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Par Issa
Email :
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Université de Ouagadougou
Institut Supérieur des Sciences de la
Population Master- Population et Santé
Année académique 2005-2006
Mémoire
Thème :
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Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
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Sous la direction
SOMBIE Pr. Dieudonné OUEDRAOGO
sombiss@yahoo.fr
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Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
REMERCIEMENTS
Mon père n'a eu cesse de me répéter,
à chaque fois que je recevais un présent sans dire mot en retour,
ceci : « Fais un effort de ne jamais oublier de dire merci
quel que soit ce que l'on te fait car dire merci est un signe de reconnaissance
des efforts des autres mais aussi et surtout une marque de distinction
».
Conscient que l'aboutissement de ce travail n'a
été possible que grâce à l'assistance de nombre de
bonnes volontés, je me fais l'obligation de témoigner ma
sincère gratitude à : - Pr. Dieudonné OUEDRAOGO.
En votre qualité de Directeur de l'ISSP, vous avez su faire
preuve d'une grande compréhension à mon égard, toute chose
qui m'a permis de participer à cette formation. En tant que Directeur
académique, j'ai appris beaucoup à vos côtés. En
effet, votre parfaite maîtrise des questions relevant des politiques
publiques, votre rigueur méthodologique et enfin, votre démarche
pédagogique empreinte de respect et de considération est autant
de vos qualités que je ne cesserai de louer.
- La coordination du Master et l'ensemble du corps
professoral pour la qualité des enseignements reçus.
- Valéry RIDDE de l'Université de
Montréal, pour ses conseils et orientations. Aussi, il ne s'est
lassé à me faire parvenir des documents pour une meilleure
maîtrise de mon thème. - Le coordonnateur de la CADSS et
l'ensemble de ses collaborateurs pour avoir accepté de nous
compter parmi eux durant les deux mois qu'a duré mon stage.
- Dr Abel BICABA pour sa remarquable
disponibilité et ses orientations intelligentes. - Dr Issiaka
SOMBIE, mon frère ainé qui m'a fraternellement
apporté son concours financier, affectif et académique.
- Mes collègues étudiants de la
première cohorte, nous avons ensemble passé une
année à apprendre. Sachez que les discussions, les commentaires
que nous avons eu, m'ont permis de forger davantage mon esprit critique.
- Toutes les personnes qui ont accepté de
participer à ce travail à travers diverses formes
d'assistance.
3
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
TABLE DES MATIERES
1. Introduction 7
1.1 Justification du stage 7
1 .2 Contexte de l'étude 8
1.3 Le système de santé actuel
10
1.3.1 La structure 11
1.3.2 L'organisation administrative 12
1.4 Problématique 13
1. 4.1 Questions de recherche 16
1.4.2 Objectifs de l'étude 16
1.4.3 Hypothèses 17
2. Revue de littérature 17
3. Méthodologie 21
3.1 La décentralisation du système de
santé, une politique publique 21
3.2 Définition de quelques concepts
22
3.3 La méthode par hypothèse
23
3.4 Population d'étude et échantillonnage
26
3.5 Sources de données et méthodes
d'analyse 26
3.6 Les limites de l'étude 27
4. Présentation des résultats
24
4.1 Du niveau de décentralisation des districts
24
4.1.1 La pluralité 24
4.1.2 La dispersion 26
4.1.3 La spécialisation 26
4.1.4 La sensibilité 26
4.1.5 L'aplatissement 27
4.1.6 La délégation 27
4.1.7 La participation des populations aux
décisions courantes 28
4.1.8 La participation des populations aux
décisions reconfigurantes 29
4.1.9 Commentaire 30
4.2 Facteurs d'influence de la mise en oeuvre
31
4.2.1 Les contenus de la politique et la réaction
des acteurs 31
4.2.2 Des stratégies non
expérimentées 33
4.2.3 Contexte politique et social 34
4.2.4 Jeu d'intérêts et logiques
d'intervention des acteurs 37
5. DISCUSSION et recomandations 43
5.1 Discussion 43
5.1.1 Le débat, un préalable
nécessaire 43
5.1.2 Une vision étriquée de
l'accessibilité 44
5.1.3 Décentraliser pour qui ? 44
5.1.4 Une politique en panne d'évaluation
46
5.1.5 La question des ressources humaines reste
posée 47
5.1.6 Décentralisation et équité
48
5.1.8 La décentralisation, une question
d'approche au changement 49
5.1.9 Ce qui marche 51
5.2 Recommandations 52
6. Conclusion 55
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
LISTE DES TABLEAUX ET FIGURES
Tableau 1 : Tendance de quelques indicateurs de
santé 10
Tableau 2 : Les dix logiques repérées
18
Tableau 3 : la décentralisation sanitaire : une
politique publique 22
Tableau 4 : Echantillon de l'étude
26
Tableau 5 : Situation du personnel au CMA
25
4
Figure 1 : Cadre d'analyse de la mise en oeuvre d'une
politique de santé 25
5
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
SIGLES ET ABREVIATIONS
ICP : Infirmier Chef de Poste
CMA : Centre Médical avec Antenne
chirurgicale
MCD : Médecin Chef de District
ECD : Equipe Cadre de District
CoGes : Comité de Gestion
CSD : Conseil de Santé de District
CSPS : Centre de Santé et de Promotion
Sociale
CHR : Centre Hospitalier Régional
CADSS : Cellule d'Appui à la
Décentralisation du Système de Santé
CHN : Centre Hospitalier National
PNDS : Programme de National de Développement
Sanitaire
DRS : Direction Régionale de la
Santé
INSD : Institut National de la Statistique et de la
Démographie
MBDHP : Mouvement Burkinabé des Droits de
l'homme et du peuple
IB : Initiative de Bamako
UIDH : Union Interafricaine des Droits de
l'Homme
ONG : Organisation Non Gouvernementale
PDSN : Projet de Développement Santé et
Nutrition
PADS : Projet d'Appui aux Districts
Sanitaires
PRSS : Programme de renforcement des Structures
Sanitaires
MATD : Ministère de l'Administration
Territoriale et de la Décentralisation
MFB : Ministère de Finances et du
Budget
7
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
1. INTRODUCTION
1.1 Justification du stage
Depuis la rentrée académique 2005-2006,
l'université de Ouagadougou à travers l'Institut Supérieur
des Sciences de la Population (ISSP) a initié un programme de formation
sur les questions de population et santé avec pour objectifs de disposer
pour la sous région en cadres à même d'analyser les
problèmes de population et santé, formuler des politiques, mettre
en oeuvre les programmes issus de ces politiques, faire également les
suivis et les évaluations y afférentes. Cette formation accorde
une importance en analyse des politiques en dotant les étudiants de
compétences pour leur permettre non seulement d'adresser des critiques
aux programmes formulées mais aussi de faire des recommandations
réalistes et pertinentes dans l'optique d'une meilleure
amélioration tant dans l'élaboration que dans la mise en oeuvre
des politiques. A ce titre la formation vient à point nommé vu
que les déficits dans l'identification des priorités, la
détermination des d'objectifs, le choix des instruments et
stratégies, tous éléments préalables à la
formulation des politiques sociales, restent une réalité palpable
dans les pays de l'Afrique subsaharienne. Nous avons eu la chance de faire
partie de la première cohorte de cette formation inédite dont la
fin est sanctionnée par un stage autour d'un thème en rapport
avec les questions de populations et santé.
C'est ainsi que nous avons sollicité et obtenu
un stage au sein de Cellule d'Appui à la Décentralisation du
Système de Santé (CADSS). Cette structure est logée au
niveau du secrétariat général du ministère de la
santé avec pour mission de suivre, d'évaluer et d'orienter la
mise en oeuvre de la politique de décentralisation du système de
santé. Notre séjour à la CADSS nous a permis non seulement
d'accéder à certaines données mais aussi et surtout
faciliter notre contact avec des personnes ressources et d'autres structures
partenaires. Nous y avons passé six semaines.
8
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
1 .2 Contexte de l'étude
Le Burkina Faso a entrepris depuis les années
1980, une réforme de son système de santé sous
l'inspiration de l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) et
l'impulsion de la Banque Mondiale. Après la conférence de Alma
Ata tenue en 1978, le Burkina Faso, à l'instar de nombre pays du
continent, a ratifié la charte de développement sanitaire de la
région africaine d'ici l'an 2000, qui était fondée
essentiellement sur les soins de santé primaires comme stratégie
pour atteindre l'objectif de la «santé pour tous d'ici l'an 2000
».
De nombreuses autres initiatives ont été
développées sur le continent pour impulser une véritable
dynamique à la promotion de la santé. On peut citer la
conférence de Lusaka (Zambie) en 1985, celle de Harare (Zimbabwe) en
1987 et enfin celle de Bamako(Mali) en 1987. Le Burkina Faso a participé
à toutes ces conférences et a adhéré à
toutes les résolutions qui y ont été prises. En 1992, un
atelier national sur le renforcement des sons de santé primaires s'est
tenu à Bobo Dioulasso, avec pour but la définition des
orientations générales de la politique nationale en la
matière. Ce fut le début de la mise en application de
l'Initiative de Bamako. C'est en ce moment que le système de
santé a connu une restructuration avec une pyramide à quatre
niveaux : les CSPS (Centre de Santé et de Promotion Sociale), le Centre
Médical avec Antenne Chirurgicale(CMA), le Centre Hospitalier
Régional(CHR), le Centre Hospitalier National(CHN). Sur le plan
administratif, le système de santé comprend trois niveaux : le
niveau central, le niveau intermédiaire avec les Directions
Régionales de la Santé et enfin les districts sanitaires. Depuis
1994, en ce qui concerne les districts, les efforts convergent vers
l'opérationnalisation de ces entités par la construction
d'infrastructures, d'équipement, de renforcement des capacités
des acteurs, d'une mise en place de structures d'appui.
