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Approches de solutions durables de prise en charge des réfugiés en situation d'asile: le cas du Bénin

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par Dodzi Tagbédji Romaric ADAHA
Université d'Abomey-Calavi - Maà®trise en Développement Communautaire 2009
  

Disponible en mode multipage

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Introduction

Le continent africain a connu une violence sans précédent ces deux dernières décennies1(*). Par voie de conséquences, on note des dizaines de milliers 2(*)de réfugiés politiques contraints de prendre le chemin de l'exil.

Du Libéria au Sénégal en passant par la Sierra Leone, la Guinée, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Nigeria, le Togo, la Côte d'Ivoire ... et de l'autre côté du même continent, le Tchad, le Soudan, le Zimbabwe, le Kenya, etc. des conflits internes ont entraîné des déplacements massifs de populations parties chercher asile dans d'autres contrées, dans la précarité des camps de réfugiés qui essaiment de l'autre côté de la frontière (Nasreddine, L. 2005). En concret, la question touarègue au Mali et au Niger, les idéaux ethnico-religieux au Nigeria, l'irrédentisme casamançais, le soulèvement militaire en Guinée-Bissau, les conflits post-électoraux militaro-civiles au Togo, les guerres fratricides au Libéria et en Sierra Leone en sont quelques unes des causes3(*).

Ces situations liées aux carences politiques4(*) de ces pays, qui, généralement, sont pauvres, fragilisent davantage le processus d'édification de l'Etat de droit (Tévoedjrè A, 2002). Dès lors, leur résolution mérite une attention particulière surtout dans notre Sous-Région.

La problématique du réfugié se révèle au jour au jour comme un défi que l'Afrique doit relever pour tenir sa promesse de développement. La violence, l'intolérance, l'injustice, la pauvreté, et le SIDA sont autant de maux liés à la question des réfugiés. Ainsi, HOLO, T. (2004) notifie : « l'Afrique, ce berceau de l'humanité est aujourd'hui considérée comme la terre d'élection des réfugiés. Des citoyens sont contraints de quitter leur pays, n'ayant pour seule alternative que la valise ou le cercueil, en raison soit de leur origine, soit de leurs convictions religieuses, politiques ou philosophiques. A cette masse humaine s'ajoute d'autres êtres humains qui fuient soit la misère économique, soit les conflits internes, voire internationaux dont l'Afrique est encore le théâtre privilégié ». La question des réfugiés dans notre Sous-région, est devenue une particularité vécue au quotidien en sorte qu'elle a fini par entrer dans les habitudes que d'aucuns qualifient de "fait social". De même, les réfugiés constituent de sérieuses charges supplémentaires pour les pays d'asile qui sont généralement de petits pays pauvres confrontés déjà aux problèmes de survie. Ainsi, l'arrivée massive des réfugiés ne pourrait qu'aggraver une telle situation dans ces pays (HCR, 2004).

En Afrique de l'Ouest, la République du Bénin est l'un des pays d'asile les plus fréquenté (KONAN, A.O. 2007). En effet, selon Amnesty International, « les reformes adoptées au début de l'année 1990 au Bénin ont entraîné des changements importants dans le domaine des Droits de l'Homme ainsi qu'un renforcement de l'Etat de droit ». Les réformes politiques auxquelles Amnesty International fait allusion sont le fruit de la Conférence des Forces vives de la Nation tenue du 19 au 28 février 19905(*), suite aux tensions sociales et politiques qui ont prévalu au Bénin en 1989. Quant aux changements, il faut reconnaître qu'il s'agit de l'alternance au pouvoir, de la reconnaissance de multipartisme, etc. Cette nouvelle atmosphère socio-politique qu'a connue le Bénin l'a mise sur une orbite appréciable et attrayante en sorte que les ressortissants des pays de la Sous-région encore moins ceux dont les pays sont en guerre y font leur demande d'asile. Ainsi, selon Césaire KPENONHOUN6(*), « le processus de l'édification d'un Etat de droit favorise [...] l'apaisement des tensions sociales et politiques. Et comme le Bénin vit dans contexte sous-régional où beaucoup de chefs d'Etat sont encore hostiles à l'amorce du processus de droit, les tensions sociales et politiques amènent leurs citoyens et ceux d'autres Etats africains comme d'ailleurs à s'exiler au Bénin ». Outre cette distinction particulière dont jouit le Bénin, on note sa participation aux différentes ratifications relatives au statut des réfugiés (Convention de l'ONU du 21 juillet 1951, Protocole relatif à la Convention de l'ONU du 21 juillet 1951, Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique du 10 septembre 1969, Déclaration de Carthagène sur les réfugiés du novembre 1984). Or, l'article147 de la Constitution7(*) du Bénin stipule : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie ». Tous ces éléments prédisposent une atmosphère favorable pour l'accueil des réfugiés au Bénin. Il a le devoir d'assurer la protection et l'assistance aux réfugiés exilés chez lui en attendant leur retour prochain dans leur pays d'origine, après l'établissement d'une paix durable. Car «c'est d'abord aux états qu'il incombe d'assurer la protection des demandeurs d'asile et des réfugiés qui se trouve sur leur territoire 8(*)». Ainsi, les réfugiés sont-ils accueillis dans les pays d'asile comme au Bénin, dans l'intention de retourner dans leur pays d'origine à la fin des violences et des conflits qui les ont contraint à fuir.

Dans ce cadre, la communauté internationale a pu distinguer trois solutions dites durables sur lesquelles se base la gestion des réfugiés. Il s'agit du rapatriement librement consenti (le retour dans le pays d'origine à la suite d'une paix réinstaurée), l'intégration locale (l'intégration dans le pays d'asile) et la réinstallation (installation dans un pays du Nord). Le rapatriement librement consenti est reconnu par la communauté internationale comme la meilleure des trois solutions durables car « on ne vit mieux que chez soi ». Le Bénin étant devenu l'un des pays sûr9(*) de la Sous-région, donc pays d'asile aux réfugiés, il est appelé à mettre en oeuvre ces solutions durables dans le souci de soulager la peine et la souffrance des réfugiés. Dans ce cadre, le rapatriement librement consenti proposé aux réfugiés dont les pays d'origine ont connu la paix fait l'objet de réticence en leur sein.

Cette situation de non-adhésion des réfugiés au programme de solutions durables en l'occurrence celui du rapatriement, est observée dans nombre de pays d'asile de la Sous-région. En effet, hormis le Bénin, on peut citer les cas de Guinée-Conakry et du Ghana. Or, ces réfugiés de la Sous-région proviennent des mêmes pays et sont les conséquences des mêmes conflits. Et c'est pour comprendre et cerner cet état de fait que la présente étude intitulée « Approches de solutions durables de prise en charge des réfugiés en situation d'asile en Afrique de l'Ouest : le cas du Bénin » s'évertuera.

La première partie expose la contextualisation et la problématisation de la recherche, la deuxième est consacrée à la démarche méthodologique adoptée pour l'étude et la troisième présente les résultats, leurs analyses puis les suggestions et perspectives pour des approches de solutions durables.

Mais avant toute chose, il faudrait présenter le contexte dans lequel s'inscrit cette étude et monter par suite le mobile qui le justifie.

 1- CONTEXTUALISATION DE LA RECHERCHE

1.1- Contexte et justification

Depuis la Conférence des forces vives de la Nation, le Bénin s'est fait remarqué comme l'un des pays phares de la Sous-région ouest-africaine en matière de démocratie et de respect de Droits de l'homme. Signataire des Conventions internationales relatives aux réfugiés et reconnaissant la supériorité des Traités et Conventions internationaux sur les Lois de la République comme le notifie l'article 147 de sa Constitution, le Bénin a le devoir d'accueillir et de protéger les réfugiés de la Sous-région et de partout. Ce devoir lui incombe également en tant qu'Etat souverain et indépendant appelé à partager avec ses voisins leurs peines. Reconnu dans ce cadre comme l'un des grands pays d'asile d'Afrique de l'Ouest, le Bénin compte au 1er janvier 2006, 31989 personnes dont 30294 réfugiés (HCR-Bénin, mars 2006). C'est ainsi qu'on compte plus d'une vingtaine de nationalités de personnes vivant avec le statut du réfugié en République du Bénin.

Le devoir du Bénin en tant que pays d'asile, face ces âmes en détresse, consiste à leur assurer la protection internationale, à leur  «donner un abri«, et dans la limite de ses moyens, leur apporter l'assistance. Mais ce devoir est temporaire, c'est-à-dire qu'il prend fin le jour où le calme ou la paix est rétablie dans leurs différents pays de provenance. Dans ce cas, il faut que le retour se fasse dans la dignité et la sécurité. De leur côté, les réfugiés doivent respecter les lois de la République et se conformer aux lois qui régissent leur statut durant tout le temps que va durer l'exil.

Du coup, ces personnes sans abri sont des êtres vulnérables et désespérés qu'il faut « protéger et assister ». Cela suppose la mise en place d'une politique de gestion ou du moins, d'une politique de recherche des solutions durables à leurs problèmes pour éviter un éventuel débordement socio-démographique et un exagérément dérapage géopolitique. Cela va sans dire que l'échec d'un tel défi pourrait être préjudiciable tant sur les plans économique, social et politique pour le Bénin. Dès lors, la question des réfugiés, telle que posée, constitue un problème de développement qu'il faut prendre au sérieux et traiter avec beaucoup de soin.

Dans ce cadre, la République du Bénin a, à l'instar des autres pays d'asile de la Sous-région à travers le HCR, lancé les programmes des solutions durables conformément aux dispositions que leur mise en oeuvre nécessite. Le programme sur le rapatriement librement consenti qui consiste à organiser le retour des réfugiés dans la dignité et la sécurité dans le pays d'origine une fois que la paix y est revenue et qui est reconnu comme la meilleure des solutions durables aux problèmes des réfugiés, fait l'objet de désintéressement et de non-adhésion au sein des réfugiés concernés. Cette réticence se caractérise parfois par des violences et des pressions provenant de la part des réfugiés pour exiger auprès des autorités compétentes, d'autres solutions comme la réinstallation (solution durable qui consiste à faire installer un réfugié dans un pays du Nord parce que se sentant toujours menacé dans le pays d'accueil). Cette situation prend parfois des proportions inquiétantes d'autant plus qu'elle déstabilise l'ordre public instauré par les pouvoirs publics. On se rappelle encore de la séquestration pendant des heures du Représentant Régional du HCR lors de son passage sur le site des réfugiés à Kpomassè pour exiger l'accès à la réinstallation et des soulèvements des populations autochtones du site contre une telle pratique, des violences fréquentes portées sur le personnel du HCR et de la CNAR dans leur bureau respectif. Ces méthodes fâcheuses pratiquées par les réfugiés pour réfuter le rapatriement en faveur de la réinstallation peuvent conduire à un soulèvement social dont les conséquences pourraient être incalculables pour le pays d'accueil. Au risque de voir ces mesures de revendication perdurer pour devenir une norme pour les réfugiés et pour éviter d'éventuels événements, il est nécessaire de chercher à comprendre les réelles causes et les vrais motifs qui sous-tendent cette réticence au programme du rapatriement chez les réfugiés du Bénin enfin de lui trouver des solutions appropriées. Ce travail s'inscrit dans ce contexte.

Si le contexte de la recherche et le mobile qui le justifient sont connus, il est tout de même nécessaire de présenter le champ dans lequel se fera cette étude.

1.2- Présentation du cadre physique et humain

1.2.1- Présentation physique

La République du Bénin est un pays de l'Ouest africain situé dans la zone intertropicale entre l'Equateur et le Tropique nord. Il se présente comme « un point fermé qui sort de l'Océan Atlantique ». Il est limité au Nord par le fleuve Niger, au Sud par le Golfe de Guinée, à l'Est par le Nigeria, à l'Ouest par le Togo, et au Nord Ouest par le Burkina Faso. Sa superficie est de 114763 Km2.

Excepté le Burkina Faso, le Bénin abrite sur son sol les réfugiés venant des autres pays limitrophes. C'est ainsi qu'on peut compter les Ogoni issus du Nigeria, les réfugiés togolais ainsi que des réfugiés nigériens au Bénin.

1.2.2- Population

Le Bénin compte aujourd'hui environ huit millions habitants. C'est une population jeune avec un taux d'accroissement estimé à 28%. La population béninoise est essentiellement rurale et inégalement repartie. En effet les 2/3 des Béninois vivent dans la parie méridionale où la densité est de 215 hbt/km2. Le Nord est beaucoup moins peuplé : 27hbt/km2. Parmi la vingtaine de groupes ethniques qui composent cette population, on distingue en majorité : les Fon, les Yoruba, les Bariba ou Batombou, les Adja, les Mina ou Gen, les Dendi, les Somba, les Mahi, les Aïzo, les Goun, les Brésiliens créoles.

Malgré la diversité des langues qui le caractérise, le Bénin s'est épargné des clivages ethniques et régionalistes qui rongent les pays voisins de la Sous-région dans laquelle il se trouve. Tous ces aspects positifs concourent à la paix dont il bénéficie et qui fait l'objet d'attirance et d'asile pour les réfugiés.

1.2.3- Les langues

Les Béninois parlent une cinquantaine de langues parmi lesquelles le Fongbé arrive en tête pour plus de deux millions de personnes. Ensuite viennent le Yoruba, l'Adjagbé, l'Aïzogbé, le Gengbé, le mahigbé, le Baatonum, le Somba ou le Ditamari, le Dendi, etc. La langue officielle est le Français, parlée dans l'administration, dans les écoles et le commerce. L'effort de revalorisation de nos langues à travers un large programme d'alphabétisation est enclenché avec la création d'un ministère de la promotion des langues maternelles et de l'alphabétisation.

Cette diversité de langues constitue hier comme aujourd'hui une véritable source de richesses inhérentes à l'histoire du pays, en sorte qu'elle caractérise son identité. Puisque l'hospitalité, la solidarité, la tolérance, etc. sont des vertus qui tirent leur sève nourricière de cette multiplicité de langues. Elle a réussi à constituer de façon tolérante et patiente l'histoire du pays. Cette histoire est aujourd'hui chargée d'enseignements et de leçons qui ont donné naissance à la démocratie béninoise enviée par le monde entier et qui permet à tous les réfugiés de vivre pleinement leur droit d'asile au Bénin.

1.2.4- Histoire

Proclamée indépendante le 1er août 1960, la République du Dahomey a connu une instabilité politique jusqu'en octobre 1972 où le chef de bataillon Mathieu Kérékou arrive au pouvoir par un coup d'Etat militaire. Il engage le pays dans la voie du socialisme. Le marxisme-léninisme devient l'idéologie de l'Etat. « La dictature révolutionnaire » est mise en place. En 1975, le Dahomey devient République Populaire du Bénin, change de drapeau et le Parti de la Révolution Populaire du Bénin est crée. L'Assemblée Nationale Révolutionnaire (ANR), organe membres, les commissaires du peuple, élisent le Président de la République et lui confèrent sa légitimité.

A partir de 1988, la grave crise économique mondiale, qui frappe plus particulièrement les pays en voie de développement, n'a pas épargné l'Etat Révolutionnaire du Bénin. Le retard de 3 à 6 mois dans le règlement des salaires des fonctionnaires du secteur public va entraîner des séries de grèves qui paralyseront les activités surtout économiques du pays. Le marxisme-léninisme à la béninoise a échoué. Le Gouvernement sous la pression de la rue, renonce en décembre 1989 à l'idéologie marxiste, convoque du 19 au 28 février 1990 une Conférence des « Forces Vives » de la Nation composées des Béninois de l'intérieur et de l'extérieur (surtout exilés politiques). Les Forces Vives de la Nation dénoncent le régime du Parti de la Révolution Populaire du Bénin (PRPB) et se prononcent pour un Renouveau Démocratique avec le multipartisme intégral et l'alternance au pouvoir. Le Général Kérékou s'et engagé à mettre en oeuvre de « façon réaliste toutes les décisions de la Conférence Nationale ». Un Gouvernement composé uniquement de personnalités civiles, nommées pour une période transitoire de 12 mois et dirigé par Nicéphore SOGLO, Premier Ministre désigné par la Conférence Nationale, est chargé de remettre le pays en marche et d'organiser des élections démocratiques.

La nouvelle Constitution adoptée par référendum le 11 décembre 1990 opte pour un régime présidentiel avec une nette séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Les élections législatives et présidentielles furent organisées dans le calme et la transparence. Monsieur Nicéphore Soglo est élu Président de la République. Aujourd'hui les Institutions de contre-pouvoir recommandées par la Conférence Nationale à savoir : la Cour Constitutionnelle, la Cour Suprême, la Haute Cour de Justice, la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication et le Conseil Economique et Social sont installées. Dès lors, le Bénin s'installe dans la pratique démocratique et fait figure d'exemple de l'émergence pacifique de la démocratie en Afrique, privilégié par les populations des pays voisins en guerre. Du coup, il est l'un des pays d'asile (pays sûr) en Afrique de l'Ouest.

Quels sont à présent les instruments juridiques qui définissent son cadre juridique en tant que pays d'asile ?

1.3 - Présentation du cadre juridique de l'étude

Le cadre juridique se fonde sur trois types de textes à savoir :

- les textes normatifs internationaux;

- les textes normatifs régionaux et

- les textes normatifs nationaux.

