République Démocratique du Congo UNIVERSITE
OFFICIELLE DE BUKAVU
BP 570
FACULTE DES SCIENCES SOCIALES, POLITIQUES ET
ADMININISTRATIVES DEPARTEMENT DES RELATIONS INTERNATIONALES
LE RECOURS A LA FORCE ET LE PRINCIPE
DE NON-IMMIXTION DANS LES AFFAIRES
INTERIEURES DES ETATS
|
Travail présenté en vue de l'obtention de
diplôme de graduat en relations internationales
Présenté par : BISIMWA Bonheur
Encadré par : AMANI BYENDA Adolphe
ANNEE ACADEMIQUE : 2020-2021
BISIMWA Bonheur
DEDICACES
A mes très chers parents : le feu Bisimwa Cherubala Martin
et Venantie Nyakala
A tous mes frères et soeurs, et à mes très
cher(e)s ;
A tous mes oncles et tantes ; A tous mes neveux et nièces
;
Vous avez fait preuve d'une affection à mon égard,
grâce à laquelle je viens de réaliser ce travail
d'études du premier cycle. Que le maitre de temps et de circonstances
vous récompense.
BISIMWA Bonheur
II
IN MEMORIUM
Que ce travail soit le sacrifice dédié pour le
repos de l'âme de notre père Bisimwa Cherubala. Que
l'omniprésent continue à bénir sa progéniture.
Il en est de même pour notre tante Nsimire Cherubala
Honorathe
BISIMWA Bonheur
III
REMERCIEMENTS
Nous remercions notre Dieu tout puissant pour sa bonté
et ses bénédictions sans lesquelles nous n'aurions jamais atteint
cette étape de notre vie
Nos parents pour les sacrifices qu'ils ont consentis pour
notre formation et surtout pour le courage exceptionnel qu'ils ne cessent de
montrer à notre égard et leur soutien indéfectible sans
lequel nous ne serions pas ce que nous sommes ;
Nous présentons nos hommages à notre directeur,
le Chef de Travaux Amani Byenda Adolphe, qui nous a orienté tout au long
de nos recherches.
Spécialement, nous vous remercions cher Grand
frère, Kaganda Mulume-Oderhwa Philippe pour le soutien et l'assistance
tant financière que morale. Fier de vous avoir comme frère.
Nous tenons également à remercier Marta
Cherubala, Assani Mangobo Honorius et Annie Malonga pour leur soutient sans
condition pendant la rédaction de ce travail.
Enfin, nous tenons à exprimer nos sentiments de grande
gratitude à tous ceux qui, de loin ou de près en occurrence nos
différents amis, qui ont contribué à la réalisation
du présent travail ; Que notre Dieu tout puissant vous comble sa
grâce pour vos différents soutiens tant matériels que
moraux.
IV
SIGLES ET ABREVIATION
Art. : Article
CEDEAO : Communauté Economique des Etats de l'Afrique
de l'Ouest
CIISE : Commission International de l'Intervention et de la
Souveraineté
CIJ : cour internationale de justice
DI : Droit International
LGDJ : Librairie de Droit et Jurisprudence
MINUAD : Mission des Nations Unies et de l'Union Africaine au
Darfour
OI : Organisation Internationale
ONU : Organisation de Nations Unies
OTAN : Organisation du Traité de l'Atlantique Nord
PUF : Presse Universitaire de France
PV : Procès-Verbal
RBDI : Revu Belge de Droit International
RCADI : Recueil des Cours de l'Académie de Droit
International
RGDIP : Revu General Droit International Public
RI : Relations Internationale
SDN : Société de Nations
Vol. : Volume
1
INTRODUCTION
1. Présentation du sujet.
Parler de recours à la force et la non-immixtion dans
les affaires internes d'un Etat renvoi à l'analyse du principe de non
recours à la force conformément à l'article 2 § 4 de
la Charte des Nations et toutes les exceptions qui en découle, entre
autre la légitime défense1, la sécurité
collective2, la responsabilité de protéger3
et l'intervention humanitaire4.
En fait, ce sujet renvoi à l'étude des
circonstances suivant lesquelles un Etat ou un groupe d'Etats peut
déroger au principe de non recours à la force, et au cas
où il est dérogé, dans quelles mesures un Etat ou un
groupe d'Etats peut, conformément au droit international, s'immiscer
dans les affaires internes d'un autre Etat sans que cette intervention ne soit
qualifiée comme contraire aux règles transgressibles de droit
international.
1 Article 51 de la Charte des Nations Unies :
« Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au
droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective,
dans le cas où un Membre des Nations Unies est l'objet d'une agression
armée, jusqu'à ce que le Conseil de sécurité ait
pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la
sécurité internationales. Les mesures prises par des Membres dans
l'exercice de ce droit de légitime défense sont
immédiatement portées à la connaissance du Conseil de
sécurité et n'affectent en rien le pouvoir et le devoir qu'a le
Conseil, en vertu de la présente Charte, d'agir à tout moment de
la manière qu'il juge nécessaire pour maintenir ou
rétablir la paix et la sécurité internationales ».
2 L'article 39 de la charte permet au Conseil de
Sécurité de prendre des mesures selon les articles 41 et 42 en
cas menace la paix, rupture de la paix et acte d'agression.
3 Quand une population souffre gravement des
conséquences d'une guerre civile, d'une insurrection, de la
répression exercée par l'État ou de l'échec de ses
politiques, et lorsque l'État en question n'est pas disposé ou
apte à mettre un terme à ces souffrances ou à les
éviter, la responsabilité internationale de protéger prend
le pas sur le principe de non-intervention.
4 L'intervention militaire à des fins de
protection humaine doit être considérée comme une mesure
exceptionnelle et extraordinaire. Pour qu'elle soit justifiée, il faut
qu'un dommage grave et irréparable touchant des êtres humains soit
en train ou risque à tout moment de se produire, tel que : A. des pertes
considérables en vies humaines, effectives ou présumées,
qu'il y ait ou non intention génocidaire, attribuables soit à
l'action délibérée de l'État, soit à la
négligence de l'État ou à son incapacité à
agir, soit encore à la défaillance de l'État; ou B. un
« nettoyage ethnique » à grande échelle, effectif ou
présumé, qu'il soit accompli par l'assassinat, l'expulsion
forcée, la terreur ou le viol.
2
2. Choix et intérêt du sujet
Elle permet de répondre à un souci qui est
l'harmonisation des idées et surtout de cohérence des
analyses.
Nous avons choisi ce sujet intitulé « le recours
à la force et le principe de non immixtion dans les affaires interne des
Etats » avec comme ambition de mettre en exergue une fois de plus la
nécessité de la résolution pacifique des différends
internationaux comme cela peut être lu dans l'esprit de differents
instruments internationaux qui régissent les relations
interétatiques en vue d'une préservation des
générations futures contre ce fléau qui perturbe le monde
et la sécurité internationale qu'est guerre entre Etats (
économique, politiques...). Car même en cas de recours à
ces principes dans la légalité, ledit recours ou intervention
n'est pas exempté des critiques surtout de la part des Etats moins
puissants à l'instar des pays africains et du Moyen-Orient.
- Intérêt personnel
Cette thématique nous paraît d'un
intérêt capital du fait qu'il nous permettra non seulement
à approfondir nos connaissances en droit, mais aussi à comprendre
les facteurs qui motivent la dérogation au principe de non-recours
à la force et à celui de non immixtion dans les affaires internes
d'un Etat par une puissance étrangère.
- Intérêt scientifique
L'oeuvre de ce travail scientifique donnerait à tout
chercheur en relations internationales et en droit international public des
notions importantes qui pourraient lui permettre d'appréhender comment
dans une certaine mesure le recours à la force ou l'immixtion dans les
affaires qui semblent constituer la compétence exclusive d'un Etat peut
contribuer au maintien de la paix de la sécurité internationale,
surtout lorsque cet Etat viole manifestement ou n'est pas en mesure de
respecter ou de faire respecter le droit international humanitaire.
- Intérêt social
Sur le plan social le sujet que nous avons choisi revêt
un intérêt primordial étant donné que la position de
recours à la force et du principe de non immixtion dans les affaires
internes des État ne va pas sans susciter de nombreuses réactions
dans les relations internationales.
3
Il est donc à signaler que la question de recourir
à la force et de la non immixtion dans les affaires internes des autres
Etats demeure une question préoccupante, étant donné que
l'organisation des Nations-Unies ayant dans ses attributions la tâche du
maintien de la paix et de la sécurité internationale, n'est pas
épargnée des critiques de la part des Etats et des doctrinaires
à la matière.
3. Etat de la question
La meilleure manière d'entamer un travail de recherche
en sciences sociales consiste à s'efforcer d'énoncer le projet
sous la forme d'une question de départ. Pour cette question, le
chercheur tente d'exprimer le plus exactement possible ce qu'il cherche
à savoir; à élucider; à mieux comprendre. La
question de départ servira le premier fil conducteur à la
recherche.5
C'est dans cette perceptive que nous avons consulté les
travaux des certains auteurs qui nous ont précédés, et qui
ont attiré notre attention dans leurs études.
D'entrée de jeu, Mencer souligne dans son article
intitulé : « Du Principe de nonintervention » publié
à Bruxelles dams la revue du droit contemprain (1964) que le principe de
l'égalité des Etats, le principe de non immixtion constituent,
l'un des piliers fondamentaux des relations internationales. Il continue en
disant que ces principes présentent ainsi un aspect fondamental en droit
international. Cependant il s'interroge sur la légitimé des
interventions humanitaires comme exceptions, et qui pourraient selon lui, dans
certains contextes, servir des prétextes pour permettre aux grandes
puissances d'exercer une pressions sur les Etats qui ne les sont pas. Mettant
ainsi à mal le principe cardinal d'égalité souveraine des
Etats proclamé par la Charte des Nations Unies qui constitue une
boussole dans les relations internationales.6
L'auteur définie à ce sujet l'intervention ou
l'immixtion dans les affaires intérieures d'un Etat comme étant
une pression exercée par un Etat ou groupe d'Etats sur un autre pour lui
imposer une volonté extérieure à la sienne.
De leur côté, Pierre- Marie Dupuy et Yann Kebrat
dans leur ouvrage intitulé : Droit international public
rappellent que le principe de non-recours à la force et celui de
non immixtion dans les affaires intérieure des État sont dans la
majeure partie de cas difficilement
5 R.Quivy et L.. Campenhoudt, Manuel de recherche
en sciences sociales, 2eéd.,Paris, Dalloz,1998,p.35.
