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Facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue dans la commune de Ngaba


par Jérémie NGUABI KAO
Université de Kinshasa - Graduat  2023
  

Disponible en mode multipage

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    UNIVERSITE DE KINSHASA

    FACULTÉ DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE L'ÉDUCATION

    DÉPARTEMENT DE PSYCHOLOGIE

    FACTEURS EXPLICATIFS DU PHENOMENE ENFANT DE LA RUE DANS LA COMMUNE DE NGABA

    Par

    Par

    Jérémie NGUABI KAO

    Travail de fin de cycle présenté en vue de l'obtention du titre de gradué en psychologie

    Directrice : Prof. Dre.JoséphatTSHIANDA KAPINGA

    Encadreur : Ass. Paul MAKAMBU KANDU

    ANNEE ACADEMIQUE 2022-2023

    RESUME

    La présente étude a un seul objectif qui consiste à identifier les différents facteurs expliquant le phénomène des enfants de la rue qu'on constate à Kinshasa, précisément dans la commune de NGABA.

    Dans cette recherche, nous avons voulu vérifier l'hypothèse selon laquelle les facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue sont : la perte de parents, les prophéties de certains pasteurs, la séparation avec les parents et la pauvreté.

    Sur ce, nous avons recouru à la méthode clinique basée sur l'étude de cas. Celle-ci était opérationnalisée par la technique d'entretien clinique appuyée par un guide d'entretien qui nous a permis de récolter les données auprès de 5 sujets âgés de 18 à 27 ans, qui vivent dans la rue depuis leur enfance.

    Après le traitement des données, les résultats nous ont permis de confirmer notre hypothèse car nos sujets, chacun selon son cas, sont dans la rue parce qu'ils ont soit été séparé de leur mère suite à sa mort et la maltraitance subie de la part de la marâtre ou autre tutrice leur conduit dans la rue ; soit à cause de l'irresponsabilité du père qui leur font vivre une pauvreté vu qu'il est alcoolique, soit suite à la sévérité des parents qui les étouffe à la maison, soit encore à la suite des prophéties de certains pasteurs les taxant de sorcier.

    Mots clés : facteur explicatif, enfant de la rue

    SAMMURY

    This study has a single objective, which is to identify the different factors explaining the phenomenon of street children observed in Kinshasa, specifically in the NGABA municipality.

    In this research, we aimed to verify the hypothesis that the explanatory factors of the street children phenomenon are : the loss of parents, prophecies from certain pastors, separation from parents, and poverty.

    To do so, we used the clinical method based on a case study approach. This was operationalized through the use of clinical interviews supported by an interview guide, which allowed us to collect data from 5 subjects aged 18 to 27 years old, who have been living on the streets since their childhood.

    After analyzing the data, the results confirmed our hypothesis, as each subject, according to their case, is on the streets either because they were separated from their mother due to her death and mistreatment by their stepmother or other guardian, or due to the irresponsibility of their father who subjects them to poverty because of his alcoholism, or due to the severity of their parents who suffocate them at home, or even due to prophecies from certain pastors labeling them as witches.

    Keywords : explanatory factor, street child

    EPIGRAPHE

    « La société se mesure par la manière dont elle traite ses enfants les plus vulnérables».

    Nelson Mandela

    DEDICACE

    Nous souhaitons dédier ces écrits à nos proches, à ceux qui nous sont chers et qui nous ont toujours témoigné leur affection. Ce que nous avons accompli est le fruit concret de ce que vous avez semé.

    À vous, notre cher père NGUABI KAO Paul, à vous notre mère MUSIMAKA KAMESA Marie, nous vous adressonsnotre dédicace spéciale pour les efforts que vous avez déployés, depuis notre conception jusqu'à ce jour, tant sur le plan financier, spirituel que moral.

    À nos chères soeurs et à mon frère NGUABI Patient, Aris NGUABI, Béatrice NGUABI, BethyNGUABI et Maria NGUABI, nous vous exprimons notre reconnaissance pour votre soutien moral constant.

    Jérémie NGUABI KAO

    REMERCIEMENTS

    Nous sommes arrivés à la fin de notre travail de fin de cycle. Permettez-nous de saisir cette occasion pour exprimer notre profonde reconnaissance à tous ceux qui ont contribué à sa réalisation. Du fond de notre coeur, nous exprimons notre gratitude envers vous tous pour votre soutien inestimable et votre contribution à notre réussite.

    Tout d'abord, nous aimerions remercier chaleureusement notre Directrice, Professeure Docteure. Joséphat TSHIANDA KAPINGA, pour sa guidance, son expertise et son dévouement tout au long de notre parcours. Votre soutien constant et vos précieux conseils nous ont permis d'approfondir nos connaissances et de mener à bien notre TFC. Nous sommes honoré d'avoir eu l'opportunité de travailler sous votre direction.

    Nous voudrions également exprimer notre gratitude envers notre encadreur, Assistant Paul MAKAMBU KANDU pour son encadrement, ses conseils éclairés et sa disponibilité tout au long de notre travail. Son expertise et son soutien ont été inestimables et ont grandement contribué à notre apprentissage.

    Nous souhaitons également adresser nos remerciements sincères à nos amis, collègues et partenaires de lutte, qui ont partagé ce voyage avec nous. Leurs encouragements, leur soutien moral et leur collaboration ont été d'une grande valeur pour notre réussite. Nous aimerions tout particulièrement remercier MANGELA MAKANDA Romilord, IMBOYO KWETE Joe et Monsieur MONTALI Chadrackpour leur travail d'équipe exemplaire et leur contribution précieuse.

    Enfin, nous n'oublions pas de remercier Mademoiselle KINDU NGIMBI Patricia et nos amis BONKOTO Daniel, LUZAYADIODéance, MUYEMBI Gédéon et MBUNGU Kethiapour leur soutien physique, moral et spirituel.

    En conclusion, nous tenons à remercier toutes les personnes qui ont contribué à la réalisation de ce travail de manière directe ou indirecte et dont les noms ne sont pas repris ci-haut.

    LISTE DES ABRÉVIATIONS, ACRONYMES ET SIGLES

    MONUSCO  : Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la Stabilisation au

    Congo

    ONG  : Organisation Non-Gouvernementale

    PNUD  : Programmes des Nations Unies pour le Développement

    RDC  : République Démocratique du Congo

    INTRODUCTION

    Le phénomène des enfants de la rue est une réalité sociale complexe et déchirante qui persiste dans de nombreuses sociétés à travers le monde. Ces enfants, souvent invisibles aux yeux de la société, vivent dans des conditions extrêmement précaires, exposés à la violence, à l'exploitation et à l'abandon (Bourgois,1995). Comprendre les facteurs explicatifs de ce phénomène est crucial pour élaborer des stratégies efficaces de prévention et d'intervention.

    Le présent travail se propose d'explorer en profondeur les multiples dimensions qui sous-tendent le phénomène des enfants de la rue dans la ville de Kinshasa, capitale de la République Démocratique du Congo. À travers une analyse approfondie, nous chercherons à identifier les facteurs explicatifs qui contribuent à la marginalisation et à l'errance de ces enfants vulnérables.

    0.1. Problématique

    Depuis quelques années, le nombre d'enfant qui vivent dans les rues de Kinshasa ne cesse de croitre. Bien que les chiffres exacts ne soient pas connus, les militants de la protection de l'enfant estiment que le nombre d'enfant de la rue à Kinshasa et dans d'autres zones urbaines a doublé au cours des dix dernières années (rapport de HumanRights Watch, 2015).

    Généralement, les enfants de la rue sont des mineurs qui ont pour milieu de vie et de survie les rues. Alors que dans des sociétés traditionnelles africaines, l'enfant était considéré comme un être précieux et occupait une place sacrée.

    A ce sujet, Erny(1972) explique que traditionnellement, « l'on accueille l'enfant avec joie comme nouveau membre de la communauté qui vient la renforcer, mais aussi parce qu'on entend des effets bienfaisants sur le plan de la relation avec l'au-delà et des êtres qui les peuplent ». C'est ainsi que nous procédons à l'étude du phénomène « Enfant de la rue ».

    Le phénomène Enfants de la rue a de multiples facettes, il est dès lors difficile de pointer certaines causes. Cependant, la combinaison de facteurs familiaux, économiques, sociaux et politiques joue un rôle important sur leur situation.

    Faute d'analyse approfondie de la question, Plusieurs mesure adoptées par les dirigeants ne peuvent déboucher sur un quelconque résultat à cause de l'ignorance criante des variables et facteurs explicatifs dudit phénomène (Arthur &Langer, 1983).

    Plusieurs recherches ont été menées au sujet des enfants de la rue. L'étude de MakuruSavo (2006) sur les projets de vie des enfants en rupture avec le milieu familial, nous informe que ces enfants ont effectivement des projets pour leur avenir. Ils espèrent un jour retourner en famille, renouer avec les études, fonder un foyer et exercer un métier pour leur survie. Concernant le projet de leur insertion familiale et/ou communautaire, la majorité approuve leur placement dans la famille.

    Mais avant de leurs réinsérer dans la famille, il est nécessaire de connaitre les facteurs explicatifs de leur départ de la famille, d'où l'importance de notre étude.

    La hardiesse des conditions de vie dans la rue parait l'explication la plus plausible de leur désir de vouloir la réinsertion familiale. En effet, pendant leurs aventures dans la rue, nombreux sont les enfants qui sont victimes d'acte de maltraitance de la part de leurs compagnons d'infortune et parfois des agents de l'ordre. Il y' a aussi des enfants qui sont tombé malades faute des soins appropriés, et qui ont quitté la terre des hommes.

    L'étude de YebonaYenga (2006) démontre que les enfants et les adolescents soupçonnés de la sorcellerie présentent dans leur comportement quotidien les symptômes qui les rapprocheraient des enfants ayant des difficultés psychopathologiques de nature divers (troubles d'intelligence, socio-affectif et de comportement).

    YebonaYenga ajoute que, devant de telle menace, les familles réagiraient par deux types de solutions qui consistent soit à marginaliser l'enfant, soit à le maltraiter, le punir, l'exclure, le rejeter, ou nier son appartenance à la famille.

    Ce phénomène « Enfants de la rue » est un véritable fléau à Kinshasa. Sur une population plus ou moins de 11 millions d'habitants, on estime leur nombre à plus de 25 000, la vie de ces enfants appelés communément « shegués » est caractérisée par un manque total d'hygiène, une grande violence et une promiscuité sexuelle très forte, la consommation de drogue est courante, les maladies chroniques infectieuses et sexuellement transmissibles sont observées. Ces enfants se nourrissent eux-mêmes au fruit de leur ramassage, sillonnant le marché le soir après le départ de vendeurs (es). Ceux qui ont les capacités, effectuent des petits travaux ; les plus jeunes se livrent à la mendicité...

    Cependant, ce constat nous a amené à formuler la seule question suivante de notre recherche :

    - Quels sont les facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue dans la commune de NGABA ?

    0.2. Hypothèse

    Au regard de la problématique évoquée ci-dessus et de la question de recherche, nous formulons notre hypothèse de la manière suivante :

    - Les facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue dans la commune de NGABA sont les suivants : perte de parents, prophéties de certains pasteurs, séparation avec les parents et pauvreté

    0.3. Intérêt du sujet

    Ce sujet revêt un triple intérêt : Social, Pratique et Scientifique.