1.3.1- les textes normatifs internationaux

Les instruments juridiques internationaux se composent de la Convention de l'ONU du 21 juillet 1951 relatif au statut des réfugiés. Cette Convention constitue le pilier sur lequel se sont fondées les différentes dispositions qui définissent et régissent ce qu'est un réfugié, le statut du réfugié, un pays d'accueil ou d'asile, les principes directeurs qui les caractérisent. La Convention de l'ONU se révèle comme un instrument juridique référentiel pour la gestion du réfugié. Elle est composée de 46 articles.

Protocole relatif à la Convention de l'ONU du 21juillet 1951sur le statut des réfugiés. C'est instrument juridique qui vient élargir l'approche définitoire du concept « Réfugié »tel que prescrit dans la Convention. Puisque « de nouvelles catégories de réfugiés sont apparues depuis que la Convention a été adoptée et que, de ce fait lesdits réfugiés peuvent ne pas être admis au bénéfice de la Convention »

Statut du Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés, adopté par l'Assemblée générale dans sa Résolution 428(v) du 14 décembre 1950. C'est e Statut qui a fait naître, sous l'autorité de l'Assemblée générale des Nations-Unies, le HCR, lui permettant d'agir sous les auspices de l'ONU, en ce qui concerne les réfugiés qui entrent dans le cadre du Statut, et de rechercher des solutions durables permanentes au problème des réfugiés, en aidant les gouvernements et les organisations privées à faciliter le rapatriement librement consenti de ces réfugiés ou leur assimilation dans de nouvelles communautés nationales.

Déclaration universelle des Droits de l'Homme. Il constitue un instrument juridique, comme l'idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes les nations afin que tous les individus et tous individus et tous les organes de la société, ayant la Déclaration à l'esprit, s'efforcent, par l'enseignement et l'éducation, de développer le respect de ces droits et libertés et d'en assurer, par des mesures progressives d'ordre national et international, la reconnaissance et l'application universelles et effectives, tant parmi les population des Etats membres eux-mêmes que parmi celles des territoires placés sous leur juridiction.

1.3.2- Les textes normatifs régionaux

Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique adoptée par la Conférence des chefs d'Etat et de Gouvernement lors de sa 6ème session ordinaire (Addis-Abeba, 10 septembre 1969), entrée en vigueur le 20 juin 1974. Cet instrument juridique est venu comblé un vide que souffraient les textes internationaux lorsqu'il s'agit de leur application aux problèmes des réfugiés en Afrique. En effet, notant avec inquiétude l'existence d'un nombre sans cesse croissant de réfugiés en Afrique, et désireux de trouver les moyens d'alléger leur misère et leurs souffrances et de leur assurer une vie et un avenir meilleurs, la Convention de l'OUA a vu le jour pour redéfinir le concept « Réfugié » à l'africain et se doter des dispositions régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique.

Déclaration de l'Organisation de l'Unité africaine : des réfugiés qui ont impérativement besoin de protection international de juillet 2001. C'est un document juridique qui protège les réfugiés, les rapatriés et des personnes déplacées en Afrique.

Déclaration de Carthagène sur les réfugiés adoptée en novembre 1984 est un instrument juridique qui a été adopté pour régir des problèmes juridiques et humanitaires qui ont surgi dans la région centraméricaine, au Mexique et au Panama en ce qui concerne les réfugiés en prenant en considération la coordination et l'harmonisation nécessaires entre les systèmes universels et régionaux et les efforts nationaux. C'est un document qui détermine la conduite à suivre à l'égard des réfugiés dans la région centraméricaine.

1.3.3- Les textes normatifs nationaux

La Législation béninoise créée par Ordonnance n°75-41 du 16 juillet 1975 portant statut des réfugiés et le Décret n°97-647 du 31 décembre 1997 portant création, composition, attributions et fonctionnement de la Commission nationale chargée des Réfugiés (CNR). Les deux textes, à l'instar d'une loi, sont exécutés pour régir la gestion des réfugiés en République du Bénin (article 8 de l'Ordonnance).

Le premier, c'est-à-dire la Législation béninoise reconnaît le droit de refuge aux étrangers en tant que réfugiés tels que définissent par les textes internationaux. De même, ils reconnaissent ces deniers comme réfugiés et « ne peuvent être expulsés du territoire dahoméen que pour des raisons de sécurité nationale, s'ils se livrent à des activités contraires à l'ordre public, ou s'ils sont condamnés à une peine privative de liberté pour des faits qualifiés de crime ou de délit d'une particularité grave » (article 4). Le même document donne aux réfugiés, les mêmes privilèges et avantages que les nationaux en ce qui concerne le droit à l'éducation et le droit du travail sur le marché de l'emploi (article 5 et 6).

Quant au Décret, il a crée, défini, composé, attribué le fonctionnement la Commission nationale chargée des Réfugiés (CNR) au Bénin. En effet, elle est crée auprès du Ministre de l'Intérieur. Son siège est à Cotonou. Le Ministre de l'Intérieur, de la Sécurité et de l'Administration territoriale ou son représentant en est le Président. Il travaille en collaboration avec ses collègues surtout avec celui de la Justice, de la Législation et des Droits de l'Homme, des Affaires étrangères, de la Protection Sociale et de la Condition féminine. La Commission a pour mission de :

- reconnaître la qualité de réfugié à toute personne qui relève du mandat du Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés ou qui répond aux définitions de l'article 1er de la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, complétée par le Protocole du 31 janvier 1967 et / ou à celle de l'OUA du 10 septembre 1969 ;

- assurer la protection juridique et administrative aux réfugiés ;

- examiner les requêtes qui lui sont adressées par les réfugiés tombant sous le coup d'une des mesures prévues par les articles 31, 32 33 de Convention du 28 juillet 1951 relative au séjour irrégulier des demandeurs d'asile sur le territoire national, et de décider du maintien ou de l'annulation de ces mesure est suspendue ;

- statuer sur les demandes de révision introduite par les personnes auxquelles la Commission n'aurait pas reconnu la qualité de réfugié ;

- mobiliser et coordonner toute forme d'aide et d'assistance nationale ou internationale au profit des réfugiés ;

- coordonner les actions des structures gouvernementales, du système des Nations-Unies, des Organisations non gouvernementales et autres intervenants au profit des réfugiés (article 8).

Les articles 12, 13, 14, 15, 16 et 17 définissent la reconnaissance du statut du réfugié. Elle se procède comme suit :

- constitution d'un dossier comportant une demande manuscrite dûment signée de l'intéressé et exposant les motifs de sa requête ainsi que, dans la mesure du possible, toute pièce justificative de son identité ;

- le dépôt de dossier peut être fait à l'un des Ministères (l'Intérieur ou Affaire étrangères) ou au Bureau du HCR ;

- le président de la Commission centralise toutes les requêtes et les transmet au Comité d'éligibilité pour étude et propositions. Il convoque ledit Comté toutes les fois que le nombre ou l'urgence des affaires à examiner l'exige ;

- la décision de la Commission intervient dans les 90 jours qui suivent sa première réunion sur le cas concerné. Son silence au terme des 90 jours équivaut à une reconnaissance de la qualité de réfugié au requérant. Il en de même pour la requête en révision.

- le requérant peut être convoqué à la réunion du Comité d'éligibilité pour plus amples informations. Si régulièrement convoqué, il ne se présente pas sans excuse valable, le comité délibère ;

- le Représentant du HCR assiste en qualité d'observateur aux réunions du Comité d'éligibilité et de la Commission nationale avec voix consultative. Il peut être entendu sur chaque affaire ;

- la notification de la décision de la Commission est faite directement au postulant par son président ;

- les personnes auxquelles la qualité de réfugié n'est pas reconnue et celles qui ont perdu cette qualité se verront appliquer les textes en vigueur réglementant le séjour des étrangers en République du Bénin.

Quant à la perte de la qualité de réfugié, elle est constatée dans les cas suivants :

- lorsque la personne ne relève plus du mandat du HCR ;

- cas prévus par l'article 1er section F de ladite Convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

- cas prévus par l'article 1er section F de ladite Convention ;

- cas prévus au paragraphe 4 de l'article 1er de la Convention de l'OUA du 10 septembre 1969 ;

- lorsque les activités du réfugié porte atteinte à la sécurité nationale et à l'ordre public.

Tels sont les textes qui constituent les instruments juridiques définissant et réglementant les différentes contraintes qu'exige la gestion des réfugiés dans les pays d'accueil en général. Les instruments juridiques nationaux cités ci-dessus viennent spécifier la procédure et les modalités internes qu'exploite le Bénin dans la gestion des réfugiés en tant que pays d'asile.

Au regard de ces instruments juridiques qui définissent le contexte et les modalités d'application et de gestion des réfugiés au Bénin, il s'avère nécessaire, à présent, de présenter la situation générale qui caractérise la Sous-région ouest africaine dans la production et dans la gestion des réfugiés, avec à l'appui quelques cas.

1.4- L'aperçu général de la situation dans la Sous-région10(*)

Jusqu'en 1989, la région d'Afrique de l'Ouest avait connu des mouvements de réfugiés. Le HCR supervisait les programmes de protection et d'assistance à partir d'un bureau sous-régional à Dakar au Sénégal. En avril 1989, suite aux conflits ethniques dans leur pays d'origine, quelques 50000 Mauritaniens ont trouvé refuge au Nord du Sénégal. Vers la fin de l'année, une insurrection au Libéria a provoqué la fuite des Libériens vers la Côte d'Ivoire et la Guinée principalement. Avant la fin de 1990, le nombre des réfugiés était passé de quelques centaines à plus de 800.000 dont la majorité était d'origine libérienne et mauritanienne. Le nombre des réfugiés en Afrique a atteint 1,5 million en 1994. La période entre 1995 et 1998, en particulier, a vu la résolution de plusieurs crises politiques notamment, au Togo, en Sierra Leone, en Guinée Bissau, au Libéria, au Mali et au Niger d'où la baisse du nombre de réfugiés dans ces pays. En 2005, il y a environ 465.000 réfugiés en Afrique de l'Ouest. Le problème des réfugiés a principalement été résolu à travers le rapatriement et l'intégration locale. Depuis 1990, moins de 40.000 réfugiés ont trouvé une solution durable à travers la réinstallation.

1.5- Quelques cas de pays producteurs des réfugiés de la Sous-région

1.5.1- Le cas du Libéria11(*)

La situation des réfugiés libériens est celle qui a le plus affecté la sous région en terme de durée et du nombre de réfugiés, et par conséquent, l'impact négatif sur la sécurité. Déjà à partir de 1989, il y a eu des mouvements massifs des populations du Libéria vers la Sierra Leone, la Guinée, le Bénin et la Côte d'Ivoire, avec des mouvements directs et secondaires vers le Ghana et le Nigeria. Il y a aussi eu des mouvements considérables en direction des Etats-Unis et des autres pays occidentaux. En 1991 et 1992, une réduction du nombre de réfugiés libériens a été observée. Elle était principalement due au retour spontané et à la re-vérification. De plus, les hostilités déclenchées dans les pays hôtes en mars 1991, ont poussé près de 100.000 réfugiés libériens à être soit rapatriés ou alors transportés en Guinée. La reprise des hostilités en octobre 1992 résultait de l'exode continu dans les pays voisins. A la fin de 1996, la situation libérienne a commencé a commencé à s'améliorer résultant ainsi à quelques retours spontanés des réfugiés. En juillet 1997, les élections générales ont été organisées, résultant encore à des retours spontanés. Avant la fin de l'an 2000, quelques 377.000 réfugiés libériens avaient déjà, depuis le début du programme de rapatriement, regagné leur pays soit de manière spontanée, soit avec l`assistance du HCR. Cependant, 1999, les signes d'une éventuelle reprise du conflit avaient été observés dans la région de Lofa. Avant la fin de 1999, des incidents relatifs à la sécurité avaient pris de l'ampleur au Nord, poussant ainsi quelques 8.000 Libériens à fuir le pays pour la Guinée. La guerre civile proprement dite a repris en 2002, résultant à l'exode d'environ 100.000 Libériens, dont quelques 18.500 (chiffre rond) nouvelles arrivées en Côte d'Ivoire, 31.000 en Guinée et 40.000 en Sierra Leone.

Depuis le départ de Charles Taylor en août 2003, la signature de l'Accord de Paix, le déploiement de 15000 forces de l'ordre et la fin du processus de DDRR, une nouvelle lueur d'espoir pour la paix et la stabilité a émergé au Libéria. Environ 100.000 personnes déplacées internes sont retournées de manière spontanée depuis la signature de l'accord de paix.

1.5.2- Le cas de Sierra Leone12(*)

La situation des réfugiés en Sierra Leone a commencé avec l'insurrection en mars 1991 du Front Révolutionnaire Uni de Foday Sankoh. Avant la fin de l'année, quelques 140.000 Sierra Léonais avaient quitté le pays pour la Guinée et le Libéria, et dans une moindre mesure, la Gambie. Cet exode a continué en 1992. En 1993, quelques 40.000 réfugiés avaient quitté la Guinée et le Libéria pour retourner dans leur pays. Cependant, le conflit s'est intensifié en mi-janvier et l'exode a évidemment recommencé. Avant la fin de 1995, il y avait près de 379.000 réfugiés dans la région. 1996 était une année positive en Sierra Leone avec la tenue des élections générales et la signature, le 30 novembre 1996, de l'Accord d'Abidjan. Malheureusement, le coup militaire du 25 mai 1997 et fin 1999, quelques150.000 réfugiés Sierra Léonais se sont réfugiés dans les pays voisins. En Septembre 2000, suites aux attaques transfrontalières sur les villages guinéens par les rebelles Sierra Léonais et Libériens, le ressentiment contre les réfugiés s'est installé davantage car, ils étaient perçus comme les véritables responsables de ces attaques. Pour cette raison, les autorités ont demandé que les réfugiés, qui vivaient depuis le début des années quatre-vingt dix parmi la population guinéenne, soit transférée dans les camps. 55000 réfugiés avaient été transférés dans les nouveaux camps et 30.000 assistés à retourner dans leur pays ; certains autres réfugiés ont décidé de rester dans leur pays d'origine. Dès leur retour, de nombreux Sierra Léonais ont dû, au départ, être logés dans les camps ou dans des communautés hôtes. De la fin de l'an 2000 à la fin de 2001, la population des réfugiés libériens était passée de 400000 à 179000. En dépit de quelques revers, la situation en Sierra Leone s'est progressivement améliorée et les retours ont continué. La fin de la guerre en Sierra Leone a été déclarée en janvier 2002 et le programme de rapatriement a pris fin en 2004.

1.5.3- Le cas du Togo13(*)

La situation des réfugiés togolais a débuté en 1992 lorsque, suite à des troubles sévères d'ordre politique, les réfugiés ont commencé à fuir leur pays en direction du Ghana et du Bénin. Après quelques mois seulement, près de 300.000 réfugiés avaient déjà traversé dans ces deux pays. A partir de 1994, la situation a commencé à s'améliorer, résultant à des retours spontanés. Une opération organisée de rapatriement avait été lancée en 1995 et a continué jusqu'en 1997.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, treize ans après ces événements togolais, une nouvelle crise politique sans précédent a secoué en avril 2005 le Togo à la suite d'un hold-up électoral. Effet, après la mort du Président GNASSINGBE Eyadema, un coup d'Etat constitutionnel14(*) permettant l'installation du fils de feu Président, a été pratiqué par les barons du régime pour l'entretenir et le pérenniser. La riposte du peuple contre une telle manoeuvre politique ne s'est pas faite entendre. Conséquence, le pays s'est retrouvé dans un affrontement militaro-civile. Les premières vagues de réfugiés sont observées derrière les frontières ghanéenne et béninoise. Ces déplacements forcés de premières heures vont s'accentuer au lendemain même des élections présidentielles organisées avec ferveur et contraintes par le régime et qui ont vu porter Faure GNASSINGBE au pouvoir. On comptait alors au Bénin 24650 réfugiés togolais15(*) issus de cette crise d'avril 2005.

Les trois cas évoqués ci-dessus présentent une Afrique de l'Ouest très conflictuelle et moins stable pendant ces deux décennies. Outre la déstabilisation politico-économique de cette région de l'Afrique et la précarité sociale que ces crises ont engendrées, on note une migration forcée sans précédent des hommes, des femmes et des enfants souvent innocents fuyant les émeutes. Les solutions durables retrouvées pour pallier au mal sont-elles si idoines pour régler le problème ? La réponse à une telle interrogation nous renvoie aux résultats de cette présente recherche.

A présent, abordons la problématisation de la recherche qui, en premier lieu, note l'étude documentaire.

2- PROBLEMATISATION DE LA RECHERCHE

2.1- Revue de la littérature

La question de la recherche des solutions durables aux problèmes des réfugiés dans les pays d'asile a été abordée de diverses manières par écrivains et chercheurs. Lors de cette recherche de données théoriques, on s'est rendu à l'évidence que certains chercheurs ont remonté aux sources, c'est-à-dire aux causes qui produisent les réfugiés, d'autres se sont attaqués aux traitements auxquels les réfugiés sont soumis une fois quittés les pays d'origine, d'autres également se sont investis dans la prise en charge des réfugiés, d'autres encore se sont interrogés sur les instruments de gestion des réfugiés dans les pays d'asile, d'autres, enfin, ont abordé la situation des enfants réfugiés, etc.

