Sommaire
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- Dédicace
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1
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-
Remerciement
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2
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- Sommaire
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4
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- Introduction
générale
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1ère partie - La Politique
Industrielle
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- Avant propos
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Chapitre I : Les justifications et la
définition d'une politique industrielle
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14
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Section n°1 : Faut-il une politique
industrielle ?
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14
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Section n° 2 : Peut-on définir
la notion d'une politique industrielle ?
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17
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Chapitre II : Les types de politique
industrielle et leurs instruments
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19
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Section n°1 : Les objectifs des
pouvoirs publics et les types de politique Industrielle
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19
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Section n°2 : Les instruments de la
politique industrielle et ses limites
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22
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2ème partie :
Quelle politique industrielle pour le secteur des
assurances au Maroc?
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- Préambule
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Chapitre I : Le secteur des assurances au
Maroc
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Section n°1 : Historique et
Définitions
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28
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Section n° 2 : Structure du
marché marocain d'assurances
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Chapitre II : L'intervention de l'Etat sur le
secteur d'assurances
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51
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Section n°1 : Raisons de
l'intervention étatique sur le secteur
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51
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Section n° 2 : Les relations entre les
assurances et l'Etat : de la législation au contrôle
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53
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- Conclusion générale
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- Bibliographie
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- Annexes
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INTRODUCTION
Si la justification de l'intervention de l'Etat dans
l'économie repose principalement sur les défaillances du
marché, les économistes libéraux soulignent l'existence de
défaillance propre de l'action publique. Cette position va permettre de
mettre en cause l'Etat autant qu'acteur.
Dans plusieurs pays des mesures importantes ont visé
à réduire la place de l'Etat dans l'activité
économique (privatisation, déréglementation,
réforme fiscale...). Sur le plan théorique, l'objection aux
justifications traditionnelles de l'action publique (régulation de
l'activité économique, correction de défaillance du
marché, redistribution de richesses...) s'est appuyée sur la mise
en évidence sur des différentes formes d'inefficacité
générée par l'intervention de l'Etat, le débat se
résume parfois en l'opposition des : "state failing & market
failing".
Toujours est-il que le rôle de l'Etat se conçoit
difficilement en dehors de sa relation au marché ?!
En particulier, si l'on se place dans une économie de
marché, une condition nécessaire de la légitimité
de l'intervention publique est que l'Etat soit susceptible de faire le mieux
pour le marché.
Les changements qui s'opèrent dans la gestion de
l'économie se traduisent par plusieurs opérations. Les pouvoirs
publics s'efforcent d'appuyer la relance des investissements privées par
des actions ponctuelles (assouplissement de la politique restrictive des
crédits, hausse des taux d'intérêt créditeurs pour
renforcer les moyens de financement externes, et établissement d'un
nouveau code des investissements et des exportations) et tentent de rechercher
avec l'ensemble des partenaires économiques (entreprises, banques,
groupes étrangers...) les voies permettant la relance de
l'économie.
Plus généralement, les pouvoirs publics continuent
d'assurer un minimum de protection des structures industrielles pour
concrétiser les attentes des industriels et pour éliminer
progressivement les désajustements entre l'offre et la demande. Mais les
interventions de l'Etat qui connaissent de nouvelles évolutions doivent
prendre un caractère moins direct et moins accentué que durant
les années antérieures.
Apparemment, si l'Etat n'entend pas laisser jouer totalement les
mécanismes de la concurrence au risque de voir le développement
de l'économie aboutir à des ruptures voire à des
déséquilibres économiques et financiers encore plus
profonds, les dispositions arrêtées dans le cadre de la politique
industrielle et commerciale permettant de penser que l'on s'oriente davantage
vers une nouvelle manière d'aborder les problèmes
économiques.
L'ouverture de l'économie, la pression de la concurrence
internationale et la fragilité du système industriel provoquent
des changements dans les modalités de l'action de l'Etat.
Aux régulations globales et aux perspectives
macro-économiques, l'on tend à substituer progressivement une
logique micro-économique fondée sur le rôle de la firme et
l'affirmation de la gestion comme facteurs d'orientation du processus de
développement.
La logique micro-économique entraîne un
déplacement des rapports Etat-industrie dans la mesure où l'on
tend à réduire les mécanismes d'intervention traditionnels
fondés sur des actions globales (réglementations,
régulation sectorielle, incitations économiques...) au profit des
firmes et des groupes en tant qu'unités de développement et de
restructuration de l'économie.
Si, dans une première approche, on conçoit la
politique industrielle comme un "ensemble des relations entre l'Etat et les
entreprises", on ne doit pas s'étonner que l'existence d'un tel
"interventionnisme" ait déjà pu soulever des questions, surtout
dans l'esprit des chantres d'un libéralisme parfait ou le rôle de
l'Etat serait réduit au minimum. En fait, tandis qu'il existe divers
fondements théoriques et attitudes concrètes face à la
mise en place d'une telle politique, les arguments économiques en faveur
d'une telle intervention ne cessent de se multiplier.
Actuellement, au Maroc comme dans la plupart des pays, les
pouvoirs publics ne cessent d'accroître leur intervention, mettant en
place les éléments de ce qu'on appelle plus ou moins
confusément une "politique industrielle" ; bien qu'omniprésent au
sein des économies modernes, dans la mesure où toutes les actions
de l'Etat ont de près ou loin une incidence sur les structures
industrielles et sur les comportements des agents, cette politique n'est pas
toujours avouée. Elle est de surcroît souvent mal définie.
Elle constitue pourtant, et de plus en plus, un instrument d'action
privilégié de la politique globale.
Si tous les secteurs se caractérisent par l'interaction de
l'ensemble de ses éléments (des producteurs, des consommateurs,
des intermédiaires et tout organe de régulation) en raison des
contradictions entre la nature et les objectifs de chacun des
éléments, le secteur des assurances connaît lui aussi un
ensemble d'éléments dont la composition et la portée
diffèrent en raison de leurs liens avec ce secteur. Les
éléments qui semblent être des unités de production
cherchent à renforcer leur existence en élargissant et en
renforçant le champ de leurs activités à travers la
création d'une solide enveloppe budgétaire à même de
leur permettre, d'une part, de faire face à leurs engagements financiers
vis-à-vis des clients et d'autre part d'en faire une puissance
financière capable de suivre une politique d'investissement au diapason
des autres secteurs d'activité. Outre ce type d'éléments
actifs dans le secteur des assurances, il existe un deuxième type
d'éléments qui sont les organes de régulation et du
contrôle qui reflètent l'action publique sur ce secteur. En
démontrant la relation de causalité entre les deux types, nous
essayerons d'englober dans cette étude tous ces éléments,
de leurs structures jusqu'à leurs objectifs. D'ailleurs, l'objectif
à atteindre dans ce domaine est d'une importance toute
particulière, car c'est sa nature même qui définit la
nature de la décision. La nature et les objectifs de la décision
de création de l'élément productif dans le secteur des
assurances sont différents de ceux de la décision
régissant l'activité.
Nous essayerons d'abord de répondre à la question
de savoir la raison de l'intervention de l'Etat dans le secteur des assurances
et quel en est le but?
Cette question prend à notre avis de plus en plus
d'importance lorsque nous constatons que l'intervention étatique
à cet égard porte essentiellement sur l'activité
d'organismes privés crées à l'initiative des
privés. C'est ici que nous saisissons l'importance de cette
activité au service des intérêts
socio-économiques.
C'est dans ce cadre que l'Etat, dans la perspective de
protéger les intérêts des assurés et vu l'importance
du rôle joué par les fonds des entreprises d'assurances comme
source de l'épargne nationale et principale source de financement de ses
investissements, est intervenu dans ce secteur non seulement pour l'organiser
mais pour le protéger contre toute anarchie et pour le redresser le cas
échéant.
C'est ainsi que nous essayerons de jeter la lumière sur
les différents aspects de l'intervention de l'Etat pour assurer la
continuité de l'activité d'assurances et en
bénéficier dans le cadre de l'équilibre des
intérêts, c'est-à-dire les intérêts des
assurés, de l'entreprise et de l'Etat.
Ce sujet a fait l'objet de plusieurs études et recherches
sous diverses considérations, mais les caractéristiques de
l'assurance et les nouveautés que connaît ce domaine de temps
à autre ont fait que le secteur a toujours été
influencé par la conjoncture. C'est pourquoi, dans divers pays dont le
Maroc, le législateur est intervenu soit pour reformuler certains textes
de lois, soit pour les promulguer. L'intervention étatique, ses
objectifs et les moyens de son étude ont connu des changements
qualitatifs depuis son apparition et jusqu'à nos jours. Ainsi, afin de
cristalliser ce développement, nous allons essayer d'analyser le
modèle marocain comme une expérience tiers-mondiste de la
politique industrielle, qui continue de vivre à ce jour une phase
transitoire dans le cadre de la recherche de ses fondements de base.
Face aux problèmes auxquels fait face cette industrie
d'assurance au Maroc, nous avons souhaité dans le cadre de cette
étude traiter la politique industrielle dans le secteur des assurances
au Maroc comme étant un cas récent, particulièrement
depuis le début d'interventions de l'autorité dans certaines
compagnies en 1986, en vue de redresser leur situation financière,
suscitant par là même l'intérêt du public marocain
qui, suivant l'affaire à travers la presse, se demande le pourquoi de
l'existence de ce type d'intervention. C'est pourquoi, en abordant ce sujet,
nous essayerons de contourner les différents rouages du concept de la
politique industrielle, avant de connaître les performances et les
problèmes qui caractérisent ce secteur d'assurances au Maroc afin
de proposer enfin de compte quelques solutions qui, espérons-le,
aideront à promouvoir ce secteur et à en promouvoir la
politique.
En conclusion, nous diviserons cette étude en deux
principales parties :
v Première partie : La politique
industrielle ;
v Deuxième partie : Quelle politique
industrielle pour le secteur des assurances au Maroc ?
1ère partie:
La Politique Industrielle
AVANT-PROPOS
D'année en année, les pouvoirs publics ne cessent
d'accroître leur intervention, mettant en place les
éléments de ce qu'on appelle plus ou moins confusément une
"politique industrielle" ; bien qu'omniprésent au sein des
économies modernes, dans la mesure où toutes les actions de
l'Etat ont de près ou loin une incidence sur les structures
industrielles et sur les comportements des agents, cette politique n'est pas
toujours avouée. Elle est de surcroît souvent mal définie.
Elle constitue pourtant, et de plus en plus, un instrument d'action
privilégié de la politique globale.
Peut-on saisir les contours de la politique industrielle de la
même façon qu'on peut concerner les contours des autres politiques
de l'Etat (politique sociale, politique fiscale...) ? Autrement dit, use-t-on
l'expression de la "politique industrielle" par simple "souci de
symétrie" avec ces autres politiques, ou les actions de l'Etat dans ce
domaine sont-elles à ce point dotées d'un système de
cohérence sans faille qu'elles constituent une véritable
politique ?
On va s'interroger, dans cette partie, sur les justifications
d'une politique industrielle et sur l'opportunité de son identification,
on évoquera ensuite les types de politique industrielle et ses
instruments ; et enfin de compte, on essayera de mettre en évidence les
limites à la politique industrielle.
Chapitre I :
Les justifications et la définition d'une
politique industrielle
La politique industrielle recouvre des pratiques multiformes,
d'existence ancienne, mais qui se sont développées et
modifiées dans les dernières décennies. Elle correspond
à des interventions des pouvoirs publics sur les appareils productifs,
au moyen de subventions ou de crédit d'impôt, qui ont pour but
d'aider la production ou la recherche et développement, mais aussi
à des politiques d'incitation au regroupement et à la
rationalisation des firmes, ou encore à la création de firmes.
Section 1 : Faut-il une politique industrielle ?
A- Fondements théoriques de l'intervention des
pouvoirs publics :
Il n'existe pas de théorie scientifique,
générale et complète du rôle économique de
l'Etat qui intégrait les diverses formes de son intervention dans une
explication d'ensemble et mettrait en évidence leurs effets dans
l'économie globale. Par contre, des grands courants théoriques
s'intéressent sur l'opportunité d'une intervention des pouvoirs
publics.
Or, rares sont ceux qui nient la nécessité d'une
intervention publique dans l'économie, aussi peu nombreux sont ceux qui
contestent l'intérêt du recours au mécanisme du
marché, ainsi qu'un consensus semble avoir émergé autour
d'une troisième voie entre le tout Etat et le tout marché, entre
le dirigisme étatique radical et le laisser faire absolu.
v Dans le cadre des idées libérales, la vie
économique est dominée par l'idée de
supériorité de l'initiative privée, l'Etat doit
donc laisser jouer la libre concurrence et les mécanismes du
marché. Il doit, normalement, se tenir en dehors de l'activité
économique et son action doit être aussi légère et
neutre que possible. Ainsi, le philosophe H. TAINE condamne-t-il violement tout
empiètement de l'Etat hors de ses missions spécifiques : «
L'Etat est mauvais chef de famille, mauvais industriel, agriculteur et
commerçant, mauvais distributeur de travail et de subsistance, mauvais
régulateur de la production, des échanges, de la consommation,
philanthrope sans discernement, directeur incompétent des beaux-arts, de
la science, de l'enseignement et des cultes. En tous ces offices son action est
lente ou maladroite, routinière ou cassante, toujours dispendieuse, de
petit effet et de faible rendement, toujours à côté et
au-delà des besoins réels qu'elle prétend satisfaire
». [Le Régime Moderne. Hachette. Paris. 1890. p 181.]