    Sur le plan social, il est question de susciter l'espoir d'éradiquer ce grand fléau de temps moderne, en prenant conscience ses facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue.

    Sur le plan pratique, les résultats de cette recherche fourniront des informations aux gouvernants, aux familles et aux centres de prise en charge de ces enfants, sur les causes de ce phénomène pour une meilleure résolution de ce problème de société.

    Sur le plan scientifique, notre étude met à la disposition des chercheurs qui voudraient réaliser des recherches dans ce domaines d'y recourir comme document de référence.

    0.4. Objectif du travail

    L'objectif visé par ce travail, est celui d'identifier les différentes causes ou facteurs favorisant ou expliquant ce phénomène d'enfants de la rue dans la commune de NGABA.

    0.5. Méthode et technique de recherches

    Dans le souci de mieux cerner l'objet d'étude, nous avons opté pour la méthode clinique basée sur l'étude de cas. Celle-ci est opérationnalisée par la technique d'entretien clinique s'appuyant sur un guide d'entretien.

    0.6. Délimitation du sujet

    Dans l'espace, notre recherche est menée dans la commune de NGABA auprès de 5 enfants de la rue. Dans le temps, elle couvre la période qui va du mois de mai au mois d'octobre 2023.

    0.7. Division du travail

    Hormis l'introduction et la conclusion, notre travail est subdivisé en trois chapitres ci-après :

    Ø Le Premier chapitre traite des considérations générales et théoriques ;

    Ø Le Deuxième chapitre aborde l'approche méthodologique ;

    Ø Le troisième chapitre concerne la présentation, l'analyse et l'interprétation des résultats.

    CHAPITRE 1 : CONSIDERATIONS GENERALES ET THEORIQUES

    Dans ce chapitre, nous définissons les concepts de base et développons les théories explicatives.

    Il sied de dire que quatre concepts méritent d'être soulignés pour mieux éclairer notre thème de recherche, à savoir : facteur, phénomène et enfant.

    1.1. Facteur

    1.1.1. Définition

    Selon le dictionnaire, un facteur est défini comme un élément qui influe ou qui agit. (Dictionnaire Larousse, 2012).

    Comprenons tout de suite que le facteur, c'est l'agent moteur de l'action, il est, celui qui joue de l'influence dans l'activité, dans la scène afin d'être motivé. Il est même le pont, le bras de soutenance pour l'accomplissement de l'action criminelle qu'on observe chez certains enfants de la rue.

    Le concept facteur est aussi défini comme un élément concourant à la production des biens et des services. Toujours est-il qu'il joue un rôle de liaison, grâce à son influence (Adam Smith, 1776).

    Dans le cadre de notre étude, nous nous intéressons aux facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue qu'on constate en République Démocratique du Congo, précisément sur toute l'étendue de la ville province de Kinshasa. La commune de Ngaba, l'une de 24 communes de la province de Kinshasa est le terrain de notre recherche.

    1.1.2. Facteurs susceptibles de favoriser le phénomène enfant de la rue

    Le phénomène enfants de la rue est complexe et multifactoriel. Il est influencé par une combinaison de facteurs qui peuvent varier d'un contexte à un autre. (Wikipédia).

    D'une manière générale, voici quelques facteurs susceptibles de favoriser ce phénomène (Jo Boyden, 1992) :

    Ø Pauvreté et inégalités économiques : Les enfants de familles défavorisées sont plus susceptibles de se retrouver dans la rue en raison de la pauvreté et du manque de ressources. Les inégalités économiques croissantes peuvent également contribuer à l'augmentation du nombre d'enfants de la rue.

    Ø Instabilité familiale : Les problèmes familiaux tels que la violence domestique, les abus physiques, sexuels ou émotionnels, le divorce, la négligence ou le décès des parents peuvent amener les enfants à quitter leur domicile et à se retrouver dans la rue.

    Ø Urbanisation rapide : L'urbanisation rapide dans de nombreux pays peut entraîner une augmentation de la population urbaine et une demande croissante de services de base tels que le logement, l'éducation et les soins de santé. L'incapacité des systèmes sociaux à répondre à cette demande peut entraîner l'existence d'enfants vivant dans la rue.

    Ø Migration et déplacement : Les enfants qui fuient les conflits armés, les catastrophes naturelles, la pauvreté ou d'autres formes de crises peuvent se retrouver sans abri dans les zones urbaines où ils cherchent refuge.

    Ø Manque d'accès à l'éducation : L'absence d'accès à une éducation de qualité peut être un facteur déterminant dans la décision d'un enfant de quitter sa famille et de vivre dans la rue. L'éducation peut offrir des opportunités d'amélioration des conditions de vie, et son absence peut perpétuer le cycle de la pauvreté.

    Ø Stigmatisation sociale : Les enfants de la rue peuvent être victimes de stigmatisation sociale, ce qui peut les conduire à se sentir exclus et marginalisés. Cette stigmatisation peut rendre difficile leur réintégration dans la société et les inciter à rester dans la rue.

    Ø Absence de protection sociale : L'absence de filets de sécurité sociale adéquats, tels que des programmes d'aide sociale, des services de protection de l'enfance et des institutions de soutien familial, peut contribuer à la vulnérabilité des enfants et les laisser sans protection.

    Il est important de noter que ces facteurs ne sont pas exhaustifs et qu'ils peuvent interagir de manière complexe. La compréhension de ces facteurs est cruciale pour développer des approches holistiques visant à prévenir et à remédier au phénomène des enfants de la rue.

    1.2. Phénomène

    1.2.1. Définition

    Un phénomène est défini comme un fait, ou un événement qui frappe l'imagination. En fait un phénomène est un fait social qui se produit après un lapse de temps et à une période déterminée et par un groupe d'individus donné. (Erny, 1992).

    1.2.2. Phénomène social

    1.2.2.1. Notions des phénomènes sociaux 

    Un phénomène social c'est un fait généré par l'être humain. Il découle de l'agir conscient d'une personne ou d'un groupe d'individus confrontés à un événement quotidien (Erny, 1992).

    Souvent, des phénomènes sociaux éclatent les facteurs qui oppriment ou limitent les sujets. En raison du mécontentement, des phénomènes sociaux se produisent et visent à provoquer un changement des conditions existantes.

    En sociologie, les phénomènes sociaux sont compris comme tous les événements, tendances ou réactions qui ont lieu au sein d'une société humaine établie. Ils se traduisent par des modifications de comportements collectifs (Émile Durkheim, 1894).

    En d'autres termes, un phénomène social est une partie du comportement conscient de la société, une manière spécifique dont elle organise et structure ses réactions. Elle est déterminée par les conditions de vie objectives et subjectives dans lesquelles les gens vivent.

    Ainsi, les phénomènes sociaux peuvent être de nature différente, et répondre à certains intérêts, voire être la conséquence d'autres types de facteurs, comme l'économique. Cependant, étant de nature éminemment sociale, leur perspective se limite aux relations entre les individus qui constituent une communauté.

    1.2.2.2. Caractéristiques des phénomènes sociaux

    Les phénomènes sociaux se distinguent des autres types de phénomènes en ce que, liés à la manière de penser et d'agir des personnes dans le cadre d'une société, ils sont de nature subjective et relative. Dans certains cas, ils répondent même à des caractéristiques de l'imaginaire collectif (Émile Durkheim, 1894).

    Ils sont différents des phénomènes organique et psychique dans la mesure où ils se focalisent sur les représentations et les actions, ils ont une existence qui n'est pas seulement dans la conscience individuelle et qui n'est pas due seulement à des consciences individuelles.

    On parle de phénomènes sociaux pour tenter de comprendre de manière systémique ou contextuelle les décisions prises par un groupe. C'est-à-dire que pratiquement tout peut être un phénomène social donné.

    1.3. Enfant

    1.3.1. Notions

    Le mot « Enfant » vient du latin « infants » qui signifie « celui qui ne parle pas ». C'est ainsi que chez les Romains, le père avait le droit de vie et de mort sur ses enfants (Encyclopédie encarta, 1993)

    Lorsque l'on pose la question de savoir ce que c'est un enfant ; il existe pratiquement plusieurs réponses et cela dépend d'un pays à un autre. Dans plusieurs pays occidentaux, l'enfant est considéré adulte à l'adolescence. En Inde, par exemple, l'enfant est considéré adulte lorsqu'il atteint l'âge du mariage, et cela parfois avant 15 ans. Dans certains pays d'Afrique, les enfants entrent rapidement dans le monde des adultes et exercent très tôt des responsabilités au sein de la famille.

    Ainsi, c'est la loi de chaque pays qui règlemente ce qu'un enfant, c'est-à-dire un mineur en établissant l'âge de majorité. Il s'avère important ici de rappeler qu'il est de 20 ans au Japon et 18 ans en France (code Napoléon, 1804).

    Dans cette étape d'évolution humaine, la loi congolaise de 2009 définit l'enfant comme toute personne qui n'a pas atteint l'âge de dix-huit ans. Cette loi continue à définir un certain nombre de catégories d'enfant dont l'enfant à conflit avec la loi à ces termes « l'enfant à l'âge variant entre quatorze et dix-huit ans, qui commet un manquement qualifié d'infraction à la loi pénale ».

    Également l'enfance délinquante est définie comme un « phénomène social pathologique qui s'observe dans le comportement de toute personne, la vigueur et le charme de la jeunesse et qui viole non seulement la loi pénale mais encore la morale et les bonnes moeurs dans une société bien déterminée ». Faudrait-il encore dire que l'enfance est conçue comme la période de la vie partant de la naissance jusqu'à la puberté (Encyclopédie encarta, année).

    La convention relative aux droits de l'enfant de 1989, qui a été ratifiée par la quasi-totalité des pays du monde, a voulu harmoniser les différentes lois internes. Cette nouvelle disposition internationale précise qu'« un enfant est un être humain âgé de moins de 18 ans », sauf si son pays lui accorde la majorité plus tôt.

    Notons que c'est la déclaration de Genève de 1924 qui fut, un texte international qui définit pour la première fois les droits spécifiques à l'enfant.

    La R.D.C n'a pas été muette à cette matière en promulguant la loi 01/009 du 10 Janvier 2009 relative à la protection de l'enfant.

    1.3.2. Loi sur la protection de l'enfant

    Pourtant, la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009, portant protection de l'enfant considère que dans son article 190 le délaissement d'un enfant en un lieu quelconque est puni d'un an à cinq ans de servitude pénale principale et d'une amande de cent mille à deux cents mille francs congolais, ... En connivence, de ce qui précède, le dépliant de la MONUSCO, sur l'Aide-mémoire pour les Policiers » reconnait que « Un enfant en rupture avec le milieu familial ou dans la rue est une personne en situation difficile que le policier doit protéger » (Makuru, 2006).

    1.4. Enfant de la Rue

    1.4.1. Définition

    Pour Susanna Agneli (2010), l'enfant ou jeune de la rue « est un mineur sans protection adéquate et qui a élu domicile dans la rue, celle-ci étant considérée au sens large du terme et incluant les immeubles inoccupés, les terrains vagues, etc. »

    Cité par SavoMakuru Jolie (2006), Massiala, (1990), tire du dictionnaire encyclopédique de l'enfant de la rue, la définition suivante : « l'enfant de la rue est toute personne, fille ou garçon n'ayant pas atteint l'âge adulte, et pour qui la rue est devenue la demeure habituelle et le moyen d'existence ».

