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étude de la migration clandestine somalienne vers l'europe ses causes et conséquences à  travers la presse arabe


par Bilal HACHIN IBRAHIM
Université de Lorraine - Master 1 2018
  

Disponible en mode multipage

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Réalisé par : Bilal HACHIN IBRAHIM Dirigé par : Mme Laurence DENOOZ

Département Langues et Cultures Étrangères -

Mémoire : Master 1 Meco arabe parcourt (recherche).

Année universitaire 2017/2018

Étude de la migration clandestine

somalienne vers l'Europe ses causes et

conséquences à travers la presse arabe

2

Table des matières

Étude de la migration clandestine somalienne vers l'Europe ses causes et conséquences à travers la

presse arabe 1

Remerciement 4

Système de translittération 5

Introduction 6

1. La situation politique en Somalie depuis l'indépendance en 1969 jusqu'à nos jours 10

2. Historiographie de l'émigration en Somalie au 19èmesiècle 12

3. Les seigneurs des guerres et le phénomène de la piraterie 13

Chapitre I : 16

Les causes de l'émigration somalienne vers l'Europe d'après la presse arabe et étrangère 16

A. La guerre civile en somalie depuis1991 17

B. Le chômage, cause de l'émigration clandestine 20

C. Le groupe al-Ðabâb 27

D. Le rôle des réseaux sociaux dans l'émigration clandestine somalienne 30

Chapitre II : 37

Les conséquences de l'émigration clandestine somalienne vers l'Europe à travers la presse arabe et

étrangère 37

A. La souffrance des émigrés dans le désert, dans les pays de transit et en Méditerranée 38

B. Le viol des femmes émigrées 44

C. La torture et les autres mauvais traitements 55

D. La rançon imposée par les trafiquants d'êtres humains (le magafe) en langue somalie 67

Chapitre III : 75

Étude sur les émigrés clandestins somaliens morts en Méditerranée depuis l'année 2011 Jusqu'à

2017 75

1. Le soulèvement en Libye et les victimes somaliennes en 2011 76

2. Une athlète somalienne, victime de la Méditerranée 80

3. Appel du premier ministre français après la mort d'environ 300 émigrés clandestins somaliens en

2013 85

4. Le naufrage de Somaliens en Méditerranée en 2015 88

5. Les réactions de la presse sur les émigrés somaliens morts noyés en Méditerranée en 2016 91

6. La souffrance rencontrée par les immigrés une fois en Europe 100

1. La barrière linguistique et le chômage 102

2. L'empreinte digitale et le rapatriement 103

3. Le manque de logement et le refus des demandes d'asile 106

3

Conclusion 109

Résumé en arabe 111

LES RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIES 116

4

Remerciement

J'adresse mes sincères remerciements à mon professeur et directrice de recherche madame Laurence DENOOZ, pour sa disponibilité tout au long de la rédaction de mon mémoire et pour ses précieux conseils donnés à chaque entretien.

Je tiens également à remercier mon professeur monsieur Nejmeddine KHALFALLAH pour l'intérêt porté au sujet et pour ses encouragements. Enfin, je remercie tous ceux qui m'ont aidé à réaliser de ce mémoire, mes enseignants, ma famille et mes amis.

5

Système de translittération

Pour la translittération des termes arabes figurants dans cette recherche, le système Arabica a été retenu puisqu'il est la norme la plus fréquemment utilisée dans le domaine des études arabes en Occident.

Lettres arabes

Transcription en français

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6

Introduction

L'immigration est un phénomène très ancien, en effet, pour différentes raisons les mouvements migratoires ont toujours existé entre les pays et les continents, ainsi, la question de l'immigration ne s'est jamais limitée à un lieu, à un temps précis ou à des populations spécifiques. Et Jusqu'à nos jours, on observe que chaque année des milliers de personnes quittent leurs pays avec l'ambition de vivre dans un autre aux meilleures conditions.

"Depuis l'aube de l'humanité, les populations se sont déplacées, d'un pays à l'autre, d'un continent à l'autre. Elles se sont déplacées parfois pour quelque temps, parfois pour toujours, parfois isolées, parfois en groupes. Certaines migrations ont pris de très grandes proportions. Les causes de ces migrations sont nombreuses : catastrophes naturelles, changements Climatiques, épidémies, invasions, conquêtes, guerres, persécutions politiques ou religieuses, la recherche de moyens d'existence, d'un travail1.».

En somalie, depuis la chute du gouvernement central en1991 tenu par le président somalien Mohamed SIAD BARRE par les rebelles, le pays s'est vu plonger dans une situation chaotique avec l'éclat de guerres civiles entre les clans qui constituaient la Somalie. Face à cette situation et face aux rivalités des clans, ce sont des milliers de Somaliens qui ont fui le pays et se sont réfugiés dans des pays voisins tels que l'Éthiopie, le Kenya, la République de Djibouti, le Yémen et d'autres pays d'Afrique. Plusieurs autres réfugiés somaliens ont eu l'opportunité de s'installer en Amérique du Nord (États Unis et Canada), en Angleterre et dans plusieurs pays européens comme la Suède, la Finlande, le Danemark, l'Italie, la Belgique, Malte, l'Allemagne, la Norvège, le Pays-Bas, la France... etc. Les Somaliens réfugiés dans les pays européens et en Amérique du Nord obtiennent l'asile dans ces pays souvent à l'aide d'un système sélectif opéré par les organisations humanitaires comme l'organisation internationale pour les réfugiés, UNHCR. Pour les autres Somaliens, ils se dirigent vers l'Égypte et la Turquie et également vers la Libye qui avant la chute du régime de KADHAFI accueillait plusieurs somaliens qui avaient droit au travail et à la résidence.

Les Somaliens qui souhaitent se rendre en Europe traversent illégalement la Méditerranée grâce à des passeurs / des trafiquants d'êtres humains, et les départs se sont intensifiés lorsque la guerre a éclaté en Libye au début de l'année 2011, en effet, cette guerre n'a pas limité ou

1 Service Social des Étrangers, Le phénomène de l'immigration et les problématiques de l'intégration dans le contexte européen, consulté le 10/11/2017.

7

diminué ces départs, la Libye est enfin devenue une nouvelle porte d'entrée des émigrés clandestins vers l'Europe. Cette situation nous rappelle des propos tenus par l'ancien président libyen Mouammar KADHAFI dans lesquels il disait : « si je tombe, vous aurez l'immigration, des milliers de gens qui iront envahir l'Europe depuis la Libye et il n'y aura personne pour les arrêter2». Depuis l'écroulement de toutes les institutions en Libye, elle est donc devenue un passage ouvert pour les émigrés clandestins se rendant en Europe par le Sahara Libyen puis la Méditerranée, cette dernière est devenue un cimetière pour les jeunes somaliens de moins de trente ans.

Le phénomène de l'émigration clandestine touche en particulier les jeunes, en effet, chaque année, plusieurs Somaliens dont des étudiants universitaires désespérés de la situation du pays natal tente la traversée de la Méditerranée pour atteindre le continent européen. Ces émigrés qui pour atteindre l'Italie effectuent un long trajet depuis la Somalie en passant illégalement par voie terrestre d'autres pays en Afrique comme l'Éthiopie, le Soudan et la Libye. Pendant leur trajet, ils subissent de nombreuses difficultés telles que la souffrance morale et physique, les viols perpétrés contre les femmes émigrées, l'enlèvement et la rançon qu'elle implique et enfin la mort pour certains. D'après l'article « l'émigration augmente en Somalie3 » publié dans le journal IRINNEWS, on observe que malgré ces souffrances, difficultés et obstacles, les jeunes hommes et femmes restent déterminés par la traversée vers l'Europe et ce même si, et durant le périple, certains parmi eux meurent de faim ou de soif dans le Sahara entre le Soudan et la Libye ou dans la mer Méditerranéenne.

Dans cette étude, nous allons nous interroger sur les causes et conséquences de cette émigration clandestine poussant les jeunes somaliens à fuir leur pays malgré les diverses souffrances et difficultés rencontrées sur les trajets. De cette interrogation, d'autres tout aussi importantes en découlent, comme celle d'étudier l'image de cette émigration dans la presse arabe, de dégager selon cette même presse les causes et les conséquences de l'émigration, d'une part sur l'individu émigré et d'autre part sur le pays natal quitté, il s'agit aussi de savoir comment la souffrance et les difficultés de ces individus ont été décrites dans cette presse, enfin, il s'agit d'étudier l'impact de cette émigration sur la société et la jeunesse somalienne.

Durant notre recherche, nous n'avons pas trouvé de recherches scientifiques suffisantes dans les journaux français abordant les causes et les conséquences de l'émigration clandestine

2 LACHKAR Michel, Le chaos en Libye oblige l'Europe à revoir sa politique d'accueil, en ligne : http://geopolis.francetvinfo.fr/immigration-le-chaos-en-libye-oblige-leurope-a-revoir-sa-politique-daccueil-59121, publié le 21 /04/2015, consulté le 15/01/2018.

3 IRINNEWS, L'émigration clandestine en hausse en Somalie, en ligne :

http://www.irinnews.org/ar/report/3395/%D8%A7%D9%84, publié le 12 décembre 2012, consulté le 12/11/2017.

8

somalienne. Nous avons eu accès à seulement quelques articles mais traitant la problématique de manière insuffisante et plutôt générale. CHARMARKEH Houssein4, chercheur djiboutien à l'université d'Ottawa au Canada et auteur de plusieurs articles sur la diaspora somalienne a souligné dans son revue « Le rôle d'Internet et de la télévision dans l'adaptation des réfugiés en France » que malgré la présence de chercheurs français spécialistes des questions sur la Somalie et sa diaspora, il n'existe aucune étude sur les réfugiés somaliens notamment en France.

Outre le fait que l'émigration clandestine soit un sujet d'actualité, elle parait être un sujet fertile et riche que je pourrai étudier et c'est ici où réside l'intérêt de cette recherche, présenter un travail scientifique qui sera utile aux chercheurs, aux étudiants francophones voulant étudier la question ou toute personne s'intéressant à cette thématique. Enfin, le choix de ce travail de recherche et outre l'interrogation sur les causes et conséquences de l'émigration, s'inscrit dans la volonté de mettre en lumière les peines, les préoccupations et les difficultés des émigrés somaliens.

Afin de répondre scientifiquement à la problématique, nous allons analyser les articles de la presse arabe selon une approche analytique et critique, aussi, nous allons utiliser la méthode sémiotique pour étudier les termes employés par la presse arabe pour évoquer la problématique de l'émigration. Il s'agira de voir comment chaque presse analyse les causes et les conséquences de ce phénomène et la valeur et signification du vocabulaire utilisé pour communiquer la souffrance des émigrés clandestins.

Le corpus principal de notre recherche est la presse arabe, notamment quelques articles tirés d'al-Jazeera, al-?Arabiyya, al-?ayât et Somâlî al-Yawm rédigés de 2010 jusqu'à 2017. Mon choix s'est porté sur ces journaux en particulier puisqu'ils sont les plus lus dans le monde arabe, aussi puisqu'ils analysent souvent les événements des pays voisins de manière complète, également puisqu'ils regorgent d'une quantité importante d'informations sur mon sujet, enfin mon choix devient certain puisque cette presse couvre quotidiennement les actualités en Somalie qui fait partie des vingt-deux pays arabes. Enfin, nous étudierons quelques articles que nous avons trouvés dans la presse francophone et anglophone.

4CHARMARKEH Houssein, Le rôle d'Internet et de la télévision dans l'adaptation des réfugiés en France, dans Alternative francophone 1.6, 2013, 38 pages.

CHARMARKEH Houssein est docteur en sciences de la communication, il a rédigé, à l'université Sorbonne Nouvelle, Paris III, une thèse sur l'émigration somalienne intitulée pratiques médiatiques, usages des médias sociaux et trajectoires migratoires des Somaliens en France et au Canada.

9

L'étude se divise en trois chapitres, dans un premier temps, nous introduirons le sujet par une étude historiographie de l'émigration en Somalie, dans le premier chapitre nous analyserons premièrement les diverses causes de l'émigration et dans le deuxièmement nous allons étudier la conséquence et la souffrance de l'émigration clandestine en mettant en évidence l'impact de cette problématique sur la jeunesse somalienne, enfin, Dans le troisième chapitre, nous allons étudier les migrants clandestins somaliens qui sont morts en Méditerranée et enfin, nous conclurons notre recherche en analysant les problèmes rencontrés par les émigrés somaliens une fois en Europe.

Enfin, les traductions d'articles en arabe et en anglais vers le français et certains entretiens en langue somali sont réalisées par moi-même.

Nous allons résumer ici quelques difficultés les plus fréquents à laquelle nous serons confrontés durant cette étude :

- Comme notre corpus constituait plusieurs articles en arabe, nous avons consacré beaucoup du temps la traduction de ces citations vers le français. Et on les révisait de temps en temps pour éviter les erreurs linguistiques et pour trouver une équivalence entre la langue source (arabe) et la langue cible (français).

- Le deuxième difficulté est l'écriture de l'arabe surtout l'ors de la rédaction de notre résumé en arabe car le clavier de notre pc est uniquement en français et anglais. Pour surmonter cet obstacle, nous nous obligé de `écrire l'arabe dans un clavier automatique sur l'internet et puis on faisait copie coller dans le Microsoft Word.

10

1. La situation politique en Somalie depuis l'indépendance en 1969 jusqu'à nos jours

Pour mieux comprendre les raisons se cachant derrière le phénomène de l'émigration somalienne, l'étude de l'histoire politique de la Somalie depuis son indépendance parait primordiale, puisqu'en Somalie l'émigration possède une relation directe avec la guerre civile qui a ravagé le pays depuis l'effondrement du dernier régime. La Somalie, située dans la Corne de l'Afrique se trouve sur la longueur du golfe d'Aden et de l'océan Indien, le pays s'est limitrophe par Djibouti au Nord-Ouest, par l'Éthiopie à l'Ouest et par le Kenya au Sud-ouest, et d'après l'Encyclopédie Universalis : « La Somalie (636 000 kilomètres carrés et environ 10 millions d'habitants au milieu des années 2000) est un État en ruine. Créé en 1960 par l'unification de deux colonies devenues indépendantes, le Somaliland britannique et la Somalie italienne, l'État somalien naît avec le sentiment d'être incomplet. Il revendique, en effet, l'incorporation de territoires limitrophes habités par des Somali : à l'est de l'Éthiopie, au nord

du Kenya, et au sud la République de Djibouti5. ».

Figure 1 : Carte géographique de la Somalie6

5 FICQUET Éloi, GASCON Alain, SIMONIS Francis, SOMALIE, dans EncyclopædiaUniversalis, en ligne : http://www.universalis.fr/encyclopedie/somalie/, consulté le 02 /10/2017.

11

À l'époque coloniale et avant l'indépendance de la Somalie, les territoires du peuple somalien étaient divisés en cinq grandes parties, le Somaliland britannique colonisée par l'Angleterre, la somalie italienne colonisée par l'Italie, le territoire de l'Ogaden sous l'autorité de l'Éthiopie, Northern frontière District (N.F.D) et les côtes françaises de la Somalie actuellement la république de Djibouti (Tatania Charlier, 1966). En 1960, le Somaliland britannique obtiendra l'indépendance et quelques jours plus tard la Somalie italienne sera indépendante, ces deux territoires principaux habités par l'ethnie Somalie formeront la République Démocratique de Somalie. En effet, selon le chercheur CHARLIER Tatania:

« La création de la République de Somalie en I960 par la réunification de deux ex-

colonies le Somaliland britannique et la Somalie italienne est considérée par les

Somaliens que comme un premier pas vers unité pan somalienne étoilent cinq branches

qui figurent sur le drapeau de la République somalienne rappelle en effet que les

provinces somaliennes sont au nombre de cinq mêmes si actuellement État en compte que

deux7.»,

Et d'après l'article Culture de la Somalie :

« Depuis la création de cet État somalien indépendant, issu de la combinaison d'anciennes colonies italiennes (Somalia) et britanniques (Somaliland) renaît alors l'espoir de réunir dans un seul État tous les Somaliens qui vivent en Éthiopie, au Kenya et à Djibouti8».

Un an après l'indépendance, en 1961ADEN Abdullah Osman est élu premier président somalien et il régnera sur le pays jusqu'en 1969. En 1969 Abdel Rashid Ali SHERMARKE devient le deuxième président de la Somalie et bien qu'élu démocratiquement ce dernier sera assassiné par l'un de ses gardes du corps. « En 1969, à la suite d'un coup d'État militaire et de l'assassinat du président, le docteur Ali Shermarke, Mohammed Siad Barré proclame la République démocratique de Somalie », (Mabire, J.(2003)). Le général Mohamed SIAD BARRE, un homme qui a débuté sa

6 Carnet photographique, Carte géographique de la Somalie, publié le 25/12/2017, en ligne : http://www.voyagesphotosmanu.com/carte_geographique_somalie.html, consulté le 01/12/2017.

7 CHARLIER Tatania , À propos des conflits de frontière entre la Somalie l'Éthiopie et le Kenya, dans

Revue française de science politique , en ligne : http://www.persee.fr/doc/rfsp_0035-
2950_1966_num_16_2_418460?q=%C3%80+propos+des+conflits+de+fronti%C3%A8re+entre+la+Somalie+l%27Ethiopie+et+le+Kenya+, pp. 310.

8 BDV, Culture de la Somalie, en ligne : http://www.bourse-des-voyages.com/somalie/guide-culture-politique-aden-abdullah-osman-daar.php, consulté le 02/11/2017.

12

carrière comme membre dans la police nationale, puis généra là l'armée, dirigera le pays d'une main de fer et accordera son soutien à tous les mouvements pour libérer les régions disputées avec certains pays comme l'Éthiopie, la France et le Kenya. En effet, « ces provinces font objet de revendications somaliennes tantôt par voie diplomatique tantôt par la force des armes le plus souvent par les deux méthodes la fois9 ». Et pour ce faire, la Somalie attaquera l'Éthiopie en 1977 et conquerra tous les territoires disputés, cependant, la Somalie sera repoussée par les alliés de l'Éthiopie, les cubains et l'URSS ce qui entraina le retirement de l'armée somalienne de ces territoires. À la fin de cette guerre, certains généraux somaliens iront se réfugier dans les pays voisins car ils étaient contre le retirement des forces somaliennes de l'Éthiopie, et plus tard, avec d'autres mouvements d'oppositions ils deviendront des rebelles armés, fait qui mènera à des guerres civiles interminables. Nous développerons en détails cette guerre civile et son rôle dans l'émigration somalienne.

2. Historiographie de l'émigration en Somalie au 19èmesiècle

Lorsqu'on s'intéresse à l'histoire de la Somalie, on constate qu'historiquement les peuples somaliens sont des nomades qui pratiquaient le pastoralisme et étaient donc constamment à la recherche d'eau pour leurs bétails, ils avaient donc et depuis longtemps l'habitude de voyager et de se déplacer d'un lieu à un autre, de leur terre vers une autre plus développée et fertile. Selon GASCON Alain :« Les Somali ont une pratique ancienne de la migration : leurs cheikhs ont toujours étudié en Arabie et leurs marins toujours vogués sur la mer rouge et l'océan Indien. Dans les années 1960, les besoins en main-d'oeuvre des États pétroliers ont dirigé vers le golfe persique10. ».

Depuis l'indépendance de la Somalie en 1960, il y a eu trois vagues migratoires du peuple somalien vers le monde extérieur, le premier exode a eu lieu au début des années soixante-dix après le Dabadheer11, une longue saison de sécheresse qui a ravagé l'économie locale. Par conséquent, beaucoup de Somaliens ont immigré durant cette période vers les pays du Golfe en particulier en Arabie Saoudite qui en plein développement pétrolier avait besoin de mains-d'oeuvre étrangères. Cette vague d'immigration a été provoquée par les pertes de bétails et le manque d'opportunités d'emplois dans le pays. La deuxième vague migratoire a commencé vers la fin des années quatre-vingt et le début des années quatre-vingt-dix. Cette fois, la cause de l'émigration était due aux confrontations militaires entre le régime de l'époque et les mouvements rebelles, ce qui a entrainé

9 CHARLIER Tatania, Op., cit.,.pp. 310.

10GASCON Alain, Les Somali : nomadisme, migrations et déplacements forcés, 2001, p. 77-94.

11 dabadheer était une longue sécheresse qui a frappé la somalie dans le quatre vingt.

13

l'exode de plusieurs somaliens vers les pays voisins, puis vers l'Europe, l'Amérique du Nord et l'Australie12.La troisième vague migratoire fut après la chute du gouvernement somalien en 1991 par des mouvements d'opposition, depuis, le pays est considéré comme étant le premier pays de l'Afrique de l'Est avec un fort pourcentage d'émigrés. En effet, d'après CHARMARKEH Houssein :

« Après la chute du régime du président Siad Barré en décembre 1991, les Somaliens quittent leur pays ravagé par la guerre civile en grand nombre. Ils fuient les milices armées qui, profitant de l'absence de l'État somalien, terrorisent les populations affamées. Près d'un million de Somaliens ont dû abandonner leur foyer13»,

Et d'après le journal Perspective Monde, la première raison de l'exode est la guerre civile de 1190 :

« La première raison est la guerre civile de 1990 qui frappe le pays, alors que le président est écarté du pouvoir par un coup d'État de forces rebelles, insatisfaites du régime autoritaire instauré par le président Siyad Barre. Puis, ces rebelles lancèrent une guerre entre eux-mêmes chacun voulait l'accession au pouvoir et plongea le pays dans une guerre civile qui ne se terminera en quelque sorte jamais14».

Dès l'effondrement du gouvernement, la Somalie n'avait plus de gouvernement central capable d'exercer le pouvoir par la préservation de la loi et de la sécurité du pays ce qui a permis aux rebelles de renverser le gouvernement central, et à la moitié du peuple somalien de fuir leur propre pays.

3. Les seigneurs des guerres et le phénomène de la piraterie

Depuis l'éclatement de la guerre civile, il y a eu dans un premier temps l'émergence de plusieurs rebelles que l'on appelle les seigneurs de guerre, chacun de ces seigneurs de guerre combattait au nom de son propre clan. L'apparition de ces milices a engendré la corruption dans la société somalienne et a aussi paralysé l'économie du pays, puisqu'ils exploitaient le revenu de la population en détournant à leurs profits plusieurs aides internationales.

12Sheikh Hassan et HEALY Sally, Somalia's missing million: The Somali diaspora and its role in development, 2009.

13CHARMARKEH Houssein, Op., cit.

14 PERSPECTIVE MONDE, Les camps de réfugiés somaliens : une situation critique qui perdure, publié le 25/03/2014, consulté le 05/12/2016.

14

Rousseau Élise, dans son Entre désintégration et reconstruction de l'État, la figure du seigneur de guerre somalien: les années 1990, a su développer les prétentions de ces seigneurs de guerre :

« Premièrement, les seigneurs de guerre somaliens semblent agir en vertu de leurs intérêts personnels. Il y a trente ans, il fut impossible de créer un gouvernement somalien efficace à cause des buts divergents des différents acteurs. Deuxièmement, les seigneurs de guerre somaliens tentent de générer un maximum de profits. Lorsqu'ils conquièrent des territoires, c'est avant tout pour s'approprier les points de passage stratégiques et les infrastructures qui leur permettront de prélever des impôts et d'agir dans le commerce international. Les seigneurs de guerre somaliens ont d'ailleurs développé un réseau efficace de relations commerciales licites et illicites. Troisièmement, les seigneurs de guerre somaliens cherchent à établir une certaine légitimité. Pour ce faire, ils peuvent se reposer en partie sur les traditions de la société somalienne, notamment les notions de lignage et d'appartenance. Autrement dit, La promotion de leurs intérêts personnels, la création de profits et le renforcement de leur légitimité15. ».

Et dans un deuxième temps, il y a eu l'apparition de la piraterie somalienne entre 2005 et 2015, formée par de jeunes pêcheurs. La piraterie a commencé à attaquer violement et à kidnapper tous les navires étrangers sur la mer somalienne en échange de rançons. Comme l'affirme certains chercheurs, ces pirates n'ont pu pêcher dans leur propre mer à cause des imposants navires étrangers qui pêchaient illégalement dans la mer somalienne et qui donc empêchaient les petits navires artisanaux de ces pirates de subvenir à leurs besoins.

La cause ultime de l'apparition des pirates somaliens était la chute du gouvernement en 1991 ce qui a fait naitre la pêche illégale des pays étrangers dans la mer somalienne. Aussi, le chômage qui s'est amplifié par la guerre et le manque d'institutions gouvernementales a poussé les jeunes somaliens à rejoindre le métier de pêcheur puisqu'il était le seul moyen leur permettant d'avoir une subsistance.

Après l'invasion des navires internationaux, ces jeunes n'ont trouvé aucun autre moyen pour les repousser que par les armes, ainsi l'année 2005 marque la première frappe des pêcheurs somaliens contre les navires étrangers et le nombre de jeunes qui par la suite ont rejoint la cause des

15ROUSSEAU Elise, Entre désintégration et reconstruction de l'Etat, la figure du seigneur de guerre somalien : les années 1990, 2014, 31 pages.

15

pirates a augmenté puisqu'il y avait une sensibilisation dans la communauté et une mise en garde contre les navires étrangers.

D'après DIOP Djibril: « Les côtes somaliennes ont la sinistre réputation d'être les plus dangereuses au monde à cause des pirates qui y sévissent. Ces bandits des mers intensifient les abordages, profitant du désordre politique dans le pays. Sur de petites embarcations très rapides, ces groupes armés jusqu'aux dents foncent à la tombée de la nuit jusqu'au lever du jour sur leur proie, attaquant les navires marchands comme les voiliers qui entrent en mer Rouge depuis l'océan Indien ou en provenance du canal de Suez. Le nombre d'attaques est tel qu'il a fini par perturber dans cette zone stratégique le trafic maritime international16». En 2008, les attaques des pirates se sont multipliées et la piraterie est devenue un sujet d'actualité dans le monde entier.

16Dr. DIOP Djibril, De la lutte contre le terrorisme et la piraterie, à la lutte contre le terrorisme en Somalie, publié le 03/10/2008, consulté le 11/12/2016.

:

16

Chapitre I

Les causes de l'émigration somalienne vers

l'Europe d'après la presse arabe et étrangère

17

A. La guerre civile en somalie depuis1991

La guerre civile en Somalie a débuté dans les années quatre-vingt après l'apparition des mouvements armés à l'extérieur du pays qui ont formé une opposition contre le régime du général Mohamed SIAD BARRE. Les mouvements les plus populaires sont les suivants :

somali
démocratic
association (SDA

Somali
salvation
democratic
front (SSDF)

Southern
somalie
nationale

mouvmenet (SSNM)

Somali nationale mouvement(SNM

Somali democratic mouvement (SDM)

United somalie congress (USC)

Entre 1990 et 1991, ces mouvements militaires vont lancer des attaques offensives contre le régime ce qui engendrera une guerre qui durera longtemps en causant la mort de milliers de personnes et le déplacement de milliers d'autres soit à l'intérieur du pays même soit vers des pays voisins. La situation du pays s'est dégradée jusqu'à la chute du régime le 27 janvier 1991 par ces mouvements militaires ce qui forcera par la suite le président à s'enfuir de la Somalie. :

« Le palais présidentiel tombe aux mains des rebelles de l'United Somali Congress (USC) en 1991. Deux jours plus tard, l'USC annonce la nomination du nouveau président de la Somalie, M. Ali Mahdi Mohamed. Cette nomination va engendrer une rupture fratricide entre ce mouvement et provoquer un sentiment de frustration pour tous les autres mouvements armés qui ont combattu le régime (Mabire, J. (2003) ».

D'après al-Jazeera, l'United Somalie Congress, USC, et la Somali Démocratique Mouvement, SDM, étaient les deux mouvements principaux qui ont causé la chute du gouvernement dirigé par Ali MAHDIMOHAMED et FARAH AIDID :

18

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« En 1991, le président Siad Barre a été renversé par des chefs de guerre tribaux dirigés par Mohamed FARAH AIDID et Ali MAHDI MOHAMED. En effet, cette guerre a ensuite conduit le pays dans le chaos ce qui a entraîné la mort et la blessure de milliers de civils. ».

Donc, la vraie guerre civile en Somalie a débuté en 1991 lorsque tous les mouvements militaires qui avaient combattu pour la chute du régime SIAD BARRE se sont par la suite combattus entre eux même par convoitise du pouvoir, « depuis la chute du dictateur Siad Barré, en 1991, la Somalie est déchirée par une guerre civile ; le pays ne dispose d'aucune structure étatique en état de fonctionner, et différents groupements (claniques, militaires, islamistes) se disputent les ressources et le pouvoir18. ».

Cette guerre a provoqué la mort de milliers, le pays a perdu sa stabilité et sa sécurité ce qui a mené au combat entre les clans et les tribus en Somalie : « La somalie en proie à la guerre civile depuis 1990 n'aucun moyen pour faire face à une situation sans précédent.Plus de 90000 sont déplacés, dont 500000 enfants de moins de cinq ans. Poussé par la famine ; 100000 ont quitté leurs maigres19. ».

Depuis plus de 2 décennies, des milliers de personnes se sont déplacées à l'intérieur du pays, et des milliers d'autres se sont réfugiées partout dans le monde, notamment dans les pays de la Corne de l'Afrique comme le Kenya, l'Éthiopie et la République de Djibouti. Chacun de ces pays accueillait un grand nombre de somaliens depuis l'éclatement de la guerre civile en 1991 jusqu'à nos jours, cette évolution on l'a remarque notamment dans le nombre

17 CHARMARKEH Houssein, Les plus importantes étapes du conflits somalien, en ligne : http://www.aljazeera.net/news/arabic/2006/5/22/%D8%A3%D8%A8%D8%B1%D8%B2-, consulté le 04/09/2017.

