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L'émergence de la responsabilité sociale des entreprises en Afrique : état des lieux, enjeux et perspectives

( Télécharger le fichier original )
par Urbain K. YAMEOGO
IAE Gustave Eiffel - Université Paris 12 (Créteil) - Master 2 professionnel Management de la RSE 2007
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE PARIS XII VAL DE MARNE UFR / SCIENCES DE GESTION

ECOLE SUPERIEURE DES AFFAIRES

 
 

Année universitaire 2006-2007

L'émergence de la responsabilité sociale des entreprises en
Afrique : état des lieux, enjeux et perspectives

MASTER 2 professionnel de Management de la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE)

Mémoire présenté par :
YAMEOGO Urbain Kiswend-Sida

Contact : yurbain@ yahoo.fr Tel : +33 6 30 11 00 30

Directeur de Mémoire : Michel CAPRON

Tutrice entreprise : Isabelle BLAES/Chef de Projets au CIRIDD

Remerciements

Ce travail a été le fruit d'une véritable passion. Une passion pour la RSE que le personnel enseignant de l'Ecole Supérieure des Affaires (ESA) de l'Université de Paris XII a su me donner ; une passion qui a été entretenue par celles et ceux qui, dans les épreuves de tous les jours, ont été à mes côtés ; et enfin une passion qui a été vivifiée par le CIRIDD et par toutes les personnes que j 'ai approchées tout au long de l'étude.

Je tiens tout particulièrement à remercier :

- M. Michel CAPRON, mon directeur de mémoire, dont l'assistance, les conseils et les orientations m'ont été d'une très grande utilité ;

- Mme Isabelle BLAES, responsable de projets au CIRIDD pour sa disponibilité et son encadrement : sa contribution a été essentielle et déterminante ;

- Jackie et Guy ROUILLON ainsi qu'à tous ceux qui ont contribué à tracer le chemin de ma vie et à m'indiquer la voie ;

- Toutes celles et tous ceux qui nous ont manifesté leur attention et leur intérêt en répondant à nos sollicitations ;

- Tous les proches, amis, collègues stagiaires et au personnel du CIRIDD ; - Une pensée à ma famille du Burkina Faso .

Je dédie ce travail à la mémoire de mon père Issa Jean Claude YAMEOGO décédé le 3 mai 2006.

«Si nous ne faisons pas en sorte que la mondialisation profite à tous, elle finira par ne profiter à personne» Kofi Annan, ancien Secrétaire général des Nations unies

SOMMAIRE

Introduction 4

Abstract 8

PREMIERE PARTIE : MISE EN CONTEXTE DE LA RSE EN AFRIQUE

A- Contexte économique, social et environnemental de l'Afrique 10

I- Des données macroéconomiques témoins d'une évolution positive .10

II- Une amélioration progressive des indicateurs macroéconomiques sans effet

significatif sur les indicateurs de développement humain 11

III- Situation environnementale et cadre naturel de l'Afrique 12

IV- Cartographie du tissu économique : un marché hétérogène 13

B- Réponses politiques et institutionnelles des Etats africains ..16

I- Les sentiers battus des politiques de développement : de l'Etat providence

aux CSLP-SNDD-ENPLT 16

II- Cadre juridique et institutionnel: inexistence ou inefficacité ? 20

C- L'Afrique dans l'oeil du tourbillon de la mondialisation 23

I. La gouvernance mondiale et la mondialisation 23

II. La marginalisation de l'Afrique dans la mondialisation .....25

III. La RSE et l'exigence d'une mondialisation à visage humain 27

D- Les problématiques RSE en Afrique 28

I. Gouvernance et bonnes pratiques des affaires 28

II. Droits humains ..29

III. Pratiques professionnelles : relations et conditions de travail 33

IV. Environnement ....34

V. Questions de consommation 36

VI. Contribution au développement de la société (ancrage territorial) ..37

DEUXIEME PARTIE : ETAT DES LIEUX DES CONNAISSANCES, DES PERCEPTIONS ET DES INITIATIVES EN MATIERE DE RSE EN AFRIQUE

A- Connaissance et perception de la RSE : le débat en Afrique 40

I- La RSE, une notion peu connue et un débat public émergent 40

II- Participation et perception des initiatives internationales : méconnaissance et timidité plutôt que de méfiance ou de défiance 43

B- Les initiatives en matière de RSE en Afrique ..44

I- Les initiatives nationales et continentales des acteurs 44

II- Quelques initiatives extérieures tournées vers l'Afrique 58
TROISIEME PARTIE : QUELLE RSE POUR L'AFRIQUE ?

A- Les théories fondatrices de la RSE à l'épreuve des réalités africaines ..66

I- Que faut-il entendre par réalités africaines ? 66

II- Approches occidentales de la RSE : définition et débat autour de la RSE ..75

III- Les fondements d'une vision africaine de la RSE 77

B- Les enjeux que la RSE pose pour l'Afrique .84

I- S'engager dans un processus de développement harmonieux et durable ..85

II- Tirer le meilleur parti des échanges internationaux 86

III- Relever les défis de la mondialisation ..87

IV- Instaurer le dialogue et une contribution de tous les acteurs au développement

durable 88

C- Les facteurs du développement de la RSE en Afrique : forces,

faiblesses, opportunités et contraintes 88

I- Forces .89

II- Faiblesses 90

III- Opportunités 92

IV- Les contraintes 92

CONCLUSION 93

BIBLIOGRAPHIE .94

ANNEXES I - XXVII

INTRODUCTION

L'émergence du concept de responsabilité sociale ou sociétale traduit un intérêt accru et une attention particulière que le monde entend porter aux interactions entre les Hommes d'une part et entre l'Homme, les organisations humaines et la nature d'autre part. La notion de responsabilité sociale des entreprises dénote une prise de conscience encore plus importante quant aux conséquences négatives que les activités des entreprises peuvent avoir sur la communauté humaine et l'environnement. Dans les pays développés, en Europe et aux Etatsunis en particulier, le concept de responsabilité sociale des entreprises (RSE) se trouve au centre des débats aussi bien au sein du milieu des affaires et du monde politique, que dans l'arène des organisations de la société civile et du monde académique.

Les dénonciations de pratiques irresponsables, aidées en cela par différentes catastrophes humaines, sociales et environnementales impliquant les entreprises, ont contribué à aiguiser la conscience et la sensibilité des opinions publiques nationale et internationale sur les risques globaux qu'encourt l'humanité en cas de persistance de telles pratiques non éthiques et non durables. Le débat sur la RSE s'est ainsi développé et plusieurs initiatives ont été entreprises par différents acteurs. Plus qu'une question d'actualité, la responsabilité sociale des entreprises est devenue un sujet de négociation, nationale, régionale et internationale.

La réponse des grandes entreprises ne s'est pas faite attendre. Elles ont, parallèlement au débat qui a cours, développé plusieurs initiatives pour faire face aux problématiques et enjeux de RSE et pour contribuer de manière volontaire au développement durable. Les entreprises africaines et étrangères opérant en Afrique en particulier doivent aussi faire face à des problématiques sociales, environnementales et économiques spécifiques. La façon d'intégrer ces problématiques à leurs activités quotidiennes va leur permettre ou non de contribuer à un développement durable des Etats et des communautés locales. Mais si la responsabilité sociale des entreprises est une notion qui fait débat dans les pays occidentaux et au niveau international, on ne sait pas vraiment ce qu'il en est en Afrique, alors même que ce continent est de fait concernée et interpellée au même titre que les autres par la problématique de l'émergence et de l'institutionnalisation de la responsabilité sociale des entreprises.

Divers cadres conceptuels théoriques ont été avancés en appui au débat sur la RSE, lesquels traduisent des visions et des approches occidentales. Mais ces visions et approches sont-elles partagées partout, s'appliquent-elles ou s'accommodent-elles avec les réalités spécifiques des différentes régions du monde ? Il nous est ainsi revenu de nous interroger sur les visions et les

perceptions que les acteurs africains ont ou peuvent avoir de la RSE. Les cadres conceptuels occidentaux développés jusque-là sont-ils pertinents face aux réalités africaines et quelle problématique l'émergence de la RSE pose-t-elle pour les pays africains ?

La réponse à ces questions, à notre sens, passe par l'examen du contexte social, économique et environnemental de l'Afrique pour déceler les problématiques majeures de RSE qui doivent engager les acteurs africains dans un premier temps. Dans un deuxième temps un état des lieux des connaissances, des perceptions et des initiatives en matière de RSE ainsi qu'un éclairage sur les acteurs engagés dans ces initiatives s'avèrent nécessaires. Enfin, il conviendra de mettre à l'épreuve les cadres conceptuels en se fondant sur les réalités africaines et les traditions africaines pour saisir leur pertinence .

Intérêt et justification de l'étude

Cette étude est le résultat de la convergence de plusieurs intérêts. Un intérêt exprimé par le Centre International de Ressources et d'Innovation pour le Développement durable (CIRIDD), au sein duquel j'ai effectué un stage de six (6) mois sur les projets ISO 26000 - Lignes directrices relatives à la responsabilité sociétale - et un intérêt purement personnel, non seulement pour la RSE, mais aussi pour les implications que l'émergence de la RSE peut avoir pour le continent africain.

Le CIRIDD, commanditaire de l'étude, est une association loi 1901 qui intervient essentiellement dans les domaines suivants :

- la gestion de l'information mondiale francophone sur le développement durable à

travers les sites Agora 21 et Médiaterre ( www.agora21.org www.mediaterre.org)

- le développement de formation et l'accompagnement de divers acteurs publics et privés dans la mise en oeuvre de politiques de développement durable par le moyen d'outils méthodologiques et pédagogiques

- la recherche et le développement d'innovations méthodologiques

- la gestion de projets internationaux et européens dans le cadre duquel s'inscrivent les projets ISO 26000.

Les projets ISO 26000 comprennent entre autres :

- l'animation du Réseau francophone sur le responsabilité sociétale en vue du développement durable (Réseau RSDD) dont il assure le secrétariat,

- le secrétariat du Groupe francophone du Groupe de travail international ISO 26000 - Lignes directrices relatives à la responsabilité sociétale,

- l'animation de groupes de travail entreprises et collectivités territoriales sur les textes des lignes directrices au niveau de la Région Rhône-Alpes.

Cette étude trouve sa justification dans la volonté du CIRIDD de faciliter le renforcement de capacités des membres africains du réseau RSDD, en prenant connaissance des initiatives et des acteurs présents en Afrique sur le sujet de la responsabilité sociétale.

Démarche et méthodologie de l'étude

Notre étude s'est déroulé en 3 phases.

Une première phase exploratoire nous a conduit à faire de la recherche bibliographique sur le sujet et à avoir des entretiens avec :

- Mme Isabelle BLAES, coordonnatrice du réseau RSDD et tutrice de ce travail de recherche

- M. Christian BRODHAG, délégué interministériel au développement durable/France - M. François FATOUX, délégué général de l'ORSE

- M. Vincent COMMENNE, chercheur, coordonnateur d'une étude sur la RSE dans les

5 continents et responsable du Réseau européen pour une consommation responsable

- Ainsi que des échanges téléphoniques avec des membres africains du réseau du

RSDD.

Ce travail exploratoire nous a permis d'orienter notre approche et notre démarche dans la collecte des données et de l'information.

Une seconde phase du travail nous a permis de recueillir des données primaires et secondaires par l'élaboration de questionnaires « multi-acteurs » qui ont été diffusés auprès d'acteurs africains et français opérant en Afrique et auprès d'autres personnes intéressés par les enjeux de RSE dans les pays du sud et en Afrique en particulier. Parallèlement, le travail de recherche et d'analyse documentaire s'est poursuivit à travers internet essentiellement.

La diffusion du questionnaire s'est faite à travers divers réseaux et nous estimons que plus de 500 personnes ont été destinataires desdits questionnaires et nous marquons 5% de réponses effectives. Nous avons pu par ailleurs réaliser quelques entretiens avec des acteurs français qui ont montré un intérêt certain pour l'étude. Les éléments de réponses ainsi recueillis nous nous ont permis de croiser les informations, les visions et les approches avec celles fournies par les acteurs africains eux-même.

La troisième phase a consisté au dépouillement et à l'analyse des données à la lumière des informations que nous avons pu rassembler par la recherche et l'analyse documentaire.

Abstract

The emergence of corporate social responsibility in Africa: Inventory, stakes and perspectives

Corporate social responsibility (CSR) is nowadays subject to national, regional and international negotiation, initiatives and debates. These debates are real and often stormy in the developed countries while the true stakes are in the least developed countries, particularly in Africa. However, we ignore the knowledge of and acceptance of corporate social responsibility in Africa. Our study so aims at highlighting the knowledge, the perceptions of CSR and the initiatives of African actors to face their specific CSR issues.

African and foreign companies operating in Africa have to face specific social, environmental and economic challenges and stakes : poverty and local community development, bribery, access to essential products and services, complicity in human rights abuses, HIV and other health issues, professional and environmental concerns, etc. The way of integrating these stakes in their daily activities will allow them or not to contribute to sustainable development of African countries and local communities.

But CSR is not well known in most African countries yet. In some countries, we can note emerging initiatives involving different actors interested in the debate :

- In some countries, public authorities take part in international initiatives like EITI and ISO 26000 process. They create national mirror committees gathering national standardization institutes and other stakeholders and actors and they participate in ISO meetings, etc. But tackling poverty is the major concern of public authorities. Most of them are leading poverty tackling strategies and politics to meet the millennium development goals with United Nations bodies and international financial institution's support. Such public initiatives sometimes associate private actors notably enterprises and civil society organizations in the whole process. This creates a base from which they can deal with CSR.

- Business and professional organizations are interested in finding ways to take effective part in international exchanges. They have to respect the national or regional legal and institutional framework and to be compliant with their partners or with the leading companies' requirements. For the subsidiaries of international corporations, the compliance to the group strategy gradually favours CSR commitment and initiatives. The Global Compact networks are privileged places for CSR and sustainable

development commitment for national corporations. Business pays attention to social issues particularly those which have repercussions on the companies. For instance, companies are concerned and committed to AIDS tackling because it also has consequences on employees performance and productivity;

- Civil society organizations (trade unions and NGO) are increasingly interested in issues connected to companies thanks to cooperation with foreign organizations. Their participation in world and regional social forums and other private initiatives like «Publish what you pay» help them build skills in analysing and discussing economic globalization issues and dealing with CSR issues;

- In some countries, notably in the English-speaking countries, the academic and

research centres are also interested in the development of new concepts affecting

companies through management, business ethics and corporate governance teaching.

- The international actors, the United Nations bodies in particular, have a major role in

carrying out and encouraging CSR initiatives. International actors and initiatives

therefore contribute to reinforce CSR debate and to shape the African CSR vision. However, the differences of economic, political, social and environmental contexts and the vision of the company role in the society led us to question the relevance of the western CSR approaches considering African realities, traditions and culture. An African CSR approach should integrate a cultural dimension and take root in African practices. Some of these practices can be considered as CSR drivers or silent CSR. It should put forward the social link and the requirements of solidarity, benevolence to others and to the community, legitimacy, the respect for community cultures and values. These approaches can so found, justify or sustain the development of CSR in Africa as an answer to globalization and development stakes.

PREMIERE PARTIE : MISE EN CONTEXTE DE LA RSE EN AFRIQUE

A- Contexte économique, social et environnemental de l'Afrique

L'Afrique s'étend sur 30 millions de km2 et compte plus de 750 millions d'habitants majoritairement jeunes1, répartis sur 53 pays avec une forte croissance démographique. Grenier de matières premières, le continent dispose d'énormes richesses en ressources naturelles mais connaît cependant une situation d'extrême pauvreté décrite par différents indicateurs macroéconomiques et de développement humain.

I. Des données macroéconomiques témoins d'une évolution positive

Les données macroéconomiques actualisées de la Banque mondiale sur l'Afrique montrent une forte croissance du produit intérieur brut (PIB) et du produit national brut (PNB) depuis 2000 avec une inflation annuelle stabilisée autour de 7% depuis quelques années.

Cependant cette croissance décrite par certains indicateurs macro-économiques contraste avec le niveau de développement humain du continent. La pauvreté persiste et la croissance ne se traduit pas en amélioration des conditions de vie pour les populations.

Tableau synthétique d'indicateurs

Indicateurs macro-économiques

2000

2005

2006

Produits Intérieur Brut (PIB) (en milliards US$)

341.7

630,8

709.5

Croissance du PIB (% annuelle)

3.5

5.7

5.6

Produit national Brut (PNB) /habitant (US$)

485.1

743

841.8

Taux d'inflation (% annuelle)

6.1

7.9

6.9

Exportation de biens et de services (% du PIB)

32.6

33.6

32.1

Importation de biens et de services (% du PIB)

30.9

34.7

36.5

Indicateurs de Développement Humain

2000

2005

2006

Population totale (millions)

668.9

752,6

770.3

Taux de croissance de la population (% annuelle)

2.6

2,3

2.3

Espérance de vie à la naissance (années)

46.7

47

..

Prévalence de la malnutrition, weight for age (% d'enfant

..

29.5

..

1 Près de la moitié des habitants de l'Ouganda et du Niger ont moins de 14 ans et selon les projections de l'ONU, la population de l'Afrique passerait de 750 millions actuellement à 1,5 milliards voire 2 milliards en 2050.

.. 5.8

..

.. 59.3

..

de moins de 5 ans)

Prévalence du VIH, total (% des personnes âgées de 15-49)

Taux d'alphabétisation total des adultes (% de personnes de 15 ans et au-delà)

Source : World development indicators, 2006

L'Afrique pèse moins de 2% dans le commerce mondial et les investissements directs étrangers (IDE)2 vers l'Afrique ne représentent que 3% du total mondial. Ces investissements sont, de surcroît, orientés vers certains secteurs spécifiques (pétrole et mines) et vers les pays détenteurs de ces ressources.

II. Une amélioration progressive des indicateurs macroéconomiques sans effet significatif sur les indicateurs de développement humain

Le Rapport 2006 du PNUD fournit entre autres des indices synthétiques sur le développement humain (IDH) et la pauvreté humaine (IPH). Il ressort de ce rapport l'existence d'écarts significatifs en termes de développement, de bien-être et d'espérance de vie dans le monde. Ces écarts et inégalités persistantes sont perceptibles entre les pays industrialisés et les pays en développement d'une part, entre les différentes régions du monde d'autre part , et enfin à l'intérieur même des pays.

Source : rapport IDH, PNUD, 2006 Source : OCDE

2 Le rapport de la CNUCED montre aussi que l'Afrique subsaharienne attire un volume d'IDE nettement plus important qu'avant, mais que l'IDE fait encore l'objet d'une forte concentration autour de quelques pays et de quelques secteurs, les ressources naturelles et les services bancaires en l'occurrence.

Le premier tableau montre que depuis 1990 l'Afrique subsaharienne a connu une stagnation des indicateurs de développement humain par rapport aux autres parties du monde. Le rapport 2006 établit 3 catégories de niveau de développement humain. Vingt et huit (28) des trente et un (31) pays de la troisième catégorie des pays à faible développement humain se trouvent en Afrique subsaharienne. C'est aussi dans les pays africains que les écarts sont très prononcés avec un fossé qui ne cesse de se creuser entre riches et pauvres. Selon le rapport de suivi des objectifs du millénaire pour le développement (OMD), le taux de pauvreté resterait supérieur à 38%3. Aucun des OMD ne pourrait être atteint d'ici 2015.

III. Situation environnementale et cadre naturel de l'Afrique

L'Afrique possède un paysage très riche et varié avec une grande diversité en termes de végétation, de pluviométrie, de climats et d'espèces aussi bien végétales qu'animales.

Selon le deuxième rapport du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) sur l'avenir de l'environnement en Afrique, « les forêts et les régions boisées d'Afrique couvrent environ 650 millions ha (21,8% de la surface terrestre), représentant 16,8% du couvert forestier mondial ». Ces forêts sont de types très variés comme le montre la carte ci- dessous.

L'ensemble de la région connaît par ailleurs une grande diversité climatique. On distingue, suivant les zones, des climats froid, tempéré, chaud, sec et humide, influencés par la diminution constante de la pluviométrie et les sécheresses.

 
 

Source : PNUE

3 Le rapport de suivi des objectifs du millénaire pour le développement (OMD) est établi par la Banque mondiale et le FMI

Biodiversité : L'Afrique demeure un paradis de la biodiversité en dépit de changements profonds causés par la perte des habitats (en raison de la conversion des terres, la fragmentation des habitats, les IAS) et une utilisation non durable :

- Environ 1 000 espèces vertébrées sont présentes dans tout juste 4 des 119 écorégions d'Afrique (Burgess et autres 2004).

- L'Afrique compte un quart (1 229 espèces) des espèces mammifères mondiales, soit environ 4 700 (Brooks et autres 2001)

- L'Afrique abrite plus d'un cinquième (2 000) des espèces aviaires mondiales, de l'ordre de 10 000 (Burgess et autres 2004)

- L'Afrique possède environ 950 espèces d'amphibiens (GAA 2004) et tous les ans, de nouvelles espèces sont découvertes.

- On trouve entre 40 000 et 60 000 espèces végétales sur le continent africain (Beentje 1996), dont environ 35 000 sont endémiques.

- L'Afrique compte au moins 2 000 espèces piscicoles, un chiffre estimé comme représentant la plus grande richesse d'espèces au monde (Klopper et autres 2002) Source : PNUE, Rapport 2 sur l'avenir de l'environnement en Afrique, 2006

Le sous-sol regorge d'énormes potentialités minières. Il contient environ 30 % des réserves mondiales en minéraux, dont 40 % de l'or, 60 % du cobalt et 90 % du platine selon un rapport ONU 2002 repris par le PNUE. Rare dans certaines zones, la disponibilité des ressources en eau est affectée par les variations pluviométriques et l'absence de retenues d'eau.

Selon le rapport du PNUE précité, l'incidence croissante de la pollution crée de nouvelles contraintes pour le bien-être des populations et l'intégrité environnementale, bien que l'Afrique soit un pollueur relativement minime à l'échelle mondiale. La pollution atmosphérique est favorisée par l'urbanisation galopante, l'importation et l'utilisation de véhicules d'occasion et le manque d'efficacité des processus de fabrication industrielle.

IV. Cartographie du tissu économique : un marché hétérogène

a) La cohabitation de l'économie formelle avec l'économie informelle

Le marché économique africain est très particulier en ce sens que l'économie formelle et l'économie informelle y cohabitent officiellement. On note même une prédominance du secteur informel dans la plupart des pays. La Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation souligne dans son rapport que : « Dans la plupart des pays en développement, l'économie informelle tient une large place et cette activité économique

parallèle souffre d'un manque de reconnaissance et de protection dans les cadres juridiques ou réglementaires officiels».

Le secteur informel est défini par l'UEMOA (Union Economique et Monétaire Ouest Africaine) comme l'ensemble des unités de production informelles (UPI) dépourvues d'un numéro d'enregistrement administratif et/ou de comptabilité écrite formelle. Il englobe la grande majorité des travailleurs allant des petites entreprises aux activités de survie, incluant non seulement les travailleurs indépendants et les travailleurs familiaux mais aussi la maind'oeuvre salariée sous diverses formes. Les conclusions de l'étude de l'UEMOA4 sur le secteur informel dans les principales agglomérations de sept Etats membres sont très révélatrices de l'hétérogénéité des marchés et des caractéristiques du secteur informel dans l'économie des pays africains qui le distinguent du secteur formel.

Le secteur informel dans les principales agglomérations de sept Etats membres de
l'UEMOA : performances, insertion perspectives

Les UPI exerçant dans des activités marchandes des 7 agglomérations génèrent plus de 2,3 millions d'emplois, confirmant que le secteur informel est de loin le premier pourvoyeur d'emplois en milieu urbain. Les caractéristiques du secteur informel :

- il s'agit massivement de micro-unités (1,53 personnes par UPI)

- la précarité et l'absence de protection sociale : 31% des emplois dépendants sont salariés mais seul 5% des employés bénéficient d'un contrat écrit

- le revenu moyen du secteur informel est supérieur au salaire minimum

- le taux d'enregistrement des UPI dans les différents registres officiels sont très faibles notamment l'enregistrement au fisc (moins de 1% des UPI des 7 capitales)

- la faiblesse ou l'absence de capital dans le processus de production : les principales sources de financement du capital sont l'épargne, le don ou l'héritage (entre 65% et 95% de la valeur du capital). Les autres modes de financement tels que le micro-crédit ou le crédit bancaire restent rares.

Source : UEMOA

4 Les enquêtes auprès des Unités de Production Informelles (UPI) dans les capitales économiques des pays de l'UEMOA ont été réalisées entre la fin 2001 (Bénin) et la mi 2003 (Sénégal).Les activités informelles sont plus tournées vers les secteurs de circulation des biens (45% des UPI exercent dans la branche «commerce»), les deux autres secteurs se partageant également le complément (28% pour les UPI industrielles et 26% pour les UPI de services).

Le secteur formel comprend les petites et moyennes entreprises locales, les grandes entreprises nationales privées, publiques et semi-publiques très structurées et les implantations des multinationales rompues à la gestion moderne. On s'accorde à reconnaître que dans la dernière décennie, et consécutivement aux ajustements structurels des économies africaines, le secteur privé s'est développé de manière prodigieuse5.

b) Une présence relativement variable de multinationales

La présence des multinationales est relativement variable suivant le niveau de développement des pays, des secteurs et des intérêts en termes de ressources et d'opportunités de marchés. Les investissements directs étrangers sont essentiellement orientés vers les secteurs pétroliers et autres industries extractives (mines)6. Les pays qui regorgent de ressources pétrolières et minières sont par conséquent ceux qui recueillent le plus d'investissements directs étrangers et d'implantations d'entreprises multinationales. Les multinationales investissent ainsi les secteurs productifs des mines, du pétrole, de l'énergie mais aussi les secteurs du BTP (Bâtiments et travaux publics), des banques et finances, de l'agroalimentaire, du textile, des télécommunications, etc. Les pays comme l'Afrique du sud, le Nigeria, le Soudan, le Maroc, la Tunisie, le Tchad, la Guinée Equatoriale, la République Démocratique du Congo (RDC), l'Algérie, et la Tunisie accueillent la grande majorité des investissements directs étrangers et des implantations multinationales du continent. Beaucoup d'entre eux, paradoxalement, connaissent des situations de crise, de troubles politiques ou sociaux voire de guerres civiles. Le Groupe de recherche sur les activités minières en Afrique note que « dans certaines circonstances, l'investissement dans certains pays riches en ressources naturelles peut alimenter des conflits et représenter un facteur inhibiteur de développement7.

5 « Cependant là où le secteur privé est fort, il est souvent dominé soit par des minorités ethniques, familiales, asiatiques en Afrique de l'Est et blancs en Afrique du Sud, soit par des filiales de sociétés transnationales ». A.S.

Bhalla (sous la direction de), Mondialisation, croissance et marginalisation, CRDI, 1998

6 Le Fonds Monétaire International définit l'IDE comme des investissements « effectués dans le but d'acquérir un intérêt durable dans une entreprise exerçant ses activités sur le territoire d'une économie autre que celle de l'investisseur, le but de ce dernier étant d'avoir un pouvoir de décision effectif dans la gestion de l'entreprise » Manuel de la balance des paiements, Washington, 4ème éd., 1977, p. 136

7 La gouvernance des activités minières en Afrique : une responsabilité partagée, mémoire présenté par Bonnie Campbell devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, dans le cadre de l'Examen de l'Énoncé de politique internationale du Canada, Novembre 2005 http://www.unites.uqam.ca/grama/pdf/Memoire Enonce politique int Can.pdf

Pendant très longtemps l'Etat a été et demeure dans une certaine mesure un acteur économique de premier plan. Son intervention sur le plan économique et social s'est faite de diverses manières en réponse aux défis du développement. La question qui se pose est celle de la place et du rôle des acteurs économiques privés notamment des entreprises qui ont vu leur influence croître avec la mondialisation : plus d'influence n'appelle-t-elle pas plus de responsabilité ?

B- Réponses politiques et institutionnelles des Etats africains

I- Les sentiers battus des politiques de développement : de l'Etat providence aux CSLP-SNDD-ENPLT

Les réponses des pouvoirs publics africains aux enjeux du développement se sont traduites par la formulation et la mise en oeuvre de politiques et stratégies intégrant plus ou moins les acteurs privés. Nous distinguerons d'une part les réponses formulées au travers de stratégies et de politiques globales et sectorielles et d'autre part les réponses au travers de cadres juridique et institutionnel national et/ou régional.

a. la mission de service public dévolue aux entreprises publiques dans l'Etat providence

Avec les indépendances, les Etats africains ont hérité d'entreprises publiques dans divers secteurs économiques qu'ils ont développées par la suite. En dehors de quelques implantations de multinationales des anciennes métropoles, les pays ne disposaient pas de secteur privé fort. L'Etat devait ainsi assurer des services dans le champ économique à travers notamment les services publics industriels et commerciaux. La présence de l'Etat providence était quasi permanente dans tous les secteurs, soit en tant qu'acteur économique ordinaire, soit en tant que régulateur. La mission de service public et la responsabilité de la gestion et de la gouvernance des activités économiques suggèrent que l'entreprise étatique devait inscrire son activité dans la satisfaction de l'intérêt général et dans le long terme. A ce titre on peut être amené à penser que les entreprises publiques intégraient, dans une certaine mesure, des considérations autres qu'économiques à leurs activités économiques. On ne peut pour autant affirmer péremptoirement qu'elles furent socialement responsables. Certaines problématiques notamment en matière de gouvernance, de bonnes pratiques des affaires, de protection des droits humains ou de l'environnement n'ont pas toujours été la préoccupation des managers

publics. Les difficultés qui ont découlé de mauvaises gestions ont été le justificatif des divers programmes d'ajustement qui ont préconisé un rôle plus important du secteur privé .

b. les programmes d'ajustement structurel (PAS) ou le rite initiatique manqué à la mondialisation

Des années 80 à nos jours, l'Afrique a été le champ de mise en oeuvre de programmes de redressement économique dits d'ajustement structurel (PAS). Préconisés par les institutions financières internationales (IFI) avec comme objectif principal l'amélioration des indicateurs macroéconomiques et des politiques sectorielles, les programmes d'ajustement structurel devaient conduire à cantonner les interventions de l'Etat dans les domaines qui relèveraient de sa compétence exclusive (sécurité, justice, défense, diplomatie) ou qui justifient de la mission de service public. Ils devaient de ce fait favoriser le développement du secteur privé par l'ouverture de l'économie à la concurrence interne et internationale. Ces programmes et réformes économiques se sont soldés, selon certains acteurs, par la détérioration des capacités des gouvernements africains à gérer leurs économies. Pendant ce temps, selon le rapport de la commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation, le développement du secteur privé n'a pas été suffisant pour compenser la diminution du rôle de l'État.

Des codes fiscaux et d'investissement plus attractifs les uns que les autres dénotent d'une compétition entre Etats pour attirer les investissements étrangers. Et cette compétition tirée vers le bas s'est souvent soldée par des législations peu protectrices des travailleurs et de l'environnement. Les investissements directs étrangers n'ont pas afflué malgré la multiplication des réformes pour assainir le milieu des affaires. Bien au contraire, investir en Afrique est toujours considéré comme très potentiellement risqué : risques liés aux instabilités politiques, à l'imprévisibilité économique et financière, aux risques de corruption et de complicité pour des violations de droits humains et de ce fait, un risque d'atteinte à l'image associé aux investissements. Certains secteurs ont été investis par des multinationales et des PME locales. L'Etat, premier employeur du secteur formel, a été contraint à réduire ses effectifs par des licenciements8 ou par le non recrutement dans les secteurs sociaux. Les secteurs non productifs et peu rentables ont été délaissés, cédant la place à la pauvreté. Ce qui devrait donner sa place à l'Afrique dans le concert de la mondialisation, s'est soldé comme un rite initiatique manqué puisqu'elle a contribué à la marginalisation de l'Afrique.