En effet, Rosenhlatt (1999) l'auteur expose, après s'être interrogé sur les causes qui produisent les réfugiés dans le monde, le drame humanitaire que présente la question des réfugiés surtout en Afrique. Il s'en est rendu à l'évidence dans ses travaux que les réfugiés constituent des cibles pour les politiques du moment où ils sont pris en otage dans des conflits armés pour lesquels ils n'en sont pour rien. Ensuite, il souligne leur nature d'indésirables ailleurs car, selon l'auteur, les réfugiés portent les malheurs d'insécurité, d'instabilité et de misère pour les pays dits d'asile. Déplorant les guerres et les conflits armés comme les premières causes de production de réfugiés, Rosenhlatt en donne l'entière responsabilité aux dirigeants d'Etat et aux hommes politiques. Ainsi, pour lui, la recherche des solutions aux problèmes des réfugiés, pour qu'elles soient durables, doit être abordée essentiellement sous un angle politique et non humanitaire. Enfin, il conclut que « la seule vraie manière de résoudre le problème des réfugiés est de punir ceux-là même qui sont à l'origine des troubles ». Malheureusement, il n'en a pas donné les recettes.

Quant à Wilklinson (2005) dans son analyse théorique sur la situation des réfugiés en Afrique, en l'occurrence ceux du Darfour, il expose dans un premier temps le drame humanitaire sans précédent auxquelles hommes, femmes et enfants sont victimes dans le Darfour. Ce drame sans précédent, selon l'auteur, montre combien il est nécessaire pour les Africains de régler les problèmes africains à l'africaine. Ensuite, dans un second temps, il souligne une nette inégalité observée dans la gestion des réfugiés, entre ceux de l'Afrique et ceux de l'Europe. Parlant donc de cette inégalité, il souligne que les réfugiés des pays du Nord sont bien assistés et bien protégés que ceux des pays du Sud, alors qu'ils sont soumis (les deux types de réfugiés) aux mêmes instruments de gestion et sont régis par les mêmes instruments juridiques. Comme solution, il propose la mise en place d'une médiatisation permanente des hostilités et des drames dans les pays du Sud afin d'attirer l'attention de la communauté internationale sur la situation des réfugiés des pays du Sud dans les camps d'une part et d'inciter les donateurs à s'y intéresser d'autre part. Cela, écrit-il, permettra l'accroissement des dons pour faire face aux multiples problèmes d'assistance et de protection des réfugiés des pays du Sud. Ce point de vue final de Wilklinson, noble qu'il soit, remet par contre l'Afrique sur les rails de la dépendance vis-à-vis de l'Occident. Or, curieusement, ce problème de dépendance en est le premier abordé et déploré par le même auteur dans son étude. Il est revenu là-dessus en y montrant la nécessité.

DIENG (1993) analysant la question du réfugié, pense que c'est arbitraire de catégoriser les victimes des guerres en appelant les uns "réfugiés", en les protégeant et en les assistants parce qu'ayant simplement traversé une frontière et les autres qui subissent les exactions dans le pays d'origine, "déplacés" dont aucune protection juridique et aucune assistance organisée ne sont envisagées. Il pense qu'il s'agit là de deux types de réfugiés : les réfugiés de l'intérieur (les victimes de guerres qui n'ont pas traversé une frontière) et les réfugiés de l'extérieur (les victimes de guerres qui ont traversé une frontière). Cela permettra, selon lui, à traiter les deux types de réfugié équitablement. Dans ce cadre, il pense que la réduction des peines et des souffrances des réfugiés de l'intérieur réside dans la mise en place d'une politique où les chefs d'Etat et les hommes politiques n'auront plus à brandir en cas de conflits internes, l'argument de la souveraineté nationale pour contrer l'intervention de la communauté internationale dont le but est de protéger les réfugiés internes contre les exactions et les drames humanitaires. Pour DIENG, la souveraineté nationale perd sa raison d'être lorsque les populations ne sont pas protégées par le gouvernement d'un Etat en conflit. Il revient dans ce cas, à la communauté internationale de prendre ses responsabilités en apportant son concours de protection et d'assistance aux populations victimes de la violation des Droits humains. Pour lui, c'est déjà un début de la résolution du problème des déplacements massifs en Afrique.

Steinbruner (1992) va plus loin dans la recherche des solutions aux problèmes du réfugié. Pour lui, si les conflits perdurent et créent autant de problèmes tant dans les pays d'origine que dans les pays d'asile, c'est parce que la « communauté internationale n'a pas développé ni principes ni mécanismes de rétablissement de l'ordre civil là où il a cessé d'exister dans un Etat souverain ».Il déplore à cet effet l'inexistence d'une politique d'actions préventives et d'interventions efficaces en cas de crises. Il parle de « principe de légitimité » qui consiste à rétablir dans les pays producteurs des réfugiés, l'Etat de droit et l'ordre civil dans des circonstances où ils ont cessé d'exister. A ce titre, il revient à la communauté internationale d'y veiller, car selon l'auteur, toute action efficace doit avoir un caractère largement international. En outre, il précise qu'une telle politique de résolution du problème des réfugiés doit s'appuyer simultanément sur une large diversité de traditions politiques et culturelles. Enfin, il parle de « la dimension opérationnelle ». Elle consiste à envisager des solutions de manières préventives. En effet, les mesures préventives constituent la meilleure des solutions durables pour les réfugiés. Pour Steinbruner, l'établissement d'un Etat de droit solidaire et de rétablissement de l'ordre civil constituent des conditions sine qua non pour la paix. Ces deux points passent nécessairement par le désarmement et la dispersion des milices.

KPENONHOUN (avril 2004) a fait une étude sur la situation des enfants réfugiés au Bénin. Partant de l'hypothèse selon laquelle les enfants sont les premières victimes des guerres et sont les plus exposés aux problèmes de tout genre compte tenu de leur vulnérabilité et de leur fragilité, il aboutit aux résultats suivants :

- absence d'instruments juridiques pour la protection des enfants lors des guerres ;

- la gestion des enfants réfugiés au Bénin souffre de certaines insuffisances tant sur le plan juridique que sur le plan assistance. En effet, il souligne la non association active du HCR à la détermination du statut du réfugié comme une limite des dispositions juridiques de l'Etat béninois ;

- les enfants réfugiés au Bénin ne sont pas suffisamment associés à la gestion de leur vie ;

- l'auteur constate tout comme le HCR que toutes les solutions durables identifiées jusque-là sont basées sur l'exil. De plus, les mesures de ces solutions durables ne sont prises que de façon curative et non préventive. Enfin, il note quelques insuffisances conceptuelles aux instruments juridiques internationaux relatifs aux réfugiés en l'occurrence la Convention de l'ONU du 21juillet 1951 avec les concepts comme le non-refoulement et la non-expulsion.

En définitive, l'auteur pense que la recherche des solutions durables aux problèmes des réfugiés ne doit pas être vue seulement sous l'angle curatif comme on l'observe aujourd'hui mais plutôt qu'elles devraient se faire accompagnées par des mesures préventives. Cependant, l'auteur a oublié de nous en donner les moyens de leurs mises en oeuvre.

Le Rapport de la Réunion des Experts Régionaux d'Accra (mai-juin 2005) sur les solutions durables à la situation des déplacements forcés en Afrique de l'Ouest, présente dans le cadre de « la mise en place des solutions durables pour fournir des modèles méthodologiques », les propositions suivantes: il s'agit de la Réinstauration de l'Aide au Développement pour les réfugiés (DAR), de la promotion des trois types des solutions durables à travers les 4R (rapatriement, réintégration, réhabilitation et reconstruction). Aussi, et si possible, le développement par l'intégration sur place notamment pour les réfugiés qui restent dans les pays d'asile. Cela, précise le Rapport, permettra de cibler plus efficacement l'aide au développement afin que celle-ci soutienne l'apport aux solutions durables des réfugiés. Ce Rapport a mis en exergue les nécessités de soutenir effectivement les réfugiés dans les pays d'accueil à partir de l'aide au développement. Cependant, une inquiétude se situe sur les modalités de payement d'une telle aide, d'autant plus que le Rapport est passé sous silence là-dessus.

BOURASSA (2007) s'est interrogée sur la question des solutions durables, en l'occurrence sur la réinstallation, l'intégration locale et le rapatriement librement consenti des réfugiés de Guinée. Elle a pu se rendre à l'évidence après son étude qu'il y a un fort engouement pour la réinstallation et un désintéressement pour le rapatriement et l'intégration des réfugiés dans la société guinéenne. Ce désintéressement se traduit par le refus des réfugiés à l'assistance financière accordée par le HCR dans le cadre des activités génératrices de revenus (AGR) pour l'intégration. Ceci, dans l'espoir d'être admis au programme de la réinstallation dans un pays du Nord. Ces réfugiés dont la majorité sont des nationalités libérienne et sierra léonaise refusent de croire que la réinstallation n'est pas admise à tous les réfugiés. Selon l'auteur, les réfugiés pensent que la réinstallation constitue pour eux la seule véritable solution durable. Après avoir présenté cette réalité du terrain, l'auteur pense que la recherche des solutions durables n'emprunte pas une logique de complémentarité entre le rapatriement, l'intégration et la réinstallation, mais plutôt, traite chaque type de solution durable d'une façon autonome et isolée. Ce qui crée, selon elle, les dysfonctionnements dans l'applicabilité. Elle propose à la fin de son étude, la réflexion sur de nouvelles approches pouvant permettre une meilleure complémentarité entre les trois types de solutions durables.

Afrique relance (2007) pose la situation surhumaine des réfugiés dans les pays d'accueil en Afrique. Rapportant l'interview à lui accordée par madame Ogata SADAKO directrice d'alors du HCR à Genève, Afrique relance fait mention de l'aggravation des problèmes des réfugiés comme échec persistant de la communauté internationale d'éliminer les préjudices, la persécution, la pauvreté et d'autres causes profondes des conflits et des déplacements massifs des populations. Aussi, précise la revue, la communauté internationale a la tentation d'ignorer le problème, car l'histoire a montré les déplacements de populations ne sont pas seulement une conséquence, mais aussi une cause des conflits. Sans la garantie d'une situation sécuritaire satisfaisante, il ne peut y avoir de la paix et de la stabilité. Présentant enfin la situation aggravante dans laquelle la Sous région ouest-africaine s'est plongée à cause de la recrudescence des conflits où plus d'un tiers des réfugiés et de personnes déplacés du continent se trouvent en Afrique de l'Ouest vers la fin des années 90, l'Afrique relance jette un regard sur les pays d'asile et elle constate que ces personnes (les réfugiés) sont accueillis par des petits pays déjà pauvres, comme la Guinée qui ne sont pas à même de gérer ces afflux. Pour finir, la revue annonce, sans aucun engagement, la recherche des solutions durables pour les réfugiés de l'Afrique.

Le rapport publié sur le site www. Panos_ao.org, (2002) a analysé la situation des réfugiés dans les pays d'accueil en Afrique. "Une longue et dramatique errance" fut le titre de l'analyse. Elle a abordé les cas des traitements inhumains dont sont victimes les réfugiés sur le continent. Considérés en effet comme des parias, les réfugiés africains ne bénéficient pas du minimum tant sur le plan assistance que sur le plan protection. Le cas des milliers de réfugiés libériens et sierra léonais a été évoqué en guise d'exemple. Par ailleurs, interrogeant les mesures de gestion des conflits en Afrique, le document y identifie une faiblesse des mécanismes régionaux de gestion et y souligne sa non-intégration dans cette dimension des réfugiés. Il propose à cet effet la redéfinition des politiques d'intervention et d'assistance et des prises en charge propres. Enfin, un appel est lancé aux institutions africaines à prendre leur responsabilité au lieu d'entendre tout de la communauté internationale qui ne réagit, selon le document, que par un intérêt.

Nasreddine (2005) fait une analyse sur le caractère universel dont on se sert pour régler les problèmes de l'Afrique. Pour l'auteur, on ne peut pas régler les problèmes des réfugiés africains avec des préceptes universels. Partant de cette hypothèse, il analyse les instruments de gestion des réfugiés, il se rend à l'évidence de leur caractère universel et de leur inadéquation aux problèmes des réfugiés de l'Afrique. Il fait le même constat au niveau des instruments qui doivent s'occuper des affaires de l'Afrique. En guise d'exemple, il a évoqué le cas de la Charte africaine qui, selon lui, à partir de son préambule s'éloigne déjà des réalités africaines. Pour l'auteur, si les Structures des Nations Unies ont démontré leur incapacité à prendre en charge comme il se doit les douleurs africaines, c'est parce qu'elles ne sont pas pensées et conçues avec l'histoire et la géographie africaines. Il trouve que ces Structures sont trop larges et trop vastes et un peu spécifiques au monde occidental qui les a conçus et qui tente de les exporter sur un terrain africain où ils sont exotiques. D'où la nécessité de deux réformes : une structurelle et une organisationnelle. Ainsi, pour lui, la lutte et le traitement de la question des réfugiés en Afrique nécessitent des programmes d'action sur double plan : la géographie et l'histoire. Il met dans la géographie, la reconnaissance et la prise en compte des "caprices de la nature" en vue de lui trouver des solutions adéquates et intégrées. Dans l'histoire, il y met la résolution des litiges, des conflits qui poussent les hommes à vouloir s'exterminer les uns contre les autres. Ce volet historique, précise l'auteur, est plus important que celui de la géographie car la réussite du premier conditionne le succès du second. Puisque l'observation et l'évaluation de plusieurs cas de réfugiés permettent de conclure que chaque variante est un cas d'espèce avec ses propres caractéristiques qui nécessitent un traitement homéopathique. Ce qu'il appelle : l'inéluctable choix entre universalisme et spécificités.

YAKPA (2004) a étudié le rôle des ONG dans la protection et de l'assistance humanitaire des réfugiés au Bénin dans son mémoire. Son étude révèle qu'il y a une implication des ONG dans la gestion des réfugiés en République du Bénin. Cependant, certaines irrégularités à savoir la non-disponibilité des rapports d'activités et de certaines données et l'absence d'une politique sérieuse à rechercher des solutions à long terme y ont été soulignées. Son étude reconnaît les efforts louables des ONG dans la gestion des réfugiés au Bénin et nous renseigne le plus largement possible sur les activités qui y sont menées et les ONG qui y interviennent dans cette gestion.

NDEKO (2005) s'est investi sur l'action du HCR en faveur des enfants réfugiés au Bénin. Il note que malgré qu'il y a un effort considérable du HCR dans la gestion en faveur des enfants réfugiés au Bénin dans les domaines de la protection et de l'assistance, ces derniers sont encore victimes des mauvais traitements comme l'abus sexuel, le trafic des enfants, etc. De même, il note qu'un travail sérieux reste à faire au niveau des instruments juridiques pour la protection effective de enfants réfugiés au Bénin.

AGBADJE (2005) s'est interrogé dans son étude de mémoire sur la question de la protection internationale des personnes déplacées à l'intérieur de leur territoire. Il s'agissait pour le jeune chercheur d'analyser les instruments de gestion des déplacés. Il se rend à l'évidence que des instruments existants n'ont rien de juridique et souffrent de surcroît de nombreuses insuffisances d'ordre organisationnel. Ainsi, le caractère peu efficace de ces instruments, réside dans l'absence des instruments juridiques.

GRANERO (2005) a fait une étude sur la situation des réfugiés au Bénin. Du rapport de l'étude, il ressort que les réfugiés vivant au Bénin sont relativement bien gérés. On y note une volonté de l'Etat béninois et du HCR-Bénin à offrir à la mesure de leurs moyens, "un asile humain" aux réfugiés en République du Bénin. Comme difficultés dans la gestion, le rapport fait cas de l'insuffisance des ressources surtout financières, de la lenteur bureaucratique dans le traitement des dossiers, du manque de personnels, etc. Au niveau des réfugiés, on y note une ambition démesurée qui les conduit souvent à l'adoption des comportements exigeants et parfois violents. Enfin le rapport recommande une maximisation des ressources humaines disponibles à défaut d'en recruter. Il encourage aussi et suggère l'association réelle des réfugiés à l'initiation des activités de leur gestion.

Rapport de l'UNHCR publié en 2002 sous le titre de " les 50 ans du HCR. L'aventure devrait durer trois ans ", retrace les premières actions du HCR en Afrique datant de 1956 jusqu'à l'an 2000. Après une analyse sur les conditions et les circonstances dans lesquelles a été crée cette institution, le rapport mentionne que le HCR n'a fait qu'atténuer les souffrances des réfugiés, surtout de l'Afrique et que depuis lors, des solutions vraiment durables pour les réfugiés en Afrique n'est pas encore trouvées. La preuve est qu'on compte encore dans le monde, selon le rapport, les réfugiés issus de la guerre de Biaffra, du génocide rwandais, etc. Cette analyse pose l'éternel problème de l'adéquation des instruments internationaux conçus à l'occidental et transférés vers l'Afrique pour la résolution de ses problèmes propres à elle. Cette analyse rejoint à cet effet, celle de Nasreddine Lezzar qui parle de « l'inéluctable choix entre universalisme et spécificités ».