    Signalons qu'en RDC les concepts « Shégués » ou « phaseurs » leur convient bien malgré que certains d'entre eux ne l'acceptent alors que cela se justifie par leurs comportements.

    Les âges des enfants de la rue varient entre 5 et 16 ans, mais il y en a d'autres qui sont âgés de 3 ou 4 ans aux côtés des frères plus âgés qui assurent leurs protections. Les filles sont en effet moins visibles car moins influencées, ne quittant pas trop le toit paternel. Et si elles descendaient dans la rue, elles sont utilisées comme domestiques, prostituées ou comme ouvrières.

    Ce terme « enfant de la rue » a une connotation négative et désigne les enfants qui ont choisi de leur gré d'abandonner leurs familles respectives, ou ceux délaissés par ces dernières et ont finalement élu domicile dans les rues et vivent dans le vagabondage et dans la mendicité. Ils vivent dans la méconduite et dans l'indiscipline notoire, dans la débauche, dans le jeu, dans des trafics et d'autres pratiques assimilées aux infractions telles que vol, détournement, violences sexuelles pourtant réprimés par la législation en vigueur (centre d'accueil Ndako Ya Biso, 2006).

    Le terme « enfants ou jeunes de la rue » renvoie à une expression générale qui regroupe l'ensemble des enfants d'une tranche d'âge comprise entre 6 et 18 ans passant tout ou une partie de leur journée dans la rue. Ce sont des enfants qui sont en rupture totale ou quasi-totale avec leur famille et leur groupe d'appartenance, connaissant une présence permanente dans la rue.

    Ils dorment dans des abris de fortune qu'offre la ville (immeubles ou bâtiments non achevés, auvents de magasins, ponts, hangars...) ou dans des espaces ouverts en plein air si les conditions climatiques le permettent. Ce sont les enfants pour lesquels la rue est devenue la demeure habituelle et la source principale de moyens de survie. Pour ces jeunes, l'accoutumance et la dépendance à la rue sont tributaires de la durée dans la rue, et de leur mode de vie.

    Luc Sibiri Kabore (2000) démontrera que « Les lieux populaires tels que les grands magasins, les salles de cinéma, les bars, les marchés, les restaurants, les gares routières, les mosquées sont leurs points d'attraction, points qui leur offrent de multiples occasions de commettre des infractions ».

    Généralement organisés en groupe sous « l'encadrement » et la protection d'un leader, les enfants de la rue vivent dans un monde de violences, de drogue et dans des conditions d'hygiène qui les exposent très souvent au rejet de l'entourage.

    1.4.2. Rapport entre phénomène enfant de la rue et délinquance

    Il y a lieu à ce stade, de préciser le rapport entre la délinquance et le phénomène enfants de la rue. Pour Gilbert Robin cité par Fernand Cortez (1998) « La délinquance est l'aboutissement d'un processus d'inadaptation sociale. Elle se décèle par le vol, le banditisme, les coups et blessures volontaires, le recel, l'abus de confiance, l'escroquerie, la drogue, les délits sexuels... En effet, le qualificatif de délinquant définit une position plus qu'une manière d'être ».

    1.4.3. Type d'enfants de la rue

    Les enfants de la rue sont à différencier des enfants dans la rue qui sont ceux pour qui la rue est devenue la source de moyens d'existence dans la journée, mais qui rentrent dans leurs familles en fin de journée. Leurs revenus reviennent le plus souvent aux parents, qui encouragent alors les activités de l'enfant.

    Savo, Makuru Jolie  (2006) citant Beaumauk (1996) d'une manière globale distingue le jeune de la rue en quatre catégorie : « Le jeune ou l'enfant de la rue, des jeunes totalement abandonnés, des enfants partiellement abandonnés, des enfants « clés au cou » et des enfants qui travaillent »

    Pour Tessier (1998), il existe trois types d'enfants qui partagent leur visibilité dans la rue : les enfants de la rue qui vivent en permanence et ont rompu tous les liens familiaux et scolaires ; les enfants de la rue qui travaillent et rentrent presque tous les soirs dans une famille ; les enfants de la rue qui sont des fumeurs, qui vivent temporairement et exceptionnellement dans les rues. L'auteur conclut que ces différentes catégories interagissent entre elles.

    1.4.4. Causes du phénomène enfant de la rue

    Nous avons évoqué plus haut que les enfants qui ont élu domicile dans la rue n'ont pas toujours été là, ils n'ont pas toujours été des enfants des rues. Ils le sont devenus par un concours de circonstances d'ordre macrosocial : les inégalités sociales et la situation d'injustice qui poussent les enfants à abandonner leur foyer, les facteurs économiques et politiques. Ces facteurs conduisent à la désorganisation familiale et communautaire.

    Pour Lucchini (1999), « Les dures et pénibles expériences familiales, marquées en général par des relations familiales troublées, le caractère provisoire des liens, et l'abandon de la part des familles, en général en jeune âge, induisent chez ces jeunes de forts sentiments d'insécurité, d'anxiété, de méfiance, d'indifférence, de rancune et d'agressivité. Ces aspects expliquent l'échec scolaire et professionnel, la délinquance, la fugue des maisons et des foyers de substitution ». Ces enfants vont alors élaborer des stratégies de maintien et de survie. Ces stratégies peuvent être durables et évoluer vers un mode de vie.

    Ils sont en « situation de rue » car c'est précisément cette situation qui doit être qualifiée, et dont les discours et comportements des enfants sont des révélateurs. Il est donc absolument indispensable de comprendre ce contexte dans lequel évoluent les enfants.

    Stoecklin (1980) pense qu'il est plus respectueux de comprendre la façon dont les acteurs vivent leur situation. Ainsi, il définit la situation de rue comme la combinaison, toujours variable selon les contextes et les individus, entre, d'une part, les contraintes qui pèsent sur les enfants marginalisés et, d'autre part, les stratégies que ces enfants développent pour faire de la rue un espace de survie. Tout projet d'aide doit donc tenir compte de ces compétences, plus ou moins développées et différenciées selon les contextes.

    1.4.5. Activités des enfants de la rue

    L'arrivée dans la rue d'un enfant se dessine à travers un cheminement. Ce cheminement est visible surtout par les activités exercées. La pratique des activités vise la survie de ces enfants.

    Beaucoup d'enfants des rues exercent une activité. Ce sont généralement de petits métiers riches dans leur diversité et pratiqués de manière quotidienne et assidue. Il s'agit en fait d'une incessante quête quotidienne pour trouver de quoi subsister non seulement pour eux-mêmes mais aussi, le cas échéant, pour leur famille. Dans cette quête de survie, les enfants embrassent toute sorte d'activités susceptibles de leur procurer des revenus : « Il y en a qui volent, il y en a qui essuient les vitres des voitures, il y en a qui gardent les véhicules.

    Parmi ces activités, il y en a qui revêtent des formes relativement acceptables, mais d'autres revêtent une forme marginale, et nous les qualifions de formes de déviance. Ces comportements ne sont pas isolés mais sont renforcés par un ensemble de pratiques entretenues par les enfants et par un conditionnement social de leur milieu de vie. Nous y reviendrons dans les chapitres suivants pour analyser plus profondément les logiques qui sous- tendent cette errance.

    1.4.5.1. Activités rémunératrices ou lucratives des enfants de la rue

    Les activités lucratives dans la rue ne sont pas stables et presque tous les enfants ont des périodes pendant lesquelles ils n'exercent aucune activité. La finalité de l'ensemble de ces activités est la consommation. Ils évoluent dans une logique d'immédiateté (ici et maintenant) si bien que les profits de ces différentes activités disparaissent dans la consommation immédiate.

    Les activités sont diversifiées suivant les intérêts et les aptitudes de chaque enfant. Cependant, il y a une catégorisation dans la pratique des activités : les plus petits et les nouveaux arrivés n'ont pas le même champ d'activités même si parfois ils sont utilisés » par les grands pour commettre des vols.

    On retrouve assez souvent les plus petits et les nouveaux arrivés dans les activités suivantes :

    ï La plonge : beaucoup d'enfants travaillent comme plongeurs dans les Restaurants.

    ï La vente d'eau : souvent employés par les femmes pour la vente d'eau glacée.

    ï Le portage des bagages : les enfants aident les vendeuses à porter leurs légumes et autres marchandises moyennant de modiques pièces d'argent.

    ï Le balayage et le ramassage d'ordures aux abords des lieux publics.

    ï La recherche de cuivre, de l'aluminium, des bouteilles, des boîtes usagées... à travers les poubelles, les tas d'ordures et dans les concessions. Tous ces objets seront revendus.

    Une autre activité non moins importante découverte par les enfants et jugée rémunératrice, c'est le gardiennage des chaussures et les autres lieux de prière. En plus de cela, les enfants avec leur boîte de tomate procurent de l'eau aux fidèles musulmans pour les ablutions. Pour les plus grands et les jeunes qui se sont fortement enracinés on les retrouve plus dans les activités suivantes :

    ï Le parking

    ï Le gardiennage de véhicules

    ï Le docker dans les marchés et les gares routières.

    Outre ces activités valorisantes qui peuvent être considérées comme conformistes, ils existent d'autres pratiques (bien que ce soit des activités qui procurent des avantages pécuniaires) qui ne s'inscrivent pas tout à fait dans les limites de ce qui est acceptable pour la société.

    1.4.5.2. Activités déficientes

    Ce sont des comportements prohibés qui vont contre les principes socialement admis. La déviance s'applique à un ensemble de conduites variées ayant en commun le non-respect des normes généralement acceptées.

    a. Vol et délinquance

    Le vol est pratiqué par la majeure partie des enfants vivants dans la rue. Pour les plus petits, les opérations de vol sont moins organisées, mais pour les plus grands ou les aînés de la rue, ce sont des opérations bien organisées allant très souvent jusqu'à l'utilisation d'armes blanches. Les objets volés sont généralement les portables, les porte-monnaie, les rétroviseurs, les autoradios.... Le terme « volé » est usité par certains enfants sans aucune gêne (Centre d'accueil Ndako Ya Biso, 2006).

    Certains affirment voler par égoïsme. Ils sont frustrés par l'inégale répartition des biens et de l'argent. Ils supportent difficilement le fait que les autres aient de l'argent et qu'eux ils n'en ont pas. Il ressort la question de la distribution inégale de richesses dans le monde et le fossé grandissant entre pauvres et riches. Les avantages certains que procurent les actes de vols contribuent à enraciner davantage certains enfants dans la rue : « Si chaque jour tu peux gagner 5000 francs par le vol et que tu es habitué à manger du bon, tu ne veux absolument plus repartir parce que quand tu es habitué à l'argent du vol, tu ne peux plus repartir (Centre d'accueil Ndako Ya Biso, 2006).

    b. Pratiques sexuelles dévalorisantes

    Certains jeunes, fascinés par l'argent se laissent entraîner dans des pratiques sexuelles néfastes. C'est notamment la pratique de la pédophilie qui est très fréquente dans le milieu de la rue de Ouagadougou (Luc Sibirikabore, 2000). Les pédophiles sont généralement des personnes extérieures, des adultes et parfois des étrangers qui sodomisent les enfants contre de petites sommes d'argent. Ces sommes, bien qu'elles soient modiques, contribuent à renforcer la motivation et à aiguiser l'intérêt des enfants pour la pratique de ces actes. Désormais ce sont les enfants eux-mêmes qui courent vers les exploiteurs parce qu'ils ont besoin de l'argent pour survivre. Ce ne sont pas des activités valorisantes mais elles procurent quelques avantages suffisants pour garder l'enfant aussi longtemps dans la dépendance.