18EYER Philipp, Schweizer Régine, et Schweizer Régine, Les diasporas somalienne et érythréenne en Suisse, 2010.

19GUISNEL Jean, MAHLER Viviane. Pirates de somalie, Ed, Grasset Fasquelle, Paris,12 pages, 2012.

19

de réfugiés dans les camps : « A Djibouti, le camp d'Ali Adde pour les réfugiés qui existait depuis 1990 accueillait avant, près de 7000 réfugiés et désormais ils sont plus de 20 000 réfugiés, majoritairement des Somaliens20. ».

Depuis 1991, des immigrants somaliens résident dans les pays de la Corne de l'Afrique et vivent dans des conditions misérables. La majorité de ces réfugiés se dirigent vers le Kenya, particulièrement dans le camp de Dadaab qui est situé près de la frontière somalienne. Il accueille 350.000 personnes pour la plupart des somaliens et ce depuis plus de 20 ans. Le camp de Dadaab est constitué de trois camps, Ifo, Dagahaley et Hagadera21. ».

Figure 2 : la photo du dadaab, le plus grand camp refugié du monde au Kenya.

Comme les autres camps de réfugiés en Afrique, les immigrés somaliens au Dadaab y souffrent de différentes difficultés telles que la malnutrition, le manque d'aide sanitaire, l'insalubrité des camps. En Éthiopie, le camp de réfugiés Dollo Ado est considéré comme le deuxième plus grand camp de réfugiés au monde après le camp Dadaab au Kenya.

20 UN RADIO, Camps de réfugiés de Djibouti : la ville dans la ville d'Ali Sabieh, publié le 19/12/2011, en ligne : http://reliefweb.int/report/djibouti/camps-de-r%C3%A9fugi%C3%A9s-de-djibouti-la-ville-dans-la-ville-d%E2%80%99ali-sabieh, consulté le 10/01/2017.

21CHEMAN Melissa, Au Kenya, le plus grand camp de réfugiés du monde, publié le 18/07/2011, en ligne http://www.lefigaro.fr/international/2011/07/18/01003-20110718ARTFIG00507-au-kenya-le-plus-grand-camp-de-refugies-du-monde.php,consulté le 09/12/2016.

20

B. Le chômage, cause de l'émigration clandestine

Il existe plusieurs raisons différentes et liées entre elles causant l'émigration clandestine. Après avoir consulté quelques articles de la presse arabe, le phénomène du chômage est considéré comme l'un des facteurs majeurs de l'émigration clandestine somalienne. La guerre civile ayant détruit les institutions gouvernementales, les infrastructures, la richesse naturelle et l'économie du pays, cela a favorisé l'augmentation du taux du chômage. Dans les articles suivants, nous allons étudier comment le chômage fait partie des causes de l'émigration et comment la presse arabe le lie à l'émigration.

Tout d'abord, les jeunes somaliens qualifiés et éduqués qui souhaitent trouver un emploi pensent à l'émigration puisque ne trouvant de visions d'avenir dans un pays en ruine émigrent clandestinement vers des pays développés avec le soutien des trafiquants et des passeurs.

« Au cours des centaines d'entretiens menés dans certaines régions en Somalie, chaque personne interrogée citait une autre personne (membre de sa famille ou ami) qui avait migré clandestinement vers l'Europe. Ces recherches révèlent que l'un des grands facteurs de cette migration est l'omniprésence des passeurs (magafes), qui transforment la migration forcée en migration clandestine. Durant la recherche, les Somaliens interviewés expliquent ne pas avoir de choix et que la migration irrégulière (tahreeb) constitue leur seule chance de vivre une vie digne et sans danger 22»,

Ces personnes sont celles qui ont le moyen d'entreprendre ce long voyage périlleux en mettant leur vie en danger pour la quête d'une vie meilleure en Europe et dans d'autres pays en Occident. Ensuite, ceux qui n'ont pas les moyens pour ce voyage coûteux rejoignent soit le groupe gihadiste al-Ðabâb soit les pirates somaliens. D'après la presse Al-?arabiyya Skynews, deux tiers des jeunes somaliens âgés de moins de trente ans souhaiteraient quitter le pays, car en Somalie le phénomène du chômage est le plus élevé dans le monde :

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22 MAJIDI Nassim, Migration afghane et somalienne (post-)conflit vers l'UE, 2014, en ligne : http://www.fmreview.org/fr/destination-europe/majidi.html, consulté le 25/02/2018.

21

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« Une enquête faite auprès de 9,5 millions d'habitants de la Somalie affirme que deux tiers des jeunes somaliens âgés de moins de trente ans, ce qui représente soixante-dix pour cent de la population, préfèrent quitter le pays. D'ailleurs, la moitié de la population qui est représentée par des jeunes âgés de plus de quinze ans n'ont pas la possibilité de trouver un emploi car le taux de chômage en Somalie est le plus élevé dans le monde entier.».

Le rapport de l'organisation des Nations Unies datant de 2010 a estimé que la Somalie est à la tête des pays pauvres. La population de la Somalie est estimée à 12 millions d'habitants et environ 82 % des somaliens sont pauvres dans les différents domaines de la vie (santé, éducation, niveau de vie). Ainsi, 73 % des somaliens vivent avec moins de deux dollars par jour24. Pour la presse Al-`arabiyya, les jeunes somaliens qui représentent 73 % de la population somalienne souffrent du chômage ce qui pousse beaucoup d'entre eux à quitter le pays.

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« Selon un rapport des Nations Unies, 82% de la population somalienne est pauvreet 73% parmi eux vivent avec moins de deux dollars par jour à cause des décennies des guerres qui ont fait de la Somalie l'un des pays les plus pauvres au monde. En effet, dans le

23SKYNEWS AL-?ARABIYYA, Deux tiers des jeunes somaliens veulent émigrer, publié le 01/10/2012, en ligne : http://www.skynewsarabia.com/web/article/48122/, consulté le 12/11/2016.

24 WORLD FOOD PROGRAMME, 10 facts about hunger in Somalia, 10 faits sur la famine en Somalie, publié le 11 juin 2015, en ligne : http://www.wfp.org/stories/10-facts-about-hunger-somalia, consulté le 15/12/2017.

25 AL-`ARAB, En Somalie, la génération de l'espoir résiste à l'émigration clandestine en se souvenant des voyages de la mort, publié le 12/06/2015, en ligne : http://www.alarab.co.uk/?id=54521, consulté le 05/12/2017

22

rapport sur le développement humain de 2010, la Somalie est classée 165émesur 170 des pays les plus pauvres. La jeunesse somalienne qui représente 73%de l'ensemble de la Somalie souffre du chômage qui a le taux le plus élevé dans le monde. ».

Une analyse d'al-Jazeera montrait aussi que la cause derrière l'émigration est le chômage. Contrairement aux articles précédents, al-Jazeera a cité deux causes de l'émigration en commençant par la guerre puis le chômage. Elle a donc souligné qu'il faut reconnaître que la cause principale est la guerre civile qui a ensuite conduit à d'autres facteurs tels que le chômage et l'émigration, et selon MAJIDI Nassim: « La plupart des Somaliens recherchent d'abord la sécurité et des opportunités dans leur pays mais les répercussions de la guerre, l'incertitude et les conflits se traduisent par une économie faible et l'incapacité des familles à subvenir aux besoins de leurs familles. Pour surmonter ces problèmes financiers, le seul choix restant est la migration clandestine à destination de l'Europe 26». Toutefois, al-Jazeera estime que la guerre plus que d'autres problèmes internes est le facteur principal poussant les Somaliens vers l'émigration clandestine :

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«Parmi les raisons qui poussent les jeunes somaliens vers l'émigration illégale, les problèmes de la guerre et du chômage dont souffrent les jeunes qu'ils soient qualifiés ou non ... c'est cela qui pousse les jeunes vers l'émigration fuyant ces catastrophes et cherchant un endroit sûr et meilleur à vivre. ».

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26 Nassim MAJIDI, op. cit., consulté le 25/02/2018.

27 NOUR ASKAR abdifatah, L'émigration clandestine et les difficultés des Somaliens, publié le 02/04/2012, en ligne : http://www.aljazeera.net/home/print/f6451603-4dff-4ca1-9c10-122741d17432/b6f09ff9-a93a-4f45-b9ac-e0b1a8f0d41e, consulté le 07/11/2017.

« À cause des problèmes créés par l'absence d'un gouvernement somalien qui pourrait prendre en charge la situation des citoyens, les Somaliens souffrent du problème de l'émigration clandestine ce qui les obligent à fuir vers d'autres pays laissant les guerres civiles, le chômage et la pauvreté. ».

Dans un autre article, le journal d'al-Jazeera suggère encore la question du chômage ainsi que la pauvreté en Somalie comme facteurs à l'émigration. Ce dernier article estime le taux de chômage dans ce pays a environ 75 %, quant à ceux qui sont en dessous du seuil de pauvreté le taux de chômage atteint 80 % de la population. En outre, le revenu moyen est de 2 dollars par jour.

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« Le taux de chômage en Somalie est estimé à 75% alors que le taux de pauvreté est à 80%, le revenu par personne est d'environ 2 dollars par jour et la principale source de revenus provient du transfert de fonds par les diasporas somaliennes qui sont estimés à près d'un million et deux cent mille personnes. Le gouvernement a lancé plusieurs initiatives en créant des emplois pour les jeunes et en encourageant les petites entreprises et les secteurs de l'agriculture et de l'élevage. Pour diminuer la pauvreté, les associations civiles ont lancé une série d'initiatives pour créer des emplois et former les jeunes à certains métiers. ».

Il est évident que l'Europe qui est un continent développé attire l'attention de beaucoup de personnes issues des pays pauvres. Pour cela, plusieurs Somaliens majoritairement des jeunes effectuent de longs voyages périlleux depuis la Somalie pour atteindre l'Europe et pour réaliser et obtenir ce qu'ils n'ont pas pu avoir dans leur pays : « Les Somaliens figurent toujours parmi les dix nationalités que l'on retrouve le plus fréquemment

28 Ibid.

29AL-JAZEERA, Les conditions économiques en Somalie après des années d'absence du

gouvernement, publié le 30/07/2016, en
ligne : http://www.aljazeera.net/programs/economyandpeople/2016/7/30/%D8%A7%D9%84%D8%A3%D9%88%D8%B6%D8%A7%D8 %B9-, consulté le 04/01/2018.

24

chez les demandeurs d'asile enregistrés en Union européenne (UE). Et de nombreux Somaliens arrivant en UE sont jeunes, c'est-à-dire des hommes âgés entre 15 et 24 ans 30. ». Ces jeunes aimeraient premièrement trouver du travail pour aider leurs proches, et deuxièmement, ils voudraient réaliser leurs propres projets qui leur permettront d'avoir un avenir, une famille et enfin contribuer à la société. Étant donné que ces aspirations ne sont pas réalisables en Somalie, l'émigration clandestine devient alors l'unique solution:

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« Le chômage est l'huile qui va attiser le feu de l'émigration clandestine, [...] en Somalie, le taux de chômage varie entre 60% et 70% selon des statistiques non officielles. Les jeunes avec des ambitions pour construire un avenir meilleur pour leur vie et la vie de leurs familles, poursuivent les études durant des années en assumant toutes les difficultés et les obstacles, mais après l'obtention du diplôme, ils se confrontent à la réalité en ne trouvant pas de travail ce qui découragent leurs espoirs. Ils se trouvent donc chômeurs, vivant dans la pauvreté et ne pouvant subvenir ni à leurs besoins ni à ceux de leurs familles, ils vont donc favoriser le bavardage dans les cafés, les lieux de rencontre, et à cet instant vient en eux l'idée de l'émigration au prix de leur vie. ».

Les causes de l'émigration sont très diverses, mais pour le Mogadishu Centre, centre de recherche scientifique en Somalie, il soulève que plusieurs autres facteurs sont la cause du départ des jeunes. Parmi les points soulevés, la corruption et le népotisme, qui découragent les jeunes. C'est la raison pour laquelle la Somalie a été en tête de liste des pays

30 MAJIDI Nassim, op. cit., consulté le 25/02/2018.

31WALI SHARIF ahmed, Qu'est-ce qui pousse la jeunesse somalienne à l'émigration clandestine ?,

publié le 27/04/2016, en ligne : http://mogadishucenter.com/2016/04/%D9%85%D8%A7-

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%D8%A7%D9%84%D9%87%D8%AC%D8%B1/, consulté le 15/01/2018.

25

les plus corrompus dans le monde selon un rapport publié par le Transparency International. Le deuxième point soulevé par ce centre de recherche est l'illusion de l'Europe, ces jeunes aperçoivent l'Europe comme un paradis, autrement dit, ils pensent que le continent européen est une terre paradisiaque. Cette illusion est présente dans l'esprit de beaucoup de jeunes les encourageant par la suite à l'émigration clandestine vers le continent convoité. Selon eux, l'Europe est la terre de la justice, de l'égalité où ils pourraient trouver un travail digne, une éducation de qualité...etc. néanmoins, les points de vue des jeunes et des intellectuels somaliens sur les raisons de l'émigration clandestine sont différents. En effet, selon le politologue somalien ABDI-LIBA Ali Osman, les jeunes ayant fait des études supérieures sont plus susceptibles de quitter la Somalie puisqu'ils éprouvent de la fierté et nourrissent de grands espoirs. Pendant les deux premières années à l'université, ils sont intéressés par les études mais durant les deux dernières années d'étude leurs espoirs s'envolent car ils connaissent d'anciens étudiants sans emploi. Pour cette raison et pour éviter le chômage et la pauvreté ils se tournent vers l'émigration clandestine (IRIN, 2012). En outre, dans une communication publiée dans le journal somalien en langue arabe Somali Times, HUSSEIN Ahmad, Professeur de sociologie à l'Université de Mogadishu indique que les difficiles conditions du pays obligent les Somaliens à quitter la Somalie.

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« L'augmentation de la pauvreté, la détérioration des conditions économiques et la généralisation du chômage n'offrant pas d'opportunités de travail sont les principales raisons qui poussent les jeunes vers l'émigration clandestine pour atteindre les pays européens. Cependant et malheureusement ils se jettent dans la mort. ».

Par conséquent, tant qu'il y aura une guerre il y aura forcément du chômage qui va pousser les individus vers l'émigration clandestine. Au terme de cette étude et après

32SOMALI TIMES, L'émigration clandestine conduit nos jeunes vers les griffes de la mort, publié le 20/04/2016, en ligne : http://www.somalitimes.net/2016/04/20/%D8%A7%D9%84%D9%87%D8%AC%D8%B1%D8%A9-

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%D8%A8%D8%B1%D8%A7/, consulté le 13/12/2017.

26

avoir étudié les différentes analyses des articles arabes, on s'aperçoit que l'origine du problème de l'émigration clandestine chez les Somaliens reste la guerre civile qui a engendré d'autres facteurs tels que le chômage, la pauvreté, l'insécurité ...etc., et en guise de conclusion à cette partie, ce phénomène peut être résumé ainsi :

La guerre civile

Le chômage

La pauvreté

L'emigration cladestine

La majorité des jeunes migrants somaliens dont les universitaires qui quittent le pays supposent que l'émigration vers l'Europe est une solution indispensable pour qu'ils puissent changer leur vie et celle de leur famille, ils pensent en effet que leurs diplômes seront plus reconnus ailleurs et que le pays d'accueil leur offrira la vie dont ils rêvent. Ainsi, bien que la distance entre la Somalie et le continent européen se compte par des milliers de kilomètres, ce trajet représente pour beaucoup d'émigrés clandestins somaliens une solution garantissant un meilleur avenir et ce même si leur vie est mise en danger.

« Le chômage alimente l'immigration clandestine, même si le trajet comporte des risques inhérents tels que les mauvais traitements, les dettes, la déportation et l'emprisonnement. Le taux de chômage élevé en est considéré comme l'un des facteurs principaux qui pousse les jeunes à se tourner vers l'immigration clandestine33», ce qui est important à savoir c'est que malgré les difficultés auxquelles ils font face durant le voyage, l'idée de vivre une meilleure vie dans un pays sûr et valorisant leur potentiel reste présent.

33 IRIN, Augmentation de l'émigration clandestine au Somaliland, publié le 12 décembre 2012, en ligne : http://www.irinnews.org/fr/report/96964/somalie-augmentation-de-l%E2%80%99%C3%A9migration-clandestine-au-somaliland, consulté le 25/09/2017.

27

C. Le groupe al-gabâb

Le groupe al-abâbfait partiedes raisons qui poussent les jeunes à l'émigration clandestine. ?arakatal-abâbal-mugâhidîn mouvements des jeunes combattants est un groupe gihadistené en Somalie en 2007 après l'invasion de l'armée éthiopienne pour chasser l'union des tribunaux islamiques. Le groupe est précisément connu sous le nom al-abâb, la jeunesse en français. D'après al-Jazeera, al-abâba plusieurs noms :

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« Al-abâbest une faction armée somalienne possédant plusieurs noms tels que: le mouvement des jeunes somaliens, la jeunesse, les mugâhidûn, le mouvement des al-mugâhidîn, le mouvement de la jeunesse islamique, le mouvement des jeunes mugâhidîn et la jeunesse gihadiste. Le groupe a rompu avec l'union des tribunaux islamiques, a annoncé sa volonté de créer un État islamique, et a lancé une guerre contre le gouvernement somalien et ses alliés au sein du pays et à l'étranger. ».

Comme l'a expliqué le chercheur ROLAND Marchal35 dans son étude de 2011, la création de ce mouvement avait pour but, et tout en usant du discours religieux, de recruter des membres jeunes, d'où le nom al-abâb. Aussi, l'état de guerre dans lequel s'enlise le pays et la présence des forces étrangères sur le sol somalien a facilité le recrutement des jeunes (Léa Baron, 2017). A l'instar des autres groupes gihadistes, al-abâb et pour promouvoir ses idéologies utilise des actes de violences, des attentats suicides, et des enlèvements, en effet, ils ont pris les armes pour imposer le Gihâd et ont d'ailleurs rejoint al-Qâ?ida.

En 2007, l'Union Africaine a déployé des forces en Somalie pour aider le gouvernement somalien fragilisé dans le combat contre al-abâb. Les pays ayant contribués à cette aide sont Burundi, Djibouti, Éthiopie, Kenya, Ouganda, Sierra-léon,et avec le soutien des forces africaines, l'armée somalienne fait sortir le groupe de ses territoires .Pour se venger de ces pays, dans un double attentat al-abâb ont tué 75 personnes et blessés 65 autres dans la

34AL-JAZEERA, Le mouvemental-abâb al-mugâhidîn, publiéle 03/04/2015,en

ligne : http://www.aljazeera.net/encyclopedia/movementsandparties/2015/4/3/%D8%AD%D8%B1%D9%83%D8%A9-%D8%A7%D9%84%D8%B4%D8%A8%D8%A7%D8%A8-

%D8%A7%D9%84%D8%B5%D9%88%D9%85%D8%A7%D9%84%D9%8A%D8%A9 , consulté le 20/03/2018.

35ROLAND Marchal est chargé de recherche au CNRS, ses recherches portent sur l'économie et les conflits dans l'Afrique sub-saharienne, https://www.franceculture.fr/personne-roland-marchal.html , consulté le 21/03/2018.

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capitale ougandaise en juillet 2010. D'après la radio française internationale36, deux bombes ont été placées dans deux restaurants de la capitale ougandaise lorsque de nombreuses personnes assistaient à la retransmission de la finale de la coupe du monde de football.

Comme Djibouti abrite beaucoup de bases militaires de certains pays occidentaux, al-Ðabâb y ont mené un attentat meurtrier en mai 2014 visant un restaurant fréquenté par les occidentaux présents sur le sol djiboutien. Cet attentat a tué trois personnes et blessé quinze autres. Au Kenya, le groupe a effectué plusieurs attaques mais les plus meurtrières étaient cellesde 2013 et 2015. En septembre 2013, le groupe a mené une attaque contre Westgate Mall, un centre commercial à la capitale kenyane Nairobi, fréquenté par les riches kenyans et les étrangers. Dans cette attaque 39 personnes ont été tuées et150 autres blessées. La deuxième attaque la plus meurtrière fut en avril 2015 et avait eue lieu à l'université de Garissa située dans une ville kenyane près de la Somalie, dans cette attaque149personnes parmi lesquelles des étudiants, professeurs et le personnel de l'université ont été tuées et blessées.

En ce qui concerne la Somalie, le groupe a effectué plusieurs attaques meurtrières, d'après une étude réalisée par le journal Vice News, entre 2006 et 2015 les attaques terroristes sont passées d'environ cent par an. Depuis sa création en 2006, al-abâba mené plus de 350 attaques en Somalie et ont tué4281 personnes seulement en 2016 (Alexa Liautaud, juin, 2017).

Le 13 octobre 2017, un camion piégé a été utilisé par al-Ðabâb et s'est explosé devant un carrefour fréquenté par les Somaliens. Selon al-Jazeera, cette explosion a causé la mort de 300 personnes et a blessé 200autres. Cet attentat fut l'un des attentats le plus meurtrier dans le pays et en hommage aux victimes, la maire de Paris Anne Hidalgo a annoncé le soir de l'attentat sur Twitter que la Tour Eiffel sera éteinte en hommage à ces victimes37.

36RFI, Somalie : des militaires américains pour aider à combattre les shebabs, publié le 15/04/2017,en ligne : http://www.rfi.fr/afrique/20170415-somalie-militaires-americains-combattre-shebabs, consulté le 24/03/2018.

37 LE PARISIEN, La Tour Eiffel éteinte en hommage aux victimes de l'attentat de Mogadiscio, publié le 16 octobre 2017, en ligne : https://www.theguardian.com/global-development/2016/sep/19/raped-imprisoned-beat en-migrants-reveal-perilous-journeys-europe-united-nations-general-assembly, consulté le 15/01/2018.

29

Après cette brève présentation de ce mouvement gihadiste et des actions entreprises pour faire entendre leur voix, nous allons mettre en évidence la raison qui fait que ce groupe soit l'une des causes de l'émigration des jeunes somaliens.

Les jeunes fuient la Somalie par peur d'être recruté par le groupe pour combattre dans leur rang. Al-abâb impose un recrutement forcé chez les jeunes pour combattre contre les forces africaines et les armées somaliennes. Comme on l'a déjà signalé, le nom du groupe est un nom tiré du terme arabe « ÈÇÈÔáÇ » qui signifie en français la jeunesse. Nous constatons que le choix de ce nom n'est pas anodin mais souligne plutôt la volonté d'attirer les jeunes pour faire partie du mouvement. Pour ce faire, le groupe n'hésite pas à mettre la pression sur les parents de l'adolescent et estime comme ennemi tous ceux qui n'acceptent pas leur idéologie, aussi, ils n'hésitent pas à menacer de mort les parents qui refusent de donner leurs enfants, enfin, après l'enrôlement et l'entrainement, al-abâb exploitent ces jeunes dans les attentats kamikazes effectués contre les civils et l'armée :« Le groupe islamiste armé al-Ðabâba menacé et enlevé des civils pour obliger les communautés à lui remettre leurs enfants pour les enrôler dans la milice affiliée à Al-Qaïda. Des centaines des jeunes ont dû quitter leur domicile pour échapper à ce recrutement forcé38. ».

D'après le témoignage de Kassim, un jeune somalien qui a fui la Somalie pour éviter d'être enrôlé dans le groupe al-abâb. Il s'est échappé au Kenya et bien qu'il y existe une grande communauté somalienne, il estime qu'il n'était pas en sécurité à cause d'al-abâb. Pour arriver en Europe, il a traversé le Kenya, le Soudan et la Libye, et après avoir voyagé dans le désert durant trois jours, il s'embarqua avec cinquante-neuf personnes à bord d'un bateau pour traverser la Méditerranée. Ils sont restés en mer pendant deux jours avant qu'un navire ne vienne à leur sauvetage. Arrivé à Lampedusa et étant à présent loin d'al-abâb, Kassim affirme qu'il est heureux d'être en Europe, «Votre vie est en sécurité, votre

38 APRNEWS, Al-Shabab veut enrôler les enfants, publié le 15 janvier 2018, en ligne : https://apr-news.fr/fr/actualites/somalie-al-shabab-veut-enroler-les-enfants, consulté le 14/04/2018.

38 THE GUARDIAN, Raped, imprisoned, beaten: migrants reveal their perilous journeys to Europe, Violés, emprisonnés, battus: les migrants révèlent leurs périples périlleux en Europe, publié le 19 September 2016, enligne : https://www.theguardian.com/global-development/2016/sep/19/raped-imprisoned-beaten-migrants-reveal-perilous-journeys-europe-united-nations-general-assembly , consulté le 01/09/2017.

30

santé est en sécurité39» dit-il. Comme Kassim, beaucoup de jeunes somaliens prennent le chemin de l'émigration clandestine pour s'échapper à al-abâb.

D. Le rôle des réseaux sociaux dans l'émigration clandestine somalienne

Les médias et les réseaux sociaux en particulier sont considérés comme l'autre raison derrière l'émigration clandestine. L'importance de la télécommunication nous mène à étudier le rôle des réseaux sociaux dans l'émigration clandestine chez les jeunes.

Dans son rapport annuel, MYRIA une journaliste du VIF affirme que le développement de l'Internet et des médias sociaux facilite la traite et le trafic des êtres humains40.Bien que la Somalie soit déchirée par la guerre civile, le pays reste considérablement développé dans le domaine de la télécommunication, en effet, la Somalie est classée au 8ème rang pour le nombre de lignes téléphoniques sur un total de 54Etats africains, elle a le 16ème rang pour la téléphonie mobile, la11ème place pour la connexion à internet et 27ème pour les postes de télévision (CHARMARKEH, 2013, p44).

Ce développement au niveau des télécommunications permet aux jeunes somaliens d'accéder aux informations du monde entier. En effet, « Dans un pays stable comme le Kenya, il faut attendre plusieurs années pour l'installation d'une ligne téléphonique alors cela pourrait prendre seulement trois jours en Somalie. En effet, quatre compagnies de télécommunications opèrent en Somalie, dont trois dans le Sud, Telcom, Nationlink, Hormuud et Somtel. Ces compagnies de télécommunications profitant de l'absence de payement d'impôts à l'État offrent l'accès à internet, la téléphonie mobile et téléphone à domicile à des prix défiant toute concurrence. Cela a permis la création de cybercafés dans tous les quartiers permettant ainsi l'accès à la population somalienne aux technologies».

Avant tout propos, la population somalienne vit dans une véritable révolution technologique depuis l'émergence des compagnies privées de télécommunications qui ont changé le mode de vie des Somaliens en fournissant des services de communication de toutes sortes. Il est surprenant de savoir que dans un pays comme la Somalie ravagé par les guerres et sans infrastructures depuis

39 THE GUARDIAN, Op. cit., consulté le 01/09/2017.

40 GATHON Myria, Migration : le trafic d'êtres humains facilité par les réseaux sociaux, publié le 16 octobre 2017, en ligne http://www.levif.be/actualite/belgique/migration-le-trafic-d-etres-humains-facilite-par-les-reseaux-sociaux/article-normal-739431.html , consulté le 21/01/2018.

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l'effondrement du gouvernement central en 1991, ces services soient plus développés que dans des pays stables comme le Kenya. Comme nous l'avons déjà expliqué, milliers de somaliens ont émigré à cause de la guerre civile, ce qui a permis à la télécommunication et aux médias de se développer puisqu'ils vont permettre aux immigrés de communiquer avec leurs proches. Ainsi, on remarque que dans chaque quartier se trouvent des cybercafés privés, les personnes s'y rendant sont celles n'ayant pas les moyens financiers pour avoir Internet à domicile, ou celles ne maitrisant pas assez l'utilisation de l'Internet et des réseaux sociaux pour en avoir à domicile comme les parents des immigrés, et selon CHARMARKEH Houssein« C'est surtout les parents qui, davantage moins compétents que les jeunes en informatique se déplacent dans les cybercafés en Somalie pour voir et entendre la voix et les images de leurs enfants. Ce sont souvent les employés des cybercafés ou leurs plus jeunes enfants qui les aident à établir la communication par vidéoconférence41. ».

Par la nouvelle technologie le monde est devenu un petit village, facilitant ainsi la prise de contact avec de nouvelles personnes et la communication avec les proches. En somalie, les jeunes utilisent quotidiennement les réseaux sociaux à l'aide d'ordinateurs et des derniers modèles de Smartphones et tablettes...etc. :

Travail personnelle42:

41CHARMARKEH Houssein. Op., cit., p. 43.

42 Travail personnel, après avoir étudié le rôle des réseaux sociaux sur l'émigration somalienne, nous avons appris que les jeunes utilisaient ces outils de communication pour se renseigner sur les itinéraires et les étapes à suivre.