Traditionnellement, l'intervention des Etats se justifie
lorsqu'il s'agit d'accroître le "bien être social", autrement dit,
quand se manifestent des situations où le marché est incapable de
garantir une allocation optimale des ressources et où la politique
industrielle s'impose et qui sont : l'apparition de monopoles ; la
présence de biens publics ; le développement
d'externalités ; l'existence de biens collectifs ; des
différences entre les taux privés et les taux sociaux de
préférence pour le temps. En général, dans un
environnement incertain, l'intervention gouvernementale dépend de
l'imperfection des informations et de la présence des coûts de
transaction.
v Grâce aux apports de W. BEVERIDGE et J.M. KEYNES, au
lendemain de la première guerre mondiale, l'Etat était donc
devenu un Etat providence devant accomplir de nouvelles missions et
essentiellement en matière économique et sociale. Dans le cadre
d'une telle théorie interventionniste, l'Etat n'est plus le
simple ensemble d'individus qui décident d'agir collectivement de
l'analyse néoclassique, mais un véritable agent économique
placé au-dessus des autres agents économiques et à qui il
peut imposer ses vues. Dans cette optique keynésienne ou
néo-keynésienne, où l'intervention de l'Etat n'est plus
totalement taboue, on justifie très bien la coexistence d'un secteur
privé, soumis aux règles du schéma classique, et d'une
économie publique en charge de grands objectifs d'intérêts
généraux (plein-emploi, relance...).
v Selon la théorie marxiste, l'Etat est un instrument de
domination de la classe capitaliste détentrice des moyens de production.
Au sein des systèmes industriels modernes, son intervention a pour objet
d'assurer la persistance du mode de production dominant, prenant en charge le
financement du capital, budgétisant certaines activités publiques
rentables au profit d'intérêt privés, facilitant la mise en
sommeil des capitaux en excédent... Dans cette perspective, les
interventions étatiques sont présentées comme un moyen
d'éviter la faillite d'une société fondée sur les
rapports de production capitaliste.
B- Les arguments économiques en faveur d'une
politique industrielle : Marché et politique industrielle.
Les échecs du marché, en tant que tels, ne
nécessitent pas une politique industrielle. La plupart des distorsions
peuvent être réglées par des réglementations ou, au
contraire, des déréglementations. La politique industrielle peut
cependant être justifiée par deux principes qui ne sont pas
antinomiques du marché :
v L'industrie joue un rôle décisif dans la
croissance nationale. Ce rôle découle de la relation dans les
secteurs industriels entre croissance, investissement et productivité
(loi de Kaldor). On peut considérer l'industrie comme un ensemble
d'activités exerçant des effets externes positifs sur la
totalité des secteurs. Il est dès lors concevable que les
pouvoirs publics subventionnent tout ou partie des activités
industrielles afin de développer leurs effets positifs sur
l'économie sur son ensemble.
v Les effets de la concurrence internationale doivent
être accompagnés par les pouvoirs publics. L'industrie
représente la partie d'une économie nationale qui est le plus
soumise à la concurrence des producteurs étrangers. Les
mouvements de réaffectation des facteurs de production entre secteurs
prennent du temps et ont des conséquences sociales et économiques
trop onéreuses pour laisser au marché seul le soin de les
régler. Les pouvoirs publics sont les gardiens d'une forme de «
cohérence du système productif ».
Cependant la politique industrielle semble tomber en
désuétude dans la période récente, Il faut
cependant noter que la plupart les grandes firmes demandent avec une insistance
croissante une intervention des pouvoirs publics en leur faveur.
C- Les ambiguïtés entourant le principe de
l'intervention de l'Etat :
Au niveau du principe même de l'intervention de l'Etat et
de sa signification, les ambiguïtés sont nombreuses, le domaine de
la politique industrielle étant par excellence celui où les
décalages sont les plus grands entre ce qui se dit et ce qui se fait, et
où les discours se démarquent le plus de la réalité
: n'a-t-on pas souvent les défenseurs ardents du libéralisme
réclamer les aides de l'Etat sous toutes leur formes? Et les partisans
les plus farouches de l'intervention publique ne sont-ils pas devenus les
hérauts de la responsabilité entrepreneuriale ?
Il s'agit là d'attitudes qui renvoient à des
débats de fond et aux diverses conceptions existantes sur le
fonctionnement des sociétés et le rôle attribué
à l'Etat.
Mais si la politique industrielle peut apparaître comme un
cadre d'organisation et de référence de tout un ensemble
d'interventions en quoi consiste-t-elle et quelles sont les difficultés
que suscite sa définition?
Section 2 : Peut-on définir la notion d'une
politique industrielle ?
La politique industrielle est, dans un premier temps, une
pratique des Etats, avant de reposer sur une base analytique précise.
Pour pouvoir en rendre en compte, il est nécessaire, après
s'être penché sur des problèmes de définition et
d'instruments d'une telle politique, de s'intéresser aux
conséquences de spécialisation internationale sur les
économies nationales.
A- Une pratique ancienne :
L'intervention des pouvoirs publics sur l'industrie est une
pratique ancienne qui s'est développée selon des rythmes et des
modalités différentes selon les pays.
Aux Etats-Unis, en dépit de la référence aux
principes du marché, les interventions publiques ont survécu
à la fin de la crise de 1929 (rôle des programmes militaires),
même si la déréglementation correspond à une
réforme de retrait de l'Etat. Le Japon est un cas exemplaire de symbiose
entre le Ministère de l'Industrie et du Commerce International (le MITI)
et les firmes. L'Allemagne connaît des interventions de l'Etat
fédéral auxquelles s'ajoutent celles des Lander. Enfin, en France
les pouvoirs publics ont toujours inspiré les grands projets
industriels.
Cette pratique ancienne prend une nouvelle dimension dans les
économies industrialisées ouvertes aux échanges
internationaux. Dans la période contemporaine, les ajustements
impliqués par la concurrence internationale, en particulier la
reconversion des secteurs menacés par la concurrence
étrangère, se font avec une intervention constante des pouvoirs
publics, quels que soient les pays concernés. Il faut noter que le terme
de politique industrielle n'a été officialisé qu'en 1975,
dans un rapport de l'O.C.D.E.
B- Les difficultés d'identifier la politique
industrielle :
Au niveau de la définition de la politique industrielle
les difficultés viennent du fait qu'elle se heurte à plusieurs
séries de problèmes :
v Problème du cadre conceptuel : de façon
générale, on a toujours senti la difficulté
d'élaborer un "corpus" théorique de
référence assez général et assez bien
accepté pour parvenir à guider les choix et les
légitimer.
v Problème des critères d'action :
étroitement lié au précédent, ce problème
précis concerne le choix des éléments susceptibles de
guider les attitudes vis-à-vis des diverses activités
industrielles.
v Problèmes de cohérence : il s'agit des
difficultés à intégrer des objectifs apparemment
concurrents, au moins dans le court terme, tels que, par exemple,
accroître la compétitivité et sauvegarder l'emploi
(problèmes de cohérence interne). Ainsi, il s'agit des
problèmes de cohérence externe dans le cas des difficultés
à raccorder les mesures de politique industrielle avec diverses autres
mesures de politique économique.
v Problèmes d'efficacité : ils concernent
les difficultés à expliquer les relations entre les mesures
prises et les objectifs à atteindre.
Enfin, les difficultés d'identification de la politique
industrielle tiennent aux ambiguïtés qui entourent sa
définition et sa mise en place : le domaine propre de la politique
industrielle n'est pas nettement défini, souvent confondu avec celui des
autres politiques.
C- Une définition opératoire :
Toutes les interventions de l'Etat sur l'industrie ne
relèvent pas de la politique industrielle. Il faut exclure de
ce champ les interventions qui, bien qu'ayant un effet sur les firmes
industrielles, ne traduisent pas une volonté explicite. On peut en effet
soutenir que toutes les décisions publiques relatives à la
réglementation de la vie des firmes (lois sur les
sociétés, fiscalité, politique de la concurrence...) ou au
coût du crédit ont un impact sur les résultats et les
décisions des entreprises. La notion de la politique industrielle
risquerait d'être vide de sens si on ne la définissait que par son
effet.
La politique industrielle peut prendre des formes très
différentes. Une distinction commode consiste à opposer des
actions d'environnement (par exemple aide à la R & D) aux actions
spécifiques (aides aux chantiers navals ou à la
sidérurgie, par exemple).
Selon J. Capul et O. Garnier, la politique industrielle peut
désigner l'ensemble des mesures prises par les pouvoirs publics pour
modifier et orienter l'évolution des activités
industrielles.1(*)
La définition proposée par Y. Morvan permet de
prendre en compte toutes les modalités et les implications de la
politique industrielle. Celle-ci est définie comme « un ensemble
d'orientations coordonnées par les pouvoirs publics visant à agir
sur les conditions de détermination des attitudes des agents (et/ou sur
les attitudes elles-mêmes), de façon à atteindre des
objectifs considérés comme importants2(*) ».
Une telle définition n'est pas "fermée" en ce sens
qu'elle permet de repérer plusieurs types de politique industrielle
selon les réponses apportées aux points suivants :
v Quels objectifs la politique industrielle doit-elle viser ?
v Quel doit être le champ de cette politique ?
v A quel niveau la politique industrielle doit-elle situer ses
interventions?
v Quelles modalités d'intervention privilégier ?
Chapitre II :
Les types de politique industrielle et leurs
instruments
Pour repérer les types de politique industrielle
existants, on pourrait considérer les objectifs retenus par les
pouvoirs publics. Mais l'analyse de leurs grandes options reste difficile
à mener, étant donné les difficultés à
repérer les choix annoncés (quand ils le sont !).
Section 1 : Les objectifs des pouvoirs publics et les types
de politique industrielle
A- Les objectifs des pouvoirs publics :
Dans l'économie décentralisée qui sert de
référence à la théorie économique, les
agents prennent leurs décisions à partir des signaux du
marché. Ces décisions, pourvu que soient remplies les conditions
habituelles de la concurrence pure et parfaite, conduisent à un
état optimum de l'économie nationale. Il n'y a donc aucune raison
à l'intervention des pouvoirs publics. Cette prescription habituelle du
libéralisme doit être nuancée dans plusieurs cas
analysés par l'Economie publique :
v L'absence de marchés à terme empêche les
agents de former convenablement leurs plans pour le futur;
v Il existe des « échecs du marché »,
c'est-à-dire des situations où le marché ne peut pas
fonctionner convenablement (externalités, biens publics, monopoles,
rendements d'échelle croissants).
Dès qu'une telle configuration se manifeste, les pouvoirs
publics doivent intervenir pour permettre à l'économie de se
rapprocher de l'optimum. L'Etat est alors le « gardien de l'optimum
».
Les objectifs des pouvoirs publics débordent la seule
relance de la production industrielle et, dans certains cas, essaient
même d'intégrer les aspects techniques et sociaux des
décisions, ce souci de réduire l'inévitable dichotomie
entre les politiques industrielles et les politiques sociales pèse
encore toutefois d'un faible poids.
B- Les types de politique industrielle :
Pour avoir déterminé une typologie de politique
industrielle on a recours à deux grands critères :
1. La nature des tactiques d'intervention :
Elle dépend largement des conceptions qu'on se fait du
rôle de l'Etat dans le pilotage de l'économie et de son
degré de volontarisme.
v Les tactiques d'environnement : visant surtout
à agir sur les structures, il peut s'agir de peser sur les règles
du jeu, en codifiant l'activité des agents (réglementation de la
concurrence, normalisation des produits...) ; il peut s'agir aussi d'une
réglementation du travail, de politique salariale, de peser sur les
conditions de financement, sur l'effort de recherche ou sur les
débouchés.
v Les tactiques de comportement : qui visent soit
à peser sur les agents grâce à une "tactique d'influence"
(des contrats, des subventions, des commandes...) ; soit à agir
directement à la place des agents, grâce à une "tactique de
substitution" qui va s'appuyer sur les entreprises publiques, sur la prise de
participations majoritaires...
2. Les champs de l'intervention :
Le champ de la politique industrielle s'élargit sans
cesse, les mesures ne se limitent plus aux seules "mesures directes" qui
affectent les processus productifs, mais s'étendent largement aux
"mesures indirectes" qui modifient l'environnement au sens plus large dans
lequel les firmes se meuvent (mesures en faveur de l'enseignement, de la
formation...).
Les champs d'intervention des pouvoirs publics peuvent être
donc plus ou moins large :
v Il peut s'agir d'un champ général ou les mesures
ne prétendent pas avoir d'effet direct sur les activités
industrielles proprement dites : on met alors en place des "mesures indirectes"
correspondant soit à des politiques conjoncturelles
générales (politiques fiscale, budgétaire,
monétaire, des revenus...), soit à des politiques visant à
créer des modifications des structures économiques (politique
d'aménagement territorial, de relations de travail, d'aides aux
exploitations, de soutien de la recherche...).
v Comme il peut s'agir d'un champ restreint d'intervention
où les mesures prétendent avoir des "effets directs" sur les
activités industrielles. On peut distinguer deux types de mesures
directes :
· Les mesures directes horizontales : ont notamment
pour objet de promouvoir l'ensemble des entreprises, et peuvent correspondre
soit à des mesures conjoncturelles (politiques de prix, d'aides aux
exportations...), soit à des mesures d'organisation industrielle
(politique de la concurrence, de la concentration...).
· Les mesures directes spécifiques : ils
sont beaucoup plus sélectives et volontaristes que les
précédentes et peuvent viser plusieurs des firmes
déterminées ou des ensembles des firmes, s'agissant soit de
"politiques de firmes", dans le cadre d'un projet de défense, de
prestige, de soutien l'emploi... soit de "politiques de secteurs" ou
"politiques de branches", "politiques de projets", "politiques de
filières"...; ces politiques ont souvent reposé sur des
"méthodes de sélectivité" susceptibles de
permettre un tri parmi les activités à promouvoir, à
reconvertir ou à abandonner.