8 Les plans sociaux sont intervenus dans les entreprises qui ont été privatisées. Dans certains cas un accord entre l'entreprise repreneur et l'Etat protégeait les employés des licenciements pour motif économique à la reprise.

c. ENPLT - CSLP - SNDD : renouveau des politiques publiques ou vision intégrationniste et prospective du développement ?

1. Les Etudes Nationales de Prospectives à Long Terme (ENPLT)

Les études nationales de prospective à long terme, initiées dans le cadre du projet Futurs africains9, constituent une innovation majeure aussi bien dans leur conception, dans leurs objectifs qu'au niveau des acteurs qu'elles entendent impliquer. Elles s'intéressent à la question du développement dans toutes ses dimensions dans un horizon temporel de 25 ans. Les ENPLT s'inscrivent ainsi dans une vision globale, analytique et prospective du développement et accordent une place de choix au rôle du secteur privé et des autres parties prenantes de la société. Si les études nationales de prospective à long terme reconnaissent un rôle important du secteur privé, il n'apparaît nullement dans ces documents les conséquences probables/possibles de l'implication des acteurs privés ayant la volonté de s'inscrire dans une démarche socialement responsable. Cela semble cependant relever plus de la méconnaissance du concept que de l'omission volontaire. Les études nationales de prospective à long terme nous semblent pourtant bien indiquées pour aborder les questions de RSE pour plusieurs raisons :

- elles s'inscrivent dans une vision à long terme et non dans le court terme ;

- elles entendent impliquer tous les acteurs du développement y compris les entreprises et la société civile ;

- elles construisent une vision intégrationniste du développement et des scénarios d'interaction des acteurs avec des hypothèses d'analyse ainsi que les réponses envisageables

- elles entendent servir de base à l'élaboration et à la mise en oeuvre de certains instruments et outils de politique de développement.

L'opérationnalisation des études nationales de prospective à long terme a servi de base pour la planification stratégique des cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté en faveur de la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement.

9 Futurs africains est un programme qui apporte un appui technique à l'élaboration d'études nationales prospectives de long terme sur des enjeux stratégiques. Etabli au niveau régional par le PNUD en 1992, elle vise à promouvoir l'institutionnalisation d'une approche prospective dans la gestion du développement en Afrique.

2. Les Cadres Stratégiques de Lutte contre la Pauvreté (CSLP) et les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD)

Depuis que le Sommet du Millénaire10 a érigé la question de la pauvreté en enjeu global pour l'humanité et comme premier objectif du millénaire pour le développement les Etats se sont fermement engagé en faveur de la lutte contre la pauvreté, sa réduction et voire son éradication. Il s'en est suivi l'élaboration de Documents stratégiques de réduction de la pauvreté (DSRP) 11 ou de Cadres stratégiques nationaux de lutte contre la pauvreté (CSLP), élaborés avec l'appui d'organismes des Nations Unies, notamment du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), et financés par divers bailleurs de fonds étrangers. Après l'échec de l'ajustement structurel, les institutions financières internationales se sont positionnées dans le financement et l'accompagnement des pouvoirs publics dans la lutte contre la pauvreté pour favoriser l'accès des populations aux biens et services de base. Il s'agit de processus multi-acteurs qui mobilisent l'administration, le secteur public, le secteur privé, ainsi que les organisations de la société civile à divers stades et à divers degrés. Les participants à la consultation, que nous avons effectuée par le biais de questionnaires, nous indiquent que presque tous les pays africains disposent d'un document stratégique de réduction de la pauvreté. Pour certains participants, cela dénote une volonté de fédérer les énergies des acteurs du développement par leur implication dans des processus de consultation et de concertation. Pour d'autres en revanche, les Etats n'ont pas d'autres choix que d'élaborer un cadre stratégique de lutte contre la pauvreté. Ils s'inscrivent ainsi dans une logique de mobilisation de ressources financières à travers diverses aides pour financer des projets.

3. Les Stratégies Nationales de Développement Durable

Si l'on ne devait s'en tenir qu'aux documents existants, on peut affirmer sans se tromper que le développement durable est la chose la mieux partagée en Afrique. Les réponses aux questionnaires adressés à divers acteurs africains révèlent que la plupart des Etats africains disposent de Stratégies Nationales de Développement Durable (SNDD) ou d'un outil

10 Il s'est tenu à New York au siège des Nations Unies du 6 au 8 septembre 2000

11 Le DSRP est établi à travers un processus participatif qui mobilise diverses parties prenantes internes et externes, notamment les bailleurs de fonds et les IFI. Il décrit les politiques, projets et programmes macroéconomiques sur une période de 3 ans ou plus. GOHY Gilles , dans son article Pauvreté : les mots et les faits au Bénin dénonce « leur ton paternaliste, condescendant et au demeurant dogmatique » , La pauvreté, une fatalité ? (ouvrage collectif)

stratégique équivalent. Les pays africains ne sont pas non plus en reste dans la signature voire les ratifications de conventions internationales de protection de l'environnement, des droits humains, et du travail. Cependant, ces SNDD, contrairement aux SNDD européennes, sont très axées sur les problématiques environnementales. Le développement durable est ainsi vu uniquement sous l'angle de la protection de l'environnement, de la biodiversité, de la gestion intégré des ressources naturelles notamment des eaux , la gestion des déchets, les pollutions. C'est ce qui sans doute justifie l'existence dans beaucoup de pays à la fois de SNDD et des Documents stratégiques de lutte contre la pauvreté dont la coordination est loin d'être évidente. Une bonne coordination des politiques passe aussi, à notre avis, par un cadre juridique et institutionnel propice et cohérent avec les objectifs et les défis du développement.

II- Cadre juridique et institutionnel : inexistence ou inefficacité ?

Le cadre juridique et institutionnel en Afrique s'articule autour de politiques développées au sein d'organisations d'intégration régionale ou sous-régionale et de législations communautaires ou nationales régissant la vie et l'activité des entreprises qui peuvent servir d'appui ou de fondement à la RSE.

a) Le cadre posé par les organisations d'intégration régionale en Afrique

1) La stratégie de l'Union Africaine pour assurer un développement durable au 21ème siècle : le NEPAD

Née des cendres de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA), l'Union Africaine (UA) est une organisation de coopération intergouvernementale qui ambitionne d'être une organisation d'intégration à la fois politique et économique. Si l'intégration politique peine à se faire, l'intégration économique semble se dessiner à travers le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD), une initiative qui se positionne comme une stratégie intégrée de développement. Il est à la fois une vision et un cadre stratégique de développement destiné à «stopper la marginalisation persistante de l'Afrique dans le processus de mondialisation ». Il vise à promouvoir un cadre socio-économique intégré de développement pour l'Afrique par la prise en compte des défis majeurs qui se posent au continent tels que l'accroissement de la pauvreté et de la misère, la persistance du sous- développement économique. Il ambitionne d'éradiquer la pauvreté par la croissance et le développement durable des pays individuellement et collectivement. Sa stratégie de développement durable fixe comme priorités :

- l'établissement des conditions favorables au développement durable à travers entre autres la démocratie et la bonne gouvernance politique, économique et d'entreprise, le renforcement des capacités et le développement de compétences ;

- la réforme des politiques et l'augmentation des investissements dans des secteurs prioritaires : l'agriculture, le développement humain (santé, éducation, sciences et technologies), les infrastructures ( l'énergie, les transports, l'eau et l'assainissement), le commerce (la promotion de la diversité de la production et des exportations, le développement du commerce intra-africain et l'accès aux marchés des pays développés, l'environnement) ;

- la mobilisation des ressources aussi bien internes qu'étrangers

Ce plan stratégique de développement de l'Afrique est devenu aujourd'hui la référence ultime et pose les cadres d'un renforcement du secteur privé et de la participation de celui-ci à tous les stades du développement. Par voie de conséquence, elle conduit l'entreprise à envisager voire assumer d'autres responsabilités vis-à-vis du développement africain. D'autres organisations intergouvernementales notamment ouest africaines, l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) posent des cadres propices à l'éclosion de la RSE.

2. Le programme qualité de l'UEMOA

L'UEMOA, qui regroupe 8 pays ouest africains (Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo) avec une superficie de 3,5 millions de Km2 et 70 millions d'habitants, est l'organisation africaine d'intégration la plus avancée. Elle dispose d'une monnaie unique, d'un marché commun en vigueur depuis le 1er janvier 2000. Ses pays membres partagent des critères de convergence macro-économique et des politiques communes dans certains domaines comme : la politique agricole de l'Union (PAU), la politique industrielle et le programme qualité12. Le programme qualité de l'Union a conduit à l'adoption d'un schéma d'harmonisation des activités d'accréditation, de certification, de normalisation et de métrologie visant à favoriser l'insertion harmonieuse des Etats dans le processus de mondialisation par la levée des obstacles techniques au commerce. Il met ainsi en place non seulement un cadre juridique de coopération régionale en matière de qualité, mais aussi des mécanismes de coordination et de pilotage ainsi que des structures techniques de soutien.

12 Débuté en septembre 2001, le programme qualité s'est clôturé en décembre 2005 pour laisser la place à une structure désormais permanente que constitue le schéma d'harmonisation des activités d'accréditation, de certification, de normalisation et de métrologie

L'UEMOA se pose par ailleurs des questions sur l'opportunité d'intégrer la problématique RSE dans le cadre de ce programme.

II. Le cadre juridique

Au plan juridique stricto sensu, les Etats africains disposent de diverses législations régissant la création et l'activité des entreprises. La tendance a été d'évoluer vers une harmonisation des systèmes juridiques et comptables, une volonté qui s'est matérialisée avec l'adoption des actes uniformes de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) par 16 Etats francophones13 et d'un système comptable ouest africain (SYSCOA) au sein de l'UEMOA. L'obligation de reddition de comptes financières est consacrée par les articles 13 à 17 de l'acte uniforme sur le droit commercial général de l'OHADA et l'article 19 du règlement relatif au droit comptable dans les Etats de l'UEMOA. Cependant ces textes n'obligent nullement, ni ne recommandent aux entreprises l'intégration de considérations d'ordre social ou environnemental dans leurs rapports ou dans leur comptabilité. La plupart des législations nationales exigent cependant la conduite d'étude d'impact environnemental pour l'exécution de projets à grand impact environnemental ou l'établissement de notice voire de mini-notice d'impact environnemental pour les projets de moindre ampleur. Le cadre juridique peut être complété par l'ensemble des engagements internationaux pris par les Etats africains14 aussi bien en matière de droits humains, les conventions de l'organisation internationale du travail (OIT) et les conventions relatives à la protection de l'environnement. Bien qu'elles ne soient pas les destinataires directs des obligations créées par les conventions internationales, force est de reconnaître que les entreprises ne sauraient entreprendre des activités contraires à l'esprit et à la lettre desdites conventions. La déclaration universelle des droits de l'Homme, renforcée par une autre résolution de l'assemblée générale des Nations Unies, énonce le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales universellement reconnus15. Il faut cependant noter que, aussi bien les Etats que les acteurs économiques

13 Il faut noter que dans les actes uniformes de l'OHADA, on n'a aucune définition de l'entreprise. Celle-ci est traduite par la notion de « commerçant personne morale » ou de « société commerciale »

14 En annexe 1, le récapitulatif des principales conventions et l'état des signatures et ratification par les Etats

15 Assemblée générale de Nations Unies, Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales universellement reconnus, Résolution de 53/144 du 8 mars 1999

privés africains, sont insérés dans un cadre mondial dont la maîtrise constitue un des enjeux majeurs.

C- L'Afrique dans l'oeil du tourbillon de la mondialisation16

La mondialisation étant un phénomène complexe, notre propos ne visera pas à traiter des méandres du phénomène mais simplement à cerner le concept en lien avec la RSE. Nous chercherons à comprendre ses conséquences pour l'Afrique et identifier les réponses que l'émergence de la RSE peut apporter.

I. La gouvernance mondiale et la mondialisation

La gouvernance mondiale peut être définie comme l'ensemble des processus par lesquels des règles collectives sont élaborées, décidées, légitimées, mises en oeuvre et contrôlées. Zaki LAÏDI la conçoit encore comme « l'ensemble des processus par lesquels les sociétés politique, économique et civile, négocient les modalités et les formes d'arrangements sociaux planétaires sur la base du principe de la coopération conflictuelle » 17 . Autrefois les Etats - nations étaient les acteurs principaux des relations internationales. Le principe de l'égalité souveraine entre Etats justifiait ainsi l'espérance ou l'illusion d'une gouvernance mondiale démocratique. Cependant cette illusion a été mise à rude épreuve avec l'apparition de nouveaux acteurs comme les organisations de la société civile (associations, ONG, syndicats, etc.), les organisations internationales et surtout les entreprises multinationales et transnationales, voire l'individu. Les entreprises multinationales, dont la puissance tend à supplanter celle des Etats, sont devenues des acteurs clés de la vie politique et économique dans un monde de plus en plus globalisé dominé par l'économie de marché. La multiplicité des acteurs et la prédominance de l'acteur privé n'est pas sans conséquence sur la gouvernance mondiale. Ces conséquences ne sont pas vécues de la même manière par les Etats, les régions et les continents. La Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation souligne dans son rapport que dans le contexte de mondialisation, on note une

16 Selon la Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation (CMDSM), le terme «mondialisation» est devenu courant dans les années quatre-vingt-dix, Une mondialisation juste : créer des opportunités pour tous, OIT, rapport 2004.

17 Z. LAÏDI, Les enjeux de la gouvernance mondiale, http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/FD001432.pdf

« tendance foncière de la gouvernance mondiale à favoriser les intérêts des acteurs puissants, essentiellement basés dans les pays riches »18.

La mondialisation peut être saisie à un double niveau en fonction des caractéristiques propres qu'elle dégage. On peut ainsi distinguer d'une part la mondialisation économico-financière, d'autre part la mondialisation politico-idéologique et enfin la mondialisation culturelle.

La mondialisation économico-financière se caractérise essentiellement par le développement des échanges de biens, de services et de technologies, une grande fluidité des flux financiers et des investissements directs étrangers entraînant l'internationalisation du système productif. Le monde est devenu, selon l'expression consacrée, « un village planétaire ». Les facteurs qui ont contribué à la construction du processus sont multiples. Nous pouvons citer :

- la « multilatéralisation » des relations internationales en réponse aux crises

internationales ;

- l'ouverture des frontières avec le démantèlement des barrières douanières pour favoriser les échanges internationaux comme vecteur de paix et de sécurité internationale ;

- le développement technologique notamment l'explosion des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) ;

- le développement des marchés et des flux financiers ainsi que l'expansion des IDE19 ;

- et l'influence des nouveaux acteurs internationaux notamment les organisations

internationales, les institutions financières internationales et les entreprises

multinationales.

La mondialisation économique a eu pour effets le développement sans précédent du volume et du rythme des échanges commerciaux internationaux. Elle a aussi favorisé la disponibilité, l'accessibilité et la diversité des biens et des services, une relative stabilisation des relations internationales, le développement et la croissance d'acteurs économiques, notamment des entreprises multinationales et transnationales.

Avec la chute du mur de Berlin et l'effondrement de l'URSS, le libéralisme connaît un triomphe incontestable. Cela s'est traduit au niveau des Etats par l'instauration de l'état de droit et de la démocratie libérale. Le libéralisme est devenu, pour ainsi dire, le fondement idéologique de l'organisation politique et économique dans beaucoup d'Etats. Les Etats

18 rapport de la Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation, op. cit.

19 « L'intégration rapide des marchés financiers au cours des vingt dernières années représente l'aspect le plus spectaculaire de la mondialisation. » rapport de la Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation, p.30

africains n'ont pas échappé à la règle. La mondialisation libérale a conduit, selon Jean COUS SY20, à une double libéralisation : une libéralisation internationale (ouverture des frontières et des marchés) prolongée par une libéralisation interne (démantèlement des monopoles publiques dans l'économie).

A peine sortie des indépendances, balbutiant sur les sentiers du développement, l'Afrique se trouve confrontée au phénomène de mondialisation et en prise avec les contraintes internationales. Les effets positifs de la mondialisation n'ont pas été équitables ni profitables pour tous les pays du monde, ni sur tous les plans. Le rapport du Conseil économique et social (CES) français reconnaît que « le développement de la société industrielle, dans le cadre d'une croissance soutenue des économies, s'est effectué au détriment des écosystèmes » 21 . Il ajoute que tous les pays n'ont pas bénéficié de manière égale du surplus de croissance. Aux inégalités de croissance entre les pays intégrés dans le processus de globalisation des échanges, s'est ajoutée l'inégalité de leur attractivité pour des investisseurs étrangers. L'Afrique se retrouve ainsi dans une situation de marginalisation. La mondialisation se trouve aujourd'hui sur le banc des accusés, si elle n'est pas tout simplement prise comme la coupable désignée de la situation que connaissent les pays africains.

II. La marginalisation de l'Afrique dans la mondialisation

Malgré le développement des échanges internationales qui accompagne la mondialisation, l'Afrique peine à trouver sa place dans le commerce international. Elle pèse moins de 2% dans le commerce mondial, ce qui a conduit progressivement à sa marginalisation. Divers facteurs sont invoqués pour expliquer la situation de marginalisation dans laquelle se trouve l'Afrique. Il s'agit entre autres de :

- l'insuffisance des réformes : cette insuffisance se trouve plus dans l'ampleur des réformes plutôt que dans leur nombre car les réformes politiques et juridiques sont très souvent parcellaires (réformes à mi-chemin) et non coordonnées, ce qui conduit à une multiplication (florilège) de cadres institutionnels et de textes juridiques qui ne trouvent pas à s'appliquer ;

20 Jean COUSSY est chercheur à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) et associé au Centre d'Etudes et de Recherches Internationales (CERDI).

21 Conseil Économique et Social, Enjeux sociaux et concurrence internationale : du dumping social au mieux- disant social, Rapport présenté par M. Didier Marteau, 2006

- l'échelle de production et des marchés : l'Afrique a une longue tradition de production et de marchés à petite échelle. La faiblesse de la production et du marché réside dans la faible industrialisation et dans le poids important de l'économie informelle ;

- la qualité des ressources humaines : beaucoup de pays disposent d'une main d'oeuvre abondante et peu coûteuse. Cependant une bonne partie de la main d'oeuvre n'est pas qualifiée ou ne dispose pas de compétences en adéquation avec les besoins du marché;

- les risques environnementaux élevés et la faiblesse des contraintes : l'absence ou la faiblesse des contraintes érigées par les législations peut constituer plus un risque qu'une opportunité. Les économies sont par ailleurs très vulnérables aux aléas climatiques du fait de la nature des produits exportés ;

- La persistance de la dépendance envers les produits primaires et l'invariabilité de la structure des produits de base : il s'agit pour l'essentiel de matières premières agricoles et minières exportés sans transformation et donc sans valeur ajoutée22 ;

- Le faible développement du secteur secondaire : elle a pour cause principale
l'effondrement des industries locales nationales suite à l'ouverture des frontières ;

- Les difficultés d'accès aux marchés des pays développés : ces difficultés sont très perceptibles dans le domaine agricole où les normes sanitaires et techniques empêchent les produits du sud d'accéder aux marchés du nord;

- Le développement du tout financier et du « court-termisme » qui a conduit au délaissement des secteurs non productifs ou peu rentables23 ;

- La faiblesse et la répartition inégalitaire des IDE : les IDE sont orientés vers les pays qui disposent de ressources pétrolières et minières.

- La faiblesse du commerce intra-régional et l'influence des relations avec les anciennes métropoles coloniales : les pays africains ont établi des liens économiques plus étroits avec leurs anciennes métropoles respectives qu'avec d'autres pays africains, ce qui, à certains égards, constitue un handicap non négligeable.

- La faible présence des africains dans la gouvernance mondiale et la recherche 24

22 « La part du commerce international que détient l'Afrique est petite et continue de s'amenuiser, son marché étant axé vers l'exportation de produits primaires et l'importation de produits non primaires » A.S. Bhalla Op. Cit

23 « Pour beaucoup, la mondialisation a mis à mal les moyens d'existence traditionnels et porté atteinte aux communautés locales, et elle représente une menace pour l'environnement et pour la diversité culturelle.» A.S. Bhalla (sous la direction de) op. cit.

- L'affaiblissement de l'Etat : son intervention se réduit aux fonctions régaliennes

Le rapport de la Commission mondiale sur dimension sociale de la mondialisation est très critique au sujet des effets de la mondialisation sur les pays du sud. Elle note :

- de graves déséquilibres Nord-Sud concernant l'accès au savoir et à la technologie - les pays les moins avancés demeurent exclus des avantages de la mondialisation - les flux spéculatifs à court terme ont eu un effet dommageable

- une forte augmentation des activités transfrontières illégales

- l'étroitesse des investissements dans les secteurs non productifs comme l'éducation

- les personnes instruites et qualifiées, disposant d'un capital et de capacités

entrepreneuriales ont été les gagnants mais les travailleurs pauvres, analphabètes et

sans qualifications ainsi que les peuples indigènes ont été les perdants

- de grandes disparités de pouvoir et de capacité entre les différents Etats - nations, ces inégalités ayant pour cause première l'inégalité au niveau de la puissance économique.

III. La RSE et l'exigence d'une mondialisation à visage humain

Les interdépendances mondiales engendrées par la mondialisation ont créé une communauté d'enjeux (réchauffement climatique) et d'intérêts (développement harmonieux à la fois économique, humain et social) qui appellent une co-responsabilité des acteurs même si les responsabilités sont inégales : les acteurs n'ayant pas les mêmes degrés d'influence et d'intérêt, leurs actions dans la mondialisation et les impacts qui en résultent ne sont pas les mêmes et ne les engagent pas de la même manière. La mondialisation qui, d'une manière générale, s'est accompagnée de l'accroissement de la puissance et de l'influence du secteur privé, et d'un affaiblissement relatif du rôle de l'Etat et du secteur public, conduit l'entreprise à assumer une responsabilité de fait ou de droit. D'où l'émergence du concept de responsabilité sociétale qui vise à répondre de manière constructive et systématique aux défis qui se posent à l'entreprise et à la société : celui de placer l'Homme au centre de tout processus de développement et d'inscrire le développement dans une perspective de durabilité. Ceci l'amène ainsi à intégrer à l'objectif économique et de rentabilité financière,

24 «la mondialisation loin d'être un processus historique naturel, inévitable, est une stratégie planifiée, élaborée dans des officines où aucun africain n'est convié. Pour la promotion d'intérêts qui ne sont pas ceux de l'Afrique... », Makhtar Diouf, Mondialisme et Régionalisme, le «nouveau régionalisme» en Afrique 2002

des logiques et des considérations autres, notamment sociétales et environnementales et sur le long terme, à s'interroger et à répondre de manière structurée à l'impact de ses décisions, de ses politiques, de ses stratégies, de ses actions et de son abstention à agir. Cela passe par l'identification des problématiques et enjeux auxquels l'entreprise et la société ou l'environnement local sont confronté(e)s.

D- Les problématiques RSE en Afrique

Il faut entendre par «problématiques RSE» les grands enjeux auxquels les sociétés africaines sont confrontées du fait de l'action des entreprises ou auxquels les entreprises peuvent contribuer à répondre. Certaines de ces problématiques peuvent être internes à l'entreprise. D'autres par contre trouvent des résonances au sein de la communauté, du pays et voire du continent. Les problématiques présentées ci-dessous ne sont qu'indicatives. Elles ne sauraient être considérées comme exhaustives et leur présentation ne répond à aucun ordre d'acuité.

I Gouvernance et bonnes pratiques des affaires

a. Respect des lois

On a pu constater dans le chapitre consacré au cadre juridique que les pays africains possèdent des législations encadrant les activités économiques. La vraie problématique se situe au niveau de leur respect par les acteurs, au premier rang desquels les entreprises. Les contournements législatifs, l'exploitation des failles de la réglementation notamment en matière fiscale ou le lobbying irresponsable pour des exigences légales au rabais constituent des pratiques qui ne sont pas méconnues dans le milieu des affaires africains. Des entreprises nationales ou multinationales ont souvent été accusées de faire et de défaire les pouvoirs locaux ou de piller les ressources locales en profitant des situations hors de contrôle des gouvernements. En octobre 2002, un Groupe d'experts des Nations Unies enquêtant sur l'exploitation illégale des ressources en République démocratique du Congo publiait un rapport dénonciateur sur les activités des sociétés engagées dans le commerce très souvent illégal des diamants et l'extraction d'autres ressources25. Il faut noter par ailleurs que les réformes d'ajustement structurel ont érodé la capacité des Etats à surveiller la mise en oeuvre et le respect des lois et règlements par les entreprises comme le relève le GRAMA.

25 Rapport final du Groupe d'experts sur l'exploitation illégale des ressources naturelles et autres formes de richesse de la République démocratique du Congo, S/2002/1146,

b. Reddition de compte

Les réglementations et législations organisent la reddition des comptes financiers dans le cadre des obligations comptables à la charge des entreprises vis-à-vis de l'Etat et de ses propriétaires, c'est-à-dire les actionnaires. Cependant les réglementations sont muettes quant à la reddition des comptes aux autres parties prenantes de l'entreprise sur leurs performances environnementales et sociales. La faiblesse de l'influence des parties prenantes laisse à l'entreprise africaine, en dehors de toute pression externe (de donneurs d'ordre, du groupe ou de la maison mère) la latitude de s'enfermer dans l'opacité complète quant aux impacts de ses activités sur la société.

c. Ethique des affaires : corruption et subordination

La problématique de la corruption constitue un des enjeux majeurs en matière de RSE en Afrique. Ce ne sont pourtant pas les mesures réglementaires, légales et institutionnelles qui manquent. Beaucoup d'Etats ont adhéré à la Convention des Nations unies contre la corruption et mis en place des structures et mécanismes de surveillance et de répression de la corruption. Cependant, l'indice de perception de la corruption de Transparency International montre que beaucoup d'Etats africains sont rongés par la corruption. Elle constitue une gangrène aussi bien pour les Etats que pour les entreprises. Pour les multinationales, cet état de fait crée un climat malsain pour les affaires. L'Indice de Corruption des Pays Exportateurs (ICPE) révèle pourtant qu'elles sont souvent à la base des pratiques de corruption qu'elles dénoncent. Transparency International dans son rapport 2006 note en effet que « le versement de pots-de-vin à l'étranger par les entreprises des plus grands pays exportateurs reste une pratique courante [...] (et que) les sociétés qui versent des pots-de-vin compromettent les efforts réels des gouvernements des pays en développement pour améliorer la gouvernance et entretiennent ainsi le cercle vicieux de la pauvreté » 26 . La PME locale comme l'entreprise nationale ou multinationale se trouve ainsi être à la fois actrice et victime de la corruption.

II Droits humains

a) Travail des enfants et travail forcé

26 L'ICPE évalue la propension des entreprises de 30 des plus grands pays exportateurs à verser des pots-de-vin à l'étranger

La question du travail des enfants est une problématique majeure des entreprises et de l'opinion occidentales. Cela ne semble pas être le cas en Afrique27. Et pour cause, sur la liste indicative des problématiques adressées aux participants africains, aucun choix n'a été fait sur le travail des enfants ou le travail forcé. Cependant, les rapports de plusieurs organisations non gouvernementales attestent de trafics et d'utilisation d'enfants dans les plantations de cacao, de café, de coton, l'exploitation minière, etc. Les entreprises des secteurs agroalimentaires, textiles et miniers sont ainsi les plus concernées par la problématique. De précédents scandales impliquant des fournisseurs ou sous-traitants d'entreprises occidentales en Asie ont aiguisé la sensibilité des entreprises occidentales et leur attention sur cette problématique. Cependant, force est de constater que la situation de pauvreté en Afrique qui conduit l'enfant à se battre pour survivre par le travail, ainsi que les habitudes et la culture locale (travail dans le champ familial) qui veut que le travail soit un moyen d'éducation et d'insertion de l'enfant dans la société, contrastent avec toute l'attention accordée à la question et dénote la complexité du problème. Cela devrait conduire à une approche holistique et non isolée de la question car la lutte contre le travail des enfants ne doit pas amener à les fragiliser davantage en les abandonnant dans des situations de prostitution, de délinquance ou de criminalité. L'enjeu pour les entreprises est donc double : éviter le travail des enfants et oeuvrer à leur plein épanouissement.

b) Complicité dans les abus commis par des tiers et collusion

En vertu du deuxième principe du Pacte mondial, les entreprises devraient s'assurer qu'elles ne sont pas complices de violation de droits humains28. La complicité dans les abus commis par des tiers en Afrique prend plusieurs formes :

- l'implication directe ou indirecte des partenaires d'affaires notamment des filiales, de la chaîne de sous-traitance ou des fournisseurs dans des violations. Il en est ainsi par exemple des fournisseurs ou sous-traitants employant des enfants, pratiquant des formes de travaux forcés, ou impliqués dans des affaires de corruption, etc.

- les violations commises dans le cadre d'opérations de sécurisation et de protection
assurées par des brigades de sécurité privées agissant souvent dans l'impunité totale.

27 Le travail des enfants en Afrique : Problématique et défis, Banque mondiale, FINDINGS, 191, novembre 2001

28 Pour le haut-commissaire aux droits de l'homme des Nations unies, une entreprise se rend complice de violations des droits humains quand elle autorise, tolère ou ignore sciemment des atteintes aux droits humains perpétrées par une entité à laquelle elle est associée, ou si elle fournit sciemment une aide concrète ou des encouragements sans lesquels les droits humains n'auraient pas été bafoués dans les mêmes proportions.

- les opérations dans les zones de conflits ou les liens avec les groupes armés ou avec les pouvoirs publics auteurs de violation de droits humains.

Des accusations sont par exemple portées contre ECOBANK de complicité dans l'agression de la RDC suite à son acquisition de la Banque de commerce, de développement et d'industrie (BCDI) du Rwanda29. Au Nigeria d'autres accusations ont été portées contre Chevron pour sa complicité dans la répression sanglante de manifestations par l'armée nigériane30. Dans le rapport de la mission d'enquête internationale la FIDH révèle que : «l'exemple de Morila où 9 anciens travailleurs ont été mis en détention provisoire pendant 14 mois pour l'étrange explosion de deux bus de la Somadex devant la gendarmerie met en lumière les dangers de cette collusion entre forces de l'ordre et entreprises »31.

c) Problématiques liées à la santé : Sida, accès aux médicaments, recherche sur les maladies pauvres ou orphelines, essais thérapeutiques

Il y a un lot de problématiques liées à la santé en Afrique qui touchent à la responsabilité des grands groupes pharmaceutiques. Un des grands scandales du siècle reste sans doute les poursuites judiciaires engagées par 39 grands groupes pharmaceutiques contre le gouvernement sud africain pour le non respect de droits de propriété intellectuelle sur les antirétro viraux. Le Sida pose par ailleurs à l'entreprise d'autres enjeux connexes : la prise en charge, la non discrimination et l'intégration des personnes vivant avec le virus de l'immunodéficience humaine (VIH). Pendant longtemps des licenciements et des discriminations au travail ou dans le recrutement ont touché des personnes vivant avec le VIH au sein d'entreprises aussi bien nationales que multinationales. Une prise de conscience conduit à l'adoption d'initiatives pour juguler le problème.