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Ces réseaux de communication sont les plus populaires et les plus utilisées par les jeunes ainsi que tous les prétendants à l'émigration clandestine. En effet, grâce à la croissance et à la progression des réseaux de télécommunications dans le pays, presque la majorité des jeunes somaliens citadins possèdent aujourd'hui au moins un compte dans l'un des réseaux sociaux cités au-dessus. Et comme l'explique CHARMARKEH Houssein « Le média social Face book est parmi les outils favoris des somaliens. Cette plateforme a pour but de rechercher les amis d'enfance et ceux qui ont rejoint l'Europe43 ». Parmi toutes les plateformes mentionnées sur le diagramme, le réseau social Face book est le préféré des jeunes somaliens puisqu'il leur permet de communiquer avec leurs amis, leurs proches à l'étranger. Messenger lui vient en deuxième position au niveau d'usage, et toujours selon CHARMARKEH Houssein44, Messenger est aussi utilisé pour recevoir de la part de leurs amis des informations concernant les étapes de l'émigration, les itinéraires, comme il permet de planifier en avance le voyage et de s'adapter aux futurs obstacles. Les Somaliens se servent également de cet outil pour s'informer sur les pays européens acceptant la demande d'asile des réfugiés en provenance de la Somalie, et des différentes options qui s'offrent à eux une fois arrivés en Europe. Cette recherche constante d'informations sur la politique d'asile européenne continue jusqu'à l'arrivée en Europe et même après avoir été débouté de sa demande d'asile (charmarkeh, 2013).

Dans cette optique, l'utilisation d'Internet est l'un des facteurs de motivation à l'émigration clandestine, puisque certains immigrés arrivés en Europe communiquent avec les futurs émigrés à travers les réseaux sociaux en leur envoyant de belles photos séduisantes. Et même si la vie espérée en Europe n'est pas atteinte en raison des difficultés qu'ils rencontrent dans le nouvel environnement, ils encouragent leurs pairs, amis et membres de la famille à venir en Europe, en effet :

« Face à la difficile réalité de l'exil, nombreux sont ceux qui se retrouvent confrontés à l'échec après avoir réussi le saut migratoire. Cet échec demande de faire le deuil du rêve, ce qui n'est pas facile et constitue parfois à ce stade une stratégie inacceptable. Plusieurs alternatives s'ouvrent alors. Certains alimentent le rêve en créant l'illusion de la réussite auprès de leurs proches restés au pays. Même si les informations

43CHARMARKEH Houssein, Op., cit., p. 42. 44CHARMARKEH Houssein, Op., cit., p. 43.

33

sur la misère vécue dans le pays d'accueil sont souvent connues de tous les réseaux somaliens, on pourra toujours faire semblant d'y croire45. ».

Enfin, cette illusion créée de la part des immigrés européens porte un message indirect aux jeunes encore en Somalie et les incite à prendre ce chemin dangereux. Selon une

étude faite par le centre de recherche Mogadishu,Center for Research and Studies, beaucoup de jeunes somaliens utilisent les réseaux sociaux :

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« Les jeunes somaliens passent beaucoup de temps à utiliser les réseaux sociaux, en particulier Face book, bien qu'Internet soit arrivée en Somalie tardivement, beaucoup d'entre eux sont devenus obsédés par cet outil, il joue maintenant un rôle majeur dans le changement du mode de vie des Somaliens et dans la reconstitution de la relation qui lie ces jeunes avec le monde extérieur. ».

figure3 : des jeunes somaliens utilisent internet en cybercafé.

Sur cette photo, on remarque que les utilisateurs sont des jeunes, femmes et hommes utilisent les réseaux sociaux et tous deux sont ou deviennent prétendants à l'émigration clandestine. Comme on l'a expliqué dans la partie précédente sur le taux de chômage en Somalie, le chômage ayant un fort taux et touchant même les jeunes diplômés les mènent vers

45ROUSSEAU Cécile, TAHER M. Said, GAGNE Marie-Josée, BIBEAU Gilles, Rêver ensemble le départ. Construction du mythe chez les jeunes Somaliens réfugiés, dans Autre part 2 (2001), 58 pages. 46 OSMAN NAHIF abdallah, L'obsession de nos jeunes pour Facebook, 08/01/2017, en ligne, http://mogadishucenter.com/2017/01/36113/ , consulté le 20/01/2018.

34

une vie d'oisiveté qui par la suite les rendent dépendants aux réseaux sociaux et à la volonté d'émigrer vers les pays européens.

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« De jeunes chômeurs sans rien à faire [...] pour cela, leur unique objectif est devenu celui de prendre des photos et de les publier sur les pages des réseaux sociaux, celui de devenir dépendant aux conversations dans des salles fictives sur ces réseaux. Le nombre de Somaliens dans les réseaux sociaux a dépassé 310 mille utilisateurs. ».

Du point de vue social, la majorité des Somaliens utilisent Internet mais lorsqu'on évoque la question sur la relation entre l'émigration clandestine et les réseaux sociaux on s'aperçoit que c'est grâce aux réseaux sociaux que ces jeunes peuvent se renseigner et prendre contact avec les passeurs.

En ce qui concerne l'usage des réseaux sociaux de la part des trafiquants d'êtres humains et des passeurs, ils les utilisent pour recruter les nouveaux émigrés et leur proposer les informations utiles pour le voyage et la traversée. Dans certains cas, ils essayent de convaincre les jeunes désespérés qui ne sont pas encore partis en leur présentant un discours valorisant l'Europe et l'immigration, en effet, « les réseaux sociaux permettent d'atteindre un nombre plus grand de candidats au départ. Les médias sociaux ont été de plus en plus utilisés au cours des dernières années par les trafiquants et les migrants. Leur utilisation a eu un impact significatif sur les migrations irrégulières. Elle aide les migrants à se rassembler, produisant une dynamique plus forte aux frontières extérieures et accroît la capacité des passeurs à modifier les voies migratoires face aux mesures de sécurité ou aux forces de l'ordre48. ».

Le 14 mai 2015, le centre des recherches scientifiques et politiques « al-Jazeera Centre for Studies » pour la chaine satellitaire Qatari al-Jazeera a publié que les

47AL SOMALI AL JADID, Les réseaux sociaux et leur influence sur la société, publié le 25/12/2017, en ligne : http://alsomal.net/%D9%85%D9%88%D8%A7%D9%82%D8%B9-%D8%A7, consulté le 23/01/2018.

48SPUTNIk, Quand les réseaux sociaux favorisent le trafic de migrants, publié le 22/12/2016, en ligne : https://fr.sputniknews.com/points_de_vue/201612221029306262-reseaux-sociaux-migrants/ , consulté le 15/02/2018.

35

publicités pour l'émigration clandestine sont de plus en plus diffusées sur les réseaux sociaux :

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« La publicité sur l'émigration clandestine se fait principalement à travers les réseaux sociaux tels que Face book et Twitter. L'Union européenne a pu fermer plus de 50 sites publicitaires de l'émigration clandestine. ».

Selon le Arezzo Malakooti50, il existe des pages Face book promouvant avec des promotions et des packages les tarifs des voyages, les lieux de départ et d'arrivée : « En payant plus cher vous pouvez avoir un voyage plus sûr, avec un gilet de sauvetage ou une place sur le pont supérieur. ». En effet, les trafiquants d'êtres humains publient sur leurs sites des annonces publicitaires pour attirer l'attention des jeunes et pour embellir leurs actions et animer en eux l'envie de départ, ils publient d'illusoires promesses sur le voyage, les photos des villes européennes, tout cela pour attirer l'attention des clients.

«.

51ãÇí ÉÚÖÈ ìæÓ ÞÑÛÊÓÊ áÇ ÉÍíÑãæ Éäã ÊáÇÍÑ Ç íå »

« Des voyages sûrs et confortables qui ne durent que quelques jours ».

« Les passeurs étaient traditionnellement des locaux avec certaines compétences ou certains contacts qui agissaient seuls (...) mais récemment on a constaté que ces activités sont

49 DR. ALSHEIKH AL-ALAWI Al-housein, L'émigration clandestine à travers la Lybie, la

souffrance humaine tarifée, publié le 14 mai 2017, en ligne :
http://studies.aljazeera.net/ar/reports/2015/05/2015511105445305355.html, consulté le 30/01/2018. 50Un agent de l'Office international des migrations (OIM).

51 FRANCE 24 , L'émigration clandestine, quelle est l'authenticité des promesses faites aux émigrés

par les passeurs ?, publié le 27/03/2017, en ligne, http://observers.france24.com/ar/20170327-

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%D9%81%D9%8A%D8%AF%D9%8A%D9%88, consulté le 24/01/2018.

36

devenues plus sophistiquées et sont de plus en plus le fait de réseaux professionnels52 », en effet, et avec les nouvelle technologies, les passeurs n'ont plus besoin de sortir pour chercher les prétendants à l'émigration, tout se passe sur Internet, une fois une annonce comme celle au-dessus publiée, elle ne tarde pour atteindre sa cible, ce qui montre que les réseaux sociaux ont facilité la méthode d'échange et de recrutements. Enfin, quoi qu'il en soit, les réseaux sociaux font partie des causes permettant l'émigration clandestine chez les jeunes Somaliens.

52 OUEST FRANCE, Migrants. Passeurs de clandestins : des réseaux mafieux très puissants, le 12/05/2015, en ligne : https://www.ouest-france.fr/monde/passeurs-de-clandestins-des-reseaux-mafieux-tres-puissants-3395627 , consulté le 25/01/2018.

:

37

Chapitre II

Les conséquences de l'émigration clandestine

somalienne vers l'Europe à travers la presse

arabe et étrangère

38

A. La souffrance des émigrés dans le désert, dans les pays de transit et en Méditerranée

Le nombre exact d'émigrés somaliens qui meurent durant le voyage vers l'Europe est inconnu mais depuis l'apparition du phénomène d'émigration les mortalités ne cessent d'augmenter année après année. Les émigrés somaliens et durant ce périple font face à deux épreuves, d'une part le désert entre la frontière Soudano-libyenne et d'autre part, la mer Méditerranéenne. Concernant le désert et pour se rendre en Lybie, il est traversé par la majorité des émigrés somaliens qui se rendent au Soudan depuis l'Éthiopie. Durant le périple, beaucoup de ces émigrés perdent la vie et ceux qui réussissent à le traverser et arrivent en Lybie, se préparent encore à embarquer vers l'Europe à bord de bateaux Zodiac surchargés. Dans cette partie, nous allons analyser comment la presse arabophone, francophone et anglophone décrit la situation des émigrés somaliens qui perdent la vie ou disparaissent durant la traversée du désert et celle de la Méditerranée.

Il faut tout d'abord rappeler que le désert entre le Soudan et Libye est un enfer pour les émigrés clandestins, en effet, « pour les migrants, la Libye est un paradoxe. C'est la destination principale de leur voyage souvent mortel dans le Sahara. C'est aussi le point de départ principal pour embarquer vers l'Europe à travers la Méditerranée. Tous les témoignages recueillis par VOA Afrique montrent que la Libye constitue la partie la plus sombre de leur voyage. C'est aussi là ou leur destin peut basculer53. ».

Aussi, les passeurs et hormis leur attitude inhumaine envers les émigrés, utilisent plusieurs moyens de transports lors de cette traversée, on trouve l'utilisation de Pick-up ou de camions dans lesquels les émigrés sont entassés dans d'effroyables conditions et desquels ils peuvent tomber à tout moment sans être secourus par les passeurs. Ils se retrouvent donc abandonnés dans le désert sans eau ni nourriture. Ces informations ont été relayées par une émigrée somalienne RASHID Khadra qui a affirmé à la radio américaine Voice Of America, VOA:

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53VOA, Le cauchemar des migrants africains vers l'Europe, publié en février 2017, en ligne : https://projects.voanews.com/adrift-african-diaspora/french/, consulté le 22/12/2017.

39

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« Khadra RASHID est l'une des survivantes de l'horrible incident : « Nous étions à bord d'une voiture avec 124 personnes, une grande quantité de ciment était placée au-dessus de nous et arrivés prés de Tripoli, les sacs de ciment sont tombés sur nous. Nous avions demandé l'aide du conducteur mais il ne s'était pas arrêté par peur de la police. Puis une autre quantité de sac nous est tombée dessus. » Khadra RASHIDa rapporté que le conducteur arrêt a finalement le véhicule en découvrant plusieurs blessés et les corps inanimés d'une vingtaine de personnes. Ces personnes ont été transférées dans un hôpital à Tripoli et les survivants de l'incident en prison. Notons que ces personnes sont venues de la Somalie et tous voulaient se rendre en Europe par la Méditerranéenne. Cet incident n'est pas le premier qui fait perdre la vie à plusieurs Somaliens mais il est le premier dans son genre puisque jusqu'à cet incident les Somaliens mouraient noyés dans la mer ou dans le désert. ».

Le 29 décembre 2012, le journal Somali al-Yawm a relayé cet incident et a communiqué la mort d'environ vingt de ces émigrés. La phrase tirée du VOA« une grande quantité de ciment était placée au-dessus de nous »montre que les trafiquants d'êtres humains se soucient uniquement de leurs intérêts matériels et financiers et manquent d'humanité et d'empathie. Aussi, pour exprimer la mort de ces émigrés, l'auteur a utilisé des synonymes différents en remplaçant un terme par un autre ou par une expression complète. Ainsi, on remarque l'emploie du substantif « wafât », « la mort » dans la première phrase, puis du verbe « mâta », « mourir » à la fois conjugué au passé « mâtû », « ils sont morts » et au présent« yamutûna »,« ils meurent ». Enfin, il a remplacé tous ces termes par l'euphémisme « ya?habu?a?iyataha» qui possède le même sens que le verbe mourir mais dont la valeur significative est atténuée, aussi cette expression est une périphrase, une figure de style utilisée par l'auteur pour éviter la répétition du même terme, ce qui montre aussi la richesse de la langue arabe.

Le 2 avril 2012, la presse al-Jazzera a publié un article sur l'émigration somalienne. L'étude de cet article nous confirme que 95 % des émigrés clandestins de la Somalie sont des jeunes représentant l'avenir du pays. Ici nous allons comparer l'article de la presse Somali al-

54SOMALI TODAY, La mort d'une vingtaine de somaliens dans un étrange accident enLybie, publié le 29 /12/2012, enligne, : http://www.somaliatodaynews.com/port/2009-04-24-18-19-57/1-2009-03-27-03-56-22/3909-2012-12-29-07-51-39.html, consulté le 18/01/2018.

40

Yawmà celui d'al-Jazeera pour étudier leurs positions respectives, leurs divergences et similitudes :

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« Des sondages estiment la mort de centaines de migrants somaliens chaque année - dont 95% sont des jeunes - dans un voyage qui peut être décrit comme un suicide. Ils voyagent dans des camions traversant des centaines de kilomètres pour atteindre la Libye, puis vers l'Europe sur des bateaux gonflables qui ne résistent face aux vagues déchainées et à la violence du vent. Aussi, les Somaliens souffrent dans le désert de la Libye où ils meurent à cause de ce voyage périlleux qui commence dès la Somalie. ».

Dans cet extrait, on remarque que les jeunes représentent le plus grand pourcentage des Somaliens émigrant en Europe et en s'appuyant sur un sondage des Nations Unies, la presse al-Jazeera nous confirme que des centaines de Somaliens meurent chaque année à cause de l'émigration clandestine vers l'Europe. Le journal qualifie cette émigration d'acte suicidaire : «Fîri?laaqalamâtû?af bi annahainti?âriyya». Également, nous remarquons l'utilisation de deux expressions qui résument l'espace de souffrance des émigrés :

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Aussi, il est indispensable de noter que le journal a bien préservé l'ordre des espaces traversé par les émigrés, à savoir l'espace du Sahara jusqu'à l'arrivée en Libye. Al-Jazeera dénonce, d'une part, l'effroyable et pénible trajet en traversant des milliers de kilomètres pour atteindre la Libye et l'Europe à travers Méditerranée. De plus, le journal mentionne les types de transports pris par les émigrés, à savoir les camions, les embarcations gonflables...etc. D'autre part, pour souligner la souffrance des émigrés clandestins durant ce

55AL-JAZEERA, L'émigration clandestine, le souffrance des somaliens, publié le 2 avril 2012, en ligne : http://www.aljazeera.net/news/reportsandinterviews/2012/4/2/%D8%A7%D9%84%D9%87%D8%AC%D8%B1%D8%A9-%D8%BA%D9%8A%D8%B1-%D8%A7%D9%84%D8%B4%D8%B1%D8%B9%D9%8A%D8%A9-%D9%85%D8%B9%D8%A7%D9%86%D8%A7%D8%A9-%D8%A7%D9%84%D8%B5%D9%88%D9%85%D8%A7%D9%84%D9%8A%D9%8A%D9%86 , consulté le 07/01/2018.

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long voyage, l'article emploie le verbe « yu`ânîal-?ômâliyûn », « les somaliens souffrent », le verbe arabe « `âna » pourrait se mettre à l'aspect inaccompli ou à l'aspect accompli, cependant, l'accompli correspond à une action achevée et ce n'est pas le cas ici, le verbe «yu`ânûna» est alors un verbe inaccompli montrant que l'action est toujours en cours56. Le verbe«`ânâ » conjugué au présent « yu`ânûna »,« ils souffrent » signale bien que l'action a débuté il y a longtemps, en effet, la souffrance de ces personnes est due à un phénomène présent, qui existe toujours. Enfin, on remarque que les deux articles évoquent les mêmes obstacles et souffrances des émigrés.

Beaucoup de ces personnes trouvent la mort dans le désert, la cause étant que les passeurs se chargeant d'eux les abandonnent sans provisions par crainte des patrouilles frontalières, acte qui oblige les émigrés à marcher à pied de longues distances à la recherche d'un abri ou d'une oasis jusqu'à ce qu'ils perdent la vie. Partant de là, une page Facebook libyenne « al-Algwâ » a publié qu'un émigré clandestin somalien a été retrouvé sans vie dans le Sahara, abandonnés par leur passeur en plein désert, son frère qui voyageait avec lui et qui a été secouru témoigne :

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« La mort d'un somalien dans le désert près de Sabha à cause de la soif.Un somalien voyageait avec des passeurs pour traverser la frontière libyenne est décédé dans le désert à cause de la soif après que les passeursl'aient abandonné lui et son frère. Selon le témoignage de son frère, le défunt a marché depuis la Somalie jusqu'à la Libye et n'a pas pu supporter la soif dansle désert [...]. La ville de Sabha connait la mort de plusieurs émigrés somaliens se dirigeant vers la Libye par le désert. ».

56L'ÉCOLE DES HIBOUX, La conjugaison et les verbes en arabe, en ligne, http://www.les-ziboux.rasama.org/conjugaison-verbes-arabe.html, consulté le 19/12/2017.

57AJWA, La mort d'un somalien dans le désert près de Sabha à cause de la soif, publié le 15 Mars 2015, en ligne : https://www.facebook.com/ajwanews/photos/a.391836070889900.93550.391790294227811/832198610186975/, consulté le 15/11/2017.

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Le journal britannique Telegraph, communique l'histoire de Fedussa, une jeune femme somalienne qui a voyagé clandestinement à travers le Soudan. La prochaine étape dans le voyage de Fedussa fut Tripoli, en Libye ou elle a été détenue dans une maison en plein désert pendant trois mois. En expliquant sa détention et sa souffrance, elle raconte qu'il y avait 412 hommes dans une pièce et 116 femmes dans une autre. Elle relate aussi les menaces faites par les passeurs : « on va vous enterrer comme des chiens 58», elle continue en évoquant l'insalubrité de la chambre dans laquelle elle était détenue et perd espoir d'être libérée en voyant une femme enceinte avec son bébé mourir de faim devant ses yeux. Enfin, elle affirme que lorsque les passeurs enterrent ces personnes au Sahara, ils ne se donnent même pas la peine de creuser une tombe, ils se servent de leurs mains ou de leurs assiettes pour creuser une tombe peu profonde dans laquelle ils jettent les corps.

GEELDOON Mohamed, ancien migrant somalien a évoqué dans son livre où il raconte son périple,

qu'après avoir voyagé pendant environ 18 jours à travers le désert, la voiture qui les transportait est tombée en panne et le téléphone satellitaire qui les guidait n'avait plus de charge. Leur voyage s'était donc transformé en cauchemar, les passeurs les avaient abandonnés en plein désert en leur indiquant un chemin à suivre et où ils reviendraient les chercher plus tard. Pensant que ces promesses étaient sincères ils ont marché en direction de ce lieu de rencontre où beaucoup d'entre eux ont perdu la vie, notamment des femmes et des hommes âgés :

« Il n'y avait presque rien à manger. [...] On piétinait depuis deux jours lorsqu'un vieil homme est mort. Je me souviens qu'il marchait très lentement et les gens l'attendaient [...]. Soudain, il s'accroupit et tomba par terre [...], il était mort. Il a été le premier à mourir. Chacun d'entre nous était furieux, certains pleuraient et d'autres pensaient que nous allons tous mourir. Nous avons ensuite commencé à l'enterrer. Trop épuisés, quatre d'entre nous seulement ont creusé et placé son corps dans la tombe, puis nous avons prié sur lui. Nous étions choqués, faibles et souffrants59.».

58 EIRINI LEMOS, How migrants are being raped, left for dead and 'buried like dogs' by people smugglers,Comment les migrants sont violés, laissés pour morts et «enterrés comme des chiens» par des passeurs,

publiéle 6 Aoùt 2015, enligne : http://www.telegraph.co.uk/news/worldnews/europe/11814241/How-migrants-are-being-raped-left-for-dead-and-buried-like-dogs-by-people-smugglers.html,consulté le 05/02/2018.

59GEELDOON Mohamed, We Kissed the Ground, A migrant's journey from Somaliland to the Mediterraneanp, Nous avons embrassé le sol, le voyage d'un migrant du Somaliland à la Méditerranée, rifty valley institute, 2006, London, 72 pages.

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Dans son roman Le Titanic africain, dans le même style que GEELDOON Mohamed, KAHAL Hamid, un écrivain érythréen a lui aussi abordé le sujet de la souffrance des émigrés clandestins durant ce voyage à travers le Sahara, en l'évoquant dans plusieurs termes dénotant la douleur physique et morale d'un voyage soldé par la mort :

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« On n'avait plus d'eau et on ne savait pas où on était. [...] Les bouches et les nez se sont transformés en des grottes habitées par la poussière. Les dernières gouttes d'eau qui traversèrent ma gorge étaient bues il y a deux jours. Jusqu'à présent, deux Érythréens et un Somalien sont morts. Le Somalien et l'un des Érythréens sont morts presque au même moment. ».

L'auteur de ce roman emploie des termes qui reflètent les difficultés des émigrés dans le désert, ainsi on remarque dans cet extrait que la phrase «Ta?awalat l-afwâhu-wal-unûf-ilâ-magârât-yaskunuhâ l-gubâr» est une kinâya, dérivé de la racine « K. N. Y. », il dénote généralement l'idée de : cacher, dissimuler, camoufler. Comme l'euphémisme, la kinâya consiste à ne pas dire, expressément, le sens voulu, mais un autre qui s'en résulte61. L'objectif de l'auteur est donc de dire que les émigrés souffraient à cause de la fatigue et du désert et pour souligner cela, il a employé à deux reprises le verbe«mâtâ» « ils sont morts », et la répétition de ce terme dévoile la douloureuse réalité de cette situation.

D'après Rahma ABUKAR ALI, une migrante somalienne qui a voyagé à travers le désert raconte à VOA Afrique comment elle a passé les cinq derniers mois de sa grossesse à parcourir le continent pour émigrer. Lors de l'interview, elle a affirmé que les émigrés enduraient beaucoup de souffrances dans le Sahara, certains buvaient leurs urines pour ne pas mourir de soif. Rahma ABUKAR ALI a rejoint la Lybie depuis la Somalie, exténuée par la chaleur brulante du Sahara, ses seuls moments de répit étaient les voyages en camion, entassée avec d'autres malheureux qui tentaient de fuir ce pays ravagé par la guerre. Rahma ABUKAR ALI embarque depuis la Libye sur un bateau de fortune en direction de l'Europe,

60 KAHAL Hamid Abu-Bakr, Le Titanic africain, ed. al-Sâqî,2008. 34 pages.

61 KHALFALLAH Nejmeddine, Kinâya Litote, euphémisme, Cours d'histoire de la tradition rhétorique donné en 2017 pour le master1 MECO arabe.

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ce voyage selon elle marquera un nouveau départ, soit la vie en Europe, soit la mort. Après avoir été secourue en mer, Rahma ABUKAR ALI accouchera d'une petite fille prénommée Sophia sur un bateau de la marine allemande au milieu de la Méditerranée62.

B. Le viol des femmes émigrées

Les personnes qui fuient le conflit, la persécution et la pauvreté dans leurs pays et partent vivre en Libye font face à des violations quotidiennes dont le viol, la torture et l'enlèvement. Les témoignages de certains Somaliens emprisonnés dans des centres de détentions sont nombreux, il existe, en effet, plusieurs rapports sur les violences sexuelles, les tortures contre les émigrés somaliens dans les pays de passage, en Libye surtout depuis la chute du régime de KADHAFI en 2011.

Il existe des évidences concrètes qui démontrent des mauvais traitements contre les émigrés en Libye et les Somaliens sont parmi ces personnes qui sont quotidiennement maltraitées par les trafiquants d'êtres humains. D'après le témoignage d'un émigré somalien rapporté par l'équipe de HCR et ses partenaires, cette personne a été embauchée temporairement dans le secteur de la construction dans la capitale libyenne et y a subi plusieurs agressions et discriminations raciales, quant à sa femme et ses filles, elles ont subi des abus sexuels : « J'ai été confronté à de nombreux problèmes : vol, mauvais traitement, discrimination, exploitation et tentative de viol sur ma femme et mes filles. ». Les journalistes de HCR racontent dans leur article que :

« Le sort désespéré de cette famille est malheureusement courant parmi un nombre croissant de réfugiés et de migrants qui fuient la guerre et les difficultés en Afrique pour rejoindre ce pays nord-africain. Parmi les arrivants en Libye, le pêcheur somalien a rejoint le Sud-ouest du pays depuis le Soudan avec un passeur, après une marche qui l'a mené à travers l'Éthiopie et Djibouti. Une fois dans la ville de Rebyana au milieu du désert, il a été détenu par des autorités inconnues pendant cinq jours. Dans sa quête désespérée de nourriture et d'un logement décent, il ne voit aucune autre alternative que de poursuivre son voyage vers l'Europe : « Je ne peux pas rentrer chez moi en raison de

62OSMAN Abdulaziz et PINAULT Nicolas, Le cauchemar des migrants africains vers l'Europe, publié en février 2016, en ligne : https://projects.voanews.com/adrift-african-diaspora/french/#part-3 , consulté le 11/04/2017.

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la guerre en Somalie et de l'absence du gouvernement depuis plus de deux décennies », a-t-il déclaré63. »».

Le trafic humain est devenu un business lucratif, nous allons donc dans cette partie dévoiler les conséquences de l'émigration clandestine somalienne. Nous allons et par la presse arabe et les journaux francophones et anglophones examiner les violences sexuelles subies par les femmes durant le trajet.

La majorité des jeunes ayant déclaré avoir subi de mauvais traitement sont été emprisonnés par des passeurs dès leur entrée en Libye, où ils ont été vendus à des bandes criminelles. En effet, de nombreux jeunes indiquent qu'ils ont été maltraités par ceux qui les détenaient en prison, certains ont été témoins de meurtres sur les émigrés et par les passeurs même, d'autres ont vu des personnes mourir à cause des mauvais traitements.

Ici nous allons procéder à une analyse approfondie des actes de violence contre les émigrés somaliens durant ce voyage vers l'Europe. La presse al-Jazeera évoque ce phénomène et nous présente la situation de ces personnes à travers le témoignage d'un garçon somalien :

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« Les émigrés sont exposés à divers abus tels que le viol, le meurtre et la torture commis par des passeurs et des autorités. Ismail, un jeune homme somalien a raconté à l'organisation « Sauver Les Enfants » comment les passeurs ont violé à plusieurs reprises une émigrée enceinte de sept mois. Cette femme avait tenté de se suicider à plusieurs reprises mais Ismail et les autres migrants l'en ont empêché de le faire. ».

D'après cet extrait, nous constatons les violences contre les émigrés par l'utilisation dans la première phrase de termes comme « al-igti?âb», « al-qatl », « atta?dîb ».Aussi, le

63 HCR et ses partenaires, Hausse des flux de réfugiés et de migrants traversant la Libye, selon un rapport, publié le juillet 2017, disponible sur : http://www.unhcr.org/fr/news/stories/2017/7/595a8126a/hausse-flux-refugies-migrants-traversant-libye-rapport-hcr.html?query=jeunes%20somaliens%20en%20libye, consulté le 07/12/2017.

64 AL-JAZEERA, Les émigrés se rendant en Europe et les histoires d'agressions et d'extorsion, publié le 16/08/2015, en ligne :

http://www.aljazeera.net/news/presstour/2015/8/16/%D8%A7%D9%84%D9%85%D9%87%D8%A7%D8%AC%D8%B1%D9%88%D9%8 6-%D8%A5%D9%84%D9%89-%D8%A3%D9%88%D8%B1%D9%88%D8%A8%D8%A7-%D9%88%D9%82%D8%B5%D8%B5-%D8%A7%D9%84%D8%B6%D8%B1%D8%A8-

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substantif «viol » et le participe passé « violés» conjugué à la troisième personne du pluriel ont été mentionnés deux fois dans le but de marquer l'idée d'insistance et la gravité de cet acte subi par les femmes. Également, on remarque qu'une femme enceinte de sept mois a tenté de se suicider après s'être fait violer par l'expression « taðniqunafsahâ65», cette personne désespérée a préféré la mort car elle a perdu sa dignité à cause des passeurs.

A présent, nous allons étudier un article en anglais publié le 15 août 2015 et portant sur le même récit que celui d'al-Jazeera. Le journal Indépendant a publié des témoignages concernant les agressions des émigrés et des rapports sur les viols et d'autres mauvais traitements auxquels ils font face. Le journal a interviewé un médecin qui travaille pour l'organisation MSF66, selon son témoignage ainsi que celui des victimes, un grand nombre d'émigrées somaliennes sont violées, torturées au cours de leur voyage vers l'Europe et certains à cause de la faim et de la soif meurent en plein désert avant même d'embarquer pour la traversée de la Méditerranée.