6 G. Mencer , « Du principe de non-intervention
», in Revue de droit contemporain, Bruxelles, 1964, p. 39.
4
dissociables dans la mesure où l'intervention militaire
s'accompagne toujours d'une ingérence, même si la
réciproque n'est pas nécessairement vraie.
Ils continuent en disant que ces principes désignent
l'obligation pour L'État de respecter le caractère exclusif de
compétences territoriales d'un autre État, les territoriales
étant envisagé ici non pas comme une chose placée dans sa
possession, mais comme l'espace d'exercice de ses pouvoirs souverains. Ces deux
principes s'alimentent cependant l'un à l'autre à la même
source qui est la règle de l'égalité souveraine des
États7.
Dans son ouvrage intitulé Principe de
non-immixtion, Bernedetto Conforti, essaye de monter qu'à l'air
actuelle le droit international est inclus dans ce principe
(non-immixtion)8. Il souligne dans cet ouvrage qu'on ne sait pas
toujours ce qu'on entend exactement dans la pratique internationale et dans la
doctrine lorsqu'on parle du principe de non-recours à la force dans les
affaires intérieures et extérieures d'un État.
Différents droits et obligations internationaux sont
généralement groupés sous ces principes qui varient en
fonction bien souvent de point de vue des auteurs. Le droit international
pourrait pratiquement être inclus presque entièrement dans le
principe de non recours à la force et de non immixtion dans les affaires
intérieures d'un État étant donné que toute
violation de ses règles représente dans un certain sens une
ingérence dans la sphère de liberté d'autrui.
Ils continuent disant que le recours à la force et le
non immixtion dans les affaires intérieures des États serait
admise non seulement en tant que moyen pour se défendre contre la
violation de ses propres droits mais aussi en tant qu'instrument pour affirmer
ses propres intérêts égoïstes.
Ce principe se distingue du non-recours par son
caractère plus large, une ingérence pouvant prendre des formes
autre qu'une intervention armée, l'affaiblissement économique,
les actes de terrorisme sont autant des formes d'ingérence prescrit en
droit international.
La CIJ dans l'arrêt Détroit de Corfou, critique
fortement les interventions passées : « La Cour ne peut admettre un
tel système de défense. Le prétendu droit d'intervention
ne peut être envisagé par elle, que comme la manifestation d'une
politique de force politique qui dans le passé a donné lieux aux
abus les plus grave et qui ne saurait quelles que soient les
déficiences
7 D. Pierre-Marie et Y. Kerbrat, Droit
international public, 14e éd., Paris, Dalloz, 2018, p.
179.
8 B. Conforti, Le principe de non immixtion,
Rome, 1997, p. 86.
5
présente de l'organisation internationale, qui ne
trouve aucune place dans le droit international ».
Thierry Tardy9 dans son ouvrage renommé :
l'ONU et le recours à la force montre que l'ONU comme gardien
du droit et comme maitresse d'oeuvre de recours à la force et de la non
immixtion dans les affaires interne des autres États, doit offrir aux
État une option de substitution au recours à la force et à
l'ingérence dans les affaires interne d'un État, départ
les normes qu'elle diffuse et départ ses mécanismes de
règlement pacifique des différends.
Donc le conseil de sécurité est garant du
respect des dispositions du droit international relatives au recours à
la force et de la non immixtion dans les affaires interne des États.
Cela se traduit d'une part, par la possibilité de condamner tout acte
non conforme au jus ad bellum et d'autre part, par la
possibilité de rendre légal le principe du droit
international.
De ces idées Boutros Boutros-Ghali a demandé la
mise en oeuvre de l'art 43 de la charte et introduit l'idée d'imposition
de la paix par l'ONU dans son Agenda pour la paix.10
Il continue en disant qu'il pense que l'euphorie est grande
autour d'un monde enfin régulé par le droit et où non
seulement le recours à la force et la non immixtion dans les affaires
intérieures des États ne serait plus un outil de règlement
des différends, mais aussi de surcroît donc l'ONU doit jouer son
rôle d'entité de régulation internationale.
Thierry Garcia dans son article intitulé : « L'ONU
et le recours à la force ou le mariage de la carpe où du lapin
», montre que la prohibition du recours à la force sort de la
révolution copernicienne en droit ,constitue d'ailleurs un principe
primordial dans le système onusien parce que, selon son
préambule, cette organisation a été créée
pour préserver les générations futures du fléau de
la guerre et a pour but de maintenir la paix et la sécurité
internationale, le corollaire de cette interdiction de recours à la
force est constitué par l'obligation de régler pacifiquement les
différends dont la charte prévoit. Cette interdiction
générale du recours à la force a été reprise
par tous les pactes régionaux de sécurité et de
défense mutuelle.11
Nous avons personnellement pensé le principe de recours
à la force et de non immixtion dans les affaires intérieure des
États ont un caractère relatif puisque la charte
9 T.Tardy, « L'ONU et le recours à la
force ou le mariage de la carpe où du lapin »,Québec,
2006,p.9.
10 G. Boutros, « Agenda pour la paix »,
Paris, Médine, 2002.p.232.
11 G.Thierry « Recours à la force et droit
internationale »,Nice, sophia,2003,p.134.
6
légalise ces exceptions. Partant de l'article 107
relatif à la possibilité d'action militaire et article 51 portant
sur la légitime défense individuel et collectif qui
lui-même s'insère dans le cadre du chapitre VII qui régit
l'action coercitive du conseil de sécurité pour la mise en oeuvre
du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.
4. Problématique
Le principe de non immixtion ou de non intervention dans les
affaires internes d'un Etat, principal corolaire du principe
l'égalité souveraine des Etats dans l'ordre juridique
international, renvoi à la souveraineté de l'Etat dans ses
affaires internes. La souveraineté des États implique une
responsabilité, et c'est à l'État lui-même
qu'incombe, au premier chef, la responsabilité de protéger son
peuple. Cette souveraineté exclue toute immixtion d'une puissance
étrangère dans ses affaires internes conformément à
l'article 2 § 1 de la charte des Nations Unies. Cependant, des questions
se posent sur la légitimité d'une immixtion dans les affaires
internes d'un Etat aux fins humanitaires basée sur les exceptions
ci-haut mentionnées.
Pour asseoir leur domination territoriale, autrefois les
États se faisaient la guerre entre eux, sans que cela ne paraisse
illégitime. Les choses resteront en l'état jusqu'au début
du vingtième siècle. Bien que considéré comme un
attribut essentiel de la souveraineté de l'Etat par le droit
international classique, le recours discrétionnaire à la force a
très tôt fait l'objet de tentatives de limitation. Celles-ci ont
commencé à revêtir un caractère positif au
XIXe siècle, avant de s'épanouir au XXe
siècle. La règlementation contemporaine apparait ainsi comme
l'aboutissement d'un long effort normatif12.
Les premiers balbutiements d'une réglementation visant
l'interdiction du recours à la force dans les relations internationales
trouvent leurs origines principalement lors de la conférence
internationale de la paix de La Haye de 1907 où il fut adopté
deux conventions.
La première consacre à son article premier
ler le principe suivant: « En vue de prévenir autant que
possible le recours à la force dans les rapports entre les États,
les Puissances contractantes conviennent d'employer tous leurs efforts pour
assurer le règlement pacifique des différends
internationaux»13.
12 J. Combacau et S. Sur, Droit international
public, Paris, Montchrestien, 11e éd., 2014, p. 621.
13 Convention pour le règlement pacifique
des conflits internationaux (Ière convention) de 18 octobre
1907, RO Il 194.
7
La seconde, la Convention Drago-Porter, va également
dans le même sens à son article premier, en ce qui concerne cette
fois-ci le recouvrement de dettes entre les États: « Les puissances
contractantes sont convenues de ne pas avoir recours à la force
armée pour le recouvrement de dettes contractuelles
réclamées au gouvernement d'un pays par un gouvernement d'un
autre pays comme dues à ses nationaux »14. Cet effort de
restriction se traduit sur plusieurs plans, dans lesquels le jus ad bellum
(droit recours à la guerre) et le jus in bello (le droit applicable en
cas de conflit et notamment à la conduite des
opérations)15.
Après la première guerre mondiale, cette
question va logiquement connaître un regain d'intérêt. Si le
Pacte de la Société des Nations imposait à ses membres
dans son préambule certaines obligations de ne pas recourir à la
guerre, il n'en interdisait pas pour autant l'usage16. C'est le
pacte Briand-Kellogg du 27 août 1928 qui s'en chargera. Celui-ci met la
guerre hors la loi, en prohibant le recours à la guerre comme moyen de
politique nationale17. Ce pacte « constitue la première
dénonciation de la guerre par un instrument international d'une
concision notable »18. Son talon d'Achille résidait
cependant dans le fait qu'il n'était assorti d'aucune
sanction19. En raison de cette lacune, le pacte Briand-Kellogg ne
put parvenir à son objectif. Il n'empêcha évidemment pas la
seconde guerre mondiale et son cortège d'atrocités.
14 Convention concernant la limitation de l'emploi de force
pour le recouvrement des dettes contractuelles (IIe convention de La
Haye, dite Drogo-Porter de 18 octobre 1907, RO Il 194.
15 J. Combacau et S. Sur, op. cit., p.
622.
16Le Pacte interdit les guerres d'agression
(article 10), le conflit ouvert pour contester une décision judiciaire
ou arbitrale internationale (article 12 § 1) et la guerre
décidée malgré une recommandation adoptée à
l'unanimité du Conseil de la SDN. (Article 15 § 4). Par ailleurs,
avant de recourir à la guerre, les Etats devaient d'abord soumettre leur
différend à l'arbitrage ou au Conseil de la SDN, puis respecter
un délai de trois mois à compter de la décision arbitrale
ou judiciaire ou du rapport du Conseil (article 12).
17« Les Hautes parties contractantes déclarent
solennellement au nom de leurs peuples respectifs qu'elles condamnent le
recours à la guerre pour le règlement des différends
internationaux et y renoncent en tant qu'instrument de politique nationale dans
leurs relations mutuelles » : article 1er du pacte Briand-Kellogg.
18J.-P. Cot, A. Pellet, et M. Forteau, La Charte des Nations
Unies : Commentaire article par article, Paris, Pédone,
3e éd., Vol. I, Economica,2005, p.442.
19A. Mandelstam, L'interprétation du
pacte Briand-Kellogg par les gouvernements et les parlements des Etats
signataires, Paris, Pédone, 1934, p.162.