Le manque d'intérêt des laboratoires de recherche pour des maladies négligées, présentes ou répandues dans les pays tropicaux pauvres, ou orphelines (rares) constitue une problématique importante. Dans le doute de retour sur investissement voire la certitude de non rentabilité, peu de laboratoires osent s'aventurer dans la recherche sur ces maladies.

29 http://www.business-humanrights.org/Categories/Issues/Abuses/Complicity?&batch start=1 1

30 La mise en cause de Chevron est relative entre autres aux événements qui se sont déroulés sur le terminal d'Escavos le 4 février au cours desquels les forces de sécurité auraient attaqué, tué ou blessé des civils, cf. EFAI, AFR 44/020/2005 du 3 novembre 2005

31 FIDH «Mali, l'exploitation minière et les droits humains », septembre 2007 http://www.fidh.org/spip.php?article4709

Par ailleurs des groupes pharmaceutiques ont souvent été accusés d'exploiter la misère et l'ignorance ou la détresse de populations pour leur administrer des essais thérapeutiques. On garde encore à l'idée les accusations et les poursuites engagées par le Nigeria (l'Etat de Kano) contre Pfizer récemment accusée d'avoir utilisé secrètement des enfants malades comme cobayes pendant la pandémie de méningite de 199632. Dans le secteur de l'industrie agroalimentaire, les problèmes liés à la malnutrition (obésité) et à la sécurité des aliments (produits OGM) aussi font jour en Afrique.

d) Droits des autochtones : expropriation, jouissance des fruits de l'exploitation des ressources naturelles locales, bio piratage

Les expropriations et la jouissance des fruits de l'exploitation des ressources locales se posent avec acuité dans les zones riches en ressources naturelles pétrolières et minières. La lutte du peuple Ogoni face à SHELL Petroleum Development Corporation au Nigeria constitue dans les mémoires un exemple encore très vivace33. Dans un document public34, Amnesty International note que, dix ans après les exécutions qui ont horrifié la planète entière, l'exploitation pétrolière dans le delta du Niger continue d'entraîner des spoliations, des injustices et des violences. Les habitants de villages, qui souffrent par ailleurs de dégâts environnementaux, risquent un châtiment collectif de la part des forces de sécurité lorsqu'ils sont soupçonnés de faire obstacle à la production de pétrole ou de protéger des criminels. Malgré la montée des cours du pétrole, les riverains des installations du delta du Niger restent parmi les plus pauvres du monde. Se posent ainsi à la fois le problème de l'indemnisation des personnes expulsées des champs d'exploitation et de la jouissance par ces derniers des fruits de l'exploitation pétrolière. Cela entraîne souvent des conflits et des violences intercommunautaires, des violences contre les forces publiques et surtout contre les entreprises et leurs installations.

Lorsque ce ne sont pas leurs sols qui sont spoliés ou leurs ressources qui sont pillées, ce sont les savoirs des communautés indigènes notamment en matière médicale (et les plantes médicinales qui vont avec) qui sont frauduleusement exploités ou brevetés.

32 Il s'agit d'un comportement à la fois délictueux et contraire à l'éthique en violation totale de la déclaration d'Helsinki régissant l'éthique de la recherche médicale ainsi que la CIDE des Nations Unies

33 Ken Saro - Wiwa, leader de la minorité Ogoni et huit autres défenseurs de la minorité ont été exécutés en 1995 malgré les protestations de la communauté internationale et la complicité passive de SHELL est indexée.

34 EFAI, AFR 44/020/2005 du 3 novembre 2005

e) Discriminations

La discrimination a été et est encore un problème majeur en Afrique. En Afrique du sud, pendant la période d'apartheid, des entreprises nationales et multinationales ont appliquées des politiques de discriminations raciales.

La pratique des embauches familiales, relationnelles et ethniques posent aussi le problème de l'inégalité des chances sur le marché du travail. La question de l'égalité des sexes dans le recrutement, le traitement en matière salariale ou la gestion des carrières reste tout aussi importante.

III Pratiques professionnelles : relations et conditions de travail

a) Conditions de travail

La question des conditions de travail se pose aussi avec acuité en Afrique plus qu'ailleurs avec des enjeux sous-jacents ou connexes comme la santé, l'hygiène et la sécurité au travail, les rémunérations, la pénibilité du travail. Le travail décent constitue un défi aussi bien pour les Etats que pour les entreprises.

b) Liberté d'association et droits sociaux

Le rapport 2006 de la CSI (Confédération Syndicale Internationale) révèle que l'Afrique n'est pas en reste dans les atteintes aux droits et libertés des travailleurs. Il indique que de nombreux Etats comme le Zimbabwe, le Maroc, l'Île Maurice, l'Afrique du sud, la Guinée, la Guinée équatoriale, l'Algérie, le Bénin, l'Ethiopie, la Libye, le Soudan, le Kenya se sont illustrés dans la répression de manifestants syndicaux, le harcèlement, les intimidations et menaces ou la limitation de droits syndicaux. Il faut noter par ailleurs que la nature du marché économique et du travail africain, le manque de ressources des syndicats, les accointances politiques et les enjeux de leadership internes sont des handicaps pour l'organisation et le renforcement des syndicats africains face à l'Etat et surtout au secteur privé. Si le statut protecteur des fonctionnaires justifie l'engagement de ceux-ci dans les grèves de revendications salariales et de lutte contre la vie chère, la précarité de l'emploi et la crainte de licenciement décourage les travailleurs du secteur privé à s'organiser en syndicats ou à utiliser la grève comme mode de revendication. L'hostilité aux syndicats est en particulier perceptible chez les entrepreneurs individuels comme nous l'indique les propos d'un entrepreneur

burkinabé rapporté par Pascal LABAZEE dans son livre. Pour ce dernier « le seul syndicat qu'il connaisse, c'est le travail »35.

IV Environnement

D'entrée de jeu, il convient de noter la dépendance directe des populations vis-à-vis des biens environnementaux. La proximité avec l'environnement est très perceptible dans les habitudes de vie : plantes et arbres fruitiers sauvages, plantes médicinales, utilisations domestiques du bois, sacralité des arbres, des forêts et de certaines espèces animales ; autant de références qui dénotent un lien de proximité érigeant les questions environnementales en enjeu majeur.

a) Les défis liés à l'agriculture

L'agriculture durable constitue un défi majeur pour l'Afrique aussi bien au plan économique, social que environnemental et l'agriculture est aujourd'hui un des points d'achoppement des négociations internationales aussi bien à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) que dans les accords de partenariat économique (APE).

L'agriculture est le plus grand pourvoyeur d'emplois dans de nombreux Etats africains36. Cependant, il s'agit très souvent d'emplois familiaux, saisonniers ou précaires. Toujours au plan économique se pose la question de la sécurité alimentaire face à l'abandon des cultures vivrières au profit des cultures commerciales. Pour accroître leurs devises, plusieurs Etats et entreprises encouragent les cultures d'exportation (coton, cacao, café) pendant que plus de 200 millions en Afrique subsaharienne meurent de faim. L'abandon de l'agriculture vivrière ou de subsistance au profit des cultures commerciales ne peut qu'avoir des effets désastreux au plan social au moment même où le cours de certaines matières agricoles connaît une baisse généralisée voire un effondrement du fait des subventions illégales et massives que les pays développés accordent à leurs agriculteurs.

Au plan environnemental, plusieurs enjeux liés à l'agriculture se posent : la dégradation des sols, l'introduction des organismes génétiquement modifiés (OGM). Les effets de l'agriculture sur les sols sont très perceptibles. Extensive et rudimentaire dans les zones rurales, l'agriculture contribue à l'érosion et au lessivage des sols. Intensive et industrialisée

35 P. LABAZEE, Entreprises et entrepreneur du Burkina, Khartala, 1988

36 Pour la majorité de l'Afrique, l'agriculture constitue l'activité économique principale, fournissant un moyen de survie et un emploi à un grand nombre d'habitants. Près de 203 millions de personnes (56,6% de la main d'oeuvre), travaillaient dans le secteur agricole en 2002 (FAOSTAT 2004). Dans la plupart des pays africains, l'agriculture pourvoit aux besoins de 70% de la population (CEA 2004)

dans d'autres, elle favorise la pollution des sols et des eaux par les engrais et pesticides. Quelques Etats, sous l'impulsion de la Banque mondiale et de certaines multinationales ont adopté la culture d'OGM. Depuis 2003 le Burkina Faso suivi par d'autres pays se sont ainsi lancés dans des cultures expérimentales de coton transgénique. L'introduction des OGM fait émerger ou accroît l'acuité de certains enjeux comme la sécurité alimentaire, les pollutions, la santé humaine, les dangers pour la biodiversité et pose la question de la responsabilité des différents acteurs face à la nécessité de précaution qui doit entourer la culture des OGM.

b) Protection de l'écosystème et de la biodiversité

La déforestation et la désertification portent de sérieuses menaces sur la biodiversité37. Selon le PNUE, l'Afrique perd ses forêts au taux de 0,8% par an (5 262 000 ha). Elles sont le fait aussi bien des usages domestiques que de l'exploitation industrielle des forêts. Les activités extractives et minières ont aussi des conséquences énormes sur l'environnement et la biodiversité. Tout l'enjeux est donc d'adapter les besoins de l'exploitation industrielle et domestique aux nécessités de protection des écosystèmes et de la biodiversité.

c) Changements climatiques

Selon le PNUE, l'Afrique supporte une part disproportionnée des coûts associées aux changements climatiques. Les émissions de CO2 en Afrique constituent une part très infime des émissions mondiales du fait de la faiblesse de l'industrialisation de la plupart des pays africains et malgré les pollutions importantes perceptibles dans les grandes villes. Cependant la faiblesse des émissions contraste avec les désastres liés aux changements climatiques qu'endure l'Afrique : rareté des pluies et des eaux, sécheresses et famines, dérèglements climatiques et saisonniers, réchauffement climatique, maladies.

Les questions énergétiques se posent aussi en termes de disponibilité et d'accès à l'électricité. L'énergie thermique et hydroélectrique constituent jusque-là les principales sources d'énergie. Le développement des énergies renouvelables notamment l'énergie solaire demeure un défi et peut-être la voie de l'autosuffisance énergétique.

d) Assainissements : déchets et eaux usées

37 Selon El Hadji Abdourahmane Diouf et Cheikh Tidiane Dieye «dans les zones humides du Sud et de l'Ouest, on assiste à une disparition rapide des forêts à cause entre autres, de l'exploitation abusive du bois à des fins marchandes et à l'extension des zones de culture pour compenser les déficits de productivité ». ICTSD-IISDRing Southern Agenda on Trade and Environment - www.trade-environment.org

Malgré la faible industrialisation, le traitement des eaux usées industrielles et la gestion des déchets constituent une question essentielle et une préoccupation qui prend toute son importance au moment où l'Afrique affiche une volonté de promotion de l'industrialisation à travers le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique NEPAD. Mais les exportations en Afrique de déchets industriels dangereux constitue une des problématiques les plus importantes et les plus actuelles. Le souvenir encore vivace du déversement en Côte d'Ivoire de 400 tonnes de déchets toxiques pétrochimiques en provenance d'Europe par le Probo Koala en est une preuve. Elle met en exergue une responsabilité à la fois des entreprises exportatrices des pays industrialisés et des entreprises ou autorités publiques des pays importateurs de ces déchets.

V- Questions de consommation

a. Accès aux biens essentiels

Dans la situation de pauvreté voire de misère dans laquelle se trouve certaines populations, l'accès aux biens essentiels demeure très problématique. Les réformes économiques réalisées dans le cadre des programmes d'ajustements structurels ont conduit au délaissement des services non productifs notamment des services sociaux. Des millions de personnes en Afrique subsaharienne demeurent encore sans approvisionnement en eau potable ou rencontrent des difficultés pour s'alimenter, se loger, se soigner ou encore d'avoir accès à l'éducation et à l'électricité. Les télécommunications demeurent un luxe pour les campagnes et la fracture numérique ne cesse de se creuser. Les services financiers ne favorisent pas l'accès au crédit aux pauvres malgré le développement de micro-crédits.

b. Qualité et prix des produits

En plus de la disponibilité se pose le problème de la qualité et du prix des produits disponibles. La faiblesse des ressources financières conduit assez souvent et tout naturellement les populations à accorder plus d'importance au prix qu'à la qualité. Toute l'attention accordée aux consommateurs européens à travers les services après vente ne semble pas être des pratiques répandues en Afrique exception faite des grandes métropoles et pour des biens qui ne sont pas à la portée de tous.

L'Afrique est de plus en plus la destination des produits usagés et l'exemple patent constitue
la récupération et le réemploi des ordinateurs et surtout l'import-export des véhicules de
seconde main ou d'occasion à l'origine des pollutions massives. La question du recyclage

n'étant pas forcément la préoccupation première des entreprises locales, cela a conduit à transformer certaines capitales en véritables dépotoirs.

VI- Contribution au développement de la société (ancrage territorial)

L'ancrage territorial des entreprises en général et des multinationales en particulier constitue une thématique et un enjeu majeur de responsabilité sociétale. Elle fait ressortir diverses problématiques dont les plus importantes sont les relations avec les communautés locales, le respect et la promotion de la culture locale et les investissements sociaux.

a. Relations avec les communautés locales : dialogue, concertation, participation

Elle est la condition première, aussi bien de l'acceptation de l'entreprise et de ses activités que de l'efficacité de la contribution de celle-ci au développement de l'environnement social dans lequel elle opère. Plusieurs entreprises en ont malheureusement appris à leurs dépens. C'est le cas des entreprises opérant dans le secteur pétrolier au Nigeria où le manque ou la rupture du dialogue entre les entreprises et les communautés locales ainsi que la répression des forces publiques conduit à des rapts d'employés et des attaques contre les installations pétrolières.

La question est encore très essentielle dans les zones d'exploitations minières. La gestion du dialogue, l'implication des différentes couches sociales à travers des structures de concertation sont fondamentales. La mauvaise gestion du dialogue et la répartition inéquitable des ressources issues de l'exploitation entraîne souvent des conséquences néfastes pour l'entreprise ou exacerbe les tensions intercommunautaires.

b. Respect et promotion des cultures locales

Si l'entreprise doit contribuer au développement de la communauté locale, il est tout aussi essentiel que ses opérations se fassent dans le respect des cultures locales. La participation des acteurs locaux ne sera effective et efficace que dans la mesure où celle-ci intègre la dimension culturelle à toute sa politique. Il s'agit non seulement de respecter les spécificités locales, nationales, mais aussi de les promouvoir. Beaucoup d'entreprises ou responsables d'entreprises, très peu au fait des réalités locales veulent appliquer des principes de gestion qui tiennent à la seule rationalité. Il en est par exemple des pratiques de gestions des ressources humaines, etc. La conciliation de la rationalité économique et des spécificités locales voire leur promotion est un enjeu tout aussi important.

c. Investissement sociaux

L'entreprise peut-elle prospérer dans un environnement de misère ? Le défi du développement de la communauté au sein de laquelle opère l'entreprise est essentiel. Cela n'a malheureusement pas été toujours le cas. Au Congo Brazzaville, malgré l'existence de la manne pétrolière, beaucoup de région d'exploitation vivent dans des conditions inacceptables que les ONG locales membres de l'initiative « Publiez ce que vous payez » n'ont de cesse critiqué.

DEUXIEME PARTIE : ETAT DES LIEUX DES CONNAISSANCES, DES PERCEPTIONS ET DES INITIATIVES EN MATIERE DE RSE EN AFRIQUE

La RSE fait l'objet de débats souvent vifs en Europe et dans d'autres parties du monde impliquant divers acteurs. Des initiatives ont été développées et beaucoup de travaux de recherche et de publications consacrés à la RSE. Dans cette deuxième partie nous nous efforçons de donner le pool de la connaissance, de la perception de la RSE et des initiatives qui ont cours en Afrique conformément à ce qui ressort de notre consultation et des études documentaires. Nous verrons par ailleurs quelles peuvent être les facteurs favorables ou défavorables au développement de la RSE en Afrique.

Dans le cadre de cette étude, nous nous sommes adressé à divers acteurs africains et non africains qui peuvent être répartis comme suit, suivant les catégories d'acteurs ou les zones et pays d'origines des acteurs interrogés et ayant répondu effectivement aux questionnaires : Répartition par catégorie d'acteurs :

Pourcentage

8%

16%

16%

16%

12%

16%

16%

Gouvernement Entreprise

ONG et Syndicat Organisme de soutien Université et recherche Presse

Organisme des Nations

Pourcentage

33%

67%

Afrique
Europe

Répartition par zone :

Répartition par pays :

Pourcentage

6% 6%

6%

27%

11%

38%

6%

Belgique Burkina Faso Cameroun France

Maroc Sénégal Tunisie

A- Connaissance et perception de la RSE : le débat en Afrique

I- La RSE, une notion peu connue et un débat public émergent

Lorsque nous nous en tenons aux réponses qui nous ont été apportées par les participants à la consultation, il en ressort un avis majoritaire selon lequel il s'agit encore d'un débat public naissant et très embryonnaire dans la plupart des pays africains. El Hadji Abdourahmane Diouf et Cheikh Tidiane Dieye affirment que : « En Afrique de l'Ouest, le débat sur les liens entre le commerce, l'environnement et le développement durable ne fait que commencer. En effet, même s'il est aujourd'hui communément admis que le commerce international des produits agricoles et industriels a un impact réel sur les ressources naturelles et sur l'environnement, les débats se sont jusqu'ici cloisonnés dans des milieux intellectuels et scientifiques basés dans leur quasi-totalité dans les pays du nord38.

Dans les pays africains anglophones en général et en Afrique du sud en particulier, le niveau de débat et d'intérêt est assez important et des initiatives ont été lancées. Le Maroc, la Tunisie et quelques autres pays francophones connaissent une émergence d'initiatives et l'institutionnalisation du débat même si le débat est encore interne à quelques organisations et que la RSE demeure inconnue des acteurs qui sont pourtant susceptibles de s'y intéresser. Elle n'est pas un sujet de discussion publique pour le moment mais des universitaires, des acteurs du milieu des affaires et des consultants s'y intéressent de plus en plus du fait d'un intérêt à la fois personnel et professionnel. Cet intérêt semble être en lien avec le débat international et l'agenda mondial sur la RSE.

38 ICTSD-IISD, Ring Southern Agenda on Trade and Environment, document de discussion, p. 33, juillet 2003 - www.trade-environment.org

Il semble par ailleurs que les initiatives internationales en matière de RSE soient en général méconnues des acteurs africains : il n'existe pas de clubs d'affaires qui échangent autour de la RSE. Dans les rares cas où il en existe, ces clubs d'entreprises ou d'employeurs sont dans la capitale et regroupent les filiales d'entreprises étrangères implantées dans le pays. Quelques entreprises disposeraient de chartes ou codes de conduite ou de déontologie mais la pratique des codes n'est pas répandue. Mais si la RSE en tant que concept est peu connue, les problématiques qu'elle soulève le sont plus.

La presse qui assume une mission de veille et d'éducation de la société et d'éveil des consciences s'est illustrée dans la dénonciation des dérives des acteurs économiques au niveau africain et international. Pendant longtemps, les acteurs publics ont été la cible principale des médias. Cependant on note une place de plus en plus importante accordée au traitement de données informationnelles liées aux entreprises et à des problématiques fondamentales en matière de RSE, et ce, malgré la méconnaissance du concept. Les réponses aux questionnaires indiquent que la notion de RSE est peu connue aussi de la presse. A contrario celle de développement durable semble leur être plus familière mais abordée sous l'angle des stratégies et politiques publiques. Certains indiquent par ailleurs que les informations relatives aux impacts négatifs des entreprises sont le plus souvent traités dans des faits divers et font rarement l'objet de dossiers ou d'enquêtes approfondies. Mais le développement d'organes de presse spécialisée et de rubriques dédiées à l'économie et à la société dans la presse généraliste conduit à consacrer plus de place et d'attention aux questions liées aux activités et à la vie des entreprises ainsi qu'à l'impact de leurs activités sur la société. On rencontre ainsi des articles sur la RSE et le traitement de thématiques ou enjeux liés à la RSE39.

Sous l'effet conjugué des phénomènes de mondialisation et du développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication, la presse africaine se fait l'échos des grands scandales impliquant des entreprises comme le dénote ces extraits du quotidien burkinabé « Le Pays » suite au retrait par Mattel de jouets fabriqués en Chine.

Jouets chinois en Afrique : Qui garantit la sécurité des consommateurs ?
Extrait du quotidien burkinabé Le Pays N°3939 du 24/08/2007

Le fabricant de jouets Mattel vient de battre le rappel de millions de jouets au motif que ceux-ci présenteraient des risques sanitaires pour les gamins. [...]

39 Dans le quotidien de l'économie LE MAGHREB des articles de réflexion sur la RSE

L'information a créé une certain émoi aux Etats-Unis et en Europe où la sécurité physique et sanitaire des consommateurs est sacrée. Le retrait des jouets qui est une mesure conservatoire a deux effets immédiats : une perte financière énorme et une image de marque ternie. [...] Les déboires de Mattel ne sont pas près de finir, puisque les associations de consommateurs se mêlent à la danse. Un procès en bonne et due forme est en cours et ne manquera pas d'alimenter la chronique des prochains jours. Ce branle-bas de combat pour assurer la sécurité des consommateurs est presque anecdotique, vu d'Afrique. Pourquoi autant de bruit pour des jouets que chacun est libre d'acheter ou pas ? Le coup financier du retrait aurait certainement déclenché le bal du duo infernal corrupteur-corrompus toujours enclins à tirer parti de ce genre de situation au détriment des intérêts publics. L'intérêt général sous nos tropiques n'est pas souvent la chose la mieux partagée chez nos dirigeants et certains de leurs complices dans les milieux d'affaires.[...]. Dans nos contrées, les pouvoirs publics ne semblent pas assez sensibilisés à cette question de la sécurité des consommateurs, s'abritant derrière le manque de moyens et d'infrastructures techniques de contrôle. Les populations consomment tant que les produits sont à leur portée, sans que cela n'émeuve personne. Avec la mondialisation, le marché africain est devenu la destination préférée des produits chinois. [...].

Personne aujourd'hui ne peut attester de la qualité des produits chinois qui inondent nos marchés et du mode d'emploi de ces produits écrits en chinois, donc probablement douteux.

Dans quelques années, il faudra certainement s'attendre à payer la facture médicale de ce laisser-faire qui traduit l'incapacité ou la mauvaise volonté des dirigeants africains de veiller sur leurs populations. Les Occidentaux, une fois de plus, montrent la voie à suivre. Puisse cet exemple servir de déclic pour que l'Afrique revoie totalement ses modes de production et surtout de consommation. Se cacher derrière le bas prix des produits chinois, leur accessibilité au plus grand nombre ne peut prospérer que lorsqu'on est assuré de leur qualité. Les multinationales occidentales sont en train de payer le prix de cette hérésie qui veut produire à des coûts toujours plus bas et dans des conditions de travail peu conformes aux normes. La course aux gros profits ne doit pas exempter les producteurs du respect des règles et des procédures en matière de sécurité sanitaire et physique des consommateurs. [...]

II- Participation et perception des initiatives internationales : méconnaissance et timidité plutôt que méfiance ou défiance

Les acteurs interrogés jugent en majorité la participation des pays africains aux initiatives internationales timide mais nécessaire et indispensable. Certains avancent que la participation des acteurs africains aux initiatives internationales devrait favoriser le développement d'une stratégie africaine et d'un agenda régional de RSE, la croissance et un niveau acceptable de développement. L'Afrique devrait prendre conscience de la nécessité de la RSE comme outil et voie de développement.

L'intérêt pour un pays de s'intéresser à la RSE est à la fois social, économique et politique : la RSE permettrait d'éviter les conflits sociaux et de préserver la paix sociale. Selon les participants, la RSE favorise l'implication des entreprises sur des aspects sociétaux allant au- delà du simple intérêt économique. Elle pourrait favoriser :

- le développement des exportations par la création de normes ou la conformité aux normes existantes

- la bonne gestion et la valorisation des ressources humaines

- la promotion du développement, la lutte contre la pauvreté et la sauvegarde de l'environnement

La RSE permettrait d'anticiper sur les problèmes que le développement futur de l'industrialisation en Afrique ne manquerait pas de poser.

Beaucoup d'entreprises auraient hérité du code de conduite du groupe ou de la maison mère du fait de l'obligation d'être en conformité avec la stratégie ou la politique du groupe. Il semblerait que les entreprises ne disposent pas de stratégie ni de politique RSE autonome et là où on en trouve, il s'agit de la mise en oeuvre de stratégies ou politiques du groupe ou de la maison mère et à quelques rares cas d'une volonté d'anticipation. Les filiales des multinationales dont les maisons mères ont adhéré à des initiatives internationales ne communiquent pas sur le sujet et n'intègrent pas non plus de considérations autres que financières dans leurs rapports : il n'y a pas d'obligation de reporting et les entreprises ne manifestent pas un intérêt particulier à le faire. Les participants africains à la consultation dressent ainsi un tableau qui décrit une faible connaissance de la RSE en Afrique. Cependant, la recherche documentaire et la veille informationnelle nous ont permis de nous rendre compte que le débat est certes émergent mais des initiatives dignes d'intérêt ont été développées par divers acteurs.

B- Les initiatives en matière de RSE en Afrique

I- Les initiatives nationales et continentales des acteurs

a) Les initiatives des pouvoirs publics

Par leurs missions traditionnelles de satisfaction de l'intérêt général et de protection de l'individu et de la collectivité, les acteurs publics assument une responsabilité importante voire primordiale en matière de RSE. Ces acteurs peuvent s'investir dans la RSE sous diverses formes en tant que censeur, promoteur ou incitateur ou tout simplement en donnant l'exemple par leur implication dans des démarches de responsabilité sociétale.

1. ISO 26000 et les comités miroirs nationaux40

Plusieurs pays africains sont « membres pleins » de l'Organisation Internationale de Normalisation (ISO) et prennent part aux processus d'élaboration des normes à travers leurs organismes nationaux de normalisation41. Cependant beaucoup d'autres pays ne sont que membres observateurs ou correspondants. Dans le cadre de l'élaboration des lignes directrices ISO 26000, des comités miroirs nationaux ont été mis en place autour des organismes nationaux de normalisation. Ces comités miroirs nationaux regroupent diverses catégories d'acteurs ou parties prenantes (pouvoirs publics, industries, organisations non gouvernementales, monde du travail, consommateurs et les SSRO pour désigner les Services, Etudes, Recherches et autres) qui travaillent sur les propositions des groupes de travail. Au stade actuel de l'élaboration de la norme l'opportunité est donnée à tous les membres, pleins ou non, et à toute organisation/structure de faire remonter à l'ISO, par le biais des comités miroirs nationaux, leurs observations à la lumière des réalités nationales. On note l'existence de comités miroirs notamment en Afrique du sud, au Cameroun, en Côte d'Ivoire, en Egypte, au Maroc, au Sénégal.

Cette initiative est innovante en ce qu'elle réunit diverses parties prenantes autour d'un concept à clarifier, à construire en prenant en compte différentes approches, différentes perceptions et différentes visions. Tout l'enjeu du processus est non seulement de tenir compte de ces particularités et des avis nationaux, sans noyer l'essentiel des lignes directrices dans des particularismes nationaux ou organisationnels mais aussi de rendre les lignes

40 L'ISO a été créée en 1947 et constitue la première organisation productrice de normes au niveau international. Elle comprend aujourd'hui 157 organismes nationaux de normalisation membres

41 Pour plus d'information sur les pays membres de l'ISO : http://www.iso.org/iso/iso members

directrices accessibles, compréhensibles et adaptables sinon applicables à toutes les organisations dans tous les pays. Ce processus favorise le rapprochement et le dialogue entre des organisations (industries et ONG par exemple) qui n'avaient sans doute jamais fait l'expérience d'une collaboration dans le cadre d'un processus de normalisation. Ce processus favorise le renforcement des capacités de certaines organisations dans le domaine de la RSE et leur permet en retour de développer des initiatives. C'est le cas par exemple de l'Association Sénégalaise de Normalisation (ASN) qui vient d'organiser un séminaire à Dakar sur la responsabilité sociétale des entreprises du secteur des plastiques.

2. L'atelier régional sur la responsabilité des entreprises du secteur plastique42

Cet atelier organisé en juillet 2007 en collaboration avec l'Association internationale des volontaires laïcs (Lvia) a connu la présence de la Côte d'Ivoire, Burkina Faso, Mali et de la Mauritanie preuve, s'il en est besoin, que la gestion des déchets plastiques est une question cruciale au Sénégal et dans la sous région et nécessite de ce fait une coordination et une collaboration des interventions sur ce champ. L'atelier était une occasion de sensibiliser les acteurs politiques, économiques et sociaux sur l'importance de la normalisation comme voie de réponse aux problématiques de RSE et comme voie d'amélioration des performances de l'entreprise. L'Association sénégalaise de normalisation qui est à l'origine de cet atelier est membre plein de l'ISO et participe aux travaux du Réseau francophone sur la responsabilité sociétale en vue du développement durable (Réseau RSDD). Elle prend activement part aux travaux de l'ISO 26000 et à ce titre, elle constitue un acteur essentiel de la RSE au Sénégal en tant que structure hôte du comité miroir sénégalais.

b) Les initiatives du milieu des affaires

En Afrique, le secteur informel occupe une grande partie de l'économie de la plupart des Etats africains et l'implantation d'entreprises multinationales est plus ou moins forte en fonction des Etats, des ressources dont ils regorgent et des opportunités de marché. Pour des questions pratiques de collectes des informations, nous nous sommes limité aux initiatives développées par les entreprises du secteur formel et en particulier celles des grandes entreprises publiques et privées ou mixtes, des implantations des multinationales ainsi que celles des organisations professionnelles.

42 Pour plus d'information : http://www.lesoleil.sn/article.php3?id article=27149

1. Démarches QSE (ISO 9001, ISO 14000, OHSAS 18001)

Les démarches qualité ont fait bonne recette dans beaucoup de pays africains au sein du milieu des entreprises. Des entreprises s'y sont engagées avec la ferme volonté d'améliorer leur compétitivité par la qualité de leurs produits et services. Parallèlement se sont aussi développées des normes en matière de management environnemental, d'hygiène, de santé et de sécurité qui ont suscité l'intérêt des entreprises. Plusieurs entreprises ont ainsi adopté des outils et référentiels QSE (Qualité, Sécurité, Environnement) et ont fait l'objet d'une triple certification ISO 9001, ISO 14001 et OHSAS 18001. L'adoption de l'outil QSE amène l'entreprise à allier compétitivité économique, protection sociale et de l'environnement. Cette démarche qui aboutit à une triple certification a été la voie par laquelle certaines entreprises africaines estiment s'être engagées officiellement dans le développement durable et la RSE. C'est l'exemple d'AZITO O&M en Côte d'Ivoire qui, après sa triple certification, ambitionne d'« être en Afrique la référence du Développement Durable»43.

2. La mobilisation des milieux des affaires et des syndicats contre le SIDA L'Afrique constitue le continent le plus touché par la pandémie du Sida. La frange jeune, c'est-à-dire la force de travail du continent, est très affectée et la situation est particulièrement catastrophique dans certains pays notamment d'Afrique Australe où la séro-prévalence dépasse souvent les 20%. Les entreprises sont de fait affectées et interpellées par les enjeux liés au SIDA : sur les 40 millions de personnes infectées par le VIH/SIDA dans le monde, 26 millions seraient des travailleurs44. Les enjeux qui se posent sont la sensibilisation des salariés et des communautés locales, la prévention, le dépistage, l'accès au traitement, la non- discrimination, etc.

