UNIVERSITE DE LOME
TOGO Faculte des Lettres et Sciences
Humaines (FLESH)
DEPARTEMENT DE GEOGRAPHIE
KOUTOUGOU, UN TERROIR TEMBERMA
ENCLAVE DANS LA KERAN
MEMOIRE POUR L'OBTENTION DE LA MAITRISE
ES-LETTRES
Option: GEOGRAPHIE RURALE
Présenté et soutenu par : Sous la direction de :
NOYOULEWA Tchoou Adong Mr. OLADOKOUN Wonou
Maître-assistant
2 DtDICACE :
A MES PARENTS, Trés tot, vos conseils et
orientations nous ont fait prendre conscience d 'une chose dans la vie :
« FAIS BIEN CE QUE TU FAIS ! , Puissiez-vous trouver dans ce travail la
concrétisation de vos efforts et transmettre tous ces enseignements a
nos fréres.
A TOUS MES FRERES ET SCEURS, Ce mémoire est
pour vous un exemple. Vous n 'avez d 'autre choix que de faire davantage
!
A : Jean-Philippe IROUKOURA, Michel
PERRON, Fréres du Sacré-cceur. Vous avez été le
ferment par lequel nous avons découvert les vertus de la culture de
la perfection et de l 'excellence ; votre soutien moral et matériel
ne nous a jamais fait défaut.
AUX PAYSANS DES CONTREES ISOLEES DU TOGO, Votre
souffrance dans l 'exercice de cette noble activité connaitra un
terme un jour. Et ce jour sera celui ou notre pays entier
découvrira les nombreuses richesses dont regorgent vos
contrées, Ce jour sera pour tous un jour de bonheur !
3 REMERCIEMENTS :
Un mémoire de maitrise, a l 'instar de toute
oeuvre humaine et de surcroit scientifique est rarement le fruit d 'un effort
personnel. Il convient alors avant toute chose de dire un sincere merci a tous
ceux qui ont contribué a la réalisation de ce
travail.
Certes, il serait trop fastidieux de nommer toutes ces
personnes, mais nous voudrions nous acquitter de ce devoir envers quelques
piliers de notre oeuvre.
· Monsieur OLADOKOUN Wonou qui en dépit
de ses nombreuses occupations nous a accordé une attention
particuliére et a bien voulu diriger ce travail. Nous voulons par ce
canal lui manifester toute notre reconnaissance et lui avouer qu'au-delA du
Directeur de Mémoire, il est pour nous un modéle dans nos
motivations et nos choix dans le monde universitaire. Puisse-t-il trouver ici
la marque de notre volonté de pouvoir continuer a compter sur lui a l
'avenir.
· A tous les enseignants du Département
de géographie. Vous avez tout au long des quatre années de notre
formation participé a forger en nous non seulement un désir d
'étudier cette science noble mais encore de la vivre au quotidien. Que
ce travail, image concrete de vos enseignements multiples traduise notre
gratitude a votre égard.
· A la Communauté des Fréres du
Sacré-Coeur au Togo. Vous nous avez permis de découvrir et de
croire en nos capacités et votre soutien moral et matériel a
été pour nous une motivation supplémentaire tout au long
de nos études. Que ce mémoire soit pergu comme un pas vers l
'idéal auquel vous destinez les nombreux jeunes togolais a travers la
formation que vous donnez au Collége Saint-Albert le Grand d
'Atakpamé. Que les valeureux enseignants du CSA se reconnaissent dans ce
travail qui doit être un exemple pour les vaillants Albertins
actuels.
4
· Au Préfet, au Secrétaire
Général de la préfecture de la Kéran et au Chef
canton de Koutougou, merci pour votre disponibilité et votre
intérCt A notre travail. Que par vous, tout le peuple Temberma en
général et celui de Koutougou en particulier accepte nos
remerciements et croit en notre souhait de voir trés prochainement un
processus de désenclavement s 'enclencher au profit de cette
localité.
· A mes amis du Club de Géographie de l
'Université de Lomé, votre collaboration a toutes les ceuvres
communes nous a permis de cultiver l 'esprit du travail en groupe et d
'affectionner la vie a l 'Université. Que nos remerciements vous
parviennent a tous et nos vceux de réussite vous accompagnent. Restons
toujours unis pour la cause de notre club !
· A nos amis dont nous craignons de ne pouvoir
prendre le risque de citer des noms de peur de faire des jaloux. Trouvez ici l
'expression de notre profonde gratitude.
5 SOMMAIRE :
INTRODUCTION GENERALE 1
Chapitre 1 : CADRE PHYSIQUE ET HUMAIN
1.1 Apergu géographique 25
1.2 Le milieu naturel 31
1.3 La flore et la végétation
36
1.4 Une zone de faible densité humaineEEEEEE..
43
Chapitre 2 : L'ESPACE AGRAIRE DANS LE TERROIR
DE
KOUTOUGOU
2.1 Un régime foncier patrilinéaire
56
2.2 La dynamique agricole 60
2.3 Les types de culturesEEEEEEEEEEEE
68
2.4 Utilisation du solEEEEEEEEEEEEEE
70
2.5 Autres activitésEEEEEEEEEEEEEEE
72
Chapitre 3 : L'ENCLAVEMENT, UNE REALITE
INDISSOCIABLE
AVEC LA VIE A KOUTOUGOU
3.1 Des chemins inexistants ou impraticablesEEE.
77
3.2 Les contraintes liées a l'enclavement
80
3.3 Les manifestations sociales de l'enclavement
87
3.4 De la nécessité de désenclaver
KoutougouEEE. 91
CONCLUSION GENERALE 103
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUESEEEEEEEEEEEEEEE.
107
LISTE DES FIGURES 111
LISTE DES TABLEAUX 112
LISTE DES PHOTOSEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEE 113
ANNEXE.EEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEE. 111 TABLE DE
MATIERESEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEE. 125
6 LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS:
SOTOCO : Société Togolaise du
Coton.
I.C.A.T. : Institut de Conseils et d'Appuis
Techniques
A.T.C. : Agent Technico-Commercial
B.I.D. : Banque Islamique de développement
C.V.D. : Comité Villageois de
Développement
D.S.I.D. : Direction des Statistiques
Agricoles, de l'Informatique et de la Documentation.
D.P.A.E.P. : Direction Préfectorale de
l'Agriculture, de l'Elevage et de la Pêche.
G.A.V. : Groupement Agricole Villageois
7 QUELQUES PRECISIONS TERMINOLOGIQUES :
TERROIR : Etendue de terrain
présentant certains caractères (relief, végétation,
climat, sol, exposition, habitat, types d'exploitations, ...) qui
l'individualisent au point de vue agronomique. Il est l'unité
territoriale appartenant à un peuple qui s'y reconnaît et dont le
centre de gravité est le village. Ainsi défini, il est un
territoire sur lequel une communauté de paysans s'est installée
pour le défricher et le cultiver et sur lequel elle exerce des droits
agraires.
HABITAT RURAL : Ensemble et arrangement des
habitations dans un espace donné. Il est bâti sur l'espace
habité du terroir et rassemble les maisons d'habitation, les greniers,
les enclos, les magasins et leurs annexes. C'est la cellule organisatrice de la
vie rurale. On la désigne aussi sous le vocable de centre
d'exploitation.
PAYSAGE AGRAIRE : C'est le résultat
concret de l'aménagement de l'espace rural par un peuple. Son analyse
prend en compte le type d'habitat, le parcellaire, le réseau de chemins,
les sols, bref, c'est la photographie d'un terroir à une époque
précise.
STRUCTURES AGRAIRES : Ensemble des liens
durables et profonds qui unissent un peuple à son sol. Elles prennent en
compte les formes de propriété du sol, les formes de son
utilisation et les modes de faire-valoir qui y règnent. Comme tel, elles
sont le cadre juridique, l'ossature dans laquelle évolue l'agriculture
sur le terroir considéré. Elles sont généralement
stables et durent longtemps à moins qu'une réforme ne vienne les
rompre.
ENCLAVEMENT : Dérivé du
concept enclave, ce mot trouve son origine dans le terme latin clavis
qui exprime l'idée initiale de clef, de verrou ou de barre de fermeture.
Le dictionnaire Larousse avance qu'on dit d'un espace « enfermé,
enclos dans un autre », qu'il est enclavé. Stricto sensu
donc, seuls le Vatican, Lesotho et San Marin sont des pays enclavés au
monde. Mais, dans la langue française contemporaine, on utilise le mot
enclavé dans son sens anglo-saxon : landlocked, «
enfermé à l'intérieur des terres » puisque
d'après le dictionnaire Harcourt (
www.harcourt.com), en
géographie, il se défini comme : « a land region, having
no access to a waterway ». C'est donc l'absence d'accès
à la mer qui devient le critère de définition de
l'enclavement. C'est du moins le sens que lui donnent les
spécialistes de la géopolitique. Pour les
économistes et les géographes, « l'isolement dans lequel se
trouve une aire plus ou moins étendue, souvent dans un milieu montagneux
ou désertique, du fait de l'absence, ou de l'insuffisance des moyens de
communication » est l'enclavement, RABALLAND G. et ZINS M.(2003). Mais
l'impact économique de l'enclavement étant difficile à
évaluer, certains géographes et économistes
préfèrent parler des enclavements en y ajoutant une nouvelle
notion, celle de centralité. Il existerait donc d'après ces
derniers, des zones enclavées mais centrales c'est-à-dire
incontournables dans les échanges dans une région comme la Suisse
en Europe, alors que d'autres sont considérées comme
défavorisées.
En dépit de la relativité du concept, nous
retiendrons dans le cadre de cette étude que l'enclavement est
l'absence, l'insuffisance ou la praticabilité saisonnière des
voies de communication dans une zone donnée. Cette situation
qui maintient le milieu dans un déficit de croissance, peut se
répartir en quatre échelles selon DOUMENGE F. (2000), allant de
« l'enclavement supportable » pour les zones situées à
moins de 500 km d'un important port aux coins « excessivement
enclavés » situés à plus de 2000 km.
INTRODUCTION GENERALE
La vie de tout peuple est relatée par rapport à
son milieu de vie. Celui-ci est constitué du cadre physique, des liens
qui le lient à son environnement ainsi que des aménagements qu'il
apporte en vue de satisfaire à des besoins d'ordre économique,
culturel ou naturel. Ce faisant, lorsqu'un peuple s'approprie un territoire
qu'il modèle à son goût, il en fait une unité
distincte des autres, qui, associée à sa
spécificité physique devient son terroir.
Ainsi, l'histoire des Incas1 est liée
à Cuzco dans l'actuel Pérou et celle des Pygmées à
la forêt équatoriale d'Afrique centrale. La vie des Temberma elle,
l'est avec les versants de la chaîne de l'Atakora aux confins nord-est de
la préfecture de Kéran, dans un des coins les plus
enclavés de la région et même du pays.
Au pied de la chaîne Défalé donc, vivent
les Temberma, peuple de paysans et de bâtisseurs dont le nom vient de
betammaribe c'est-à-dire « les bons maçons
» par référence au type d'habitat dans lequel ce peuple a
toujours vécu. De nos jours, personne ne peut parler de ce peuple sans
en faire allusion. C'est pourquoi les Temberma et leurs forteresses, ou mieux
leurs fermes fortifiées selon les mots de FRANCOIS Y. (1995) font
l'objet d'une attention particulière de la part des architectes, des
touristes et des historiens, bref du monde scientifique. C'est d'ailleurs ce
qui explique l'inscription de ce site au patrimoine mondial de l'UNESCO comme
un site culturel depuis juillet 2004.
C'est à ce peuple de bâtisseurs qu'appartiennent
les 2 647 habitants du canton de Koutougou, qui s'étend sur 112
km2 avec une densité de 19 hbts/km2. Il est
enserré entre la chaîne de l'Atakora à l'ouest et au nord,
le Bénin à l'est et la rivière Kéran au sud. Mais
pour éviter la confusion que peut laisser apparaître l'utilisation
de Koutougou comme terroir d'étude et comme un village de ce terroir,
nous userons du même nom écrit de deux façons
différentes : Koutougou pour signifier le village et KOUTOUGOU pour
désigner le terroir.
Le terroir de KOUTOUGOU qui correspond à notre zone
d'étude, comptait 1885 habitants en 1970 puis 1923 au recensement
général de la population de 1981. En 2005, sa population est
estimée à 2007 individus repartis dans les quatre villages
couvrant notre zone d'investigation. Celle-ci est située au sud-est du
canton du même nom et est limitée par les villages de
Koutchatougou, Koutapa, Kouya-kougou au nord-ouest et le Bénin à
l'est. C'est sur cette limite nord-ouest que se dresse la chaîne de
l'Atakora alors que plus au sud se trouve le cours d'eau
Kéran.
1 « Fils du Soleil », nom des souverains du peuple
quechua, au Pérou (vallée de Cuzco), qui ont établi un
empire sur la cordillère des Andes qui va être défait au
milieu du XVIe siècle lors de la conquête espagnole. Le terme
désigne à la fois le souverain de l'Empire lui-même, mais
également la tribu qui est à l'origine de son édification
qui s'est enrichie de l'ensemble des peuples amérindiens qui lui sont
soumis.
Notre travail consistera dans un premier temps à en
faire une étude exhaustive. Il s'agira pour nous de passer en revue
l'historique même de l'installation de cette frange du peuple Temberma au
sud du mont alors que la plupart vit encore du côté nord de la
formation géomorphologique dans le canton de Nadoba. Nous nous
intéresserons par ailleurs à l'aspect physique - climat, sol,
végétation, exposition, hydrographie, relief -, et son
incidence sur la vie des habitants, à l'aspect humain en prenant en
compte la population et ses mouvements internes et externes. Dans cette partie,
nous porterons un intérêt particulier au paysage agraire de notre
terroir de même qu'aux modes de gestion de la terre. Nous pourrions du
coup définir les structures agraires qui sont pratiquées par les
Temberma de KOUTOUGOU et analyser en outre les réalités
économiques de notre terroir. Il sera aussi question de passer au peigne
fin les formes d'utilisation des sols (le système agricole) et les
résultats de cette utilisation auxquels nous ajouterons ceux des
activités parallèles comme la chasse, la pêche et
l'artisanat.
Au terme de cette analyse, nous apprécierons le
développement de notre site d'étude en rapport avec les
infrastructures de transport y existant et leur niveau de fréquentation.
C'est la prise en compte de cet aspect économique qui nous mènera
vers l'étude des relations et des échanges entre les habitants de
KOUTOUGOU et leurs voisins considérant qu'aucun développement
n'est possible pour un milieu s'il vit en autarcie (YATOMBO T., 1994). Nous
déboucherons ainsi sur l'étude de l'enclavement qui
caractérise notre site et qui limite son intégration au
réseau commercial national.
Mais en prélude à cette étude, nous
exposerons le cadre conceptuel et méthodologique afin de montrer outre
nos motivations sur le choix de ce sujet, la problématique qu'il
soulève, les interrogations qui s'y attachent de même que la revue
de la littérature et les objectifs assignés à cette
étude. Par ailleurs, il sera aussi question de présenter les
hypothèses de travail ainsi que la méthodologie utilisée
pour les vérifier avant de faire état des difficultés
rencontrées sur le terrain.
Lorsqu'un peuple choisit son site d'existence, il le fait par
rapport aux conditions physiques du milieu qui dans la plupart des cas sont
compatibles avec son activité principale.
Les Temberma de KOUTOUGOU l'ont très bien
appliqué quand ils s'y installèrent. Ainsi, Climat, sols,
végétation sont favorables à la pratique de l'agriculture.
Chaque année donc, plusieurs tonnes de produits vivriers et de coton y
sont récoltées. Mais la nécessité d'une production
massive est souvent couplée de celle des marchés
d'écoulement qui permettent aux paysans de vendre leurs récoltes
et d'acheter en retour des biens manufacturés.
C'est justement à partir de là que les choses
se compliquent pour les habitants de l'univers étudié dont la
caractéristique principale est l'insuffisance ou mieux l'absence des
voies de communication. A cela s'ajoute la question de la
praticabilité saisonnière des rares infrastructures de
transport qui y existent. C'est ce que nous appelons l'enclavement de
KOUTOUGOU.
Mais qu'est-ce qui peut faire de cet enclavement de KOUTOUGOU un
thème d'étude en Maîtrise de Géographie rurale ?
En 1995, le Togo comptait 12 040 km de routes dont 2 926 km
de route nationale (1 650 km bitumées, 1 036 km non revêtues et
282 km non aménagées en terre) et 9 110 km de routes et pistes
rurales (dont 4 950 km de pistes aménagées). De nos jours, loin
d'avoir progressés, ces chiffres ont connu une baisse significative
puisque les pistes aménagées n'ont pas connu un entretien
conséquent. Il en ressort une diminution du trafic vers certains points
du pays surtout vers les milieux ruraux.
Dans la préfecture de la Kéran par exemple, la
situation actuelle des infrastructures routières se présente
comme l'indique la figure 1 et montre une disparité entre
l'extrême sudouest qui a un réseau routier dense et l'est qui en a
un très lâche s'il n'est pas entièrement inexistant. Dans
cette partie, il se résume à une piste automobile
saisonnière dont la praticabilité est rendue complexe par
l'état du pont sur la Kéran, et des pistes secondaires en
très mauvais état surtout en saison des pluies.
1°00'
1°20'
0°40'
0°50'
1°10'
0°40'
0°50'
1°00'
1°10'
1°20'
FIG 1 : Infrastructures routières dans la
Préfecture de la Kéran
PREFECTURE DE L'0TI
KOPELE
OTINAFOKIO
SONGOULAOU
#
#
MBORATCHIKA
#
#
N
#Y
#
OSSAKRE
#
HOULIO
#
NADOUDJA
#
HELOTA
#
NABO
#Y #
#
NABOULGOU
#
SINITE
WARDE
#
#
ANIMA
#
TERITE
LEOTA
#
ANDESSI
#
KOKOU TAMBERMA
#Y #
TCHASTE
#
WARTE
#
#Y #
ATALOTE
#
KOFI
#
SIOUTE
NATIBONI
#
#Y #
KPESSIDE
NADJANGOU
#
KOKOTE
#
KOUTOUGOU
#
TATANWATA
#
PIYANGA
#
AGNINKATA
#
AWANDE
#
#
% #Y #
ATETOU
#
PIMINI
KANTE
KOUKOTCHIENGOU
#
NADOBA
#Y #
DEOUTE
#
#
GOULBI
#
WARTEMA
#
KOUTAGOU
#
#Y KOUTAPA
#
WARENGO
þ# Village étudié
% Chef lieu de Préfecture
#Y Chef lieu de Canton
#
Route bitumée Route secondaire
Autres localités
Kouya - Kougou
#
Koutougou Sola
Koutantagou
#
Lipouli 2
þ# #
#
Koutapa
2 0 2 4 6 8 10 Kilometers
Source : NOYOULEWA A. (205), d'après les
données recueillies dans Cartographie Censitaire,
D.S.I.D., 1996.
#
LEGENDE
þ# #
þ# #
·
Lipouli 1
UTOUGOU
Koutamagou
Limites de Préfecture
Limite d'Etat
Cours d'eau permanent Cours d'eau saisonnier Réserve
de la Kéran
Zone d'étude
Tapounté
#
9°50' 10°00' 10°10'
10°10'
10°00'
9°50'
Certaines zones par ailleurs n'ont jamais connu un quelconque
aménagement de leurs pistes et connaissent depuis toujours un
enclavement très préjudiciable à leur
développement. C'est le cas du canton de Koutougou.
En effet, pour y accéder, il n'y a rien de facile.
Durant la saison sèche, l'accès au site d'investigation reste
difficile en dépit de l'aménagement des rues par la SOTOCO en vue
du transport du coton graine. En fait, quoique séparés de
Kantè, le chef-lieu de la préfecture à laquelle ils
appartiennent de dix kilomètres à vol d'oiseau, aucune piste
même cyclable ne relie les habitants de KOUTOUGOU à cette ville.
La situation se complique davantage en saison pluvieuse puisque dès les
premières pluies (autour de 400 mm), le radier sur la rivière
Kéran est submergé par les flots et aucun passage n'est possible.
C'est cette situation que présente les photos 1 & 2 sur lesquelles
on se rend compte que le niveau de l'eau est légèrement en
dessous du pont. Cette décrue est le fait d'une accalmie
pluviométrique d'une semaine à la fin du mois d'août 2005.
Autrement, il en résulte un isolement du terroir par rapport au reste du
pays.
Photo 1 : Vue oblique du pont sur la
Kéran
Source : Cliché de l'auteur, 2005.
7 Photo 2 : Etat du pont sur la
Kéran
Source : Cliché de l'auteur, 2005.
De l'avis de RABALLAND G. & ZINS M-J. (2003),
l'enclavement est une question essentielle aujourd'hui. Paradoxalement, cette
question ne semble pas encore préoccuper les acteurs du
développement au Togo.
Pourtant, ce ne sont pas les références sur
l'importance des voies de communication dans un processus de
développement qui manquent. Dans une allocution de M. Alassane Dramane
OUATTARA, alors Directeur Général Adjoint du FMI prononcée
le 12 mai 1999 à Port-Louis (Maurice) à l'occasion d'un
séminaire de haut niveau sur l'ajustement structurel en Afrique
subsaharienne, il n'a pas manqué de prouver que les nombreux
investissements vers l'Afrique auraient été plus rentables si au
tout début, une priorité avait été donnée
à la mise en place d'une infrastructure de communication viable et de
longue durée, car ajoute-t-il, cela aurait été source d'un
développement économique de base sérieux et le moteur
d'une intégration plus sûre au sein des entités
politico-économiques sous-régionales sur ce continent.
Quant à Cécile SPORTIS, porte-parole du
Programme Alimentaire Mondial (PAM), elle déclarait le 26 octobre 2005
lors de la conférence des donateurs à Genève quand elle
parlait de la situation des victimes du séisme du 16 octobre au
Pakistan, que le simple fait du manque des voies de communication multipliait
les besoins par trois car il fallait dès lors utiliser les
hélicoptères. Ceci est une preuve supplémentaire sur
l'importance des routes dans
tout processus ayant trait au bien-être des hommes.
KOUTOUGOU peut-il faire exception à cette règle ?
L'isolement de l'environnement étudié par
rapport au reste de la préfecture qui le porte et du pays,
entraîne de facto le développement des échanges
transfrontaliers en défaveur du Togo. C'est cette situation
particulière qui a motivé le choix de notre thème sur un
terroir Temberma, celui de KOUTOUGOU qui constitue l'unité agronomique
sur lequel plus de deux milliers d'hommes et de femmes se battent pour tirer de
la terre les produits de leur survie et les ressources nécessaires pour
promouvoir le développement de leur contrée. C'est d'ailleurs
pourquoi nous l'avons intitulé : KOUTOUGOU, UN TERROIR TEMBERMA
ENCLAVE DANS LA KERAN.
Il s'agit d'un terroir que l'on classe en
général parmi les terroirs de warengo, terroirs propres aux
Temberma, peuple issu du groupe linguistique des Para-gourma (GAYIBOR N. L.
dir.1997). Ces terroirs sont reconnus pour être propres aux zones de
reliefs contrastés, avec un habitat semi dispersé et des
densités de population faibles à l'échelle du pays (19
hbts/km2).
Quant à leur mise en valeur, elle est semi extensive
avec la possibilité d'une longue jachère et une organisation des
exploitations en banquettes sur les versants de montagne rappelant les cultures
en terrasses des Kabyè comme décrites par POKO Y. (1999). En ce
qui concerne le parcellaire, il est relativement plus grand que chez les
Kabyè avec des champs assez éloignés des concessions (500
mètres environ) dégageant un espace de pâturage autour des
cases. On note également une déforestation poussée surtout
ces dernières années en dépit d'une faible occupation du
sol (19 hbts/km2). La reproductibilité de cette situation de
notre zone d'investigation est analogue à celle de Dimori, village de
plaine du Katcha, un terroir N'caam dans la préfecture de Bassar
décrite par ALI S. (1996) où la densité est de 7,3
hbts/km2. Mais elle contraste nettement avec celle de Mandela,
terroir Kabyè où la densité de 127,9 hbts/km2
est aussi source de déforestation avancée d'après
DJIMINGRA M. (1983).
KOUTOUGOU est situé sur le versant sud de la
chaîne de Défalé qui y atteint des altitudes de 400
à 500 mètres et a pour limite sud la rivière Kéran
au travers de laquelle le radier supposé relier notre zone
d'étude au reste des villages voisins n'a qu'une hauteur de moins d'un
mètre et demi au-dessus du lit mineur. Ainsi, déjà au
cours du mois de juillet, lorsque la pluviométrie atteint 400 mm, la
rivière est en crue.
Quant au Mont, son ascension et sa traversée
n'étant pas faciles, les populations de Koutougou passent alors
plusieurs mois coupés de leurs voisins et du reste du Togo. C'est ce qui
fait de ce terroir un terroir enclavé, tant son réseau de voies
de communication interne se
résume aux sentiers qui relient champs et maisons et
villages voisins. Isolés même du chef-lieu de la
préfecture de la Kéran à laquelle ils appartiennent, les
Temberma se contentent une bonne partie de l'année d'échanger
uniquement avec leurs frères vivant dans le Bénin voisin.
Il se dégage alors de l'analyse des
réalités humaines, de la position géographique et des
réalités physiques naturelles de la zone d'investigation un
aspect qui retient particulièrement notre attention : c'est
l'enclavement. Des interrogations se dégagent alors en vue d'aider
à mieux comprendre ce phénomène.
Qu'est-ce qui a amené cette frange du peuple Temberma
à franchir le Mont pour s'installer dans cette cloison isolée du
monde et de leur site primaire ? Comment est organisée la vie des
Temberma de KOUTOUGOU ? Comment gèrent-ils le patrimoine foncier sur
lequel ils vivent et se déroulent leurs activités ? Qu'est-ce qui
est à la base des nombreuses mutations qui se remarquent aujourd'hui
dans l'habitat rural de ce peuple de bâtisseurs ? Comment se font les
échanges culturels et commerciaux avec leurs frères voisins du
Bénin, ceux de Nadoba au nord de KOUTOUGOU ainsi qu'avec les villages
environnants ? Quelles sont les infrastructures socio collectives dont ils
disposent ? Quels sont les effets de l'enclavement sur les activités
économiques du milieu ? Comment les habitants de KOUTOUGOU
perçoivent-ils leur isolement ?
Autant de questions qui justifient le choix de notre sujet,
même s'il faut y ajouter notre passion pour le monde rural qui nous a vu
naître et grandir. Nous y avons ainsi côtoyé en grandissant
et à travers les régions des Plateaux Sud, Plateaux Est, et celle
de la Kara, de braves paysans toujours confrontés à
l'épineux problème de la proximité ou de
l'accessibilité des centres d'écoulement de leurs produits
agricoles. Depuis les villages d'Ogou sur la rive Est de la rivière Ogou
dans la préfecture de l'Est-Mono à ceux de la préfecture
de Dankpen dans l'ouest de la région de la Kara, nous avons
expérimenté la vie dans une contrée où les
automobiles ne viennent qu'en saison sèche et seulement les jours de
marchés hebdomadaires si ceux-ci existent. Autrement, c'est lors de la
campagne d'achat et d'évacuation du coton graine par exemple que les
gros véhicules attirent des foules de badauds curieux de voir
très souvent pour une première fois le « titan ».
Ainsi donc, au moment d'entreprendre des recherches en vue de
l'obtention d'une Maîtrise, quoi de plus normal que de se tourner vers ce
monde pour nous appesantir sur une des situations les plus
désagréables de la vie d'un paysan : l'éloignement et la
difficulté d'accès au marché. DUMONT R. (1991) ne
disait-il pas que si en Afrique on veut que les paysans produisent en masse, il
faut d'abord leur donner les moyens et la chance de pouvoir écouler
leurs produits sans difficultés ? Nous ne pouvons parler des motivations
qui nous ont
conduit à ce sujet sans parler de l'attachement que
nous avons eu du monde Temberma depuis la première fois que nous nous y
sommes rendu. Il s'agit donc pour nous d'assouvir un désir longtemps
manifesté et en même temps de contribuer à la connaissance
de ce peuple hautement riche sur le plan culturel mais sur lequel
paradoxalement, il existe très peu d'écrits puisque les rares
existants sont du domaine architectural, touristique ou historique très
souvent signés par des expatriés. Néanmoins, aucune
étude ne pouvant aboutir sans recherche documentaire préalable,
nous avons, à défaut d'ouvrages portant sur le pays Temberma, eu
accès aux documents allant de l'étude d'autres terroirs à
ceux relatifs aux problèmes du monde rural en général et
de l'enclavement en particulier.
La place qu'occupe l'agriculture dans les pays en
développement est une préoccupation plus que jamais
d'actualité. Depuis leurs indépendances en effet, les pays moins
nantis en ressources minières et énergétiques ont mis un
accent particulier sur la promotion du secteur agricole. Mais il faut noter que
cette primauté de l'agriculture dans ces pays ne date pas de
l'époque des indépendances. Depuis les temps coloniaux en effet,
avec le pacte colonial, nos pays ont hérité d'un rôle qui
les maintient dans un situation d'éternels fournisseurs de
matières premières aux pays du Nord.
Plus tard, même avec la division internationale du
travail puis la mondialisation, ce rôle est loin de changer. Bien au
contraire, la tendance se renforce encore avec la mondialisation sous sa forme
actuelle en dépit des nombreuses mutations institutionnelles et des
réformes entreprises souvent en accord avec les grandes institutions
internationales et laissant derrière elles des retombées
fâcheuses pour les populations.
C'est ce que dénonce ELA J-M. (1982) dans
L'Afrique des villages lorsqu'il parle de la mise en place des
politiques de développement rural entreprises par les gouvernements
africains à coût de milliards déboursés par les
institutions internationales et qui ont abouti dans la plupart des cas à
des échecs et pire encore à l'éclosion de relations
conflictuelles entre les masses. C'est ainsi que s'opposent vieux et jeunes,
agriculteurs et éleveurs, citadins et ruraux. Cette situation selon
l'auteur conduit à l'éclatement des groupes sociaux ayant des
intérêts divergents mais appelés à vivre sur un
même territoire national. Il conclut donc en précisant que tant
que la mise en place des projets ne prendra pas en compte les
réalités des bénéficiaires et sera plutôt
basée sur des relations de domination et d'assujettissement, ils
n'auront pas d'autres issues que l'échec. Il ajoute que l'exploitation
et la négligence des masses rurales que l'on écarte injustement
de la confection et de la réalisation des projets en leur faveur au nom
d'un hypothétique illettrisme est un frein pour le
développement.
Il poursuit dans Quand l'Etat pénètre en
brousse... : les ripostes paysannes à la crise (1990), en
stigmatisant les partis uniques imposés par les dirigeants politiques
depuis les années soixante pour étouffer toute tentative de
démocratisation ou de révolte tout en utilisant le travail et les
efforts des paysans pour assouvir les caprices des gouvernants. Aussi,
ajoute-til que les cultures commerciales ont fragilisé un tissu
économique et social certes précaire, mais qui était
fondé sur des pratiques ancestrales et empiriques ayant fait leurs
preuves. Il garde toutefois espoir dans le dynamisme du paysan africain en
prévenant que l'épanouissement réel de ce dernier passe
par une liberté pouvant ouvrir la voie à l'expression de sa
créativité, à l'organisation des associations et
groupements villageois qui doivent constituer les bases de canalisation des
forces et qui deviennent du coup les acteurs des changements dans les milieux
ruraux.