8
Fortement traumatisés par ces événements
tragiques, les Etats décident de s'entendre pour ne plus faire du
recours à la guerre un acte discrétionnaire. C'est pourquoi lors
de la Conférence de San Francisco fut adopté l'article 2 § 4
de la Charte des Nations-Unies qui consacre l'interdiction du recours à
la force tout comme la menace d'y recourir. Il ne s'agit toutefois pas d'une
interdiction absolue. Deux bémols d'inégale importance doivent
d'emblée y être ajoutés. Le premier concerne le champ
d'application de la règle. Cette interdiction ne vaut que dans le cadre
des relations internationales et uniquement à l'égard des Etats
membres des Nations Unies. De plus, le recours à la force n'est interdit
que dans la mesure où il est dirigé contre
l'intégrité territoriale ou l'indépendance d'un Etat ou
est entrepris d'une manière incompatible avec les buts des Nations
Unies. Le second bémol qu'il convient d'apporter est relatif aux
exceptions permettant le recours à la force. D'une part, le principe de
l'interdiction du recours à la force ne saurait priver les Etats de leur
droit naturel de la légitime défense (article 51 de la charte de
l'ONU.20 D'autre part, la Charte des Nations Unies permet au Conseil
de sécurité de décider de mesures coercitives en cas de
constatation de menaces d'atteinte ou de rupture à la paix ou
d'agression. Il en résulte que l'article 2 § 4 impose aux Etats une
interdiction générale de recourir à la force armée
dans les relations internationales qui ne peut être levée
qu'à condition qu'un Etat puisse montrer que son action s'inscrit dans
le cadre de l'une ou l'autre des deux dérogations
précitées. De nombreuses résolutions de l'Assemblée
générale des Nations Unies ont rappelé l'existence de ce
principe21 qui, d'après la Cour internationale de Justice,
constitue une « pierre angulaire de la Charte des Nations Unies
»22.
En 1986, la CIJ a même constaté qu'il avait
acquis valeur coutumière23. Le principe de l'interdiction du
recours à la force a donc le double statut de norme conventionnelle et
de norme coutumière.
20 J.-P. Cot et alii, op. cit., pp. 1329-1362.
21 Le principe de l'interdiction du recours à la force
a été réaffirmé par un certain nombre de
résolutions de l'Assemblée générale des Nations
Unies : les résolutions : 2625 (XXV) du 24 octobre 1970, 2660 (XXV) du 7
décembre 1970, 3314 (XXIX) du 14 décembre 1974, A/RES/31/9 du 8
novembre 1976, A/RES/33/72 du 14 décembre 1978, A/RES/42/22 du 18
novembre 1987.
22 Activités armées sur le territoire du Congo (RD
Congo c. Ouganda), arrêt du 19 décembre 2005, § 148.
23 Activités militaires et paramilitaires au
Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique), Rec.
CIJ, 1986, p. 103, § 193.
9
Selon Jean Salmon, le principe de non-intervention veut dire
que les Etats ne peuvent accomplir les actes d'ingérence dans les
affaires internes d'autres Etats, c'est-à-dire qu'ils ne peuvent exercer
une influence de nature contraignante dans les affaires des autres Etats ou
exiger d'eux l'exécution ou l'inexécution d'actes qui ne
relèvent pas du droit international24.
Ce principe trouve son fondement à l'article 2
paragraphe 7 de la charte des nations unies qui souligne que : « Aucune
disposition de la présente Charte n'autorise les Nations Unies à
intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la
compétence nationale d'un Etat ni n'oblige les Membres à
soumettre des affaires de ce genre à une procédure de
règlement aux termes de la présente Charte; toutefois, ce
principe ne porte en rien atteinte à l'application des mesures de
coercition prévues au Chapitre VII ».
Cela veut dire qu'au regard de la charte des Nations Unies, en
se fondant sur cette disposition, seules les mesures prises par le conseil de
sécurité sur base du chapitre 7 dérogent à ce
principe et lorsqu'il s'agit d'une O.I, celle-ci ne saurait recourir à
la force sans aval du conseil de sécurité.
Cependant, la pratique internationale offre une autre image de
l'immixtion dans les affaires internes d'un Etat par une puissance
étrangère sans même l'autorisation du Conseil de
Sécurité suivant l'article 53. C'est les cas du Kosovo en
199925 et du Liberia en 1992 où les forces d'interposition de
la CEDEAO avaient pris des sanctions économiques contre cet Etat en
informant le Conseil de Sécurité après le coup.
Sur base de ce qui précède, cette question
mérite notre attention :
? Comment le recours à la force est-il envisagé
à l'égard du principe de non immixtion dans les affaires
intérieures des Etats en Droit International ?
5. Hypothèses
L'une des exigences de la recherche scientifique est qu'il ne
faut, non seulement pas savoir soulever le(s) problème(s) en posant
certes des questions mais aussi savoir y réserver des réponses
hypothétiques, lesquelles réponses servent évidemment de
fil conducteur de la
24 J. Salmon, Droit des gens, Tome III,
17e éd., Bruxelles, PUB, 2002, p.556.
25 Les massacres des civils en 1999 avaient
poussé l'OTAN à réitérer sa menace d'employer la
force. L'échec des négociations et la reprise de la campagne
militaire au Kosovo par les forces Serbes avaient conduit l'OTAN à
recourir à la force contre la Yougoslavie sans avoir
préalablement obtenu l'autorisation du conseil
sécurité.
10
recherche puisque c'est également elles qui
suggèrent les techniques de recherche à mettre en oeuvre
ultérieurement.26Les hypothèses doivent aussi remplir
certaines conditions afin d'une expérimentation qui obéit
également à ces impératifs
susnommés.27
En vertu du principe de non immixtion, une obligation est
faite aux autres Etats de ne pas s'ingérer dans les affaires
intérieures d'un autre Etat. Néanmoins, aux regard des exceptions
que le droit international soulève parallèlement au principe de
non-recours à la force prévu à l'article 2 § 4 de la
charte des Nations Unies, entre autre la légitime défense, la
sécurité collective, la responsabilité de protéger
et l'intervention humanitaire. Ces exceptions constituent l'unique moyen auquel
le droit international reconnait le recours à la force en violation du
principe de non-immixtion dans les affaires internes d'un Etat.
En effet, l'article 2 paragraphe 4 impose aux Etats une
interdiction générale de recourir à la force armée
dans les relations internationales qui ne peut être levée
qu'à condition qu'un Etat puisse monter que son action s'inscrit dans le
cadre de l'une des dérogations précitées28.
L'intervention militaire à des fins de protection
humaine doit être considérée comme une mesure
exceptionnelle et extraordinaire permettant l'immixtion dans les affaires
internes d'un Etat. Pour qu'elle soit justifiée, il faut qu'un dommage
grave et irréparable touchant des êtres humains soit en train ou
risque à tout moment de se produire, tel que des pertes
considérables en vies humaines, effectives ou présumées,
qu'il y ait ou non intention génocidaire, attribuables soit à
l'action délibérée de l'État, soit à la
négligence de l'État ou à son incapacité à
agir, soit encore à la défaillance de l'État; ou un
nettoyage ethnique à grande échelle, effectif ou
présumé, qu'il soit accompli par l'assassinat, l'expulsion
forcée, la terreur ou le viol29.
On signalera qu'il existe d'autres dérogations.
L'article 107 de la charte des Nations Unies, envisage une possibilité
d'actions militaires contre les anciens Etats ennemis, une autre
dérogation cette-fois ci coutumière, est celle permettant
à un Etat s'immiscer,
26L. Albarello, Apprendre à chercher,
Bruxelles, éd. De Boeck,1999, p.43.
27 M. Grawitz, Méthodes des sciences
sociales,11e éd., Paris, Dalloz, 2001,p.378.
28 G. Le floch, « Le principe de
l'interdiction du recours à la force a-t-il encore valeur positive ?
», in Droit et cultures, 2009, disponible sur
https://journals.openedition.org/droitcultures/
29 Rapport de la Commission internationale de
l'intervention et de la souveraineté des États, La
responsabilité de protéger, 2001, p. 12.
11
éventuellement par la force, afin d'assurer la
protection de ses ressortissants en cas de situation d'urgence. C'est sur base
de ce principe que le Royaume-Uni s'était fondé pour intervenir
en Sierra Leone en 2002.
A titre illustratif il sied de souligner que les Etats peuvent
le faire soit dans le cadre des interventions décidées par du
Conseil de sécurité de l'ONU. Il en a été ainsi de
l'intervention au Darfour (Soudan). Soit les Etats dans le cadre de
l'intervention humanitaire, peuvent intervenir sans attendre l'autorisation. En
de telles circonstances, il faudrait s'attendre à ce que les Etats
interviennent par des coalitions ponctuelles, comme cela a été
entrepris par l'OTAN au Kosovo en 1999, ou la coalition
américano-britannique en Irak en 2003.
Généralement reconnues comme impératives,
ces interventions déclenchées en principe pour éviter
l'aggravation d'une catastrophe humanitaire, ne pouvaient s'appuyer sur aucune
habilitation par le Conseil de sécurité. C'est le c'est
également du droit humanitaire qui était outrageusement
violé par les forces serbes à l'encontre des populations
albanophones.
Nous ne pouvons pas ne pas signaler les interventions
humanitaires au Timor oriental, à partir d'octobre 1999, ou en Libye, au
printemps 2012 sous l'égide des Nations Unies, sur base de
résolutions à portée obligatoire votées par le
Conseil de sécurité.
6. Méthode et technique
En étudiant un phénomène on cherche tout
simplement à connaitre comment il s'observe en y jetant un regard
critique grâce à une démarche méthodologique qui
sera le levier puissant mise à la disposition d'un esprit logique
permettant la réalisation d'une construction sociale. Cette approche
contient à la fois une méthode et technique de collecte et
d'analyse des
données.la méthodologie
est une branche de la logique qui étudie le principe et le
démarche de l'investigation scientifique ses méthodes.
6.1 Méthode
Pinto et Grawitz définissent la méthode comme un
ensemble des opérations intellectuelles par lesquelles une discipline
cherche à atteindre les vérités qu'elle poursuit,
démontre et les vérifie30.Elle est une démarche
rationnelle de l'esprit fait pour arriver à la connaissance où
à la démonstration d'une vérité.
30 Pinto et M. Grawitz, Méthode des
sciences sociales, Dalloz, Paris, 1971, P.78.
