La politique étrangère du Congo-Brazzaville(1997-2007) : jeux et enjeux d'une realpolitik( Télécharger le fichier original )par Sylvie Lembe Institut des Relations internationales du Cameroun - Master II 0000 |
Paragraphe 3 : L'aménagement interne fait la politique extérieureCe sont les « raisons du dedans qui inspirent le plus souvent les solutions des questions du dehors », déclare Marcel Merle98(*). Ainsi, le Congo dirigé par le Général Sassou Nguesso, après avoir mené une politique interne génératrice de contraintes, contestée par ses partenaires internationaux au développement, décide de faire peau neuve, afin de paraître correct. Le nouveau président entend redorer son blason personnel. Pour ce faire, il rompt avec les « méthodes staliniennes ». Les signes marquant cette rupture sont perceptibles à plusieurs égards. Sur le plan politique : vers un retour à l'Etat de droit ?Sassou Nguesso s'est toujours déclaré démocrate99(*). En effet, en tant que premier responsable du pays, il lui incombe de défendre les valeurs inhérentes à cet idéal. Ce faisant, il commence par doter le Congo d'une nouvelle Constitution. Nouvelle car, après s'être autoproclamé Chef de l'Etat en 1997, il a aussitôt répudié celle adoptée en 1992 en la remplaçant par l'Acte fondamental du 24 octobre 1997. Tout compte fait, le Congo sera pendant trois années sans Constitution. L'analyste Félix Bankounda soutient que pour Denis Sassou Nguesso, « l'exercice du pouvoir n'est nullement lié à la constitution, il la détermine unilatéralement et s'en délie n'importe comment, quand bon lui semble, démontrant ainsi de façon évidente l'inanité pour l'Afrique, des prétentions d'un Etat de droit sans démocratie, promue par les membres du réseau qu'on appelle aujourd'hui les Françafricains »100(*). Il n'empêche, qu'en 2002, avec la pression de la société civile internationale, on assiste au retour à l' « Etat de droit » doté d'une Constitution bien qu'il soit vrai que généralement en Afrique, « ces textes ne sont pas justifiés par des exigences endogènes, mais par l'application d'une pédagogie internationale très bien présentée »101(*). Il s'agit en réalité, comme le fait remarquer Félix Bankounda, de « constitution de l'urgence »102(*) . Mais toujours est-il qu'il était nécessaire pour le nouveau gouvernement de se doter de lois pour réguler l'organisation de la vie du Congo et prétendre faire partie de la société internationale d'aujourd'hui sans constitution, ne serait-il pas un peu comme se présenter à une soirée de gala en costume de bain ? La nouvelle constitution est assortie de 192 articles qui régissent officiellement l'organisation de la vie interne et externe du Congo. Elle est aux antipodes de l'ancienne. Pour illustration, l'article 3 de l'ancienne dispose que les « représentants du peuple sont élus au terme d'élections ». Elle avait été approuvée par référendum et consacrait un régime semi-présidentiel. Inversement, l'article 2 de la nouvelle Constitution élargit le mode d'élection du Président du Congo : « la souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce au moyen du suffrage universel par ses représentants élus ou par voie de referendum», sans doute pour légitimer le pouvoir acquis via ce mode. La nouvelle Constitution institue un régime présidentiel qui accorde au président de la République de larges pouvoirs. Elu pour un mandat de sept années, renouvelable une fois, le président de la République est le chef de l'Exécutif. Toujours dans sa dynamique de faire peau neuve, le président va plus loin dans ses intentions d'assainir son action. Aussi peut-on relever des signes marquants y afférents * 98 Marcel Merle, La Politique étrangère, op.cit., p. 45. * 99 Sassou Nguesso, Le manguier, le fleuve, et la souris, op.cit., p.47. * 100 Félix Bankounda, « Congo-Brazzaville, une septième Constitution pourquoi faire ?», in Politique africaine, Paris, karthala, n° 81, mars, 2001, p.16. * 101 Félix Bankounda, bid, p.19. * 102 Félix Bankounda, « Congo-Brazzaville, une septième Constitution pourquoi faire ?» op.cit., p.16. |
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