La mobilisation du monde des affaires contre le Sida concerne aussi bien des entreprises
multinationales que nationales, publiques comme privées. La plupart des multinationales
implantées en Afrique placent la lutte contre le SIDA au rang des premières responsabilités

43 AZITO est une entreprise d'économie mixte détenue par l'Etat ivoirien et EDF qui opère dans le domaine de l'énergie et qui fournit 50% de la consommation de la Côte d'Ivoire

44 Le rapport de la 93ème conférence internationale du travail révèle aussi que trois millions de personnes en âge de travailler meurent chaque année en raison du VIH/Sida. Les pertes se chiffraient déjà à environ 28 millions de travailleurs en 2005. Et au président de l'AECV Edouard Rochet d'ajouter que « le Sida est une menace pour les entreprises où en cas de décès du travailleur, il faut repartir à zéro, reprendre la formation sans compter avec l'expérience ».

sociales de l'entreprise. Des séminaires réunissent les entreprises autour du SIDA45 et des structures associatives se sont créées pour coordonner la lutte et apporter aux entreprises l'expertise nécessaire. C'est l'exemple de l'association Sida - Entreprises au niveau international et de l'association « Action des entreprises contre le VIH/Sida au Burkina (AECV) ». Beaucoup d'entreprises multinationales s'appuient sur Sida - Entreprises46 pour développer des programmes innovants en matière de prévention et de traitement.

« Partenaires contre le sida» a été lancée par la Coalition Mondiale des Entreprises contre le sida, la tuberculose et le paludisme (GBC) et Sida-Entreprises avec l'appui financier de l'Agence Française de Développement. Cette association s'investit dans la prévention et la prise en charge avec pour but de renforcer la place du secteur privé dans les programmes publics et les politiques nationales de lutte contre le SIDA, la tuberculose et les maladies sexuellement transmissibles (MST). Elle offre par ailleurs aux entreprises une expertise technique pour conduire des programmes internes. Une des problématiques associées à la lutte contre le SIDA est sans doute le tourisme sexuel qui interpelle les entreprises du secteur touristique.

3. Lutte contre le tourisme sexuel : une charte au Cameroun

La lutte est en train de s'organiser au Cameroun comme l'atteste l'adoption d'une « Charte contre le tourisme sexuel » par des acteurs du tourisme le 2 juin 2007 à l'occasion de la première journée mondiale pour un tourisme responsable. Cette charte vise à « lutter contre le tourisme sexuel et défendre les valeurs culturelles »47. Son adoption s'inscrit dans la dynamique mondiale de promotion d'un tourisme durable portée par la Coalition internationale pour un tourisme responsable.

4. L'Observatoire des pratiques éthiques des affaires en Afrique de l'Ouest La création de l'Observatoire des pratiques éthiques des affaires en Afrique de l'Ouest fait suite à un colloque sur l'éthique et le management organisé du 8 au 10 juin 2006 à Dakar, sur

45 Le dernier séminaire international s'est tenu les 26 et 27 juin 2007, à l'hôtel Sofitel Ouaga 2000.

46 Selon M. VIRY, président de Sida - Entreprises «le rôle de Sida-entreprises est d'entretenir l'engagement des acteurs contre le Sida au sein des entreprises »

47 10% des 842 millions de touristes choisissent leur lieu de villégiature en fonction du marché du sexe disponible et selon le président de la Coalition internationale pour un tourisme responsable, Guillaume Cromer, trois millions d'adolescents dans le monde sont affectés par le tourisme sexuel, auquel l'Afrique paie un lourd tribut http://www.afrik.com/article11865.html

l'initiative de l'Institut Africain de Management (IAM). L'Observatoire des pratiques éthiques des affaires en Afrique de l'Ouest a été mis en place pour répondre au souhait des participants de créer un observatoire, qui aurait une mission de « veille et de contrôle des pratiques éthiques dans la gestion des entreprises » comme indique le communiqué de presse qui lève le voile sur les attributions de la structure. L'Observatoire s'est doté d'une charte éthique et nourrit l'ambitieux objectif de développer un climat sain dans le milieu régional des affaires par :

- la mise en place d'un label éthique

- la collecte de l'information et veille sur l'éthique des affaires

- l'accompagnement d'entreprises dans la mise en oeuvre de « programmes d'équité sociale, le respect de l'environnement, et l'amélioration de la cohésion sociale, des relations de commerce équitable »

Contrairement à d'autres initiatives multi parties prenantes, l'OPEAO ne réunit que des entreprises soucieuses de travailler sur les problématiques liées à l'éthique des affaires.

5. Forum des employeurs africains sur la RSE et la déclaration de Bamako48 Il s'est tenu à Bamako un forum sous-régional de réflexion des organisations d'employeurs d'Afrique francophone sur la responsabilité sociale des entreprises en août 2007. Organisé par le Conseil National du Patronat du Mali (CNPM) en collaboration avec le Bureau International du Travail (BIT) et l'Organisation Internationale des Employeurs (OIE), ce forum, premier du genre dans le milieu des employeurs d'Afrique francophone, avait pour objectif de « dégager une stratégie africaine commune de promotion de la RSE sur le continent » . Il vise par ailleurs l'amélioration des connaissances et le renforcement des capacités, les échanges de bonnes pratiques et l'appropriation de la notion par les employeurs africains. Ce forum a été l'opportunité pour certaines entreprises de présenter leur engagement et leurs expériences en matière de RSE. Ce premier forum s'est conclu par une déclaration dite de Bamako à travers laquelle les employeurs déclarent partager la vision de l'organisation Internationale des Employeurs sur la RSE et être « convaincus de la nécessité de prendre en compte les questions sociales et environnementales dans le cadre d'un développement harmonieux et durable de chacun des pays membres de l'espace africain francophone » et affirment « saisir toute la portée de la Responsabilité Sociale de l'entreprise africaine et

48 http://www.bamanet.net/actualite/print/4201.html et http://www.cnpmali.org

encouragent les dirigeants d'entreprise à s'approprier volontairement et librement ce concept et à tout mettre en oeuvre pour assurer sa promotion ».

d. les organisations de la société civile49

Le rôle que la société civile joue ou est susceptible d'occuper dans le débat sur la RSE ou en faveur du changement social est fonction de son état, de son expertise et de ses capacités d'influence. Selon les informations que nous avons recueillies à travers notre consultation, il ressort que la plupart des pays africains disposent d'une implantation assez forte d'organisations de la société civile qui interviennent sur divers champs, allant du développement local aux droits humains en passant par l'environnement, la lutte contre la corruption, la défense des intérêts matériels et moraux de leurs membres, etc. Cependant cette forte présence d'organisations de la société civile contraste, selon les pays, avec leur capacité réelle d'influence. La société civile demeure plus ou moins structurée selon les pays et, dans la plupart des cas, peu influentes. La RSE ne semble pas être leur préoccupation majeure du fait de la faible structuration de l'entreprenariat privé et du manque d'expertise. Cependant, toutes les organisations de la société civile n'ont pas été insensibles à l'émergence de la RSE et ont, bien au contraire, développé des initiatives dans ce sens.

1) La conférence maghrébine des travailleurs sur la RSE
Cette conférence s'est tenue à Tunis les 6 et 7 mai 2005, organisée par l'Union Syndicale des
Travailleurs du Maghreb, en collaboration avec l'Organisation Arabe du Travail sur le thème
de « la responsabilité sociale de l'entreprise économique » et a connu la participation des
Organisations de travailleurs de Libye, d'Algérie, du Maroc, de Mauritanie et de Tunisie. Elle
a permis aux participants de se familiariser avec le Pacte Mondial, les principes directeurs de
l'OCDE à l'intention des multinationales et la déclaration de principes tripartite de l'OIT sur
les entreprises multinationales et la politique sociale. Dans les recommandations finales les
participants notent que : « le concept «Responsabilité Sociale de l'entreprise économique»
est un concept apparu souvent dans le contexte de l'accroissement de la mondialisation et il
est relié à la question du développement durable, mais pourrait être interprété différemment.
Ainsi, certains partenaires pourraient en faire un mauvais usage, c'est pourquoi les

49 Selon Habermas, « la société civile se compose de ces associations, organisations et mouvements qui à la fois accueillent, condensent et répercutent en les amplifiant dans l'espace public politique, la résonance que les problèmes sociaux trouvent dans les sphères de la vie privée ».

syndicalistes sont tenus de mieux l'éclaircir et de fixer son contenu et ses limites de façon à le mettre au service du développement social global et à éviter les interprétations et les utilisations restrictives et intéressées ».

2) Travail et environnement, lutte contre la pauvreté, SIDA et la corruption

à l'ordre du jour des conférences et des plans d'action des syndicats africains Une conférence des Cadres d'UNI AFRICA co-organisée par UNI et la CFDT a réuni les représentants syndicaux de divers pays francophones à Yaoundé, du 13 au 17 novembre 2006 sur la thématique de la corruption. A l'issue de cette formation, les participants ont adopté des résolutions dans lesquelles ils marquent leur volonté :

- « d'intégrer le concept de la responsabilité sociale et sociétale des cadres dans le processus de dialogue social ;

- de promouvoir l'éthique et la bonne gouvernance pour la lutte contre la corruption et la mauvaise gestion des ressources ;

- et de mettre en place dans chaque pays un cadre de réflexion en vue de partager les expériences ».

Peu avant cette conférence s'est tenue du 28 au 29 juillet 2006 à Johannesburg une autre conférence syndicale sur le travail et l'environnement. A cette occasion un module de formation a été présenté par M Gabou GUEYE vice-président d'UNI sur « le gouvernement d'entreprise, la responsabilité des entreprises : transparences financières et équité sociale », la preuve, une fois de plus, que le débat sur la RSE s'ancre progressivement dans le paysage syndical africain. Les syndicats s'engagent ainsi sur des champs quelques peu différents du terrain traditionnel de défense des intérêts de leurs adhérents pour s'engager dans des enjeux qui interpellent toute la société. C'est ainsi que dès 2003 UNI Africa déclarait la guerre à la pauvreté et au Sida. Des programmes de lutte contre le SIDA se sont aussi développés au sein des syndicats afin surtout de « faire valoir les droits des travailleurs vivant avec le VIH/SIDA dans le milieu du travail ». C'est toute la raison de l'engagement d'UNI - Africa à travers l'Action contre le VIH/sida en Afrique lancée à l'occasion de la 1ère Conférence Régionale UNI-Africa tenue à Johannesburg du 15 au 18 octobre 2003 et précédé de l'appel des jeunes d'UNI-Africa à un engagement des syndicats sur ce terrain. L'une des causes ou des vecteurs possibles voire évidents du Sida est le tourisme sexuel et la lutte contre le Sida passe aussi par l'implication responsable des entreprises opérant dans le secteur touristique.

3) Les mouvements sociaux dans le débat sur la RSE en Afrique

Beaucoup d'organisations africaines se sont impliquées dans les forums sociaux mondiaux et au fil du temps, elles se sont forgées une certaine expertise dans l'analyse des phénomènes économiques locaux, nationaux, régionaux et internationaux. Des forums sociaux mondiaux se sont déroulés sur le sol africain à Bamako au Mali et à Nairobi au Kenya. Des forums sociaux nationaux (Burkina50, au MALI51) et régionaux (forum social ouest africain FSOA)52 ont aussi vu le jour. Au nombre des sujets de débat lors de ces forums sociaux figurent en bonne place la mondialisation néolibérale et l'OMC, les OMD, les questions agricoles dans les négociations internationales, la souveraineté alimentaire et les OGM, la dette et les investissements, l'immigration, les accords de partenariat économique (APE) entre l'Union Européenne et les pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique), les droits économiques, sociaux et culturels de façon générale et en particulier l'accès aux biens essentiels. A l'occasion du deuxième FSOA tenue au Bénin la responsabilité des acteurs économiques et les questions relatives à la gouvernance des entreprises et au contrôle citoyen ont constitué des thèmes de débat et de proposition.

4) « Publiez ce que vous payez »

Il s'agit d'une initiative internationale qui vise à inciter voire contraindre les entreprises du secteur extractif et les Etats riches en ressources minières et surtout pétrolières à faire de la transparence autour des recettes de ces exploitations. Selon le coordonnateur pour l'Afrique de «Publiez Ce Que Vous Payez», Matteo PELLEGRINI, « en Afrique, la question du delta du Niger et de l'oléoduc Tchad-Cameroun a été le déclencheur de l'action de la société civile internationale et nationale » à travers l'initiative «Publiez Ce Que Vous Payez»53. Cette campagne internationale a trouvé des échos auprès de la société civile africaine et des coalitions nationales se sont constituées dans divers pays où l'activité extractive des mines et

50 Le forum social du Burkina (FSB) s'est tenu du 28 au 30 mars 2007 à Loumbila près de Ouagadougou. Pour plus d'information voir http://www.forumsocialburkina.info

51 Le forum des Peuples a eu lieu à Gao du 15 au 17 juillet 2006 et a réuni les représentants des mouvements sociaux des pays suivants : Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée Conakry, Mali, Maroc, Niger, Belgique, Canada, France, Ecosse.

52 La deuxième édition du FSOA s'est tenu à Cotonou du 23 au 25 septembre 2005. Pour plus d'information sur ce forum voir http://www.mediabenin.org/fsoa

53 Présentation de PCQVP lors d'un atelier organisé en juin 2007 à Libreville disponible sur : http://www.publishwhatyoupay.org/francais/pdf/bulletins/0106afrique.pdf

ressources pétrolières et de gaz occupent une place importante dans l' économie. A ce jour, plus de 12 coalitions «Publiez Ce Que Vous Payez» existent à travers l'Afrique54.

5) L'initiative de transparence des industries extractives

En réaction à la campagne « Publish what you pay » (Publiez ce que vous payez) engagée par des ONG, Tony BLAIR et le gouvernement britannique lancent l'Extractive Industry Transparency Initiative (EITI) lors du sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg en 2002. Cette initiative publique a connu une adhésion majoritairement de pays africains puisque 14 des 22 pays qui ont adhéré à cette initiative sont du continent africain. D'autres institutions africaines comme le groupe de la Banque africaine de développement (BAD) y ont également souscrit55. Cette initiative et son pendant ONG « Publish what you pay » sont parmi les initiatives internationales de RSE les plus connues des acteurs africains dans les pays où se pose la problématique de la transparence de la gestion des recettes minières et pétrolières.

e. Le monde académique et de la recherche

Le monde académique occidental est aujourd'hui un acteur incontournable du débat et des initiatives en matière de RSE. Beaucoup de travaux de recherche et de publications ont appuyé l'action des parties prenantes. Le monde académique et de la recherche est le lieu d'éclosion des théories et d'analyse des faits économiques et sociaux. La contribution du monde académique et de la recherche en Afrique est tout aussi importante pour l'institutionnalisation de la RSE en Afrique. Le développement durable est bien connu et fait l'objet d'enseignement et de travaux de recherche au sein des universités dans plusieurs filières académiques (droit, sciences économiques et de gestion, communication - journalisme, en sociologie, dans les études environnementales, l'agriculture et le développement rural de façon générale.), dans les centres de recherches et les écoles spécialisées56. Des activités académiques et des colloques sont organisés autour du

54 Les 12 coalitions de la société civile sont originaires de : Mauritanie, Guinée Conakry, Sierra Leone, Libéria, Nigeria, Ghana, Côte d'Ivoire, Niger, Tchad, Cameroun, Congo Brazzaville, RDC. La société civile est mobilisée également en Guinée Equatoriale, Sao Tomé, Angola, Madagascar, Zambie, Mozambique, Guinée Bissau, Botswana et Afrique du Sud et une nouvelle coalition a vu le jour au Gabon en juin 2007

55Le Potentiel éd. 3856 19/10/06 http://www.lepotentiel.com/afficher article.php?id edition=&id article=35928 56 L'Institut International d'Ingénierie de l'Eau et de l'Environnement (2IE), ex groupe EIER - ETSHER basé à Ouagadougou offre diverses formations spécialisées liées au développement durable. www.eieretsher.org

développement durable. Cependant, la RSE n'est pas abordée en tant que discipline ou branche autonome ni en tant que module d'enseignement. Mais divers enseignements en matière de gestion et de gouvernance des entreprises ou touchant aux problématiques de RSE ressortent. Des professionnels universitaires et du conseil s'intéressent de plus en plus à la RSE et l'expertise est en construction dans plusieurs pays anglophones (l'Afrique du sud, Ghana, Nigeria, Kenya, etc.) et dans quelques pays francophones (Maroc, Tunisie).

1) Le Business Ethics Network of Africa (BEN Africa)57

Créé en 1990, il réunit des professionnels universitaires de plus de 25 pays africains disposant de compétences dans l'enseignement, la recherche et la gestion des questions relatives à l'éthique des affaires. Le réseau a des représentations au Botswana, au Kenya, au Nigeria, en Afrique du sud, en Tanzanie et au Cameroun. L'utilisation d'outil électronique (site web, newsletter) et des conférences permettent d'entretenir une certaine interaction entre les membres et d'échanger sur les questions.

2) Le milieu académique sud-africain

L'Afrique du sud est assurément le pays africain où la notion de RSE ou de citoyenneté d'entreprise fait autant débat que dans les milieux académiques occidentaux. L'histoire du pays et le rôle joué par les entreprises pendant le régime d'apartheid a été un élément propulseur de la RSE en Afrique du sud.

Le « Centre for Corporate Citizenship », un programme des facultés de Sciences économiques et gestion de l'université d'Afrique du Sud (UNISA), est aujourd'hui un acteur essentiel dans le développement de la RSE en Afrique du sud. Il se positionne comme un leader dans la construction des connaissances et le renforcement des capacités individuelles et institutionnelles sur la RSE et dans « la promotion des affaires soutenables et la cohésion sociale ». Il s'investit aussi bien dans l'enseignement, la formation que dans la recherche et le plaidoyer en faveur de la RSE et enfin développe un programme d'accompagnement et de conseil des professionnels dans la conduite du changement et l'intégration de la RSE dans les pratiques managériales. A la suite de l'UNISA, d'autres universités ont développé des enseignements qui intègrent la RSE. C'est l'exemple de la Graduate school of business du Cape Town, du Leadership centre de l'université du Natal qui développe, en partenariat avec

57 http://www.benafrica.org/

la National Business Initiative (NBI) et l'International Business Leaders Forum (IBLF), un programme de MASTER entièrement consacré à la RSE.

On peut affirmer que l'intérêt de la RSE pour le monde académique sud africain est à la hauteur ou à l'aune de l'intérêt qu'il suscite au sein même du pays et du milieu des affaires en particulier.

Dans d'autres pays comme le Nigeria et le Kenya, il convient de noter quelques enseignements dispensés incluant la RSE en général ou la gouvernance des entreprises et l'éthique des affaires au Lagos business school logée au sein de l'université panafricaine du Nigeria et au Eastern and Southern Management Institute de Nairobi. On peut ainsi constater que les écoles de management se positionnent comme les leaders dans l'enseignement la recherche et le plaidoyer autour de la RSE. Autre fait d'importance à noter : la collaboration entre ces écoles et d'autres acteurs notamment du milieu des affaires mais aussi de la société civile. Cette collaboration s'est souvent traduite par le développement d'initiatives mixtes ou conjointes et à ce titre l'AICC, constitue le meilleur exemple.

f. Les initiatives mixtes ou « multi-parties prenantes » : l'AICC et la Convention de l'African Corporate Citizenship58

L'Institut africain pour la citoyenneté d'entreprise (AICC) est une organisation multi parties prenantes qui a vu le jour en Afrique du sud en 2001 et qui se positionne comme un centre d'excellence dans la promotion de la responsabilité sociétale des entreprises et dans la construction de sociétés durables. L'Institut développe plusieurs programmes en faveur de la RSE en Afrique.

L'Africa Corporate Sustainability Forum (ACSF) est un des premiers programmes majeurs de l'AICC. Tribune multi parties prenantes établie en 2005, l'ACSF offre une opportunité de rencontre entre divers acteurs pour des échanges d'expériences autour des grands défis africains en matière de RSE. Le Centre for Sustainability Investing (CSI), créé en 2003 offre à l'AICC l'opportunité de s'investir dans l'évaluation de la manière dont les innovations dans les produits financiers, les mécanismes de marché et les structures de régulation peuvent mieux contribuer au développement durable en Afrique. Le programme de compétition et d'innovation (Competitiveness and Innovation) vise le renforcement des capacités institutionnelles des organisations de la société civile pour leur permettre de s'engager avec

58 L'institut intervient sur divers projets au Botswana, au Cameroun, au Lesotho, Malawi, au Mozambique en Namibie, au Nigeria, en Zambie et au Zimbabwe. Pour plus d'information : www.aiccafrica.org

les entreprises sur les questions fondamentales de RSE. ReportCom est une plate-forme de recherche, d'implication et d'échanges de connaissances et d'expériences sur le reporting en matière de RSE et de développement durable en général. Elle s'investit dans le plaidoyer en faveur du reporting, les modèles d'assurance ou de certification de rapports et des processus de reporting entre autres.

L'Institut africain pour la citoyenneté d'entreprise est l'initiatrice de la Convention africaine sur la responsabilité sociale des entreprises organisée en collaboration avec le « Centre for Corporate Citizenship de l'Université d'Afrique du Sud (CCC - UNISA) à Johannesburg. La convention réunit les chefs d'entreprises, de gouvernements, d'organisations de la société civile africaines et du monde afin de favoriser les échanges de points de vue et la construction de visions partagées. La deuxième convention tenue en Septembre 2004 s'est appesanti sur l'opportunité de concevoir un agenda de responsabilité sociale des entreprises pour l'Afrique. Elle souligne l'inadéquation entre les approches de la RSE dans les pays développés aux réalités contextuelles de l'Afrique et une claire divergence entre la teneur principale de l'agenda global de RSE et celle qui émerge en Afrique.

g. Les organismes internationaux et la RSE en Afrique

1- Le développement des réseaux Pacte Mondial

Le Pacte Mondial se positionne aujourd'hui comme l'une des initiatives de RSE les plus connues et les plus globalement acceptées par les acteurs africains. Il s'est développé dans les pays africains avec l'appui d'organisations internationales notamment du PNUD. Plusieurs réseaux nationaux ont été créés ou sont en cours de création dans divers pays africains59. Ces réseaux sont des structures d'appui importantes pour l'institutionnalisation de la RSE au niveau national, à la construction d'une expertise au sein des entités adhérentes et au partage des bonnes pratiques entre les différents participants. La force de l'initiative réside dans l'appui des représentations résidentes des Nations Unies et du consensus tout au moins relatif du milieu des affaires vis-à-vis des principes édictés. Dans certains pays comme le Maroc et la Tunisie, le projet «Développement durable grâce au Pacte Mondial » qui implique le BIT et la participation financière de l'Italie permet la promotion des trois outils principaux : le Pacte Mondial, la Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale de l'OIT et les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises

59 Réseaux africains existants : Afrique du sud, Côte d'Ivoire, Egypte, Ghana, Malawi, Mozambique, Nigeria, Sénégal, Tunisie, Zambie. Réseaux en cours de formation : Cameroun, Maroc.

multinationales. Il faut noter par ailleurs l'organisation par le Pacte mondial de forums d'apprentissage (international learning forum) dans quelques pays Africains. Le quatrième du genre s'est tenu au Ghana du 22 au 24 novembre 2006 et a connu le lancement d'Africa Leads, une publication qui fait une compilation d'expériences innovantes dans le milieu des affaires relativement à la RSE60.

2. Les objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et le Growing sustainable Business du PNUD

Les objectifs du millénaire pour le développement constituent une initiative internationale de premier ordre. Elle a été lancée par les Nations Unies à l'occasion du sommet du millénaire pour le développement et a érigé la lutte contre la pauvreté en objectif primordial. Cependant, elle a très souvent été perçue comme une initiative publique qui n'engage que les seuls pouvoirs publics. Le Growing sustainable Business vient donc comme une initiative sous- jacente devant mettre en avant la contribution et le rôle du secteur privé dans la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement. Le Growing sustainable Business a été développé par le PNUD et vise selon Nicolas PONTY61 à « attirer davantage d'investissement en Afrique dans les pays les moins avancés et aligner les intérêts commerciaux et le développement soutenable». Emergé en 2002 de la politique de dialogue du Pacte Mondial sur le développement durable et les affaires, le Growing sustainable Business a été renforcé à l'issue de la publication du rapport de la Commission des Nations Unies sur le secteur privé et le développement en mars 2004. Il s'agit d'une démarche expérimentale d'implication du secteur privé dans la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement. Coordonné par les bureaux nationaux du PNUD et le bureau du Pacte Mondial, le Growing sustainable Business engage le secteur privé dans des partenariats innovants, souvent autour de nouveaux modèles d'affaires, afin de donner un coup d'accélérateur au progrès sur les objectifs du millénaire pour le développement. L'initiative a été mise en oeuvre dans plusieurs pays africains62 où se sont formés dans un premier temps des processus consultatifs transparents sous l'égide du PNUD réunissant pouvoirs publics, entreprises, organisations non

60 Pour plus d'information : sur le forum international d'apprentissage : http://www.ungc-learningforum.org/ et sur Africa Leads : http://www.unisa.ac.za/Default.asp?Cmd=ViewContent&ContentID=19365

61 Nicolas PONTY est administrateur de l'INSEE, économiste principal au PNUD.

62 Les pays ayant expérimenté l'initiative en Afrique sont l'Angola, l'Ethiopie, le Kenya, le Madagascar, le Malawi, la Tanzanie, et la Zambie.

gouvernementales, bailleurs de fonds et système des Nations Unies pour identifier des projets permettant de soutenir la croissance du secteur privé et de bénéficier aux communautés locales. Dans un second temps, la création d'une structure interface permanente a permis de gérer les relations entre les différentes parties prenantes impliquées dans la démarche en lien avec le PNUD et les partenaires au développement. Elle a permis par ailleurs d'apporter un appui à l'identification et au développement de projets de développement d'affaires durables, le financement de travaux de recherche et la diffusion de connaissances, le renforcement des capacités et de révéler les opportunités d'investissement dans les pays participants. Elle a mobilisé le milieu des affaires et permis le développement de nouveaux modèles d'affaires au bénéfice des communautés locales.

3. Les initiatives de la Francophonie/IEPF : le Réseau RSDD

Une des initiatives les plus importantes dans le monde francophone constitue la création sous l'impulsion de l'Institut de l'Energie et de l'Environnement de la Francophonie (IEPF) d'un réseau sur la responsabilité sociétale en vue du développement durable (Réseau RSDD). Lancé à l'issue du séminaire de Marrakech en décembre 2005 sur la normalisation et la responsabilité sociétale en vue du développement durable, ce réseau ne regroupe pas que des acteurs africains mais il constitue une plate-forme au sein de laquelle les acteurs africains ont l'opportunité de renforcer leurs capacités et de confronter leurs visions, leurs approches et leurs perceptions de la RSE avec les acteurs d'autres pays participant à ce réseau. Le Réseau affiche par ailleurs une ferme volonté d'être une partie prenante au débat sur la RSE et d'oeuvrer à l'institutionnalisation de la RSE en Afrique. A cet effet cette étude jette les bases d'actions futures de renforcement des capacités des acteurs engagés ou désireux de s'engager. Une plate-forme de communication a été élaborée et favorisera les échanges sur les problématiques de fond de RSE.

Les initiatives évoquées relativisent l'idée généralement répandue selon laquelle la RSE est un concept complètement méconnu en Afrique. Ces sont des initiatives d'acteurs africains ou d'organismes internationaux présents en Afrique très impliqués aux côtés d'acteurs locaux dans le débat et la promotion de la RSE. Mais il faut noter aussi que les débats et initiatives sur la RSE en Afrique sont aussi le fait d'acteurs extérieurs qui marquent cependant un intérêt pour le développement de la RSE en Afrique.

4. Le groupe d'action régional pour l'Afrique de l'UNEP-FI

L'UNEP-FI est une initiative mondiale qui a scellé un partenariat entre le PNUE et le secteur financier privé en vue d' « explorer et promouvoir les liens entre l'environnement, la durabilité et la performance financière ». Un des moyens d'action de cette initiative constitue la création de groupes d'action régionaux. Le groupe d'action régional Afrique s'est ainsi créé avec pour objectif de soutenir et de développer une pratique financière durable en Afrique. Ce groupe de travail regroupe pour l'instant des acteurs d'Afrique australe (Afrique du sud et Zimbabwe) mais il a pour ambition de s'élargir à toute l'Afrique. Elle bénéficie de l'appui de la Division Technologie, Industrie et Economie du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (DTIE/PNUE) et compte à son actif la publication d'un rapport sur la pratique bancaire durable en Afrique qui couvre les systèmes bancaires de l'Afrique du sud, du Nigeria, du Kenya, du Botswana et du Sénégal.

II- Quelques initiatives internationales tournées vers l'Afrique a) Les initiatives des pouvoirs publics

1) Le Code de conduite pour les entreprises européennes opérant dans les pays en développement 63

Le Parlement européen fait preuve d'une attention particulière sur les implications éventuelles et impacts possibles des activités des entreprises européennes dans les pays en développement notamment dans les zones sensibles. Il a ainsi adopté un code de conduite qui doit guider les activités des entreprises. Malgré la portée juridique très limitée d'un tel texte, il convient de souligner les importantes positions prises par le Parlement européen sur la responsabilité des multinationales vis-à-vis des communautés au sein desquelles elles opèrent. Selon le Parlement européen « les codes de conduite ne sauraient servir d'instrument permettant de soustraire les entreprises multinationales au contrôle des pouvoirs publics et de la justice ». Il affirme par ailleurs que «l'autodiscipline» ou l'autorégulation n'est pas toujours la réponse adéquate. Il relève surtout qu'une attention particulière doit être accordée à l'application des codes en ce qui concerne les travailleurs du secteur informel, du secteur de la sous-traitance et des zones franches et enfin que les entreprises devraient contribuer sur le plan économique et social au processus de développement dans les régions affectées, dans le respect des orientations définies par les pouvoirs publics concernés.

63 Résolution sur des normes communautaires applicables aux entreprises européennes opérant dans les pays en développement: vers un code de conduite. A4-0508/98

2) Les évaluations d'impact sur le développement durable (EIDD) des accords commerciaux64

En 1999, la Commission européenne décidait de soumettre tout accord commercial international qu'elle négocierait à une évaluation d'impact sur le développement durable (EIDD). Ceci marquait une certaine volonté politique de la Commission européenne de renforcer la cohérence de sa politique en matière de développement durable, volonté qui sera matérialisée et inscrite dans sa stratégie développement durable65. Financés par l'Union Européenne et réalisés par un consortium de consultants, les EIDD s'appuient sur les trois piliers principaux du développement durable et font l'objet de publication sous forme de rapports intermédiaires et finaux mis à la disposition du public. Elles viseraient, selon Stefan SZEPESI du Centre européen de gestion des politiques de développement, non seulement à informer les négociateurs sur les conséquences sociales et environnementales de l'accord projeté, mais aussi à orienter les mesures correctives et d'accompagnement à entreprendre. Simple greenwashing ou réelle volonté politique de la Commission d'intégrer les enjeux et principes du développement durable dans les accords commerciaux ?66 les EIDD ont au moins cet avantage de poser le développement durable à l'ordre du jour des négociations commerciales extérieures de l'Union Européenne et dans le processus de conclusion des accords, en attendant que les partenaires africains y tirent réellement le meilleur parti pour un développement harmonieux.