Aussi, afin de disposer d'un cadre de
référence pour toutes les interventions dans le domaine de la
santé, le gouvernement a adopté en 2000 la première
politique nationale de santé de son histoire. Pour donner effet à
cette politique, un plan national de développement sanitaire (PNDS) a
été élaboré pour la période 2001-2010. Le
PNSD qui poursuit 8 objectifs et 22 objectifs spécifiques, a
été adopté en juillet 2001. Pour faciliter sa mise en
oeuvre, des plans triennaux sont
9
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
élaborés régulièrement. Au
moment où nous rédigeons ce document, le PNDS vient de boucler
son premier plan triennal. Le rapport d'évaluation mentionne que «
on peut conclure que le PNDS a obtenu d'importants résultats en
matière de réforme du secteur de la santé et de
l'amélioration de certains indicateurs de santé. Un des
résultats probants est l'extension géographique de la couverture
sanitaire à travers la normalisation1 de 65% des dispensaires
et maternités. L'amélioration de l'accessibilité
financière n'est pas clairement documenté par le PNDS »
(Ministère de la santé, 2005).
La communalisation intégrale est de nos jours
une réalité au Burkina. En effet, le processus entamé en
1992 avec les premières élections municipales qui avaient
consacré 45 localités en commune, s'est poursuivi avec la
division du territoire en 13 régions avec chacune à sa tête
un gouverneur ; 305 communes rurales ont été crées ainsi
des conseils régionaux. Le code général des
collectivités territoriale en ses articles 7 et 13 précise que :
« Le Burkina Faso est organisé en collectivités
territoriales. La collectivité territoriale est une subdivision du
territoire dotée de la
personnalité juridique et de l'autonomie
financière. Elle constitue une entité
d'organisation et de
coordination du développement. Les
collectivités territoriales sont : la région et la commune »
. Cependant, cette avancée significative sur le chemin de la
démocratie ne sera pas sans conséquence sur la
décentralisation du système de santé en cours.
Au regard du niveau de quelques indicateurs de
santé du moment, on note que la santé des populations tarde
à s'améliorer tel que souhaitée. Les réformes
mettent du temps à produire les effets escomptés. Le tableau
suivant donne un aperçu sur quelques indicateurs de
santé.
1 Normaliser un dispensaire ou une maternité,
c'est la transformer en un CSPS qui comprend : une maternité, un
dispensaire, quelques salles d'observation, un dépôt
pharmaceutique, un forage, des logements pour l'infirmier et l'accoucheuse
auxiliaire.
10
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Tableau 1 : Tendance de quelques indicateurs de
santé
Indicateurs
|
1995
|
2000
|
2005
|
Prévalence de la malnutrition (pour
100)
|
|
|
15, 26
|
Taux de mortalité infantile (pour1000)
|
93,7
|
105,00
|
83
|
Taux de mortalité maternelle (pour
1000)
|
566
|
484
|
484
|
Taux de couverture prénatale (pour
100)
|
47, 77
|
61,05
|
79,97
|
Prévalence contraceptive (pour 100)
|
8,32
|
11,84
|
21,89
|
Taux d'utilisation des formations sanitaires (pour
100)
|
18, 17
|
20,56
|
34,08
|
Source : Annuaire des Statistiques de santé
2005/DEP/Ministère de la santé
La réflexion pour aboutir à un
système de santé performant à même de permettre
d'améliorer l'état de santé des populations s'impose.
C'est dans ce sens que, nous avons choisi de travailler sur le thème:
« Analyse de la politique de décentralisation du système
de santé du Burkina Faso ». Nous comptons de ce fait, apporter
notre modeste contribution au débat sur la réorganisation du
système de santé dans l'optique de l'adapter aux besoins et aux
conditions de vie des populations.
1.3 Le système de santé actuel
Dans son rapport sur la santé dans le monde de
l'année 2000, l'OMS définit le système de santé
comme « toutes les activités dont le but essentiel est de
promouvoir, entretenir ou maintenir la santé ». (OMS 2000, p5).
Ainsi, le système de santé inclut la prestation des
professionnels de soins médicaux, les actions des guérisseurs
traditionnels et toutes les autres formes de médication, des
activités traditionnelles de santé publique comme la promotion de
la santé et la prévention des maladies. D'autres actions
favorables à la santé comme l'amélioration de la
sécurité routière et l'environnement, les mesures de
scolarisation des fillettes font également partie du système de
santé. Cette définition nous semble trop englobant et ne saurait
convenir à nos attentes dans le cadre de ce travail. C'est pourquoi,
nous retiendrons comme définition opérationnelle la suivante
« le système de soins regroupant les interventions
préventives, curatives et palliatives menées par les services
publics ». Le système sanitaire est structuré suivant
une pyramide à quatre niveaux.
11
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
1.3.1 La structure
L'architecture du système de santé
correspond à une pyramide à quatre niveaux :
> Le Centre de Santé et de promotion Sociale
(CSPS) est le niveau de soins le plus périphérique, le premier
échelon de soins. Il comprend dans une enceinte un dispensaire et une
maternité. Il a une capacité d'hospitalisation de 6 lits (2 au
dispensaire et 4 lits à la maternité). L'effectif de son
personnel est de 4 agents. Un paquet minimum d'activités a
été défini pour le CSPS : la consultation curative, la
consultation prénatale, celle des nourrissons sains, la planification
familiale, les accouchements eutociques (qui s'effectue dans les conditions
normales) et la participation communautaire. La prise en charge des maladies
chroniques et la réhabilitation nutritionnelle deviennent
également effectives dans les CSPS. Les patients dont les
problèmes d santé ne peuvent être résolus au CSPS
sont transférés au centre médical.
> Le Centre Médical (CM) est le
deuxième niveau de soins. Il est le premier échelon de
référence et de recours des CSPS. Il comprend des services
d'hospitalisation (20lits dont 8 lits pour la maternité) et des services
de soins ambulatoires. L'effectif de son personnel est de 16 agents
qualifiés. Le paquet minimum d'activités du CM est le suivant :
la consultation curative de référence et l'hospitalisation, les
accouchements dystociques (difficiles), des activités de laboratoire et
d'évaluation des services des CSPS. Il lui a été adjoint
la prise en charge des urgences médico-chirurgicales (césarienne,
cure de hernies, de grossesse extra-utérine, appendicectomie),
d'où le changement d'appellation de Centre Médical en Centre
médical avec Antenne chirurgicale (CMA). Le CMA a une capacité
d'hospitalisation de 40 à 60 lits.
> Le Centre Hospitalier Régional (CHR) est
le troisième niveau de soins. D'une capacité d'hospitalisation de
140 lits environ, le CHR compte un service de Médecine (40 lits), un
service de Pédiatrie (30 lits), un service de Gynéco
obstétrique (30 lits), un service de Chirurgie (30 lits), un service de
Maladies infectieuses (8 lits) et un service de Santé mentale (2 lits).
Il sert de référence et de recours aux CM., CMA et CSPS. Sa
fonction est
12
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
donc essentiellement curative. L'effectif de son
personnel est d'environ 35 agents technique
> Le Centre Hospitalier National est le niveau de
soins le plus élevé. Sa vocation est de prendre en charge les
patients dont le problème de santé n'a pu être
résolu au niveau des échelons de soins précédents.
Il est également lieu de formation des différentes
catégories de personnels et de recherche.
1.3.2 L'organisation administrative
Sur le plan administratif, le système de
santé comprend trois niveaux :
> Un niveau central qui est organisé autour
du cabinet du ministre, du secrétariat Général, des autres
directions, services et programmes nationaux. Ce niveau définit les
orientations stratégiques en matière de politique
nationale.
> Un niveau intermédiaire qui comprend les
Directions Régionales de la Santé (DRS). Elles jouent un
rôle d'appui et de coordination des différentes interventions et
sont chargées de la mise en place de la politique nationale de
santé à l'échelon régional. Il convient de noter
que les directions provinciales de la santé (DPS) feront leur apparition
dans le paysage administratif du ministère de la santé
(Arrêté N 2003- 109/MS/CAB du 4 mars 2003).
> Un niveau périphérique qui est
représenté par les districts sanitaires, entités
opérationnelles les plus décentralisées du système.
Le territoire national est découpé en 55 districts sanitaires. Le
personnel de santé des CSPS et des CM est essentiellement
constitué d'infirmiers et de sages femmes.
Il convient de préciser qu'à
côté de cette organisation publique de système de
santé, il existe de structures de soins privés à but
lucratif ou non. Ce système de santé fonctionne -t-il
convenablement ?
13
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
1.4 Problématique
Dans l'univers des politiques publiques, les
politiques de décentralisation occupent une place particulière en
ce sens qu'elles sont encadrant d'autres politiques (Lemieux, 2001, pp7). En
effet, ces politiques se caractérisant généralement par un
transfert d'attributions du centre vers la périphérie ou en sens
inverse sont susceptibles d'engendrer des modifications au niveau d'autres
politiques déjà en place, du fait qu' elles restent des
tentatives de régulation selon des normes , en réponse à
des situations où se posent des problèmes publics de distribution
des ressources. Cette régulation peut se faire à
différents niveaux et à partir de plusieurs stratégies ou
techniques.
