étude de la migration clandestine somalienne vers l'europe ses causes et conséquences à travers la presse arabepar Bilal HACHIN IBRAHIM Université de Lorraine - Master 1 2018 |
1. La barrière linguistique et le chômageDès l'arrivée des migrants en Europe, ils font face à la barrière linguistique qui leur pose beaucoup de problèmes, surtout pour les adultes, mais pour s'intégrer à la société des pays d'accueil, ces personnes doivent apprendre la langue du pays, ainsi on constate qu'« en Europe, la connaissance de la langue et de la société d'accueil est de plus en plus une condition nécessaire à l'intégration des migrants dans leur pays d'arrivée, qu'il s'agisse d'entrer sur le territoire, d'obtenir l'autorisation de résidence permanente ou d'en acquérir la nationalité. Un grand nombre de pays européens mettent ainsi en place différentes politiques de formations linguistiques sanctionnées par des tests175». Cependant, la langue maternelle pour les Somaliens est le somali et certains grâce aux études connaissent l'anglais, ces derniers n'auront donc pas de barrière linguistique s'ils déposent une demande d'asile dans un pays parlant l'anglais comme les Pays Bas ou une partie de la Belgique, et en ce qui ceux qui ne parlent que le Somali alors ils auront des difficultés de communication dans les pays européens. En France, ces réfugiés peuvent apprendre la langue française par des cours donnés par l'office français de protection des réfugiés et apatrides, OFPRA. Cependant cet l'apprentissage de cette nouvelle langue n'est pas sans conséquences, puisqu'ils mènent beaucoup d'entre eux à rester sans activités professionnelles car ils ne peuvent même pas s'exprimer. En effet, selon CHARMARKEH Houssein176, les migrants somaliens en Europe %D8%A8%D9%84%D8%BA%D8%A7%D8%B1%D9%8A%D8%A7- %D8%A7%D9%84%D8%B5%D9%88%D9%85%D8%A7%D9%84-%D8%A7%D9%84%D8%A8%D8%B1%D8%AF/, consulté le 20/12/2012. 175 EXTRAMIANA Claire et VAN AVERMAET Piet, Apprendre la langue du pays d'accueil, dans Hommes et migrations, numéro 1288, publié en 2010, p.8. 176 CHARMARKEH Houssein, Op., cit. 103 font face à plusieurs difficultés dont la langue. La qualité de l'intégration des Somaliens est donc faible à cause du manque de maitrise de la langue du pays d'accueil. Le 28 décembre 2017, nous avons visité la ville d'Angers où nous avons rencontré des réfugiés demandeurs d'asile, j'ai pu donc m'entretenir avec eux en langue Somali, sur leurs trajets jusqu'en Europe et sur leurs vies en France. J'ai rencontré un jeune bachelier qui m'a affirmé que l'obstacle le plus important à leur arrivée en Europe est celui de la langue, aussi, il met l'accent sur le fait que l'apprentissage de cette langue leur est difficile puisqu'ils ne sont pas intégrés dans la société française. 2. L'empreinte digitale et le rapatriement Certains Somaliens font ce qu'on appelle l'Asylum shoping, c'est quand les migrants choisissent le pays d'accueil en fonction de sa situation économique, en fonction de la politique des demandes d'asile, et en fonction de s'ils y possèdent des proches. Cependant, en 2003, les pays européens ont signé un accord sous le principe du One stop, One chopes, selon lequel, l'immigré doit obligatoirement voir traiter sa demande dans le premier pays d'accueil européen où il a mis le pied (Catherine Wenden, 2017.99). Cependant, la majorité des immigrés n'ont pas connaissance des traités et accords européens, et déposent donc plusieurs demandes d'asile dans différents pays -choisis selon les critères mentionnés-mais ces demandes sont nulles et seul le pays dans lequel l'immigré a été en premier acceptera sa demande. A titre d'exemple, en 2010, Abdurrahman177un jeune somalien