Le droit international à l'épreuve de l'emploi d'armes nucléaires aux termes de l'avis consultatif de la Cour internationale de Justice du 8 juillet 1996( Télécharger le fichier original )par Sylvain-Patrick LUMU MBAYA Université de Kinshasa - Licence en droit-Avocat au Barreau de Kinshasa/Matete et Assistant à la Faculté de droit de l'UNIKIN 2004 |
SECTION II. LES NORMES GENERALES CONVENTIONNELLES ET COUTUMIERES DE PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME ET DU DROIT DE L'ENVIRONNEMENTNous nous pencherons ici en premier lieu sur les normes conventionnelles avant de parvenir en second lieu aux règles générales d'origine coutumière. §1. Les normes conventionnelles Au nombre de normes conventionnelles furent évoqués les traités et instruments internationaux de protection des droits de l'Homme et ceux en vigueur en matière de protection et de sauvegarde du droit de l'environnement. A. Les instruments juridiques de protection des droits de l'Homme
Ici, la discussion devant la Cour s'est déroulée autour de l'applicabilité du pacte international relatif aux droits civils et politiques et les instruments de protection des droits de l'Homme de caractère régional d'une part, et de la convention du 9 décembre 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide, d'autre part. 1. L'applicabilité du pacte international relatif aux droits civils et politiques et instruments des droits de l'Homme de caractère régional Pour bien cerner le contenu du débat en question, nous partirons des positions contradictoires des Etats pour parvenir aux commentaires des auteurs en passant par l'opinion de la Cour. 1°. Les positions contradictoires des Etats a) Les arguments favorables Ces arguments viennent des Etats partisans de l'illicéité de l'emploi d'armes nucléaires en toute circonstance. Selon eux, l'emploi de ces armes porterait atteinte au droit à la vie(41(*)) tel que garanti par le PIDCP dont l'élaboration a commencé en janvier 194742(*). En effet, sans définir le droit à la vie, les Etats parties à ce pacte et d'autres, justifiant de l'intérêt à ce stade, se sont expressément engagés à donner effet à ses dispositions protégeant ce droit. C'est ainsi qu'ils ont particulièrement soutenu que tout emploi d'armes nucléaires porterait atteinte à l'article 6, paragraphe 1 du PIDCP. En effet, cette disposition stipule que « Le droit à la vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être protégé par la loi. Nul ne peut être arbitrairement privé de la vie ». Nul n'est besoin de dire que ce point de vue n'a été de bon ton que pour les partisans de l'illicéité tandis que les tenants de la licéité ont soutenu le contraire. b) Les arguments défavorables Les adeptes de la thèse de la licéité de l'emploi d'armes nucléaires ont soutenu à contrario que le droit à la vie n'est pas un droit absolu et que la privation de la vie pendant les hostilités est une exception nécessaire à ce principe qui reste soumis, dans certains systèmes de protection des droits de l'Homme, à un régime dérogatoire et restrictif. Ils désapprouvent par ailleurs l'affirmation selon laquelle cet instrument est applicable à l'emploi de l'arme nucléaire. Ils estiment, quant eux, que le PIDCP « ne mentionnent ni la guerre, ni les armes et que l'on a jamais envisagé que cet instrument régisse la question de la licéité ou de l'illicéité de l'emploi des armes nucléaires ». Le pacte vise plutôt « la protection des droits de l'Homme en temps de paix, alors que les questions relatives à la privation illicite de la vie au cours des hostilités sont régies par le droit international applicable dans des conflits »(43(*)). Le PIDCP ne peut donc pas, selon eux, régir la menace ou l'emploi d'arme. 2°. Le point de vue de la Cour La Cour adopte de se prononcer en premier lieu sur le caractère absolu ou relatif du droit à la vie garanti par le PIDCP avant de dire en second lieu si celui-ci est applicable ou non à la menace ou l'emploi d'armes nucléaires. - A propos de la première préoccupation, l'organe judiciaire mondial déclare que « le droit de ne pas être arbitrairement privé de sa vie vaut aussi pendant les hostilités ». C'est « une prescription à laquelle il ne peut être dérogée ». Même les instruments des droits de l'Homme à caractère régional, notamment la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'Homme proclament le droit à la vie comme étant l'un des droits auxquels il n'est pas possible de déroger et qui fait partie du noyau irréductible des droits de l'Homme. La protection offerte par le PIDCP, soutient par ailleurs la Cour, « ne cesse pas en temps de guerre, si ce n'est par l'effet de l`article 4 du Pacte, qui prévoit qu'il peut être dérogé, en cas de danger public, à certaines des obligations qu'impose cet instrument »(44(*)) Cette exception ne concerne-t-elle pas le droit à la vie ? Non, nous semble-t-il car l'article 6, paragraphe 1 déclare qu'on ne peut déroger à ce droit, et l'alinéa 2 de l'article 4 susmentionné réconforte cette position. Sans cela, l'interprétation extensive de cet article 4 ouvrirait une brèche favorable aux Etats nucléaires qui risqueraient d'attacher la notion de danger public évoquée dans cette disposition à celle de la légitime défense dans laquelle la survie même d'un Etat serait en cause, et s'octroieraient ainsi une possibilité d'emploi d'armes nucléaires au détriment du droit protégé. La Cour n'a pas affirmé une telle prétention. - Au regard de la seconde préoccupation sur l'applicabilité du Pacte international relatif aux droits civiques et politiques à l'emploi d'armes nucléaires, elle déclare que ce sera uniquement au regard de la lex specialis à savoir le droit applicable dans les conflits armés, et non au regard des dispositions du pacte lui-même, que l'on pourra dire si tel décès provoqué par l'emploi d'un certain type d'armes au cours d'un conflit armé doit être considéré comme une privation arbitraire de la vie contraire à l'article, paragraphe 1 du pacte.(45(*)). 3°. Commentaires de la doctrine Les commentaires des auteurs ont essentiellement porté sur le caractère dérogatoire ou non du droit à la vie. Sans le définir, quelques uns d'entre eux l'ont qualifié de droit « intangible, voir sacré » ; mais relativisent plutôt son caractère dérogatoire en affirmant qu' « il ne peut être dérogé que dans des circonstances spéciales ».(46(*)) D'autres estiment, par ailleurs, que même dans ces circonstances, lorsqu'une arme « peut tuer entre un million et un milliard de personnes et qu'aucun service de santé au monde ne soit capable d'améliorer de manière significative une situation résultant de l'utilisation ne serait - ce que d'une seule arme nucléaire »(47(*)), la vie humaine se trouve dévalorisée au point qu'il n'y a plus de dignité humaine au sens où on l'entend dans toutes les cultures. Un Etat qui entreprend délibérément en quelque circonstance que ce soit une action aboutissant à un tel résultat « porte atteinte au respect de la dignité fondamentale de la personne humaine dont dépend la paix du monde et auquel sont tenus tous les Etats membres des Nations Unies. (48(*)) Le juge Weeramantry ne se réfère pas seulement [ici] à des dispositions de la Déclaration universelle des droits de l'homme ou d'autres instruments relatifs aux droits de l'homme, mais à un aspect fondamental du droit de la Charte dont le préambule indique que les peuples des Nations Unies sont notamment résolus à « proclamer à nouveau [leur foi] dans les droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine », et affirme que « jamais au cours d'une longue histoire marquée par l'inhumanité de l'homme envers l'homme n'a été inventée une arme qui est si contraire, comme c'est le cas de l'arme nucléaire, à la dignité et à la valeur de la personne humaine ».(49(*)) Il faut aussi mentionner l'observation générale du Comité des droits de l'homme des Nations Unies intitulée « le droit à la vie et les armes nucléaires »(50(*)), qui fait sienne l'opinion de l'Assemblé générale selon laquelle le droit à la vie est particulièrement pertinent dans le cas des armes nucléaires(51(*)). Considérant que les armes nucléaires constituent l'une des plus graves menaces à la vie et au droit à la vie, le Comité a vu un tel conflit entre les armes nucléaires et le droit international qu'il a proposé de qualifier l'emploi de ces armes de crime contre l'humanité. Tous ces droits de l'homme procèdent d'un droit fondamental décrit par René CASSIN comme « le droit des êtres humains à l'existence »(52(*)). Reconnaître la licéité, en quelque circonstance que ce soit, de l'emploi d'une arme qui peut faucher des vies par millions, serait détruire les bases sur lesquelles repose un système délicat qui représente l'une des réalisations juridiques les plus remarquables du siècle. Ce système, bâti sur l'une des valeurs les plus essentielles et les plus dignes de respect que connaisse le droit, ne peut pas survivre sous une forme théorique ; ce qui serait le cas si le droit international devrait reconnaître une telle licéité. Malgré toutes ces raisons, la Cour ne retiendra pas le Pacte international relatif aux droits civils et politiques au nombre des dispositions directement pertinentes applicables à l'emploi d'armes nucléaires. Le rejet du premier argument a amené la Cour à l'examen de l'applicabilité de la convention du 9 décembre 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide. 2. L'applicabilité convention du 9 décembre 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide Nous passerons également ici en revue les positions contradictoires des Etats, l'opinion de la Cour avant d'arriver à la critique des auteurs. 