C'est à partir des analyses des tactiques
déployées et des champs d'intervention qu'on s'attachera à
repérer et à classer les mesures utilisées selon le
tableau suivant :
LES TACTIQUES D'INTERVENTION
|
LES CHAMPS D'INTERVENTION
|
|
Champ Général
|
Champ restreint
|
1. Tactique d'environnement
· Action sur les coûts
· Action sur les facteurs
· Action sur les débouchés
· ...
2. Tactique d'action
· Tactiques d'influence :
(faire-faire)
Conventions, accords, commandes publiques, aides ...
· Tactiques de substitution :
(faire)
Entreprises publiques, nationalisations...
|
1. Mesures indirectes
· Politiques conjoncturelles (fiscales, monétaires,
budgétaires...)
· Politiques d'infrastructures (localisation,
recherche...)
|
2. Mesures directes horizontales
· Politiques conjoncturelles (exportation, formation,
innovation...)
· Politiques d'organisation industrielle (concurrence,
concentration...)
3. Mesures directes spécifiques
· Politiques de branches, de filières...
· Politiques de firmes... etc.
|
Section 2 : Les instruments de la politique industrielle et
ses limites
A- Les instruments de la politique industrielle :
Les modalités d'intervention des pouvoirs publics sur les
« conditions de détermination des attitudes des agents (et/ou sur
les attitudes elles-mêmes) », selon la définition de Morvan
citée précédemment, ne sont pas particulières
à la politique industrielle. Il n'existe pas en effet d'instrument
spécifique à la politique industrielle, au-delà des
subventions et des dégrèvements fiscaux.
En plus, il semble difficile d'isoler les instruments de la
politique industrielle de l'ensemble des tactiques et des champs d'intervention
des pouvoirs publics analysé précédemment (cf. tableau
p.9).
Or, on peut poser que les instruments de la politique
industrielle sont les variables contrôlées par les pouvoirs
publics qui permettent, à titre essentiel, d'agir sur les coûts
des entreprises et sur les structures sectorielles. Mais il existe des
variables dont la qualification n'est pas facile.
Un des exemples les plus révélateurs des
difficultés du bornage du domaine de la politique industrielle est celui
de la manipulation des taux de change. Doit-on considérer qu'une
dévaluation s'inscrit dans la politique industrielle? La réponse
est nécessairement ambiguë : oui parce qu'elle agit sur les
coûts de production des firmes, non parce que son but est
généralement autre (réponse à une crise de
change).
Il semble en revanche normal de considérer que le
protectionnisme, avec ses différent instruments (prohibition, quotas,
tarifs douaniers, normes,...) est un des éléments de la politique
industrielle. A coup sûr il relève de la définition
proposée par Morvan, puisqu'il agit sur les attitudes des firmes. De
surcroît l'équivalence entre une protection douanière et
une subvention aux entreprises domestiques est un thème classique des
analyses du protectionnisme.
Enfin, le transfert de propriété de firmes
industrielles du secteur privé au secteur public peut être
conçu comme un instrument de politique industrielle. La nationalisation
de groupes industriels et financiers avait pour but explicite de modifier le
comportement de ces entreprises par rapport à l'investissement. Selon le
diagnostic avancé, les capitaux privés, en raison d'un horizon
temporel trop bref, privilégiaient le profit à court terme et
évitaient de prendre des risques industriels. Le changement de nature
des actionnaires devait renverser les perspectives. On pourrait, en inversant
le raisonnement, considérer que les privatisations relèvent
également d'une forme différente de politique industrielle.
B- Les limites à la politique industrielle :
Au niveau de la mise en place d'une politique industrielle, les
difficultés sont permanentes et tiennent, au moins, aux facteurs
suivants :
v Ambiguïtés dans les relations quotidiennes entre
l'Etat et les entreprises : si la politique industrielle est
élaborée par des pouvoirs publics, avec ou sans la collaboration
des firmes, elle ne sera finalement réalisée que par ces
dernières ; or, par nature, elles chercheront à préserver
leur autonomie. De plus, l'Etat les y invite... tout en les influençant
: au niveau des principes, volontarisme industriel et autonomie de gestion font
mauvais ménage ; au niveau des faits seul le double langage sauve les
apparences. Des problèmes de type voisin se rencontrent dans les
relations entre l'Etat et les entreprises publiques ;
v Absence d'un lien bien clair de la définition de
coordination de la mise en place de cette politique, de sorte qu'elle risque de
se réduire à une suite de décisions prises "au coup par
coup" par un petit nombre de personnes, se connaissant bien entre elles et
maîtrisant les problèmes ;
v Articulation difficile entre les politiques nationales et les
politiques régionales, quand il ne s'agit pas d'opposition entre elles,
certaines régions voulant soutenir au nom de la défense de
l'emploi et de la cohérence de leur système local ;
v Faiblesse de système d'information et
d'évaluation qui entraîne une absence systématique du bien
fondé des interventions et une sous-estimation de leurs effets
réels ;
Quels rapports la politique industrielle entend-elle
instaurer entre les entreprises et les pouvoirs publics ?! D'un
côté, ces dernières doivent-ils se contenter de
définir une "pratique incitative", invitant les firmes à profiter
de "politique d'environnement" déterminant un environnement favorable ?
Pour beaucoup, les limites de la politique industrielle doivent
s'établir là, sous peine d'aboutir à un interventionnisme
trop puissant... D'un autre côté, ne peut-on pas attendre des
pouvoirs publics qu'ils développent des "pratique plus contraignantes",
visant à atteindre des objectifs précis et
hiérarchisés, à l'aide de "politique d'intervention"
très différenciées ? Pour beaucoup d'analystes, dans cette
hypothèse, l'Etat deviendrait, à la limite, un coordinateur
obligé du système et ferait des entreprises des sortes
d'unités fictives, des agents économiques soumis à un
pouvoir régulateur omniprésent.
Au-delà des discussions politico-théoriques sur
l'opportunité de l'intervention de l'Etat, on sait qu'il existe un
argument de "concurrence déloyale" qui joue en défaveur des
interventions publiques ; les différentes modalités
d'intervention sur l'industrie peuvent être ramenées à des
subventions versées par les pouvoirs publics, puisqu'il est possible de
calculer des équivalences entre les subventions et les avantages
fiscaux. Or les productions des firmes subventionnées peuvent être
vendues à l'étranger; même si ce n'est pas le cas, elles
viennent en concurrence avec des firmes étrangères qui offrent
leurs produits dans le pays.
Selon un argument qui joue un rôle très important,
l'existence de ces subventions est à l'origine d'une « concurrence
déloyale » entre firmes subventionnées et firmes non
subventionnées. Cette situation est contraire aux règles de
l'Accord Général sur le Commerce et les Droits de Douane (GATT
selon l'acronyme anglaise), reprises par l'Organisation Mondiale du Commerce
(OMC).
De telles situations sont à l'origine de rappel à
l'ordre de la part du GATT, de plaintes devant l'OMC, mais aussi de mesures
destinées à contrebalancer les avantages artificiellement
créés. D'autres instances interdisent de manière encore
plus rigoureuse certaines subventions.
Réalité multiforme, la politique industrielle
rencontre des obstacles aussi bien lors de sa définition que de sa mise
en oeuvre.
2ème partie:
Quelle politique industrielle pour le secteur des
assurances au Maroc?
PREAMBULE
Nul ne peut ignorer le rôle que joue le système
financier dans la stimulation de la croissance et ce, à travers la
collecte et l'injection des flux financiers dans les rouages de
l'économie. Dans ce cadre le secteur des assurances, entre autres, joue
un rôle important.
Ce secteur ne cesse de prendre de l'importance, que ce soit par
les sommes importantes qu'il draine ou au niveau des tendances lourdes qui le
caractérisent ces dernières années (concentration,
libéralisation, bancassurance...), ainsi qu'au niveau des pays qui
dominent le secteur sur la scène internationale.
Avec l'amorce du nouveau millénaire, le secteur des
assurances au Maroc à l'instar des autres pays de par le monde
connaît de profondes mutations et se trouve ainsi confronté
à de grands et importants défis (libéralisation,
concentration, assurance maladie obligatoire, bancassurance...) qui vont
certainement affecter le processus de sa croissance, des défis qui une
fois relevés, le secteur sortira certainement plus solide et plus apte
à mener à bien sa principale mission, qui est celle de permettre
à l'économie marocaine à mieux s'adapter aux exigences
internationale.
Nous avons essayé, dans la première partie de cette
étude portant sur l'identification et les types de la politique
industrielle ainsi que ses instruments, de définir ces
éléments et leurs champs d'application. Après nous
évoquerons dans cette deuxième partie l'un des
élargissements du champ de la politique industrielle au Maroc concernant
le secteur des assurances ; nous proposons d'abord d'identifier ce secteur,
à partir d'un certain nombre des éclaircissements ainsi que des
chiffres mettant l'accent sur le poids économique, financier et social
d'une telle industrie dans le tissu économique du Maroc, et de passer
ensuite à l'étude de l'ensemble de mesures et d'instruments de
l'Etat, s'inscrivant d'une manière ou de l'autre dans le cadre d'une
politique industrielle pour le secteur des assurances, visant à
intervenir non pour restreindre ses activités mais pour l'encourager
à aller de l'avant en lui faisant prendre des orientations
particulières lui garantissant la pérennité et le bon
fonctionnement en dépit des difficultés qu'il connaissait ces
dernières décennies.
Chapitre I :
Le secteur des assurances au Maroc
Le secteur des assurances fait partie des secteurs introduits au
Maroc à la suite de l'activité maritime qui a permis
l'émergence d'agences des compagnies d'assurances
étrangères dans les principaux ports marocains au cours du XIXe
siècle. Il a connu en suite un développement organisé et
bien structuré sous le Protectorat, ainsi qu'une évolution
accentuée après l'Indépendance.
A travers les sommes importantes qu'il mobilise, le secteur des
assurances joue un rôle important dans la collecte de l'épargne
intérieure et dans son acheminement vers le financement des besoins de
l'économie.3(*)
Section 1: Définitions et historique de l'assurance
au Maroc
L'assurance est née du commerce maritime au Moyen
Âge dans le monde méditerranéen. L'origine en est le "
prêt à la grosse " qui était un contrat de prêt
maritime. Pour armer leurs bateaux, les marchands s'adressaient à des
banquiers qui leur prêtaient les capitaux nécessaires. Si le
bateau faisait naufrage, l'armateur ne remboursait rien au banquier. Par
contre, s'il arrivait à bon port, il remboursait le prêt ainsi
qu'une participation très élevée en compensation du risque
encouru. L'intérêt du prêt pouvait atteindre 40%.
C'est avec la disparition du caractère spéculatif
de cette opération pendant le Moyen Âge (sous l'action de
l'Église avec le Pape Grégoire IX) que naquit l'assurance
maritime. L'écrit qui matérialisait ce contrat portait
déjà le nom de " police ". La plus ancienne police de ce type est
conservée dans un musée à Gênes. Elle date de 1347
et couvre la cargaison du " Santa Clara " pour un voyage de Gênes
à Majorque.
Par la suite, apparurent les premières assurances vie, au
XVè siècle et surtout XVIè siècle.
L'assurance Incendie fit son apparition en Angleterre un
siècle plus tard en 1666 après le grand incendie qui a
détruit des quartiers entiers de la ville de Londres
Au Maroc, l'assurance s'est développée sous le
Protectorat. En effet, les étrangers continuèrent à
s'assurer auprès des sociétés d'assurances de leurs pays
d'origine.
Les premières sociétés d'assurances qui
s'installèrent au Maroc étaient toutes étrangères.
Elles exerçaient soit sous forme de délégation, soit sous
forme de petites agences. Ensuite, prirent naissance des sociétés
de droit marocain.
C'est après l'Indépendance que l'assurance connut
une grande évolution tant au niveau de la réglementation et du
contrôle qu'au niveau de l'organisation du marché.
A- Définition de l'assurance :
L'assurance, c'est la mutualité.
Cette formule lapidaire tend à démontrer que
l'assurance c'est la réunion de nombreuses personnes qui, risquant
d'être frappées par un événement similaire,
coûteux ou dommageable, s'accordent entre elles à l'avance pour
venir en aide à celui ou ceux qui sont frappés par le sort.
Chaque assuré-souscripteur verse sa quote-part à
l'assurance. L'ensemble des primes ainsi versées finance le
remboursement des sinistres dans une même catégorie de risques.
Les cotisants, pour eux comme pour les autres, constituent ainsi une
mutualité.
L'industrie de l'assurance consiste donc à organiser cette
réunion de capitaux et leur versement. Il faut donc une organisation
rigoureuse et une forte solidarité réciproque. Ainsi, il serait
aléatoire d'attendre l'accident pour réunir les fonds
nécessaires à ceux qui sont frappés, de même que
divers mécanismes doivent prévoir l'aggravation continue ou
temporaire d'un risque (augmentation imprévisible de la fréquence
des vols par exemple) ou sa diminution. Le système doit se
prémunir contre les abus et les " tricheries " et chacun doit être
traité avec les mêmes règles.
C'est pourquoi, le législateur est intervenu pour
définir l'application de règles strictes de souscription et de
paiement des sinistres et des primes, règles qui visent en
définitive la protection de la mutualité.
M. Joseph Hémard a donné de l'assurance la
définition suivante :
" L'assurance est une opération par laquelle une personne,
l'assuré, se fait promettre, moyennant une rémunération
(la prime), pour lui ou pour un tiers, en cas de réalisation d'un
risque, une prestation par une autre partie, l'assureur, qui prenant en charge
un ensemble de risques, les compense conformément aux lois de la
statistique ".