qui est arrivé en Hongrie et souffrait à cause du froid auquel il n'était habitué a décidé de se rendre chez des proches à Manchester au Royaume-Unis - les règlements de l'union européenne lui permettent de se rendre dans d'autres États d'Europe pour une période de trente jours, sans pouvoir toutefois s'y installer - mais il s'est fait arrêter et renvoyé à Budapest, conformément au règlement de Dublin II178. « Ce jeune homme a expliqué qu'il avait été abandonné à l'aéroport de Budapest, tout ce qu'il avait sur lui, c'était une carte d'embarquement pour le vol Londres-Budapest. A Budapest, il s'est retrouvé sans abri durant trois nuits [....] Il avait froid et faim, il était sale et il avait peur des skinheads. Il s'est alors rendu dans le seul endroit qu'il 177Nom fictif donné pour des raisons de protection comme indiqué par HCR. 178 Ces dispositions obligent les demandeurs d'asile à rester dans le pays où ils ont déposé une demande d'asile, qui est leur premier point d'entrée en Europe. 104 connaissait, le centre Bicske. Il peut obtenir tous les documents d'identité avec l'aide du Bureau de l'immigration et de la nationalité, mais il a besoin de parler le hongrois et de temps. Le HCR espère que son intervention, visant à résoudre la crise du logement pour les réfugiés et à appuyer une amélioration des politiques d'intégration y compris le droit de travailler et de vivre dans la dignité179 ». La raison qui a obligé ce jeune homme à quitter la Hongrie est le froid et la barrière de la langue qui l'empêche d'avoir un travail. C'est pour cela qu'il a décidé de se rendre clandestinement aule Royaume-Unis pour s'y installer avec sa famille. Puis, il a été rapatrié ver la Hongrie après quelques mois conformément au système européens, Eurodac, qui est un système d'information des empreintes digitales permettant d'identifier les demandeurs d'asile frauduleux dans plusieurs pays de l'Europe. Ce renvoie d'immigrants vers les pays qui leur sont de droit ne concerne pas uniquement les pays européens mais il peut s'agir aussi de pays comme la Libye ou la Somalie, acte qui peut être dangereux pour les immigrés surtout s'il s'agit d'un rapatriement vers la Libye ou la Somalie. Pour cette raison, le 23 février 2012, la cour européenne a condamné un acte concernant des immigrés somaliens refoulés par l'Italie vers la Libye : « La juridiction du Conseil de l'Europe a condamné l'Italie pour avoir intercepté et refoulé vers la Libye un groupe de Somaliens. En violation de la Convention européenne des droits de l'homme et sans avoir préalablement examiné si cela constituait un risque réel pour ces personnes, dans le cadre de l'affaire intitulée Hirsi Djama et autres180. ». La souffrance exprimée par ces personnes est comparable à celle de nombreux immigrés somaliens qui arrivent en Europe chaque année, et lorsqu'ils souffrent dans un pays ils décident de le changer pour un autre mais en vain. MOUSE AHMED Nima fait partie de ces immigrées qui souffraient en Europe, c'est une jeune somalienne qui a essayé de se suicider après qu'elle ait été rapatriée de la Suède, en effet, elle a expliqué dans une interview que sa demande d'asile a été refusée par l'autorité Autrichienne, rajoutant qu'elle et d'autres Somalien sont été forcés de dormir dehors. MOUSE AHMED Nima essaya de 179TOTH Zoltan, H. SUNJIC Melita, Des réfugiés somaliens sans abri en plein hiver à Budapest, publié le 27 /01/2010, en ligne : http://www.unhcr.org/fr/news/stories/2010/1/4b61c1376/refugies-somaliens-abri-plein-hiver-budapest.html?query=les%20refugies%20somalien%20en%20europe, Consulté le 16/02/2018. 