1°. Les avis contradictoires des Etats a) Les arguments favorables Certains Etats, notamment les défenseurs de l'illicéité, ont soutenu devant la Cour que l'interdiction du génocide, formulée dans la convention précitée serait une règle pertinente du droit international que la Cour devrait appliquer en l'espèce (53(*)) Ils ont, en effet, estimé que le nombre de morts que causerait l'emploi de l'arme nucléaire serait énorme; que l'on pourrait, dans certains cas, compter parmi les victimes des membres d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux particulier et que l'intention de détruire de tels groupes pourrait être inférée du fait que l'utilisateur de l'arme nucléaire aurait omis de tenir compte des effets bien connus de l'emploi de cette arme.(54(*)) b) Les arguments défavorables Etant donné qu'ils se situent dans le contexte d'un débat contradictoire, les partisans de la licéité étaient appelés et devraient rencontrer l'argument de leurs adversaires qui soutiennent l'illicéité de l'emploi de l'arme nucléaire. A en croire le contenu de l'avis consultatif, ils ne l'ont pas fait ; en l'absence de toute raison valablement évoquée, l'argument est resté sans contre-argument et, cela ne fausse pas tout de même le caractère contradictoire du débat. 2°. L'opinion de la Cour La Cour rappellera que « le génocide est défini à l'article II de la Convention du 9 décembre 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide »(55(*)) En effet, l'article II de cette convention définit le génocide comme « l'un quelconque des actes ci-après, commis dans l'intention de détruire en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel : a) meurtre de membres du groupe ; b) atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe ; c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ; d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ; e) transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe. Quant à la question de l'applicabilité de cette disposition à l'emploi d'armes nucléaires, la Cour relèvera à cette égard que « l'interdiction du crime de génocide serait une règle pertinente en l'occurrence que s'il est établi que le recours aux armes nucléaires répond à une intention « génocidaire » dirigée contre un groupe comme tel, que requiert la disposition sus- évoquée.(56(*)) Ainsi s'empresse-t-elle à dire qu'il ne serait possible de parvenir à une telle conclusion qu'après avoir pris dûment en compte les circonstances propres à chaque cas d'espèce.(57(*))
3°. Point de vue de la doctrine Le raisonnement de la Cour était de bon ton chez les Etats défenseurs de la licéité. Mais ceux qui soutiennent, à l'opposé, l'illicéité de l'emploi de l'arme nucléaire, attendaient certainement que la Cour dénonçât de manière absolue cette tendance régressive qu'on veut imprimer au droit international. En effet, ce que dit la Cour (au paragraphe 26 de l'avis), à propos des rapports entre l'arme nucléaire et le crime de génocide est inadéquat car, l'emploi d'armes nucléaires dans le cadre d'une riposte à une attaque nucléaire, surtout dans l'hypothèse d'une riposte généralisée, causerait vraisemblablement un génocide non lié à aucune intention première d'extermination d'un groupe ethnique ou racial dans le chef de l'utilisateur. Le juge Weeramantry estime que même une bombe modeste du genre de celles qui ont été utilisées au Japon, pourrait être un instrument de génocide si l'on considère le nombre de personnes qui ont été tuées dans ce pays à la suite de ces explosions. Lancée sur une ville, une seule bombe pouvait faire plus d'un million de morts. Si un nombre plus élevé de bombes devrait être utilisé en riposte le nombre des morts pourrait, selon les estimations de l'Organisation Mondiale de la Santé sur les effets de la guerre nucléaire, atteindre dans le pays auteur de l'attaque et les autres pays le total de un milliard. Un tel résultat « constitue bien un génocide et ne peut quelles que soient les circonstances être toléré par le droit ». (58(*)) Par ailleurs, quiconque emploie une bombe nucléaire sait pertinemment bien qu'elle aura pour effet de tuer un si grand nombre de personnes et que des populations entières disparaîtront. Il existe une tendance, dans les discussions sur la définition du génocide dans la convention, à mettre trop l'accent sur le mot « comme tel ». L'argument que l'on en tire est que l'atteinte à un groupe national, ethnique racial ou religieux en tant que tel doit être le résultat intentionnel et non pas un effet secondaire d'un autre acte. Mais puisque les bombes nucléaires ont la capacité d'anéantir massivement la population, ces chiffres s'échelonnant entre plusieurs centaines de milliers et plusieurs millions de personnes, il ne fait pas de doute que l'arme nucléaire vise tout ou en partie, le groupe national de l'Etat contre lequel elle est dirigée.(59(*)) L'analyse de la Cour [devrait donc] être complétée par le rappel aux règles concernant les dommages collatéraux que l'attaque d'objectifs militaires légitimes peut causer aux populations civiles (60(*)) estime le juge Guillaume. Ces règles trouvent leur origine dans les articles 23 g, 25 et 27 de l'annexe à la convention IV de La Haye. Elles firent l'objet de formulation nouvelle dans le projet de convention sur la réglementation de la guerre aérienne de 1923 dans la résolution adoptée par l'Assemblée de la Société des Nations le 30 septembre 1938. Elle furent explicitées par le Tribunal militaire américain de Nuremberg et par l'Assemblée générale des Nations Unies qui déclare à l'unanimité que : « il est interdit de lancer des attaques contre les populations civiles en tant que telles...il faut en tout temps faire la distinction entre les personnes qui prennent part aux hostilités et les membres de la population civile, afin que ces derniers soient épargnés dans toute la mesure du possible ».(61(*)) Le juge Ferrari Bravo se demande pour sa part s'il peut être de s'imaginer qu'au moment où le droit humanitaire engendre toute [cette] série de principes pour la protection de la population civile ou pour la sauvegarde de l'environnement, ce même droit international continue d'abriter en son sein la licéité par exemple de la bombe à neutrons qui laisse intact l'environnement mais...seulement avec la « petite » conséquence de l'anéantissement de la population. Si tel est le cas, peu importe une norme spécifique sur la bombe à neutrons car elle devient automatiquement illicite par contraste avec la majorité des règles du droit international.(62(*)) En dépit de ce qui précède, la Cour ne retient pas la convention du 9 décembre1948 dans le lot de règles directement et spécifiquement applicables à l'emploi de l'arme nucléaire. C'est ainsi que les défenseurs de l'illicéité ont dans leurs exposés écrits et oraux soutenu en outre que tout emploi d'armes nucléaires serait illicite au regard de normes en vigueur en matière de sauvegarde et de protection de l'environnement. B. Les normes en vigueur en matière de sauvegarde et de protection de l'environnement 1°. La position des tenants de l'illicéité (63(*)) Les défenseurs de l'illicéité ont avancé l'argument selon lequel l'environnement, habitat commun à tous les membres des Nations Unies ne pourrait être endommagé par un ou plusieurs membres au détriment des autres. Ils ont cité dans leurs exposés oraux et écrits que les divers traités et instruments internationaux en vigueur, à savoir le protocole additionnel I aux conventions de Genève de 1949 - qui, à son article 35 paragraphe 3, interdit l'emploi de « méthodes ou moyens de guerre qui sont conçus pour causer ou dont on peut attendre qu'ils causeront des dommages étendus, durables et graves à l'environnement naturel » - et la convention du 18 mai 1977 sur l'interdiction d'utiliser des techniques de modification de l'environnement à des fins militaires ou toutes autres fins hostiles - qui, à son article Ier interdit l'emploi d'armes « ayant des effets étendus, durables ou graves sur l'environnement ». Ont également été cités les déclarations de Stockholm de 1972 (principe 21) et de Rio de 1992 (principe 2) - qui expriment la conviction commune des Etats concernés qu'ils ont le devoir « de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommages à l'environnement dans d'autres Etats ou dans des régions (zones) ne relevant d'aucune juridiction nationale ». Ils ont en outre soutenu que « tous ces instruments, de même que d'autres dispositions relatives à la protection et à la sauvegarde de l'environnement, s'appliqueraient à tout moment, en temps de guerre comme en temps de paix, serait violés par l'emploi d'armes nucléaires ayant des effets transfrontaliers. 2°. Le point de vue des partisans de la licéité (64(*)) Ces Etats ont, en effet, soit remis en cause le caractère contraignant de ces dispositions du droit de l'environnement ; soit contesté que la convention sur l'interdiction d'utiliser des techniques de modification de l`environnement à des fins nucléaires ou toutes autres fins hostiles ait un quelconque rapport avec l'emploi d'armes nucléaires dans un conflit armé, soit encore nié être liés de façon générale par les dispositions du protocole additionnel I, ou bien rappelé qu'ils avaient réservé leur position sur l'article 35, paragraphe 3 de celui-ci. Ils ont soutenu, par ailleurs, que l'objet principal des traités et normes relatifs à l'environnement est de protéger l'environnement en temps de paix ; que ces traités ne mentionnent pas les armes nucléaires en particulier et que ce serait fragiliser l'empire du droit et la confiance nécessaire aux négociations internationales que de faire dire à ces traités qu'ils interdisent le recours aux armes nucléaires. Ils ne sont donc pas applicables en l'espèce. La Cour était donc appelée à départager les parties par rapport à leurs moyens de défense ci-haut évoqués. 