C'est dans cette logique qu'aborde HARRISON P. (1991) dans
Une Afrique verte, un document écrit au terme
d'une enquête réalisée au profit de l'institut
international de l'environnement et de l'USAID qui a financé le projet.
L'auteur, chargé de cours à l'université d'Ifè au
Nigeria a visité seize projets, quatre grands centres internationaux
dans six pays différents. Il en ressort donc que les « projets
réussis » (14%) sont le fait des gouvernants ayant pris la mesure
de l'association des paysans à toute initiative comme au Zimbabwe avec
ce qu'il appelle « le miracle du maïs zimbabwéen » alors
que ceux qui ne le sont pas (86%) résultent de ce qu'on peut appeler les
« copier coller » d'un milieu à un autre. Il dénonce en
outre le «piège de l'aide » qui a maintenu beaucoup de
coordonnateurs de projets dans une situation mesquine qui consiste à
arrêter toute initiative dès que les financements
extérieurs n'arrivent plus.
S'il est quasi certain au regard de ce qui
précède que la promotion du secteur agricole passe
nécessairement par l'association des paysans aux nombreux et
coûteux projets de développement, il n'est pas moins
évident que cela passe aussi par la prise en compte des
réalités physiques de chaque milieu surtout quand il est question
d'opérer des choix de cultures, des types d'habitat et
d'aménagement.
Dans leur article Agriculture de colline et de petite
montagne : Evolution récente des systèmes de production dans une
zone de montagne du Nord Vietnam, district de Cho Dông, province de Bac
Kan, in Agriculture et développement,
(1997), BAL P. et al écrivent que la diversité des
systèmes de production est en rapport avec le relief
caractéristique du milieu. Ainsi, dans le district sud où on
trouve des collines en forme de demi oranges, avec des vallées
étroites, des sols en général profonds et acides, c'est la
pratique de la culture du riz de
submersion qui prévaut au sein des Tay2 qui
y habitent. Par contre, dans le nord, où prédominent des longues
et fortes pentes, des sols alcalins, un substrat calcaire et des reliefs
karstiques, c'est la crise agricole qui est marquée par une agriculture
semi itinérante sur brûlis pratiquée par les
Dao3, du groupe Mao Yao. Ils concluent en disant que la
variabilité des zones agro-écologiques du district de Cho
Dông peut représenter pour les agents d'appui et de
développement une situation complexe. Mais ils ajoutent que « dans
ce contexte, les méthodes de vulgarisation comme les approches des
projets de développement doivent rechercher, en partenariat avec les
paysans, des solutions qui ne peuvent plus se limiter au
transfert des innovations techniques en provenance des plaines.
»
Les conditions physiques sont autant un moteur qu'un frein
dans le développement de toute activité et celui de l'agriculture
en particulier. C'est ce que soutient BETEMA B. (1992) dans son mémoire
de Maîtrise intitulé Nima, un terroir Kotokoli (centre du
Togo),. Dans cet ouvrage, l'auteur relève la
compatibilité entre les conditions physiques et climatiques (milieu de
plaine sous climat tropical soudano-guinnéen) et la pratique de
l'activité agricole sur le terroir de Nima avant de montrer que parfois,
cette même activité peut être soumise à des
aléas climatiques qui entraînent des résultats
désastreux pour les paysans qui n'ont que le fruit de la terre pour
assurer leur survie. Il continue en ouvrant une brèche sur les
difficultés relatives à l'écoulement des produits
agricoles dues soit à la saturation des marchés, soit à
l'impossibilité de rallier des marchés plus grands du fait de
l'absence ou de la praticabilité saisonnière des voies de
communication.
Il en résulte une nouvelle dimension qui vient
s'ajouter au problème de développement des zones rurales. C'est
la dialectique du développement en milieu rural en rapport avec
l'enclavement qui a été abordée par certains auteurs
également. Parmi eux, nous parlerons autant de ceux qui ont juste fait
allusion à ce problème dans un ouvrage que de ceux-là qui
ont consacré toute une étude, article ou ouvrage pour donner un
point de vue ou mieux une approche de solution à ce que tous conviennent
de classer parmi les raisons qui freinent l'évolution du monde rural.
C'est par exemple MERLIN P. (1991) qui, dans son
Espoir pour l'Afrique Noire trouve que le retard de
l'Afrique subsaharienne sur les autres continents dans tous les domaines peut
s'expliquer par l'isolement qui caractérise ses villes et ses campagnes.
Dans ce
2 Du groupe des Thaï, les Tày sont
après les Kinh le groupe le plus important et le plus influant au nord
du Vietnam.
3 Ils représentaient 11% de la population du
district en 1994. Leur présence dans la zone n'est pas datée avec
exactitude mais elle paraît relativement récente.
cadre précis, ajoute-t-il, l'activité agricole
ne peut en rien se développer si les produits récoltés ne
peuvent être écoulés sur d'autres marchés pour
rapporter des devises aux paysans.
Pour GOUROU P. (1982) dans Terre de Bonne
Espérance, l'Afrique Tropicale, les échanges
d'hommes et de marchandises ont toujours joué un rôle
planétaire dans le développement des techniques de production. Ce
fut, dit-il, le cas de l'Europe et de l'Asie, chacun des deux continents
profitant tour à tour des découvertes et des inventions qui se
produisaient dans l'autre alors qu'à l'inverse, la barrière
constituée par le Sahara et des côtes difficiles d'accès a
empêché ou freiné les échanges entre ce monde
eurasiatique très actif et l'Afrique subsaharienne à la
traîne. Il conclut que l'Afrique gagnerait à promouvoir les
échanges avec les autres continents et que cela passe
nécessairement par le développement des voies de communication
à l'échelle internationale.
C'est aussi le point de vu de DUMONT R. (1991) dans
Démocratie pour l'Afrique quand il
démontre qu'il ne peut y avoir de démocratie sans un
développement et que la mise en place d'une meilleure infrastructure de
transport, d'un réseau de pistes desservant tous les villages constitue
un préalable au progrès rapide. Alors, si les paysans doivent
produire plus, il faut leur concéder des prix qui puissent leur
permettre d'acquérir des moyens de transport, des outils de travail du
sol et de récolte plus appropriés. C'est donc de cette
façon que les peuples y compris ceux des milieux ruraux parviendront au
développement et aussi à la démocratie. A défaut,
lorsque dans un pays, le réseau routier est effondré, les paysans
s'en viennent au découragement comme ce fut le cas au Cameroun, en
Tanzanie, au Sénégal et ailleurs en Afrique. C'est en tout cas
l'explication qu'il trouve mais cette fois avec MOTTIN M-F.(1980), à la
situation statique, immobile de ce continent dans leur ouvrage L'Afrique
étranglée.
YATOMBO T. (1994) lui, croit trouver le bâton magique
pour sortir nos milieux de cet immobilisme dans son mémoire de
Maîtrise titré Désenclavement et dynamique de
l'espace rural dans la région des savanes : cas du sous/secteur de
Lotogou lorsqu'il démontre que le désenclavement
réalisé dans ce milieu a introduit une nouvelle dynamique de
développement faisant croître les surfaces cultivées de
plus de 60% entre 1988 et 1992 alors que le nombre de planteurs est
passé de 911 à 1713 soit 88% de croissance dans la même
période. En outre, écrit-il, le taux de scolarisation par le seul
fait du désenclavement a évolué de 26% en 1984 à
53,8% en 1991 et le nombre de marchés d'animation hebdomadaire de 03
à 07. Il en résulte donc une intensification de la vie
économique du milieu après un processus de désenclavement.
Néanmoins, l'auteur évoque et prévient du risque de
l'apparition de nouvelles formes de préoccupations comme la destruction
de l'environnement, l'oisiveté, ...
SEGBOR P. (1990) va plus loin dans son article Transport
et développement au Togo, in Annales de l'Université
du Bénin, série Lettres Tome XI, 1983 - 1991, car il
affirme que le niveau de développement d'un milieu peut
s'apprécier à partir de son réseau routier.
Ainsi, dit-il, celui-ci est à l'image de l'animation
économique et sociale qui y prévaut, elle-même tributaire
de la facilité des populations de rallier les autres villages proches
des centres économiques. Il finit en mentionnant comme en exemple le
fait que les villages proches des centres de distribution économique
connaissent un essor plus important que ceux qui en sont
éloignés.
Au total, il ressort que le développement est
lié à l'amélioration du réseau de chemin et surtout
à sa praticabilité en toute saison. En plus, la prise en compte
des réalités physiques, et culturelles des peuples et du milieu
est un impératif de même que l'association des
bénéficiaires à tout processus de développement.
Mais en tant que terroir, quelles sont les
réalités de Koutougou en rapport avec d'autres terroirs ayant
déjà fait l'objet d'une étude ?
Si les habitants de KOUTOUGOU reconnaissent que les tatas
sont le type de construction qui jusqu'à un passé récent
les individualisait des autres peuples de la région, les Nawdéba
eux, comme le montre KOUDEMA A. (1983) dans son mémoire de
maîtrise titré : La vie rurale dans le canton de Siou.
Exemple du quartier de Birigou, ont pour cadre de vie la case ronde ou
mieux la concession ronde en forme de Soukhala très bien décrite
par DJIMINGAR M. (1983) dans son Terroir Kabyè : MANDELA
Nord-Togo. C'est d'ailleurs ce type d'habitat qu'adoptent de
nos jours les Temberma.
Quant aux systèmes d'exploitation dans le monde rural
en Afrique et au Togo, ils peuvent varier d'une région à une
autre selon les réalités physiques et humaines. ANTHEAUME B.
(1978) puis SAUVAGET C. (1981) dans leurs livres respectifs :
Agbétiko, terroir de la basse vallée du Mono,
Sud-Togo et BOUA, village de Koudè, un terroir
Kabyè, Togo septentrional décrivent la pratique de la
culture intensive qui résulte de la pression démographique et qui
contraste bien avec celle que les habitants de KOUTOUGOU pratiquent. En effet,
la densité de population y étant de 19 hbts/km2, les
Temberma de notre zone d'étude pratiquent plutôt une agriculture
extensive sur brûlis et ce, à cause de la disponibilité des
terres. La seule nuance à apporter est que dans le cas
d'Agbétiko, le Mono et ses dépôts de limon sont un avantage
certain dans la richesse des sols et qu'à Boua, il existe une forme de
fertilisation des sols basée sur les fosses compostières alors
qu'à KOUTOUGOU, les paysans pratiquent encore une jachère qui va
au-delà de cinq ans et plus.
Ainsi, l'environnement étudié ne peut faire
exception à la règle et une étude sur ce terroir doit
pouvoir définir des objectifs pour mieux répondre aux nombreux
défis, attentes et interrogations autour desquels, il est possible
d'envisager son développement. Quels sont les facteurs qui permettent de
cerner au mieux les réalités du terroir de Koutougou en pays
Temberma ? Des objectifs clairs et précis doivent donc être
définis pour mener à bien cette étude qui est
censée rechercher et organiser les données en vue du
développement et de l'épanouissement des populations de notre
zone d'étude et de leur site.
Les objectifs que nous assignons à cette étude
sont de deux ordres. Il s'agit d'un objectif général duquel
découlent des objectifs spécifiques. L'objectif
général est de montrer en quoi l'enclavement de notre zone
constitue un frein à l'épanouissement socio culturel et
économique pour ses habitants. De là, apparaît un autre
beaucoup plus historique et culturel mais non moins important car permettant de
rentabiliser notre travail par les concepteurs du projet de sauvegarde et de
viabilisation du patrimoine Temberma en vigueur dans la préfecture de la
Kéran. En fait, à la veille de la communalisation de nos
campagnes, chacune d'elles doit pouvoir créer des ressources propres
pour assurer son fonctionnement et au-delà, son développement
économique et social. Pour y parvenir, à KOUTOUGOU comme
ailleurs, les développeurs doivent disposer d'études partageant
les réalités de la vie des peuples afin de les prendre en
considération. Comme intérêt pratique donc, nous voudrions
montrer les effets induits de l'abandon des tatas sur l'activité
touristique afin d'apporter au terme d'analyses et de comparaisons avec les
réalités du pays Nadoba, des approches de solutions pour arriver
à définir un programme de développement authentique et
durable au profit du terroir et partant du canton de Koutougou, car en dernier
ressort, tous les programmes de désenclavement, misent sur les richesses
disponibles dans la localité. Quant aux objectifs spécifiques,
ils se présentent comme suit :
- Analyser les réalités physiques du terroir ainsi
que leurs implications sur les
activités des habitants.
- Etudier les modes de vie et de gestion des terres à
KOUTOUGOU.
- Etudier les mouvements de la population de même que le
niveau de vie de
celle-ci.
- Montrer pourquoi ce groupe de Temberma a dû quitter ses
frères pour
s'installer de ce côté de la montagne.
- Evaluer les effets de l'enclavement de KOUTOUGOU sur les
échanges
transfrontaliers qui se développent entre ce milieu et le
Bénin.
- Etudier les relations qu'ils entretiennent avec leurs voisins
Temberma de
Nadoba et Nawdéba puis Lamba de la préfecture de
Doufelgou.
- Faire découvrir les cultures des Temberma de KOUTOUGOU
et leur façon de
concevoir leur isolement.
Pour atteindre ces objectifs et trouver des réponses
aux nombreuses questions soulevées plus haut, nous allons nous servir de
nos observations sur le terrain, de nos expériences vécues et
lues pour poser des hypothèses. A cet effet, nous dégagerons des
hypothèses subsidiaires autour d'une hypothèse centrale. Celle-ci
est la suivante : l'isolement de KOUTOUGOU par rapport au reste du Togo est un
obstacle au développement du milieu et à l'épanouissement
des habitants. Les hypothèses subsidiaires elles, s'articulent selon la
configuration ci-après :
- Les mutations intervenues dans l'habitat des Temberma de
Koutougou est le
résultat d'un brassage avec les populations Lamba,
Kabyè et Nawdéba des préfectures de la Kéran et de
Doufelgou.
- La dynamique de l'habitat a été renforcée
par la disparition de la nécessité de
se défendre ou de faire la guerre puisqu'une des raisons
qui justifiaient l'édification des tatas était d'ordre
sécuritaire.
- La situation du territoire sur un versant est favorable
à l'implantation des
concessions de forme ronde comme en pays Kabyè.
- C'est la recherche de terres plus riches et plus giboyeux qui
a conduit cette
frange du peuple Temberma à essaimer vers le sud de la
chaîne de montagne.
- Les conditions physiques du milieu se prêtent fort bien
à la pratique de
l'agriculture et de l'élevage ainsi qu'aux
systèmes d'exploitation en vigueur sur le terroir.
- L'isolement de KOUTOUGOU est le facteur premier dans la
précarité qui y règne et qui caractérise la vie de
ses populations car il explique non seulement un coût de production
élevé mais aussi des prix de vente très bas.
- L'enclavement, l'unité monétaire et linguistique
sont les facteurs qui militent
en faveur du développement des échanges
commerciaux avec le Bénin.
Comment procéder pour répondre favorablement
aux attentes et collecter les données nécessaires afin de pouvoir
intégrer dans notre analyse les nombreuses préoccupations
inhérentes à l'enclavement de l'univers d'investigation. Il se
dégage à travers les hypothèses
précédées des objectifs assignés à notre
étude, la nécessité de définir une
approche méthodologique qui puisse nous permettre de
collecter les données nécessaires en vue de répondre aux
interrogations et vérifier les hypothèses.
Nous avons mené notre étude sur une base
méthodologique à trois niveaux : la documentation
préexistante, l'enquête de terrain et l'observation
participante.
La documentation préexistante est l'ensemble des
sources de renseignement dont nous avons eu besoin pour mieux circonscrire
notre sujet dans l'espace, dans le temps et dans le débat scientifique
actuel. Outre les cartes, les rapports d'activités de la
Société Togolaise du Coton (SOTOCO) et les documents
généraux ayant trait à notre sujet, nous nous sommes rendu
dans de nombreux services et centres de documentation.
· A la Direction des Statistiques Agricoles, de
l'informatique et de la Documentation (D.S.I.D.), nous avons eu accès
aux données du recensement agricole de 1996 dans un document
édité en avril 1998 en deux séries : SP - Population
agricole et série AA - Population Active.
· A la bibliothèque du centre de documentation
technique du Ministère du Plan, nous avons disposé outre du
schéma directeur de la région de la Kara, d'un atlas du
développement régional au Togo.
· A la Direction Générale des Statistiques et
de la Comptabilité Nationale, nous avons eu accès au
dépouillement des fiches complètes du recensement
général de 1981.
· A la Direction Régionale de la SOTOCO à
Kara et à la Coordination BinahDoufelgou à Niamtougou, plusieurs
informations relatives au niveau de production de coton et à
l'acheminement des intrants nous ont été fournies.
· Dans les bibliothèques universitaires notamment
celle du département de Géographie, celle de la FLESH et à
la bibliothèque centrale, nous avons trouvé outre les
mémoires de nos devanciers, certains articles et autres publications des
enseignants de l'université.
· Au Centre Culturel Français, nous avons
bénéficié de certains documents de géographie
récents introuvables à l'Université.
Nombre de nos informations proviennent également des
recherches sur des sites d'universités étrangères par le
biais de l'Internet.
Toutefois la non prise en compte dans nos recherches
documentaires des photographies aériennes de l'environnement
étudié est due essentiellement au fait que les photos disponibles
mis à part leur échelle trop petite et donc couvrant une zone
trop grande,
sont vieilles de plus de trente ans et ne traduisent pas
nécessairement les réalités actuelles surtout en ce qui
concerne l'occupation des sols. Néanmoins, les quelques
interprétations faites nous ont édifié sur les
réalités physiques.
Par ailleurs, les entretiens que nous avons eus avec certaines
personnes ressources notamment l'ATC de la SOTOCO, le magasinier du groupement
agricole villageois, le chef canton et son secrétaire ont
été des sources indiscutables de données chiffrées
ou historiques. Nous rappelons que ces contacts ont été pris lors
de notre séjour d'une dizaine de jours à KOUTOUGOU entre le 14 et
le 22 octobre 2004, visite que nous avons aussi consacrée à
l'observation passive des faits physiques et humains puis lors de nos travaux
de terrains effectués du 19 août au 02 septembre 2005.
Cette enquête de terrain qui a duré deux semaines
a consisté à administrer un questionnaire à 116 chefs de
ménage soit 40% des chefs de ménage que compte la zone
d'étude. Cet effectif est réparti sur tout le terroir sur la base
indicative des données du tableau n°1 et selon l'importance de la
population des quatre villages pris en compte dans cette étude. Ainsi,
à Koutamagou habité par 792 habitants (39,7% de la population
totale) et donc 115 chefs de ménages, nous avons retenu 46
enquêtés soit 39,7% des enquêtés. Les autres villages
ont eu respectivement 38 (Koutougou), 20 (Lipouli 1) et 13 (Lipouli 2)
enquêtés. Parmi eux, nous avons ciblé dans chaque village
une proportion de 20,7% de femmes.
Cette proportion de femmes est guidée par les
données sociologiques caractéristiques du terroir d'étude.
D'abord le fait d'avoir pensé intégrer des femmes dans notre
échantillon qui devrait se constituer que de chefs de ménage est
dû à notre volonté de ne pas négliger cette couche
qui pourtant est majoritaire dans la population de l'environnement
d'étude. Mais pourquoi seulement 20% ? Nous nous sommes contenté
de cette proportion à cause de la place qui est celle de la femme dans
la société Temberma à KOUTOUGOU. Réduite à
l'exécution des décisions du mari par qui tout peut arriver, elle
ne maîtrise presque pas les données relatives à la vie de
sa société. Ce faisant, celles que nous avons pu interroger ont
un âge compris entre 35 et 55 ans car les plus jeunes, restent encore
sous la protection et la surveillance de leurs époux.
Quant aux hommes, nous avons retenu la tranche d'âge 18
à 55 ans puisque dans cette société, le critère
d'autonomie est jugé par le départ du toit parental ou mieux la
construction de sa propre maison même si cela se réalise à
la périphérie de la concession familiale. Toutefois, on peut se
demander comment sommes-nous arrivé à cet échantillon
alors que notre zone d'étude compte selon les projections
que nous avons faites à partir des données démographiques
existantes environ 2007 habitants en 2005 ?
Voici présentée la fiche technique
d'échantillonnage.
Estimation de la population actuelle à Koutougou :
P2005 = P1981 (0 1 1) ~
Ø : Croissance moyenne nationale: 2,6 %
P1981: Population en 1981
P2005 : Population en 2005
n : Nombre d'années = 24
Calcul du nombre de ménages : Moyenne de la
taille des ménages dans la Kéran : 6,9 Nombre de
ménages = Pop. Totale / 6,9 Déduction du nombre
d'enquêtés par village : Echantillon estimé
à 40 % Nombre d'enquêtés = (Pop. Totale x 40) /
100
Tableau n°1 : Récapitulatif de
l'évolution de la population, du nombre de ménages et
du nombre d'enquêtés par village :
Villages
|
Effectifs
|
Nombre de ménages
|
Nombres d'enquêtés
|
1970
|
1981
|
2005 (estimation)
|
Koutamagou
|
744
|
759
|
792
|
115
|
46
|
Koutougou
|
612
|
624
|
652
|
94
|
38
|
Lipouli 1
|
315
|
322
|
335
|
49
|
20
|
Lipouli 2
|
214
|
218
|
228
|
33
|
12
|
KOUTOUGOU
|
1885
|
1923
|
2007
|
291
|
116
|
Sources : D'après nos calculs à partir des
données recueillies dans Schéma Directeur régional,
édition révisée de 1986, D.R.I.P.
L'échantillon de 116 chefs de ménages a
constitué la population cible à laquelle notre questionnaire a
été administré. Le questionnaire en lui-même
comporte six parties.
La première est purement consacrée à
l'identification de l'enquêté: âge, sexe, personnes à
charge, autochtonie, situation matrimoniale, profession, ....
La deuxième partie devrait contribuer à une
meilleure connaissance des pratiques foncières en cours dans le terroir
notamment les limites du domaine foncier villageois, les modes d'accès
à la terre ainsi que ceux de gestion de ces terres.
Quant à la troisième partie, elle devait combler
les attentes relatives aux pratiques agricoles. Il s'agit là de mieux
apprécier les usages faits des sols à KOUTOUGOU, les
différentes cultures agricoles, la façon et les moyens techniques
et humains mis en oeuvre pour les produire.
Dans une quatrième partie réservée aux
données socio-économiques, nous nous sommes
intéressé à la finalité des produits agricoles et
surtout au type de culture à laquelle les paysans accordent plus
d'importance.
L'historique du terroir et la dynamique de son habitat ont
constitué le cinquième volet de notre questionnaire. Il s'est
agit de mieux appréhender les raisons qui ont conduit à
l'essaimage de ce peuple puis aux transformations qui se remarquent dans son
habitat.
Enfin nous avons consacré la dernière partie de
notre questionnaire à la perception des enquêtés sur la
notion de l'enclavement de même que la manière dont ils le vivent.
Il s'agit entre autres de comprendre la mentalité des habitants de
KOUTOUGOU sur le phénomène qu'ils vivent et qui les
individualisent des autres peuples de la région, puis les pistes de
résolution qu'ils préconisent pour en sortir. Quant à
l'analyse des effets induits par l'enclavement, elle a été rendue
possible par l'utilisation d'un guide d'entretien censé compléter
les travaux de l'enquête proprement dite.
Il faut toutefois ajouter que dans la conception du
questionnaire sus- présenté, nous avons eu recours à un
certain nombre de variables. Ce sont des caractéristiques auxquelles on
assigne des valeurs. Nous en avons adopté dans le cadre de notre
étude deux types :
D'une part les variables indépendantes. Ce sont :
l'âge, le sexe, l'ethnie, le niveau d'instruction et l'état
civil.
Concernant l'âge, nous sommes partis des données
des services des statistiques qui considèrent comme personnes actives
dans le domaine agricole les personnes ayant un âge compris entre
dix-huit et cinquante-cinq ans. Cependant selon les réalités de
la zone d'investigation et surtout compte tenu du statut social des jeunes qui
doivent avoir leur propre
logis avant de bénéficier de leur autonomie
d'action, de même que celui des personnes âgées qui à
défaut de support pratiquent les activités agricoles
jusqu'à un âge très avancé, nous avons retenus la
tranche d'âge 15 à 60 ans. Cette catégorie de personnes est
celle dont l'activité est déterminante dans la vie sociale et
économique de notre terroir d'étude. C'est à cet âge
qu'on devient responsable et indépendant au point de prendre des
décisions concernant la gestion du foyer et des parcelles
cultivées.
Le sexe quant à lui est dans nos sociétés
traditionnelles un facteur de différenciation important. Il nous a
semblé utile de l'inscrire au nombre des variables indépendantes.
En effet, à Koutougou comme ailleurs en Afrique, les travaux qui
requièrent l'usage de la force et les prises de décisions
incombent aux hommes alors que les femmes se contentent de petits travaux
champêtres. Elles s'adonnent aux attributions spécifiques à
une épouse.
L'ethnie est aussi une variable indépendante, parce que
la plupart de nos contrées regorgent de populations allochtones. A
KOUTOUGOU, cette réalité est moins apparente puisqu'on y compte
que 3,5% de foyers allochtones. Quoique vivant dans un milieu autre que le
leur, les ménages allochtones conservent certains procédés
et certaines techniques de leur milieu d'origine. Il en résulte une
dimension sociologique qui s'exprime à travers une
différenciation qui s'observe au niveau des moyens de production, des
techniques culturales, de la façon de concevoir la réalité
de l'enclavement et surtout d'appréhender celle de la dynamique de
l'habitat. C'est ce qui justifie l'inscription de cette donnée au nombre
des variables indépendantes.
La prise en compte du niveau d'instruction est le
résultat du fait que dans le monde paysan, il détermine sans
aucun doute les choix culturaux et surtout la facilité ou la
réticence avec laquelle les producteurs acceptent les innovations.
D'autre part nous y avons inscrit les variables
dépendantes. Elles sont celles dont l'option est liée avec
d'autres. Il s'agit entre autres des activités rurales, des techniques
culturales et de l'état du ménage.
Concernant les activités rurales, nous
préciserons seulement que le labeur est souvent relatif à
l'âge du paysan. La tranche d'âge 15-60 ans est la plus active
économiquement alors que les personnes âgées sont
très peu rentables à l'instar des moins de 15 ans.
Néanmoins, si l'agriculture reste la principale activité, elle
est toujours associée de l'avis de 89% de nos enquêtés,
à une autre comme l'élevage.
Tout comme la variable ethnique, les techniques culturales
varient mais s'interpénètrent. Certaines disparaissent au profit
d'autres et ce, compte tenu des réalités physiques du milieu qui
les abrite. On parlera entre autres des Kabyè qui y ont abandonné
la culture en terrasse pour adopter la culture sur brûlis qui se pratique
dans le milieu d'investigation. Le faible taux de rotation de cultures (3,4%)
est enregistré auprès des populations allochtones.
L'état des ménages est un indicateur important
surtout que nous nous fixons pour finalité de montrer l'impact de la
production agricole sur le niveau de vie des populations de même que
l'effet qu'a l'isolement sur cette dernière. Ainsi, le nombre des
membres d'une famille est déterminant dans les choix de l'habitat et de
la taille de l'exploitation effectués par le chef de ménage.
Ce questionnaire ainsi décrit a été
administré comme nous l'avions dit plus haut à un
échantillon représentatif de 40% des chefs de ménage
tirés par hasard à partir des chiffres de la population du
recensement général de 1981 que nous avons actualisés soit
à 116 chefs de ménages dont 24 femmes. L'administration du
questionnaire s'est faite avec l'aide d'un étudiant en quatrième
année de Géographie avec qui nous avons formé
équipe en vue des travaux de terrain.
Pour gagner du temps, nous avons fait faire un
dépouillement assisté à l'ordinateur après
naturellement avoir fait codé le questionnaire. Le logiciel
utilisé est le SPSS 10.0 avec un nombre de lignes dans le fichier de
travail évalué à cent seize et celui des valeurs
autorisées à 18 724.
Qu'en est-il alors de la troisième phase de notre
méthodologie ?
L'observation participante dont il est question s'est faite
essentiellement au cours de nos visites et séjours dans la
localité puisque durant nos travaux nous avons vécu soit chez un
habitant soit comme dans le cas du dernier séjour chez le chef canton.
Elle a permis entre autres de bien comprendre l'organisation de la cellule
familiale et la hiérarchie sociale chez les Temberma et les principes
qui régissent la célébration de certains cultes ainsi que
de certaines fêtes traditionnelles.
En tout état de cause, des difficultés n'ont pas
manqué de surgir à un moment ou à un autre de notre
travail. Certes elles sont sérieuses mais elles n'ont en rien
ébranlé notre détermination. Bien au contraire, elles
constituent pour nous le péril grâce auquel notre triomphe sera
glorieux.
En premier lieu, la difficulté majeure reste celle de
la communication et est relative aux contradictions qui peuvent se rencontrer
lors de l'utilisation des sources orales. En effet certains de nos
interlocuteurs nous ont fourni des informations dont le contenu a varié
d'un jour à l'autre ou mieux d'une visite à l'autre.
Par ailleurs, nous avons souffert de la disponibilité
des paysans à répondre à nos questions. La raison est que
nos travaux ont été effectués soit en période des
pluies et donc en pleine activité des champs, soit au cours des
périodes consacrées aux cérémonies traditionnelles
et au cours desquelles, les jeunes sont interdits de frotter avec « le
monde ambiant ».
L'autre aspect des difficultés reste
l'éloignement de l'environnement étudié par rapport
à notre lieu de résidence. Cette situation ne nous a pas
aidé dans la collecte de certaines informations. Notre souhait de
pouvoir apprécier le niveau d'eau dans la Kéran pendant la
période d'étiage en a souffert.
Au demeurant, il en résulte un travail qui sera
présenté en trois parties outre l'introduction
générale qui intègre le cadre conceptuel et
méthodologique et la conclusion générale qui résume
les résultats auxquels nous sommes parvenus.
D'abord le cadre physique et humain qui, outre l'aperçu
géographique et le milieu naturel, traite du couvert
végétal et des données humaines. Cette partie
présente notamment les réalités physiques de notre zone
d'étude de même que les aspects relatifs au peuplement, son
histoire, son évolution et son organisation actuelle. Nous
déboucherons ainsi sur la caractérisation physique et humaine du
terroir étudié.
Il sera ensuite question de l'espace agraire dans le terroir
de Koutougou. C'est ici que nous présenterons entre autre la
problématique foncière, la dynamique agricole, les types de
cultures ainsi que les différentes activités économiques
qui se déroulent dans le milieu. Notre étude ayant
privilégié le concept de terroir, nous préciserons ici les
différents traits qui l'individualisent par rapport aux autres
contrées Temberma ou Lamba de la région.
Nous étudierons enfin l'enclavement dans toutes ses
dimensions avec tous ses effets induits sur la vie des habitants de KOUTOUGOU.