Rapport mondial sur les réfugiés, US Committee for refugees and immigrants, (2007) a classé le Bénin au 2ème rang sur le plan mondial après le Canada comme pays où les réfugiés sont mieux protégés. Après avoir mis en exergue les efforts de l'Etat béninois à favoriser l'intégration des réfugiés dans la société béninoise, le rapport note des insuffisances surtout au niveau de l'assistance aux réfugiés. Il note également l'engouement des réfugiés au Bénin pour la réinstallation dans les pays du Nord. Cet engouement pour la réinstallation au mépris des autres solutions amène les réfugiés à s'adonner parfois aux actes de vandalisme dans le souci de faire fléchir les autorités béninoises et surtout celles du HCR à leur octroyer le quitus de la réinstallation. Ce problème, reconnaît le rapport, sabote et parfois paralyse les activités du HCR. Malheureusement, aucune recommandation ni proposition n'a été faite à cet effet. Ce problème reste toujours pendant au Bénin et est similaire à celui qu'a révélé l'étude de Bourassa Marie-Paule en Guinée.

Au regard de tout ce qui précède, on note que les différents auteurs étudiés ont donné les points de vue divers sur la problématique du réfugié. Mais la question de retour des réfugiés dans leur pays d'origine, de leur réinstallation voire même de leur intégration n'a pas été abordée de façon concrète et précise. Les documents ont surtout porté leur intérêt sur les descriptions des situations des réfugiés, sur l'analyse des instruments de gestion des réfugiés, sur les annonciations de la nécessité d'une création des mécanismes de prévention des guerres, sur la question relative aux procédures d'urgence et des aides humanitaires, etc. Au total, les souffrances des réfugiés et les outils de leur gestion sont les thèmes évoqués et analysés. La question des solutions durables en l'occurrence celle liée au rapatriement est passée sous silence.

Ainsi, ces questions restent-elles épineuses et demeurent un gros problème dont aucune idée n'a encore élucidée.

Si les études documentaires nous ont permis de savoir comment certains auteurs ont abordé la question de la recherche des solutions durables, il n'en demeure pas moins que la problématique d'adhésion et d'acceptation des programmes relatifs à la mise en oeuvre des solutions durables surtout à celle du rapatriement dans les pays d'accueil, n'a pas été, curieusement, abordé de façon concrète par lesdits auteurs. C'est-à-dire qu'aucun des auteurs ne s'est interrogé sur le mobile et les éventuelles causes qui pourraient expliquer, à l'instar de notre étude, la réticence et le désintéressement des réfugiés à accepter ou non un programme d'un retour au pays d'origine. L'originalité de notre étude se situe justement à ce niveau précis.

Au regard de cette étude documentaire et des objectifs de notre recherche, le modèle d'étude qui nous a servi d'emprunt est circonscrit dans la section qui suit.

2.2- le modèle d'étude

Le modèle d'étude est le champ dans lequel se circonscrit la recherche. Il permet au chercheur de définir « l'espace où s'exercent diverses formes de pouvoir et où s'expriment des identités. Il reflète et exprime une culture, entendue comme des usages qui fixent des modèles de comportements, s'organisant dans des règles communes (institutions et règlements), important des valeurs, et construisant des schémas de stratégies politiques ».16(*)En effet, la mise en oeuvre des solutions durables à la situation des réfugiés présente deux principaux types d'acteurs : il s'agit des acteurs gestionnaires (directs ou indirects) et des acteurs victimes. Les premiers, c'est-à-dire les acteurs gestionnaires sont appelés à concevoir et à mettre en oeuvre les règles qui définissent les modalités de traitement et de gestion dans la recherche des solutions durables aux problèmes des acteurs victimes. Ces derniers, c'est-à-dire les acteurs victimes, doivent respecter et accepter ce que leur proposent les acteurs gestionnaires (les trois types de solution durable). Mais les acteurs victimes, n'ayant pas le choix, acceptent de respecter le règlement, mais en le renversant de façon rusée ou en l'interprétant d'une manière qui pourrait les arranger ou encore en se rangeant du côté qu'ils jugent rentable (le choix inopportun d'une seule solution durable au détriment des deux autres restantes) conformément à leurs intérêts et à leurs besoins. Du coup, on se retrouve en face des « jeux de pouvoir », de « stratégies » et de « rationalité », selon le mot de Friedberg17(*). En effet, l'analyse de l'auteur sur le phénomène de l' « organisation » dans sa généralité et dans sa dynamique même, se révèle comme structuration (les règlements officiels établis) et restructuration (les règlements officiels désabusés) des contextes dans lequel se déploie l'action collective des hommes (le choix personnel des acteurs victimes). Les interactions se cristallisent en ordres locaux contingents, provisoires et aux limites incertaines (les éventuels conflits qui naissent entre les acteurs gestionnaires et les acteurs victimes). Ceux-ci (les acteurs victimes) sont relativement autonomes par rapport aux grandes régulations politiques et culturelles d'une société (les Institutions de décision telles que le HCR et la CNAR) et mettent en question l'homogénéité et l'unité supposées du champ social dont ils soulignent le fractionnement irréductible. Pour Friedberg, « tout phénomène social peut être analysé comme le produit des comportements d'un ensemble d'acteurs qui sont liés entre eux par de l'interdépendance stratégique et dont les interactions renvoyant les uns aux autres, forment système et obéissent à un ordre local, celui-ci étant entendu comme la règle et la régulation ». Ainsi, l'ordre local produit par les jeux des acteurs sont des construits sociaux présentant un caractère contingent car pouvant être remis en question. Dans le cas d'espèce, comme le souligne si bien l'auteur, « l'apparition de nouvelles opportunités tout autant que l'apprentissage de nouvelles capacités peuvent permettre aux acteurs concernés la mobilisation de ressources nouvelles et proposer ou imposer de nouveaux problèmes comme de nouvelles solutions ».

Somme toute, l'analyse de Friedberg dans l'un de ses derniers ouvrages intitulé  « le pouvoir et la règle dynamique de l'action organisée »18(*) prend en compte le champ de notre étude qui se veut de comprendre les comportements des acteurs victimes à la réticence tels qu'analysé précédemment plus haut.

Le modèle d'étude étant défini, il convient de clarifier les concepts autour desquels va se consacrer notre étude

Quelques définitions pour clarifier les concepts qui nous serons familiers durant cette étude.

2.3- Clarification conceptuelle

Réfugié : la définition de ce concept se repose sur trois instruments importants d'application régionale : les principes de Bangkok adoptés en 1966 par ce qui s'appelait alors Comité consultatif juridique afro-asiatique (AALCC), la Convention de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA) régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique adoptée en 1969, et la Déclaration de Carthagène de 1984.

La conjugaison de ces éléments dit alors que le réfugié est une personne :

· qui craint avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques

· qui se trouve hors du pays dont elle a la nationalité

· qui ne peut ou ne veut se réclamer de la protection du pays dont elle a la nationalité ou dans lequel se trouve sa résidence habituelle et ne veut y retourner par crainte d'être persécutée.

Au plan du droit international, une personne est considérée comme un réfugié dès qu'elle répond aux critères retenus pour la définition. En appliquant ces critères, une personne n'acquiert pas le statut de réfugié parce qu'elle est reconnue comme tel, mais bénéficie de cette reconnaissance parce qu'elle est un réfugié. Toute déclaration relative au statut de réfugié précise que la personne visée est un réfugié.

Solution durable : permet au réfugié de sortir de la condition précaire de l'asile et d'entamer une reconstruction de sa vie étant entendu que la durée de l'asile devra être la plus courte possible. C'est donc tout moyen permettant de résoudre de façon satisfaisante et durable les problèmes que pose la situation des réfugiés et de leur faire mener une existence normale. Il existe trois solutions durables à savoir : rapatriement librement consenti, l'intégration locale et la réinstallation.

Rapatriement librement consenti (RLC) : est le retour volontaire d'un réfugié dans son pays d'origine pour s'y établir durablement. Le HCR ne mettra en oeuvre cette solution durable que si des conditions de sécurité et de dignité sont réunies.

Le point de départ du RLC est :

- une décision libre du réfugié basée sur une information objective.

- L'Etat d'origine dot veiller à assurer des conditions d'accès aux services de base et à mettre en oeuvre, dans la mesure du possible, des programmes de réinsertion socio-économiques en collaboration avec le HCR et d'autres agences des Nations Unies.

Le rapatriement peut être :

Spontané, lorsque le réfugié décide de renter spontanément sans informer le HCR.

Facilité, dans le cas où suit à une évolution positive de la situation dans le pays, des réfugiés manifestent le souhait de retourner dans leur pays. Le HCR peut accorder une assistance qui néanmoins sera limitée.

Organisé, après la signature des accords tripartites entre le pays d'asile, le pays d'origine et le HCR par lesquels les Etats offrent des garanties pour un retour dans la sécurité et la dignité. Le HCR, en collaboration avec d'autres partenaires organise une campagne de sensibilisation au retour. Une assistance est accordée aux réfugiés et un programme de réintégration des rapatriés est mis en place avec les partenaires.

La communauté internationale considère le rapatriement librement consenti comme une solution privilégiée car on ne vit mieux que chez soi.

Intégration locale : consiste à amener le réfugié à reconstruire sa vie dans le pays d'accueil lorsque les conditions pour un retour au pays tardent à venir. Le rôle de HCR est de promouvoir l'intégration en facilitant des initiatives de recherche d'emploi ou d'auto prise en charge. Dans ce cas, un effort d'intégration est attendu de la part du réfugié. Il doit :

- s'intéresser à la vie de la communauté d'accueil

- respecter les valeurs culturelles et les devoirs qui pèsent sur lui en tant qu'étranger

- chercher une activité génératrice de revenus pour se prendre en charge.

Les autorités du pays d'accueil doivent faciliter l'intégration en prenant des mesures pour :

- faciliter l'accès à la nationalité et aux services publics

- la protection contre d'éventuelles atteintes à la sécurité physique...

- l'insertion socio-économique : accès à l'emploi, au crédit...

Réinstallation : est un moyen de protection par lequel le réfugié peut être installé dans un autre pays d'asile dans certaines conditions bien définies.

1- la première condition est d'avoir été reconnu réfugié de manière individuelle.

2- Les réfugiés susceptibles d'être réinstallés sont identifiés par le HCR et ses partenaires sur la base des critères suivants :

- menaces graves à la sécurité physique

- victimes de violence sexuelle ou d'actes de torture

- raisons médicales graves

- les femmes à risque

- regroupement familial

- les enfants / adolescents non accompagnés

- impossibilité d'insertion après des efforts prouvés d'intégration

- les personnes âgées.

Pour pouvoir poursuivre l'examen d'un dossier, le réfugié doit satisfaire à l'un de ces critères.

3- la procédure de réinstallation est la suivante :

- le réfugié passe un entretien approfondi avec un fonctionnaire de la section Protection qui examine les besoins de réinstallation. A l'issue de l'entretien soit :

1- il ne remplit pas les critères, dans ce cas, une lettre de rejet lui sera adressée ou,

2- il répond aux critères et son dossier est envoyé au Bureau régional du HCR à Accra qui examinera la demande à son tour.

3- Si l'avis du Bureau régional du HCR à Accra est favorable, le dossier est soumis aux autorités d'un pays de réinstallation, lequel examinera la demande en fonction de ses propres critères. Après examen du dossier et entretien individuel avec le réfugié, les autorités de ce pays peuvent accepter ou rejeter la demande. Le réfugié sera informé de la décision.

4- Le Bureau régional du HCR à Accra assurera le suivi du dossier auprès des autorités du pays qui a accepté la réinstallation.

La réinstallation n'est pas un droit mais répond à une nécessité examinée par le HCR. Les cas sont examinés par le HCR de manière individuelle.

La reconnaissance prima facie : c'est une procédure de détermination collective de la qualité de réfugié selon laquelle, sauf preuve du contraire, chaque membre du groupe est considéré à première vue comme réfugié. C'est cette procédure qui est adoptée en cas d'afflux de demandeurs d'asile.

2.4- Etude du problème

En signant les Traités et les Conventions relatifs aux réfugiés, le rôle des pays d'asile est d'assurer une protection internationale aux réfugiés. Ce rôle devrait connaître son terme aussitôt que la paix est revenue dans leur pays d'origine. Cela voudrait dire que les réfugiés retournent dans leur pays une fois que les dispositions nécessaires sont réunies. D'autres mesures comme l'intégration locale ou la réinstallation peuvent être prises en cas de la durée des conflits dans les pays d'origine ou de la persécution dont les réfugiés peuvent être victimes. Dans tous les cas, le retour du réfugié dans le pays d'origine constitue, selon le HCR, la meilleure des solutions durables (HCR-Bénin, avril 2007) à cause de son caractère de double-résolution du problème : la décharge du pays d'accueil et le retour chez soi comme l'unique lieu où l'on vit mieux. Le rapport de la Réunion des Experts Régionaux sur les solutions Durables à la Situation des Déplacements Forcés en Afrique de l'Ouest tenue du 30 mai au 1er juin 2005 à Accra au Ghana, a réitéré et encouragé ce point de vue dans le cadre de la recherche des solutions durables.

La République du Bénin est l'un des principaux pays d'asile qui abritent un nombre considérable des réfugiés provenant des pays de la Sous-région KPENONHOUN, C. (2004). En effet, « au 1er janvier 2006, la population totale relevant de la Représentation régionale du HCR couvrant quatre pays à savoir Burkina Faso, Niger, Togo et Bénin était approximativement de 43340 personnes dont 2947 demandeurs d'asile. Le Bénin à lui seul abritait 31989 personnes dont 30294 réfugiés », soit un pourcentage de 73,81% du nombre total (HCR-BENIN, mars 2006). Ces chiffres dénotent que la République du Bénin est l'un des grands pays d'asile de la Sous-région. Venus essentiellement de l'Afrique de l'Ouest et de l'Afrique centrale19(*), les réfugiés sont déjà plus d'une vingtaine de nationalités en 1999 au Bénin (KPENONHOUN, 2004).

Se séparé brusquement des siens loin de toutes ses réalités, laissant derrière soi toute sa fortune pour un pays étranger souvent inconnu et y vivre pour un temps indéterminé aux dépens des "gestes humanitaires", est la chose la plus pénible au monde. Le réfugié vit au quotidien dans le désespoir hors de sa patrie et souvent au mépris de la société d'accueil. La recherche des solutions durables devient une nécessité dans les pays d'accueil puisqu'elles contribuent à alléger les souffrances, à réduire les peines de dépendance, à favoriser l'intégration et à redonner l'espoir de vivre aux réfugiés (Nations- Unies, 2007).

Protéger les réfugiés contre toute sorte de persécution, avec l'aide du HCR, en attendant l'amélioration des situations qui ont provoqué leur départ forcé de leur pays, est la mission essentielle qui est assignée au pays d'asile. Ainsi, le souci majeur du pays d'asile est d'aider les réfugiés à y trouver refuge et à y bénéficier d'une protection en attendant leur retour prochain. Le droit d'asile au réfugié a, a priori, un caractère temporaire. Tacitement, le droit d'asile pourrait perdre sa raison d'être une fois que le pays d'origine s'est stabilisé, garantissant un retour dans la dignité et la sécurité des réfugiés. Dans ce cadre, le retour de la paix dans le pays d'origine dans un temps record, constitue l'une des conditions sine qua non pour le rapatriement.

Au Bénin, la plupart des réfugiés qui y vivent proviennent des pays de la Sous-région ouest-africaine comme le Togo, la Côte d'Ivoire, le Nigeria, la Guinée-Bissau, le Libéria, etc. et des autres contrées de l'Afrique telles que le Tchad, la République Démocratique du Congo, l'Angola, etc (pré-enquête, mars 2007). Aujourd'hui, nombre de ces pays ont retrouvé leur vitalité et un rétablissement de la paix. Dans le souci de la recherche des solutions durables à leurs situations, le HCR-Bénin et la CNAR ont proposé le rapatriement, première solution durable aux réfugiés concernés. Les conditions nécessaires sont prévues pour leur rapatriement dans la dignité et la sécurité (Pré-enquête, mars 2007). Mais les réfugiés concernés par ce programme en expriment leur réticence et n'y adhèrent pas malgré toutes les actions de sensibilisation menées par le HCR (pré-enquête, mars 2007). Cette réticence au rapatriement librement consenti se ferrait certainement en faveur d'autres choix que seules les recherches pourraient révéler.

Eu égard tout ce qui précède, les questions suivantes se posent: pourquoi les réfugiés expriment-ils leur réticence au programme du rapatriement ? Quelles en sont les causes ? Comment y remédier ? La recherche de réponses à ces questionnements nous amène à émettre l'hypothèse suivante :

2.4.1-Hypothèse

Les réfugiés sont réticents et se désintéressent du programme du rapatriement parce qu'ils veulent bénéficier de la réinstallation dans les pays tiers des continents américain européen.

Cette hypothèse sera la base qui va guider les recherches en vue d'atteindre les objectifs.

2.4.2-Objectif principal

L'objectif principal de notre recherche est de comprendre les motifs et causes qui sous-tendent la réticence et le désintéressement des réfugiés à adhérer au programme de rapatriement en République du Bénin.

2.4.3-Objectifs spécifiques

De manière spécifique, il s'agit :

1- identifier les motifs et causes de la réticence et du désintéressement des réfugiés à adhérer au programme du rapatriement en République du Bénin.

2- connaître les sources de ces motifs et causes

3- faire des suggestions pour y remédier

Pour conduire à bien notre étude, il convient de définir la démarche méthodologique à suivre.