3°. La position de la Cour (65(*)) D'entrée de jeu, la Cour affirme sa préoccupation de ce que « l'environnement est menacé jour après jour et de ce que l'emploi d'armes nucléaires pourrait constituer une catastrophe pour le milieu naturel ». Elle a également conscience que « l'environnement n'est pas une abstraction, mais bien l'espace où vivent les êtres humains et dont dépendent la qualité de leur vie et leur santé » y compris les générations à venir. L'obligation générale qu'ont les Etats de veiller à ce que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle respectent l'environnement dans d'autres Etats ou dans les zones ne relevant d'aucune juridiction nationale fait maintenant partie du corps de règles du droit international de l'environnement. Cette position de la Cour est consolidée par celle de la Commission du droit international qui va plus loin, en déclarant que les principes de la protection de l'environnement sont aujourd'hui « si profondément encrés dans la conscience de l'humanité qu'ils sont devenus des règles particulièrement essentielles du droit international »(66(*)). La Cour, a même qualifié de crime international la pollution massive de l'atmosphère ou des mers.(67(*)) Mais la Cour, en revisitant la question, la précise plutôt estimant qu'il ne s'agissait pas de savoir si les traités relatifs à la protection de l'environnement sont ou non applicables en période de conflit, mais bien de savoir si les obligations nées de ces traités ont été conçues comme imposant une abstention totale pendant un conflit armé. A ce propos, elle juge que ces traités n'entendent « pas priver un Etat de l'exercice de son droit de légitime défense en vertu du droit international, au nom des obligations qui sont les siennes de protéger l'environnement ». Néanmoins, poursuit-elle, les Etats doivent (toujours) tenir compte des considérations écologiques lorsqu'ils décident de ce qui est nécessaire et proportionné dans la recherche d'objectifs militaires. Le respect du droit de l'environnement devient ainsi l'un des éléments qui permettent de juger si une action est conforme aux principes de nécessité et de proportionnalité. Ce droit comporte alors un certain nombre de principes auxquels les armes nucléaires portent atteinte et que le juge Weeramantry estime susceptibles d'être reconnus par la Cour à la faveur de la présente demande d'avis consultatif et utilisés par elle dans la formulation de ses conclusions ;(68(*)) car, la guerre exerce une action intrinsèquement destructrice sur le développement durable. Les Etats doivent donc « respecter le droit international relatif à la protection de l'environnement en temps de conflit et participer à son développement, selon le besoin »(69(*)) ; ces principes s'appliquent aussi bien en temps de guerre qu'en temps de paix et « procèdent d'obligations applicables dans les deux situations.(70(*)) Quant aux dispositions du protocole additionnel I aux conventions de Genève, (à savoir l'article 35, paragraphe 3 et l'article 55), la Cour observera, par ailleurs, qu'elles offrent à l'environnement une protection supplémentaire.(71(*)) L'on peut penser, à la lecture de ces dispositions, que la question pertinente n'est pas de savoir si l'on a voulu ou non viser les armes nucléaires mais d'y voir des énoncés de principes incontestables et incontestés du droit international coutumier. Soutenir que les principes généraux ainsi énoncés ne sont pas assez explicites pour pouvoir être considérés comme applicables aux armes nucléaires ou que les armes nucléaires ont été délibérément passées sous silence et ne sont donc pas couvertes ou même qu'il était entendu clairement que les armes nucléaires n'entraient pas dans le champ des dispositions en cause c'est mettre en relief l'incongruité d'une thèse qui reconnaît comme interdites les armes présentant une nocivité moindre pour l'environnement mais laisse intact un moyen infiniment plus puissant qui cause les dommages que le traité a pourtant pour but de prévenir. Dès lors qu'existent des obligations générales découlant du droit international coutumier (72(*)), il importe peu que les divers accords sur l'environnement contiennent ou non une mention expresse des dommages causés par les armes nucléaires. Les mêmes principes s'appliquent que l'on soit en présence « de hauts fourneaux qui émettent des fumées, de réacteurs présentant des fuites ou d'engins explosifs. On ne saurait déduire du fait que les hauts fourneaux et les réacteurs ne sont pas expressément désignés dans les traités sur l'environnement qu'ils sont soustraits du champ d'application des normes et principes indiscutables et bien établis - (correctement mis en valeur dans les motifs de l'avis consultatifs) - énoncés dans ces traités ».(73(*)) La réalité c'est que le dommage causé à l'environnement par les armes nucléaires et la conséquence de la violation d'une obligation incombant à l'Etat, et « la destruction de l'environnement non justifiée par des nécessités militaires et ayant un caractère gratuit est manifestement contraire au droit international en vigueur »(74(*)) Pour autant que les Etats défenseurs de l'illicéité de l'emploi de l'arme nucléaire s'y attendaient le moins la Cour, au lieu de se prononcer si clairement en faveur de leur thèse au regard de principes sus-évoqués, se contente plutôt de constater que « le droit international existant relatif à la protection et à la sauvegarde de l'environnement n'interdit pas spécifiquement l'emploi d'armes nucléaires, (mais), poursuit-elle, il met en avant d'importantes considérations d'ordre écologique qui doivent être dûment prises en compte dans le cadre de la mise en oeuvre des principes et règles du droit applicable dans les conflits armés ». Voyons à présent les normes coutumières de portée générale applicables à l'emploi d'armes nucléaires. §2. L'applicabilité des normes coutumières de portée générale En l'absence d'une règle conventionnelle générale pertinente directement applicable à la question de la licéité ou de l'illicéité de l'emploi de l'arme nucléaire, le débat devant la Cour s'est immédiatement engagé autour de la recherche et la détermination d'une telle règle en droit coutumier. Les Etats possesseurs d'armes nucléaires soutenaient qu'il existe une autorisation générale d'emploi. Quant aux Etats non-nucléaires, ils se précipitaient pour démontrer qu'il existe une règle générale prohibant tout emploi d'armes nucléaires. La Cour devrait ainsi départager les arguments juridiques des uns et des autres. Soulignons dès à présent que la substance du droit international coutumier doit « être recherchée en premier lieu dans la pratique effective et l'opinio juris des Etats » (75(*)) (1). En l'absence de celles-ci, les débats se sont déroulés autour d'une série de résolutions de l'Assemblée générale des Nations Unies relatives à l'interdiction de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires (2) I. La pratique de non-emploi et la politique de la dissuasion Ce paragraphe sera traité en trois phases à savoir les points de vue contradictoires des Etats, la Cour et la dissuasion nucléaire et enfin les considérations des juges à l'égard de la dissuasion nucléaire. 1. Les positions contradictoires des Etats sur la portée de l'abstention Les débats entre les Etats devant la Cour ont principalement porté sur la portée de l'abstention et sa situation en droit international.
Les défenseurs de l'illicéité de l'emploi d'armes nucléaires en toutes circonstances ont avancé l'idée qu'il existe bel et bien une pratique constatée des Etats depuis 1945 de non-emploi ou de « self-restraint » dans l'utilisation des armes nucléaires, qui traduit une certaine conviction que l'emploi de l'arme nucléaire était illicite (76(*)). L'argument s'est arrêté là. Pour les Etats tenants de la licéité, aucun argument décisif n'a pu être présenté quant à l'existence d'une opinio juris attestant qu'une telle conduite est véritablement inspirée par un désir de se conformer au droit (77(*)). Pour la Cour, le non-emploi d'armes nucléaires depuis la fin de la guerre froide ne peut guère constituer l'expression d'une opinio juris. Elle déclare notamment que : « les Etats qui soutiennent que l'utilisation d'armes nucléaires est illicite se sont employés à démontrer l'existence d'une règle coutumière portant interdiction de cette utilisation. Ils se réfèrent à une pratique constante de non utilisation des armes nucléaires par les Etats depuis 1995, et veulent voir dans cette pratique l'expression d'une opinio juris des détenteurs de ces armes... les membres de la communauté internationale sont profondément divisés sur le point de savoir si le non-recours aux armes nucléaires pendant les cinquante dernières années constitue l'expression d'une opinio juris. Dans ces conditions, la Cour n'estime pas pouvoir conclure à l'existence d'une telle opinio juris (78(*)). Ainsi, le problème semble être de savoir si l'on peut déceler dans la pratique de non-emploi, un sentiment d'opinio juris (79(*)) témoignant en l'existence d'une règle juridique de non emploi. Ce faisant, la Cour semble réagir à l'argument des Etats défenseurs de l'illicéité de l'emploi d'armes nucléaires qui voulaient prouver l'existence d'une règle coutumière prohibant l'emploi, d'une pratique qui comporte en elle-même une opinio juris. Il aurait suffit, dans ce cas, de constater la généralité et la constance d'une pratique d'abstention pour déduire, sans davantage de preuve, l'existence d'une opinio juris conforme à une pratique d'abstention. Clairement, la Cour ne voulait pas prendre une telle position ; elle s'est plutôt « rangée du côté des attaques entreprises par les Etats nucléaires » (80(*)) Finalement, ce fut un argument négatif qui permettait de réfuter les prétentions des Etats non nucléaires sans pour autant se ranger complètement du côté des Etats nucléaires. En l'occurrence, la Cour semble refuser de déduire l'existence d'une opinio juris de la simple pratique de non emploi. Elle demande une preuve tangible qu'une pratique de non emploi est véritablement motivée par un sentiment de la part des Etats nucléaires de se conformer au droit. Or, l'abstention reste fortuite et discrétionnaire en ce sens que les Etats nucléaires l'ont optée pour des raisons politiques et non pas du fait d'une opinio juris. Pour la Cour, cette pratique de non emploi n'a pas franchi encore le seuil du droit. De ce point de vue, les Etats défenseurs de l'illicéité, n'ont pas pu apporter la moindre preuve étayant leur thèse. Tout au contraire, la politique de dissuasion semble être une présomption de l'inexistence d'une règle coutumière prohibant l'emploi. 