180UNHCR, La Cour européenne des droits de l'homme prononce un jugement faisant date sur le refoulement en mer Méditerranée, en ligne : http://www.unhcr.org/fr/news/press/2012/2/4f465a2ec/strasbourg-cour-europeenne-droits-lhomme-prononce-jugement-faisant-date.html?query=les%20somaliens%20en%20libye, consulté le 05/12/2017. 105 rejoindre la Suède mais à cause de l'Eurodac, elle a été repérée puis rapatriée vers l'Autriche, premier pays où elle a posé les pieds à son entrée en Europe. Voici l'extrait d'un entretien qu'un journaliste du VOA Somali181 a réalisé avec MOUSE AHMED Nima : « -Le journaliste de la VOA : comment vous appelez-vous ? -Nima : je m'appelle Nima Mousse Ahmed -Le journaliste : D'où venez-vous ? -Nima : je suis de la Somalie, -Le journaliste : où avez-vous commencé votre voyage ? Nima : j'ai commencé mon voyage de la Somalie en passant par l'Éthiopie, le Soudan, la Libye. Je suis restée en mer pendant une nuit et une journée avec 380 autres émigrés et ont a été secourus par un navire américain qui nous a amené en Italie. Puis je me suis dirigée vers l'Autriche. Le journaliste : combien de mois a duré votre trajet ? Nima : presque 6 mois, Le journaliste : combien avez-vous payé pour venir en Autriche ? Nima : j'ai payé environ 8500 dollars, Le journaliste : pourquoi avez-vous quitté votre pays ? Nima : à cause des problèmes intérieurs, Le journaliste de la VOA : avez-vous de la famille en Somalie ? Nima: oui, j'ai quitté ma mère, mon père et mes enfants, Le journaliste : combien d'enfants avez-vous ? Nima : j'ai deux enfants, un garçon Amir de 3 ans, et une fille Amira de deux ans. Le journaliste : quand as-tu vu tes enfants pour la dernière fois ? Nima: c'était en octobre 2014. Le journaliste : êtes-vous en contact avec eux ? Nima : oui, on se parle. Le journaliste : est-ce que vos enfants savent que tu as été blessée ? Nima : oui, ils savent pour ma blessure, mon fils m'a dit qu'il sait ce que j'ai fait et il qu'il prie pour moi. Le journaliste lui demande la raison qui l'emmena à vouloir mettre fin à sa vie en sautant d'un immeuble, Le journaliste : que s'est-il passé ? Nima: j'ai sauté du troisième étage d'un immeuble, la vie est dur ici. J'attends toujours une réponse pour ma demande d'asile, je n'ai reçu aucun document et je n'ai 181 VOA SOMALI, abréviation pour la voix de l'Amérique, une radio aux Etats-Unies. 106 pas été convoqué à un entretien, Le journaliste : qu'avez-vous pensé lorsque vous avez sauté ? Nima : je voulais me suicider car la vie est devenue difficile pour moi. Le journaliste : que s'est-il passé ensuite ? Nima : je me suis cassé les deux jambes et la colonne vertébrale et j'ai été dans le coma pendant quatre jours. Le journaliste : quels sont vos projets ? Nima : je veux partir en Suède mais j'ai été interceptée par la police et ramenée au camp alors que j'étais blessée. Le journaliste : quel est votre message pour ceux qui verront cette interview ? Nima : je conseille les Africains surtout mes frères et soeurs en Somalie qu'ils arrêtent de rêver de l'Europe, il n'y a rien ici. Le journaliste : n'avez -vous pas entendu les mêmes paroles quand vous étiez en Afrique ? Nima : si j'entendais, mais je pensais que les gens mentaient. Maintenant, je vois la réalité, au moins, en Afrique, je n'ai jamais connu la faim. Mais ici, j'ai faim et il fait très froid car il neige tout le temps182. ». MOUSE AHMED Nima est comme plusieurs de jeunes somaliens pensait qu'une fois arrivée en Europe, elle va réaliser ses rêves et vivre une vie meilleure. Et comme beaucoup d'immigrés qui ne connaissent les règlements européens, elle a quitté son pays d'accueil pour la Suède, mais en vain, puisqu'elle n'y a pas droit. |
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