INTRODUCTION
Les pays en développement vivent une situation
sanitaire de plus en plus précaire et ont pendant longtemps souffert et
souffrent encore des prestations de santé de piètre
qualité. Si des facteurs d'ordre géographique, environnemental et
économique (sécheresses ou inondations, faibles revenus
économiques, surpopulation, chute des cours des produits à
l'exportation, crise financière mondiale...) expliquent en partie cet
état de fait, d'autres raisons interviennent, impliquant la
responsabilité des gouvernements mais aussi des gestionnaires des
structures de santé.
Le Sénégal, à l'instar de bon nombre de
pays Africains, avait inscrit dans sa constitution le droit fondamental
à la santé. C'est ainsi que la totalité du financement de
la santé était à l'entière charge de l'état
Sénégalais qui allouait une part importante du budget national au
secteur de la santé pour assurer la gratuité des soins aux
populations. Dès les années 1970, il s'est avéré
que nos Etats n'avaient pas les moyens économiques pour appliquer cette
politique de gratuité des soins. Ce qui a engendré beaucoup de
difficultés parmi lesquels on peut noter :
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un manque chronique de médicaments ;
une dégradation des structures sanitaires ;
un personnel insuffisant, non qualifié et de plus en plus
démotivé ; et finalement une très mauvaise image de marque
du système de soins dans les communautés.
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En conséquence, les patients se tournent vers les
structures privées (donc chères et abordables uniquement pour les
plus aisés), les guérisseurs traditionnels et les marchands
ambulants, qui fournissent des médicaments pas chers mais de
qualité douteuse.
Pour remédier à cette situation presque
catastrophique, des mesures ont été initiées pour rendre
les soins accessibles mais avec un effort de participation des populations au
financement de la santé.
C'est ainsi que le concept de médicaments essentiels
est apparu dans les années 1970 et a été adopté par
l'OMS en 1977. Les médicaments essentiels sont ceux qui satisfont aux
besoins de la majorité de la population. À Alma Ata en 1978, le
consensus s'est fait sur leur prise en compte dans les composantes des Soins de
Santé Primaires. En 1987, l'Initiative de Bamako est venue renforcer
leur place de choix dans tout système de santé. L'Initiative de
Bamako a pour objectifs, entre autres, la promotion de la participation
communautaire à l'effort de santé et le renforcement des
mécanismes de gestion, de fourniture et d'utilisation des
médicaments essentiels.
Malgré toutes ces mesures, la situation sanitaire du
Sénégal reste difficile et même intenable dans les
hôpitaux qui, finalement manquent de tout. Dés lors, il s'est
avéré urgent de mettre en place une nouvelle politique de
santé et du médicament capable d'assurer aux hôpitaux, la
transparence, et l'autonomie dans la gestion.
C'est ainsi que, le 12 février 1998, l'Assemblée
Nationale du Sénégal adopta la loi portant réforme
hospitalière. « Le but de cette réforme est
d'améliorer les performances des hôpitaux sur le plan de la
gestion et de la qualité des soins. La réforme confère aux
EPS une grande autonomie encadrée par un conseil d'administration et
contrôlée par des mécanismes qui sont équivalents
à ceux utilisés dans les établissements publiques
».
Aujourd'hui, douze (12) années après la
réforme hospitalière, l'Hôpital Général de
Grand Yoff (HOGGY), comme la plupart des établissements publics de
santé (EPS) du Sénégal, continue toujours de rencontrer
des dysfonctionnements.
Cette situation serait inhérente à plusieurs
facteurs parmi lesquels, entre autres, on peut citer :
L'insuffisance des subventions de l'Etat. En effet, durant ces
quatre dernières années, les subventions que l'Etat du
Sénégal a allouées à HOGGY s'élèvent
à 1 300 000 000 F CFA par an ;
Le plan Sésame qui consiste en une prise en charge
intégrale des frais médicaux des personnes âgées de
plus de 60 ans par l'état. Ce plan est intervenu en septembre 2006 ;
Les charges salariales élevées ;
Les tarifs imposés par l'Etat qui ne couvrent pas les
coûts réels des prestations de
soin ;
L'insuffisance de recouvrement des créances : les cas
d'urgence sans prise en charge (les particuliers qui payent à leur
frais) ne payent presque jamais ; l'Etat qui est un gros client paie souvent
dans un délai très long.