3) L'action du Canada dans le domaine minier

Le Canada marque une attention particulière pour la RSE en l'inscrivant comme une question
centrale dans le cadre de sa politique et de son action de coopération et de commerce
international. Il a initié depuis quelques temps sous l'égide de son ministère des affaires

64 Préparatifs en vue des négociations d'APE : Quel est le rôle des EID ? Eclairage sur les négociations commerciales, juin 2003

65 « Nos politiques - intérieures et extérieures - doivent soutenir activement les efforts déployés par les pays tiers, et notamment par les pays en développement, pour parvenir à un développement plus durable» Développement durable en Europe pour un monde meilleur : stratégie de l'Union européenne en faveur du développement durable COM(2001)264 final/2, page 9

66 Les ONG restent néanmoins préoccupées principales par les EIDD comme l'atteste une déclaration conjointe de 31 ONG d'Europe et des Etats-Unis. Et dans le cadre des accords de partenariats économiques (APE) Union Européenne - ACP, les ONG africaines dénoncent de plus en plus fortement les conséquences qu'ils entraîneraient et rien ne semble pour l'instant répondre à leurs préoccupations malgré le dispositif EIDD

étrangères et du commerce international des tables rondes réunissant diverses parties prenantes autour de la responsabilité sociétale des entreprises canadiennes opérant dans les pays en développement dans le secteur extractif (mines, pétrole, gaz)67. Selon le ministère canadien des affaires étrangères ces tables rondes ont pour objectif d'examiner les mesures à prendre pour permettre aux entreprises opérant dans les pays en développement de satisfaire aux normes et aux pratiques exemplaires internationales en matière de RSE. En favorisant et en promouvant la responsabilité sociétale de ses entreprises opérant dans les pays en développement, le Canada montre la voie à suivre et contribue de fait à l'institutionnalisation de la RSE dans les pays africains. Les recommandations des tables rondes ont été saluées par le réseau canadien sur la reddition de comptes des entreprises (RCRCE) comme « un pas vers la bonne direction »68. En plus de ces tables rondes le Canada s'est illustré encore en à travers l'inscription de la RSE à l'ordre du jour des dialogues interparlementaires Afrique - Canada. Il est ressorti de ces dialogues la nécessité de conjuguer les efforts en faveur de la responsabilisation des entreprises et en particulier celles opérant dans le secteur des ressources naturelles69. Ces dialogues ont tout leur intérêt dans le fait qu'il renforce les capacités des parlementaires, décideurs politiques africains, dans ce domaine et aiguise leur sensibilité face aux problématiques et enjeux de RSE.

4) Le Groupe de travail sur la RSE et les SNDD en Afrique

Il s'agit d'une initiative émergente qui vise à mobiliser des entreprises françaises présentes en Afrique autour des problématiques de RSE et de développement durable. Une démarche expérimentale visera dans un premier temps 5 pays africains : Burkina Faso, Cameroun, Ghana, Maroc et Sénégal et mobilisera des entreprises françaises volontaires présentes dans ces pays autour des problématiques de responsabilité sociétale et des stratégies nationales de développement durable (SNDD). L'initiative qui ne vise pas seulement le milieu des affaires intégrera progressivement des acteurs autres que les entreprises, notamment les ONG dans la démarche. La seconde phase de la démarche expérimentale s'intéressera à l'Algérie et à la Côte d'Ivoire et, par touche progressive, s'étendra à d'autres pays africains.

67 Pour plus d'information sur les tables rondes : http://geo.international.gc.ca/cip-pic/current discussions/csrroundtables-fr.aspx

68 La déclaration du RCRCE sur le rapport final des tables rondes nationales sur la RSE est disponible sur : http://geo.international.gc.ca/cip-pic/library/CSR CNCA Statement francais.pdf

69 Consulter le rapport du deuxième dialogue interparlementaire annuel Afrique-Canada sur les politiques http://parlcent.ca/africa/papers/Rapport%20(Version%20site%20web).pdf visité le 10/10/2007

b) Les initiatives du milieu des affaires

1. Les principes de Sullivan et les sommets Léon Sullivan

Très peu évoquée au niveau international, cette initiative peut et doit pourtant être considérée comme l'initiative pionnière en matière de RSE au niveau international, en Afrique et en particulier en Afrique du sud. Lancés en 1977 par le Révérend Léon H. Sullivan70, alors qu'il siégeait au conseil d'administration de General Motors, ces principes visent à soutenir et promouvoir la justice économique, l'équité et la cohésion sociales par les entreprises partout où elles opèrent. Au coeur de ces principes figurent en bonne place la promotion des droits humains en général, des droits des employés en particulier, le respect des lois et le bien-être des communautés au sein desquelles l'entreprise opère et enfin l'égalité des chances et la non- discrimination.

Cette initiative trouve son fondement dans la volonté de son initiateur de mobiliser les entreprises nord américaines opérant en Afrique du Sud sous l'apartheid à ne pas appliquer des politiques d'apartheid et à traiter leurs employés noirs comme elles le feraient pour des citoyens américains. Ces principes font expressément référence à la déclaration universelle des droits de l'Homme et s'adressent à tout type d'entreprise. Il est attendu des entreprises qui y souscrivent de fournir publiquement des informations attestant des efforts déployés pour se conformer aux principes. Ces principes ont contribué de manière significative à la fin de l'apartheid. Revisité et rebaptisés « Global Sullivan Principles for Corporate Responsibility», ces principes sont considérés comme le fondement même du Pacte mondial des Nations Unies.

Cette initiative de M. Sullivan a eu aussi pour objectif d'inciter les entreprises et la diaspora afro-américaines à investir en Afrique. Il se tient depuis plusieurs années des sommets Léon Sullivan réunissant les dirigeants politiques. Le dernier en date et huitième du genre s'est tenu du 17 au 21 juillet 2006 à Abuja au Nigeria71. Ces sommets contribuent aussi à la promotion des principes et à l'institutionnalisation de la RSE.

70 Léon H. Sullivan (16 octobre 1922 - 24 avril 2001) premier afro-américain à occuper d'aussi importantes fonction au sein d'une grande entreprise américaine. Il fut un activiste contre l'apartheid et lança les principes de Sullivan sous forme de code de conduite en complément de la campagne de désinvestissement lancé à l'endroit des entreprises américaines présentes en Afrique du sud pendant l'apartheid.

Pour plus d'information : http://www.thesullivanfoundation.org/gsp/default.asp

71 Le premier sommet Sullivan s'est tenu en Côte d'Ivoire en 1991. Les sommets Sullivan réunissent des décideurs politiques et économiques mondiaux, des délégués d'organisations des sociétés civiles nationales,

2. La charte du développement durable du CIAN

Le CIAN a adopté une charte du développement durable avec la volonté de « lui donner une spécificité africaine » ainsi que l'affirmait son Président, Gérard PELISSON. A travers cette charte, les entreprises membres s'engagent à respecter 3 principes essentiels du développement durable : la contribution au développement économique des pays d'opération, le respect de l'autre et de sa culture et la protection de l'environnement et du patrimoine écologique. Un groupe de travail « suivi des entreprises » permettra à l'organisation d'assurer un accompagnement des entreprises dans leurs stratégies et démarches de développement durable pour une meilleure efficacité de la démarche. Il faut noter par ailleurs que le CIAN a adopté en mars 2005 une déclaration sur la prévention de la corruption.

3. Le Forum des affaires UE - Afrique et le groupe de travail sur la bonne gouvernance et l'éthique d'entreprise

Le forum des affaires Europe - Afrique est en passe de s'institutionnaliser. Après une première édition tenue à Bruxelles du 16 au 17 novembre 2006, la deuxième édition a eu lieu en terres africaines, au Ghana du 21 au 23 juin 2007. Portés par les milieux des affaires, de tels forums ont pour objectif de mettre en exergue les potentialités africaines et les opportunités d'affaires entre les deux régions et de favoriser la mise en place de réseaux d'affaires et, partant, de renforcer le secteur privé africain.

La première édition annonçait déjà les couleurs quant à la perspective de l'intégration de la RSE dans les rapports économiques entre l'Europe et l'Afrique. En effet, au menu des discussions figuraient en bonne place la bonne gouvernance et l'éthique d'entreprise. Un groupe de travail «Bonne gouvernance et éthique d'entreprise» a été mise en place avec pour but : « d'approuver les meilleures pratiques en matière de gouvernance du secteur public et de promouvoir les meilleures pratiques en matière de gouvernance du secteur privé »72.

Il est à noter que si les secteurs privés aussi bien européens qu'africains ont apprécié l'intégration de la RSE dans le forum, ils estiment cependant dans le document de discussion que « toute société faisant des affaires sur le continent africain, et non seulement les entreprises européennes, devrait réfléchir aux stratégies de RSE ».

internationales et universitaires pour concentrer l'attention et les ressources sur le développement économique et social de l'Afrique

72 Extrait du document de discussion du groupe de travail sur la base de la contribution du secteur privé

4. Les initiatives du milieu pharmaceutique

Trente neuf (39) grandes entreprises pharmaceutiques avaient engagé des poursuites judiciaires contre l'Afrique du sud en 1997 pour le non-respect des droits de propriété intellectuelle sur les produits anti rétro viraux (ARV) malgré la catastrophe sanitaire qui menace l'Afrique du sud du fait de la séro-prévalence très élevée. Cette action a soulevé une indignation générale de par le monde, ces entreprises ayant donné l'impression d'accorder plus d'attention aux intérêts financiers qu'à la santé humaine. Cette situation a écorné l'image de nombreuses entreprises qui ont, par la suite, abandonné leurs poursuites. Et pour faire sans doute amende honorable et reconquérir leur image de marque, des grandes entreprises pharmaceutiques ont lancé un nouveau plan pour l'Afrique qui vise coordonner la lutte contre le sida en faisant face à l'émergence de crise de diabète73.

Sanofi- adventis pour sa part a choisi de s'attaquer aux maladies tropicales négligées74. Elle a renouvelé ainsi en octobre 2006 sa collaboration avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour le traitement de la trypanosomiase africaine et de 3 autres maladies négligées : leishmaniose, ulcère de Buruli et maladie de Chagas. Elle s'investit également dans un programme contre le paludisme dénommé Impact malaria.

c) Le monde académique : les études, mémoires et actions du GRAMA

Le GRAMA constitue une composante de la Chaire de recherche sur la gouvernance et l'aide au développement de l'Université du Québec à Montréal (UQAM). Il poursuit « un triple mandat de recherche, de formation et de participation aux processus de prise de décision concernant les enjeux de développement économique et social que suscite la présence croissante d'activités minières en Afrique » 75. Il a ainsi mené plusieurs études qui ont fait l'objet de publication et présenté des mémorandums notamment dans le cadre du dialogue sur la politique étrangère du Canada afin que celui-ci inscrive, dans ses politiques nationales, bilatérale et multilatérale, la nécessité d'élaborer des normes contraignantes à l'intention des

73 Pour plus d'information : http://www.business-humanrights.org/Links/Repository/360156/link page view

74 Selon la Mission permanente de la France auprès de l'ONU à Genève, un milliard de personnes dans le monde sont atteintes d'une ou plusieurs maladies négligées. Ces maladies sont qualifiées de « négligées » car elles ne frappent plus que les populations des régions les plus pauvres et marginalisées.

Sur le partenariat avec l'OMS : http://www.who.int/mediacentre/news/releases/2006/pr54/fr/index.html

75 Il s'agit là d'une présentation synthétique suivant les informations disponibles sur le site du GRAMA. Pour plus d'information : http://www.er.uqam.ca/nobel/grama/

entreprises minières pour garantir les droits humains et le respect de l'environnement. Il faut relever particulièrement le mémoire soumis dans le cadre des audiences publiques du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international dans lequel il estime que le Canada doit jouer un rôle de leader et assumer les responsabilités dans la promotion de la responsabilité sociétale des entreprises opérant à l'étranger et dans le suivi des investissements opérés avec son appui76.

d) Autres initiatives sur l'activité extractive en Afrique objet d'études et d'enquête

Parce que le secteur minier est très problématique en Afrique, beaucoup d'ONG ont mené des enquêtes et investigations à la suite d'alertes, d'allégations ou de soupçons de violation de droits humains ou d'atteinte à l'environnement. On peut citer en exemple l'étude de la FIDH sur l'exploitation minière au Mali77 et les rapports de deux missions d'enquête conduite par SHERPA au Niger et au Gabon, respectivement en 2005 et 200778.

D'autres études de type académique se sont également intéressées aux problématiques de RSE en Afrique. On peut entre autres relever une thèse de Aurélie CHAMARET sur les projets miniers au Niger79. Cet intérêt croissant du monde académique européen et des ONG internationales pour les problématiques et enjeux de RSE en Afrique contribue assurément à renforcer le débat au niveau africain en aiguisant l'intérêt des acteurs locaux voire en les

76 La gouvernance des activités minières en Afrique : une responsabilité partagée . Examen de l'Énoncé de politique internationale du Canada Fierté et influence : notre rôle dans le monde, par Dr Bonnie Campbell, en collaboration avec Suzie Boulanger et Myriam Laforce, Montréal, le 4 novembre 2005.

Pour plus d'information : http://www.ccic.ca/e/docs/002 policy 2005-1 1 ips memoire grama.pdf

77 Mali : l'exploitation minière et les droits humains, FIDH, septembre 2007, N°477

78 LA COGEMA AU NIGER Rapport d'enquête sur la situation des travailleurs de la SOMAÏR et COMINAK, filiales nigériennes du groupe AREVA-COGEMA, 25 avril 2005. Enquête réalisée en collaboration avec la CRIIRAD et AGHIR IN' MAN Sous la direction de William Bourdon. Rapport disponible : http://www.assosherpa.org/CP areva07/RAPPORT%20SHERPA%20NIGER%20ARLIT.pdf

AREVA AU GABON, Rapport d'enquête sur la situation des travailleurs de la COMUF, filiale gabonaise du groupe AREVA-COGEMA, 4 avril 2007. En collaboration avec la CRIIRAD, Médecins du Monde et les associations d'anciens travailleurs de la COMUF : CATRAM (au Gabon) et MOUNANA (expatriés). Rapport disponible : http://www.asso-sherpa.org/CP areva07/RAPPORT%20AREVA%20MOUNANA%20040407.pdf

79 A. CHAMARET «Une démarche top-down / bottom-up pour l'évaluation en termes multicritères et multiacteurs des projets miniers dans l'optique du développement durable: Application sur les mines d'uranium d'Arlit» (Niger), thèse soutenue le 28 juin 2007

mobilisant autour des enjeux de RSE et incite les entreprises étrangères qui y opèrent à porter plus d'attention aux impacts de leurs activités.

D'autres organisations non gouvernementales se sont également investis dans des initiatives qui ont touché l'Afrique. Il s'agit par exemple de :

- Amnesty International et Global Witness ont beaucoup travaillé sur les exploitations des ressources minières et les violations des droits humains, plus spécifiquement sur les diamants de la guerre et le processus de Kimberley ;

- Transparency International sur les questions relatives à la corruption

- OXFAM et Agir Ici et les Amis de la Terre sur les questions agricoles et les accords de partenariat économique (APE)

Diverses initiatives ont contribué à alimenter le débat sur la RSE en Afrique à l'intérieur et hors des frontières africaines. Ces initiatives sont d'importance inégale. Il en est de même de la connaissance du concept dans les pays et par les acteurs africains. On retiendra pour l'essentiel une tendance beaucoup plus importante au développement du débat et des initiatives dans les pays anglophones que dans les pays francophones. Cela relève-t-il des influences des anciennes métropoles , de l'influence du système juridique, d'influences culturelles ? Dans tous les cas, il serait intéressant de voir ce qui explique le fait que la RSE soit un sujet plus discuté dans les pays anglophones que francophones et surtout s'il y a une convergences dans l'approche, dans la vision de la RSE ainsi que les éléments déterminants de telles approches. Une première étape dans cette direction n'est-elle pas de voir de façon globale ce qui constitue le fondement d'une vision africaine de la RSE au vu des réalités précédemment décrites et de la culture africaine.

TROISIEME PARTIE : QUELLE RSE POUR L'AFRIQUE ?

La contribution du milieu des affaires au développement durable et la gestion des impacts négatifs des activités de l'entreprise sur la société est devenue une question centrale dans le contexte actuel de la mondialisation. Simple effet de mode ou mouvement de fond, la RSE demeure encore une notion qui est à la recherche de ses marques surtout en Afrique. En Occident, plusieurs théories ont été développées pour fonder/justifier la RSE et plusieurs définitions ont été les témoins d'une diversité d'approches théoriques, de courants et d'écoles de pensée. Les questions qui se posent à nous dans cette partie sont la pertinence des fondements théoriques développés jusque-là autour de la RSE par rapport aux problématiques africaines, les enjeux que la RSE pose pour l'Afrique ainsi que les leviers potentiels de l'institutionnalisation de la RSE en Afrique.

A Les théories fondatrices de la RSE à l'épreuve des réalités africaines

Selon M. CAPRON, « la responsabilité sociale (de l'activité économique, puis des entreprises) existe dès lors que l'Homme se soucie de réguler ses rapports avec la nature et avec ses semblables »80. Cela va s'en dire que la RSE, tout au moins la RSE implicite81, n'est nouvelle ni pour l'Europe ni pour l'Afrique. Plusieurs approches théoriques ont été développés et qui sont le fondement ou la justification des visions occidentales de la RSE. Il y a lieu, dans cette partie de notre étude, de faire l'économie de ces approches théoriques et de s'interroger sur ce qui peut fonder une vision africaine de la RSE ou s'accommoder aux réalités qui sont les siennes.

I Que faut-il entendre par réalités africaines ?

Il serait très réducteur de penser l'Afrique comme un ensemble uniforme partageant les mêmes caractéristiques, les mêmes visions, les mêmes traditions. Bien au contraire, l'Afrique est multiple. Cependant, les pays africains partagent des caractéristiques socioculturelles économiques et politiques qui se distinguent de très loin de celles des pays des autres régions

80 CAPRON M., Quel sens donner au mouvement de la responsabilité sociale des entreprises ? EJESS - 19/2006. Ethique, économie et société, pages 113

81 D. MATTEN et J. MOON distingue la RSE explicite par opposition à la RSE implicite.

du monde. Il faut par conséquent se référer au contexte et à la conception africaine de l'entreprise pour comprendre les réalités africaines dans lesquelles doit s'ancrer toute approche et toute vision de la RSE.

a) Rappel du contexte africain

Comme nous l'avons déjà évoqué plus haut, le contexte africain se caractérise par des Etats affaiblis, fragilisés par le processus de mondialisation, un contexte économique en pleine mutation avec une volonté officiellement manifeste de sortir du sous-développement, un contexte écologique riche mais menacé par les enjeux globaux et spécifiques. Le véritable défi des Etats réside plus dans la mise en application des législations et réglementations que dans l'existence même d'un cadre institutionnel et juridique approprié. On note par ailleurs une influence très faible de la société civile malgré la forte présence d'associations, de syndicats et d' organisations non gouvernementales dans la plupart des pays. Il s'agit non seulement d'une société civile peu influente mais aussi qui ne marque que peu d'intérêt aux problématiques liées aux entreprises. Les réalités africaines, c'est aussi l'aspiration des populations à l'éducation, à la santé et à l'accès aux produits de base. La recherche de produits moins chers met ainsi souvent au second plan la question de la qualité intrinsèque du produit. Dans ces situations, il est illusoire de penser à un quelconque activisme consumériste. La pression des consommateurs sur l'entreprise est de ce fait quasi absente et ne peut à priori être l'élément moteur de l'engagement de celle-ci dans des démarches RSE. L'Afrique marque aussi par la spécificité des problématiques fondamentales de développement auxquelles elle est confrontée : pauvreté, insécurité, souveraineté alimentaire, accès aux marchés extérieurs, SIDA et autres pandémies. Des problématiques qui touchent de plein fouet les entreprises et demandent de leur part une plus grande pro-activité en matière de RSE. C'est aussi un environnement où la RSE explicite est en pleine implantation grâce aux initiatives de certains acteurs, la construction d'une vision à laquelle prend activement part l'acteur international. Enfin les réalités africaines, ce sont aussi à la fois une histoire, une diversité de cultures qui se tiennent à travers certaines caractéristiques fondamentales ; c'est une certaine approche de l'entreprise qui transcende l'objectif financier et le court terme.

b) L'entreprise africaine : de la fiction juridique à la réalité sociologique

La plupart des Etats africains ont hérité des traditions juridiques et politiques des anciennes métropole82. De ce fait l'approche juridique de l'entreprise s'inscrit dans les systèmes juridiques auxquels les Etats africains appartiennent. Il est par conséquent difficile, voire inopérant de ne recourir qu'aux acceptions juridiques de l'entreprise dans l'effort de conceptualisation d'une approche africaine de la RSE. C'est pourquoi dans nos propos, nous ne nous limiterons pas uniquement à la société commerciale juridiquement consacrée. Nous nous intéresserons aussi aux très petites entreprises du secteur informel car la compréhension de leurs pratiques est aussi utile pour le développement d'une approche africaine de la RSE. Il s'agit par conséquent de se pencher davantage sur une conception sociologique et multidimensionnelle de l'entreprise africaine pour éclairer les acceptions juridiques et les pratiques de l'entreprise.

1) Essai de définition et de compréhension de la place et du rôle de l'entreprise africaine

L'entreprise ou la société (commerciale), selon le droit burkinabé et des pays de tradition juridique française, est « un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes décident de mettre quelque chose en commun, dans la vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter ». Cette acception « contractualiste » de l'entreprise ne rend compte que partiellement de la réalité de l'entreprise en mettant seulement en exergue l'association des capitaux, la recherche et le partage des bénéfices entre les associés. L'entreprise est aussi, selon Pascal LABAZEE83, « le lieu de création de richesses et de pouvoirs » et un « espace social ». Les réponses au questionnaire nous donnent par ailleurs un éclairage sur la perception de l'entreprise par les participants africains. Tous s'accordent sur l'objectif de rentabilité de l'entreprise, mais il convient de noter que la grande majorité lui assigne d'autres missions/rôles tels que le développement de la communauté, la participation à l'innovation et à la créativité ainsi que la répartition équitable des richesses.

Créer de la richesse, de la valeur, engendrer des bénéfices, être profitable ; l'objectif
économique de l'entreprise est le lieu de convergence à la fois des acceptions africaines et
occidentales de l'entreprise. Mais l'entreprise en Afrique est aussi un espace social et un lieu

82 L'harmonisation du droit des affaires a suivi les traditions juridico-linguistiques et l'OHADA en constitue une preuve palpable.

83 Pascal Labazée, né en 1953. Economiste et anthropologue, il est chargé de cours à l'université Paris VIII. Il a effectué plusieurs séjours en Afrique, notamment au Burkina Faso. Il est l'auteur du livre Entreprises et entrepreneurs du Burkina Faso, Karthala, 1987, collection Les Afriques.

de pouvoirs. Cela n'en demeure pas moins vrai aussi dans les pays occidentaux. Cependant cet état de fait est encore plus prégnant en Afrique lorsque l'on prend en considération les traditions, les réalités sociologiques. L'entreprise africaine est en soi un microcosme social. Il se reproduit au sein des entreprises nationales du secteur formel comme du secteur informel et même dans les filiales de multinationales dirigées par des nationaux, des attributs de la société africaine. LABAZEE parle de reconstitution d'un pouvoir de forme traditionnelle à l'intérieur des entreprises84. Le recours à des méthodes ou voies non juridiques de gestion des conflits sociaux est illustratif du fait qu'au sein de l'entreprise se retrouvent les traits, les représentations même de la société africaine.

L'entreprise est un moyen plutôt qu'une fin. La création d'une affaire doit permettre au promoteur d'en vivre mais aussi de faire vivre ses proches, parents et amis, de délivrer des services à la communauté. Elle doit contribuer à raffermir le lien social et non le mettre en péril. La prospérité assure au promoteur une certaine considération ou ascension sociale. Cependant cette considération sera à l'aune de la contribution de l'entrepreneur ou de l'entreprise au bien-être social, de la légitimité que lui confère la conformité de ses activités aux exigences éthiques et enfin de l'effectivité de son ancrage territorial. A ce titre, l'obligation implicite de solidarité vis-à-vis de la communauté est fortement ancrée dans les sociétés africaines et se répercute au sein même de l'entreprise. C'est ce qui justifie qu'à l'occasion des grands enjeux nationaux (secours à des sinistrés, participation à une compétition, etc.), l'Etat fasse appelle à la contribution des acteurs privés hors du circuit traditionnel des obligations fiscales à leur charge et des activités de mécénat traditionnel.

L'entreprise africaine dispose ainsi de caractéristiques propres et de rôles particuliers qui le distinguent de l'entreprise occidentale et qui vont au-delà de l'acception juridique. A ce titre LABAZEE fait un tour d'horizon des pratiques de gestion, de direction et de prise de décision dans le milieu des affaires burkinabé et dégage des caractéristiques qui peuvent, à certains égards, être répliquées/étendues à l'Afrique, marquée par l'hétérogénéité du milieu des affaires burkinabé et africains en général.

2) Les modes de gestion, de direction et de prise de décision

84 La reconstitution d'un pouvoir de forme traditionnelle à l'intérieur des entreprises provient de l'adaptation des règles de communication et des équilibres hiérarchiques et économiques qui y sont liés : distinction entre source et manipulation du pouvoir, règlement des problèmes particuliers relatifs aux impératifs de solidarité, respect des prééminences gérontocratiques ou familiales, représentation de ces prééminences, etc.

i. Typologie des modes de gestion des entreprises africaines

La gestion empirique est très caractéristique de beaucoup d'entreprises africaines. Elle se manifeste par l'absence quasi-totale d'organisation comptable formelle et de reporting financier et par une très grande variabilité des prix. Ce mode de gestion est très présent dans les entreprises du secteur informel et dans certaines entreprises structurées individuelles ou familiales. L'organisation et la gestion de l'entreprise sont telles que celle-ci se confond à son dirigeant dans les faits et la réalité. Le dirigeant en est à la fois propriétaire, gérant et comptable. L'entreprise se positionne le plus souvent sur des « marchés d'opportunité » qui ne s'accommodent pas forcément avec les outils modernes de gestion. Le promoteur ou l'entrepreneur applique à la gestion de son entreprise des méthodes personnelles acquises au fil de son expérience et de sa formation personnelles.

La délégation des responsabilités de gestion constitue un premier pas vers « l'assimilation des contraintes » selon l'auteur et l'adoption de règles modernes de gestion qui autorise une certaine dose/obligation de reporting comptable et financier du gérant délégué au propriétaire ou à l'administration fiscale. Le propriétaire ou promoteur demeure cependant très présent dans les différents actes que pose l'entreprise, contrôle ou recommande les embauches sans que le délégué à la gestion puisse dans la réalité remettre en cause ces décisions.

Dans ces deux modes de gestion, on peut affirmer que l'éthique de l'entreprise est celle de son dirigeant puisqu'il y a une symbiose quasi parfaite, du moins une confusion entre l'entreprise et l'entrepreneur. L'entreprise n'a d'existence que par son propriétaire. L'ancrage de l'entreprise dans son milieu sera à la hauteur de l'intégration de son propriétaire ou de son dirigeant au sein de la société. Dans cette situation, il faut rechercher la source du commandement dans l'autorité morale et confessionnelle de l'entrepreneur.

La gestion professionnelle constitue la mise en oeuvre des outils modernes de gestion. Selon LABAZEE, elle est le fait « d'investisseurs influents, de promoteurs ayant une qualification élevée ou une expérience en matière de gestion et d'organisation ». Les entreprises s'adaptent dans leur gestion aux contraintes du marché et de l'économie moderne. Elles éliminent l'utilisation d'opportunités tant pour l'approvisionnement que la distribution de produits ou la délivrance des services. Le respect d'une certaine orthodoxie de gestion financière est la condition à l'accès aux crédits dont l'entreprise a besoin pour son développement. Elle s'attache moins aux particularités que les deux modes précédents évoqués. La source de commandement au sein de l'entreprise réside dans les compétences professionnelles du dirigeant ou la propriété des capitaux conformément aux réglementations régissant les entreprises. Les entreprises filiales de multinationales sont assurément dans cette optique de

gestion même si les réalités qui gouvernent la prise de décision sont soumises à des contingences sociales et sociologiques qui peuvent échapper dans tous les cas aux règles de la gestion moderne.

Typologie d'organisation de la gestion et de la comptabilité et leurs effets

1) Gestion empirique

> flux d'échanges non profitable, le profit escompté est variable et dépendant des opportunités

> Impossibilité d'accès aux financements externes à court, moyen et long terme.

> Impossibilité de générer des produits financiers et d'effectuer des placements > Pas d'accès aux marchés publics

> Articulation nulle ou médiocre aux grandes entreprises

2) Gestion déléguée

> L'information suscitée dans l'entreprise et utilisable par le promoteur dépend étroitement de la qualification du personnel recruté

> Conflits potentiels de pouvoir dans l'entreprise, difficulté de contrôle de l'activité du gestionnaire

> Abandon partiel des marchés d'opportunité

> Poids de la concurrence avec les établissements à gestion empirique, qui bénéficient d'un avantage en terme de coûts.

3) Gestion professionnelle

> Difficultés de recrutement d'un personnel qualifié

> Difficultés d'une planification rigoureuse sur tous les aspects relatifs à l'activité

> Abandon des opportunités produisant des profits exceptionnels et difficulté de dégager une marge régulière

> Difficultés de concilier les techniques de gestion rigoureuses et les impératifs liés à l'existence de cas particuliers

Source : P. LABAZEE, Entreprises et entrepreneurs du Burkina Faso, Karthala, 1988

ii. Les impératifs gouvernant la direction et la prise de décision

Deux types d'impératifs gouvernent la gestion et la prise de décision dans l'entreprise. Il y a d'une part les impératifs liés au respect des règles de solidarité très ancrée dans les communautés africaines et d'autre part l'impératif de rentabilité optimale.

Comme évoqué plus haut, l'entreprise africaine n'est pas dénué de tout objectif de profitabilité et il serait aberrant de penser que l'entreprise africaine est vouée à faire de la charité à tout vent. Bien au contraire ! La poursuite de la rentabilité à court, moyen et long termes constitue un objectif essentiel de l'entreprise. Cependant, cet objectif de profitabilité s'articule avec l'obligation de solidarité très ancrée dans les traditions africaines et qui ressort aussi dans l'entreprise. Cela se manifeste dans les actes caritatifs, l'attention sur les préoccupations de la communauté, le respect des valeurs. On y retrouve des pratiques paternalistes comme par exemple la prise en charge de l'employé et de sa famille par l'employeur, la variabilité du salaire qui est fixée selon des facteurs extra-économiques (humeur du patron, proximité familial, etc.). Face à un problème, les décisions à prendre doivent à la fois préserver l'objectif financier de l'entreprise et se conformer à l'ensemble des normes culturelles et morales en vigueur dans la société.