Ramenées dans le domaine particulier de la
santé, les politiques de décentralisation adoptées depuis
quelques dizaines d'années par nombre de pays dont le Burkina Faso afin
de faire face aux difficultés financières, organisationnelles et
institutionnelles qui caractérisent le secteur de la santé,
portent d' abord sur une réorganisation du ministère de la
santé par une redéfinition des pouvoirs et des
responsabilités des différentes instances constitutifs du
ministère et ensuite par une régulation des rapports avec son
environnement externe.
Depuis 1993 le ministère de la santé du
Burkina Faso s'essaie à cet exercice par la privatisation des
pharmacies, l'érection des nationaux et régionaux en
établissements publics à caractère administratif(EPA) et
la création des districts sanitaires, instances de gestion des questions
de santé au niveau périphérie. L'innovation majeure
introduite par cette nouvelle démarche repose sur l'autonomie de gestion
qui rythme désormais les rapports entre ces différentes instances
et le niveau central représenté par le
ministère.
Dans le cadre du présent mémoire, les
investigations se focaliseront essentiellement sur la décentralisation
à travers les districts car les districts impliquent mieux et touchent
directement les populations dans l'amélioration de leur
santé.
Il existe plusieurs démarches analytiques dans
l'étude des politiques publiques. En effet, l'approche des
déterminants pose comme question de cherche principale les facteurs
économiques et politiques qui conditionnent les politiques publiques.
Elle explique selon Lemieux les politiques publiques par un ensemble de
facteurs disposés dans une séquence, qui
14
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
va des conditions historiques et géographiques
au comportements des élites, en passant successivement par les facteurs
socio- économiques , le comportement des masses et les institutions
gouvernementales. L'approche qui consiste à distinguer les
étapes des politiques publiques, il s'agit d'une démarche
descriptive qui s'intéresse au déroulement temporel des
politiques. Considérant les acteurs comme des fins calculateurs, le
modèle de l'action rationnelle fait des règles ou
aménagements institutionnels du jeu des acteurs l'objet de recherche en
politiques publiques. Enfin, le modèle de relation de pouvoir
qui met un accent particulier sur la capacité de contrôle des
ressources des différents acteurs impliqués dans une politique
publique. Partant d'une typologie des ressources et considérant
certaines comme « contraignants » et d' autres comme «
habilitantes » , ce modèle postule que c' est grâce
à des ressources utilisées à titres d' atouts que les
acteurs peuvent participer aux politiques publiques et chercher à
contrôler les distributions des ressources qui en sont les enjeux. Il y a
contrôle de leur part quand le résultat des opérations
correspondent à leurs préférences, ce contrôle se
traduisant en du pouvoir, partagé ou non, par rapport à d'autres
acteurs (Lemieux, 2002, pp23).Cette approche nous semble pertinente pour
étudier le fonctionnement des districts sanitaires qui sont les
unités les plus décentralisées du système de
santé du Burkina Faso. Si les districts rencontrent des obstacles
à leur fonctionnement, c'est parce que les acteurs au niveau sont
dépossédés du contrôle des ressources
habilitantes.
Après plus d'une décennie de la mise en
oeuvre de la politique de décentralisation sanitaire, il semble opportun
de s'interroger sur le fonctionnement effectif des districts sanitaires et la
nature réelle des pouvoirs qui leur sont
concédés.
Le discours officiel les présente comme des
entités décentralisées, jouissant d'une autonomie de
gestion certaine qui s'observe dans la planification des activités, la
liberté dans les dépenses, la quête de partenariat, le
recrutement de personnel, l'imputabilité.
A côté de ce discours «politique
», des propos discordant indiquent que dans la pratique, d'énormes
efforts restent à pourvoir afin de concéder une réelle
autonomie aux districts. Des études mentionnent que les districts ne
disposent pas encore de pouvoir et de compétences suffisants pour
assurer la gestion des ressources humaines. (ABSP, CRDI, 2001). Aussi, on
note
15
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
que beaucoup de districts ne parviennent à
exécuter leurs plans d'actions pour deux raisons essentielles : le
manque de moyens financiers et l'exécution ou la réalisation
d'activités non planifiées comme les campagnes de vaccination
(Enq02). Sur le plan financier, la contribution de l'Etat aux districts selon
une étude, varie entre 20 à 30% de leur budget total ; et que le
niveau central n'a alloué en 1998 que 14% du budget total aux 53
districts tandis que les hôpitaux nationaux recevaient 22% de ce
même budget (Bodart et al.., 2001). Sur le plan de la participation
communautaire, des écrits soulignent que la participation communautaire
semble se limiter à générer des ressources
financières à partir de la vente des MEG(Médicaments
Essentiels Génériques) et de la tarification des prestations
(GTZ, 1997 ; A. Meunier, 1999).
La disparité observée dans le
fonctionnement des districts se caractérise par une absence de personnel
notamment les médecins, une insuffisance d'infrastructures et
d'équipement, des insuffisances considérables dans le
fonctionnement des CoGes et bien d'autres obstacles. Une étude
menée en 2001, remarquait qu'à l'échelle du pays, moins de
5 districts disposaient en 2000 du nombre requis de médecins et
seulement 17 des 53 hôpitaux de district étaient en mesure de
réaliser des césariennes ( Bodart et al.., 2001). Une autre
étude affirmait que sur un total de 57 médecins formés en
gestion en 1994, 38 (67%) étaient dans les districts sanitaires en 1999
(Catrayé et al, 2001). Pour les médecins formés en
chirurgie essentielle à partir de 1992 au nombre de 47, seulement 26
(55%) servaient encore dans les districts en1999 (Ministère de la
santé, décembre 2000). Selon un rapport de la CADSS (1999),
à la fin de l'année 1999, aucun des districts ne satisfaisait
à l'ensemble des critères d'opérationnalité. Un
autre document (Ministère de la santé, 2001) notait qu'à
la fin de l'année 2000, un seul district (celui de Boulsa) sur les 53
pouvait prétendre répondre à l'ensemble des
critères retenus : soit 2% de district opérationnels. La
récente évaluation du PNDS (2005) indiquait des avancées
notables au niveau de la couverture sanitaire. Il reste néanmoins que
l'opérationnalisation des districts, passage obligé pour leur
autonomie, éprouve d'énormes difficultés dans son
déroulement. Dans une étude menée en 2006 dont le titre
est : décentralisation et réduction de la pauvreté au
Burkina Faso : quelles stratégies, Hervé Kafimbou et Jean
Sanou font une analyse critique de la décentralisation de façon
générale au Burkina Faso. Ils ont relevé un nombre
important de contraintes et d'écueils au bon fonctionnement des communes
parmi lesquels on peut citer l'absence de ressources humaines
compétentes, faiblesse des ressources, le refus des citoyens de payer
les impôts et les
16
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
taxes, les incessantes dissensions au sein des
conseils municipaux. Ces contraintes et écueils handicapent
sérieusement le développement des communes ne seront pas sans
conséquences sur les capacités de participation des conseils
municipaux à l'opérationnalisation des districts.
La mise en oeuvre d'une politique publique constitue
une étape cruciale pour son aboutissement. En effet, à cette
étape il peut y avoir des « ré-reformulations et même
des ré-émergences », aussi ce moment constitue une
opportunité pour certains acteurs de s'exprimer. Cette étape
cristallise tant d'enjeux qu'elle est déterminante pour sa
réussite. De nombreux facteurs (les solutions proposées, le
contexte, le temps, le niveau de formation des acteurs, la nature des parties
impliquées, les stratégies de mise en oeuvre, etc.) peuvent de
façon isolée ou combinée, influencer la réalisation
d'une politique. Ce travail se donne fixe pour objectif de s'interroger sur les
facteurs qui influencent la mise en oeuvre de la politique de
décentralisation du système de santé.
Le profil que présentent les districts
sanitaires oblige à se garder de les créditer du label
d'unité décentralisée. Au regard des insuffisances qui
caractérisent le système de santé de district au Burkina
Faso, il nous paraît pas aisé d'arguer que les districts
sanitaires dans leur situation actuelle présentent tous les attributs
d'un service décentralisé : accessibilité,
adaptabilité, capacité et participation des populations. Ce
questionnement nous amène à formuler les questions,
hypothèses et objectifs de recherche suivants.
1. 4.1 Questions de recherche
1. Les districts sanitaires dans leur situation
actuelle, présentent -ils les caractéristiques d'un service
décentralisé ?
2. Le processus actuel de la mise en oeuvre de la
décentralisation favorise t- il le bon fonctionnement des districts
sanitaires ?
1.4.2 Objectifs de l'étude
1. Rendre compte du niveau actuel de
décentralisation des districts sanitaires.
2 Identifier et expliquer les facteurs qui influencent le
processus d'opérationnalisation des
districts sanitaires.
Les hypothèses suivantes nous guideront dans notre
quête de réponses aux questions ci-dessus
formulées.
17
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
1.4.3 Hypothèses
1. Au delà des discours et des textes, dans la
pratique, les districts sanitaires ne possèdent pas les fondamentaux
d'un service décentralisé.
2. Les disparités et difficultés
observées dans le fonctionnement des districts sanitaires trouvent leurs
explications dans le processus de mise en oeuvre de la décentralisation
sanitaire.
2. REVUE DE LITTERATURE
Notre ambition est de répertorier un ensemble
de facteurs à même de nous permettre de construire nos cadres
conceptuels.
