Introduction
générale
« La monnaie est un voile
derrière lequel l'action des forces réelles est
cachée », (Pigou, 1949). Cette citation de l'économiste
classique Pigou décrit bien le sentiment général de ses
contemporains quant au rôle de la monnaie dans l'économie.
La monnaie pour eux est un bien résiduel.
Sa détention est sans coût et son incidence sur les transactions
sans effet. Elle est même au sens de Sidrauski (1967) « super
neutre ». Elle n'a d'incidence ni à court terme, ni à
long terme sur le niveau de l'activité réelle.
Ainsi la pensée néoclassique
attribue à la monnaie l'unique fonction de facilitation des
échanges.
Cependant, cette thèse pourtant
fondamentale a été remise en cause par les keynésiens et
néo-keynésiens qui soutiennent que dans un environnement
incertain, les agents économiques ont une certaine
préférence pour la liquidité. Ils lui attribuent alors une
seconde fonction qui est celle de réserve de la valeur.
Autrement dit, la détention des avoirs
liquides pénalise les transactions et la monnaie n'est plus ce voile que
Say et Pigou décrivent dans leurs travaux. Tobin en 1965 montre à
cet effet qu'en modifiant le portefeuille des ménages, la monnaie influe
sur le niveau du PIB. Pour lui, elle doit en conséquence être
désormais définie comme un actif financier qui permet à
son détenteur de se prémunir contre les risques du marché
des biens et services.
Bien plus, l'économie de
l'intermédiation financière et bancaire nous amène
à définir la monnaie tout simplement comme le crédit
bancaire. En effet, une fonction première des intermédiaires
financiers et particulièrement de la banque est de créer la
monnaie ou tout autre actif financier ayant les mêmes
caractéristiques qu'elle.
Cette fonction est d'autant plus importante pour
Keynes que la création monétaire constitue un moyen efficace par
lequel les autorités étatiques peuvent relancer l'activité
économique.
Il démontre à cet effet par le
mécanisme du multiplicateur monétaire qu'un accroissement de la
masse monétaire induit une augmentation de la production globale via
l'accroissement de la demande effective.
Aussi, toutes les thèses qui s'inscrivent
dans la même logique que la pensée de Keynes sont en contradiction
avec toute la construction de l'équilibre générale
élaborée par Arrow et Debreu.
Ces derniers considèrent en effet que le
système financier tout entier vient graisser le mécanisme par
lequel les équilibres partiels conduisent à l'équilibre
général sans en être le moteur.
En d'autres termes, un
déséquilibre dans le système financier ne saurait
perturber l'équilibre général dont la solidité
repose sur des fondamentaux réels.
A ce stade de l'analyse nous pouvons constater
que le débat entre classiques et keynésiens sur le rôle de
la monnaie a évolué au fil du temps en un débat entre
néoclassiques et néo-keynésiens sur la place du
système financier dans l'économie.
Tandis que certains auteurs à l'instar de
Lucas (1988) pensent qu'une place trop importante est accordée à
tort aux facteurs financiers, d'autres, en l'occurrence McKionnon, Levine, Shaw
et Hubbard épousent une vision contraire. Celui-ci démontre que
l'équilibre sur le marché des capitaux en l'absence
d'intermédiaires financiers est sous optimale.
Tous ces débats théoriques sont
mis à profit dans les analyses empiriques faites par Collier et Gunning
(1997) et Odekun (1996). Alors que les premiers établissent que la
relation entre le développement de l'activité financière
et celui de l'activité réelle est positive en Afrique, le second
montre que ce résultat n'est pas en conformité avec la
réalité des faits dans près de 2/ 3 des pays
D'Afrique subsaharienne.
Notons que le coeur de toutes ces confrontations
sur les plans théorique et empirique est la place que le système
financier occupe dans le développement de l'activité
économique. Pourrait-on en conclure que le développement de
l'activité financière aurait une quelconque incidence sur la
croissance économique ?
Ce mémoire est donc une tentative de
réponse à ce questionnement dans le cadre spécifique du
Cameroun. Si nous nous sommes intéressés à ce pays, c'est
parce que nous avons été guidés d'une part par la place de
choix qu'il occupe dans la zone CEMAC1(*) et d'autre part par le fait qu'il a connu une
succession de crises et de reprises des activités financière et
productive.
En effet, au cours de la décennie 1980,
le Cameroun comme la plupart des pays d'Afrique subsaharienne a connu une
récession économique liée à la mauvaise conjoncture
sur le marché international des matières premières et une
crise de son système bancaire tout entier.
Pour se sortir de cette situation critique, le
Cameroun se lance dès 1988 dans une grande phase d'ajustement structurel
qui vise à relancer l'activité économique. Une des
réformes importantes imposées par les institutions
²internationales de Bretton Woods est l'assainissement de son
système financier.
Cette prescription du FMI est appuyée par
les thèses libérales de McKinnon et Shaw (1973) qui
démontrent dans leurs travaux que la libéralisation
financière a pour conséquence majeure l'approfondissement voire
le développement financier. Celui-ci à leur avis permet de
« booster » la croissance économique en
améliorant la qualité des financements et en conduisant à
une plus grande collecte de fonds prêtables.
La libéralisation ainsi enclenchée
a permis dans un premier temps d'améliorer les conditions de
dépôts, mais dans un second temps, elle a conduit à la
baisse drastique des ratios de développement financier. Ces conclusions
que nous pouvons tirer de l'observation des faits nous amènent à
nous intéresser davantage au sens de la causalité entre le
développement du système financier et le phénomène
de croissance de l'activité économique.
Cette nouvelle appréhension trouve
d'ailleurs ses fondements dans l'observation des faits stylisés. En
effet, après la dévaluation du franc CFA en janvier 1994, on
observe une certaine reprise d'abord de l'activité économique et
ensuite de l'activité financière.
Aussi, l'objet de ce mémoire est
d'établir le signe, le sens ainsi que le terme de la relation entre le
développement financier et la croissance économique dans le cadre
précis du Cameroun.
Pour cela, nous nécessitons d'une
méthodologie particulière qui se prête mieux à
l'analyse simultanée du terme et du signe de la relation. L'estimation
économétrique par l'approche de Engle et Granger présente
en effet l'avantage d'extraire le signe de la relation à long terme
ainsi que celui de la relation à court terme.
L'estimation du modèle à
correction d'erreurs nous permet de faire une analyse dynamique des
phénomènes. Et comparativement aux autres méthodes
classiques notamment la méthode des moindres carrés ordinaires ou
généralisés, cette méthode d'estimation nous
renseigne mieux sur les effets des fluctuations simultanées et sur la
manière dont les deux phénomènes se retrouvent à
long terme sur le même sentier d'expansion.
Le sens de la relation quant à lui
nécessite la mise en oeuvre d'un test statistique particulier ; il
s'agit du test de causalité au sens de Granger. La causalité est
une notion plus adéquate lorsque nous cherchons à
déterminer l'impact d'un phénomène sur un autre.
Aussi dans ce travail, nous passerons
progressivement de l'étude d'une simple corrélation à
celle de la causalité statistique qui trouve ses fondements dans
l'analyse théorique.
Pour ce faire, nous analyserons dans un premier
chapitre la corrélation entre les indicateurs du développement
financier et la croissance du produit par tête. Mais avant tout, il nous
importe de savoir si après les premières réformes de 1973,
le système financier camerounais s'est effectivement
développé.
Dans un second chapitre, nous ferons ressortir
les fondements théoriques de cette corrélation. Aussi
l'étude des modèles théoriques nous permettra de mettre en
relief les canaux par lesquels la Finance influence la croissance à
court terme et à long terme.
Le troisième chapitre quant à lui
est celui de la modélisation économétrique. Il y sera
discuté des propriétés statistiques de nos variables ainsi
que celui des tests préalables à la mise en oeuvre de la
méthode d'estimation choisie. Entre autres, nous établirons aussi
le sens de la causalité entre ces deux phénomènes.
Dans un quatrième chapitre enfin, nous
donnerons les résultats finaux de nos estimations et nous proposerons
quelques réformes susceptibles d'être envisagées sur les
plans institutionnel, réglementaire et purement économique.
Chapitre 1 : Le développement de
l'intermédiation financière et son incidence sur la croissance
économique au Cameroun
Introduction
Le système financier des pays de la zone
CEMAC est placé sous l'autorité et le contrôle des
principaux organes de l'UMAC2(*) à savoir la BEAC3(*) et la COBAC4(*). La BEAC est chargée principalement de
l'émission monétaire et depuis le 16 octobre 1990, elle a pour
mission prioritaire la stabilisation monétaire ; celle-ci passant
par le maintien de la parité de change par rapport à l'euro et un
contrôle rigoureux du taux d'inflation à l'intérieur de la
zone. La COBAC quant à elle a pour tâche principale
l'harmonisation des réglementations et le contrôle de
l'activité bancaire de la zone. Pour cela, elle censure les banques qui
évoluent en marge du système réglementé et est
garante des règles prudentielles mises en oeuvre depuis la
libéralisation financière des années 1970.
Le Cameroun est le pôle économique
de cette zone économique et bénéficie en
conséquence de près de la moitié de la masse
monétaire qui y est en circulation. Il bénéficie en outre
du système financier le plus étoffé. Celui-ci a beaucoup
évolué depuis les indépendances (Eze-Eze, 2001). En
réalité, le système financier camerounais est un vestige
de la colonisation. Il a subi de nombreuses modifications s'accordant avec les
exigences économiques et les objectifs de politique monétaire.
Toutefois, sa structure en elle-même n'a
pas beaucoup évoluée depuis les années 1960. On y retrouve
de manière générale trois compartiments : le premier
est constitué des banques commerciales dites de second rang.
Ce compartiment est dominé par les
banques multinationales françaises ; notamment SGBC, Crédit
Lyonnais et BICEC. Néanmoins on y retrouve quelques banques typiquement
camerounaises, en l'occurrence Afriland First Bank ou Amity Bank, et une
pléiade d'établissements de micro finance tels que First Trust,
Cofinest, CCA ou même Comeci pour ne citer que ceux-là.
Le second compartiment est formé
d'organismes spécialisés. Il s'agit principalement des caisses
d'épargne, du trésor public, des offices postaux et de quelques
entreprises de leasing et de « capital risk ». On peut
évoquer à juste titre dans cette catégorie les entreprises
telles que Socca Soccabail, Cenainvest ou même Africa Leasing Company.
Le dernier compartiment est celui des banques de
développement. Celui-ci a disparu avec l'avènement de la
libéralisation financière et la nouvelle orientation des
objectifs de politique monétaire pour laisser place au marché
financier ouvert sur la place de Douala depuis 2001. Toutefois celui-ci
n'étant pas encore opérationnel, il ne fera pas l'objet d'une
analyse dans notre travail.
L'objet de ce chapitre est d'établir une
corrélation entre l'évolution du système financier et
l'évolution de l'activité productive. Pour ce faire, nous
analyserons dans notre première section l'évolution de
l'économie de l'intermédiation financière telle que
vécue au Cameroun et dans une deuxième section, nous envisagerons
la pertinence de la corrélation entre les deux
phénomènes.
Section 1 : L'économie de
l'intermédiation financière au Cameroun : une analyse des
agrégats monétaires
La période post coloniale est
marquée par une vague de nationalisation des entreprises privées
et des banques commerciales en activité. Les taux
d'intérêts créditeur et débiteur sont
plafonnés et le réescompte spécial des effets des
entreprises publiques et parapubliques est instauré. Tout ce dispositif
est taxé par les tenants du libéralisme économique de
système financier répressif. Cependant avec l'avènement de
la globalisation des échanges internationaux et une
préférence pour la mobilité des capitaux de plus en plus
accrue, les systèmes financiers répressifs ont vite montré
leurs limites, et, les systèmes libéralisés se sont
imposés comme les meilleurs dans un tel contexte. Aussi, le 16 octobre
1990, le Cameroun et ses voisins de la CEMAC optent pour la
libéralisation de leur système financier ; ce qui implique
de facto une modification de l'objectif de politique monétaire qui
transite vers la stabilisation de la monnaie en circulation d'un point de vue
interne et externe (Atouts économiques, 2005).
L'objet de cette section est de procéder
à une analyse de l'approfondissement du système financier
camerounais. Aussi, notre première sous-section traite de
l'évolution des indicateurs de développement financier (A) tandis
que la deuxième sous-section envisage l'examen sommaire du réseau
bancaire au Cameroun (B).
A. L'analyse des indicateurs financiers au
Cameroun
Le développement du système
financier ou tout simplement développement financier peut être
perçu comme l'enrichissement et l'amélioration du système.
Autrement dit le développement financier prend en compte l'accroissement
en volume des transactions et services financiers et l'amélioration de
la qualité des produits et services fournis par le système
financier.
Ce concept est à différencier de
celui de l'approfondissement financier définit par Assidon (2004) comme
le renforcement d'un système financier peu développé et
éclaté ; lequel renforcement passe par un accroissement de
l'épargne intermédiée et une augmentation de l'offre des
fonds prêtables par les intermédiaires financiers. Ainsi
l'approfondissement financier ne traite que de la rentabilisation des fonds
investis par les institutions financières en général et
les établissements de crédit en particulier.
Le phénomène de
développement financier est cependant très difficile à
appréhender à l'aide de simples indicateurs, parce que ceux-ci
ne rendent pas compte de la qualité du système. Les indicateurs,
déjà très discutés, sont peu appropriés pour
traiter du concept d'approfondissement financier. Dans notre travail, nous les
utiliserons néanmoins pour mesurer le développement du
système financier camerounais. Mais auparavant nous envisagerons les
problèmes de mesure qui ont fait l'objet d'une grande
littérature.
Les problèmes de mesure du
développement financier
Le premier indicateur retenu est le taux de
liquidité de l'économie M2/PIB. La masse
monétaire au sens M2 prend en compte les encaisses
détenues par les agents qui ne sont pas comptabilisées par le
système bancaire et la monnaie adressée au système
bancaire. Cet indicateur a été construit par King et Levine
(1993, a). Dans le cadre d'un pays en développement comme le Cameroun,
cet indicateur n'est malheureusement pas satisfaisant dans la mesure où
une grande partie de la masse monétaire au sens M2 est
détenue sous forme d'encaisses par les agents en dehors du
système bancaire. Ce ratio mesure beaucoup plus en conséquence le
taux d'utilisation de la monnaie plutôt que le taux de bancarisation de
l'économie.
Pour palier à cette insuffisance,
l'indicateur quasi monnaie /PIB est proposé. Il est calculé
à partir du premier indicateur. Il suffit de retirer de M2
toute la monnaie fiduciaire en circulation dans l'économie pour trouver
un ratio qui mesure de façon effective l'incidence du
développement financier. On s'attend à ce que ce nouveau ratio
soit faible dans les pays en développement, matérialisant ainsi
la forte préférence pour la liquidité des agents
économiques.
Il faut toutefois noter que dans un pays comme
le Cameroun, la construction d'un tel indicateur peut poser problème. En
effet, les statistiques qui rentrent dans la composition de l'agrégat
quasi monnaie ne prennent pas en compte les flux financiers du secteur
informel. Aussi, les comptes d'épargne répertoriés par le
conseil national de crédit sont tous domiciliés dans les banques
et quelque fois dans les autres établissements financiers. C'est
à cet effet que Bekolo Ebe (1993) recommande dans le cas
spécifique du Cameroun de reconsidérer cette épargne dans
celle du système financier. Des efforts considérables de la part
des autorités de contrôle ont été faits dans ce sens
depuis lors. A nos jours, la plupart des associations d'épargne et de
crédit rotatifs logent leurs ressources financières dans des
comptes bancaires. On peut ainsi dire que les ressources du secteur informel
retrouvent le circuit formel.
Un autre indicateur est le ratio crédit
au secteur privé sur PIB. Il a été proposé par De
Gregorio et Guidodti (1993). Il a l'avantage de ne prendre en compte que les
performances du secteur privé mettant de côté les
dépenses gouvernementales. Ainsi, il capte mieux la relation entre
finance et investissement, et par conséquent permet d'établir une
relation entre développement financier et croissance
économique.
King et Levine (1993a) note que tout
système qui alloue une grande partie du crédit au secteur
privé est plus engagé dans le développement de
l'activité réelle ; ce type de système exerce par
conséquent un plus grand contrôle sur les projets financés,
investit beaucoup plus dans la gestion des risques, facilite les transactions
et mobilise davantage l'épargne que les systèmes qui accordent
des crédits au secteur public. Cependant dans les pays en
développement, et ceci avant la grande vague de libéralisation
financière imposée par les institutions de Bretton Woods, l'Etat
possède une part prépondérante des investissements ;
ce qui implique que pour cette période, notre indicateur est moins
pertinent que le ratio crédit bancaire/PIB.
D'autres indicateurs mis en relief dans
l'analyse de Levine (1997) ne sont pas pertinents une fois rapportés au
contexte africain. Il s'agit entre autres du crédit accordé par
les institutions non financières5(*) et du rapport entre le crédit accordé
par les banques secondaires et la somme des crédits accordés par
la banque centrale et les banques de second rang6(*).
Les indicateurs retenus dans nos travaux sont le
ratio de liquidité M2/PIB, le ratio crédit au secteur
privé/PIB et dans une moindre mesure le ratio quasi monnaie/PIB.
Toutefois il est crucial de noter que l'agrégat
« crédit au secteur privé » utilisé
par De Gregorio et Guidotti correspond dans leur source de données en
l'occurrence l' « International financial Statistics »
du FMI à la somme des crédits à l'économie, hors
crédits à l'administration centrale. Par conséquent, ce
ratio tient compte des crédits alloués aux entreprises publiques
et parapubliques (Joseph et al, 1998). Nous pouvons dès lors envisager
l'étude de l'évolution de ces différents indicateurs au
Cameroun.
L'analyse de l'évolution des indicateurs de
développement financier au Cameroun
La période post coloniale est
marquée par la bonne santé du secteur primaire camerounais et par
de nombreuses opportunités de croissance économique. Dans
l'objectif de sortir rapidement du groupe des pays en développement, le
gouvernement camerounais entreprend de financer sa croissance économique
par expansion monétaire. C'est dans la poursuite de cet objectif que le
seul rôle assigné aux institutions nouvellement mises en place est
la création monétaire (Atouts économiques, 2005).
Les soubassements théoriques d'une telle
politique sont qu'un accroissement de la masse monétaire a un effet
multiplicateur sur les revenus et donc sur la production. D'après
l'analyse keynésienne, le multiplicateur monétaire est
habituellement inférieur à l'unité ; ce qui implique
que la production domestique croît moins vite que la masse
monétaire. On pourrait par conséquent s'attendre à un
accroissement substantiel du taux de liquidité de l'économie
représenté par le ratio M2/PIB. Une évolution
positive de ce ratio caractérise l'approfondissement du système
financier.
L'étude de ce ratio dans le cadre de
l'économie camerounaise sur la période 1973 à 2000 (cf.
graphique 1.2) nous permet de dire que tout au long de son évolution, le
système financier s'est développé. On observe à cet
effet une constance du ratio de liquidité autour de 20% jusqu'en 1994.