3- DEMARCHE METHODOLOGIQUE

3.1- Type d'enquête

Cette étude se propose de comprendre les motifs et causes qui sous tendent la réticence et le désintéressement des réfugiés à adhérer au programme du rapatriement en République du Bénin. Pour y parvenir, les travaux de recherche entrepris se distinguent et se basent sur une étude de type qualitatif et quantitatif. Etude de type qualitatif et quantitatif parce que l'une sans l'autre ne sera pas suffisante à elle seule pour cerner les contours de nos questionnements.

3.2- Population d'enquête

C'est l'ensemble des individus ou des éléments concernés par notre étude. Elle concerne les réfugiés en tant qu'acteurs victimes, les différents acteurs gestionnaires directs (le HCR et la CNAR) et les différents acteurs gestionnaires indirects (le CPPS, la CARITAS, l'Amnesty International, etc.)

- les acteurs gestionnaires directs : il s'agit des Institutions internationales (HCR) et nationale (CNAR). Ce sont elles qui, conformément à la mission qui leur est dévolue, définissent les politiques, les stratégies, conçoivent les plans d'action et mobilisent les moyens nécessaires pour la gestion des réfugiés. Il s'agit :

- du service de la détermination du statut du réfugié de la CNAR : cette institution est gouvernementale et est chargée de déterminer le statut du réfugié au sein des demandeurs d'asile. A ce titre, nous avons estimé qu'elle est bien placée pour nous parler au nom du gouvernement du Bénin, des mesures de solutions durables qui y sont prises dans le cadre de la gestion des réfugiés d'une part, et les difficultés y afférents d'autre part ;

- du service de la protection du HCR : ce service assure plusieurs activités au sein du HCR-Bénin dans le cadre de la gestion des réfugiés. Pour ce faire, il est habileté à nous fournir des informations nécessaires relatives aux questions de solutions durables, plus spécifiquement sur la réinstallation et le rapatriement des réfugiés au Bénin.

- Les acteurs gestionnaires indirects : il s'agit des Organisations Non Gouvernementales (ONG) qui sont en partenariat avec le HCR. Elles ont pour mission de mettre en exécution les programmes, les plans d'action et les stratégies définies par le HCR. On y trouve dans cette catégorie, les ONG telles que : le CPPS, la CARITAS et Amnesty International. Dans le cadre de nos investigations, le CPPS a été ciblé compte tenu de sa large intervention. En effet, le Centre Panafricain de Prospective Sociale (CPPS) est une ONG partenaire opérationnelle du HCR. Elle s'occupe de l'éducation, de la formation professionnelle et de l'insertion socio-professionnelle des réfugiés au Bénin. Ce qui le met en contact permanent avec les réfugiés de toutes les catégories socio-professionnelles (étudiants, coiffeurs, ménagères, apprentis (es), électriciens, frigoristes, maçons, etc.)

Enfin, il y a les réfugiés encore appelés dans le cas d'espèce les acteurs victimes. Il s'agit notamment des réfugiés ayant trouvé asile en République du Bénin.

3.3- Echantillonnage

C'est la portion retenue de l'effectif total (population d'enquête). Il est composé des différents acteurs (victimes et gestionnaires) concernés par l'étude. Dans ce cadre, l'échantillonnage de notre étude se compose de deux types de méthode : la méthode dite à choix raisonné et la méthode de l'échantillonnage sur place.

3.3.1- Echantillonnage à choix raisonné

L'échantillonnage à choix raisonné nous a permis de choisir les agglomérations où résident fortement les réfugiés qui constituent notre population d'enquête. Il s'agit de :

- l'agglomération de Cotonou pour les réfugiés en formation professionnelle ;

- l'agglomération d'Abomey-Calavi pour les réfugiés étudiants.

Autrement dit, les acteurs victimes choisis et qui ont été enquêtés dans le cadre de notre étude sont des agglomérations d'Abomey-Calavi et de Cotonou.

3.3.2- Echantillonnage sur place

C'est une méthode qui consiste à enquêter les sujets en les regroupant à un lieu ou à aller vers eux sur leurs lieux de travail ou de regroupement.

Les réfugiés du Bénin, hormis ceux qui sont logés sur les sites de Kpomassè et d'Agamè une fois venus au Bénin, se concentrent dans les centres urbains tels que Abomey-Calavi, Cotonou et Porto-Novo, pour diverses raisons : s'approcher des institutions qui se chargent de leur gestion, chercher de l'emploi, poursuivre les études supérieures, etc. (pré-enquête, mars 2007). Cependant, ils ne vivent pas ensemble comme ce peut être sur les sites ; ce qui explique la difficulté de les rencontrer et d'échanger avec eux si ce n'est pas seulement les mardis où les audiences du CPPS sont ouvertes à eux au siège de la CNAR pour exprimer leurs préoccupations diverses relatives à l'éducation, à la formation professionnelle et à l'insertion socio-professionnelle.

En outre, les jeudis, les réfugiés à la recherche de l'assistance et des services liés à leur statut, fréquentent le siège de la CARITAS. C'est aussi l'occasion au cours de laquelle on rencontre la majorité des réfugiés du Bénin venus de partout du territoire exposés leurs préoccupations (pré-enquête, mars2007).

L'échantillonnage sur place s'est donc révélé pour nous comme l'ultime choix fiable et approprié pouvant nous permettre de recueillir des informations auprès des réfugiés. Il s'est organisé de façon la plus simple possible : dans un premier temps, à la CNAR (un mardi) et dans un second temps à la CARITAS (le jeudi suivant). Il s'est consisté à amener les réfugiés à remplir la fiche de questionnaire.

3.3.3- Taille de l'échantillon

La taille de l'échantillon porte sur l'effectif total des acteurs sélectionnés au niveau des trois (03) groupes cibles que sont : deux acteurs directs (un responsable du service de la protection et un responsable du service de la détermination du statut du réfugié à la CNAR), un acteur gestionnaire indirect (le Directeur du CPPS) et 62 acteurs victimes. En d'autres termes, la taille de l'échantillon est le point du nombre des acteurs sélectionnés avec lesquels le sujet de recherche sera abordé.

Pour conduire cette étude, 65 sujets ont été retenus pour nous fournir des informations.

Ces 65 sujets se composent comme suit :

?3 sujets (acteurs gestionnaires) qui sont :

- un responsable du service de la protection du HCR ;

- un responsable du service de la détermination du statut du réfugié de la CNAR ;

- le directeur de l'ONG CPPS.

?62 sujets (acteurs victimes)

Les acteurs victimes se composent des réfugiés de tous les statuts : étudiants, coiffeuses, hôtelières, maintenanciers, informaticiens, chômeurs, ménagères, revendeuses.

Au total, nous avons comme taille de l'échantillon, 65 sujets à enquêter.*

3.4- Techniques et outils de collecte des données

3.4.1- Les techniques

Pour collecter les informations auprès de l'échantillon et conduire notre recherche au bout, nous avons utilisé quatre techniques :

3.4.1.1- La pré-enquête

Elle s'est déroulée en mars 2007. Il s'est agi pour nous de descendre sur le terrain en particulier auprès des acteurs gestionnaires directs (CNAR et HCR), des acteurs gestionnaires indirects (CPPS et Amnesty International) pour nous enquérir des informations relatives à la gestion des réfugiés de façon générale et ceux liés à la mise en oeuvre des solutions durables au Bénin en particulier. Ce qui nous a permis d'affiner notre questionnaire et notre grille d'entretien.

3.4.1.2- L'étude documentaire

Elle nous a permis d'avoir des informations très riches et diversifiées sur la problématique du réfugié. C'est une étude qui nous a fait part, de façon approfondie, des problèmes liés aux solutions durables de la question des réfugiés. En outre, elle nous a permis de connaître la situation mondiale, continentale, régionale et nationale sur la question. Bref, l'étude documentaire nous a fourni des informations nécessaires pour comprendre mieux la question du réfugié en situation d'asile.

3.4.1.3- L'enquête par questionnaire

Elle a été adressée aux acteurs victimes (les réfugiés). Elle nous a permis de recueillir les données qui expliquent leur réticence et leur désintéressement au programme de rapatriement.

3.4.1.4- L'entretien individuel

Il s'est tenu avec les acteurs gestionnaires directs et indirects (un responsable de chacun des services de Réinstallation et de Rapatriement, et du Directeur du CPPS). Il nous a permis de mieux apprécier les informations liées à nos questionnements de recherche. C'est aussi la phase au cours de laquelle, on nous a fait part des difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre du programme du rapatriement en tant que solution durable privilégiée.

3.4.2- Les méthodes de collecte des données et d'analyse

3.4.2.1- La méthode de collecte des données

Pour collecter les données de l'enquête par questionnaire, nous avons assisté les sujets au remplissage des questionnaires séance tenante. Ceux non instruits ont été aidés dans la transcription fidèle de leurs opinions, nous permettant ainsi d'éviter les mauvais remplissages et les pertes de fiches de questionnaire. Il faut souligner que l'enquête portée sur les acteurs victimes, c'est-à-dire, l'enquête du type quantitatif s'est déroulée à Cotonou en deux lieux : à la Coordination Nationale de l'Assistance pour les Réfugiés (CNAR) et à la CARITAS. Quant à l'entretien, il s'est déroulé à Cotonou au HCR et à la CNAR puis à Porto-Novo au CPPS. Le contenu des discours a été enregistré sur support magnétique et retranscrit.

3.4.2.2- Le traitement des données

Les informations recueillies à partir des questionnaires ont été traitées manuellement : dépouillement, numérotation et codage. Les questions étant numérotées au départ, le travail s'est révélé facile lors du dépouillement et de l'exploitation. Pour les entretiens, le traitement des données a consisté à l'analyse des informations recueillies qui représentent des points de vue des différentes personnes interviewées après leur transcription.

3.5- Les difficultés rencontrées

L'investigation sur le terrain s'est révélée très difficile contrairement à ce que nous avions pensé au départ. En effet, au niveau des réfugiés (acteurs victimes), il faut souligner que ce sont des gens qui sont très méfiants et très prudents. Au départ, ils ont refusé catégoriquement de répondre aux questionnaires. Ils disent être victimes des manipulations et qu'il s'agit d'une enquête conçue pour les identifier et les amener à rentrer par force dans leur pays d'origine où ils sont sur la « liste noire ». Il a fallu assez de patience et beaucoup d'explications avec à l'appui notre carte d'étudiant pour qu'ils puissent (certains) accepter de se confier à nous à travers les questionnaires. D'autres ont exigé que nous leur rassurions à partir d'un écrit signé avec nos coordonnées que les informations sont juste destinées pour les fins exclusives d'un mémoire. Ce qui fut fait. Telles sont les difficultés rencontrées sur le terrain lors de nos investigations.

Par ailleurs, la conciliation des études de l'année académique et les recherches n'a pas été chose aisée. Ce qui a expliqué nombre de difficultés à répondre aux rendez-vous fixés par les acteurs gestionnaires. La question d'appui financier pour conduire les recherches à terme est un fait qui nous a fait défaut.

En outre, ce travail a failli nous coûter la vie avec l'inoubliable accident de circulation que nous avons fait à la veille de la rencontre prévue avec les réfugiés, lors des préparatifs. Nous en avons traîné les séquelles pendant plus d'un mois. Aussi, avons-nous été confronté au problème financier pour conduire les travaux au terme.

Cependant, toutes ces difficultés ne nous ont pas empêché d'aller jusqu'au bout. Bien au contraire, notre engagement s'est renforcé, la détermination et la soif des résultats qui nous animaient, se sont accrues. Ce qui explique la présence des résultats obtenus.

4- PRESENTATION DES RESULTATS

Les résultats des investigations seront présentés en deux points mais de la façon suivante :

- les résultats de l'enquête par questionnaire adressée aux acteurs victimes (les réfugiés). Ils seront catégorisés et repartis dans des tableaux ;

- les résultats issus des guides d'entretien individuel adressé aux acteurs gestionnaires directs (CNAR et HCR) et de l'acteur gestionnaire indirect (CPPS). Ils seront transcrits et annexés au document. Nous en servirons dans la partie analyse.

4.1- Les résultats de l'enquête par questionnaire adressée aux acteurs victimes

Tableau 1 : récapitulatif des identifications sur les sujets enquêtés

Pays d'origine

Nombre de sujets enquêtés

Hommes

Femmes

Tranche

d'age

Durée d'asile

TOGO

37 (59,67%)

16

21

37 à 20 ans

15ans (8sujets) ; 3ans (29 sujets)

RWANDA

5 (8,06%)

2

3

28 à 24 ans

9ans

LIBERIA

6 (9,67%)

5

1

26 à 32 ans

15ans

TCHAD

8 (12,90%)

6

2

28 à 42 ans

8ans

COTE D'IVOIRE

3 (4,83%)

2

1

15 à 28 ans

5ans

ANGOLA

2 (3,22%)

2

0

27 à 29 ans

9 ans

R D C

1 (1,61%)

1

0

28 ans

2ans

Total

62 (100%)

34

28

_

_

Ce tableau récapitulatif présente le nombre de femmes, d'hommes, la tranche d'age, la durée d'asile, les nationalités d'origine des acteurs victimes (réfugiés) enquêtés. Il regroupe sept (7) nationalités différentes. Parmi celles-ci, on constate que la nationalité togolaise domine très largement (soit 59, 67 % du nombre total des enquêtés). Cet écart explique le fort taux que représente cette nationalité parmi les réfugiés en asile au Bénin. Quant à la tranche d'âge, elle se situe entre 15 à 42 ans. La durée d'asile, quant à elle, va de 15 à 2 ans. Les Libériens et les Togolais sont les plus « vieux » réfugiés en République du Bénin et les plus « jeunes » sont les Congolais de la RDC (2ans) et les Ivoiriens (5ans).

4.1.1-Résultats relatifs aux causes d'asile

Tableau 2 : répartition des acteurs victimes selon les causes d'asile

Nombre

%

Causes de départ du pays d'origine

29

46, 77

Conflits post-électoraux

28

45, 16

Conflits inter-ethniques

05

08, 06

Troubles socio-politiques

Total 62

100

_

Ce tableau montre que trois grands événements constituent les causes qui contraignent le départ des réfugiés de leurs pays pour le Bénin, dont les plus fréquentes sont les conflits post-électoraux et inter-ethniques.

4.1.2- Résultats relatifs aux raisons ayant motivé le choix du Bénin

Tableau 3 : récapitulatif des raisons motivant le choix du Bénin en tant que pays d'asile

Nombre de sujets

%

Raisons motivant le choix du Bénin comme pays d'asile

30

48, 38

Le Bénin est un pays de paix et de démocratie

19

30, 64

Le Bénin est géographiquement proche du pays d'origine

09

14, 51

Le Bénin est un pays de transit pour accéder aux pays du Nord

04

06, 45

Le Bénin offre des facilités pour la reconnaissance du statut du réfugié

Total 62

100

_

Le tableau 3 présente les éléments qui motivent les réfugiés à venir se réfugier au Bénin. On comprend que les raisons sont diverses et varient. La plupart (soit 48, 38%) des personnes enquêtées ont avancé comme raison que le Bénin est un pays démocratique et de paix. Il y a également les raisons géographiques, de facilité d'accès au statut du réfugié et aussi de facilité d'accès à la réinstallation.

4.1.3-Résultats relatifs à l'appréciation des conditions d'asile au Bénin

Tableau 4 : les conditions d'asile au Bénin

Nombre de sujets

%

Appréciation des conditions d'asile

Raisons évoquées

29

46, 77

Très Mauvais

Pas d'assistance (3 kg de riz depuis 3 ans) ; les réfugiés sont traités mépris ; il y a trop de tracasseries dans les formalités d'accès aux oeuvres sociales ; privation des biens aux réfugiés ; corruption des employés des Organisations ayant en charge la gestion des réfugiés.

14

22, 58

Mauvais

Pas d'emplois ; pas de quoi manger ; pas d'abri ; les réfugiés sont des parias et vivent par hasard

13

20, 96

Bien

Il y a la paix au Bénin ; on y dort bien et il y a aussi la sécurité

04

6, 45

Moins Bien

Pas d'assistance ; les réfugiés sont laissés à eux-mêmes

02

3, 22

Très bien

Il y a la paix et la sécurité au Bénin

Total 62

100

_

_

A partir de ce tableau, on voit les différentes tendances relatives à l'appréciation des conditions d'asile au Bénin. Les raisons évoquées par chaque tendance peuvent être catégorisées en deux points essentiels : le premier est ceux qui trouvent les conditions d'asile décevantes avec pour raisons la quasi inexistence de l'assistance et la difficulté d'accès à un emploi, la misère qu'ils côtoient. Le second montre que les conditions d'asile au Bénin sont acceptables, évoquant comme raisons l'existence de la paix, de la démocratie et de la sécurité dont ils bénéficient.

4.1.4-Résultats relatifs à la jouissance de la Protection internationale

Tableau 5 : appréciation sur la protection des réfugiés au Bénin

Nombre de sujets

%

Jouissance de la Protection

Source de menaces

Les auteurs des menaces

48

77, 42

Oui

_

_

14

22, 58

Non

Pays d'origine

Les autorités politiques (Selon 9 sujets 14, 51%)

Total 62

100

_

_

_

Le tableau 5 présente deux réponses différentes sur la question de la protection des réfugiés. 77, 42% des enquêtés disent être en sécurité au Bénin. 22, 58% pensent le contraire. 14, 51% de ces derniers disent être menacés par les autorités politiques de leurs pays.

