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Le secteur du micro crédit au maroc, evaluation et etude de cas

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par Mohamed Faska
Université Moulay Ismail Méknes - Licence en sciences économiques 2006
  

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Section III : Les institutions de la microfinance : tendance et viabilité.

I- Le concept d'institutionnalisation :

1) la notion d'institutionnalisation :

Les concepts de financement du développement, comme toute théorie économique, ont toujours été fortement imprégnés par les courant de pensé de leur époque. Ainsi, les premières activités de microcrédit se situent souvent dans un contexte de « l'ajustement structurel » dans le cadre duquel le retrait de l'Etat suscitait la « promotion » de l'activité prouvée de la part des agences de coopération. C'est dans ce contexte qu'ont émergé, notamment en Afrique de l'Ouest. De nombreux projets d'appui aux « microréalisations » de promotion de l'artisanat ou de développement rural intégré. Pour renforcer leur caractère promotionnel, ces projets étaient souvent dotés d'instruments financiers, tels que des fonds de crédit au service du groupe cible.

Au lieu de cette intervention directe dans le secteur financier, encor peu de projets favorisaient la coopération avec des institutions financières formelles ou informelles sur place, ces dernières faisant souvent défaut. Aujourd'hui, on constate que le concept de la « promotion financière » d'hier ne rime pas avec celui de « l'institutionnalisation d'un projet » de nos jours.

Depuis le milieu des années 90, on est passé du concept de « financement » à celui de « développement des institutions financière » et notamment des institutions de microfinance (IMF) avec un objectif de pérennité. Ce changement était accompagné par le développement des approche systémiques en faveur des secteurs financiers qui mettaient l'accent sur les conditions cadres (réglementation et supervision des nouvelles institutions financières). En même temps, on cherchait l'articulation de ces nouvelles IMF avec le système bancaire classique accentuant ainsi la complémentarité qui peut exister entre les institutions financières de taille et de part de marché différentes. Finalement, le développement de la « microfinance » était de plus en plus programmé dans le cadre des stratégies nationales pour le développement de la microfinance qui ont vu le jour à partir du milieu des années 80, notamment au Mali, au Burkina-Faso et plus récemment, au Niger.

2) Forme juridique de l'institution :

Le statut juridique permet de déterminer qui a la propriété de l'institution et qui a le pouvoir de décision. L'analyse des textes organiques (notamment les statuts) va permettre d'identifier les différents organes de décision et leur rôle respectifs.

Une institution de microfinance peut avoir différents statuts (projet, association/ONG, mutuelle/ coopératives, société anonyme, institution publique). Le choix du statut sera déterminant pour le type d'organisation. Pour les modalités de prise de décision et donc pour la gouvernance de l'institution.

Les statuts principalement rencontrés sont caractérisés par un niveau de formalisation plus ou moins important (du projet à la banque, allant du champ du public au privé, en passant par l'associatif et le coopératif).

- projet : institution non reconnues au stade de la création et ayant un statut de projet de développement le plus souvent financé directement ou indirectement par les bailleurs de fonds.

- association/ONG/ fondation : organisation à but non lucratif. Ce type d'institution ne peut pas collecter d'épargne. Dans le cas où la collecte existe, c'est une tolérance en l'absence de cadre juridique pour la microfinance.

- Mutuelle / coopérative : institution détenue par les membres qui sont bénéficiaires directs des services d'épargne et de crédit proposés.

- société anonyme : société avec une composition du capital très viable selon les situations en fonction de l'origine des capitaux et de la motivation des investisseurs.

Une analyse des raisons qui ont conduit du statut juridique peut s'avérer intéressante pour comprendre la démarche et les contraintes éventuelles de l'institution.

Différents éléments peuvent être retenus pouvant conduire à un choix :

le niveau de formalisation, l'âge de l'institution : le statut de projet ou d'ONG est souvent un statut provisoire en amant de l'institutionnalisation.

les contraintes légales : le choix su montage institutionnel sera étroitement lié au cadre légal encadrant ou non la profession. En effet, on distingue les pays ayant un cadre légal spécifique, pour la microfinance et ceux pour lesquels rien n'existe. Parmi les pays ayant un cadre légal spécifique, on distingue ceux pour lesquels le choix reste ouvert entre les différents statuts (société, coopérative, association...) et ceux où le choix est très restrictif et imposé par les textes. Dans les pays n'ayant pas de cadre légal pour la microfinance, tout est possible pour les institutions, toutefois il est important de vérifier lors du montage l'acceptation par les autorités de tutelle potentielles afin d'éviter les problèmes de mise en conformité lors de l'introduction d'une régulation pour le secteur.