12
Ainsi pour analyser notre thématique portant sur le
recours à la force et le principe de non immixtion dans les affaires
intérieures d'un Etat, la méthode analytique nous paraît
nécessaire.
En effet, elle nous permettra d'interroger les textes
essentiellement internationaux en vue d'en dégager la portée de
la notion de non immixtion dans les affaires intérieures d'un Etat. Et
cela à travers l'analyse, au-delà des textes internationaux et la
doctrine, la jurisprudence.
6.2 Techniques
Une technique est perçue comme étant un,
ensemble de procédés exploités par le chercheur dans la
phase de collecte des données qui intéressent son étude.
De ce fait, pour parvenir à comprendre de manière optimale ce
sujet, notre choix s'est posé sur les techniques documentaires, lesquels
nous ont soumis et permis de rassembler les données d'une manière
profonde et rationnelle tout en nous poussant droit sur les ouvrages, les
articles, les revues, les travaux scientifiques et internet.
7. Délimitation du sujet
L'étude portant sur le recours à la force et le
principe de non immixtion dans les affaires intérieures d'un Etat ne
peut être évalué que dans la perspective où elle
s'étend à tous les Etats membres des Nations Unies.
- Délimitation temporelle
Sur le plan temporaire, cette thématique sera
évalué selon que le principe de non recours à la force et
de non immixtion dans les affaires intérieures d'un Etat ont
été dans leur application de l'entrée en vigueur de la
charte de Nations Unies jusqu'à nos jours.
- Délimitation spatiale
Sur le plan spatial, cette recherche couvre les interventions
militaires ou le recours à la force dans les affaires intérieures
d'un Etat par un ou plusieurs Etats dans les relations internationales en
violation du principe de non immixtion des affaires intérieures d'un
Etat. Outre les Nations Unies où siègent tous les états du
monde il sera question de la cour pénale internationale et tous les
territoires du monde constituants les Nations Unies.
Alors le non recours à la force et la non-immixtion
dans les affaires internes d'un Etat par une puissance étrangère
font partie des principes cardinaux qui règlementent les relations
internationales.
13
8. Subdivisons du travail
Hormis l'introduction et la conclusion, notre travail est
subdivisé en deux chapitres. Le premier porte sur les
considérations générales, et le second porte sur
l'applicabilité et validité du recours à la force face au
principe de non immixtion dans les affaires intérieures des
États.
14
CHAPITRE PREMIER: CONSIDERATIONS
GÉNÉRALES
La société internationale d'après 1945 a
été marqué par la double volonté, manifestée
dans le texte cardinal qu'est la charte des nations unies, de revaloriser les
fondement du droit international et d'affirmer la solidarité des Etats
mais aussi des peuples des nations unies31, afin atteindre la paix
perpétuelle recherchée par elles dans leurs relations
internationales en s'abstenant de recourir à certains
procédés qui portent atteintes aux droits des autres.
L'usage de la force est prohibé dans les relations
internationales afin de respecter les objectifs de nations unies qui se
trouvent être le maintien de la paix et de la sécurité
internationale, le développement de relations amicales entre
États, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, la
coopération internationale et le respect des droits de
l'homme32. À cet effet, il ne fait aucun doute que ce
principe reflète un caractère fondamental. En effet, pour
Olivier Corten, la règle interdisant le recours à
la force revêt un caractère impératif.33
Ainsi, ce chapitre sera scindé en deux sections. D'une
part, il nous parait utile de définir les concepts clés (section
I), pour enfin chuter par donner un aperçu historique sur le principe de
non immixtion et de recours à la force en relations internationales et
en droit international d'autre part ( section II).
Section I: DEFINITION DES CONCEPTS
L'explication des concepts est la toute première phase
dans l'élaboration d'un travail scientifique car certains termes ont
souvent tendance à prêter confusion, c'est ainsi qu'il semble
impérieux d'en définir certains auxquels nous ferons usage dans
ce travail. Il s'agit entre autre du non-recours à la force, et du non
immixtion dans les affaires intérieures d'un État afin d'orienter
favorablement nos lecteurs dans nette compréhension de ces vocables.
31 D. Pierre-Marie, Droit international public,
14e éd., Paris, Dalloz,2018,p.54.
32 Alain Pellet, Droit international public,
Paris, L.G.D.J, 7e éd., 2002, p. 967.
33 Olivier Corten, Le droit contre la guerre,
Paris, Pedone, 2014, 2e édition, p 342.
15
§1. Principe de non recours à la force
Le dictionnaire français souligne que recourir à
signifie « faire appel à » et que « force armée
» s'entend de différents moyens militaires et autres qu'un
État consacre à la mise en oeuvre de sa politique de
défense. « recourir à la force armée » peut
fidèlement se traduire comme la possibilité de faire appel aux
différents moyens mis à disposition d'une armée
régulière d'un État pour mener à bien une
quelconque action.
L'analyse du recours à la force comme un droit, revient
à le présenter dans son acception plus ancienne. Comme
étant un droit reconnu à tout État de pouvoir faire la
guerre ou d'utiliser à l'encontre d'un autre État sa force
armée pour résoudre d'éventuels différends ou
crises auxquelles il serait confronté. En bref ,entendu dans le sens de
la guerre ,le droit de recourir à la force est le droit qu'a tout
État d'être dans une situation de conflit armé avec
d'autres États ou groupes politiques constitués
Pour Jean Salmon dans son « Dictionnaire de droit
international public » l'interdiction du recours à la force
évoque un principe selon lequel le recours à la force dont la
guerre n'est qu'une forme est prohibée34.Ce principe est
également désigné comme celui interdisant de
méconnaître l'intégrité territoriale d'un autre
État. Il est en fait étroitement associé au principe de
non-ingérence35.
Il ressort également de la résolution 2625(XXV)
de l'Assemblée générale que le principe du non-recours
à la force est le devoir pour les États : « de s'abstenir
d'organiser ou d'encourager l'organisation de forces irrégulières
ou de bandes armées, notamment de bandes de mercenaires, en vue
d'incursions sur le territoire d'un autre État » ainsi que «
de s'abstenir d'organiser et d'encourager des actes de guerre civile ou des
actes de terrorisme sur le territoire d'un autre État, d'y aider ou d'y
participer, ou de tolérer sur son territoire des activités
organisées en vue de perpétrer de tels actes, lorsque les actes
mentionnés dans le présent paragraphe impliquent une menace ou
l'emploi de la force »36
34 J. Salmon, Dictionnaire de droit international
public, op. cit.,p.595.
35D. Pierre-Marie,op.cit., p.180.
36 Consulte en ligne sur
https://treaties.un.org/doc/source/docs/A_RES_2625-Frn.pdf
à la page 133, le 10 novembre 21.
16
La Cour internationale de Justice a considéré,
dans son arrêt du 19 décembre 2005, Activités armées
sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c/
Ouganda), que ces dispositions revêtent un caractère
déclaratoire du droit international coutumier37.
Dans la compréhension des internationalistes c'est un
acte diplomatique de dernier recours après les ultimes
négociations, les moyens utiliser sont juridiquement soumis à des
règles du droit internationale, celles-ci définissent les
conditions de légitimité le déroulement et le moyens
licites de guerre dans une idée de recours à la
force38.
§2. Principe de non- ingérence
D'amblée, il sied de définir le principe de
non-ingérence ou de non-immixtion dans les affaires intérieures
d'un autre Etat selon différentes dictionnaires ou auteurs.
Selon dictionnaire français Larousse39,
l'immixtion c'est l'intervention illicite dans les affaires d'autrui faite en
l'absence de tout titre d'intervention (mandat, habitation judiciaire, pouvoir
légal) et qui 'accompagne parfois de la transgression d'une interdiction
d'agir. Mais également, il peut signifier l'acte accompli avec ou sans
droit, dont l'auteur doit supporter toutes les conséquences.
L'immixtion en soi est définie par le même
dictionnaire comme étant le fait de se mêler de quelque chose qui
ne nous regarde pas et que l'on participe par la force à la
réflexion pour orienter la décision. Il s'agit de plus souvent
d'un élément extérieur qui souhaite prendre une place dans
un huis clos qui ne le concerne pas.
Sur le plan relations internationales et du droit
international, on confond souvent le principe de non-ingérence avec
celui de non intervention. Cette confusion ayant été entretenue
par l'arrêt de la Cour internationale de Justice dans l'affaire des
Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre
celui-ci40 dans lequel elle désigne le principe de
non-intervention comme mettant en jeu : « le droit de tout État
souverain de conduire ses
37 Affaire des activités militaires au Congo
consultée sur
http://www.icj-cij.org,
le 14 novembre 2021 à 13 heures.
38 U. Palwankar, « Mesures auxquelles peuvent
recourir les Etats pour remplir leur obligation de faire respecter le droit
international humanitaire », in Revue internationale de la
Croix-Rouge, n°805, février 1994, p. 28.
39 Dictionnaire français le Larousse.
40 Affaire des activités militaires au Congo
( affaire RDC contre Ougnda),
http://www.icj-cij.org que
nous avons consulté le 23 novembre 2021 à 16 h.
17
affaires sans ingérence extérieure ». On
conviendra cependant qu'en pratique, le principe de non-intervention et celui
de non-ingérence sont dans la majeure partie des cas difficilement
dissociables, dans la mesure, notamment, où l'intervention militaire
s'accompagne toujours d'une ingérence, même si la
réciproque n'est pas nécessairement
vraie41.Non-ingérence et non intervention s'alimentent
cependant l'un et l'autre à la même source, la règle de
l'égalité souveraine des États.
Section II : APERCU HISTORIQUE SUR LE PRINCIPE DE NON
IMMIXTION ET DE RECOURS À LA FORCE EN R.I/D.I.
§1.Aperçu historique sur le principe de non
immixtion en relations internationales et en droit international
En parlant de l'aperçu historique sur le principe de
non immixtion on observera que le principe de non immixtion a des origines
lointaine puisqu'on en trouve des consécrations pratique et doctrinale
dès le début du XIXe siècle (le refus de la
grande Bretagne d'aider la Saint- alliance à réprimer des
mouvements insurrectionnelle en 1920) même elle sont souvent assorties
d'exceptions, pourtant le principe ne fera jamais l'objet d'une
véritable codification conventionnelle au contraire de ce qui s'est
fait, par exemple pour le droit de la guerre (convention de la Haye du 18
octobre 1907,de Genève du 12 Août 1949 et du 8juin 1977,etc le
droit de la mer(convention de Genève du 29 Avril 1958 et de
Montegobay42 du décembre 1982) le relations diplomatique et
consulaires(Conventions de Vienne du 18 avril 1961 et du 24 avril 1963), le
droit des traités (convention de vienne du 23 mai 1969,22 Août
1978 et 21 mars 1986).