D'après Kochen et Deutsch(1980), la
prestation des services est d'autant plus décentralisée que les
relations de communication et de contrôle entre les prestateurs et les
prestataires de services prennent moins de temps et sont plus directes que dans
la centralisation. Cette conception de la décentralisation les a
amenés à définir 8 variables qui à leur sens,
permettent de juger du niveau de décentralisation d'une organisation qui
dispense des services aux publics. Les 8 variables sont les suivantes : la
pluralité, la dispersion, la spécialisation, la
sensibilité, l'aplatissement, la délégation, la
participation courante et la participation reconfigurante. Nous reviendrons en
détails sur ces variables que les auteurs nomment dimensions dans la
section suivante. Nous emprunterons ce cadre pour vérifier notre
première hypothèse.
Valéry Ridde (2005) a relevé 10
logiques d'acteurs dans le cadre de la mise en oeuvre de l'Initiative de
Bamako. Ainsi, dans leur lutte pour le contrôle des ressources, les
différents acteurs, chacun en fonction de sa position et des
bénéfices escomptés, met en pratique les stratégies
susceptibles de lui permettre d'engranger le maximum de profits. Les logiques
sont contenues dans le tableau suivant :
18
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Tableau 2 : Les dix logiques
repérées
Accaparement
|
Neutra /domination
|
Discours
|
Clientélisme
|
Opacité
|
Connivence
|
Evitement
|
Suspicion
|
Substitution
|
Mépris du service public
|
Source : Ridde, 2005
Ce cadre nous semble bien pertinent et pourra nous
aider à analyser le jeu des acteurs dans la mise en oeuvre de la
décentralisation sanitaire.
Selon Walt et Gilson (1994), les facteurs
à prendre en compte dans l'analyse des politiques publiques sont au
nombre de quatre : le contenu des politiques, les stratégies
d'implantation, le contexte dans lequel elles se déroulent et enfin les
acteurs affectés ou influents par rapport à cette nouvelle
politique.
Le contenu des politiques fait référence
à la nature des solutions pour venir à bout des problèmes
qui ont fait l'objet de la formulation de la politique. Dans le cas particulier
de notre étude, la politique de décentralisation est un
concentré de solutions aux diverses difficultés que traverse le
secteur de la santé. Aussi, faut- il que les solutions proposées
soient capables d'apporter les changements souhaités et indispensables.
Généralement, on constate que dans beaucoup de pays du sud, les
solutions ne s'adaptent pas aux problèmes pour lesquels elles ont
été formulées, car importées d'ailleurs, loin des
réalités locales.
Les stratégies d'implantation comprennent
l'ensemble des mesures et dispositions qui doivent être prises pour la
mise en oeuvre de la politique. Ces dispositions et mesures doivent permettre
d'atteindre les objectifs visés. Il est souvent fait
référence aux stratégies « top-down ou bottom-up
» (voir Sabatier 1986, Hill 1997 cités par Ridde, 2005). Une autre
distinction originale a été proposée par Elmore (1979 ;
1982) autour de deux approches différentes. D'un côté, il y
a le « forward mapping » laissant penser que les dirigeants
contrôlent l'ensemble du processus d'implantation qui se déroule
conformément aux attentes initiales. De l'autre côté, il
est possible
19
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
de concevoir la mise en oeuvre au regard des
comportements des personnes pour qui les politiques publiques sont
implantées afin de répondre à leurs besoins, soit le
« backward mapping », partant du principe que « that is not the
policy or the policymaker that solves the problem, but someone with immediate
proximity » (Elmore 1979, p 612) (cité par Ridde, 2005, p
23).
Le contexte concerne les aspects sociaux,
économiques, technologiques, politiques et organisationnels de la
réforme. Selon le contexte, des occasions seront offertes et des
contraintes pèseront sur les modalités de la mise en oeuvre
(Monnier 1992). Nous choisirons ce modèle pour la vérification de
notre deuxième hypothèse pour cause.
Les éléments qui forment ce cadre nous
semblent à même de nous permettre d'expliquer la mise en oeuvre de
la politique de décentralisation. En effet, nous soupçons que les
contenus de cette politique, imposée plus ou moins par des «
opérateurs politiques internationaux » conviendraient peu aux
attentes de certains acteurs clés, ce qui ne va manquer de jouer sur
leur participation au processus. Aussi, la littérature informe que
l'échec de nombre de politique est imputable au choix de
stratégies d'intervention ; il leur est reproché d'être
inadaptées au contexte, exorbitant au niveau des coûts pour ne
citer que ces exemples. Il va de soi que les stratégies d'intervention
ne sont pas sans conséquence sur la réussite d'une politique. En
outre, la mise en oeuvre des politiques dans les pays africains mobilise un
nombre important d'acteurs, comme c'est le cas avec la décentralisation
du système de santé du Burkina.
C'est le jeu des acteurs qui fait en partie que dans
la mise en oeuvre des politiques, on s'écarte généralement
de ce qui avait été prévu. Enfin, le modèle de Walt
et Gilson accorde une importance au contexte qui est producteur, semble-t-il de
situations, d'éléments à même d'entacher
l'implantation d'une politique. Ce cadre est riche d'éléments
susceptibles d'être pertinents dans l'explication de notre
deuxième hypothèse.
Paul Sabatier (1986) propose quelques
éléments, qui selon lui peuvent être favorables à
une amélioration des résultats des politiques publiques. Il note
que les politiques ayant atteint leurs buts disposaient d'objectifs
raisonnables et clairement énoncés, de contenus proches des
préférences des acteurs clefs et avaient un nombre de
négociateurs réduit à un niveau gérable
tout
20
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
en s'assurant que la majorité des acteurs sont
favorables à l'initiative. Il met donc l'accent sur les objectifs, la
nature des solutions et le nombre des acteurs impliqués dans une
politique comme des éléments à suivre avec une attention
soutenue dans la mise en oeuvre. Même s'il accorde une place aux acteurs
dans la mise en oeuvre, ce cadre ne contient pas un certains types
d'éléments (stratégies, le contexte, les ressources) qui
peuvent être déterminants dans l'implantation de la
décentralisation sanitaire.
Bridgman et Davis (1998) apportent quatre
autres éléments. Selon eux, pour garantir le succès
à une politique publique, il s'avère indispensable de
réduire les étapes entre la phase de formulation et celle de la
mise en oeuvre, d'opter pour une évaluation continue, aussi les
dirigeants se doivent de s'investir sérieusement dans la mise en oeuvre.
L'important au niveau de ce modèle est qu'il fait de l'évaluation
un facteur non négligeable dans la mise en oeuvre des politiques
publiques. Dans nombre de cas concrets, on ne pense à
l'évaluation qu'au moment où se termine le programme ou le
projet. Ce modèle semble très restrictif des
éléments d'influence de la mise en oeuvre.
Gun (1978) a dressé une liste de 10
conditions préalables à la réussite de la mise en oeuvre
d'une politique publique. Ces conditions sont les suivantes : un contexte
favorable, du temps et des ressources, des moyens disponibles à chaque
étape de la mise en oeuvre, une politique fondée sur une
théorie valide, un lien direct entre les causes et les effets
désirés, une seule agence indépendante pour gérer
l'implantation, une bonne compréhension et l'acceptation des objectifs,
une liste d'activités bien spécifiques pour chaque participant
à la politique, un niveau de coordination parfait et, enfin une
autorité en mesure de faire respecter ses décisions2.
Appliquer un tel modèle offre l'avantage d'aller dans les moindres
détails dans l'explication du processus de mise en oeuvre. Seulement, il
ne prend pas en compte les acteurs, qui, estimons-nous, portent en eux une
grande capacité d'influence du processus. Les différentes
logiques qui orientent les actions des uns et des autres dans la
décentralisation sanitaire constituent un foyer d'éléments
favorisant ou limitant la marche du processus.
2 Ce résumé de l'ouvrage de Gun a
été recopié dans la thèse de Valery Ridde, pp20 et
21
21
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
3. METHODOLOGIE
3.1 La décentralisation du système de
santé, une politique publique
Selon Anne Mill (1991) la décentralisation
consiste en un transfert d'autorité ou en un fractionnement de
l'autorité publique entre le niveau national et les niveaux
sous-régionaux ou plus généralement, entre
l'administration centrale et les administrations régionale, locale,
etc., en matière de planification, de gestion et de décision.
Pour le cas du Burkina, la décentralisation du système de
santé consiste en un transfert d'un certain nombre de sphères de
décisions (administration, gestion financière, partenariat, etc.)
du niveau central vers les districts sanitaires et les hôpitaux. Peut -on
parler de politique publique dans ce cas ?
En effet, « la première difficulté
à laquelle se heurte l'analyste des politiques publiques est le
caractère polysémique du terme politique. Les choses sont plus
simples pour les auteurs de langue anglaise, puisqu'ils disposent de mots
différents pour désigner ce que le français réunit
sous la notion de politique. Ce terme, en effet, recouvre à la fois la
sphère (policy), l'activité politique (politics) et l'action
publique (policy). La première fait la distinction entre le monde de la
politique et la société civile (...), la seconde désigne
l'activité politique en général (la compétition
pour l'obtention de postes politiques, le débat partisan,....), la
troisième acception, enfin désigne le processus par lequel sont
élaborés et mis en place des programmes d'action publique,
c'est-à-dire des dispositifs politico-administratifs coordonnés
en principe autour d'objectifs explicites » (Muller, Surel, 1998, p13). La
décentralisation du système de santé se situe dans le
cadre de la troisième acception celle des policies. Une politique
publique répond à un certains de caractéristiques. Le
tableau suivant indique ainsi les caractéristiques de notre objet
d'analyse.