Ainsi, après avoir fait état de la faiblesse des infrastructures
de transport, nous évoquerons les contraintes d'ordre moral, social,
culturel et surtout économique liées au fait de l'isolement. Il
sera aussi question de décrire les manifestations concrètes de ce
phénomène sur les activités économiques et sociales
en rapport avec les autres contrées de la zone d'étude. Une
évaluation des prix des intrants, un inventaire
des outils de travail et les opportunités de main d'oeuvre
vont constituer des indicateurs d'analyse du coût de production
élevé qui caractérise l'univers géographique
étudié.
Il sera question de montrer :
- la nécessité de désenclaver ce milieu de
laboureurs qui travaillent beaucoup plus pour
ravitailler le Bénin voisin alors qu'ils
bénéficient entièrement d'un approvisionnement en intrants
de la part des services d'encadrement paysan du Togo.
- qu'un tel processus sera d'un grand intérêt non
seulement pour les populations de
KOUTOUGOU qui pourront voir leur coût de production
baisser et les prix de vente de leurs produits s'élever mais aussi pour
le reste du territoire togolais qui profitera ainsi d'un grenier
céréalier supplémentaire puis d'un site touristique.
- que l'existence de potentialités physiques
(vallée exploitable et pistes à aménagées...)
et humaines (population prête à participer aux
efforts de désenclavement) est une évidence dans un milieu
où l'enclavement est plutôt perçu comme une réelle
volonté pure des pouvoirs publics d'isoler tout un peuple.
Tous les atouts du milieu couplés des
possibilités existantes constituent des raisons valables qui justifient
la nécessité d'enclencher un processus de désenclavement
au profit de notre terroir d'étude.
Comment se présente le cadre physique dans lequel se
déroule la vie des Temberma de KOUTOUGOU et se pratiquent leurs
activités ? Quelles sont les réalités humaines de ce site
et comment sa population y perçoit les mutations qui s'y opèrent
dans le temps et dans l'espace ? Bref comment pouvons-nous percevoir dans la
zone d'investigation l'interface homme-milieu ?
Ce sont entre autres, les préoccupations auxquelles le
premier chapitre intitulé cadre physique et humain tentera de
répondre.
CHAPITRE 1
CADRE PHYSIQUE ET HUMAIN
A KOUTOUGOU comme dans tout espace géographique, des
réalités physiques et humaines existent et il convient de les
étudier afin de mieux comprendre notre environnement d'investigation. De
la présentation de l'aperçu géographique à celle
d'une zone faiblement peuplée en passant par un bref exposé sur
le milieu naturel, la flore et la végétation, nous
dégagerons les grands traits qui caractérisent ce terroir
enserré dans la Kéran et expliquerons dans certaines mesures
l'organisation de la vie.
1.1- APERÇU GEOGRAPHIQUE
Koutougou est situé dans la région de la Kara au
nord du Togo. La région de la Kara, unité administrative de
création relativement récente surtout dans sa composition
actuelle (créée en 1968 et réaménagée par la
loi n° 81/9 du 23 juin 1981), est située entre 9°25 et
10°10 de latitude Nord et 0°15 et 1°30 de longitude Est. Elle
couvre une superficie de 11 629 km2 soit 20,50% du territoire
national togolais.
La région de la Kara présente une morphologie
très irrégulière avec un relief constitué par une
alternance de plaines et de vallées, de plateaux, dominés par de
vieux massifs accidentés aux aspects assez contrastés, et, le
plus souvent dénudés de végétation.
Néanmoins, deux ensembles géomorphologiques se
dégagent.
D'une part les surfaces planes de la vallée de l'Oti,
véritable glacis polygénique entaillé par une reprise
d'érosion récente. Les pentes y sont faibles (3% sur des
distances de 6 Km) mais plus importantes à l'approche des versants de
l'Oti (3 à 5%). En fait, ce sont des terrains tendres
sédimentaires, non métamorphiques, quasi-horizontaux appartenant
au groupe supratillitique du Voltaïen moyen. Ils sont constitués de
shales gris-vert et silistones argileux, de grès argileux
verdâtres, d'argilites comme celles qui s'étendent de Mango
à Gando, le tout reposant sur une discordance de ravinement glaciaire.
On y rencontre aussi dans les environs de Kabou (pays Bassar), des couches
issues de la série du Buem fortement métamorphisées
évoluant vers des schistes plus ou moins gréseux ainsi que celles
fortement altérées avec leur teinte jaunâtre quelques fois
masquées par des terrains de couverture peu épais mais
très étendus. La nature imperméable de la
roche-mère, la faiblesse de la fissuration et de la fracturation, ne
permettent pas le stockage de l'eau. Les cours d'eau constituent donc le seul
moyen d'approvisionnement en eau sur de vastes superficies d'autant plus que le
réseau hydrographique, en dépit de la faible extension de l'Oti
dans la région est dense du fait de la présence des affluents
comme le Mô, Kankassi, Katcha.... qui découpent la plaine.
D'autre part, on retrouve les reliefs orientaux qui sont
essentiellement subdivisés en trois sous-ensembles. L'unité
structurale de la plaine Benino-togolaise, les formations de l'Atakorien et les
schistes de Kantè.
Les roches de l'unité structurale Benino-togolaise sont
des formations d'âges diversifiés qui ont été
métamorphisées il y a environ 550 millions d'années suite
à l'orogenèse panafricaine. On y distingue facilement
l'orthogneiss de Kara avec ses trois faciès pétrographiques (les
micaschistes mésocrates du piémont nord-est de l'Atakora, les
gneiss mésocrates de Pya et les granites leucocrates le long des cours
d'eau comme la Binah, Kpélou et la Kara) et le complexe Kabyè
formant un ensemble individualisé caractérisé par un
alignement de collines au relief accusé et s'étendant du sud au
nord notamment, LamaKouméa (779 m), Sirka (602 m),
Farendè-Pessaré (679 m) et Boufalé-Solla (558 m). Il date
aussi de la tectonique panafricaine (550 millions d'années) et constitue
un bloc rigide avec un empilement de grandes écailles chevauchant vers
l'ouest et le sud-ouest. Par ailleurs, il faut noter la présence d'un
ensemble de plateaux indurés (glacis latéritiques)
s'étendant au nord de Solla, dans le secteur central de
Kouméa-Pagouda-Kétao et Kétao-Sirka.
Quant aux formations de l'Atakorien, elles commencent à
partir de l'escarpement de 350 à 400 m et correspondent aux Monts du
Togo (Atakora au Bénin). Ce sont des roches dures formées pour la
plupart de quartzites et de grès-quartzites allant du sud de la Kara
où elles se présentent sous la forme d'une plaine alluviale aux
monts Djamdè, Tabalo (625 m) beaucoup plus contrastés. Elles
progressent diagonalement vers le Bénin avec des altitudes quelque fois
très élevées (600 à 650 m).
Enfin, les schistes de Kantè ont des limites
imprécises mais s'étalent entre les plaines de l'Oti et
l'Atakora. C'est un paysage de collines arrondies séparées par de
petites plaines formées de séritoschistes gréseux (roche
grise finement litée de faciès vulcano-sédimentaire). Avec
des pendages autour de 45° et parfois 75 - 80°, ces couches sont
fortement plissées parachevées au nord par un relief tabulaire du
plateau de Koumongou (réserve de la Kéran), fossilisée par
une cuirasse avec de très faibles pentes. C'est sur cet ensemble
géomorphologique que se situe la préfecture de la Kéran,
une des six que compte la région de la Kara depuis 1981.
La préfecture de la Kéran qui a pour chef-lieu
Kantè, couvre une superficie de 1 660 Km2 et compte de nos
jours neuf cantons. Il s'agit de : Atalotè, Kantè, Koutougou,
Nadoba, Pessidè puis Helota, Ossacré, Warengo et Akpontè
de création plus récente.
Le pays Temberma lui, s'étend sur les cantons de
Nadoba, Warengo et Koutougou, l'équivalent de 294 Km2 soit
environ 18% de la superficie totale de la Préfecture. Il se situe
dans toute la partie Est de la préfecture et forme la
frontière togolaise avec le Bénin. Cette zone est habitée
à plus de 90% par les Temberma ou Bessourbe, du groupe
Para-gourma, groupe linguistique très fréquent dans la
région septentrionale du Togo et duquel proviennent les Bassar, les
Konkomba, les Tchokossi... En 1981, on comptait environ 11 899 Temberma dans la
région de la Kara dont 10 752 au niveau préfectoral.
C'est dans l'étendue de cette zone que se situe le
canton de Koutougou, qui couvre 112 Km2 et est habité par 2
095 et 2 137 individus respectivement en 1970 et 1981. Aujourd'hui on les
estime à 2 647 et on pense qu'ils seront 2 684 en 2006. C'est une
entité administrative qui comprend sur la base de la figure 2,
les villages de Koutapa, Koutchatougou, Kouya-Kougou, Koutantagou,
Tapountè Koutamagou, Lipouli 1, Lipouli 2 et Koutougou qui en est le
chef-lieu.
Ces villages, quoique du même ressort administratif
connaissent des héritages différents autant dans leur situation
géographique que dans leurs réalités culturelles et
socioéconomiques.
Certains villages situés sur le flanc de la
chaîne de l'Atakora (cas de Koutapa, KouyaKougou et Koutantagou) ou sur
la rive nord de la Kéran à proximité du canton de
Tchitchira dans la préfecture de Doufelgou (cas de Tapountè), ont
un accès facile au monde environnant. D'autres par contre se distinguent
par leur situation plutôt sur les versants ou dans la plaine,
coincés entre la chaîne de l'Atakora au nord et la Kéran au
sud comme indiqué sur la figure 3 relative à la position
des villages étudiés. Ce sont eux qui, en vertu de leur position
géographique à laquelle s'ajoutent d'autres liens
inhérents à la langue et aux pratiques foncières puis
agricoles, forment le terroir de Koutougou, espace géographique sur
lequel se déroule notre étude. Ce terroir, comme tout espace
géographique se spécifie par toute une diversité de
réalités physiques et humaines.
34000
50000
48000
46000
44000
40000
38000
36000
4200029
N Fig. 2: Situation géographique de la
zone d'étude
11 18000
#
Kouya - Tougou
#
1116000
Koptapa
Koumagou
luli
1
CANTON DE NADOBA
1114000
luli 2
KOUTOUGOU
%U # #þ
1112000
Ta4ounté
1110000
Koutougou Sola
1104000
PREFECTURE DE DOUFELGOU
1 104000 1106000 HOMO 1 110000 1112000 1114000 1116000
1118000
1106000
1104000
34000
50000
48000
46000
44000
42000
40000
38000
36000
LEGENDE
þ#
Limites de Préfecture
Village étudié
# KOUTOUGOU
Cours d'eau permanent
#
Autres localités
Cours d'eau saisonnier
%U Chef lieu de Canton
Limites de Canton
Limites d'Etat
Route secondaire
Zone d'étude
Limites de Canton
0.6 0 0.6 1.2 1.8 2.4 3 3.6 Kilometers
Source: NOYOULEWA A. (2005), d'après les
données recueilies dans Cartographie Censitaire, DSID, 1996.
0°45'
1°00'
1°15'
0°45'
1°00'
1°15'
þ# Village étudié
Zone d'étude
# Chef lieu de Canton
% Chef lieu de Préfecture
# Autres localités
Supérieur à 500m 400 à 500m Inférieur
à 400m
Route bitumée Route secondaire Limites d'Etat
Limites de Préfecture
N
KOKOU TAMBERMA
#
#
#
WARENGO
#
Koutantagou
#
Kouya - Kougou
#
Koutamagou
OSSACRE
þ# #
Koutapa
#
#
Lipouli 1
þ##
KOUTOUGOU
Lipouli 2
þ# #
þ# #
Tapounté
#
KPESSIDE
#
Koutougou Sola
#
KANTE
% # #
ATALOTE
#
HELOTA
#
Hélota
#
745' 10'00' 10'15'
10°15'
10°00'
7 45'
Naboulgou NADOBA
Nadoba
#
FIG 3 : Relief de la zona'étude par rapport
à celui de l'ensemble de la Préfecture de la
Kéran
LEGENDE
Source : NOYOULEWA A. (2005), sur la base
dela carte topographique, feuille Kara au 1/200 000.
3 0 3 6 9 12 15 Kilometers
31
1.2- LE MILIEU NATUREL
1.2.1- Géomorphologie et
géologie
Les villages de notre terroir s'étalent sur le versant
sud de la chaîne du Mont Togo qui au Bénin voisin prend
le nom de l'Atakora. Chaîne montagneuse de l'Afrique occidentale, dans le
nord du Bénin et du Togo, d'orientation sud-ouest / nord-est, le massif
de l'Atakora a donné son nom à un département du
Bénin (chef-lieu Natitingou). Peu élevé (825 m aux
Monts Koronga au Bénin), le massif domine cependant les plaines
voisines par de vigoureux escarpements de faille. Bien arrosé (1 500 mm
par an), l'Atakora alimente de nombreux cours d'eau, tributaires du Niger
côté oriental et de l'Oti côté occidental. Son rebord
ouest est constitué d'une impressionnante falaise, presque verticale,
à peine entamée par quelques torrents qui la dévalent en
cascades alors que celui du côté oriental est marqué par
des replats successifs et de petits chaînons parallèles.
En fait, dans son prolongement vers le Bénin, cette
chaîne aux latitudes de notre zone d'étude atteint des altitudes
de 500 à 600 mètres. Il s'agit d'une alternance de collines
fortement accusées d'où s'échappent deux ensembles
clairement définis.
Un relief de monts élevés qui s'alternent dans
une orientation sud-ouest / nord-est avec des terres relativement planes mais
qui en réalité sont des versants s'allongeant progressivement
vers la rivière Kéran auxquels s'ajoutent des terres basses aux
potentialités agricoles immenses.
Le relief de monts est dominé par deux principaux sommets
situés complètement dans la continuité de la chaîne
géomorphologique :
- il s'agit d'abord du mont Tamoungou : situé
au nord-est de Koutougou, il atteint des altitudes de plus de 550 mètres
avec une succession de nombreux points qui culminent et offrent au paysage un
mauvais panorama sur l'horizon. Ses versants sont relativement abrupts (environ
20°) et abritent les villages de Koutamagou et de Koutougou.
- Et ensuite du mont Takpangou qui surplombe le
village de Koutougou-Sola au sud et ceux de Lipouli 1 et Lipouli 2 plus au
nord-est. Il atteint une altitude de 600 mètres et présente des
versants plus raids (40°) au sommet et qui s'adoucissent progressivement
autour des deux kilomètres permettant l'installation des villages
cités plus haut.
Les terres basses elles, sont en réalité des
vallées entaillées dans la chaîne et qui pour la plupart
aboutissent aux plaines qui s'étendent autour des cours d'eau.
En définitive, ces formations géologiques
appartiennent au bassin primaire Voltaïen et spécifiquement
à l'Atakorien. Ce sont des formations formées de schistes et de
quartzites très durs, donnant des reliefs vigoureux qui font que
KOUTOUGOU présente un relief irrégulier marqué par une
alternance de hauts sommets à versants relativement abrupts et des
vallées peu profondes. Ces unités topographiques
s'élargissent davantage quand on s'éloigne de la chaîne de
montagne et qu'on s'approche des cours d'eau du sud. Par ailleurs, il
appartient à l'ensemble géologique issu de la série de
l'Atakora comme l'indique la carte géologique de la préfecture de
la Kéran (Figure 4).
D'ailleurs les sols qu'on y rencontre résultent non
seulement de la nature de la rochemère mais davantage de la topographie
même du milieu.
0°39'56"
0°49'55"
0°59'54"
1°9'53"
0°39'56"
0°49'55"
0°59'54"
1°9'53"
N
Nab#oulgou
Nadoba
#
#
Koutapa#
#þ #
Lipouli 2
#þ #
Koutougou
Ossacré
#
Tapounté
#
Koutougou Sol
#
KANDE
% #
# Hélota
P
9°4955. 9°5954"
10.953. 10.1952.
9.49.55.
9°5954^
10'9'53"
10.19.52.
PREFECTURE DE DANKPEN
PREFECTURE DE L'OTI
FIG 4 : Formations géologiqda de la zone
d'étude
par rapport à celles de l'ensemble de la
Préfecture de la Kéran
Kouya - Tougou
#
Koutamagou #þ #
þ##Lipouli 1
LEGENDE
Alluvions
ATAKORA : barres de quartzites
BUEM : argilites, siltites, grès, quartzites SERIE DE
KANTE
SERIE D L'OTI: argilites, siltites, silexites, grès
2 0 2 4 6 8 10 Kilometers Source: NOYOULEWA A. (2005),
d'après les
données de l'Atlas du dévreloppement
régional du Togo, 1981, p41.
# Autre localités
% Chef lieu de Préfecture
Limites d'Etat
Limites Préfecture
þ# Village étudié
Route bitumée
Route secondaire
Zone d'étude
1.2.2- Des sols diversifiés
Les formations pédologiques de KOUTOUGOU comme partout
ailleurs sont diversifiées en raison non seulement de la nature de la
roche-mère et de la topographie mais aussi du processus
pédogénique actuel ou ancien. Il en résulte donc une
multitude de sols :
- Les sols hydromorphes ou vertisols : Ici,
on les rencontre sous la forme de sols humiques à pseudogley de
profondeur, engorgés pendant les mois de juin à septembre par
suite de la crue des fleuves ou de la remontée de la nappe
phréatique. La matière organique y est très abondante,
mais peu évoluée. Ce sont des sols à hydromorphie
temporaire qu'on retrouve le long de la Kéran. Ils couvrent environ 40%
du terroir étudié.
- Les cuirasses ferrallitiques : Très
épaisses ou craquelées, elles sont souvent nues,
rarement recouvertes d'une mince épaisseur de sol
sablo-argileux. On les rencontre sur environ 30% du territoire de KOUTOUGOU
surtout sur le flanc de la montagne et sur les versants abrupts. Ce sont
surtout des cuirasses anciennes dégagées par l'érosion qui
résulte de l'absence du couvert végétal. Leur profil
(Figure 5) présente une zone d'accumulation importante
au-dessus de laquelle se superpose une moyenne couche de cuirasse, des argiles
lessivées et un léger dépôt d'humus.
- Les sols sablo-argileux : Issus de
l'altération des roches métamorphiques et éruptives
que l'on rencontre un peu partout dans la dépression du
socle surtout quand on s'approche des cours d'eau, ils sont dominés par
des sables en surface. Cependant, la quantité d'argile augmente avec la
profondeur jusqu'à 40 à 50%.
- Les lithosols : Ce sont des inselbergs
dénudés possédant des anfractuosités dans
lesquelles s'accumule un support sablo-argileux où
s'installent de véritables jardins suspendus sous forme de forêt
de montagne. Néanmoins, quand il n'y a pas d'accumulation de ce support,
ils constituent des pavés damant toute l'étendue de la surface de
la montagne et dénudés de végétation.
La diversité des sols sur cet espace est sans doute un
facteur déterminant dans la multitude des espèces
végétales et des cultures qui y sont pratiquées, elles
mêmes tributaires de la réalité climatique de la zone
d'investigation.
35 FIG 5 : Profil d'un sol ferralitique de la zone
d'étude :
0
1
2
3
4
5
Mètres
|
|
Humus
Argile lessivé
Cuirrasse
Zone d'accumulation
Roche-mère
|
Source : NOYOULEWA A. (2005), d'après les données
recueillies dans
Géographie du Togo (1986), page 118.
1.2.3- Les éléments du climat
Avant toute chose, il convient de rappeler le
phénomène qui régit l'alternance des saisons en Afrique
occidentale.
En effet, l'affrontement des alizés au-dessus de
l'équateur thermique entraîne une remontée des masses d'air
en une voûte ogivale. Sous cette voûte existe un air chaud et
instable, équatorial. La zone d'affrontement de ces deux vents est
nommée zone intertropicale de convergence (ZIC). La plus grande part du
climat au Togo et ailleurs en Afrique occidentale dépend de cette ZIC et
de ses déplacements au cours de l'année.
En juillet, la ZIC se situe largement dans le nord du pays.
L'air équatorial amène des vents soufflant de l'océan vers
le continent et apportant des pluies. C'est la saison pluvieuse que provoque la
mousson, un vent chaud et humide d'origine équatoriale. Au contraire, en
décembre, la ZIC est située largement au sud dans l'Atlantique.
Les masses d'air venant du Sahara affectant tout le territoire, avec un climat
particulièrement sec et chaud. Cet alizé continental est
nommé l'Harmattan.
Ce schéma un peu simple est affecté par ailleurs
par des « palpitations » biquotidiennes, la ZIC avançant vers
le Nord en milieu et en fin de journée, puis reculant de 50 à 250
Km. L'ensemble de ces variations détermine l'alternance des saisons
à KOUTOUGOU et dans tout le nord du Togo.
En fait, entre avril et octobre, c'est la saison pluvieuse
alors que la saison sèche couvre les mois de novembre à mars. Il
s'agit donc du climat tropical sec ou soudanien. Les précipitations
atteignent 1300 mm par an et l'humidité relative de l'air varie entre
99% en août et 18% en avril. Le mois le plus froid est celui d'août
(24°2) et le plus chaud est mars (29°5). Le nombre total d'heures
ensoleillées est de 2 862 avec un maximum au mois de janvier (281
heures) et un minimum au mois d'août (110 heures). Le tableau
récapitulatif des principaux éléments du climat
(précipitations, température, humidité relative)
enregistrés en 1998 (Tableau 2) montre quant à lui une
extension des moyennes sur plusieurs mois, montrant ainsi que les
données indiquées plus haut constituent des moyennes
établies à partir des données pluriannuelles.
Tableau 2 : Données des principaux
éléments du climat en 1998 à la station de
Kantè.
|
J
|
F
|
M
|
A
|
M
|
J
|
JT
|
A
|
S
|
O
|
N
|
D
|
Moy.
|
Pmm
|
0.8
|
2.5
|
71.2
|
114.7
|
146.9
|
203.3
|
262.7
|
240.7
|
99.3
|
99.3
|
13.9
|
3
|
1191.5
|
T°c
|
28.6
|
31.2
|
32.0
|
29.4
|
27.3
|
25.7
|
26.2
|
26.9
|
28.8
|
26.9
|
28.8
|
28.5
|
28.6
|
HR%
|
32.1
|
38.1
|
36.1
|
49.4
|
60.0
|
69.8
|
72.4
|
73.5
|
72.0
|
64.9
|
64.9
|
41.3
|
36.4
|
Source : Direction de la
Météorologie Nationale, Lomé.
En somme, les forts contrastes saisonniers
caractérisent le climat tropical soudanien. C'est à eux que sont
soumis le pays Temberma en général et le terroir de Koutougou en
particulier. Intimement lié à ce climat, le réseau
hydrographique est l'un des moins denses du pays surtout quand on le met en
rapport avec l'ouest de la région de la Kara.
1.2.4- Un réseau hydrographique
lâche
Le réseau hydrographique de KOUTOUGOU se résume
à la présence d'un cours d'eau important : la Kéran autour
duquel gravitent la Binah et quelques petits ruisseaux sans grande importance.
Constituant la limite sud de notre zone d'étude, cette rivière
atteint une largeur de 20 mètres avec des profondeurs variant entre 2 et
5 mètres entaillées dans des roches très dures favorisant
du coup le déversement d'une quantité importante d'eau dans
l'Oti. Son sens d'écoulement est celui de la quasi-totalité des
cours d'eau de l'est de la région de la Kara
(Nord-est / Sud-ouest) et a un débit moyen
dépassant parfois 20m3 /s. Au cours des mois de juillet et
août, cette rivière pérenne connaît sa saison de
hautes eaux et les vagues se déferlent pour atteindre le lit majeur tel
que présenté sur le schéma de la vallée en berceau
de la Kéran (Figure 6).
FIG 6 : Schéma de la vallée en berceau de
la Kéran
Lit majeur
Lit moyen
Lit mineur
Source : NOYOULEWA A. (2005), d'après nos travaux de
terrain.
En période de basses eaux correspondant à la
période allant de décembre à juin, la rivière est
sèche. Avec le Koumongou et la Binah, il forme la bassin nord est et
entretient sur ses rives une végétation qui se dégrade
quand on s'éloigne de son cours comme l'indique le schéma des
formes géomorphologiques et du paysage autour de la Kéran (
Figure 7).
FIG 7 : Quelques formes géomorphologiques de la
zone d'étude
38
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Savane herbeuse
|
Savane arbustive
|
Savane boisée
|
Vallée
|
Savane boisée
|
Savane arbustive
|
Savane herbeuse
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Sour rrain
Source : NOYOULEWA A. (2005), d'après nos travaux
de terrain
LEGENDE
|
Dépôts alluviaux et colluviaux Cuirrasse
ferrugineuse
Carapace
Zone d'altération très poussée
Roche-mère altérée
Zone d'altération iso-volumétrique
|
Vides d'eau en saison sèche, la Kéran et ses
cours d'eau voisins ne sont guère exploitables pour l'irrigation en
raison de la faiblesse de leurs débits. Toutefois, leur présence
dans la région est un facteur déterminant dans la
définition des divers ensembles du couvert végétal.
1.3 - LA FLORE ET LA VEGETATION
1.3.1- La sous-zone de l'Atakora
KOUTOUGOU est entièrement situé dans la
sous-zone de l'Atakora encore appelée la zone du Karité selon les
grandes zones botaniques d'HUBERT H. (1908). En effet, la zone est couverte de
Butyrospermum parki ou karité extrêmement abondant
à l'état spontané. Cependant il faut noter l'existence
dans une proportion non moins importante d'autres espèces comme le
manguier ou Mangifera indica, le néré ou le Parkia
biglobosa ainsi que de gros arbres de baobab ou Adansonia
digitata. Ce sont ces espèces dominantes qui constituent la
quasi-totalité de la strate arbustive de la végétation.
1.3.2- Une savane arborée
La végétation qui couvre le terroir que nous
étudions est une savane arborée avec la strate supérieure
haute de plus 10 mètres et essentiellement constituée de baobab
(Adansonia digitata), de néré (Parkia
biglobosa), de Karité (Butyrospermum parki) et de
manguiers (Mangifera indica) et quelques rares Kapokiers rouges ou
Bombax costatum.
Quant à la strate moyenne, elle est riche en arbustes
et en jeunes arbres dont les hauteurs varient entre 3 et 7 mètres. Il
s'agit essentiellement des espèces de la famille des mimosacées
notamment l'acacia ataxacantha, l'acacia gourmaensis, et de
celle des rubiacées comme le Nauclea latifolia, le
Mitragyna inermis et le Morinda lucida.
La strate inférieure ou celle herbeuse est
constituée de touffes d'herbes formant une couverture dense sur la
surface du sol surtout en saison des pluies.
Il faut toutefois préciser que la jeunesse des
espèces constituant la strate moyenne montre une grande activité
humaine qui ne laisse la chance aux arbustes de reprendre forme que pendant les
périodes de la jachère. De plus, le long de la Kéran et
dans les vallées des petits ruisseaux, on rencontre une
végétation où dominent largement les espèces
ligneuses donnant ainsi l'aspect d'une forêt galerie.
Au total, KOUTOUGOU, avec son climat tropical soudanien, ses
sols diversifiés et relativement riches pour la pratique de
l'agriculture, son relief de versants et son réseau hydrographique peu
dense a une végétation de savane arborée soudanaise comme
le dénomme
la carte des formations forestières du Bénin de
AUBERVILLE A. (1937 et 1949). C'est aussi cette formation
végétale que BRUNEL J. F. (1981) appelle la zone de forêt
sèche (Figure 8). Mais ce serait trop tendancieux de nos jours
de nous en tenir aux caractéristiques générales de ce type
de végétation sans noter l'effet anthropique vu que la zone en
dépit de sa faible densité de population (19 hbts/km2)
connaît tout de même l'intervention de l'homme dans son milieu
naturel. La carte du couvert végétal dans la Kéran
présente le couvert végétal actuel dans la
préfecture (Figure 9). Elle permet de voir clairement l'emprise
de l'activité humaine et surtout de celle de l'agriculture sur
l'évolution de la savane arborée. Qu'en est-il alors des
réalités humaines de notre terroir?
0°
1°
2°
-200000
-100000
0
100000
200000
0
100000
200000
-200000
-100000
0°
1°
2°
6° r r r ir 1 r
700000 800000 900000 1000000 1100000 1200000
N
BURKINA FASO
Fig 8 : Formations végétales de la zone
d'étude selon les subdivisions écologiques de Brunel
11°
DAPAON
MANDOURI
%
%
1200000
TANDJOARE
%
MANGO
%
KANDE
16°
%
1100000
NIAMTOUGOU
PAGOUDA
%
GUERIN KOUKA
%
KARA
%
BAFILO
%
BASSAR
%
TCHAMBA
SOKODE
%
%
REPUBLIQUE DU GHANA
41
REPUBLIQUE DU BENIN
SOTOUBOUA
%
LEGENDE
% Chef lieu
|
de Pré
|
fecture
|
|
Préfecture
|
de la
|
Kéran
|
|
|
|
|
|
Zone d'étude
|
|
|
|
du
nord
|
Savane soudanaise
|
Forêt sêche
|
|
|
|
Savane guinéenne
|
|
|
|
Forêt mésophile
|
|
|
|
Zone côtière
|
|
|
|
|
BLITTA
%
900000
ELAVAGNON
1000000
%
BADOU
%
ATAKPAME
AMLAME
%
%
DANYI APEYEME
%
800000
TOHOUN
%
NOTSE
r
KPALIME
%
%
%
AGOU GARE
TABLIGBO
20 0 20 40 60 Kilometers
%
KEVE TSEVIE
%
%
VOGAN
%
ANEHO
700000
%
LOME
%
GOLFE DE GUINNEE
Source: NOYOULEWA A. (2005), d'après les
données recueillies dans Principales praiques destrucives de
l'environnement dans le secteur Ouest de la Kéran, TCHEROTEN (2004) page
27 citant BRUNEL (1981).
0°39'56"
0°49'55"
0°59'54"
1°9'53"
0°39'56"
0°49'55"
0°59'54"
1°9'53"
Limites d'Etat
Limites de Préfecture
þ# Village étudié
Zone d'étude
Source: NOYOULEWA A. (2005), d'après les
résultats de nos travaux et sur la base de la carte topographique -
Feuille Kara au 1/200 000.
3 0 3 6 9 12 15 18 Kilometers
FIG 9 d'étude
|
0 42
: Couvert végétal actuel dans la
zone
par rapport à l'ensemble de la Préfecture
de la Kéran
|
N
|
|
|
|
KOKOU TAMBERMA #
|
Koutamagou
þ#
Lipouli 1
þ#
Lipouli 2 þ# þ# # KOUTOUGOU
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
NADOBA
|
|
|
|
|
|
|
|
#
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
WARENGO #
|
|
|
|
|
Kéran
|
|
# OSSAKRE
|
|
KPESSIDE #
|
|
|
|
HELOTA #
|
KANDE % #
ATALOTE #
|
|
|
|
|
|
PREFECTURE DE DANKPEN
|
0
|
|
9.49'53° 9°05e 10°953"
101952"
l(P19'32°
10°9'33°
?OW"
5.49'55"
LEGENDE
Chef lieu de Canton
% Chef lieu de Préfecture
Cours d'eau
Formation forestière Forêt dégradée
Savane arborée
Savane arborée à forte emprise agricole Formation
riveraine
#
43
1.4- UNE ZONE DE FAIBLE DENSITE HUMAINE
1.4.1- Une localité de peuplement très
récent
Peuple de chasseurs et de cultivateurs, les Temberma habitent
aujourd'hui les versants nord et sud de la chaîne de l'Atakora.