Plusieurs survivants ont raconté la manière dont ces passeurs humiliaient les femmes émigrées. Ainsi, dans l'article de DEARDEN Lizzie, un immigré qui a rejoint clandestinement l'Europe et qui a été interviewé par Amnesty Internationale raconte les agressions sexuelles contre les femmes:

«a teenager, from Somalia, told how he travelled through the desert with women who were raped and forced to perform sex acts on smugglers as they drove.«One of the women who was raped was seven months pregnant,» Ismail said.«When she came back to the group took a scarf and tried to strangle herself but luckily we stopped her67. ».

« Un adolescent originaire de la Somalie a raconté qu'il avait voyagé dans le désert avec des femmes qui se sont fait violer et qui ont été forcées d'avoir des actes sexuels avec les passeurs alors qu'ils conduisaient. « L'une des femmes violées était enceinte de sept mois », a déclaré Ismail, et « lorsqu'elle est revenue dans le groupe, elle a pris une écharpe et a essayé de se suicider, heureusement nous l'avons arrêtée. ».

65 Elle a tenté de se suicider.

66MSF : Médecins Sans Frontières.

67DEARDEN Lizzie, Migrants being raped, shot and tortured on desperate journeys to Europe, doctor reveals, un MSF révèleque des migrants sont violés, fusillés et torturés lors de voyages désespérés en Europe,publié le 15/08/2015, enligne : http://www.independent.co.uk/news/world/europe/migrants-being-raped-shot-and-tortured-on-desperate-journeys-to-europe-doctor-reveals-10457130.html , consulté le 08/12/2017.

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Ce témoignage nous montre la gravité des actes commis contre les femmes, ces passeurs les violent sans âme ni conscience, quel que soit l'âge de la femme, quel que soit son état de santé, etc. On constate que les faits rapportés dans cette interview sont similaires à ceux d'al- Jazeera cités précédemment, comme nous pouvons remarquer que cette presse anglaise a employé les mêmes termes que ceux utilisés par al-Jazzera, ainsi, on observe bien l'emploi du terme « violés » et l'expression « forced to perform sex acts on...» utilisés aussi dans l'article d'al-Jazeera. Les articles ont employé les mêmes termes puisqu'ils sont le champ lexical mettant en évidence la description de l'état des victimes et reflète la réalité. En effet, les deux articles analysent cet incident de la même manière ce qui montre qu'il existe une similitude et une volonté de la part de la presse arabe comme l'occidentale de transmettre et dénoncer la souffrance de ces personnes.

D'après ces deux articles nous remarquons que le viol est l'un des problèmes majeurs que rencontrent les femmes pendant leur voyage. Cependant, la plupart d'elles n'osent pas dénoncer ces violences par peur d'être rejetée de leur famille, d'être stigmatisée par leur société ou répudiée par leurs maris. En effet, «Dans les sociétés Arabo-musulmanes, le viol constitue une honte pour l'ensemble de la constellation familiale. La femme violée est considérée par les autres et même par ses proches comme abîmée. Elle se considère comme coupable et est rejetée par autrui. Ce rejet des autres et destructeur pour elle. Par ailleurs, le viol reste un sujet tabou, entouré d'un silence très difficile à briser68. ».

Malheureusement, le nombre d'émigrés quittant la Somalie n'est pas estimé, ces personnes se retrouvent bloquées entre la Somalie et l'Europe et essaient de trouver un refuge pour vivre en paix et dans la sérénité. Le 2 Avril 2012, al-Jazeera rapporte que les Somaliens souffrent à cause des guerres interminables, du chômage, de la pauvreté et de l'absence d'un gouvernement somalien qui pourrait prendre soin de ses citoyens, ce qui les obligent à fuir la Somalie et à se lancer au péril de leur vie dans un voyage vers l'Europe. Certaines de ces personnes voyagent clandestinement dans des camions et font des centaines de kilomètres pour atteindre la Libye, puis l'Europe par des bateaux de fortune qui ne résistent ni aux vagues ni au vent :

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68 BOUZIDI Houda, Le Viol et Ses Conséquences Traumatiques Sur La Femme, thèse en ligne sur : https://bu.umc.edu.dz/theses/psychologie/BOU941.pdf , consulté le 28/02/2018.

48

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« Dans le désert libyen, les Somaliens souffrent de nombreuses violations et agressions qui enfreignent les principes de l'humanité comme le viol des femmes et le vol de l'argent qu'ils avaient amassé dans des travaux pénibles. Fatouma est une fille somalienne du Bossasso , une ville côtière en Somalie. Après avoir payé 80 dollars, elle voyagea à bord d'un bateau de pêche avec 100 autres émigrés. Elle confirme que les gangs des trafiquants frappaient les migrants au cours de leur voyage à l'aide de bâtons, ils épuisaient les femmes, et ont violé son amie, elle souligne aussi que les contrebandiers récoltaient des sommes d'argent importantes avec l'émigration clandestine. ».

Ici al-Jazeera évoque le récit de Fatouma, cette jeune fille somalienne tombée entre les mains des trafiquants, le journal indique selon son témoignage que les émigrés souffrent physiquement et psychologiquement. Dans la première partie de l'article, on peut voir l'emploi du verbe « yu?ânî » de la racine « ?.a.n » qui en français signifie «souffrir ». Ensuite, il est noté dans cet article que les émigrés souffrent de nombreuses violations et agressions qui constituent un crime contre l'humanité en utilisant les termes suivants : « al-igti?âb70 », « al-Nahb71 ». Également, pour bien expliquer les agressions des trafiquants, l'article poursuit et présente dans la dernière ligne quelques verbes qui reflètent ces actes tels que : « ya?ribûna72», « yata?araðûna73 », « igtu?ibat74 », « taganâ75 ». Ce champ lexical met en

69 AL-JAZEERA, L'émigration clandestine, les souffrances des somaliens, publié le 02/04/2012, en

ligne sur : http://www.aljazeera.net/news/reportsandinterviews/2012/4/2/%D8%A7%D9%84%D9%87%D8%AC%D8%B1%D8%A9-%D8%BA%D9%8A%D8%B1-%D8%A7%D9%84%D8%B4%D8%B1%D8%B9%D9%8A%D8%A9-%D9%85%D8%B9%D8%A7%D9%86%D8%A7%D8%A9-

%D8%A7%D9%84%D8%B5%D9%88%D9%85%D8%A7%D9%84%D9%8A%D9%8A%D9%86, consulté le 28/02/2018. 70Le viol.

71Le pillage.

72 Ils les frappaient.

73 Ils les agressaient sexuellement.

74 Violée.

75 Profités.

lumière les agressions et la souffrance des émigrés en général et l'usage de termes différents liés au viol nous montre que les femmes sont toujours les plus vulnérables car elles sont violées directement et subissent des harcèlements sexuels.

L'émigration clandestine pour de nombreux jeunes est une aventure sans danger, avant le départ ils ont dans leur esprit des destinations comme l'Europe, l'Asie ou l'Amérique, des destinations qui leur permettront d'avoir une vie meilleure, une vie prometteuse mieux que dans leur pays d'origine. Nous savons maintenant que la pauvreté dans le pays de ces jeunes somaliens les force à prendre de grands risques pour atteindre l'Occident, mais beaucoup d'entre eux ne réfléchissent pas aux conséquences de cet acte et se trouvent dans des situations désastreuses.

Un jeune somalien qui faisait partie des émigrés clandestins somaliens détenus en 2013 en Libye a raconté au PNUD76 lors d'une interview la souffrance que les émigrés somaliens surtout les femmes ressentent durant l'émigration clandestine vers l'Europe. Dans cette interview, il a témoigné du viol subi par les femmes, et d'après lui, deux femmes sur 55 qui voyageaient avec lui ont été violées entre le Soudan et l'Éthiopie et ont par la suite été libérées des violeurs. Ici, nous allons étudier les termes utilisés par cette presse anglaise pour décrire cet acte et les violences subies :

« There were two rape victims. They were raped on the border between Sudan and Ethiopia as they were crossing the border by foot. In the same night of the incident some people came to us and rescued the two ladies from the rapists. The condition of the two ladies is stable now. One of them managed to proceed with her journey and the other one is still with us77».

« Il y avait deux victimes de viol. Elles ont été violées à la frontière entre le Soudan et l'Éthiopie alors qu'elles traversaient la frontière à pied. Dans la même nuit, quelques personnes sont venues à nous et ont sauvé les deux femmes des violeurs. Leur état est stable pour le moment, l'une a continué son voyage et l'autre est toujours avec nous. ».

of children and youth

76 Programme des Nations Unies pour le développement.

in Somalia,

77 UNDP, Illegal immigration

49

Immigration illégale d'enfants et des jeunes en Somalie,enligne

 

:

http://www.so.undp.org/content/somalia/en/home/search.html?q=Illegal+immigration+of+children+and+youth+in+Somalia, consulté

le 24/11/2017.

50

Dans cet extrait, les émigrés risquent d'être enlevés, d'être torturés et d'être victimes de violences sexuelles dans l'espace migratoire avant d'atteindre la destination. Ce journal emploie les mêmes termes vus précédemment, «viol », « violées », «violeurs », et on remarque alors que ces termes ont le même sens que les autres présents dans les extraits analysés précédemment. Aussi, la répétition de ces termes souligne la douleur et l'image de l'horrible sort de ces personnes, enfin, on note que le viol des femmes est l'une des conséquences les plus sévères de l'émigration clandestine.

Les risques pendant le voyage, comme les dommages corporels causés par la traversée du désert à pied, la mort, le viol, les détentions et les autres mauvais traitements laissent des séquelles psychologiques difficiles à oublier. Le jeune migrant interviewé par le PNUD affirme que les femmes qui voyageaient avec lui avaient souffert de violences sexuelles, pour cela, le terme« viol » a été employé à trois reprises dans son témoignage pour montrer la continuité de cette violence durant le voyage. Certains des émigrés ne croient pas en la véracité de ces obstacles et difficultés et pensent seulement à l'Europe, comme nous l'avons déjà mentionné, l'émigration clandestine est un phénomène dont les femmes et hommes somaliens en sont victimes. GEELDOON est l'un des jeunes somaliens qui a essayé de rejoindre l'Europe sans succès et qui finalement est retourné en Somalie. Comme la majorité des Somaliens, il a emprunté le même itinéraire, passage par l'Éthiopie, le Soudan, la Libye, puis la traversée de la mer Méditerranée. Et au cours de l'année 2014, il a écrit un livre sur son voyage en langue somali, qui a été ensuite traduit en anglais. Dans son livre il raconte les souffrances subies durant son trajet, ses difficultés et expériences reflètent la souffrance de nombreux autres Somaliens. Ce jeune homme a eu la chance de survivre et a décidé de raconter dans son livre la réalité du voyage pour l'Europe, par conséquent, depuis son retour en Somalie, il a organisé des compagnes de sensibilisations contre l'émigration clandestine et encourage ainsi les jeunes à créer leur avenir dans leur pays.

Dans son ouvrage, il a évoqué de nombreuses souffrances dont il a été témoin jusqu'à son arrivée en Libye. Au cours de son trajet, l'un des événements importants fut lorsque lui et ses camarades ont été bloqués à la frontière soudano-libyenne :

«We were asked to get out of the bus. We showed our papers. The other Somalis who had no papers were detained. We continued our journey and again stopped at a checkpoint in the town of Warawar. On the bus, I had chatted with a young Sudanese man

51

who spoke English. He had told me that there were Somalis who were held here. Money was demanded from the men and the women were held for sex78.» .

«On nous a demandé de descendre du bus, on a montré nos papiers, et ceux qui n'avaient pas de papiers ont été arrêtés. Nous avons poursuivi notre voyage et nous nous sommes encore arrêtés à un poste de contrôle dans la ville de Warawar79.Dans le bus, j'ai discuté avec un jeune soudanais qui parlait l'anglais, il m'a dit qu'il existe des Somaliens détenus et à qui on demande de l'argent, et les femmes étaient détenues pour le sexe. ».

Comme GEELDOON avait de faux documents d'identité il a pu traverser cette frontière et continué son voyage vers la Libye. Durant leur marche dans le désert, GEELDOON et ses camarades sont entrés dans une maison abandonnée et y ont découvert une femme enchainée parlant le somali : « «Oh, mes frères, entrez! »Elle était enchaînée au sol, elle a pleuré et nous a dit: «Frères! Asseyez-vous. Vous êtes Somaliens. Cela fait deux ans que je n'ai pas vu de Somaliens » Nous nous sommes assis et elle a commencé à raconter son histoire : « j'ai immigré et j'ai beaucoup souffert. J'ai été kidnappée par un homme arabe près d'Adjedabia80, j'étais trop faible pour marcher. Il m'a emmené dans sa voiture, m'a nourri et enchaîné. La nuit, il venait et me donnait quelque chose à manger, il abusait de moi sexuellement et m'enchainait81. ».

Cette femme détenue dans le désert en Libye était en route pour l'Europe quand un homme l'a kidnappée et retenue comme esclave sexuelle, elle a été enfermée dans une maison isolée au milieu du désert. La phrase « il abusait de moi sexuellement et m'enchainait » démontre qu'elle était dépourvue de liberté, elle a été violée, affamée et abandonnée seule et chaque soir avec inquiétude, elle attendait le retour de son violeur qui la traitait comme un animal.

Bien que toutes les femmes émigrées rencontrent ce genre d'agressions lors de leur trajet, le cas de cette dernière reste un cas général et sa souffrance n'est pas unique, elle la lie à toutes les autres femmes violées et séquestrées lors de ces voyages.

78GEELDOON, Op., cit.,

79Warawar est une ville située au Nord de la région du Bahr el-Ghazal au Sud du Soudan. 80AJdabiya est une ville libyenne située dans le Nord-Est de la Libye.

81GEELDOON Mohamed, Op., cit.,

52

Le 20 août 2015, le journal britannique BBC a publié

l'article Fedussa's story: Surviving the mediterranean migrant crossing, L'histoire
de Fedussa: la survivante de la traversée de la Méditerranée
, dans lequel ont été décrit le périple de Fedussa, une fille somalienne de 15 ans et les actes inhumains et immoraux qu'ont subi les femmes qui ont voyagé avec elle jusqu'à leur arrivée en Italie. Elle rapporte que : « le viol affecte en pleine profondeur l'intimité de la femme, son honneur, sa dignité, car il touche l'endroit le plus intime de son corps82 », et pour cette raison, lorsqu'une victime de viol témoigne, la majorité des autres femmes violées n'osent témoigner ou elles le font de manière anonyme ou elle reporte l'acte de viol sur une autre personne préservant ainsi leur propre viol.

« On the journey to Tripoli many things happened - including rape," Fedussasays."When it was night the smugglers separated the men and women. They wanted the women to go with them so that they could rape them."I refused to go with them but they took away my friend Qani."She said six men raped her which she remembers resisting and fighting, but after the sixth she lost consciousness. "Qani left for Europe 15 days before I did. I don't know where she is but I hope to find her. ».

« Au cours du voyage vers Tripoli, beaucoup de choses se sont passées- y compris le viol, dit Fedussa.Le soir, les passeurs séparaient les hommes des femmes. Ils voulaient que les femmes les accompagnent pour les violer. J'ai refusé d'aller avec eux et ils ont enlevé mon amie Qani. Elle a dit que six hommes l'avaient violée et qu'elle se souvenait d'avoir résister, mais après le sixième, elle avait perdu conscience. Qani est entré en Europe 15 jours avant moi. Je ne sais pas où elle est actuellement, mais j'espère la retrouver83. ».

Sous la menace d'une arme, la femme sera obligée de se soumettre au viol, car sa vie est menacée de mort. Lorsque les trafiquants d'êtres humains les forcent à choisir entre la mort ou le viol, certaines accepte le viol par dépit car elles n'ont pas d'autres choix et ne peuvent pas se défendre. D'autres comme Qani résistent « elle se souvenait d'avoir résisté, mais après le sixième, elle avait perdu conscience », cette phrase montre que la victime a essayé de se défendre jusqu'à en perdre conscience. Malheureusement, les témoignages de celles ayant

82 BOUZIDI Houda, Op., cit., consulté le 28/02/2018.

83 NEWSBEAT, Fedussa's story: Surviving the Mediterranean migrant crossing, L'histoire de Fedussa: la survivante de la traversée de la Méditerranée, publié le 20 août

2015, http://www.bbc.co.uk/newsbeat/article/33987125/fedussas-story-surviving-the-mediterranean-migrant-crossing , consulté le
01/11/2017.

survécu indiquent que les femmes voyageant avec elles ont subi des viols mais ne peuvent témoigner, l'acte de viol est toujours porté sur une autre pour préserver leur dignité. Ainsi, on remarque dans l'article que Fedusa n'a pas mentionné qu'elle a été violée, mais seulement le viol de son amie Qani. Aussi, étant donné que les passeurs connaissent les proches des femmes émigrées, alors ces dernières n'osent témoigner par peur des représailles. Enfin, dans le paragraphe ci-dessus, on entend la honte ressentie par la femme violée quand elle rejoint le groupe.

Le 22 Août 2015, le journal al-`Arab al-Yawm a publié,deux jours après l'article de la BBC, un article intitulé Une somalienne témoigne que des femmes migrantes sont violées et assassinées par les trafiquants d'êtres humains, dans lequel une jeune femme somalienne de 20 ans raconte sa souffrance qui reflète celle des milliers d'émigrées clandestines entre le Soudan et la Libye. Après son arrivée en Italie par la Méditerranée, cette jeune femme a raconté au journal en détail son voyage, sa souffrance et le coût de son trajet. Elle relate que les passeurs les avaient emmenés au Soudan avant de se faire arrêter par la police soudanaise à la frontière soudano-éthiopienne. Comme a dit Fatouma, lorsqu'ils sont arrivés là-bas, ils racontèrent à la police qu'ils avaient fui la guerre et la pauvreté en Somalie, et la prièrent de les laisser passer. Malheureusement, la police refusa et certains décidèrent de courir pour échapper à la police:

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84Al?arab al-yawm, Une somalienne témoigne des femmes migrantes violées et assassinées par les trafiquants d'êtres humains, publié le 22/08/2015, enligne :

http://www.arabstoday.net/43/%D8%B5%D9%88%D9%85%D8%A7%D9%84%D9%8A%D8%A9-%D8%AA%D8%B1%D9%88%D9%8A-%D8%A7%D8%BA%D8%AA%D8%B5%D8%A7%D8%A8-%D8%A7%D9%84%D9%85%D9%87%D8%A7%D8%AC%D8%B1%D8%A7%D8%AA-

54

«Fedoussa avait dit que la police les avait arrêtés à la frontière soudanaise, qu'ils l'avaient informé qu'ils venaient de la Somalie fuyant la guerre civile et la pauvreté et qu'ils lui avaient ensuite demandé de leur céder le passage. Mais la police refusa et certains des migrants ont couru sous les coups de feu qui visaient aussi le petit bus qui les transportait. Étant la seule femme voyageant parmi les hommes, Fedoussa a fait face à des menaces plus dangereuses qu'une balle réelle. Elle se souvient de son voyage vers Tripoli où les contrebandiers l'ont violé et infligé de douleurs. La jeune femme affirme que les contrebandiers venaient le soir pour séparer les hommes des femmes. Deux des contrebandiers ont demandé aux femmes de les accompagner pour les loger et leur donner de la nourriture. Fedoussa a dit que les femmes savaient que c'était un mensonge, ils voulaient seulement qu'elles aillent avec eux afin de les violer. Elles répondaient qu'elles n'avaient ni faim ni froid, puis ils sont revenus encore avec d'autres moyens de pression, cette fois-ci, les deux hommes portaient des armes et ils ont pris son ami Qani. Lorsque le conducteur l'a retrouvé, elle était en état de choc et inconsciente, pendant 24 heures elle ne répondait plus au point qu'on pensait qu'elle était morte. Qani informason ami Fedoussa qu'elle se souvient avoir résisté puis qu'elle a perdu conscience après le sixième viol. ».

Pendant l'émigration, toutes les femmes ne sont pas en sécurité face à la violence sexuelle. Dans le texte ci-dessus, nous avons vu comment l'amie de Fedussa a été violée par un groupe de six hommes et comment elle a résisté jusqu'à perdre conscience. Cette jeune femme et même si elle a eu la chance de survivre va vivre avec ces séquelles et ce traumatisme. Dans la phrase « al muharibûna -al?aqûbihim al- âlâm », on trouve le terme « âlâm» signifiant en français « douleurs », c'est le pluriel du mot « alam » et cela montre la douleur que les émigrées rencontrent durant leur voyage clandestin. Aussi, le journal emploie le terme « viol » trois fois, il est utilisé comme un nom attaché avec « äå » à la troisième personne du pluriel féminin « igti?âbihina» ce qui souligne que le viol est limité au genre féminin. Le terme « al-igti?âb» « viol » est employé deux fois afin de mettre en évidence la gravité des agressions. À part ces actes de violence sexuelles, nous remarquons que les trafiquants d'êtres humains utilisent la nourriture comme moyen de pression pour violer les femmes, si elles refusent elles seront

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55

forcées au viol et privées de nourriture, la nourriture peut donc être une récompense comme elle peut être une punition.

C. La torture et les autres mauvais traitements

Dans cette partie, nous allons mettre en lumière les détentions et la torture subis par les émigrés somaliens depuis leur départ de la Somalie jusqu'à leur arrivée dans les différents pays. Tous d'abord, il semble important de rappeler que le phénomène de l'émigration des Somaliens vers l'Europe à travers la Libye existe depuis longtemps. Il y a ceux qui tentaient d'aller en Europe en passant par ce pays et en se confrontant à toute sorte de souffrance pour y arriver, en effet : « D'après l'OIM, la plupart des étrangers qui vivent en Libye sont originaires des pays d'Afrique. La majorité de ceux qui traversent le pays avant de rejoindre l'Italie par bateau viennent des pays comme la Somalie. Ceux originaires de l'Érythrée, de l'Éthiopie et de la Somalie qui arrivent par le Soudan passent par Al Koufra, puis voyagent jusqu'à Adjedabia qui sont deux villes dans la région nord-est du pays. Les bateaux à destination de l'Europe partent pour la plupart du nord-ouest du pays. Avant d'embarquer, les étrangers sont retenus dans des maisons ou des fermes jusqu'à ce qu'ils soient assez nombreux pour prendre le large85».

Notre étude se concentrera sur les faits qui se sont déroulés de 2010 jusqu'à 2017, car les mouvements migratoires ont augmenté depuis 2011 à cause du soulèvement en Libye. Nous allons faire une relation entre le chaos libyen qui a débuté avec la chute du régime en 2011 et l'augmentation de la souffrance des émigrés, car le trajet des émigrés semble prendre fin en Lybie sous la menace et la torture des trafiquants d'êtres humains.

En décembre 2010, un rapport d'Amnesty International a communiqué comment les émigrés somaliens fuyant la guerre civile retrouve un autre enfer en Libye. Le choix des Somaliens de rentrer en Europe par la Libye est un choix par dépit, puisqu'il n'existe pas autre itinéraire sûr et régulier vers l'Europe, alors l'entrée en Italie depuis la Libye est devenue la seule voie importante pour ceux qui tentent d'atteindre l'Europe. Amnesty International confirme que des dizaines de milliers de personnes parmi les émigrés somaliens sont détenues indéfiniment dans des centres de détention surpeuplés en Libye où ils sont l'objet d'abus systématiques :

85 AMNESTY INTERNATIONAL, En Libye, les réfugiés et les migrants fuient les sévices sexuels, les violences et l'exploitation, publié le 10 juillet 2016, en ligne : https://www.amnesty.org/fr/press-releases/2016/07/refugees-and-migrants-fleeing-sexual-violence-abuse-and-exploitation-in-libya/ , consulté le 24/11/2017.

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« Depuis la guerre civile en Somalie en 1991, des dizaines de milliers de Somaliens ont fui le conflit qui a déchiré leur pays. Certains se sont dirigés vers les pays voisins et certains d'autres vers des régions au-delà à la quête d'un refuge. La majorité du temps, ils entreprennent des voyages dangereux à travers l'Éthiopie, le Soudan et la Libye où ils perdent souvent leurs espoirs car ils sont arrêtés et détenus pour de longues périodes, ils sont torturés et subissent d'autres mauvais traitements car ils n'ont pas la possibilité de demander la protection ou de se soigner.».

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« Chaque année, des milliers de Somaliens fuient leur pays déchiré par la guerre à la quête d'un refuge. Ceux d'entre eux qui arrivent en Libye sont détenus à des durées indéterminées, sont torturés et subissent d'autres mauvais traitements. Malgré cela plusieurs entreprennent le voyage terrible vers l'Europe, et ceux qui survivent au naufrage font face à l'arrestation, l'isolement, la misère et la pauvreté dans des logements insuffisants en Malte. ».

Il faut d'abord rappeler que les émigrés durant leur voyage, sont confrontés dans les pays de passage à des conditions difficiles telles que le racisme, la torture, la détention indéterminée, la xénophobie...etc. En ce qui concerne la Libye, les différentes milices armées qui contrôlent le pays sont apparues après la chute deKADHAFI en 2011, malgré cette situation, beaucoup d'émigrés de plusieurs pays africains prennent ce chemin pour atteindre l'Europe.

86 AMNESTY INTERNATIONAL,Ils cherchaient la sécurité mais n'ont trouvé que la peur, publiée 14 décembre 2010, en ligne : https://www.amnesty.org/ar/documents/mde19/1191/2010/ar/ , consulté le 14/11/2017.

87 AMNESTY INTERNATIONAL, Op., cit., consulté le 13/11/2017.

57

« Des centaines de milliers de migrants, en provenance d'Afrique subsaharienne, pour la plupart, rejoignent la Libye pour fuir la guerre, les persécutions ou l'extrême pauvreté, souvent dans l'espoir de s'installer en Europe. Personne ne devrait risquer d'être enlevé, torturé ou violé en Libye afin d'obtenir une protection .Dans un contexte où le non-droit et la violence continuent de miner la Libye, une industrie lucrative de trafic d'êtres humains s'est installé le long des itinéraires qui relient le sud du pays à la côte méditerranéenne, au nord, d'où partent les bateaux pour l'Europe. Amnesty s'est entretenue des migrants qui ont expliqué avoir été victimes de violations de leurs droits à toutes les étapes de leur périple, de leur entrée sur le territoire libyen. D'autres vivaient dans le pays depuis des années, mais avaient cherché à s'enfuir en raison du harcèlement et des violences qu'ils subissaient de la part de bandes locales, de la police ou de groupes armés88. ».

Amnesty International sort annuellement un rapport concernant la situation des droits des hommes dans chaque pays du monde, et dans son rapport de 2012 on trouve des témoignages relatifs à des violations contre des émigrés somaliens. Des jeunes émigrés somaliens incarcérés dans des centres de détentions libyens ont informé l'organisation de leurs souffrances durant la détention, ils ont témoigné qu'ils avaient été frappés et torturés à plusieurs reprises à l'aide des bâtons électriques, d'objets métalliques et tous ce qu'il peut être utilisé pour frapper. Un émigré somalien venu se réfugier en Libye a raconté à Amnesty International en février 2012 le récit de son expérience douloureuse et a dit :

« Je suis dans ce pays depuis sept mois et depuis je n'ai pas connu une seule bonne journée. Après avoir voyagé pendant16 jours dans le désert avec mes compagnons d'infortune, j'ai été enfermé dans une maison par les passeurs. Ils refusaient de nous laisser repartir à moins que nous ne payions 300 dollars chacun - qui venaient s'ajouter aux 600 dollars que nous avions déjà versés pour rejoindre la Libye depuis le Soudan. Ils nous ont finalement conduits à Tripoli à bord d'un camion de marchandises. Nous y étions entassés comme des légumes. Je suis resté libre pendant quelque temps, je faisais de petits boulots malgré mon diplôme universitaire. Je me tenais sur un rond-point et j'attendais qu'on me propose du travail. Parfois, un Libyen charitable m'engageait et me payait raiment à la fin de la journée. D'autres fois, je travaillais du matin au soir sans rien obtenir en retour que des insultes. Si je me plaignais, l'employeur me menaçait en disant :

88 AMNESTY INTERNATIONAL, En Libye, les réfugiés et les migrants fuient les sévices sexuels, les violences et l'exploitation, publié le 10 juillet 2016, en ligne : https://www.amnesty.org/fr/press-releases/2016/07/refugees-and-migrants-fleeing-sexual-violence-abuse-and-exploitation-in-libya/ , consulté le 24/11/2017.

58

«Tu veux appeler la police ?» ...etc. En juillet, j'ai été arrêté par un poste de contrôle et transféré dans un centre de détention à Misratah89.Les conditions de vie y étaient épouvantables. Ils frappaient tout le monde, y compris les femmes, à l'aide de tuyaux en caoutchouc, de bâtons, de balais, de tout ce qu'ils pouvaient trouver à porter de main...J'ai été transféré ici il y a trois semaines. Je ne suis pas frappé, mais ceux qui tentent de s'évader le sont... On m'oblige à laver les Toilettes sans qu'il soit possible de refuser90. ».