    Ils sont alors Victimes de l'exploitation sexuelle, mais recourent à la prostitution. Il est très difficile pour un enfant qui a vécu dans de telles pratiques de pouvoir revenir en arrière. Il est obligé dans cette situation de poursuivre sa « carrière » qui ne sera rien d'autre que l'endurcissement de son caractère, que l'installation dans la « carrière délinquante ».

    c. Mendicité

    La mendicité est une activité relativement plus facile. Elle est la première activité exercée par tous les enfants. Il y a peu d'enfants vivant dans la rue qui ne pratique pas la mendicité. Mais au fur et à mesure que l'enfant prend de l'âge et grandit dans la rue, il est obligé d'abandonner cette activité. Il est de plus en plus gêné de mendier, mais surtout il n'attire plus la pitié des gens. Il est grand et personne ne s'intéresse plus à lui, mais ils utilisent certains petits pour mendier à leur compte. Même étant dans l'incapacité de mendier, les plus grands se nourrissent toujours - pas uniquement - des revenus de la mendicité des plus petits.

    La mendicité dans ce sens, non seulement contribue à mettre des enfants dans la rue, mais aussi et surtout contribue à les maintenir dans ce milieu aussi longtemps que leur personnalité est confrontée à une situation de complète aliénation. La relative facilitée de cette pratique, les gains qu'elle génère, et l'idée de solidarité et de pitié qu'elle suscite font qu'elle joue une fonction importante dans la relation de l'enfant à la rue. Cette fonction peut comporter deux (2) dimensions : survie et solidarité (Centre d'accueil Ndako Ya Biso, 2006 ).

    1.5. Etudes antérieures

    Nous ne sommes pas le premier chercheur à nous intéresser à la problématique des enfants de la rue. Ainsi, nous consacrons cette présente section à la présentation des certaines études qui ont abordé explicitement ou implicitement cette problématique avant la nôtre.

    1.5.1. Etude de NsimbaNdongo (2010)

    NsimbaNdongo a réalisé une étude sur l'environnement familial des jeunes délinquants à Kinshasa. Dans cette étude, il a essayé d'analyser l'état psychologique des familles des jeunes « kuluna » en établissant une relation entre leur environnement familial et leurs conduites délictueuses. Il a aussi analysé l'image des jeunes qui se livrent aux actes des vandalismes et celle qu'ils se font de l'autorité parentale.

    Il a utilisé la méthode clinique et l'étude de cas, et a travaillé avec sept jeunes « Kuluna » de la commune de Kinsenso.

    Son étude a abouti aux conclusions selon lesquelles la majorité des jeunes Kuluna proviennent du milieu familial dysfonctionnel, caractérisé par l'appauvrissement des rôles de responsabilités de membres. Certains jeunes ont été rejetés avant même leur naissance et d'autres ont été à la base de divorce ou séparation de leurs parents.

    Aux seins de leurs familles respectives règnent des irrégularités dans le style de vie entre parents et enfants.

    1.5.2. Etudes de NsumbuNansadi (2015)

    Dans son étude intitulée « violence et comportement agressif des enfants dites de la rue », NsumbuNansadi a voulu vérifier l'hypothèse selon laquelle, la pauvreté, le manque d'affection et d'encadrement ainsi que la marginalisation seraient les causes de comportement agressif des enfants dits de la rue.

    Le chercheur a utilisé les études de cas de cinq sujets avec la technique du test de famille.

    Après analyse et interprétation des données, NsumbuNansadi a abouti aux résultats selon lesquels les enfants de la rue sont victimes de manque d'affection, d'encadrement et de la marginalisation. Et sans espoir d'un lendemain meilleur, quelques-uns se refugieraient dans la drogue, le viol, la prostitution et la violence, etc.

    CHAPITRE 2 : APPROCHE METHODOLOGIQUE

    Dans ce chapitre, nous présentons la démarche méthodologique suivie pour vérifier les hypothèses de notre étude. Ce chapitre est constitué de quatre points : la présentation du milieu d'étude, la population et l'échantillon d'étude, la méthode et technique de récolte et de traitement de donnée, et les difficultés rencontrées.

    2.1. PRESENTATION DE LA COMMUNE DE NGABA

    2.1.1. Aspect géographique

    La commune de Ngaba est créée par l'arrêté ministériel n°68/026 du 30 septembre 1968. Tel que fixé par l'arrêté ministériel n° 69-0042 du 23 janvier 1969, la commune de Ngaba est bornée :

    - au Nord  par l'intersection de l'axe de l'avenue de l'Université prolongé avec l'axe de l'avenue Kikwit jusqu'à son intersection avec la rivière Yolo ;

    - à l'Est par la rivière Yolo jusqu'à sa bifurcation, vers l'Est de cette bifurcation une ligne droite nord-sud jusqu'à son intersection avec l'avenue By-Pass ;

    - au Sud par l'axe de l'avenue By-Pass jusqu'à son intersection avec l'axe de l'avenue Université ;

    - à l'Ouest par l'axe de l'avenue de l'Université prolongé jusqu'à son intersection avec l'axe de l'avenue Kikwit.

    Cette municipalité couvre une superficie de 4 Km2. Elle compte 112 allées dont 104 rues et 8 avenues, et 5982 parcelles habitées.

    Sa population au 31 décembre 2008 est composée de 136 780 nationaux et 173 étrangers. Et la densité est de 34 238 habitants au Km².

    2.1.2. Origine

    La commune de Ngaba fut créée par l'arrête ministériel n° 6836 le 30 mars 1968. Elle tire son origine du nom d'un grand chef Teke-humbu qui s'appelait NGABA et habitait les environs de rond-point Ngaba vers la paroisse catholique et à coté de petit marché de Makala.

    2.1.3. Subdivision administrative

    La commune de Ngaba Comprend 6 quartiers : Baobab, Bulambemba, Luyi, Mateba, Mpila, Mukulua. Le quartier Bulambemba où s'est déroulée cette étude, est située au Sud de la commune de Ngaba, à 318 m d'altitude, et entre 4°23' de latitude Sud et 15°19' de longitude Est. Cette entité administrative dirigée par un chef de quartier, compte 19024 d'habitants.

    2.1.4. Quelques caractéristiques socio-économiques de la population de Ngaba

    Sur le plan socio-économique, la commune de Ngaba, comme les autres Communes populaires, est habitée par une population en majorité pauvre. Certes, cette Commune abrite quelques cadres d'entreprises et médecins, cependant on y retrouve plus des fonctionnaires de l'Etat tels que des enseignants, des opérateurs de la petite économie marchande, des sans emploi, etc.

    Comme nous pouvons l'apercevoir, il s'agit pour l'essentiel, des catégories socioprofessionnelles à faibles revenus qui vivent en deçà du seuil de la pauvreté.

    Les enquêtes menées à ce propos établissent que la majorité des habitants de cette Commune (66,6%) vivent avec un revenu journalier de 0.26 $ us. Ce degré de dénuement a été qualifié d'hypo pauvreté par Pascal KapagamaIkando (2009), parce qu'en deçà du seuil de pauvreté extrême fixé à 0.75$/personne par le PNUD. Cet auteur perçoit cette hypo pauvreté à travers plusieurs indicateurs, notamment le type d'habitat, l'accès difficile à certains services sociaux (eau, électricité, soins de santé, éducation, transport, salubrité, etc.) et singulièrement dans la consommation alimentaire. A propos de ce dernier indicateur, l'auteur mentionne que la plupart des ménages enquêtés (86,6%) mangent en moyenne une ou deux repas par jour.

    Contre cette hypo pauvreté, il s'est développé dans cette Commune les activités de survie, notamment la petite économie marchande. Ces activités comprennent la vente des denrées alimentaires, des petites boutiques, des petites officines pharmaceutiques, de la vente à la criée d'arachide, de l'eau en sachet, des articles divers comme la cigarette, les bonbons et biscuits, les oeufs bouillis, etc.

    Cette pauvreté pressurant conduit la majorité des habitants à se tourner vers Dieu en vue de résoudre leurs problèmes existentiels. D'où, l'hyper religiosité observée dans cette Commune qui se manifeste par la prolifération des églises de réveil. Chaque avenue en compte au moins deux. D'autres personnes, par contre, s'organisent en mutuelles d'entraide, notamment les « likelemba », le « moziki », d'autres encore s'organisent dans les mutuelles tribales et d'autres enfin se livrent à la déviance sociale (prostitution, criminalité, escroquerie, etc.).

    Suite à tous ces phénomènes existentiels, précisément de la pauvreté et bien d'autres facteurs que nous allons découvrir au chapitre trois de cette étude, les enfants se retrouves dans la rue pour y vivre.

    2.2. POPULATION ET ÉCHANTILLON D'ÉTUDE

    2.2.1. Population d'étude

    En sciences sociales et humaines, les études ciblent toujours une catégorie d'objets et/ou de personnes appelée population.

    Selon Chanquoy (2005), la population d'une étude peut être comprise comme étant un ensemble complet d'individus ou d'objets (ou plus encore de mesures), ayant des caractéristiques communes observables. Le même auteur poursuit qu'il s'agissait donc d'une collection d'individus (des enfants, des adultes) ou d'objets (des écoles, des machines) partageant un ensemble de caractéristiques préalablement définies.

    Quant à Mucchielli (1971), la population d'étude est considérée comme étant l'ensemble de groupe humain concerné par les objectifs d'étude, c'est-à-dire l'ensemble des individus auxquels se rapporte l'étude. Ainsi, dans le cadre de notre étude, nous optons pour la pensée de NgongoDisashi (1999) qui considère la population comme étant l'ensemble fini d'individus, d'objets, d'institutions, etc. auxquels s'adresse la recherche.

    Notre étude porte sur les facteurs explicatifs des enfants de la rue. De ce fait, notre population est constituée des enfants de la rue de la ville de Kinshasa, vivant à la commune de Ngaba, précisément au quartier Bulambemba.

    2.2.2. Echantillon d'étude

    Sous cette section, nous définissons l'échantillon et relevons les catégories d'échantillon en recherche qualitative.

    2.2.2.1. Définitions et types d'échantillon

    L'échantillon d'une étude peut être considéré comme une fraction représentative et un ensemble d'individus concernés par l'étude (sillamy, 2006).

    Quant à Ngub'usim (2015), l'échantillon est comme un groupe représentatif de la population sur lequel on mène une étude et à partir duquel les résultats obtenus peuvent être généralisés sur la population.

    Notre étude s'inscrit dans le cadre de la recherche qualitative. Car, les facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue, dans l'esprit de cette étude, relève du domaine de la psychologie dynamique. A cet effet, l'abord idiographique, notamment avec le concours de l'entretien individuel nous permet de mieux relever les facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue.

    Notons que la recherche qualitative est un terme générique qui regroupe des perspectives diverses en termes de bases théoriques, de techniques, de recueil et d'analyse des données. Elle est particulièrement appropriée lorsque les facteurs observés sont subjectifs, donc difficiles à mesurer. Les applications en sont très concrètes, plus particulièrement pour les aspects relationnels des soins. La démarche fait référence aux modèles ou aux culturels vécus.