L'assurance est le seul moyen au monde de faire supporter
par autrui (l'assureur) ce que vous ne pouvez pas supporter seul.
Cependant, tous les risques ne sont pas assurables. Pour qu'un
risque soit assurable, il doit obéir à trois règles :
v être futur ;
v être aléatoire et incertain dans sa survenance ou
dans sa date (Assurance Vie) ;
v être indépendant de la volonté de
l'assuré. 4(*)
B- Mécanisme de l'assurance :
1. La loi des grands nombres et les probabilités
:
Selon la loi des grands nombres, plus une expérience est
répétée, plus les résultats de cette
expérience se rapprochent de la probabilité théorique de
survenance d'un événement.
Ainsi, avec un dé à jouer à 6 faces, la
probabilité de sortir le 1 est de 1/6e puisque chaque face a autant de
chances de sortir. En jouant un nombre de fois limité, 10 par exemple,
la possibilité de sortir le 1 est de 0, 1, 2, 10 fois peut être
avec de la chance, soit un résultat très proche ou très
éloigné des 1/6e. Mais en jouant beaucoup plus, 10.000, 1.000.000
de fois, le nombre total de sorties du 1, la fréquence observée
se rapproche de la probabilité théorique de 1/6e.
Si la probabilité c'est la chance de survenance d'un
événement, la fréquence c'est l'observation du nombre
d'événements réalisés sur le total des
éléments d'observation.
Le calcul de la fréquence s'obtient par la formule
suivante :
Fréquence =
|
nombre de cas observés où l'événement
se produit
|
nombre total de cas observés
|
Cette fréquence est nécessairement comprise entre 0
(pas d'événements réalisés sur 100
événements observés), et 1 (100%). En assurance, cette
fréquence est exprimée le plus souvent en taux pour mille, 0,1%o
par exemple.
2. Les statistiques et l'assurance :
En ce qui concerne l'assurance, les statistiques ont une
importance primordiale pour le calcul des primes en premier lieu, pour une
meilleure répartition des risques en second lieu.
En effet, on peut maîtriser le hasard avec des
études statistiques portant sur un très grand nombre de cas et
sur des périodes longues. On peut ainsi prédire la
probabilité de survenance d'un événement avec suffisamment
de certitude pour en tirer des conclusions chiffrables.
Les statistiques pourront par exemple indiquer combien de
décès surviennent à tel âge de la vie ou l'âge
moyen de décès d'une population masculine ou féminine
à une époque donnée (table de mortalité).
De même, les statistiques pourront indiquer l'effectif (le
nombre) de sinistres Incendie survenus dans une population d'assurés et
combien ils ont coûté, globalement et en moyenne.
3. Calcul des primes :
La prime pure
Un risque quelconque peut être caractérisé
par un nombre d'apparitions du phénomène appelé
fréquence du risque. Le calcul de la prime implique une simple
multiplication de la somme assurée par cette fréquence
rapportée au nombre de biens assurés.
Cependant, la réalisation du risque n'est pas
obligatoirement totale.
Exemple:
|
Un immeuble assuré contre l'incendie peut ne brûler
qu'en partie. Les statistiques permettent de déterminer le coût
moyen obtenu en divisant le coût total des sinistres par le nombre de
sinistres.
|
On peut donc calculer la prime pure à partir du coût
moyen.
D'une manière simplifiée, la prime technique ou la
prime pure est égale à la fréquence du risque
multipliée par le coût moyen d'un sinistre.
Prime pure = fréquence X coût moyen
Ainsi, en vol, si la fréquence est de 1 pour 1000
assurés et le coût moyen de 8.000 Dh, la prime pure sera de
(1/1.000) X 8.000 = 8 Dh, payable par chaque assuré en " vol "
quel que soit l'effectif des assurés (au-delà de 1.000).
La prime nette et la prime totale
Pour couvrir ses frais de fonctionnement (frais de gestion,
rémunération des intermédiaires ...), l'assureur ajoute
à la prime pure des chargements. Le total de la prime pure et des
chargements (commissions et frais de gestion) constitue la prime commerciale.
Récapitulation
Prime commerciale ou prime nette
|
|
Prime pure
|
Commissions
|
Frais de gestion
|
-
|
Taxes
|
|
Chargements
|
|
Prime totale
|
4. Acceptation des risques et production :
Sélection
L'assureur s'efforce de choisir des risques normaux ou
homogènes et comparables à ceux observés pour
l'établissement des statistiques servant à la
détermination des primes.
Les méthodes de sélection sont variables selon les
branches considérées :
v Visite médicale en assurance Vie ;
v Vérification du risque en assurance Dommages.
Les risques aggravés par rapport à la moyenne sont
soit refusés s'ils présentent de trop fortes chances
d'occasionner des pertes, soit acceptés moyennant un supplément
de prime (une maison en bois est plus exposée au feu qu'une maison en
pierre).
En tout état de cause, l'assureur s'efforcera, afin de
maintenir son équilibre technique, de respecter la règle d'or
suivante : S = P où S = Total des sinistres et P = Total des
primes de risque (ou prime pure).
La sinistralité d'un risque est illustrée par son
S/P qui est le rapport entre le total des sinistres et le total des primes de
risque.
Production d'affaires nouvelles
Au-delà de la nécessité de sélection
du risque et d'équilibre des risques, une autre manière de
compenser les risques consiste à les " noyer " dans une masse
considérable d'assurés. C'est pourquoi l'assureur doit s'efforcer
de réunir le maximum d'assurés par une production constante
d'affaires nouvelles. Par cette production, l'assureur limite les risques et
remplace les sorties naturelles de contrats.
Dispersion de risques
Par ailleurs, pour que l'assurance joue à plein, il
convient d'établir une dispersion des risques de manière à
éviter qu'un sinistre collectif ne vienne à toucher tous les
assurés d'une seule compagnie (imaginons une tempête ou un cyclone
ravageant une ville qui serait entièrement assurée par une seule
compagnie).
En pratique, cette règle n'est pas toujours facile
à respecter. C'est pourquoi, les assureurs ont inventé les
techniques de la co-assurance et de la réassurance pour limiter ces
éventuels cumuls.
C- Historique de l'assurance au Maroc :
Au Maroc, l'assurance n'a pas été toujours une
culture de nos ancêtres. Pendant longtemps, l'opération
d'assurance a été considérée comme immorale car
elle développait la négligence et la notion de pari. Elle a
été rejetée par le système juridique islamique,
hormis les impératifs du développement économique. De
même que, le pouvoir d'achat limité de certaines couches de la
population qui considèrent l'assurance comme un produit de luxe,
réservé aux marocains issus de la classe à revenu
élevé, constituait en partie un véritable handicap au
développement naturel du secteur.
Pour toutes ces raisons, l'assurance, toutes branches confondues,
totalement étrangère à la tradition juridique du pays, n'a
pu voir le jour qu'après l'avènement du protectorat.
Avec le temps, cette pratique a pu tisser une place dans la
société marocaine. Les premières sociétés
d'assurance étaient des compagnies étrangères qui
travaillaient dans l'assurance maritime, et ce n'est qu'après, que cette
activité a pu se généraliser pour toucher d'autres
secteurs.
La transplantation de cette technique au Maroc se justifie
à l'origine d'une part, par l'arrivée des étrangers,
attirés par les richesses du pays et l'abondance de ses matières
premières ainsi que les facilités administratives et fiscales que
leur accordaient les autorités du protectorat, et d'autre part, par la
volonté de se prémunir contre les aléas de l'avenir.
Les premières sociétés d'assurances
maritimes (la Espagnola en 1879, la Centrale et la Réparation en 1883,
The Calpean maritime Insurance Ltd en 1887, la Manheim en 1886 et le Lioyd
Alleman en 1893) ayant couvert des risques au Maroc remontent à la
2ème moitié du 19ème siècle et sont le fruit du
régime des concessions étrangères en vertu du
traité du 9 décembre 1856.
Avec la première guerre mondiale, on a assisté
à la création à Tanger d'une compagnie d'assurances
maritimes et de guerre "le Maroc" en 1916, dissoute quatre années plus
tard.
Une des conséquences de la 2ème guerre mondiale a
été la naissance de 23 compagnies d'assurances entre 1941 et 1951
dont le capital était en majorité étranger, exception
faite de la Royale Marocaine d'Assurances, créée en 1950 avec la
participation de capitaux marocains et la création en 1960 de deux
compagnies "C.N.I.A." (la Compagnie Nord africaine et Intercontinentale
d'Assurances) et "S.C.R." (Société Centrale de
Réassurance) avec la participation de l'Etat par l'intermédiaire
de la Caisse de Dépôt et de Gestion (C.D.G.).
En 1958, 315 compagnies dont 25 de nationalité marocaine
se partageaient un montant global de primes de l'ordre de 150 M.Dh. Dès
1962 on ne comptait plus que 219 unités.
Ce mouvement s'est trouvé renforcé par
l'institution en 1965 d'un plancher d'encaissement d'un million de dirhams, que
les compagnies devaient atteindre, au plus tard en 1968, sous peine de retrait
d'agrément.
De ce fait, le nombre de compagnies est passé de 130
à la veille de cette décision à 54 en 1970, 32
sociétés vers la fin de 1973 et à 27
sociétés vers la fin de 1975.
Le premier juillet 1965, un arrêté complétant
les conditions d'agrément a institué l'obligation de
présenter un plan financier, établissant de manière
détaillée pour les trois premiers exercices les prévisions
de recettes et de dépenses, compte tenu, le cas échéant,
des transferts de portefeuilles et de contrats.
A l'issue du troisième exercice, l'arrêté
indique que le chiffre d'affaires doit être au moins équivalent
à un million de dirhams.
L'un des faits marquants de l'histoire du secteur était
sans doute la liquidation de cinq sociétés d'assurances (Arabia
Insurance Company Morocco S.A., la Compagnie Atlantique d'Assurances, la
Réunion Marocaine d'Assurances et de Réassurances, la Renaissance
et la Victoire) en vertu des arrêtés du Ministre des Finances et
des Investissements Extérieurs du 12 septembre 1995.
La liquidation de ces sociétés, fait suite aux
mesures de redressement appliquées par les autorités dans le
cadre de la politique d'ajustement structurel entamée depuis 1982, et
à la promulgation de certaines règles de gestion et des
indicateurs d'appréciation de la solvabilité globale des
entreprises d'assurances. Parmi ces mesures on peut citer:
v L'instauration d'un ratio de solvabilité assez
sévère, destiné à faire face aux risques de
l'exploitation propres aux caractères aléatoires des
sociétés d'assurances;
v En matière de politique de crédit, les
autorités monétaires ont décidé d'exclure à
partir du 1er juillet 1992 les entreprises d'assurances et les organismes de
prévoyance sociale d'opérer sur le marché des billets de
trésorerie en émettant des titres négociables à
l'ordre de personnes physiques ou morales d'une courte durée ou d'un
montant au moins égal à 1 million de dirhams. Cette
décision a été prise pour orienter les entreprises
d'assurances vers le marché des adjudications des bons de
Trésor.
En plus de ces mesures, on a assisté dans le cadre de la
politique d'assainissement du secteur des assurances, à la fusion par
absorption de la société "l'Entente" par "Al Amane" en 1993, avec
l'obligation d'augmenter le capital social à hauteur de 10% au moins de
son chiffre d'affaires. Plus tard, la société "Al Amane" a
été autorisée à continuer son activité sous
la nouvelle dénomination sociale "Axa Al Amane".
En 2004, le marché marocain des assurances et de
réassurance a été marqué par la fusion par
absorption de la société ALWATANIYA par la Royale Marocaine
d'Assurances (RMA) donnant ainsi naissance à la RMA WATANYA. Le nombre
des entreprises s'est ramené cette année à dix huit dont
quinze entreprises commerciales et trois mutuelles. 5(*)
Section 2: Structure du marché marocain
d'assurances
Le secteur des assurances est constitué de plusieurs
personnes exerçant cette activité, qu'ils soient assureurs ou
intermédiaires. Naturellement, ces catégories de personnes ne
peuvent exercer que si elles remplissent certaines conditions et disposent de
certaines spécificités, dont la plus importante est la forme
juridique, c'est-à-dire la qualité que revêtiront ces
personnes, morales ou physiques, dans le marché des assurances.
Au Maroc, comme dans autres pays du monde, nous remarquons
souvent que la forme revêtue par ces personnes vis-à-vis des
assureurs, sont celles de sociétés, de mutuelles, contrairement
aux intermédiaires qui peuvent exercer soit en tant que personne
physique que morale.
Nous concluons que toutes les entreprises d'assurances doivent
être constituées selon la forme juridique fixée par le
législateur. Cette forme est souvent conforme avec le genre
d'opérations qu'elles effectuent.6(*)
Par ailleurs, il convient de mentionner, qu'au Maroc, il y avait
une distinction jusqu'à 1996 entre assurances dommages et assurances de
personnes (cf. tableau 2), et ce n'est qu'à partir de 1997 avec
l'arrêté du Ministre des Finances qu'une nouvelle classification
des opérations d'assurances a été introduite et a fait la
distinction entre opérations non vie et opérations vie et
capitalisation (tableau 1).