2. La politique de dissuasion nucléaire et le droit international L'argument de l'existence d'une règle coutumière de non recours à l'arme nucléaire fut principalement rejeté par les défenseurs de la licéité, par l'invocation de la politique de dissuasion. Selon les contestations de la France, « l'abstention de recours à l'arme nucléaire depuis 1945 ne saurait être considérée comme constitutive d'une pratique au sens du droit international. Pour qu'une abstention d'agir soit pertinente aux fins de la formation d'une règle coutumière, il faut qu'elle soit fondée sur la conviction de se conformer à une obligation juridique et qu'elle puisse, de ce fait, être l'indice d'une coutume établie ou en vue de formation. Or, le non-recours, depuis 1945, aux armes nucléaires tient à ce que les circonstances susceptibles de justifier leur emploi ne se sont heureusement pas présentées, grâce à la politique de dissuasion elle-même » (81(*)). La Grande-Bretagne a aussi signalé que « les armes nucléaires ont pour but de jouer un rôle dissuasif, de par leur existence même. Le fait qu'une arme n'est pas employée n'indique pas qu'elle soit interdite, à moins que les Etats qui s'abstiennent d'y avoir recours le fassent parce qu'ils se considèrent dans l'obligation de ne pas utiliser ces armes. Or tel n'est pas le cas en l'occurrence. Que les Etats dotés d'armes nucléaires ne les aient pas employées et que certains autres Etats considèrent que leur emploi serait illicite ne permet pas de déduire l'existence d'une règle portant interdiction de ces armes » (82(*)). Pour ces Etats, la politique de dissuasion ouvertement adoptée par tous les Etats dotés d'armes nucléaires, selon laquelle l'Etat concerné se réserve le droit, par une menace générale étendue dans le temps, d'utiliser les armes nucléaires en légitime défense contre une attaque armée qui met en danger les intérêts vitaux de cet Etat, repose en dernière analyse sur le postulat que les armes nucléaires pourraient effectivement être amenées à être utilisées (83(*)). Deux conséquences pratiques peuvent ainsi émerger de l'invocation de la politique de dissuasion. Premièrement, il s'agit de l'introduction d'une présomption d'inexistence d'une opinio juris qui, si elle avait existé, aurait pu confirmer que la pratique de non-recours à l'arme nucléaire est devenue une règle coutumière. Deuxièmement, la dissuasion peut aussi expliquer le non-recours à l'arme nucléaire depuis la deuxième guerre mondiale. En matière d'emploi d'armes nucléaires, le refus d'y recourir ne suivait pas un certain sentiment de se conformer à une obligation juridique mais « dépendait de la crainte qui est générée par la dissuasion chez l'adversaire de subir une destruction semblable à ce qu'il peut lui-même infliger, sans la perception d'avantage acceptable » (84(*)). Il était donc inévitable, d'aborder ce problème de la licéité de l'emploi d'armes nucléaires sans que l'argument juridique ne dérape vers la politique de dissuasion pratiquée par tous les Etats nucléaires. La doctrine, pourtant divisée, s'accorde tout de même à affirmer que la politique de dissuasion qui était une « justification politiquement et moralement tranquillisante » (85(*)) à l'existence des armes nucléaires constituait aussi le bord du glissement vers l'apocalypse. Elle est en quelque sorte « la plus éloquente du paradoxe même de cette arme » (86(*)). Pour les uns, la doctrine de la dissuasion part du postulat, qu'il faut éviter par tous les moyens le déclenchement d'une quelconque confrontation nucléaire, et que le seul moyen de faire comprendre aux adversaires actuels ou potentiels l'imminence de la dévastation que pourrait entraîner l'utilisation des armes nucléaires est d'augmenter les possibilités d'une telle dévastation à l'encontre des agresseurs potentiels. De ce fait, la raison même de la doctrine de dissuasion vise à « empêcher »(87(*)) la guerre et la prévenir (88(*)). Son but même est d'éviter le plus longtemps possible une confrontation nucléaire qui serait désastreuse pour tous. Elle est en quelque sorte une « police d'assurance » qui est basée sur le « abhorence of nuclear war » (89(*)) et peut être de ce fait « moralement acceptable » (90(*)). A sa manière, la politique de dissuasion, signale cette doctrine, était à maints égards à mesure de garantir non seulement la sécurité nationale des Etats qui l'ont adoptée mais aussi la stabilité internationale (91(*)) en avortant tout calcul de première frappe à l'arme nucléaire. Dans un ordre international décentralisé, dont le pouvoir est aussi diffus qu'inégal, le « contrôle effectif » pour garantir un « minimum d'ordre public » doit être forcement basé sur la réciprocité et les représailles (92(*)). Toutefois, si de telles vues quant aux prémisses de la dissuasion sont largement partagées parmi les Etats nucléaires, quelque divergences subsistent encore sur le sort de la doctrine quand elle échoue, avec la mise en oeuvre d'une première frappe nucléaire. Tandis que la dissuasion n'a, pour certains, qu'une dimension axée sur le non-emploi ou la non-guerre (93(*)), de sorte qu'elle cesse d'avoir la moindre justification dès l'instant de la première frappe, elle continue pour d'autres à exister car elle n'a aucun sens si elle ne peut pas amener à utiliser effectivement l'arme nucléaire (94(*)) par des réponses qui s'élèvent graduellement en intensité suivant les degrés de menaces encourues. La dissuasion est pour d'autres fondamentalement instable en temps de paix. Elle ne peut guère servir comme source d'ordre et de stabilité. Elle est, en fait, la base de tout le contraire (95(*)). Par sa préoccupation majeure de balancer constamment avec les capacités de l'ennemi, pour l'empêcher d'avoir un avantage pouvant l'inciter à recourir à une attaque nucléaire et son objectif de gagner si possible quelques avantages pour mieux dissuader, la dissuasion entraîne inévitablement les protagonistes vers une course infernale aux armements (96(*)). Qualifiée par certains comme « l'apprenti soucier » (97(*)) de la dissuasion, cette course acharnée aux armements est, pour Raymond Aron le symbole de « la dialectique de l'hostilité en temps de paix [et] la forme non-belliqueuse de l'ascension aux extrêmes » (98(*)) car, « elle entraîne les protagonistes vers une menace continue et même grandissante d'annihilation globale de l'humanité toute entière (99(*)). 3. La Cour et la dissuasion nucléaire A la lumière du débat qui s'est engagé à propos de la politique de dissuasion, la Cour s'est vue interpellée pour déterminer la position du droit en la matière (100(*)) Cette politique a-t-elle une quelconque valeur juridique ? Constitue t-elle une menace de recourir à la force prohibée par l'article 2, paragraphe 4, de la Charte des Nations Unies ? Peut-elle être justifiée en termes juridiques par la notion de la légitime défense ou servir de présomption d'inexistence d'une opinio juris selon laquelle la pratique de non-emploi d'armes nucléaires est bel et bien une règle coutumière, voire porter un quelconque indice sur l'existence d'une opinio juris relative à une pratique opposée ?. La Cour annonce toute suite qu'elle « n'entend pas se prononcer ici sur la pratique dénommée « politique de dissuasion » (101(*)). Toutefois, elle prend expressément acte du fait de son adoption par les Etats nucléaires et constate notamment « qu'il est de fait qu'un certain nombre d'Etats ont adhéré à cette pratique pendant la plus grande partie de la guerre froide et continue d'y adhérer » (102(*)). De cette constatation, l'organe juridictionnel tente de tirer les conséquences juridiques nécessaires quant à la valeur juridique de la dissuasion, et à l'existence d'une norme coutumière quelconque sur la licéité de l'emploi de l'arme nucléaire. La dissuasion peut-elle tomber sous le coup de la prohibition de la menace du recours à la force prohibé par l'article 2, paragraphe 4, de la Charte des Nations Unies ? La Cour répond en déclarant à ce stade que : « la question de savoir si une intention affichée de recourir à la force, dans le cas où certains événements se produiraient constitue ou non une menace au sens de l'article 2 paragraphe 4 de la Charte est tributaire de divers facteurs. Si l'emploi de la force envisagé est lui-même illicite, se déclarer prêt à y recourir constitue une menace interdite en vertu de l'article 2, paragraphe 4 ...les notions de « menace » et d' « emploi » de la force ou sens de l'article 2, paragraphe 4, de la Charte vont de pair, en ce sens que, si dans un cas donné, l'emploi même de la force est illicite- pour quelque raison que ce soit - la menace d'y recourir le sera également.... Qu'il y ait là une « menace » contraire à l'article 2, paragraphe 4, dépend du fait de savoir si l'emploi précis de la force envisagé serait dirigé contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un Etat ou irait à l'encontre des buts des Nations Unies, ou encore si, dans l'hypothèse où il serait conçu comme un moyen de défense, il violerait nécessairement les principes de nécessité et de proportionnalité. Dans l'un et l'autre cas, non seulement l'emploi de la force, mais aussi la menace de l'employer, seraient illicites selon la Charte » (103(*)). La question de savoir si la dissuasion constitue une menace de recours à la force prohibée par le droit fut résolue par la Cour d'une façon indirecte et détournée. Notons tout d'abord qu'elle appréhende avec beaucoup