3) Pratiques de gestion des ressources humaines (GRH)

Nous n'analyserons pas en détail toutes les pratiques de GRH dans les entreprises africaines. Pour les besoins de notre étude, nous avons choisi de nous limiter aux pratiques de recrutement et de rémunération qui ont un effet certain sur les relations entre employeurs et employés ainsi que les types de conflit et les modes de résolution des conflits sociaux utilisés. D'entrée de jeu, il convient de noter que les 2 impératifs sus-mentionnés déterminent aussi bien le recrutement que le système de rémunération85. On distingue 3 modes de recrutements qui ont aussi des influences sur le mode de rémunération et de gestion de la carrière de l'employé.

i. Le recrutement sur qualification ou expérience professionnelle

Il se fait sur le marché anonyme de l'emploi par des services ou directions de ressources humaines intégrés dans l'entreprise ou par le recours aux organismes privés ou publics de recrutement ou de placement. Il se justifie par les besoins de croissance de l'entreprise. Sont principalement prises en considération les qualifications, les compétences, l'expérience

85 Pascal LABAZEE ajoute un troisième impératif qu'il appelle l'impératif idéologique

professionnelle et la motivation du postulant. La relation de l'employé à l'employeur est hiérarchique, individuelle certes mais moins personnalisée au début de l'embauche. La rémunération et la gestion des carrières sont négociées et tiennent compte des stipulations contractuelles, du droit du travail et /ou des conventions collectives qui les régissent. Les revendications et conflits sociaux s'inscrivent dans le cadre professionnel et leur résolution obéit le plus souvent à des règles formalisées consacrées dans le droit du travail et les pratiques professionnelles formelles sans préjudice de démarches informelles parallèles qui peuvent aussi y contribuer.

ii. Les recrutements familiaux ou interethniques et les embauches clientélistes ou relationnelles

Ces deux modes sont très fréquents et similaires dans leurs caractéristiques86. Ils trouvent leur fondement dans la nature même du marché économique et du travail avec la forte présence du secteur informel qui a principalement recours à ces formes d'embauche. Il consiste à engager dans des liens professionnels des personnes issues de la famille au sens (large) africain du terme, des amis ou des personnes recommandées par des proches87. Très souvent cette relation professionnelle n'est pas formalisée par la signature d'un contrat formel de travail. L'engagement de l'employé peut ne pas correspondre à un besoin particulier de l'entreprise ni tenir compte des qualifications de l'employé. Il s'agit d'une forme de solidarité qui consiste à offrir à l'employé un travail et les moyens de survie par le biais du travail au sein de l'entreprise au-delà des actes caritatifs ponctuels conformément aux traditions de solidarité et au dicton qui veut qu'au lieu de donner du poisson à quelqu'un on lui apprenne plutôt à pêcher : on supplée ainsi à la charité par le travail. Ces modes de recrutement peuvent cependant se conjuguer avec la compétence et l'expérience professionnelle de la personne recrutée. Mais le fait d'appartenir au réseau familial ou de connaissance constitue un atout majeur, ce qui peut s'analyser à tort ou à raison comme une atteinte au principe de l'égalité des chances.

86 La possibilité de s'insérer dans l'entreprise en tant qu'apprentis ou employé est ouverte aux membres de la famille de l'entrepreneur et à ceux qui partagent une communauté de culture ethnique ou confessionnelle avec celui-ci

87 On inclut dans le cercle familial toutes les personnes qui entretiennent des liens de parenté proche ou lointaine. On parle très souvent de grande famille. Mais la famille ne se limite pas seulement au lien de sang. Elle peut aussi résulter d'une relation d'affectivité et d'amitié transcendant le lien de sang

Ces modes de recrutement ont pour effet la transposition dans l'entreprise de relations personnalisées d'une toute autre nature transcendant les simples liens de travail. Les relations personnelles influent sur les relations professionnelles et vice versa. L'employeur est responsable de l'employé et de sa famille et intervient dans des situation personnelles (financement du mariage, participations aux soins ou aux funérailles de l'employé ou de ses proches, etc.) On assiste au développement d'une certaine forme de paternalisme qui trouve son fondement dans l'obligation de solidarité et qui participe à la cohésion sociale. On y retrouve des systèmes atypiques de gestion des conflits sociaux hors du cadre juridique établi. On peut citer par exemple le recours à la médiation privée non formelle comme les conseils de famille, les conseils d'anciens ou de sages sans préjudice des mécanismes formels (négociation collective et dialogues avec les instances représentatives du personnel). Le montant de la rémunération de l'employé est très variable et son versement irrégulier. Le salaire peut comporter une part non financière et son montant/variation ne tient pas forcément compte d'éléments objectifs : elle se fait au gré de l'employeur.

Si cette forme d'embauche a l'avantage de favoriser un climat de travail a priori serein entre des personnes dont la destinée commune dépasse le cadre de l'entreprise, elle peut aussi déboucher sur l'exploitation de l'employé qui se refuserait à tout conflit professionnel ou à toute revendication pour préserver les relations extra professionnelles qui le lient à l'employeur. Les employeurs qui ont recours à ce mode de recrutement manifestent une certaine hostilité vis-à-vis des organisations de travailleurs et des revendications corporatives88.

Ces modes de recrutement et de rémunération peuvent ainsi être appréciées de diverses manières suivant l'appréhension qu'on a de ces pratiques et suivant les conséquences qu'elles engendrent. D'une part elles favorisent la redistribution de ressources par le travail (alors même que la situation de l'entreprise ne commande pas le recrutement de l'employé) et la consolidation de relations professionnelles entre employeurs et employés et d'autre part elles peuvent favoriser l'exploitation, voire une certaine méprise du droit du travail. La solution réside-t-elle dans la formalisation des relations professionnelles et la restructuration même des entreprises du secteur informel pourvoyeur de ces emplois précaires ? Peut-être bien ! Mais cela s'accommodera-t-il avec les conditions sociales de la production et de la circulation des marchandises, des réalités sociales et sociologiques ? On ne peut manquer de se demander si

88 P. LABAZEE « il est évident qu'un patron ne peut voir d'un bon oeil la mise en place d'une section d'entreprise », op. Cit.

l'application de techniques de rationalisation n'engendrerait pas, dans certains cas des effets pervers et ne briserait pas la chaîne de solidarité en individualisant et en dépersonnalisant les relations de travail. Ce que certains peuvent considérer comme un manque de rationalité dans la gestion des entreprises notamment dans le mode empirique, n'en est peut-être rien. Il conviendrait de voir si, en raison des différences de considération et de perception de l'entreprise, le curseur de la rationalité et de responsabilité ne se situe pas à niveau autre que dans la situation de gestion moderne occidentale et de trouver les approches fondatrices d'une RSE conformes à ces réalités sociales, économiques et sociologiques à l'exemple des approches européennes qui ont été développées.

II Approches occidentales de la RSE : définition conceptuelle et débat autour de la RSE

La RSE peut être saisie comme l'application du concept et des principes du développement durable à l'entreprise ou encore la contribution des entreprises au développement durable par la prise en compte des impacts négatifs de leurs activités sur la société. Pour l'entreprise, le développement durable suppose qu'elle se développe en s'appuyant sur trois piliers majeurs et interdépendants : économique, social et environnemental.

Pour Jones (1980) la responsabilité sociétale est « [l'idée] selon laquelle les entreprises, au- delà des prescriptions légales ou contractuelles, ont une obligation envers les acteurs sociétaux ». Il ressort que la responsabilité d'une entreprise ne saurait se limiter aux exigences ou contraintes légales, contractuelles classiques. La Commission de l'Union européenne abonde dans ce sens en affirmant que : « Être socialement responsable signifie non seulement satisfaire pleinement aux obligations juridiques applicables, mais aussi aller au-delà et investir davantage dans le capital humain, l'environnement et les relations avec les parties prenantes ». La RSE explicite est apparue d'abord aux Etats-unis à la fin du 19ème siècle. La conception états-unienne de la RSE a une forte dominance éthique et un ancrage religieux important. L'entreprise, assimilée à son dirigeant, est capable de faire du bien ou du mal, d'adopter des comportements éthiques, être vertueuse. Les principes de charité et de bienveillance ou d'intendance à l'égard d'autrui (charity and stewardship principles) ont été le fondement de l'approche états-unienne de la RSE. La philanthropie participe ainsi à réduire les inégalités, à rétablir les injustices et à réparer les torts survenus du fait de l'activité de l'entreprise. La RSE s'est par la suite propagée en Europe et a connu d'autres développements et d'autres justifications voire une remise en cause de la philanthropie comme faisant partie de la RSE.

Le nouveau développement des fondements de la RSE en Europe est en partie lié aux nombreux scandales économiques et financiers, humains, sociaux et environnementaux survenus dans diverses parties du monde et impliquant directement ou indirectement des entreprises, les multinationales en particulier et à la forte pression de la société civile. La problématique de la gestion des impacts ou externalités négatives des entreprises s'est ainsi retrouvée au centre des débats et le nouveau domaine d'investissement de divers acteurs OSC, pouvoirs publics, des investisseurs institutionnels et privés voire des entreprises elles-mêmes. Les scandales associés à l'image des entreprises, la multiplication des mouvements sociaux et du consumérisme ont contribué à l'institutionnalisation de la RSE et à son inscription dans l'agenda interne, national, régional et international de divers acteurs économiques notamment des entreprises.

Dans le débat sur la RSE au sein de l'Union européenne par exemple, les acteurs expriment des positions diverses qui vont de la demande d'une réglementation contraignante dans certains domaines de la RSE à une politique du laisser-aller laisser-faire ou le volontarisme pur. Pour certains acteurs de la société civile occidentale, il faut mettre en place un cadre institutionnel contraignant pour garantir que les entreprises assument effectivement leur responsabilité vis-à-vis de la société. Cependant pour la plupart des acteurs du milieu des affaires, la responsabilité RSE ne saurait éluder la responsabilité première de l'Etat. Les théories néo-classiques et la théorie de l'agence en particulier nous enseignent que le dirigeant d'entreprise, qui n'a reçu de mandat que des actionnaires propriétaires de l'entreprise, ne peut ou ne doit assumer de responsabilité qu'à leur égard. Si l'entreprise devait être amenée à assumer une responsabilité, celle-ci ne peut être que secondaire et volontaire.

La RSE en tant que concept s'est par la suite étendue à d'autres continents, notamment en Afrique, avec des réalités, des problématiques et des enjeux somme toute spécifiques. Les fondements justificatifs de la RSE en Afrique sont sans doute aussi différents. Et de ce fait, l'appropriation du concept, oblige les acteurs africains à l'adapter aux problématiques spécifiques, aux enjeux locaux. Cette appropriation passe aussi par la construction de théories justificatrices ou des fondements de « la RSE à l'Africaine ».

Au vu de ce qui précède, la conceptualisation d'une vision africaine de la RSE se trouverait confrontée au moins à une double problématique/tension : les fondements ou les justifications moralistes, éthiques et institutionnalistes d'une part et d'autre part les approches volontaire et contraignante de la RSE. Peut-on saisir une vision unique et uniforme de la RSE en Afrique? Cette vision s'accommode-t-elle avec les grands courants précités ou se rapproche-t-elle de

certains courants particuliers? Les réalités et les initiatives indiquent-elles le chemin d'une autre alternative théorique ou d'un nouveau fondement justificatif ?

III Les fondements d'une vision africaine de la RSE

Les pratiques des entreprises sont fortement ancrées dans l'environnement économique, social, juridique et politique, culturel voire idéologique dans lequel elles se trouvent. Elles peuvent soit influencer leur environnement, soit être influencées par lui. La vérité est que le plus souvent, c'est une double influence qui s'opère. L'environnement africain n'est pas celui des pays occidentaux et vice versa. Les approches de la RSE et les fondements des pratiques peuvent ainsi différer. La convention de l'Institut africain pour la citoyenneté des entreprises (AICC) de 2004 s'est conclue à Johannesburg par le constat qu'il y a une inadéquation entre les visions, les fondements et les justifications africaines de la RSE d'une part et celles occidentales d'autre part. Cette divergence de vues ou d'approches tiendrait au fait que les réalités sociales, sociologiques et économiques sont très différentes d'une région à l'autre.

a) L'interculturalité du développement durable et de la RSE

L'émergence de la RSE a été suivie de débats à tous les niveaux quant à l'opportunité et à la pertinence des démarches volontaires d'une part et d'autre part celle d'une approche contraignante. Des démarches volontaires n'auront d'échos et de succès auprès des entreprises que dans la mesure où l'on pourra préalablement prouver que de telles démarches seraient bénéfiques pour l'entreprise (business case), ou à tout le moins, qu'elles ne lui nuiraient pas. S'il est évident que la RSE peut entraîner des coûts supplémentaires ou changer les pratiques de l'entreprise, la corrélation positive entre RSE et performances économiques reste à prouver En dehors de tout cadre contraignant, tout au moins incitatif, il va s'en dire que peu d'entreprises s'engageraient dans des démarches RSE. C'est une des raisons pour lesquelles certains acteurs postulent pour un cadre contraignant au niveau international. Des normes ont été élaborées ou sont en cours d'élaboration par des organismes publics et privés. Le processus ISO 26000 qui aboutira à des lignes directrices à destination de tout type d'organisations s'inscrit dans cette dynamique. D'autres référentiels et outils d'auto diagnostic et d'audit ont aussi vu le jour. Ces normes ont été le plus souvent élaborés dans les pays occidentaux au sein d'instances où les acteurs africains sont absents. L'enjeu et le débat en Afrique ne devraient donc pas se porter uniquement sur la nature contraignante ou volontaire de la RSE. Ils devraient également se porter sur la question la question de

l'adaptabilité et de l'applicabilité de ces normes au contexte africain. Il se pose donc le dilemme de l'aspiration à l'universalité théorique des normes et des principes qui les inspirent face à la relativité et à la spécificité des contextes et des réalités. Un premier pas dans la réponse au dilemme passe à notre sens par la prise en compte d'une dimension culturelle du développement durable et donc de la RSE.

La question d'un quatrième pilier du développement durable a été à maintes reprises évoquée. Jean Philippe BARDE89 dans une communication sur les enjeux économiques du développement durable évoquait aussi l'impératif éthique comme quatrième dimension du développement durable. Mais l'éthique peut-elle se départir de la culture ? L'éthique et la morale qui posent des questions de valeurs sont fondamentalement culturelles. C'est pourquoi Esoh ELAME évoque plutôt « l'interculturalité» qu'il élève comme quatrième pilier du développement durable.

Le développement durable comprend en effet un aspect culturel qu'on ne saurait ignorer. Esoh Elame reprochait en effet à l'émergence du concept même de développement durable de ne pas mettre assez l'accent sur la diversité culturelle et la nécessité de prendre en compte l'interculturel à tous les niveaux des politiques de développement arguant de la diversité même des représentations des problématiques que pose le développement durable. Pour lui, en effet, « l'absence des dimension culturelle et interculturelle dans l'analyse des questions de développement durable a une incidence dans la lecture des problème de l'humanité » 90.

Il définit l'interculturalité comme le « rapport aux autres cultures par une articulation langagière, de savoir-faire, de croyances, de représentations et par une expérimentation continue des pratiques de co-responsabilité, de co-décision et de co-gestion ». Une telle approche aurait l'avantage de favoriser les échanges des pratiques entre les différentes communautés culturelles autour des problématiques de développement contrairement à l'approche multiculturelle qui, selon lui, ne favoriserait pas les échanges91.

89 Jean-Philippe travaille à la Direction de l'environnement de l'OCDE et intervient dans plusieurs universités, écoles et instituts européens

90 Esoh (E).,2004 b - « Interculturaliser le développement durable» Actes du colloque de la Francophonie Volume 1- Burkina Faso. Journées d'études organisées par l'Agence internationale de la Francophonie

91 Selon lui l'approche interculturelle tient compte de la diversité culturelle dans une approche à la fois ethnoculturelle , écologique, sociale, économique et favorise les échanges de bonnes pratiques entre les communautés culturelles.

Solidarité
sociale

Efficacité économique

Pilier sociétal

Pilier culturel

Pilier environneme ntal

Pilier économique

Responsabilité
écologique

Responsabilité
interculturelle

Les quatre piliers du développement durable selon Esoh Elamé

Cette problématique de l'interculturalité se pose à notre sens à divers niveaux. D'une part au niveau global dans le débat international et l'agenda de la RSE et du développement durable et d'autre part dans le chef même des entreprises multinationales opérant en Afrique.

Au niveau international, l'intégration de la dimension culturelle du développement durable doit permettre la prise en compte du rôle essentiel de toutes les régions du monde, y compris l'Afrique, dans le débat international et dans la conceptualisation de la RSE ainsi que dans les initiatives de normalisation qui ont court ou à venir. La meilleure manière pour que les normes transpirent l'universalité n'est-elle pas d'associer divers acteurs et diverses sensibilités à leur élaboration ? Cependant il conviendrait de ne pas tomber dans la considération des particularismes qui conduit le plus souvent à des normes au rabais.

Les filiales des multinationales présentes en Afrique doivent respecter la politique ou la stratégie de groupe en matière notamment de RSE. Les pratiques de l'entreprise s'inscrivent dans une certaine culture d'entreprise que l'entreprise tête de groupe entend bien appliquer aux filiales. La perspective de RSE commande par ailleurs que l'entreprise tête de groupe ou la maison mère soit attentive aux comportements de la supply chain. Mais cette culture d'entreprise ou la démarche RSE peut être confrontée aux représentations locales, aux spécificités culturelles. Elle aura par conséquent besoin d'intégrer une dimension fondamentale culturelle dans l'approche des enjeux et des problématiques locales et de développer une interculturalité pour allier la spécificité du milieu, du contexte à la culture et la stratégie globale de groupe. Les meilleures stratégie RSE ne sont-elles pas celles qui, dans

leur opérationnalisation, s'appuient sur la culture locale et répondent effectivement aux problématiques locales en phase avec le développement durable ?

Si nous partageons bien avec E. Elamé la nécessité d'une dimension culturelle dans le développement durable et la RSE, nous demeurons moins convaincu par l'idée que cette dimension s'érige en un pilier du développement durable et plus encore à l'idée d'une responsabilité interculturelle. La dimension culturelle et l'interculturalité au même titre que l'éthique doivent être appréhendées comme des principes fondamentaux du développement durable et de manière très transversale. Isoler l'aspect culturel ou interculturel comme pilier reviendrait à nier la nécessité de prendre en compte l'aspect culturel dans chacune des trois piliers : il y a du culturel dans l'économique, dans le social ou le sociétal et dans l'écologique. Notre conviction est donc que chacun de ces piliers possède une dimension culturelle et que l'effort d'une démarche interculturelle doit favoriser l'intégration des trois piliers dans une perspective de développement durable.

b) L'épreuve des théories de la dépendance à l'égard des ressources et de la

légitimité : les actions caritatives et la tradition de solidarité

Comme nous l'avons déjà évoqué plus haut, l'entreprise africaine n'a pas pour seul objectif de maximiser les profits au bénéfice de ses propriétaires. Au-delà de l'objectif de rentabilité, l'entreprise et l'entrepreneur assument une certaine responsabilité vis-à-vis des proches, amis et parents voire de la société.

Le lien social et relationnel précède l'entreprise et l'entreprise est un moyen plutôt qu'une fin. Même lorsqu'il relève d'une initiative individuelle, la création et la prospérité d'une entreprise reposent sur un lien social fort qu'il ne saurait ignorer au fil de sa croissance, de son développement et de ses transformations. Pascal LABAZEE croyait si bien dire lorsqu'il affirme qu' « il faut chercher l'origine de la réussite (d'une entreprise) non dans la transmission d'un capital monétaire, mais dans un stock de connaissances et de relations indispensables à la réalisation d'affaires favorisant une accumulation de départ ». Il ressort donc que le capital relationnel est un palliatif à l'épargne personnelle souvent insuffisante. L'objectif de profitabilité ne devrait pas mettre à mal ce lien social, relationnel qui est à l'origine même de l'affaire. Bien au contraire l'entreprise ou l'entrepreneur doit allier efficacité économique et contraintes sociales. Pascal LABAZEE renchérit que « l'entreprise européenne n'est précisément pas soumise aux conflits potentiels entre l'optimum d'efficacité

financière et les contraintes d'ordre social 92». Dans le cadre d'une démarche RSE en Afrique, la considération de ce lien social, de ce capital relationnel élargi à toute la communauté est fondamentale. Car ce lien constitue la ressource essentielle que l'entreprise doit préserver. On voit ainsi se dessiner la théorie de la dépendance à l'égard des ressources et celle de la légitimité : le lien social est ici la ressource et la préservation de cette ressource confère la légitimité.

La tradition de solidarité, de charité, de bienveillance vis-à-vis du bien et du bien-être d'autrui constitue le fondement de la culture et les actions caritatives, qui sont à la fois des prescriptions voire des préceptes religieux et culturels, restent fondamentalement ancrées dans les moeurs individuels et collectifs. Dans une société où l'altérité est si présente et résiste tant bien que mal aux exigences d'une mondialisation quelque peu oppressante, la RSE ne devrait apparaître comme une contrainte supplémentaire mais plutôt comme une opportunité de mettre les exigences de la mondialisation en phase avec les réalités sociales, sociologiques, économiques et culturelles. Georges Frynas souligne que beaucoup d'activités philanthropiques dans les pays en développement peuvent être guidées par les notions traditionnelles de la responsabilité du milieu des affaires dans le cas de la défailllance de l'action gouernementale93.

c) Enraciner la théorie des biens publics mondiaux dans la culture de protection, de bienveillance et du bien commun

La théorie des biens publics mondiaux implique que l'entreprise adapte son activité aux nécessités de préservation des biens que le monde a en partage et dont dépend la survie de tous. Cette théorie suggère ainsi l'idée de protection des ressources communes. En Afrique cette idée de préservation des ressources communes (au-delà du lien social) est fortement ancrée dans les traditions et impose à tout membre de la communauté, et partant, à toute organisation humaine la protection de ces ressources dont la communauté dépend. Ces ressources peuvent être multiformes. Dans le domaine environnemental par exemple, la culture de sacralisation de certaines espèces végétales ou animales peut être considérée comme répondant de cette idée de protection des biens communs. Esoh Elamé évoque ainsi la sacralité des forêts négro-africaines qui appartiennent d'abord aux ancêtres et sont le

92 LABAZEE P. Op. Cit. p. 138

93 George Frynas, Corporate Social Responsibility in Emerging Economies, JCC 24 Winter 2006

« domicile de divinités »94. Au Burkina Faso, la pratique des totems conduit à l'interdiction de l'abattage de certaines espèces animales considérés comme ayant des liens directs de vie et de survie avec l'Homme (caïmans, boa, etc.). Serait-il par exemple concevable qu'une entreprise qui exploite et vend des peaux de caïman s'établisse dans une zone où les caïmans sont considérés comme sacrés ? Il y a donc une approche culturelle de la protection et de la conservation de la nature et de la biodiversité qui peut être développée95. Cette protection permet à la fois de se conserver (protection de soi), de maintenir le lien social et de protéger les autres. On perçoit assez aisément la permanence, l'omniprésence des considérations d'ordre moral, éthique et religieux dans les différentes approches qui peuvent être développées en lien avec les réalités et la culture africaine. Une approche africaine de la RSE peut donc partager en partie l'approche éthique et religieuse comme c'est le cas dans les pays anglosaxons.

d) L'approche par la mondialisation : RSE régulateur de la mondialisation « Si la mondialisation est un fleuve, construisons des barrages pour produire de l'énergie »96 Cette assertion attribuée par la Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation à un participant polonais au dialogue traduit bien l'enjeu que l'émergence de la RSE pose face à la mondialisation : la transformation du phénomène de mondialisation en une force positive de développement. Certains acteurs du débat international posent très souvent la RSE comme le moyen de régulation de la mondialisation. L'Afrique étant le continent qui a le plus souffert de la mondialisation, il sied par conséquent de se pencher sur cette approche régulatrice de la mondialisation.

La mondialisation et les programmes d'ajustements structurels qui en ont résulté ont contribué à affaiblir la capacité des Etats africains à satisfaire les besoins fondamentaux des populations locales. Cet affaiblissement du rôle de l'Etat n'a malheureusement pas été compensé par le milieu des affaires qui a bénéficié de ce retrait/repli de l'Etat. La RSE offre donc l'opportunité de réfléchir à la manière même de poser et de définir les problématiques de développement et la contribution des entreprises à la satisfaction des besoins fondamentaux. Il s'agit tout simplement d'appréhender la RSE comme la contribution des acteurs privés au développement social, à l'amélioration de la qualité de la vie et l'inscription d'une telle préoccupation au centre de tous les processus de développement. Et, comme le souligne

94 Esoh Elamé, Interculturaliser le développement durable, op. cit.

95 Esoh Elamé à ce sujet évoque bien à propos une dimension culturelle des déchets solides urbains

96 Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation, op. cit.

l'AICC, il faut permettre aux entreprises de jouer un rôle dans le renversement des tendances d'affaiblissement de la croissance économique en Afrique : « En conduisant cependant des affaires de façon responsable, les compagnies peuvent certainement améliorer leur propre compétitivité, la condition sociale de leur pays et voire du continent. »

e) Une vision influencée par l'acteur international et dictée par le contexte mondial : l'institutionnalisation de la RSE

La particularité du débat et des initiatives en matière de RSE en Afrique réside dans le rôle important de l'acteur international dans l'institutionnalisation de la RSE en Afrique. Il faut entendre par acteur international l'ensemble constitué par les organisations internationales non africaines, les institutions financières internationales ainsi que les autres organismes internationaux comme l'ISO, l'organisation Internationale des Employeurs, les confédérations de syndicats et les organisations non gouvernementales internationales. Dans les différentes initiatives décrites dans la seconde partie de notre étude, on remarque qu'il y a très peu d'initiatives endogènes de RSE explicite. La présence de l'acteur international est quasi permanente dans toutes les initiatives et contribue « volens nolens », à la construction d'une certaine vision et approche de la RSE.

Dans la déclaration de Bamako, les employeurs francophones disent clairement partager la vision de la RSE développée par l'Organisation International des Employeurs. Les cadres d'Uni Africa ne manquent d'affirmer la nécessité pour les syndicalistes de se saisir de la RSE conformément à la vision qui leur a été transmise par la CFDT-Cadres lors de la rencontre de Yaoundé. Le même son de cloche avait été entendu lors de la conférence maghrébine des travailleurs qui se donne une mission de vigilance face à l'éventualité d'une exploitation utilitariste et à des interprétations restrictives de la RSE par les entreprises. Du côté des organisations non gouvernementales, le discours altermondialiste, l'exigence d'une régulation contraignante et la dénonciation de l'approche purement volontaire de la RSE sont aussi présents au sein des organisations non gouvernementales africaines de différentes obédiences. Mais la vraie influence vient aussi des partenaires économiques et bailleurs de fonds du continent ainsi que des multinationales. A cet effet, l'agenda africain de la RSE sera aussi celui qui est suggéré par ces derniers. Plus la RSE sera mise en avant dans les relations bilatérales et multilatérales des partenaires de l'Afrique, plus il sera inéluctable qu'elle s'inscrive dans l'agenda africain. Il ne faut donc pas s'étonner que certaines approches de la RSE trouvent leurs échos en Afrique avec ou sans considération des spécificités culturelles africaines.

C'est ainsi que l'on peut remarquer une tendance fondamentale, dans les pays anglophones, à une mise en avant de l'aspect éthique et des approches contractualistes notamment la théorie des parties prenantes. Dans les pays francophones par contre, la tendance est plus à une approche institutionnaliste de la conformité aux exigences internationales et de la légitimité. Cette approche institutionnaliste se justifie d'autant plus que, comme nous avons eu à le relever à maintes reprises, l'enjeu africain est plus dans l'efficacité et l'effectivité du cadre existant plutôt même que la création de nouveaux cadres institutionnel, réglementaire ou normatif. La preuve en est que la plupart des Etats africains en matière de signature et de ratification des conventions internationales font preuve d'un certain enthousiasme, mais échouent dans la mise en application des obligations contractées. La question est donc comment l'entreprise peut intégrer cette dimension de la conformité à des exigences pour suppléer à la défaillance de l'Etat.

Il ne faut cependant pas se leurrer. La répartition des approches n'est pas aussi étanche ni fondamentalement liée au rapport colonial, aux traditions juridiques et au rapport linguistique. Nous constatons par ailleurs une tendance du milieu des affaires et dans une certaine mesure du milieu académique à se focaliser sur le caractère volontaire de la RSE. Le fait que ce soit des facultés de gestion qui, à travers l'enseignement du management, s'intéressent le plus à la RSE en Afrique y est certainement pour beaucoup. La presse sénégalaise rapporte à l'occasion du lancement de l' Observatoire des pratiques éthiques des affaires en Afrique de l'ouest que pour Moustapha Mamba Guirassy, président directeur général de l'Institut africain de management (IAM) et un des initiateurs de l'Observatoire des pratiques éthiques des affaires en Afrique de l'ouest, le souhait est que « le législateur se saisisse le moins possible du sujet de l'éthique des affaires et laisse aux organisations existantes le soin de définir les règles adaptées à leur environnement économique et culturel en s'appuyant sur l'obligation de transparence ».

B Les enjeux que la RSE pose pour l'Afrique

Le tableau ci-dessous expose à lui seul les différents enjeux que la RSE pose pour l'Afrique et que nous développerons en 3 temps. D'une part, la RSE pose la question du développement harmonieux et durable de l'Afrique par une participation responsable du secteur privé. D'autre part elle commande que l'Afrique puisse tirer le meilleur parti des échanges internationaux par le respect de certaines exigences nationales et internationales implicites et explicites afin d'accéder aux marchés extérieurs et de nouer des partenariat économiques

durables. Enfin, vue comme régulateur de la mondialisation, la RSE implique de relever les défis de la mondialisation en lui donnant un visage plus humain.

L'industrie de la fleur coupée du Kenya : une étude de cas en matière de RSE

[...] Le secteur à croissance la plus rapide de l'économie du Kenya, qui se classe au troisième rang en matière de recettes en devises étrangères, est l'horticulture [...]. Les visites ont amplement démontré les résultats favorables sur le plan social et environnemental, éminemment rentables de surcroît, des pressions exercées sur l'industrie en matière de RSE. [...] À la suite des revendications des travailleurs et des pressions exercées par les acheteurs européens, les producteurs indépendants ont créé le Kenya Flower Council en 1997. Homegrown est membre fondateur de ce Conseil et s'est engagée non seulement à adopter le code de pratique du Conseil mais aussi, lorsque sa société mère est devenue membre de l'Ethical Trading Initiative (ETI) [...] à adhérer aux neuf clauses du code de base de l'ETI. [...]. Les pratiques des entreprises de culture de fleurs ont également fait l'objet d'inspections du comité parlementaire permanent de l'agriculture, des terres et des ressources naturelles du Kenya. Bien qu'elle ne soit pas membre du Kenya Flower Council, Sher Agencies Limited fait preuve d'un engagement vigoureux en matière de RSE. L'entreprise offre à ses 5 000 travailleurs un logement gratuit avec eau et électricité, une garderie, une école primaire équipée d'ordinateurs et un hôpital de 55 lits, que plusieurs des parlementaires ont visité. Pourquoi le plus gros producteur de roses du monde investirait-il des sommes aussi considérables dans le bien-être de ses travailleurs? Notamment parce que Sher est également obligée de respecter les strictes normes européennes. En outre, selon le propriétaire de l'exploitation, moins les travailleurs ont de soucis, plus ils sont productifs et plus la productivité est élevée, plus ses profits augmentent. En bref, ce que les principaux représentants de l'industrie de la fleur coupée du Kenya ont appris, d'abord sous l'influence de pressions puis peut-être à leur étonnement, c'est qu'ils prospèrent en se souciant du bien de leurs travailleurs.

Source : Rapport du deuxième dialogue interparlementaire annuel Afrique-Canada sur les politiques

I- S'engager dans un processus de développement harmonieux et durable

Le développement est un processus multidimensionnelle, une conquête permanente. Il ne se résume pas uniquement à son aspect économique mais implique aussi un volet social et culturel (épanouissement) et la protection du patrimoine écologique. Mais certains processus

de développement économique se sont réalisés au détriment des deux aspects social et écologique. Cette initiation à l'école du développement qui a été souvent un apprentissage douloureux et les expériences capitalisées par les pays développés devraient permettre à l'Afrique de se développer sans passer par toutes les étapes que le monde occidental a suivies et qui à tort ou à raison est à l'origine des grandes problématiques environnementales de notre ère. Le développement économique africain a donc cette possibilité de tirer leçon du processus de développement occidental et d'adopter les innovations intervenues ou introduites par les autres, de faire par exemple usage des modes de productions et de consommation propres. Mais cela suppose une prédisposition des autres partie du monde à transférer ces connaissances et ces technologies.