Tableau n°1 : nouvelle
classification
Opérations non vie
|
Opérations vie et capitalisation
|
· Automobile
· Accidents corporels
· Accidents du travail
· Transports
· Incendie
· Assurances des risques techniques
· Responsabilité civile générale
· Vol
· Grêle
· Crédit
· Assistance
· Autres
|
· Assurances individuelles
· Assurances de groupes
· Capitalisation
· Autres opérations
|
Tableau n°2 : ancienne
classification
Assurances des personnes
|
Assurances (dommages) de biens et des
responsabilités
|
Assurance vie
· Assurances en cas de décès
· Assurances en cas de vie
· Assurances mixtes
Ou épargne capitalisation (sans assurés parfois) ou
tontinière (après abus des assurances mixtes)
Autres assurances de personnes
· Assurance accident
· Assurance incapacité- invalidité
· Assurance remboursement des frais médicaux
Assurances collectives
· Assurance couvrant les emprunteurs (souscrites par les
banques)
· Assurances souscrites par les entreprises
(prévoyance et retraite)
|
Assurance automobile
Assurances de dommages aux
biens
· des particuliers (ex multirisques habitation, avec volet
responsabilité)
· des professionnels (ex multirisques commerciales
· agricoles (ex multirisques avec volet dommage et
responsabilité)
Assistance
Assurances de la construction (branche
gérée en capitalisation)
· Dommages à l'ouvrage
· Responsabilité civile décennale
Assurances de responsabilité
civile
· Hors volet responsabilité de l'assurance dommages,
risques professionnels et d'entreprises
Assurance transport
· Maritime
· Aéronautique
· Spatial
· Assurance des marchandises
|
Il en va de même pour les intermédiaires. Il n'est
permis d'exercer l'activité d'intermédiaire en assurance qu'une
fois ayant rempli certaines conditions, dont la forme juridique. Les
intermédiaires étant de deux sortes: courtier ou agent.7(*)
B- Les intervenants du secteur :
1. Les entreprises d'assurances : Sociétés
et Mutuelles
En abordant le cas des entreprises, nous considérons
qu'on va examiner les plus importants éléments efficients dans le
secteur des assurances et que l'on peut résumer aux
sociétés et aux mutuelles, car ils représentent les
éléments les plus engagés par le contrat d'assurances.
v Les sociétés d'assurances : Ce sont des
sociétés à but lucratif. Elles doivent avoir un capital
minimum légalement exigé. Elles sont dirigées par un
Conseil d'Administration. Ainsi, elles peuvent pratiquer toutes les branches
d'assurance, n'ont pas de limitation territoriale au Maroc et travaillent avec
des intermédiaires (agents généraux et courtiers).
v Les mutuelles d'assurances : Ce sont des associations.
Les cotisations sont toujours variables. Elles ne peuvent donc jamais pratiquer
d'opérations impliquant une gestion en capitalisation. Elles ne
travaillent jamais avec des intermédiaires.
Au Maroc, le nombre des entreprises s'est ramené à
dix huit dont quinze entreprises commerciales et trois mutuelles.
Sur ce total, neuf pratiquent aussi bien les opérations
d'assurances non vie que les assurances vie et capitalisation, trois se
limitent aux opérations d'assurances non-vie, une pratique exclusivement
les opérations d'assurances vie et capitalisation, trois pratiquent les
opérations d'assistance, une pratique exclusivement l'assurance
crédit, et une entreprise est spécialisée dans la
réassurance.
En 2004, le montant des primes émises en affaires directes
réalisé par le secteur des assurances au Maroc
s'élève à 12193,26 millions de dirhams, en
régression de 1,14% par rapport à l'exercice
précédent (12333,30 millions de dirhams). Ce montant se
présente comme suit :
Les opérations non-vie:
9317,33 millions de dirhams, soit 76,41% du total, contre 8877,81
millions de dirhams en 2003, soit une progression de 4,95%.
Les opérations vie et capitalisation
:
2875,94 millions de dirhams, soit 23,59% du total, contre 3455,49
millions de dirhams en 2003, soit une diminution de 16,77%.
La répartition des émissions par branches et
catégories montre, pour sa part, la place prépondérante de
la catégorie automobile (36,39%), suivie par la branche vie et
capitalisation (23,59%) comme le montre le tableau suivant 8(*) :
En plus des sociétés commerciales et des mutuelles,
on peut relever dans le secteur des assurances l'existence d'autres organismes
à caractère social comme la CNSS (Caisse Nationale de
Sécurité Sociale), la CIMR (Caisse Interprofessionnelle Marocaine
de Retraite), la CMIM (Caisse Mutuelle Interprofessionnelle Marocaine), la
CNOPS (Caisse Nationale des Organismes de Prévoyance Sociale), le RCAR
(Régime Collectif d'Assurance et de Retraite) et la CMR (Caisse
Marocaine de Retraite).
2. Les intermédiaires d'assurances :
Le secteur des assurances, dans son ensemble, n'est pas seulement
constitué de sociétés et de mutuelles, mais
également d'intermédiaires d'assurances.
L'intermédiaire en assurance est la personne a qui revient
le mérite de créer la relation contractuelle entre l'entreprise
d'assurance et le client-assuré. Et pour atteindre les gens afin
d'offrir ses garanties, l'entreprise doit recouvrir aux intermédiaires
d'assurances. Leur rôle acquiert une importance accrue pour certaines
branches d'assurance-vie. En général, on peut dire que le
développement de l'entreprise et de la bonne circulation de ses produits
dépendent essentiellement de l'efficacité des
intermédiaires et de leur compétence professionnelle.
v Les agents généraux d'assurances :
l'agent général d'assurances est une personne physique mandataire
d'une seule société d'assurances qu'il représente dans une
région déterminée en vertu d'un traité de
nomination. L'agent général n'est pas un commerçant. Il
exerce une profession libérale et est rémunéré par
des commissions. Le portefeuille de l'agent général appartient
à sa société mandante à qui il doit
l'exclusivité de sa production sauf pour les risques qu'elle ne pratique
pas ou qu'elle refuse.
v Les courtiers : Le courtier est le mandataire de
l'assuré. Il n'est lié à aucune société
d'assurances. Il place les contrats de ses clients auprès des
sociétés de son choix. Il est rémunéré par
des commissions de courtage qui varient selon les branches. La profession de
courtier est réglementée (idem pour les agents
généraux) par des conditions de capacité professionnelle
prescrites par la réglementation en vigueur.
Dans le public, il y a parfois confusion entre courtier et agent
général. Voici donc les principales différences entre ces
2 catégories d'intermédiaires :
Courtiers
|
Agent Général d'Assurance
|
Mandataire de l'assuré
|
Mandataire de l'assureur
|
Personne physique ou morale
|
Personne physique
|
Commerçant
|
Profession libérale
|
Commission de courtage
|
Commission d'agent général
|
Indépendance vis-à-vis de l'assureur (libre choix)
|
Dépendance vis-à-vis de l'assureur (avec quelques
exceptions)
|
Portefeuille en propriété
|
Portefeuille propriété de la compagnie
|
En 2004, le nombre des intermédiaires d'assurances
agréés était de 751 au lieu de 773 l'année
précédente. Ce nombre est réparti comme suit :
- 580 : agents d'assurances (en exercice au 31/12/2004) ;
- 171 : courtiers d'assurances.
Le nombre des agents d'assurances agréés a
reculé de 3,49%, passant de 601 en 2003 à 580 en 2004.
Le nombre des courtiers en activité a quasiment
stagné avec 171 contre 172 en 2003.
Quant à la répartition de ces intermédiaires
selon les régions, elle est retracée dans le tableau suivant :
On constate que plus de 40% des intermédiaires
d'assurances sont concentrés dans la région du Grand-Casablanca,
le reste étant réparti entre les différentes
régions du Royaume.
Concernant les courtiers d'assurances, on remarque que la
région du Grand-Casablanca en rassemble plus de la moitié, soit
101 sur 171. En revanche, la présence des courtiers est très
faible dans les autres régions du royaume.
Par ailleurs, depuis l'entrée en vigueur du code des
assurances, les banques et Barid Al-Maghrib (la poste) sont habilités
à présenter au public les opérations d'assurances de
personnes, d'assistance et d'assurance crédit. Ainsi, le nombre
d'agences bancaires et de Barid Al-Maghrib autorisées jusqu'au 2004
à faire cette présentation a atteint 2334, ventilé comme
suit :
- 1977 agences bancaires ;
- 357 agences de Barid Al-Maghrib.
Un fort degré de concentration touche les
intermédiaires d'assurances. En effet, les courtiers qui exercent
réalisent près de 70% des émissions du marché qui
est dominé par quelques grands courtiers.
Cette concentration est légitimée, comme pour les
compagnies d'assurances, par les défis de la libéralisation et de
l'ouverture du marché, la taille critique et la réalisation des
économies d'échelle devenues priorités au sein d'un
secteur qui ne cesse de changer de physionomie.
3. Les institutions de la régulation du secteur
:
Plusieurs institutions exercent dans le secteur des assurances au
Maroc comme instances de régulation ou de promotion.
La plus importante de ces institutions est sans aucun doute la
Direction des Assurances et de la Prévoyance Sociale (D.A.P.S.),
relevant du Ministère de l'Economie et des Finances. Elle a comme
attributions, entre autres, d'instruire les demandes d'agrément
présentées par les compagnies d'assurances, d'exercer le
contrôle sur l'activité de ces compagnies et d'apprécier
leur solvabilité, d'assurer le suivi des opérations
financières des entreprises d'assurances et d'accorder après
étude le visa aux produits d'assurances émis dans le
marché.9(*)
Le Comité Consultatif des Assurances Privées
(C.C.A.P.) est un organisme chargé de donner les conseils et les
propositions sur l'évolution du secteur, il est composé de treize
représentants des compagnies, de deux représentants des
intermédiaires en plus de la présence des autorités de
tutelle (Ministère de l'Economie et des Finances).
Le Fonds de Garantie Automobile (F.G.A.): Institué par le
Dahir du 22 février 1955, le F.G.A. a pour principale mission la prise
en charge des victimes d'accidents, causés notamment par des
véhicules dont les responsables sont inconnus ou ne disposent pas d'un
contrat d'assurance. Les ressources financières émanent des
contributions des compagnies d'assurances, des amendes et des produits des
placements.
Le Bureau Central Marocain (B.C.M.) est une association de droit
privé, créée le 20 février 1969, suite à
l'adhésion du Maroc à la convention type inter-bureaux
"convention de Londres". Il est l'émanation de toutes les compagnies
d'assurances pratiquant l'assurance automobile.
Le B.C.M. a pour missions: la gestion et le règlement des
sinistres survenus sur le territoire marocain et causés par des
véhicules immatriculés à l'étranger ou des
sinistres survenus à l'étranger et causés par des
véhicules immatriculés au Maroc ainsi que l'émission de la
carte verte ou la carte internationale d'assurance automobile, qui est un
document délivré par l'assureur automobile à son
assuré et qui a valeur, à l'étranger, de contrat
d'assurance de responsabilité civile automobile, dans la limite des
garanties qu'il énonce.
C- Les défis du secteur :
Le secteur des assurances, comme tout autre secteur, est de plus
en plus touché par le phénomène de mondialisation et son
corollaire la libéralisation. Il est donc normal que les entreprises
industrielles et les prestataires de services qui opèrent sur un
marché de plus en plus global, sentent le besoin d'être soutenus
par leurs assureurs.
La recherche de gains d'efficacité, à travers la
diversification des risques, la réduction des coûts, les
économies d'échelle, les opportunités de croissance dans
les pays émergents à fort potentiel comparés aux pays
développés et le suivi des clients, constituent les principales
motivations des compagnies d'assurances pour la recherche de profits sous
d'autres cieux.
La conclusion de l'accord sur la libéralisation des
services financiers en 1997, entré en vigueur le 1er mars 1999 dans le
cadre du General Agreement on Trade in Services (GATS), s'est traduite par
l'engagement de plus de 100 pays en faveur d'une libéralisation du
secteur des assurances.
4. La libéralisation :
Au Maroc, la libéralisation est venue pour clore plusieurs
années agitées: liquidation, assainissement... Elle consistera en
la mise en place de tarifs élaborés sur des bases statistiques
ayant le consensus du marché et validées par la Direction des
assurances, au lieu de leur homologation.
L'objectif est de déterminer un tarif représentatif
pour chaque branche d'assurance. Pour cela, les compagnies doivent constituer
une banque de données statistiques au niveau de la
Fédération Marocaine des Sociétés d'Assurances et
de Réassurance. Par la suite, ce tarif doit être proposé et
appuyé par une étude statistique, à la Direction des
assurances qui doit en principe proposer des ajustements au cas où les
tarifs avancés sont jugés insuffisants. Les compagnies
d'assurances ont la possibilité de réviser leurs tarifs une fois
par an. Cette révision est soumise à l'approbation
préalable de la Direction des assurances.
Cette libéralisation qui était programmée
initialement à partir de 2001 a été reportée vers
une date ultérieure en raison de plusieurs motifs invoqués par
les sociétés d'assurances: situation financière du secteur
modeste eu égard à la santé de la bourse marocaine ces
dernières années, structure du marché qui ne cesse de
changer de physionomie avec la vague des fusions-acquisitions et surtout,
manque de préparation au niveau technique et statistique pour la
majorité des compagnies d'assurances.
Depuis la libéralisation des tarifs en 2001, les
assurances sont invitées à plus de transparence. Ainsi, en
entamant leur mue, elles se restructurent à coups de rapprochements de
fusions et d'alliances, et se réorganisent.10(*)
5. La tendance à la concentration :
Le secteur des assurances au Maroc, à l'instar des autres
secteurs de par le monde, a connu et connaît ces derniers temps une vague
de concentration sans précédent, qui va dans le sens de la
libéralisation des marchés, conformément aux accords
signés dans le cadre de l'Organisation Mondiale du Commerce, afin de
bénéficier de l'ouverture et de la globalisation dans les
services financiers. Ce secteur est, désormais, concentré,
principalement autour des groupes: RMA-Al Watanyia, AXA-ONA, Wafa-assurances et
Atlanta-Sanad.