4.1.5-Résultats relatifs au retour au pays d'origine

Tableau 6 : positions des réfugiés sur le retour au pays d'origine

Nombre de sujets / pourcentage

Retour au pays

Les conditions d'un retour

Raisons évoquées

24 ( 38, 70%)

OUI avec conditions

Le pouvoir doit d'abord changer de régime avec des hommes nouveaux et neutres ; la paix doit revenir de façon définitive prouvée par les compatriotes qui sont encore au pays ; le régime qui est là doit partir d'abord car actuellement, « c'et tel père tel fils » ; une volonté manifeste du gouvernement à changer les choses de manière positive

_

38 (61, 30 %)

NON

_

Les autorités ont les noms de ceux qui ont fui lors des événements ; il y a actuellement la chasse aux sorcières au pays ; c'est les poursuivants qui sont encore au pouvoir ; on se souvient encore des mauvaises images et des mauvais souvenirs (perte des parents, des frères, amis, etc.) ; on n'a plus personne au pays, chacun a pris son chemin lors de la guerre.

Les résultats que présente ce tableau sont de double facette. La première (38,70%) expose les conditions qu'il faut pour le retour au pays d'origine (le rapatriement). La seconde facette (61, 30%) montre que le retour au pays d'origine est impossible basée sur diverses raisons précises. Le débat d'un retour au pays d'origine n'est pas encore opportun selon les résultats que présente le tableau.

4.1.6-Résultats relatifs à la réinstallation

Tableau 7 : positions des réfugiés sur la réinstallation

 

La réinstallation comme un droit de vie meilleure du réfugié

La réinstallation comme la fin des difficultés du réfugié

La réinstallation est un canal par lequel on peut joindre un pays du Nord

Nombre des sujets/ Pourcentage

36 soit 58, 06%

20 soit 32, 26%

06 soit 9, 68%

Le tableau 7 présente trois tendances de conception des réfugiés sur la réinstallation. Elle se présente pour 58,06 comme un droit de vie meilleure du réfugié, pour 32, 26% comme la fin des difficultés du réfugié et pour 9, 68% comme un canal par lequel on peut joindre un pays du Nord. Le tableau expose la réinstallation comme un point de mire pour les réfugiés.

4.1.7- Résultats relatifs à l'accès aux formations professionnelles

Tableau 8 : récapitulatif des opinions sur la formation professionnelle

Profession

Nombre de sujets / Pourcentage

36 soit 100%

La réinstallation permet de :

Couturières

8 soit 22, 22%

- faciliter la réinstallation dans un pays tiers (22 sujets soit 61, 11%) ;

- s'autosuffire (08 sujets soit 22, 22%)  ;

- s'intégrer (04 sujets soit 11, 11%)

Coiffeuses

13 soit 36, 11%

Chauffeurs

06 soit 16, 66%

Maintenanciers

04 soit 11, 11%

Hotetilières

03 soit 08, 33%

Revendeuses de pain (dossiers en instance)

02 soit 5, 56%

Les résultats que présente ce tableau montre que sur les 62 sujets enquêtés, 36 soit 58, 06% sont en formation professionnelle. Autrement dit, les 36 sujets enquêtés sur la question, trois types de versions en découlent. La formation professionnelle se révèle pour certains (61, 11%) comme un parchemin facilitant la réinstallation dans un pays tiers. Pour d'autres (22, 22%), la formation professionnelle permet au réfugié de s'autosuffire. La troisième version (11, 11%) dit que la formation professionnelle permet au réfugié de s'intégrer au Bénin.

4.1.8- Résultats relatifs à l'accès aux études universitaires

Tableau 9 : récapitulatif des opinions sur les études universitaires

Entités universitaires

Nombre de sujets 23 pourcentage 100%

L'accès aux études universitaires permet de :

FLASH

17 ( 73, 91%)

- faciliter la réinstallation dans un pays tiers (14 sujets soit 60, 87%) ;

- gagner de l'avenir de façon assurée (9 sujets soit 39, 13%).

FADESP

04 (17, 39%)

ENAM

02 soit 08, 69%

Le tableau 9 présente les résultats des sujets à l'Université. Sur les 23 sujets, 14 soit 60, 87% pensent que les études universitaires constituent un élément facilitateur de réinstallation dans un pays tiers. La deuxième tendance (9 sujets soit 39,13%) présente les études universitaires comme un moyen sûr pour gagner l'avenir.

Tableau 10 : opinions des sujets qui ne sont ni en formation professionnelle ni à l'université.

Nombre de sujets

Statut

Avis sur l'accès aux formations universitaires

Avis sur l'accès aux formations professionnelles

03

chômeurs

Néant

Néant

Le tableau ci-dessus présente les 3 sujets qui ne sont ni en formation professionnelle ni à l'université. Ils sont chômeurs à la recherche de l'emploi. Aucun d'eux ne s'est prononcé sur la question.

4.1.9-Résultats relatifs à la préférence de vie entre le Bénin et le pays d'origine

Tableau 11 : différentes tendances sur la préférence entre le pays d'accueil et le pays d'origine

Nombre de sujets

%

Préférence

Raisons évoquées

41

66, 13

Bénin

On se sent à l'aise ici que dans le pays d'accueil. Il y a la paix et la sécurité au Bénin

17

27, 42

Pays d'origine

Avant la guerre, on était bien chez nous ; on vit mieux chez soi ; on est à l'aise que sur la terre des aïeux.

04

6, 45

Néant (position mitigée)

Là-bas au pays, la guerre nous a fait partir, et au Bénin ici il n'y a pas d'emplois ; la vie est très dure au Bénin ; or la paix n'est pas encore effective dans notre pays.

Total 62

100%

_

_

Le tableau présente la préférence des réfugiés entre le Bénin et leur pays d'origine. Les résultats qui en ont découlé peuvent être classés en trois catégories : la première représente 66, 13% des sujets ayant choisi le Bénin au nom de la paix et de la sécurité. La seconde tendance représentant un taux de 27, 42% ont préféré leur pays d'origine car « on vit mieux chez soi » et on est toujours à l'aise sur la terre des aïeux. Enfin, le troisième camp (6, 45%) a donné une réponse mitigée. Ni le pays d'origine ni le Bénin n'a été choisi comme une préférence.

4.1.10- Résultats relatifs aux suggestions pour améliorer de façon durable la problématique du réfugié au Bénin dans la Sous-région

Tableau 12 : résultats récapitulant les suggestions pour une solution durable

Nombre de sujets

%

Suggestions

43

69, 35

-il faut associer les réfugiés aux décisions qui sont prises ;

-il faut permettre aux réfugiés de dire ce qu'ils ressentent et les aider à trouver des solutions vraiment courageuses ;

- il faut aimer les réfugiés et les aider à vivre comme ceux qui s'occupent d'eux ;

- au lieu de laisser les réfugiés à eux-mêmes, il faut créer des centres de suivi et de soutien aux personnes persécutées de leur pays ;

- la solution durable qu'il faut pour éviter l'augmentation des problèmes des réfugiés, c'est de les prendre en charge en leur donnant les moyens nécessaires pour qu'ils puissent faire les petits commerces ;

- il faut prévenir les guerres et les conflits pour éviter les situations qui engendrent la persécution des populations de leur propre pays.

19

30, 65

N'ont pas fait de suggestions

Total  62

100

_

Le tableau 12présente de suggestions pour une solution durable aux problèmes des réfugiés. 69, 35% représentant le taux des sujets qui ont exprimé leurs positions. 30, 65 % représente le taux des sujets qui n'ont pas fait des suggestions.

Au regard de ces résultats, quelle analyse revêtent-ils ?

4.2- Analyse des résultats

Partant du constat documentaire et empirique selon lequel les réfugiés en asile dans les pays de l'Afrique de l'Ouest sont généralement réticents à adhérer au programme du rapatriement opportun conçu à leur endroit, solution durable qui amoindrirait leurs difficultés, nous nous sommes interrogé sur la question pour la comprendre et en connaître les causes en étudiant le cas du Bénin. Pour atteindre ces objectifs, nous avons entrepris une recherche basée sur une démarche méthodologique caractérisée par une méthode quantitative (enquête par questionnaire) et une méthode qualitative (enquête par entretien). Les deux méthodes ont ciblé une population constituée d'acteurs gestionnaires directs, indirects et d'acteurs victimes. Les résultats quantitatifs issus de ces investigations sont catégorisés et repartis dans les tableaux. Quant aux résultats issus des entretiens, ils sont annexés au document et serviront de point d'ancrage avec ceux quantitatifs dans notre analyse.

4.2.1- Des causes ayant provoqué les réfugiés à venir au Bénin et les raisons de réticence d'un retour

Les résultats issus des enquêtes présentent trois types de causes liées à la production des réfugiés qui viennent chercher asile au Bénin (Tableau 2). En effet, 46, 77% du taux représentant les sujets enquêtés nous révèlent qu'ils sont devenus réfugiés à la suite des conflits post-électoraux. Ce taux qui constitue le plus élevé au sein des trois, traduit bien fort la situation dangereuse dans laquelle la Sous-région s'engouffre. Les élections qui devraient permettre aux différents Etats de progresser vers l'avant, vers le développement, constituent plutôt les périodes d'intolérance, de haine et de persécution des paisibles citoyens. Si les élections sont devenues des "carrefours" des grands conflits en sorte qu'ils peuvent en produire des réfugiés, cela pose alors un problème de non-respect des règles démocratiques. Dans ce jeu, malheureusement, ce ne sont pas les acteurs mêmes qui sont les premières victimes. Les sujets enquêtés victimes des conflits post-électoraux sont des populations généralement pauvres ayant à peine, avant d'arriver au Bénin  un emploi suffisamment décents. En effet, les résultats rapportés par le guide d'entretien adressé au Directeur du Centre Panafricain de Prospective Sociale (CPPS) le confirment à travers ces propos : « d'autres qui exerçaient un métier dans leur pays d'origine ou qui sentent le besoin de se perfectionner, suivent un recyclage de six mois ». Puisque le mécanisme de gestion des réfugiés mis en place au Bénin, permet aux réfugiés désoeuvrés d'apprendre un métier pour se prendre en charge. Le directeur du CPPS s'explique : « des réfugiés sans qualification apprennent pendant un ou deux ans un métier de leur choix dans une structure de leur choix et obtiennent un diplôme : couture, coiffure et tresses, menuiserie, restauration, hôtellerie, mécanique, soudure, imprimerie... ». Mieux, il suffit de questionner les résultats relatifs à l'accès à la formation professionnelle (Tableau 8) pour s'en convaincre : 36 sujets soit 58,06% du taux des enquêtés sont en formation professionnelle dont 60,87% du taux des sujets en formation professionnelle pensent que celle-ci permet de faciliter la réinstallation dans un pays tiers. La deuxième cause concerne, selon les résultats, les conflits interethniques. En effet, 45,16% des sujets en ont témoigné. Elle (la cause) se traduit par les effets secondaires évoqués ci-dessus tels que la haine, l'intolérance, le sectarisme et l'égoïsme. La troisième cause identifiée est les troubles socio-politiques.

En effet, 8,06% (Tableau 2) des sujets disent devenir réfugié à la suite des troubles socio-politiques survenues dans leurs pays. Les trois causes étant surtout politiques, on comprend dès lors à travers ces résultats que les causes qui contraignent les réfugiés à quitter leur pays pour le Bénin sont liées au non-respect des règles démocratiques et des droits humains. Dans ce cas, les hommes politiques et les dirigeants d'Etat sont les premières personnes responsables de ces manoeuvres humaines. Or, le gros problème se situe dans le fait que les personnes qui viennent chercher asile au Bénin ne sont pas ces hommes politiques encore moins ces dirigeants d'Etat, même si on en compte quelques uns dans les cas rares. L'afflux massif des réfugiés au Bénin se caractérise par des personnes démunies et généralement non-instruites hormis quelques uns qui avaient un emploi et les étudiants. On voit par là que les réfugiés qui viennent au Bénin, n'avaient pas dans leur majorité une situation de vie décente dans le pays d'origine. Le lien qu'on peut y faire est que ces dernières sont victimes d'un système soit politique soit sociale soit économique dont ils ne sont pas forcement les premières cibles en persécution surtout dans les conflits post-électoraux. Le pays d'accueil devient à cet effet, un lieu où on pense améliorer sa situation ou encore par lequel on peut passer pour joindre un pays du Nord, la prise en charge aidant. Car, rappelons-le : même si la majorité (48,38%) des enquêtés pensent que les raisons qui ont motivé leur choix pour chercher asile au Bénin réside dans le fait que celui-ci est un « pays de paix et de démocratie » (Tableau 3), il y en a qui pensent (14,51%) que le Bénin est un « pays de transit pour accéder dans un pays du Nord » (Tableau 3). Cette pensée vient justifier les propos de Jonas DJREKPO, responsable du Secrétariat du Comité d'Eligibilité et du Comité de Recours au Statut du Réfugié (SCE/CRSR) de la CNAR: « le demandeur d'asile n'a pas d'autres objectifs que d'être protégé. Mais à l'expérience, on s'est rendu compte que beaucoup de demandeurs d'asile sont demandeurs d'asile non au Bénin mais pour d'autres destinations. C'est-à-dire qu'ils viennent déjà avec l'idée qu'ils ne vont pas rester au Bénin» (Entretien du lundi 28 juillet 2008).

Cependant si tant est que le réfugié par définition, est une personne en danger et en persécution à qui il faut assurer une protection, on comprend alors les raisons qui ont motivé le choix des 48,38% du taux des enquêtés pour venir chercher refuge au Bénin : la paix et la démocratie béninoises. Du coup, on peut dire que la majorité des réfugiés au Bénin y sont parce que leur vie est en danger et qu'ils sont à la recherche de protection au Bénin. Alors seulement, on peut se frotter les mains pour dire que la majorité des réfugiés au Bénin, y sont essentiellement pour se chercher de protection. Une telle analyse, de loin, est évidente. Car « il y en a qui ont des traumatismes qu'ils ont subi dans leur pays d'origine [...]. Mais c'est l'infime minorité par rapport à la grande majorité qui espère trouver à travers la procédure de détermination de statut du réfugié, la procédure de réinstallation que bénéficie un réfugié », propos du responsable du Secrétariat du Comité de détermination du statut du réfugié et du Comité du recours (Entretien du lundi 28 juillet 2008). Dès lors, on se rend compte que les réfugiés sont, dans leur majorité, de passage au Bénin pour aller dans les pays du Nord, où se trouve la fin de leurs problèmes. Les causes qui ont provoqué leur départ dans les pays d'origine sont très évidentes certes, mais ne sont pas forcement tributaires de leur arrivée au Bénin, ou c'est le cas, et une fois arrivée ils changent d'objectifs. Mieux, il y en a qui viennent dramatiser l'événement qui a provoqué leur départ, dans l'ultime souci d'obtenir le statut du réfugié pour le servir à d'autres fins. En un mot, s'il y a les réfugiés au Bénin qui sont vraiment en difficulté et méritent toute attention de protection et d'assistance, il n'en demeure pas moins que la grande majorité veut profiter d'une situation donnée pour améliorer sa condition de vie. Dans ces conditions, peut-on dire que la recherche de protection est vraiment motivée ?

4.2.2- De la recherche de la protection au Bénin à la recherche de la réinstallation dans un pays du Nord

« Le demandeur d'asile n'a pas d'autres objectifs que d'être protégé », déclarait Jonas DJREKPO, le responsable SCE /CRSR de la CNAR, suite à l'entretien tenu avec lui le 28 juillet 2008. Ces propos montrent que l'objectif premier du Bénin en donnant l'asile au réfugié, est de le protéger contre la persécution dont il fait l'objet depuis son pays d'origine. S'il est donc vrai que les réfugiés dans leur majorité (77,42%) du taux des sujets enquêtés (Tableau 5) bénéficient de la protection internationale au Bénin contre un taux de 22,58% qui estiment le contraire, on peut se frotter les mains et se dire que la majorité des réfugiés venus au Bénin ont vu leur objectif atteint et ont été comblés de l'accueil qui leur est réservé. En revanche, le Bénin ne va pas dormir sur son laurier, il doit plutôt se ceindre davantage les reins en améliorant ses prestations en sorte que la quasi-totalité des réfugiés puissent se sentir en protection au Bénin. En le faisant, le Bénin rehausse son image sur le plan international.

Cependant, il est difficile de s'accrocher à cette réalité des résultats. En effet, le Tableau4 comportant les résultats sur l'appréciation des conditions d'asile au Bénin rapportent que 46,77% du taux des sujets enquêtés trouvent les conditions d'asile « très mauvaises » et « mauvaises » pour 22, 58% contre seulement 3,22 % qui apprécient les conditions d'asile de « très bien ». Les premiers, c'est-à-dire ceux qui estiment que les conditions d'asile sont très mauvaises avancent assez d'arguments dont l'inexistence d'assurance, les tracasseries administratives, le manque d'emplois, d'abris et même la tendance à se voir rejeter par les populations du pays d'accueil. Mais la minorité vraiment infime qui qualifie l'asile au Bénin de « très bien » évoque les raisons telles que l'existence de la paix, de la démocratie et de la sécurité. Cet écart d'appréciation des conditions d'asile au Bénin confirme que les réfugiés ont un autre objectif à part celui de la protection. Puisque la majorité d'entre eux avait reconnu être en protection au Bénin (Tableau 5). Il y a donc un problème sérieux lié au matériel, au pécuniaire qu'à la protection dont ils ont réellement besoin. La preuve est qu'ils ont apprécié et noté le pays d'asile sur une base matérielle plutôt que sur une base juridique et politique. La recherche de protection sert donc d'alibi pour octroyer le statut du réfugié et partant, bénéficier de la réinstallation. « Donc leur objectif dès leur arriver, c'est obtenir la protection et au-delà de la protection de l'Etat béninois, se faire réinstaller dans les pays développés », déclarait le responsable du SCE /CRSR de la CNAR (Entretien du 28 juillet 2008). Du coup, il y a incompatibilité entre les mesures de gestion pour les solutions durables et les réfugiés. Puisque les mesures de gestion tirent leur pertinence des causes, or les causes que présentent les réfugiés ont une apparence politique alors qu'elles sont plutôt économiques. Ainsi, à l'amenuisement des fonds alloués pour la gestion des réfugiés, s'ajoute le problème de l'incompatibilité des mesures curatives aux maux à guérir. Dans ces conditions, on peut imaginer déjà ce qui pourrait expliquer la réticence des réfugiés face à un programme de retour paisible dans le pays d'origine.

