De la TICAD III à la TICAD IV: enjeux et mutations de la politique africaine de coopération du Japon( Télécharger le fichier original )par Patrick Roger Mbida Université de yaoundé II - Master professionnel 2011 |
CHAPITRE V : LES ENJEUX LIES A L'ACCELERATION DE LA COOPERATION NIPPO-AFRICAINE PAR LE BIAIS DE LA TICAD IVAnalyser les enjeux liés à l'accélération de la coopération nippo-africaine, telle que la TICAD IV entend rendre compte, revient pour à s'interroger sur le pourquoi ou encore décrypter sur les motivations affichées et latentes qui sou tendent tant l'investissement massif du Japon en Afrique. Quelles seraient ainsi les prétentions de l'Empire du Soleil-Levant quand il s'investit tant sur le continent africain ? Répondre à cette question à cette question nous amènera à scruter tour à tour les enjeux traditionnels (section 1) puis les « nouveaux enjeux » (section 2) SECTION I : LES ENJEUX TRADITIONNELS : LA CAPITALISATION DES SOUTIENTS AFRICAINS EN VUE DE L'OBTENTION DU SIEGE DE MEMBRE PERMANENT AU CONSEIL DE SECURITE DES NATIONS UNIESC'est l'une des tendances lourdes du comportement international du Japon en Afrique. En effet, l'analyse de l'engagement significatif du Japon envers l'Afrique tend à révéler son désir de jouer un rôle catalyseur sur le plan international. Cet engagement a été généralement intéressé et surtout utilisé comme moyen pour permettre à l'Empire du Soleil-Levant d'avoir voix au chapitre en faisant son entrée dans le sacro-saint club des décideurs mondiaux en tant que membre permanent au Conseil de Sécurité des Nations Unies. En recherchant l'appui des capitales africaines, Tokyo fait de la réforme de ce « sanctuaire de la diplomatie mondiale » un viatique incontournable dans sa quête d'un important rôle sur la scène internationale (paragraphe 1) en employant un puissant plaidoyer discursif (paragraphe 2). PARAGRAPHE 1 : LA REFORME DU CONSEIL DE SECURITE : UN POINT FOCAL DE LA DIPLOMATIE NIPONNELors de la 50ème session de l'ONU en septembre 1995, le ministre japonais des affaires étrangères d'alors Kono Yohei mit en lumière le besoin d'une réforme du CS/NU, en soulignant l'arrivée de nouvelles puissances devant assumer des responsabilités proportionnelles à leurs capacités. Il précisa que si le nombre des membres onusiens étaient passés de 51 à 185, celui du CS/NU n'avait augmenté que de 11à 15 depuis 1965. D'où la déclaration suivant laquelle le Japon supportait la proposition d'établir un CS/NU réformé avec un nombre de sièges se situant dans la basse vingtaine, afin de tenir compte de l'émergence de nouvelles puissances globales et améliorer la représentativité dudit Conseil ; le nombre de sièges non permanents devant être accordé aux régions sous représentées, notamment l'Asie, l'Afrique et l'Amériques du Sud.175(*) Néanmoins, la réforme du Conseil de Sécurité ne peut se faire que par une révision de la Charte des Nations Unies, qui doit être acceptée et ratifiée par plus des deux tiers (128 pays) du total des membres (192 pays), dont les cinq membres permanents qui ont le droit de veto. Pour cette raison, le gouvernement japonais continue à intensifier son offensive diplomatique pour que se réalise la réforme du Conseil de Sécurité. En mobilisant son APD en direction du continent noir et en initiant des processus multilatéraux comme la TICAD, dont la 4ème édition est venue resserrer davantage les liens de coopération avec l'Afrique, l'Empire du Soleil-Levant compte sur le soutien des 53 pays africains, qui représentent environ 30% du total des membres des Nations Unies, pour rehausser son profil politique. En effet, compte tenu du fait que l'Afrique compte une cinquantaine d'États, soit un quart des membres de l'Assemblée générale de l'ONU, il était tentant, comme d'autres grandes ou moyennes puissances avant lui, de rechercher leurs bonnes grâces, de manière à obtenir leur soutien tant à l'Assemblée générale qu'au Conseil de sécurité, où les membres non permanents africains ont parfois un rôle déterminant. De leur côté les Africains tiennent également, comme le soutient Ntuda Ebode, le Japon comme une puissance stratégique d'appoint, le pays grâce auquel le continent pourrait entrer au Conseil de Sécurité. Le Japon et l'Afrique se retrouvent donc dans une sorte de partenariat stratégique où la victoire de l'un implique celle de l'autre.176(*) On assiste donc, au regard de qui précède, à un passage de ce que Jean Daniel Aba appelle « la diplomatie mère Theresa » à une diplomatie « real politik »177(*) intégrale où l'Empire du Soleil - Levant emploie un puissant plaidoyer pro domo. * 175 J.V Ntuda Ebode (2005), op.cit, p.129 * 176 Idem p.130 * 177 J.D Aba (2001)." Les modalités d'élaboration de la politique africaine des Etats-Unis depuis la fin de la guerre froide". Thèse de doctorat. Paris : Sorbonne, p.622 |
|