de perspicacité la dynamique politique de la dissuasion, afin de pouvoir la qualifier juridiquement par rapport à l'interdiction de la menace de recours à la force ; et raisonne suivant deux manifestations pratiques de la dissuasion. La première est une posture de menace générale qu'adopte un Etat donné et qui consiste en l'accumulation d'un arsenal d'armement et des capacités de différentes configurations, susceptibles avec les arguments constants par rapport aux moyens militaires des ennemis potentiels de dissuader ces derniers de recourir en premier à l'arme nucléaire contre cet Etat. Elle est d'une nature qui relève plutôt des considérations stratégiques de balance de force et de stabilité au niveau international. Pour la Cour, il convient de savoir si « la possession d'armes nucléaires est par elle-même une menace illicite de recourir à la force » tel que l'ont soutenu les Etats défenseurs de l'illicéité. La deuxième est une posture de menace spécifique qui se construit, en réaction à des agissements particuliers menaçants de la part de l'agresseur potentiel, et qui est susceptible de dissuader ce dernier à entreprendre la moindre agression (cas des essais nucléaires indo-pakistanais). Il s'agit là de l'intention spécifique qu'affiche un Etat « de recourir à la force, dans le cas où certains évènements se produiraient » (voir ci-haut).La Cour ne se prononce pas directement pour évaluer la licéité de la dissuasion par rapport à l'article 2, paragraphe 4 de la Charte des Nations Unies, mais se contente de clarifier son sens quant à la notion de menace et son rapport avec le recours effectif à la force. La menace du recours à la force est illicite selon l'article 2, paragraphe 4 quand le recours même à la force est illicite. Celui-ci peut bien l'être quand « l'emploi précis de la force envisagé serait dirigé contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un Etat ou irait à l'encontre des buts des Nations Unies ». Cela peut-il bien impliquer à contrario que dans le cas où le recours à la force est organisé dans le cadre d'une action concertée des Nations Unies, elle ne peut nullement être entachée d'illicéité ? En ira-t-il de même quand la menace est construite dans le cadre d'une action de légitime défense individuelle ou collective ?La dissuasion est précisément basée sur une menace de riposte nucléaire en légitime défense. Dans l'hypothèse d'une réponse affirmative à la question ci-haut reprise, l'interdiction de la menace de recours à la force au sens de l'article 2, paragraphe 4, de la Charte des Nations Unies n'affecte pas, selon la Cour, la dissuasion dans ses deux manifestations car ces dernières consistent en des menaces de recourir à la force en cas de légitime défense en second et non en premier. Quant à la dissuasion générale par la simple possession, le prononcé de la Cour n'est pas clair quand il s'agit d'évaluer la licéité par rapport à la menace du recours à la force contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique des Etats ennemis. Il est vrai que l'on peut facilement montrer que la dissuasion générale ne peut être crédible que quand il s'agit de menacer l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique des Etats ennemis à cause d'une confrontation de nature particulière. C'était le cas durant la guerre froide car « les Etats de chaque alliance ciblaient par leurs possessions, développements et déploiement des missiles nucléaires à l'intégrité territoriale et l'indépendance politique des Etats de l'autre camp » (104(*)). Toutefois, la dissuasion après la fin de la guerre froide s'est transformée en nature et a diminué d'intensité. Elle est devenue une posture minimale de « vigilance - stratégique » qui n'identifie aucun ennemi concret. Elle se maintient contre tout ennemi potentiel qui peut émerger. La dissuasion n'est donc dirigée contre aucun Etat déterminé. Elle existe plus pour rassurer que pour menacer. La Cour laisse cette question ouverte (105(*)) : « Qu'il y ait là, [déclare-t-elle] notamment, une « menace » contraire à l'article 2, paragraphe 4, dépend du fait de savoir si l'emploi précis de la force envisagé serait dirigé contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un Etat ». La Cour précise le critère d'appréciation sans porter un jugement concret sur la question. Après tout, ce n'est pas la véritable problématique de la dissuasion par rapport au droit. Qu'il s'agisse ou non d'une menace contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un autre Etat, elle ne peut guère être illicite , quand elle est montée dans le contexte de la légitime défense (106(*)). Cette question divise aussi les juges qui se sont vus obligés d'en fournir leur jugement de valeur. 4. Les juges et la dissuasion nucléaire. Remarquons que chaque fois que la Cour fait référence dans son avis à la politique de dissuasion, soit pour refuser de se prononcer (107(*)) à son sujet, soit pour dire qu'elle ne pourrait l'ignorer (108(*)), elle ne parvient pas de manière satisfaisante à circonscrire les contours de cette notion. En l'absence d'une définition satisfaisante de la politique de dissuasion, on pourrait la déterminer comme étant la politique suivie par les Etats nucléaires, et qui consiste en la fabrication, la possession et le déploiement des armes nucléaires (109(*)). Le vice-président schwebel précise à ce propos, dans son opinion dissidente, que « dès lors qu'une puissance possède, entretient et déploie des armes nucléaires et les moyens de les lancer, elle se met dans une situation de dissuasion » (110(*)) Il déclare que ces puissances « ont fait savoir et continuent à faire savoir qu'elles sont disposées à les utiliser dans certaines circonstances ». Ainsi pour le juge Américain, possession et menace forment dissuasion. Le juge Ferrari Bravo a particulièrement qualifié la dissuasion d'un phénomène d'anti-droit. Il a déclaré notamment que : « l'idée de la dissuasion nucléaire n'a aucune valeur juridique » et, ajoute-t-il, « la théorie de la dissuasion, tout en inaugurant une pratique juridique sur laquelle doit être fondé le début de la création d'une coutume internationale, on peut arriver à dire que l'on est en présence d'un anti-droit, si on pense aux effets qu'elle a sur la Charte des Nations Unies » (111(*)). Pour le juge Koroma, il n'était pas judicieux la part de la Cour d' « accorder une reconnaissance juridique à la doctrine de dissuasion comme principe de droit international. S'il est légitime que la Cour constate l'existence de cette politique, elle aurait dû avoir conscience que, une fois mise en oeuvre, la doctrine en question peut être déclarée illicite car son application suppose un conflit nucléaire lourd de conséquences catastrophiques non seulement pour la population civile des Etats belligérants mais aussi pour celle d'Etats étrangers au conflit et peut déboucher sur la violation du droit international en général et du droit humanitaire en particulier. Il aurait donc été plus sage que la Cour s'abstienne de prendre position en cette matière, essentiellement non juridique » (112(*)) Le juge, Weeramantry a particulièrement critiqué la Cour pour n'avoir pas condamné la politique de dissuasion (113(*)). Mais cette politique n'est pas non plus regardée par la Cour avec faveur. Elle est même apparue devant elle comme une source de nuisance, un obstacle à la cristallisation d'un droit « voulu » portant la prohibition de l'emploi d'armes nucléaires en lex lata (114(*)). Car déclare-t-elle notamment que : « l'apparition en tant que lex lata, d'une règle coutumière prohibant spécifiquement l'emploi des armes nucléaires en tant que telles se heurte aux tensions qui subsistent entre, d'une part, une opinio juris naissante et d'autre part, une adhésion encore forte à la politique de dissuasion » (115(*)). En fait, elle s'est imposée dans le raisonnement de la Cour non en tant que pratique qui n'est pas illicite, et non en tant que pratique devenue droit coutumier - ce qui n'est nullement prétendu par les Etats nucléaires - mais seulement par la force même l'arme nucléaire dont elle est la justification. Les arguments en faveur de l'illicéité se fondaient, en outre, sur une série de résolutions de l'Assemblée générale des Nations Unies. II. Les résolutions de l'Assemblée générale des Nations Unies relatives à l'interdiction de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires En défendant l'idée de l'existence des règles de droit international coutumier qui prohibent l'usage des armes nucléaires, les tenants de la thèse de l'illicéité s'appuyaient sur une centaine de résolutions de l'assemblée générale des Nations Unies qui affirmaient régulièrement l'interdiction des armes nucléaires selon le droit international (116(*)) . Le débat qui s'en est suivi a tourné autour de la normativité de ces résolutions (I) Nous analyserons ici les position contradictoires des Etats, le traitement de la Cour et l'approche de la question par la doctrine. I. Les positions contradictoires des Etats sur la valeur normative des résolutions de l'Assemblée générale 1. Les assertions des tenants de la licéité