D'autre part nous allons constater qu'en droit international,
ce principe a été proclamé en Europe contre la
sainte-alliance et aux Amérique (doctrine Monroe) contre la tendance
à l'ingérence des puissances européennes. Il se
présente à la lumière du droit international classique
plutôt comme aspiration et argument politique que comme véritable
réalité
juridique. la guerre était
toujours licite pour le droit international, on ne pouvait sûrement pas
maitriser un État plus faible. Alors le problème se pose
aujourd'hui dans de termes différents étant donné la
tendance du droit international contemporain à poursuivre une plus
grande justice parmi les peuples malgré tant de conflits et divergences,
même d'opinion entre les différents groupes d'États qui
constituent la communauté internationale.
41 D. Pierre-Marie, Droit international public,
14e éd., Paris, Dalloz, 2018, p.181.
42 Convention de Montegobay consulté
sur
http://www.cicr.org que nous
avons consulté le 23 novembre 2021 à 16 h.
18
§2. Aperçu historique sur le recours à
la force en relations internationales et en droit international
Au regard de l'Histoire de la guerre, il apparait que
l'expression du «non-recours à la force armée» qui a
été érigée au rang des grands principes
régissant les relations internationales est apparue autour du XXe
siècle sur la table de discussions des États. En
réalité, les sociétés se sont construites autour
des «guerres» et c'est incontestablement grâce à elles
qu'elles ont obtenu leur indépendance, leur assise et leur puissance sur
la scène internationale43.
Au XIXe siècle encore, faire la guerre
était considéré comme un attribut d'un État
souverain. Et la guerre était considérée comme « un
ensemble d'actes de violence, exercée par un État à
l'encontre d'un autre État, pour le forcer à se soumettre
à sa volonté». Dans cet esprit, l'usage de la force
armée était légalement justifié par les
États par une nécessité de l'action, qui reste très
souvent à la défense ou la conquête d'un territoire. Cette
situation va progressivement conduire au développement de la notion des
«guerres justes». La guerre est considérée comme
«juste» parce qu'elle porte sur de «bonnes intentions» qui
la rendent légitime.
De nos jours, pour certaines grandes puissances, à
l'instar des États-Unis, la lutte contre le terrorisme ferait partie de
ces causes justes de la guerre. Selon Albane Geslin44, l'histoire du
droit de la guerre a été marquée par trois temps
principaux. D'abord, la période antique jusqu'au XIXe
siècle, où la doctrine de la guerre juste visait à rendre
morale la guerre et ensuite, dans le XXe siècle la
souveraineté de l'État lui a permis de proclamer sa
liberté et ainsi user de la guerre comme un instrument de politique
internationale.
En bref, nous allons dire que la première tentative de
limitation du recours à la force est due à la Convention
Drago-Porter de 1907 dont la portée était bien modeste
puisqu'elle limitait l'emploi de la force pour le recouvrement de dettes
contractuelles. La seconde limitation du droit de recourirs à la force
est issue du Pacte de la SDN qui distingue les guerres illicite, celle
d'agression, des guerres licites, c'est-à-dire toutes celles qui
n'entrent
43 J-M. Henckaerts, Droit international
humanitaire coutumier,vol.1,Bruxelles, Bruyllant,2006,p.198.
44 J-M. Henckaerts et Doswald-L. Beck ,
Customary International Humanitarian Law, Cambridge, International
Committee of the Red Cross and Cambridge University Press, vol. I,
2005,p.322.
19
pas dans cette première catégorie, en
prévoyant le respect de procédures dans l'usage de la
force.45
Un pas décisif a été fait par le
célèbre Pacte Briand-Kellog du 26 août 1928 qui met fin
à la règle de la compétence discrétionnaire de
guerre des Etats, sans interdire pour autant de manière
générale et absolue le recours à la force. Le Rubicon a
été franchi par la Charte des Nations Unies,
élaborée pendant la seconde guerre mondiale, qui prévoit
dans son article 2, §4 que « Les membres de l'Organisation
s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la
menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité
territoriale ou l'indépendance politique de tout Etat, soit de toute
autre manière incompatible avec le but de Nations-Unies ».
Les travaux préparatoires de la Charte montrent que le
terme force ne vise que la force armée même si au cours des
années soixante les États du tiers monde ont cherché
à l'étendre à toutes les mesures des pressions y compris
les mesures politique et économique prises par les pays
développés.
45 D. Eric, Eléments de droit
international, Paris, PUF, 2018,p.351.
20
CHAPITRE II : APPLICABILITE ET VALIDITE DU PRINCIPE DE
RECOURS A LA FORCE FACE AU PRINCIPE DE NON IMMIXTION DANS LES AFFAIRES
INTERIEURES DES ÉTATS
Les principes de non-recours à la force et de
non-immixtion ayant un caractère coutumier, ils sont toutefois soumis
à certains fléchissements ou exceptions. Pour dire que dans
certaines circonstances les Etats peuvent recourir à la force ou
s'immiscer dans les affaires relevant de la compétence exclusive des
autres soit aux fins humanitaires (section I), ou soit dans une perspective de
faire respecter le droit international (section II). Cependant, ces exceptions
ne vont pas sans soulever des critiques ou des observations du point de vue des
relations internationales (section III).
Section I : L'INTERVENTION AUX FINS HUMANITAIRES
§1. Genèse de l'intervention humanitaire
En réalité, l'histoire des relations
internationales a été marquée depuis longtemps par la
pratique des interventions d'humanité, développée surtout
au XIXe siècle et ayant principalement pour but la protection
des nationaux de l'Etat intervenant, au cas où leurs vies étaient
menacées46. Ainsi, les premiers balbutiements doctrinaux de
cette notion remontent de très longtemps.
En effet, parmi les auteurs classiques de l'école du
droit naturel qui se sont penchés sur la notion d'intervention
d'humanité, on peut citer notamment Saint Thomas D'Aquin47
qui estime qu'« un souverain a le droit d'intervenir dans les affaires
intérieures d'un autre lorsque ce dernier maltraite ses sujets »,
et Grotius48. Grotius écrivait, en évoquant la
souveraineté des Etats : « Mais le droit de la
société humaine ne sera pas exclu pour cela, lorsque l'oppression
est manifeste... C'est ainsi que Constantin prit les armes contre Maxence et
contre Licinius ; que d'autres empereurs des Romains les prirent, ou
menacèrent
46 Hajer Gueldich, droit d'ingérence et
interventions humanitaires : état de la pratique et du droit
international, Paris, Dalloz,p.54.
47 Saint thomas d'Aquin cité par C-H.Thuan,
« De l'intervention humanitaire au droit d'ingérence », in
FENET, Paris PUF, 1994, p. 100.
48 Grotius cité par O. Corten et P. Klein ,
« Droit d'ingérence ou obligation de réaction non
armée », in RBDI, 1990/2, p.369.
21
de les prendre contre les Perses, s'ils cessaient de
persécuter les chrétiens à cause de leur religion
».
Leurs idées ont été soutenues par
d'autres auteurs tels que Vattel49, Puffendorf, Suarez, De Vittoria
et même Saint Augustin. Sur la base de toutes ces pensées, allait
se développer, au XIXe siècle, la doctrine
d'intervention d'humanité.
De même, Gustave Rolin-Jacquemyns, avait écrit
à propos de la légitimité de la pratique d'intervention :
« lorsqu'un gouvernement, tout en agissant dans la limite de ses droits de
souveraineté, viole les droits de l'humanité, par des
excès de cruauté et d'injustice qui blessent profondément
nos moeurs et notre civilisation, le droit d'intervention est légitime.
Car quelque respectables que soient les droits de souveraineté et
d'indépendance des Etats, il y a quelque chose de plus respectable
encore, c'est le droit de l'humanité ou de la souveraineté
humaine qui ne doit pas être outragé »50.
En dépit du fit que le droit naturel a
été remplacé au XIXe siècle par le droit
positif, en tant que socle du droit international, cela n'en en rien
empêché la persistance de la thématique de l'intervention
pour des fins humanitaires dans les doctrines française, britannique et
américaine.
A ce sujet, Stowell enseigne que lorsque les habitants d'un
pays sont de manière persistante victimes des atrocités graves et
abusives, et qui dépassent les limites de raison et de justice dans
lesquelles doit se maintenir le gouvernement, un Etat tiers peut intervenir
à juste titre et employer la force pour secourir les
victimes51. Dans l'affaire Espagne c/Grande Bretagne (sentence du 23
octobre 1923), l'arbitre Max Hubert avait souligné que : «
L'intérêt d'un Etat de pouvoir protéger ses ressortissants
et leurs biens doit primer le respect de la souveraineté territoriale,
et cela même en l'absence d'obligations conventionnelles. Ce droit
d'intervention a été revendiqué par tous les Etats, ses
limites seules peuvent être discutées
»52.
L'intervention humanitaire, dite au XIXe
siècle « intervention d'humanité », a souvent servi
d'excuse légale aux politiques des grandes puissances. Dans bien des
cas, elle
49 J-M. Henckaerts, Droit international
humanitaire coutumier,vol.1,Bruxelles, Bruyllant,2006,p.357.
50 G. Rolin-Jacquemyns,op. cit., p.675.
51 E. StowelL , « La théorie et la
pratique de l'intervention », in RCADI, 1932/II, page 138.
52 Affaire Espagne c/Grande Bretagne, Rapport
du 23 octobre 1924, in RSA, volume II, page 641.
22
dissimulait mal ses mobiles politiques53. Elle a
notamment été mise en avant pour la protection de personnes et
spécialement de nationaux contre un péril imminent les
opérations d'Entebbe par Israël en 1976, de Kolwezi par la France
en 1978 et de Taba par les États-Unis en 1980). La Cour internationale
de Justice a indirectement émis une appréciation négative
à l'égard de cette dernière opération dans son
arrêt relatif à l'affaire du Personnel diplomatique et consulaire
américain à Téhéran.54
La résolution de Wiesbaden sur le principe de
non-intervention dans les guerres civiles, l'Institut de droit international a
avancé la règle d'après laquelle : « les États
tiers s'abstiendront d'assister les parties à une guerre civile
sévissant sur le territoire d'un autre État ». Il a
cependant admis à l'article 4 de la même résolution, la
règle d'après laquelle : « devrait être tenu pour
licite l'envoi de secours ou d'autres formes d'aides purement humanitaires en
faveur des victimes d'une guerre civile ».C'était
déjà dégager la voie qui devait conduire à
l'affirmation, quelques années plus tard, du « devoir
d'ingérence humanitaire ».