Ceci se justifie à double titre. D'une part, l'accroissement de la masse
monétaire est fondé sur l'évolution du produit
intérieur comme nous suggère l'observation du graphique 1.1. En
dehors des années 1975 et 1979, la décennie1970 est
marquée par des taux de croissance de la masse monétaire et du
PIB positifs et évoluant de façon colinéaire. Ceci se
vérifie d'ailleurs jusqu'en 1989, date à partir de laquelle le
paradigme keynésien est remis en cause.
source : banque mondiale, 2002
Pendant les années 1975 et 1979, le
Cameroun enregistre un taux de croissance négatif dû à la
mauvaise conjoncture internationale. Les chocs pétroliers de 1973 et
1979 ont eu pour effet majeur dans les pays en développement non membres
de l'OPEP de détourner une grande partie de la demande des produits
primaires qui leur était adressée au profit des produits
pétroliers dont les prix se sont subitement multipliés.
Par ailleurs, la période 1973-1994 est
celle où prévaut le plafonnement des taux d'intérêt
et la gestion réglementée du système financier. Cette
période est taxée par les tenants des thèses
libérales de répression financière. On pourrait dire que
de manière générale, les réformes monétaires
mises en oeuvre depuis 1973 ont permis, dans un premier temps, une
amélioration de la qualité des services offerts par les banques
et une densification du réseau bancaire ; ce qui explique le
passage du ratio de liquidité de 15% à 20% que nous pouvons
observer dans le graphique 1.2 et, dans un second temps, la main mise de l'Etat
sur les principaux canaux de financement de l'économie a conduit
à une stagnation du ratio de
source : banque mondiale, 2002
liquidité à 20%. Le système bancaire
camerounais a cessé de s'étoffer au cours de la décennie
1980. C'est d'ailleurs pendant la même période qu'on observe la
fermeture de plusieurs banques commerciales, notamment les filiales
américaines de la Boston Bank ou de la Manhattan Bank ; et la
liquidation des principales banques de développement à savoir la
Banque Camerounaise de développement et le Crédit Agricole du
Cameroun.
La décennie 1990 est quant à elle
marquée par deux périodes essentielles comme nous montre le
graphique ci-dessus : la première est dite transitoire et la
seconde est celle de la libéralisation financière.
La décision de libéraliser le
système financier de la zone BEAC a été prise le 16
octobre 1990. Cette libéralisation a consisté à l'abandon
du plafonnement absolu des taux d'intérêts créditeur et
débiteur et des taux préférentiels appliqués aux
crédits publics. Ainsi avant la dévaluation, le taux de
croissance du PIB est négatif ; ceci a pour conséquence
immédiate un relèvement substantiel du ratio de liquidité
jusqu'en 1994. Passé cette période, le taux de croissance du PIB
redevient positif mais celui de la masse monétaire reste négatif
jusqu'en 1997, date qui marque la fin des restructurations bancaires. On note
en conséquence au cours de cette décennie une baisse
considérable du taux de liquidité qui passe désormais en
dessous du seuil de 15%.
Une autre analyse pertinente est celle de la
part du crédit au secteur privé dans la production domestique. Le
graphique 1.3 représente l'évolution de cet indicateur de
source : banque mondiale, 2002
développement financier. L'étude graphique nous
permet de distinguer trois périodes majeures qui représentent les
décennies 1970, 1980 et 1990.
Au cours de la première décennie,
on note un accroissement de la part des crédits dans la production
intérieure. Cette évolution est conforme avec l'objectif de
politique monétaire qui prévaut lors de la mise en place du
système. L'économie est essentiellement financée par le
crédit bancaire. Les plus grands bénéficiaires de ce
crédit sont les entreprises publiques et parapubliques. Elles sont les
plus nombreuses et sont à l'origine des grands projets d'investissement
et contribuent pour une grande part à la croissance de l'activité
productive. Pendant cette période, les entreprises débitrices
n'ont pas de réels problèmes pour le remboursement des fonds
prêtés.
Cependant, à partir de 1982, les
problèmes apparaissent dans le système financier camerounais.
L'Etat fait face à des services de la dette extérieure de plus en
plus élevés. Ce problème de non respect de
l'échéancier de dette est aggravé par ailleurs par la
chute des cours des matières premières observé dès
l'entrée dans la deuxième décennie. Les entreprises
exportatrices de produits de base ont ainsi des difficultés quant au
remboursement des crédits bancaires. Et dès 1983, on note une
rupture dans le processus de développement financier enclenché
depuis 1973. Le ratio crédit au secteur privé/PIB oscille
désormais autour de 25% et ceci malgré une légère
baisse du taux de croissance.
Ce taux de 25% est encore largement
supérieur au taux observé après la libéralisation
du système financier. A l'issue de la restructuration bancaire de 1997
cet indicateur descend en dessous du seuil de 10%. Cette chute brutale trouve
son explication dans le rationnement des crédits accordés aux
entreprises publiques et parapubliques qui ne jouissent pas d'une bonne
santé financière. La levée du contrôle absolu des
taux d'intérêt par les autorités monétaires permet
aux banques d'orienter les crédits essentiellement vers les entreprises
financièrement stables. Elles accordent désormais les
crédits sur la base des états financiers, et, leurs placements
sont couverts par des collatéraux.
Le renforcement des conditions de crédit
limite le volume des crédits alloués même si dans une
certaine mesure, il permet aux établissements financiers de se
prémunir contre les risques d'aléa moral et de « rush
bancaire ».
Pour éviter d'essuyer à nouveau
une crise systémique comme celle des années 1980, les organes
institutionnels mis en place mettent sur pieds de nouveaux mécanismes
qui épargnent aux banques les mauvais placements. C'est ainsi qu'une
consultation régulière de la centrale des risques évite
aux établissements de crédit de constituer des créances
à forte probabilité de compromission.
En résumé, pendant la
période de libéralisation financière les conditions de
crédit sont devenues plus rudes. L'exigence des garanties
élevées (en moyenne 150% du montant du crédit
demandé) et la méfiance des gestionnaires de portefeuille ont
conduit à une baisse considérable de la masse des crédits
accordés au secteur privé, et par conséquent à une
baisse de l'indicateur de développement financier.
En définitive, l'analyse des ratios du
développement financier retenus aboutit au résultat
suivant : au cours de la décennie 1970, le système financier
s'est plutôt développé ; mais à partir de 1982,
la conjoncture économique n'a pas permis que ce développement se
poursuive. La décennie 1980 est caractérisée par une grave
crise du système bancaire qui a suscité la mise en application
des politiques libérales. Seulement, la libéralisation
financière opérée depuis 1990 n'a pas eu tous les effets
escomptés et le système financier a évolué en marge
du développement de l'activité réelle. Il est judicieux de
noter que toutes les justifications que nous apportons sont propres aux
indicateurs d'approfondissement financier et qu'une analyse du système
proprement dit est nécessaire pour compléter l'examen du
développement financier. Pour ce faire, nous procéderons à
une étude sommaire du réseau bancaire depuis 1973.
B. L'examen sommaire du réseau bancaire
camerounais
Tout comme l'activité financière
s'est développée depuis les années 1970, le réseau
des banques camerounaises a connu de nombreuses modifications qui sont en
relation avec les différentes périodes de
prospérité économique et de crise systémique. Un
examen sommaire du réseau bancaire nous renseigne sur
l'amélioration de la collecte de l'épargne par les
intermédiaires financiers et sur la place accordée au
système bancaire dans l'activité économique. Aussi dans
cette sous-section nous envisagerons le processus de développement
financier à travers l'étude de l'étendu du réseau
bancaire sur la période allant de 1975 à 2004.
Le tableau 1.1 nous donne l'évolution du
nombre de banques et d'agences sur les périodes significatives depuis
les réformes du système en 1973.
Tableau 1.1 : Evolution du nombre de banques et
d'agences
Années
|
Nombre de banques
|
Pourcentage (%)
|
Nombre d'agences
|
Pourcentage (%)
|
1975
|
4
|
-
|
88
|
-
|
1980
|
11
|
175
|
143
|
62.5
|
1987
|
7
|
-36
|
116
|
-23
|
1992
|
11
|
57
|
84
|
-26
|
1996
|
8
|
-27
|
74
|
-12
|
1999
|
8
|
0
|
64
|
-13.5
|
2004
|
10
|
25
|
85
|
33
|
source : rapport du conseil national de
crédit
Du tableau 1.1, il ressort une progression de
175% du nombre de banques et de 62.5% du nombre d'agences entre 1975 et 1980.
Cette progression corrobore bien les résultats de notre première
sous-section. Ainsi, dans la décennie 1970, le système financier
camerounais s'est enrichi. Seulement à partir de 1982, le secteur
bancaire subit la conjoncture économique de telle sorte qu'en 1987 on
observe une chute drastique du nombre d'agences et de banques qui passent
respectivement de 11 à 7 et de 143 à 116. A l'issu de la
restructuration bancaire enclenchée dès le début des
années 1990, le nombre total des banques est porté à 8 et
le nombre d'agences à 64 en 1999.
L'assainissement du système financier
camerounais a conduit en 2004 à une expansion de réseau des
banques et à la naissance d'un tout nouveau type d'intermédiaires
financiers qui sont les établissements de micro finance. Elles occupent
désormais une place non moins importante dans le système en ce
sens qu'elles offrent des conditions de crédit moins rudes et offrent
des opportunités de placement à la hauteur de l'épargne
des petits ménages.
Tableau 1.2 : distribution géographique des
agences bancaires au Cameroun
Villes
|
1975
|
1983
|
1987
|
1994
|
1999
|
2004
|
Douala
|
17
|
27
|
47
|
9
|
8
|
15
|
Yaoundé
|
13
|
20
|
39
|
7
|
7
|
13
|
Bafoussam
|
5
|
7
|
10
|
6
|
6
|
8
|
Sous-total
|
35
|
54
|
96
|
22
|
21
|
36
|
Autres
|
43
|
113
|
90
|
56
|
43
|
49
|
Total
|
88
|
167
|
186
|
78
|
64
|
85
|
source : rapport du Conseil National du
crédit
Le tableau 1.2 nous montre comment le
réseau des principales banques a évolué sur le plan
géographique depuis la création de la BEAC. L'analyse de ce
tableau nous permet de dire que depuis sa mise en route le système
financier camerounais a connu une certaine dichotomie spatiale. On observe dans
les principales villes de Douala, Yaoundé et Bafoussam une concentration
et une densification du réseau bancaire. La capitale économique
bénéficie toujours du plus grand nombre d'agences bancaires.
Cette concentration a une raison d'être
économique : les banques cherchent à se rapprocher de la
clientèle. Les grandes villes étant réputées pour
leur surpopulation et leurs pôles industriels, les fonds prêtables
y sont par conséquent facilement mobilisables et les placements
financiers comparativement plus rentables.
En définitive, le développement de
l'activité bancaire au Cameroun a évolué en droite ligne
avec la politique de développement mise en oeuvre depuis les
indépendances. Une étude simultanée du taux de croissance
économique et du taux de croissance de l'activité
financière nous suggère de tabler sur l'existence d'une
corrélation entre les deux phénomènes. L'étude de
cette corrélation fait l'objet de notre deuxième section.
Section 2 : La corrélation entre le
développement financier et la croissance économique au
Cameroun
La plupart des études théoriques
menées sur le développement financier depuis Goldsmith (1969)
portent à croire que celui-ci constitue une variable déterminante
dans l'explication de la croissance économique.
Dans le cadre du Cameroun, très peu
d'études ont essayé de valider ou d'invalider cette assertion.
Une analyse graphique conjointe des deux phénomènes dans ce pays
nous permettra probablement d'émettre quelques hypothèses quant
à l'existence d'un lien de corrélation entre les deux types de
variables.
source : banque mondiale, 2002
Le graphique 1.4 nous montre qu'autour de la
crise du système bancaire camerounais de 1989, on observe une
décroissance du PIB par habitant. La question que suscite en nous cette
observation est celle de savoir si l'évolution de la croissance du
secteur réel a une incidence quelconque sur le système financier
ou plutôt existe-t-il une relation entre l'évolution de la
sphère financière et celle de la sphère
réelle ?
Cette section s'atèle à
répondre à ces questions qui sont toutes aussi essentielles que
la durée de la relation.
Ainsi, nous envisagerons dans notre
première sous-section la liaison entre les phases du cycle
économique et la fragilité du système financier en
général et du secteur bancaire en particulier. Notre seconde
section s'épandra sur l'existence d'une corrélation à long
terme entre les deux phénomènes.
A. Récession économique et
fragilité du système bancaire
A la suite des deux chocs pétroliers, les
pays en développement lourdement endettés voient leur service de
la dette extérieure augmenter de façon exponentielle en raison de
la mise en oeuvre de la nouvelle politique anti-inflationniste
américaine. La chute des cours des produits de base vient s'ajouter
à cette situation déjà déplorable pour un pays
comme le Cameroun. Le début des années 1980 est marqué par
une allocation totale des fruits de la croissance au remboursement du service
de la dette.
source : banque mondiale
Le graphique 1.5 illustre bien cette assertion.
Il nous montre que malgré un accroissement régulier du PIB, le
revenu national brut croît à taux décroissant ; les
fruits de la croissance ne sont pas redistribués aux populations.
Au cours de la même période, les
dépôts bancaires de l'Etat ont considérablement
diminué tandis que les crédits accordés à l'Etat
ont augmenté. Ceci pourrait laisser supposer qu'ils étaient eux
aussi utilisés pour le paiement du service de la dette qu'elle soit
extérieure ou intérieure.
source : BEAC
Le graphique 1.6 nous montre qu'à partir
de 1983, l'Etat réduit ses avoirs bancaires et augmente son endettement
intérieur et ceci jusqu'en 1987, date à laquelle le gouvernement
camerounais décrète de façon officielle la crise
économique. A cette date, L'Etat est asphyxié et n'arrive plus
à honorer ses engagements.
Le retrait des fonds publics et l'accumulation
des créances compromises déstabilisent le système
financier déjà très fragilisé par la fermeture de
quelques grandes banques commerciales et des petites banques
financièrement peu structurées qui survient quelques
années avant la crise systémique de 1989.
Cette crise est caractérisée par
une généralisation dans le système d'une mauvaise position
bilancielle bancaire. Ainsi sur les 7 banques encore en activité en
1989, seules les grandes multinationales à savoir SGBC, BIAO, BICIC et
SCB Crédit Lyonnais subissent des restructurations, toutes les autres
sont liquidées.
La crise du système bancaire est à
l'origine de la création de la SCR (Société Camerounaise
de Recouvrement) dont la mission principale est le recouvrement des
créances douteuses et dans une moindre mesure la liquidation des banques
en difficulté.
La crise du système bancaire qui survient
au lendemain de la récession économique démontre bien
combien le système financier camerounais est fragile et instable. Cette
instabilité se perçoit aussi bien à travers les effets
positifs et négatifs que peuvent avoir les chocs extérieurs sur
l'évolution des agrégats du développement financier.
Tout comme la crise économique influence
le système financier, les politiques libérales mises en oeuvre
à la suite de la dépression survenue dans le système
affectent son évolution. Le graphique 1.7 nous montre qu'au lendemain de
la libéralisation et surtout à l'issue de la restructuration, le
système financier camerounais s'est enrichi. Les dépôts et
les placements bancaires ont tous augmenté ; et ceci
conformément à une évolution positive du PIB (cf graphique
1.1).
source : BEAC
Au total, le système financier
camerounais évolue de façon colinéaire par rapport
à l'activité réelle. Il serait par conséquent
opportun de poser quelques hypothèses quant à l'existence d'une
corrélation entre les deux phénomènes.
B. La corrélation à long terme entre le
développement financier et la croissance économique au
Cameroun
L'étude que nous menons sur la
corrélation à long terme entre le développement de
l'activité financière et celui de l'activité productive
constitue une ébauche d'un travail plus élaboré sur le
sens de la causalité entre l'amélioration du système
financier et la croissance économique.
Aussi, dans cette deuxième sous-section,
nous nous intéresserons à la signgificativité des
différents coefficients de corrélation de la relation de long
terme Finance-croissance. Nous prendrons la peine de les calculer pour une
simple régression entre le taux de croissance du PIB par tête et
nos indicateurs de développement financier. Nous procéderons pour
ainsi dire à une estimation simple des modèles symétriques
qui prennent en compte les variables financières retenues plus haut.
y=1.27X-2.7
(0.543905)
R²=0.007725
source : banque mondiale et calculs de
l'auteur
Le graphique 1.8 nous montre que dans le long
terme, il est difficile d'appréhender la relation entre le
développement financier et la croissance économique à
partir de la droite de régression. Le coefficient de corrélation
calculé entre la croissance du PIB par habitant et le logarithme du
ratio crédit au secteur privé/PIB soit 1.27 n'est significatif ni
aux seuils de 5% et 10%, ni même au seuil statistique de 20%. En effet,
la valeur de la statistique de Student calculée (0.54) est
inférieure aux valeurs critiques respectivement égales à
1.96, 1.64 et 1.28.
Néanmoins, le signe positif de la
relation nous amène à penser que dans une étude plus
élaborée, l'accroissement de la part du crédit au secteur
privé dans l'économie contribue à l'amélioration de
la production du secteur réel.
De plus, la faiblesse de coefficient de
détermination (0.007) nous suggère déjà que le
modèle tel que spécifié ne saurait permettre une analyse
pertinente. Il est indispensable pour une estimation ultérieure de
considérer d'autres variables théoriquement significatives dans
notre modèle.
Parallèlement relation inverse entre la
part du crédit privé et la croissance du PIB par habitant n'est
non plus possible. Le coefficient de corrélation pour cette relation est
de 0.006 et la valeur calculée de la Statistique de Student qui lui est
associée reste la même.
y= -11.72X+ 31.66
(-2.842464)
R²= 0.175340
source : banque mondiale et calculs de
l'auteur
En revanche, le graphique 1.9 nous montre qu'il
est toujours possible à long terme de trouver une corrélation
entre le développement de l'activité financière et la
croissance économique à travers le ratio de liquidité. Le
coefficient de corrélation calculée pour cette relation est de
-11.72. Ce coefficient est significatif au seuil de 5%, car la valeur de la
statistique de Student qui lui est associée soit en valeur absolue 2.84
est supérieure à sa valeur critique au seuil de 5%. La relation
inverse elle aussi reste possible. D'après nos calculs, lorsque la masse
monétaire augmente de 1%, le taux de croissance du produit par
tête diminue de 0.015%.
Le signe négatif qui affecte cette
relation trouve une explication dans la formulation du taux de liquidité
de l'économie. En effet, le taux de liquidité de
l'économie est un rapport entre deux types d'agrégats : un
agrégat réel et un autre financier.
En général l'agrégat
monétaire soit M2 est utilisé par les autorités
étatiques comme instrument de politique économique. Aussi, le but
recherché est l'incidence de celui-ci sur le niveau de l'activité
réelle.
En théorie économique, les effets
sont souvent étudiés une fois que la
clause « cétéris paribus » est
évoquée. Autrement dit, les effets ne sont étudiés
que dans un environnement statique.