Une fois arrivé dans en Libye, ce jeune émigré voulait travailler et réaliser ses rêves, mais il a été enfermé dans une maison et a été dépourvu de sa liberté. Les trafiquants d'êtres humains pratiquent tortures contre les émigrés pour des raisons pécuniaires, en effet, pour racheter sa liberté, les trafiquants exigent d'importantes rançons que la majorité de ces personnes ne peuvent régler, et s'il ne paie pas il restera enfermé dans une maison, torturé jusqu'à ce que sa famille lui envoie de l'argent ou jusqu'à ce qu'il meure. Lorsque le détenu est au téléphone avec sa famille, les passeurs le frappe pour que celle-ci se presse à payer la rançon, mais si la famille ne possède les moyens pour verser la rançon, celle-ci ne cessera d'augmenter. Partant de l'extrait précédent, ce jeune nous a décrit son calvaire dans l'espace migratoire à travers les termes suivants : « enfermé dans une maison », « voyagé pendant 16 jours dans le désert », « conduits à Tripoli à bord d'un camion de marchandises », il a mentionné aussi les outils que les passeurs utilisent pour torturer les détenus : « l'aide de tuyaux en caoutchouc, de bâtons, de balais ».Parfois, la vie et le sort des émigrés dépendent du passeur, si ce dernier est inhumain alors leur chance de vie sera écourtée.

En juin 2012, un autre émigré somalien arrêté dans un centre de détention en Libye a affirmé qu'il souffrait depuis son arrivé en Libye : « Je voulais fuir et trouver un endroit où je serais en sécurité et où ma vie serait meilleure. Au lieu de cela, j'ai effectué un voyage terrible et j'ai trouvé un pays terrible. Je suis arrivé à Al-Koufra91 en janvier 2012, mes ennuis ont alors commencé... Il y a deux mois, j'ai été transféré avec 600 autres personnes à

89 Misrata est ville libyenne.

90 AMNESTY INTERNATIONAL, Nous sommes des étrangers nous n'avons aucun droit, publié en novembre 2012, en ligne sur : https://www.amnesty.be/IMG/pdf/mde190202012fr-1-2.pdf , consulté le 26/11/2017.

91 Koufra est une ville libyenne à la frontière soudano-libyenne, c'est l'entrée en Libye depuis le Soudan.

59

Ganfouda92 à bord d'un camion...Pour les Somaliens, la vie est difficile. Est-ce là le destin des réfugiés93 ? dit-t-il. ».

Après la traversé du Sahara, les émigrés rentrent en Libye par al-Koufra. Dès l'arrivée dans cette ville, les trafiquants les torturent, ce jeune a perdu son oeil gauche à cause des coups donnés par les trafiquants et ceux qui essaient d'échapper à la prison reçoivent les punitions les plus sévères. Toujours selon un rapport d'Amnesty International, un groupe de jeunes somaliens a tenté de s'échapper et a raconté la conséquence de cette tentative de fuite :

« En septembre 2012, des Somaliens ont tenté de s'évader du centre de détention de Khoms, à la faveur du chaos qui avait succédé à un différend entre plusieurs détenus. Ils ont indiqué à Amnesty International que, après avoir été repris, ils avaient été passés à tabac par des hommes armés en civil. Mohamed Abdallah Mohamed (19 ans) a raconté qu'il avait été roué de coups de pied, traîné sur le sol, frappé à l'oeil et battu à coups de bâtonnet de crosse de fusil. Atteint de plusieurs blessures, en particulier à l'oeil gauche, il a déclaré que les soins médicaux qu'on lui avait finalement prodigués étaient insuffisants. Khadar Mohamed Ali (16 ans) et Khadar Warsame (21 ans), ont eux aussi été repris et frappés. Blessé à la tête, Khadar Warsame a été admis dans l'unité de soins intensifs de l'hôpital de Khoms94».

Dans ce témoignage on voit des jeunes qui n'ont même pas atteint l'âge de vingt ans, et qui sont tous à la recherche d'un avenir meilleur, détenus dans des centres des quels ils ne peuvent s'évader. Si l'on prend le cas de Mohamed ABDALLAH, il a été battu à coups de crosse de fusil, roué de coups de pied, traîné sur le sol et frappé à l'oeil. Ce témoignage sur la torture confirme que plusieurs autres victimes subissent la même souffrance, et ce dernier témoignage est parmi ceux les plus significatifs car ils nous montrent la réalité de la souffrance des émigrés.

Au début du soulèvement libyen en 2011, la Libye qui est le principal point de départ des émigrés clandestins vers l'Europe est en proie à la guerre civile entre le régime et des milices armées. Durant cette année-là, il y a eu de nombreuses rumeurs selon lesquelles le colonel Mouammar KADHAFI aurait fait venir des mercenaires étrangers combattre son peuple pour réprimer le soulèvement contre lui. À ce moment-là, l'ancien ambassadeur libyen

92Ganfouda est une ville située dans la banlieue de Benghazi, deuxième ville de Libye.

93 AMNESTY INTERNATIONAL, Op., cit., consulté le 26/011/2017.

94 Ibid.

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qui avait démissionné à la suite du soulèvement a affirmé à al-Jazeera: « les gens disent qu'ils sont africains, de peaux noires et ne parlent arabe. Ils font des choses terribles, ils entrent dans les maisons et tuent les femmes et les enfants (the guardian.2011). »

Cette information a été relayée dans toute la Libye et les émigrés africains y compris les somaliens ont été donc pris pour cible. Cependant, une agence du haut-commissariat pour les réfugiés a déclaré avoir reçu des "rapports alarmants" selon lesquels les Libyens se retourneraient contre des réfugiés africains qu'ils accusaient d'être mercenaires pour Kadhafi. « Certaines des informations provenant de tierces parties sont très inquiétantes. Un journaliste a communiqué les dires de somaliens à Tripoli qui affirment avoir été pourchassés car on les soupçonnait d'être des mercenaires. Le journaliste explique également que les somaliens à Tripoli se sentent pris au piège et qu'ils ont peur de sortir de chez eux, même s'ils ont peu ou pas de nourriture95. ».

Pour étudier ce phénomène, IRINNEWS a publié le 3 mai 2012 un article consacré aux violences contre les émigrés en Libye durant les soulèvements en 2011. Le journal affirme qu'ils avaient été accusés d'être mercenaires de la part des opposants.

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« En 2011, pendant le soulèvement en Libye, certains émigrés d'Afrique subsaharienne ont été accusés de travailler comme mercenaires pour Kadhafi. En l'absence de système judiciaire officiel, avec des milices qui contrôlent de vastes régions du pays et avec un sentiment anti-africain omniprésent en Libye, beaucoup d'entre eux ont été arrêtés,

95EDWARDS Adrian, publié le 22 février 2011, http://www.unhcr.org/fr/news/stories/2011/2/4d63d6fc2/hcr-craint-securite-refugies-pris-violences-libye.html , consulté le 02/03/2018.

IRIN, Detained migrants face harsh conditions, Les migrants détenus sont confrontés à des conditions difficiles, des limbes juridiques, publié le 3 Mai 2012, en ligne : http://www.irinnews.org/feature/2012/05/03/detained-migrants-face-harsh-conditions-legal-limbo , consulté le 16/12/2017.

96 Ibid.

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battus et détenus. Les autorités affirment que les migrants actuellement détenus n'ont pas été accusés d'être des mercenaires, mais qu'ils ont été emprisonnés pour n'avoir aucun document officiel, ils avaient soit des documents expirés soit de faux visas. Le centre compte environ 400 personnes, dont 150 Somaliens. ».

Comme il est mentionné ci-dessus, cet article soulève le fait que les émigrés sont devenus une cible uniquement parce qu'ils sont soupçonnés d'être mercenaires « murtazaqa »en arabe. Une Murtazaqa est celle qui accomplit une mission pour gagner de l'argent, et selon le dictionnaire français Larousse, le mercenaire est un soldat qui sert à prix d'argent un gouvernement étranger. Ce terme a été employé et partagé par les groupes armés qui prenaient pour cible tous les étrangers sous prétexte qu'ils sont mercenaires. Et c'est pour cette raison qu'on voit l'utilisation de ce terme dans l'article car il porte à une charge négative ce qui légitime l'arrestation et les détentions des émigrés. Par conséquent, si un migrant est soupçonné d'être une Murtazaqa par les Libyens.

Le même journal a effectué une visite dans les centres de détentions en Libye en 2012, et retrace avec transparence, dans un article, la réalité des faits grâce aux entretiens avec des jeunes détenus :

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« Souleymane MANSOUR, un jeune somalien passe ses journées emprisonné dans une des cellules du centre de détention à Benghazi, deuxième plus grande ville de Libye. Tu les trouves allongés sur des matelas contre un mur sur lequel sont inscrits des noms et des slogans comme « J'aime la Somalie ». Dans une entrevue avec IRINNEWS, « Je suis ici depuis quatre mois, j'ai quitté Mogadiscio en août de l'année dernière et j'ai été arrêté à Kufra avant d'être ramené ici, dit Mansour. » ».

97Ibid.

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On observe dans le texte ci-dessus, la nostalgie que portent les jeunes pour leur pays. Les slogans gravés au mur « j'aime la Somalie » nous évoque l'amour, l'affection et l'attachement à leur pays, ce sont uniquement les circonstances qui les ont obligés à quitter leurs proches, leurs familles et leur pays.

Figure 4 : Photo des émigrés somaliens en prison à Benghazi.

Lorsqu'une personne est en prison, on observe sur son visage le stress, l'inquiétude et la tristesse, cependant, et étant élevés dans un pays déchiré par la guerre civile depuis plus de deux décennies, les Somaliens se sont habitués et se sont adaptés à cette situation difficile, ainsi on remarque le sourire et la sérénité sur leurs visages malgré la souffrance d'un avenir incertain.

Après ce long et dangereux périple, ces émigrés obtiennent-ils ce qu'ils espéraient ? C'est une question que l'on se doit de poser pour comprendre les ambitions qui les poussent à mettre leur vie en péril pour vivre en Europe, terre paradisiaque selon eux mais difficile d'accès. En effet, certains émigrés et avant même d'entamer le périple pensent que la vraie vie se trouve en Europe, puisque la majorité d'eux sont trompés par les fausses informations trouvées sur Internet et publiées surtout par les passeurs.

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63

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« Ahmed OMAR ISAAK, 31 ans, a fui le conflit dans son pays natal, la Somalie, en janvier 2012. Son intention était simplement de déménager dans un lieu sécurisé, mais c'était bien plus difficile que ce qu'il avait imaginé. Durant les derniers 16 mois, il a parcouru près de 5 000 km en camions, en bus, en bateaux et même dans le coffre d'une voiture, il a été détenu, battu et coincé dans le désert du Sahara. Il a raconté son voyage à IRIN par téléphone depuis Malte99. ».

Ainsi, les émigrés font tout ce qu'ils peuvent pour atteindre le continent européen. Ahmed a risqué sa vie pour atteindre l'Europe et a traversé 5000 kilomètres. D'après la phrase « il a parcouru près de 5 000 km en camions, en bus, en bateaux et même dans le coffre d'une voiture », il apparaît bien clair que les émigrés clandestins utilisent tous les moyens de transports pour rentrer en Europe. Dans l'extrait, Ahmed a même risqué sa vie en se cachant dans le coffre d'une voiture pour passer les frontières fermées, ce n'est pas ici un cas exceptionnel, c'est le cas de toutes les personnes comme lui. Néanmoins, ils ont d'autres méthodes pour ne pas être détecté par les patrouilles frontalières, en effet, certains achètent de faux documents afin de rentrer dans un pays européen... etc.

Selon un Médecin Sans Frontières, il y a des réseaux de passeurs qui prennent en charge les émigrés à la frontière, qui les font voyager dans des conteneurs ou dans des camions dans des conditions plus que rudimentaires. Ils les emmènent après dans des marchés où ils sont vendus comme des esclaves, une autre partie sera remise à des bourreaux qui vont les torturer. Ils sont électrocutés, battus, et pour exiger que leurs familles versent des rançons qui peuvent atteindre 5.000 dollars, ils sont torturés jusqu'à la mort. Le but c'est d'obtenir des rançons quel que soit le prix (Europe1, le 30 novembre 2017).

Concernant la question de la torture, GEELEE Hussein est un auteur somalien et ancien immigré, il vivait en Libye durant des années et il voulait rentrer en Europe par l'Italie, mais après avoir échoué trois fois à traverser la Méditerranée, il est retourné dans son pays et a rédigé un ouvrage intituléwehave kissed the ground, Nous avons embrassé le sol, dans lequel il raconte son expérience et ses souffrances en Libye:

98IRIN, Horn migrants risk new routes to reach Europe, Les émigrés de la Corne se risquent dans de nouvelles routes pour atteindre l'Europe, publié le 11 Novembre 2013, en ligne : http://www.irinnews.org/analysis/2013/11/11/horn-migrants-risk-new-routes-reach-europe, consulté le 19/12/2017.

99 Ibid. c'est une traduction du texte arabe en français par le site IRINNEWS.

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« Dès que nous sommes arrivés en prison, ils ont commencé à nous torturer parce que nous étions des émigrés somaliens. C'était horrible de voir ceux qui étaient dans la prison. Nous avons rencontré des Somaliens qui étaient là depuis quatre ou cinq ans. Certains d'entre eux avaient les jambes handicapées et devaient donc ramper. Tu seras choqué si tu vois les séquelles sur leur peau et le sang coulé, certains ressemblaient à des fantômes. On leur demandait pourquoi ils étaient comme ça, ils répondaient qu'ils étaient frappés pendant trois heures chaque jour et que les gardiens de prison empoisonnaient l'eau qu'ils buvaient avec des médicaments, ce qui leur a causé des éruptions cutanées et la sécrétion de pus. Et en raison du manque d'hygiène dans la prison, les poux habitaient chaque partie de leur corps. Dans la prison, des centaines de personnes ont été logées dans une même cellule et il n'y avait pas un endroit où on pouvait dormir parce qu'il y avait trop des gens, hommes et femmes dans une même chambre. On n'était pas nourri et la seule chose qu'on nous donnait c'était l'eau qui nous faisait dormir. Ils ont fait cela pour nous empêcher de fuir de la prison et pour nous faire oublier le besoin de nourriture. Je pense qu'ils ont fait tout cela parce que la Libye est envahie par les étrangers. ».

Il a dû endurer ce calvaire et raconte comment il a été torturé : « D'après les témoignages recueillis par Amnesty International, certains auraient reçu des décharges électriques et auraient été suspendus dans des postures contorsionnées. Depuis la chute du gouvernement de Kadhafi, l'organisation recueilli des informations sur deux migrants dont un Somalien qui sont morts des suites des tortures infligées par des miliciens armés100 ».

Avant l'embarcation des migrants vers l'Europe, les passeurs les emprisonnent par grande quantité dans des maisons inconnues pour qu'ils puissent les envoyer tous en une seule fois. Cet ancien émigré somalien nous raconte comment il s'est fait arrêter avec ses camarades par la police quand les trafiquants les avaient emprisonnés dans une maison à Tripoli :

« La police m'a emmené, battu et frappé avec un bâton électrique. C'était très douloureux. J'ai vu des gens très fatigués, certains avec des os brisés [...]. C'était incroyable de voir comment les gens étaient torturés par l'électricité surtout si on soupçonnait que vous avez tenté de vous échapper. J'ai réussi à m'échapper quand le policier était occupé à attraper un autre jeune homme. J'ai couru dans une autre maison qui était occupée par des femmes, certaines étaient enceintes et d'autre malades. Pendant que nous étions dans cette maison, nous avons réalisé que la police nous cherchait, donc, nous avons commencé à courir. Une femme enceinte souffrait beaucoup et en courant elle

100 AMNESTY INTERNATIONAL, Nous sommes des étrangers nous n'avons aucun droit, publié le novembre 2012, en ligne sur : https://www.amnesty.be/IMG/pdf/mde190202012fr-1-2.pdf , consulté le 26/011/2017.

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a glissé, s'est coincée les jambes et a heurté son le ventre contre le sol. Elle saignait et n'avait aucune aide. Je l'ai entendu pleurer. Je l'ai regardé et elle était gravement blessée. Je l'ai laissé parce que je ne pouvais pas l'aider. J'ai croisé une autre fille qui a perdu conscience, on m'a dit qu'elle était traumatisée et malade. Les gens étaient vraiment désespérés. D'une certaine façon, les plus touchées étaient les femmes. Les hommes pouvaient s'enfuir et en même temps, c'étaient les hommes que la police visait. Ils étaient accusés d'être derrière tous ce qui se passait. Les femmes couraient pour éviter d'être arrêtées et rapatriées101.».

Dans la même perspective, le journal Somali Al-Yawma publié le 13 Mai 2012, deux mois après le témoignage de ce jeune migrant, un article relatif à la question de la souffrance des émigrés somaliens. Le journal soulève que les souffrances des émigrés somaliens en Libye sont causées parles bouleversements politiques dans ce pays. Somali Al-Yawmnous explique que même les Somaliens qui vivaient légalement en Libye avant le soulèvement ont dû fuir le pays, Aujourd'hui dans la Libye en guerre, ils affrontent le pillage et les arrestations arbitraires:

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« Les émigrés somaliens résidant en Libye souffrent à cause des troubles dans ce pays, après que les autorités ont commencé des opérations contre les étrangers qui se trouvent dans leur pays d'une manière illégale. Yonis Mohammed, porte-parole des immigrants somaliens en Libye, lors de sa communication à un média local a déclaré qu'ils sont confrontés à des risques sécuritaires et qu'ils ont peur d'être arrêtés par la police lors de l'expulsion des immigrés clandestins qui tentent de traverser la mer Méditerranée pour l'Europe. Il a aussi souligné que les émigrés somaliens sont dans une situation très

101GEELDOON Mohamed, Op., cit.

101SOMALI AL-YAWM, Des émigrés somaliens face au danger de l'insécuritéenLibye, publie le 13 Mai 2012, enligne : http://www.somaliatodaynews.com/port/2010-01-04-20-51-44/3066-2012-05-13-07-27-10.html, consulté le 11/09/2017.

102 SOMALI AL-YAWN, Op., cit.

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difficile puisqu'ils n'obtiennent pas de séjour légal et chaque jour ils sont exposés à des pillages par des groupes armés inconnus sur leur chemin vers les côtes libyennes. ».

Somali Al-Yawm souligne, premièrement, que les autorités libyennes qui détiennent les immigrés sont contre l'immigration clandestine, pour cette raison, le journal affirme que la police pense que tous les migrants en Libye veulent traverser la Méditerranée, ils sont donc détenus dans des centres de détentions. Deuxièmement, la presse définit deux catégories d'immigrés: ceux qui viennent en Libye pour traverser la Méditerranée et se rendre en Europe et ceux qui travaillent en Libye et envoient une partie de leurs revenus en Somalie pour aider leurs familles. Cependant, la police ne peut pas différencier entre ces deux groupes et les emprisonne tous : « Les représentants de l'État libyen et les miliciens ne font aucune différence entre les migrants, les demandeurs d'asile et les réfugiés. En raison de leur situation au regard de la législation relative à l'immigration, les personnes qui ont besoin d'une protection internationale risquent d'être arrêtées arbitrairement, placées en détention pour une durée indéfinie, torturées et soumises à d'autres mauvais traitements103. ».

Les autorités ont lancé une campagne contre les immigrés clandestins, en effet, les arrestations deviennent très fréquentes et les détenus sont exposés aux tortures, aux séquestrations, certains sont même tués si la rançon n'est pas payée. Comme nous l'avons déjà mentionné, un grand nombre de réfugiés et de demandeurs d'asile en Libye sont soupçonnés d'être des mercenaires du régime KADHAFI, malgré ces rumeurs véhiculées dans les médias et dans les rues, certains intellectuels indiquent que ces fausses rumeurs ont été diffusées par l'OTAN, l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, car ils voulaient déstabiliser le régime libyen à de KADHAFI:

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103 AMNESTY INTERNATIONAL, Op., cit., consulté le 26/011/2017.

104ARAB AL-YAWM, Les émigrés africains fuient la vie pour la torture des centre de détention

libyens, publié le 09/25/2015, en ligne :

http://www.arabstoday.net/326/%D8%A7%D9%84%D9%85%D9%87%D8%A7%D8%AC%D8%B1%D9%88%D9%86-%D8%A7%D9%84%D8%A3%D9%81%D8%A7%D8%B1%D9%82%D8%A9-%D9%8A%D9%87%D8%B1%D8%A8%D9%88%D9%86-%D9%85%D9%86-%D9%88%D9%8A%D9%84%D8%A7%D8%AA-%D8%A7%D9%84%D8%AD%D9%8A%D8%A7%D8%A9-%D8%A5%D9%84%D9%89-%D9%85%D8%B9%D8%A7%D9%86%D8%A7%D8%A9-

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« 590 personnes ont été arrêtées dans une opération [...] Bachir ELAJI, un Somalien de 30 ans en détention, déclare qu'avant la guerre en Libye, la traversée vers l'Europe était extrêmement difficile mais que tu pouvais travailler à Tripoli sans être arrêté [...]. Il poursuit en disant que la situation économique n'est plus aussi forte qu'avant et les immigrés clandestins sont arrêtés et ajoute en disant que les immigrés se rendent en l'Italie pour pouvoir subvenir aux besoins de leur famille. Aussi, il se questionne sur la raison qui laisse une personne effectuer ce voyage si elle a du travail en Somalie et si elle peut subvenir aux besoins de sa famille de 15 personnes. Il n'y a pas d'avenir en Somalie. ELAJI s'était déjà fait arrêter en Libye dans la prison d'Abou Salim ».

Parfois, ils prennent des immigrés en otages et parfois ils les obligent à des travaux forcés dans des champs de plantations ou certains affirment qu'ils avaient travaillé sans salaire. Les trafiquants d'êtres humains vendent ceux qui ne peuvent pas payer la rançon et les propriétaires des champs qui ont besoin de mains d'oeuvre les achètent comme travailleur sans salaire.

D. La rançon imposée par les trafiquants d'êtres humains (le magafe) en langue somalie

Une fois kidnappés par les trafiquants, les émigrés voient leurs rêves se transformer en cauchemar, les trafiquants et pour les emmener en Europe leur impose une rançon que la famille du détenu doit verser, sinon dans le cas où elle ne peut payer, le détenues tué ou vendu dans les marchés comme esclave :

« La traite des êtres humains est un phénomène ancien et constant, malgré les diverses abolitions. Elle consiste à réduire des individus à l'état d'esclave et à les exploiter au maximum de ce qui est possible, pour en tirer le plus grand profit...elle ne peut être dissociée des flux migratoires internationaux et parfois elle emprunte les mêmes itinéraires. Des millions d'hommes, de femmes et d'enfants à travers le monde sont actuellement victimes du trafic d'êtres humains, achetés et vendus comme des marchandises, forcés à se prostituer et à travailler. On retrouve ce commerce aux quatre coins du monde, et il s'agit d'une activité lucrative105. ».

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105 BBC NEWS, Le trafic d'êtres humains : des vies achetées et vendues, publié le 29 juillet 2015, en ligne :

http://www.bbc.com/afrique/monde/2015/07/150728 human trafficking, consulté le 17/03/2018.

68

Cette partie va mettre l'accent sur la rançon que les émigrés payent pour être libérer et la manière dont les trafiquants l'impose à eux, ici nous nous appuierons sur les journaux français car nous n'avons pas trouvé d'articles dans la presse arabe traitant de la rançon.

« Les magafes représentent à la fois une ressource et une menace pour les personnes ayant besoin d'arriver en Europe. Ils ont contribué à l'augmentation de la migration clandestine en permettant aux jeunes personnes de quitter leur pays sans verser de paiement. Ils recrutent des jeunes personnes à qui ils ne demandent pas d'argent, mais lorsque ces jeunes atteignent leur destination, les passeurs appellent alors leur famille et les menacent pour obtenir un paiement106. ».

Un grand nombre de ces migrants sont d'origine somalienne et passent des années sous la torture et l'humiliation des passeurs en Libye, ils deviennent à la fin du périple des esclaves.

Dans le texte ci-dessous, nous allons voir que les émigrés de la Corne de l'Afrique, en particulier les Somaliens traversent le Soudan et empruntent ensuite le Sahara pour la Libye. D'après la chaine France 24, « La route qui traverse la Libye est l'itinéraire le plus souvent choisi par les migrants d'Afrique pour rejoindre l'Europe. L'instabilité absolue dans laquelle est le pays en fait un choix privilégié pour échapper aux contrôles, mais également un pays très risqué ». Tout au long de l'espace migratoire se trouve des bandes armées à la recherche d'émigrés à kidnapper pour recevoir une rançon. D'après IRINNEWS, un immigré somalien en Norvège a raconté ce qui suit sur son périple :

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106 MAJIDI Nassim, Op., cit., consulté le 25/02/2018.

107 IRIN, L'augmentation de l'émigration clandestine en Somalie, publié le 03/09/2012, en ligne : http://www.irinnews.org/fr/report/96964/somalie-augmentation-de-l%E2%80%99%C3%A9migration-clandestine-au-somaliland consulté le 08/12/2017.

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« J'ai commencé mon voyage en traversant l'Éthiopie, le Soudan et la Libye contre 5 000 dollars pour la totalité du voyage. Nous étions en contact avec des passeurs en Éthiopie, au Soudan et en Libye, a-t-il dit. Dès que nous avons atteint la ville frontalière libyenne de Sabha, nous avons été livrés comme des animaux à un libyen qui touchait 800 dollars par tête, il nous battait et torturait avec des câbles électriques. Ensuite, à bord d'un pick-up et d'une land-Cruiser, nous sommes arrivés à Tripoli où nous avons retrouvé le bateau vers l'Europe, loué par des passeurs arabes et somaliens108. ».

Après ce long périple, le jeune homme a eu la chance de rentrer en Europe et fait désormais partie des Somaliens qui vivent en Norvège clandestinement. Ce qui est important de souligner c'est qu'ils n'obtiennent pas rapidement les documents officiels pour rester et vivre légalement dans ce pays et cette illégalité représente le premier problème auquel ils sont confrontés en Europe, la majorité des demandeurs d'asile logent dans des foyers et pour les sans domiciles fixes, ils vivent dans la rue.

L'extrait suivant est tiré d'al-`Arab al-Yawm et traite de l'histoire de Fedussa qui a survécu à la traite des êtres humains, il nous décrit sa souffrance causée par les trafiquants et comment elle a été exploitée en dévoilant la violence exercée sur elle pendant le trajet :

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« Fedoussa une migrante somalienne de 20 ans a dévoilé les dangers qui menacent la vie des réfugiés et des émigrés. Née en Somalie, Fedoussa a déclaré s'être échappée de l'Éthiopie après que son père et ses deux frères ont été tués à cause des violences au pays. Elle sentait qu'elle n'avait pas d'autres choix que payer 4800 dollars à une bande de passeurs. La jeune femme a subi des violences, elle a été affamée et menacée de mort par des bandits. ».

108 Ibid.

109 ROLA ISSA WASHINGTON, Une somalienne raconte le viol et le meurtre des émigrées par les passeurs, publié le 22/08/2015,

enligne http://www.arabstoday.net/43/%D8%B5%D9%88%D9%85%D8%A7%D9%84%D9%8A%D8%A9-%D8%AA%D8%B1%D9%88%D9%8A-%D8%A7%D8%BA%D8%AA%D8%B5%D8%A7%D8%A8-%D8%A7%D9%84%D9%85%D9%87%D8%A7%D8%AC%D8%B1%D8%A7%D8%AA-%D9%88%D9%82%D8%AA%D9%84%D9%87%D9%86-%D8%B9%D9%84%D9%89-%D8%A3%D9%8A%D8%AF%D9%8A-

%D9%85%D9%87%D8%B1%D8%A8%D9%8A-%D8%A7%D9%84%D8%A8%D8%B4%D8%B1, consulté le 21/01/2018.

70

Elle a payé cette importante somme d'argentpour rejoindre l'Europe et après être arrivée en Libye elle a été détenue et battue avec d'autres émigrés. Le journal News Beat a interviewé cette femme à son entrée en Italie puis a publié sur son site internet le 20/8/2015 que sa mère avait vendu la maison familiale pour la libérerdes mains des passeurs, « Ils ont réclamé 3000 dollars pour le voyage, la mère de Fedussa a vendu la maison familiale et a donné l'argent à sa fille pour qu'elle puisse partir110. ».

Sans père ni frères, sa mère sans moyens financiers a dû vendre sa maison pour libérer Fedussa, sa fille était dans une situation difficile où elle faisait face à la mort, pour les passeurs sa vie valait 3000 dollars. Le cas de cette famille n'est pas unique, puisque la majorité des Somaliens n'ayant d'actifs financiers pour sauver leurs enfants vendent leurs maisons, voitures, bijoux ... etc. Pour les familles n'ayant pas les moyens financiers pour libérer leurs enfants, les membres d'une même tribu cotisent pour racheter la liberté de la victime, c'est ici une preuve démontrant la solidarité qui règne au sein des tribus, et beaucoup de détenus ont été libérés grâce à ce système tribal.

La rançon est donc l'une des principales cause et conséquence de l'enlèvement des émigrés, en effet, les passeurs profitent de cette exploitation, ils kidnappent leurs victimes en contrepartie d'une rançon qui va de 300 jusqu'à 8000 euros. Ils gardent les détenus attachés dans des maisons secrètes, et en attendant le paiement de l'argent de la rançon, les émigrés font face à toutes sortes d'abus. D'après al-Jazeera, les trafiquants d'êtres humains enlèvent même les mineurs pour obtenir cette rançon :

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« Quant à l'enfant somalien Ismail, il a raconté à l'organisation Sauver Les Enfants, qu'après leur arrivée en Libye, ils ont été enlevés par une bande qui réclamait 300

110 NEWSBEAT, Fedussa's story: Surviving the Mediterranean migrant crossing, L'histoire de Fedussa, unesurvivante de la traverse méditerranéenne, publié le 20 Août 2015, http://www.bbc.co.uk/newsbeat/article/33987125/fedussas-story-surviving-the-mediterranean-migrant-crossing, consulté le 25/02/2018.