Les tenants du flambeau de la licéité de l'emploi d'armes nucléaires ont objecté sur la valeur normative des résolutions de l'Assemblée générale soutenue par les partisans de l'illicéité en affirmant le caractère non obligatoire des résolutions de l'Assemblée générale selon la Charte (117(*)). Beaucoup ont soutenu que de telles résolutions ne sauraient être déclaratives d'aucune règle de droit international coutumier interdisant toute utilisation des armes nucléaires (118(*)). De plus, les défenseurs de la licéité insistaient sur la faiblesse du nombre de votes affirmatifs qui avaient approuvé ces résolutions, par rapport à ceux qui ne les avaient pas acceptées ou qui s'étaient abstenus. Ils soulignaient aussi le fait que presque tous les Etats dotés de l'arme nucléaire ont souvent voté contre ces résolutions. Durant la phase orale de la procédure, d'aucuns se sont demandés avec justesse : « qui sont finalement les Etats les plus affectés par telles résolutions de l'Assemblée générale ? Est-ce qu'ils sont véritablement les Etats dotés de l'arme nucléaire, ou plutôt ceux qui n'en possèdent pas et qui sont les « récipients » des effets de l'emploi des armes nucléaires, ou même l'humanité au sens large ? » (119(*)). Aussi, le lien établi entre l'affirmation de l'illicéité de ces armes et la demande adressée dans les mêmes résolutions au Secrétaire général de se consulter avec les Etats membres pour conclure une convention internationale interdisant l'utilisation des armes nucléaires, soulève la question de savoir « si les Etats qui ont voté en faveur de la résolution jugeaient l'utilisation des armes nucléaires comme illicite en l'absence d'une telle convention » (120(*)). En tout état de cause, la demande de conclusion d'un traité d'interdiction de l'emploi des armes nucléaires est révélatrice de la conviction de l'Assemblée générale selon laquelle leur interdiction en droit n'est valable que par une convention internationale (121(*)).Cet argument fut repris par le Vice-président Schwebel dans son opinion dissidente (122(*)). 2. Les arguments des partisans de l'illicéité En revanche, pour les défenseurs de l'illicéité, ces résolutions ne prétendaient pas créer de nouvelles règles, mais se bornaient à confirmer le droit coutumier (123(*)) relatif à la prohibition de tout moyen ou méthode de guerre qui dépassent, par leur utilisation, les limites de la « « modération nécessaire dans la conduite de la guerre » (124(*)). Ces règles furent codifiées et réaffirmées à maintes reprises, par divers instruments internationaux depuis la déclaration de Saint Petersburg de 1868 jusqu'aux conventions de Genève de 1925, 1949 et 1977, en passant par les divers règlements de la Haye de 1899 et 1907. De ce fait, les résolutions de la l'Assemblée générale déterminaient, tout simplement l'applicabilité des règles susmentionnées à la situation que pose l'emploi des armes nucléaires (125(*)). Pour les défenseurs de l'illicéité, la force normative de ces résolutions ne dépend pas de l'instrumentum des résolutions mais relève plutôt du droit international général confirmé dans les contenus de ces résolutions. Il importe donc peu que ces résolutions expriment l'opinion de la majorité et non pas l'opinion des Etats nucléaires, tant qu'elles sont l'expression du droit international coutumier déjà existant (126(*)) . De toute façon, la demande de l'Assemblée générale de conclure une convention de codification portant interdiction de l'emploi de l'arme nucléaire ne saurait constituer une négation d'une règle de prohibition d'emploi, car « si tel est le cas, toute convention de codification signifie négation du droit préexistant (127(*)). La conclusion d'une convention d'interdiction d'emploi de l'armement claire est utile pour préciser le droit en la matière et prévoir les mécanismes de vérification appropriés. Quel en est le point de vue de la Cour ? II. Le point de vue de la Cour Après avoir réitéré sa jurisprudence quand à la valeur normative des résolutions de l'Assemblée générale, la Cour remarque « le ton tantôt hésitant, tantôt rêveur » de la plupart des résolutions portant sur l'interdiction de l'utilisation des armes nucléaires « (128(*)). Elle déclare notamment que : « Si on les considère dans leur ensemble, les résolutions de l'Assemblée générale invoquées devant la Cour déclarent que l'emploi d'armes nucléaires serait « une violation directe de la Charte » et, dans certaines versions, que cet emploi « doit.... être indirect » ; dans ces résolutions, l'Assemblée générale a parfois mis l'accent, plutôt, sur diverses questions connexes » (129(*)). Selon la Cour, l'insistance de l'Assemblée générale sur ce que le droit « doit être » en matière d'emploi d'armes nucléaires, ne saurait guère fournir de preuve quant à l'existence d'une règle coutumière ou quant à l'émergence d'une opinio juris en la matière. Il s'agit d'un droit « souhaité » ou « programmé » (130(*)) qui a du mal à figurer comme preuve de l'existence d'une règle coutumière de proscription d'emploi, car un droit « souhaité » n'est pas encore un droit « accepté ». A notre avis, le ton généralement hésitant des résolutions en question a considérablement réduit leur valeur normative. En fait, la plupart de ces résolutions adoptaient, au fil des années, des tournures au conditionnel quand il s'agissait de qualifier juridiquement le problème de l'emploi des armes nucléaires. Presque la totalité de ces résolutions réaffirment que « toute forme d'emploi d'armes nucléaires constituerait une violation de la Charte des Nations Unies et un crime contre l'humanité » (131(*)) ou « doit être considéré comme une violation... » (132(*)). L'emploi d'armes nucléaires « doit donc être interdit en attendant le désarmement nucléaire »(133(*)). La plupart de ces résolutions demandaient aux Etats membres par le biais du Secrétaire général ou le comité qui est devenu la conférence de désarmement « d'entreprendre en priorité, des négociations en vue de parvenir à un accord sur une convention internationale interdisant en toutes circonstances l'emploi ou la menace d'emploi d'armes nucléaires »(134(*)). Il est à noter que l'Assemblée générale exprime habituellement, dans le préambule de chaque résolution son regret que la conférence ne pouvait pas entreprendre de négociations sur la question lors de la séance précédente. L'on se demande si la conférence de désarmement qui est un organe subsidiaire de l'Assemblée générale n'est pas obligée d'entreprendre lesdites négociations à la demande de l'Assemblée générale. Cela dépendra du fait de savoir si l'Assemblée générale voulait par une telle demande éditer une décision obligatoire à l'organe inférieur. (135(*)). L'Assemblée générale annexait chaque année un projet de convention sur l'interdiction de l'emploi d'armes nucléaires dont le préambule affirme la conviction « que toute forme d'emploi d'armes nucléaires constitue une violation de la Charte des Nations Unies et un crime contre l'humanité ». La différence de formule, entre le dispositif des résolutions avec le préambule du projet de convention, incite effectivement à croire que l'Assemblée générale ne considérait pas l'interdiction d'emploi d'armes nucléaires comme relevant du droit coutumier déjà existant, mais qu'une telle interdiction devait intervenir par le biais d'une convention internationale multilatéralement négociée et ratifiée. Toutefois, quelques unes de ces résolutions ont eu des jugements plus tranchés. Pour une d'elles, qui était la première de la série, l'emploi d'armes nucléaires « est contraire à l'esprit, à la lettre et aux buts de la Charte des Nations Unies et constitue en tant que tel, une violation directe de la Charte » (136(*)) ; une autre déclare que le recours aux armes nucléaires « constituera une violation de la Charte des Nations Unies et un crime contre l'humanité » (137(*)) ; pour une autre, « les Etats et hommes d'Etat qui emploient les premiers des armes nucléaires commettent le crime le plus grave contre l'humanité » (138(*)). Pour déterminer la valeur normative de cette affirmation, la Cour se livre à une analyse de sa logique même. Pour elle, les auteurs de la résolution ont « procédé à une qualification de la nature de l'arme nucléaire, à une détermination de ses effets, et l'application de règles générales du droit international coutumier à l'arme nucléaire en particulier »(139(*)). Cette initiative, propre à l'Assemblée générale, d'appliquer les règles générales de droit aux armes nucléaires, rend peu probable l'existence d'une règle spécifique de droit coutumier interdisant l'emploi de l'arme nucléaire, car si tel avait été le cas, l'Assemblée générale n'aurait pas procédé à un exercice avancé de qualification juridique d'une situation donnée pour les besoins des règles déjà existantes en matière d'emploi de l'arme nucléaire. Il appartiendra toujours à la Cour d'apprécier, d'après la nature des armes nucléaires et le fond des normes pertinentes, si l'utilisation des armes nucléaires est prohibée en droit international. De plus, après avoir été interpellée par les uns et les autres afin de prendre en considération les intérêts spécifiques dans son examen des conditions d'adoption des révolutions de l'Assemblée générale portant sur l'interdiction de l'utilisation des armes nucléaires, la Cour se livre à quelques constatations sur l'importance numérique de la majorité par rapport aux voix contre et aux abstentions. III. La position de la doctrine Les auteurs ont, quant à eux, relevé que les Etats nucléaires s'efforcèrent durant la procédure de défendre l'idée que la Cour devait, dans son examen des conditions d'adoption des résolutions de l'Assemblée générale, tenir compte des positions des Etats les plus affectés par la résolution. En manière d'emploi d'armes nucléaires, il s'agissait pour la Cour de prendre en considération la position des Etats possesseurs de l'arme nucléaire. Quant aux Etats défenseurs de l'illicéité, il était évident que l'humanité toute entière était affectée par l'emploi des armes nucléaires.