22
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Tableau 3 : la décentralisation sanitaire : une
politique publique
Une politique publique est :
|
La décentralisation sanitaire
|
La réponse à un problème
public
|
Difficultés dans la réponse de demandes
de soins et faible participation des populations dans la gestion des services
de santé périphériques.
|
Par l'intermédiaire d'activités et de
moyens
|
La construction d'infrastructures, la mise en place de
structures d'appui, la formation des acteurs, adoption de textes
législatifs et réglementaires
|
Grâce à l'action d'acteurs
gouvernementaux
|
L'Etat à travers ses structures
|
Et d'autres acteurs
|
Les communautés et la coopération
internationale
|
Qui agissent dans un environnement
|
A l'échelle d'un district ou d'une région
sanitaire.
|
Et dans le temps
|
A moyen terme sous forme de projet et à long
terme sous forme de programme.
|
Source : Howlett et Ramesh 1995 ; Lemieux 2002,
cités par Ridde, 2005.
3.2 Définition de quelques concepts
Il s'impose de définir quelques concepts
clés
3.2.1 Le système de santé
Dans son rapport sur la santé dans le monde de
l'année 2000, l'OMS définit le système de santé
comme « toutes les activités dont le but essentiel est de
promouvoir, entretenir ou maintenir la santé ». (OMS 2000, p5).
Ainsi, le système de santé inclut la prestation des
professionnels de soins médicaux, les actions des guérisseurs
traditionnels et toutes les autres formes de médication, des
activités traditionnelles de santé publique comme la promotion de
la santé et la prévention des maladies. D'autres actions
favorables à la santé comme l'amélioration de la
sécurité routière et l'environnement, les mesures de
scolarisation des fillettes font également partie du système de
santé. Cette définition nous semble trop englobante et ne saurait
convenir à nos attentes dans le cadre de ce travail. C'est pourquoi,
nous retiendrons comme définition opérationnelle la suivante
« le système de soins regroupant les interventions
préventives, curatives et palliatives menées par les services
publics ».
23
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
3.2.2 Le système de santé de district
Le district sanitaire est avant tout une aire
géographique bien délimitée, cadre d'interaction entre les
populations et les services de santé. Il est l'unité
opérationnelle la plus proche des communautés et est
structuré à deux échelons : le CSPS, point de premier
contact et l'hôpital de district qui vient en appoint aux CSPS.
Administrativement, il est dirigé par un collège appelé
équipe cadre de district (ECD). Le système de district permet
:
- une décentralisation géographique des
soins via les centres de santé (CSPS)
- une qualité technique des soins tels que plus
de 95% des problèmes de santé peut être pris en charge au
niveau du district ;
- une qualité humaine de soins
(continuité, globalité et intégration) ;
- une décentralisation de la prise de
décision permettant la coexistence de la planification de haut en
bas(normative) avec celle de bas en haut(qui prend en compte les desiderata de
sa population de responsabilité bien définie
géographiquement, et les spécificités sociales,
économiques et culturelles de sa zone de couverture. (CADSS, module 1,
formation des médecins)
3.3 La méthode par hypothèse
Afin d'éviter une généralisation
méthodologique qui peut s'avérer peu constitutive, nous avons
choisi de présenter notre démarche en lien avec chaque
hypothèse.
Hypothèse 1 : Au delà des discours
et des textes, dans la pratique les districts sanitaires ne possèdent
pas les fondamentaux d'un service décentralisé.
Pour vérifier cette hypothèse, nous
avons procédé à une revue documentaire permettant de juger
du caractère décentralisé d'un service. Ainsi, nous avons
trouvé chez des auteurs (Kochen et Deutch) huit dimensions qui nous
semblent pertinentes pour nous permettre d'apprécier le niveau de
décentralisation des services de santé à travers les
districts sanitaires. Ce sont :
La pluralité : fait
référence à la disponibilité des prestataires en
nombre suffisants par rapport au nombre d'utilisateurs de services.
La dispersion : elle indique la répartition
géographique du service dans sa zone de couverture.
24
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
La spécialisation : a trait aux
différentes fonctions que les prestataires remplissent dans
l'établissement. Le temps consacré à chaque fonction
pourrait faire perdre beaucoup de temps aux usagers.
La sensibilité : permet de se rendre
à l'évidence du niveau de collaboration entre usagers et
prestataires. L'occasion est- elle donnée aux utilisateurs de s'exprimer
? Leurs doléances sont-elles prises en compte ?
L'aplatissement : a trait aux paliers de
supervision qui existent à l'intérieur du service. Moins il y a
de palier, les individus sont plus libres dans la prise des
décisions.
La délégation : indique la nature
des décisions qui peuvent être prises au niveau le plus
décentralisé d'une agence. Pour le cas du système de
santé, il s'agit de juger de la nature des décisions qui sont
l'apanage des districts.
La participation courante :
réfère à l'implication d'autres acteurs, en plus des
prestataires de service dans la prise des décisions courantes. Elle met
l'accent sur le fait que les autres acteurs doivent disposer de ressources
à même de permettre d'influencer les décisions
prises.
La participation reconfigurante : indique
l'implication des utilisateurs de service à un niveau plus
élevé de prise de décisions. Il importe de relever que
dans tous les services ,la prise de certaines décisions importantes
exige la mise sur pied de structures de décisions particulières.
Dans le contexte du système de santé, il peut s'agir de conseil
de discipline, de conseil d'administration et autres.
Pour appliquer ce cadre, il nous a semblé plus
indiqué de partir du cas concret d'un district sanitaire et d'aller y
voir. C'est ainsi que nous avons choisi de façon aléatoire le
district sanitaire de Kombissiri, situé dans la région sanitaire
de centre-sud. Le cas de ce district servira de prétexte pour illustrer
le niveau réel d'autonomie des districts sanitaires
Hypothèse 2: Les disparités et les
difficultés observées dans le fonctionnement des districts
sanitaires trouvent leurs explications dans le processus de mise en oeuvre de
la décentralisation sanitaire.
25
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Comme nous l'avons précédemment
mentionné, le modèle de Walt et Gilson nous permettra
d'identifier et d'expliquer les facteurs susceptibles d'influencer la mise en
oeuvre de la décentralisation sanitaire. Le modèle comprend
quatre éléments importants qui peuvent avoir une portée
considérable sur le processus d'implantation d'une politique publique.
Ces quatre éléments sont représentés dans le
schéma suivant
Figure 1 : Cadre d'analyse de la mise en oeuvre d'une
politique de santé
Contexte
Acteurs
Contenu Stratégies d'implantation
Source : Walt et Gilson cité par V.Ridde (2005,
p24)
Le modèle nous donne à voir la place
considérable qu'occupent les acteurs dans la mise en oeuvre d'une
politique de santé. Aussi, les comportements des acteurs ne trouvent-
ils pas leur origine dans le contexte, les contenus des politiques et les
stratégies d'intervention. Il ne faut pas se méprendre cette
simplicité schématique. Elle est inversement proportionnelle
à la complexité des relations qu'entretiennent ces quatre
facteurs fondamentaux pour l'analyse des politiques de santé (Ridde,
2005).
26
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
3.4 Population d'étude et
échantillonnage
L'étude a inclus des responsables de la CADSS, des
membres de l'ECD, des médecins, et des infirmiers. Le tableau ci-dessous
présente les détails sur l'échantillon.
Tableau 4 : Echantillon de l'étude
Cibles
|
Nombre
|
Responsables CADSS
|
4
|
Membres ECD
|
9
|
Médecins
|
5
|
Infirmiers
|
12
|
3.5 Sources de données et méthodes
d'analyse
Les données qui ont servi à la
vérification de nos hypothèses proviennent d'une part
d'études antérieures, de rapports, de compte rendu de
réunion et des entretiens que nous avons eus avec certains acteurs
d'autre part. Trois études ont été d'un apport
significatif (Bodart, C. et al, 2001 ; Catrayé, J et al, 2000 ;
Ministère de la santé, juin 1995). Pour les entrevues, nous avons
échangé avec des cadres au niveau central, d'anciens cadres du
ministère de la santé et enfin des acteurs de terrain que sont
les médecins chef de district, les communautés, les partenaires
au développement, les associations et ONG. La rencontre avec les acteurs
au niveau central nous a permis de comprendre les motifs qui ont guidé
au choix des composantes de la politique, la définition des
stratégies, le contexte d'émergence, de formulation et de mise en
oeuvre de la décentralisation sanitaire. Avec les médecins de
district et les autres acteurs de terrain tel les populations, les partenaires
au développement, les ONG, nous avons discuté des
difficultés rencontrées dans le fonctionnement des districts,
leurs causes éventuelles. Aussi, l'étude de cas du district de
kombissiri a constitué une source importante de
données.
Vu que l'essentiel de nos données reste des
discours, le modèle d'analyse utilisé dans ce travail est
l'analyse de contenu.
27
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
3.6 Les limites de l'étude
La première limite de cette étude
réside dans la qualité des données. En effet, il est admis
de douter de la véracité de certaines données tant elles
varient d'une source à l'autre. Par exemple, nous avons relevé
que les chiffres concernant le nombre d'agent, le nombre de CSPS, certains taux
varient selon que l'on consulte l'Annuaire des statistiques de santé ou
les plans d'action des districts sanitaires.
La seconde limite à notre sens émane de
notre niveau très approximatif de la langue anglaise. La plupart des
documents concernant l'analyse des politiques publiques sont disponible en
anglais. Ce faisant, nous n'avons pas pu exploiter comme il se doit certains
documents d'importance.
La troisième limite se rapporte au temps
imparti à notre travail, environ 8 semaines, ce qui fait que nous
n'avons pas pu interroger le maximum d'acteurs.