Ainsi l'incidence d'une évolution
positive du PIB sur le ratio de liquidité est étudiée sous
l'hypothèse forte « toute chose égale par
ailleurs ». Et, puis que cet agrégat se trouve au
dénominateur de notre ratio, ce dernier diminue lorsque le PIB
augmente.
Au total, l'évaluation du
développement financier mesuré par le ratio crédit au
secteur privé sur PIB n'est pas corrélée à la
croissance économique. Ce résultat empirique souffre quelque peu
de robustesse. Pour cette raison, cette analyse doit être
complétée par une étude plus approfondie sur la
causalité entre l'amélioration du système financier et le
développement de l'activité réelle dans notre
troisième chapitre. Cette étude nous permettra de vérifier
de façon statistique et empirique les résultats de nos
observations.
A l'inverse, le développement financier
mesuré par le taux de liquidité de l'économie est
négativement corrélé avec la croissance du produit par
tête. Il faut néanmoins noter que ce résultat est
donné « cétéris paribus ». En effet,
l'analyse de la corrélation n'intègre pas la
simultanéité de l'évolution des variables
considérées. Tout se passe comme si seul le PIB à
l'instant t se modifie. Son incidence est par la suite mesurée sur le
taux de liquidité et vice-versa.
Cependant dans la réalité la
plupart des phénomènes ne sont pas statiques. On observe a
contrario une évolution dynamique des phénomènes de telle
sorte que les résultats que nous trouvons sont a priori en contradiction
avec la réalité des faits. Pour cette raison, notre travail ne se
limitera pas à une analyse statique de la relation à
estimer ; il se consacrera davantage à l'étude dynamique de
la relation entre les deux phénomènes.
Conclusion
L'économie de l'intermédiation
financière de manière générale a beaucoup
évolué au cours du temps. A la suite de multiples chocs, on est
progressivement passé des systèmes répressifs aux
systèmes libéralisés. Ces chocs ont été
à l'origine de la remise en cause du paradigme fondamental
keynésien sur le contrôle et la surveillance étatique. Dans
les pays africains et en particulier au Cameroun, la mise en oeuvre d'un tel
paradigme a conduit à une forme plus exacerbée de
l'interventionnisme étatique qui a entraîné un
ralentissement du processus de développement financier enclenché
dans la décennie 1970.
La colinéarité des
phénomènes d'approfondissement financier et de croissance de
l'activité économique a donné une orientation
précise à notre analyse. L'existence d'une corrélation
possible entre les variables financières et les variables réelles
nous suggère de nous intéresser désormais au sens de la
causalité entre les deux phénomènes. Bien plus elle nous
exige d'identifier la nature de la relation causale ainsi que sa
durée.
Mais avant, il est crucial pour nous
d'établir le cadre théorique d'une telle relation en situant
notre travail dans un paradigme. L'analyse néoclassique de la croissance
nous semble la plus pertinente même si elle reste très normative.
Ainsi, la question à laquelle nous essaierons de répondre dans
notre deuxième chapitre porte sur la dualité de la dynamique
Finance-croissance.
Chapitre 2 : Les relations de court terme et de
long terme entre le développement financier et la croissance
économique : les fondements théoriques
Introduction
Le concept de croissance économique a
une origine très ancienne. Il remonte aux travaux précurseurs de
Rostow qui l'assimile au concept de développement économique.
Celui-ci est définit par les économistes contemporains comme une
amélioration de la qualité de vie des agents économiques
qui s'accompagne d'un accroissement de la production domestique.
Ce concept se distingue de celui de la
croissance économique parce qu'il prend en compte les aspects sociaux et
environnementaux qui relève beaucoup plus de la qualité de vie
que de l'accroissement de la production.
Ainsi, la croissance économique se
définit comme un accroissement progressif et constant de la production
globale sur une longue période.
Vu sous cet angle, on pourrait croire qu'une
économie peut croître de façon infinie. Les modèles
traditionnels de croissance ne sont pas en accord avec cette manière de
penser. Partant de l'hypothèse fondamentale de rendements
d'échelles décroissants, ces modèles montrent qu'il existe
toujours et ceci pour toute économie un point où la production ne
peut plus croître.
A l'inverse, les modèles de croissance
endogènes garantissent une croissance économique auto-entretenue,
redue possible avec l'avancée technologique. La prise en compte du
progrès technologique comme variable endogène remet en question
l'hypothèse des rendements décroissants qui cède
désormais la place à celle des rendements croissants ou
constants.
L'incidence du système financier sur la
croissance économique n'est mise en évidence qu'avec les travaux
pionniers de Goldsmith (1969) qui identifie une colinéarité entre
le développement de la sphère financière et celui de la
sphère réelle. Partant du constat sur un panel de 35 pays, que
les périodes de croissance rapide sont généralement
accompagnées d'un accroissement du taux moyen de développement
financier, Goldsmith démontre qu'il existe une relation positive entre
le développement financier et la croissance économique.
La plupart des développements
théoriques faisant suite aux travaux de Goldsmith ont tenté
d'identifier les canaux de transmission à court terme et à long
terme du développement financier vers la croissance.
Les principaux canaux mis en exergue par Levine
(1997) par exemple sont l'accroissement du stock de capital qui passe par une
efficience dans la collecte de l'épargne et l'allocation des ressources
disponibles par les intermédiaires financiers et l'amélioration
du progrès technologique.
L'objet de ce chapitre est d'établir les
relations directes et indirectes à court terme et à long terme
entre le développement de la sphère financière et celui de
la sphère réelle.
Pour ce faire, nous utiliserons les
modèles de croissance traditionnels de type néoclassique, en
particulier celui de Solow et Swan (1956) et les modèles de croissance
endogène, notamment le modèle AK de Romer (1986).
Ces deux types de modèle se distinguent
par leur manière de considérer le progrès technologique.
Alors que le premier le considère comme exogène, le second le
prend en compte comme variable endogène de la fonction de production.
Notre chapitre sera ainsi réparti en deux
sections. La première analysera la dynamique de courte période
mise en exergue dans le modèle de Solow (section 1), et la seconde fera
le tour de la dynamique de longue période qui ne trouve sa raison
d'être que dans le cadre d'analyse des modèles de croissance
endogène (section 2).
Section 1 : La dynamique de courte période
entre le développement financier et la croissance
Les modèles de croissance traditionnels
fondé sur le paradigme néoclassique se sont
développés en marge des réalités africaines qui
sont : un environnement imparfait et une viscosité des prix. Mais
ces modèles constituent un repère pour la détermination
des facteurs explicatifs de la croissance de manière
générale.
Le modèle de Solow et Swan sans
progrès technique essaie de déterminer la croissance
d'état stationnaire ou mieux celle qu'il faut maintenir pour garantir
l'équilibre sur le marché réel.
L'analyse du rôle de la finance est
résiduelle dans ce modèle néoclassique car toute
l'attention est portée aux effets de l'accumulation du capital sur le
niveau de la production d'équilibre. L'objet de cette section tient
alors à un examen approfondi du modèle de Solow et Swan (1956)
sans progrès technique et à la détection des effets
indirects du développement financier sur la croissance de la production
par tête.
Autrement dit cette partie essaie de
répondre aux questions suivantes : quels sont les différents
enseignements que nous pouvons tirer du modèle de Solow (A) et quels en
sont les limites une fois rapporté au contexte spécifique
camerounais (B).
A. Les enseignements du modèle de croissance de
Solow et Swan (1956)
Le modèle de Solow peut être
considéré comme modèle de base de l'analyse
néoclassique de la croissance économique. Il peut être
traité comme tout modèle d'équilibre du marché des
biens et services ayant une composante offre et une composante demande.
v La fonction d'offre dans le modèle de
Solow
Dans ce modèle, la production globale
dépend des facteurs capital et travail. La fonction de production
agrégée est caractérisée par des rendements
d'échelle constant. L'hypothèse de constance des rendements
d'échelle permet de ne pas tenir compte de la taille de
l'économie, car elle n'affecte pas la relation entre la production par
tête et le capital par tête (Mankiw, 2001).
La production par tête dépend de
façon positive du capital par tête et il est important de noter
qu'il n'existe aucune relation linéaire entre ces deux variables (De
Haas, 2001). La fonction d'offre prend la forme suivante :
Y=f (K, L)
(1)
La fonction de production par tête est donnée
par :
y=f (k)
(2)
avec k= K/L et y= Y/L
La production par tête est
caractérisée par une productivité marginale
décroissante du capital par tête qui assure la concavité de
la fonction de production par tête. Ceci suppose que l'accroissement
(marginal) de la productivité par tête diminue plus vite que
l'accroissement du capital par tête.
v La fonction de demande globale
Pour Solow, la fonction de demande des biens et
services peut être décomposée en deux sous fonctions
à agréger : une fonction de demande des biens de
consommation C et une fonction de demande des biens d'investissement I. La
fonction de demande agrégée prend donc la forme :
Y= C+I
(3)
Et la fonction de demande par tête ou par unité
de travail est donnée par
y= c+i
(4)
avec c= C/L et i= I/L
Solow fait l'hypothèse que la fonction de consommation
a la forme linéaire suivante :
c= (1-s)y où s représente le taux
d'épargne
v L'équilibre sur le marché des
biens et services
L'équilibre sur le marché des
biens et services est donné par
y= (1-s)y +i
(5)
Ce qui implique que l'investissement par travailleur prend la
forme
i= sy
(6)
De (6), il ressort que l'épargne qui
n'est qu'une fraction du revenu est entièrement affectée à
l'investissement.
Un volume de capital par tête
élevé induit par conséquent des niveaux de production et
d'investissement par unité de travail élevés.
Il est cependant important de noter que le stock
de capital se déprécie avec le temps pour une fraction ä et
que cette fraction tout comme l'investissement affectent le niveau du stock de
capital et de la production par travailleur.
Au total, la variation du stock de capital par
tête est donnée par l'équation
Äk= sf(k)- äk
(7)
L'équation (7) est dite équation
fondamentale du modèle de Solow car c'est elle qui détermine le
taux de croissance du capital par tête et donc de la production par
travailleur qui garantit l'équilibre de la sphère réelle.
Solow montre qu'il n'existe qu'un seul stock de
capital k* qui équilibre investissement et amortissement. Ce stock k*
est dit stock d'état stationnaire.
A l'état stationnaire, le stock de
capital optimal est tel que l'épargne est égale à la
dépréciation du capital et par conséquent, l'accroissement
net du capital par tête est nul.
Comme la croissance économique est
essentiellement liée à l'accroissement du capital par tête
et que celui-ci est nul à long terme, l'état stationnaire est
unique et toutes les politiques visant à accroître le stock de
capital ne sauraient avoir que des effets
éphémères7(*).
Les canaux de transmission de court terme entre le
développement financier et la croissance économique.
De l'analyse précédente, il
ressort qu'aucune variable n'a d'incidence à long terme sur
l'état stationnaire de l'économie. Cependant et ce
conformément aux travaux de Solow et Swan (1956) il est possible
d'observer à court terme un accroissement périodique du stock de
capital par tête.
En effet la convergence conditionnelle centre
l'analyse autour de l'évolution du taux d'épargne. A court terme,
le développement de l'intermédiation financière agit sur
le niveau de l'épargne qui reste supérieur à la
dépréciation du capital comme l'indique la figure
ci-après :
k0
k*
épargne par tête= sf (k)
« dilution par tête »+
épargne par tête= (n+ä)k
capital par tête
épargne par tête
« dilution par tête »
source : Aghion, 2000, p17
Figure 2.1 : L'état stationnaire dans le
modèle de Solow
Les intermédiaires financiers agissent
sur le taux d'épargne des ménages via la gamme de produits
financiers qu'ils mettent à leur disposition. Ainsi
l'amélioration de la qualité des services bancaires participe
pour une grande part dans la collecte de l'épargne des agents. Cette
épargne qui dans la plupart des cas est liquide est par la suite
transformée en « ressources longues »
destinées au financement des investissements par ces mêmes
intermédiaires financiers. Diamond et Dybvig 8(*)(1983) à travers un
modèle d'intermédiation en présence d'asymétrie
informationnelle nous montrent comment les banques assurent la liquidité
des fonds des déposants qu'ils transforment en capitaux.
De surcroît, les intermédiaires, en
garantissant une rémunération adéquate des
dépôts, permettent le retour à une épargne
intermédiée détournée par la répression
subite par les banques.
A cet effet, Mckinnon et Shaw (1973)
recommandent vivement une libéralisation des systèmes
réprimés qui aboutit non seulement à une meilleure
allocation des ressources mais aussi à un accroissement des
investissements productifs.
Une telle libéralisation améliore
le niveau de l'activité, mais comme le stipulent les modèles
traditionnels de croissance, cette amélioration est
éphémère ne concerne que le court terme et n'est possible
que lorsque le marché de l'intermédiation bancaire est
parfait.
Cependant la réalité
économique en est toute autre. Les marchés sont essentiellement
imparfaits. La raison d'exister des intermédiaires financiers
démontre à elle seule à quel point l'asymétrie de
l'information rend difficile la réalisation de l'équilibre
concurrentiel.
A cette première imperfection nous
pouvons ajouter l'existence des barrières à l'entrée sur
le marché bancaire. En effet, les lois et la réglementation en
vigueur dans les pays constituent une barrière réglementaire de
fait à l'entrée de nouveaux établissements dans le
secteur.
Toutes ces imperfections sont incompatibles avec
le modèle que nous venons d'étudier et oriente la suite de notre
travail vers l'analyse des limites du modèle de Solow.
B. Les limites du modèle de Solow et
Swan
Le modèle de Solow et Swan est une
tentative d'explication des déterminants de la croissance d'état
stationnaire. Il nous donne non seulement le niveau de la croissance
d'état régulier, mais il nous permet en outre de comprendre les
différences du niveau de développement entre les pays.
A l'épreuve des faits, le modèle
de Solow et Swan présente des limites qui sont plus liées aux
hypothèses fortes sur lesquelles il se fonde qu'à l'explication
même qu'il nous donne de la croissance.
Nous envisagerons les limites de ce
modèle en deux sous-sections : la première concernera la
remise en cause du paradigme néoclassique de l'efficience, qu'elle soit
en liaison avec le marché ou technique ; tandis que la seconde
soulève la question de l'analyse en autarcie qui n'intègre pas
les chocs extérieurs et de la viscosité des prix.
B.1. La remise en cause du paradigme néoclassique de
l'efficience
La structuration néoclassique du
modèle de croissance de Solow et Swan fonde toute l'analyse sur la toute
puissance du marché. Le paradigme néoclassique émet
l'hypothèse d'efficience forte du marché des capitaux et des
actifs financiers au sens de Fama (1973).
Cette hypothèse fondamentale implique que
les prix déterminés sur ce marché en particulier et sur
tous les autres marchés en général tient compte de toutes
les anticipations possibles des agents de telle sorte qu'aucune force
extérieure ne saurait perturber l'équilibre à long terme.
Les distorsions observées sur les marchés ne pourraient
être que périodiques, ayant des effets
éphémères. Pour cette raison, l'équilibre
trouvé est unique, optimal et stable.
Ainsi, selon Solow, l'équilibre de toute
l'économie est assuré par la seule relation entre
l'investissement et l'épargne matérialisée par
l'équation (6). L'interprétation que nous donnent les auteurs de
cette équation est simple : à l'équilibre,
l'investissement désiré est toujours égal à
l'épargne désirée. Autrement dit, une fois toute
l'épargne constituée, elle est affectée dans son
intégralité au financement des investissements.
Cependant la prise en compte des contraintes
d'intermédiation bancaire vient invalider cette égalité
qui est pourtant le point de départ de l'explication de la croissance
d'état stationnaire. L'équilibre sur le marché des
capitaux est sous optimal. Il est en effet rare sinon impossible d'affecter
toute l'épargne qu'elle soit intermédiée ou non au
financement de projets d'investissement.
Pour des besoins de liquidité, les
banques ont l'obligation de constituer des réserves pour faire face aux
retraits de déposants. L'épargne non intermédiée
est celle que les ménages constituent par devers eux pour des motifs de
spéculation et de précaution. Seule l'épargne
spéculative sert au financement de l'économie.
En conséquence, l'équilibre
réel de l'économie est sous optimal et la seule manière de
reconsidérer un équilibre optimal est d'ajouter dans le
modèle de croissance de Solow une contrainte qui matérialise la
perte d'épargne due à l'intermédiation financière
ou qui représente l'épargne de précaution
constituée par les agents économiques. Cette contrainte a
été rajoutée par Pagano (1993) dans le cadre des
modèles de croissance endogène que nous étudierons dans la
deuxième section de ce chapitre.
Par ailleurs, les systèmes financiers des
pays d'Afrique sub-saharienne sont réputés pour leur dualisme
(Besley & al, 1990) qui constitue une limite apparente de l'efficience du
marché. En effet, d'après la définition de l'efficience
forte de Fama (1973), il ne saurait exister qu'un seul marché de
capitaux qui satisfasse tous les intervenants ; les prix
déterminés sur ce marché sont tels qu'aucun acteur ne peut
les modifier.
Autrement dit, si le modèle de Solow et
Swan constitue une analyse néoclassique de l'équilibre
général, il n'intègre pas une possible coexistence entre
le marché formel de l'intermédiation bancaire et le marché
souterrain de capitaux.
A côté de l'efficience du
marché, plusieurs auteurs notamment Mankiw, Romer et Weil (1992)
émettent des réserves quant au niveau d'efficience technique que
les pays sont supposés initialement avoir. D'après le
modèle de Solow, ce niveau d'efficience technique est indépendant
des variables explicatives, ce qui implique qu'il est exogène et
inobservable. Cette variable non moins importante est par conséquent
absente des régressions ; les résultats obtenus ont de
bonnes chances d'être faussés.
De plus, toute l'analyse néoclassique est
basée sur l'hypothèse forte de marchés parfaits et
d'équilibre de plein emploi. Cette hypothèse ne tient que dans le
cadre très précis de l'analyse normative de l'économie. Il
est en effet très difficile sinon impossible de trouver dans la
réalité un marché qui respecte les cinq conditions d'un
marché de concurrence pure et parfaite. Même s'il est possible
d'observer dans la réalité l'atomicité du marché,
la parfaite mobilité des facteurs de production, la libre entrée
et sortie dans le secteur , la transparence du marché et
l'homogénéité des produits (Guerrien, 1991) sont des
critères irréalistes.
La réalité du marché est
telle que les leaders dans l'activité constituent des barrières
à l'entrée de telle sorte que pour tout nouveau postulant, les
coûts d'entrée sont supérieurs à l'espérance
de gain ; ce qui décourage les nouveaux entrants.
La mobilité de facteurs de production
quant à elle peut être entravée par des facteurs
géographiques, ethniques et même culturels.
La différenciation des produits est
devenue la règle d'or dans un contexte où la marque à elle
seule est une garantie de qualité. A ce niveau de l'analyse il est clair
que l'hypothèse forte de perfection des marchés ne permet pas une
analyse positive des déterminants de la croissance économique.