(140(*)) Toutefois, ce fut Charles Devisscher qui disait : « on a pu comparer la lente constitution de la coutume internationale à la formation graduelle d'un chemin à travers un vague. A l'origine, on y relève des pistes multiples et incertaines, à peine visibles au sol. Puis la majorité des usagers, pour quelques raisons d'utilité commune, adopte un même parcours : un sentier unique se dégage qui, à son tour, fait place à un chemin reconnu désormais comme la seule voie régulière, sans que l'on puisse dire à quel moment cette dernière transformation s'est accomplie ... Parmi les usages, il en est toujours qui, plus profondément que d'autres, marqueront la terre de l'empreinte de leurs pas, soit en raison de leurs poids, c'est-à-dire leur puissance en ce monde soit parce que leurs intérêts les appellent plus fréquemment à effectuer le parcours. C'est ainsi qu'après avoir imprimé à l'usage une orientation définie, les grandes puissances s'en constituent encore les garants et les défenseurs » (141(*)), et que cette position était reflétée dans celle des majorités au fil des ans au sein de l'Assemblée générale. Pour les uns et les autres, la Cour devait tenir compte des différents intérêts en cause qui mobilisent les positions respectives. Elle devait déterminer, sans critère juridique précis, les plus prépondérants en l'espèce. La Cour s'est finalement contentée d'affirmer que : « Plusieurs résolutions dont il est question en l'espèce ont cependant été adoptées avec un nombre non négligeable de voix contre et d'abstention. Ainsi, bien que lesdites résolutions constituent la manifestation claire d'une inquiétude profonde à l'égard du problème des armes nucléaires, elles n'établissent pas encore l'existence d'une opinio juris quant à l'illicéité de l'emploi de ces armes »(142(*)) Une première lecture du passage précédent peut suggérer que l'on parte dans l'examen de la valeur normative des résolutions de l'Assemblée générale, d'une compréhension de deux intérêts en cause pour aboutir à une description de la réalité sans la moindre évaluation juridique. Il existe une opinio juris naissante portant sur la prohibition de l'emploi d'armes nucléaires ; mais elle est cependant dans un état encore embryonnaire. Toutefois, l'insistance de l'Assemblée générale à adopter chaque année des résolutions qui rappellent le contenu de la résolution 1653 (XVI) et qui prient les Etats membres de conclure une convention interdisant l'utilisation des armes nucléaires en toutes circonstances, est révélatrice d'un désir grandissant de la part de la communauté internationale de franchir, par une interdiction spécifique et expresse de l'emploi de l'arme nucléaire complet.(143(*)) Ce raisonnement de la Cour rappelle les observations de Paul Reuter à cet égard, lorsqu'il déclare notamment : « Ou bien la règle existe déjà avant l'intervention des Nations Unies et l'action de l'Assemblée générale équivaut à une reconnaissance de cette règle au titre de l'organisation ; ou bien la règle n'existe pas encore et la résolution de l'Assemblée générale ne saurait en tant que telle lier les Etats membres ; en revanche, elle exerce une pression politique certaine sur les Etats ; si ceux-ci se conforment à cette pression, une pratique étatique peut se développer et comporter au bout d'un certain temps la conscience d'une obligation juridique et donner ainsi naissance à une coutume. En sens contraire, les Etats peuvent parfaitement, pour lever toute spéculation sur leurs intentions, déclarer qu'ils rejettent immédiatement cette pression politique »(144(*)) Une deuxième lecture du raisonnement de la Cour voit dans le prononcé de l'avis une volonté avortée de promouvoir l'objectif de l'élimination de l'arme nucléaire. Ainsi, les résolutions de l'Assemblée générale sont perçues comme un terrain d'affrontement de deux tendances opposées. La première est basée sur l'intérêt de l'humanité tout entière d'éliminer les armes nucléaires. Elle reflète la volonté d'une majorité grandissante au sein de l'Assemblée générale (145(*)) d'aboutir à une interdiction de toute utilisation des armes nucléaires. La deuxième tendance est surtout influencée par la politique de dissuasion adoptée par les Etats nucléaires. Cette politique a inspiré la plupart des Etats possesseurs de l'arme nucléaire une opposition à toute initiative tendant à interdire l'emploi de l'arme nucléaire. Car, accepter cette interdiction détruirait le fondement même de la dissuasion, garant ultime de leur sécurité nationale. S'il est vrai que l'humanité même est concernée par l'emploi de l'arme nucléaire, il reste cependant évident que l'arme nucléaire existe que la politique de dissuasion reste capable de fournir la justification pour son éventuel emploi. En réaction aux conclusions de la Cour, Eric David a eu l'occasion de commenter : « on fait donc prévaloir une opinion minoritaire limitant la portée des règles anciennes sur l'opinion majoritaire donnant à ces règles la portée qui leur vient en vertu des textes eux-mêmes, au nom d'une pratique elle-même contestable » (146(*)) Au grand regret, cet affrontement parait se solder par l'échec de la tendance de la raison au profit de celle de la force, car : « L'apparition, en tant que lex lata, d'une règle coutumière se heurte aux tensions qui subsistent entre, d'une part une opinio juris naissante et, d'autre part, une adhésion encore forte à la pratique de la dissuasion » (147(*)). Quand l'arme ultime affronte la naissance d'un droit portant l'interdiction de cette arme, ce droit émergera « mort né » (148(*)). Si la guerre froide n'a pas pu cristalliser une règle portant sur l'interdiction de l'utilisation de l'arme nucléaire, l'éventualité de son emploi chaud ne saura cristalliser une telle règle. Une fois de plus, le droit est face à ses limites qu'il ne peut décrire. En tout état de cause, il devenait particulièrement évident qu'aucun consensus n'a pas pu être formé au sein de l'Assemblée générale, pour appuyer le contenu de ces résolutions. Les majorités formées au fil des ans apparaissent de plus en plus fragiles devant la minorité de la dissuasion. Le résultat quant au contenu des résolutions, fut pour le moins un langage hésitant ou irrésolu, dépourvu de la moindre autorité sur les organes subordonnés et privés de tout mécanisme de suivi normatif. Devant une telle réalité, la Cour ne pouvait que constater cette fragilité des résolutions de l'Assemblée générale relatives à l'emploi de l'arme nucléaire. Elle a en effet constaté que « ni le droit international coutumier ni le droit international conventionnel ne comporte d'interdiction complète et universelle de la menace ou d'emploi des armes nucléaires en tant que telles ». Peut-être trouvera-t-elle une telle règle ou une telle interdiction dans les matières spécifiques du droit international. LES NORMES SPECIFIQUES DU DROIT INTERNATIONAL Dans ce chapitre, il est question de déterminer les normes spécifiques de droit international applicable à l'emploi d'armes nucléaires. Le débat s'accentue entre les partisans de la licéité de l'emploi d'armes nucléaires et les défenseurs de l'illicéité, à propos de l'existence d'une règle de permission ou l'interdiction, dans les différents instruments de source conventionnelle relatifs aux normes nucléaires. La Cour rappellera à titre liminaire, en effet, qu'il n'existe aucune prescription spécifique de droit international coutumier ou conventionnel qui autoriserait la menace ou l'emploi d'armes nucléaires ou de quelque autre arme en général ou dans certaines circonstances, en particulier lorsqu'il y a exercice justifié de la légitime défense. Il n'existe cependant pas davantage de principe ou de règle de droit international qui ferait dépendre d'une autorisation particulière à licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires ou de toute autre arme(149(*)). La pratique des Etats montre en outre que l'illicéité de l'emploi de certaines armes en tant que telles ne résulte pas d'une absence d'autorisation, mais se trouve au contraire formulée en termes de prohibition. Nous tenterons de vérifier cette dernière affirmation en parcourant les points de vue contradictoires des Etats et ceux de la Cour en premier lieu sur l'applicabilité des différents instruments de sources conventionnelle relatifs aux armes nucléaires (section I) et en second lieu dans les normes spécifiques du droit des conflits armés (Section 2). * 41 CIJ, Recueil 1996, p.239, paragraphe 24 * 42 Lors de la première session de la Commission des Droits de l'Homme * 43 CIJ, Recueil 1996, p.239, paragraphe 24 * 44 CIJ, Recueil 1996, p. 240, paragraphe 25. * 45 CIJ, Recueil 1996, p.240, paragraphe 25 * 46 Voir dans ce sens NGONDANKOY (Nkoy e a -Loongya), Droit congolais des droits de l'homme, Bruxelles, éd. Bruylant, 2004, p. 255. * 47 CIJ, Recueil 1996, p. 67. * 48 Opinion dissidente du juge Weeramantry, CIJ, Recueil 1996, p. 507. * 49 Opinion dissidente de Weeramantry, op. Cit. p 507 * 50 Gen. C 14/23 reproduit dans NOWAK (M), United Convenant on Civil and Political Rights, 1983, p. 861 cité par Weeramantgry, op. Cit., p. 507. * 51 Résolution 38/75 de l'Assemblée générale intitulée « Condamnation de la guerre nucléaire » ; paragraphe 1 du dispositif * 52 CR 95/32, p.64, y compris la note 20. * 53 CIJ, Recueil 1996, p.240, paragraphe 26 * 54 Idem * 55 Idem * 56 CIJ, Recueil 1996, p.240, paragraphe 26 * 57 Idem * 58 Lire à ce propos l'opinion dissidente de Weeramantry, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ, Recueil 1996, p. 501. * 59 Idem * 60 Opinion individuelle de M. Guillaume, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ, Recueil, 1996, p. 289. * 61 Résolution 2444 (XXIII) du 19 décembre 1968 concernant le respect des droits de l'homme dans les conflits armés. * 62 Déclaration de M. Ferrari Bravo, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ, Recueil, 1996, p. 285. * 63 CIJ, Recueil 1996, p. 241, paragraphe 27 * 64 CIJ, Recueil 1996, p.241, paragraphe 28 * 65 CIJ, Recueil, 1996, p. 241-242, paragraphe 29. * 66 Rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa vingt-huitième session, ACDI, 1976, Vol. II, deuxième partie, p. 101, paragraphe 33. * 67 Paragraphe 3d de l'article 19 du projet de la Commission du droit international sur la responsabilité des Etats. * 68 Dans son Opinion dissidente M. Weeramantry énumère entre autre le principe de précaution, le principe de tutelle sur les ressources de la terre suivant lequel la charge de la preuve que les mesures de sécurité ont été prises