Néanmoins, leur installation dans cette zone qui s'identifiait au coeur
de la savane aux grands fauves et autres animaux sauvages est guidé par
des objectifs de défense. C'est aussi le site le plus apte pour ce
peuple de guerriers vivant dans les habitats refuges pour apercevoir de loin
l'ennemi. Mais comment est-on arrivée à la dispersion des
Temberma à travers les versants de l'Atakora ?
Les habitants actuels de notre terroir ne se souviennent plus
de l'époque où le premier Temberma foula les sols de leur
localité. Néanmoins, des données concordantes notamment
celles qui considèrent les Temberma comme un peuple autochtone (GAYIBOR
N.L., 1997) dans la région de la Kara contrairement à leurs
frères Kabyè et autres qui seraient des «
réfugiés », nous permettent de dire que ce peuple qui serait
venu du nord du Burkina Faso s'installa d'abord dans un lieu appelé
Tanguiéta au Bénin. C'est une famine qui les firent fuir de cette
localité pour arriver à Nadoba dont le vrai nom est «
Kounadookou-Nadoba » c'est-àdire « pays de ceux qui cultivent
les mains nues ». C'est donc de là que partit le fondateur de
Koutougou, un certain OWA M'poh, grand chasseur de son
état, à la recherche d'un endroit giboyeux et de nouvelles
terres. Il accéda donc à ce côté de la montagne et
décida de s'y installer à cause de la richesse de la faune de
cette zone. On raconte que c'est le lieu par excellence du phacochère,
du buffle et autres bêtes sauvages.
Plus tard arrivèrent à sa suite plusieurs autres
clans que la rareté du gibier commençait par faire partir de
Nadoba. Ils fondèrent alors l'actuel village de Tapountè au bord
de la Kéran. C'est donc à partir de ce site que tout le versant
sud de la chaîne de l'Atakora a été colonisé et est
actuellement habité par les Temberma appartenant à de nombreuses
tribus. Toutefois, de nos jours, ils ne reconnaissent aucun lien avec leurs
frères de Nadoba si ce n'est l'appartenance à une même
ethnie. En ce qui concerne les cérémonies et autres rites
traditionnels, ils font tout à leur niveau sans se mêler à
ce que font les autres. D'ailleurs, il existe nombre de différences dans
certains aspects non moins importants des deux sociétés. A
Nadoba, le grenier familial est géré par le chef de famille alors
que à KOUTOUGOU, cette charge incombe plutôt à la femme.
L'explication donnée sur place est que, à Nadoba, le
marché étant sur place, les femmes peuvent vilipender les biens
alimentaires familiaux si on leur confie la gestion des greniers alors
qu'à KOUTOUGOU, le marché étant au Bénin et
très éloigné (25 kilomètres environ), elle ne peut
le faire sans que son époux ne s'en aperçoive.
On se demande alors quelles sont les réalités
actuelles de l'évolution de cette population de chasseurs reconvertie en
paysans et éleveurs ?
1.4.2- Les mouvements de la population
On entend par mouvements de population les changements
intervenus dans celle-ci au cours d'une période, sous l'effet des
évènements démographiques de cette période, tels,
les mariages, les naissances, les décès, les migrations,... On
les subdivise le plus souvent en mouvements naturels et externes. Les
mouvements naturels regroupent ceux qui, affectant l'état civil des
individus apportent un changement dans la société sans aucun lien
avec l'extérieur alors que les mouvements externes rassemblent
essentiellement les flux migratoires ayant eu lieu au sein de ladite
population. Au total, ce sont eux qui déterminent le niveau de
croissance d'une population.
1.4.2.1- Les mouvements naturels
Ils résultent de l'excédent des naissances sur
les décès dans une population. C'est l'indicateur de
l'excédent des naissances sur les décès.
A KOUTOUGOU comme sur l'ensemble de la préfecture de la
Kéran, la caractéristique principale de la population est le taux
de natalité qui reste élevé soit 54%° et une
mortalité estimée de nos jours à 49 %° selon la
Direction Nationale des Statistiques et de la Comptabilité
Générale.
Le taux de natalité élevé s'explique par
la polygamie, l'idéal de la grande famille4 et le mariage
précoce chez les filles5 (autour de 14 ans).
Quant à celui de mortalité, il s'explique par un
manque crucial d'unité de soins. Ainsi, c'est la mortalité
infantile6 (environ 112%°) due essentiellement à la
diarrhée (27%), au paludisme (17%) et aux affections respiratoires (12%)
qui annule l'effet de la natalité élevée.
Selon les fiches de suivi du centre de santé, sur les
84 naissances enregistrées depuis le début de l'année
2005, on a déploré 13 décès soit 154,7%° sur
les huit premiers mois de cette année.
Cependant, ce taux est loin de celui de la croissance dans
notre zone d'étude. Celui-ci très faible (0,18%) soumet notre
zone d'investigation à une faible densité de population (19
hbts/km2) comme ci-dessous cartographié (Figure
10).
4 78,4% de nos enquêtés sont
mariés et 60,5% ont plus de 4 personnes à charge.
5 Les filles se marient à l'âge moyen de
14 ans.
6 Ces chiffres sont ceux de la Direction
Préfectorale de la santé de la Kéran.
Aux zones de fortes densité situées autour de la
ville de Kantè (fait urbain oblige), s'opposent des zones de moyennes et
de faibles densités comme Helota, Nadoba. Quant à Koutougou, on
conclut à la faiblesse de sa densité de même que celle de
Ossacré et Naboulgou entièrement situés dans le parc
national de la Kéran. Qu'est-ce qui explique cet état de fait
?
0°49'55"
0°59'54"
1°9'53"
0°49'55"
0°59'54"
1°9'53"
% Chef lieu de Préfecture
Limites de Préfecture
Route bitumée
Zone d'étude
Route secondaire
Limites d'Etat
þ# Village étudié
# Autres villages
20 - 35 habitants/km2 35 - 50
habitants/km2 Plus de 50 habitants/km2
Moins de 20 habitants/km2
2 0 2 4 6 8 10 Kilometers
Source: NOYOULEWA A. (2005), d'après les
résultats de nos travaux et sur la base de la carte topographique -
Feuille Kara au 1/200 000.
N
Naboulgou
Nadoba
#
#
Kouya - Kougou
#
Koutapa
#
Koutougou
Ossacré
Tapounté
#
#
;ola
Koutougou
KANTE
%
Hélota
#
PREFECTURE
DE DANKPEN
REGION DES SAVANES
FIG 10: Densité de population dans la
Préfecture de la Kéran
46
Koutamagou þ# #
Lipouli 1 þ# #
#þ þ#
#
Lipouli 2
LEGENDE
9.4955. 9°59'54"
10.953. 10.1952.
10°1952^ 10'9'53" 9°5954^
9.49.55. 1080000
1.4.2.2- Un flux migratoire important chez les jeunes
La jeunesse de KOUTOUGOU ne se contente pas de vivre dans
cette contrée isolée du territoire préfectoral. Elle part
de plus en plus à « l'aventure ». En effet, fatigués de
voir leur localité comme elle fut depuis l'époque de leurs grands
parents, plusieurs parents n'hésitent pas à inciter leurs enfants
à aller chercher leur bonheur ailleurs. Leur destination première
est le Bénin et sa ville de Natitingou7. D'autres encore
partent pour Boukoumbé8 au Bénin toujours et pour les
plus téméraires, c'est la route d'Accra9 ou du
Nigeria10 qui les accueille. Certes, il y en a qui vont vers
d'autres villes togolaises comme Kara, Niamtougou ou même Lomé.
Mais il faut préciser que leur proportion est infime11.
Malheureusement, cette émigration (étant
donné que presque tous les départs aboutissent au franchissement
de frontières nationales), n'est pas compensée par une
immigration conséquente. Seuls 3,5% de nos enquêtés sont
des allochtones contre 96,5% d'autochtones et la raison évoquée
pour justifier la présence des allochtones dans la zone d'étude
est d'ordre professionnel. Il s'agit pour la plupart des enseignants ou des
infirmiers dont 51% viennent de la Kozah et 49% de Kéran Ouest.
La conséquence de cette émigration
élevée est la baisse sensible du taux de croissance de population
à KOUTOUGOU. On note donc une situation qui dure depuis longtemps et qui
se traduit par un taux de croissance de 0,18% par an entre 1970 et 1981 alors
que ceux de la préfecture, de la région et du pays étaient
respectivement de 0,5%, 1,4% et 2,8%. Aujourd'hui, ce taux est loin de
changer.
En résumé, le tableau 3 présente
l'évolution de la population selon les villages dans le terroir de
Koutougou entre 1970 et 2005.
Tableau n°3 Evolution de la population dans le
canton de Koutougou entre 1970 et 2005.
|
Effectifs
|
1970
|
1981
|
1996
|
2001
|
2005
|
Koutougou
|
2 095
|
2 137
|
2 550
|
2 535
|
2 647
|
Source : Direction Générale de la
Statistique et de la Comptabilité Nationale, 2005.
On se rend bien compte qu'en 35 années (entre 1970 et
2005), on est passé de 2 095 habitants à 2 647 soit une
progression en valeur absolue de 552 individus. Certes, cette
réalité
7 27% de nos enquêtés affirment y avoir
séjourné durant cinq ans au moins.
8 18% de nos enquêtés reviennent de cette
localité.
9 C'est beaucoup plus le fait des plus
âgés (plus de 40 ans) dont 14% disent avoir vécu à
Accra ou ailleurs au Ghana.
10 20 % des jeunes de moins de 30 ans
enquêtés y ont fait un séjour de un an au moins.
11 Seul un enquêtés sur 116 soit moins
d'un pour cent y a séjourné dans un cadre purement religieux car
exerçant la profession de Pasteur.
contraste avec le taux de natalité élevé
mais vient corroborer la thèse d'une émigration forte et d'une
mortalité élevée surtout chez les enfants de moins de cinq
ans.
Comment s'organise alors cette population à faible
croissance?
1.4.3- La structure sociale
Elle présente l'organisation de la
société ainsi que les nombreuses relations qui lient les
individus. C'est elle qui détermine également les types
d'hiérarchies qui sous-tendent la vie d'un peuple. Elle s'exprime sous
plusieurs aspects.
1.4.3.1- La structure par âge
Dans toute la région, la proportion des habitants dont
l'âge varie entre 5 et 30 ans l'emporte sur les autres. Cependant
à KOUTOUGOU, les jeunes de moins de 30 ans ne font que 23,3% à
cause de la forte émigration « juvénile ». Ce sont les
30 ans et plus qui rassemblent les 76,5% de la population car à cet
âge prend fin l'aventure et commence le «retour au village
natal». En ce qui concerne les plus de 55 ans, ils représentent
seulement 0,9%12 dénotant ainsi de la faiblesse de
l'espérance de vie à cause des nombreuses difficultés qui
font que le niveau de vie reste faible.
En somme, en dépit d'un départ massif des bras
valides et d'une espérance de vie faible, on voit bien que nombre de
jeunes reviennent très vite vers le village natal pour disentils «
essayer de donner un sens à leur vie ». Il n'empêche
cependant pas que le rapport hommes / femmes reste en faveur de ces
dernières surtout dans les tranches d'âge qui enregistrent un
départ important chez les hommes.
1.4.3.2- Notion de famille : N'tchieda
Dans la société Temberma de KOUTOUGOU, la
famille (N'tchieda) est la cellule de base de l'organisation de la
société. Elle est fondée et dirigée par le
père de famille (Atchita) alors que la mère
(Agnon) est la dame de la maison et celle à qui reviennent les
soins des enfants et la gestion du grenier familial (L'boo). Les fils
(N'trabila) et les filles (N'tpobila) sont sous la
surveillance de la mère jusqu'au moment où ils peuvent servir
dans les champs. A partir de ce moment, c'est l'homme qui prend la
responsabilité ou mieux la direction des travaux. Quant à leur
éducation, elle revient à l'homme pour les mâles alors que
les filles sont éduquées par leur mère jusqu'à leur
mariage.
12 D'après les données de nos travaux de
terrain.
Dans cette société, il n'est pas rare de
retrouver sous la même concession (Tatchiédé) une
tante (M'peté) ou un oncle (M'mani) en visite. Par
contre, il est rare que l'un ou l'autre s'installe définitivement chez
son parent. Lorsque cette éventualité se présente (souvent
pour des raisons de divorce), une maison est bâtie dans les environs
immédiats du parent hôte pour abriter celui qui demande
l'hospitalité.
Quant aux enfants, ils vivent sous le toit parental jusqu'au
mariage qui survient souvent après les cérémonies
d'initiation. Le jeune homme construit alors avec l'aide des voisins sa propre
maison dans les environs de celle de ses parents puis y vit avec son ou ses
épouses. Seul le dernier né des enfants mâles reste
définitivement dans la maison familiale afin de l'entretenir. C'est du
moins ce qui se faisait jusqu'à un passé récent quand le
goût de vivre dans les tatas a diminué, ce qui fait que de nos
jours les jeunes préfèrent s'installer chez eux quitte à
amener avec eux leurs mères devenues veuves.
Pour les filles, la situation est moins complexe car les
parents n'attendent pas grand-chose d'elles si ce n'est la dot
(Tiponti) qui est composée de deux boeufs et d'autres objets de
luxe que la monétarisation a engendré. Il s'agit entre autres des
pagnes, des bijoux, ....
Dans tous les cas, la structure matrimoniale est
caractérisée par la faiblesse du célibat car à 25
ans, 87% de nos enquêtés sont mariés alors que ce taux est
de 96% chez les filles du même âge. Cette situation n'est pas de
nature à baisser la taille des ménages.
1.4.3.3- Des ménages d'importante taille
Même si les services de statistiques affirment que la
taille moyenne des ménages dans la préfecture est de 6,9
individus, il faut noter une relativité de cette réalité
selon les milieux. A KOUTOUGOU, environ 60,5% de nos enquêtés ont
plus de quatre personnes à charge alors que ceux qui en ont moins se
chiffrent à 39,5%. Nous tenons à préciser que durant nos
enquêtes, nous avons pu constater que le nombre de personnes à
charge indiqué est celui des enfants non encore mariés et qui
vivent encore sous le toit parental. Nos enquêtés n'y ajoutent pas
leurs épouses et vice versa. Ainsi, les chiffres donnés devraient
être revus à la hausse d'une, de deux ou de trois unités
pour mieux refléter la réalité.
Par ailleurs, les chefs de ménage sont à 93% des
hommes alors que seulement 07% sont des femmes, le plus souvent des veuves de
plus de 40 ans. Mais pour ces dernières, la taille du ménage est
très réduite.
Il ressort donc que le nombre moyen de personnes par
ménage dans le terroir de Koutougou varie entre 4 et 10comme l'indique
le tableau 4.
Tableau n° 4 Taille des ménages en
pourcentage (%) :
Nombre de personnes
|
0 - 1
|
2
|
3
|
4 - 6
|
7 - 10
|
11 et plus
|
Total
|
Chef de ménage =
Homme
|
8,4
|
10,5
|
13,2
|
26,3
|
31,1
|
10,5
|
100
|
Chef de ménage =
Femme
|
34
|
20
|
18
|
15
|
11
|
2
|
100
|
Moyenne Terroir
|
17,2
|
15,25
|
15,6
|
20,65
|
21,05
|
10,25
|
100
|
Moyenne région
Kara
|
24
|
20
|
18
|
16
|
14
|
8
|
100
|
Sources : NOYOULEWA A. (2005), d'après nos travaux de
terrain.
On note que quand le chef de ménage est homme, la
taille du ménage est plus importante13. Cette taille se
réduit considérablement dans le cas où le chef de
ménage est une femme car pour les tranches 4 à 6 et 7 à 10
personnes par exemple, le pourcentage des ménages est de 15 et 11%.
C'est au niveau des ménages de plus petite taille que ce taux est
élevé (34% pour les ménages de 0 et un enfant).
Lorsque nous considérons les moyennes des deux sexes au
niveau du terroir, on se rend bien compte que les ménages ayant entre 4
et 10 personnes sont les plus nombreux (41,7%). Ces moyennes sont alors plus
élevées que celles enregistrées au niveau régional.
Il s'agit en réalité de l'influence du fait urbain qui fait que
dans les villes, la taille des ménages est souvent inférieure
à celle qu'on a dans les milieux ruraux. Néanmoins, dans
l'ensemble, les tendances sont presque partout les mêmes excepté
le fait que les valeurs diffèrent. Ainsi, on se rend compte que les
forts taux se situent autour des ménages de 4 à 10 personnes avec
une plus grande valeur à KOUTOUGOU (42%) qu'au niveau régional
(30%). C'est d'ailleurs ce qui explique l'allure que de la courbe (Figure
11) présentant la tendance des tailles de ménage à
KOUTOUGOU d'une part selon que le chef de ménage soit une femme ou un
homme et d'une autre selon qu'on soit au niveau du terroir ou de la
région de la Kara.
FIG 11: Taille des ménages de la zone
d'étude par rapport à celle de l'ensemble de lé
région de la Kara
0 - 1 2 3 4 à 6 7 à 10 11 et plus
Nombre de personnes
Moyenne Terroir Moyenne région Kara
Pourcentage
25
20
30
15
10
5
0
Source : NOYOULEWA A. (2005), d'après les
résultats de nos travaux.
Au total, le diagramme qui présente clairement les
réalités dans nos deux cas (à KOUTOUGOU et dans la
région de la Kara) montre que les ménages ayant entre 0 et 4 puis
10 personnes et plus sont moins nombreux alors que les plus nombreux sont ceux
qui comptent entre 4 et 10 individus. Le niveau d'instruction des habitants de
la Kara et de ceux de notre zone d'étude n'est sans doute pas sans
conséquence sur cette situation. Comment s'y présente-t-il ?
1.4.3.4- Un faible niveau d'instruction :
C'est un facteur déterminant dans la vie d'un milieu
rural car au-delà du fait qu'il traduit le niveau de
développement des infrastructures d'éducation, il montre aussi
dans quelle mesure cette population peut accepter les innovations qui leur sont
proposées par les services d'encadrement.
Il est très faible dans notre zone d'étude car
58,4% de nos enquêtés sont non instruits alors que seuls 34,5%
sont allés à l'école primaire et 7,1% au secondaire. Pas
un seul n'a fait des études supérieures (Figure 12).
FIG 12: Répartition de nos enquêtés
selon leur niveau d'instruction
Secondaire 7%
Primaire 35%
|
|
Non instruit 58%
|
Source : NOYOULEWA A. (2005), d'après nos travaux de
terrain.
Mais il faut ajouter que la situation diffère selon le
sexe. Entre 1994 et 1995 par exemple, seul 30% de filles étaient
scolarisées contre près de 70% de garçons. De nos jours,
force est de constater que ces taux ne se sont guère
améliorés de façon considérable et cette
disparité n'est pas qu'un souvenir. Pour l'année scolaire
2004-2005 par exemple, l'école primaire publique de Koutougou comptait
juste 137 élèves dont une vingtaine de filles, tous repartis en
trois classes (CP, CE et CM) avec deux enseignants de l'Etat auxquels il faut
ajouter un bénévole. Ce dernier est en fait un employer du chef
car c'est ce dernier qui décide des modalités de sa
rémunération. A quoi ressemble la notion de chefferie à
Koutougou ?
1.4.4- La chefferie à Koutougou
Il faut dire que les personnes âgées
bénéficient dans notre zone d'étude comme il est souvent
le cas dans les sociétés africaines, d'un respect dû
à leur âge. Ce sont les sources de référence dans
presque tous les domaines de la vie (CHAUVEAU J-P. & RICHARD J., 1983). Ce
sont eux qui décident s'il faut accorder ou non l'hospitalité
à un étranger.
Ils sont également les garants des us et coutumes et
dépositaires des secrets des anciens. Le plus vieux du clan est le
maître des cérémonies, le gardien de la « boîte
médicale » de la famille. Il préside les réunions des
sages.
C'est aussi le critère qui détermine le choix du
chef. Certes ce choix se fait dans la famille royale mais le trône
revient de droit au plus âgé des enfants de chef défunt.
D'ailleurs, un regard rétrospectif sur l'histoire de la royauté
dans ce milieu montre même que le premier occupant du milieu qui est
Owa M'poh n'a jamais été chef. Bien au
contraire, cette tâche a été remplie par un certain
Ottoura, un vieux qui a dû suivre l'élan de
dispersion des Temberma. Installé comme tous ses frères à
Tapountè, il fut choisi comme chef à cause de son âge
avancé.
A sa mort, la régence fut assurée par
M'boukpagou qui lui habitait Koutamagou jusqu'à ce que,
démobilisé de l'armée française, N'tcha
Alfa, descendant du premier chef revint reprendre le trône. Il
régna entre 1957 et 1978 puis mourut. Son premier fils Alfa
Oubati qui vivait jusque là dans l'ouest des Plateaux regagna
la terre familiale et fut fait chef le 14 mai 1979. C'est donc lui qui dirige
le canton de Koutougou jusqu'à nos jours.
Mais outre le chef canton, tous les villages ont un chef qui
doit obéissance et respect au chef canton. Dans l'ensemble, il faut
préciser que l'autorité du chef dans cette société
est encore vivante. Il est de ce fait l'organisateur de la vie de tout le
canton et y représente le pouvoir central. Cependant la plupart des
décisions se prennent en conseil des sages qui réunit tous les
chefs de villages ainsi que les délégués du Comité
Villageois de Développement (CVD). Quelle est la hauteur de
participation de la femme aux prises de décisions dans cette
organisation ?
1.4.5- La femme dans la société
Temberma
Quoique dominant en effectif, la femme Temberma est
réduite à jouer les rôles de la ménagère.
C'est elle qui s'occupe de l'éducation des enfants, de la cuisine et
surtout de la cueillette des produits des champs.
Comme tel, elle n'est informée des grandes
décisions même la concernant que pour les exécuter. A son
mariage qui intervient après les cérémonies d'initiation
qui ont lieu autour de 14 ans, elle devient la propriété de son
mari qui s'est acquitté d'une dot de deux boeufs et d'autres objets. En
cas de veuvage, elle regagne le toit d'un des beaux frères qui doit
prendre soin des enfants pour assurer au frère disparu la
postérité de son nom.
Dans l'ensemble, même de nos jours, personne ne semble
s'inquiéter de son sort ; surtout pas les hommes qui trouvent d'ailleurs
qu'elle n'a rien d'autre à faire que de s'occuper de la maison. C'est ce
qui justifie le fort taux de déperdition scolaire au niveau des filles.
En effet, sur les 19 filles inscrites au début de l'année
scolaire 2004-2005, seule 09 ont pu passer les examens de fin d'année
soit une déperdition de 52,6%. On verra par ailleurs que dans le
mode d'accès à la terre, aucun de nos
enquêtés n'a affirmé pouvoir léguer des terres
à une femme. Même s'ils affirment à 97,4% que cette
dernière peut disposer de parcelle d'exploitation, le mode d'acquisition
diffère. Elle peut se voir offrir un lopin de terre par son époux
(93,1% le disent). Mais attention, elle ne peut pas tout mettre en valeur.
Certes, d'autres pensent qu'elle peut tout cultiver (2,6%) mais la plupart
(97,4%) affirment qu'elle ne doit y mettre que des vivriers et surtout des
oléagineux contre 1,8% qui toléreraient la culture du coton par
une femme.
A quoi s'en tenir au terme de la présentation et de
l'analyse des réalités physiques et humaines du terroir de
KOUTOUGOU ?
Au total, le terroir de Koutougou, terroir du versant sud de
la chaîne de l'Atakora abrite environ 2000 Temberma dont
l'évolution en nombre est une des plus lente de la région
(0,18%/an) et qui profitent de la diversité des facteurs physiques pour
mener une vie paisible. Il ne fait plus l'ombre d'aucun doute que la richesse
des sols, le climat tropical sec, le réseau hydrographique lâche
et la végétation de forêt sèche (BRUNEL J-F.1981)
sont autant d'atouts qui ont exercé un attrait sur ce groupe qui a
décidé de quitter son site primaire de Nadoba (versant nord de la
même montagne) pour aller à la recherche du gibier. Ce qui
néanmoins reste encore non expliqué, c'est la façon dont
ce peuple gère ses terres de nos jours de même que l'usage qu'il
en fait. Quels sont donc les liens qui unissent les Temberma de KOUTOUGOU
à leurs terres et comment les aménagent-ils pour en faire en
dernière analyse une unité géographique distincte des
autres ? Quelles activités mènent-ils et quels sont les outils
qu'ils utilisent ? Comment s'organisent-ils entre eux pour créer les
moyens de subsistance qui sont les leurs ? Enfin, quelles sont les structures
agraires en vigueur dans le milieu ?
CHAPITRE 2
L'ESPACE AGRAIRE DANS LE TERROIR DE
KOUTOUGOU
Chez les Temberma de KOUTOUGOU comme partout ailleurs, la vie
et son organisation sont régies par un certain nombre de liens lointains
pour la plupart qui les unissent à la terre. Ces liens
déterminent également les différentes options en terme de
gestion des terres, leur mise en valeur de même que la finalité
des produits qu'elle offre. Tout cet ensemble de choix volontaires ou «
imposés » par des faits naturels ou humains constitue sans aucun
doute l'élément de base dans la connaissance d'un peuple. Ce sont
toutes ces réalités historiques et contemporaines que nous
appelons les structures agraires et que nous comptons présenter et
analyser dans les lignes qui vont suivre. Il s'agira de présenter tour
à tour le régime foncier, la dynamique agricole puis tous les
autres éléments qui entrent dans l'analyse du tout agraire
notamment le parcellaire, les usages que les Temberma de KOUTOUGOU font de la
terre et les itinéraires techniques. Par ailleurs, il sera question
d'énumérer les activités qui, en plus de l'agriculture
proprement dite meublent le quotidien de ce peuple.
2.1- UN REGIME FONCIER PATRILINEAIRE
Il se fonde sur la combinaison des règles qui
gouvernent la question de la terre dans un milieu et qui en déterminent
les niveaux de propriété de même que les différents
moyens en vigueur pour individualiser celle-ci. Des modes d'accès
à ceux d'appropriation de la terre en passant par la délimitation
des propriétés, nous essayerons de montrer la survivance de
structures anciennes et propres au peuple Temberma.
2.1.1- Les modes d'accès à la
terre
Ce sont les moyens par lesquels un individu issu de la
collectivité ou non peut entrer en possession d'une parcelle de terre.
Ils sont en quelque sorte le soubassement du contrat qui lie celui qui dispose
de la terre et son bénéficiaire. Ce constat détermine en
outre les usages que le bénéficiaire est autorisé à
en faire.
Notre zone d'étude s'étale sur un territoire
conquis par simple occupation. En effet, le premier habitant de ce coin
reculé du pays Temberma d'après les témoignages de 99,1%
de nos enquêtés, n'a pas fait autre chose que de s'y installer vu
que personne n'y exerçait des droits de propriété sur le
territoire.
C'est sans doute pourquoi les formes dominantes d'accès
à la terre sur ce site sont l'héritage et le don.
L'héritage est le fait d'entrer en
possession des biens qui ont appartenu à un parent défunt. C'est
le mode d'accès le plus répandu à KOUTOUGOU puisque 71% de
nos enquêtés déclarent que leurs propriétés
proviennent de l'héritage. Cependant, dans son usage, il prend
dans l'univers d'étude une connotation
particulière étant entendu que seuls les enfants mâles
peuvent hériter de la terre. Dans cet ordre d'idées, les
mentalités ne sont pas en phase de changer surtout que 99,1% de nos
enquêtés affirment ne pouvoir léguer leurs terres
qu'à leurs descendants mâles. Ceux-ci héritent des terres
à la mort de leur père et deviennent responsables du domaine
foncier familial dans le cadre d'une responsabilité collective du moment
où aucun partage de la terre n'est effectué. Chacun dispose de la
superficie qu'il peut exploiter. C'est du moins l'avis de 97,3% de ceux que
nous avons interrogé sur la façon dont les héritiers
gèrent les terres familiales.
Il s'agit en conclusion d'un droit successoral
patrilinéaire ne reconnaissant qu'un droit de culture
concédé par l'époux à son épouse. Il
n'existe donc pas de legs féminins faits du vivant du père comme
chez les Adja Éwé (ABOTCHI T. ,1997). Qu'en est-il alors du don
de la terre ?
Le don est le fait de recevoir une parcelle
de terre d'un propriétaire qui peut s'il le désire la retirer ou
vous en restreindre les usages. 29% de chefs de ménages que nous avons
rencontré ont avoué que leurs terres provenaient du don. Cette
proportion qui nous semble un peu trop élevée est sans aucun
doute le résultat du fait que ceux dont les parents sont encore en vie
considèrent plutôt que leurs terres d'exploitation appartiennent
encore à leur père. Toutefois, les droits qu'ils exercent sur ces
parcelles ressemblent fort bien à ceux des propriétaires
puisqu'ils peuvent en céder à leurs épouses ou à
des étrangers. Mais la version originale soutient que cette pratique est
plutôt en vigueur au sein même des couples puisque c'est le mari
qui offre dans 93,1% des cas évoqués une parcelle d'exploitation
à son épouse. Autant dire que c'est le seul moyen par lequel une
femme peut entrer en possession d'une parcelle. Cette réalité est
due au fait que dans cette société, on considère que la
femme ne doit rien tenir de ses parents puisqu'elle est vouée au mariage
et ne doit rien emporter le moment venu.
C'est aussi le mode par lequel les étrangers
accèdent à des parcelles d'exploitation. En fait, quand un
étranger arrive, il fait la demande à son hôte qui la
transmet au chef du village à titre d'information. Puis, l'autochtone
indique la partie des champs à offrir au bénéficiaire qui
peut tout y cultiver. La seule prescription qui lui est faite est qu'il ne doit
pas en céder une partie à une tierce personne. Certes, certains y
ajoutent une nécessité de respect à l'égard du
propriétaire, mais beaucoup pensent qu'aucune condition ne régit
la donation d'une parcelle de terre sur le terroir de KOUTOUGOU.
Somme toute, les modes d'accès à la terre en
vigueur dans l'environnement étudié sont encore traditionnels. Il
n'y a donc pas d'évolution du système foncier. C'est une
situation
qui diffère de celle de bien d'autres terroirs
où la monétarisation de l'économie et l'adoption de la
religion chrétienne ont été source de mutations
créant du coup plusieurs autres modes d'accès à la terre
comme la vente, le gage et la location. Par exemple, dans les
préfectures de Haho et de Moyen-Mono, les peuples Adja
Éwé, pour faire face à des besoins monétaires de
plus en plus cruciaux, ont depuis quelques années, commencé par
faire fi de la tradition qui le leur interdisait en disposant de la terre par
voie de gage, de location et de vente (ABOTCHI T. et KLASSOU K., 2002, page
38).
Dans tous les cas, nous sommes amené à penser
que en plus de l'enclavement, c'est la faible pression démographique qui
constitue le ferment de la conservation de ces modes d'accès à la
terre. Soulignons également que l'enclavement constitue aussi un
élément important dans la délimitation du domaine foncier
villageois.