L'asymétrie de l'information est au coeur
du débat sur le rôle de l'intermédiation financière
dans le financement de l'économie. D'après Levine (1997), la
raison d'être des intermédiaires financiers est la
réduction des coûts d'acquisition de l'information et des
coûts de transaction dans un environnement où les risques
liés à l'incertitude sont élevés. Les
intermédiaires financiers en assurant la liquidité des
déposants et en exerçant un contrôle rigoureux envers les
dirigeants réduisent considérablement les risques
d'antisélection et d'aléa moral. Pour ce faire, ils disposent
d'un arsenal de mesures leur garantissant le remboursement des fonds
prêtés ; il s'agit principalement des collatéraux, des
relations de long terme entre la banque et sa clientèle (Scialom,
2001).
L'asymétrie de l'information est moins
perceptible dans un environnement où l'intermédiation
financière est suffisamment développée que dans un
contexte où les systèmes financiers sont peu
développés et très éclatés, notamment en
Afrique subsaharienne. Ces économies sont réputées pour
leur extrême vulnérabilité aux chocs extérieurs.
B.2. La viscosité des prix et l'analyse en
autarcie
Le modèle de croissance de Solow et Swan
raisonne en économie fermée. L'équation de demande des
biens et services de ce modèle n'admet pas de composante qui
matérialise les relations avec l'extérieur.
Ceci est une limite de ce modèle dans la
mesure où de nos jours l'économie se mondialise progressivement,
contraignant ainsi les pays à échanger entre eux, ou à se
constituer en blocs économiques en vue d'améliorer leur
compétitivité sur le plan international. Dans un tel de
globalisation des échanges d'imbrication et d'interdépendance des
systèmes financiers, le modèle de Solow devient
inopérant.
Rappelons d'ailleurs que les chocs
extérieurs sont susceptibles de perturber les grands équilibres
macroéconomiques et de rendre inopérantes les politiques
économiques décidées dans un cadre autarcique.
L'histoire économique nous enseigne que
certaines crises financières ont eu des effets symétriques dans
les pays où ont débuté la crise et dans les pays en
relation avec les premiers. On peut citer à titre d'exemple la crise
asiatique de 1997 et la crise mexicaine du début des années
1980.
Aussi, la non prise en compte du secteur
extérieur exclut d'office l'incidence de ces phénomènes
qui sont pourtant une explication aux modifications des grands
équilibres monétaires et réels.
A cela s'ajoute la viscosité des prix sur
les marchés. Le paradigme néoclassique admet que l'ajustement
entre l'offre et la demande se fait par les prix ; ce qui suppose une
parfaite flexibilité de ceux-ci et ce quelque soit le marché.
On observe en effet des rigidités sur le
marché de crédit. Alors que la demande de crédit
évolue inversement par rapport au taux d'intérêt, l'offre
de crédit est rationnée par les intermédiaires financiers.
Ces derniers évoquent comme raison de ce
rationnement la structure des dépôts qui sont à
majorité constitués de dépôts à cour terme.
Ces capitaux sont très mobiles et ne facilitent pas le financement des
projets longs.
Une autre raison évoquée par les
banques qui rationnent le crédit est la présence dans
l'environnement économique des risques idiosyncrasiques et des risques
d'asymétrie informationnelle.
Dans le cas particulier du Cameroun, ces risques
sont très élevés en raison de la
vulnérabilité du pays aux chocs extérieurs. Il faut dire
que le Cameroun tire ses réserves en devises essentiellement de la
commercialisation des produits de base dont les cours subissent des mouvements
spéculatifs sur le marché international des matières
premières.
En définitive, le modèle de Solow
élabore le cadre théorique d'une croissance constante vers le
niveau d'état régulier de la production globale. Mais une fois
confronté à la réalité des faits, les
hypothèses fortes de base sur lequel il se fonde constituent un
véritable blocus pour l'analyse des fluctuations économiques.
Les modèles de croissance traditionnels
nous enseignent qu'à court terme le seul canal de transmission du
système financier vers la croissance économique est le taux
d'épargne. A long terme les seules variables susceptibles d'influer sur
le niveau de l'activité sont le taux de croissance de la population et
le progrès technique.
Cependant l'avancée technologique reste
dans ce modèle un facteur exogène et aucun acteur
économique ne peut structurellement modifier son niveau.
Cette manière de penser a
été remise en cause par les pères fondateurs des
modèles de croissance endogène (Schumpeter, 1911 ; Romer,
1986). Le modèle schumpetérien de base introduit comme variable
endogène les innovations technologiques comme facteur explicatif de la
croissance soutenue.
Les intermédiaires financiers ont la
possibilité d'investir da ns le domaine de la recherche et le
développement (R&D). Les innovations générées
assurent la continuité de la croissance de la production globale de
telle sorte que l'état régulier à la Solow ne
définit plus l'équilibre de l'économie.
Les modèles de croissance endogène
changent pour ainsi dire toute l'analyse néoclassique de la croissance.
Il suppose même a contrario qu'il est toujours possible d'envisager une
relation à long terme entre le développement de l'activité
financière et celui de l'activité réelle.
Section 2 : La dynamique de longue période
entre le développement financier et la croissance économique
L'étude de la dynamique de longue
période entre le développement financier et la croissance
économique se prêtre mieux à l'utilisation des
modèles de croissance endogène selon De Haas (2003).
Le modèle retenu à cet effet par
Pagano (1993), Levine (1991,1997) est le modèle AK de Romer (1986).
D'autres auteurs à l'instar de
Berthélémy et Varoudakis (1993) utilisent un modèle
à générations imbriquées pour établir une
relation positive à long terme entre le développement financier
et la croissance économique.
Mais ce type de modèle ne prête pas
facilement aux calculs économétriques ; d'où notre
préférence pour le modèle AK.
L'objet de cette section est de faire ressortir
à partir du modèle de croissance endogène choisi la
dynamique de long terme entre le développement de
l'intermédiation financière et la croissance de l'activité
économique en mettant en exergue les principaux canaux de
transmission.
Aussi, notre section sera divisée en deux
sous-sections. La première sous-section fait le tour sur la
présentation du modèle AK tel que envisagée par Pagano et
la deuxième analyse les différents canaux de transmission
à long terme entre le développement financier et la croissance
économique d'après le schéma proposé par Levine
(1997).
A. La présentation du modèle AK de Romer
(1986) relu par Pagano (1993)
Les travaux pionniers de Goldsmith (1969) sur
l'importance du système financier dans le financement de
l'économie nous amènent à inférer que celui-ci agit
de façon positive sur la croissance à long terme.
L'analyse menée par King et Levine (1993
a et b) conforte cette assertion tout comme l'étude menée par
Pagano (1993). Ce dernier auteur s'inspire du modèle de croissance
endogène AK de Romer pour établir à long terme la relation
entre finance et croissance, et tout comme Levine (1997), il met en
évidence les principaux canaux de transmission de longue période.
Le modèle développé par
Pagano peut être reproduit comme suit :
Figure 2.2 : Intermédiation financière
dans les modèles de croissance endogène
Y=AK
I=ösAK
?K
äK
K
äK
Y
I
ã
source : Pagano, 1993
â
L'analyse du modèle nous permet
d'émettre quelques hypothèses dites de base. La première
est que la fonction de production est linéaire :
Yt= AKt
(7)
Ceci signifie que la productivité
marginale n'est pas décroissante. Cette structuration est telle qu'une
augmentation du stock de capital améliore de façon continue le
revenu national grâce au facteur d'échelle A, qui incorpore le
progrès technologique.
La seconde hypothèse nous permet
d'obtenir l'équation de l'investissement net :
?Kt= Kt+1 - Kt =
It - äKt
(8)
On peut tirer de cette équation
It = Kt+1 - (1-ä) Kt
(9)
Pagano (1993) suppose qu'une partie de
l'épargne nationale (1- ö) est perdue dans le processus
d'intermédiation financière ; ce qui implique que
l'équilibre du secteur réel s'établit au point
It = öSt avec St =
sYt
(10)
Les intermédiaires financiers utilisent
un pourcentage de chaque unité monétaire de l'épargne pour
exécuter la procédure d'intermédiation ; de cette
façon, il y a moins d'épargne pour le financement des
investissements.
En pratique, cette fuite est exprimée
comme un écart entre les taux d'intérêt débiteur et
créditeur ou bien comme coût de certaines commissions.
Dépendante de la férocité
de la concurrence sur le marché bancaire, cette fuite peut être
perçue comme une forme d'inefficience X.
L'importance de l'introduction de la perte d'un
montant de l'épargne réside dans le fait que si la
procédure d'intermédiation est menée de façon
efficiente, l'épargne augmente, générant ainsi un
accroissement des investissements, une amélioration quantitative et
qualitative du stock de capital et donc une croissance économique
entretenue.
Fry (1995) essaye de déterminer pour les
intermédiaires financiers l'efficience optimale en recherchant
l'écart minimal entre les taux d'intérêt sur le
marché. Il aboutit à la conclusion que la minimisation du spread
des taux d'intérêt passe par une concurrence accrue entre les
intermédiaires financiers. La combinaison des équations (7), (8)
et (10), nous permet d'obtenir l'équation (11) :
?Kt= ös (AKt) - äKt
(11)
Cette équation nous montre que
l'investissement net est égal à l'investissement brut moins la
dépréciation du capital ; et parce qu'il n'y a pas de
rendements décroissants, la croissance continue est possible tant que
l'investissement net est positif. L'état régulier est
matérialisé par le taux de croissance du capital. Autrement
dit :
g= (Kt+1/Kt) -1
(12)
en introduisant l'équation de l'investissement (9),
nous obtenons le résultat suivant
g= (It/Kt)-ä
(13)
l'équation (10) nous permet d'écrire
g= (ösYt/Kt)- ä
(14)
Finalement, l'état stationnaire de
l'économie est matérialisé par l'équation (15)
g = Aös - ä
(15)
et alternativement par la différence entre les angles
â et ã dans la figure 2.2. Il ressort de ce modèle
qu'à long terme l'intermédiation financière peut avoir une
influence positive sur la croissance économique par trois canaux
à savoir : le taux d'épargne, le développement
technologique et la part de l'épargne consacrée au financement de
l'économie.
B. Les canaux de transmission à long terme du
développement financier vers la croissance économique
L'analyse de Levine (1997) de l'incidence du
développement financier sur la croissance à long terme
s'intéresse particulièrement aux fonctions des
intermédiaires financiers. Levine démontre que les
intermédiaires agissent sur la croissance économique par les
canaux suivants : accumulation du capital et avancée technologique.
Ainsi, la relation entre le développement du système financier et
la croissance économique peut être analysée à partir
du graphique ci-après (cf figure 2.3).
Les intermédiaires financiers, en
remplissant parfaitement leur rôle dans la réduction des
asymétries d'information et dans l'assurance de la liquidité des
dépôts, peuvent drainer une épargne suffisante pour le
financement de l'activité économique. Ceci est d'autant possible
à long terme que l'augmentation du stock du capital est permise par les
avancées technologiques.
En effet, si une partie des crédits est
allouée aux chercheurs, il s'en suit dans ce secteur une augmentation de
la production et par conséquent une amélioration des techniques
de production et de la qualité des biens et services.
A cet égard, Bencivenga et Smith (1991)
s'inspirant des travaux de Diamond et Dybvig distinguent deux grandes
étapes dans la transmission du développement financier vers la
croissance de l'économie. Dans une première phase, les
intermédiaires financiers participent activement à la
création de procédés nouveaux de fabrication et la
production de machines plus performantes en finançant la recherche. Les
banques peuvent être des actionnaires ou tout simplement des pourvoyeurs
de fonds dans ce cas.
Dans une seconde phase, toutes les innovations
créées servent à accroître la production globale
mais aussi à améliorer la qualité des produits mis
à la disposition de l'économie. Il devient clair que si les
progrès technologiques sont fréquents, la croissance
économique qui en résulte est continue sur le long terme.
source : Levine, 1997.
Marchés financiers et intermédiaires
Les coûts du marché
§ Coûts de l'information
§ Coûts de transaction
Fonctions financières
§ Mobilisation de l'épargne
§ Allocation des ressources
§ Monitoring des dirigeants
§ Facilitation de la gestion des risques
§ Facilitation des transactions et de la mise en oeuvre
des contrats
Canaux vers la croissance
§ Accumulation du capital
§ Innovations technologiques
Croissance économique
Figure 2.3 : Une approche théorique de la
finance et de la croissance
Par ailleurs, comme l'a souligné Fry
(1995), la part de l'épargne disponible pour le financement de
l'économie joue un rôle non moins important que les deux canaux
cités plus haut.
En effet, une manière de jouer sur le
niveau de l'activité réelle est de réduire au minimum la
perte d'épargne subséquente au rôle d'intermédiation
assuré par les banques. Cette perte est matérialisée par
la différence entre le taux d'intérêt débiteur et le
taux d'intérêt créditeur encore appelé spread de
taux d'intérêt.
La concurrence entre les banques et avec les
autres intermédiaires non bancaires tend à réduire ce
spread, laissant une plus grande part de l'épargne pour le financement
des projets productifs.
En somme, la structuration endogène de la
croissance nous renseigne sur la dynamique de long terme entre le
développement de la sphère financière et celui de la
sphère réelle. Les auteurs sus-cités montrent que le
développement de l'intermédiation financière en
général et en particulier celui de l'intermédiation
bancaire a une incidence avérée sur le niveau du
développement technologique et sur le niveau de l'épargne, socles
de l'activité réelle.
Toutefois cette formulation du modèle AK
n'est pas appropriée pour l'estimation économétrique qui
impose une forme linéaire par rapport à tous les arguments de la
fonction de production. La forme la plus courante de la fonction de production
utilisée pour l'estimation économétrique est la forme
loglinéaire que nous envisagerons de développer dans notre
troisième chapitre.
Conclusion
Contrairement aux modèles de croissance
traditionnels, les modèles de croissance endogène
étudiés dans ce chapitre nous donnent des arguments pour discuter
de l'importance de l'intermédiation financière et nous expliquent
comment les banques et les autres intermédiaires financent le
développement socio-économique.
Les systèmes financiers quels qu'ils
soient, remplissent la fonction principale de transformation de
l'épargne des ménages en actifs illiques conformément au
modèle de Diamond et Dybvig.
Ils peuvent accroître le volume de fonds
prêtables de plusieurs manières : en assurant la
liquidité des actifs détenus par les déposants, en
réduisant les risques liés à l'asymétrie de
l'information et les risques idiosyncrasiques.
Ils détiennent ainsi un volume important
de fonds qu'ils peuvent mettre à la disposition des investisseurs
rigoureux. Un contrôle régulier des dirigeants et une
participation dans les investissements obligent les intermédiaires
à allouer de façon efficiente les ressources disponibles.
Les cas de gaspillages de ressources sont par
conséquent évités et il s'en suit à long terme un
accroissement de la production globale subséquente à
l'augmentation des investissements rentables.
Toute cette dynamique est rendue possible avec
l'innovation technologique qui remet en question l'hypothèse des
rendements décroissants qui fonde toute l'analyse traditionnelle de la
croissance.
Chapitre 3 : Développement financier et
croissance économique au Cameroun : la modélisation
économétrique
Introduction
Les études empiriques portant sur la
relation entre développement financier et croissance menées par
King et Levine ont contribué à la détermination des
leviers de la croissance de l'activité économique. Une revue de
littérature spécifiquement empirique fait état d'un nombre
considérable des méthodes d'analyse dont les plus récentes
sont économétriques.
Les outils économétriques ont
l'avantage de rendre les modèles de croissance moins complexes lorsque
l'étude porte sur un ensemble de pays à travers la
méthode des panels ; d'apporter une plus grande précision de
résultats à l'aide de pléthore de tests statistiques
requis ; et enfin, de permettre des prévisions à partir de
l'histoire des processus et des chocs grâce à
l'économétrie des séries temporelles.
Dans ce chapitre nous retiendrons comme
modèle de croissance le modèle AK de Romer avec progrès
technique endogène.
Les modifications qui y sont apportées
nous permettront de mettre en exergue la dualité de la relation entre le
développement du secteur financier et la croissance économique
d'un point de vue économétrique.
Ainsi notre première section se
consacrera à la présentation et à la spécification
du modèle économétrique et des variables
financières et réelles (section 1) ; tandis que la seconde se
focalisera sur les tests statistiques de cointégration et de
causalité, et les tests sur les résidus préliminaires
à l'estimation de la relation Finance-croissance (section 2).
Section 1 : Présentation et
spécification du modèle économétrique et des
variables
Le modèle de croissance endogène
de Romer revu par Pagano (1993) considère comme argument de la fonction
de production le capital et le progrès technique. Le capital est
considéré ici comme un élément composite dont les
éléments sont le capital physique, le capital financier et le
capital humain.
Les développements sur le capital
physique et le capital humain ayant fait l'objet de nombreuses
recherches ; entre autres celles de Barro, de Solow ou de Sala-i-Martin;
notre étude centre la relation autour de la liaison
croissance-finance.
Aussi pour des besoins d'estimation, nous
apporterons quelques modifications au modèle AK qui sont
envisagées dans notre première sous-section (A). Et, dans notre
deuxième sous-section, nous traiterons des propriétés
statistiques des variables utilisées (B).
A. Le modèle AK revisité
La modélisation
économétrique de la relation entre le développement de
l'activité financière et la croissance économique a
été l'oeuvre des auteurs tels que King et Levine dans leurs
travaux datant de 1993 et Levine, 1997. La forme retenue par ces auteurs est la
suivante :
G=á + âF(i) + èX + å
(16)
Dans cette équation, G représente
la variable qui matérialise la croissance économique en terme
logarithmique bien entendu. F(i) est utilisé pour les variables
financières. Nous discuterons des problèmes de mesure dans le
chapitre suivant. X est la matrice des variables de contrôle
associées à la croissance économique. Il s'agit entre
autres du revenu par tête, de l'éducation, de la stabilité
politique, du taux d'ouverture, du commerce, de la fiscalité et
même de la politique monétaire (Levine, 1997).
Cette forme de la fonction de production est
particulière en ce sens qu'elle met en relief la relation directe entre
le développement financier et la croissance de l'activité
économique. Seulement d'après Arestis et Demetriades (1993),
cette formulation ne nous renseigne pas suffisamment sur les sens de la
relation finance-croissance.
Patrick en 1966 établissait
déjà une relation biunivoque entre les variables
financières et les variables réelles. Le soubassement
théorique de cette analyse est que dans une première phase, le
développement de la sphère financière contribue dans une
grande proportion au développement de la sphère réelle,
ceci par le biais des canaux cités dans la première sous-section.
Cette phase est celle du « supply leading ».
Dans une seconde phase, la croissance
économique générée alimente les innovations
financières et contribue au développement du système
financier ; cette phase est dite celle du « demand
following ».
Aussi Arestis et Demetriades (1993)
suggèrent une formulation du modèle sous la forme d'un VAR
bivarié.
Cette forme a l'avantage de prendre en compte
l'interdépendance des deux sphères et d'analyser le sens de la
causalité entre développement financier et croissance
économique.