La quatrième limite concerne le refus de
certains acteurs clés du système de santé de se
prêter à nos questions prétextant un agenda très
chargé pour ne pas nous consacrer quelques minutes d'échange. Vu
leurs responsabilités, ils nous auraient fourni des informations sans
doute capitales pour la compréhension et l'analyse de la
décentralisation du système de santé.
24
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
4. PRESENTATION DES RESULTATS
4.1 Du niveau de décentralisation des
districts
Nous mentionnions que pour vérifier
l'hypothèse en relation avec cet objectif, nous avons opté pour
une étude de cas. C'est le district sanitaire de Kombissiri qui,
à titre illustratif a été choisi; une brève
présentation de cette entité s'impose.
Le district sanitaire de Kombissiri est situé
au sud de Ouagadougou, dans la région sanitaire du centre -sud. Il
relève administrativement de la province du Bazéga et couvre une
superficie de 2 .435Km2. Il est limité au nord-est par le
district sanitaire de Zorgho, au nord par le district sanitaire du secteur 30
de Ouagadougou, à l'ouest par le district sanitaire de Saponé, au
sud par le district sanitaire de Manga. La population du district était
estimée en 2005 à 192 980 habitants. Le taux de natalité
était à la même année de 45,2 %° avec une
espérance de vie de 51 ans (Source, Plan d'action 2005) Le taux de
mortalité était de 0, 11%. Quant au taux de scolarisation, il est
estimé à 38, 06%. Le district sanitaire de Kombissiri compte 19
CSPS et un CMA.
Notre modèle d'analyse se structure autour de
huit dimensions et ce sont ces dimensions que nous vérifions à
présent : pluralité, dispersion, spécialisation,
sensibilité, aplatissement, délégation, participation
courante, participation reconfigurante.
4.1.1 La pluralité
La pluralité est mesurée par le nombre
d'agents qui dispensent les services et le nombre de personnes qui sont
habilitées à les recevoir, toute chose qui oblige à faire
le point du personnel présent dans le district. Ce point est fait
à partir de trois structures essentielles du district à savoir le
CMA, le laboratoire et les CSPS.
Le tableau suivant donne un aperçu sur la
situation du personnel au niveau du CMA
25
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Tableau 5 : Situation du personnel au CMA
Catégorie
|
Nombre
recommandé
|
Nombre disponible
|
Médecin en chirurgie
|
2
|
1
|
Attaché de santé en chirurgie
|
2
|
2
|
Attaché de santé en ORL
|
1
|
0
|
Attaché de santé en odonto-
|
1
|
0
|
Attaché en santé mentale
|
1
|
1
|
Anesthésiste
|
2
|
1
|
Infirmiers diplômés d'Etat
|
3
|
2
|
Infirmiers brevetés
|
2
|
1
|
Agents itinérants de santé
|
-
|
-
|
Accoucheuses auxiliaires
|
-
|
-
|
Source : Plan d'action 2005 /District sanitaire de
Kombissiri
On note au niveau du CMA, une insuffisance de
personnel qualifié pour rendre opérationnel à temps plein
l'antenne chirurgicale. (Médecins formés en chirurgie
essentielle, attaché en anesthésie).
Au niveau des CSPS, il ressort que sur les 19 que
compte le district, seulement 8 répondent aux normes minimales en
personnel, c'est à dire, un IDE ou un IB + AA +AIS3. Le
déficit en personnel au premier niveau dans le district était
estimé à une vingtaine d'agents, toute catégorie
confondue.
S'agissant du Laboratoire, composante non moins
importante dans le dispositif du district, on note l'absence d'un technicien
supérieur. En lieu et place se trouvent deux techniciens de niveau
inférieur, ce qui limite les possibilités d'examens.
Le district sanitaire de Kombissiri n'est pas
suffisamment pourvu en personnel pour répondre aux préoccupations
des usagers des services de santé. Ce district est loin de
répondre aux normes de l'OMS qui sont 1 médecin pour 10 000
habitants et 1 infirmier pour 5.000 habitants.
3 IDE : Infirmier Diplômé d'Etat ; IB :
Infirmier Breveté ; AA : Accoucheuse Auxiliaire ; AIS : Agent
Itinérant de Santé.
26
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
4.1.2 La dispersion
La dispersion qui est la deuxième dimension de
notre indicateur d'accessibilité, est estimée
à
travers le nombre de CSPS et la distance entre ces
CSPS et le CMA. On compte 19 CSPS sur une superficie de 2.435 km2
soit un CSPS sur 128 km2. Concernant les distances, on observe que
seulement 4 CSPS sont à moins de 15km du CMA ; les 15 autres sont
à plus de 20 km. On trouve 6 CSPS qui sont à 45km de
l'hôpital du district. A ces distances s'ajoute l'état
impraticable des routes. Considérant la distance entre la
majorité des CSPS et l'hôpital de district (environ 25Km en
moyenne) et la non disponibilité d'une ambulance au niveau de ces CSPS,
on image toutes les difficultés que rencontrent les patients pour
bénéficier des services de l'hôpital de
district.
4.1.3 La spécialisation
La spécialisation renvoie aux différentes
fonctions que remplit un agent de santé dans une
structure de soins. Dans les formations sanitaires de
premier contact du district (CSPS), les agents de santé font face aux
activités suivantes : la consultation curative, la consultation
prénatale, celle des nourrissons sains, la planification familiale, les
accouchements eutociques (qui s'effectue dans les conditions normales), les
vaccinations, les causeries/sensibilisation. L'effectif du personnel dans les
formations de base étant retreint, amène à se demander si
le fonctionnement de ces entités permet de répondre aux besoins
des usagers. Ce mode de fonctionnement ne fait -il pas perdre plus de temps aux
patients, attendant que l'agent de santé oscille d'une activité
à l'autre. Souvent, pendant les campagnes de vaccinations, certaines
formations du district sont fermées pour permettre aux agents de
santé d'aller à la rencontre des populations là ou ces
dernières habitent. Le constat établi est les CSPS du district
avec la quantité de personnel disponible, exécutent difficilement
le paquet d'activité qui leur est dévolu.
4.1.4 La sensibilité
La sensibilité a trait aux demandes des usagers et
surtout à la réponse des agents de santé,
autrement dit, elle se réfère au
degré de satisfaction des usagers des services de santé. Quels
sont les canaux que le district prévoit et qui permettent de prendre en
compte les besoins des populations et surtout les réponses qui leur sont
réservées ? De l'avis des premiers responsables du district, en
cas d'insatisfaction, les populations ont la possibilité d'écrire
contre l'agent ou le service incriminé.
27
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Selon les premiers responsables, en 2005, il eut des
protestations sous forme de lettre adressée au MCD par des CoGes qui
n'étaient pas satisfait des agissements de deux agents de santé.
Ainsi, suite leur a été donnée car ils ont
été écoutés et les agents fautifs ont
été mutés. Contre cet argument, deux responsables de CoGes
que nous avons rencontrés estimaient que les plaintes des populations
recevaient rarement des réponses. Le fonctionnement actuel des districts
n'oblige pas les agents de santé à une interaction franche avec
les communautés. Le changement de comportement indispensable à
une meilleure sensibilité tarde à s'installer chez les agents de
santé.
4.1.5 L'aplatissement
L'aplatissement selon les auteurs concerne les paliers
de supervision qui existe dans un système décentralisé.
Ainsi, plus il y a de paliers, moins l'entité est
décentralisée. Nos données laissent comprendre que le
district sanitaire de Kombissiri fait souvent l'objet de supervision par la DRS
et certains partenaires directs du district. A l'intérieur, le seul
palier de supervision est le MCD, qui par trimestre fait le tour des CSPS pour
s'enquérir des difficultés techniques, organisationnelles,
sociales rencontrées. C'est un palier de supervision que compte le
district de Kombissiri à l'interne.
4.1.6 La délégation
La délégation renvoie aux types de
décisions que le district est en droit de prendre. L'arrêté
(Arrêté N°93 /146/SASF/SG) portant organisation, attribution
et fonctionnement des districts sanitaires stipule que les districts sont
compétents pour planifier leurs activités de soins cliniques, de
supervision, de formation, de gestion et de recherche- action. En un mot, les
districts sont autonomes. Nous avons choisi de mesurer cette autonomie à
travers la gestion financière et celle de la gestion des ressources
humaines car il reste que ces deux domaines sont essentiels ou les plus grandes
décisions sont prises.
Les ressources financières du district de
Kombissiri proviennent essentiellement des allocations de l'Etat, du PADS
(Programme d' Appui aux Districts Sanitaire), du paiement direct des actes, de
la contribution de certains partenaires. Pour bien comprendre comment ces fonds
sont gérés, nous avons focalisé notre attention sur les
types de dépenses effectués par le district ainsi que les
procédures de dépense.
28
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Chaque année le district de Kombissiri
évalue et exprime ses besoins à travers son plan d'action annuel.
Une fois que le plan est adopté, il est transmis au niveau du
ministère et du PADS ; il est également transmis aux autres
partenaires du district.
A partir de cet instant, le PADS qui met à la
disposition du district 50 million par an, s'arroge le droit d'effectuer les
grosses dépenses (construction d'infrastructures, achat de moto,
d'ordinateurs et de ses accessoires, du matériel médical, etc.)
en lieu et place des districts. Une commission d'attribution des
marchés, dirigée par le Secrétaire Général
du ministère de la santé sélectionne les fournisseurs pour
des commandes groupées.
Pour ce qui est des fonds que l'Etat alloue au
district de Kombissiri, ils sont placés dans un compte au niveau du
trésor, toute dépense à engager doit faire l'objet
d'examen par une commission provinciale d'attribution des marchés
présidée par le Secrétaire Général de la
province. L'autonomie financière du district de Kombissiri se limite aux
dépenses en carburant, et autres dépenses de
fonctionnement.