4.2.3 - De la réticence au rapatriement à l'engouement pour la réinstallation

En questionnant les résultats à cet effet, on comprend aisément qu'il y a un problème qui se pose. En effet, le directeur du CPPS déclarait que « les difficultés viennent des réfugiés eux-mêmes dont le rêve est la réinstallation. Ils croient que c'est le pays hôte ou les partenaires qui les empêches de partir » (propos recueillis à la suite des réponses apportées au guide d'entretien). On comprend mal que ceux qui se disent être en danger de vie puissent prendre position en croyant que leurs malheurs proviennent plutôt des humanitaires qui s'occupent d'eux et qui tentent de leur apporter le nécessaire. C'est donc dire que le réfugié change de cible une fois qu'il est dans le pays d'accueil. L'octroi du statut du réfugié n'est pas une fin en soi. Il est temporaire et éphémère. Le réfugié devrait retourner dans son pays d'origine une fois que les conditions sont améliorées et que son retour est assuré dans la dignité et la sécurité : c'est le rapatriement. C'est sur cette base que le pays d'asile offre l'hospitalité au réfugié pour jouir de la protection internationale. En revanche, il ne peut pas retourner dans son pays si les événements qui l'ont contraint à le quitter ne sont pas passés. Mais dans le cas des réfugiés en asile au Bénin, on dénote qu'il y a l'amélioration de la situation dans certains pays d'origine. Les résultats issus des sujets enquêtés dans ce cadre ne présagent aucun signe d'une volonté de retour. En effet, 38,70% représentant le taux des sujets disent « oui, mais à conditions » au retour dans le pays d'origine (Tableau 6). Mais les conditions énumérées qu'il faut pour un éventuel retour sont, certes, objectives mais au fond, moins sincères : le changement du régime avec des hommes neufs, le retour de la paix prouvé par les compatriotes, la volonté des dirigeants à réinstaurer vraiment la paix, etc (Tableau 6) sont autant d'éléments évoqués. Cependant, 61,30% du taux des sujets enquêtés pensent eux autres que le retour n'est même à l'ordre du jour, c'est-à-dire qu'ils ne rêvent pas retourner chez eux parce qu'ils ont tout perdu, ils n'ont plus personne au pays, les mauvais souvenirs sont encore dans les esprits, etc (Tableau 6). Dans chacun des deux cas, les éléments évoqués pour rendre le rapatriement inopportun sont pertinents. Mais il suffit de voir loin pour comprendre qu'en réalité la question de rapatriement n'est pas forcement liée dans les tous cas aux problèmes éventuels qui peuvent surgir lors de sa mise en oeuvre dans le pays d'origine. La preuve est que les sujets, en rendant le rapatriement inopportun voire même impossible, n'optent pas pour une intégration au Bénin mais rêvent partir dans les pays du Nord (Tableau 7). Le rapatriement se présente alors sous les yeux des réfugiés comme un retour à la misère et non au pays. Cela traduit la précarité de vie dans laquelle ils se trouvaient avant l'avènement des conflits qui les ont vu partir. De peur donc d'aller tomber à nouveau dans les misères d'entre temps, ils préfèrent y rester pour bénéficier de la formation professionnelle ou des études universitaires en attendant que le programme de la réinstallation aboutisse.

Par ailleurs, la réticence au retour peut s'expliquer aussi par le fait que le pays d'asile en occurrence le Bénin, présente au-delà de tout, des opportunités majeures aux réfugiés en sorte qu'ils ne peuvent pas s'en débarrasser aussitôt. Il y en a, en effet, qui ont laissé les études depuis quatre, cinq voire même six ans dans leur pays pour des raisons d'ordre financier. Mais une fois en asile au Bénin, avec le statut du réfugié, l'opportunité leur est donnée de s'inscrire à l'Université nationale du Bénin dans les facultés au même titre que les nationaux. Alors que dans leur pays d'origine, les frais d'étude sont très hausses, ce qui ne leur permet pas d'y accéder facilement. Parmi ceux-là, on en compte qui attendent finir leurs études avant de retourner au pays. D'autres du même groupe désirent finir, rester au Bénin et y travailler. D'autres encore et c'est la majorité, rêvent partir à l'étranger après les études, c'est-à-dire se faire réinstaller. Dans tous les cas, on constate que le réfugié exploite à merveille des opportunités qui sont offertes à lui. Mais la finalité que poursuit le Bénin en offrant ces opportunités aux réfugiés sur son territoire est de les rendre autonomes, indépendants à se prendre en charge : « quel que soit le cas, l'éducation donnée par la formation professionnelle et les études universitaires est un atout », reconnaît le Directeur du CPPS.

Par ailleurs, selon le Directeur du CPPS, «le retour volontaire est la meilleure des solutions durables ». Mais les réfugiés n'entendent point cela de leur oreille. Les résultats (Tableau7) révèlent que la réinstallation est perçue aux yeux de 58,06% du taux des sujets enquêtés « comme un droit de vie meilleure », et 32,26 % la conçoivent « comme la fin des difficultés du réfugié ». Au total, 90,32% des sujets enquêtés pensent que leur espoir est à l'étranger dans les pays du Nord. Convaincus de ce fait, ils se mobilisent à leur manière non pour réclamer le renforcement du droit de protection au Bénin, mais plutôt pour exiger la réinstallation, parfois avec violence, aux autorités qui s'occupent d'eux en l'occurrence le HCR. Car selon eux : « c'est le pays hôte ou les partenaires qui les empêchent de partir ». Cette troisième solution durable (la réinstallation) qui est exceptionnelle et constitue un outil stratégique, et qui n'est applicable que dans des conditions vraiment déterminées et avérées, se présente aux yeux des réfugiés comme l'unique porte de sortie et la condition sine qua non de la résolution de leurs problèmes. Le phénomène se présente comme celui de la migration où l'on croit que le salut est de l'autre côté de la mer. Dans un tel cas, l'idée première qui motive le départ est loin d'être la recherche de la protection ; elle est plutôt la recherche du bien-être, de vie meilleure. Ainsi, au lieu de retourner au pays pour participer à sa reconstruction, les réfugiés préfèrent opter pour la réinstallation. On brave la vie et on s'embarque avec tous les risques. On préfère aller à l'étranger et y mourir s'il le faut, mais presque jamais dans le pays d'origine. Au vu de tout cela, la réticence des réfugiés au rapatriement s'explique. Jonas DJREKPO, le responsable du SCE /CRSR de la CNAR confirme : « la réticence au retour s'explique par le...le...le fait que l'optique dans laquelle le demandeur d'asile était pour venir au Bénin, n'est pas tellement de rester au Bénin mais de pouvoir, à travers la protection que le Bénin va lui offrir et les documents mis à sa disposition, pouvoir demander d'être sous d'autres cieux que son pays de départ » (entretien du 28juillet 2008). Au vu de tout ce qui précède, on voit clairement que la réticence au retour n'est pas forcement liée aux raisons évoquées par les réfugiés (Tableau 6). Les mesures de sécurité pour un retour apaisé ont été prévues conformément aux différentes réalités qui s'imposent, et pourtant les réfugiés n'ont pas changé de position : l'engouement à la réinstallation est plus que jamais l'unique rêve qu'ils nourrissent. Plus rien ne peut leur faire changer d'avis. On n'est pas réticent pour se faire intégrer dans le pays d'asile mais plutôt pour s'envoler loin, dans l'autre bout du monde. Tout simplement parce que le pays d'origine tout comme le pays d'asile n'ont pas une économie forte caractérisée par la recherche d'une main d'oeuvre. Généralement en Afrique de l'Ouest, ce sont des petits pauvres confrontés aux multiples problèmes de développement. Les réfugiés se voient alors obligés de chercher mieux ailleurs, d'où leur engouement pour la réinstallation. Ainsi, les réfugiés en asile au Bénin sont pour la plupart des réfugiés économiques et non politiques. Puisque si cela ne tient seulement qu'à la protection, il devraient y rester. Le Bénin a fait preuve en matière de la protection des réfugiés comme l'un des pays sur de la Sous-région. Sa réputation dans ce sens a dépassé les bornes de l'Afrique. L'asile octroyé tout dernièrement à l'ex-Président des Iles de Java de Comores colonel Bakar, en est une preuve patente. Alors que les réfugiés arrivent même des pays du Nord pour chercher asile au Bénin, ceux qui y ont trouvé asile y quittent pour ces mêmes pays dans le souci d'avoir une vie meilleure. Finalement, on voit que l'intérêt n'est pas le même. Chez certains, il est vraiment politique et chez d'autres, il est purement économique (Tableau 4).

4.2.4- Des réfugiés politiques et des réfugiés conjoncturels ou économiques en asile au Bénin : la distinction

Il est utile de mentionner que les réfugiés que nous appelons réfugiés économiques sont en transit au Bénin. Leurs points de chute sont les pays du Nord tels que le Canada, les Etats-Unis, l'Australie et la Finlande. Il y a en donc parmi les réfugiés qui ne méritent pas d'être appelés ou considérés comme tel. En effet, sur les 62 sujets enquêtés composés de 7 nationalités différentes, 37 sont de nationalités togolaises soit un pourcentage de 59,61% (Tableau 1). Ce qui traduit que les réfugiés de nationalité togolaise sont les plus nombreux au Bénin. Mais là n'est encore pas le problème. Le Tableau 4 révèle que 43 sujets au total soit un pourcentage de 69,35% trouvent l'asile du Bénin de loin à combler leurs attentes. En s'appuyant sur ces données évoquées, on voit que les réfugiés togolais sont les premiers indexés en ce qui concerne les appréhensions mauvaises de l'asile au Bénin.

Or, aujourd'hui le Togo est un pays qui est entrain de retrouver sa vitalité politique en sorte que les dispositifs et les mesures de retour sont mis en place pour que puissent rentrer les réfugiés ayant quitté le pays lors des événements survenus aux dernières élections présidentielles d'avril 2005. Ces dispositifs mis en place sont élargis aux membres de l'opposition togolaise, pour que le retour puisse être viable et puisse se faire dans la dignité et dans la sécurité. Il y en a en effet qui sont rentrés après avoir reçu leurs droits d'appui de reconstruction auprès du HCR (pré-enquête, mars 2007). D'autres en ont reçu et parti puis sont revenus par la suite, évoquant comme raisons que le pays est économiquement à terre et il est difficile d'y vivre (pré-enquête, mars 2007). En outre, selon le HCR, la nationalité dont la demande de réinstallation est la forte est celle du Togo. Au même moment, l'un des pays dont les réfugiés peuvent rentrer aujourd'hui sans problème est toujours le Togo, puisque le gouvernement togolais d'union nationale installé, s'est impliqué pour que le retour au pays respecte les normes et se passe bien. Et pourtant, les réfugiés togolais en asile au Bénin non seulement n'entendent pas y retourner mais aussi ne veulent pas (pour la grande majorité) s'y intégrer. Ils veulent plutôt tous la réinstallation. Dès lors, on comprend qu'ils sont en transit au Bénin. En d'autres termes, parmi les trois solutions durables à savoir le rapatriement, l'intégration et la réinstallation, seule la dernière, celle qui permet de s'éloigner davantage de son pays, intéresse les réfugiés togolais alors que leur sécurité n'est pas en danger au Bénin. L'intérêt qui guide une telle intention est économique plutôt que politique : la recherche du mieux-être...Hormis les togolais qui sont les réfugiés économiques en transit au Bénin, il faut reconnaître que les efforts considérables sont faits en matière de paix en Côte d'Ivoire où les réfugiés ivoiriens en asile au Bénin pourraient y retourner. Ils pourraient y retourner dans la dignité et la sécurité, puisque les acteurs en conflits se sont réconciliés : la nomination de Guillaume Soro, Secrétaire géneral d'alors des Forces Nouvelles comme premier ministre par le Président Gbagbo, le désarmement effectif des Forces Nouvelles, l'annonce de la date des élections présidentielles prochaines, sont autant d'éléments qui justifient un opportun retour paisible des réfugiés ivoiriens. Parmi les enquêtés, on en a décompté 3 sujets soit un pourcentage de 4,83% provenant de la Côte d'Ivoire dont les résultats témoignent qu'ils ne sont pas prêts à rentrer et, tels les Togolais, ils nourrissent l'envie de partir de l'autre côté de la mer, refusant ainsi la réintégration et le retour au pays. Ils sont aussi, si on peut le dire, en transit au Bénin. Quant aux Nigérians, les résultats ne nous ont pas permis de savoir de façon précise leur situation, puisqu'ils ne se sont pas représentés par nationalité dans l'échantillonnage. La mobilité et la fluctuation qui caractérisent la vie des réfugiés en asile au Bénin expliquent la non disponibilité des chiffres précis du nombre total qu'ils constituent au Bénin : « [...] il est difficile d'avoir un chiffre fiable sur la population réfugiée » (entretien du 28 juillet 2008 avec le responsable de SCE/CRSR de la CNAR. Toutefois, il faut noter que les pré-enquêtes du mars 2007 au HCR et au CPPS nous ont révélé la recherche d'asile des Ogoni20(*)du Nigéria au Bénin, dans l'ultime souci d'y transiter pour les Etats-Unis. C'est pourquoi, nous expliquait le Directeur du CPPS, « ils ne pardonnent pas du tout à celui d'entre eux qui accepte d'apprendre un métier au Bénin, car cela risque de réduire leur chance pour la réinstallation » (propos recueilli lors de la pré-enquête à Ouidah, mars 2007). Les réfugiés nigérians n'ont donc pas un statut différent de deux autres cités précédemment. Ce sont également des réfugiés économiques en transit au Bénin dont la destination est les Etats-Unis d'Amérique.

Partant de cette analyse, on peut dire que nous tendons vers une nouvelle forme de migration économique qui risque de déstabiliser le pays d'asile et l'institution qui s'occupe de la gestion des réfugiés, nous voulons nommer le HCR. Puisque la réinstallation n'est pas un outil de migration ou d'immigration pour le pays de son choix. Elle n'est pas non plus un outil pour améliorer la situation économique ou sociale d'une personne. En passant par le couloir humanitaire, les hommes et femmes vaillants qui devraient participer au développement de leur Nation, profitent d'un événement fâcheux survenu dans leur pays pour se rendre à l'étranger à la quête du bien-être. Ainsi, naît la nouvelle forme du réfugié, loin de toute attente. La paupérisation, la misère sont autant de facteurs qui encouragent le phénomène dans les pays d'asile de l'Afrique de l'Ouest en l'occurrence au Bénin. Le risque du phénomène est qu'il pourrait affaiblir et détourner les institutions (le HCR en particulier) en charge de la gestion des réfugiés de ses nobles objectifs qui ne sont qu'humanitaires. Cela pourrait créer par voie de conséquences, d'autres problèmes tels que la déshumanisation et l'instrumentalisation de l'institution pour les fins inavouées qui seraient ainsi préjudiciables aux pays d'asile et aux vrais réfugiés qui ont besoin vraiment de protection.

En revanche il faut reconnaître en dépit de tout qu'il y a des réfugiés au Bénin qui méritent d'être vraiment considérés comme tel. C'est-à-dire qui sont des réfugiés politiques au sens définitoire du terme. En effet, le rebondissement des conflits dans certaines contrées de l'Afrique continue de prolonger la durée d'asile des réfugiés provenant de ces contrées au Bénin. La République Démocratique du Congo (RDC), le Tchad, etc. n'ont jusque-là pas encore trouvé leur vitalité politique. Cependant les réfugiés provenant de ces pays sont en nombre minoritaire et jouissent d'une protection effective au Bénin (Tableaux : 1 et 4). Par ailleurs, la réticence au rapatriement peut être expliquée par ce facteur de l'instabilité politique qui y prévaut. Par contre, le Rwanda et le Libéria sont en reconstruction politique et économique. Mais l'horizon politique ne présage rien de rassurant dans ces pays où la guerre a dicté sa loi pendant des années. Du coup, la réticence au rapatriement des réfugiés provenant de ces pays pourrait être expliquée aussi par la longue durée de l'asile et l'existence des mauvais souvenirs dans les esprits (Tableau 6), contrairement à la même réticence des réfugiés économiques qui ne sont qu'en transit au Bénin pour les pays du Nord (Tableau 6).

Au regard de tout ce qui précède, que faire ?