Néanmoins, notre étude ne
s'attarde que sur le signe de la relation, elle ne fait malheureusement pas le
tour du questionnement sur le sens de la relation ; pour cette raison,
nous préférons la formulation de Levine.
Cependant, compte tenu des avancées
considérables faites en économétrie des séries
temporelles, nous envisageons de modifier cette structuration pour aboutir
à une forme plus simple à manipuler et compte tenu des
résultats que nous obtiendrons, nous améliorerons le
modèle pour le rendre plus satisfaisant d'un point de vue purement
statistique. Aussi le modèle qui sert de base à notre analyse
est-il le suivant :
LnPIB=á + âLnFIN(i) +å
(17)
Dans ce modèle, LnPIB est le logarithme
népérien du produit intérieur brut par tête,
LnFIN(i) est le logarithme népérien de l'indicateur de
développement financier.
Cette équation ne sera utilisée
que pour rendre compte de la relation de long terme entre les deux variables.
La relation de court terme sera appréhendée à partir du
modèle à correction d'erreur que nous présenterons dans le
chapitre suivant.
B. Présentation et spécification des
variables de développement financier et de croissance
économique
La relation que nous étudions met en
relation deux types de variables, il s'agit des variables financières et
des variables réelles. Les caractéristiques de ces variables
seront appréhendées à travers le test de
stationnarité que nous mettrons en oeuvre. Il est néanmoins
important de préciser le choix de notre source de données et d'en
relever les limites.
B.1. Les sources de données
La base de données de la banque mondiale
présente comme principal avantage la consistance des séries
utilisées. En effet, les séries proposées par cette
institution nous permettent de faire des régressions sur une
période assez longue de telle sorte que les résultats des tests
opérés soient suffisamment robustes pour nous permettre de
conclure.
Dans la base de données de la Banque Mondiale les
séries sont exprimées en dollar américain ; ce qui
facilite la comparaison entre les pays si davantage l'étude est
comparative.
Néanmoins les informations fournies par
cette institution souffrent de quelques lacunes, notamment en ce qui concerne
les données démographiques. En effet, les recensements dans le
cadre spécifique du Cameroun sont menés à intervalle de
temps irrégulier et les autorités en charge de la collecte de
l'information et de la publication des données statistiques
démographiques n'ont pas souvent les moyens de vérifier les
informations qui leur parviennent.
Ceci implique par conséquent que les
informations démographiques que nous utilisons dans nos analyses sont
peu fiables et que les résultats que nous obtenons doivent être
interprétés avec beaucoup réserve.
Par ailleurs, les estimations concernant la
croissance démographique par exemple faites par la Banque Mondiale
souffrent d'un manque de réalisme. Elles n'intègrent pas en effet
comme variable significative de leur estimation les spécificités
propres à chaque pays.
Cette manière de procéder peut
conduire à invalider une théorie alors que le contexte de
l'étude lui-même est faussé.
B.2. Les caractéristiques statistiques des
variables
L'activité réelle porte sur
l'ensemble des transactions sur biens et services dans une économie.
Elle est perçue par les économistes comme étant l'ensemble
de la production des différents secteurs d'activité ; en
l'occurrence les secteurs primaire, secondaire et tertiaire. L'indicateur le
plus souvent retenu pour mesurer l'importance de l'activité
réelle est le PIB réel/habitant. Cet indicateur d'après
Arestis et Demetriades (1996) est le moins controversé et le plus
significatif ; vu qu'il prend en compte tous les chocs qui affectent les
statistiques démographiques. Cet indicateur est
déflaté ; ce qui implique qu'il élimine les effets
d'une inflation, rendant ainsi la comparaison entre les pays plus aisée
d'un point de vue strictement économique.
Les séries que nous analysons
débutent en 1961 et se limitent en 2000. Pour des besoins de
modélisation économétrique, les séries sont
lissées lors de la linéarisation du modèle AK
présenté plus haut ; elles sont en conséquence
loglinéaires. Une série de tests de racines unitaires ont
été effectuées pour rendre nos résultats
d'estimation plus fiables. L'objectif recherché est la stationnarisation
de nos processus par le biais d'une simple combinaison linéaire
appelée cointégration. Pour se faire, les séries
analysées doivent être non stationnaires. Les résultats du
test de stationnarité « Augmented Dickey-Fuhler 9(*)» pour la principale
variable réelle sont donnés dans le tableau
ci-après :
Tableau 3.1 : Résultats du test de racines
unitaires pour la série loglinéaire du PIB
réel/tête
Variables
|
Nbre de retards10(*)
|
Statistique ADF
|
Modèle
|
Décision
|
calculé
|
Tabulé
|
ln(PIB réel/tête)
|
3
|
0.25
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Non stationnaire
|
Äln(Pib réel/tête)
|
3
|
-1.53
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Non stationnaire
|
Ä2ln(PIB réel/tête)
|
3
|
-3.66
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Stationnaire
|
Modèle 1 est le modèle sans constante
ni trend
source : calculs de l'auteur
Les tests ADF appliqués à la
série ln(PIB réel/habitant) nous permettent de conclure qu'elle
n'est stationnaire ni en niveau, ni en différences premières pour
un nombre de retards égal à 3 (les valeurs de la statistique DF
calculées sont supérieures à la valeur critique au seuil
de 5% soit -1.95). Cette série n'est stationnaire que lorsque deux fois
différenciée (la valeur calculée est inférieure
à 1.95). Autrement dit ln(PIB réel/tête) est I(2)
et Äln(Pib réel/tête) est I(1).
Après la présentation et la
spécification de la principale variable réelle, nous envisageons
à présent la présentation et la spécification des
variables financières susceptibles d'appartenir à notre
modèle de croissance.
L'activité financière est
très dense et difficile à appréhender d'un point de vue
essentiellement quantitatif. Les indicateurs retenus dès notre premier
chapitre restent dans notre analyse les plus pertinentes et les plus
significatives.
Pour la série ln(M2/PIB), le
nombre de retards nécessaire à la mise en place du test est de 14
conformément à l'analyse du corrélogramme. Cependant, la
littérature de Mignon et Lardic (2002) nous conseille de prendre comme
nombre maximal de retards T/4 avec T le nombre d'observations. Aussi, avons
nous choisi d'adopter comme nombre de retards maximal 10. Les
caractéristiques statistiques de cette variable sont
récapitulées dans le tableau ci-contre :
Tableau 3.2 : Résultats du test de racines
unitaires sur la série loglinéaire de M2/PIB
Variables
|
Nbre de retards
|
Statistique ADF
|
Modèle
|
Décision
|
calculé
|
Tabulé
|
ln(M2/PIB)
|
10
|
0.59
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Non stationnaire
|
Äln(M2/PIB)
|
10
|
-1.72
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Non stationnaire
|
Ä2ln(M2/PIB)
|
10
|
-2.13
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Stationnaire
|
source : calculs de l'auteur
La statistique ADF calculée est
supérieure à la valeur critique au seuil de 5% la variable prise
en niveau et en différence première. L'hypothèse nulle est
donc acceptée conformément à la littérature de
Lardic et Mignon. Les séries ln(M2/PIB) et
Äln(M2/PIB) ne sont par conséquent pas stationnaires.
Par contre, la statistique ADF calculée
pour la série en différence seconde est stationnaire. En effet,
la valeur critique du ADF au seuil de 5% est supérieure à sa
valeur calculée soit -2.13. La série
Ä2ln(M2/PIB) est donc stationnaire.
En somme, la série ln(M2/PIB)
est I(2), la série ?ln(M2/PIB) est I(1) et
Ä2ln(M2/PIB) est I(0).
Pour la série ln(crédit au secteur
privé/PIB), l'observation du corrélogramme de la série en
différence première nous suggère une intégration
à l'ordre 1 de la série ln(crédit/PIB). Le nombre de
retards utilisés pour procéder au test de stationnarité se
limite par conséquent à l'unité. Les
propriétés statistiques pour cette autre variable sont
récapitulées dans le tableau suivant (cf. tableau 3.3) :
Tableau 3.3 : Résultats du test de racines
unitaires sur la série loglinéaire du crédit au secteur
privé/PIB
Variables
|
Nbre de retards
|
Statistique ADF
|
Modèle
|
Décision
|
calculé
|
Tabulé
|
ln(crédit/PIB)
|
1
|
-0.37
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Non stationnaire
|
Äln(crédit/PIB)
|
1
|
-3.68
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Stationnaire
|
source : calculs de l'auteur
La statistique ADF calculée pour la
variable en niveau est supérieure à sa valeur critique au seuil
de 5%. L'hypothèse de non stationnarité est donc acceptée
pour celle-ci.
Par contre, la statistique ADF calculée
pour la variable en différence première est inférieure
à sa valeur critique au seuil de 5% ; l'hypothèse nulle est
donc rejetée au profit de l'hypothèse alternative de
stationnarité et, la variable ln(crédit/PIB) est
intégrée au premier ordre.
Pour la série ln(quasi monnaie/PIB), le
nombre de retards retenu pour l'application du test de stationnarité est
1 conformément à l'observation du corrélogramme. Les
caractéristiques statistiques de cette série sont
récapitulées dans le tableau 3.4 ci- contre :
Tableau 3.4 : Résultats du test de racines
unitaires sur la série loglinéaire de quasi monnaie/PIB
Variables
|
Nbre de retards
|
Statistique ADF
|
Modèle
|
Décision
|
calculé
|
Tabulé
|
Ln(quasi mon/PIB)
|
1
|
0.42
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Non stationnaire
|
Äln(quasi mon/PIB)
|
1
|
-3.64
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Stationnaire
|
source : calculs de l'auteur
La statistique ADF calculée pour la
variable en niveau est supérieure à sa valeur critique au seuil
de 5%. Nous acceptons en conséquence l'hypothèse nulle de non
stationnarité. Elle est au contraire inférieure à sa
valeur tabulée pour la même variable prise en différence
première.
L'hypothèse nulle est donc rejetée au profit de
l'hypothèse alternative de stationnarité.
En somme, la série ln(quasi monnaie/PIB)
est I(1) et sa différence première est stationnaire.
Ainsi, comme nous venons de le voir dans cette
section toutes les variables financières et réelles sont non
stationnaires. Aussi une stationnarisation par combinaison linéaire peut
être envisageable. Ce type de stationnarisation des séries est
encore appelé cointégration.
Section 2 : Les tests statistiques de
cointégration, de causalité au sens de Granger et les tests sur
les résidus
La relation de long terme entre le
développement de la sphère financière et celui de la
sphère productive peut être facilement appréhendé
à l'aide d'une relation de cointégration entre les deux types de
variables. Néanmoins, il faut s'assurer au préalable que les
conditions requises sont réunies et qu'il est toujours possible de
trouver une relation de longue période entre les variables
financières et les variables réelles ; ceci peut être
vérifié à partir d'un test de cointégration.
Le test retenu est celui de la trace
développé par Johansen11(*) ; il sera mis en oeuvre dans notre
première sous-section. Pour une plus grande fiabilité de nos
résultats et une bonne interprétation des
phénomènes économiques, une série de tests dits de
causalité au sens de granger sera elle aussi mise en oeuvre dans cette
sous-section.
La deuxième sous-section se consacrera
aux tests sur les résidus qui garantissent l'utilisation de la
méthode des moindres carrés ordinaires employée pour
l'estimation des relations de court et long terme.
A. Les tests de cointégration et de
causalité de Granger entre les variables réelles et les variables
financières
A.1. Le test de cointégration de
Johansen
Les tests de cointégration
développés par Johansen sont appropriés pour une
spécification VAR des modèles économétriques. Ils
nous permettent de connaître le nombre de relations de
cointégration possibles entre les variables. Ainsi, la structure VAR de
notre modèle prend la forme structurelle suivante :
G=á1 + â1F(i) +
å1
F(i)= á2 + â2G +
å2
Les valeurs critiques de ce test figurent en annexe ;
elles sont données par Osterwald-Lenum (1992). Notons cependant qu'il
est très important de spécifier le nombre de retards que nous
considérons dans le VAR12(*).
Les résultats des différents tests
de cointégration entre la variable du secteur productif et les
différentes variables du secteur financier sont donnés dans les
tableaux suivants :
Tableau 3.5 : Résultats du test de
cointégration entre ln(PIB réel/tête) et
ln(M2/PIB)
Nbre de relation de cointégration
|
Nbre d'obs.
|
Test de la trace
|
décision
|
Coefficients de la relation normalisée
|
Calculé
|
critique
|
R=0
|
38
|
24.21
|
19.96
|
r>0
|
Ln(pib)
Ln(m2)
c
|
1
-3.20
2.09
|
R=1
|
38
|
3.77
|
9.24
|
r=1
|
source : calculs de l'auteur
Les séries loglinéaires du PIB
réel par habitant et de l'indicateur de développement financier
M2/PIB sont intégrées au second ordre. Aussi, nous
avons pu effectuer le test entre leurs différences premières en
considérant un seul retard. Le ratio de vraisemblance calculé
lorsque r=0 est supérieur à sa valeur critique au seuil de 5%
soit 19.96. Le test de la trace est un test unilatéral à
droite ; ce qui nous conduit à rejeter l'hypothèse nulle
d'absence de relation de cointégration au profit de l'hypothèse
alternative. Ainsi, le ratio de vraisemblance calculé pour r=1 est
inférieur à sa valeur critique soit 9.24 ; ce qui nous
amène à conclure à l'existence d'une relation de
cointégration possible. Les tableaux ci-dessus nous donnent les
différents coefficients de cointégration.
Il nous importe à présent de
savoir s'il est possible de trouver une relation de long terme entre les autres
variables financières et le PIB.
Tableau 3.6 : Résultats du test de
cointégration entre ln(PIB réel/tête) et
ln(crédit/PIB)
Nbre de relation de cointégration
|
Nbre d'obs.
|
Test de la trace
|
décision
|
Coefficients de la relation normalisée
|
Calculé
|
critique
|
R=0
|
39
|
4.23
|
19.96
|
r=0
|
Ln(pib)
Ln(crédit)
c
|
1
-0.31
-5.66
|
R=1
|
39
|
1.18
|
9.24
|
r=0
|
source : calculs de l'auteur
La série loglinéaire de
l'indicateur financier crédit au secteur privé/PIB est
intégrée d'ordre 1 ; pour cette raison, le test de
cointégration est effectué entre les variables en niveau. Le
ratio de vraisemblance calculé (4.23) pour r=o est inférieur
à sa valeur critique au seuil de 5% soit 19.96 d'où l'acceptation
de l'hypothèse nulle d'absence de relation de cointégration.
Autrement dit, il ne peut y exister une relation
à long terme entre le crédit au secteur privé et la
croissance économique. Cette conclusion est d'ailleurs en
conformité avec l'analyse de la corrélation faite dans notre
premier chapitre.
Cette absence de relation de
cointégration peut s'expliquer notamment par la faiblesse de ce type de
crédit pendant les années qui ont précédé la
crise économique et par la réticence des banquiers à
financer les projets d'investissement dont la rentabilité n'est
effective qu'à moyen ou long terme.
Les résultats du test de
cointégration entre notre variable réelle et la variable
financière quasi monnaie/PIB sont donnés dans le tableau
suivant :
Tableau 3.7 : Résultats du test de
cointégration entre ln(PIB réel/tête) et ln(quasi
monnaie/PIB)
Nbre de relation de cointégration
|
Nbre d'obs.
|
Test de la trace
|
Décision
|
Coefficients de la relation normalisée
|
Calculé
|
critique
|
R=0
|
39
|
29.39
|
19.96
|
r>0
|
Ln(pib)
Ln(quasi)
c
|
1
-0.89
-4.74
|
R=1
|
39
|
3.34
|
9.24
|
r=1
|
source : calculs de l'auteur
La série loglinéaire de quasi
monnaie/PIB est intégrée d'ordre 1 et la série
loglinéaire du PIB est intégrée d'ordre 2 ; il est
par conséquent possible d'effectuer un test de cointégration sur
les variables en niveau. Le ratio de vraisemblance calculé pour r=0
(29.39) est supérieur à sa valeur critique au seuil de 5% ;
ce qui conduit au rejet de l'hypothèse nulle d'absence de relation de
cointégration au profit de l'hypothèse alternative. Le ratio de
vraisemblance calculé pour r=1 (3.34) est inférieure à sa
valeur critique au seuil de 5% ; ce qui nous conduit à accepter
l'hypothèse nulle et à conclure à l'existence d'une
relation de cointégration possible.
Au total, les tests de cointégration
entre les variables de la sphère productive et celles de la
sphère réelle indiquent qu'il est possible de trouver à
long terme une relation entre le développement du secteur financier et
la croissance économique. Cependant, une des questions secondaires
auxquelles notre travail tente de répondre est celle du sens de la
causalité entre les deux phénomènes.
Aussi une autre série de tests est
nécessaire pour résoudre le problème du sens de la
causalité ; ces tests sont dits de causalité au sens de
granger.
A.2. Les tests de causalité entre variables du
développement financier et variables de la croissance
économique
Une simple étude de la corrélation
entre deux phénomènes d'après Granger (1969) ne suffit pas
pour décider de l'existence d'une causalité entre ces deux
phénomènes. A travers quelques exemples, Granger montre qu'une
corrélation entre deux phénomènes n'implique pas
forcément une relation causale.
La causalité peut être
étudiée au travers une gamme variée de tests statistiques.
On peut citer entre autres, les tests de causalité instantanée,
de causalité au sens de Pierce et Haugh13(*), de causalité au sens de Sims14(*) et le test de causalité
au sens de Granger.
Ce dernier type de causalité essaie de
faire une comparaison entre deux modèles distincts : dans le
premier modèle, Granger considère une formulation
autorégressive simple du processus étudié ; et dans
le second il y ajoute le bloc de la variable explicative retardée sur
plusieurs périodes. Pour lui, on ne saurait dire que le processus X
cause le processus Y si le second modèle est statistiquement plus
significatif que le premier.
L'utilisation du logiciel d'application Eviews
nous exige de spécifier le nombre de retards que nous souhaitons
intégrer dans les modèles pour effectuer le test de
causalité de Granger. Cet auteur propose de considérer un nombre
suffisant de retards même s'il est élevé qui correspond au
nombre de périodes significatives pour notre analyse. Pour cette
étude, nous choisirons un nombre de retards ex-nihilo égal
à 5. Les résultats du test de causalité sont
donnés dans les tableaux en annexe.
La probabilité associée au test de
non causalité entre la variable financière ln(M2/PIB)
et la variable réelle ln(PIB réel/tête) est
supérieure à 0.05, ce qui nous conduit à l'acceptation de
l'hypothèse nulle. La probabilité associée au test de non
causalité dans le sens inverse est inférieure à 0.05. Ceci
nous amène à rejeter l'hypothèse nulle au profit de
l'hypothèse alternative.
Autrement dit, au Cameroun, le taux de
liquidité ne saurait être une explication de la croissance
économique mais à l'inverse, la croissance économique est
un facteur explicatif de l'évolution du ratio M2/PIB.