le niveau de structuration sociale : la cohésion du groupe notamment des bénéficiaires va orienter vers une structure plutôt de type coopérative avec une large base sociale si ces derniers ont participé directement à la mie en place de l'institution.

la structure de financement : selon les sources de revenus, la possibilité ou non de collecter l'épargne ou au contraire la nécessité de faire appel à des investisseurs extérieurs va influencer le choix entre un statut de type coopératif ou plutôt une société.

le rôle de l'Etat : En fonction du rôle joué par l'Etat et sa place dans le capital on s'orientera plutôt vers une structure de type privée ou publique. Le statut associatif peut également être un moyen pour l'Etat de garder un certain contrôle sur les ressources mises à disposition des institutions.

II- le concept de viabilité sociale :

1. La problématique de la pérennité des institutions de microfinance :

Si au départ, le crédit était considéré comme moyen d'atteindre d'autres objectifs(lutte contre la pauvreté, promotion des activités féminines...) ,l'évolution de ces dernières années a conduit à réfléchir en terme de services financiers et de création d'institutions financières pérennes. Les besoins des services financiers étant structurels ou permanents, ils ne peuvent être réglés par des interventions temporaires ou de projets. Pour arriver à une telle institutionnalisation, la priorité a été mise d'abord sur deux points :

- arriver à l'équilibre financier (ou viabilité financière).

- donner un statut juridique aux IMF et faire rentrer ces institutions dans la surveillance bancaire (Ministère des finances, Banque Centrale). Mais on s'aperçoit de plus en plus, notamment avec les crises récentes de certains réseaux, que ces éléments très importants sont insuffisants.

Par exemple, les causes des impayés ne sont pas seulement financières ou économiques mais peuvent venir de la volonté de certains de ne pas rembourser. Il y a donc interaction entre divers éléments et nécessité de prendre en compte de nouveaux facteurs (par exemple la perception de l'IMF et de l'origine de ses fonds par les emprunteurs, leur confiance vis-à-vis des élus et des agents...).

2. La viabilité sociale :

Plusieurs acteurs sociaux sont concernés, directement ou indirectement par les IMF ; au niveau local, les emprunteurs et les épargnants, les élus, l'agent de crédit et le gérant, ceux qui n'ont pas accès aux services (volontairement ou involontairement). Les démissionnaires mais aussi les usuriers, les grands commerçants, les autorités religieuses, coutumières et politiques, à d'autres niveaux les différents types de cadres nationaux de l'IMF (selon leurs degré de responsabilité, leur ancienneté, leur niveau d'éducation), l'Etat, les bailleurs de fonds, éventuellement l'opérateur/assistant technique.

Chaque acteur a ses intérêts (par exemple accéder au crédit pour les membres/client ou avoir une sécurité d'emploi pour le salarié/et ses normes (ou système de références ou de valeurs). Par exemple l'agent de crédit et l'emprunteur ont des visions différentes sur la nécessité de rembourser le jour de l'échéance, sur le type de garanties et notamment sur les groupes de solidarité, sur les pénalités à appliquer, sur le type de sociétaires (faut-il par exemple intégrer les fonctionnaires et les gros commerçants ?), sur le niveau des taux d'intérêt, sur le niveau de rémunération et des indemnités...

Il y a viabilité sociale si on arrive à des compromis, des comptabilités, des accords d'intérêt et des normes entre les différents acteurs. Autrement dit s'il n'y a pas un véritable accord, une intériorisation des règles, on constate une application ou une détournement de celle-ci, une réinterprétation officieuse, ce qui débouche souvent sur des crises.

On peut parler de viabilité sociale interne quand ces compromis/accords concernant les acteurs directement concernés (les emprunteurs, les élus, les cadres, les actionnaires) et de viabilité sociale externe lorsque l'IMF n'est plus considérée comme un corps étranger venant de l'extérieur mais devient une véritable institution locale au service de la population et des autorités coutumières, religieuses ou politiques.

Pour analyser la viabilité sociale, il faut donc identifier les différents acteurs sociaux ; comprendre leurs intérêts, leurs logiques, leurs stratégies, voir comment peuvent s'établir des comptabilités (par l'information, la formation, le débat, les décisions conjointes, les co-évaluation) ; observer les divers dysfonctionnements (par exemple impayés, détournement, démissions) et les crises.

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