Syndrome de la guerre : lorsque le psychisme ne cesse de rappeler( Télécharger le fichier original )par Shqipe BUJUPI Institut libre Marie Haps - Assistante en psychologie 2005 |
Haute École Leonard de Vinci Institut Libre Marie Haps Bruxelles Sous le patronage de l'Université Catholique de Louvain SYNDROME DE LA GUERRE : LORSQUE LE PSYCHISME NE CESSE DE RAPPELER.... Mémorante : Shqipe Bujupi Promoteur : Mr. Eric Pierrard Mémoire remis dans le cadre de l'obtention du Diplôme d'Assistante en psychologie Année Académique 2004-2005 TABLE DES MATIERES Partie théorique Avant-propos Introduction générale Préliminaire : L'homme et la guerre Chapitre I : Kosovo : une brève histoire 1. Introduction 2. L'antiquité 3. La transmigration slave vers les Balkans 4. La domination ottomane 5. La Serbie et la Yougoslavie 6. Les manifestations de 81 7. L'abolition de l'autonomie et l'apartheid kosovar 8. Le conflit armé de 1998-1999 Chapitre II : Le traumatisme psychique : voyage au bout de l'enfer 1. La conception de Freud 2. Les conceptions contemporaines 3. La répétition dans le traumatisme et ses corollaires
Chapitre III : Les victimes et les facteurs en cause
a. Les facteurs externes 1b.3 Les polytraumatismes de guerre b. Les facteurs internes b.1 Trois sortes de vulnérabilités Chapitre IV : Les répercussions sur le sujet 1. Le viol et la torture comme instruments de guerre
2b.3 Les méthodes du tortionnaire 2. Chez l'enfant 3. Vivre en société 4. Et les réfugiés ? 5. Deuil traumatique a. Deuil compliqué b. Deuil impossible 3b.3 Le travail de deuil Chapitre V : Le syndrome psychotraumatique 1. Le syndrome de répétition 2. Les symptômes non-spécifiques 3. La personnalité traumato-névrotique (Modification de la personnalité) Chapitre VI : La prise en charge de la victime 1. L'intervention immédiate 2. L'intervention post-immédiate 3. La prise en charge à long terme a. Le problème de la demande b. Pour des vécus spécifiques - traitement spécifiques b.1 La neutralité ou la reconnaissance de la souffrance b.2 Le silence b.3 La culpabilité c. Différentes types d'approches c.1 La thérapie cognitivo-comportementale c.2 La psychanalyse c.3 La méthode cathartique c.4 L'ethnopsychiatrie c.5 Désensibilisation et reprogrammation par des mouvements oculaires 4. Le soutien social 5. La réparation Conclusion de la partie théorique Conclusion ? Partie pratique INTRODUCTION GENERALECombien de fois n'avons-nous pas entendu et même utilisé « j'en suis » ou « il en est traumatisé » sans comprendre clairement ce terme et les bouleversements profonds qui peuvent affecter les sujets. Un stage effectué à Exil nous a permis de nous intéresser et d'éclairer cette notion, notamment les traumatismes de guerre et les séquelles qui en résultent. L'objet de notre sujet de mémoire est une réflexion sur les traumatismes de guerre, particulièrement de la guerre au Kosovo. La guerre est une des plus grandes épreuves infligée à tout un peuple. Ces ravages causent des souffrances énormes dans la population. Dans le cas des victimes de guerre, par opposition à celles en temps de paix, les événements traumatogènes sont multiples et fréquentes. Les symptômes principaux en sont les reviviscences. La question principale que nous avons choisie de développer est : par quel processus, par quels mécanismes psychiques les épisodes douloureux de l'histoire de ces sujets traumatisés reviennent dans leur conscience contre leur volonté ? En aucun cas nous ne prétendons que nous avons déchiffré finement ce trouble car nous trouvons que la mémoire traumatique est extrêmement complexe à l'instar de la notion même de traumatisme. Nous avons commencé notre travail par une brève description, sous une forme préliminaire : Destruction et autodestruction de l'homme dans à la guerre. Ensuite, nous avons essayé de décrire, les grandes lignes, de l'histoire du Kosovo, afin de pouvoir comprendre le sens de la guerre dans ce pays. Dès l'ouverture du deuxième chapitre nous nous pencherons sur les traumatismes. C'est-à-dire, nous étudierons la perception de différents auteurs. Qu'en est-il de leur notion de traumatisme, de son étiologie et des types de traumatisme ? Nous nous attarderons un peu plus sur les mécanismes psychiques de reviviscence et les principaux mécanismes de défense qu'un sujet traumatisé met en place pour s'en protéger. Ne pouvant pas englober totalement ce sujet qui s'avère complexe, nous avons focalisé notre attention sur les souffrances indicibles induites par des actes de destruction délibérée notamment la torture et le viol. Nous approcherons l'intentionnalité du tortionnaire. Comment arrive-t-on à détruire psychiquement une personne, et à travers elle peut-être sa famille, sa communauté ? De quels types de souffrance s'agit-il ? Quelles sont les transformations psychiques induites chez la victime ? Comment sont-elles exprimées par la victime, par quels types de symptômes ? Les victimes de guerre sont également celles qui perdent aussi leurs proches, cela complexifie le tableau clinique du syndrome psychotraumatique. Nous avons aussi abordé le deuil traumatique repris par la sémiologie du deuil et d'Etat