CHAPITRE 2 : ENJEUX ET ETAPES DE LA MISE EN
EXPLOITATION DE LA MINE D'OR DE SISSINGUE
La sous-préfecture de Kanakono suite à la
découverte de plusieurs gisements miniers est perçue comme l'une
des principales zones minières de la Région de la Bagoué,
voire du grand Nord ivoirien même. Si l'activité d'orpaillage
clandestin y est fortement pratiquée, il faut aussi souligner la
présence d'un site minier industriel exploité par la
transnationale minière australienne Perseus Mining. Cette exploitation
est entrée en production depuis le premier semestre de l'année
2018. Située dans une zone sous-équipée et connaissant un
fort taux de chômage juvénile, cette exploitation minière
est au coeur de nombreux enjeux tant sur le plan local que sur le plan
national.
2.1.Enjeux liés à l'exploitation de la
mine d'or de Tongon
2.1.1. Sur le plan national
La mise en exploitation de la mine d'or de Sissingué
s'inscrit dans le contexte général de la mise en valeur du
potentiel minier de la Cote d'Ivoire en vue de la diversification de
l'économie nationale. Cette exploitation occasionnera une rentrée
de devise pour l'Etat à travers la part qu'il détient dans le
projet et les prélèvements de taxes et impôts. Toutefois il
faut préciser que cela a été occasionné par la mise
en place d'un cadre règlementaire et légal favorable au
développement du secteur minier.
2.1.1.1.Le cadre légal du secteur minier en
Côte d'Ivoire
Au lendemain des indépendances, un code minier a
été mis en place pour réglementer le secteur minier en
Côte d'Ivoire. Ce code minier connaitra par ailleurs deux
réformes, d'abord en 1995 puis en 2014 pour diverses raisons.
a. Adoption d'un code minier en phase avec la conjoncture
économique en 1955
L'autorité coloniale avait basé l'exploitation
de la colonie ivoirienne sur l'exploitation des ressources naturelles avec
l'introduction de cultures de rente comme le café et le cacao.
Après les indépendances, le système économique
adopté, comme dans la continuité de celui de la période
coloniale, donnait une place en or au développement de ces cultures de
rentes. Les ressources générées par ces activités
agricoles ont permis de financer le développement du pays.
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Cependant ces ressources ne permettront pas au pays
d'être épargné par la crise économique des
années 1980. Pour y faire face, les autorités du pays sous
l'impulsion des bailleurs de fonds s'engageront dans une dynamique de
libéralisation des secteurs d'activités. Dans le domaine minier,
cela se traduira par une réforme du code minier en vue de stimuler
l'investissement étranger dans le pays.
La loi n° 95-553 du 17 Juillet 1995 portant code minier,
sera adoptée en 1995 dans le dessein de rendre le secteur de
l'extraction minière plus attractif en Côte d'Ivoire pour les
investisseurs étrangers. Elle innove d'une part en intégrant un
chapitre de définition en vue de lever l'équivoque sur certaines
notions liées à l'industrie minière. D'autre part, elle
accorde des avantages fiscaux aux investisseurs à travers
l'exonération. En effet, à l'importation, les matériels,
matériaux, machines et équipements destinés aux
activités de recherche dont l'importation est nécessaire à
la réalisation du programme agréé sont
exonérés de tous droits et taxes, y compris la taxe sur la valeur
ajoutée.
Sur un autre plan, vu que l'activité minière se
pratique généralement sur des terres qui préalablement
étaient la propriété des populations, le nouveau code
minier a intégré un nombre d'article visant à
réglementer les rapports entre exploitants et propriétaires
terriens. Ces articles au nombre de quatre stipulent d'abord que les
activités de prospection ou d'exploitation sur un site donne droit
à une indemnisation au profit de l'occupant légitime ou du
propriétaire selon le type d'espace et la réglementation en
vigueur.
Ce qu'il convient de dire est que cette réforme du code
minier a attiré une multitude de compagnie minières
transnationales vers le pays et dynamiser le secteur de l'industrie
minière. Avec la demande croissante mondiale en ressources
minérales dans le début des années 2000, les
sociétés minières vont accroitre leurs activités
dans plusieurs endroits de la planète. Cela ne sera pas sans incidence
sur le milieu physique et sur les populations riveraines des projets miniers.
Ainsi, l'intégration du développement durable dans le domaine
minier sera une approche adoptée non seulement par les Etats mais aussi
par les sociétés minières.
b. Un code minier pour une industrie minière durable
Les effets négatifs issus de l'exploitation des
ressources minières ont par endroit été le moteur de
plusieurs contestations sociales qui ont souvent abouti à la fermeture
des sites minier.
Ainsi pour garantir une exploitation des ressources naturelles
bénéfique aux exploitants, à l'Etat et aux populations
riveraines ; l'Etat de Côte d'Ivoire va initier une réforme de son
code
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minier. La loi N° 2014-138 du 24 Mars 2014 portant code
minier sera ainsi adoptée en 2014. Il intègre un certain nombre
de principe internationaux imposables aux exploitants miniers garantissant la
prise en compte des questions environnementales et social dans le secteur de
l'industrie extractive. Au nombre de ses principes l'on peut citer :
- L'initiative pour la transparence dans l'industrie
extractive (ITIE) qui est une norme internationale fixée par un
collège composé de gouvernements, d'entreprises, de la
société civile, d'investisseurs et d'organisations internationale
dans le but d'améliorer la transparence et la redevabilité dans
le secteur de l'industrie extractive.
- Le principe de l'équateur qui est le
référentiel de principe du secteur financier permettant de
s'assurer que les projets à financer sont réalisés de
manière socialement responsable et respectueuse de l'environnement.
- Le processus de Kimberley qui est une
initiative commune regroupant des gouvernements, l'industrie du diamant et des
entités de la société civile qui s'engagent à
suivre les conditions de contrôle de production et du commerce des
diamants bruts régies par le système de certification du
processus de Kimberley.
En outre, le nouveau code minier ivoirien innove sur le plan
du développement communautaire avec d'une part la mise en place d'un
cadre de gestion de cette question avec les populations et les autorités
locales et d'autre part, la constitution d'un fonds dédié
à la réalisation de projets communautaires alimenté par
0,5 % du chiffre d'affaire de l'exploitation. Sur le plan environnemental, il
impose la réalisation d'EIES et l'ouverture d'un compte séquestre
recevant l'ensemble des sommes nécessaires à la
réhabilitation et à la fermeture de la mine.
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