Ceci est tout a fait compréhensible dans
la mesure où les fruits de l'accroissement de la production nationale
sont vite convertis en liquidités pour des motifs de transaction et de
précaution. Il est facile d'observer le comportement des ménages
lorsque les revenus augmentent. Une bonne partie de ces revenus est
utilisée dans le but de l'amélioration des conditions de vie. Les
agents économiques dépensent leurs revenus dans l'achat des biens
immobiliers et des biens d'équipement.
Par ailleurs, la probabilité
associée au test de non causalité entre la variable de la
sphère productive ln(PIB réel/tête) et celle de la
sphère financière ln(quasi monnaie/PIB) est supérieure
à 0.05 ; ce qui nous conduit à l'acceptation de
l'hypothèse nulle de non causalité.
La probabilité au test de non
causalité dans le sens inverse est aussi supérieure à 0.05
et les conclusions tirées sont les mêmes. Ces résultats
sont conformes avec la réalité des faits. En effet, il est
difficile de voir les ménages placer leur épargne dans des
comptes bancaires. Les agents ont dans ce pays une préférence
pour les placements tontiniers.
Par conséquent, un accroissement du
produit brut par tête a une incidence peu significative sur le volume des
quasi liquidités ; et puisque celles-ci ne constituent qu'une
petite part de la masse monétaire, elle ne saurait être d'une
importance significative dans la détermination des facteurs explicatifs
de la croissance économique.
La probabilité associée au test
de non causalité entre la variable réelle ln(PIB
réel/tête) et la variable financière ln(crédit/PIB)
est supérieure au seuil de 0 .05 et très proche de
l'unité. Ceci implique que l'hypothèse nulle est la plus probable
et la conclusion qui en découle est le rejet de la causalité
entre la sphère financière et la sphère réelle. Le
test de non causalité effectué dans le sens inverse donne des
résultats similaires. La probabilité associée à ce
test est elle aussi supérieure au seuil de 0.05 ; ce qui nous
conduit au rejet de l'existence de causalité entre le secteur productif
et le système financier.
Tous ces résultats sont en
conformité avec la réalité des faits. En effet,
malgré la légère augmentation des crédits qui
survient au lendemain de la libéralisation du système financier,
les crédits à long terme ne correspondent qu'à un infime
partie de la masse totale des crédits accordés. Les fonds
bancaires sont généralement orientés vers le financement
des campagnes agricoles, des crédits et remises documentaires, de la
trésorerie des entreprises plutôt que vers le financement des
grands projets d'investissement susceptibles de générer de grands
profits à long terme.
Avec une telle structure de crédit, on ne
saurait dire que le système financier soutient la croissance
économique. Pire encore, on ne pourrait pas penser à une
causalité inverse dans la mesure où les fruits de la croissance
économique observée au Cameroun depuis 1997 ne contribuent en
rien dans l'accroissement du volume des crédits accordés. Le
rationnement du crédit pratiqué par les institutions
financières en place a d'ailleurs à cet effet conduit les
autorités en charge du contrôle et de la régulation du
système à statuer sur les effets pernicieux de la
surliquidité bancaire. Si au sens de Patrick (1966), nous nous trouvions
dans la seconde phase de la relation soit la phase de « demand
following », la coexistence entre une croissance économique
soutenue et une surliquidité bancaire serait paradoxale.
En définitive, la causalité au
sens de Granger nous permet non seulement d'établir une relation causale
entre deux phénomènes mais aussi de statuer sur le sens de cette
relation. Ainsi, tel que nous venons de le voir dans cette sous-section nous
pouvons dire que dans une logique de long terme, il est toujours possible
d'envisager une relation entre la sphère productive et la sphère
financière ; mais le sens de la relation tend plus à
conforter l'idée selon laquelle la croissance économique est
soutenue par la volonté des acteurs économiques plutôt que
par le système financier.
Les résultats trouvés jusqu'ici
constituent un préalable à l'estimation proprement dite. Dans le
but de s'assurer que la méthode d'estimation choisie est bien
appropriée pour cette relation, nous allons effectuer une
deuxième série de tests statistiques dits tests
résiduels.
B. Les tests sur les résidus
Les tests résiduels sont
mis en oeuvre pour éviter des régressions fallacieuses et
l'utilisation des méthodes d'estimation inappropriées. Il s'agit
en l'occurrence du test de normalité des résidus, du test
d'autocorrélation de Durbin Watson et du test de White pour
témoigner de l'homoscédasticité de nos erreurs.
Les statistiques de Durbin et Watson
calculées pour les différents modèles que nous cherchons
à estimer sont données dans le tableau ci-contre :
Tableau 3.8 : Test d'autocorrélation des
résidus
Modèle
|
Statistique DW calculée
|
Croissance - Taux de liquidité
|
1.385
|
Croissance - Taux de quasi liquidité
|
0.223
|
Croissance - Part du crédit privé
|
0.176
|
source : calculs de l'auteur
Pour le premier modèle, les valeurs
critiques de Durbin Watson sont D1=1.43 et D2=1.54. La statistique DW
calculée pour ce modèle est de 1.385. Cette valeur est
située entre 0 et D1 ; ce qui nous amène à
inférer la présence d'une autocorrélation
résiduelle positive. La cause probable de ce résultat est
l'omission d'une variable pertinente. Nous essaierons de confirmer ce
résultat à l'aide du test d'omission des variables.
Pour le second modèle, les valeurs
critiques de Durbin Watson sont D1=1.44 et D2=1.54. La statistique DW
calculée pour cet autre modèle est de 0.223. Cette valeur est
comprise entre 0 et D1 ; ce qui nous pousse à conclure de la
présence d'une autocorrélation résiduelle. Ce
résultat trouve une explication dans la méthode d'estimation qui
à priori n'est pas adéquate pour l'estimation de cette
relation.
Pour le troisième modèle, les
valeurs critiques de Durbin Watson sont D1=1.44 et D2=1.54. La statistique DW
calculée pour cet autre modèle est de 0.176. Cette valeur est
comprise entre 0 et D1 ; ce qui nous amène à conclure
à l'existence d'une autocorrélation positive des résidus.
La cause probable de ce résultat est l'omission d'une variable
pertinente. Nous essaierons de confirmer ce résultat à l'aide du
test d'omission des variables.
Le test de normalité quant à lui
nous permet de savoir si les résidus de nos différentes
régressions se prêtent à l'estimation par la méthode
des moindres carrés ordinaires. Il est mis en oeuvre pour nous assurer
que nos résidus sont des bruits blancs. Autrement dit, il nous permet de
savoir si les estimations que nous faisons ne sont pas affectées de
façon significative par des chocs aléatoires. Il nous donne pour
les différentes équations de long terme les résultats
suivants :
Graphique 3.1 : Test de normalité sur les
résidus de la relation entre la croissance et le taux de
liquidité de l'économie
source : calculs de l'auteur
L'observation de l'histogramme nous
suggère a priori l'acceptation de l'hypothèse de distribution
normale des résidus qui est notre hypothèse nulle. Cette
conclusion est confirmée par la probabilité associée au
test de Jarque-Bera15(*)
qui est supérieure au seuil critique de 0.05 et la statistique
elle-même qui se situe en dessous de la valeur critique du Khi-Deux
à 2 degrés de liberté soit 5.99.
Graphique 3.2 : Test de normalité des
résidus de la relation entre la croissance et le taux de quasi
liquidité de l'économie
source : calculs de l'auteur
La probabilité associée à
la statistique de Jarque-Bera est faible même si elle reste
supérieure au seuil de 0.05. La statistique de Jarque-Bera
calculée (2.075) reste elle très inférieure au seuil de 5%
à sa valeur critique (5.99) ; ce qui pourrait laisser considérer
que les résidus suivent une distribution normale.
Graphique 3.3 : Test de normalité des
résidus de la relation entre la croissance et la part des crédits
au secteur privé dans l'économie
source : calculs de l'auteur
La probabilité associée à
la statistique de Jarque-Bera est elle aussi faible pour les résidus de
cette régression. Elle reste néanmoins supérieure au seuil
critique de 0.05. La statistique calculée en elle-même (2.82) est
inférieure au seuil statistique de 5% à la valeur tabulée
du Khi-Deux à 2 degrés de liberté, soit 5.99. En
conclusion, les résidus de la régression entre la principale
variable financière et le logarithme de la part du crédit au
secteur privé dans l'économie suivent une loi normale.
Pour garantir la fiabilité de nos
résultats, il est aussi important d'effectuer le test
d'hétéroscédasticité. Le test que nous appliquerons
sur nos résidus est le test
d'hétéroscédasticité de White16(*). Les résultas
associés à ce test sont donnés dans le tableau 3.9.
Tableau 3.9 : Résultats du test
d'hétéroscédasticité de White
Modèle
|
Test de White
|
Prob
|
Décision
|
Test d'omission des variables
|
Prob
|
Décision
|
Calculé
|
Tabulé
|
Calculé
|
Tabulé
|
Croissance - Taux de liquidité
|
0.484
|
3.84
|
0.785
|
Homoscédasticité
|
0.226
|
-
|
0.798
|
Omission des variables
|
Croissance - Taux de quasi liquidité
|
7.381
|
3.84
|
0.025
|
Hétéroscédasticité
|
4.186
|
-
|
0.023
|
Pas d'omission de variables
|
Croissance - Part d crédit privé
|
0.790
|
3.84
|
0.673
|
Homoscédasticité
|
0.373
|
-
|
0.691
|
Omission des variables
|
Pour le premier modèle,
c'est-à-dire le modèle Croissance économique - Taux de
liquidité de l'économie, la statistique de White calculée
nR2=0.484 (n est le nombre d'observations). Cette valeur est
inférieure à la valeur critique du Khi-Deux à 1
degré de liberté soit 3.84 ; ce qui nous conduit à
l'acceptation de l'hypothèse nulle d'absence
d'hétéroscédasticité. La probabilité
associée à la statistique F17(*) du test d'omission des variables est suffisamment
élevée pour qu'on puisse conclure que des variables explicatives
ont été omises dans la transformation de notre modèle AK.
Cette probabilité se situe en effet au dessus du seuil statistique de
5%.
Pour notre deuxième modèle, soit
le modèle Croissance économique - taux de quasi liquidité
de l'économie, la statistique de White calculée (7.381) est
largement supérieure à sa valeur critique au seuil de 5%.
D'où le rejet de l'hypothèse nulle
d'homoscédasticité au profit de l'alternative
d'hétéroscédasticité.
Pour notre troisième et dernier
modèle, c'est-à-dire le modèle Croissance
économique- part du crédit au secteur privé dans
l'économie, la statistique de White calculée (0.790) est
inférieure à sa valeur tabulée au seuil critique de 5% et
la probabilité associée au test d'omission des variables
explicatives est supérieure à 5%. Ces comparaisons nous
amènent à conclure en l'absence
d'hétéroscédasticité résiduelle et en
l'omission de variables pertinentes.
En définitive, les tests statistiques que
nous avons effectués dans cette dernière section l'ont
été dans le seul but de conforter l'analyse économique que
nous ferons de la relation finance-croissance dans le cadre spécifique
du Cameroun. Les différents tests résiduels nous permettent de
choisir à présent la méthode d'estimation de nos
différentes relations. Aussi pour les modèles
homoscédastiques, la méthode choisie sera les moindres
carrés ordinaires ; tandis que les moindres carrés
généralisés seront appliqués aux modèles
hétéroscédastiques.
Conclusion
La modélisation de la relation entre le
développement de l'activité financière et celui de
l'activité réelle nécessite une bonne spécification
des variables utilisées. En effet, une mauvaise spécification
pourrait biaiser les résultats et fausser toute l'analyse qui en
découle. Les phénomènes de croissance économique et
de développement financier sont très difficiles à
appréhender. Les indicateurs retenus dans notre travail comportent tous
quelques imperfections qui à notre sens ne sont pas majeures, mais ils
essaient au mieux de capter ces différents phénomènes.
L'utilisation des tests statistiques nous permet de nous rassurer quant au
choix de la méthode de travail, du modèle théorique et des
outils d'analyse.
Les résultats trouvés dans ce
chapitre nous permettent de dire qu'il est possible d'appréhender la
relation entre les deux sphères au moyen d'une équation de
cointégration qui évalue la liaison à long terme ; et
puisque à toute équation de cointégration correspond
toujours un modèle à correction d'erreur ; l'estimation de
ce dernier modèle nous donnera des informations sur la liaison à
court terme.
Chapitre 4 : Estimation de la relation
Finance-croissance et implications de politiques économiques
Introduction
Les travaux de King et Levine (1993),
Berthélémy et Varoudakis (1993) et même ceux de Loayza et
Ranciere (2005) montrent que dans la plupart des pays développés,
l'activité financière constitue une explication significative au
niveau de long terme de l'activité productive.
Les développements récents de
Bouliba et Trabelsi (2002) sur la Tunisie expliquent l'accumulation du capital
à court terme comme à long terme par les contributions majeures
d'un système financier libéralisé.
Aussi toutes les thèses
néoclassiques de croissance traditionnelle et de croissance
endogène sont validées par la réalité des faits.
Dans le cadre spécifique du Cameroun,
les travaux de Joseph & al (1998) constituent une référence
pour notre analyse. L'utilisation d'une méthodologie similaire nous
donne des résultats contradictoires en ce qui concerne le sens de la
causalité entre les deux phénomènes.
Ainsi notre quatrième chapitre
s'atèle à valider ou à invalider les résultats de
l'étude de référence et à y apporter des
justificatifs d'un point de vue analytique. Pour ce faire, nous envisageons de
diviser ce chapitre en deux sections. La section 1 sera consacrée
à l'estimation de la relation Finance-croissance à court terme et
à long terme et la section 2 traitera des implications de politique
économique.
Section 1 : Estimation de la relation entre le
développement financier et la croissance économique au
Cameroun
Le Cameroun occupe une position de leader dans
la zone CEMAC ; il bénéficie à lui tout seul de
près de la moitié de la masse monétaire qui y est en
circulation. Pendant les années 1980 il a subit une grave crise qui a
d'ailleurs participé de la mise en place des programmes triennaux
auxquels il s'est astreint jusqu'à nos jours.
Au cours de cette même période, son
système financier tout entier s'est effondré et la principale
question qu'a suscitée cette crise profonde a été celle de
la liaison entre les deux phénomènes.
Notre travail essaie d'apporter des
réponses à ce questionnement et cette section se charge
d'évaluer l'incidence du secteur financier sur la croissance
économique. Nous avons choisi pour des besoins de structuration de
donner dans un premier temps les résultats de l'estimation de la
relation de longue période prise en compte par la cointégration
(A) avant de d'estimer en second lieu la relation de courte période
formalisée dans le modèle à correction d'erreur (B).
A. L'estimation de la relation de long
terme
Les résultats du test de la trace de
Johansen entre les variables réelles et les variables financières
valident pour la plupart l'hypothèse d'existence d'une relation de
cointégration. La relation de long terme sera estimée à
l'aide de la méthode d'estimation en deux étapes de Engel et
Granger. Les tests effectués dans le chapitre précédent
nous amènent à considérer comme variables
financières pertinentes les ratios M2/PIB et quasi
monnaie/PIB qui sont respectivement intégrés d'ordre 2 et 1. Le
ratio crédit au secteur privé/PIB est lui aussi pertinent comme
instrument d'analyse, mais il n'est pas statistiquement en relation avec la
croissance économique. Nous essaierons de confirmer les résultats
des tests sur le modèle Croissance économique - Part du
crédit privé dans l'économie en testant la
stationnarité des résidus de cette régression.
Ainsi, dans cette sous-section nous aurons
à estimer la dynamique de longue période entre les variables en
différence du secteur réel et du taux de liquidité, puis
la dynamique de longue période entre les variables en niveau du secteur
réel et du taux de quasi liquidité de l'économie. Ces
différentes équations de cointégration seront
estimées par la méthode de moindres carrés ordinaires et
généralisés comme préconisés par Engle et
Granger.
Pour le modèle spécifique
Croissance - Part du crédit privé, la méthode des moindres
est en notre sens la plus appropriée, mais elle sera
complétée par le test de stationnarité des résidus
en vue de confirmer ou infirmer les résultats des tests de
cointégration et de causalité au sens de Granger qui y sont
associés.
Les résultats de nos estimations sont
donnés dans le tableau 4.1 ci-après :
Tableau 4.1 : Estimation des différentes
relations de long terme
Modèle
|
Méthode d'estimation
|
Nbre obs.
|
Estimations
|
R2
|
R2 ajusté
|
Croissance - Taux de liquidité
|
Moindres carrés ordinaires
|
39
|
Äln(pib)=0.008-0.076Äln(m2/pib)
(0.78) (-0.87)
La valeur critique du Student à 5% est de 1.96
|
0.02
|
-0.006
|
Croissance - Taux de quasi liquidité
|
Moindres carrés généralisés
|
40
|
ln(pib)=6.211+0.179ln(quasi/pib)
(133.17) (6.65)
Les valeurs ( ) représentent la statistique de Student
associée au paramètre estimé
|
0.538
|
0.526
|
Croissance - Part du crédit privé
|
Moindres carrés ordinaires
|
40
|
ln(pib)=5.586+O.318ln(crédit/pib)
(30.527) (4.929)
|
0. 39
|
0.374
|
source : calculs de l'auteur
Les résultats du test de
stationnarité qui sont spécialement mis en oeuvre pour le
troisième modèle sont donnés dans le tableau 4.2
ci-après :
Tableau 4.2 : Résultats du test de racines
unitaires sur les résidus du modèle Croissance - Part du
crédit au secteur privé dans l'économie
Variables
|
Nbre de retards
|
Statistique ADF
|
Modèle
|
Décision
|
calculé
|
Tabulé
|
Résidus
|
2
|
-0.97
|
-1.95
|
Modèle 1
|
Non stationnaire
|
source : calculs de l'auteur
Le coefficient de détermination
associé à l'estimation de la relation entre la croissance
économique et le ratio de liquidité de l'économie est
très faible et largement en dessous du seuil de significativité
qui est de 75% (R²=0.02). Le R² ajusté quant à lui est
négatif. Ces résultats nous confortent davantage dans notre
explication de l'autocorrélation résiduelle.
La non significativité des
paramètres du modèle nous amène à penser qu'il
n'existe pas à long terme de relation entre le développement de
l'activité financière mesuré par le ratio
M2/PIB et celui de l'activité réelle. Seulement nous
nous gardons de tirer des conclusions aussi hâtives et nous proposons
d'améliorer ce résultat en rajoutant quelques variables à
notre modèle.
En ce qui concerne la relation entre la
croissance économique et le ratio de quasi liquidité,
l'estimation par la méthode des moindres carrés
généralisés nous donne des résultats satisfaisants.
En effet, le coefficient de détermination associé à cette
régression se situe au de-là de 50% ; et l'ajustement de ce
coefficient ne change rien à l'analyse.
Les coefficients estimés de cette
relation sont tous significatifs. Ce résultat confirme bien le test de
causalité que nous avons effectué au chapitre 3. Le coefficient
de corrélation entre le développement de l'activité
financière et la croissance économique est de 0.18. Un
accroissement du taux de quasi liquidité de 1% entraîne une
augmentation du niveau de l'activité économique de 0.18%.