    2.2.2.2. Echantillon en recherche qualitative

    La recherche qualitative est parfois définie en référence ou en opposition à la recherche quantitative. En réalité, il n'y a pas d'opposition mais une complémentarité entre les deux, car elles n'explorent pas les mêmes champs de connaissance. La recherche qualitative ne cherche pas à quantifier ou à mesurer, elle consiste le plus souvent à recueillir des données verbales (plus rarement des images ou de la musique) permettant une démarche interprétative. Elle est une recherche qui produit et analyse des données descriptives, telles que les paroles écrites ou dites et le comportement observatoire des personnes (Grawitz, 1986).

    Et aussi elle renvoie à une méthode de recherche intéressée par le sens et l'observation d'un phénomène social en milieu naturel. Elle traite des données difficilement quantifiables. Elle ne rejette pas les chiffres ni les statistiques mais ne leur accorde tout simplement pas la première place.

    A cet effet, le chercheur est intéressé à connaître les facteurs conditionnant un certain aspect du comportement de l'acteur social mis au contact d'une réalité. Il se sert d'un modèle interprétatif où l'accent est mis sur les processus qui se développent au sein des acteurs (ici, on est intéressé par des significations que l'acteur attribue à son environnement de même qu'à ces interprétations).

    De même, il doit chercher à comprendre, chercher à décrire et à explorer un nouveau domaine, à évaluer les performances d'une personne, à aller à la découverte de l'autre, à évaluer une action (Kakai, 2008).

    Comme notre étude s'inscrit dans la recherche qualitative, notre échantillon d'étude est constitué des enfants de la rue de la commune de Ngaba. Du point de vue taille, son effectif s'élève à 5 sujets. Le faible effectif de notre échantillon se justifie par le fait que cette étude ne vise ni à établir ni à annoncer des lois, mais à saisir le vécu phénoménologique de chaque sujet contacté.

    2.2.2.3. Types d'échantillons dans la recherche qualitative

    En recherche qualitative, on recourt à ce qu'on appelle l'échantillon non probabiliste, qui ne cherche pas à reproduire le plus fidèlement possible dans la population globale, en tenant compte des caractéristiques connues de cette dernière. Ainsi, l'échantillon probabiliste repose sur le hasard alors que celui non probabiliste est intentionnel. Patton, cité par Deslauriers (1991) distingue sept sortes d'échantillons intentionnels :

    ü L'échantillon de cas extrêmes ou déviants, qui permet d'obtenir des renseignements sur certains cas inhabituels ;

    ü L'échantillon de cas typiques qui fournit des renseignements à partir de quelques cas jugés représentatifs de l'ensemble ;

    ü L'échantillon multiphasé, qui renseigne par l'analyse des variations qu'a connues un cas en s'adaptant à différentes conditions ;

    ü L'échantillon de cas critiques, qui fait ressortir quelques cas qui, s'ils s'avèrent vrais, illustreraient l'ensemble ;

    ü L'échantillon de cas politiquement importants, qui attire l'attention sur des cas inhabituels ayant une influence sur l'ensemble ;

    ü L'échantillon le plus proche, qui offre des renseignements à partir des cas les plus facilement accessibles ;

    ü Et l'échantillon par boule de neige, technique qui consiste à ajouter à un noyau d'individus (des personnes considérées comme influentes par exemple) tous ceux qui sont en relation (d'affaires, de travail, d'amitié, etc.) avec eux, et ainsi de suite.

    Dans le cadre de cette étude, nous avons opté pour l'échantillon de cas typiques. A cet effet, l'analyse des informations issues de quelques cas des enfants de la rue contactés dans le cadre de cette étude, nous permet de comprendre les facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue de ces sujets.

    2.2.2.4. Critères d'inclusion des sujets d'échantillon

    La ville de Kinshasa, en l'occurrence, la commune de Ngaba regorge beaucoup des jeunes. Vu le temps limité dont nous avons disposé pour mener cette étude et sa spécificité, nous avons recouru à la technique d'échantillonnage non probabiliste, et notre échantillon comprend 5 sujets. Ces sujets ont été retenus suivant les critères de sélection ci-après :

    ü Avoir grandi dans la rue ;

    ü Avoir plus de 18 ans ;

    ü Se retrouver dans la commune de Ngaba ;

    ü Se montrer disponible de nous partager son histoire.

    Les sujets qui ont rempli ces critères ont été retenus dans notre échantillon d'étude. Nous les avons contactés un à un jusqu'à atteindre un effectif de 5 sujets.

    2.3. METHODE ET TECHNIQUE D'ENQUETE

    2.3.1. Méthode et technique de récolte des données

    2.3.1.1. Méthode de récolte des données

    Dans le domaine de la recherche, le terme méthode désigne l'ensemble des démarches que met en oeuvre un chercheur, pour découvrir et vérifier des connaissances, ou un praticien pour résoudre un problème concret à partir de connaissances existantes (Bloch, 2007).

    Il existe des méthodes spécifiques dans chaque domaine d'étude. En psychologie, on distingue les méthodes expérimentale, introspective, clinique, psychanalytique, phénoménologique, observation, enquête, etc. (Ngub'usimMpey-Nka, 2016).

    En ce qui nous concerne, nous avons fait recours à la méthode clinique qui, étymologiquement indique un positionnement au chevet du patient, près de son lit ou dans sa chambre et renvoie à une conception humaniste et subjective du rapport à la personne en mauvaise santé, malade ou en demande de soutien. Elle rappelle ainsi l'exigence éthique comme nécessaire à la relation thérapeutique entre soignant et soigné.

    Notons aussi que le terme clinique est défini par Rotsart et Hertaing (1986) comme tout ce qui relève de la pratique du contact avec un patient et fait référence à la pratique psychothérapeutique. Pedinielli (2005) pense que la méthode clinique vise à créer une situation avec un degré faible de contrainte, en vue d'un recueil d'informations le plus large et le moins artificiel possible, donnant au sujet des possibilités d'exprimer ses sentiments profonds.

    Notons par ailleurs que le choix de la méthode clinique pour notre étude est motivé par le souci d'appréhender chaque sujet enfant de la rue comme une personne qui se trouve en situation-problème.

    2.3.2.2. Techniques de récolte des données

    Par technique, nous entendons l'instrument utilisé pour récolter les informations dont le chercheur a besoin. Ngub'usimMpey-Nka (2016) la définit comme étant la réalisation pratique ou la matérialisation effective de la méthode. C'est l'outil qui rend opérationnel la méthode.

    La technique est un procédé ou un ensemble de procédés mis en oeuvre pour obtenir un résultat déterminé. Selon le Robert Méthodique (1988), la technique est l'ensemble des moyens et des procédés qui permettent à un chercheur de rassembler les informations originales ou de seconde main sur un objet donné.

    Ainsi, pour vérifier l'hypothèse émise et atteindre l'objectif assigné à cette étude, nous recourons à la méthode clinique (étude de cas) opérationnalisée par l'entretien clinique qui nous permet d'appréhender de façon approfondie les facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue.

    2.3.2.2.1. Entretien clinique

    a. Définitions

    L'entretien clinique est une situation de communication entre un psychologue clinicien, ou un médecin ou un bénévole et un patient, qui s'établit sur un mode spécifique. Ce mode de communication peut être en lien avec une théorie (non directivité, psychanalyse, etc.) choisie par le professionnel ou le praticien lui-même.

    D'une façon plus large, on peut aussi définir l'entretien comme étant une interaction, essentiellement verbale, entre deux personnes en contact direct avec un objectif préalablement posé (plus ou moins formellement). C'est notamment cette caractéristique qui différencie l'entretien d'une discussion banale ou d'un échange à bâtons rompus (NgufuluBasuluka, 2018).

    b. Type d'entretiens

    Il existe plusieurs types d'entretiens suivant la manière de le réaliser : l'entretien non directif ou libre, l'entretien semi directif et l'entretien directif.

    v Entretien directif

    Proche du questionnaire, l'entretien directif est un type d'entretien qui exige l'usage du guide dans son déroulement. Le protocole de l'entretien comporte des questions ouvertes, mais les réponses restent libres dans leur contenu ainsi que dans leur forme.

    v Entretien non-directif

    L'interviewer laisse la personne libre de choisir les thèmes à aborder et adopte une attitude d'empathie (essayer de comprendre l'autre comme s'il était à sa place... sans oublier toutefois qu'on ne l'est jamais vraiment...).

    v Entretien semi-directif

    Dans ce type d'entretien, le sujet détermine avant l'entretien, un certain nombre de thèmes ou de questions à explorer (un guide d'entretien). Mais au cours de l'entretien, l'attitude du sujet reste la plus "non-directive" possible, c'est-à-dire, intervention de type écoute empathique, reformulation, ou éventuellement question ouverte pour faciliter l'expression sans pour autant suggérer des pistes de réponse ou manifester un quelconque jugement.

    Dans notre étude, nous avons opté pour l'entretien semi-directif. Celui-ci s'est basé sur un guide d'entretien élaboré pour vérifier notre hypothèse. Ce guide, est élaboré en avance, laisse un abord libre aux différents thèmes abordés lors de l'entretien. Ainsi, ce type d'entretien essaie de diminuer au possible les désavantages inhérents à la directivité (risque d'enfermer le client) et ceux liés à la non directivité (l'obtention des données vagues, non-respect du temps...).

    Ainsi, Bordeleau (1997) éclaircit les avantages de ce type d'entretien pour un chercheur en disant : « le spécialiste utilise alors une attitude de semi directivité, en abordant que des thèmes à couvrir par des questions ouvertes, par ensuite selon les réponses de l'interviewé, approfondir une réponse générale par des questions plus spécifiques ».

    d. Description du guide d'entretien

    Elaboré en français, traduit en lingala, suivant l'objectif assigné à l'étude, notre guide d'entretien comporte deux dimensions ci-dessous :

    ü La première dimension concerne l'identification du sujet, à savoir : l'âge, le niveau d'études, l'appartenance religieuse, etc.

    ü La deuxième dimension couvre l'entretien proprement dit, elle cherche à déceler les raisons du départ de l'enfant ; les difficultés rencontrées dans la rue et les solutions adéquates de la sortie de l'enfant.

    2.3.2. Méthode et technique de traitement des données

    Compte tenu de la nature qualitative des données récoltées, nous avons recouru à une méthode d'étude approfondie de cas, et à l'analyse de contenu

    2.3.2.1. Analyse de contenu

    Les réponses aux questions ouvertes de l'entretien contiennent des informations qu'il faut repérer, classifier, analyser et interpréter pour en extraire la signification.

    La technique d'analyse de contenu, telle que définie par Berelson (1952), comme une technique de recherche pour la description objective, systématique et quantitative du contenu manifeste de la communication, nous parait appropriée. Cela veut dire que le discours des personnes interviewées ainsi que les réponses aux questions ouvertes contiennent des informations, des données brutes dont il faut découvrir le sens ; en un mot, qu'il faut décortiquer.