111 AL-JAZEERA, Les émigrés pour l'Europe et les histoiresd'agressions et d'extorsions, publié le

16/08/2015, enligne :

http://www.aljazeera.net/news/presstour/2015/8/16/%D8%A7%D9%84%D9%85%D9%87%D8%A7%D8%AC%D8%B1%D9%8 8%D9%86-%D8%A5%D9%84%D9%89-%D8%A3%D9%88%D8%B1%D9%88%D8%A8%D8%A7-%D9%88%D9%82%D8%B5%D8%B5-%D8%A7%D9%84%D8%B6%D8%B1%D8%A8-

%D9%88%D8%A7%D9%84%D8%A7%D8%A8%D8%AA%D8%B2%D8%A7%D8%B2 , consulté le 15/01/2018.

71

dollars par personne. Avant que sa mère ne lui envoie de l'argent, Ismail a été détenu pendant un mois au cours duquel lui et ses compagnons ont été battus à plusieurs reprises sans aucune raison. ».

Comme nous l'avons déjà signalé, les trafiquants d'êtres humains frappent ceux qui n'ont pas pu payer la rançon devant les nouveaux détenus pour leur montrer l'importance de la payer. GUEELDOON, l'auteur de Nous avons embrassé le sol, a révélé dans son ouvrage qu'avec ses camarades, ils avaient été battus et torturés, d'après lui, ils étaient entassés dans une petite pièce dans laquelle les passeurs venaient réclamer pour leur liberté 1400 dollars par personne. Selon GEELDOON, les détenus sont dans l'incapacité de payer cette somme puisque tout leur argent a été dépensé durant le voyage. GEELDOON relate les traitements subis :

«Ils disaient: « on va vous montrer que vous êtes des animaux et non des êtres humains comme vous le croyez. Nous allons vous montrer ce qui arrive à celui qui ne paie pas en vous présentant une personne de votre groupe qui est arrivé avant vous et qui n'a pas pu nous payer ». Ensuite, ils ont ramené un jeune somalien et l'ont étendu sur une grande table, quatre hommes forts l'ont tenu par les mains et les pieds et l'ont frappé aux genoux. Puis, ils ont amené des clous et un marteau et ont cloué ses paumes à la table. Il criait à nous terrifier, mais on ne pouvait rien faire puisque quand tu essayais de bouger on mettait une épée sur ton cou. Nous étions impuissants lorsque le jeune homme saignait et hurlait. Et toujours cloué à la table, ils l'ont emmené on ne sait où, on ne sait toujours pas s'il a été assassiné ou pas. Ils se sont emparés de certains d'entre nous et nous menaçaient en disant : « Nous ferons de même avec ceux-là si vous ne nous payez pas demain à l'heure communiquée. Nous allons aussi clouer cette femme enceinte avec son bébé et le reste devra payer 100 dollars supplémentaires si vous ne réglez pas à l'heure communiquée, vous devrez payer 2 000 dollars ». Nous étions terrifiés et nous ne savions pas quoi faire112 ».

D'après l'OIM, « les contrebandiers adaptent leurs activités criminelles aux nouvelles technologies. Pour rançonner des familles de migrants qu'ils retiennent en otage dans des lieux secrets en Libye, ces passeurs ont trouvé l'idée de filmer et de faire parvenir ensuite à ces familles les images de ces maltraitances. Des familles à qui on a exigé parfois entre 8.000 et 10.000 dollars afin que leurs proches ne

112GEELDOON Mohamed, Op., cit.

112 Refugiés et migrants, L'OIM dénonce la diffusion d'une vidéo montrant des migrants maltraités pour obtenir des rançons, publiéle 16/06/2017, en ligne : https://refugeesmigrants.un.org/fr/libye-loim-d%C3%A9nonce-la-diffusion-dune-vid%C3%A9o-montrant-des-migrants-maltrait%C3%A9s-pour-obtenir-des-ran%C3%A7ons, consulté le 19/03/2018.

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soient pas tués113». Parfois, ils arrivent que les passeurs vendent les émigrés comme esclave à des sommes allant de 200 jusqu'à 4000 dollars, ces derniers émigrés font partie de ceux qui n'ont pas le moyen de régler la rançon.

Récemment une nouvelle technique a été inventée par les trafiquants, en effet, désormais ils publient des vidéos en transmission directe sur les réseaux sociaux les montrant entrain de torturer les victimes pour forcer leur proche à payer la rançon. En juin 2017, les trafiquants ont publié une vidéo dans laquelle ils montraient la torture de femmes somaliennes, dans cette vidéo apparaissait une jeune fille qui a été violement torturée : Jama Sumaya, 15 ans, est une de ces Somaliennes. Elle a décidé d'aller en Europe mais elle est tombée entre les mains d'un groupe qui réclamait 8.500 dollars américains en échange de sa libération. Ils l'ont filmée recevant des coups de fouet, les mains et les pieds attachés au sol. La vidéo a beaucoup circulé et a donné lieu à une collecte de fonds au sein de la communauté somalienne, qui a réuni pas loin de 15.000 dollars pour la libérer (Claire Bénaud, 2017).

Le 9 juin 2017, un journaliste somalien qui travaille pour Universal TV, chaine satellitaire en langue somali a publié sur son compte Face book une vidéo avec des jeunes émigrés somaliens détenus en Libye. Cette vidéo a reçu beaucoup d'échos au sein de la communauté somalienne et fut partagée sur les réseaux sociaux pendant plusieurs semaines. Ces émigrés racontaient leurs souffrances, ils ont affirmé que les passeurs les battaient jour et nuit. Aussi, l'organisation internationale pour les migrants, OIM, a précisé dans un rapport que le nombre de détenus était de 260 personnes somaliennes :« L'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a dénoncé la diffusion sur Face book d'une vidéo montrant 260 migrants somaliens retenus captifs dans le sud de la Libye par des passeurs qui cherchent à obtenir des rançons de leurs familles. La vidéo d'une demi-heure montre des dizaines d'hommes ou d'enfants, amaigris, affaiblis, entassés sur le sol. Ces 260 migrants ou réfugiés somaliens... disent ne pas recevoir de nourriture et être battus, torturés114». Quant à France 24, elle a consacré un article sur cette dernière vidéo en affirmant que chaque détenu était contraint de régler une rançon de 8000 dollars. En Somalie, 800 euros est un montant assez conséquent que la majorité des Somaliens ne possèdent :

113 Ibid.

114ONU INFO, L'IOM dénonce la diffusion d'une vidéo montrant des migrants maltraités pour obtenir des rançons, publié le 15 juin 2017, en ligne: https://news.un.org/fr/story/2017/06/359372-libye-loim-denonce-la-diffusion-dune-video-montrant-des-migrants-maltraites, consulté le 18/04/2018.

73

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« Des centaines de migrants parqués et entassés dans une pièce où ils s'assoient par terre. Et un somalien affamé, allongé, avec sur le dos un imposant bloc de béton, montrant ainsi le peu de dents qui lui reste après qu'elles le lui soient arrachées. Ce ne sont là que quelques exemples choquants de migrants somaliens détenus par des trafiquants en Libye116. ».

Figure 5 : Capture d'écran de la vidéo relayée plusieurs milliers de fois sur les réseaux sociaux où on aperçoit des émigrés entassés et assis sur le sol.

Durant l'entretien, les émigrés ont expliqué pendant trente minutes leur quotidien dans les centres de détention. Ils affirment avoir été torturés par les trafiquants, en effet, le jeune homme avec le bloc de béton posé sur le dos affirme avoir été puni car il n'a pas été en mesure de payer une rançon de 8 000 dollars : « J'ai ce bloc sur le dos depuis trois jours, ça

115 France 24,Les souffrances des émigrés somaliens en Libye, entre maltraitance et viol, le 21 juin

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consulté le 03/12/2017.

116 France 24, Torture, viols... des somaliens racontent leur cauchemar en Libye, publié le 20 juin 2017, en ligne sur : http://observers.france24.com/fr/20170620-torture-viols-folie-somaliens-racontent-leur-cauchemar-libye , (consulté le 22/02/2018).

me fait vraiment très mal ». Un des autres émigrés explique que les émigrés libéraient l'homme de son bloc quand leurs geôliers s'absentaient, et le lui remette sur le dos quand ils reviennent, s'ils sont découverts ils seront punis pour l'avoir aidé''7. ».

Pour conclure cette partie, nous avons mis en lumière l'existence d'agressions contre les émigrés somaliens dans les pays de transit et en particulier la Libye. Ces passeurs qui avant le départ des émigrés leur promettent une vie de rêve en Europe, leur facilite le voyage jusqu'en Libye en leur offrant un certain confort, comme la nourriture, les habits et les frais de transport, puis les entassent dans les centres détentions une fois arrivés en Libye et leur impose au prix de leurs vie le paiement de rançons exorbitantes. Enfin, comme les détenus ne possèdent les moyens de payer ces sommes considérables, les passeurs usent d'immoralité et d'inhumanité en les torturant ou en les vendant comme esclaves dans les marchés.

74

''7 Ibid.

75

Chapitre III

:

Étude sur les émigrés clandestins somaliens

morts en Méditerranée depuis l'année 2011

Jusqu'à 2017

76

1. Le soulèvement en Libye et les victimes somaliennes en 2011

Dès le début du soulèvement contre le régime de KADHAFI en 2011, des milliers d'immigrés somaliens qui résidaient en Libye ont dû fuir le pays pour ne pas être tués ou emprisonnés par les opposants au régime. C'était aussi le cas des personnes qui vivaient en Tunisie, Égypte et Syrie, et qui ont dû traverser la Méditerranée pour fuir les bouleversements. Ainsi on observe que « la route de la Méditerranée centrale menant de l'Afrique subsaharienne vers l'Italie, en passant par la Libye, ou l'Égypte est redevenue le premier point d'accès vers l'Europe, comme au début de la crise migratoire. Et parmi les personnes qui empruntent cette route, des somaliens. (Le monde.2016.) ».

Ici, en étudiant la presse arabe, francophone et anglophone nous allons, dans un premier temps, analyser les événements de la période allant de 2011 jusqu'à 2017 et dans un deuxième temps, étudier la souffrance des émigrés qui meurent noyés après le naufrage de leurs bateaux depuis la Libye.

En 2011 ont commencé les manifestations à Benghazi contre le régime de KADHAFI, ces manifestations marquent l'apparition de milices armées s'opposant au régime, et la situation devient critique pour les étrangers subsahariens et somaliens vivant en Libye et qui ont dû fuir le pays pour aller se réfugier dans les pays voisins ou en Europe, ces personnes étaient soupçonnées de faire partie des mercenaires venus pour combattre avec le régime. Ainsi et d'après UNHCR « La Libye était traditionnellement un pays de transit et de destination pour les réfugiés. Le haut-commissariat pour les réfugiés a accordé le statut de réfugié à 8 000 personnes dont des somaliens. Les africains semblent être particulièrement en danger car ils sont soupçonnés d'être des mercenaires étrangers118. ».

À la mi-février 2011, après avoir fui les violences en Libye, beaucoup de ces migrants sont restés bloqués aux frontières tunisiennes et égyptiennes. L'agence des Nations

118 UNHCR, Le chef du HCR appelle à évacuer les personnes essayant de quitter la Libye, publié le 28 février 2011, en ligne : http://www.unhcr.org/fr/news/press/2011/2/4d6bb9cfc/chef-hcr-appelle-evacuer-personnes-essayant-quitter-libye.html?query=les%20somaliens%20en%20libye , consulté le 04/12/2017.

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Unies pour les réfugiés a lancé un appel de fonds d'un montant de 32 millions de dollars auprès des donateurs afin de financer ses opérations de secours d'urgence visant à répondre aux besoins humanitaires engendrés par la crise en Libye. Ces fonds supplémentaires étaient utilisés pour répondre aux besoins en matière de protection, et en matière d'aide humanitaire.(Divers,Leo DObbs, 2011).

Et d'après le HCR « un somalien âgé de 21 ans interviewé à la frontière tunisienne a expliqué avoir fui Tripoli après que sa femme et son bébé aient été tués par des tirs croisés. Il a expliqué que des témoins lui avaient parlé de cinq africains sub-sahariens qui ont également été tués sous leurs yeux dans la capitale libyenne. Enfin, il a affirmé qu'ils ont été attaqués, parce que les milices contre le régime pensaient qu'ils travaillaient pour Khaddafi119. ».

Il est important de noter que la Libye n'a pas adopté un cadre législatif protégeant les migrants et les demandeurs d'asile, ce qui signifie qu'en cas de situations de danger, d'insécurité et d'instabilité, ces personnes ne seront pas protégées, et cette absence de loi protégeant les immigrés les oblige donc à quitter le pays.

En mars 2011, la guerre entre les forces du dirigeant KADHAFI et les rebelles s'est aggravée faisant la mort de milliers de personnes. En mars 2011, le fils de Kadhafi,Saif al-Islam affirma dans un communiqué que si la Libye est attaquée par la coalition occidentale alors elle deviendra comme la Somalie : « La Libye pourrait devenir la Somalie de la Méditerranée. Vous aurez des pirates en Sicile, en Crête et à Lampedusa. Vous verrez des millions de migrants clandestins. La terreur sera à vos portes.

Le 30 mars de la même année, l'OTAN frappe la Libye, et depuis, un flux migratoire très important vers l'Europe commença, aussi, au cours de cette période de nombreux migrants somaliens provenant de la Libye sont arrivés en Italie le 29 mars 2011 à bord de bateaux : «cinq bateaux sont arrivés en Italie depuis l'éclatement du conflit, avec 1 481 personnes à leur bord, faisant pression sur les capacités d'accueil des personnes susceptibles d'avoir besoin d'une protection. Deux autres bateaux sont arrivés à Malte avec 535 passagers, la plupart sont des Somaliens. (UNHCR, 29,03/2011) ».

119 UNHCR, Le HCR demande 32 millions de dollars pour les opérations d'urgence relatives à la crise en Libye, publié le 07 mars 2011, en ligne : http://www.unhcr.org/fr/news/stories/2011/3/4d75f284c/hcr-demande-32-millions-dollars-operations-durgence-relatives-crise-libye.html?query=les%20somaliens%20en%20libye, consulté le 07/12/2017.

78

L'arrivée de ces bateaux en Italie a été suivie par plusieurs autres arrivées tout aussi importantes, les bateaux sur les côtes libyennes étaient surchargés et les passeurs en profitaient, l'émigration est devenue financièrement rentable pour eux. Une semaine après l'arrivée de ces bateaux, d'autres se sont noyés dans la Méditerranée : « Plus de 220 réfugiés somaliens, érythréens et ivoiriens se sont noyés mercredi matin lorsque leur bateau a chaviré à environ 39 milles marins au sud de l'île italienne de Lampedusa. C'est la pire tragédie survenue ces dernières années en Méditerranée dans le cadre de ces tentatives de traversée120.

».

Le 8 avril 2011, après cette tragédie, le haut-commissariat pour les réfugiés appelle l'union européenne à mettre en place d'urgence des mécanismes plus fiables et plus efficaces pour le sauvetage en mer, (UNHCR, 2011).

Certains de ces migrants se trouvent bloqués aux frontières tunisienne et égyptienne avec la Libye et ne savent où aller, en effet, Simon BURROUGHS, coordinateur d'urgence de MSF121 à Tripoli, explique que : « beaucoup de ces personnes avaient déjà fui les combats dans leur pays d'origine, comme la Somalie ou d'autres pays africains et certains sont venus dans ces camps de fortune à la recherche d'un moyen de rejoindre l'Europe par bateau, d'autres sont venus chercher refuge pour se protéger des combats à Tripoli. (MSF.2011)».

Le haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a soulevé la même problématique que le MSF en déclarant dans un article le 20 avril 2011 que : « contrairement à la plupart des étrangers qui ont fui la Libye depuis la mi-février, des centaines des somaliens bloqués aux frontières tunisienne et égyptienne avec la Libye ne peuvent pas retourner dans leur pays car leur vie y serait menacée122. ».

Le nombre des mortalités dans la Méditerranée ne cessent d'augmenter depuis le début du conflit libyen, dans un naufrage 19 personnes dont 16 d'origine somalienne y sont mortes. Durant le mois de mai de la même année, un diplomate somalien affirma que des Somaliens

120UNHCR, Le HCR appelle les Etats à respecter les principes du sauvetage en mer et du partage de la charge, le 08 avril 2011, en ligne :

http://www.unhcr.org/fr/news/press/2011/4/4da2b1d0c/hcr-appelle-etats-respecter-principes-sauvetage-mer-partage-charge.html?query=les%20somaliens%20en%20libye , consulté le 11/02/2018.

121Médecin sans frontière.

122SCHÖNBAUER Roland et DOBBS Leo,Des réfugiés arrivent au Centre de transit d'urgence en Roumanie depuis la Tunisie, publié le 20 avril 2011, en

ligne : http://www.unhcr.org/fr/news/stories/2011/4/4db04718c/refugies-erythreens-arrivent-centre-transit-durgence-roumanie-tunisie.html?query=des%20refugi%C3%A9s%20somaliens%20en%20libye , consulté le 06/12/2017.

79

fuyant la Libye sont morts noyés : « un diplomate somalien à Tripoli a affirmé que 16 corps sans vie ont été retrouvés, y compris ceux de deux bébés. Toutefois le bilan reste incertain. (SybellaWILKES, et Leo Dobbs, 2011) ».

Le 10 mai et après de cette tragédie, le haut-commissariat pour les réfugiés demande aux dirigeants politiques d'Europe de mettre en pratique des mesures efficaces et fiables pour sauver la vie des migrants, en effet : « le HCR déplore la toute dernière tragédie lors de laquelle des personnes ont péri en mer après avoir fui la Libye par bateau. L'agence des Nations Unies pour les réfugiés a réitéré son appel aux États européens pour améliorer d'urgence les dispositifs de sauvetage en mer123. ».Cette solution proposée par cette organisation internationale a encouragé les pays européens à mettre en place des solutions et des systèmes de sauvetages plus efficaces pour sauver la vie des migrants.

Lorsque la majorité des villes libyennes sont devenues sous le contrôle des rebelles armés, les Somaliens étaient en danger et donc certains comme on l'a vu fuyaient car soupçonnés d'être mercenaires ou étaient juste visées à cause de leur couleur de peau- une pratique qui n'existait pas auparavant en Libye - les autres restaient par dépit dans le pays. Le HCR relate l'histoire d'un de ces Somaliens restés en Libye, il s'appelle Ahmed, a la trentaine, enseigne à l'université depuis 2007 et souhaite sans le pouvoir quitter la Libye à cause des soulèvements qui mettent sa vie en danger.

La plupart des quartiers de Tripoli sont désormais entre les mains des rebelles, les africains sub-sahariens comme Ahmed subissent la discrimination, d'après lui, les personnes de couleur noire sont attaquées et explique que les habitants des quartiers établissent des barrages routiers pour empêcher les noirs de peaux de se déplacer. Il a d'ailleurs indiqué que les africains ne pouvaient pas quitter leurs domiciles, pas même pour aller chercher de l'eau. Et quand les provisions alimentaires sont épuisées, les rebelles attaquent ces immigrés sortis de chez eux pour acheter de quoi manger124. ».

123 WILKES Sybella, Améliorer les dispositifs de sauvetage après les naufrages en Méditerranée, publié le 10 mai 2011, en ligne : http://www.unhcr.org/fr/search?page=search&skip=18&docid=&query=les%20somaliens%20en%20libye , consulté le 07/12/2017.

124EDWARDS Adrian, Les Africains sub-sahariens ciblés en Libye, publié le 26 Août 2011, en

ligne : http://www.unhcr.org/fr/news/stories/2011/8/4e5b6097c/hcr-inquiet-africains-sub-sahariens-cibles-libye.html?query=Les%20Africains%20sub-sahariens%20cibl%C3%A9s%20en%20Libye, consulté le 07/12/2017.

80

À cause des violences et des menaces auxquelles ils font face, beaucoup de migrants dont des Somaliens quittent ce pays pour traverser la Méditerranée. À cet égard, Sybella WILKES, porte-parole du HCR a déclaré que l'année 2011 atteint un important taux de traversées de la Méditerranée, que le nombre de migrants morts en Méditerranée en tentant la traversée vers l'Italie dépasse le millier, et ceux qui sont bloqués en Libye dans des conditions dangereuses, sont le plus souvent enfermés dans des centres de détention125. ».

2. Une athlète somalienne, victime de la Méditerranée

Selon les estimations du haut-commissariat pour le réfugié, plus de 1500 personnes se sont noyées ou sont portées disparues depuis leur tentative de traverser la Méditerranée en 2011, année où a été observé un nombre record pour les arrivées en Europe, allant jusqu'à 58 000 personnes, (UNHCR.2012).Cette année était donc la plus meurtrière depuis que l'organisation a commencé à enregistrer les statistiques des migrants morts en Méditerranée.

La guerre entre le régime de KADHAFI et les rebelles armés depuis la mi-février 2011 a mené à la chute de Kadhafi le 20 octobre 2011. Depuis, la condition des migrants s'est aggravée puisque, « la guerre civile qui a suivi la chute du régime de Kadhafi en octobre 2011 a encore compliqué la situation intérieure du pays, désormais confrontés aux affrontements entre deux gouvernements rivaux et la fermeture les frontières des pays européens. Dans ce contextemarqué par l'absence de tout cadre juridique ou humanitaire, les migrants sont devenus la proie des milices locales : « Tout le monde est autorisé à faire ce qu'il veut des immigrés. Cela donne lieu à une exploitation brutale, marquée par une multiplication des kidnappings, (Le monde, 2015) ». Le 31 Janvier 2012, « Les garde-côtes libyennes ont informé le haut-commissariat pour les réfugiés que 15 corps sans vie, tous identifiés comme étant ceux de ressortissants somaliens, ont été rejetés par la mer sur différentes plages en Libye, y compris 12 femmes, deux hommes et un bébé. Il a été confirmé plus tard que toutes les personnes qui avaient péri étaient des somaliens provenant de l'installation de fortune située à Tripoli126...».

125 UNHCR, Triste record pour les traversées de la Méditerranée par les migrants et les réfugiés en 2011, publié le 31 janvier 2012, en ligne : http://www.unhcr.org/fr/news/briefing/2012/1/4f280ad3c/triste-record-traversees-mediterranee-migrants-refugies-2011.html , consulté le 26/11/2017.

126Sybella WILKES, Op., cit.,

81

Le 2 avril 2012, al-Jazeera a rapporté dans un article que les jeunes somaliens représentent 95 %127 de tous les émigrés somaliens. Le 23 avril 2012, une athlète somalienne, Samia YOUSOUF OMAR128 est retrouvée noyée en Méditerranée parmi d'autres émigrés. L'histoire de cette jeune athlète a fait le tour du monde puisque la sprinteuse avait participé aux jeux olympiques de Pékin en 2008, et en 2010elle a quitté la Somalie pour la Libye en passant par l'Éthiopie puisa embarqué avec des dizaines d'autres migrants clandestins à bord d'un bateau pneumatique.

Août 2012, Abdi BILE ABDI, ancien athlète somalien de haut niveau et médaillé d'or en 1987 s'est exprimé sur la mort de Samia : « Les larmes aux yeux, Abdi BILE rappelle que la jeune fille portait fièrement le drapeau somalien aux Jeux Olympique de Pékin et regrette que quatre ans plus tard, son sort ne suscite qu'indifférences. Sans cette communication, la mort de la jeune femme serait sans doute passée inaperçue129. ». BILE ABDI, était le premier à avoir communiqué la mort de l'athlète à la presse italienne qui l'a diffusé et qui ensuite a été relayée dans la presse arabophone et anglophone. La mort de cette jeune athlète a bouleversé la presse du monde, en effet, de nombreuses presses lui ont consacré des documentaires et des articles. Bbc al-Arabiya a aussi publié un article sur la mort de Samia le 21 Août 2012 en s'exprimant ainsi :

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127 AL-JAZEERA,L'émigration clandestine, les souffrances des Somaliens, publié le 02 avril 2012, en ligne : http://www.aljazeera.net/news/reportsandinterviews/2012/4/2/%D8%A7%D9%84%D9%87%D8%AC%D8%B1%D8%A9-

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%D8%A7%D9%84%D8%B5%D9%88%D9%85%D8%A7%D9%84%D9%8A%D9%8A%D9%86, consulté le 06/11/2017.

128LE IMMAGINI DEL DRAMMA, Le corps de Samia sans vie dans une vidéo, en ligne :

http://www.youtube.com/watch?v=XarIhLp0AUw&feature=player_embedded, consulté le
04/03/2018.

129LE JEUNEVéronique, Hommage en BD à Samia Yusuf Omar, athlète somalienne qui rêvait de l'Olympe, en ligne : http://geopolis.francetvinfo.fr/jo-hommage-en-bd-a-samia-yusuf-omar-athlete-somalienne-qui-revait-de-l-olympe-111187, consulté le 28/12/2017.

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« L'athlète somalienne Samia YOUSEF OMAR est morte noyée lors de sa tentation de rejoindre l'Europe à bord d'un bateau transportant des émigrés. Des rapports indiquent que le bateau qui la transportait a coulé lors d'une tentative de traversée entre la Libye et l'Italie en avril dernier. Aux Jeux Olympiques de Pékin en 2008, Samia a couru une course de 200 mètres bien qu'elle n'ait reçu aucun entrainement officiel. En effet, la sprinteuse somalienne s'entrainait dans la capitale somalienne, Mogadiscio, en faisant face à la guerre, à la pauvreté, à l'absence totale des infrastructures sportives et avec le refus de certaines régions de la participation des femmes aux jeux sportifs. Des rapports indiquent qu'elle avait voyagé vers l'Éthiopie en octobre 2010, à la recherche d'un entraîneur pour l'aider à s'entraîner pour se qualifier aux Jeux Olympiques de Londres 2012. La nouvelle de la mort de l'athlète est rendue publique lorsque Abdi BILE, l'ancien athlète olympique somalien a évoqué sa disparition lors d'une presse conférence. ».

Ici, la chaine britannique BBC soulève deux principaux éléments qui ont poussé la sprinteuse à l'émigration clandestine. Premièrement, elle était passionnée par les l'athlétisme et pour s'entrainer pour les prochains Jeux Olympiques elle voulait donc quitter son pays pour trouver un entraineur qui puisse l'aider à s'améliorer et à gagner les Jeux Olympiques de Londres 2012. Deuxièmement, les menaces subies de la part du groupe gihadiste al-Ðabâb qui refuse la participation des femmes à ces jeux ont obligé la jeune sprinteuse à fuir le pays.

La mort de la sprinteuse a même été relayée dans la presse française, ainsi et selon le Figaro, « La sprinteuse Samia Yusuf Omar, remarquée aux JO de Pékin, a tenté de rejoindre clandestinement l'Italie à bord d'une embarcation de fortune. Un destin tragique. L'athlète Samia Yusuf Omar a péri noyée en avril dernier alors qu'elle tentait de rejoindre l'Italie depuis les côtes libyennes. La sprinteuse, qui avait représenté la Somalie aux JO de Pékin en

130BBC AL-?ARABIYYA, Noyade de Samia YOUSEF, la sprinteuse somalienne olympique, dans une

tentative de rejoindre l'Europe, publié le 21/08/2012, en ligne :
http://www.bbc.com/arabic/sports/2012/08/120821_somaliaolympic.shtml , consulté le 25/09/2017.

83

2008, n'a pas survécu à une traversée en Méditerranée à bord d'une embarcation de fortune, relatent mardi des médias italiens131. ».

figure 6 : Une photo de Samiya Yousef132.

Le 23 août 2012, la chaine télévisée France 2 annonce la mort du Samia YOUSEF en ces termes : « Une jeune athlète somalienne est morte en avril, noyée dans la Méditerranée, après avoir essayé de rejoindre les côtes italiennes sur une embarcation de fortune, avec des migrants clandestins. Elle a participé aux Jeux olympique de Pékin en 2008, elle a disputé le 200 mètres, sous les couleurs de la Somalie, et était une des deux seules athlètes à représenter ce pays. Samia Youssouf Omar voulait rejoindre l'Europe pour trouver un coach italien qui l'aurait préparé aux Jeux Olympiques de Londres en 2012133. ».

D'après une journaliste d'al-Jazeera, qui était en contact avec la sprinteuse car elle voulait écrire un livre sur sa vie, affirme que la jeune athlète voulait se rendre en Italie pour chercher un entraineur qui puisse l'entrainer aux Jeux Olympique de Londres en 2012. Cependant, les rêves de Samia se sont brisés en Méditerranée, mer qui est devenue pour des milliers d'émigrés un cimetière anonyme134.

131LE FIGARO,Une athlète somalienne meurt au large de la Libye, publié le 22/08/2012, en ligne :

http://www.lefigaro.fr/international/2012/08/22/01003-20120822ARTFIG00519-jo-une-athlete-somalienne-meurt-au-large-de-la-libye.php,

consulté le 18/08/2017.

132 MRAP, Samia Yusuf Omar, tragique héroïne des temps modernes, publié le 09/08/2016, en ligne : http://www.mrap-landes.org/spip.php?article844 , consulté le 17/12/2017.

133 DARNA TELEVISION, Le destin tragique de l'athlète somalienne Samia OMAR noyée lors d'un

voyage clandestin, publié le 23 aout 2012, en ligne : https://www.youtube.com/watch?v=8MuUsYTYlfk , consulté le 17/12/2017.