A partir de cette équation nous pouvons
conclure que dans une optique de long terme, le développement du
système financier agit positivement sur la croissance économique.
Bien que le coefficient de détermination
associée à l'estimation de la relation soit suffisamment
élevé (39%), le modèle doit être
amélioré conformément aux résultats du test
d'omission des variables explicatives. Néanmoins les paramètres
de cette régression sont statistiquement non nuls (la valeur
calculée de Student est supérieure à 1.96) et le signe de
la relation est positive.
Autrement dit, le développement de
l'activité financière a une incidence positive sur
l'activité économique. Lorsque la part du crédit au
secteur privé dans l'économie augmente d'un point, l'indicateur
de croissance économique s'améliore de 0.318 point.
Cependant, nous ne pouvons pas considérer
cette relation comme une relation de long terme, dans la mesure où les
résidus de cette régression sont non stationnaires. Ces
résultats confortent non seulement les résultats de nos tests de
cointégration et de causalité de granger mais aussi l'analyse
graphique du chapitre 1.
Le rajout des variables théoriquement
pertinentes dans notre premier modèle ne change rien au résultat
initial. Le modèle reste globalement peu satisfaisant et les
paramètres de ce nouveau modèle sont tous non significatifs.
Par contre la prise en compte de ces nouvelles
variables améliore la relation entre la croissance économique et
le niveau de développement de la sphère financière
mesuré par l'indicateur crédit au secteur privé/PIB. En
effet, bien que les coefficients associés à ces nouvelles
variables sont tous non significatifs, le paramètre associé
à notre indicateur de développement financier est positif et
significatif.
De surcroît, les résidus de cette
nouvelle estimation sont stationnaires. Et d'après la littérature
de Engle et Granger (1987) reprise par Lardic et Mignon (2002), la relation
Finance-Croissance estimée représente une relation statique de
long terme.
En d'autres termes, une fois les nouvelles
variables considérées dans le modèle, il devient possible
de trouver une relation de long terme significative et satisfaisante.
Les variables que nous avons rajoutées
pour cette nouvelle estimation sont le niveau de la dépense
intérieure, l'épargne nationale et la formation de capital. Pour
toutes ces variables, les séries débutent en 1965. C'est pour
cette raison que le nombre total d'observation est égal à 36. Les
propriétés statistiques de ces variables sont
récapitulées dans le tableau 4.3 et la nouvelle estimation dans
le tableau 4.4.
Tableau 4.3 : Récapitulatif des
propriétés statistiques des variables omises
Variables
|
Niveau de stationnarité
|
ADF calculé
|
ADF tabulé
|
Ln(épargne/pib)
|
En différence première
|
-4.51
|
-1.95
|
Ln(dépense/pib)
|
En différence première
|
-5.90
|
-1.95
|
Ln(formation capital/pib)
|
En différence première
|
-6.72
|
-1.95
|
Tableau 4.4 : Estimation de la relation entre la
croissance économique et le développement du système
financier avec prise en compte des variables omises
Modèle
|
Méthode d'estimation
|
Nbre obs.
|
Estimation
|
R²
|
R² ajusté
|
Croissance - Taux de liquidité
|
Moindres carrés ordinaires
|
35
|
Äln(pib)=-6.46-
0.09Äln(m2/pib)+1.34ln(dépense/pib)
(-1.035) (0.93)
+0.21ln(épargne/pib)
(0.26)
-0.11ln(formation capital/pib)
(-0.39)
|
0.27
|
0.17
|
Croissance - Part du crédit privé
|
Moindres carrés ordinaires
|
36
|
ln(pib)=9.241+
0.13ln(crédit/pib)-
(1.983)
1.02ln(dépense/pib)
(-0.345)
+0.338ln(épargne/pib)
(0.622)
+0.21ln(formation capital/pib)
(-0.350)
|
0.72
|
0.69
|
sources : calculs de l'auteur
Pour le modèle Croissance
économique - Taux de liquidité, les résultats de la
nouvelle estimation sont en conformité avec l'analyse de la
causalité effectuée dans le chapitre précédent qui
aboutit en conclusion à l'absence de causalité entre le
développement de la sphère financière mesuré par le
ratio de liquidité et la croissance de l'activité
économique.
Par contre pour le modèle Croissance
économique - Part du crédit privé dans l'économie,
les résultats de la nouvelle estimation contredisent les
résultats de tous les tests que nous avons préalablement obtenus.
Le coefficient de détermination associée à cette nouvelle
régression est plus que satisfaisant (72%). Et conformément
à la théorie économique et à notre hypothèse
fondamentale, le développement de l'activité financière a
une incidence positive à long terme sur la croissance économique.
Lorsque cet indicateur augmente de 1%, le niveau de l'activité
économique s'améliore de 0.13%.
Ce résultat est d'ailleurs similaire
à celui de Joseph et ses coauteurs (1998) qui recommandent au
gouvernement camerounais d'oeuvrer dans l'amélioration des conditions de
crédit ; ceci dans le but de faciliter l'octroi des crédits
et de catalyser les relations entre les établissements de crédit
et leur clientèle.
En définitive, les seules relations de
long terme validées dans notre travail sont celles qui existent entre
le taux de croissance et le ratio de quasi liquidité, et, le taux de
croissance et la part du crédit privé dans l'économie.
Essayons à présent de voir si ces
différentes relations de longue période tiennent aussi une fois
qu'elles sont transposées dans la dynamique de courte période.
L'examen de la relation à court terme est
appréhendé à travers un modèle à correction
d'erreurs. Celui-ci nous permet d'étudier les fluctuations des
phénomènes en tenant compte de leur sentier d'expansion.
B. L'estimation de la relation de court terme :
le modèle à correction d'erreurs
L'estimation du modèle à
correction d'erreurs constitue la deuxième étape de la
méthode de Engle et Granger de l'analyse de la cointégration.
Cette étape est la plus importante, car elle fait ressortir les
variations périodiques du phénomène étudié
une fois l'équilibre déterminé. Les résultats de
l'estimation de ces différents modèles sont donnés dans le
tableau suivant :
Tableau 4.5 : Résultats de l'estimation des
modèles à correction d'erreurs
Modèle
|
Méthode d'estimation
|
N
|
Estimation
|
R²
|
R² ajusté
|
Croissance -Taux de quasi liquidité
|
Moindres carrés ordinaires
|
38
|
Äln(pib)=0.003-0.1387z+0.365Äln(pib)(-1)
(0.28) (-2.07) (2.30)
-0.06Äln(quasi/pib)+0.06Äln(quasi/pib)(-1)
(-0.84) (1.004)
|
0.22
|
0.13
|
Croissance-Part du crédit privé
|
Moindres carrés ordinaires
|
34
|
Äln(pib)=0.006-0.322v+0.125Äln(pib)(-1)
(0.58) (-3.67) (0.81)
+0.08Äln(crédit/pib)
(1.18)
|
0.39
|
0.31
|
Dans le premier modèle la variable z
représente le résidu de la relation de long terme
décalé d'une période. La statistique de Student
associé au coefficient qui lui est affecté est supérieure
à sa valeur critique au seuil de 5%, soit 1.96. La constante, tout
comme les variations du ratio (quasi monnaie/pib) qu'elles soient
instantanées ou décalées, est non significative. Seule la
variation décalée du PIB a une incidence significative sur le
niveau de la croissance économique.
Le coefficient associé à la force
de rappel z est négatif et significatif (-0.139) ; il existe donc
bien un mécanisme à correction d'erreurs : à long
terme, les déséquilibres entre le développement du
système financier et celui de la sphère productive se compensent
de sorte que les deux phénomènes ont une évolution
similaire.
De façon similaire, la variable v
représente le résidu de la relation de long terme
décalé d'une période et associé au second
modèle. La statistique de Student du paramètre de la force de
rappel est largement supérieure à sa valeur critique au seuil
statistique de 5%. Pour ce modèle aussi, il existe un mécanisme
de correction des erreurs qui à long terme ramène les deux
phénomènes étudiés sur un même sentier
d'expansion.
En revanche, les paramètres
associés aux fluctuations de courte période sont tous non
significatifs. Cependant la valeur du Student calculée pour le
paramètre de notre indicateur financier est supérieure à
l'unité. Et, nous suggérons une analyse plus approfondie de cette
relation afin de tirer des conclusions plus appropriées. Nous
émettons l'hypothèse forte selon laquelle sur une plus grande
période d'observation, les fluctuations du ratio crédit au
secteur privé/PIB ont une incidence positive sur les fluctuations de
l'activité réelle.
Conformément à l'analyse de Joseph
et al (1998), la relation de long terme entre les deux phénomènes
nous conduit à considérer que les autorités de
contrôle et de surveillance du système financier en
général et du secteur bancaire en particulier doivent faire
davantage d'effort pour renforcer leur crédibilité.
Ce renforcement aura pour effet dans une optique
de long terme de stimuler les dépôts longs, facilitant ainsi
l'octroi des crédits à moyen et long terme, source importante de
croissance économique.
On constate en outre que le taux de croissance
de la production intérieure brute dépend positivement de sa
valeur retardée. Lorsque celle-ci augmente de 1%, le taux de croissance
de la période étudiée s'accroît d'environ 0.14%.
Ce résultat trouve des fondements dans
l'analyse de l'équilibre offre globale - demande globale. En effet,
l'accroissement de la production de la période précédente
entraîne un accroissement des revenus et par conséquent une
augmentation de la demande la période suivante. Cette augmentation de la
demande est à l'origine de celle de la production de la période
suivante.
La non significativité des
paramètres associés à la variable quasi monnaie/PIB
(retardée et actuelle) est sans doute due au fait que les fluctuations
à court terme de ce ratio ne sont pas importantes. Ceci se justifie par
le fait que dans le court terme, les agents économiques cherchent
à améliorer leurs conditions de vie.
Dans un contexte où une grande partie de
la population vie en dessous du seuil de pauvreté, l'accroissement des
revenus alimente la consommation plutôt que les placements, comme c'est
le cas dans les pays développés. L'épargne individuelle y
est peu consistante ne saurait être constituée à court
terme que pour des motifs de précaution.
Par conséquent, le système
financier ne bénéficie pas à court terme des
retombées de l'accroissement des revenus. Cette conséquence peut
être aussi justifiée par le fait que le Cameroun est un pays
économiquement vulnérable. Les chocs extérieurs affectent
significativement son appareil productif de telle sorte que les acteurs
économiques ont une préférence pour les actifs liquides
plutôt que pour les actifs quasi liquides.
En définitive, les dynamiques de court
terme et de long terme entre le développement financier et la croissance
économique perçues à travers le modèle à
correction d'erreurs sont rendues possibles dans le contexte camerounais avec
la modification du modèle théorique AK.
Alors qu'à court terme, les habitudes de
consommation et les décisions des ménages sont rigides de telle
sorte que la croissance économique est perçue comme un processus
autorégressif ; à long terme, l'incidence de l'accroissement
du taux de quasi liquidité est positive sur le niveau de
l'activité économique.
Une fois le sens et le signe de la relation
établis, les questions qui restent à notre avis sans
réponse sont celles relatives aux implications de politiques
économiques.
Section 2 : Les implications de politiques
économiques
Dans la réalité camerounaise, il
est peut être difficile de percevoir à court terme une relation
franche entre l'amélioration du système bancaire et
l'accroissement de la production globale, tout porte même à croire
que la relation causale s'établit plutôt entre croissance
économique et développement financier ; mais l'histoire
économique de ce pays nous amène à penser que le
développement de l'activité financière peut avoir une
influence indirecte sur le niveau du PIB.
Les successions de crises et reprises de
l'activité économique et de l'activité bancaire
nous démontrent à suffisance l'imbrication des
deux phénomènes à court terme. Les décideurs
politiques et économiques doivent en conséquence intégrer
cet aspect dans l'analyse qu'ils font de la croissance économique.
A l'issue de ce travail de recherche, nous
sommes à même de proposer quelques mesures dont la mise en
application permettrait d'atteindre plus rapidement les objectifs de croissance
fixés par les institutions internationales de Bretton Woods et les
institutions sous-régionales, en accord avec les autorités
camerounaises.
Aussi cette deuxième section fait
état des propositions de politique économique et des implications
économiques de telles mesures. A cet effet, nous étudierons en
premier lieu les mesures institutionnelles et en second lieu les
décisions économiques susceptibles d'être
adoptées.
A. Les mesures institutionnelles et
réglementaires potentielles
L'amélioration du niveau de
l'activité économique passe nécessairement par
l'amélioration du cadre institutionnel qui l'accompagne. De la
même façon, le développement financier ne saurait se faire
sans qu'au préalable le cadre institutionnel et réglementaire ne
subisse quelques changements structurels.
Il est à noter que lorsque nous parlons
ici de développement financier, nous considérons tous les
indicateurs d'approfondissement que nous avons étudiés dans le
premier chapitre. Ainsi les mesures institutionnelles se réfèrent
aussi bien aux dépôts et crédits qu'à la monnaie.
La première mesure que nous proposons est
la mise en place au sein de nos établissements de crédit d'un
département spécifique de trésorerie. Le rapport de la
BEAC de 2001 sur le fonctionnement du système financier établit
comme phénomène paradoxal la surliquidité des banques
camerounaises dans un contexte où l'endettement extérieur
constitue la principale source de financement pour les secteurs dits
prioritaires, à savoir, l'éducation et la santé.
Dans la plupart des pays financièrement
développés, ce sont les grands groupes financiers et les holdings
financiers qui soutiennent ces secteurs. Ils sont soit actionnaires dans les
grandes écoles soit la principale source de financement pour des
études chères payées mais rentables in fine.
Ainsi, au Cameroun le département
trésorerie des établissements aura en charge la rentabilisation
des fonds oisifs ; dans la mesure où le financement des projets
d'investissement est rendu difficile par l'instabilité de la conjoncture
économique qui accroît les risques idiosyncrasiques et les risques
d'asymétrie informationnelle.
La construction des écoles et
hôpitaux par les intermédiaires financiers est une solution
proposée au problème de la surliquidité des banques. Cette
solution s'inscrit mieux dans le cadre stratégique de lutte contre la
pauvreté (CSLP) et contribue pour une grande part à
l'édification de la croissance économique, voire du
développement socio-économique.
La seconde mesure institutionnelle concerne la
réhabilitation de la cour de justice communautaire. Cette institution
régionale a pour tâche première le règlement des
conflits intra zone et pour missions secondaires la stabilité politique
et la restauration d'un Etat de droit dans tous les pays appartenant à
la zone CEMAC.
Cette mesure trouve toute son importance dans la
régularité des conflits armés que nous observons depuis
quelques années dans les pays voisins, en l'occurrence le Tchad et le
Congo, ainsi que dans l'apparition des soulèvements sociaux et
politiques qui ont bouleversé le Cameroun au début des
années 1990.
A cet effet, il est important de noter que le
système financier camerounais ne saurait se développer sans qu'au
préalable règne une atmosphère de paix.
L'instabilité socio-politique a pour principale conséquence de
rendre très incertain l'avenir, élevant ainsi les risques.
L'accroissement des risques conduit les
établissements de crédit à rationner les crédits et
à limiter leur expansion géographique. Ceci a pour effet le
ralentissement des investissements et à terme, la récession de
l'activité économique.
En outre, l'instabilité politique a pour
effet la réduction de la masse monétaire en circulation. En
effet, pendant les périodes troubles, les agents économiques
préfèrent thésauriser leurs avoirs. Ce comportement est
rationnel, dans la mesure où les placements bancaires et les
investissements comportent des risques trop élevés.
La réduction de la masse monétaire
et de la masse des crédits alloués conduit l'économie vers
une situation de crise qui n'est aucunement souhaitable pour un pays
déjà très endetté comme le Cameroun
Il est par conséquent judicieux pour
assurer la stabilité socio-politique dans ce pays que la cour
communautaire soit réhabilitée et qu'il lui soit attribué
la mission prioritaire de prévention des conflits intra pays.
Sur le plan réglementaire, il est crucial
que la crédibilité de notre système juridique soit
restaurée. Le système juridique camerounais souffre d'un manque
d'autonomie véritable. Les autorités politiques ont en effet le
pouvoir d'orienter les décisions de justice vers la satisfaction de
leurs intérêts personnels.
Il faut noter que pour émettre de telles
affirmations, il nous a fallu faire un stage académique dans une
institution bancaire dans la ville de Douala en tant que gestionnaire de fonds
de commerce.
Le constat que nous avons fait met en relief le
fait que la plupart des administrateurs publics possèdent de petites
structures soit familiales, soit personnelles. Pour assurer le financement de
leurs projets d'entreprise, ils se servent de leur qualité de
décideur pour bénéficier du crédit. Par la suite,
lorsqu'il leur arrive de ne pas respecter leurs échéances de
dette ou tout simplement de ne pas honorer leurs engagements auprès de
la banque, ils usent parfois de cette même qualité
d'administrateur pour dissuader les autorités juridiques de prendre des
décisions susceptibles de les compromettre.
Cette main mise des autorités
administratives sur le pouvoir juridique conduit au rationnement de
crédit ainsi qu'à l'accroissement du risque
d'antisélection qui a un effet néfaste sur l'efficience
allocationnelle des intermédiaires et donc sur la croissance optimale de
l'économie.
Par ailleurs, la corruption est un fléau
social qui mine la société camerounaise. Les acteurs
économiques en paient les frais lorsqu'ils possèdent des
dépôts litigieux auprès des institutions de crédit.
Ceci conduit la plupart des déposants à confier leurs avoirs
à la banque sur de courte période, conservant ainsi le
contrôle de leur épargne.
Cette attitude des épargnants n'est pas
favorable à l'amélioration de l'activité productive en ce
sens qu'elle ne permet pas aux institutions bancaires de faire des placements
sur de longues périodes ; puisque ne disposant que des avoirs
courts. Les projets d'investissement dont la rentabilité est
avérée dans le long terme mais conséquente sont ainsi
abandonnés au profit de simples crédits de campagne ou des
facilités de caisse.
A la réforme du renforcement de la
crédibilité du système financier doit s'ajouter celle de
l'application effective de la loi sur le blanchiment d'argent. Le non respect
d'une telle loi déteint sur la crédibilité du
système financier et de manière plus générale sur
la renommée du pays.
Il n'est d'ailleurs pas souhaitable pour un pays
comme le Cameroun qui bénéficie encore de l'aide des institutions
internationales d'abriter des réseaux de blanchiment
d' « argent sale ». Un tel constat pourrait geler les
relations avec ces institutions et freiner le processus d'assainissement du
système financier.
D'un point de vue purement économique, la
pratique d'une telle activité au sein du pays peut fausser les
résultats attendus de la mise en oeuvre d'une politique sectorielle
particulière.
Pour étayer nos propos, imaginons que
l' « argent sale » soit blanchi à travers une
société écran qui appartienne au secteur industriel. Les
profits comptables générés par cette industrie
démontre que le secteur industriel se porte bien et n'a en
conséquence besoin d'aucune aide quelconque. La réalité
économique peut cependant en être toute autre et les
décisions de politique qui sont prises sur la base de ces informations
sont totalement faussées.