§2. Conditions
Pour qu'une intervention d'humanité soit
légitime, il faut que le fait qui la motive soit d'abord un fait de la
puissance publique et non le fait de particuliers ; Ensuite, ce fait doit
constituer une violation du droit humain et non une simple violation du droit
positif ; enfin, l'intervention doit réunir certaines conditions
d'opportunité.
Trois conditions peuvent de manière brève
être retenues pour justifier l'intervention aux fins humanitaires : le
droit à la vie (A), le droit à la liberté(B) et le droit
à la légalité(C).
A. Le droit à la vie
Il n'est plus important de rappeler que la protection du droit
à la vie et le respect de l'intégrité physique reconnus
à tout individu ont toujours été le primordial motif des
interventions d'humanité. Il en de même de l'interdiction de la
torture28, l'interdiction de l'esclavage et de la servitude et l'interdiction
du génocide.
S'agissant de l'interdiction de la torture, il sied de
souligner l'intervention collective des signataires de l'Acte
d'Algésiras auprès du Sultan du Maroc en 1909. Ce dernier
53 D. Pierre-Marie, op.cit., p.183.
54 Affaire des otages, consulté sur
http://www.icj-cij.org,
le 14 novembre 2021 à 13 heures.
23
réprimait les rebelles en leur faisant couper le
poignet droit et le pied gauche. Les Etats signataires du Pacte lui avaient
demandé de respecter et faire respecter les lois de l'humanité et
d'interdire la torture.
B. Le droit à la liberté
Antoine Rougier écarte, dans ce sens, plusieurs droits
qui ne peuvent pas faire l'objet d'intervention d'humanité telle que la
liberté religieuse à laquelle s'applique plutôt « la
théorie de l'intervention pour cause religieuse ». De même
que « l'aide fournie par un Etat à un peuple en danger pour
conquérir son indépendance ou pour défendre ses
libertés politiques », se rattacherait, selon l'auteur, à un
ordre de conscience différent. Concernant le droit de
propriété, et pour répondre à la question de savoir
si les violations du droit de propriété pouvaient justifier une
intervention d'humanité, l'auteur affirme que : « seule la
dépossession des propriétaires en dehors d'une
nécessité publique et sans indemnité pourrait justifier
une intervention d'humanité ».
S'agissant de l'interdiction de l'esclavage et de la
servitude, citons par exemple l'intervention des Etats-Unis et de l'Angleterre
en 1907 en faveur des indigènes de la religion de Putu Mayo au
Pérou, intervention justifiée par la lutte contre l'esclavage et
la servitude
B. Le droit à la
légalité
D'après Antoine Rougier, le droit à la
légalité c'est « le droit pour tout individu d'être
protégé dans son activité par un certain ordre
légal, d'échapper au pur arbitraire de ses gouvernants et de
n'être frappé dans sa vie et dans ses biens que
conformément à la loi, par une autorité juridictionnelle
régulière suivant des formes établies »55
55 A. Rougier, « La théorie de
l'intervention d'humanité », op. cit., p.521.
24
Section II : L'OBLIGATION DE PROTEGER OU DE FAIRE
RESPECTER LE
DROIT INTERNATIONAL
§1. Contexte de l'élaboration de l'obligation
de protéger
Héritière du « droit d'ingérence
»56 la théorie de l'obligation de protéger a
été élaborée par une commission internationale
intitulée « La Commission internationale de l'intervention et de la
souveraineté des États (CIISE) », mandatée par le
gouvernement canadien. Constituée en 2000 et co-présidée
par M. Gareth Evans et Mohamed Sahnoun, cette commission a rendu public en
décembre 2001 son rapport intitulé « La
responsabilité de protéger ».
Du « droit d'ingérence » à la «
responsabilité de protéger ». À la demande du
Secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, le
Conseil de sécurité de l'ONU a discuté en mai 2002, un
rapport sur le « devoir d'ingérence » rebaptisé d'une
manière plus neutre « responsabilité de protéger
» les populations en grave détresse humanitaire. Le rapport se
prononce pour une responsabilité principale exercée par le
Conseil de sécurité lui-même afin de prendre l'initiative,
dans le cadre de l'ONU, de ce type d'interventions ; la détresse
à laquelle ces actions seraient destinées à
remédier sont définies par « des pertes considérables
en vies humaines, effectives ou présumées, qu'il y ait ou non
intention génocidaire, attribuables soit à l'action
délibérée de l'État sur le territoire duquel
l'action est déployée, soit à sa négligence, son
incapacité à agir, sa défaillance ». L'intervention
militaire est désignée comme modalité de dernier
recours.
Elle devrait être proportionnée et avoir des
perspectives raisonnables d'atteindre ses objectifs. La question de la
légitimité des interventions militaires dans un tel contexte
renvoie directement au problème de l'usage du veto de la part
de l'un ou l'autre des membres du Conseil de sécurité. À
la proposition du représentant permanent de la France de ne faire usage
du veto que lorsqu'un intérêt jugé d'ordre «
vital » serait en cause pour l'un des membres permanent, la Russie,
pensant à la crise tchétchène, a opposé un refus de
principe.
Le document final du sommet mondial de 2005 (GTDIP no
2) adopté par les chefs d'État et de gouvernement lors de la
session de l'Assemblée générale s'inspire directement
des
56 Lire à ce sujet d'informations, voir
http://www.icrc.org/fre/resources/documents/misc/5fzg3n.htm.
25
conclusions du rapport précité. Après
avoir affirmé que « c'est à chaque État qu'il incombe
de protéger les populations du génocide, des crimes de guerre, du
nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité », le document
envisage la mise en place éventuelle d'un « dispositif d'alerte
rapide » par les Nations Unies pour leur permettre d'aider chaque
État membre qui le solliciterait à faire face à ses
obligations. Il prévoit également si nécessaire la mise en
oeuvre des « moyens diplomatiques, humanitaires et autres moyens
pacifiques appropriés, conformément aux Chapitres VI et VII de la
Charte afin d'aider à protéger les populations du
génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes
contre l'humanité ».
C'est dans ce contexte que les chefs d'État et de
gouvernement se disent « prêts à mener en temps voulu une
action collective résolue, par l'entremise du Conseil de
sécurité, conformément à la Charte, notamment son
Chapitre VII, au cas par cas et en coopération, le cas
échéant, avec les organisations régionales
compétentes, lorsque ces moyens pacifiques se révèlent
inadéquats et que les autorités nationales n'assurent
manifestement pas la protection de leurs populations » contre les
fléaux précités57.
Ce texte est à la fois non négligeable et peu
innovant. Non négligeable, parce qu'il manifeste au moins deux choses,
D'une part, un rappel ; celui que chaque État, pour reprendre la
terminologie propre à l'article 1er commun aux quatre Conventions de
Genève de 1949, depuis lors passé dans le droit coutumier, a
l'obligation de « respecter et faire respecter » le droit
international humanitaire auquel s'ajoutent ici les droits fondamentaux de la
personne ; d'autre part, la volonté politique, au moins affichée,
de récupérer sous l'appellation nouvelle de «
responsabilité de protéger » le droit existant allié
aux acquis tirés des crises décrites plus haut (Kurdistan,
Somalie, Bosnie, Kosovo, etc.). Il s'agit en même temps d'un utile
recadrage. L'un des messages principaux est d'insister sur le fait qu'en
dépit du caractère individuel, pour chaque État, d'une
telle responsabilité, l'action en faveur de sa réalisation peut
bénéficier de l'action collective des autres membres de la
communauté internationale, mais dans le cadre et le respect du droit des
Nations Unies
Quoi qu'il en soit, le texte reste peu innovant. Comme dit
plus haut, l'obligation de « respecter et faire respecter » existait
déjà depuis les Conventions de Genève. La Cour
internationale de Justice a eu l'occasion, à cet égard, de
préciser la portée d'un tel engagement
57 « Responsabilité de protéger »,
rapport de la CIISE, publié par le Centre de recherches pour le
développement international, Ottawa (Canada),
http://www.idrc.ca/FR/Resources/Publications/Pages/IDRCBookDetails.aspx?
PublicationID=237 consulté le 14 novembre 2021 à 14 heures.
26
dans son avis sur les Conséquences juridiques de
l'édification du mur dans les territoires palestiniens du 9 juillet
2004. L'obligation consignée à l'article premier s'impose
à tous les États. Elle a pour eux diverses implications dont
celle de ne pas reconnaître les situations créées par des
violations du droit international, comme, en l'espèce, l'entrave
persistante à l'expression du droit du peuple palestinien à
exercer son droit à l'autodétermination. Mais le même avis
souligne aussi que l'ONU elle-même est appelée par le droit
humanitaire en vigueur à coopérer à la mise en oeuvre tout
au moins des « principes intransgressibles du droit international
coutumier » au nombre desquels figure précisément
l'obligation de « faire respecter » l'ensemble du « droit de
Genève ».
§2. Champ d'application de l'obligation de
protéger
La souveraineté des États implique une
responsabilité, et c'est à l'État lui-même
qu'incombe, au premier chef, la responsabilité de protéger son
peuple. Quand une population souffre gravement des conséquences d'une
guerre civile, d'une insurrection, de la répression exercée par
l'État ou de l'échec de ses politiques, et lorsque l'État
en question n'est pas disposé ou apte à mettre un terme à
ces souffrances ou à les éviter, la responsabilité
internationale de protéger prend le pas sur le principe de non
intervention.
Il ressort du rapport de la CIISE qu'uniquement des
circonstances exceptionnelles, identiques à celles invoquées pour
« l'intervention d'humanité », nécessitent une
intervention, c'est le cas lorsque la violence est si manifestement
'attentatoire à la conscience de l'humanité' ou bien elle
représente un danger si évident et immédiat pour la
sécurité internationale.
Ladite commission avance six critères
nécessaires pour une telle intervention : autorité
appropriée, juste cause, bonne intention, dernier recours,
proportionnalité des moyens et perspectives raisonnables. Il convient de
s'arrêter sur les deux plus discutables d'entre eux : juste cause et
perspectives raisonnables.