    Cette technique nous a permis de rassembler les contenus des réactions de différents sujets vivant dans la rue et contactés afin de faire partie de notre échantillon. Cette analyse se fait en deux temps : horizontale et longitudinale.

    a. Analyse horizontale

    Il s'agit de l'analyse thématique « horizontale » de chaque entretien sur les raisons du départ de l'enfant ; les difficultés rencontrées dans la rue et les solutions adéquates de la sortie de l'enfant de la rue.

    Basée sur les aspects du guide d'entretien, elle cherche une cohérence thématique inter-entretiens après mise en évidence de signifiants, mots-clés, termes ou expressions et regroupement.

    b. Analyse longitudinale

    L'analyse horizontale a donné lieu à l'analyse longitudinale pour chaque enfant de la rue afin de décrire les raisons du départ de l'enfant ; les difficultés rencontrées dans la rue et les solutions adéquates de la sortie de l'enfant.

    De plus, il nous a paru intéressant de synthétiser pour chaque enfant de la rue, toutes les informations sur son vécu sur la rue.

    2.3.2.2. Etude de cas

    L'étude de cas est une méthode utilisée dans les études qualitatives en sciences humaines et sociales, mais elle peut être utilisée dans les études pour se pencher sur un cas en particulier. Elle vise l'étude approfondie d'un cas spécifique, soit une personne, un groupe ou un sujet spécifique (Wikipédia, 2022).

    L'étude de cas est le fondement de la pratique clinique. Son but est d'appréhender le sujet à travers sa pathologie mais surtout à travers son histoire et sa personnalité, dans sa globalité.

    L'étude des cas nous permet de cerner les faits autour du phénomène enfant de la rue et relever les aspects psychologiques autour de son image de soi.

    2.4. DIFFICULTES RENCONTREES

    La grande difficulté rencontrée était surtout celle de l'indisponibilité de certains sujets de plus de 18 ans au centre. Le report des rendez-vous nous a couté en temps et en finances. Mais en dépit de toutes ces difficultés, la volonté et la détermination nous ont permis d'aller au bout de notre travail.

    TROISIEME CHAPITRE : PRESENTATION, ANALYSE ET INTERPRETATION DES RESULTATS

    Ce chapitre de notre étude s'intéresse aux cas de sujets contactés sur le terrain. Il s'agit, pour rappel, des5 sujets de 18 à 27 ans qui ont vécu dans la rue depuis leur enfance,précisément dansla commune de Ngaba au quartier Bulambemba.

    Il sied de signaler par ailleurs que ce chapitre comporte deux sections : la première présente les cas, un à un, et la deuxième procède à l'analyse globale de tous les différents cas présentés.

    3.1. PRESENTATION DES RESULTATS

    Dans la présentation des résultats, nous examinons chacun de nos casen parlant de l'identité du sujet, de l'extrait du récit autobiographique et de l'analyse psychologique partielle.

    Tenant compte des obligations déontologiques à l'égard de la confidentialité des sujets, nous avons utilisé les pseudonymes des noms pour identifier les sujets contactés.

    3.1.1. Cas de Madrid

    3.1.1.1. Identification

    De sexe féminin et âgée de 27 ans, Madrid a étudié jusqu'en 2ème secondaire. Originaire de l'Équateur, elle a passé 12 ans dans la rue, elle vivait avec son père. Etant d'une famille de 4 enfants dont 3 garçons et elle est la fille unique, Madrid fréquente l'église catholique.

    3.1.1.2. Extrait du récit autobiographique

    Ma mère est décédée quand j'avais 10 ans et après une année, mon père a épousé une autre femme. Au début, on vivait bien avec la femme de mon père. Mais un jour, sa grande soeur était venue nous voir à la maison et c'est le jour où ma souffrance avait commencé.

    La femme de mon père avait commencé à me maltraiter avec mes frères. Alors, le cadet vivait avec notre grand-mère, la maman de mon père.

    On priait à une église Bima, un jour, la femme de mon père amène deux prophètes pour prier avec nous à la maison et les prophètes avaient dit à mon père, c'est moi et mon grand frère qui sommes à la base de la mort de maman et on se prépare aussi pour le tuer.

    Papa ne croyais pas à cela mais sa femme disait que c'est vrai, j'ai des signes de la sorcellerie. Après 2 mois, je m'étais décidée de quitter la maison, pour me rendre à dans la rue. Je ne voulais pas aller chez la grand-mère parce qu'elle avait cru à cette prophétie.

    J'avais quitté la maison parce que la femme de mon père me maltraitait beaucoup et me traitait de sorcière. Au paravent tout était bien, mon père travaillait et gagner beaucoup d'argent même.

    Dans la rue pour manger, je vendais de l'eau quand j'étais à l'âge de 12 ans mais je me suis lancée à la prostitution et c'est une amie qui m'avait orienté et elle était plus âgée que moi. Il y' avait d'autre garçons qui m'ont ravi l'argent et d'autres qui m'ont voilé, d'autres sortait avec moi sans payer, quand je demandais l'argent il me tabassé.

    Ce que j'éprouve comme difficultés c'est beaucoup plus le manque de soins de santé, parce que dans cette vie, je tombe souvent malade mais je ne me soigne pas très bien et je manque aussi l'endroit pour passer la nuit.

    Pour qu'on puisse m'aider dans cette situation, je veux qu'on me donne les moyens pour suivre une formation, je vais apprendre même l'esthétique et une place pour dormir parce que la rue n'est pas vraiment une bonne place pour moi, la souffrance augmente tous les jours.

    3.1.1.3. Analyse psychologique

    Madrid est dans la rue puisqu'elle était accusée de sorcellerie par sa famille. La perte de sa mère peut avoir un impact profond sur Madrid, entraînant des sentiments de tristesse, de colère et de confusion. Si la famille attribue la mort de la mère à des croyances superstitieuses telles que la sorcellerie, l'enfant peut se sentir responsable de manière injuste et développer un sentiment de culpabilité.

    Être accusé de sorcellerie par sa famille peut entraîner un fort sentiment de rejet et d'isolement chez l'enfant. Il peut se sentir incompris, maltraité et discriminé en raison de croyances irrationnelles qui lui sont imposées Cela peut avoir un impact dévastateur sur l'estime de soi de l'enfant pourra se sentir dévalorisé, incompris et non aimé par sa propre famille.

    Vivre dans la rue peut être perçu comme une tentative de retrouver un sentiment de valeur personnelle et d'identité propre, loin des jugements et des accusations injustes. Vivre dans un environnement où l'enfant est accusé de sorcellerie peut compromettre le sentiment de sécurité et d'appartenance de l'enfant ; il peut se sentir menacé physiquement et émotionnellement à la maison, ce qui le pousse à chercher ailleurs un endroit où il se sentira accepté et en sécurité.

    3.1.2. Cas de Marseille

    3.1.2.1. Identification

    De sexe masculin et âgé de 24 ans, Marseille a arrêté les études en deuxième année secondaire. Originaire du Kongo-central, il ne fréquente aucune confession religieuse depuis un temps, il a fait 11 ans à la rue, il a été élevé par ses propres parents biologiques, enfant unique de sa famille.

    3.1.2.2. Extrait du récit autobiographique

    Je suis à la rue depuis que j'ai fui la maison par ma propre volonté. J'étais trop bloqué à la maison, Mes parents ne voulaient pas que je sorte de la maison. Jusqu'à 13 ans, on me traitait toujours comme un enfant qu'on devait surveiller. Car, je suis enfant unique.

    Quand j'étais à la maison, on avait une bonne vie, puisque mon père était un homme riche. Mes parents sont à Lemba et ils sont toujours ensemble mais ne sont plus venus me chercher.

    Depuis que je suis dans la rue, je suis devenu quelqu'un d'autre. Ici on m'appelle Général. Je confisque des choses des gens. Mes petits de la base ont pour rôle de voler pour moi, ils m'amènent tous ceux qu'ils volent le soir.

    Ici, au début j'avais des difficultés mais maintenant non. Je n'éprouve aucune difficulté car je suis général, il y a personne pour m'intimider. Parfois même, je me battais avec les voyous de Yolo.Mais si seulement une personne de bonne volonté me donne l'argent, la maison et une femme, je vais voir comment arrêter, seulement j'aime beaucoup la vie de la rue car il y a quelques années on m'avait ramené à la maison et je les ai volé. Raison pour laquelle je suis encore rentré à la rue.

    3.1.2.3. Analyse psychologique

    Âgé de 24 ans, Marseille est enfant unique de ses parents. S'est retrouvé dans la rue par sa propre volonté, il voulait être libre, se sentir capable de tout, chose que sa famille lui privait. Il est important de noter que ce désir qu'aMarseille de vivre dans la rue plutôt qu'en famille peut également être le signe de difficultés émotionnelles ou relationnelles avec ses parents.

    La rue est représentée par Marseille comme un espace de liberté où l'enfant se sent moins contraint par les règles et les attentes familiales. Cela peut être perçu comme une forme d'émancipation et d'autonomie, comme un moyen pour lui de se sentir plus adulte et de prendre des décisions par lui-même, même si cela comporte des risques. Cette situation peut compenser un sentiment d'isolement ou de malaise au sein de sa famille.La rue est présentée comme un terrain de jeu plus excitant et stimulant.

    3.1.3. Cas de Barcelone

    3.1.3.1. Identification

    De sexe masculin et âgé de 18 ans, Barcelonea arrêté ses études en 5ème primaire ;il est originaire de la province du Kongo- central ; il fréquente rarement l'église catholique ; et il est à dansla rue depuis 3 ans.Barcelone était élevé par ses propres parents, et est ainé d'une fratrie de 6 enfants dont 2 garçons et 4 filles.

    3.1.3.2. Extrait du récit autobiographique

    J'étais serré à la maison, mais c'est mon père qui m'a poussé à sortir dans la rue. Il gagnait de l'argent mais ne voulait pas me scolariser, il gaspillait beaucoup son argent au lieu de nous payer les études. Et cela m'avait beaucoup énervé car, c'est bien lui mon père biologique.

    Mon départ est causé par le mauvais traitement, c'est d'ailleurs la cause principale qui m'a motivé à quitter cette maison et à être loin de ma famille. Mon père prenait trop d'alcool chaque jour et à son retour tabassait toujours ma mère et tout le monde autour de lui. A son retour, il nous maltraite. Pour lui, la seule chose à faire avec son argent c'est de boire, fumer et rentrer tard. C'était vraiment un papa irresponsable que je n'ai jamais vu.

    A la maison, on mangeait très difficilement, mon père préférait acheter l'alcool que de donner l'argent à maman pour nous préparer à manger. Il achetait au moins 5 bouteilles de bières par jour pendant que nous, on n'avait pas mangé.

    Mes parents sont toujours en vie sous le même toit et, ils sont toujours ensemble jusqu' à présent. Mais je ne sais pas si papa continue toujours avec son sale caractère d'alcoolique. Mais Ça n'a jamais arrivé qu'on puisse voir un pasteur ou un prophète pour prophétiser sur moi.

    Pour avoir quelque chose à manger ici dans la rue c'est très difficile car souvent, je portais des charges lourdes pour trouver à manger avec l'argent qu'on me payait. Parfois, je volais pendant les embouteillages et un jour on m'avait même arrêté pour ça et j'étais frappé par quelques jeunes sur place. Je suis allé jusqu'à Lufuavec un vieux et là-bas, on m'avait arrêté pour avoir volé mais j'avais fui.