En définitive, les mesures
institutionnelles et réglementaires suggérées dans notre
travail ont pour objectif principal l'instauration d'un cadre viable propice au
développement du système financier et surtout à la
croissance économique. Mais à elles seules elles ne sauraient
suffire pour garantir une croissance auto-entretenue qui passerait par
l'amélioration de la sphère financière. Aussi nous
essaierons de compléter l'analyse par les réformes d'ordre
économique.
B. Les réformes d'ordre économique
susceptibles d'être envisagées
Les réformes économiques se
distinguent des réformes institutionnelles et réglementaires en
ce sens qu'elles exigent de la part des autorités monétaires et
gouvernementales la mise en place d'un dispositif communicationnel important.
Elles requièrent en outre un effort de la part des différents
acteurs économiques, mais surtout un ensemble d'éléments
motivants.
La première réforme que nous
proposons est la vulgarisation des moyens de paiement modernes. Cette
vulgarisation permettra l'accroissement du taux de bancarisation de
l'économie. Celui- ci à son tour contribue à
l'amélioration du système financier et donc à
l'amélioration de l'activité économique via les
différents canaux analysés au deuxième chapitre.
Comment vulgariser ces moyens de paiement
modernes ? L'Etat camerounais depuis quelques années a
entériné la décision ministérielle portant sur le
paiement des salaires des fonctionnaires. Cette décision stipule que
pour des appointements supérieurs à 100 000 FCFA, les
fonctionnaires doivent recevoir leur salaire par virements bancaires. Cette
décision oblige ainsi de nombreux agents économiques à se
constituer des comptes bancaires de type compte chèque.
Même si elle n'est pas encore effective
dans toutes les régions du pays, la décision ministérielle
constitue un pas vers la vulgarisation des moyens de paiement. Elle a
d'ailleurs été suivie avec beaucoup d'intérêt par
quelques entrepreneurs camerounais qui désormais paient leurs
employés dont le salaire se trouve au dessus du seuil sus indiqué
essentiellement par virement bancaire.
Mais cette pratique était
déjà mise en oeuvre dans la plupart des multinationales
implantées au Cameroun pour des employés cadres et
minoritairement pour des agents de maîtrise.
Quelle est l'incidence de cette vulgarisation
sur le niveau de l'activité réelle ? Si d'ici l'horizon
2010, tous les fonctionnaires et les salariés disposent d'un compte
bancaire qu'il soit un compte chèque ou un compte d'épargne, le
volume de l'activité bancaire va augmenter. L'utilisation des
chèques comme moyen de paiement est plus sécurisant, plus commode
et elle facilite les transactions.
De plus, l'ouverture des comptes bancaires par
les acteurs économiques accroît la quantité des fonds
prêtables et partant donne l'opportunité à de grands
projets d'investissement d'être réalisés.
Au total, la vulgarisation des moyens de paiement
modernes dans la société permet aux banques secondaires de jouer
pleinement leur rôle de création monétaire dont l'incidence
sur l'activité réelle trouve ses fondements dans l'analyse
keynésienne du multiplicateur monétaire.
Outre cette mesure, nous proposons aux banques
camerounaises la diversification des produits de financement. Nous entendons
par nouveaux produits de financement de nouveaux types de crédits qui
répondent aux besoins d'une économie en développement.
D'après les critères mis en
exergue par la Banque Mondiale, le Cameroun est un pays pauvre. Le rapport du
PNUD en 2001 atteste d'ailleurs que plus de la moitié de sa population
vit en dessous du seuil de pauvreté.
Une grande partie de la population camerounaise
vit du petit commerce. Celui-ci a beaucoup de mal à se développer
et nécessite pour cela un financement bancaire encore difficilement
accessible.
A l'exemple de la « Grammy
Bank » du Bangladesh, les institutions bancaires pourraient mettre
sur pieds un crédit de petits commerces à taux bonifié
pour renforcer et développer ces activités qui sont la source de
revenu d'une grande partie de la population.
Ainsi, la demande globale pourra
s'accroître conformément aux thèses keynésiennes,
générant par conséquent l'accroissement de la production
globale.
Une autre manière de booster la demande
intérieure est d'offrir aux ménages des crédits de
consommation. Mais il est vrai que des conditions de crédit bien
ficelées doivent faire l'objet d'une étude plus approfondie.
La descente dans quelques établissements
de crédit de la ville de Douala nous a donné de constater que les
seuls types de crédit de consommation alloués sont des
crédits d'équipements et des crédits automobiles. Encore
faut-il noter qu'ils sont accordés à une classe
particulière d'individus ; il s'agit en particulier des
employés de l'institution et dans une moindre mesure de quelques
employés des entreprises partenaires et des cadres de l'administration
centrale.
Dans cet ordre d'idée, nous saluons les
efforts entrepris par la Société d'aménagement de Douala
en partenariat avec le Crédit Foncier du Cameroun qui oeuvre pour
l'amélioration des logements des habitants de cette ville.
Cette action a bien entendu des
conséquences sur la croissance économique ; dans la mesure
où la construction de ces nouveaux logements requiert une demande
abondante des matériaux de construction. Elle participe par
conséquent à la redynamisation du secteur de l'industrie
immobilière.
A côté de toutes ces
réformes structurelles, nous recommandons que les mesures
déjà envisagées par les autorités camerounaises
deviennent effectives. Il s'agit en l'occurrence de la mise sur pieds d'un
marché financier dynamique qui permettra aux petites entreprises de
trouver le financement pour leurs investissements, et de la légalisation
des associations tontinières qui sont le lieu d'un volume
conséquent de flux financiers difficiles à percevoir à
travers nos différents agrégats macro économiques.
Le marché boursier a l'avantage de
présenter la situation financière réelle de chaque acteur
qui désire y entrer en cotation. Le entreprises sont en effet
obligées de présenter leur structure financière
véritable qui dénote de leur crédibilité, afin
d'émettre des titres dont les cours auront une évolution
favorable.
Le marché boursier en plus d'être
un lieu de financement est un lieu d'évaluation des entreprises. Sa
réhabilitation permettra à l'Etat camerounais de résoudre
le problème d'évasion et fraude fiscale qui est devenu depuis
quelques années l'apanage des entreprises camerounaises.
La légalisation des tontines permettra
d'autre part d'améliorer la
« traçabilité18(*) » des mouvements de capitaux. Ainsi, les
agrégats monétaires pourraient être construits sans
ambiguïté et les décisions de politique économique
auraient les effets escomptés.
En définitive, les mesures à
entreprendre par le gouvernement camerounais sont à même de
relancer l'activité économique via un accroissement de la demande
domestique d'une part et d'autre part d'aider à la poursuite de
l'objectif de réduction de la pauvreté d'ici l'horizon 2015
à travers le financement des secteurs jugés prioritaires par les
institutions internationales.
Conclusion
Les estimations économétriques
auxquelles nous avons procédé dans ce chapitre montrent que le
développement de l'activité financière a une incidence
positive sur le développement de l'activité réelle.
Même si la relation inverse n'a pas l'objet d'une modélisation
rigoureuse, tout porte à croire que la relation que nous avons
étudiée est biunivoque.
A cet effet, nous avons proposé quelques
mesures à mettre en oeuvre sur les plans institutionnel,
réglementaire et économique qui vont dans le sens de
l'amélioration du système financier. Celle-ci a un effet
boomerang puisque le développement de l'activité productive exige
un système financier de plus en plus étoffé et
performant.
La performance du système financier est
perçue à travers l'analyse du taux de liquidité et dans
une moindre mesure du taux de quasi liquidité. Ces différents
ratios nous renseignent sur le degré de monétisation de
l'économie. Et, un système devient de plus en plus performant au
fur et à mesure que l'économie devient monétaire.
Cette transformation a l'avantage que les
politiques économiques mises en oeuvre peut aisément mouvoir
l'économie vers un équilibre. Il reste cependant à
établir la stabilité de ce nouvel équilibre. Ce travail
est à envisagé dans une étude ultérieure.
Conclusion Générale
Il y a environ 40 ans que Goldsmith a
posé les jalons de l'analyse de la corrélation entre le
développement de l'activité financière et la croissance
économique. Il a été en effet le premier à
démontrer de façon empirique que le développement
financier a un effet positif sur le développement de l'activité
productive.
Depuis lors, de nombreux travaux empiriques et
théoriques notamment ceux de Loayza (2005), Levine (1997), abondent dans
le même sens. Ils essaient en outre de déterminer les
différents canaux par lesquels le développement financier
affecte- est affecté par- la croissance économique.
Le sens de la causalité de la relation a
lui aussi fait l'objet d'une controverse théorique tranchée par
Patrick (1966) qui établit que cette relation finance - Croissance est
biunivoque.
Néanmoins, sur le plan empirique,
l'estimation de la relation de cause à effet tend à conforter
l'idée selon laquelle à long terme c'est l'amélioration de
la sphère financière qui impulse celle de la sphère
productive à travers l'accroissement des investissements dans le domaine
de la recherche et du développement (R&D) et des innovations
financières.
D'après Levine (1997), cette conclusion
sur la dynamique de long terme Finance - Croissance a un corollaire très
important :
Bien que les paniques bancaires et financières ou
même les crises économiques ont des effets critiques, le lien
à long terme Finance - Croissance survit aux bouleversements et
fluctuations de courte période l'affectent.
Cette conclusion est d'autant plus importante dans notre
analyse que malgré la succession des crises économique et du
système financier camerounais, celui-ci depuis la fin de la
restructuration bancaire de 1997 s'étoffe d'un nouvel type
d'intermédiaires financiers, à savoir les établissements
de microfinance et d'une gamme variée de produits nouveaux impulsant
ainsi la croissance économique.
L'objet de ce mémoire est
d'établir le signe, le sens et la durée de la relation entre le
développement de l'activité financière et la croissance de
l'activité économique au Cameroun. Nous avons ainsi pu
démontrer que le signe de notre relation était positif.
Mais l'étude de la causalité nous
a mené à conclure qu'au Cameroun, c'est plutôt la
croissance économique qui influence la qualité des services
financiers et la structure du système bancaire.
L'analyse du terme de la relation a quant
à elle nécessité une démarche méthodologique
rigoureuse. L'utilisation de la méthode d'estimation de Engel et Granger
nous a permis de faire ressortir d'une part la relation statique de long terme
qui détermine le sentier d'expansion entre nos deux
phénomènes et d'autre part la relation dynamique de court terme
à travers l'estimation du modèle à correction
d'erreurs.
Les conclusions auxquelles nous avons abouti
sont les suivantes :
· A long terme, il existe une relation positive entre le
taux de quasi liquidité de l'économie et la production globale.
Et de la même manière, les crédits alloués au
secteur privé sont corrélés positivement avec le niveau de
l'activité réelle.
· Par contre, la dynamique de court terme n'aboutit pas
aux mêmes conclusions. L'estimation des différents modèles
à correction d'erreurs établit que seules les variations
passées du PIB ont une incidence sur son taux de croissance. Les chocs
en provenance du système financier affectent très peu la
structure du comportement des agents économiques.
· A l'inverse, l'observation des faits nous amène
à inférer qu'une quelconque variation du revenu des agents
affecte leur comportement d'épargne et d'investissement. En effet, la
baisse des revenus survenus au cours de la décennie 1980 a
été suivie par la baisse des avoirs bancaires. Mais au lendemain
de la dévaluation de janvier 1994 qui a engendré un regain de
l'activité économique dès 1997, les dépôts
bancaires ont connu une nette progression.
Il est néanmoins important de souligner
que toutes les conclusions que nous avons pu tirer jusqu'ici ont
nécessité la prise en compte dans les relations de long terme
d'autres variables explicatives pertinentes. Sans elles, les résultats
de nos estimations seraient moins robustes et ne permettraient pas d'en
inférer une quelconque analyse. Les nouvelles variables qui ont
été considérées dans nos modèles sont les
parts de l'épargne, de l'investissement et de la dépense
nationale dans la production globale.
Dans ce travail, nous n'avons malheureusement
pas discuté des liens théoriques entre ces variables et les
indicateurs de croissance économique ; mais d'un point de vue
empirique, leurs effets sur le niveau de l'activité économique au
Cameroun restent quelque peu ambigus.
A l'issue de tout ce travail analytique, nous
avons suggéré quelques propositions de politiques
économiques susceptibles d'améliorer la relation. Il s'agit en
l'occurrence :
Ø Sur le plan institutionnel
· de la mise sur pieds dans les établissements de
crédit d'un véritable département de trésorerie.
· de la réhabilitation de la cour de justice
communautaire
Ø Sur le plan réglementaire
· du renforcement de la crédibilité du
système judiciaire
· de la mise en application de loi contre le blanchiment
d'argent
Ø Sur le plan purement économique
· de la vulgarisation des moyens de paiement modernes
· de la diversification des produits de financement
· du fonctionnement effectif du marché
financier
· de l'intégration dans le secteur formel des
associations tontinières qui sont devenues au fil du temps un
véritable lieu de financement des PME camerounaises
Cette dernière proposition pourrait
constituer un approfondissement de ce sujet. Les travaux ultérieures sur
la relation entre le développement du système financier et la
croissance économique pourraient en effet prendre en compte le secteur
informel dans l'analyse. Aussi, la construction d'un nouvel type d'indicateur
de développement financier s'avère nécessaire.
* 1 CEMAC :
Communauté économique et monétaire de l'Afrique Centrale.
Les pays membres de cette zone sont le Cameroun, le Gabon, le Congo, la
RCA, le Tchad et la Guinée équatoriale
* 2 UMAC : Union
Monétaire de l'Afrique Central
* 3 BEAC : Banque des Etats
de l'Afrique Centrale
* 4 COBAC : Commission
Bancaire de l'Afrique Centrale
* 5 Les institutions non
financières sont presque inexistantes dans un pays comme le Cameroun
où le système financier mis en place est encore embryonnaire.
* 6 Le rapport entre le
crédit accordé par les banques secondaires et le total du
crédit octroyé par le système financier est peu
significatif comme indicateur dans un contexte de surliquidité bancaire.
Si une banque souhaite se refinancer, elle le fera sur le marché
interbancaire plutôt qu'en ayant recours aux concours de la banque
centrale.
* 7 L'introduction du
progrès technique dans le modèle ne modifie en rien l'analyse de
l'incidence du développement financier sur la croissance d'état
stationnaire. En effet, le progrès technique pour Solow est une variable
exogène, déterminé en dehors de l'économie.
Autrement dit il n'est pas possible d'agir sur son niveau au moyen des
politiques économiques. Seuls des chocs exogènes pourraient
modifier son niveau réel. En supposant qu'il croît à taux
constant g, Solow démontre que le stock de capital par tête et la
production par tête croissent à ce même taux g. Seulement ce
canal de transmission du développement financier vers la croissance
économique reste inopérant dans notre cadre d'analyse.
* 8 Diamond et Dybvig ont
construit un modèle en 1983 pour montrer comment les banques assurent en
tout temps la liquidité des dépôts tout en menant à
bien leur rôle de financement de l'activité économique.
Scialom en fait un résume succinct dans son ouvrage « Economie
bancaire », 2001. Les auteurs partent d'un modèle à
deux périodes et démontrent qu'il est toujours plus
intéressant pour les épargnants de faire des dépôts
longs qui bénéficient d'une forte rentabilité plutôt
que des dépôts de court terme dont la rentabilité est plus
faible ; et ceci même s'ils doivent s'abstraire au contrôle de
leurs avoirs dont la gestion est désormais assurée par le
banquier.
* 9La procédure du
test ADF (Augmented Dickey-Fuhler) est séquentielle mais très
simple. L'idée générale consiste à partir d'un
modèle autorégressif d'ordre p dit AR(p) et d'en écrire le
modèle dérivé en différence première puis de
procéder à son estimation. L'écriture du modèle en
différence peut accepter trois formes possibles : un modèle
avec trend et constante (modèle 3), un modèle avec constante et
sans trend (modèle 2) et enfin un modèle sans constante ni trend
(modèle 1).
* 10 Le nombre de retard
pris en compte dans le modèle est délicatement choisi. En effet,
l'inclusion d'un nombre insuffisant de retards peut affecter le niveau
général du test et l'introduction d'un nombre trop
élevé de retards réduit le nombre de degrés de
liberté et la puissance du test ; ce qui conduit très
souvent et de manière erronée à l'acceptation de
l'hypothèse nulle (Lardic et Mignon, 2002). Ces auteurs proposent un
choix du nombre de retards conforme à l'observation des
corrélogrammes des processus en différence première.
* 11 Johansen développe
deux types de test de cointégration. Le premier test est dit test de la
valeur propre maximale et le second test est dit de la trace. Ce dernier est le
pus utilisé parce qu'il permet de connaître le nombre de vecteur
de cointégration même s'il ne renseigne pas sur les variables
cointégrées. (Lardic et Mignon, 2002)
* 12 La configuration du
logiciel (Eviews) que nous utilisons nous oblige à préciser si le
test est fait entre les variables en niveau ou en différence. Ainsi
lorsque nous introduisons dans le volet lags 0 to 0, ceci signifie que le test
est fait entre les variables en niveau et que nous ne considérons aucun
retard dans le VAR. Si par contre, nous introduisons 1 to 1, cela signifie que
le test est fait entre les variables en différence première et
que nous considérons un VAR(1).
* 13 La causalité au
sens de Pierce et Haugh (1977) peut être caractérisée par
les corrélations des innovations des deux processus X et Y. Dans ce cas
un simple test de student sur la significativité du coefficient
d'autocorrélation. On conclura à une non causalité lorsque
le coefficient sera significativement nul et à une causalité dans
le cas contraire.
* 14Sims (1980) propose de
considérer dans l'étude de la causalité les valeurs
futures des processus. Ainsi, si les valeurs futures de Yt peuvent
permettre d'expliquer la valeur présente du processus Xt,
alors, X est la cause de Y. De façon similaire, on dira que X cause Y si
les innovations de X contribuent à la variance de l'erreur de
prévision de Y.
* 15 Jarque-Bera est une
statistique qui permet de tester la normalité des erreurs. Elle suit une
loi de Khi deux à 2 degrés de liberté. Une
probabilité faible associée à cette statistique conduit au
rejet de l'hypothèse nulle de normalité des résidus.
* 16 La statistique de White
suit une loi de Khi-Deux avec comme nombre de degré de liberté,
le nombre de paramètres estimés en dehors de la constante. Pour
notre modèle, cette statistique suit un Khi-Deux à 1 degré
de liberté.
* 17 La statistique F dont nous
parlons est calculée automatiquement lors de la mise en oeuvre du test
d'hétéroscédasticité de White. Elle nous indique si
d'importantes variables ont été omises dans la
spécification du modèle. Il est cependant difficile de
déterminer avec exactitude la loi de probabilité de cette
statistique. Pour cette raison, nous ne nous servirons que de la
probabilité qui lui est associée pour prendre des
décisions.
* 18Le terme
traçabilité est propre au jargon bancaire ; il
désigne la possibilité qu'ont les autorités
monétaires et publics à retracer sans difficulté les
différents flux de capitaux dans l'économie.
|