Concernant la gestion des ressources humaines, nous
avons estimé le degré d'autonomie à travers les
possibilités de sanctions qui sont accordées au district. Nos
investigations ont abouti au constat que le district de Kombissiri ne dispose
d'aucune possibilité de sanction directe sur les agents même au
niveau des affectations. En cas de faute d'un agent, le MCD écrit au DRS
qui dispose de pouvoir pour imposer à l'agent incriminé un
blâme, les autres types de sanction incombent au niveau central. Il
s'impose à travers le cas de Kombissiri de relativiser la notion
d'autonomie de gestion que le niveau central croit concéder aux
districts.
En conclusion, on peut dire que les districts ne sont
pas autonomes dans leur gestion financière en témoignent les
commissions qui limitent considérablement leur pouvoir.
4.1.7 La participation des populations aux décisions
courantes
La première forme de participation des
populations à la gestion des questions de santé se trouve dans la
mise en place des CoGes qui siègent au niveau des CSPS. Les
élections ont lieu tous les deux ans et sont organisées par les
autorités administratives notamment les préfets. Est
éligible, tout ressortissant d'une localité se trouvant dans les
limites géographiques d'une formation sanitaire, jouissant de ses droits
civiques. Le mode de désignation est le vote.
29
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Dans le district sanitaire, le nouvellement des CoGes
a lieu en 2005 dans l'ensemble des 19 formations sanitaires. Les populations ne
manifestent pas les mêmes intérêts à cette structure
lorsqu'on passe d'une formation sanitaire à une seconde. En effet, alors
que dans certaines, l'élection des membres des CoGes mobilisent les
communautés, dans d'autres une grande majorité ne sent pas
concerner et participe à peine aux élections. Un informateur
témoignait que la mise en place des CoGes draine les foules dans les
formations sanitaires non loin du chef lieu de la province que dans celles qui
sont très éloignées car, ceux qui sont proches, poursuit-
il, comprennent plus l'importance de ces structures que les autres. Il a
déploré la faible participation des femmes de façon
générale à ces élections. Aussi, il est des cas ou
les bureaux des CoGes sont mis en place par consensus. Ce fut le cas dans 5
CSPS des 19 que compte le district en 2005. La participation des populations au
vote pour la mise en place n'est pas aussi élevée.
La deuxième forme de participation concerne les
activités quotidiennes des CoGes qui représentent les populations
et agissent en leur nom. En concertation avec l'infirmier chef de poste, les
membres du CoGes gèrent au quotidien les problèmes de
santé des populations. Il faut noter que les membres du CoGes ne
participent pas aux activités au même rythme.
4.1.8 La participation des populations aux décisions
reconfigurantes
La participation reconfigurante a été
mesurée à travers la participation des populations à
certains types de réunion que nous avons estimée
déterminantes : les réunions de l'équipe cadre du
district, l'instance décisionnelle du district, les réunions
disciplinaires, les rencontres avec les partenaires. Il ressort que leur
participation se limite à la présence de quelques membres des
CoGes à ces réunions. C'est plus de la figuration que d'une
présence active. Il faut noter que les possibilités de
participation aux décisions déterminantes sont faibles. En effet,
un cadre de concertation des populations n'a pas été prévu
au niveau des hôpitaux de district. A ce niveau, les décisions
sont prises exclusivement par le personnel médical et
paramédical.
30
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
4.1.9 Commentaire
Après avoir apprécié les huit
dimensions du cadre de Kochen et de Deutch, des observations s'imposent
:
- le district sanitaire dispose de pouvoir très
limité dans la gestion des ressources humaines ;
- l'autonomie de gestion des ressources
financières semble une chimère car jusqu`à nos jours,
plusieurs autres structures de l'Etat prennent activement part dans le
processus des dépenses des districts. Le niveau central continue
toujours à exécuter une part importante des dépenses en
lieu et place des districts.
Il appert de ce constat que les districts ne peuvent
pas être considérés comme des unités
décentralisées. Nous estimons que les domaines clés d'une
décentralisation restent les ressources financières, les
ressources humaines, la planification. Ainsi, tout service qui s'adjuge le
label de décentralisé doit au moins disposer du contrôle
total sur ces ressources humaines, la gestion des fonds, la planification et
l'exécution de son plan d'action. Le degré de
décentralisation se mesure non seulement par rapport aux
compétences et au financement des organisations
décentralisées mais aussi par à l'autorité de ces
organisations (Lemieux, 1997) S'administrer, se gérer
financièrement sont essentielles pour la décentralisation d'un
service publique. Or tel ne semble pas le cas pour les districts qui en
matière de gestion du personnel ne possèdent aucun pouvoir de
sanction ; dans le domaine des dépenses, ils sont à la remorque
du niveau central et de l'administration publique au niveau
décentralisé. Le mode actuel de financement des districts accorde
une place importante au niveau local et aux services financiers publics qui
relèvent du ministère des finances. Aucun district ne peut
engager des dépenses sans l'accord de ces derniers par qui tout passe en
ce qui concerne les finances car les comptes des districts sont
désormais logés au niveau du trésor en lieu et place des
banques comme cela se faisait il y a quelques années.
Au vue de ce qui se passe en réalité sur
le terrain, nous osons affirmer sans ambages que beaucoup d'efforts sont
à pourvoir afin de faire des districts, des services
décentralisés comme le discours politique tend de le faire
admettre. Le système de santé de district en cours vient si
besoin en était, confirmer une tare majeure des politiques. En effet,
entre ce qui était prévue et ce qui est fait en
réalité, l'écart est toujours grand dans le domaine des
politiques publiques. Rares sont les politiques qui sont mises en oeuvre tel
que prévue depuis la phase de la formulation. Cette
31
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
difficulté inhérente aux politiques
publiques émane de l'action des acteurs qui est très difficile
à prévoir et à canaliser. Dans le cas de la
décentralisation du système de santé, une réelle
autonomie concédée au district n'allait t- elle pas restreindre
le champ de pouvoir de certains acteurs ? La lutte des uns pour élargir
leur sphère de pouvoir et le combat des autres afin de conserver leurs
prérogatives est ce qui caractérise et explique la mise en oeuvre
de cette réforme de santé.
L'autonomie dont on crédite les districts
sanitaires semble de façade car, entre ce qui est prévu par les
textes et ce qui se donne à voir sur dans la réalité,
l'écart est considérable et suscite des interrogations
légitimes. En effet nous n'avons trouvé dans aucun des textes qui
créent et réglemente, le fonctionnement des districts que
certains types de dépenses devraient être exécutés
par le niveau central, encore moins que le secrétaire
général d'une province avait le droit de s'immiscer dans les
passations des marchés pour le compte des districts. Telle que les
choses se déroulent sur le terrain, on ne peut s'empêcher de
s'interroger sur la réussite d'une décentralisation sectorielle
dans un contexte de gestion globale centralisée. Quelles garanties le
ministère de la santé a- t- elle reçu des autorités
à même de permettre aux districts de s'affranchir des
mécanismes empreints de lourdeur et implication de plusieurs structures
étatiques dans le processus des dépenses des services de
santé ? La réalité des faits démontre que
l'autonomie dont on crédite les districts est sous perfusion
4.2 Facteurs d'influence de la mise en oeuvre
Il convient de rappeler que nous avons opté
d'utiliser le modèle de Walt et Gilson pour analyser les facteurs
d'influence. Ce cadre met en exergue quatre facteurs : le contenu de la
politique c'est à dire les choix opérés, les
stratégies adoptés pour l'implantation, le contexte et enfin le
jeu des acteurs impliqués dans la mise en oeuvre. Nous restons
fidèles à notre engagement.
4.2.1 Les contenus de la politique et la réaction
des acteurs
La politique de décentralisation accorde une
importance certaine à la formation des médecins en
chirurgie et en gestion.
Force est de constater que le principe même de
formation en chirurgie essentielle ne semble pas être bien accepté
par les médecins. Certains estiment que c'est un alibi pour le
ministère de réduire ou de retarder la formation des chirurgiens.
Il faut préciser que ce choix politique n'a pas
32
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
reçu l'assentiment de tous les acteurs du
système. A commencer par les enseignants de la Faculté de
médecine qui doutaient fort de l'efficacité de cette formation.
Former un médecin en 6 mois en chirurgie lui permettrait- il de prendre
réellement en charge les patients ? Il reste que ce choix politique
continue toujours à faire l'objet de discussion vu qu'il ne semble pas
pertinent. La composante technique (formation des médecins en chirurgie)
introduite par la politique de décentralisation est loin d'être la
solution pour un meilleur fonctionnement des hôpitaux de districts. La
formation des médecins en chirurgie, introduit sans nul doute des
changements dans leurs activités traditionnelles qu'ils ne sont pas
prêts à accepter, toute chose préjudiciable à la
mise en oeuvre effective de cette politique. Selon Paul SABATIER, une des
conditions de réussite d'une politique est attribuable aux choix des
composantes techniques qui ne doivent être loin de la
préférence des principaux acteurs. (Paul Sabatier 1986,
cité par Ridde, 2005, p 21).Ce qui ne semble pas le cas ici. Les
manifestations caractéristiques du désaccord se trouvent dans le
refus de certains médecins pourtant ayant reçu la formation de
poser des actes chirurgicaux ; d'autres usent de leurs relations pour
être mutés hors des districts. C'est ce qui explique en partie le
déficit récurrent de médecins dans les districts. On note
une faible motivation des médecins à accepter ce choix : «
C'est faute de mieux que nous acceptons d'y aller. Tu sais, ce sont des
risques énormes que nous prenons pour effectuer les interventions
chirurgicales et au finish, tu n'as rien. Tu n'es pas un spécialiste, tu
abats un grand boulot et c'est toujours le même salaire. Nous n'avons
aucun avantage, même pour les spécialisations, on vient passer le
concours comme tous les autres. Franchement, on ne gagne rien à
travailler dans un district. C'est ce qui fait que chacun cherche mieux
ailleurs », nous affirmait un médecin de district.