A. Juste cause
Pour cette commission, le concept « juste cause » de
la décision d'intervenir est amplement satisfait en cas des pertes
considérables en vies humaines, effectives ou
appréhendées, qu'il y ait ou non intention génocidaire,
qui résultent soit de l'action délibérée de
l'État, soit de sa négligence ou de son incapacité
à agir, soit encore d'une défaillance dont
27
il est responsable ; ou un 'nettoyage ethnique' à
grande échelle, effectif ou appréhendé, qu'il soit
perpétré par des tueries, l'expulsion forcée, la terreur
ou le viol.
Le facteur risque est donc suffisant pour intervenir
militairement dans un pays donné. Bien qu'elle soit consciente des
manipulations au niveau des informations, la CIISE ne pose pas comme condition
une mission sur le terrain pour vérifier les allégations, mais se
contente de la recommander « si l'on dispose du temps nécessaire
» Ce qui nous ramène à la théorie de guerre
préventive58.
B. perspectives raisonnables
Par perspectives raisonnables, cette commission entend le
succès de l'intervention militaire. Sur ce point, cette dernière
fait preuve d'un réalisme « déconcertant » quand elle
affirme exclure toute action militaire contre l'un des cinq membres permanents
du Conseil de sécurité « même si toutes les autres
conditions de l'intervention décrites plus haut sont réunies.
» Et elle justifie sa position en ces termes : « le fait qu'on ne
puisse pas intervenir dans tous les cas où une intervention se justifie
ne justifie pas que l'on n'intervienne dans aucun cas ».
Bien que le rapport CIISE insiste sur la protection des
populations civiles et que les droits humains y occupent une bonne place, la
« responsabilité de protéger », à l'instar des
deux précédentes théories présentées, ne
vise à protéger que le droit à la vie et encore à
la condition que sa violation soit le fait d'un génocide, de nettoyages
ethniques, de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité. Il sied
de souligner que les rédacteurs du rapport sont accès explicites
sur ce point. Ils soutiennent que : « les violations des droits de l'homme
qui, bien que graves, ne vont pas jusqu'au meurtre caractérisé ou
au nettoyage ethnique, par exemple la discrimination raciale
systématique, l'emprisonnement systématique ou d'autres formes de
répression politique des opposants » ne constituent pas un motif
d'intervention militaire.
Cette obligation de protéger peut être
résumée en trois piliers selon les rédacteurs de ce
rapport : la prévention, la réaction (intervention armée)
et la reconstruction, pouvant être décrits comme suit :
58 Rapport de la Commission internationale de
l'intervention et de la souveraineté des États, p.24.
28
D'abord la responsabilité de prévenir :
éliminer à la fois les causes profondes et les causes directes
des conflits internes et des autres crises produites par l'homme qui mettent en
danger les populations ;
Ensuite, la responsabilité de réagir :
réagir devant des situations où la protection des êtres
humains est une impérieuse nécessité, en utilisant des
mesures appropriées pouvant prendre la forme de mesures coercitives
telles que des sanctions et des poursuites internationales et, dans les cas
extrêmes, en ayant recours à l'intervention militaire ;
Enfin, la responsabilité de reconstruire : fournir,
surtout après une intervention militaire, une assistance à tous
les niveaux afin de faciliter la reprise des activités, la
reconstruction et la réconciliation, en agissant sur les causes des
exactions auxquelles l'intervention devait mettre un terme ou avait pour objet
d'éviter.
Section III : DEFIS ET PERSPECTIVES
§1. Limites de la responsabilité de
protéger
En dépit des éloges de l'obligation de
protéger pour sauvegarder les droits de l'homme sous ses diverses
dimensions, elle suscite toutefois quelques réticences, voire des
craintes du côté des Etats en voie de développement. Et
cela pour plusieurs raisons. Premièrement, la responsabilité
internationale, bien que subsidiaire, pourrait avoir pour conséquence de
déresponsabiliser certains Etats peu respectueux des droits de l'homme.
Ensuite, il va sans dire que le mot «responsabilité» implique
inévitablement des obligations pour les Etats qui en acceptent les
modalités. Et bien que les démocraties occidentales condamnent
unanimement les massacres tels qu'ils ont eu lieu au Rwanda, en Bosnie ou au
Soudan, elles ne sont pas prêtes à payer de leur sang pour
protéger les autres59. Finalement, si la communauté
internationale accepte cette obligation solidaire, elle devra en assumer les
coûts tant au niveau de la prévention, de l'intervention que de la
reconstruction
Malheureusement, la lacune essentielle consiste dans la mise
en oeuvre concrète des valeurs proclamées. Par exemple,
quid en cas de blocage du Conseil de sécurité?
Le Document final passe sous silence le problème
récurrent du potentiel blocage ou de l'inaction du Conseil de
sécurité. Mais si le Conseil de sécurité a la
responsabilité principale en matière de paix et de
sécurité internationales (art. 24 de la Charte), l'article 11
59 J. Goldsmith, The Limits of International Law,
Oxford University Press, Oxford, 2005, p. 213.
29
de la Charte confère à l'Assemblée
générale une responsabilité subsidiaire60. La
différence réside dans le fait que l'Assemblée
générale peut uniquement faire des recommandations, alors que le
Conseil de sécurité peut prendre des décisions
contraignantes en vertu du Chapitre VI de la Charte.
Il paraît extrêmement important d'amener un
remède à l'hypothèse de la paralysie ou de la
passivité du Conseil de sécurité, car comme l'avait
très justement compris l'ancien Secrétaire général
de l'ONU, si la conscience collective de l'humanité ne trouve pas dans
l'Organisation des Nations Unies sa plus grande tribune, elle risque fort de
rechercher ailleurs la paix et la justice.61
En de telles circonstances, il faudrait s'attendre à ce
que les Etats interviennent par des coalitions ponctuelles, comme cela a
été entrepris par l'OTAN au Kosovo en 1999, ou la coalition
américano-britannique en Irak en 2003, parfois pour de mauvaises
raisons, en suivant des intérêts égoïstes, et surtout
au détriment de la crédibilité indispensable de l'ONU.
En effet cette intervention, déclenchée en
principe pour éviter l'aggravation d'une catastrophe humanitaire, ne
pouvait s'appuyer sur aucune habilitation par le Conseil de
sécurité, celui-ci étant paralysé par les vetos
russe et chinois. Sans être inexistantes, les conditions de la
justification juridique de cette intervention sont ainsi
particulièrement malaisées à trouver sans recourir
à l'argument d'une nécessité de la sauvegarde des
principes de droit humanitaire et des droits de l'homme,
généralement reconnus comme impératifs, et dont il est
patent qu'ils étaient outrageusement violés par les forces serbes
à l'encontre des populations albanophones. En revanche, on retrouve une
situation plus conforme à la pratique des années quatre-vingt-dix
avec les conditions des interventions humanitaires internationales au Timor
oriental, à partir d'octobre 1999, ou en Libye, au printemps 2012,
puisqu'elles se sont déroulées toutes deux sous l'égide
des Nations Unies, sur base de résolutions à portée
obligatoire votées par le Conseil de
sécurité62.
En tenant compte de la réalité politique, ladite
Commission avait envisagé le cas exceptionnel d'une intervention
moralement légitimée63.Toutefois, se situer sur le
plan de la
60 La Résolution Dean Acheson de 1950.
61 Séance plénière de la
54e session de l'Assemblée générale des Nations
Unies, doc. ONU A/54/PV.4 (1999).
62 D. Pierre-Marrie, op.cit., p.213.
63 La Commission préconise une sorte de
pesée d'intérêts: «La question se pose vraiment de
savoir en pareil cas où est le moindre mal: celui que l'ordre
international subit parce que le Conseil de sécurité a
été court-circuité,
30
légitimité relève d'un domaine qui est
beaucoup plus difficile à saisir car il laisse une large part à
la subjectivité. C'est la raison pour laquelle cette
responsabilité de protéger devrait s'interpréter comme une
responsabilisation solennelle des Nations Unies et plus particulièrement
du Conseil de sécurité et non pas une assise juridique pouvant
justifier une intervention armée unilatérale64
Un autre problème qu'il convient de soulever tient au
fait que même avec l'aval du Conseil de sécurité, l'ONU n'a
pas de capacité opérationnelle puisque l'armée onusienne
envisagée par la Charte n'a jamais vu le jour. Partant, l'action
effective décidée sur le plan international reste
conditionnée à la volonté des Etats notamment les plus
puissants d'entre eux de mettre à la disposition du Conseil, leurs
ressources militaires. Les Etats devraient être disposés à
recourir à la force au nom de l'ONU, sous sa direction et pour les buts
qu'elle a fixé. Toutefois, en pratique, les interventions
décidées par le Conseil de sécurité manquent
cruellement de ressources, comme en témoigne l'exemple du
Darfour65.
§2. Perspectives
Bien que certains auteurs aient vu dans la proclamation de la
responsabilité de protéger une simple «réforme de
caractère linguistique»66, nous sommes d'avis que cette
notion contribue tout de même à faire évoluer la situation
sur le plan international. Contrairement au «droit d'ingérence
humanitaire», qui n'a jamais été reconnu sur le plan
ou celui qu'il subit parce que des êtres humains sont
massacrés sans que le Conseil de sécurité ne lève
le petit doigt»
64 J. Noel, le principe de non-intervention :
théorie et pratique dans les relations interaméricaines,
Bruxelles, Bruylant, 19811, p. 236.
65 En effet, la Résolution 1769 du Conseil
de sécurité du 31 juillet 2007 qui prévoyait le
déploiement renforcé des Nations Unies et de l'Union africaine
n'aura pas eu l'effet escompté sur le terrain. La mission des Nations
Unies et de l'Union africaine Au Darfour (MINUAD) s'était fixé
comme objectif à atteindre une présence de quelques 26 000 hommes
en plus des 7 000 soldats débordés de l'Union africaine sur le
terrain depuis 2004. Cet objectif n'a pourtant jamais pu être atteint. Au
17 juin 2008, le nombre total des personnels en uniforme de la MINUAD
s'élevait à 10 190 hommes (soldats, officiers, policiers) et 3
443 civils volontaires recrutés sur le plan national et international.
De plus, les ressources matérielles notamment en termes
d'équipements s'avèrent également insuffisants, (Rapport
du Secrétaire général sur le déploiement de
l'Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour, 17 juin
2008, doc. ONU S/2008/400).
66 L. Boisson de chazournes et L Condorelli ,
De la responsabilité de protéger ou d'une nouvelle parure
pour une notion déjà bien établie, RGDIP, 2006, p.