    Mes difficultés sont beaucoup plus liées à l'endroit où dormir et là où je ne peux pas manquer la nourriture. Pour ces derniers temps je dors chez ma tante et parfois je dors dans la rue. La vie dans la rue ce n'est pas facile, plusieurs fois, j'ai vraiment connu des moments très durs mais je me suis beaucoup forcé pour rester mais j'ai des cicatrices sur ma tête j'étais tabassé sérieusement pour la nourriture.

    Pour m'aider dans cette situation, je dois avoir une personne ou une famille d'accueil pour me prendre en charge et me considérer aussi comme enfant. Il me faut aussi un encadrement pour quitter la rue, c'est vraiment de cette façon-là qu'on peut m'aider dans ma situation. Bien que plusieurs fois ma mère passait me chercher, je ne compte pas rentrer à la maison parce que mon père ne me plaît pas sur tout ce qu'il fait.

    3.1.3.3. Analyse psychologique

    Barcelone a quitté chez eux en raison d'un père alcoolique qui ne prend pas bien soin de lui et ses études. Cela peut justifier son vivre dans la rue qui peut être perçu comme une option plus sûre pour lui, où il se sent moins exposé aux risques liés à l'abus d'alcool et à un environnement familial instable. En cherchant à s'éloigner de cette situation, il espérait trouver des relations plus chaleureuses et bienveillantes dans la rue, même si cela comporte des dangers potentiels.

    Vivre dans la rue peut être une façon pour l'enfant de reprendre le contrôle sur sa propre vie et de se libérer de l'emprise négative de son père alcoolique. Cela peut être perçu comme un moyen de se protéger et de décider de son propre destin, même si cela implique de prendre des risques, et la rue peut représenter un refuge pour l'enfant, un endroit où il peut échapper temporairement aux problèmes familiaux et trouver un certain soulagement psychologique.

    3.1.4. Cas de Leicester

    3.1.4.1. Identification

    Âgé de 24ans et de sexe masculin, Leicester est issu d'une famille de 5 enfants dont 2 filles et 3 garçons, tous vivants sauf sa mère. Il a arrêté les études en troisième primaire, il était élevé par sa marâtre, il fréquentait l'église catholique mais actuellement, il ne prie plus. Il est originaire de la province de Mai-Ndombe. Aujourd'hui, il totalise 14 ans dans la rue.

    3.1.4.2. Extrait du récit autobiographique

    L'histoire remonte depuis 2010 lorsque j'ai été chassé de la maison par la femme de mon oncle qui ne m'aimait pas et elle me traitait comme un sorcier suite aux dires d'un prophète.

    Ma famille avait une belle vie, voire une vie stable, elle avait des moyens pour répondre très bien à tous les besoins primaires de toute la famille. Depuis que ma mère est morte, j'ai été abandonné par mon père sans raison et j'ai été récupéré par mon oncle. C'est la raison pour laquelle j'étais amené plusieurs fois chez le prophète de la femme de mon oncle puisque j'étais traité de sorcier par cedernier.

    Depuis que j'ai commencé la vie de la rue, je n'arrivais pas à trouver facilement à manger comme il faut, je transportais les colis des gens et quelque fois je fessais la mendicité pour trouver quelque chose à mettre dans mon ventre. J'avais de difficulté de trouver à manger et je me demandais à chaque fois comment je vais m'en sortir avec cette famine ? En plus j'étais exposé à un danger grave de menace de mort, de vole voir même être privé de ma nourriture et payer plus des taxes par jours chez les grands vieux de la rue mais je n'étais pas confronté par les actes de violence.

    J'aimerais bien quitter la rue et retourner à l'école ou faire la formation de maçonnerie puisque c'est le seul métier que désire faire dans ma vie. Je préfère travailler ou être dans une maison d'hébergement pour améliorer ma situation.

    J'espère un jour quitter dans la rue, c'est vraiment mon souci de tous les jours. Car, je souffre énormément malgré que personne ne s'occupe de moi et personne de ma famille n'a le souci de venir me chercher dans la rue.

    3.1.4.3. Analyse psychologique

    Leicester a été chassé par la femme de son maitre parce qu'il était considéré comme sorcier. Leicester est confronté à un environnement familial toxique où il est victime de maltraitance et de rejet. Cette situation peut entraîner un traumatisme émotionnel profond, affectant sa confiance en soi, son estime de soi et sa capacité à établir des relations saines avec les autres.

    Être chassé de sa propre maison peut provoquer chez ce dernier un sentiment d'abandon et d'isolement. Il peut se sentir rejeté, incompris et seul face à des circonstances difficiles et injustes. Ce sentiment d'isolement peut renforcer son désir de fuir et de chercher refuge ailleurs. La maltraitance et le rejet peuvent compromettre le développement émotionnel et social del'enfant.qui peut avoir du mal à faire confiance aux autres, à exprimer ses émotions et à établir des liens affectifs sains.

    Cette situation peut également affecter sa capacité à gérer le stress et les conflits de manière appropriée. D'où Leicester a préféré de trouver refuge dans la rue.

    3.1.5. Cas de Vita-club

    3.1.5.1. Identification

    Âgé de 22 ans et garçon unique de sa famille, tous les deux parents sont vivants. Il a arrêté les études en première secondaire, il a été élevé par ses propres parents biologiques, il fréquentait l'église de réveil et actuellement il ne prie plus. Il est originaire de la province de Kasaï- Central.Aujourd'hui, Vita-club a 8 ans dans la rue.

    3.1.5.2. Extrait du récit autobiographique

    J'avais quitté la maison de mes parents depuis 2016 en fouillant seulement mon père et cela par ma propre volonté,sans être chassé par quelqu'un de la famille. J'ai quitté chez nous à cause de mes parents qui ne voulaient pas que je sois heureux et que je joue même avec mes amis ou que je sorte même de la parcelle. Or, j'avais aussi besoin de la liberté car à la maison je me sentais comme si j'étais en prison.

    Mon père très colérique me mettait très mal à l'aise comme si ce n'était pas vraiment mon père. Il m'insultait beaucoup et n' appréciait rien de tout ce que je faisais. Selon lui, j'étais comme un enfant, j'étais moins intelligent ...

    Mes parents restent ensemble, mènent une bonne vie et restent dans l'une des communes de la ville province de Kinshasa. Je n'ai jamais été amené chez un pasteur pour la prière ou être prophétisé.

    Je suis actuellement bien dans la rue et on m'appelle Gouverneur, je trouve la nourriture en envoyant mes petits soit moi-même, je pars manger dans un orphelinat.

    Je peux accepter d'être aidé par quelqu'un si on me donne les moyens pour continuer les études et une maison ouoù habiter. 

    Je ne refuserai jamais de quitter dans la rue bien, j'apprécie beaucoup la vie dans la rue que dans la maison.Si mes parents viennent me chercher, je partirai seulement si papa arrête son sale comportement.

    3.1.5.3. Analyse psychologique

    Vita-Club a quitté chez eux suite aux mauvais comportements de ses parents. La colère chronique et incontrôlée du père peut créer un climat familial toxique où l'enfant se sent constamment menacé, humilié ou négligé. Cette maltraitance émotionnelle peut pousser l'enfant à fuir pour échapper à un environnement familial oppressant. L'enfant peut ressentir une peur constante face aux réactions violentes et imprévisibles de son père. Cette peur peut générer un sentiment d'insécurité et d'instabilité, incitant l'enfant à chercher refuge ailleurs, même dans la rue. Face à un environnement familial oppressant et contrôlant, l'enfant peut ressentir un besoin urgent d'autonomie et de liberté.

    La rue peut apparaître comme un lieu où il peut échapper aux contraintes familiales et prendre ses propres décisions. Les tensions et les conflits récurrents entre le père et l'enfant peuvent être liés à des différences de valeurs, de croyances ou de modes de communication. Ces conflits non résolus peuvent pousser l'enfant à chercher une échappatoire dans la rue pour éviter les confrontations constantes.

    Si l'enfant ne se sent pas soutenu ou compris par les membres de sa famille face à la colère de son père, il peut se retrouver isolé et désespéré. Le manque de soutien familial peut renforcer sa décision de partir à la recherche d'un environnement plus favorable.

    3.2. ANALYSE GLOBALE, INTERPRETATION ET DISCUSSION DES RESULTATS PRESENTES

    Après avoir présenté les différents cas rencontrés dans la commune de Ngaba, nous procédons dans cette section à l'analyse globale des résultats. Il est question d'examiner les informations autour de ces cas en vue de vérifier les facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue.

    Il ressort de nos différents cas que tous les sujets présentés ont une histoire particulière liée à leur situation. Cette histoire particulière est différente d'un sujet à l'autre et chacun l'a vécu de manière individuelle.

    La lecture attentive de différents cas, montre que tous ne sont pas à la rue pour les mêmes raisons : 2 sujets (Madrid et Leicester) ont perdu tous deux leurs mères, la mort les a séparés. Ainsi, ces deux sujets ont subi une maltraitance à la disparition de leurs mères : Madrid par sa marâtre et Leicester par la femme de son oncle chez qui il est allé vivre car il a été abandonné par son père. Les deux ont aussi été taxés de sorcier à cause des prophéties des certains pasteurs.

    Marseille et Vita-Club sont les deux sujets qui ont fui la maison à cause de la sévérité des parents qui étaient dures dans leur éducation. C'est la recherche de la liberté qui leur a conduit à la vie.

    Un autre sujet, Barcelone a quitté la maison à cause de la maltraitance de toute la famille par un père alcoolique qui ne scolarise pas les enfants et ne les nourrit pas. Barcelone vivait une pauvreté voulu par son père qui dépensait son argent dans l'alcool.

    Ces résultatsrejoignent ceux de NsimbaNdongo (2010) qui a abouti aux conclusions selon lesquelles la majorité des jeunes Kuluna proviennent du milieu familial dysfonctionnel, caractérisé par l'appauvrissement des rôles de responsabilités de membres. Certains jeunes ont été rejetés avant même leur naissance et d'autres ont été à la base de divorce ou séparation de leurs parents. Aux seins de leurs familles respectives règnent des irrégularités dans le style de vie entre parents et enfants.

    La théorie du soutien social de Bowlby (1960), souligne l'importance des relations sociales et affectives dans le développement de l'enfant. Selon cette théorie, les interactions avec les figures d'attachement, en l'occurrence les parents, jouent un rôle crucial dans la construction d'un sentiment de sécurité et de confiance chez l'enfant. Lorsque ces relations sont perturbées ou inexistantes, l'enfant peut éprouver un sentiment d'insécurité et de détresse, ce qui peut influencer son comportement et ses décisions.

    Dans le cas de l'enfant qui quitte la maison pour la rue pour plusieurs raisons, la théorie du soutien social de Bowlby met en lumière l'importance du lien d'attachement entre l'enfant et son père, principalement celui de l'enfant et de sa mère. Si ce lien est marqué par des interactions négatives et conflictuelles, l'enfant peut ressentir un manque de soutien émotionnel et affectif, ce qui peut le pousser à chercher du réconfort ailleurs, y compris dans la rue.

    En ce qui concerne la théorie de l'attachement de Bowlby (1960), celle-ci met en avant le besoin fondamental de l'enfant d'établir des liens sécurisants avec ses figures d'attachement pour se sentir en sécurité et protégé. Lorsque ces liens sont fragilisés par des conflits familiaux ou des interactions négatives, l'enfant peut développer un attachement insécure, caractérisé par une crainte de l'abandon et un besoin constant de validation et de réassurance.

