PREMIERE PARTIE :
PRESENTATION
GENERALE DE
L'AUTEUR ET DE SON
OEUVRE.
ESPACE ET TEMPS DANS L'OEUVRE
DE JULES VERNE :
« VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE... » ET
DANS LE TEMPS.
« Mon but a été de dépeindre la
Terre, et pas seulement la Terre, mais l'univers, car j'ai quelquefois
transporté mes lecteurs loin de la Terre dans mes romans. »
Jules Verne, 18933.
I - PRESENTATION GENERALE DE L'AUTEUR ET DE SON
OEUVRE.
A partir de trois romans que nous avons retenus, et parmi tant
d'autres possibles, nous allons montrer brièvement à quel point
les notions d'espace et de temps sont centrales dans l'oeuvre de Jules
Verne.
A) - Voyage au centre de la terre (1864) : un voyage dans le
temps.
Voyage au centre de la terre (1864) constitue
un bon exemple de mélange entre réalisme et imaginaire. Plus
qu'un voyage au centre de la terre, il s'agit d'un voyage dans le temps que
nous propose l'auteur. Se retrouvant à 120 kilomètres sous terre
(environ), les héros découvrent un univers totalement
différent de celui qu'ils ont quitté, où l' «
habiter » correspond beaucoup plus, a priori, à celui
des époques préhistoriques et antédiluviennes, qu'à
celui de la fin du 19° siècle. La description du voyage en
lui-même représente l'essentiel du roman (soit un peu moins des
2/3), où nous observons une très forte corrélation entre
la
3 Propos rapportés par DEKISS Jean-Paul.
Jules Verne. Le rêve du progrès. Paris :
Gallimard, 1996. Page 146.
distance parcourue à l'intérieur de la terre et
le retour dans le temps4. La narration sous forme d'un carnet de
bord5, décrivant scrupuleusement les différentes
couches géologiques rencontrées, confère au récit
une crédibilité tout à fait honnête, même si
parfois certains passages manquent de cohérence et de réalisme
par rapport à l'ensemble du texte6...
La dialectique de l'espace et du temps est donc ici au coeur
du roman. Jules Verne y fait preuve d'une connaissance solide
et précise du vocabulaire géologique et
minéralogique7, les descriptions qu'il donne des roches et
des minéraux étant tout à fait conformes à la
réalité. Néanmoins, il s'agit cependant plus d'une
réalité théorique que d'une réalité
pratique, la structure géologique de la terre n'étant
actuellement réellement connue que sur une quinzaine de
kilomètres de profondeur8, le reste n'étant
qu'extrapolations et suppositions de la part des géologues et des
géophysiciens (par l'étude de la propagation des ondes
sismiques).
B) - De la terre à la lune (1865) : un autre type de
voyage dans le temps.
De la terre à la lune (1865) est
l'archétype de l'oeuvre d'anticipation. Pour autant, et malgré
cette affirmation, Jules Verne a-t-il réellement fait
preuve d'anticipation, ou est-ce son imagination qui a été
rattrapée un siècle plus tard par la réalité ? Le
sous-titre, quant à lui, n'en est pas moins tout aussi
intéressant : « Trajet direct en 97 heures 20 minutes...
»9
La description des préparatifs et de la mise en place
du projet constitue ici l'essentiel du roman, le voyage ne représentant
que quelques pages10. L'utilisation et la restitution précise
des dernières connaissances en matière de balistique permettent
à l'auteur de donner
4 La corrélation est inversement
proportionnelle : les voyageurs rencontrent d'abord les terrains les plus
anciens (siluriens, dévoniens,...), pour arriver aux plus
récents. Au début de leur aventure correspond le début du
monde, et ainsi de suite...
5 Et à la première personne du
singulier.
6 Cf. supra.
7 Ainsi que des différentes théories de
l'époque (contradictoires et qui s'affrontaient) relatives à la
nature de l'intérieur de la planète.
8 Nous faisons référence ici au forage
le plus profond réalisé par l'homme aujourd'hui. Il s'agit d'un
forage russe (à Zapol'arnyj) atteignant environ les 15 kilomètres
de profondeur. La possibilité pour l'homme de réaliser un tel
voyage constituerait un formidable moyen d'enrichir nos connaissances sur la
structure géologique de l'écorce terrestre. Il ne s'agirait alors
plus d'un retour en arrière, mais d'un véritable bond en
avant...
9 Surtout quand nous savons que la mission APOLLO 11
(du 16/07/1969) relia la terre à la lune en 102 heures, 45 minutes et 40
secondes, et que le départ se déroula en Floride...
10 Au contraire, dans Voyage au centre de la
terre, les proportions sont inversées : les préparatifs
sont détaillés en quelques pages, quant au voyage, il constitue
l'essentiel du roman. Il en est de même dans Le tour du monde en
80 jours.
beaucoup de réalisme au projet, même si les
dimensions démesurées du canon semblent parfois difficiles
à accepter, bien que l'action se déroule aux U.S.A., le pays,
où déjà à l'époque, tout est possible.
La référence à l' « habiter
» est centrale ici aussi, puisqu'il s'agit de projeter des hommes de
la terre à la lune, afin que ces derniers puissent coloniser le
satellite naturel de la terre. Or, le postulat de départ, et qui est
celui des scientifiques de l'époque considérée, est que la
lune est habitée (par les Sélénites). La seule
difficulté, a priori, consiste à acheminer correctement
les hommes vers leur destination, la possibilité de s'établir
sans aucune difficulté sur la lune étant communément
admise. Une fois encore, Jules Verne extrapole, mais anticipe
aussi, les possibilités des inventions de la fin du 19°
siècle.
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