134 Ibid.

84

Le journal local somalien Somaliland a insisté sur le deuxième élément relevé par la BBC, selon lequel Samia aurait émigré car elle avait été menacée par le groupe al-abâb :

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« YOUSSEF a reçu des menaces de mort et elle a été intimidée à son retour en Somalie après sa participation aux Jeux olympiques de Beijing en 2008, à une époque où le groupe extrémiste al-abâb contrôlait certaines parties de la capitale. Selon al-Jazzera, YOUSSEF espérait peut-être trouver un entraîneur en Europe pour l'aider à atteindre les Jeux olympiques de Londres. ».

Afin que l'histoire de la jeune sprinteuse ne soit rapidement oubliée de tous, Giuseppe CATOZZELLA, un écrivain et journaliste italien a rédigé un roman sur la vie de Samia, et d'après Cristina DE STEFANO, c'est « un livre magnifique, juste par son ton et sa délicatesse, triste par son épilogue, mais plein de vie et d'énergie, comme l'était Samiya. Qui, grâce à lui, vivra pour toujours ». Ayant comme titre Ne me dit pas que tu as peur, l'auteur retrace dans son roman, la vie de Samia, en rendant vivant son personnage qui en un récit dévoile son histoire avec la voix d'une enfant, puis d'une jeune femme, qui, consciente de son talent, n'a jamais eu peur d'affronter la solitude136.

Dans un quartier somalien à Rome, les réfugiés somaliens qui y vivent se souviennent du symbole qu'elle incarnait. Mahmoud, refugié somalien en Italie a dit : « elle était la première Somalienne à devenir une sportive reconnue, je ne pouvais retenir mes larmes en regardant ses vidéos137... ».

L'émigration n'est pas donc cantonnée sur les étudiants ou les personnes sans emploi,

elle touche même les athlètes et des personnalités public, qui entre vivre dans un pays en guerre et atteindre leurs rêves préfèrent traverser la Méditerranée qui n'est pas sans péril.

Le8 mai 2012, des émigrés somaliens ont réussi à rentrer à Malte et ont confirmé la

mort de sept personnes voyageant avec eux : « des survivants épuisés sont arrivés à bord d'un

135 https://somalilandtoday.org/2012/08/26/6225

136 FNAC, en ligne : https://livre.fnac.com/a7029393/Giuseppe-Catozzella-Ne-me-dis-pas-que-tu-as-peur, consulté

27/11/2017.

137 DARNA TELEVISION, Op., cit.,consulté le 17/12/2017

bateau qui transportait des réfugiés somaliens sur l'une des plages les plus fréquentées de Malte ce week-end. Ils ont indiqué au HCR que cinq hommes et deux femmes avaient trouvé la mort à bord durant le voyage long d'une semaine depuis la Libye. Le bateau a accosté à Riviera Bay samedi et il transportait 90 personnes à son bord. Les services d'urgence ont été alertés par les personnes qui passaient la soirée à la plage138».

Après cette analyse, on observe que la mort de cette athlète a été relayée dans la presse nationale et internationale, l'objectif de cette large communication est de sensibiliser les jeunes voulant traverser clandestinement la Méditerranée, et de vouloir mettre fin à ce phénomène qui touche toutes les catégories sociales.

3. Appel du premier ministre français après la mort d'environ 300 émigrés clandestins somaliens en 2013

Dans cette partie, nous allons étudier les causes de la mort des émigrés somaliens en Méditerranée depuis l'année 2013 jusqu'à 2017. Le 5 octobre 2013, la presse al-?ayâta publié un article en arabe ayant pour titre L'appel français pour une réunion européenne urgente après le naufrage de migrants et la Somalie remercie l'Italie, et dans lequel, ellea communiqué la mort d'environ 300 Somaliens au large des côtes italiennes. Après cette tragédie, Jean-Marc AYRAULT, ancien premier ministre français, a qualifié l'incident de tragédie. Nous allons ici examiner les termes employés par les dirigeants, les politiciens français et somaliens :

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138 UNHCR, Des réfugiés somaliens arrivent à Malte par bateau, à bord duquel sept personnes

auraient trouvé la mort, publié le 08/05/2012, en ligne :

http://www.unhcr.org/fr/news/briefing/2012/5/4fa934dbc/refugies-somaliens-arrivent-malte-bateau-bord-personnes-trouve-mort.html?query=les%20somaliens%20%20en%20libye , consulté le 25/11/2017.

139AL-?AYAT, L'appel français à une réunion européenne immédiate après le naufrage des immigrants et la Somalie remercie l'Italie, publié le 5/10/2013,en ligne : http://www.alhayat.com/Details/558969, consulté le 03/01/2017.

« Le Premier ministre français Jean-Marc Ayrault a déclaré que les pays européens devaient se réunir rapidement après la tragédie du naufrage des émigrés clandestins au large des côtes de l'Île de Lampedusa. En visite à Metz, une ville française à l'Est de la France, Jean-Marc Ayrault a déclaré qu'« il est important que les responsables politiques européens discutent sur ce sujet le plus tôt possible. ». Et il a rajouté que « c'est à leur responsabilité de se réunir pour trouver une solution adéquate. » aussi, « J'étais vraiment touché par les images que j'ai vues. ». Selon le premier ministre français « ce qui s'est passé en Lampedusa est une terrible tragédie, enfin, « il ne suffit pas d'exprimer juste notre sympathie et solidarité avec eux, mais il est nécessaire que l'Europe prenne soin de

s'occuper de cette situation tragique. » ».

Cet appel français pour une réunion européenne urgente survient après le naufrage des émigrés somaliens, de plus, l'appel du premier ministre français reflète l'importance et la nécessité de mettre en oeuvre des mécanismes permettant le sauvetage des émigrés et a sollicité les membres des pays européens à se réunir pour trouver une solution. Dans son appel, nous avons remarqué l'emploi du terme « ma?sâ »,« tragédie », « al-ma?sâwiyya », « tragique »,et la tragédie est un événement funeste, terrible selon le dictionnaire Larousse et la répétition et l'utilisation de ce terme à plusieurs reprises marquent la gravité de cette catastrophe. « Laqadt??artubiquwat??artu-l-li?ura al-

latyðâhatuhâ », dans cette phrase, le verbe « ÊÑÏÊ », conjugué au passé et dont la racine est « a.?.r.

»,a été employé deux fois par le ministre français. Cette phrase n'a pas été dite de manière spontanée mais elle a été utilisée pour attirer l'attention des politiciens européens sur cet incident en indiquant qu'il a été choqué après avoir vu les corps des émigrés rejetés par la mer.

Dans le même contexte, le premier ministre somalien s'est prononcé sur le naufrage et a présenté ses remerciements à l'autorité italienne qui a sauvé un bon nombre des citoyens somaliens lors du naufrage. Après la confirmation du décès d'environ 500 personnes, le gouvernement somalien a adressé ses condoléances aux familles des victimes :

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140AL-?AYAT, Op., cit., consulté le 03/01/2017.

87

« Le premier ministre somalien a déclaré que les efforts de l'Italie ont contribué à éviter la perte de beaucoup d'émigrés lors du naufrage d'un bateau de pêche à proximité de Lampedusa, et qui transportait clandestinement entre 450 et 500 personnes. Seulement 155 personnes ont été secourues ce qui suscite les craintes par rapport au nombre élevé de morts qui atteint les 300 victimes [...]Abdi FARAH, premier ministre somalien a remercié le gouvernement italien pour ses efforts pour aider les émigrés et qui ont contribué à éviter des pertes supplémentaires. Enfin, il a ajouté : « Je voudrais présenter mes condoléances à ceux qui ont perdu leurs proches et leurs amis dans cette tragédie...».

Cet extrait tiré d'al-?ayât nous a fourni une information supplémentaire, en effet, le journal a soulevé qu'au cours des deux dernières décennies, des centaines de Somaliens ont fuient leur pays à cause de la guerre civile et de la sécheresse qui ont frappé le pays. al-?ayâtdé fend la position selon laquelle le gouvernement somalien devra développer le pays avec une politique stable et avec des infrastructures pour éviter aux jeunes l'émigration. Dans le discours du premier ministre somalien, on remarque encore une fois l'utilisation du terme«ma?sâ », utilisé par le premier ministre français, ce qui montre que les politiciens possèdent une même idée et ressentent la même peine face à cette tragédie.

Le journal al-`Arab 21 relaie l'information du journal français Le Point publiée en 2013, sous le titre Le Point observe les plus importants évènements du naufrage des émigrés en Méditerranée. Selon Le Point, cet incident est la pire catastrophe qu'a connue là Méditerranée, et a communiqué la mort de 366 Somaliens en Méditerranée, noyés près des côtes de Lampedusa :

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141BRAHIMI Rifqa, Le Point observe les plus importants évènements du naufrage des émigrés en Méditerranée, publié le 21 avril 2015, en ligne : https://arabi21.com/story/825950/,consulté le 26/01/2018.

« Le journal français Le Point a publié un rapport sur la mort d'émigrés pendant le naufrage d'un bateau en méditerranée. [...] Dans ce rapport, le journal indique que l'incident est la pire tragédie qu'ait connue la Méditerranée, [...] le 3 octobre 2013, 336 émigrés des 500 majoritairement somaliens qui avaient embarqué de Libye sont morts après le naufrage du bateau près de l'île Lampedusa. Les médias internationaux ont réagi sur cet accident tragique. ».

Dans ce passage, en citant le nombre de morts qui est de 300 personnes et en utilisant l'expression « Aswa?kâri?a?arafaha al-ba?r», « la pire tragédie qu'ait connu la mer », le Point a donc démontré la gravité de ce naufrage. Aussi, nous avons noté que le journal al-`Arab 21, emploie le terme « al-?âdi?a al-ma?sâwiyya » « l'incident tragique » pour définir la tragédie du naufrage. Enfin et après la déclaration des politiciens, la scène politique internationale a su réagir face à l'ampleur de l'incident.

4. Le naufrage de Somaliens en Méditerranée en 2015

Bien que le nombre de victimes de la Méditerranée augmente d'année en année, le flux des émigrés clandestins somaliens de la Libye vers le continent européen connait une réelle augmentation jusqu'à l'année 2015. En effet, le 12 avril 2015 al-Jazeera relaie encore un nouveau drame causant la disparition de 800 personnes:

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142AL-JAZEERA, L'ONU confirme la mort de 800 émigrés au large des côtes Libyenne, publié le 21/04/2016, en ligne : http://www.aljazeera.net/news/international/2015/4/21/%D8%AA%D8%A3%D9%83%D9%8A%D8%AF-

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t=921.6, consulté le 13/01/2017.

des Somaliens [...] Ils avaient embarqué de la capitale libyenne samedi matin, tandis que Di Giacomo, porte-parole de l'organisation internationale pour les réfugiés a déclaré que les survivants parmi eux quatre mineurs sont venus des pays africains dont la Somalie. ».

Cette fois-ci, on remarque que les mineurs voyagent parmi les émigrés, cela nous montre que les enfants sont aussi les prétendants à l'émigration clandestine. Au cours de notre recherche, nous avons observé al-Jazeera est l'unique presse arabe a dévoilé l'émigration des mineurs. Et à l'instar d'al-Jazeera, le site Afrika143a indiqué qu'un jeune somalien de 15 ans qui a pourtant été secouru en Méditerranée est mort sur le bateau des Médecins sans Frontières qui le conduisait en Italie. D'après les Médecins sans Frontières, « le jeune souffrait d'une maladie chronique et avait été violemment battu il y a trois semaines en Libye. Selon MSF, il a été contraint à des travaux lourds sans avoir assez de nourriture et d'eau. Il ne pouvait plus marcher, mais il a bien réagi aux médicaments et aux soins, avant de succomber tragiquement d'un arrêt cardiaque144. ».

Et toujours en étudiant le journal al-Jazeera, on remarque que contrairement aux autres journaux, al-Jazeera le 3 juin 2015 a cité en détails dans un article les événements relatifs à tous les flux migratoires illégaux en 2015. En effet, l'article communique plusieurs informations sur le taux de décès tout au long de cette année, comme il nous apporte une information sur les embarcations de fortune qui contrairement aux années antérieures à 2015 sont bien plus sophistiquées, enfin, il affirme que malgré les causes poussant les personnes à l'émigration vers l'Europe, les pays européens sont réticents à accueillir les émigrés.

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143 AFRIK est un site internet basé aux pays bas et destiné au continent africain et sa diaspora.

144KARDIATOU TRAORÉ, Un jeune somalien meurt après avoir été secouru en Méditerranée, publié le 25 Août 2015, disponible sur : http://www.afrik.com/immigration-un-jeune-somalien-meurt-apres-avoir-ete-secouru-en-mediterranee, consulté le 10/09/2017.

89

145AL-JAZEERA, L'Europe et l'oubli du souvenir de l'asile, publié le 03 juin 2015, en ligne :

90

« Un siècle plus tard, le monde est témoin d'une nouvelle crise de réfugiés, et cette fois-ci, c'est l'Europe qui a la capacité de fournir la protection pour les réfugiés désespérés ... Au cours des premiers mois de l'année 2015, plus de 38 000 personnes ont tenté d'atteindre l'Europe par la mer Méditerranéenne [...]L'organisation internationale pour la migration et la marine italienne indiquent que la majorité des émigrés venant de la Somalie et de la Syrie ont le droit à la demande d'asile à cause de la condition prévalent dans leur pays...».

Al-Jazeera continue à examiner le phénomène de l'émigration en soulignant que le nombre de ces émigrés « al-yâ?isîna », « désespérés » a augmenté au cours de l'année 2015. Aussi, al-Jazeera indique que seulement au début des premiers mois de l'année 2015, 38 mille personnes clandestines ont essayé de traverser la Méditerranée, également, l'article évoque l'Europe qui, il y a un siècle et à cause des guerres et des crises économiques, a aussi connu un flux migratoire. En effet, le journal s'interroge sur la raison qui empêche l'Europe d'accueillir un nombre supplémentaire de réfugiés, elle qui a connu une crise migratoire et qui pourtant ne réagi pas face à cette crise humanitaire.

Seulement trois mois après cet article, la chaine russe RT146diffuse le 4 septembre 2015 l'information selon laquelle l'organisation internationale pour la migration enregistre que le nombre des traversées de la Méditerranée dépasse118 mille personnes. L'article de la RT montre que les tentatives de traversée de la Méditerranée ne cessent d'augmenter.

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« L'organisation internationale pour les migrations, OIM, a déclaré qu'un navire appartenant à des garde-côtes italiens a secouru 91 personnes malgré la perte d'un corps en indiquant que les survivants emmenés à Lampedusa en Italie ont dit que leur bateau

http://www.aljazeera.net/knowledgegate/opinions/2015/5/31/%D8%A3%D9%88%D8%B1%D9%88%D8%A8%D8%A7-%D9%88%D9%81%D9%82%D8%AF%D8%A7%D9%86-%D8%B0%D8%A7%D9%83%D8%B1%D8%A9-

%D8%A7%D9%84%D9%84%D8%AC%D9%88%D8%A1, consulté le 16/01/2018.

146 RT est une chaine russe qui, en plus du russe, diffuse ses informations en arabe, en anglais, en espagnol et en français.

transportait entre 120 et 140 personnes. Flavio Di Giacomo, porte-parole de l'IOM a déclaré que beaucoup d'entre eux se sont noyés en soulignant que la majorité de ces émigrés venaient de la Somalie147 [...] ».

Selon l'OIM, plus de 118 000 demandeurs d'asile sont arrivés en Italie depuis le début de 2015 et environ 2 600 personnes ont disparu durant cette période, le rapport de cette organisation nous montre que seulement 91 sur 140 ont été secourues. Et tout comme al-Jazeera, La chaine Russe conclue son analyse en affirmant que la majorité des morts est de nationalité somalienne.

5. Les réactions de la presse sur les émigrés somaliens morts noyés en Méditerranée en 2016

Le 18 avril 2018 une embarcation transportant 500 émigrés a embarqué des côtes égyptiennes, quelques minutes après son départ, elle a chaviré faisant la mort d'environ 400 Somaliens. Voici un naufrage parmi les plus meurtris et le gouvernement somalien l'a reconnu comme un jour de deuil national. Le nombre des victimes comme nous l'avons déjà vu ne cesse d'augmenter et cette fois-ci, la plupart des victimes étaient des jeunes diplômés qui représentaient, dans un monde meilleur, l'avenir de la Somalie. La tragédie a aussi fait réagir les Somaliens sur les réseaux sociaux, en effet, le centre des études et des recherches somalien nous explique comment les utilisateurs de Face book ont réagi face à la mort de ce grand nombre d'émigrés somaliens:

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147 RT, Des dizaines de réfugiés morts le 4 septembre après le naufrage d'un bateau pneumatique en Méditerrané, publié le 04/09/2015, en ligne : https://arabic.rt.com/news/793148-%D8%AE, consulté le 03/012/2017.

148 ADEN Abdallah Abdoulkader, La fuite d'une mort vers une autres, publié le 20/04/2016, en ligne :

http://mogadishucenter.com/2016/04/%D8%A7%D9%84%D8%AA%D9%87%D8%B1%D9%8A%D8%A8-%D8%A7%D9%84%D9%81%D8%B1%D8%A7%D8%B1-%D9%85%D9%86-%D8%A7%D9%84%D9%85%D9%88%D8%AA-

%D8%A7%D9%84%D9%89-%D8%A7%D9%84%D9%85%D9%88%D8%AA/ ,consulté le 20/09/2017.

92

« Cette question a bouleversé la communauté somalienne, en particulier les jeunes. Les médias sociaux ont couvert cette nouvelle avec une grande intensité, ainsi, Face book s'est transformée en un écran de condoléances pour la majorité des participants somaliens, et les pages Face book se sont emplies de photos des jeunes de cette épreuve, et de leurs séduisantes photos avant qu'ils n'entreprennent ce voyage. ».

Toutefois, plusieurs journaux internationaux du monde entier dont la chaîne al-Jazeera, la chaîne britannique BBCal-?Arabiyya ont diffusé des informations sur le drame. Dans le paragraphe suivant, nous allons essayer de voir comment cette tragédie a été décrite dans la presse arabe et occidentale. Tout d'abord, BBC était la première chaîne à diffuser le naufrage du navire en interviewant les rescapés du naufrage :

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« Comme les survivants l'ont indiqué à la chaîne britannique BBC, des centaines d'émigrés clandestins se sont noyés lorsque le bateau qui les transportait a chaviré en Méditerranée[...] Les survivants ont dit qu'ils avaient été transférés dans un autre bateau après le renversement de leur bateau vers minuit[...] Ils rajoutèrent qu'environ 500 personnes sont mortes [...]Un somalien qui s'appelle Abdelkader a dit : au début, 240 personnes parmi nous sont parties de la Libye et les passeurs nous ont emmenés dans unplus grand bateau en bois qui faisait près de 30 mètres et transportaient déjà environ 300 autres passagers [...]. Mouad a indiqué qu'il était le seul parmi un petit nombre de personnes à pouvoir nager vers un petit bateau [...]Une femme somalienne vivant en Égypte informa le service de la BBC en langue somali que trois de ses proches sont perdus depuis leur départ vers l'Europe. [...] Le président somalien avait exprimé ses condoléances après cet incident. L'ambassade de la Somalie au Caire a confirmé que le nombre des victimes est d'environ 400 personnes. ».

149 BBC,Des centainesd'émigrésmortsnoyés après le naufrage de leurbateau en Méditerranée, publié le 18 avril 2016, disponible en ligne :

http://www.bbc.com/arabic/worldnews/2016/04/160418_migrants_crisis_boat , consulté le 22/01/2018.

93

RT150 la chaine russe, diffuse cette information sur son site Internet en confirmant aussi le naufrage d'un bateau transportant des Somaliens. En réalité, la presse russe a rediffusé la même nouvelle que la BBC al-?Arabiyya. Et tout comme la BBC, RT rappelle que le nombre de morts est de 400 personnes somaliennes.

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« Lundi 18 avril 2016, la chaîne britannique BBC rapporte selon des sources égyptiennes que plus de 400 émigrés clandestins qui tentaient d'atteindre les côtes européennes se sont noyés dans la mer Méditerranée. Les sources ont indiqué que la plupart des naufragés sont des citoyens somaliens qui venus de l'Égypte se dirigeaient vers la côte italienne à bord de quatre bateaux anciens ce qui a causé le naufrage. ».

À la suite de cette tragédie, la presse francophone n'a pas cessé de parler du naufrage, ainsi, elle n'est pas restée silencieuse face à cette tragédie, par exemple, le journal L'humanité a rapporté selon des sources de la BBC que des centaines d'émigrés clandestins ont perdu la vie en Méditerranée. Aussi, que ces émigrés sont partis de l'Égypte à bord de quatre embarcations en direction de l'Italie :« Plus de 400 migrants, somaliens en majorité sont portés disparus depuis hier matin, alors que, partis d'Égypte sur quatre grosses embarcations de fortune, ils cherchaient à rallier les côtes italiennes. L'information a été donnée par la chaine Bbc al-?Arabiyya, puis confirmée par l'ambassadeur de Somalie en Égypte.... Le correspondant de la BBC au Kenya a affirmé avoir parlé à des proches des migrants disparus et selon la presse somalienne, citée par l'agence de presse italienne, une trentaine d'entre eux seulement auraient été secourus152. ».

150 RT, Naufrage plus de 400 migrants en Méditerranée, le 18/04/2016, en ligne : https://arabic.rt.com/news/819590, consulté le 12/03/2017.

151 RT « dLua4áÇ ÖfiJ y ÈdJ 1J yp. j4 400 e4 yËßI cayA », le 18/04/2016, enligne : https://arabic.rt.com/news/819590-%D8%BA%D8%B1%D9%82-%D8%A3%D9%83%D8%AB%D8%B1-%D9%85%D9%86-400-%D9%85%D9%87%D8%A7%D8%AC%D8%B1-%D9%81%D9%8A-%D8%A7%D9%84%D8%A8%D8%AD%D8%B1-

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152LEMAHIEU THOMAS, Cimetière Méditerranée pour 400 Somaliens, publié le 19 AVRIL 2016, en ligne : HTTPS://WWW.HUMANITE.FR/CIMETIERE-MEDITERRANEE-POUR-400-SOMALIENS-605022 , CONSULTE LE 28/03/2018.

94

Le journal belge, RTBF153 a également relaté le naufrage sur son site Internet, le même jour après l'article de la BBC. Et comme les autres journaux, RTBF a communiqué le même itinéraire : « 400 migrants partis d'Égypte seraient portés disparus. Le ministère italien des affaires étrangères cherche encore à obtenir davantage de détails auprès des autorités égyptiennes. Ce serait pour la plupart des somaliens [...]. Tous partis des côtes égyptiennes sur quatre bateaux de fortune pour rejoindre l'Italie. Mais selon la BBC en langue arabe, les bateaux ont chaviré peu après le départ, seules 29 personnes auraient été secourues. Ce sont les familles somaliennes des disparus qui ont signalé le naufrage aux correspondants de la BBC (Valérie Dupont. 2016) ».

Dans un nouvel article, al-Jazeera affirme que le président italien Sergio MATARELLA a déclaré que de nombreux émigrés ont péri noyés en Méditerranée, et lors des funérailles des victimes, il annonça que l'Europe devra considérer cette dernière tragédie. De son côté, le ministre des affaires étrangères italien a commenté cet incident en disant : «il est certain que nous sommes en présence d'une nouvelle tragédie en Méditerranée, exactement un an après celle que nous avons eu dans les eaux libyennes154.».

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153RTBF : Radiotélévision Belge de la Fédération Wallonie Bruxelles.

154EUGÉNIO POPULIN, Nouvelle tragédie de migrants au large de l'Egypte, publié le 16 avril 2016, en ligne : https://blogs.mediapart.fr/eugenio-populin/blog/180416/nouvelle-tragedie-de-migrants-au-large-de-legypte , consulté le 08/11/2017.

155 AL-JAZEERA, La mort de plusieurs émigrés dans une catastrophe en Méditerranée, publié le 18

avril 2016, en ligne : http://www.aljazeera.net/news/international/2016/4/18/%D8%B1%D8%A6%D9%8A%D8%B3-

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« Le président italien Sergio MATARELLA a déclaré que certains émigrés ont trouvé la mort en Méditerranée, tandis que le ministre italien des affaires étrangères a indiqué que son pays était en attente de plus de détails sur la tragédie [...] Des informations indiquent que près de 400 personnes ont péri en mer dans le naufrage d'embarcations à proximité des côtes égyptiennes en tentant de rejoindre l'Europe[...], L'ambassadeur de la Somalie en Égypte a confirmé que les réfugiés qui se sont noyés sont de nationalité somalienne et leur nombre était d'environ quatre cent. ».

Malgré la guerre civile qui a déchiré le pays depuis les deux dernières décennies, la Somalie possède une importante presse. Cependant, et bien qu'existe des presses en arabe et anglais, la majorité des médias somaliens restent en langue somali, et chacun de ces journaux traite quotidiennement les actualités locales en Somalie, ainsi que les évènements internationaux. Lors de cette dernière tragédie, l'incident a dominé les médias somaliens, en effet, dans les médias audiovisuels et la presse papier qu'il est la pire tragédie du naufrage. Le 20 avril 2016 Somali Times, journal somalien en langue arabe, a édité un article sur son site internet en affirmant la mort de 400 émigrés somaliens en Méditerranée. Suivi par un autre article publié par le centre des études et des recherches de Mogadishu156. Ici nous allons nous intéresser aux termes utilisés pour décrire le naufrage :

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%D8%A8%D8%A7%D9%84%D9%85%D8%AA%D9%88%D8%B3%D8%B7 , consulté le 08/04/2018.

156Le centre de recherche de Mogadishu est un centre de recherche scientifique qui siège dans la capitale somalienne Mogadishu.

157SOMALI TIMES, L'émigration clandestine conduit nos jeunes vers les griffes de la mort, publié le 20 avril 2016, en ligne :

http://www.somalitimes.net/2016/04/20/%D8%A7%D9%84%D9%87%D8%AC%D8%B1%D8%A9-%D8%BA%D9%8A%D8%B1-%D8%A7%D9%84%D8%B4%D8%B1%D8%B9%D9%8A%D8%A9-%D8%AA%D8%B3%D9%88%D9%82-

96

« Environ 400 émigrés clandestins majoritairement provenant de la Somalie sont morts en Méditerranée dans une tentative d'atteindre illégalement l'Europe[...] Cet événement incarne les risques de l'émigration clandestine qui menace actuellement la vie des jeunes somaliens, qui se jettent dans le cercueil de la mort pour atteindre l'Europe dangereusement, dans le but de réaliser un rêve qui leur fait signe de loin [...]...Le dernier naufrage a coûté la vie à des centaines de jeunes somaliens [...] Dans plusieurs foyers somaliens, cette tragédie a fait pleurer les parents, les soeurs, les frères et les proches. Cette catastrophe a touché tous les Somaliens ainsi que le président du Somalie Hassan CHEIK MAHMOUD qui a exprimé profondément son regret dans un communiqué : cet incident douloureux montre le besoin de sensibiliser les jeunes contre l'émigration clandestine. ».

À la suite de cette tragédie, une funérailles est organisé en Rome, le capital Italien hommage pour ces migrants somaliens noyées en méditerranée. Le drapeau de leurs pays, (Somalie) est mis sur leurs cercueils comme montre cette photo ci-dessous :

Figure 7 : des migrants clandestins somaliens morts en méditerrané158.

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06/11/2017.

158 Ali Omar ghedi, « funeraille pour un des migrants somaliens en Italie »

http://www.qaranimo.com/news/2016/02/14/meydadka-dhalinyaro-soomaali-tahriib-ah-oo-aas-maamuus-loogu-sameeyay-talyaaniga/ , consulté le 18/12/2017.

97

D'après le dernier extrait de journal « Somali Times », le 18 avril 2016 était un deuil national en Somalie après la perte d'environ 400 citoyens somaliens en Méditerranée, il s'agit du naufrage le plus meurtrier depuis le début du phénomène de l'émigration. Comme il est cité dans l'article, ce naufrage à bouleversé plusieurs familles qui ont perdu leurs proches dans cette tragédie et les Somaliens du monde entier partageaient sur les réseaux sociaux notamment Face book les photos de victimes prises avant le naufrage. Ils sont partis pour réaliser un rêve, mais ont perdu la vie avant d'atteindre ce rêve et la Méditerranée est désormais leur cimetière éternel. En outre, parmi les personnes les plus touchées fut un père qui a perdu son enfant, un étudiant universitaire qui s'est dirigé vers l'Égypte puis vers la mer pour rentrer en Europe. Par malheur, il s'est noyé et est parmi les morts, un membre de sa famille informe le journal Somali Times que leur enfant se trouvait parmi les victimes. Dans ce contexte, Mahmoud MOHAMMED, un Somalien dont la famille a perdu un enfant informe le journal Somali Times :

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« Ma famille est touchée par le dernier naufrage où elle a perdu un jeune garçon âgé de vingt ans, il étudiait à l'université pour obtenir le Baccalauréat. Il a quitté l'université pour l'Égypte puis pour la mer pour qu'il puisse rentrer en Europe. Mahmoud ajoute que la famille s'est assurée de la mort de leur fils le 18 Avril 2016. Le père du garçon vivait avec une hypertension artérielle et son état s'est aggravé, il a été hospitalisé dans un état critique. La tristesse domine l'ensemble la famille. ».