17.
31
juridique67, la responsabilité de
protéger fait l'objet d'un consensus mondial. Pour la première
fois, la communauté internationale a reconnu la nécessité
d'intervenir en cas de violations massives des droits de l'homme et du droit
international humanitaire et a défini les cas justifiant une telle
immixtion.
A ce sujet, Le professeur De la Pradelle dira de cette
résolution: «L'innovation est indiscutable. Jamais auparavant l'ONU
n'avait autorisé certains de ses membres à conduire une
opération de police armée à seule fin de secourir une
population affamée»68. Tous les Etats ont accepté
le fait qu'ils partagent désormais une responsabilité solidaire
dans les cas d'atrocités perpétrées sur des êtres
humains et que le bien-être des populations doit être
considéré comme un bien commun à l'humanité.
Le rapport de la CIISE présente un apport important
dans les cas qui ne satisferaient pas aux exigences de légalité.
En effet, les critères développés pourront le cas
échéant être utilisés comme garde-fou, servant
à mesurer la légitimité d'une action militaire,
menée aux fins de protection des populations vulnérables.
Même s'il paraît évident que la recherche a posteriori de la
légitimité est le signe d'une absence de droit et, à tout
le moins, d'un doute à son sujet.
En tout état de cause, l'émergence de la
l'obligation de protéger suppose que l'inaction du Conseil de
sécurité face aux génocides, crimes contre
l'humanité, nettoyages ethniques ou crimes de guerre pourra être
considérée comme un fait internationalement illicite pouvant
engager la responsabilité de l'Organisation d'une part, et celle de
l'Etat d'autre part. Dans cette perspective, optique, les Etats qui s'opposent
ou empêchent l'action nécessaire du Conseil de
sécurité dans les cas susmentionnés pourraient engager
leur responsabilité internationale.
67J-M. Sorel , Le chapitre VII de la Charte des
Nations Unies, Colloque de Rennes de la Société française
de droit international, Paris, Pedone, 1995, p. 741.
68 C. Sommaruga, Le droit international
humanitaire au seuil du 3e millénaire : bilan et perspectives,
Genève, 2000, p. 63.
32
CONCLUSION
Nous voici à la fin de la rédaction de notre
travail qui a analysé le recours à la force, face au principe de
non-immixtion dans les affaires intérieures des Etats. Le recours
à la force se trouve être une exception du principe de non-recours
la force dans les rapports entre Etats, et cela vis-à-vis de
l'obligation que la Charte impose aux Etats de ne pas s'ingérer ou
s'immiscer dans les affaires relevant de la compétence exclusive des
autres. De ce fait, notre travail nous l'avons scindé en parties.
Dans le premier chapitre qui parle des considérations
générales, nous sommes partis d'un questionnement qui consistait
à cerner de quelle manière le recours à la force est-il
envisagé à l'égard du principe de non-ingérence
dans les affaires intérieures des Etats en Droit International. Face
à cette question, nous avons proposé une solution provisoire en
rappelant le principe posé par la charte et qui est
considéré comme une boussole dans les relations entre les Etats,
à savoir : le non-recours à la force dans les relations entre ces
derniers. Toutefois, dans certaines circonstances l'on peut déroger
à ce principe, Ce qui pourrait justifier cette immixtion.
Pour bien décortiquer notre thématique, nous
avons fait appel à la méthode analytique qui nous a permis des
dégager la quintessence de differents instruments internationaux qui
régissent les relations interétatiques et ayant un rapport direct
avec la règle qui interdit aux Etats de s'ingérer dans les
affaires qui relèvent de la compétence exclusive des autres, et
lorsque par exception ils le font, quels seront les contours (contexte) de
cette intervention. Cette méthode a été associée
à la technique documentaire pour nous permettre de bien cerner la
pratique ou coutume internationale à travers différentes
décisions ( arrêt, sentences, moyen diplomatique ...) de la CIJ,
arbitres ou tout autre moyen prévu par le Droit International tranchant
des tels litiges. mais également permettre de s'imprégner des
critiques que portent differents auteurs ( doctrinaires) à ces
principes, pourquoi pas comprendre la pratique des Etats entre eux lorsqu'ils
sont bités auxdits principes.
Nous avons dans ce chapitre illustrer certains concepts qui
étaient de nature à prêter confusion pour afin permettre
à ceux qui vont nous lire de les situer dans le cadre spécifique
des relations internationales et du droit international. Nous avons par la
suite souligné le fait que le principe de non-recours à la force
et celui de non immixtion dans les affaires relevant de la compétence
des autres Etats ne datent pas d'aujourd'hui. On peut retrouver leurs traces
Nous avons également souligné qu'en cas
d'intervention militaire, les Etats doivent requérir l'autorisation du
conseil de sécurité de l'Onu. Mais cette position ne va pas
sans
33
dans l'histoire ancienne où à travers differents
traités et accords de paix, les Etats s'engageaient non seulement de ne
pas se faire la guerre, mais aussi de ne pas s'ingérer dans les
compétences des autres Etats. Durant la même période, il
existait ce qu'on n'appelait « guerre juste» pour dire que lorsqu'un
Etat était victime d'une agression de la part d'un autre, il avait le
droit de riposter pour repousser cette attaque injuste.
Dans le second chapitre, d'entrée de jeu nous avons
commencé par mettre exergue la disposition de la charte qui
réitère l'intention de ne pas s'ingérer dans les affaires
internes de tout Etat. Cependant nous avons souligné que ce principe
n'est pas intangible dans la mesure où dans certaines circonstances la
Charte autorise cette ingérence. C'est le cas en situation
d'intervention humanitaire ou dans le contexte de l'obligation de
protéger ou de faire respecter le droit international.
En effet, devant une intervention humanitaire (lorsque par
exemple les vies humaines sont en danger, danger atteignant un certain seuil),
ce principe de non-ingérence et celui de non-recours à la force
fléchissent, avons souligné dans ce travail. Nous avons
également mis l'accent sur le fait que lorsqu'un Etat oppresse une
couche de sa population en raison par exemple de leur appartenance religieuse
ou ethnique, et ce, en violation du droit international humanitaire et
coutumier et coutumier, Tout Etat peut intervenir pour faire respecter le droit
international. Il en est de même lorsqu'un Etat se trouve dans
l'impossibilité de faire respecter le droit international sur son
territoire, sachant qu'il incombe à chaque Etat l'obligation de
protéger ses citoyens.
Nous avons également souligné que ces deux
principes (non-ingérence et non-recours à la force) peuvent
trouver des limitations lorsqu'un Etat par exemple par des accords
internationaux a renoncé à une partie de ses compétences.
Ces pratiques s'observent souvent dans les cadres des coopérations entre
les Etats.
Il sied également de souligner que l'intervention
humanitaire et l'obligation de protéger ou de faire respecter le droit
international ne sont pas épargnées des critiques non seulement
de la part des Etats, mais aussi dans le chef d'auteurs. Ces interventions
trouveraient leurs limites dans le fait qu'elles pourraient servir d'alibis de
la part des grandes puissances pour violer l'intégrité
territoriale certains Etats. L'intervention en Lybie ou en Irak, en est une
illustration éloquente.
34
soulever des critiques. Certains auteurs semblent avoir une
opinion contraire à ce sujet. Ils s'interrogent en disant que lorsque
les vies humaines sont en péril, doit-on continuer à attendre
l'autorisation du conseil de Sécurité ? Et même lorsque le
conseil de sécurité tarde à répondre ou ne s'est
pas mis d'accord, doit-on croiser les bras ?
Dans la pratique, nous avons souligné un cas où
l'assemblée générale a donné une autorisation
allant dans ce sens. Il s'agit de la résolution Dean Acheson. Nous avons
enfin souligné que lorsque les règles intransgressibles du droit
international sont violées, ces interventions ci-haut citées se
présentent comme l'ultime solution afin de maintenir la paix
internationale. La responsabilité de protéger apparaît de
ce fait comme étant l'un des plus grands défis de notre XXIe
siècle. Elle cristallise une prise de conscience universelle quant au
devoir de protéger tous les êtres humains contre les actes qui
choquent notre conscience.
35
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Droit d'ingérence ou obligation de réaction non armée
», in RBDI, 1990/2.
9. Stowel, E., « La théorie et la pratique de
l'intervention », in rcadi, 1932/II.
38
TABLE DES MATIERES
DEDICACES I
IN MEMORIUM II
REMERCIEMENTS III
SIGLES ET ABREVIATION IV
INTRODUCTION 1
1. Présentation du sujet. 1
2. Choix et intérêt du sujet 2
- Intérêt personnel 2
- Intérêt scientifique 2
- Intérêt social 2
3. Etat de la question 3
4. Problématique 6
5. Hypothèses 9
6. Méthode et technique 11
6.1 Méthode 11
6.2 Techniques 12
6. Délimitation du sujet 12
8. Subdivisons du travail 13
CHAPITRE PREMIER: CONSIDERATIONS GÉNÉRALES
14
Section I: DEFINITION DES CONCEPTS 14
§1. Principe de non recours à la force
15
§2. Principe de non- ingérence
16
Section II : APERCU HISTORIQUE SUR LE PRINCIPE DE NON
IMMIXTION ET
DE RECOURS À LA FORCE EN R.I/D.I. 17
§1.Aperçu historique sur le principe de non
immixtion en relations internationales
et en droit international 17
§2. Aperçu historique sur le recours à
la force en relations internationales et en
droit international 18
CHAPITRE II : APPLICABILITE ET VALIDITE DU PRINCIPE DE
RECOURS A LA FORCE FACE AU PRINCIPE DE NON IMMIXTION DANS LES
AFFAIRES
INTERIEURES DES ÉTATS 20
Section I : L'INTERVENTION AUX FINS HUMANITAIRES
20
§1. Genèse de l'intervention humanitaire
20
§2. Conditions 22
A. Le droit à la vie 22
39
B. Le droit à la liberté 23
C. Le droit à la légalité
23
Section II : L'OBLIGATION DE PROTEGER OU DE FAIRE
RESPECTER LE
DROIT INTERNATIONAL 24
§1. Contexte de l'élaboration de
l'obligation de protéger 24
§2. Champ d'application de l'obligation de
protéger 26
A. Juste cause 26
B. perspectives raisonnables 27
Section III : DEFIS ET PERSPECTIVES 28
§1. Limites de la responsabilité de
protéger 28
§2. Perspectives 30
CONCLUSION 32