En effet, le groupe Finance.com a été
reconfiguré après le rachat, auprès du groupe
Français d'assurance GAN, de 67% de la compagnie Al Wataniya et de 85%
de l'Alliance Africaine par BMCE BANK et la RMA.
Cette opération de rapprochement a consolidé la
place du groupe Finance.com sur l'échiquier assuranciel marocain, avec
une confortable part de marché de plus de 23,3% en 1999 selon les
données publiées par la Direction des Assurances et de la
Prévoyance Sociale (12,3% pour Al Wataniya, 7,1% pour la RMA et 3,9%
pour l'Alliance Africaine).
Ce rapprochement permettra à Al Wataniya de devenir l'un
des géants acteurs de l'assurance au Maroc avec près de 600
collaborateurs, plus de 70 agences et bureaux ainsi que près de 169
courtiers.
Par ailleurs, une décision a été prise par
le groupe ONA, en septembre 1999, de sceller un partenariat avec AXA, le leader
mondial français de l'assurance, à travers la Compagnie Africaine
d'Assurance (C.A.A.), la société d'assurance du dit groupe.
Le nouveau holding créé détient 100% de la
nouvelle compagnie AXA Assurance Maroc qui a résulté de la fusion
entre la C.A.A. et AXA-Al Amane et il est détenu à 51% par AXA et
49% par ONA.
La nouvelle entité peut s'adjuger une part du
marché national d'assurance de l'ordre de plus 20,7% selon les chiffres
de 1999 (11,7% pour la C.A.A. et 9% pour AXA Al Amane).
Tous ces éléments ont valu à AXA Assurance
Maroc des résultats importants. En effet et avec un effectif de 600
personnes et un réseau de distribution constitué de 80 agents
généraux et 150 courtiers partenaires, cette compagnie
possède 15 milliards de dirhams d'actifs gérés, 8
milliards de provisions techniques et 3 milliards de fonds propres ainsi qu'un
chiffre d'affaires de 2.2 milliards en 2005.
Enfin, parmi les éléments concernant la
concentration au sein du secteur, le groupe Holmarcom contrôle la
société Sanad, qui représente une part de marché de
plus de 5%.
6. La bancassurance :
La bancassurance est une pratique qui a vu le jour au Maroc, en
fait, depuis plusieurs années. En effet, c'est vers la moitié des
années 70 (1973), avec la convention d'assistance de rapatriement de
corps, destinée initialement aux marocains résidant à
l'étranger lors de leur déplacement, que cette technique est
née. Elle s'est développée depuis une dizaine
d'années avec la vente des produits d'assurances par les banques
à travers les contrats groupe ouverts.
La bancassurance a pu trouver un terrain de développement
au Maroc notamment à la suite des processus de concentration et de
transformation en cours dans le secteur financier marocain tout entier. Dans ce
cadre, la bancassurance, c'est à dire la distribution de produits
bancaires et d'assurances par un même réseau est l'un des signes
les plus tangibles d'un processus de rapprochement progressif entre les
activités bancaires classiques et celles de l'assurance.
L'importance qu'a prise cette pratique est
démontrée par la distribution de 10% des produits d'assurances
qui se fait via les banques pour un chiffre d'affaires, avec une
précision que la branche vie représente plus de 90% du chiffre
d'affaires de l'activité bancassurance alors qu'en sens inverse plus de
5% du chiffre d'affaires global de la branche vie du secteur des assurances est
issu de la bancassurance.
Quatre principales stratégies sont possibles pour
rapprocher la banque de l'assurance et donner naissance ainsi à la
bancassurance. Il s'agit de la signature d'un accord de distribution entre la
banque et la compagnie d'assurances; la signature d'un partenariat avec prise
de participation stratégique entre les deux établissements; la
création d'une compagnie d'assurances commune entre les deux parties et
enfin la mise en place d'une filiale d'assurances de la banque en question.
Plusieurs raisons plaident pour un rapprochement entre banquiers
et assureurs, on peut citer entre autres:
v Le fait que le marché de l'assurance vie (seul
touché par la bancassurance) est attrayant pour les banques, tant du
point de vue des marges de profit que des possibilités de croissance;
v Dans un pays où les rites sociaux et religieux ne sont
pas toujours favorables au développement de l'assurance, la culture de
la clientèle bancarisée peut, en quelque sorte, permettre de
vulgariser un peu plus le message de l'assurance;
v L'offre de produits vie va permettre aux banques de
réaliser d'importantes économies d'échelle et de
développer leur chiffre d'affaires en améliorant la
productivité de leur réseau;
v Le banquier dispose d'un réseau d'informations utiles
sur ses clients qui lui donne un avantage certain pour vendre les produits
d'assurance;
v L'exploitation des effets de synergie banque/assurance à
travers notamment la réduction des coûts administratifs et
informatiques;
v La bancassurance est un moyen stratégique de
fidélisation de la clientèle et de diversification de l'offre des
produits et services;
v Et enfin, il y a les fortes participations stratégiques
des compagnies d'assurances dans les capitaux des établissements
bancaires.
Au Maroc plusieurs alliances et rapprochements ont vu le jour
dans le cadre de l'exploitation des gisements de la bancassurance, on peut
citer par exemple: la BMCE BANK avec la RMA et Al Wataniya, Wafabank avec
Wafa-Assurance, la BMCI avec l'ex société Al Amane, la BCM avec
la CAA et enfin le groupe Banques Populaires qui a signé un accord de
partenariat avec Al Amane. Un dernier rapprochement a été
élaboré entre la Marocaine-vie et le groupe Société
Générale. En effet, la Société
Générale Marocaine de Banques, quatrième banque
privée au Maroc vient d'acquérir 14,97% du capital de la dite
compagnie, alors que la SOGECAP, filiale du groupe Société
Générale et cinquième compagnie d'assurance vie en France,
a acquis quant à elle 35,05%.
Le potentiel du développement de la bancassurance au Maroc
est important, en témoignent les participations croisées entre
banques et sociétés d'assurances ainsi que la vague de
concentration que connaît aussi bien le secteur bancaire que celui des
assurances.
7. L'assurance maladie obligatoire :
L'Assurance Maladie Obligatoire (AMO) est l'un des dossiers les
plus consommés ces derniers temps pour les opérateurs du secteur
des assurances mais aussi, pour tout un pays où 80% de la population est
exclue de la couverture sanitaire. Ceci démontre que le secteur des
assurances est au coeur de la problématique sociale.
La mise en oeuvre de l'AMO serait de bon augure pour toute
l'économie nationale dans la mesure où elle constituera un canal
de la redistribution des richesses par le biais du principe de la
solidarité qui est la base de tout système de couverture
généralisée. L'AMO sera également un stimulateur de
la création d'emplois directs et indirects dans plusieurs branches
telles que l'industrie pharmaceutique, les métiers médicaux et
paramédicaux ainsi que dans le secteur des assurances et dans bien
d'autres services. En tablant sur une consommation médicale de 6
milliards de dirhams, dans ses différents blocs (hospitalisation, soins
ambulatoires et pharmacie), l'AMO sera un facteur de relance de
l'économie et de résorption du chômage.
Le projet présenté par le comité d'experts,
stipule que l'AMO, qui ne constituerait plus qu'une partie du programme de la
couverture médicale obligatoire en plus du RAMED (Régime
d'Assurance Maladie pour les Economiquement Défavorisés), sera
gérée selon une approche bipolaire, confiant ainsi la gestion du
régime de base pour les salariés privés à la CNSS,
alors que c'est la CNOPS qui se chargera de la gestion de la couverture
médicale des fonctionnaires et agents assimilés.
La couverture complémentaire et optionnelle sera, quant
à elle, confiée aux compagnies d'assurances privées. Tout
ce système sera sous la gouvernance d'une agence publique, l'ANAM
(Agence Nationale de l'Assurance Maladie), chargée de la
régulation et du contrôle du fonctionnement de ses
différents maillons.
Selon les études qui ont été faites par la
CNSS, l'AMO concernerait 2,5 millions de salariés et pourrait profiter
à près de 8 millions de personnes en comptabilisant les familles
des assurés, les retraités et invalides, alors qu'actuellement la
sécurité sociale ne couvre que 1,4 million de salariés du
secteur privé.
Le choix de la CNSS comme organisme chargé de gérer
le dossier de l'assurance maladie obligatoire a soulevé beaucoup de
critiques de la part des compagnies privées d'assurances et a
suscité une forte polémique. Les autorités chargées
du dossier avancent plusieurs arguments en faveur de la prise en charge du
dossier par la CNSS : tout d'abord, la CNSS possède un potentiel
historique d'expériences en matière de gestion des risques
d'indemnité journalière de maladie et des conventions
internationales de sécurité sociale avec des organismes de pays
étrangers au profit des marocains résidant à
l'étranger, mais il y a surtout le fait que selon les responsables il
n'existe pas un pays où une telle réforme a été
confiée aux opérateurs privés, vu la sensibilité et
l'importance économique, financière et sociale de la dite
réforme.
Les assureurs privés représentés par la
FMSAR estiment, pour leur part, qu'ils ont une longue expérience en
matière d'assurances et qu'ils sont plus proches des assurés avec
une présence sur tout le territoire et une couverture de plus d'un
million de personnes, soit le tiers des salariés du secteur
privé.
Selon la FMSAR, l'AMO doit se baser sur certains principes
fondateurs qui serviront de cadre à ce projet : il y a tout d'abord le
respect des principes de solidarité et de mutualisation des risques, le
respect de l'équilibre financier du système pour qu'il n'y ait
pas de gouffre financé et subventionné par le budget de l'Etat et
enfin la nécessité de la transparence et de la bonne gouvernance
du régime.
Quant aux moyens de financement, le taux de cotisation à
l'AMO serait, selon la dernière mouture présentée, de 6%
(à moitié entre part patronale et part salariale), l'enveloppe
nécessaire à la couverture des salariés du privé
serait de 1,5 milliard de dirhams. Les taux de remboursement varieront entre
50% et 60% pour des prestations fournies relatives aux soins ambulatoires,
à l'hospitalisation et aux médicaments. Pour les fonctionnaires
c'est l'Etat qui interviendrait via le budget du ministère de la
Santé pour verser les cotisations nécessaires.
Par ailleurs, signalons que l'entrée en vigueur de l'AMO
serait échelonnée dans le temps. Ainsi, durant une période
transitoire de deux à trois années, les personnes resteront
assurées auprès des organismes où ils le sont actuellement
et le changement d'affiliation se fera au fur et à mesure sur une
durée triennale.11(*)
Actualités
RMA-Watanya toujours en pole position
Selon les dernières statistiques de la
Fédération Marocaine des Sociétés d'Assurance et de
Réassurance (FMSAR), les primes émises par le secteur des
assurances au Maroc se sont élevées à 12,8 MMDH en 2005,
en progression de 7,4% par rapport à l'année
précédente. Cette performance favorable est notamment tributaire
du bon comportement de la Branche Vie dont les ventes se sont
appréciées de 13,4% à 3,27 MMDH.
Le chiffre d'affaires du pôle Non Vie a
présenté, quand à lui, une évolution plus timide,
s'élevant de 5,4% à 9,47 MMDH.
Par opérateur, RMA-Watanya enregistre un volume
d'activité en amélioration de plus de 13% à 2,9 MMDH en
2005, polarisant ainsi 22,7% du chiffre d'affaires global du secteur. Les parts
de marché de la compagnie sur les segments Vie (23,6%) et Non Vie
(22,3%) attestant de son leadership dans son secteur.
Pour sa part AXA Assurances Maroc affiche une contribution de 2,2
MMDH établissant sa part de marché à 17,3% pour une
croissance contenue à 0,6% seulement. La Marocaine Vie s'est, quant
à elle, illustrée suite à une envolée de plus de
70% de son chiffre d'affaires en 2005 à 543 MMDH.
Rappelons, par ailleurs, que la concurrence sur ce secteur sera
prochainement accentuée face à la libéralisation imminente
de l'assurance automobile, ce qui devrait amener les différents
opérateurs une politique commerciale plus agressive.
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Le matin éco. Lundi 3 avril 2006
Chapitre II :
L'intervention de l'Etat sur le secteur
d'assurances
Si l'initiative de créer une industrie des assurances
trouve son origine chez les particuliers qui avaient instauré la
technique d'indemnisation fondée sur le pari, sans l'accord des pouvoirs
publics, ce sont les développements intervenus dans ce secteur qui ont
suscité l'intérêt des pouvoirs publics. Les techniques
d'assurances actuelles ont fait de ce secteur une institution sociale à
part entière et une entité homogène s'intégrant
parfaitement dans le tissu économique des pays, ayant pour objectif
principal de servir l'individu et la société. Mme Yvonne Lambert
Faivre12(*) a
indiqué que "pour une société civilisée, dans
laquelle l'individu est plus isolé de la structure familiale qui le
protégeait, a vu ses besoins en sécurité et protection
devenir plus importants que par le passé, ce qui a contribué
à l'essor de cette industrie".
Face à une situation particulière à ce
secteur, qui s'est imposé à tous les niveaux social,
économique et financier, l'Etat se devait d'intervenir, non pas pour
limiter ses activités mais pour l'encourager à aller de l'avant
en lui faisant prendre des orientations particulières lui garantissant
une pérennité à une époque où le sens du
projet et du risque a suivi l'évolution de l'Homme, des sciences et de
la technologie.
Comme relèvera ce chapitre, les relations entre les
assurances et l'Etat sont entremêlées en commençant par la
législation et terminant par le contrôle. Mais quelles sont
d'abord les impulsions qui poussent l'Etat à agir dans ce secteur ?