L'Afrique est par exemple actuellement le continent qui pollue le moins. Mais cela est dû au faible développement industriel. L'amélioration de l'efficacité des processus de production et l'utilisation de technologies nouvelles et innovantes devraient lui permettre de polluer beaucoup moins encore. Mais il ne fait aucun doute que l'industrialisation de l'Afrique que le NEPAD appelle de tous ses voeux ne manquera pas de poser des problématiques nouvelles dont l'anticipation serait plus bénéfique aux plans économique, social voire écologique. La RSE devrait favoriser ainsi l'implication d'une large diversité de parties prenantes et favoriser l'adoption et la mise en oeuvre de politiques et de démarches qui favoriseraient un développement à la fois harmonieux et durable

II- Tirer le meilleur parti des échanges internationaux

L'Afrique est investie à la fois par des entreprises nationales, qui sont à la recherche d'une insertion dans le marché international, et de filiales d'entreprises multinationales soucieuses de la préservation de l'image de groupe. La RSE s'inscrit de plus en plus dans une dynamique de normalisation. La normalisation, dans certains domaines ou certains secteurs (agricole et produits alimentaires) avaient contribué et contribue encore à fermer la porte des marchés européens aux entreprises africaines. Par ailleurs le risque d'être impliqué dans des situations compromettantes et les contextes socio-politiques et économiques ont suscité les réticences de certaines entreprises à investir en Afrique. L'émergence de la RSE pose ainsi un enjeu double. En favorisant/contribuant à l'assainissement du milieu des affaires africains, la RSE loin de dissuader les investisseurs, pose un environnement favorable à l'IDE. Les exigences rencontrées sur le marché africains sont loin d'être supérieures à celles constatées sur les marchés des pays développés. Ce ne serait que tout bénéfice/au profit des entreprises

étrangères que de retrouver en Afrique un environnement normatif et juridique comparable à celui de leurs pays d'origine. Par l'adoption de démarches RSE, les entreprises nationales se donnent les moyens de prendre part au marché international qui se complexifie davantage avec l'émergence de la RSE. En effet, le véritable défi actuel est moins de faire face à des réglementations et normes érigées par des Etats pour protéger des entreprises ou des secteurs au niveau national, que répondre à des exigences et normes posées individuellement ou collectivement par des entreprises occidentales désormais très peu enclines à traiter avec des partenaires qui constitueraient un risque potentiel pour leur image. Tout l'enjeu pour les Etats et pour les entreprises africaines est donc de tirer le meilleur parti des échanges internationaux en créant le cadre à la manifestation/l'institutionnalisation de la RSE et en s'inscrivant dans une démarche de responsabilisation. La pression ici est à la fois externe et sournoise.

III- Relever les défis de la mondialisation

Comme nous l'avons déjà vu plus haut, la RSE peut être approchée comme un outil de régulation de la mondialisation. Le premier défi qui se pose à tous les Etats c'est de donner à cette mondialisation un visage humain/de l'humaniser. La RSE apparaît ainsi comme la réponse à ce défi. Le développement de la RSE impliquerait la vulgarisation et la généralisation de bonnes pratiques. En Europe divers organismes se sont invités sur le marché de la compilation des « bonnes pratiques » dites encore « pratiques socialement responsables ». Au moment où s'enchaînent les critiques de la mondialisation en tant que processus implacable d'homogénéisation, on peut aussi se poser des questions sur l'opportunité du développement et de la transposition de ces pratiques dans des univers souvent très différents sans considérations des réalités locales, de la spécificité des entreprises et des cultures locales. Sans remettre en cause la nécessité de diffuser les bonnes pratiques, il nous paraît essentiel que de faire figurer au nombre des défis de la mondialisation la nécessité d'adaptation de ces pratiques et des normes de façon générale : c'est postuler pour le droit à la différence dans un processus d'homogénéisation.

Relever les défis de la mondialisation, c'est aussi poser le cadre qui permette aux entreprises et à d'autres acteurs ou parties prenantes de l'entreprise de s'engager dans une démarche de responsabilité sociétale. Cela aurait pour effet d'éviter que le marché africain ne soit considéré comme potentiellement dangereux ou risqué parce que pouvant entacher l'image de l'entreprise qui y investirait. C'est tout simplement ouvrir la voie à la conclusion de relations économiques durables entre entreprises africaines et occidentales ?

IV- Instaurer le dialogue et une contribution de tous les acteurs au

développement durable

Un des enjeux de la RSE est de favoriser la contribution du secteur privé au développement durable, autrement dit, c'est d'introduire l'acteur privé dans un domaine qui a longtemps relevé de la sphère publique. L'entrepreneur africain, notamment dans le secteur informel, est parfaitement intégré dans son milieu et contribue de fait au bien-être de sa communauté. Cependant, il ne conçoit pas son rôle ni son action en termes de contribution à la réalisation d'un objectif global, ni en termes de participation à la mise en oeuvre d'une quelconque politique de type public ou privé. Les entreprises du secteur ne se sentent pas non plus responsables d'une quelconque manière du succès de la mise en oeuvre d'objectifs publics globaux. Mais la participation à la mise en oeuvre des objectifs publics s'est amorcé à travers les CSLP et la RSE devrait contribuer à nourrir le dialogue et la convergence des efforts des pouvoirs publics et des entreprises dans ce sens. La société civile a longtemps gardé des rapports assez distants avec le milieu des affaires et n'a eu d'interaction qu'avec les pouvoirs publics. Cela ne découle pas forcément d'une quelconque suspicion ou méfiance, mais est plutôt dû au fait que les deux types d'acteurs ont des domaines d'intervention qui officiellement se recoupent peu. La société civile, qui a été jusqu'à un certain moment peu avertie sur les questions microéconomiques, était peu encline à discuter des problématiques économiques à l'échelon de l'entreprise. Tout l'enjeu donc de la RSE est d'amener, de convier ces différents acteurs à discuter des meilleures voies, stratégies et politiques à mettre en oeuvre pour répondre aux problématiques locales, nationales et globales de développement.

C- Les facteurs du développement de la RSE en Afrique : forces, faiblesses, opportunités et contraintes

Le débat et les initiatives en matière de RSE sont en train de s'enraciner progressivement dans le paysage africain. On peut puiser dans les traditions africaines les fondements justificatifs d'une RSE implicite. Mais il y a lieu de se pencher sur les facteurs favorables et défavorables à l'institutionnalisation de la RSE en tant que concept explicite. A cet effet, nous avons recueilli les avis des participants africains et français sur ce qui peut constituer une force, une faiblesse, une opportunité ou une contrainte à au développement/ l'enracinement de la RSE en Afrique. Cette partie reflète une opinion fondamentalement personnelle éclairée par les avis des différents participants à la consultation.

I Forces

a) Le cadre institutionnel et juridique

Malgré l'imperfection inhérente à tout système juridique, on peut noter que les pays africains disposent d'un cadre juridique propice à l'émergence et à l'institutionnalisation de la RSE. L'enjeu réside maintenant dans l'effectivité de sa mise en oeuvre et dans l'amélioration progressive du cadre pour répondre aux problématiques et enjeux nouveaux. Des mécanismes comme le mécanisme africain d'évaluation par les pairs (MAEP) offrent un terreau favorable à la RSE et à des processus de dialogue multi-acteur97. La création par ailleurs de structures interfaces entre le secteur privé, les organisations de la société civile et l'Etat contribue à faire du cadre institutionnel force pour l'institutionnalisation de la RSE. Le Projet de renforcement de l'interface Etat - secteur privé - société civile (PARECAP) au Burkina Faso constitue à ce titre un exemple intéressant et une structure d'appui à l'émergence et à l'institutionnalisation de la RSE.

b) Une culture favorable de la cohésion sociale et de solidarité

Le lien social, l'appartenance communautaire et la solidarité sont les fondements d'une cohésion sociale et sont profondément ancrés dans la culture et les traditions africaines. Ils constituent à la fois des valeurs et les éléments moteurs de l'émergence et de l'enracinement de la RSE. Il faut y rechercher des éléments de RSE implicite pour guider la mise en oeuvre des stratégie de RSE explicite .

c) La proximité avec les communautés locales

Elle constitue une composante du lien social et de la solidarité. L'entreprise, l'entrepreneur et la société ne sont pas des mondes différents qui s'ignorent. Bien au contraire ! L'entrepreneur est parfaitement intégré dans son milieu social qui donne du sens à son activité. Il se crée alors une proximité voire une intégration/un ancrage de l'entreprise, de ses valeurs dans ceux de la communauté. Cette proximité de l'entrepreneur avec sa communauté lui permet de connaître les vraies problématiques auxquelles la société est confrontée et éventuellement de s'impliquer dans la résolution.

97 Le MAEP est un mécanisme mis en place par le NEPAD. Il implique des processus nationaux d'autoévaluation de la gouvernance aux plans politique, économique et financière entre autres des entreprises.

d) Les engagements internationaux des pays africains

Si elles peuvent être vécues/appréhendées comme une contrainte pour certaines entreprises ou certains acteurs, les engagements internationaux peuvent constituer à notre avis une force en créant un cadre favorable, équitable et fertile aux pratiques RSE. Ces engagements sont le fondement de l'action des organisations de la société civile. Ils leur donnent les outils de référence et les moyens de mettre les entreprises face à des obligations objectives dont elles ne peuvent se soustraire même si elles ne sont ni les signataires, ni les destinataires primaires de tels engagements. Ces engagements mettent les entreprises sur un même pied d'égalité aussi bien au plan interne qu'international, chacune étant soumise à la même obligation de respecter l'esprit et la lettre des conventions ratifiées ou non par leurs Etats.

II Faiblesses

a) La limitation de la capacité des Etats

Elle est la résultante des opérations d'ajustements structurelles qui ont dépouillé les Etats de leurs capacités d'interventions économique et sociale. Un repli de l'Etat qui n'a toutefois pas été compensé par le renforcement consécutif du secteur privé. Il ne faut pas forcément un Etat gendarme pour favoriser l'ancrage de la RSE, mais il faut que l'Etat puisse, s'il le souhaite, disposer des moyens et outils nécessaires pour inciter les entreprises ou contrôler l'effectivités des démarches engagées.

b) La nature du marché

Dans les pays occidentaux, la question de l'engagement des PME dans des démarches RSE au même titre que les grandes entreprises se pose. En Afrique c'est plutôt la question de l'insertion des micro-entreprises, des très petites entreprises du secteur informel et de leur capacité à s'inscrire dans des démarches RSE qui doit être posée. La formulation d'exigences normatives ne conduirait-elle pas à mettre ces structures en dehors du champs de la RSE ?

c) Faiblesse du secteur privé et insuffisance des capitaux et des IDE
La faiblesse du secteur privé et notamment des investissements directs étrangers constitue un
obstacle. Il apparaît que les pays où les entreprises étrangères sont très présentes et où le
secteur privé est très structuré sont des terreaux favorables à l'éclosion d'initiatives RSE parce
que les entreprises mères ou têtes de groupes disposent de stratégie ou politique RSE à la mise
en oeuvre de laquelle participent leurs filiales. Les difficultés d'accès aux crédits pour les

entreprises et le manque de moyens financiers pose le problème de leur capacité à investir le peu de ressources dont ils disposent dans le développement social.

d) La capacité des parties prenantes de l'entreprise

L'engagement des entreprises a souvent été le résultat d'une forte pression de la part de ses parties prenantes. Les stratégies RSE s'inscrivent ainsi dans une perspective de réponse ou d'anticipation de telle pression, voire de manipulation. En Afrique, on constate cependant une faiblesse relative des parties prenantes qui sont susceptibles d'influencer les pratiques de l'entreprise. Dans l'absence de pression interne et externe, on peut être porté à croire que rien ne peut contraindre une entreprise à s'engager dans une démarche RSE.

e) La faible insertion dans l'économie internationale

Le bénéfice d'une insertion dans les échanges internationaux aurait aussi pour contrepartie, une plus grande vigilance sur les pratiques des entreprises. L'exemple de la Chine est très manifeste. Si les pratiques des entreprises chinoises ou étrangères opérant en Chine sont sous les projecteurs de nos jours, c'est bien parce que la Chine occupe aujourd'hui une place importante dans le commerce international. La marginalisation de l'Afrique et son incapacité à accéder aux marchés occidentaux sont de ce fait un handicap au développement de la RSE.

f) Fragilité et instabilité du contexte politique et économique

Le contexte des pays africains décrit précédemment montre une large dépendance vis-à-vis des produits primaires et une vulnérabilité du système économique aux aléas climatiques. Le contexte politique souvent instable est loin d'être propice à l'éclosion durable de démarche de RSE explicite et à un dialogue entre les entreprises avec leurs différentes parties prenantes notamment avec les pouvoirs publics.

g) Caractère rudimentaire des opérations de production

La nature des processus de production et de commercialisation des biens et services, la faiblesse de la maîtrise technologique laisse croire que le développement de la RSE, qui suppose l'abandon des pratiques de productions non durables et l'engagement sur la voie de l'innovation, peut relever plutôt de l'illusion si rien n'est fait pour favoriser le développement des technologies et de modes de production et de consommation propres dans des pays africains qui en ont certainement besoin.

III Opportunités

a) L'agenda international de la RSE

L'inscription de la RSE dans l'agenda des négociations internationales (normalisation) constitue une opportunité à saisir par les différents acteurs africains pour faire partager leur approche de la RSE et établir éventuellement un agenda propre, national ou régional.

b) Accès aux marchés internationaux

L'espoir d'un accès aux marchés internationaux que suscite la RSE peut être un facteur incitatif à l'engagement dans des démarches RSE pour les entreprises locales. Pour l'Etat, il peut en résulter une opportunité de présenter son marché comme sain et favorable pour les affaires et partant, de favoriser les échanges avec des entreprises très soucieuses des pratiques RSE de leurs partenaires africains.

IV Les contraintes

a) La mondialisation et la concurrence internationale

La mondialisation et le développement de la concurrence internationale constituent des contraintes majeures pour les entreprises et les Etats. Soucieux de ne pas pénaliser leurs entreprises par des contraintes réglementaires et normatives, les Etats pourraient être enclins à abaisser le niveau des exigences sociales et environnementales. Les entreprises quant à elles, soucieuses de préserver une certaine compétitivité pourraient être peu disposées à être proactivité en matière de RSE. La RSE peut ainsi être perçue comme une contrainte supplémentaire dont l'entreprise se passerait bien.

b) Le développement de barrières non tarifaires au commerce

Diverses barrières non tarifaires (normes sanitaires par exemple) empêchent l'insertion des Etats et des entreprises africaines dans les échanges. Il n'est pas exclu que ceux-ci voient dans la RSE une nouvelle forme de barrière non tarifaire. Ainsi, les entreprises qui s'investissent déjà pour répondre aux contraintes et normes posées par les marchés extérieurs pourraient- elles manquer d'énergie et de moyens supplémentaires à consacrer à la RSE.

c) Difficultés d'accès ou de transfert de technologies

Le boom des technologies propres et les droits qui les accompagnent n'autorisent pas des transferts peu onéreux dans les entreprises des pays en développement qui ne peuvent se payer le luxe de les acquérir.

CONCLUSION

La RSE, en tant que concept explicite est à la recherche de ses marques et est en train de conquérir ses lettres de noblesse sur la scène internationale. Le débat s'est institutionnalisé. Divers acteurs y contribuent ; diverses régions du monde aussi. Mais l'Afrique est à la recherche de sa place dans ce débat, dans les initiatives et dans l'agenda international. Cependant, malgré la faible connaissance du concept dans beaucoup de pays africains, on note une attention portée par certaines parties prenantes aux effets des activités des entreprises et des interrogations sur la mondialisation économique qui a accru leur influence, développé les interdépendances et les craintes. Par ailleurs, il y a un intérêt accru pour la participation de l'entreprise au développement national et local. Des concertations entre les pouvoirs publics, le secteur privé et la société civile s'organisent autour des questions de développement, dans le cadre notamment des stratégies nationales de la lutte contre la pauvreté en faveur de la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement. On peut ainsi y trouver les prémisses d'engagement dans des démarches RSE même dans certains pays où le concept ne fait pas beaucoup débat. Dans d'autres pays africains où le débat émerge ou s'institutionnalise, des initiatives sont développées avec une influence notoire de l'acteur international (organisation internationale intergouvernementale ou non gouvernementale, entreprises multinationales, pays occidentaux bailleurs de fonds, etc.). Cette présence de l'acteur international contribue à diffuser une certaine vision et approche de la RSE et probablement à façonner l'approche africaine de la RSE. Cependant, la RSE en Afrique devrait répondre aux problématiques et enjeux spécifiques du continent en tenant compte du contexte économique et des réalités sociales et sociologiques.

Ces spécificités commandent que les cadres théoriques et approches conceptuels développés en appui au débat et aux initiatives en matière de RSE trouvent des fondements, des justifications dans les valeurs et les traditions africaines. Divers facteurs aussi bien internes qu'externes à l'Afrique, à l'entreprise africaine et aux parties prenantes peuvent aider ou non au développement de la RSE et il y a un intérêt certain à donner droit de citer aux approches et visions africaines de la RSE. Mais qu'en est-il des leviers potentiels qui peuvent contribuer à l'institutionnalisation de la RSE en Afrique ? Le véritable enjeu ne sera-t-il pas d'articuler les stratégies RSE des entreprises qui souhaitent assumer leur part de responsabilité dans le développement des communautés africaines avec les stratégies nationales de développement durable ou les politiques publiques en général dans les Etats africains ?

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Le Soleil : http://www.lesoleil.sn

Le Maghreb (quotidien de l'économie): http://www.lemaghrebdz.com

Synthèse de l'étude sur l'état des lieux de la RSE en Afrique

L'émergence de la responsabilité sociétale des entreprises en Afrique : état des lieux, enjeux et perspectives.

La responsabilité sociétale des entreprises est un sujet de débats, d'initiatives et de négociations tant au niveau national, régional qu'international. Ce débat est réel et souvent très houleux dans les pays occidentaux développés. Les problématiques ou les scandales qui alimentent ce débat concernent aussi et surtout les opérations et l'impact des multinationales étrangères dans les pays en développement dits encore moins avancés, en particulier en Afrique. Cependant, on ignore ce qu'il en est de la connaissance de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) par les acteurs africains eux-mêmes ainsi que les véritables problématiques africaines et les enjeux de RSE, leur vision et leur appropriation du concept et partant, la pertinence des développements théoriques et des fondements justificatifs de la RSE pour le contexte africain.

Le contexte spécifique de l'Afrique rend nécessaire l'engagement proactif des acteurs privés dans des démarches de responsabilité sociétale

Cette nécessité résulte à la fois :

- des effets et des exigences de la mondialisation : la mondialisation a eu pour effet la marginalisation des pays pauvres, et du continent africain en particulier, comme l'affirme la Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation. Les pays africains qui ont une économie basée sur un secteur informel très développé, une tradition de production à petite échelle et une économie fondée sur l'exportation de matières premières sont en marge des échanges internationaux et ont des difficultés d'accès des produits transformées sur place aux marchés occidentaux ;

- de l'érosion des capacités des Etats à répondre aux grands enjeux du développement : le désengagement de l'Etat consécutive à la double libéralisation n'a pas été compensé par le secteur privé et les secteurs non productifs ont été délaissés. Les entreprises sont devenues des acteurs dont l'influence et la puissance économique tend à supplanter celles des Etats ;

- de la multiplication des acteurs privés : la gouvernance mondiale n'est plus une affaire seulement d'Etats. Les entreprises, les ONG, les syndicats et d'autres acteurs sont apparus et marquent un intérêt pour les questions économiques, sociales et environnementales liées aux entreprises.

Des problématiques saillantes non exhaustives qui interpellent

La RSE pose comme enjeux l'engagement des pays africains dans un développement durable par l'implication de tous les acteurs, la limitation des effets négatifs de la mondialisation et le bénéfice de la participation aux échanges internationaux. Cela passe par la prise en considération des grandes problématiques spécifiques de RSE qui se posent. On peut citer entre autres :

- l'extrême pauvreté et l'accès aux biens essentiels : l'amélioration des indicateurs macroéconomiques n'a pas eu d'effet sensible sur le niveau de développement humain tel que décrit par les indices du PNUD. Le taux de pauvreté reste supérieur à 38%, la sécheresse et la famine ainsi que les problèmes sanitaires sont encore présents. L'accès aux biens essentiels et de qualité reste un enjeu majeur ;

- les questions de santé : la pandémie du SIDA constitue une préoccupation essentielle et affecte les entreprises en touchant très sensiblement à la force du travail en particulier dans certains pays où le taux de séro-prévalence est assez élevé. D'autres maladies comme le paludisme et les maladies pauvres ou orphelines constituent des problématiques sanitaires spécifiquement africaines pour lesquels un véritable engagement des grands groupes pharmaceutiques est nécessaire;

- la corruption et les problématiques de gouvernance : les entreprises sont à la fois victimes et actrices de la corruption. Les pays africains demeurent encore parmi les moins bien classés sur l'indice de perception de la corruption. Au même moment l'indice de corruption des pays exportateurs indiquent l'implication des entreprises des pays développés dans la corruption mettant ainsi à mal l'effort de lutte consenti dans certains pays comme le dénonce le rapport 2006 de Transparency International ;

- les abus et complicité de violations de droits humains : beaucoup d'ONG comme Amnesty International, Global Witness, n'ont pas manqué de dénoncer, dans des rapports et dans différentes actions de pression, les implications ou la complicité des entreprises dans des violations de droits humains dans les zones de conflit, pétrolifères ou à forte concentration minière en Afrique ;

- les questions d'égalité d'accès à l'emploi et de traitement : les modes de recrutement ainsi que les questions de genre, d'égalité salariale demeurent un réel enjeu ;

- déforestation, gestion des déchets et perte de la biodiversité : malgré la richesse de la biodiversité africaine, le PNUE tire la sonnette d'alarme sur les risquent que les pratiques d'exploitation font courir à l'environnement africain. Malgré la reconnaissance du principe de précaution, certains Etats se sous le lobby de multinationales, se sont engagés dans la culture ou la recherche sur les organismes génétiquement modifiés ; ce qui ne manquera pas par ailleurs de poser la question de la souveraineté alimentaire ou de brévetabilité du vivant.

Aller au-delà des réponses formulées à travers des politiques publiques

Les Etats africains ont formulé des réponses aux enjeux globaux de développement à travers des législations économiques sociales et environnementales plus ou moins respectées et par diverses politiques nationales et régionales. L'interventionnisme étatique sous l'état providence ainsi que la mission de service public dévolue aux entreprises publiques faisaient de la responsabilité sociétale de l'entreprise un prolongement normal de la responsabilité étatique.

Mais les programmes d'ajustement structurel et l'ouverture de certains secteurs, autrefois monopoles publics, à la concurrence privée interne et internationale ont renforcé la place du secteur privé dans le domaine économique sans que celui-ci ne manifeste pour autant de l'engouement pour les volets sociaux et environnementaux. Ainsi le développement de la place de l'entreprise privée dans la société africaine appelle-t-il la prise en compte d'une forme de responsabilité qui serait non étatique. Les Etats s'inscrivent ainsi de plus en plus dans des démarches associant divers acteurs privés au processus d'adoption et de mise en oeuvre des cadres ou documents stratégiques nationaux de lutte contre la pauvreté et les stratégies nationales de développement durable. Au niveau régional, le NEPAD donne toute sa place au secteur privé dans le développement du continent. A travers son mécanisme d'évaluation par les pairs (MAEP), il entend mettre en avant les questions ayant trait à la responsabilité sociétale du secteur privé comme la bonne gouvernance.

B- Connaissances et perceptions de la RSE

Notre étude nous a conduit à interroger divers acteurs répartis comme suit :

Pourcentage

16%

16%

12%

16%

8%

16%

16%

Gouvernement

Entreprise

ONG et Syndicat

Organisme de soutien Université et recherche Presse

Organisme des Nations Unies

Il en ressort que la RSE en tant que concept explicite est peu connue et le débat est encore naissant voire embryonnaire en Afrique. Il est encore interne à certaines organisations et s'externalise de plus en plus grâce à l'implication de différents acteurs. Mais quelques pays pionniers comme l'Afrique du sud et des pays anglophones connaissent un niveau très élevé d'intégration de la RSE dans le débat national, dans les cursus d'enseignement du management sous l'angle de l'éthique

des affaires. Plusieurs initiatives s'y développent autour de la RSE sous l'impulsion de certaines structures comme l'African Institute for Corporate Citizenship (AICC). Partout ailleurs en Afrique, des initiatives sont en train de prendre forme, marquées par un rôle central des acteurs internationaux (entreprises multinationales, syndicats, ONG internationales, organismes patronaux internationaux) qui contribuent de fait à façonner l'approche et la vision africaine de la RSE.

Beaucoup de pays, par le biais des instituts nationaux de normalisation, participent aussi au processus ISO 26000 et ont créé des comités miroirs ou bénéficié de formations initiées par l'ISO ou d'autres organismes comme la Francophonie à travers le Réseau sur la responsabilité sociétale en vue du développement durable (RSDD) ou l'AICC en Afrique australe et dans les pays anglophones. L'initiative EITI à laquelle certains pays africains ont souscrit et sa réplique ONG « Publiez ce que vous payez » ont été des initiatives moteurs qui ont contribué à lancer le débat de façon explicite sur la RSE.

Le milieu africain des affaires ainsi que les organisations patronales sont intéressés de trouver les voies et moyens pour prendre part aux échanges internationaux et voient dans la RSE un enjeu à intégrer pour éviter qu'elle ne s'érige en barrière non tarifaire aux échanges. L'obligation de conformité des filiales des multinationales aux politique et stratégie de groupe amène ces dernières à développer des initiatives sous l'impulsion de l'entreprise mère. L'engagement dans la lutte contre le SIDA avec Sida-Entreprise demeure une des initiatives connues des entreprises qui fait l'objet de communication et d'action d'envergure.

La participation de la société civile africaine aux mouvements sociaux mondiaux et le développement au niveau local et régional de forums sociaux ont favorisé l'émergence du débat et la construction d'une certaine expertise dans l'analyse des problématiques économiques en général et la RSE en particulier.

La presse africaine s'illustre aussi dans la dénonciation des pratiques irresponsables des entreprises à l'échelle nationale et internationale. En faisant écho des scandales (ENRON, Parmalat, Mattel et les jouets chinois, etc.) et des exactions impliquant les entreprises au niveau international, elle contribue à aiguiser l'attention de l'opinion publique africaine sur l'éthique des affaires, les impacts sociaux et environnementaux des activités des entreprises.

Les organismes des Nations Unies, le PNUD et l'OIT en particulier, sont sans conteste les moteurs de l'institutionnalisation progressive de la RSE en Afrique grâce au développement des réseaux du Pacte mondial en Afrique et de projets y relatifs au Maroc et en Tunisie, etc. et la création d'affaires durables à travers l'initiative GSB (Growing Sustainable Business).

Des visions occidentales inadaptées?

Il convient de relever l'existence d'une grande différence de contexte, de problématiques et d'enjeux, de réalités entre les pays développés et ceux en développement en général, d'Afrique en particulier. Un constat, bien établi par certains auteurs comme Pascal LABAZEE, Stephen ELLIS et Yves A. FAURE, décrit

par ailleurs des différences d'approche du phénomène entrepreneurial, ainsi que dans la nature, la structure et les caractéristiques des entreprises et du milieu des affaires africain. Il y a lieu, de ce fait, de s'interroger sur l'adéquation des approches et des visions occidentales de la RSE avec ce qui devrait être une approche africaine, enracinée sur les réalités, les spécificités et les valeurs africaines.

Développer une approche africaine de la RSE

Développer une approche africaine de la RSE impose la prise en compte d'une dimension culturelle transversale aux trois piliers du développement durable et une démarche interculturelle en matière de RSE . Une telle démarche conduirait à une adaptation de la RSE aux réalités locales. Il faut trouver dans les valeurs africaines, les éléments fondateurs d'une vision africaine de la RSE. Car si la RSE explicite est naissante, l'entreprise africaine n'a pas été insensible au développement de la communauté, aux enjeux sociaux et environnementaux. Bien au contraire, les exigences de la solidarité bien ancrée dans les valeurs africaines ainsi que les pratiques caritatives indiquent une certaine forme de responsabilité de l'entreprise ou de l'entrepreneur vis-à-vis de la communauté et qui met en avant l'importance du lien social et de la légitimité comme ressource fondamentale de l'entreprise.

La construction d'une vision africaine de la RSE commande aussi la participation pleine et entière des acteurs africains aux initiatives internationales autour de la RSE et la création d'un agenda régional africain et d'un mouvement de fond en matière de RSE soutenu par des réflexions qui prennent racine dans ces réalités africaines.

L'opérationnalisation des stratégies RSE des multinationales au niveau local, au-delà de l'obligation de conformité (compliance), devrait ainsi tenir compte de cette nécessaire adaptation. Il en est de même pour les normes qui gagneraient en efficacité si adaptées aux spécificités locales, nationales ou régionales. Cependant, il conviendrait d'éviter de s'enfermer dans des particularismes qui seraient réducteurs des exigences d'une réelle responsabilité sous prétexte d'adaptation au contexte.

V- Conclusion

Si la RSE n'est qu'un supplément d'âme pour pays développés ou grandes entreprises, l'Afrique serait peut-être moins disposée à s'y engager par crainte que cela n'entrave son développement ou la compétitivité de ses entreprises. Cependant s'il s'agit d'un réel mouvement de fond dans laquelle elle s'engage, elle pourrait être le bénéficiaire providentiel de la prise en compte des enjeux et problématiques de RSE par les multinationales qui y opèrent. Un tel mouvement de fond alignerait ainsi les exigences d'un développement harmonieux et durable avec la limitation ou la régulation des méfaits de la mondialisation, l'accès aux marchés internationaux pour les pays les plus pauvres et le bénéfice de la solidarité à l'échelle planétaire autour des enjeux globaux.

Annexes 1 : Questionnaires

1- Questionnaire à l'intention des membres du Réseau RSDD

Le renvoyer à urbain.yameogo@ciridd.org ou isabelle.blaes@ciridd.org avant le 31 juillet 2007

Pays d'origine :

Catégorie d'acteur :

n Gouvernement

n Entreprise

n ONG

n Organisation syndicale

n Consommateur

n Organisme de soutien à la responsabilité sociétale n Organisme de recherche

n Organisme de normalisation

n Autre :

Coordonnées complètes :

NB : Les informations fournies resteront entièrement anonymes lors de la restitution. Les données resteront accessibles par la personne intéressée auprès du CIRIDD.

Questions d'ordre général

A) Depuis combien de temps vous intéressez-vous à la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) ?

n Moins de 3 ans

n Entre 3 et 10 ans

n Depuis plus de 10 ans

B) Cet intérêt résulte-il de la publication d'un texte national, régional ou international de référence ? Si oui lequel ?

C) Pourquoi vous intéressez vous à la RSE ?

n A titre personnel (conviction, engagement)

n A titre professionnel (en raison de votre fonction, raison académique, etc.) n Les deux

D) Où en est-on avec le débat sur la RSE dans votre pays ?

n la RSE est inconnue

n débat encore interne au sein de quelques organisations

n débat public naissant/embryonnaire

n débat public avancé : différentes organisations et administrations s'y intéressent

E) Quels sont les principaux acteurs impliqués dans ce débat ? Administrations, entreprises, média, etc.