Tous ces facteurs participent à une rareté
chronique des ressources et à un déficit de trésorerie
permanant. L'HOGGY, d'année en année, accumule les dettes qui
atteignent cinq milliards (5 000 000 000) en fin 2008. Ce qui installe la
méfiance dans le camp des fournisseurs qui diminuent, voire
arrêtent toute livraison à l'hôpital. Il s'en suit des
ruptures d'approvisionnement en produits essentiels (y compris
médicaments et dispositifs médicaux) pour le fonctionnement des
services.
C'est dans cet environnement aussi difficile que nous nous
proposons d'apporter notre part de réflexion à la recherche de
solution pour une amélioration du système d'approvisionnement et
de gestion des stocks en médicaments de l'Hôpital
Général de Grand Yoff, qui, somme toute, reste une figure de
proue du système de santé du Sénégal.
1- Problématique
Le Sénégal, à l'instar des autres pays en
voie de développement, a souscrit à l'initiative de Bamako et
s'est engagé, à travers sa Politique Pharmaceutique Nationale,
à garantir la disponibilité et l'accessibilité des
médicaments essentiels à toute la population, ainsi que la bonne
qualité des produits pharmaceutiques.
Ainsi, pour aider les EPS à s'autofinancer tout en
assurant des soins de qualité y compris la dispensation des
médicaments essentiels génériques, il est mis en place des
dépôts de vente de médicaments communément
appelés pharmacies IB.
En effet, les médicaments essentiels
génériques vendus dans les pharmacies IB sont de 30 à 50%
moins chers que les spécialités pharmaceutiques
équivalentes vendues dans les officines privées et ils sont en
plus immédiatement disponibles dans la structure sanitaire. Ces
dépôts, de par les bénéfices provenant de la vente
des médicaments, contribuent significativement aux recettes de
l'hôpital.
Ce qui pose la double problématique du financement de
la santé et l'accessibilité aussi bien financière que
géographique des médicaments essentiels.
Ces dernières années, force est de constater que
les ruptures de stocks sont longues et de plus en plus fréquentes et par
voie de conséquence les recettes découlant des ventes de
médicaments s'amenuisent progressivement comme peau de chagrin.
Parmi les nombreuses raisons des ruptures de
médicaments évoquées figurent le
désintéressement notoire des médecins vis-à-vis des
médicaments génériques et de la pharmacie IB ; la non
disponibilité des produits au niveau de la pharmacie nationale
d'approvisionnement ; la méfiance grandissante des fournisseurs qui
hésitent à livrer des médicaments à un
hôpital criblé de dette, la non maîtrise des
procédures de gestion des stocks par les gestionnaires de la pharmacie.
Toutes choses qui participent au dysfonctionnement du système
d'approvisionnement et de gestion des médicaments.
Le but de notre travail de recherche consistera à
étudier :
+ Les attitudes et pratiques des prescripteurs face aux
médicaments essentiels de la pharmacie IB de l'HOGGY,
+ La sélection visant à assurer la
disponibilité des médicaments les plus
fréquemment prescrits à l'HOGGY et enfin
+ Le système de gestion des stocks mis en place pour
maintenir le stock à des niveaux tel qu'il ne produise que peu ou pas de
rupture de stocks.
C'est dire que nous occulterons, sciemment, les
problèmes chroniques d'approvisionnement imputable dans une large mesure
aux difficultés financières de l'établissement.
Au terme de notre travail, nous nous proposons de faire un
diagnostic plus précis des problèmes posés plus haut afin
de formuler des suggestions pour que d'une part la gestion des
médicaments essentiels soit améliorée pour une meilleur
qualité des soins et que d'autre part les recettes
générées par la vente des médicaments soient
beaucoup plus importantes, apportant du coup, une bouffée
d'oxygène à la tension de trésorerie de l'HOGGY.
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