Conclusion Générale
Il y a environ 40 ans que Goldsmith a
posé les jalons de l'analyse de la corrélation entre le
développement de l'activité financière et la croissance
économique. Il a été en effet le premier à
démontrer de façon empirique que le développement
financier a un effet positif sur le développement de l'activité
productive.
Depuis lors, de nombreux travaux empiriques et
théoriques notamment ceux de Loayza (2005), Levine (1997), abondent dans
le même sens. Ils essaient en outre de déterminer les
différents canaux par lesquels le développement financier
affecte- est affecté par- la croissance économique.
Le sens de la causalité de la relation a
lui aussi fait l'objet d'une controverse théorique tranchée par
Patrick (1966) qui établit que cette relation finance - Croissance est
biunivoque.
Néanmoins, sur le plan empirique,
l'estimation de la relation de cause à effet tend à conforter
l'idée selon laquelle à long terme c'est l'amélioration de
la sphère financière qui impulse celle de la sphère
productive à travers l'accroissement des investissements dans le domaine
de la recherche et du développement (R&D) et des innovations
financières.
D'après Levine (1997), cette conclusion
sur la dynamique de long terme Finance - Croissance a un corollaire très
important :
Bien que les paniques bancaires et financières ou
même les crises économiques ont des effets critiques, le lien
à long terme Finance - Croissance survit aux bouleversements et
fluctuations de courte période l'affectent.
Cette conclusion est d'autant plus importante dans notre
analyse que malgré la succession des crises économique et du
système financier camerounais, celui-ci depuis la fin de la
restructuration bancaire de 1997 s'étoffe d'un nouvel type
d'intermédiaires financiers, à savoir les établissements
de microfinance et d'une gamme variée de produits nouveaux impulsant
ainsi la croissance économique.
L'objet de ce mémoire est
d'établir le signe, le sens et la durée de la relation entre le
développement de l'activité financière et la croissance de
l'activité économique au Cameroun. Nous avons ainsi pu
démontrer que le signe de notre relation était positif.
Mais l'étude de la causalité nous
a mené à conclure qu'au Cameroun, c'est plutôt la
croissance économique qui influence la qualité des services
financiers et la structure du système bancaire.
L'analyse du terme de la relation a quant
à elle nécessité une démarche méthodologique
rigoureuse. L'utilisation de la méthode d'estimation de Engel et Granger
nous a permis de faire ressortir d'une part la relation statique de long terme
qui détermine le sentier d'expansion entre nos deux
phénomènes et d'autre part la relation dynamique de court terme
à travers l'estimation du modèle à correction
d'erreurs.
Les conclusions auxquelles nous avons abouti
sont les suivantes :
· A long terme, il existe une relation positive entre le
taux de quasi liquidité de l'économie et la production globale.
Et de la même manière, les crédits alloués au
secteur privé sont corrélés positivement avec le niveau de
l'activité réelle.
· Par contre, la dynamique de court terme n'aboutit pas
aux mêmes conclusions. L'estimation des différents modèles
à correction d'erreurs établit que seules les variations
passées du PIB ont une incidence sur son taux de croissance. Les chocs
en provenance du système financier affectent très peu la
structure du comportement des agents économiques.
· A l'inverse, l'observation des faits nous amène
à inférer qu'une quelconque variation du revenu des agents
affecte leur comportement d'épargne et d'investissement. En effet, la
baisse des revenus survenus au cours de la décennie 1980 a
été suivie par la baisse des avoirs bancaires. Mais au lendemain
de la dévaluation de janvier 1994 qui a engendré un regain de
l'activité économique dès 1997, les dépôts
bancaires ont connu une nette progression.
Il est néanmoins important de souligner
que toutes les conclusions que nous avons pu tirer jusqu'ici ont
nécessité la prise en compte dans les relations de long terme
d'autres variables explicatives pertinentes. Sans elles, les résultats
de nos estimations seraient moins robustes et ne permettraient pas d'en
inférer une quelconque analyse. Les nouvelles variables qui ont
été considérées dans nos modèles sont les
parts de l'épargne, de l'investissement et de la dépense
nationale dans la production globale.
Dans ce travail, nous n'avons malheureusement
pas discuté des liens théoriques entre ces variables et les
indicateurs de croissance économique ; mais d'un point de vue
empirique, leurs effets sur le niveau de l'activité économique au
Cameroun restent quelque peu ambigus.
A l'issue de tout ce travail analytique, nous
avons suggéré quelques propositions de politiques
économiques susceptibles d'améliorer la relation. Il s'agit en
l'occurrence :
Ø Sur le plan institutionnel
· de la mise sur pieds dans les établissements de
crédit d'un véritable département de trésorerie.
· de la réhabilitation de la cour de justice
communautaire
Ø Sur le plan réglementaire
· du renforcement de la crédibilité du
système judiciaire
· de la mise en application de loi contre le blanchiment
d'argent
Ø Sur le plan purement économique
· de la vulgarisation des moyens de paiement modernes
· de la diversification des produits de financement
· du fonctionnement effectif du marché
financier
· de l'intégration dans le secteur formel des
associations tontinières qui sont devenues au fil du temps un
véritable lieu de financement des PME camerounaises
Cette dernière proposition pourrait
constituer un approfondissement de ce sujet. Les travaux ultérieures sur
la relation entre le développement du système financier et la
croissance économique pourraient en effet prendre en compte le secteur
informel dans l'analyse. Aussi, la construction d'un nouvel type d'indicateur
de développement financier s'avère nécessaire.
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