En étudiant les deux extraits de la presse Somali al-Yawm, on remarque dans le premier extrait la phrase suivante, «al-Higra ... bâtat-tuhadidu-?ayât a?omâliyîna... », dans laquelle l'auteur a utilisé une personnification de l'émigration clandestine, en effet, « la personnification est une figure de style par laquelle on prête des qualités humaines à une chose, une idée ou un

159 Ibid.

98

animal, elle est le produit d'une comparaison ou d'une métaphore160 », donc on remarque que le verbe « tuhadidu » de la racine « h.d.d » « menacer », connote un comportement humain qui a été attribué à l'émigration. Aussi, dans le deuxième extrait, on observe l'utilisation du verbe« yusay?iru », dans « al-?uznu-yu?ay?iru -?alã-afrãd-l?ã?lÏ » «La tristesse domine l'ensemble de la famille » qui a été employé dans un sens figuré, car la tristesse ne peut dominer, cette phrase contient un Maðâzmursal, un procédé qui se fonde sur l'emploi d'un mot dans un sens figuré sans qu'il y ait la moindre relation de similitude entre les deux sens. Cependant, Les relations entre les deux sens, à savoir le sens figuré et le sens propre, doit se confirmer par un indice, qarîna en arabe, montrant la nécessité de ne pas prendre le mot au sens premier161. Ici, le verbe « dominer » signifie que la famille est triste après la mort de leur enfant.

Dans le premier extrait, quatre différents termes ont été employés : « ?ãdi? l-a?îr162 », « al-fãji?a l-a?îra163», « al-mu?îba164», « ?ãdi? al-alîm165». Et dans le deuxième extrait « ?ãdi? l-garg166», « al-?abar l-mufgi167 », termes possédant le même sens. En effet, comme nous l'avons vu avant, la presse Somali Times, emploie des termes au même sens pour transmettre des connotations fortes, ainsi nous pouvons observer que le choix de ces termes a pour but d'avertir les jeunes à ne pas entreprendre ce voyage périlleux et de transmettre une information précise sur le naufrage.

Dans la même optique, le centre de recherche de Mogadishu a publié un article qui est apparu après celui de Somali Times et qui nous transmet la même information en ajoutant que les émigrés fuyaient la guerre et la pauvreté en Somalie. Et tout comme Somali Times, les victimes du naufrage sont des étudiants somaliens que les Somaliens considéraient être l'avenir du pays :

160 ADRIAN, Personnification : définition simple et exemples, Figure de style, publié le 08/09/2017, en ligne : http://www.laculturegenerale.com/personnification-definition-simple-exemples/, consulté le 27/01/2018.

161 KHALFALLAH Nejmeddine, Cours sur la tradition rhétorique arabe, donné aux master 1 MECO, 2016-2017

162 Le dernier incident.

163 La récente tragédie.

164 La catastrophe

165Cet incident douloureux 166 Incident du naufrage. 167Une nouvelle tragique.

99

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« Après la catastrophe survenue en Méditerranée, un grand nombre d'émigrés dont la plupart étaient d'origine somalienne ont péri noyés après le naufrage de leur bateau en Méditerranée. Ils fuyaient la guerre et la famine qui menacent la vie de la plupart des Somaliens, et ce pourquoi ils ont parcouru l'Europe. Cet incident est le plus grave en son genre, puisque la majorité des morts étaient des jeunes...dont beaucoup d'entre eux étaient des académiciens qui ont fait des efforts considérables pour obtenir des savoirs et des qualifications scientifiques dans un pays où l'analphabétisme est très élevé. ».

D'après l'extrait, nous constatons que l'auteur a traité la thématique d'une manière similaire à celle de Somali al-Yawm. En premier lieu, cet article souligne encore une fois que ce naufrage était l'incident le plus désastreux auquel les émigrés clandestins ont fait face. Pour décrire l'incident qui a couté la vie à 400 personnes, l'article emploie les termes suivants : « Al-kâri?a169», « ?âdi? l-garg170». « aswa? l-?awâdi? 171», et nous constatons que ces termes sont les mêmes qui ont déjà été utilisés par la presse Somali al-Yawm dans les extraits analysés ci-dessus. En ce qui concerne la manière de l'analyse de l'incident, l'article du centre de recherche de Mogadishu nous a fourni une information supplémentaire, détaillée et plus précise, puisqu'il s'est intéressé aussi aux causes qui ont poussé les jeunes à émigrer, contrairement à Somali al-Yawm qui a juste évoqué le naufrage et la réaction de la société somalienne face à cette tragédie...etc. Enfin, et d'après cette analyse, le point important à tirer est que la presse a couvert cet incident de manière complète et précise permettant ainsi aux lecteurs d'avoir une information détaillée. Aussi, les articles somaliens

168 HASSAN AHMED Sharif, Qu'est-ce qui pousse les jeunes somaliens à l'émigration clandestine, publié le 27 avril 2016, en ligne :

http://mogadishucenter.com/2016/04/%D9%85%D8%A7-%D8%A7%D9%84%D8%B0%D9%8A-%D9%8A%D8%AF%D9%81%D8%B9-%D8%A7%D9%84%D8%B4%D8%A8%D8%A7%D8%A8-

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%D8%A7%D9%84%D9%87%D8%AC%D8%B1/ ,consulté le 09/12/2017.

169 La catastrophe.

170 Incident du naufrage.

171 Le pire naufrage.

100

étudiés emploient les mêmes termes pour communiquer ce naufrage et pour transmettre un message commun aux lecteurs somaliens ainsi qu'au reste du monde.

6. La souffrance rencontrée par les immigrés une fois en Europe

Ici nous allons nous concentrer sur la souffrance et les difficultés ressenties et traversées par les immigrés somaliens demandeurs d'asile une fois en Europe. Nous avons observé tout au long de cette étude que les émigrés avaient une fausse image de l'Europe où ils pensaient que toutes leurs envies allaient rapidement se réaliser, rappelons que cette fausse image de l'Europe a été surtout véhiculée par les passeurs et certains émigrés arrivés en Europe.

Après avoir voyagé des milliers de kilomètres à travers le désert entre le Soudant et la Libye, et après avoir traversé la Méditerranée. Dès leurs arrivés en Europe, certains Somaliens sont confrontés aux problèmes suivants : maladies, la barrière de la langue, le manque de logement, le chômage, etc. Certains souffrent de symptômes psychologiques à cause du long voyage et des mauvais traitements en Libye, ils se souviennent de la détention, de la torture, des abus sexuels, de la mort des proches ... « Selon l'organisation mondiale de la santé, un Somalien sur trois a souffert à un moment ou un autre d'un type de trouble psychologique et a été la victime de passage à tabac, torture, viol ou blessure à vie. De plus, l'organisation signale que les personnes souffrant de troubles mentaux sont souvent enchaînées ou emprisonnés. La majorité des personnes ne bénéficient pas d'une telle assistance et se retrouvent marginalisées et isolées, devenant ainsi des proies faciles pour les magafes (les passeurs) qui leur promettent une vie meilleure en Europe 172». Par exemple, un jeune somalien détenu en Italie souffre d'un traumatisme après la perte de sa soeur en Méditerranée et il a raconté le récit suivant :

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172 MAJIDI Nassim, Op., cit., consulté le 25/02/2018.

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« Elle flottait sur l'eau et avait le dos brûlé et découvert, son image est toujours dans ma tête » a raconté Mohamed AWAYS, un jeune somalien de vingt ans qui raconte la perte de sa soeur Fatima, dans le voyage meurtrier qu'ils avaient effectué à travers la mer Méditerranée avec 40 autres somaliens du Bosaso, une ville côtière en Somalie. Il est actuellement dans le centre Finolyo pour les réfugiés à Turin au Nord de l'Italie où Mohamed passe ses journées qu'il décrit de misérables, désespéré d'avoir entrepris le plus meurtri voyage et après avoir assisté à la mort de sa soeur et ses compagnons...».

Depuis la Somalie, Mohamed et sa soeur ont traversé des centaines de kilomètres à travers le désert, la Libye puis vers l'Europe à bord d'un bateau pneumatique qui n'avait pas la capacité de résister aux vagues. Ils ont payé 3 000 dollars pour le voyage mais par malheur il a perdu sa soeur Fatouma après le naufrage du bateau, il la voyait en pleine mer se noyer devant ses yeux. Arrivé en Italie, il est triste, déprimé au point que ses journées sont décrites comme être les plus misérables, de plus, il a été détenu dans un centre de détention en Italie.

Parfois, lorsqu'ils arrivent à traverser la Méditerranée, la principale entrée de l'Europe est l'Italie, la Turquie et la Grèce, où beaucoup d'entre eux n'y déposent pas la demande d'asile. En revanche, ils optent pour d'autres pays riches qui acceptent la demande d'asile facilement comme l'Allemagne. Et durant ce voyage clandestin dans les pays européens, les immigrés sont exposés à la mort à cause du froid, en effet, le journal Arabie Sputnik a communiqué la mort d'une Somalienne à cause du froid :

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173 AL FARAJI Abdulmajid, Des Somaliens face au voyage de la mort, publié en décembre 2015, en

ligne :

https://www.alaraby.co.uk/investigations/2015/12/15/%D8%B5%D9%88%D9%85%D8%A7%D9%84%D9%8A%D9%88%D9%86-%D9%8A%D8%AE%D9%88%D8%B6%D9%88%D9%86-%D8%B1%D8%AD%D9%84%D8%A7%D8%AA-%D8%A7%D9%84%D9%85%D9%88%D8%AA-%D8%A8%D8%AD%D8%AB%D8%A7-%D8%B9%D9%86-

%D8%A7%D9%84%D8%AD%D9%8A%D8%A7%D8%A9 , consulté le 20 /01/2018).

174 SPUTNIK ARABI, Le froid tue une immigrée somalienne en Bulgarie, publié le 02/01/2017, en

ligne : https://arabic.sputniknews.com/world/201701021021545065-%D9%87%D8%AC%D8%B1%D8%A9-

102

« La police bulgare a annoncé avoir retrouvé le corps d'une immigrée somalienne morte à cause du froid sur le mont Stranja près de la frontière Turque. La jeune femme faisait partie d'un groupe d'une trentaine d'immigrés clandestins arrêtés par la police des frontières. [...] Deux adolescents somaliens, un garçon de 16 ans et une fille de 14 ans ont également souffert après qu'ils aient eu les doigts gelés. ».

1. La barrière linguistique et le chômage

Dès l'arrivée des migrants en Europe, ils font face à la barrière linguistique qui leur pose beaucoup de problèmes, surtout pour les adultes, mais pour s'intégrer à la société des pays d'accueil, ces personnes doivent apprendre la langue du pays, ainsi on constate qu'« en Europe, la connaissance de la langue et de la société d'accueil est de plus en plus une condition nécessaire à l'intégration des migrants dans leur pays d'arrivée, qu'il s'agisse d'entrer sur le territoire, d'obtenir l'autorisation de résidence permanente ou d'en acquérir la nationalité. Un grand nombre de pays européens mettent ainsi en place différentes politiques de formations linguistiques sanctionnées par des tests175». Cependant, la langue maternelle pour les Somaliens est le somali et certains grâce aux études connaissent l'anglais, ces derniers n'auront donc pas de barrière linguistique s'ils déposent une demande d'asile dans un pays parlant l'anglais comme les Pays Bas ou une partie de la Belgique, et en ce qui ceux qui ne parlent que le Somali alors ils auront des difficultés de communication dans les pays européens. En France, ces réfugiés peuvent apprendre la langue française par des cours donnés par l'office français de protection des réfugiés et apatrides, OFPRA. Cependant cet l'apprentissage de cette nouvelle langue n'est pas sans conséquences, puisqu'ils mènent beaucoup d'entre eux à rester sans activités professionnelles car ils ne peuvent même pas s'exprimer. En effet, selon CHARMARKEH Houssein176, les migrants somaliens en Europe

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20/12/2012.

175 EXTRAMIANA Claire et VAN AVERMAET Piet, Apprendre la langue du pays d'accueil, dans Hommes et migrations, numéro 1288, publié en 2010, p.8.

176 CHARMARKEH Houssein, Op., cit.

103

font face à plusieurs difficultés dont la langue. La qualité de l'intégration des Somaliens est donc faible à cause du manque de maitrise de la langue du pays d'accueil.

Le 28 décembre 2017, nous avons visité la ville d'Angers où nous avons rencontré des réfugiés demandeurs d'asile, j'ai pu donc m'entretenir avec eux en langue Somali, sur leurs trajets jusqu'en Europe et sur leurs vies en France. J'ai rencontré un jeune bachelier qui m'a affirmé que l'obstacle le plus important à leur arrivée en Europe est celui de la langue, aussi, il met l'accent sur le fait que l'apprentissage de cette langue leur est difficile puisqu'ils ne sont pas intégrés dans la société française.

2. L'empreinte digitale et le rapatriement

Certains Somaliens font ce qu'on appelle l'Asylum shoping, c'est quand les migrants choisissent le pays d'accueil en fonction de sa situation économique, en fonction de la politique des demandes d'asile, et en fonction de s'ils y possèdent des proches. Cependant, en 2003, les pays européens ont signé un accord sous le principe du One stop, One chopes, selon lequel, l'immigré doit obligatoirement voir traiter sa demande dans le premier pays d'accueil européen où il a mis le pied (Catherine Wenden, 2017.99). Cependant, la majorité des immigrés n'ont pas connaissance des traités et accords européens, et déposent donc plusieurs demandes d'asile dans différents pays -choisis selon les critères mentionnés-mais ces demandes sont nulles et seul le pays dans lequel l'immigré a été en premier acceptera sa demande. A titre d'exemple, en 2010, Abdurrahman177un jeune somalien qui est arrivé en Hongrie et souffrait à cause du froid auquel il n'était habitué a décidé de se rendre chez des proches à Manchester au Royaume-Unis - les règlements de l'union européenne lui permettent de se rendre dans d'autres États d'Europe pour une période de trente jours, sans pouvoir toutefois s'y installer - mais il s'est fait arrêter et renvoyé à Budapest, conformément au règlement de Dublin II178.

« Ce jeune homme a expliqué qu'il avait été abandonné à l'aéroport de Budapest, tout ce qu'il avait sur lui, c'était une carte d'embarquement pour le vol Londres-Budapest. A Budapest, il s'est retrouvé sans abri durant trois nuits [....] Il avait froid et faim, il était sale et il avait peur des skinheads. Il s'est alors rendu dans le seul endroit qu'il

177Nom fictif donné pour des raisons de protection comme indiqué par HCR.

178 Ces dispositions obligent les demandeurs d'asile à rester dans le pays où ils ont déposé une demande d'asile, qui est leur premier point d'entrée en Europe.

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connaissait, le centre Bicske. Il peut obtenir tous les documents d'identité avec l'aide du Bureau de l'immigration et de la nationalité, mais il a besoin de parler le hongrois et de temps. Le HCR espère que son intervention, visant à résoudre la crise du logement pour les réfugiés et à appuyer une amélioration des politiques d'intégration y compris le droit de travailler et de vivre dans la dignité179 ».

La raison qui a obligé ce jeune homme à quitter la Hongrie est le froid et la barrière de la langue qui l'empêche d'avoir un travail. C'est pour cela qu'il a décidé de se rendre clandestinement aule Royaume-Unis pour s'y installer avec sa famille. Puis, il a été rapatrié ver la Hongrie après quelques mois conformément au système européens, Eurodac, qui est un système d'information des empreintes digitales permettant d'identifier les demandeurs d'asile frauduleux dans plusieurs pays de l'Europe.

Ce renvoie d'immigrants vers les pays qui leur sont de droit ne concerne pas uniquement les pays européens mais il peut s'agir aussi de pays comme la Libye ou la Somalie, acte qui peut être dangereux pour les immigrés surtout s'il s'agit d'un rapatriement vers la Libye ou la Somalie. Pour cette raison, le 23 février 2012, la cour européenne a condamné un acte concernant des immigrés somaliens refoulés par l'Italie vers la Libye : « La juridiction du Conseil de l'Europe a condamné l'Italie pour avoir intercepté et refoulé vers la Libye un groupe de Somaliens. En violation de la Convention européenne des droits de l'homme et sans avoir préalablement examiné si cela constituait un risque réel pour ces personnes, dans le cadre de l'affaire intitulée Hirsi Djama et autres180. ».

La souffrance exprimée par ces personnes est comparable à celle de nombreux immigrés somaliens qui arrivent en Europe chaque année, et lorsqu'ils souffrent dans un pays ils décident de le changer pour un autre mais en vain.

MOUSE AHMED Nima fait partie de ces immigrées qui souffraient en Europe, c'est une jeune somalienne qui a essayé de se suicider après qu'elle ait été rapatriée de la Suède, en effet, elle a expliqué dans une interview que sa demande d'asile a été refusée par l'autorité Autrichienne, rajoutant qu'elle et d'autres Somalien sont été forcés de dormir dehors. MOUSE AHMED Nima essaya de

179TOTH Zoltan, H. SUNJIC Melita, Des réfugiés somaliens sans abri en plein hiver à Budapest, publié le 27 /01/2010, en ligne : http://www.unhcr.org/fr/news/stories/2010/1/4b61c1376/refugies-somaliens-abri-plein-hiver-budapest.html?query=les%20refugies%20somalien%20en%20europe, Consulté le 16/02/2018.

180UNHCR, La Cour européenne des droits de l'homme prononce un jugement faisant date sur le refoulement en mer Méditerranée, en ligne : http://www.unhcr.org/fr/news/press/2012/2/4f465a2ec/strasbourg-cour-europeenne-droits-lhomme-prononce-jugement-faisant-date.html?query=les%20somaliens%20en%20libye, consulté le 05/12/2017.

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rejoindre la Suède mais à cause de l'Eurodac, elle a été repérée puis rapatriée vers l'Autriche, premier pays où elle a posé les pieds à son entrée en Europe. Voici l'extrait d'un entretien qu'un journaliste du VOA Somali181 a réalisé avec MOUSE AHMED Nima :

« -Le journaliste de la VOA : comment vous appelez-vous ?

-Nima : je m'appelle Nima Mousse Ahmed

-Le journaliste : D'où venez-vous ?

-Nima : je suis de la Somalie,

-Le journaliste : où avez-vous commencé votre voyage ?

Nima : j'ai commencé mon voyage de la Somalie en passant par l'Éthiopie, le Soudan, la

Libye. Je suis restée en mer pendant une nuit et une journée avec 380 autres émigrés

et ont a été secourus par un navire américain qui nous a amené en Italie. Puis je me suis

dirigée vers l'Autriche.

Le journaliste : combien de mois a duré votre trajet ?

Nima : presque 6 mois,

Le journaliste : combien avez-vous payé pour venir en Autriche ?

Nima : j'ai payé environ 8500 dollars,

Le journaliste : pourquoi avez-vous quitté votre pays ?

Nima : à cause des problèmes intérieurs,

Le journaliste de la VOA : avez-vous de la famille en Somalie ?

Nima: oui, j'ai quitté ma mère, mon père et mes enfants,

Le journaliste : combien d'enfants avez-vous ?

Nima : j'ai deux enfants, un garçon Amir de 3 ans, et une fille Amira de deux ans.

Le journaliste : quand as-tu vu tes enfants pour la dernière fois ?

Nima: c'était en octobre 2014.

Le journaliste : êtes-vous en contact avec eux ?

Nima : oui, on se parle.

Le journaliste : est-ce que vos enfants savent que tu as été blessée ?

Nima : oui, ils savent pour ma blessure, mon fils m'a dit qu'il sait ce que j'ai fait et il

qu'il prie pour moi.

Le journaliste lui demande la raison qui l'emmena à vouloir mettre fin à sa vie en sautant

d'un immeuble,

Le journaliste : que s'est-il passé ?

Nima: j'ai sauté du troisième étage d'un immeuble, la vie est dur ici. J'attends

toujours une réponse pour ma demande d'asile, je n'ai reçu aucun document et je n'ai

181 VOA SOMALI, abréviation pour la voix de l'Amérique, une radio aux Etats-Unies.

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pas été convoqué à un entretien,

Le journaliste : qu'avez-vous pensé lorsque vous avez sauté ?

Nima : je voulais me suicider car la vie est devenue difficile pour moi.

Le journaliste : que s'est-il passé ensuite ?

Nima : je me suis cassé les deux jambes et la colonne vertébrale et j'ai été dans le

coma pendant quatre jours.

Le journaliste : quels sont vos projets ?

Nima : je veux partir en Suède mais j'ai été interceptée par la police et ramenée au camp

alors que j'étais blessée.

Le journaliste : quel est votre message pour ceux qui verront cette interview ?

Nima : je conseille les Africains surtout mes frères et soeurs en Somalie qu'ils arrêtent de

rêver de l'Europe, il n'y a rien ici.

Le journaliste : n'avez -vous pas entendu les mêmes paroles quand vous étiez en Afrique

?

Nima : si j'entendais, mais je pensais que les gens mentaient. Maintenant, je vois la

réalité, au moins, en Afrique, je n'ai jamais connu la faim. Mais ici, j'ai faim et il fait très

froid car il neige tout le temps182. ».

MOUSE AHMED Nima est comme plusieurs de jeunes somaliens pensait qu'une fois arrivée en Europe, elle va réaliser ses rêves et vivre une vie meilleure. Et comme beaucoup d'immigrés qui ne connaissent les règlements européens, elle a quitté son pays d'accueil pour la Suède, mais en vain, puisqu'elle n'y a pas droit.

3. Le manque de logement et le refus des demandes d'asile

Le logement représente un des obstacles rencontrés par les immigrés, bien que certains arrivent à trouver un logement dans le pays d'accueil, d'autres restent sans domicile fixe notamment ceux qui ont essayé de quitter le pays d'accueil. En effet, selon CHARMARKEH, « ils sont confrontés à de graves problèmes de logement liés au contexte de crise de l'accueil des demandeurs d'asile et des réfugiés en France. L'absence de logement, la saturation de l'hébergement d'urgence et des structures institutionnelles d'insertion sociale insuffisantes ou parfois inexistantes pour les demandeurs d'asile ont créé des situations d'extrême

182 La section en langue Somali de la radio voix de l'Amérique : traduction personnelle après l'écoute d'entretien mené avec Nima en langue somalie par un journaliste de VOA basé en Autriche, publié le 23/10/2015, en ligne : https://www.youtube.com/watch?v=R7E-eHMj xY, consulté le 14/11/2017.

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pauvreté...ils leur arrivent parfois de dormir dans les rues lorsqu'ils ne trouvent pas de logement183».

Dans la culture somalienne, la question de la solidarité et de partage est indispensable et lorsque certains ne trouvent pas de logements, ou leurs demandes d'asile est rejetée ou en cours de traitement, vivent chez ceux qui possèdent déjà un logement. Le 13 juillet 2012, le site France terre d'asile, a communiqué le rude quotidien des immigrés somaliens de Rennes :

« Des immigrés somaliens vivent dans la précarité, en France depuis juillet 2011, ils se heurtent au refus des autorités de leur accorder le droit d'asile auquel ils ont droit. En plein centre-ville de Montpellier, un bâtiment devenu squat. Illustration d'une politique d'asile à la dérive. A l'intérieur, 80 Somaliens s'entassent depuis novembre dans l'indifférence générale. Douze par chambres sur trois étages, ils dorment sur des matelas à même le sol, au milieu de cartons de nourriture. Tous ont quitté le pays pour la même raison. Échapper à la mort dans une Somalie en pleine guerre civile. En France depuis un an, ils espèrent obtenir un droit d'asile. En vain, à l'arrivée de ces migrants somaliens, la préfecture refuse une autorisation provisoire de séjour. La raison les empreintes digitales altérées. Condition indispensable pour savoir s'ils sont déjà passés par d'autres États de l'espace Schengen où ils pourraient être reconduits184».

183CHARMARKEH Houssein, Op., cit. p. 43.

184 FRANCE TERRE D'ASILE, La galère des réfugiés somaliens, publié le 13 juillet 2015, en ligne : http://www.france-terre-asile.org/actualites/actualites/actualites-choisies/asile-la-galere-des-refugies-somaliens,consulté le 17/02/2018.

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Également, le 13 juin 2015 quelques Somaliens sans logement ont construit des tentes au coeur de Rennes :

figure3 : Photo des Somaliens dans un parc du centre de Rennes185, (Ouest-France, 06.2015).

« Les Somaliens avaient trouvé refuge près du théâtre du Vieux Saint-Etienne, au coeur de Rennes. Des solutions d'hébergement d'urgence ont été trouvées pour les 19 Somaliens. Dans des hôtels de la métropole 4 d'entre eux, identifiés comme des demandeurs d'asile, vont être relogés dans un lieu d'hébergement. Les 15 autres vont déposer une demande d'asile186.. ».

Et pour conclure cette partie, bien qu'on ait pu étudier la situation des immigrés dans tous les pays d'Europe, cependant, nous avons pu mettre en lumière leur situation en France et dans quelques autres pays européens.

185 OUEST FRANCE, Les Somaliens du Vieux Saint-Etienne relogés, publié le 13/06/2015, en ligne : www.ouest-france.fr/bretagne/rennes-35000/migrants-rennes-les-somaliens-du-vieux-saint-etienne-reloges-3478846 , consulté le 25/02/2017.

186Ibid.

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Conclusion

L'immigration clandestine somalienne a toujours existé. En 1991, il y a eu en Somalie une guerre civile qui a causé la chute du gouvernement central somalien et l'écroulement de toutes les institutions. Depuis, le pays est plongé dans une situation chaotique, en effet, des guerres civiles éclatent entre des milices armées ce qui a provoqué la chute du dernier régime. Ainsi, beaucoup de Somaliens ont dû quitter le pays à cause de la guerre et se sont réfugiés dans le monde entier notamment dans les pays de la Corne de l'Afrique limitrophes de la Somalie, comme Djibouti, l'Éthiopie, le Kenya et le Yémen... Etc. Les programmes de réinstallation des organisations humanitaires comme HCR et le haut-commissariat pour réfugiés a permis à des milliers de Somaliens de s'installer partout dans le monde mais surtout en Amérique du Nord et en Europe.

Cette émigration est causée par la guerre qui a déchiré le pays depuis 1991 et par le chômage qui a touché une grande majorité de la population somalienne, en effet, après deux décennies de guerre civile et l'effondrement de toutes les institutions gouvernementales, la possibilité de trouver un emploi est nulle, ce qui représente pour beaucoup de Somaliens une grande difficulté pour gérer leur vie et celle de leur famille. L'autre raison est liée au groupe al-Ðabâb qui oblige les jeunes à le rejoindre et comme témoignent les rescapés du groupe, ils ont immigré pour éviter les menaces et les recrutements du groupe. Enfin, la dernière cause de départ est les réseaux sociaux. Ainsi, on remarque que malgré la guerre civile, des entreprises du secteur privé ont réalisé un grand développement dans le domaine de la télécommunication, ce qui a changé le mode de vie de beaucoup de Somaliens. En effet, elle a facilité la communication entre les Somaliens restés au pays et ceux partis à l'étranger et leur a permis, par Face book, l'accès notamment aux photographies de ceux qui ont réussi à rejoindre l'Europe, à des informations sur la vie en Europe, et cela les encouragent à partir en Europe.

À cause de toutes les raisons mentionnées, plusieurs émigrés clandestins somaliens dont des étudiants quittent chaque année la Somalie pour avoir une vie meilleure en Europe. Pour ce faire, ils effectuent un long trajet depuis la Somalie en passant par d'autres pays comme l'Éthiopie et le Soudan qui constituent la première étape pour les émigrés somaliens pour rejoindre la Libye puis l'Europe. Et sans oublier le passage par le désert entre le Soudan et la Libye, dans lequel ils subissent plusieurs souffrances physiques et mentales, dont des violences sexuelles, des actes de tortures. Les rescapés du désert arrivent en Libye, qui est l'un des pays de transit pour rejoindre l'Italie, la porte d'entrée de l'Europe, et dès l'arrivée en Libye, les passeurs les remettent à d'autres trafiquants d'êtres humains locaux qui les emprisonnent dans des centres de détentions jusqu'à ce que la rançon soit payée. Durant la période d'attente de cette rançon, les

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émigrés font face aux pires violences comme la torture, les violes contre les femmes émigrées et autres violations. Et pour recevoir rapidement leurs rançons, les passeurs publient des vidéos sur les réseaux sociaux dans lesquelles ils torturent les émigrés, et selon les témoignages des rescapés arrivés en Europe, les détenus ne seront libérés qu'après avoir réglé la rançon qui va de 5000 à 8000 dollars, voire plus. Enfin, ceux qui arrivent à payer la rançon, se préparent et embarquent dans des bateaux de fortune vers l'Europe.

Depuis le début du phénomène de l'émigration jusqu'à nos jours, beaucoup d'émigrés somaliens ont trouvé la mort durant le trajet dans le désert, dans les pays de transit ou en Méditerranée. Le chiffre exact des disparus lors de ce périple est inconnu, mais les médias retiennent deux naufrages parmi les plus meurtriers, celui du 5 octobre 2013 près de l'ile de Lampedusa, où 300 personnes sont mortes noyées, et celui du 18 avril 2016 où le nombre de décès atteint 400 victimes.

Les émigrés pensent qu'une fois en Europe ils vivront une vie bien meilleure, mais les déceptions une fois sur le territoire sont grandes, ils souffrent de problèmes d'intégration dans le pays d'accueil en partie à cause de la barrière de la langue, aussi, ils rencontrent des difficultés à trouver un logement et un métier, ce qui fait que la majorité est au chômage à cause aussi du fait que leur apprentissage de la langue du pays d'accueil dans des institutions humanitaires occupe la totalité de leur temps, enfin, ils ont des difficultés à s'adapter aux conditions climatiques.

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Résumé en arabe

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