2.1.2- La délimitation des
propriétés foncières
Le terroir hérité de Owa M'poh
est d'après 95% de nos enquêtés délimité par
des faits naturels. Ce sont entre autres, la chaîne de l'Atakora au nord
et à l'ouest, la rivière Kéran au sud. Néanmoins,
il faut noter que la limite est reste très imprécise eu
égard au fait que les habitants de KOUTOUGOU ne considèrent pas
les frontières nationales comme étant d'une quelconque
importance. En effet, de part et d'autre de celles-ci vit un même peuple
ayant les mêmes traditions et la même culture. Ainsi, il n'est pas
rare de voir que des familles vivant sur des territoires nationaux
différents partagent les mêmes terres familiales. D'ailleurs,
cette réalité n'est pas surprenante quand on sait que les
frontières en question ne sont que l'héritage de l'époque
coloniale avec ses subdivisions qui n'ont tenu compte d'aucune
réalité ethnolinguistique.
Quant aux propriétés individuelles, elles
connaissent presqu'un sort similaire. En fait, les 93,4% de ceux que nous avons
interrogés sur cette question, affirment connaître les limites de
leurs terres d'exploitation, mais aucun n'est à même de les
indiquer avec précision. Cependant, certains indiquent soit un arbre,
soit un ruisseau pour montrer la limite de leurs terres.
Au demeurant, il faut dire que la notion de limites des terres
ne constitue pas une préoccupation dans le terroir que nous
étudions. Cela se justifie sans doute par l'existence de vastes terres
cultivables encore non exploités. D'ailleurs, contrairement à ce
que l'on pouvait croire sur les conflits liés à la question de la
terre, les rares qui existent soit 19,6% sont plutôt inhérents
à des questions de préférence d'une parcelle par rapport
à une autre. De l'avis de 94,7% des enquêtés, ces conflits
très souvent, opposent des frères d'une même famille qui
convoitent les mêmes parcelles de culture soit pour leur
proximité géographique par rapport à l'espace
habité soit à cause de leur disponibilité naturelle
à accueillir telle ou telle autre culture. Cette situation est analogue
à celle du pays Bassar plus précisément dans le terroir de
Kalang'na où les conflits entre individus de clans différents
à propos de la terre sont plutôt rares à en croire WAGBE
L-Y. (1987).
Dans l'ensemble, il existe une nette différence dans le
mode d'appropriation de la terre, entre KOUTOUGOU et Boua, un terroir
Kabyè décrit par SAUVAGET C. (1971) où les
propriétés font l'objet d'une différenciation dans
l'espace à partir d'entrepôts de pierres ou de gros arbres de
baobab (Adansonia digitata). A Notsè et à Tohoun par
exemple, ce sont les arbres et autres plantes bien choisies qui constituent la
haie délimitant les champs appartenant soit à des individus
différents, soit à des collectivités différentes
(ABOTCHI T. et KLASSOU K., 2002). Néanmoins, comme à KOUTOUGOU,
c'est la propriété individuelle qui prend le dessus sur la
propriété collective qui est pratiquement inexistante. Quels en
sont les mobiles ?
2.1.3- Une prédominance de la
propriété individuelle
Le niveau d'appropriation des exploitations agricoles dans le
terroir d'étude est dans 97,3% des cas de type individuel. Cette
tendance démontre ainsi la rareté des exploitations collectives.
Celles-ci restent la propriété des populations
allochtones14. Ce sont elles qui, en effet, au prorata de 2,7% des
cas ont des champs collectifs. Quant aux autochtones, chaque héritier
dispose d'une parcelle dans le domaine foncier de sa famille et en devient chef
d'exploitation. Tous les enfants mâles exploitent le bien familial selon
leur force de travail. C'est sur les parcelles exploitées que chacun en
vient à exercer des droits successoraux puisque celles-ci deviennent
leur propriété individuelle qu'ils transmettent à leurs
enfants qui eux aussi n'ont pas le droit de la partager. En fait, il s'agit, si
nous empruntons à LOMBARD J. (1961, page 197) son expression d'une
« copossession dans l'indivision ».
La prédominance de ce type de propriété
est le fruit de plusieurs facteurs. D'une part la nécessité pour
chacun d'acquérir des biens matériels personnels. Il s'agit entre
autres d'outils de travail ou d'objets de luxe devenus critères du
renforcement du statut social. Ce besoin a sans doute accentué
l'individualisme dans les sociétés traditionnelles en Afrique.
D'autre part, il y a la famille polygamique au sein de laquelle les enfants
issus de mères différentes ont du mal à s'entendre. Il
s'agit d'une situation qui n'a pas aidé à préserver,
14 Les rares exploitations collectives existantes
appartiennent aux familles allochtones dont un membre est un fonctionnaire de
l'administration publique.
mieux à maintenir les propriétés familiales
ou claniques. Elles ont donc vécu et ont cédé la place aux
propriétés individuelles plus aptes à offrir à
leurs propriétaires les avantages voulus.
Somme toute, il règne à KOUTOUGOU une
stabilité du régime foncier qui reste traditionnel. Dans cette
logique, pour les Temberma de la zone d'étude, « la terre n'est pas
un bien accumulable mais un moyen de survie et de reproduction du groupe social
et de ses éléments constitutifs » (GU-KONU E. Y., 1986,
p.246). Comme tel, tous les membres de la communauté, y compris les
allochtones peuvent y avoir accès. C'est ce qui justifie que des
conflits liés à la question de la terre ne soient pas encore
très répandus dans l'environnement étudié qui
connaît une disponibilité des terres de culture. Cette abondance
de la terre dépend de plusieurs autres facteurs qui entrent dans
l'analyse de la dynamique agricole. Leur exposé nous permettra de mieux
les appréhender avant de juger de leur influence sur la vie des
populations du terroir d'investigation.
2.2- LA DYNAMIQUE AGRICOLE
La dynamique agricole présente l'ensemble des mutations
intervenues dans la conception du travail agricole, dans sa pratique puis dans
le choix des outils utilisés et l'organisation même de ce travail.
Il dépend de plusieurs facteurs dont la disponibilité de la
terre. Par exemple, selon une étude faite dans l'Est de la région
des Plateaux en 1994 (OLADOKOUN W., 1995), 20% des paysans en culture manuelle
affirment identifier le manque de terre comme obstacle à l'acquisition
de la traction bovine. C'est pourquoi une étude de cette dynamique doit
pouvoir intégrer autant que faire se peut de nombreuses variables
relatives au monde rural. Comment se présentent-elles à KOUTOUGOU
et quelles en sont les imbrications sur l'organisation de la vie des paysans
?
2.2.1- Le système de production
C'est l'ensemble des formes d'utilisation des sols et la
manière d'assurer cette utilisation. Il couvre plusieurs
réalités :
2.2.1.1- Les outils de travail
Dans la zone d'investigation, 97,4% des paysans
rencontrés reconnaissent que les terres de culture sont fertiles et que
le climat est propice à la pratique de l'activité agricole. Il
s'agit là d'autant de paramètres qui justifient la
présence de ce peuple d'agriculteurs dans cette localité. Pour
mettre en valeur ces terres, plusieurs outils sont mis à contribution.
Ils sont essentiellement rudimentaires (houe, coupe-coupe, hache....).
La grande houe : c'est l'outil de travail le
mieux indiqué pour les travaux de buttage et le billonnage. Elle est
constituée d'une lame de fer intégrée à un manche
de bois taillé.
La petite houe : De même conception que
la précédente à la seule différence que son manche
et sa lame sont d'une moindre importance par rapport à la grande houe,
elle sert au sarclage.
Le coupe-coupe : c'est le premier outil dont
dispose le paysan quand il s'apprête à aller dans son champ. Il
s'en sert pour couper les arbres et arbustes de même que pour se
défendre.
La hache : C'est un instrument
multifonctionnel car autant les paysans s'en servent dans les champs, autant
les artisans l'utilisent dans la sculpture.
Outre ces outils, 28,3% de nos enquêtés utilisent
une paire de boeufs pour la culture
attelée.
Les outils traditionnels et la traction animale
constituent dans une moindre mesure les deux types de moyens
utilisés pour la mise en valeur de la terre. Que dire alors de
l'organisation du travail ?
2.2.1.2- L'organisation du travail
La cellule familiale, unité de base de l'organisation
sociale à KOUTOUGOU est aussi celle de l'organisation du travail. En
effet, le chef de ménage ou de famille est le responsable des
exploitations agricoles qui lui appartiennent. C'est lui qui prend les
décisions et opère des choix de culture. L'homme s'occupe des
travaux de préparation de champs, de labours et de toute autre
activité exigeant de la force. La femme elle, est la responsable des
activités secondaires comme le semis, la fumure et la récolte
avec l'aide des enfants. Néanmoins, il faut noter que des
activités comme le sarclage fait appel aux deux genres et que
très souvent, des femmes se prêtent aussi à des
activités traditionnellement réservées aux hommes. Mais
dans ces cas, c'est dans leurs champs personnels qu'elles le font. Le tableau 5
illustre bien la division traditionnelle du travail selon le sexe à
KOUTOUGOU.
62 Tableau 5 : Division traditionnelle du travail
selon le sexe à Koutougou.
Opérations agricoles
|
Hommes
|
Femmes
|
Observations
|
Défrichement
|
#####
|
|
|
Brûlis des arbres
|
|
xxxxx
|
|
Buttage
|
#####
|
|
|
Bouturage des ignames
|
#####
|
|
Le transport des têtes d'igname du lieu de
conservation vers les parcelles se fait par les femmes.
|
Paillage des ignames
|
#####
|
|
|
Labour - Billonnage
|
#####
|
|
|
Semis céréales
|
#####
|
xxxxx
|
|
Sarclage
|
######
|
xxxxx
|
Les femmes participent de plus en plus à cette
opération surtout dans leurs propres champs
|
Fumure
|
|
xxxxx
|
|
Récolte igname
|
#####
|
|
|
Récolte céréales
|
|
xxxxx
|
|
Récolte Fonio
|
#####
|
xxxxx
|
Les hommes fauchent alors que les femmes battent et
vanent
|
Récolte arachides
|
#####
|
xxxxx
|
Les hommes arrachent et les femmes récoltent les
gousses puis les sèchent.
|
Récolte légumes
|
|
xxxxx
|
|
Transport des produits
|
|
xxxxx
|
|
Vente des produits
|
|
xxxxx
|
|
Transformation des produits
|
|
xxxxx
|
|
Source : D'après les résultats de nos travaux.
Outre le sexe, l'âge est un facteur déterminant
dans la division du travail car les jeunes enfants jusqu'à leur
initiation, travaillent plus avec leurs mères qu'ils soient hommes ou
femmes. Mais selon qu'on soit membre ou non de la famille, le niveau de
participation dans l'activité agricole est différent.
2.2.1.3- Les actifs familiaux
Ce sont tous les membres de la famille qui participent au
travail dans les exploitations appartenant au chef de famille. Une grande
proportion de nos enquêtés (60,4%) affirme se faire aider dans les
champs par les membres de leur famille. Le niveau de participation de ceux-ci
dans l'exploitation peut être évalué à 30 à
40% selon leur effectif et surtout l'âge et le sexe des enfants. Aucune
rémunération ne leur est accordée comme le disent 97,2% de
ceux qui ont eu à se soumettre à notre questionnaire. Ainsi,
leurs efforts sont complétés par le travail du chef de
ménage aidé lui aussi par des actifs extérieurs à
la famille et sous des formes différentes.
2.2.1.4- Les actifs extérieurs à la famille
La participation des actifs extérieurs à la
famille varie essentiellement selon l'âge du chef de ménage
puisque les formes en vigueur (l'entraide, l'invitation et le salariat
agricole) y sont intimement liées.
2.2.1.4.1- L'entraide :
Litombiyi
C'est une forme d'organisation propre aux jeunes
(jusqu'à 40 ans), dont plus de 70% s'organisent en groupes d'entraide
(Litombiyi). Il s'agit d'un groupe de trois à six personnes qui
travaille pour chaque membre alternativement et lorsque le cycle fini, il
recommence. Dans ce cas, la participation des actifs extérieurs à
la famille dans l'exécution du travail peut atteindre 60% car toute
l'année durant et quelle que soit l'activité, l'entraide est
pratiquée. Les membres d'un même groupe sont souvent des amis.
Parfois, appartenant à une même génération, ils ont
été initiés la même année. C'est donc un
facteur d'unité et de reconnaissance de leur appartenance à une
même classe.
2.2.1.4.2- L'invitation :
Koutongou
D'un air beaucoup plus festif, il est l'apanage des plus vieux
qui, outre l'entraide qui est pratiquée par eux dans une faible
proportion, adoptent plutôt l'invitation (Koutongou). Dans ce
cas, un paysan invite les autres à venir travailler dans son champ
souvent les dimanches ou les samedis. Il fait préparer pour l'occasion
de la boisson locale et tue un porc ou un autre animal. Les invités se
retrouvent dans le champ pour un travail de deux à trois heures avant
d'aller consommer la boisson et le repas préparés pour la
circonstance. Seuls 12,5% de nos enquêtés en font usage et ne
participent au travail familial qu'à hauteur de 10 à 15%.
2.2.1.4.3- Le salariat agricole :
Litombila
Quoique pratiqué dans une faible proportion, le
métayage ou salariat agricole existe lui aussi. Mais tout comme
l'invitation, il est beaucoup plus pratiqué par les personnes d'un
âge avancé. Les jeunes, eux, en font usage, seulement en cas de
force majeure, surtout quand ils ne peuvent pas faire face à un cumul
d'activités. C'est d'ailleurs ce qui justifie leur taux d'emploi
très faible dans le terroir (14,6%) alors qu'au même moment,
l'entraide à elle seule s'évalue à 40,6%.
En somme, les cas de figure les plus abondants sont ceux
où on assiste à une combinaison de plusieurs formes de moyens de
faire intervenir des actifs extérieurs dans l'exploitation agricole. On
parle alors du règne du faire-valoir direct. C'est d'ailleurs ces types
de combinaisons qui préfigurent la capacité d'exploitation d'un
paysan et sous-tendent les formes et la taille des parcelles de même que
les itinéraires de culture.
2.2.2- Le parcellaire
C'est la photographie de la disposition des parcelles de
culture dans un paysage agraire. A KOUTOUGOU, il s'agit d'un parcellaire
régulier au sein duquel cohabitent des parcelles
régulières15 et celles
irrégulières16.
Les parcelles régulières portent les cultures de
coton, de maïs ou de niébé. Elles sont le fait de
l'introduction par les services d'encadrement de la culture attelée et
du semis en poquets réguliers. De nos jours, elles connaissent une
fulgurante croissance et tendent à couvrir toute la zone
d'étude.
L'existence des parcelles irrégulières provient
essentiellement de facteurs physiques. En fait, les versants des montagnes qui
servent de champs de culture de fonio, de sorgho ne se prêtent pas
à des aménagements viables. Il en résulte donc de petites
parcelles dont la forme est irrégulière. Dans le paysage, elles
paraissent comme des terrasses et font penser aux cultures en terrasse du pays
Kabyè. Mais il n'y a pas que les facteurs physiques qui expliquent leur
existence puisque dans les rizières où on rencontre aussi une
irrégularité des parcelles de culture, aucun obstacle physique
n'y existe. Il s'agit en fait de la forme primitive d'exploitation des
rizières qui y est en vigueur. Très souvent, elles appartiennent
aux femmes et ne font pas l'objet d'aménagement pouvant assurer leur
uniformisation. C'est le cas lorsqu'il s'agit des parcelles qui appartiennent
aux hommes qui font usage de la charrue.
15 Ce sont des parcelles ayant une forme
régulière (carrée, rectangle, ...)
16 Elles n'ont pas de formes bien définies.
A terme, il s'agit de champs ouverts sans haies vives mais
avec des parcelles de formes et de dimensions variables qui s'étendent
sur tout le terroir et dont l'exploitation judicieuse nécessite des
itinéraires techniques bien définis.
2.2.3- Les itinéraires techniques
La rentabilisation des efforts des paysans passe par le suivi
d'un calendrier agricole qui, tout en tenant compte de la réalité
physique du milieu dépend des pratiques empiriques. Les
opérations culturales s'effectuent en fonction du calendrier agricole.
Ainsi, selon les cultures, on distingue trois périodes distinctes : la
période de semis, le cycle végétatif et la période
de récolte. Le tableau 6 qui présente les situations de quelques
cultures importantes dans le milieu en dit long.
Tableau 6 : Itinéraires techniques de quelques
cultures importantes à
KOUTOUGOU
|
Périodes
|
Jan
|
Fev
|
Mars
|
Avr.
|
Mai
|
Juin
|
Jlt.
|
Août.
|
Sep
|
Oct.
|
Nov.
|
Déc.
|
Arachide
|
|
|
|
|
SSS
|
SSS
|
VVV
|
RRR
|
RRR
|
|
|
|
Coton
|
RRR
|
|
|
|
|
SSS
|
SSS
|
VVV
|
VVV
|
VVV
|
VVV
|
RRR
|
Fonio
|
|
|
|
|
|
SSS
|
VVV
|
VVV
|
VVV
|
RRR
|
|
|
Igname
|
SSS
|
SSS
|
VVV
|
SSS
|
VVV
|
VVV
|
VVV
|
RRR
|
RRR
|
|
RRR
|
RRR
|
Maïs
|
|
|
|
|
SSS
|
SSS
|
VVV
|
VVV
|
VVV
|
RRR
|
|
|
Niébé
|
|
|
|
|
|
|
SSS
|
VVV
|
VVV
|
VVV
|
RRR
|
RRR
|
Sorgho
|
|
|
|
|
|
SSS
|
VVV
|
VVV
|
VVV
|
RRR
|
RRR
|
|
Riz
|
|
|
|
|
|
SSS
|
SSS
|
VVV
|
VVV
|
VVV
|
RRR
|
|
Légende :
SSS : Période de semis VVV : Cycle
végétatif RRR : Période de récolte
Source : D'apres les résultats de nos
travaux de terrain.
Aux trois périodes ainsi dégagées
correspondent également trois grandes opérations culturales en
pays Temberma auxquelles il suffit d'ajouter la préparation du terrain
pour obtenir les quatre temps forts de la tenure d'un champ. Ce sont : la
préparation des champs, le semis, l'entretien des cultures et la
récolte.
La préparation des champs intervient
après les dernières pluies de l'année (entre octobre et
novembre) et commence toujours par les champs d'igname. Dans ce cas, il prend
le nom de débroussage puisque c'est souvent sur des parcelles non encore
exploitées ou laissées en jachère depuis des années
que cette plante est cultivée. C'est d'ailleurs elle qui ouvre la
série de la rotation. Les herbes arrachées sont
brûlées après séchage de même que les arbustes
et arbres existant dans le champ. Seules les espèces utiles
(karité, néré, baobab...) ne le sont pas. Cette
opération est immédiatement suivie de buttage. Les buttes sont
des monticules de terre d'un diamètre variant entre 0,5 et 1
mètre et d'une hauteur de 0,70 mètre environ devant accueillir
les têtes d'igname.
En ce qui concerne les champs de céréales,
l'entretien consiste essentiellement à arracher les anciennes tiges et
à procéder au labour. Ces opérations interviennent selon
la céréale entre décembre et avril avec les
premières pluies. Les champs ainsi préparés
reçoivent les semences dès qu'une importante pluie ouvre la
saison agricole.
Le semis : c'est une opération d'une
importance capitale qui est en général réservée aux
femmes sauf dans le cas du semis à la volée pratiqué dans
les rizicultures et dans la « fonioculture ».
Généralement, elle est précédée par la
sélection des meilleures graines de la récolte de l'année
précédente ou de l'achat des semences sélectionnées
auprès de l'ICAT ou de la DPAEP. Après les semis et dès
que les plantes commencent à pousser, une longue série de soins
doit être apportée, soins que nous résumons sous le vocable
d'entretien des cultures.
L'entretien des cultures est l'ensemble des
opérations qui se succèdent dans un champ jusqu'à la
maturité des produits. La première opération est le
sarclage secondé du démariage. Elle intervient autour du
quinzième jour après le semis. Puis intervient la fumure qui
consiste à apporter à la plante des compléments
énergétiques sous la forme d'engrais chimiques. Les cultures qui
en bénéficient le plus souvent sont le coton et le maïs.
Quant au sorgho, au fonio, niébé ou arachide, leur culture ne
nécessite pas la fumure puisque les paysans de Koutougou affirment que
leurs terres sont très fertiles. D'ailleurs, cela se comprend
aisément quand on sait qu'à part les champs de fonio, les autres
champs sont souvent riverains du cours d'eau. Après la fumure, suivent
respectivement un deuxième sarclage, le rebillonnage, les traitements
phytosanitaires...
Les récoltes quant à elles,
commencent avec la maturité des produits et restent prioritairement un
travail féminin. Il intervient selon le type de culture et la
durée du cycle végétatif trois, quatre ou cinq mois
après le semis et annonce la fin des activités agricoles de la
saison.
Mais cette présentation de chacune des
opérations agricoles telle que nous l'avons faite est loin d'être
respectée dans la pratique. En effet, selon le type de culture, la date
de chaque activité diffère. Il n'y a donc pas de limites
précises dans le temps pour exécuter telle ou telle
opération. C'est pourquoi, il n'est pas rare de voir qu'au moment
où on procède à la récolte d'un produit, une autre
culture n'est qu'à l'étape du semis. C'est par exemple, le cas
du niébé dont les semis commencent en
général au moment de la maturité du maïs. Cette
réalité est loin d'être le propre du terroir de KOUTOUGOU
car il est en réalité le fait des exigences du climat. Comme tel,
toute la région de la Kara jouissant du même type de climat
organise presque de la même façon le travail des champs. On note
ainsi une ressemblance avec les situations de Dimori en pays Bassar (ALI S.,
1996) et de Somdina en pays Kabyè (POKO Y., 1999). Tout ce qui
diffère entre ces trois terroirs, c'est la taille des exploitations
agricoles. Comment se présentent-elles dans notre zone d'étude
?
2.2.4- La taille des exploitations agricoles
Une exploitation agricole est l'ensemble des champs
appartenant à une même personne qui en assure la gestion durant
une campagne agricole. Son étendue dépend de son
propriétaire qui l'élargit ou le réduit selon les moyens
dont il dispose. A KOUTOUGOU, terroir de champs ouverts sur brûlis avec
une option d'extensivité, les exploitations agricoles sont dans
l'ensemble de tailles importantes. En effet, 46,1% de nos enquêtés
ont des champs d'une superficie comprise entre 3 et 5 hectares alors que pour
14,8%, cette donnée est supérieure à 6 hectares. Seuls
25,2% ont un champ de 0 à 2 hectares dont la plupart sont à 96,7%
le fait des femmes interrogées. Lorsqu'on sait qu'elles
représentent 20,7% de notre échantillon, on comprend que seuls
quelques 4% d'hommes cultivent des parcelles de moins de deux hectares.
Là encore, il s'agit essentiellement des fonctionnaires de
l'administration publique, notamment les enseignants ou les infirmiers qui
constituent 2,7% de la population cible.
Au total, il ressort que au sein de la population masculine
autochtone interrogée, rare sont ceux qui ont des champs de moins de 2
hectares. Cette réalité particulière se traduit par le
fait que les Temberma sont un peuple de braves paysans. La figure 11 montrant
la répartition de nos enquêtés par rapport à la
superficie de leurs champs reste l'expression manifeste de la taille des
exploitations agricoles.
FIG 13: Répartition de nos enquêtés
selon la taille de leurs exploitations agricoles
45
40
50
35
30
25
20
15
10
5
0
moins de 1 ha 1-2 ha 3-5 ha 6-10 ha 10 ha et +
Source : D'après les résultats de nos travaux.
Il est clair que la taille modale des exploitations dans
l'environnement d'étude est de 3 à 5 hectares. Les exploitations
de cette taille sont détenues par 46,1% de nos enquêtés.
Mais on y trouve aussi de grands exploitants qui ont des parcelles de plus de
10 hectares. Ils sont au prorata de 3,5% des enquêtés. On se
demande alors quelles sont les cultures auxquelles s'adonnent les Temberma du
terroir de KOUTOUGOU ?
2.3- LES TYPES DE CULTURES
Ils concernent les cultures vivrières et de la
cotonculture.
2.3.1- Les cultures vivrières
C'est l'ensemble des plantes dont les fruits sont
destinés à la consommation. A KOUTOUGOU, elles couvrent environ
80% des espaces cultivés. On en distingue deux sous-ensembles
constitués des céréales puis des légumineuses et
des oléagineux.
2.3.1.1- Les céréales
Ce sont les plantes dont les fruits se présentent sous
forme de graines. La céréaliculture occupe à elle seule
90% des cultures vivrières et est représentée
essentiellement par le maïs et le sorgho. En effet, 61,2% puis 19,8% de
nos enquêtés affirment accorder la priorité respectivement
à ces cultures. Quant au niébé et au fonio, leur culture
se faisant sur les versants, donc nécessitant des aménagements
particuliers et difficiles, les superficies qu'ils occupent sont en nette
régression. Mais le voandzou connaît une
prépondérance particulière à cause de son
rôle dans l'alimentation et surtout dans la préparation des
beignets qui servent lors des cérémonies traditionnelles ou
funéraires. On remarque ainsi que même si cette culture se fait
sur de petites parcelles, presque la totalité des habitants de KOUTOUGOU
ont un champ de voandzou (96,4% des enquêtés).
2.3.1.2- Les légumineuses et les oléagineux
Les légumineuses sont des plantes
ayant pour point commun le fait que leurs fruits soient des légumes. Il
s'agit essentiellement du piment, de la tomate, du gombo, bref toutes ces
cultures auxquelles se consacrent les femmes afin de pouvoir assurer
l'approvisionnement annuel de la famille en sauce. Les espaces
réservés à cette culture sont les dessous des gros arbres,
les termitières... souvent délaissés dans les champs
à cause de leur faible productivité ou du risque de destruction
des plantes par les termites.
Quant aux oléagineux, ce sont des
plantes dont les fruits transformés donnent de l'huile. Ce sont :
l'arachide, le sésame. Contrairement aux légumineuses, les hommes
aussi cultivent les oléagineux surtout l'arachide à cause
probablement de son prix élevé. Par ailleurs, on note une
abondance d'autres fruits ayant la même finalité. Il s'agit des
amandes de karité dont la cueillette reste tout de même anarchique
puisque les arbres sont tous à l'état sauvage et spontané.
Toutefois la consommation de l'huile de l'amande de karité est
très répandue dans la zone d'étude et son usage surtout
dans la médecine traditionnelle est très
apprécié.
Dans l'ensemble, il faut noter que la
céréaliculture est l'activité la plus importante dans la
zone d'investigation et tend d'ailleurs à croître depuis ces trois
dernières années avec la crise de la filière coton. En
fait, la cotonculture est la seule culture de rente dans le terroir
étudié.
2.3.2- La cotonculture, principale culture de
rente
La production du coton à Koutougou comme partout
ailleurs au Togo est vulgarisée par la SOTOCO, société
créée le 27 mars 1975. Sa mission est de vulgariser la production
du coton-graine, d'en assurer l'achat et la collecte primaire,
l'égrenage puis l'exportation de la fibre à travers ses agents
sur le terrain notamment l'ATC (Agent Technico-commercial) aidé dans ses
tâches par le conseiller agricole de l'ICAT.
Notre enquête sur le terrain a
révélé que depuis trois campagnes agricoles, on est
passé dans le GAV de Koutougou de 193 hectares emblavés à
48 hectares pour la saison en cours soit une baisse substantielle de 75,12% sur
deux ans. Cette situation est le résultat des nombreuses soldes de coton
impayées jusqu'au début de la nouvelle saison agricole,
démotivant ainsi les producteurs.
Durant notre enquête, seuls 2% des paysans affirmaient
pouvoir cultiver du coton à nouveau. Certes, ce pourcentage ne
reflète pas la réalité exacte puisque très souvent,
les paysans pensent que les enquêteurs que nous sommes, sont plus proches
des responsables de la filière. Ce faisant, ils pensent que le fait de
cesser de cultiver du coton-graine est un prétexte suffisant qui
pourrait déterminer les responsables des structures d'encadrement
à leur payer les arriérés dus.
Mais quoiqu'il en soit, la cotonculture à KOUTOUGOU
comme d'ailleurs dans tout le Togo se porte plus mal que par le passé
quand on sait que la diminution des surfaces emblavées entraîne
nécessairement celle de la production. C'est d'ailleurs ce qui explique
le fort taux de paysans qui s'adonnent uniquement aux cultures vivrières
(87,4%) dans l'espace géographique étudié.
Au total, nous retenons que la culture du coton est en nette
régression dans le terroir de Koutougou alors que celle des
céréales progresse de façon vertigineuse. Quelles sont
alors les techniques culturales en vigueur dans la zone d'étudiée
?
2.4- L'UTILISATION DU SOL
C'est la façon dont les paysans conçoivent et
pratiquent les différentes cultures sur une parcelle donnée. Ces
techniques qui dénotent de l'ingéniosité du monde paysan
permettent de maximiser les productions. Les plus en vue chez les Temberma sont
la rotation et l'association des cultures. Comment se pratiquent-elles ?
2.4.1- La rotation des cultures
Elle se définit comme l'alternance ou la succession
méthodique des cultures sur une parcelle donnée. Le cycle le plus
déterminant dans la rotation des cultures durant notre enquête est
de trois ans. La première année, après débroussage,
les deux cultures possibles sont l'igname ou le coton avec de fortes
préférences pour la première. La deuxième
année, c'est surtout le maïs ou le sorgho qui prend la place avant
de pouvoir la céder la troisième année à toutes les
autres cultures comme le niébé, l'arachide, le voandzou...
En tout état de cause, il n'existe pas ordre
prédéfini pour la succession des cultures dans le temps.
Toutefois, il est rare de trouver sur une nouvelle friche autre chose que
l'igname ou le coton dans une moindre mesure. C'est ce que montre le tableau 7
qui porte sur la rotation des principales cultures dans le terroir de
Koutougou.
Tableau 7 : Rotation des principales cultures dans le
terroir de Koutougou
|
Cultures dominantes
|
Aménagements
|
Première année
|
Ignames
|
Buttage
|
Deuxième année
|
Maïs ou sorgho
|
à plat sur le reste des buttes
|
Troisième année
|
Coton ou maïs
|
Billonnage
|
Quatrième année
|
Niébé, arachide, .....
|
Billonnage
|
Source : D'apres nos travaux les résultats de nos
travaux.
2.4.2- L'association des cultures
Excepté le cas de la culture du coton, 97,2% de nos
enquêtés apprécient le système d'association de
cultures. En fait, c'est une pratique très ancienne chez les Temberma
comme d'ailleurs c'est souvent le cas dans plusieurs sociétés au
Togo dont les Dimori en pays Bassar (ALI S., 1996). Il s'agit dans une certaine
mesure d'une conséquence de la pratique de l'agriculture extensive.
Dans la plupart des cas, les Temberma considèrent
certaines cultures comme prioritaires et à celles-là, il faut
associer celles dites secondaires. C'est aussi le fruit d'une mesure de
prévoyance puisque les Temberma pensent que lorsqu'il arrive que la
première culture connaisse des problèmes liés aux
aléas climatiques comme le retard de la pluie, les efforts de production
ne seront pas vains surtout qu'il y a possibilité d'une deuxième
culture.