    Ainsi, dans le cas de l'enfant qui quitte la maison pour la rue, la théorie de l'attachement de Bowlby souligne l'impact des relations familiales sur le bien-être émotionnel et psychologique de l'enfant. Un attachement insécure peut contribuer à renforcer le désir de l'enfant de fuir un environnement familial conflictuel et oppressant pour trouver un refuge ailleurs.

    Ces résultats nous permettent de confirmer notre hypothèse selon laquelleles facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue dans la commune de NGABA sont les suivants : perte de parents, prophéties de certains pasteurs, séparation avec les parents et la pauvreté.

    CONCLUSION

    Le présent travail que nous concluons a porté sur Facteurs explicatifs du phénomène enfants de la rue dans la Commune de Ngaba. L'objectif de cette étude était d'identifier les différentes causes ou facteurs favorisant ou expliquant ce phénomène a des d'enfants de la rue dans la commune de NGABA.

    Cette étude a voulu répondre à la question de savoir Quels sont les facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue dans la commune de NGABA ?

    Face à cette question, nous avons émis l'hypothèse selon laquelle les facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue dans la commune de NGABA sont les suivants : perte de parents, prophéties de certains pasteurs, séparation avec les parents et la pauvreté.

    Pour vérifier cette hypothèse et atteindre l'objectif visé, nous avons recouru à la méthode clinique basée sur l'étude de cas. Celle-ci était opérationnalisée par la technique d'entretien clinique s'appuyant sur un guide d'entretien qui nous a permis de récolter les données auprès de 5 sujets qui ont vécu dans la rue depuis leur enfance.

    Après traitement des données, il ressort que :

    - Madrid est dans la rue puisqu'elle s'est séparée avec sa mère suite à sa mort, elle était accusée de sorcière par sa marâtre. cette situation lui a vraiment déstabilisé et sa seule option c'était d'aller dans la rue pour vivre calmement.

    - Leicester s'est séparée avec sa mère suite à sa mort, il a été chassé par la femme de son oncle parce qu'il était considéré comme sorcier. Leicester est confronté à un environnement familial toxique où il est victime de maltraitance et de rejet.

    - Marseille s'est retrouvé dans la rue par sa propre volonté, il voulait être libre car ses parents étaient sévères envers lui.

    - Vita-Club a quitté aussi chez eux suite parce qu'il voulait être libre car ses parents étaient sévères envers lui.

    - Barcelone quant à lui, a quitté chez eux en raison de problèmes familiaux tels qu'un père alcoolique qui ne prend pas bien soin de lui et ses études. Il vivait donc dans la pauvreté à cause de l'irresponsabilité de son père.

    Ces résultats nous ont permis de confirmer notre hypothèse.A ce niveau, nous concluons que l'objectif assigné à cette étude a été atteint.

    Après la recherche menée dans le cadre de notre étude sur les enfants de la rue dans la commune de Ngaba, nous formulons quelques suggestions ci-dessous pour aborder ce problème complexe :

    - Identification et soutien des familles vulnérables : Il est essentiel que le gouvernement identifie les familles les plus vulnérables et leur fournisse un soutien adéquat. Cela peut inclure des mesures visant à prévenir la séparation des parents, à lutter contre la négligence et à prévenir les abus. Des programmes de soutien familial, tels que des conseils, des services sociaux et des formations en parentalité positive, peuvent être mis en place pour renforcer la stabilité familiale et réduire les risques de rupture.

    - Création de programmes de scolarisation spéciaux : Il est nécessaire de mettre en place des programmes de scolarisation spéciaux pour les enfants de la rue. Ces programmes devraient offrir un environnement d'apprentissage adapté à leurs besoins spécifiques, en prenant en compte les traumatismes vécus et en fournissant un soutien émotionnel et psychologique. En garantissant l'accès à une éducation de qualité, ces programmes peuvent contribuer à la réintégration sociale et à la réduction des risques d'exploitation.

    - Établissement de centres de soutien social : Il est recommandé de mettre en place des centres de soutien social dans la commune de Ngaba. Ces centres peuvent offrir des services tels que l'assistance sociale, l'aide à la réinsertion, l'accès à des soins de santé et des conseils psychologiques. Ils serviraient de points de référence pour les enfants de la rue, leur offrant un soutien et des ressources pour les aider dans leur réintégration sociale.

    - Campagnes de sensibilisation : Il est essentiel de lancer des campagnes de sensibilisation pour changer les attitudes et les perceptions à l'égard des enfants de la rue. Ces campagnes peuvent cibler la population locale, les écoles, les médias et les institutions publiques. L'objectif est de promouvoir une meilleure compréhension des enjeux auxquels les enfants de la rue font face, de réduire la stigmatisation et de favoriser l'empathie et le soutien de la communauté.

    - Collaboration avec des organisations internationales et des ONG : Il est recommandé de collaborer avec des organisations internationales, des ONG et d'autres pays pour partager les bonnes pratiques, les connaissances et les ressources dans la lutte contre le phénomène des enfants de la rue. Cette collaboration peut permettre d'établir des partenariats, d'accéder à des financements supplémentaires et de bénéficier de l'expertise d'autres acteurs engagés dans la protection des droits des enfants.

    Ces suggestions supplémentaires visent à renforcer les mesures déjà proposées et à élargir les perspectives d'intervention dans la commune de Ngaba.

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    ANNEXE

    GUIDE D'ENTRETIEN

    I. Identification de l'enquête

    Sexe :.................................................................................................

    Âge :.................................................................................................

    Classe :..............................................................................................

    Province :...........................................................................................

    Religion (avant et maintenant) :................................................................

    Temps passé dans la rue :.........................................................................

    Qui élevait l'enfant en famille :................................................................

    Fratrie :..............................................................................................

    II. Entretien proprement dit :

    RAISONS DU DEPART DE L'ENFANT DE LA FAMILLE

    1. Comment êtes-vous retrouvés dans la rue

    2. Quelles sont les principales raisons pour lesquelles vous avez quitté votre famille ?

    3. Quelle a été la situation socio-économique familiale ?

    4. Les parents sont-ils en vie ?

    5. Les parents vivent-ils ensemble ?

    6. La famille t'a-t-elle un jour amené voir un pasteur qui devait prier ou prophétiser sur toi ?

    DIFFICULTES RENCONTREES DANS LA RUE

    7. Comment vous procurez-vous de la nourriture ?

    8. Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans la rue ?

    9. Avez-vous déjà été confronté à des actes de violences ?

    SOLUTIONS ADEQUATES DE LA SORTIE DE L'ENFANT DE LA RUE

    10. Quel genre d'aide serait le plus utile pour vous ?

    11. Qu'est-ce qui pourrait améliorer votre situation ?

    12. Espérez-vous un jour quitter la rue ?

    13. Est-ce que les membres de votre famille viennent vous chercher ?

    TABLE DES MATIERES

    RESUME i

    SAMMURY ii

    EPIGRAPHE iii

    DEDICACE iv

    REMERCIEMENTS v

    LISTE DES ABRÉVIATIONS, ACRONYMES ET SIGLES vi

    0. INTRODUCTION 1

    0.1. Problématique 1

    0.2. Hypothèse 3

    0.3. Intérêt du sujet 3

    0.4. Objectif du travail 4

    0.5. Méthode et technique de recherches 4

    0.6. Délimitation du sujet 4

    0.7. Division du travail 4

    CHAPITRE 1 : CONSIDERATIONS GENERALES ET THEORIQUES 5

    1.1. Facteur 5

    1.1.1. Définition 5

    1.1.2. Facteurs susceptibles de favoriser le phénomène enfant de la rue 5

    1.2. Phénomène 7

    1.2.1. Définition 7

    1.2.2. Phénomène social 7

    1.2.2.1. Notions des phénomènes sociaux 7

    1.2.2.2. Caractéristiques des phénomènes sociaux 8

    1.3. Enfant 8

    1.3.1. Notions 8

    1.3.2. Loi sur la protection de l'enfant 9

    1.4. Enfant de la Rue 10

    1.4.1. Définition 10

    1.4.2. Rapport entre phénomène enfant de la rue et délinquance 11

    1.4.3. Type d'enfants de la rue 12

    1.4.4. Causes du phénomène enfant de la rue 12

    1.4.5. Activités des enfants de la rue 13

    1.4.5.1. Activités rémunératrices ou lucratives des enfants de la rue 14

    1.4.5.2. Activités déficientes 15

    1.5. Etudes antérieures 17

    1.5.1. Etude de Nsimba Ndongo (2010) 17

    1.5.2. Etudes de Nsumbu Nansadi (2015) 18

    CHAPITRE 2 : APPROCHE METHODOLOGIQUE 19

    2.1. PRESENTATION DE LA COMMUNE DE NGABA 19

    2.1.1. Aspect géographique 19

    2.1.2. Origine 19

    2.1.3. Subdivision administrative 20

    2.1.4. Quelques caractéristiques socio-économiques de la population de Ngaba 20

    2.2. POPULATION ET ÉCHANTILLON D'ÉTUDE 21

    2.2.1. Population d'étude 21

    2.2.2. Echantillon d'étude 22

    2.2.2.1. Définitions et types d'échantillon 22

    2.2.2.2. Echantillon en recherche qualitative 23

    2.2.2.3. Types d'échantillons dans la recherche qualitative 24

    2.2.2.4. Critères d'inclusion des sujets d'échantillon 25

    2.3. METHODE ET TECHNIQUE D'ENQUETE 25

    2.3.1. Méthode et technique de récolte des données 25

    2.3.1.1. Méthode de récolte des données 25

    2.3.2.2. Techniques de récolte des données 26

    2.3.2.2.1. Entretien clinique 27

    2.3.2. Méthode et technique de traitement des données 29

    2.3.2.1. Analyse de contenu 29

    2.3.2.2. Etude de cas 30

    2.4. DIFFICULTES RENCONTREES 30

    TROISIEME CHAPITRE :PRESENTATION, ANALYSE ET INTERPRETATION DES RESULTATS 31

    3.1. PRESENTATION DES RESULTATS 31

    3.1.1. Cas de Madrid 31

    3.1.1.1. Identification 31

    3.1.1.2. Extrait du récit autobiographique 31

    3.1.1.3. Analyse psychologique 33

    3.1.2. Cas de Marseille 33

    3.1.2.1. Identification 33

    3.1.2.2. Extrait du récit autobiographique 33

    3.1.2.3. Analyse psychologique 34

    3.1.3. Cas de Barcelone 35

    3.1.3.1. Identification 35

    3.1.3.2. Extrait du récit autobiographique 35

    3.1.3.3. Analyse psychologique 36

    3.1.4. Cas de Leicester 37

    3.1.4.1. Identification 37

    3.1.4.2. Extrait du récit autobiographique 37

    3.1.4.3. Analyse psychologique 38

    3.1.5. Cas de Vita-club 38

    3.1.5.1. Identification 38

    3.1.5.2. Extrait du récit autobiographique 39

    3.1.5.3. Analyse psychologique 39

    3.2. ANALYSE GLOBALE, INTERPRETATION ET DISCUSSION DES RESULTATS PRESENTES 40

    CONCLUSION 43

    REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 46

    ANNEXE 49

    TABLE DES MATIERES 52






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