4.3- Suggestions

La gestion des réfugiés, nous l'avons dit au début dans nos mots introductifs, est une mission délicate et complexe. Encore que nous sommes en Sciences sociales, il est difficile de trouver le remède juste au mal surtout lorsqu'on sait que ce dernier change de tactique et de champ de bataille là où la garde a baissé. Les recherches ayant conduit à ces résultats nous ont amené à nous en rendre à l'évidence. En effet, beaucoup d'efforts sont fournis de la part des acteurs gestionnaires pour une meilleure gestion des réfugiés en asile au Bénin. Cependant, au niveau des réfugiés, le problème de réticence au rapatriement persiste toujours et l'engouement pour les pays du Nord augmente sans cesse en leur sein malgré tout ce qui est fait. Il est peut-être temps d'aller « au fond des choses », selon le mot du professeur Albert TEVOEDJRE21(*). Il n'y a donc pas une clef magique. Néanmoins, certaines idées fortes découlées des résultats peuvent être retenues comme fondamentales dans le cadre de la recherche des solutions. Certes, elles ne sont pas exhaustives mais sont pleines d'actions.

4.3.1- De la nécessité de restructuration et de dynamisation du comité d'éligibilité de la CNAR

Le comité d'éligibilité joue déjà un grand rôle dans la détermination du statut du réfugié au Bénin. Il est l'avant-garde d'un système formel qui ne peut réussir sa mission que grâce à son sérieux, puisque c'est lui qui met à la disposition du HCR les personnes reconnues comme des réfugiés. C'est pourquoi, il doit savoir la grande responsabilité qui lui incombe. En effet, il pourrait se doter d'autres éléments plus subséquents qui prouveraient la bonne ou la mauvaise foi du demandeur d'asile. C'est-à-dire qu'en plus du dossier du requérant et son audition, il faudrait un dispositif pouvant permettre de vérifier de façon approfondie toutes les allégations écrites et orales dudit requérant. Ce serait un mécanisme de détection des vrais réfugiés des faux, des réfugiés politiques des réfugiés conjoncturels ou économiques. Cependant une telle action nécessite des moyens humain, matériel et financier et ne serait pas facile surtout lorsqu'on serait en face de la reconnaissance prima facie. C'est pourquoi nous avons parlé de restructuration et de dynamisation. En outre, la création d'une cellule de sensibilisation aux droits et devoirs des réfugiés en asile au Bénin permettrait de résoudre nombre de problèmes relatifs au droit d'asile au Bénin.

Au total, il faudrait nécessairement un renforcement des dispositifs mis en place pour l'identification des réfugiés parmi les personnes demandeurs d'asile et de réduire sa lenteur. Cela faciliterait la mission au HCR-Bénin.

4.3.2- De la responsabilité du Haut Commissariat des Réfugiés du Bénin (HCR-Bénin)

Le HCR-Bénin, consciente de la délicatesse et de la complexité de la mission qui lui est dévolue, joue autant que se peut sa mission. Cependant, dans le cas du programme du rapatriement, il n'a pas encore réussi à convaincre les réfugiés concernés à s'y adhérer pleinement en défaveur de la réinstallation. Mais tels que les résultats l'ont présenté, ces difficultés de non-adhésion s'expliquent par certains facteurs majeurs liés à l'environnement conjoncturel qui caractérise les pays d'origine qu'il faut prendre en compte. En effet, le HCR ne s'occupe pas des réfugiés économiques ou des migrants. Son devoir est d'assurer la protection aux personnes en danger ayant fui leur pays par peur d'être persécutées, victimes de l'intolérance politique, sociale, religieuse ou ethnique. Dans ce cas, le HCR-Bénin devrait revoir son mode de gestion. Savoir qu'il n'a pas à faire uniquement aux personnes telles que définies plus haut mais aussi aux personnes qui « ...abusent du système international d'asile », selon le mot du Haut Commissaire des Nations-Unies pour les Réfugiés Antònio Guterres (magasine Réfugiés, n°142, vol.1, 2006).

Il faudrait cependant au HCR-Bénin, la création d'une cellule de communication qui aurait pour rôle d'informer aux réfugiés, le rôle du HCR, sa mission et la limite de ses prérogatives d'une part et d'autre part expliquer ce à quoi consiste chacun des trois types de solutions durables et les conditions qui caractérisent la mise en oeuvre de chacun d'eux. Cela permettrait d'éviter l'inadéquation des solutions durables à leurs problèmes dont la plupart, dans la situation actuelle, ne sont qu'économiques. Il faudrait aussi préciser aux réfugiés déjà aux premiers jours, compte tenu de l'amenuisement des fonds, les services précis d'assistance auxquels le HCR pourraient subvenir pendant l'asile au Bénin. Cela permettrait d'être un peu à l'abri des pressions des réfugiés vis-à-vis de leurs besoins. En outre, il faudrait instaurer et promouvoir une gestion participative avec les réfugiés. Ils se sentiraient considérés et cela renforcerait leur confiance vis-à-vis de l'institution et partant, du personnel. Enfin, il faudrait réduire les tracasseries qu'ils endurent pendant l'établissement des différents dossiers pouvant leur permettre de jouir de leur statut du réfugié. Il faut noter que ces propositions sont tout même valables pour les Organisations Non Gouvernementales qui opèrent auprès du HCR.

4.3.3- Appel aux réfugiés pour une prise de conscience

Les réfugiés dont la paix est revenue dans leur pays devraient savoir qu'on peut être pauvre tout en gardant sa dignité. C'est le moment pour eux de prendre conscience et de savoir que leur salut n'est pas forcément dans les pays du Nord. C'est également le moment de se remettre en cause et de raviser leurs positions en quittant les rangs pour aller participer à la construction de leur pays respectif. Cela va dans leur propre intérêt et dans l'intérêt de l'Afrique. C'est pourquoi le Directeur du CPPS professeur Albert EKUE pense que: «l'Afrique a besoin de tous ses fils »22(*) et au responsable SCE/CRSR de la CNAR Jonas DJREKPO d'ajouter : « ce n'est pas une sensibilisation au retour. C'est un appel au sens civique, au devoir... »23(*) .

Tous ces éléments de propositions réunies dans une exécution pourraient permettre de résoudre plus ou moins la question de réticence au rapatriement, de l'engouement à la réinstallation et des éventuelles crises de gestions afférentes.

En définitive, que conclure ?

Conclusion

En optant pour un thème abordant la question des réfugiés, spécifiquement sur les « Approches de solutions durables de prise en charge des réfugiés en situation d'asile en Afrique de l'Ouest : le cas du Bénin», nous nous sommes donné l'objectif de comprendre ce qui pourrait traduire la réticence des réfugiés en asile au Bénin à adhérer au programme du rapatriement. Pour atteindre cet objectif, nous avons émis une hypothèse de départ formulée comme suit : « les réfugiés sont réticents et se désintéressent du programme du rapatriement parce qu'ils veulent bénéficier de la réinstallation dans les pays tiers des continents américain et européen ». C'était donc sur cette base que nous avons entrepris les recherches.

Les résultats issus des investigations montrent que plusieurs facteurs dont la plupart sont liés à l'atmosphère conjoncturelle tant sur les plans politique qu'économique des pays d'origine des réfugiés, sont à la base d'un tel fait. Ces facteurs sont essentiellement pécuniaires ou matériels dont le mobile se réfère à la pauvreté et à la misère des pays d'origine, caractérisé par la naissance d'une nouvelle forme de réfugiés dans le pays d'asile qu'incarne la République du Bénin. En outre, il se traduit par une mobilisation générale et un engouement total des réfugiés concernés à la réinstallation. Ce qui nous amène à conclure que notre hypothèse de départ, se vérifie.

Par ailleurs, les résultats nous ont révélé que la République du Bénin fait partie des pays exemplaires où les réfugiés se sentent en protection et en sécurité. S'il y a donc à conclure dans le cas de ce travail, c'est qu'il faut retenir que le Bénin est un pays d'asile de l'Afrique de l'Ouest où ses dirigeants et les acteurs gestionnaires se déploient pour donner le meilleur d'eux-mêmes afin que les réfugiés puissent être à l'abri des éventuels dangers qu'ils craignaient en fuyant leur pays d'origine. Aussi, faut-il retenir, et c'est capital, que les réfugiés qui sont actuellement au Bénin ne sont pas tous des réfugiés tel que défini dans les différents textes internationaux qui les régissent. Il y en a en effet de deux ordres : l'un qui est politique et l'autre qui est conjoncturel ou économique. Ce dernier qui constitue la plus grande majorité, est celui qui est réticent au rapatriement et a de l'engouement pour la réinstallation. Il s'ensuit donc dans cette étude qu'un type de réfugié existe et abuse du système humanitaire qu'incarne le HCR et l'hospitalité béninoise. Le manque de sincérité, d'honnêteté et de dignité sont autant d'éléments découverts chez ces personnes dont la tranche d'âge est entre 15 et 42 ans (résultat du tableau 1).

Ce phénomène, telle une pieuvre, étend ses tentacules de jour au jour, et si rien n'est fait pour y mettre fin, il risque de déstabiliser l'ordre public établi dans l'Etat d'asile et de fragiliser les institutions humanitaires en occurrence le HCR qui perdrait la valeur de sa noble et sacerdotale mission. Autrement dit, il y aurait plus de problèmes créés que de résolus, surtout dans l'Etat d'asile. Face à tout cela, il ne reste qu'à prendre les dispositions pour corriger le mal, un peu comme l'a dit le Haut Commissaire des Réfugiés Antònio Guterres : « s'il est vrai que les candidats à l'immigration abusent du système international d'asile, alors des mesures devraient être prises pour les décourager et les renvoyer chez eux. Bien que cette tâche ne soit pas toujours aisé, elle relève d'un problème de gestion, plus que d'une position idéologique».24(*) Ainsi, les verrous de la conditionnalité de ces propos seraient-ils sautés si on s'en tenait aux résultats de nos travaux. Autrement dit, notre étude vient d'apporter des réponses à cette inquiétude soulevée.

Dès lors, la nécessité de revoir le système de gestion s'impose. Il faudrait s'attaquer à la racine du mal en se dotant des moyens préventifs plutôt que curatifs que constituent les solutions durables car, selon le professeur Albert K. EKOUE, directeur du Centre Panafricain de Prospective Sociale (CPPS), « aucune des solutions n'est durables »25(*).

Références bibliographiques

Ouvrages

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2- DENG, M. F. (1993). Les réfugiés de l'intérieur : un défi pour la communauté internationale, Nouveaux Horizons, 287p.

3- EKUE, A. K. (2004). Culture de la Paix, collection thématique, CPPS, 268p.

4- GASSER, H.-P. (1993). Le droit international humanitaire : introduction, Institut Henry-

Dunant/Haupt, 176p.

5- GRANERO, A. (2005). Situation des réfugiés au Bénin, CPPS, 43 p.

6- IDH (1994). Modes de scrutin et financement des campagnes électorales dans une démocratie pluraliste, IDH, Fondation Konrad Adenauer, 216p.

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Articles et revues

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tranchant, UQAM, 1-2pp.

11- LECLERC, P. & Colville, R. (2007). L'univers étrange et mal connu des apatrides, réfugiés,

n°147, vol3, 5-7pp.

12- MIERE SOTIMA, A. (2004). Le refus de droit de cité aux réfugiés : le Bénin cesse d'être

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13- MONNOU, D. (2005). Exposé sur l'expérience du projet de réinstallation de réfugiés au

Bénin, Kofi Annan International Peacekeeping Traning Centre, Accra, 1-2 pp.

14- NASREDDINE, N. (2005). Le problème des réfugiés en Afrique : l'inéluctable choix entre universalisme et spécificités, le quotidien d'Oréan, 2-9pp.

15- PIARROUX, R. (2004). Des services de santé des forces armées, revue internationale, 4-5pp.

16- UNHCR (2002). Les 50 ans du HCR. L'aventure devait durer 3 ans, 3-5pp.

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statistiques des réfugiés et aperçu géographique (1989-2004), UNHCR, 1-7pp.

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19- UNHCR (2007). Recherche des solutions durables, HCR, 2-7pp.

20- ROSAMOND, B. (2007). Aider davantage les réfugiés africains, Afrique- relance, 1-2pp.

21- ROSENHLATT, R. (1999). Les réfugiés, une question  humanitaire ? Non, politique, courrier international, n°450 du 17 au 23 juin 1999, 36-37pp.

22- WILKLISON, R. (2003). L'Afrique sur la brèche : le bilan humain est terrifiant...des jours meilleurs se profilent-ils à l'horizon ?, réfugiés, n°131, vol2, 12-14pp.

23- WILKLISON, R. (2005). Populations déplacées : une approche humanitaire, réfugiés,

n°141, vol4, 4-6pp.

Mémoires et thèse

24- AGBADJE, O. E. A. (2005). La protection internationale des personnes déplacées à l'intérieur

du territoire, mémoire de Maîtrise Es-Sciences juridiques, 62p.

25- DAKPO, C. P. (2003). Dynamique politique et sportive au Bénin : le mouvement sportif

associatif ou les enjeux de pouvoir (1960-2001), thèse de doctorat unique des Universités, 565p.

26- NDEKO, S. F. (2005). L'Action du Haut Commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés aux enfants réfugiés au Bénin, mémoire de Maîtrise Es-Sciences juridiques, 71p.

27- YAKPA, R. O. (2004). Contribution des ONG à la fourniture de l'assistance humanitaire aux réfugiés : cas du Bénin, mémoire de fin de formation du 1er cycle, ENAM, 67p.

Textes, lois et instruments juridiques

28- Décret n°97-647 du 31décembre 1997, portant création, composition, Attributions et fonctionnement de la Commission nationale chargée des réfugiés (CNR) au Bénin, J.O. N°11 du 1er juin 1998.

29- Protocole relatif au statut des réfugiés (1967), Nations-Unies, Recueil des traités, 267p.

30- Constitution béninoise, loi n°90-004 du 11décembre 1990.

31- Convention relative au statut des réfugiés (1967), Nations-Unies, Recueil des traités, 267p.

32- Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique

(1969), UN MHCR/131.

Rapports et études

33- Rapport (2005). Réunion des Experts Régionaux sur les solutions durables à la situation des déplacements forcés en Afrique de l'Ouest, Kofi Annan International Peacekeeping Training Centre, Accra, 2-3pp.

34- UNHCR (2005). Introduction à la protection internationale : protéger les personnes relevant de la compétence du HCR, UNHCR, 7-9pp.

35- UNICEF (2005). La situation des enfants dans le monde, UNICEF HOUSE, 152p.

36- USCRI (2007). Rapport mondial sur les réfugiés, USCRI, 2-5pp.

Sites Internet

37- www.algeria-watch.org

38- www.ares_togo.org

39- www.efai.org

40- www.icva.ch

41- www.panos.-ao.org

42- www.unhcr.com

* 1 UNHCR, Rapport 2005.

* 2 Idem

* 3 TEVOEDJRE A. (2002). Vaincre l'humiliation, p110.

* 4 UNHCR, Réunion des Experts sur les Solutions durables à la situation des déplacements Forcés en Afrique de l'Ouest (2005).

* 5 KPENONHOUN, C. (2004). Les enfants réfugiés au Bénin, p4.

* 6 Idem, p4

* 7 Loi N°90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du bénin, article 147.

* 8 UNHCR-Bénin, 2007

* 9 CARLIER J. I. ( 2008) . Les Droits de l'Homme et les solutions durables aux réfugiés. Communication, Infosec, 24 janvier

* 10 UNHCR, Regional Experts Meeting on Sustainable Solutions to Situations of Forced Displacement in West Africa, 2005, Accra, 2-6pp.

* 11 Idem, 2-6pp.

* 12Idem, 2-6pp.

* 13 Idem, 2-6pp.

* 14 Déclaration du Président de la Commission de l'Union africaine au lendemain des événements socio-politiques survenus au Togo en avril 2005 à la suite de la mort du Président GNASSINGBE Eyadema.

* 15 Le trait d'Union, l'Organe d'information du système des Nations Unies au Bénin, n°8-9, octobre 2005, pp 98-99.

* 16 DAKPO, P.C. (2003). Dynamique politique et sportive au Bénin : le mouvement sportif associatif ou les enjeux de pouvoir (1960-2001), thèse de doctorat unique des Universités, 41p

* 17 Co-auuteur de l'Acteur et le système, sa contribution à l'analyse des organisations est le développement systématique d'un cadre théorique et d'une démarche méthodologique pour l'analyse de l'action organisée.

* 18 FRIEDBERG, E. (1993). Le pouvoir et la règle dynamiques de l'action organisée, Editions du seuil, 25p.

* 19 HCR-Bénin, 2006, symbole du sous projet : 06/AB/WAF/LS/401/ED (a).

* 20 Population établie dans l'Est du delta du fleuve Niger. La dictature militaire qui régnait au Nigéria depuis 1993 se livra en 1995 à un massacre des Ogoni qui émut l'opinion internationale.

* 21 Homme politique béninois, ancien Secrétaire général adjoint de l'ONU, ancien ministre de plan, ancien député à l'Assemblée nationale du Bénin, auteur de plusieurs documents dont vaincre l'humiliation.

* 22 Propos tirés de l'enquête par entretien, CPPS

* 23 Propos tirés de l'enquête par entretien, CNAR

* 24 Magazine «Réfugiés«, n°142, vol.1, 2006.

* 25 Propos tirés de l'enquête par entretien, CPPS






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