Ainsi conçu, l'association prend différentes
facettes dans l'environnement étudié. Outre les rares cultures en
pure, on assiste à l'association de deux, trois, voire quatre cultures
comme l'indique le tableau 8.
Tableau 8 : Types d'association de cultures dans le
terroir de Koutougou
Caractéristiques
|
Cultures
|
Cultures pures
|
Igname
Coton Maïs
Niébé Sorgho Fonio
|
Association de deux cultures
|
Igname + Manioc
Igname + Riz Igname + Voandzou
Maïs + Niébé Maïs + Arachide
Maïs + Sorgho Sorgho + Niébé
Niébé + Voandzou
|
Association de trois cultures
|
Igname + Manioc + Maïs
Igname + Voandzou +Arachide Maïs + Niébé +
Sorgho
Maïs + Arachide + Voandzou Maïs + Sorgho + Arachide
|
Association de quatre cultures
|
Igname + Manioc + Maïs +Gombo Igname + Voandzou +Arachide +
Riz Maïs + Niébé + Sorgho + Manioc
.
|
Source : D'après les résultats de nos travaux.
Le travail de la terre à KOUTOUGOU se fait de
façon organisée en dépit des nombreuses difficultés
y affairant. Mais dans ce terroir, il n'y a pas que la terre seule pour occuper
les habitants ; loin s'en faut. Comme dans tout milieu rural, les Temberma
élèvent, sculptent, pêchent et chassent même si de
nos jours ces activités n'attirent pas les foules. Quelles en sont les
proportions et à quelle période de l'année pratiquent-ils
ces activités ?
2.5- LES AUTRES ACTIVITES
Elles se retrouvent à KOUTOUGOU sous les formes suivantes
: l'élevage, l'artisanat, la chasse et la pêche.
2.5.1- L'élevage
C'est la production et l'entretien des animaux domestiques ou
utiles. Dans notre zone d'étude, il peut être
apprécié sous trois angles selon les types d'animaux
élevés. Il s'agit des volailles, des petits ruminants et des
bovins.
2.5.1.1- La volaille
La volaille désigne l'ensemble des oiseaux de la
basse-cour élevés pour leur chair et pour leurs oeufs. Les plus
représentatifs dans la zone d'investigation sont : les poules, les
pintades, les canards. Dans presque tous les ménages, ils existent soit
ensemble ou à une unité près. Leur élevage ne
nécessite aucune mesure particulière puisqu'il se fait dans la
nature et par divagation. La volaille assure elle-même son
auto-alimentation dans les champs, dans la brousse ou aux alentours des
maisons. C'est seulement le soir que les poulaillers sont ouverts pour leur
permettre de se mettre à l'abri des animaux sauvages notamment les
renards et les reptiles.
Vu le rôle de ces oiseaux dans les cérémonies
traditionnelles, ils sont d'une grande importance dans le quotidien des
Temberma. Mais ceux-ci n'élèvent pas que la volaille.
2.5.1.2 - Les petits ruminants
Caprins et ovins constituent pour toute famille vivant dans le
terroir de Koutougou non seulement un bien matériel mais davantage un
instrument de prestige social. Très souvent en divagation, les
chèvres et les moutons sont attachés aux piquets durant la saison
des pluies. Mais cette mesure n'est appliquée que faiblement parce que
dans la plupart des cas, les champs de cases n'existent pas.
2.5.1.3- Les bovins
L'élevage des bovins est aussi vieux que le milieu
lui-même. En effet, ce sont les boeufs qui servent dans les
cérémonies funéraires et lors du payement de la dot. Il se
fait sous la conduite d'un pasteur souvent Peuhl, à qui on confie le
pâturage. Mais la gestion du troupeau revient au chef de ménage.
Cet élevage y est très prospère mais depuis
l'épidémie de charbon de 1983, les troupeaux ont baissé de
taille et d'autres même ont disparu complètement.
Dans l'ensemble, il s'agit d'un élevage purement
traditionnel sans suivi médical ne permettant pas de maîtriser les
maladies et de les traiter. L'isolement aidant, les services
vétérinaires n'y viennent presque jamais (pas en tout cas de
mémoire des habitants actuels). Cette situation empêche aussi de
donner avec exactitude le nombre de têtes des animaux qui vivent dans le
terroir de Koutougou. Mais les conditions climatiques favorables (climat
tropical sec) sont un facteur déterminant dans la pratique de cette
activité à laquelle il faut
ajouter l'artisanat, la pêche et la chasse pour
établir le calendrier d'occupation des habitants de Koutougou durant
l'année.
2.5.2- L'artisanat
La poterie est la seule activité artisanale de notre
zone d'étude. Elle est pratiquée par les femmes d'un âge
avancé (plus de 55 ans). Mais l'éloignement des points
d'écoulement (marché de Takonta au Bénin) réduit
cette activité en un passe-temps. Il n'existe presque pas de ventes
outre celles qui ont lieu entre les voisins d'un même village.
2.5.3- La pêche et la chasse, deux
activités en nette régression
« Les jeunes n'ont plus le temps d'aller chasser, ils
préfèrent aller boire ». C'est en ces termes que le chef
canton a répondu à une question relative à la pratique de
la chasse. Et la conséquence dit-il est la
prolifération d'animaux sauvages (perdrix, renards, reptiles...) aux
alentours des maisons décimant les volailles et détruisant les
semis.
Quant à la pêche, elle est le
propre de quelques rares habitués, souvent des vieux qui la font entre
novembre et janvier essentiellement dans la Kéran et la Binah. Les
ressources de la pêche ne faisant presque pas l'objet de vente, on
comprend donc la moindre importance de cette activité dans la vie de ce
peuple.
En somme, comme l'artisanat, la pêche et la chasse sont
des activités quasi inexistantes dans le terroir d'étude. De nos
jours, l'activité agricole reste alors l'occupation première de
ses habitants qui par le passé furent de grands chasseurs. Ils
travaillent donc la terre presque douze mois sur les douze de l'année
car aux saisons mortes correspondent les moments de préparation des
champs. Les rares moments de repos sont ceux consacrés aux fêtes
traditionnelles ou aux cérémonies funéraires ou
rituelles.
Quoi qu'il en soit, l'environnement étudié
situé sur les versants de l'Atakora regorge des réalités
propres aux Temberma. Ainsi, les données sur le système foncier
révèlent une stabilité des modes traditionnels
d'accès et de gestion des terres, celles sur la dynamique agricole
montrent des pratiques intimement liées aux conditions orographiques et
à l'héritage historiques. De plus, avec les types de cultures,
les utilisations du sol et les activités secondaires, toutes les
particularités se conjuguent pour montrer qu'il s'agit bien d'un terroir
qui garde une certaine authenticité propre non seulement aux Temberma
mais davantage à ceux de KOUTOUGOU. La place de la femme et surtout son
rôle dans la gestion du grenier
familial ne diffère-t-il pas de ce qui se passe à
Nadoba pourtant situé à moins 5 Km au nord à vol d'oiseau,
et considéré à juste titre comme le berceau des Temberma
?
La vie quotidienne ainsi relatée révèle
une parfaite imbrication entre le fait naturel et le milieu humain
caractéristique de la zone d'étude. Ce faisant, les techniques
culturales analysées ainsi que les systèmes agricoles en vigueur
sont intimement liés à ces deux facteurs. On se demande alors si
la proportion négligeable des activités secondaires est une
situation étrangère aux conditions naturelles actuelles et aux
mutations d'ordre humain?
Une question qui nous pousse à dire que le concept de
terroir privilégié dans le cadre de notre étude se
justifie pleinement. Mais, n'existent-il pas d'autres réalités
fonctionnelles pour individualiser ce regroupement de quatre villages que nous
avons nommé terroir de Koutougou?
En dépit de la fertilité des terres et de
l'organisation sociale traditionnelle qui permettent de dégager des
ressources énormes surtout en terme de production des
céréales, la zone d'investigation n'est d'aucune utilité
lorsqu'il s'agit d'approvisionner la préfecture de la Kéran voire
la région de la Kara en produits agricoles.
Lorsque nous admettons que le canton de Nadoba est aussi
peuplé de Temberma qui produisent des céréales et les
vendent à Kantè au Togo, à KOUTOUGOU par contre, la
préférence va à la vente des produits agricoles sur le
marché de Takonté au Bénin. Cette situation est
inhérente à l'absence de voies de transport ralliant l'espace
géographique étudié au territoire togolais. Les Temberma
de KOUTOUGOU sont donc contraints de vivre dans un isolement qui affecte leur
vécu quotidien et qui est source d'un développement
socioéconomique extraverti aux effets multiplicateurs.
CHAPITRE 3
L'ENCLAVEMENT, UNE REALITE INDISSOCIABLE DE LA VIE
DES TEMBERMA
L'enclavement, avions-nous dit d'entrée de jeu, est
l'absence, l'insuffisance ou la praticabilité saisonnière des
voies de communication dans une zone donnée. Dans le cas de Koutougou,
toutes ces réalités sont évidentes.
3.1- DES CHEMINS INEXISTANTS OU IMPRATICABLES
C'est l'ensemble des voies de communication (routes, pistes
rurales, sentiers, ponts....) qui desservent une région que l'on
regroupe sous le vocable de réseau de chemins. Il se résume dans
notre zone d'étude à une piste automobile saisonnière, des
sentiers ruraux et un pont sur la Kéran, un autre sur la Binah.
La piste automobile saisonnière a une longueur de 23
kilomètres environ à travers le terroir et vient de Tchitchira
dans la préfecture de Doufelgou. Elle relie les villages de
Tapountè, Koutougou et Koutamagou avant de continuer au Bénin,
plus précisément vers le village de Koutamagou-Bénin. En
saison sèche, elle se révèle praticable et permet ainsi
à la SOTOCO d'évacuer le coton graine. Mais en saison des pluies,
son utilisation est mise à rude épreuve. Les motos et autres
voitures légères peuvent y passer à condition que la
rivière Kéran ne soit pas en crue car le pont qui est
censé relier les deux rives est plutôt un radier.
Le ponceau en question a une hauteur de 1,5 mètre
environ au dessus du lit mineur. Ainsi, il est submergé dès les
premières pluies de la saison. Par ailleurs, le premier pont sur la
Binah est dans un état de délabrement avancé comme on le
voit sur la photo 3, que les véhicules lourds ne peuvent pas prendre le
risque de vouloir traverser.
Photo 3 : Ponceau en délabrement sur la
rivière Binah
Source : Cliché de l'auteur, 2005.
Quant aux sentiers ruraux, ils forment un réseau d'une
vingtaine de kilomètres à travers tout le canton car liant les
différents villages entre eux. Leur praticabilité à moto
se révèle très difficile en raison de petits ruisseaux
souvent remplis d'eau à cette époque de l'année (voir
Photo 4).
Photo 4 : Piste secondaire herbeuse et pleine de
flaques d'eau
Source : Cliché de l'auteur, 2005.
Comme on le voit sur la photo, l'herbe a poussé sur une
piste secondaire dénotant de la fréquence de son utilisation.
Quant aux flaques d'eau, leur présence empêche toute circulation
automobile.
Dans l'ensemble, le réseau de chemins de la zone
d'étude est un des plus pauvres de la région comme l'indique la
figure 14 présentant les voies de communication. Il s'agit d'un
réseau qui ne permet pas de la rallier à Kantè le
chef-lieu de la préfecture à laquelle elle appartient.
#
Autres localités
% Chef lieu de canton
þ#
Village étudié
10°00'
1°10'
FIG 14 : Voies de communication dans la zone
d'étude
79
N
#
Kouya - Tougou
#
Koutamagou
#þ #
Koutapa
#
Lipouli 1
#þ #
Lipouli 2
#þ #
KOUTOUGOU
% # #þ
Tapounté
#
Koutougou Sola
#
CANTON DE KANTE
10°00'
1°10'
LEGENDE
Source: NOYOULEWA A. (2005), d'après nos
0.6 0 0.6 1.2 1.8 2.4 3 Kilometers travaux de terrain et sur
la base de Cartographie
Censitüre, Région de la kara, D.S.I.D.,
1981.
Limites d'Etat
Limites de Canton
Limites de Préfecture
Route carrossable Pistes
Cours d'eau
Zone d'étude
L'observation de la figure 14 laisse apparaître une
lâcheté du réseau de sentiers dans le paysage du terroir.
En fait, entre Koutougou qui nous le rappelons est le chef-lieu du canton et
les villages de l'ouest (Lipouli 1 et 2, Koutapa, Kouya-Kougou) les sentiers
sont plus nombreux. Ce sont des sentiers de montagne difficiles à
pratiquer. Mais il apparaît aussi clairement que les sentiers ne vont pas
plus à l'ouest, dénotant ainsi que les altitudes de la montagne
deviennent de plus en plus importantes et ne permettent plus la
traversée.
L'Est est plutôt marqué par un réseau
lâche. En fait, l'existence d'une piste automobile permet la
traversée de la frontière sans avoir besoin de petits sentiers.
Mais dans l'ensemble, il faut dire que ce qui est le plus marquant quand on
arrive dans le milieu, c'est l'absence ou mieux la pauvreté de ce
réseau.
Cette pauvreté du réseau de chemins est source de
nombreuses et variées contraintes. Comment se manifestent-elles ?
3.2- LES CONTRAINTES LIEES A L'ENCLAVEMENT
3.2.1- Les contraintes d'ordre moral et
culturel
Loin de n'être qu'un problème économique,
l'enclavement d'une région se perçoit aussi à travers les
aspects moraux et culturels. Il s'agit des effets sur la mentalité des
habitants. En effet, à KOUTOUGOU, les paysans ont fini par la force des
choses à développer un complexe d'infériorité par
rapport aux autres, complexe qui frise parfois le dédain
vis-à-vis des autorités publiques centrales. Lors de notre
enquête par exemple, le chef canton affirmait ne pas pouvoir inviter le
Préfet pour la fête traditionnelle parce que comme d'habitude,
tout ce qui se fait ici n'intéresse personne et que les gens n'y
viennent que pour les campagnes électorales.
Sur le plan culturel, nombre de faits marquants contribuent au
retard considérable de la zone d'étude. D'abord au niveau
scolaire, il y a une difficulté chronique d'enseignants du fait que la
plupart de ceux qui y sont affectés refusent de s'y rendre ou s'en vont
après y avoir mis les pieds. Il en résulte alors que seuls deux
enseignants affectés par la Direction Régionale de l'Education se
chargent de la scolarisation des enfants de Koutougou. Cela explique sans aucun
doute les taux de scolarisation faibles17 dans la zone
étudiée.
Ensuite, les Temberma ignorent très souvent et
volontairement la notion de frontière. C'est ainsi qu'à
KOUTOUGOU, il est difficile si non impossible d'entendre parler du Bénin
comme entité territoriale différente. D'ailleurs 97,7% de nos
enquêtés affirment ne pas voir en
17 58% de nos enquêtés sont non instruits
comme l'indique la figure 12, page 54.
la frontière avec le Bénin un motif
d'enclavement. Aussi, durant nos sorties sur le terrain, faisions-nous recours
à des astuces du genre « quel hymne chantez-vous à
l'école » avant de savoir de quel côté de la
frontière nous étions.
Enfin, la retombée de ce qui précède est
que les Temberma de KOUTOUGOU disent être les «oubliés du
Togo». Pour eux, leur milieu se cherche entre le Togo et le Bénin
car ils écoutent radio Parakou ou RFI (Radio France Internationale),
suivent (pour le seul qui a une télévision) l'ORTB (Office des
Radio Télévision du Bénin). Toutes ces contraintes sont
probablement à l'origine des autres plus palpables.
3.2.2- Les contraintes sociologiques
Toute la vie des habitants du terroir de Koutougou est
régulée par rapport au phénomène de
l'enclavement.
Primo, les jours de repos dans le village ou mieux ceux au
cours desquels on sent la vie du village sont ceux d'animation du marché
de Takonta au Bénin. Les femmes y vont dès le matin
chargées de produits vivriers alors que les hommes reviennent des champs
« prématurément » autour de neuf heures puis se
préparent pour suivre leurs épouses.
Secundo, dans la société Temberma de KOUTOUGOU,
les villages qui sont situés le long de la piste automobile sont
considérés comme « plus importants » que ceux qui en
sont éloignés. Cette importance se traduit par une
hiérarchisation des chefs de village et aussi par l'effectif de
population dans les différents villages. C'est pourquoi, lorsque le chef
de canton a une information à donner ou une décision à
prendre, le premier à être concerté, c'est le chef de
Koutamagou situé sur ladite piste. Les autres ne sont informés
que plus tard par l'entremise d'un envoyé. C'est ce qui explique
d'ailleurs que les villages de Kouya-kougou et Koutapa sont selon les dires
même du chef canton courtisés par le canton voisin de Warengo
faisant ainsi qu'au fil des années, il y a une perte progressive de son
autorité sur ces villages.
Aussi, la répartition des habitants sur l'environnement
d'étude est-elle un fait qui tient compte des réalités
liées à l'isolement. En effet, les villages situés sur la
piste automobile qui relie Tchitchira au Bénin (Koutougou, Koutamagou)
sont les plus peuplés du canton et regroupent respectivement 32,8 et
39,7% de la population totale avec comme on le voit, une domination de
Koutamagou situé sur la frontière. Dans le même temps, les
zones situées loin de la route (Lipouli 1 et 2) n'en renferment que
27,5%. Il en découle une concentration le long de la piste automobile
créant une disparité dans la répartition des hommes sur
leur terroir. C'est en tout cas ce que présente la figure 15
qui fait état de la répartition de la population dans l'univers
d'étude.
1°9'55"
1°11'54"
1°13'53"
1°15'52"
1°17'51"
1°9'55"
1°11'54"
1°13'53"
1°15'52"
1°17'51"
# Autres localités
# 200 habitants
Limite d'Etat
350 habitants
#
Kouya - Tougou
#
Koutapa
#
Lipouli 1
# #þ #
Lipouli 2
#þ #
Tapounté
#
Koutougou Sola
#
9°5930" 10'1'29" 10'328" 17527" 17726"
759'30"
10°1'29"
10°3'28"
10°5'27"
10°7'26"
CANTON DE KANTE
CANTON DE NADOBA
82
FIG 15 : Répartition de la population dans la zone
d'étude N
Koutamagou
##þ#
Koutougou
#% þ# #
PREFECTURE DE DOUFELGOU
LEGENDE
0.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 Kilometers
Source: NOYOULEWA A. (2005), d'après les
données du recensement général de la population, 1981 et
les projections de la Direction nationale de la Statisque et de la
Comptabilité Générale, Lomé.
% Chef lieu de canton
#
#
Cours d'eau
Route carrossable Zone d'étude
#þ Village étudié
Limite de Canton Limites de préfecture
650 habitants
800 habitants
Mis à part ces contraintes d'ordre moral, culturel et
social, les vraies conséquences de l'enclavement restent sur le plan
économique où notre zone d'étude brille plutôt par
un immobilisme ou mieux une précarité dans la vie de ses
habitants. Quelles en sont les transcriptions réelles dans la vie des
populations ?
3.2.3- Les contraintes économiques
La vie économique de KOUTOUGOU se résume
à l'activité agricole. C'est donc les retombées de
l'isolement sur ce domaine que nous essayons de présenter selon les
centres d'intérêts qui suivent :
3.2.3.1- Un coût de production agricole
élevé
Le coût de production est la somme des dépenses
effectuées toute l'année pour produire une denrée. Dans le
domaine agricole, il est le fait de plusieurs paramètres.
3.2.3.1.1- La main d'oeuvre
Plus élevée à KOUTOUGOU que dans les
autres localités avoisinantes, la main d'oeuvre s'exprime à
travers le salaire que l'on perçoit contre la réalisation d'un
travail champêtre. C'est en quelque sorte le prix de vente de la force de
travail. La disparité dont il est question se perçoit mieux
à travers le tableau 9 comparatif des taux d'exécution de
certaines opérations.
Tableau 9 : Tableau comparatif des taux
d'exécution de certaines opérations agricoles selon la
localité
|
|
Koutougou
|
|
Tchitchira
|
|
Massédena
|
|
Nadoba
|
Manuelle
|
Attelée
|
Manuelle
|
Attelée
|
Manuelle
|
Attelée
|
Manuelle
|
Attelée
|
Buttage (F/1butte)
|
|
100
|
|
-
|
|
75
|
|
-
|
|
60
|
|
-
|
|
25
|
|
-
|
Labour (F/Ha)
|
36
|
000
|
40
|
000
|
32
|
000
|
24
|
000
|
32
|
000
|
36
|
000
|
20
|
000
|
28
|
000
|
Sarclage (F/Ha)
|
16
|
000
|
20
|
000
|
12
|
000
|
12
|
000
|
12
|
000
|
16
|
000
|
8
|
000
|
9
|
000
|
Source : D'après les résultats de nos travaux.
Il se dégage du tableau 8 un constat clair : les prix
d'exécution des opérations agricoles sont plus
élevés à KOUTOUGOU que partout ailleurs dans la zone.
Entre Koutougou et Nadoba, un terroir Temberma à 5 km au nord, les prix
varient même jusqu'à concurrence de 44% que ce soit pour le labour
ou pour le sarclage alors que les deux localités sont à distance
égales de Kantè. Seulement la facilité d'accès de
Nadoba favorise la venue des
métayers venant de la région des savanes ou
encore des élèves de Kantè qui y viennent soit en vacance
ou durant les week-end pour s'adonner au métayage. La main d'oeuvre
revient ainsi moins chère pour les autres opérations agricoles
notamment le buttage dont le prix est à 75% plus élevé
à KOUTOUGOU par rapport à Nadoba.
Quant au village de Tchitchira dans la préfecture de
Doufelgou, les prix des opérations réalisées par la
traction animale sont particulièrement bas (24 000 F pour le labour
contre 40 000 F à KOUTOUGOU) du fait que c'est le site qui abrite le
projet des jeunes ruraux qui y ont été installés par le
gouvernement avec une paire de boeufs pour chacun afin d'exploiter la
vallée de la Kéran.
Il est donc évident qu'à KOUTOUGOU, les prix des
opérations agricoles sont très élevés. On comprend
davantage pourquoi d'ailleurs la proportion de ceux qui ont recours au salariat
agricole dans leurs exploitations y est très faible. L'enclavement
empêchant la venue d'actifs extérieurs au terroir, la
pénurie de la main d'oeuvre explique la flambée de ses prix.
Seulement, le coût de production n'est pas que du ressort du coût
de la main d'oeuvre. Les prix des intrants y participent largement.
3.2.3.1.2- Le prix des intrants
Au Togo, les prix des intrants sont fixés par le
gouvernement puisque les Directions Régionales de l'Agriculture, de
l'Elevage et de la Pêche sont habiletées à les convoyer
jusque dans les fermes les plus reculées. Mais cette
réalité est loin d'être effective dans le cas de KOUTOUGOU.
En effet, les habitants de ce canton doivent chaque année aller chercher
euxmêmes leurs intrants à Niamtougou ou à Kantè.
Selon le lieu, les prix de revient de ces produits indispensables à la
production agricole varient comme l'indique le tableau 10.
Tableau 10 : Prix de revient des intrants vivriers
selon le lieu de provenance par sac de 50 kg
|
Prix national
|
KANTE (97 km)
|
NIAMTOUGOU (72km)
|
NPK
|
7
|
750 F
|
12
|
000 F
|
9
|
000 F
|
UREE
|
7
|
750 F
|
12
|
000 F
|
9
|
000 F
|
Source : D'apres les résultats de nos
travaux.
Selon le tableau 9, les prix croissent de 54,83% et 16,12%
selon que les intrants proviennent de Kantè ou de Niamtougou. Mais il se
fait qu'appartenant à la préfecture de la Kéran, il est
plus facile aux paysans de KOUTOUGOU d'en disposer à Kantè
qu'à Niamtougou
sauf dans le cas des intrants coton car la SOTOCO rattache la
zone ATC de Koutougou à la coordination Binah-Doufelgou dont Niamtougou
est le siège.
En définitive, les paysans de la zone d'investigation
paient plus cher les intrants vivriers que les autres paysans du Togo,
simplement à cause du fait que les véhicules ne peuvent
accéder facilement à la localité. Après leur achat,
les paysans font transporter les intrants jusqu'aux bords de la Binah soit
à environ 15 kilomètres de Koutougou. Là, chacun
s'organise pour assurer le reste du trajet soit par charrettes grâce
à la traction animale, soit par moto ou dans la plupart des cas par
tête d'homme. C'est pourquoi nous devons préciser que les prix
évoqués plus hauts sont ceux évalués jusqu'à
mi-chemin c'est-à-dire jusqu'aux bords de la Binah et pour avoir une
idée exacte, il faut y ajouter le transport sur les quinze
kilomètres restants. Les intrants coton ne souffrent pas du même
problème puisque leur mise en place a lieu en saison sèche.
Seulement, les paysans n'évaluent pas souvent leurs propres efforts.
C'est aussi le cas pour les outils de travail qui leur reviennent plus chers
que dans d'autres localités de la région sans qu'ils n'y
prêtent attention.
3.2.3.1.2- Le coût des outils de
travail
C'est l'une des données que les paysans ignorent
souvent dans l'évaluation de leurs revenus. Les outils utilisés
dans les champs à KOUTOUGOU proviennent du Bénin plus
précisément de Takonta. Et pourtant, avec le travail de forge
prépondérant dans le pays Kabyè surtout à
Tcharè (POYODA M., 2001), les outils coûtent de moins en moins
chers dans toute la région de la Kara surtout en ce qui concerne les
houes et les dabas. Par ailleurs, ces instruments provenant du Bénin
sont d'une qualité inférieure à ceux fabriqués au
Togo. C'est ce que prouve leur durée d'utilisation telle que nous l'ont
relaté les paysans. Cette situation paraît clairement dans le
tableau 10 ci-dessous présentant les outils, leurs prix selon les lieux
d'achat puis leur durée d'utilisation moyenne.
Tableau 11 : Outils de travail : Prix et durée
d'utilisation des outils de travail selon le lieu d'achat
|
TAKONTA (Bénin)
|
NIAMTOUGOU
|
KANTE
|
Prix
|
Durée
|
Prix
|
Durée
|
Prix
|
Durée
|
Houe
|
500 F
|
1 an
|
250 F
|
2 ans
|
300 F
|
2 ans
|
Daba
|
4500 F
|
2 ans
|
2200 F
|
3 ans
|
2500 F
|
3 ans
|
Coupe-coupe
|
2500 F
|
1 an
|
2000 F
|
1 an
|
2000 F
|
1 an
|
Hache
|
500 F
|
+ de 5 ans
|
300 F
|
+ de 5 ans
|
300 F
|
+ de 5ans
|
Il est donc évident que les instruments de travail
reviennent plus chers et durent moins quand ils sont achetés au
Bénin. Mais dans la réalité, les habitants de KOUTOUGOU
n'ont pas véritablement le choix. Ils sont contraints par l'enclavement
de leur localité à acheter plus cher et en plus sur un
marché extraterritorial, ce qui constitue une fuite de capitaux
importants et un manque à gagner pour l'économie togolaise. Cette
variation du prix couplée de la mauvaise qualité des outils qui
leur sont proposés peut comme dans le cas de la daba prendre des
proportions importantes (plus de 50% de réduction sur les marchés
togolais).
Dans l'ensemble, les coûts de production se
révèlent très élevés pour les paysans de
notre zone d'étude à cause de l'enclavement de celui-ci. Qu'en
est-il alors des prix de vente ?
3.2.3.2- Des prix de vente dérisoires
Lorsque les prix de production d'une denrée alimentaire
sont élevés, le paysan devrait vendre cher pour entrer dans ses
droits. Cependant, force est de constater que les paysans de KOUTOUGOU ne
maîtrisent pas les données du marché de Takonta au
Bénin. Ils subissent ainsi les prix imposés par les acheteurs.
Quelques fois, les prix y sont inférieurs à ceux pratiqués
sur les marchés voisins situés en territoire togolais. Mais ne
pouvant y accéder facilement, les paysans de KOUTOUGOU bradent leurs
récoltes au Bénin. Voici présenté à titre
d'exemple les prix de certaines denrées dans quelques marchés
durant la campagne agricole 2003 - 2004 (Tableau 12).
Tableau 12 : Prix des denrées alimentaires dans
quelques marchés de la Région (Francs CFA), campagne agricole
2003-2004 :
Unité de mesure : le bol = environ 2,5
kg.
|
Takonta
(Bénin) (22km)
|
Nadoba (5km)
|
Kantè (08km)
|
Maïs
|
550
|
750
|
825
|
Sorgho
|
525
|
600
|
950
|
Haricot
|
650
|
900
|
1000
|
Arachide
|
2000
|
1850
|
2000
|
Source : D'apres les résultats de nos
travaux.
Ces prix qui constituent une moyenne sur toute l'année
varient selon les périodes. Nous avons donc considéré
trois périodes principales notamment celle de la récolte, la
misaison et la période de soudure. Il se révèle ainsi que
dans le cas du maïs par exemple, alors que le Togo connaissait une
pénurie de maïs et que les prix flambaient jusqu'à 1000
francs CFA, les paysans de KOUTOUGOU vendaient leur maïs à 700
francs au Bénin. Le seul bémol
que nous enregistrons dans l'analyse des données du
tableau 11 vient du prix de l'arachide qui est le même au Bénin et
à Kantè (2000 F) alors qu'il est inférieur à Nadoba
(1850 F). Cette situation est sans doute le résultat du fait que cette
denrée est très utilisée au Bénin pour la
préparation de galettes ? Certes, cet usage existe au Togo mais est plus
répandu dans l'ouest de la région de la Kara chez les Bassar
(WAGBE L-Y, 1987).
Par ailleurs lorsque nous ajoutons à ces prix les
données du prix des transports sur les 22 kilomètres qui
séparent Koutougou du marché de Takonta, les sommes
prélevées aux vendeurs sous la forme de taxes de marché,
on comprend bien pourquoi nous parlons de prix dérisoires. C'est
pourquoi 67,9% de nos enquêtés citent les taxes
surélevées18 comme principale difficulté dans
l'écoulement de leurs produits au Bénin. A cette
difficulté, s'ajoute celle du transport relative au manque de moyens
appropriés dont parlent 32,1% des enquêtés. En effet, le
mode de transport le plus utilisé est la marche19 (69,3%)
suivi de la bicyclette (28,8%). Seul 1,9% de nos enquêtés
affirment s'y rendre par moto. Quant aux véhicules, il n'en existe
même pas. L'emploi des charrettes de boeufs n'est pas habituel à
cause de la grande distance (22km).
Toutes les contraintes sus évoquées s'imbriquent
de façon évidente pour amoindrir le niveau de vie des populations
de KOUTOUGOU qui ne peuvent ni faire face à leurs besoins vitaux, ni
participer de façon harmonieuse au développement de leur milieu.
Les difficultés sociales se manifestent en l'occurrence par un niveau
alimentaire bas, la couverture médicale médiocre, le taux de
scolarisation insignifiant20, ..... Ce sont les implications
concrètes du phénomène de l'enclavement.
3.3- LES MANIFESTATIONS SOCIALES DE L'ENCLAVEMENT DE KOUTOUGOU
La présentation des manifestations de l'enclavement de
notre site d'étude va se faire selon des centres d'intérêt
précis. Nous apprécierons ainsi le niveau des infrastructures
dans le milieu de même que celui de leur fréquentation pour
montrer que l'isolement limite l'accès des populations de KOUTOUGOU aux
services sociaux de base.