de Stress Post Traumatique. Le sujet traumatisé est touché aussi dans son territoire social. Nous aborderons les difficultés de l'intégration au sociale. Ce social est-il prêt à accueillir, à le recueillir ? Cependant, les traumatismes ne touchent pas seulement les adultes mais également les enfants. Très brièvement nous en présentons les répercussions spécifiques. Au cours de notre recherche, un phénomène imprévu est apparu : la souffrance spécifique des réfugiés. Ne souffrent-il pas d'une sorte de victimisation secondaire ? Ensuite, nous présenterons les symptômes du syndrome psychotraumatique repris dans le tableau clinique français. Nous avons décidé de nous appuyer sur ce tableau parce que nous pensons que sa représentation est plus complète tant au niveau des symptômes que du vécu de la victime. Néanmoins, nous présenterons aussi les critères du DSM IV qui permettent de poser le diagnostic d'ESPT. Nous terminerons la partie théorique avec la prise en charge de la victime, les différents types de thérapies préconisées par les spécialistes, et le rôle du soutien social. Par quel soutien social la victime doit-elle être soutenue ? Pour la partie pratique, nous avons rencontré différents professionnels travaillant avec une population de traumatismes de guerre. Nous avons réalisé des entretiens sur leurs lieux de travail. Ces différents entretiens répondront-il à notre hypothèse de départ ? Préliminaire : L'homme et la guerre « Les siècles passent, mais hélas le malheur des hommes, les guerres, les tortures, la persécution politique, les génocides et autres violences collectives perdurent »1(*). Dans une situation de guerre, ce que nous voyons se pratiquer par l'homme ce sont des actes de destruction délibérée. Personne n'y échappe, adulte ou enfant. Nous sommes incapables de réaliser jusqu'à quel point l'homme peut courir à sa propre destructivité, à sa désintégration en tant qu'être humain : des enfants décapités, des seins coupés, des viols, des yeux percés, et on peut donner des exemples interminables de ces cruautés pour confirmer que l'impensable peut devenir réalité : oui l'humain peut devenir inhumain. C'était une « sale guerre », dit la population kosovars, car leur arsenal de combat est fait de massacres, d'exécutions, de tortures, de viols, etc. sur les civils. « Ce sont des hommes qui construisent les ponts, et des hommes aussi qui les détruisent. Les ponts... liens entre deux rives, qui réunissent des mondes clos qui s'ignorent, ou des mondes métissés qui s'envient ; ils ouvrent à des rencontres mais peuvent aussi être attaqués pour s'approprier des territoires ou séparer des communautés. Métaphore de l'appropriation de soi par l'autre ou de l'autre par soi, de l'envie et de la haine, de l'ambiguïté du progrès, de la culture, de la nécessité de penser ce qui s'échange comme provoquant aussi de la douleur, et bien d'autres choses encore... » 2(*) (Ismaïl Kadaré : Le pont aux trois arches). Tous les auteurs disent que les traumatismes causés par l'action de l'homme sont bien différents de ceux causés par les catastrophes naturelles. D'après Günter Seidler « Les traumatismes d'origine humaine laissent des traces plus profondes que ceux déclenchés par des catastrophes naturelles, et ils sont d'ailleurs plus difficiles à traiter. En outre, nous avons pu observer à la suite du tsunami au Sri Lanka que les catastrophes naturelles incitent à former des communautés de destin, que les gens se serrent les coudes, qu'ils « font corps ». Mais quand l'ennemi ou l'agresseur est un humain, ces liens se déchirent fréquemment, les personnes touchées sont mises à l'écart et exclues de la communauté »3(*). Dans différentes régions du monde, des millions de meurtres établis, des milliers de disparus, la vie de millions de personnes affectée par des bouleversements profonds, irrémédiables, que la guerre provoque. Les traumatismes touchent ceux qui la subissent et ceux qui la mènent. Il s'agit de vies blessées dans leur chair et dans leur âme. Le temps semble ne pas pouvoir effacer les empreintes de ces « blessures invisibles ». Pour la plupart des victimes, les séquelles sous forme de PTSD signifient que plus rien ne sera jamais comme avant. À l'avenir, prisonniers de leur passé, leur vie psychique sera marquée par une compulsion de répétition dont l'expression est la reviviscence de l'événement traumatique. Que d'images d'horreur ont-elles vécues ? Pourquoi ces mêmes images se réimposent-elles avec force contre leur volonté ? * 1 Sironi, F. (2002). Les enfants victimes de torture et leurs bourreaux. www.ethnopsychiatrie.net/actu/Dinan.htm * 2 Maqueda, F. (1992). LA PURIFICATION, LES PONTIFES ET LES "PSY" : L'APPROCHE RELATIONNELLE DU TRAUMA PSYCHIQUE PAR UNE ÉQUIPE D'INTERVENANTS "PSY" HUMANITAIRES DANS LES CAMPS DE RÉFUGIÉS EN EX-YOUGOSLAVIE. Revue de psychanalyse Filigrane. Le volume 13, numéro 1. http://rsmq.cam.org/filigrane/archives/purifi.htm * 3 Günter Seidler. (2005). Une thérapie fait disparaître les symptômes - les cicatrices restent... ARTE. www.arte-tv.com/fr/histoire-societe/935372.html |
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