incombe à l'auteur de l'acte mis en cause et le principe « pollueur payeur » qui impose à l'auteur d'un dommage à l'environnement d'indemniser les victimes comme il convient. CIJ, Recueil, 1996, p.p. 502-503. * 69 Principe 24 de la Déclaration de Rio de 1992 relative aux devoirs des Etats en matières de prévention des dommages à l'environnement d'autres Etats. * 70 Le principe 21 de la Déclaration de Stockholm et le principe 2 de la déclaration de Rio précitée. * 71 CIJ, Recueil, 1996, p. 242, paragraphe 31. * 72 Une conclusion dans ce sens a été formulée par les Iles Salomon au cours des audiences (CR 95/32, Sands, p. 71). * 73 Lire à ce propos l'opinion dissidente de M. Weeramantry, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ, Recueil, 1996, p. 505 et Déclaration de M. Herczegh (Geza), avis consultatif du 8 juillet l996, CIJ, Recueil, 1996, p. 575. * 74 Résolution 47/43 de l'Assemblée générale des Nations Unies du 25 novembre 1992 intitulée « Protection de l'environnement en période de conflit armé ». Tenant compte de ce que certains instruments ne sont pas encore contraignants pour tous les Etats, l'Assemblée générale, dans cette résolution, « lance un appel à tous les Etats qui ne l'ont pas encore fait pour qu'ils deviennent parties aux conventions internationales pertinentes ». * 75 La Cour rappelle son point de vue à ce propos dans Plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne /Malte), arrêt, CIJ, Recueil 1985, p.29, paragraphe 27. * 76 Voir nouvelle Zélande, Plaid., 9/11/1995, p. 37, Nauru, (OMS), Reply, p. 32, www. icj-cij.org ; voir aussi DOSWALD-BECK (Louise), « le droit international humanitaire et l'avis consultatif de la CIJ sur la licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires » RICR, n°823, janv-fev, 1997, pp, 37-59 disponible sur le site www.icrc.organisation/wet/fre/sitefreo.mf/iw... du 2/1/2001. * 77 Voir, par exemple, la critique de la France, (OMS), p. 25, France, Plaid, 2/11/1995, p. 28 ; U.K, Plaid, 15/11/1995, p. 57. * 78 Licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ, Recueil 1996, p. 254, paragraphe 65-67. * 79 Voir dans ce sens l'affaire Lotus, CPIJ, série AN. 10, p.28 ; voir aussi WEIL (Prosper), Le droit en quête de son identité, Cours général de droit international public, vol 237, Recueil des cours, La Haye, , 1992 VI, p. 171 * 80 SAYED (A), op.cit, p. 82 * 81 France, Plaid., 2/11/1995, p.28 voir aussi CIJ, Recueil, 1996, p. 254, paragraphe 66 * 82 U.K., Plaid. Trad., 15/11/1995, p. 44 * 83 France, Plaid. 2/11/195, p.27; USA, Plaid, 15/11/1995, p. 86; voir aussi dans le même sens, LISLE (Raymond E.), « Nuclear Weapons ; A Conservation Approach to Treaty Interpretation », JIL, Broklyn, 1983, pp. 275-282, p. 279. * 84 SAYED (A), op.cit, p. 81 * 85 MEYROWIZT (Henri), « Le protocole additionnel I aux conventions de Genève de 1999 et les armes nucléaires », Studia Diplomatia, XXXIX (2), 1986, pp. 195-209. * 86 SAYED (A), op.cit, p. 82 * 87 MEYROWITZ(Henri), op.cit, p. 207 * 88 Idem, p. 199 * 89 FRIED (John H.E.), « International Law Prohibits the First Use of Nuclear Weapons », RIDI, vol XVI, 1981 pp.33-53. * 90 Le terme fut utilisé par le Pape Jean Paul II dans son allocution à l'Assemblée générale des Nations Unies : « In current conditions, deterrence based on balance, certainly not as an end in itself, but as a step on the way toward a progressive desarmament may still be judged morally acceptable », cité dans SINGH (Nagenda) and McWHINNEY, (Edward), Nuclear Weapons and Contemprary International Law, Nijhoff, 1989, p. 200 * 91 REISMAN (Michael), « Deterrence and International Law », Nuclear Weapons and Law, (Miller, Arthur and Feinrider, Martin éd, 1984, pp. 129-132. Pour CHURCHIL « safety will be the sturdy child of terrior and surdival the two brother of annihilation », cité dans l'opinion dissidente du juge WEERAMANTRY, pp. 85-86 ; voir aussi SADURSKA (Romana), « Threats of Force », AJIL, vol 82, pp. 239-268 * 92 REISMAN (Michael), op.cit, 1984. * 93 MEYROWITZ (Henri), « Les armes nucléaires et le droit de la guerre », Humanitarian Law of Armed Conflict, Challenges, DELISSEN (Ahead Astrid), and TANJA (Gérard) ed, Nijhoff, 1991, p. 197-325; voir aussi ARON (Raymond), Paix et guerre entre les Nations, Paris, Clamarion-Lévy, 1984, p. 403. * 94 LISLE (Raymond E.), op.cit, p. 276. * 95 MEYRWITZ (Ellict L.) «The Laws of and Nuclear Weapons », Broklyn International Law, 1983, reprinted in Nuclear Weapons and law, London, (Miller, A. and Feinreder, A. ed.), 1984, pp.13-50, p. 37 * 96 Voir, par exemple, les Iles Salomon, Plaid, trad. 14/11/1995, p. 66 * 97 FRIED (John H.E), op.cit, pp. 33-53; voir aussi MENON(P.K) « Elimination of nuclear weapons : An impérative Need to preserve the Human Race from extinction » Revue de droit militaire et de droit de la guerre, 1991, pp. 253-301, p. 289 ; SINGH(Nagenda) & McWHINNEY (Edward), op.cit, p. 22. * 98 Voir Aron, Raymond, op.cit, p. 652. * 99 KHSOLA (Dinesh), « Nuclear Weapons, Global Values and International Law », Nuclear weapons and law, London, (Miller(A) & Feinrider (M). ed)., 1984, pp. 13-18 * 100 MAHMOUDI (Said), «The international Court of justice and Nuclear weapons », Nordic journal of international law, 66 (1997), pp. 77-100. * 101 CIJ, Recueil 1996, p.32, paragraphe 67. * 102 Idem. * 103 CIJ, op cit, paragraphes 47-48. * 104 SAYED (A), op.cit, p. 87 * 105 MILLET (Anne-Sophie), « Les avis consultatifs de la Cour internationale de justice du 8 juillet 1996, licéité de l'utilisation des armes nucléaires par un Etat dans un conflit armé, licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires », RGDIP, (1997-I) pp. 141-175. * 106 Voir à ce sujet CONDORELLI (Luigi), « La Cour internationale de justice sous le poids des armes nucléaires : jura non novit uria ? » Revue internationale de la Croix-Rouge, n°823, janvier-février, 1997, pp. 9-21. * 107 CIJ, Recueil 1996, p. 254, par.67. * 108 Idem, p. 263, par. 96. * 109 AZAR (Aida), Opinions des juges dans l'avis consultatif sur la licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires (Avis du 8 juillet 1996), Bruxelles, Bruylant, 1998, p. 51. * 110 Opinion dissidente du vice-président Schwebel, CIJ, Recueil, 1996, p314. * 111 Déclaration du juge Ferrari Bravo, CIJ, Recueil1996 p 290. ; Voir aussi, Licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, CIJ, avis consultatif, 8 juillet 1996, Recueil, 1996,p. 254 * 112 Opinion dissidente du juge Koroma, CIJ, Recueil 1996 p. 573, Voir aussi Licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, Recueil 1996, p. 579. * 113 Opinion dissidente du juge Weeramantry, CIJ, Recueil, 1996, p. 541 * 114 SAYED (A), op.cit. p. 88 * 115 CIJ, Licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, Recueil 1996, p.255, paragraphe 73. * 116 BILDER (Richard B.), « Nuclear Weapons and International Law », in Nuclear Weapons and Law, (A.Miller & M. Feinrider éd.), 1984, London, pp. 3-12 * 117 CIJ, Recueil 1996, p.254, paragraphe 68; lire aussi BILDER(Richard B.), op cit, p. 6 * 118 Voir par exemple U.K., (A.G), Trad., p. 26; CIJ, Recueil 1996, p.254, paragraphe 68 * 119 Voir Egypte, Plaid., 1/11/1995, p. 40, Egypte, (A.G), Reply, p. 16 * 120 Voir U.K., (AG), Trad., p. 27 * 121 voir par exemple Italie, Plaid., 6/11/1995, Trad. ., 45. * 122 Voir opinion dissidente du Vice-président Schwebel, op cit, p317, Voir aussi, avis consultatif, CIJ, 8 juillet 1996, CIJ, Recueil 1996, pp. 317-318 * 123 Iles Salomon, (OMS), p. 42. * 124 MEYROWITZ (Elliot), op.cit, p. 47 * 125 Egypte, Plaid., 1/11/1995, p. 40 * 126 Iles Salomon, (OMS), p. 47 * 127 Egypt (AG), Reply, p. 13 * 128 SAYED (A), op.cit, p. 42 * 129 Voir HUBER (Thierry), « Introduction aux débats : la légalité des armes nucléaires », Armes nucléaires et droit international, GIPRI, Genève, 1985, pp. 3-12 * 130 CIJ, Recueil 1996, p. 255, paragraphe 71. * 131 Voir par exemple Résolutions 48/75, 16/12/1993 ; 47/53 , 9/12/1992 ; 45/29, 4/12/1990 ; 44/117, 15/12/1989 ; 43/76, 7/12/1988 ; 42/39, 30/11/1987 ; 41/60, 3/12/1986 ; 40/151, 16/12/1985 ; 39/63, 12/12/1984 ; 38/78, 15/12/1983 ; 37/100, 13/12/1982 ; 36/92, 9/12/1981 ; 35/159, 12/12/1980 de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la condamnation de la guerre nucléaire. * 132 Voir par exemple, Résolution 1953 (XVI), 24/11/1961 * 133 Voir par exemple Résolutions 36/92, 9/12/1981 ; 35/152, 12/12/1980 ; 33/71, 14/12/1978. * 134 Voir l'ensemble des résolutions susmentionnées. * 135 Voir à ce sujet VIRALLY.(M) « La valeur juridique des recommandations des organisations internationales », AFDI, Vol, II, 1956, pp. 66-96. * 136 Voir Résolution 1953 (XVI), 24/11/1961 * 137Résolution 33/71, 14/12/1978 * 138Voir résolution 36/100, 9/12/1981. * 139 Licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ, Recueil 1996, p. 254, paragraphe 69. * 140 Cet argument a été en fait retiré par les juges Shahabudden et Weeramantry, opinion dissidente du juge Shahabudden, p.27 ; opinion dissidente du juge Weeramantry, p.74. * 141 DEVISSCHER (Charles), Théories et réalités en droit international public, 3e éd. Paris, Pédone, 1960, p.190 * 142 Licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ, Recueil 1996, p.255, paragraphe 71 infime. * 143 Idem, p.255, paragraphe 73. * 144 REUTER (Paul), Droit international public, 5e éd., Paris, PUF, Thémis, 1974, p.38 * 145 L'accroissement de la majorité au fil des ans fut particulièrement contesté par le juge Oda dans son opinion dissidente, CIJ,Recueil 1996, p 348. * 146 DAVID (Eric), « L'avis de la Cour internationale de justice sur la licéité de l'emploi des armes nucléaires » in RICR, n° 823, janvier-février 1997, pp 22-30. * 147 Licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ, Recueil 1996, p.255, par 73. * 148 Opinion dissidente du juge SCHWEBEL, CIJ, Recueil 1996, p.320 * 149 CIJ, Recueil 1996, p.247, paragraphe 52 |
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