18 Un chargement d'une femme (environ 15 bols de
céréales) vaut 100 francs CFA alors qu'une volaille est
taxée à 200 F et une bête à 300 ou plus car selon
les paysans, les collecteurs deviennent plus exigeants s'ils se rendent compte
qu'ils ont à faire aux Togolais.
19 Les 22 kilomètres sont parcourus en trois
heures à pied, environ une heure à vélo et moins d'une
demi-heure à moto. Quant aux véhicules, ils n'en existent
même pas.
20 Seuls 7% de nos enquêtés déclarent avoir
effectués des études secondaires.
3.3.1- Sur le plan sanitaire
La santé humaine est l'un des facteurs qui permettent
d'apprécier le niveau de développement d'un milieu. A KOUTOUGOU,
cette réalité contraste avec celle du reste de la région
de la Kara. Certes, à cette échelle aussi on ne peut pas dire
qu'il est satisfaisant mais quand on le rapporte à celui de notre zone,
il est plutôt excellent. Les chiffres qui suivent et qui
présentent les ressources sanitaires pour 1000 habitants dans la
région de la Kara, dans la préfecture de la Kéran puis
dans le canton de Koutougou en 1999 traduisent très bien ce que nous
avançons (Tableau 12).
Tableau 13 : Ressources sanitaires pour 1000 habitants
selon les localités en 1999 :
|
Région Kara
|
Préf. Kéran
|
KOUTOUGOU
|
Lits
|
21
|
12
|
0,9
|
Centres de santé
|
2
|
2,9
|
0,9
|
Médecins
|
0,7
|
0,4
|
00
|
Infirmiers
|
5
|
3,8
|
0,9
|
Sage-femmes
|
1,1
|
0,7
|
00
|
Dépôt pharmacie
|
0,3
|
0,2
|
00
|
Source : D'après les résultats de nos travaux sur
la base des données recueillies auprès de la Direction
Préfectorale de la Santé de la Kéran.
Nous précisons que la présence d'un centre de
santé ne correspond pas partout à la même
réalité, tant les différences au niveau du fonctionnement
sont flagrantes et s'accentuent selon que nous soyons dans un centre urbain ou
rural. Ainsi, aux centres en voie de délabrement avancé des
villages s'opposent les centres de santé flambants neufs des villes
comme Kara, chef-lieu de la région. A cette dimension, il faut ajouter
la distance qui sépare souvent les habitants des centres de
santé. La moyenne fournie par les services en question est de 60
à 100% d'habitants situés à plus de 5 km. Dans le cas de
KOUTOUGOU, le centre étant situé au chef-lieu du canton, tous les
autres villages doivent se déplacer sur au moins 6 km pour y
accéder en dépit du mauvais état des sentiers ruraux tel
que nous l'avons présenté plus haut.
La conséquence immédiate de cet état de
fait est l'augmentation du nombre de morts en cours de route vers le centre de
santé. A ceux-ci, il faut ajouter les nombreux cas de
décès qui surviennent lors des évacuations des malades
vers des centres performants comme ceux de Niamtougou. Nous rappelons que quand
des cas aussi urgents se présentent, il faut envoyer
quelqu'un à 20 km pour alerter la congrégation
des frères des campagnes installés à Massédena afin
que ceux-ci viennent assurer l'évacuation du patient avec leur voiture
si celleci est disponible et surtout quand la route est praticable. Dans le cas
contraire, on tente la traversée de la montagne avec le malade suspendu
dans un hamac. Cette traversée ou ces périples vers les
frères de campagne pouvant durer des heures, on se retrouve très
souvent malheureusement avec des patients à bout de résistance et
qui finissent par rendre l'âme. Mais la situation sanitaire des
populations de KOUTOUGOU est aussi le fait de leur niveau
d'analphabétisme, lui-même conséquence de l'enclavement du
milieu.
3.3.2- La question de la scolarisation face à
l'enclavement
Comme nous l'avions présenté plus haut, le taux
de scolarisation à KOUTOUGOU est l'un des plus faibles de la
région (58% de nos enquêtés ne sont pas instruits). Ce fait
est intimement lié au phénomène de l'enclavement. En
effet, sur les sept enseignants du primaire mutés par la Direction
Régionale des Enseignements Primaire et Secondaire, ces quatre
dernières années, seuls deux y sont restés et y exercent
encore. Les autres se sont allés le plus souvent après un
séjour qui se limite à la reconnaissance du poste de travail. La
raison évoquée pour justifier ces départs est l'isolement
du milieu. Pour les deux restants qui ne cachent pas leur désir de
partir vers d'autres cieux, les difficultés ne manquent pas.
Difficultés de toucher leurs soldes surtout en saison des pluies,
difficulté de participer aux réunions et aux séances de
formation ainsi que de s'approvisionner en outils et autres matériels
didactiques comme la craie, les bics, crayons...
Le manque de bancs et de locaux en bon état a
incité la construction pour cette année à Koutougou d'un
bâtiment de trois classes financé par le Projet BID-EDUCATION
2002. Pour y apporter les tables bancs afin de permettre une bonne
rentrée scolaire 2005-2006, le véhicule a dû faire le
détour en empruntant le trajet suivant : Kara - Kantè (48km) -
Nadoba (73km) - Boukoumbé au Bénin (93 km) - Koussoukoungou au
Bénin (123 km) avant d'entamer le sentier vers KOUTOUGOU soit au total
153 kilomètres au lieu d'emprunter un trajet normal allant de Kara
à Niamtougou puis Koutougou soit une cinquantaine de kilomètres.
Seulement, là encore, les bancs ont dû être
abandonnés en pleine brousse à Koutamagou-Bénin à
environ 15 kilomètres de leur destination finale à cause du
mauvais état de cette piste. Il appartient donc aux paysans d'organiser
le reste du transport.
Comparativement à leurs frères de Nadoba
où il existe trois écoles d'enseignement primaire et un
collège d'enseignement secondaire, les habitants de KOUTOUGOU vivent
dans
le pire dénuement réconforté par l'existence
l'autre côté d'un réseau d'électrification à
partir de la ville béninoise de Boukoumbé.
Toutes ces réalités couplées de la
difficulté que les jeunes qui réussissent au CEPD doivent aller
continuer leurs études soit à Kantè soit à Nadoba,
démotivent parents et apprenants en matière de scolarisation. Sa
faiblesse se combine aux autres facteurs pour assombrir davantage la situation
des infrastructures socio collectives de la localité et affaiblir
davantage leur niveau de fréquentation.
En somme, la pauvreté du réseau de chemin et le
mauvais état des ponts contraignent les habitants de KOUTOUGOU à
vivre dans un isolement qui est source de contraintes d'ordre social et
économique et dont les caractéristiques essentielles sont le
coût de production élevé, des prix de vente
dérisoires, une couverture sanitaire presque inexistante et un taux de
scolarisation très faible. Tous ces faits développent chez ce
peuple des sentiments divers ainsi que des complexes nuisibles non seulement
à son intégration au tissu commercial national mais davantage sur
un tout autre plan au contexte d'unité nationale. On citera simplement
le fait que les habitants de notre zone d'étude ne peuvent s'informer
sur ce qui se passe dans leur pays à défaut de pouvoir capter des
stations de radios nationales. C'est ce que nous avons appelé les
contraintes morales et culturelles de l'enclavement.
On voit donc que la vie à KOUTOUGOU n'est nullement chose
facile. Mais on se demande ce qui retient encore ce peuple de cultivateurs dans
ce coin du Togo ?
La vie des Temberma et leur bonheur aujourd'hui est le fruit
d'un espoir de sortir un jour de cette situation que MERLIN P. (1991, page 37)
qualifiait de frein pour le développement du monde rural quand il disait
que « le retard de l'Afrique subsaharienne sur les autres continents en
matière agricole comme dans bien d'autres domaines est le fruit de
l'isolement ». Y a-t-il donc des raisons pour désenclaver le
terroir de Koutougou ? Comment doit-on s'y prendre ? D'ailleurs, qui doit
désenclaver et que peut-on faire en attendant un quelconque processus de
désenclavement ?
En tout état de cause, il se dégage une
nécessité de désenclaver KOUTOUGOU, mais celui-ci doit
partir de certaines potentialités locales et de quelques raisons
valables pour le justifier.
3.4- DE LA NECESSITE DE DESENCLAVER KOUTOUGOU
Tout processus de désenclavement part du fait que la
région regorge d'une certaine richesse à tirer et qui profite
à toute la région, mieux au pays entier.
3.4.1- Les tatas, véritable richesse
touristique
L'habitat est par définition l'ensemble et
l'arrangement des habitations dans un espace donné. Comme tel, il
englobe tout ce qui est construit quelle qu'en soit la finalité. On y
regroupe donc les maisons d'habitation, les enclos pour animaux, les magasins
de stockage de produits agricoles... Cependant, on en distingue deux types en
rapport avec le milieu qui les abrite. Il s'agit de l'habitat urbain et de
l'habitat rural. L'habitat urbain est celui qui est en ville alors que
l'habitat rural s'édifie en campagne. Dans les deux cas, l'habitat reste
l'expression vivante des choix économiques, sociaux et religieux de la
société qui le construit. C'est pourquoi l'habitat a
été de tous les temps considéré comme une des
marques majeures de l'appropriation de l'espace et de la formation du
territoire.
Ainsi défini, l'habitat est propre à chaque
peuple et permet de distinguer des espaces occupés par des populations
ayant une histoire et des richesses culturelles différentes. L'habitat
rural, plus que celui urbain, est le plus expressif du fait qu'il est
l'émanation pure d'une société rurale souvent
éloignée des tendances modernes de construction. Il reste donc
dénudé de tout apport étranger pouvant lui faire perdre
son authenticité.
Il paraît donc clair que la dynamique de l'habitat rural
traduit nécessairement toute une mutation dans les façons de
gérer l'espace, de le maîtriser et même dans celle de penser
de toute la société dans laquelle elle se produit. La dynamique
de l'habitat rural est alors un baromètre pour mesurer les
transformations qui ont lieu dans un peuple et dont la géographie rurale
doit chercher à en évaluer les mobiles, les manifestations
réelles dans le paysage agraire ainsi que les conséquences sur la
vie et partant sur les activités des ruraux. Il s'agit essentiellement
dans notre cas de voir comment la préservation des tatas peut être
perçue comme une raison pour justifier un processus de
désenclavement de KOUTOUGOU.
A KOUTOUGOU, terroir Temberma dans la préfecture de la
Kéran, même si les plus vieux portent encore la pierre en forme de
corne fixée dans la lèvre inférieure, les bracelets de
cauris, symbole de leur initiation, et la coiffure à double corne de
gazelle (FRANCOIS Y. 1995) elle est bien révolue l'époque des
tatas. Car les tatas disparaissent progressivement
laissant la place à un habitat de type Soukhala.
Comment se présente la maison rurale dans ce milieu et pourquoi faut-il
sauver les tatas ?
L'habitat y est plutôt semblable aux soukhalas
des pays Lamba et Nawdéba. On y rencontre des concessions regroupant
plusieurs cases, les unes de forme ronde, les autres quadrangulaires
coiffées de pailles et parfois de tôles ondulées.
L'ensemble constitué par les maisons d'habitation, les magasins, les
greniers et les enclos confère à la concession une forme ronde
donnant sur une cour fermée à laquelle on accède par un
vestibule (Waniboli), abri des statuettes, des crânes d'animaux
(Eloyo) et autres objets du culte des fétiches
(Digboo) caractéristiques de la croyance des Temberma.
Cet habitat traditionnel constitue une richesse inestimable
justifiant d'ailleurs le fait que la préservation du patrimoine Temberma
soit au nombre des priorités du Ministère togolais du Tourisme et
l'inscription du site de Nadoba au patrimoine culturel mondial de
l'humanité par l'UNESCO depuis juillet 2004.
Mais lorsque vous arrivez à Koutougou, en plein pays
Temberma, votre première surprise surtout si vous avez fait un tour par
Nadoba dans le même pays, c'est que vous ne voyez presque pas de tatas.
Les rares existants encore sont soit en voie de délabrement
avancée comme c'est le cas sur la photo 5, soit situés à
proximité des nouveaux types d'habitat (voir Photo 6). En effet, seuls
2,7% de nos enquêtés affirment vivre encore dans les tatas. Les
97,3% restants logent actuellement dans des concessions rondes ou
quadrangulaires dispersées à travers le terroir comme
photographié sur la photo 7.
Photo 5 : Tata en voie de délabrement
avancé à Koutougou
Source : Cliché de l'auteur, 2005.
Photo 6 : Cohabitation Tata-nouveaux types
d'habitats, une réalité de plus en plus
visible à KOUTOUGOU
Source : Cliché de l'auteur, 2005.
Photo 7 : Cases rondes ou quadrangulaires
dispersées à travers le terroir
Source : Cliché de l'auteur, 2005.
Ce nouveau type d'habitation hérité du brassage
avec les Lamba et les Nawdéba selon 87,1% des enquêtés est
constitué de cases rondes construites les unes à
côté des autres et enfermant ainsi une cour ronde elle aussi. On y
entre par un vestibule alors que des murs rattachent tous les
éléments du cercle comme le décrit si bien SAUVAGET C.
(1971). La
soukhala est aussi répandue dans notre zone d'étude
qu'à si méprendre, on se croirait en plein pays Kabyè.
Seulement, à côté de celle-ci, subsistent encore quelques
tatas.
Ce sont des constructions ayant tout l'air de forteresses.
D'ailleurs, certains auteurs n'hésitent pas à les désigner
sous le vocable de châteaux-forts (TEIGA M. B., 2005) eu égard aux
raisons qui militaient en faveur de leur édification. Il s'agissait en
effet de se mettre à l'abri des fauves et surtout à partir des
perforations prévues en hauteur, suivre les mouvements d'un
éventuel ennemi en temps de guerre. C'est pourquoi le
rez-de-chaussée de cette habitation à un étage est
réservé au bétail, les hommes eux dormant en hauteur.
C'est aussi en hauteur que se trouvent les greniers renfermant les provisions
de la famille et la douche familiale.
Devant le vestibule par lequel on y entre, se trouve un canari
perché sur un bois en fourche de trois branches qui constitue la
boîte pharmaceutique familiale. Ici, on retrouve des produits contre
presque tous les maux dont peut souffrir un être humain de même que
des remèdes contre les morsures de serpents.
C'est aussi à côté de ce vestibule
principal que se localisent les mottes de terre de diverses tailles
représentant les fauves abattus par un membre de la famille et qui
deviennent des fétiches pour la famille entière. En fait, dans la
société Temberma de KOUTOUGOU, un homme n'est pas capable
d'abattre un tel animal, c'est ce dernier qui se livre ou s'offre à une
famille par l'entremise d'un individu pour en devenir son protecteur.
Au demeurant, la « cohabitation » entre tatas et
soukhalas dans le terroir de Koutougou a des raisons diverses. Certains (41,8%
de nos enquêtés) disent avoir changé d'habitat à
cause des difficultés liées à la construction des tatas
alors que d'autres (15,5%) ont adopté la soukhala pour des raisons de
commodité ou encore pour montrer leur ascension sociale (39,7%). Quant
aux 3% restants, ils évoquent plutôt la disparition de la
nécessité de se défendre. En tout état de cause,
les Temberma de notre zone d'investigation apprécient à 94,8%
leur nouveau type de logis et ne pensent pas recommencer la vie dans les tatas
car comme disent les plus jeunes, il n'y pas de place dans une tata pour le
vélo ou la moto.
Tout ceci explique pourquoi les tatas disparaissent rapidement
du terroir pour faire place à des concessions rondes alors que leur
préservation aurait été sans doute une raison de
valorisation de la localité et ainsi une raison de plus pour justifier
un quelconque projet de désenclavement.
En effet, si le canton de Nadoba aux multiples atouts
socioculturels connaît ce développement que nous avons
caractérisé, c'est sans doute à cause de ses tatas qui
font l'objet d'une attraction touristique. De plus, l'inscription du patrimoine
Temberma sur la liste
du patrimoine mondial de l'humanité devait prendre en
compte tout le pays, mieux tout l'espace sur lequel vivent les Temberma.
Malheureusement, les tatas disparaissant et l'enclavement aidant, le canton de
Koutougou a été délaissé dans la
délimitation du site touristique et ne profite d'aucune attention
concernant son développement. C'est pourquoi nous pensons que la
préservation des quelques rares tatas restantes pourrait être une
motivation supplémentaire pour le désenclavement de cette zone.
Mais il n'y a pas que les tatas pour justifier un tel processus. Les nombreuses
quantités de denrées alimentaires déversées par ces
populations sur les marchés béninois alors qu'ils sont produits
à partir des intrants achetés et subventionnés par le
gouvernement togolais sont une raison bien plus sérieuse.
3.4.2- Une importante production
céréalière déversée au
Bénin
Nous avons tout au long de ce travail montré que les
conditions climatiques et édaphiques de notre terroir de même que
l'organisation de ses habitants se prêtent très bien à
l'activité agricole. Par ailleurs, selon les données recueillies
au cours de nos travaux, 60,9% de nos enquêtés ont une
exploitation d'une superficie de plus de 3 hectares. Selon cette même
source, 37% disent avoir une production de maïs supérieure à
dix sacs et 62,5% entre un et dix sacs par campagne agricole. Les autres
cultures comme le sorgho et l'igname n'ont pu faire l'objet de quantification
précise pour deux raisons. D'une part, il est difficile aux paysans de
donner le nombre exact des tubercules d'ignames vendus au cours d'une
année parce que même avant la récolte, il leur arrive d'en
déterrer quelques unes pour la vente. D'autre part, chez les Temberma
dont 19,8% consacrent leur temps à la production du sorgho, il n'est pas
nécessaire de conserver cette céréale en grain. Elle se
conserve donc après les récoltes dans les greniers et c'est
à chaque fois qu'il y a un besoin précis d'argent que l'on fait
égrener en tapant pour en vendre les grains. Néanmoins, les
informations recueillies nous permettent de situer la productivité du
sorgho à quelques unités près de celle du maïs. C'est
ce qui nous a permis d'établir le tableau 14 qui fait
état de la production de certaines denrées essentielles par
hectare puis d'en déduire la quantité moyenne produite dans notre
zone d'étude.
Tableau 14 : Production moyenne de certaines
céréales à KOUTOUGOU, Campagne agricole 2003-2004
:
|
Productivité / Ha (en tonne)
|
Superficie moyenne (en Ha)
|
Production moyenne du terroir (en tonnes)
|
Maïs
|
2
|
28
|
56
|
Sorgho
|
1,6
|
15
|
24
|
Niébé
|
0,7
|
10
|
7
|
Arachide
|
0,4
|
07
|
2,8
|
Source : D'après les résultats de nos travaux et
les données recueillies à partir du dépouillement des
Fiches techniques ICAT.
On voit d'après le tableau 13 que chaque année,
en moyenne, quelques 56 tonnes de maïs soit plus de 500 sacs de 100 kg
sont produits à KOUTOUGOU et pas un seul n'est vendu sur le territoire
togolais. Il en est de même avec les autres denrées notamment le
niébé, le sorgho ou l'arachide. Cette année par exemple,
le problème alimentaire a été très
délicat.
Au cours des mois de juin et juillet 2005 où le prix du
maïs a connu une fulgurante ascension sur tout le territoire togolais (900
francs à Nadoba, 1000 francs à Kantè et Niamtougou le bol
de 2,5 kg environ), les populations de KOUTOUGOU vendaient leur production de
maïs au Bénin à un prix de 700 francs CFA la même
mesure à Takonta au Bénin. Cela constitue non seulement un manque
à gagner pour les paysans mais davantage une belle réserve perdue
pour l'Etat togolais qui pourtant a mis du prix pour disposer des engrais
utilisés et en plus pour les subventionner. Toute cette perte, nous
tenons à le préciser est simplement le fait de l'enclavement ne
permettant même pas à ces populations d'aller écouler leurs
produits à Nadoba à 5 km à vol d'oiseau et de faire
profiter leur production aux consommateurs nationaux. On se demande alors ce
qu'on gagne à laisser toute cette réserve de vivriers dans cet
isolement chronique et difficilement supportable.
A tout considérer, l'enclavement de la localité
que nous étudions n'a d'effets néfastes que pour ceux qui y
vivent, loin s'en faut, il est source de nombreuses pertes autant pour notre
pays que pour les populations togolaises. Celles-ci se manifestent par
l'éloignement de ce qui aurait pu être une source d'attraction
pour les touristes (les tatas même si elles sont en voie de disparition)
d'une part et d'autre part par de nombreuses quantités de produits
agricoles céréaliers surtout cultivés par des togolais, au
Togo et avec l'aide financier du gouvernement togolais, et qui se vendent
à des prix relativement bas sur les marchés extraterritoriaux.
Ces marchés constituent, faut-il le rappeler, le seul lieu
d'approvisionnement de ces populations
en produits manufacturés. Il en découle une
fuite non seulement de nos produits agricoles mais encore des capitaux vers
d'autres pays. Les taxes de marché prélevées sur les
ventes ne sont non plus de nature à réduire les effets nuisibles
de ce phénomène. C'est pour freiner ce phénomène
qu'un processus de désenclavement de KOUTOUGOU s'impose. Seulement,
celuici doit prendre en compte les nombreuses potentialités locales.
Quelles sont-elles ?
3.4.3- Des potentialités
évidentes
Il s'agit d'analyser tous les éléments existant
dans le milieu et qui peuvent constituer le soubassement d'un projet de son
désenclavement. Ils sont de deux ordres et sont liés aux
possibilités pratiques d'un tel processus.
3.4.3.1- Koutougou - Kantè : 08 km à vol
d'oiseau
Les habitants de KOUTOUGOU ont encore en mémoire toutes
les fois qu'il leur a été demandé de tailler les herbes
dans la vallée séparant les monts Amoungou et
Takpangou les séparant de Kantè. Aux dires du chef
canton et de certains habitants, cela arrive au cours de toutes les campagnes
électorales. On leur demande de débroussailler ainsi pour que les
tracteurs commencent le tracé d'une route qui les relirait au chef-lieu
de leur préfecture. Mais après, ils n'entendent plus rien
venir.
On pense donc à tort ou à raison que ladite
vallée est exploitable à cette fin. Certes, ces populations ne
sont pas des ingénieurs en ponts et chaussées mais elles
affirment à 78,3% souhaiter qu'une route y passe et les relie à
Kantè. Les autres optent plutôt pour une autre possibilité.
Laquelle ?
3.4.3.2- Le désenclavement : une question d'entretien des
pistes rurales
L'amélioration de la qualité de la route venant
de Tchitchira est le voeu de 21,7% de la population interrogée sur la
question. Cette proportion est infime, pourra-t-on être amené
à dire. Mais elle est le fait de ceux qui pensent à une solution
provisoire en attendant que la route vers Kantè voie le jour. Il s'agit
donc pour ces derniers d'une solution de substitution à laquelle ils
souscrivent à défaut du mieux. En effet, le pont sur la Binah
étant en mauvais état et celui sur la Kéran très
bas, il suffira donc de relever le second et de réparer le premier pour
que l'accès à Koutougou se fasse en toutes saisons et par tous
les types de véhicules.
Quant aux sentiers intérieurs, avec l'accroissement du
trafic que connaîtra la piste automobile, ils seront de plus en plus
pratiqués et pourront à terme prendre plus d'importance.
Les possibilités existent sur place pour
déclencher un processus de désenclavement profitable pour tous.
Mais encore faut-il disposer des moyens humains et financiers
nécessaires. Cet aspect de la question a été abordé
lors de notre enquête de terrain. Il s'agissait de voir la
mentalité des populations de KOUTOUGOU face à la
problématique du développement local participatif. Qu'est-ce qui
en a découlé ?
3.4.4- Une prédisposition locale à
participer aux efforts de désenclavement
A Koutougou, les questions de développement sont
traitées par un Comité Villageois de Développement (CVD)
mis en place par l'ex-Ministère du Plan avec l'appui des services
sociaux pour enclencher le processus du développement endogène.
Il s'est déjà illustré dans la résolution de
certains problèmes notamment dans son apport dans la construction des
salles de classe.
Sur la question du désenclavement, il a aussi son
analyse des faits et sa petite idée. Dans l'ensemble, à l'instar
de toute la population d'ailleurs, les membres de ce comité pensent que
le tracé des routes est de la responsabilité des pouvoirs
publics. Néanmoins, tous ou presque s'accordent à dire que cela
devrait se faire dans la mise en commun des efforts avec le gouvernement pour
aboutir au désenclavement de leur milieu.
Ainsi, 59,5% de nos enquêtés affirment être
prêts à participer aux frais qu'exigeront ces travaux. Parmi les
40,5% restants, 58,5%, essentiellement les femmes disent plutôt pouvoir
offrir leur main d'oeuvre pour exécuter certains travaux. Il s'agit en
l'occurrence de l'extraction du gravier des rivières, la collecte de
l'eau ou encore la mise au propre du site retenu.
Concernant la participation financière, 76,8% de
ceux-là qui affirment pouvoir participer aux frais limitent leurs taux
à mille francs CFA alors que 13% le font à deux mille francs puis
10,2% pour ceux qui pensent donner jusqu'à 5 000 francs et plus.
Dans ce cadre, les populations de KOUTOUGOU affirment à
95,3% que la gestion de ces fonds doit être confiée au CVD et 4,7%
pensent plutôt au chef canton. Lorsqu'on sait que parmi les propositions
qui leur avaient été faites, il y avait la possibilité de
confier cet argent au Préfet et que pas un seul ne s'est prononcé
en faveur de cette éventualité, on comprend plus la relation
qu'entretiennent ceux-ci avec les pouvoirs centraux.
La proportion de la population qui s'est prononcée soit
en faveur d'une participation financière soit en faveur de
l'exécution d'une activité précise s'évalue
à 83,2% de nos
enquêtés21 et montre clairement
combien les habitants de KOUTOUGOU souffrent de leur isolement et sont
conscients des effets positifs du désenclavement sur leur
mieux-être. Elle dénote aussi de leur disponibilité
à participer aux efforts de construction de la route ou même de
l'entretien de celle déjà existante. Que peut-on attendre
concrètement du désenclavement de cette localité ?
3.4.5- Les effets du désenclavement du terroir
de Koutougou
Comme tout processus dans le développement d'une
contrée, celui de désenclavement a des retombées sur la
vie des habitants, celle du pays et partant pour l'économie
nationale.
3.4.5.1- Sur le plan moral et
culturel
Si un jour les habitants de KOUTOUGOU avaient plus de
facilité à joindre Kantè ou toute autre ville togolaise
pour vendre leurs produits agricoles, ils se sentiraient plus Togolais. Le
Préfet et d'autres personnalités encore pourront s'y rendre pour
assister aux fêtes traditionnelles comme ils le font déjà
pour Nadoba et les autres peuples de la préfecture.
Aussi l'existence d'une route praticable en toute saison
permettra-t-elle de développer les échanges culturels avec
d'autres peuples de la région dont les membres viendront s'installer
à KOUTOUGOU.
Par ailleurs, un processus de désenclavement permettra
aux Temberma de KOUTOUGOU de valoriser leur culture notamment leur danse, leurs
tatas comme cela commence par se faire du côté de Nadoba et comme
cela s'est fait depuis déjà très longtemps à
Koussoukoungou au Bénin. En effet, le site panoramique ou le
belvédère de Koussoukoungou est un site touristique sous
l'autorité de l'Agence Régionale de Développement du
Tourisme (ARDET - Atacora-Donga). Là, la préservation des tatas
et leur rentabilisation est une préoccupation sérieuse. De nos
jours, des touristes nationaux comme régionaux s'y rendent après
avoir payé des droits de visite à l'Agence régionale de
Natitingou. D'ailleurs, l'auberge du site est une tata reconstruite à
base du ciment et qui date de 52 ans.
Enfin, loin de n'être qu'une affaire de routes et de
ponts, le désenclavement devrait prendre en compte la mise en place des
infrastructures permettant à ces populations de se sentir davantage
intégrées à la vie politique et culturelle de leur pays.
Il s'agit en l'occurrence de leur donner la possibilité de capter ne
serait-ce que les chaînes médiatiques togolaises
21 Seuls 16,8% affirment ne pas être en
mesure de fournir une participation quelconque afin de sortir leur
localité de son état d'enclavement. Ils pensent que ce processus
de désenclavement est purement du ressort des pouvoirs publics.
comme la TVT et la radio Lomé et Kara. De plus, la mise en
place d'un réseau de téléphonie rurale serait un atout et
un facteur d'attrait de la zone d'étude.
Bref, le désenclavement de notre site d'étude
sera probablement un prélude à une activité culturelle
génératrice de revenus et surtout à un aménagement
de ce « village-versant ». Tout ceci aura nécessairement des
retombées sur l'économie locale, régionale et
nationale.
3.4.5.2- Sur le plan social
Les retombées sociales du désenclavement de
KOUTOUGOU sont évidentes et diverses. D'abord, la croissance du taux de
scolarisation sera un fait. Comme dans le cas de Lotogou décrit par
YATOMBO (1994) où il est passé de 26% en 1984 à 53,8% en
1991, le tracé d'une route est un facteur de stabilité pour les
enseignants qui ne s'en iront plus.
Ensuite, à voir le flux de marchandises qui
s'écoulent vers le Bénin, on peut croire que si une route
existait entre Kantè et KOUTOUGOU, il y aurait nécessairement un
marché d'animation hebdomadaire qui faciliterait les échanges
commerciaux au bénéfice des populations de l'environnement
d'investigation. Il permettra en outre de réduire la dépendance
des populations de KOUTOUGOU vis-à-vis du marché extraterritorial
de Takonta au Bénin.
Enfin sur le plan sanitaire, la couverture médicale,
même si elle ne s'améliore pas profitera de la proximité de
l'hôpital préfectoral de Kantè. Les patients pourront alors
être évacués en temps réel et être
sauvés plus facilement.
Quand nous connaissons l'importance du niveau de scolarisation et
de l'état sanitaire de la population sur sa vie économique, nous
ne pouvons passer sous silence cet aspect.
3.4.5.3- Sur le plan
économique
Il est important pour tous qu'un milieu qui de surcroît est
agricole ne soit pas obligé de vivre tourné vers un autre
pays.
Les retombées économiques d'un éventuel
processus de désenclavement de notre terroir se perçoivent sous
le triple angle des grands bénéficiaires que sont la
préfecture prélevant des taxes de marché, les paysans
écoulant leurs produits puis les consommateurs disposant d'un nouveau
grenier.
L'intensification de l'activité commerciale dans le
milieu avec à terme la création d'un marché est un plus
pour les caisses de la préfecture qui a besoin de ressources
financières pour exécuter certains de ses projets. Elle pourra
alors par la collecte des taxes de marché
éviter que ces revenus ne renforcent les sources de
recettes des collectivités locales en territoire béninois.
Quant aux paysans, nous avions montré comment
l'enclavement engendrait des manques à gagner sur leurs produits vendus
sur les marchés béninois. Ils pourront alors vendre plus
facilement et à des prix plus intéressants, ce qui aura pour
effet de les inciter à un effort de production soutenu.