Section 1 : Raisons de l'intervention étatique sur
le secteur
Les raisons qui amènent l'Etat à intervenir dans le
secteur d'assurances au Maroc peuvent être résumées en
trois points :
A- Protection de l'ordre public :
Les principes de l'assurance sont le soutien mutuel et la
coopération, car la technique de l'assurance n'est pas uniquement
basée sur la loi régissant le contrat d'assurance, mais
également sur les éléments et les structures des
entreprises qui s'adonnent à cette activité afin qu'elles soient
au niveau de la confiance des assurés en général. C'est
dans cette optique que l'Etat est intervenu pour protéger les
intérêts de ces derniers qui se trouvent dans une situation
particulière. La nature de l'assurance implique que l'assuré
verse une prime d'assurance généralement payée
immédiatement et en avance à l'assureur. En contre partie, ce
dernier s'engage à payer une indemnité à l'assuré
en cas de réalisation du sinistre objet de l'assurance. Face à ce
cycle économique inversé imposé par les techniques
d'assurances permettant à l'entreprise d'assurance d'encaisser les
primes d'assurances sans donner de contre partie matérielle autre que
l'engagement moral, le législateur est intervenu dans la majorité
des pays afin de protéger les assurés par la promulgation de lois
imposant à ce secteur le contrôle efficace des pouvoirs
publics pour contraindre les entreprises d'assurances à honorer
leurs engagements dans le but de préserver l'ordre public de toute
anarchie que pourrait créer ces entreprises.13(*)
B- Raisons économiques :
Le législateur, et par conséquent l'Etat, ne peut
pas ignorer que les fonds des entreprises d'assurances constituent une part
importante dans l'épargne nationale. Pour cette raison, l'Etat est
intervenu dans le secteur non seulement pour contrôler les fonds, et
leurs investissements, mais également pour en exploiter une partie dans
la dette publique. En réalité, cet objectif a été
fixé comme conséquence à la transformation intervenue dans
l'Etat depuis le début du XXe siècle, d'où son
intervention dans l'activité économique. La réglementation
de la concurrence entre les entreprises d'assurances et la méthode
d'exploitation de leurs réserves techniques ainsi que la prise de
participation dans leur capital sont autant d'éléments
placés dans la catégorie des objectifs économiques de
l'intervention étatique dans le secteur d'assurances.
C- Raisons sociales :
Les entreprises d'assurances sont appelées à jouer
le rôle de service public ou social. Bien que l'appellation "service
public" soit aujourd'hui un peu ambiguë, il est parfois difficile de
l'appliquer aux assurances même si, généralement, la
fonction sociale est parfaitement établie et en accord avec la
philosophie de l'assurance. D'ailleurs le secteur des assurances permet
d'assister un nombre considérable de personnes victimes de divers
accidents, notamment les accidents du travail. Ainsi, et à titre
d'exemple, les ménages et unités de production (victimes, ayants
droit, bénéficiaires de contrats et auxiliaires14(*)) ont perçu, au titre
des indemnités de sinistres et des capitaux échus, un montant de
8028,89 millions de dirhams, en progression de 0,72% d'un exercice à
l'autre. La part des indemnités de sinistres a représenté
71,84% des sommes distribuées, sans négliger le nombre important
de personnes employées par le secteur.
Après ce bref aperçu des principales raisons qui
ont été derrière l'intervention étatique dans le
secteur, la question est de savoir quelle serait la forme à adopter,
s'il devrait s'agir d'une intervention efficace ?
Section 2 : Les relations entre les assurances et l'Etat :
de la législation au contrôle
Si l'intervention étatique sur les activités des
assurances trouve son essence dans plusieurs considérations dont la
principale réside dans la protection des assurés, des
souscripteurs et des bénéficiaires du contrat d'assurances, le
but visé par les autorités publiques a connu de profonds
changements depuis son instauration jusqu'à nos jours. Si au
début il ne s'agissait que d'une intervention de l'Etat au cas où
l'entreprise n'honorait pas ses engagements, aujourd'hui, grâce à
des législations spéciales, il est devenu un objectif que l'Etat
cherche à protéger avant qu'il n'y ait préjudice, devenant
ainsi une intervention préventive depuis la création de
l'entreprise jusqu'à sa liquidation. L'Etat est également
intervenu pour bénéficier de ses fonds qui constituent un
élément primordial dans l'épargne nationale.
Ainsi l'intervention de l'Etat dans ce secteur est
complétée par le contrôle de la situation financière
de l'entreprise, en mettant en place des lois relatives aux investissements de
l'entreprise par la création de règlements adéquats
donnant à l'entreprise le droit d'investir ses fonds au profit des
assurés et des bénéficiaires de contrats d'assurances.
A- Les modalités et les instruments de l'intervention :
Tout d'abord, l'Etat est intervenu, de manière indirecte,
au niveau de la législation en délimitant le cadre juridique des
entreprises d'assurances qui sont trouvées dans l'obligation d'appliquer
les dispositions des lois régissant les sociétés
commerciales. Ainsi, ces entreprises prenaient la forme de
sociétés anonymes ou sociétés en commandite par
action et autres formes de sociétés ce qui les a assujetties aux
règlements régissant ce type de sociétés.
Cette forme d'intervention a continué ainsi pour
comprendre le contrat d'assurance. Les dispositions de ce contrat ont
été inspiré par le droit privé régissant les
obligations civiles et particulièrement le code civil
complété ensuite, ce qui est tout à fait logique en raison
de la nature de l'engagement dans ce domaine par des dispositions
particulières s'adaptant à la nature de l'activité
d'assurances.
Après cette période, et après la
découverte de cette relation déséquilibrée qui
lient les parties contractantes dans le cadre du contrat d'assurances, l'Etat
est intervenu directement pour garantir les principes de ces contrats par les
entreprises d'assurances afin de préserver les intérêts des
assurés, des bénéficiaires de contrats d'assurances et des
souscripteurs.
Cette intervention tardive dans la majeure partie des cas
entraînait une sanction contre l'entreprise défaillante sans
garantir à la partie lésée de recevoir ses
indemnités, particulièrement dans le cas de faillite de
l'entreprise. Cette réalité a constitué l'une des raisons
directes ayant poussé l'Etat à intervenir à un stade
précoce, soit avant le préjudice, à travers des services
administratifs spécialisés dans le contrôle des
institutions d'assurances, puisque les entreprises ont été
soumises au système des agréments administratifs, avec toutes les
conditions nécessaires à son obtention, soit au niveau du
contrôle à posteriori ayant pour objet l'activité
d'assurance.
B- Les décisions publiques relatives à la
réglementation du secteur :
Dès que les activités d'assurances se sont
développées, il est apparu indispensable de fixer les
règles - concernant le cadre juridique, contractuel, technique et
financier - régissant les rapports Assureur / Assuré, les
obligations des parties, le contrôle des sociétés
d'assurances, les éléments devant obligatoirement figurer dans le
contrat, etc.
Au Maroc, le premier texte régissant le contrat15(*) d'assurance est
l'Arrêté Viziriel du 28 Novembre 1934, et du 6 septembre 1941
relatif au contrôle de l'Etat sur les entreprises d'assurances, de
réassurance et de capitalisation. La réglementation en la
matière relevait auparavant du droit commun.
C'est après l'Indépendance que l'assurance au Maroc
connaîtra une grande évolution, tant au niveau de la
réglementation et du contrôle qu'au niveau de l'organisation du
secteur.
En effet, La réglementation régissant le secteur
des assurances était à la fois éparse car elle a connu une
multitude de rajouts et de modifications sur plusieurs décennies, ce qui
rendaient sa manipulation difficile et son application imprécise. La
volonté d'harmoniser ces textes épars, d'en combler les
insuffisances et de tenir compte des évolutions récentes dans
l'industrie de l'assurance a donc rendu nécessaire l'élaboration
d'un code constituant un cadre institutionnel et technique propre au secteur
des assurances, à même de protéger les assurés et de
sauvegarder les acquis du secteur au bénéfice de
l'économie nationale dont il est l'un des éléments
moteurs.
La loi n° 17-99 portant le code des assurances16(*) (dahir n° 1-02-238 du
rejeb 1423 / 3 octobre 2002) ainsi que son décret d'application (n°
2-04-355 du 19 ramadan 1425 / 2 novembre 2004) apportent des réponses
aux insuffisances que connaissait la réglementation des assurances, en
introduisant un certain nombre d'innovations.
C- Le contrôle de l'Etat sur le secteur des assurances : sa
forme et son objectif :
Le contrôle de l'Etat sur le secteur des assurances au
Maroc, tant que dans la majorité des pays, prend des formes assez
semblables17(*) et
uniformisées, axé dans leur ensemble sur trois axes principaux
qui déterminent leurs champs d'application :
v Contrôle technique et financier : ce type de
contrôle porte principalement sur le respect par les entreprises des lois
régissant les réserves techniques ainsi que les moyens
légaux d'en faire le calcul. Ce type de contrôle permet aux
pouvoirs publics de procéder à la vérification des
investissements des fonds des compagnies d'assurances et leur disposition
à payer leurs engagements financiers.
v Contrôle du prix des assurances : les prix qui ont
adopté la liberté de tarification appliquée dans toutes
les branches d'assurances ou certaines d'entre elles, imposent à leurs
entreprises de faire viser leur prix par les autorités de contrôle
avant leur application. Cette procédure vise à permettre aux
autorités d'étudier la tarification et de l'adapter aux
réalités du marché.
v Contrôle de la conformité des contrats
d'assurances aux textes de loi : en raison des particularités qui
caractérisent les contrats conclus en matière d'assurance, le
législateur intervient généralement pour établir
des textes de lois régissant les contrats d'assurance, ce qui a
conféré aux autorités le pouvoir d'exercer le
contrôle et la vérification des contrats d'assurances et leur
conformité avec la loi.
Si l'Etat cherche à protéger et préserver
les intérêts des assurés et des bénéficiaires
de contrats d'assurance, il a ainsi été amené, en
exerçant son contrôle sur le secteur des assurances, à
innover et trouver de nouvelles techniques qui visent essentiellement à
créer un nouveau système de contrôle renforçant
d'abord les garanties financières de l'entreprise et deuxièmement
à innover en créant un système de contrôle
préventif.
Dans cette optique, nous remarquons que les pays ayant une longue
expérience en la matière, tel que la France, la Grande-Bretagne
et les Etats-Unis ont trouvé de nouvelles garanties dont principalement
la réserve de garantie en tant que garantie financière
préventive qui a ses particularités, puis le contrôle de la
solvabilité de l'entreprise en créant une nouvelle réserve
appelée la marge de solvabilité ou ce qui baptisé dans
l'orient arabe la marge de remplissage.
Pour le cas du Maroc, le législateur a instauré ce
type de réserves afin de faire face à toute insuffisance qui
viendrait à toucher par surprise les réserves techniques. Pour sa
constitution, elle est obligatoire pour toutes les entreprises. D'ailleurs le
législateur marocain l'a considéré comme étant un
des engagements financiers indéniables de l'entreprise. Cette
confirmation reflète bien évidemment la nature protectionniste et
l'importance de cette réserve pour sauver l'entreprise et
préserver les intérêts des assurés. Il
apparaît donc que le législateur marocain a instauré ce
type de garantie préventive pour éviter toute insuffisance qui
pourrait affecter les réserves techniques légales et non pas pour
renforcer le capital social ou constitutif comme aiment à penser
certains. C'est pourquoi le législateur marocain a obligé les
entreprises d'assurances à constituer cette réserve à
partir de prélèvements sur les primes et non plus à partir
de prélèvements sur les bénéfices comme
stipulé par d'autres législations.
Et, vu le rôle que peut jouer la marge de
solvabilité, comme instrument permettant à l'autorité de
contrôler et d'apprécier la situation financière de toute
entreprise d'assurances, le législateur marocain l'a introduit dans la
réglementation des assurances sous forme d'instruction (Instruction
n° 18 du 29 mars 1996). L'objet visé par la constitution de cette
marge, et par son imposition et son contrôle aux entreprises
d'assurances, est d'éviter à ces dernières des mesures
répressives lors des crises financières, telle le retrait de
l'agrément18(*) et
la liquidation. C'est pourquoi André Besson l'a qualifié de
garde-fou pour les entreprises d'assurances19(*).
Nous remarquons d'ailleurs qu'il s'agit de deux
éléments qui font partie des garanties financières qui
renforcent la situation financière de l'entreprise, alors que pour
l'autorité chargée du contrôle20(*) ils constituent deux
instruments légaux lui permettant de jouer pleinement son rôle
à l'égard de ce secteur.
CONCLUSION
Actuellement, le secteur des assurances au Maroc connaît de
profondes mutations et se trouve ainsi confronté à de grands et
importants défis (libéralisation, concentration, assurance
maladie obligatoire, bancassurance...) qui vont certainement affecter le
processus de sa croissance, des défis qui une fois relevés, le
secteur sortira certainement plus solide et plus apte à mener à
bien sa principale mission, qui est celle de permettre à
l'économie marocaine à mieux s'adapter aux exigences
internationale.
Conscient de l'importance sociale et économique du secteur
des assurances, l'Etat, dans la perspective de protéger les
intérêts des assurés et vu l'importance du rôle
joué par les fonds des entreprises d'assurances comme source de
l'épargne nationale et principale source de financement de ses
investissements, est intervenu dans ce secteur non seulement pour l'organiser
mais pour le protéger contre toute anarchie et pour le redresser le cas
échéant, les dispositions arrêtées dans le cadre de
la politique industrielle permettant de penser que l'on s'oriente davantage
vers une nouvelle manière d'aborder tels problèmes.