F) Disposez-vous d'expertise nationale en matière de RSE ? Si oui, de quel type (individuelle, d'organisations ou d'administrations) ?

G) Votre pays dispose-t-il :

[J d'une stratégie nationale de développement durable (SNDD) ? [J d'un cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (CSLP) ?

[J les deux

Quelles sont leurs dénominations officielles ?

H) Le cas échéant, qu'est-ce qui explique l'existence à la fois de SNDD et de CSLP ?

I) De quelle manière ces stratégies sont-elles coordonnées ?

J) La SNDD comporte-t-elle d'autres volets que les questions environnementales ?

K) Y a-t-il un chapitre sur les modes de production et de consommation durables ?

L) Quels sont les objectifs de ce chapitre ?

M) La SNDD a-t-elle données lieu à des réglementations particulières qui touchent les entreprises ?

[J OUI [J NON

Si oui dans quels domaines ?

N) Quelles sont, à votre avis, les problématiques dominantes de RSE auxquelles les entreprises pourraient faire face dans votre pays ? Précisez.

a. Problématiques sociales internes

b. Problématiques droits humains

c. Problématiques économiques et financières

d. Problématiques environnementales

e. Relations avec les partenaires économiques

f. Qualité des produits mis sur le marché

g. Relations avec les populations locales

O) Quel pourrait être l'intérêt pour votre pays de s'intéresser à la RSE et de s'en saisir ?

Questions relatives aux acteurs de la RSE

A) Pouvoirs publics

1- Action des pouvoirs publics

a. Existe-t-il des organismes publics ou structures administratives qui s'intéressent à la RSE dans votre pays ?

q Oui

q Non

b. Participation aux débats/initiatives international(e)s :

i. votre pays est-il membre de l'ISO ?

q Oui

q Non

1. Si oui, prend-il part aux travaux sur la norme ISO 26000 ?

q Oui

q Non

2. Si non, quelle en est la raison ?

ii. Votre pays participe-t-il au processus de Marrakech sur les modes de production et de consommation durable ?

q Oui

q Non

c. Quelles pourraient être les principales problématiques de la RSE qui pourraient intéresser les pouvoirs publics ?

q gouvernance

q droits humains

q pratiques professionnelles

q environnement

q développement de la société

q consommateurs

q bonnes pratiques des affaires

d. Pourriez-vous identifier des actions officielles dédiées à la RSE faites par les pouvoirs publics dans votre pays ?

2- Cadre législatif

a. Votre réglementation économique affiche-t-elle une volonté marquée d'attirer l'investissement étranger ?

q Oui

q Non

b. Selon vous, l'évasion fiscale est-elle une grande préoccupation pour votre pays ?

q Oui

q Non

c. Votre pays dispose-t-il d'un code de l'environnement ou de textes législatifs sur l'environnement ?

q Oui

q Non

d. Existe-t-il des outils juridiques et techniques pour la mise en application de cette législation ?

fl Oui fl Non

e. Le degré d'application de la législation environnementale par les entreprises dans votre pays est-il satisfaisant ?

fl Oui fl Non

Si non, quelles sont à votre avis les raisons ?

f. Votre pays a-t-il un dispositif de lutte contre la corruption ?

fl Oui fl Non

g. Quelle est votre appréciation de la protection qu'offre votre législation du travail par rapport aux normes internationales de l'OIT :

fl Protection suffisante du salarié (droits consacrés et respectés)

fl Les droits fondamentaux essentiels sont formalisés dans la législation fl Les droits fondamentaux essentiels sont partiellement formalisés

h. Votre pays exige-t-il un rapport social et/ou environnemental aux entreprises implantées dans le pays ?

fl Oui fl Non

Si oui dans quelle mesure cette demande est-elle prise en compte par les entreprises ?

B) Entreprises et RSE

1- Que représente pour vous une entreprise?

2- Tissu économique : votre pays connaît : (Plusieurs choix sont possibles) fl une forte implantation de multinationales

fl un fort développement d'entreprises (PME) locales fl une fort développement de l'économie non formelle fl une forte présence du secteur public

3- Connaissance de la RSE par les entreprises

a. Connaissance et adhésion aux initiatives internationales sur la responsabilité sociétale :

i. Quelles sont les initiatives les plus connues par les entreprises au niveau national ?

ii. Les entreprises y participent-elles (adhésion) ?

fl Oui fl Non

iii. Communiquent-elles à ce propos ?

fl Oui

Non

b. Existe-t-il des clubs ou groupements d'entreprises qui échangent sur le sujet ?

q NON

q OUI surtout dans la capitale politique et/ou économique

q OUI dans tout le pays

c. Avez-vous connaissance d'entreprises dans votre pays qui disposent de :

i. codes de conduite ?

q Oui

q Non

ii. charte éthique ?

q Oui

q Non

iii. code de déontologie?

q Oui

q Non

d. Si oui, est-ce une pratique répandue dans le pays ?

e. Dans le cas où les entreprises implantées dans votre pays s'engagent dans une démarche de RSE, quelles en sont, à votre avis, les raisons ?

q Déclinaison de la politique RSE de la société mère ou du groupe ?

q Volonté d'anticipation : initiative pionnière de l'entreprise ?

q Mimétisme ?

4- Communication sur la RSE

a. Les multinationales implantées dans votre pays communiquent-elles sur leurs politiques RSE, si elles en disposent ?

q Oui

q Non

b. Si oui, comment ?

q Par la presse

q Par des conférences

q Par la communication de rapports

q Par des bulletins d'information

q Par le partage de bonnes pratiques

c. Volontairement des entreprises affichent-elles des considérations sociales et/ou environnementales dans leurs rapports annuels ?

q Oui

q Non

Si oui, quel type d'entreprises ?

q Multinationales

q PME/PMI

q Artisans

q Services

q Commerce

q Industrie

5- Relations avec les partenaires économiques extérieurs

a. Dans quels secteurs d'activités les entreprises locales font-elles l'objet de pression de la part des clients ou des donneurs d'ordre occidentaux ?

b. Certaines ont-elles déjà fait l'objet d'audit RSE ?

Li Oui Li Non

Si oui, de quelle nature ?

c. Comment la RSE pourrait-elle être vue dans votre pays : Li comme un facteur de compétitivité à l'exportation ? Li ou au contraire comme un frein au commerce ?

Pour quelle raison ?

6- Les entreprises participent-elles à l'élaboration de la SNDD ou du CSLP ?

7- Dans quelle mesure sont-elles associées à leur mise en oeuvre ? C) Enseignement et recherche : niveau et intérêt pour la RSE

1- Y a-t-il des travaux de recherche dans le domaine de la RSE ou du développement durable ?

Li Oui Li Non

Si oui, est-ce le contexte local ou international qui les pousse à s'y intéresser ?

2- Y a-t-il des événements académiques ou des conférences sur ce sujet ?

Li Oui Li Non

3- La RSE est-elle abordée dans les cursus d'enseignement ?

Li Oui Li Non

Si oui, dans quel type de formation ?

4- Y a-t-il des cursus complètement dédiés à la RSE ?

Li Oui
LiNon

5- Le développement durable est-il abordé dans les cursus d'enseignement.

Li Oui Li Non

Si oui, dans type de formation ? Et selon quel aspect ?

6- Y a-t-il des cursus complètement dédiés au développement durable ?

q Oui

q Non

D) Société civile : syndicats, ONG et associations

1- Tissu associatif : votre pays connaît :

q Une forte implantation associative

q Une implantation associative faible ou peu influente

2- Les ONG d'envergure internationale sont-elles ?

q Fortement implantées

q Faiblement implantées

3- Dans quels domaines ces ONG internationales agissent-elles ? (citez des noms d'ONG)

q Environnement

q Développement local

q Questions relatives au travail

q Droits humains

q Lutte contre la corruption

4- Mouvement syndical : votre pays connaît :

q Une forte implantation des organisations syndicales

q Une faible implantation des organisations syndicales

5- La RSE et le développement durable constituent-ils une préoccupation pour les ONG et les organisations syndicales de votre pays ?

q Oui

q Non

6- Quelles sont les problématiques essentielles de RSE ou de développement durable que les syndicats et les associations (ONG) identifient ?

7- Quelles sont les problématiques essentielles de RSE ou de développement durable qui pourraient intéresser les syndicats et les associations (ONG) dans leurs actions ?

8- A quel niveau le débat se situe-t-il ?

q Débat en interne ?

q Débat public ?

9- Si le débat est public, citez les principales actions menées

10- Quels sont, selon vous, les obstacles à l'implication de la société civile dans ce domaine ?

q Méconnaissance / Ignorance du sujet

q Manque de moyen aussi bien financier qu'expertise

q Il y a d'autres urgences pour les associations

q Situation politique et sociale défavorable

q L'opinion publique nationale ne s'y intéresserait pas

q Manque d'intérêt des associations

11- Les entreprises participent-elles à l'élaboration de la SNDD ou CSLP ?

LiOui LiNon

12- Dans quelle mesure sont-elles associées à leur mise en oeuvre ? E) Presse

- La notion de RSE est :

Li Bien connue de la presse Li Peu connue

Li Pas du tout connue

- La notion de développement durable est :
Li Bien connue de la presse

LiPeu connue

LiPas du tout connue

- Quelles sont les problématiques liées à la RSE qui sont couramment abordées par la presse ?

Li problèmes sociaux internes à l'entreprise

Li préoccupations environnementales

Lidifficultés relationnelles avec la population locale

Li problématiques fiscales et de corruption

Li qualité des produits mis sur le marché

Li bonnes pratiques des entreprises en matière sociétale, sociale et environnementale

De la RSE à la RSO

De plus en plus, la responsabilité sociétale ne se limite pas seulement aux entreprises mais s'étend à toutes les organisations comme c'est le cas pour ISO : qu'en est-il dans votre pays ? Parle-t-on de la responsabilité sociétale d'autres organisations, d'autres acteurs ou

opérateurs ?

Commentaire général

2- Questionnaire général

Prière de renvoyer le questionnaire rempli à urbain.yameogo@ciridd.org ou

isabelle.blaes@ciridd.org ou par Fax au +33 (0)4 77 74 57 73 avant le 15 septembre 2007

NB : Une étude plus détaillée sera faite sur la RSE en Afrique francophone et dans l'espace UEMOA (Union Economique et Monétaire Ouest Africaine). Vous voudrez bien relever les spécificités relatives à ces deux espaces s 'il y en a.

Les informations fournies resteront entièrement anonymes lors de la restitution. Les données resteront accessibles par la personne intéressée auprès du CIRIDD.

1) Présentation de votre structure et ses liens avec la RSE ou des acteurs en Afrique (domaine d'intervention) et coordonnées complètes

2) Qualifiez les affirmations suivantes en cochant Juste ou Erronée La RSE est une belle opportunité pour un développement harmonieux de l'Afrique

fl Juste

fl Erronée

Le développement durable des pays en développement est du domaine de la politique publique et les entreprises n'ont rien à y faire : à chacun son rôle

fl Juste

fl Erronée

Les entreprises ont aussi leur rôle à jouer dans les stratégies nationales de développement durable et les cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté :

fl Juste

fl Erronée

Rien ne peut contraindre une entreprise, ni justifier une démarche RSE dans les pays africains en développement :

fl Juste

fl Erronée

La RSE est une nouvelle barrière non tarifaire aux échanges et nuira aux pays et entreprises d'Afrique :

fl Juste

fl Erronée

La RSE est une exigence mondiale et une nécessité incontournable en Afrique :

fl Juste

fl Erronée

3) Que pensez-vous de la participation des pays africains en développement dans le débat et les initiatives de RSE au plan mondial ?

4) Quelles sont selon vous les problématiques essentielles de RSE qui peuvent ou doivent mobiliser les acteurs (pouvoirs publics, société civile et entreprise) africains ?

5) Que pensez-vous de la législation économique, environnementale, sociale (droit du travail) de ces pays face aux enjeux et problématiques de RSE et du développement durable ?

Dans les questions suivantes les forces et les faiblesses sont internes à l'entreprise ou au pays, tandis que les opportunités et les contraintes leur sont extérieures.

6) Enumérez les forces, les faiblesses, les opportunités et les contraintes pour une entreprise africaine ou opérant en Afrique d'adopter un comportement responsable au travers d'une stratégie RSE/DD

7) Enumérez les forces, les faiblesses, les opportunités et les contraintes pour un pays d'inciter ses entreprises ou les entreprises opérant sur son territoire à adopter un comportement responsable dans le cadre de sa Stratégie Nationale de Développement Durable (SNDD)

8) Enumérez les forces, les faiblesses, les opportunités et les contraintes pour les Organisations de la société civile africaine de travailler sur des problématiques RSE par l'incitation et/ou la pression sur les entreprises

9) Quel peut ou doit être le rôle des entreprises dans les SNDD ou les Cadres Stratégiques de Lutte contre la Pauvreté (CSLP) d'un pays ?

10) A quel stade l'implication de l'entreprise est-elle nécessaire ? (plusieurs choix possibles)

fl Elaboration - consultation

fl Mise en oeuvre

fl Révision

fl Evaluation

11) Quel peut être le rôle des relations multilatérales (notamment les Accord de Partenariat Economique et l'Aide Publique au Développement) dans
l'institutionnalisation de la RSE dans les pays en développement ?

3- Questionnaire sur les initiatives nationales : état des lieux de la Responsabilité Sociétale des Entreprises en Afrique

Le renvoyer à urbain.yameogo@ciridd.org ou isabelle.blaes@ciridd.org avant le 15 septembre 2007

Une étude plus détaillée sera faite sur la responsabilité sociétale des entreprises en Afrique francophone et dans l'espace UEMOA (Union Economique et Monétaire Ouest Africaine). Merci donc de bien vouloir relever les spécificités relatives à ces deux espaces s 'il y en a.

Les informations fournies resteront entièrement anonymes lors de la restitution. Les données resteront accessibles par la personne intéressée auprès du CIRIDD.

Pays concerné(s) :

Présentation de la structure et ses liens avec la RSE ou des acteurs en Afrique

A) Où en est-on avec le débat sur la responsabilité sociétale des entreprises dans votre

pays concerné ?

fl la responsabilité sociétale des entreprises est inconnue fl débat encore interne au sein de quelques organisations fl débat public naissant/embryonnaire

fl débat public avancé: différents acteurs s'y intéressent

B) Quels sont les principaux acteurs impliqués dans ce débat ?

C) Votre pays dispose-t-il d'expertise nationale en matière de responsabilité sociétale des entreprises ? Si oui de quel type ?

D) Votre pays dispose-t-il :

fl d'une stratégie nationale de développement durable (SNDD) ? fl d'un cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (CSLP) ?

fl des deux

fl ni l'un ni l'autre

Quelles sont leurs dénominations officielles ?

E) Le cas échéant, qu'est-ce qui explique l'existence à la fois de stratégie nationale de développement durable (SNDD) et de Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté ?

F) De quelle manière ces stratégies sont-elles coordonnées ?

G) La SNDD traite-t-elle de questions autres que environnementales ?

H) Y a-t-il un chapitre sur les modes de production et de consommation durables ?

I) Quels sont les objectifs de ce chapitre ?

J) La SNDD a-t-elle donné lieu à des réglementations particulières touchant les entreprises?

fl OUI fl NON

K) Quelles sont, à votre avis, les problématiques dominantes de responsabilité sociétale des entreprises auxquelles les entreprises pourraient faire face dans votre pays ?

Si oui dans quels domaines ?

Se référer au document joint intitulé « Problématiques de RSE »

L) Quel peut être l'intérêt pour le pays de s'intéresser à la responsabilité sociétale des entreprises?

Questions relatives aux acteurs de la responsabilité sociétale des entreprises

A) Pouvoirs publics

3- Action des pouvoirs publics

a. Existe-t-il des organismes publics ou structures administratives qui s'intéressent à la responsabilité sociétale des entreprises dans le pays ?

n Oui n Non

b. Participation aux débats/initiatives international(e)s :

i. Le pays prend-il part aux travaux sur la norme ISO 26000 ?

n Oui n Non

Si non, quelle en est la raison ?

ii. Le pays participe-t-il au processus de Marrakech sur les modes de production et de consommation durable ?

n Oui n Non

c. Quelles sont les principales thématiques de responsabilité sociétale des entreprises qui pourraient intéresser les pouvoirs publics ?

n gouvernance

n droits humains

n pratiques professionnelles

n environnement

n développement de la société

n consommateurs

n bonnes pratiques des affaires

d. Pourriez-vous identifier des actions officielles dédiées à la responsabilité sociétale des entreprises faites par les pouvoirs publics dans votre pays ?

4- Cadre législatif

a. La réglementation économique du pays affiche-t-elle une volonté marquée d'attirer l'investissement étranger ?

nOui n Non

b. Selon vous, l'évasion fiscale est-elle une grande préoccupation pour le pays ?

n Oui n Non

c. Le pays dispose-t-il d'un code de l'environnement ou de textes législatifs équivalents sur l'environnement ?

n Oui n Non

d. Existe-t-il des outils juridiques et techniques pour la mise en application de cette législation ?

q Oui

q Non

e. Le degré d'application de la législation environnementale par les entreprises dans votre pays est-il satisfaisant ?

q Oui

q Non

Si non, quelles sont à votre avis les raisons ?

f. Le pays a-t-il un dispositif de lutte contre la corruption ?

q Oui

q Non

g. Quelle est votre appréciation de la protection qu'offre la législation du travail par rapport aux normes internationales de l'OIT :

q Protection suffisante du salarié (droits consacrés et respectés)

q Les droits fondamentaux essentiels sont formalisés dans la législation

q Les droits fondamentaux essentiels sont partiellement formalisés

h. Le pays exige-t-il un rapport social et/ou environnemental aux entreprises implantées dans le pays ?

q Oui

q Non

Si oui dans quelle mesure cette demande est-elle prise en compte par les entreprises ?

B) Entreprises et responsabilité sociétale des entreprises

8- Quel est pour vous l'objectif d'une entreprise?

9- Tissu économique : le pays connaît : (Plusieurs choix sont possibles)

q une forte implantation de multinationales

q un fort développement d'entreprises (PME) locales

q une fort développement de l'économie non formelle

q une forte présence du secteur public

10- Connaissance de la responsabilité sociétale par les entreprises

a. Connaissance et adhésion aux initiatives internationales sur la responsabilité sociétale :

i. Quelles sont les initiatives les plus connues par les entreprises au niveau national ?

q Global Compact (Pacte mondial)

q Principes directeurs à l'intention des entreprises multinationales de l'OCDE

q Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale de l'OIT

q Initiative de transparence des industries extractives (EITI)

q Processus de Marrakech sur les modes de production et de consommation propres

q Principes d'Investissements responsables (PRI) des Nations-Unies

q Processus de Kimberley

q Principes d'Equateur

q Principes Global Sullivan

q Principes de Caux pour la conduite des affaires

q Global Reporting Initiative (GRI)

q ISO 14001 (management environnemental)

q OHSAS 18001 (management de la santé et de la sécurité au travail)

q SD 21000

ii. Les entreprises y participent-elles (adhésion) ?

q Oui

q Non

iii. Communiquent-elles à ce propos ?

q Oui

q Non

b. Existe-t-il des clubs ou groupements d'entreprises qui échangent sur le sujet ?

q NON

q OUI surtout dans la capitale politique et/ou économique

q OUI dans tout le pays

c. Avez-vous connaissance d'entreprises dans le pays qui disposent de :

i. codes de conduite ?

q Oui

q Non

ii. charte éthique ?

q Oui

q Non

iii. code de déontologie?

q Oui

q Non

d. Si oui, est-ce une pratique répandue dans le pays ?

e. Dans le cas où les entreprises implantées dans le pays s'engagent dans une démarche de responsabilité sociétale, quelles en sont, à votre avis, les raisons ?

q Déclinaison de la politique de responsabilité sociétale de la société mère

q Volonté d'anticipation : initiative pionnière de l'entreprise ?

q Mimétisme ?

11- Communication sur la responsabilité sociétale

a. Les multinationales implantées dans le pays communiquent-elles sur leurs politiques RSE, si elles en disposent ?

q Oui

q Non

b. Si oui, comment ?

q Par la presse

q Par des conférences

q Par la communication de rapports

q Par des bulletins d'information

q Par le partage de bonnes pratiques

c. Volontairement des entreprises affichent-elles des considérations sociales et/ou environnementales dans leurs rapports annuels ?

q Oui

q Non

Si oui, quel type d'entreprises ?

q Multinationales

q PME/PMI

q Services

q Commerce

Li Industrie

12- Relations avec les partenaires économiques extérieurs

a. Dans quels secteurs d'activités les entreprises locales font-elles l'objet de pression de la part des clients ou des donneurs d'ordre occidentaux ?

b. Certaines ont-elles déjà fait l'objet d'audit RSE ?

Li Oui Li Non

Si oui, de quelle nature ?

c. Comment la responsabilité sociétale des entreprises pourrait-elle être vue dans le pays : Li comme un facteur de compétitivité à l'exportation ?

Li ou au contraire comme un frein au commerce ?

Pour quelle raison ?

13- Les entreprises participent-elles à l'élaboration de la SNDD ou du CSLP ?

14- Dans quelle mesure sont-elles associées à leur mise en oeuvre ?

C) Enseignement et recherche : niveau et intérêt pour la responsabilité sociétale des entreprises

7- Y a-t-il des travaux de recherche dans le domaine de la responsabilité sociétale des entreprises ou du développement durable ?

Li Oui Li Non

Si oui, est-ce le contexte local ou international qui les pousse à s'y intéresser ?

8- Y a-t-il des événements académiques ou des conférences sur ce sujet ?

Li Oui Li Non

9- La responsabilité sociétale des entreprises est-elle abordée dans les cursus d'enseignement ?

Li Oui Li Non

Si oui, dans quel type de formation ?

10- Y a-t-il des cursus complètement dédiés à la responsabilité sociétale des entreprises ?

Li Oui
LiNon

11- Le développement durable est-il abordé dans les cursus d'enseignement.

Li Oui Li Non

Si oui, dans quel type de formation ? Et selon quel aspect ?

12- Y a-t-il des cursus complètement dédiés au développement durable ?

Li Oui Li Non

Si oui indiquez la/les formation(s)

D) Société civile : syndicats, ONG et associations

13- Tissu associatif : le pays connaît :

Une forte implantation associative

q Une implantation associative faible ou peu influente

14- Les ONG d'envergure internationale sont-elles ?

q Fortement implantées

q Faiblement implantées

15- Dans quels domaines ces ONG internationales agissent-elles ? (citez des noms d'ONG)

q Environnement

q Développement local

q Questions relatives au travail

q Droits humains

q Lutte contre la corruption

16- Mouvement syndical : le pays connaît :

q Une forte implantation des organisations syndicales

q Une faible implantation des organisations syndicales

17- La responsabilité sociétale des entreprises et le développement durable constituent-ils une préoccupation pour les ONG et les organisations syndicales de le pays ?

q Oui

q Non

18- Quelles sont les problématiques essentielles de responsabilité sociétale des entreprises ou de développement durable que les syndicats et les associations (ONG) identifient ?

19- Quelles sont les problématiques essentielles de responsabilité sociétale des entreprises ou de développement durable qui pourraient intéresser les syndicats et les associations (ONG) dans leurs actions ?

20- A quel niveau le débat se situe-t-il ?

q Débat en interne ?

q Débat public ?

21- Si le débat est public, citez les principales actions menées

22- Quels sont, selon vous, les obstacles à l'implication de la société civile dans ce domaine ?

q Méconnaissance / Ignorance du sujet

q Manque de moyen aussi bien financier qu'expertise

q Il y a d'autres urgences pour les associations

q Situation politique et sociale défavorable

q L'opinion publique nationale ne s'y intéresserait pas

q Manque d'intérêt des associations

23- Les OSC participent-elles à l'élaboration de la SNDD ou CSLP ?

q Oui

q Non

24- Dans quelle mesure sont-elles associées à leur mise en oeuvre ?

E) Presse

- La notion de responsabilité sociétale des entreprises est :

q Bien connue de la presse

q Peu connue

q Pas du tout connue

- La notion de développement durable est :

q Bien connue de la presse

nPeu connue

nPas du tout connue

- Quelles sont les problématiques liées à la responsabilité sociétale des entreprises qui sont couramment abordées par la presse ?

n problèmes sociaux internes à l'entreprise

n préoccupations environnementales

ndifficultés relationnelles avec la population locale

n problématiques fiscales et de corruption

n qualité des produits mis sur le marché

n bonnes pratiques des entreprises en matière sociétale, sociale et environnementale

De la responsabilité sociétale des entreprises à la responsabilité sociétale des
organisations

De plus en plus, la responsabilité sociétale ne se limite plus seulement aux entreprises mais s'étend à toutes les organisations comme c'est le cas pour la norme ISO 26000 : qu'en est-il dans le pays ? Parle-t-on de la responsabilité sociétale d'autres organisations, d'autres acteurs?

Commentaire général

4- Questionnaire à l'intention des auditeurs et des responsables de services développement durable et RS d'entreprises opérant en Afrique

Prière de renvoyer le questionnaire rempli à urbain.yameogo@ciridd.org ou isabelle.blaes@ciridd.org ou par Fax au +33 (0)4 77 74 57 73

Une étude plus détaillée sera faite sur la RSE en Afrique francophone et dans l'espace UEMOA (Union Economique et Monétaire Ouest Africaine). Merci donc de bien vouloir relever les spécificités relatives à ces deux espaces s'il y en a.

- Nom de votre entreprise, coordonnées du siège social et secteur d'activité

- Quelle est la nature du lien commercial ou de société qui vous lie aux partenaires commerciaux dans les pays d'Afrique francophone (plusieurs réponses sont possibles) fl Fournisseurs

fl sous-traitants

fl filiales

fl agences

fl succursales

flautres

A) Actions et comportements socialement responsables - Quel est pour vous l'objectif d'une entreprise

- Les entreprises partenaires se préoccupent-elles des conséquences négatives réelles ou possibles de leurs activités sur la communauté ?

fl Oui fl Non

Si oui comment les gèrent-elles ? Si non pourquoi ?

- Quelles sont les grandes problématiques auxquelles les entreprises partenaires en Afrique sont confrontées ?)

- Ces problématiques sont-elles propres au secteur d'activité de l'entreprise ?

flOui fl Non

- Exigez-vous de vos partenaires africains un comportement socialement responsable ? Si oui qu'est-ce qui vous pousse à exiger d'eux un comportement socialement responsable ?

- Votre entreprise a-t-elle déjà été mise à mal suite à une dénonciation de pratiques non responsables d'un de vos partenaires commerciaux africains ?

flOui fl Non

- Quels effets des pratiques/comportements responsables d'un partenaire peuvent-ils avoir sur votre entreprise ?

B) Stratégie RSE de votre entreprise

- Votre entreprise dispose-t-elle d'une politique ou d'une stratégie écrite de développement durable ou de RSE ?

flOui fl Non

- Votre entreprise participe-t-elle à des initiatives internationales en matière de RSE? (Global Compact, Principes d'investissement responsable, principes de Sullivan...) Si oui lesquelles ?

- Les partenaires africains ont-ils connaissance de ces initiatives internationales et des référentiels de RSE ? Y participent-ils ou les utilisent-ils ? Si Oui lesquelles ?

- Votre entreprise les y encourage-t-elle ?

flOui fl Non

- Si vous réalisez un rapport développement durable, ce rapport inclut-il des informations provenant de vos agences, filiales ou succursales africaines ?

flOui fl Non

C) Code de conduite

- Votre entreprise dispose-t-elle : fl d'un code de conduite fl d'une charte éthique ? fl d'un code de déontologie ?

- Est-il/elle connu(e) de vos partenaires commerciaux africains ?

flOui fl Non

- Comment en assurez-vous le respect par ceux-ci ?

D) Audit social et/ou sociétal

- Avez-vous déjà fait des audits chez vos partenaires commerciaux africains ? si oui de quelle nature ?

- Quelle sont la fréquence et la durée des audits dans les entreprises concernées ?

- Dans le cas où ces partenaires africains sont des sous-traitants ou des fournisseurs, les problèmes constatés peuvent-ils influencer la relation d'affaires voire conduire à la rupture du lien commercial ?

flOui fl Non

- Participez-vous à la mise en oeuvre de mesures correctives ?

flOui fl Non

- Par quels moyens votre entreprise participe-t-elle à la mise en oeuvre de ces mesures ? fl appui technique/expertise,

fl suivi, surveillance, contrôle

fl autres...

- Les entreprises auditées sont-elles volontaires ou proactives dans la mise en oeuvre de ces mesures correctives ?

flOui fl Non

Conclusion

- Selon vous, quel intérêt une entreprise africaine a-t-elle à adopter des pratiques socialement responsables ?

- Qualifiez les affirmations suivantes en cochant Juste ou Erronée

La RSE est une belle opportunité pour un développement harmonieux de l'Afrique

fl Juste

fl Erronée

Le développement durable des pays en développement est du domaine de la politique publique et les entreprises n'ont rien à y faire : à chacun son rôle

fl Juste

fl Erronée

Les entreprises ont aussi leur rôle à jouer dans les stratégies nationales de développement durable et les cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté :

fl Juste

fl Erronée

Rien ne peut contraindre une entreprise, ni justifier une démarche RSE dans les pays africains en développement :

fl Juste

fl Erronée

La RSE est une nouvelle barrière non tarifaire aux échanges et nuira aux pays et entreprises d'Afrique :

fl Juste

fl Erronée

La RSE est une exigence mondiale et une nécessité incontournable en Afrique :

fl Juste

fl Erronée

Annexe 2 Etat des engagements internationaux

Source : PNUD

Annexe 3 :Classement de l'indice de perceptions de la corruption en Afrique

Indice de perception de la corruption de quelques pays de l'Afrique

Pays

Rang du pays en 2006

Indice 2006

Rang du pays en 2005

Indice 2005

Botswana

37

5.6

32

5.9

Maurice

42

5.1

51

4.2

Afrique du sud

51

4.6

46

4.5

Tunisie

51

4.6

43

4.9

Namibie

55

4.1

47

4.3

Seychelles

63

3.6

55

4.0

Egypte

70

3.3

70

3.4

Ghana

70

3.3

65

3.5

Sénégal

70

3.3

78

3.2

Burkina Faso

79

3.2

70

3.2

Lesotho

79

3.2

70

3.4

Maroc

79

3.2

78

3.2

Algérie

84

3.1

97

2.8

Madagascar

84

3.1

97

2.8

Gabon

90

3.0

88

2.9

Erythrée

93

2.9

107

2.6

Tanzanie

93

2.9

88

2.9

Mali

99

2.8

88

2.9

Mozambique

99

2.8

97

2.9

Libye

105

2.7

117

2.5

Malawi

105

2.7

97

2.8

Ouganda

105

2.7

117

2.5

Zambie

111

2.6

107

2.6

Bénin

121

2.5

88

2.9

Gambie

121

2.5

103

2.7

Rwanda

121

2.5

83

3.1

Burundi

130

2.4

130

2.3

Ethiopie

130

2.4

137

2.2

Zimbabwe

130

2.4

107

2.6

Cameroun

138

2.3

137

2.2

Niger

138

2.3

126

2.4

Angola

142

2.2

151

2.0

Congo

142

2.2

130

2.3

Kenya

142

2.2

144

2.1

Nigeria

142

2.2

152

1.9

Côte d'Ivoire

151

2.1

152

1.9

Guinée équatoriale

151

2.1

152

1.9

Soudan

156

2.0

144

2.1

Source : Transparency International






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