Par ailleurs, les prix des intrants qui augmentaient à
cause de la distance et du mauvais état des routes pourront baisser pour
être au niveau du prix national. Aussi, les prix des outils de travail
étant plus élevés au Bénin que sur le territoire
togolais, les paysans pourront-ils ainsi économiser le surplus et
l'investir dans d'autres domaines. Il en va de même pour les
excédents qu'ils pourront réaliser sur la main d'oeuvre agricole
dont le prix baissera.
Enfin, l'ouverture de ce milieu sur le reste du territoire
permettra aux paysans de profiter des innovations dans le domaine agricole
quand on sait que celles-ci n'atteignent pas les milieux enclavés et
ceux qui ne le sont pas au même rythme.
Pour les nombreux consommateurs togolais, chaque fois qu'un
sac de céréale sort du territoire, c'est un franc qui s'ajoute au
prix des denrées. Les quantités importantes de
céréales qui quittent le territoire national pour le Bénin
(56 tonnes pour le maïs, 24 pour le sorgho...) alors que tout le
territoire est en pleine pénurie constituent une réserve
inutilisée. D'ailleurs, quand on sait que les intrants ayant permis de
produire ces denrées ont été fournis par les structures
d'encadrement paysan togolais, la nécessité devient plus
récurrente.
Nous voyons donc qu'il n'y a pas que les paysans de KOUTOUGOU
pour profiter d'un processus de désenclavement de leur milieu? Bien au
contraire, tout le pays et sa population devront jouir des retombées
d'un tel processus. Nous convenons que les premiers bénéficiaires
sont les habitants de notre zone d'étude. Cependant, il faut comprendre
que la localité offre plusieurs avantages qui peuvent facilement
être exploités au profit de l'économie nationale. Ces
avantages se perçoivent à travers les domaines culturel,
touristique, social et économique avec d'énormes quantités
de céréales au profit du Togo.
Que doit-on retenir au terme de cette étude du terroir
Temberma de Koutougou enclavé dans la Kéran ?
CONCLUSION GENERALE
Les deux milliers d'habitants de KOUTOUGOU vivent
essentiellement du travail agricole. Plusieurs raisons militent en faveur du
développement de cette activité. Il s'agit d'abord d'un climat
favorable avec ses éléments qui s'accordent bien avec le type
tropical sec. De lui découlent non seulement une
végétation de savane arborée facilement exploitable mais
davantage des sols diversifiés et riches. Mais le facteur
pédologique est aussi lié à la nature de la roche
mère qui y est très diversifiée selon que l'on soit sur un
versant ou dans la plaine le long de la Kéran.
Il résulte de ces conditions naturelles favorables et
de l'histoire de ce peuple de braves paysans, dont la taille des exploitations
les plus répandues dans la zone étudiée se situe entre 3
et 5 hectares. L'acquisition des ces terres relevant encore des modes
traditionnels que sont le don et surtout l'héritage, les conflits
liés à la question foncière sont plutôt rares.
La société vit alors dans une espèce de
solidarité qui trouve ses origines dans une organisation sociale
où les vieux sont des repères pour les jeunes alors que la femme
est réduite à ses tâches domestiques. L'enfant quant
à lui constitue la première richesse et comme tel ne quitte le
toit parental qu'après les cérémonies d'initiation. Ce
départ conduit les jeunes mâles selon les cas à la
fondation d'une famille ou à l'aventure vers le Bénin ou le
Nigeria voisins augmentant du coup les disparités remarquées
entre les populations masculines et féminines.
La cohésion sociale en question est aujourd'hui
maintenue par l'organisation du travail dans le terroir de Koutougou. En fait,
les jeunes forment des groupes d'entraide alors que les plus vieux font appel
à l'invitation. D'autres encore, mais dans une moindre proportion ont
recours au salariat agricole qui n'est pourtant pas répandu.
Cette organisation de la société tout
entière et de ses activités couplée à un respect
scrupuleux des itinéraires techniques permet alors au peuple Temberma de
développer plusieurs cultures allant des vivriers au coton. Mais ces
dernières années, les problèmes de la filière coton
dans le monde et au Togo ne sont pas passés sans y laisser des traces.
Une démotivation chez les paysans a ainsi entraîné une
baisse fulgurante des superficies emblavées et du coup celle de la
production. La majorité des paysans consacrent alors toutes les
superficies ou presque aux cultures vivrières comme le maïs, le
sorgho, le niébé, le fonio....
Et pour arriver à une production efficiente, les
paysans pratiquent une agriculture extensive sur brûlis avec une grande
préférence à la jachère qui dure plus de 5 ans
comme l'indiquent 90,6% de nos enquêtés. De plus la rotation et de
l'association des cultures sont des
pratiques aussi vielles que ce peuple. Il découle de
toutes ces formes d'utilisation du sol, d'importantes productions
céréalières.
En plus des vivriers et du coton dans une moindre mesure, il
faut noter que les Temberma pratiquent un élevage traditionnel avec les
bêtes en divagation ou attachées aux piquets. L'artisanat, la
pêche et la chasse y existent aussi mais leur pratique est de nos jours
de moins en moins répandue.
L'ensemble des produits d'élevage et agricole de
l'environnement d'étude sont déversés sur le marché
béninois à Takonta à défaut de voies de
communication pouvant conduire vers les marchés nationaux. C'est ce que
nous avons appelé l'enclavement du terroir de Koutougou. Celui-ci se
manifeste par un réseau de chemin très lâche et dont les
pistes autant rurales que automobiles sont d'une praticabilité
saisonnière. A cela s'ajoute une rivière, la Kéran qui
reste en crue durant plus de trois mois dans l'année.
Ce phénomène a des conséquences multiples
autant sur les populations qui y vivent que celles du reste du territoire
national togolais. Il s'agit sur le plan moral du développement sur
place d'un complexe d'infériorité par rapport aux autres peuples,
d'un sentiment fort d'appartenance au territoire béninois sur le plan
culturel. C'est ce qui explique même que les échanges
transfrontaliers s'intensifient dans la zone. Sur le plan sociologique, on note
une organisation du travail par rapport au marché béninois de
Takonta, seul lieu d'écoulement des produits agricoles. Quant à
la vie sociale, elle souffre de l'enclavement à cause du manque du
personnel enseignant refusant de regagner ce poste du fait de son
éloignement et faisant baisser les taux de scolarisation, de la
faiblesse de la couverture sanitaire comparativement aux autres
localités de la région. L'aspect économique des
méfaits de l'isolement est illustré par un coût de
production très élevé créé par une main
d'oeuvre chère et qui se fait rare, des coûts de revient des
intrants au-dessus du prix national et celui des outils de travail très
élevés. Aussi, les prix de vente imposés sur le
marché béninois auquel s'ajoute le prélèvement des
taxes de marché abaissent-ils considérablement la marge de
bénéfice des paysans.
Pour le reste de la population togolaise, c'est un grenier de
céréale qui leur reste inaccessible toute l'année alors
que pour l'économie nationale, c'est une perte sous deux angles. Sous un
premier angle, le manque à gagner est engendré par l'absence d'un
marché d'animation hebdomadaire sur place. Sous un autre angle, il est
établi que c'est toute une masse monétaire qui est
déversée sur les marchés extraterritoriaux par les paysans
qui y achètent produits manufacturés, outils de travail,
habillement, moyens de transport.... Tout ceci est perçu comme une perte
au plan national lorsqu'on y ajoute le fait que les intrants qui servent
à la production vivrière proviennent des réserves
nationales acquises à des tarifs
élevés et subventionnés par le gouvernement
togolais. On en conclut donc sur une note d'investissement non rentable
à cause du simple fait de l'enclavement.
Et pourtant, ce ne sont pas les raisons de justification d'un
processus de désenclavement qui manquent. Outre les potentialités
agricoles sus mentionnées, la préservation du patrimoine Temberma
étant au nombre des priorités des autorités touristiques
de notre pays, la rentabilisation des tatas de KOUTOUGOU sera non seulement un
atout économique local à l'heure de la communalisation de nos
campagnes mais aussi une raison pour mobiliser les populations à leur
préservation.
A tout considérer, on se rend bien compte que des
raisons existent pour qu'un processus de désenclavement de KOUTOUGOU
devienne une préoccupation sérieuse. Celui-ci en fait devra
s'appuyer sur des potentialités locales existantes. C'est d'abord la
disponibilité d'une vallée entre les monts Tamoungou et
Takpangou qui permettrait de relier KOUTOUGOU à Kantè
par une route de 08 kilomètres ; c'est en tout cas le voeu de 96,7% de
nos enquêtés. De plus, le désenclavement de KOUTOUGOU passe
aussi par une question d'entretien des infrastructures existantes. Ce sont les
ponts sur la Binah et sur la Kéran auxquels on doit ajouter
l'amélioration de la qualité de la piste automobile venant de
Tchitchira et qui continue vers le Bénin. Par ailleurs,
désenclaver c'est aussi prévoir une ouverture de l'espace
géographique étudié sur le reste du Togo en matière
de réseaux invisibles tels celui de la télévision, de la
radio et de la téléphonie rurale. Enfin, l'atout majeur est la
population de KOUTOUGOU qui, à partir de son CVD pense du moins dans sa
grande majorité pouvoir participer aux efforts qu'exigeront les travaux
de désenclavement de leur localité. Certains affirment pouvoir
donner une participation financière à hauteur de 1000 francs
(76,8%) ou plus (23,2%) alors que d'autres22 pensent se rendre
disponibles pour des travaux précis dans le cadre du tracé de la
route ou de l'amélioration de celle qui existe.
Dans tous les cas, un tel processus engendrera probablement
des retombées positives sur toutes les composantes de l'économie
togolaise. Les populations de KOUTOUGOU, celles de la région de la Kara
et du Togo en tireront profit ; les unes par la vente de leurs produits sur
place, les autres par les apports en vivriers. Quant à l'Etat, le
désenclavement de cette localité lui éviterait d'investir
dans la production de denrées alimentaires qui ne profite à
personne si ce n'est aux Béninois et de garantir des revenus à
partir des taxes de marchés et celles à prélever sur les
produits manufacturés qui y seront vendus.
22 58,5% des restants sont ceux là qui ne
peuvent qu'offrir leur main d'oeuvre.
C'est en tout cas l'espoir de désenclavement de leur
contrée qui fait vivre et travailler encore les habitants de KOUTOUGOU
même si cet espoir s'intensifie puis s'exaspère au fil du temps et
au rythme des campagnes électorales quand on leur demande de
débroussailler la vallée pour que les tracteurs qui doivent
arriver très prochainement commencent le travail.
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Fig. 1 : Infrastructures de transport dans la
préfecture de la Kéran 5
Fig. 2 : Situation géographique de la
zone d'étude . 29
Fig. 3 : Relief de la zone d'étude par
rapport à celui de l'ensemble de la
préfecture de la Kéran 30
Fig. 4 : Formations géologiques de la
zone d'étude par rapport à celles de la
préfecture de la Kéran . 33
Fig. 5 : Coupe d'un sol ferralitique de la zone
d'étude 35
Fig. 6 : Schéma de la vallée en
berceau de la Kéran 37
Fig. 7 : Quelques formes
géomorphologiques de la zone d'étude 38
Fig. 8: Formations végétales de la
zone d'étude par rapport à l'ensemble de la
préfecture de la Kéran 41
Fig. 9: Carte du couvert végétal
actuel dans la zone d'étude par rapport à la
préfecture de la Kéran 42
Fig. 10 : Densité de population dans la
préfecture de la Kéran 46
Fig. 11: Taille des ménages de Koutougou
par rapport à la régionale 51
Fig. 12: Répartition des
enquêtés selon leur niveau d'instruction 52
Fig. 13: Répartition de nos
enquêtés selon la taille de leurs exploitations
agricoles 68
Fig.14 : Voies de communication de la zone
d'étude 79
Fig.15 : Carte de la répartition de la
population dans le terroir de
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Récapitulatif de l'évolution de la
population, du nombre de
ménages et du nombre d'enquêtés par village
19
Tableau 2 : Données des éléments du climat,
station de Kantè, 1998 36
Tableau 3 : Evolution de la population de Koutougou de 1970
à 2005 47
Tableau 4 : Répartition des enquêtés selon la
taille des ménages 50
Tableau 5 : Division traditionnelle du travail selon le sexe
à Koutougou 62
Tableau 6 : Itinéraires techniques dans le terroir de
Koutougou 65
Tableau 7 : Rotation de quelques principales cultures dans le
terroir de
Koutougou 71
Tableau 8 : Types d'associations de cultures en vigueur à
Koutougou 72
Tableau 9 : Comparaison des prix d'exécution de certaines
opérations agricoles
selon les localités . 83
Tableau 10 : Prix de revient des intrants vivriers selon les
localités de provenance . 84
Tableau 11 : Outils de travail : Prix et durée
d'utilisation selon la provenance 85
Tableau 12 : Prix de certaines denrées alimentaires dans
quelques marchés de
la région durant la campagne agricole 2003-2004 86
Tableau 13 : Ressources sanitaires pour 1000 hab. selon les
localités en 1999
dans la région 88
Tableau 14 : Production moyenne des céréales
à Koutougou durant la campagne
agricole 2003-2004 96
LISTE DES PHOTOS
Photo 1 : Vue oblique de la rivière
Kéran 6
Photo 2 : Etat du pont sur la Kéran 7
Photo 3 : Ponceau en délabrement sur la
Binah 77
Photo 4 : Piste secondaire en mauvais
état 78
Photo 5 : Tata en délabrement à
Koutougou 92
Photo 6 : Cohabitation tata-nouveaux types
d'habitat 93
Photo 7 : Dispersion de l'habitat dans le
terroir 93
ANNEXES
115 QUESTIONNAIRE
Informations prealables :
Localité :
Nom et prénom de l'enquêté (facultatif):
Age : ans Sexe : Masculin Féminin
Situation matrimoniale : Célibataire Marié (e)
Divorcé(e) Veuf (ve)
Nombre de personnes à charge :
Niveau d'étude : Pas été Primaire Secondaire
Supérieur
1- a- Etes-vous autochtone ou allochtone ?
b- Si vous êtes allochtone, d'où venez- vous ?
c- Pour quelles raisons avez-vous migré ?
- Fertilité des sols - Abondance des terres
- Conflits familiaux - Autres :
2- Quelles activités menez-vous au cours de
l'année ? (Plusieurs réponses sont possibles)
- Agriculture - Artisanat - Pêche - Elevage
- Autres : à préciser
Donnees sucr les praticruces fonciares :
3- Comment votre communauté a-t-elle acquis son terroir
?
- Par lutte tribale - Par simple occupation
- Autre, à préciser :
4- a- Y a-t-il des limites précises au domaine foncier de
votre village ?
- Pas du tout - à peu près - Oui
b- Si Oui, quelles sont-elles ?
- Au nord : - Au sud :
- A l'Est : - A l'Ouest :
c- Par quoi délimitez-vous vos terres ?
- des arbres - des faits naturels - Autres :
5- Comment avez-vous accédé à la terre que
vous cultivez ?
- Par héritage - Par don - Par bail - Par achat
- Autre forme à préciser :
6- a- Existe-t-il dans votre village des «dieux» de la
terre ? Oui Non
b- Si oui :
- leur offrez-vous des sacrifices ? Oui Non
- Comment se font ces sacrifices ?
- Personnellement - En famille - Au sein du clan
- Au niveau du village - Autre, à préciser :
- Qui dirige ces cérémonies ?
- N'importe qui - Le chef famille - un chef de la terre
- le chef du village - Autre, à préciser :
- A quel moment de l'année faites-vous ces
cérémonies ?
- N'importe quand - Au début de la campagne agricole
- Après les récoltes - Autre, à
préciser :
7- Quel est le mode d'appropriation de vos exploitations
agricoles ?
- Individuel - Familial - Clanique - Autre :
8- Qui peut hériter des terres dans votre village ?
- Seuls les enfants mâles - Seules les filles - Tous les
enfants
- Autre, à préciser :
9- Parlez-nous de la façon dont les héritiers
gèrent les terres familiales.
- Mise en valeur commune - Partage selon le nombre d'enfants
- Partage selon la capacité d'exploitation - Autres :
10- a- La femme peut-elle disposer d'une exploitation agricole
?
- Oui - Non
b- Si Non, pourquoi ?
- Par respect à la tradition - Parce qu'elle n'en n'a pas
besoin
- Parce qu'elle ne peut l'exploiter - Autre :
c- Si oui, comment elle y accède ?
- Par héritage - Par don - Par bail - Par achat
- Autre forme à préciser :
d- Quelles cultures peut-elle pratiquer ?
- Vivriers - Oléagineux - Tubercule
- Coton
- Autres :
11- a- Pouvez-vous céder des parcelles de terre à
des étrangers qui en font la demande ?
Oui Non
b- Si oui, à quelles conditions ?
- Présentation de la boisson locale - Offre d'une
volaille et de la boisson
- Garantie d'offrir des produits agricoles en fin de campagne
- Autres formes, à préciser :
c- Si non, pourquoi ?
- Par respect à la tradition - Par insuffisance de
terre
- Autre :
12- a- Etes-vous autorisés à vendre des parcelles
de terre dans votre village ?
- Oui - Non
b- Si non, pourquoi ?
- Par respect à la tradition - Par manque de terre Autre
:
c- Si oui, à combien ?
- entre 10 et 20 000 francs l'hectare - 20 - 50 000 Francs /
ha
- Plus de 50 000 francs / ha - Autre, à préciser :
13- a- Existe-t-il des conflits dans votre village liés
à la question de la terre ?
- Oui - Non
b- Si oui, à quel niveau les situez-vous ?
- Entre des individus - Entre des familles - Entre des
villages
- Autre :
Doruruees sucr les pratiquces agricoles :
14- Trouvez-vous vos terres riches pour la production agricole
?
- Oui - Non
15- Quelles cultures pratiquez-vous ? (Plusieurs réponses
sont possibles)
- Maïs - Coton - sorgho
- Arachide - Voandzou - Haricot
- Ignames - Manioc
- Autres :
16- A quelles cultures accordez-vous plus d'importance ?
- Maïs - Coton - sorgho
- Arachide - Voandzou - Haricot
- Ignames - Manioc
- Autres :
17- Depuis combien de temps faites-vous ce travail ?
- 1 à 2 ans - 3 à 5 ans - plus de 5 ans
18- Quelle est la taille moyenne de votre exploitation ?
- moins d'un Ha - 1 à 2 Ha - 3 à 5 Ha - 6 à
10 Ha
- 10 Ha et plus
19- Quels outils utilisez-vous pour la mise en valeur agricole
?
- Houe - Daba - Coupe-coupe - Faucille
- Bâton à fouillis - Hache - Charrue
- Semoir - Tracteurs - Autres :
20- a- Assurez-vous seul l'exploitation de vos champs ?
- Oui - Non
b- Si non, qui sont ceux qui y participent ?
- Les membres de ma famille - Les voisins du village - Des
allochtones
- Des ouvriers agricoles
- Autres, à préciser :
c- Si ce sont les membres de votre famille, payez-vous leur
travail ?
- Oui - Non
d- Si ce sont les voisins du village, sous quelle forme ?
- Entraide - Invitation - Salariat agricole - Autre : ..
e- Si ce sont des allochtones, à quelles conditions ?
- Salariat agricole - Reconnaissance au don de terre - Autre
:
f- Si ce sont les ouvriers agricoles, à quelles
conditions ?
- Payement en espèce - Partage des produits - Autre :
..... .....
22 a- Comment assurez-vous la pérennité de la
fertilité des sols ?
- Par la jachère - Les engrais chimiques
- Les engrais biologiques - Autres : b- Si Jachère,
combien de temps dure-t-elle ?
- 1 à 2 ans - 3 à 5 ans - Plus de 5 ans
23- Pratiquez-vous les formes culturales suivantes dans vos
exploitations ?
- La rotation - l'association de cultures - L'assolement
24- a- Existe-t-il des organismes qui interviennent dans le
domaine agricole ?
- Oui - Non
b- Si Non, auriez-vous souhaité qu'il en existe ? - Oui -
Non
c- Si Oui, lesquels ? (Plusieurs réponses sont
possibles)
- SOTOCO23 - ICAT24 - DPAEP25 -
Autres :
d- Comment appréciez-vous le travail de ces organismes
?
- Peu satisfaisant - Satisfaisant - Très satisfaisant
25- Comment vous organisez-vous dans votre village ?
- en GPC26 - en Groupes solidaires
- en Groupement villageois - Autres :
26- a- Entreprenez-vous des activités pastorales ?
- Oui - Non
b- Si oui, comment procédez-vous ?
- Par divagation - Par attache au piquet - En enclos
- Sous la conduite d'un berger - Autre : ..
c- Qu'élevez-vous ?
- Ovins - Caprins -Volailles - Porcins
- Bovins - Autre, à préciser :
Dortrtees socio-ecortomiques :
27- Dans quel intérêt cultivez-vous les produits
agricoles ?
- Auto-consommation - Commercialisation
- Autres :
28- a- Vos récoltes couvrent-elles vos besoins
alimentaires ?
- Pas du tout - A peu près - Largement
b- Si non, quelle est à peu près la
quantité de votre production ?
- Maïs sacs - sorgho..... sacs - Haricot sacs
- Arachide .... sacs - mil .... sacs - Ignames Cal.
- Manioc ..... - Autres, à préciser :
c- Que faites-vous dans ce cas pour couvrir les besoins ?
- Achat - Solidarité des voisins - Produits de chasse et
pêche
- Autre :
d- Si oui, que faites-vous du surplus ?
- Vente - Assistance aux parents - Cérémonies
traditionnelles
- Autre :
29- a- Où écoulez-vous vos produits vivriers et
ceux d'élevage ?
- Sur place - Dans les marchés voisins - Au
Bénin
- Autres : b- Si sur place, comment ?
- Dans un marché - Directement des champs - sur les
pistes
- Dans les concessions - Autres :
23 Société Togolaise du Coton
24 Institut de Conseil et d'Appui Technique
25 Direction Régionale de l'Elevage, de
l'Agriculture et de la Pêche
26 Groupement de Producteurs de Coton
c- Si dans les marchés voisins, lesquels ?
- Kantè - Pouda - Massedena - Niamtougou
- Madjatom-Togo - Madjatom-Bénin - Solla
- Autres, à préciser :
d- Comment vous y rendez-vous ?
- à pieds - à bicyclette - à moto - en
voiture
- en charrettes - Autres :
e- Si c'est au Bénin, rencontrez-vous des
problèmes ?
- Oui - Non
f- Si oui, lesquels ?
- Difficulté de transport - Formalités
douanières
- Déséquilibre des prix - Autre, à
préciser :
30- a- Où écoulez-vous votre coton ?
- Dans les marchés autogérés - Au
Bénin
- Autres :
b- Si c'est au Bénin, rencontrez-vous des
problèmes?
- Oui - Non
c- Si oui, lesquels ?
- Difficulté de transport - Formalités
douanières
- Déséquilibre des prix - Autre, à
préciser :
31- A quoi servent les revenus financiers ? (Plusieurs
réponses sont possibles)
- à la scolarisation des enfants - à assurer la
santé de la famille
- à faire des funérailles - à construire
nos maisons
- à acheter des moyens de transport - à acheter
les outils de travail
- à participer à des réalisations
collectives dans le village
- à soutenir les parents - Autres :
Dcurtrtees sur l~histcurique et la dyrtamique de l~habitat :
32- Depuis combien de temps êtes-vous installé dans
ce village ?
- Moins de 10 ans - 10 à 30 ans - 30 à 50 ans
- Plus de 50 ans - Nous y sommes nés - Autre :
33- Pourquoi avez-vous choisi ce site ?
- Pour la fertilité de ses sols - Pour la richesse de sa
faune
- Pour la proximité de la rivière - Parce qu'il
est un refuge
34- a- Vivez-vous encore dans les tatas ? (Uniquement pour les
autochtones)
- Oui - Non
b- Si oui, accepteriez-vous de vivre sous des concessions d'une
autre forme ?
- Oui - Non
c- Si non, pourquoi avez-vous changé de type d'habitat
?
- Pour des raisons de commodité
- Pour montrer mon ascension sociale
- Parce qu'il n'y a plus aucun besoin de se défendre
- Autre :
d- De qui tenez-vous cette nouvelle forme de construction ?
- De nos parents - De nos voisins Lamba et Nawdéba
- Autres :
e- Les nouveaux types de concessions vous, paraissent-ils
commodes ?
- Oui - Non
Dcurtrtees sur l~ertclavemertt :
35- a- Accédez-vous facilement à Kantè, le
chef-lieu de votre préfecture
b- Qu'est-ce qui explique l'isolement de votre terroir par
rapport au reste des villages de la région ?
- La montagne
- Le cours d'eau Kéran
- La frontière de Bénin
- Le manque de voies de desserte
- L'impraticabilité saisonnière des pistes
- La mauvaise qualité du pont sur la rivière
- Autre :
36- a- Cet isolement a-t-il des effets non souhaitables sur vos
activités ?
- Oui - Non
b- Si oui, lesquels ?
- Mévente de nos produits
- Difficulté d'approvisionnement en intrants
- Faiblesse des prix des produits agricoles
- Absence des infrastructures socio-collectives
- Difficultés d'accès aux centres de
santé
- Difficulté de communiquer avec les parents (Uniquement
pour les allochtones)
- Autres, à préciser :
c- Dans le cas de l'accès aux centres de santé,
quelles en sont les conséquences directes sur votre vie ?
- Développement des maladies - Décès des
malades avant l'arrivée au centre de santé
- Mortalité infantile - Autre :
37- Que pensez-vous que l'on puisse faire pour vous sortir de
cette situation ?
- Améliorer l'état des pistes rurales
- Améliorer la qualité du pont sur la
Kéran
- Construire une route pour nous rallier à
Kantè
- Autre :
38- Qui selon vous doit assumer les frais de ces travaux ?
- Les pouvoirs publics - Nous-mêmes - Autre :
39- a- Seriez-vous prêt à participer aux frais que
ces travaux exigeront dans le cadre d'une mise en commun
des efforts avec les pouvoirs publics ?
- Oui - Non
b- Si oui, à quelle hauteur ?
- Moins de 1000 francs / paysan - 1000 à 2000 francs /
paysan
- 2000 à 5000 francs / paysan - Plus de 5000 francs /
paysan
c- A qui pensez-vous que l'on puisse confier la gestion de ces
fonds ?
- Au chef village - Au chef canton - Au Préfet
- A un comité villageois de développement - Autre
:
40- Qu'auriez-vous souhaité que l'on fasse dans
l'immédiat pour amoindrir les effets de l'enclavement de
votre terroir ?
Aerci pour botre collaboration.
120 TABLE DE MATIERES :
DEDICACE i
REMERCIEMENTS iiSOMMAIRE iv
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS: v
QUELQUES PRECISIONS TERMINOLOGIQUES : viINTRODUCTION
GENERALE : 1
Chapitre 1: CADRE PHYSIQUE ET HUMAIN
1.1- APERÇU GEOGRAPHIQUE 25
1.2- LE MILIEU NATUREL 31
1.2.1- Géomorphologie et géologie
31
1.2.2- Des sols diversifiés 34
1.2.3- Les éléments du climat
35
1.2.4- Un réseau hydrographique lâche
36
1.3- LA FLORE ET LA VEGETATION 39
1.3.1- La sous-zone de l'Atakora 39
1.3.2- Une savane arborée 39
1.4- UNE ZONE DE FAIBLE DENSITE HUMAINE 43
1.4.1- Une localité de peuplement très
récent 43
1.4.2- Les mouvements de la population 44
1.4.2.1- Les mouvements naturels 44
1.4.2.2- Un flux migratoire important chez les jeunes 47
1.4.3- La structure sociale 48
1.4.3.1- La structure par âge 48
1.4.3.2- Notion de famille : N'tchieda 48
1.4.3.3- Des ménages d'importante taille 49
1.4.3.4- Un faible niveau d'instruction : 51
1.4.4- La chefferie à Koutougou 52
1.4.5- La femme dans la société Temberma
53
Chapitre 2: L'ESPACE AGRAIRE DANS LE TERROIR DE
KOUTOUGOU
2.1- UN REGIME FONCIER PATRILINEAIRE 56
2.1.1- Les modes d'accès à la terre
56
2.1.2- La délimitation des
propriétés foncières 58
2.1.3- Une prédominance de la
propriété individuelle 59
2.2- LA DYNAMIQUE AGRICOLE 60
2.2.1- Le système de production 60
2.2.1.1- Les outils de travail 60
2.2.1.2- L'organisation du travail 61
2.2.1.3- Les actifs familiaux 63
2.2.1.4- Les actifs extérieurs à la famille 63
2.2.1.4.1- L'entraide : Litombiyi
63
2.2.1.4.2- L'invitation : Koutongou
63
2.2.1.4.3- Le salariat agricole :
Litombila 64
2.2.2- Le parcellaire 64
2.2.3- Les itinéraires techniques 65
2.2.4- La taille des exploitations agricoles
67
2.3- LES TYPES DE CULTURES 68
2.3.1- Les cultures vivrières 68
2.3.1.1- Les céréales 69
2.3.1.2- Les légumineuses et les oléagineux 69
2.3.2- La cotonculture, principale culture de rente
70
2.4- L'UTILISATION DU SOL 70
2.4.1- La rotation des cultures 71
2.4.2- L'association des cultures 71
2.5- LES AUTRES ACTIVITES 72
2.5.1- L'élevage 73
2.5.1.1- La volaille 73
2.5.1.2 Les petits ruminants 73
2.5.1.3- Les bovins 73
2.5.2- L'artisanat 74
2.5.3- La pêche et la chasse, deux activités
en nette régression 74
Chapitre 3: L'ENCLAVEMENT, UNE REALITE INDISSOCIABLE DE
LA VIE A KOUTOUGOU
3.1- DES CHEMINS INEXISTANTS OU IMPRATICABLES 77
3.2- LES CONTRAINTES LIEES A L'ENCLAVEMENT 80
3.2.1- Les contraintes morales et culturelles
80
3.2.2- Les contraintes sociologiques 81
3.2.3- Les contraintes économiques 83
3.2.3.1- Un coût de production agricole élevé
83
3.2.3.1.1- La main d'oeuvre 83
3.2.3.1.2- Le prix des intrants 84
3.2.3.1.2- Le coût des outils de travail
85
3.2.3.2- Des prix de vente dérisoires 86
3.3- LES MANIFESTATIONS SOCIALES DE L'ENCLAVEMENT 89
3.3.1- Sur le plan sanitaire 88
3.3.2- La question de la scolarisation face à
l'enclavement 89
3.4- DE LA NECESSITE DE DESENCLAVER KOUTOUGOU 91
3.4.1- Les tatas, véritable richesse touristique
91
3.4.2- Une importante production
céréalière déversée au bénin
95
3.4.3- Des potentialités évidentes
97
3.4.3.1- Koutougou - Kantè : 08 km à vol d'oiseau
97
3.4.3.2- Le désenclavement : une question d'entretien des
pistes rurales 97
3.4.4- Une prédisposition locale à
participer aux efforts de désenclavement 98
3.4.5- Les effets du désenclavement du terroir de
Koutougou 99
3.4.5.1- Sur le plan moral et culturel 99
3.4.5.2- Sur le plan social 100
3.4.5.3- Sur le plan économique 100
CONCLUSION GENERALE 103
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 107
LISTE DES FIGURES 111
LISTE DES TABLEAUX 112
LISTE DES PHOTOS 113
ANNEXE : QUESTIONNAIRE 115
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