Si, dans une première approche, on conçoit la
politique industrielle comme un "ensemble des relations entre l'Etat et les
entreprises", on ne doit pas s'étonner que l'existence d'un tel
"interventionnisme" ait déjà pu soulever des questions, surtout
dans l'esprit des chantres d'un libéralisme parfait ou le rôle de
l'Etat serait réduit au minimum. En fait, les arguments
économiques en faveur d'une telle intervention ne cessent de se
multiplier, dont l'intérêt voire l'impératif de
définir une politique industrielle dont les fondements en
"théorie" sont en relation plus ou moins étroite avec les
analyses théoriques portant sur l'opportunité d'une intervention
des pouvoirs publics et auxquelles correspondent trois grandes familles de
politiques industrielle :
La première attitude est celle de ceux qui restent
opposés à la mise en place d'une telle action : le meilleur choix
de politique industrielle est de ne pas en avoir, de sorte que toute
intervention de l'Etat, surtout en période de crise, ne peut
qu'accroître les rigidités et retarder l'heure de la reprise, en
inspirant aujourd'hui la mise en place de "politique globale d'ajustement" des
firmes aux conditions économiques changeantes.
La deuxième attitude est celle adoptée par ceux qui
militent en faveur de l'intervention des pouvoirs publics pour atteindre des
projets précis. Il s'agit de mettre en place des "politiques
fonctionnelles" qui, au-delà d'une simple politique d'ajustement,
assurent la défense ou la promotion d'activités, sans toutefois
s'engager dans une gestion globale du système.
La troisième attitude correspond à celle des
partisans déclarés d'une politique industrielle comme moyen
privilégié d'organisation du système productif. Il s'agit
cette fois de mettre en place des "politiques structurelles", en ce sens qu'on
désire agir directement sur les structures du système industriel
et même sur les comportements des agents, de la même façon
qu'on prétend assurer un pilotage général du
développement de l'appareil productif.
L'industrie des assurances à la fois se mondialise et se
segmente. La protection sociale face au vieillissement de la population
représente un enjeu de taille pour la plupart des pays et exige la mise
en place de systèmes nouveaux et adaptés.
Au Maroc, cette industrie qui a entrepris ces dernières
années tout un processus de redressement et d'assainissement,
s'apprête à connaître de profondes mutations liées
essentiellement à l'ouverture du marché.
Désormais, avec l'échéance de la
libéralisation, les compagnies d'assurances se trouvent
confrontées à de nouveaux challenges pour conquérir un
marché fortement potentiel et résister aux coups de la
concurrence internationale. Pour y parvenir, la politique industrielle, lien
privilégié entre les entreprises et les pouvoirs publics, est
appelée à entrer dans une nouvelle phase de son
développement qui constituera sans doute la voie permettant aux
sociétés d'assurances de quitter définitivement
l'ère du protectionnisme pour entrer pleinement dans celle de la
concurrence internationale. Tout d'abord par des mesures directes
spécifiques en faveur de ce secteur, puis, progressivement, à
partir des années 80 et particulièrement en 1984 qui a connu le
plus de problèmes résultant de violations de la loi par certains
opérateurs. Si la situation à cette époque exigeait des
pouvoirs publics de prendre les mesures d'urgence pour sauver les entreprises
qui souffrent d'une faiblesse dans leur gestion ou de problèmes
financiers au point qu'elles étaient dans l'impossibilité
d'honorer leurs engagements envers leurs assurés, elle exigeait d'eux
également qu'ils cherchent d'abord les véritables raisons ayant
conduit le secteur dans cette impasse pour ensuite leur trouver la parade avec
les moyens adéquats.
Ainsi, la mise en oeuvre de politiques agressives face à
la concurrence est longtemps restée en dehors de la préoccupation
de l'Etat. L'agressivité n'a pas été nécessaire
pour cette profession régie par des contraintes réglementaires
qui limitent fortement la pression concurrentielle. Cependant, avec la
libéralisation du secteur, les compagnies d'assurances se trouvent dans
l'obligation de s'adopter à une telle politique. Dans un tel cadre, se
situe l'intérêt de transposer les concepts de la politique
industrielle aux politiques de développement des sociétés
d'assurances.
Quant aux opportunités, nous pouvons sélectionner
celles disposant d'un attrait et d'une probabilité de succès
élevés à savoir :
v Le développement de la bancassurance ;
v Le faible taux de pénétration des produits
d'assurances.
L'analyse de l'environnement interne et externe des
sociétés d'assurances nous a conduit d'une part à proposer
une politique industrielle que nous estimons adaptée au contexte
économique et social actuel et futur et d'autre part, réaliste
pour être mise en oeuvre.
La politique proposée s'articule autour de quatre grands
axes :
v Axe n°1 : La mise en place de mesures incitatives
fiscales pour encourager l'épargne longue car les taxes ont un impact
sur le coût de la prime.
v Axe n°2 : La mise en place d'un marché
financier mature et développé. L'existence d'un
marché financier mature et développé constitue pour les
compagnies d'assurances un impératif essentiel et ce pour deux raisons,
d'une part, parce que les assureurs ont besoin d'un marché financier
suffisamment important en volumes et avec des possibilités
d'investissement très diversifiées sur des durées
différentes afin de pouvoir honorer leurs engagements auprès des
assurés, et d'autre part, parce que les produits en unités de
compte qui constituent une formidable opportunité pour booster le
secteur ne peuvent se développer dans un marché
caractérisé par le marasme structurel.
v Axe n°3 : renforcer l'identité et
promouvoir l'élaboration du nouveau code constituant un cadre
institutionnel et technique propre au secteur des assurances.
v Axe n°4 : amélioration de l'environnement
externe des compagnies d'assurances complétée par le
contrôle de leurs situations financières, en mettant en place
des lois relatives aux investissements de l'entreprise par la création
de règlements adéquats donnant à l'entreprise le droit
d'investir ses fonds au profit des assurés et de
bénéficiaires du contrat d'assurances.
Cette recherche de performance de la politique industrielle dans
le secteur des assurances au Maroc n'est d'ailleurs plus un choix, mais
plutôt une exigence absolue dictée par la libéralisation du
secteur des assurances et son ouverture sur le marché
étranger.
De plus, il faut signaler que les spécificités du
monde de l'assurance s'estompent peu à peu par rapport à celles
du secteur bancaire. La réglementation évolue et rend les
rapprochements entre le secteur bancaire et celui des assurances plus
aisés. Ainsi que la mise en commun des réseaux de distribution et
la complémentarité de ces deux secteurs clés pour
l'économie leur confèrent aujourd'hui des potentialités de
développement considérables.
Au Maroc plusieurs alliances et rapprochements ont vu le jour
dans le cadre de l'exploitation des gisements de la bancassurance, son
potentiel du développement au Maroc est important, en témoignent
les participations croisées entre banques et sociétés
d'assurances ainsi que la vague de concentration que connaît aussi bien
le secteur bancaire que celui des assurances.
Ainsi, pour que l'assurance maladie obligatoire (AMO) ne devienne
pas un «autre mirage organisé», le projet de loi instituant
l'AMO , en gestation depuis près de dix ans, doit plus que jamais voir
le jour. La perspective de mise en application de ce régime d'assurance
maladie obligatoire fait naître non seulement des espoirs mais suscite
aussi des craintes. Espoirs d'étendre la couverture des dépenses
de santé à de larges fractions de la société qui en
sont dépourvues et de contribuer au développement du
progrès social. Craintes d'enfanter un monstre dévoreur de
ressources. Toute la difficulté, alors, est de mettre d'accord les
différents protagonistes sur le système de financement des soins
de santé à long terme le plus adéquat. Alors que certains,
comme les assureurs, préconisent de s'attaquer d'abord aux gros risques,
d'autres, comme les professionnels de la santé, estiment que, gros
risques ou pas, la prise en charge des soins de santé ne peut être
que collective et solidaire. Quant à l'État, il doit tout
faire pour concilier entre la nécessaire généralisation de
la couverture sanitaire et la contrainte d'un mécanisme de financement
qui ne soit pas trop budgétivore.
Enfin, la tendance actuelle, tenant compte d'un environnement
économique ouvert sur le monde dans le cadre de la globalisation des
marchés, impose une évolution du secteur vers une structure
ramassée et recentrée. Or depuis la libéralisation des
tarifs en 2001, les assurances sont invitées à plus de
transparence. Ainsi en entamant leur mue, elles se restructurent à coups
de rapprochements de fusions et d'alliances, et se réorganisent.
Dans le cadre du présent travail, nous avons adopté
une démarche qui se situe entre une approche pragmatique et une approche
théorique. L'objectif est d'allier les avantages de l'une et de
l'autre.
L'étude sur le développement du secteur des
assurances au Maroc n'a pas été du tout un travail facile. Nous
avons constaté, en effet, un manque flagrant d'études sur le
sujet. A part l'étude annuelle publiée par la Direction des
Assurances du Ministère des Finances, il y a un énorme vide
concernant le sujet.
Tout au long de ce travail, nous avons essayé de toucher
de plus près les assureurs, leur environnement et les mesures
d'encouragement et de promotion en faveur de ce type d'industrie. L'Etat a
accordé à ce secteur un intérêt particulier qui
constitue un levier de grande importance dans la mobilisation de
l'épargne longue. Ainsi, un nouveau cadre juridique a été
mis en place pour promouvoir le secteur. Toutefois, les mesures
instituées par la loi des finances 2004 constituent un coup dur qui ne
manquera pas d'avoir des effets néfastes sur l'avenir du secteur en
général. Cependant, les difficultés que connaît
cette industrie pour s'épanouir ne sont pas exclusivement imputables aux
conditions économiques ou à la conjoncture économique car
bien des secteurs réalisent de très bonnes performances
même en période de récession.
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGE :
Yves MORVAN, Fondements d'Economie Industrielle, Edition
Economica 1991.
Michel RAINELLI, Economie Industrielle, 3émé
édition 1998.
Abdelghani KADMIRI, Economie Et Politique Industrielle Au
Maroc, 1ère édition 1988.
Zoulikha Nasri, le Droit de l'Assurance au Maroc, Edition
Laporte 1984.
Abdeslam GUELLAF, Le Contrôle De l'Etat Sur Le Secteur
Des Assurances, 2ème édition 1998.
Brahim BENJELLOUN, Prévention & Assurances,
1ère édition 1998.
JOURNAUX ET PERIODIQUES
Aujourd'hui le Maroc.
Finances News Hebdo.
La Vie Economique.
Le Matin.
La Gazette du Maroc.
L'Economiste.
PUBLICATIONS MINISTERIELLES
Dahir n°1-02-238 du 3 octobre 2002 portant promulgation
du Code des Assurances -2002-
Loi de finances 2004.
Rapport d'activité des entreprises d'assurances et de
réassurance au Maroc. Année : 1996.
Rapport d'activité des entreprises d'assurances et de
réassurance au Maroc. Année : 2000.
Rapport d'activité des entreprises d'assurances et de
réassurance au Maroc. Année : 2004.
LISTE DES SITES WEB
www.cnra.co.ma
www.caa.co.ma
www.lamarocainevie.co.ma
www.rma.co.ma
www.mfie.gov.ma
www.csr.co.ma
www.axa-assurance.co.ma
www.gpamorocco.com
* 1 Cf. "Dictionnaire
d'économie et de sciences sociales". J. Capul et O. Garnier [2002],
p.214.
* 2 Voir : Yves Morvan
"Fondement d'Economie Industrielle". 2ème édition.
[1991] p.425
* 3Voir Annexe : "Situation
liminaire du secteur des assurances au Maroc en 2004"
* 4 Voir Annexe : "LES 100 MOTS
CLES DE L'ASSURANCE"
* 5Voir Annexe : "Situation
liminaire du secteur des assurances au Maroc en 2004"
* 6 Voir Annexe : "la
classification des opérations d'assurances"
* 7Voir Annexe : "Les 100 mots
clés de l'assurance"
* 8 Source : "Rapport
d'activité des entreprises d'assurances et de réassurance au
Maroc 2004"
* 9 Voir Annexe : "Interview de
M. El Alamy", ainsi la note de présentation de la DAPS
* 10 Voir Annexe : "Maroc Hebdo
International - N° 581 - Du 21 au 27 Nov. 2003"
* 11 Voir Annexe :
"Régime de l'assurance maladie obligatoire de base"
* 12 Cf. Mme Yvonne Lambert
Faivre "Droit des Assurances" Précis. Dalloz. 4éme édition
1980. p. 3.
* 13Voir : Stella B.T.
"Assurances et Pouvoirs publics" Droits et gestion d'assurances, édition
siry 1983. p.11.
* 14 Avocats, médecins,
expert...
* 15Voir Annexe : "LES 100 MOTS
CLES DE L'ASSURANCE"
* 16 Voir Annexe : "LA
REGLEMENTATION DES ASSURANCES" Code des assurances
* 17 Il faut signaler qu'en
dépit de cette ressemblance, la forme du contrôle n'en demeure pas
moins différente, ce qui peut être constaté au sein de
certains groupes de pays qui ont essayé d'harmoniser les lois sur le
contrôle du secteur des assurances.
* 18 Lorsqu'un organisme
désire exercer l'activité d'assurances, il est du ressort de
l'autorité de se prononcer à ce sujet. Sa réponse est soit
négative et dans ce cas l'agrément est refusé, soit
positive délivrée sous forme d'un agrément administratif
délivré par l'autorité à l'institution en tant que
reconnaissance légale et en tant qu'autorisation.
* 19 Voir : André Besson
"La Marge de Solvabilité en Assurances non Vie" R.G.A.T n° 1
éd 1977.
* 20 Voir Annexe : La note de
présentation de la DAPS.
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