Un autre choix qui ne semble pas rencontrer
l'assentiment des populations est la facturation des actes médicaux.
Pour bénéficier des soins, les utilisateurs doivent
débourser de l'argent. Ce sont les frais générés
par les actes médicaux et la vente des MEG qui alimentent les fonds des
districts en sus des subventions de l'Etat et des contributions d'autres
partenaires. Ce qui est reproché à ce choix est qu'on tente
d'uniformiser le cout des actes à travers l'ensemble du pays alors qu'il
est indéniable que les régions ne disposent pas des mêmes
atouts. Dans un rapport d'évaluation (Ministère de la
santé 1994), des consultants ont mentionné qu'il fallait tenir
compte des réalités économiques de chaque région
dans la facturation des actes médicaux car c'est aussi une façon
de travailler dans le sens de l'instauration de l'équité dans la
gestion des questions de santé. Ils prévenaient que la
tarification des actes sans tenir compte des réalités locales
explique
33
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
dans une large mesure le faible taux de
fréquentation des services de santé dans certaines parties du
pays.
4.2.2 Des stratégies non
expérimentées
Une des étapes importantes dans la mise en
oeuvre des politique publiques est la définition des stratégies
qui sont, sommes toutes, très déterminantes pour l'aboutissement
de la politique. On note souvent qu'il y a un décalage entre la
formulation et la mise en oeuvre et certains auteurs (Muller et Surel, 1998,
Pineault R, Daveluy, 1995 ; OMS, 1995) estiment que ce décalage est en
partie attribuable au choix des stratégies pour l'implantation. Les
stratégies qui servent à l'implantation de la politique de
décentralisation sanitaire se résument à :
- la formation des médecins en chirurgie
essentielle et en gestion
- la mise en place des CoGes ;
- le bénévolat dans les CoGes ;
- la mise en place des ECD
- la construction tout azimut de CMA
- la co-gestion des structures sanitaires avec les
populations.
Pour la mise en oeuvre de la politique de
décentralisation du système de santé, le ministère
de la santé n'a pas jugé nécessaire de procéder
à une expérimentation à travers une phase pilote avant une
extrapolation à échelle du pays. Un ancien cadre du
ministère justifie ce choix en ces termes : « Je trouve que la
meilleure décision, c'est celle qui a été prise. La raison
fondamentale, c'était une question d'équité. On ne peut
vouloir résoudre ces genres de questions en disant voilà notre
plan de développement ; on va mettre 5 districts cette année, et
l'année prochaine et ainsi de suite. Comme on connaît nos pays,
dix après on peut ne pas finir notre plan de couverture et là
ça devient difficile. Et comment justifier qu'on développe une
zone avec tout le nécessaire et on dit de l'autre côté,
ça c'est dans 3 ans alors qu'il y a un minimum qui permet de commencer ?
La question de fond était que là on ne peut pas faire une
intervention chirurgicale, on peut faire autre chose dans le cadre du
développement du district. Le district, c'est tout processus de
développement qui peut avoir des stades différents d'un moment
à l'autre selon la dynamique des régions ».
(Enq02)
34
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Les raisons invoquées par les autorités
sanitaires de l'époque pour justifier l'absence de phase pilote dans la
mise en place des districts ne semblent pas convaincre certains acteurs. En
effet, selon un jeune médecin rencontré : « Avec l'IB,
on a pris soins d'expérimenter le recouvrement des coûts avant de
commencer ; même avec ça, il reste qu'il y a des
difficultés. On aurait fait la même chose que certaines
difficultés seraient relevées et analysées
profondément pour déboucher sur des solutions efficaces. Tout ce
qu'on fait, c'est de tourner en rond sans bien sur avancer ».
(Enq04)
Nous estimons qu'une phase pilote aurait
été nécessaire pour des « raisons techniques et
tactiques ». En effet, cette étape aurait permis de tester la
faisabilité de la décentralisation sanitaire telle que
conçue au Burkina, tout chose qui n'allait pas manquer de faire surgir
les premières difficultés, de juger de la pertinence et de
l'efficacité de certains choix techniques. Il reste que tout choix
technique a un coût et oblige à des changements. Ce faisant la
phase pilote offre une opportunité d'évaluer réellement le
coût des composantes techniques de la politique, d'estimer la
capacité à innover des différents acteurs. Former un
médecin de district en chirurgie et en gestion coûterait environ
3.000 000 millions de FCFA. Ce sont de nos jours environ 300 médecins
qui ont bénéficié de cette formation, ils ne sont plus
nombreux à exercer dans un district. La phase pilote n'aurait -elle pas
permit de réfléchir sur ce choix avant d'engager des
dépenses importantes. Sur le plan tactique, cette phase allait
être mise à contribution pour engager un véritable
débat avec les principaux acteurs, tout élément
indispensable à leur adhésion au projet.
Une phase pilote aurait permis
l'expérimentation et l'adoption progressive des différentes
stratégies. Il aurait également été judicieux de
développer quelques activités de recherche sur les
capacités contributives réelles des populations et sur les
modalités de payements des services de santé. (Ministère
de la santé, 1994).
4.2.3 Contexte politique et social
En rappel, la mise en oeuvre de la
décentralisation sanitaire est intervenue à partir de 1993. Sur
le plan politique, cette période correspond à un renouveau,
marqué par l'avènement de la IV République. En 1991,
l'adoption de la constitution venait sceller l'ouverture politique avec pour
conséquence la prolifération de partis politiques, des
associations de la société civile.
35
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
De proche en proche, le débat public
commençait à prendre corps avec les actions des différents
partis politiques et la rivalité politique avec. Dans son combat pour
l'hégémonie politique qui passe l'adhésion du maximum
d'individus à ses idéaux, le parti au pouvoir use de toutes
sortes de stratégie dont la politisation de l'administration publique.
Ainsi, tous les postes stratégiques et aux prérogatives juteux
sont confiés aux militants du parti. Les cadres sont choisis moins
à cause de leur technicité que de leur militantisme
avéré. C'est cette façon de cooptation des cadres qui
explique les incessants changements au niveau des directions des
différents ministères dont celui de la santé.
En effet, de 1993, date du début du processus
de décentralisation à nos jours, ce sont quatre ministres qui se
sont succédés à la tête du ministère de la
santé. Le changement de ministre est généralement suivi
d'un mouvement de personnel. Le nouveau ministre met en place une nouvelle
équipe à même de l'assister dans l'exécution de ses
nouvelles fonctions. Le changement de cadres aux postes de
responsabilité ne s'arrête pas seulement au niveau central, il
touche aussi la périphérie. C'est ainsi que les coordonnateurs de
programme et projets, les directeurs régionaux et les médecins
chef de district subissent le changement. Il est très souvent
reproché aux ministres de procéder à des nominations de
complaisance dans certains cas car ne privilégiant que des
critères politiques. Combien sont- ils, les cadres dont les
compétences ne font l'objet d'aucun doute qui sont réduits
à leur plus simple expression car mis en rebut, victimes de leur
appartenance politique. Ils ne sont pas nombreux les cadres, membres des partis
de l'opposition à occuper des postes importants au niveau du
ministère de la santé et même dans les autres
ministères. La politisation de l'administration porte un coup dur
à la mise en oeuvre des politiques, car elle favorise la mise à
l'écart de certaines sensibilités dont la participation pourrait
apporter un plus. Une des conditions de l'aboutissement d'une politique
publique est sans conteste la mobilisation et l'implication de tous les acteurs
dans le processus.
Un médecin, ayant occupé de hautes
fonctions au sein du ministère de la santé précisait que
l'essentiel des cadres ayant travaillé sur le dossier de la
décentralisation sanitaire pendant la conception, ont été
écartés lorsqu'il s'est agit de la mise en oeuvre car on leur
rapprochait mais sans le leur dire ouvertement, de ne pas s'afficher
politiquement, d'être de connivence avec des syndicats.
(Enq04).
36
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Le traitement du dossier de la décentralisation
sanitaire relevait des compétences de la direction
générale de la santé et de la CADSS. Ces deux structures
ont toujours été touchées par les vagues de mouvement de
cadres. En effet, un de nos informateurs précisait que de 1993 à
2006, ce sont 5 directeurs généraux de la santé qui se
sont succédé et plus de 7 coordonnateurs au niveau de la CADSS.
Les motifs de départ ne sont autres que politiques (Enq03). Cette
instabilité n'est pas sans conséquence sur le déroulement
du processus.
L'une des conséquences majeures de cette
réalité reste la mauvaise couverture du pays en structures
sanitaires. En effet, pendant que des régions ne disposent pas du
minimum, on procède l'implantation de CSPS, CMA et autres dans des
localités pour tout simplement faire plaisir au ministre dans l'optique
de conserver son poste.
La politisation de l'administration tue la
compétence tout en valorisant le clientélisme, le
népotisme, le favoritisme. Cette façon de gérer
l'administration ne favorise pas la présence de « mémoire
vivante »4, tout élément qui conduit à
revenir à la case départ à tout moment. Le processus de
décentralisation du système sanitaire souffre moins de manque de
sources finacières que de compétences pour lui impulser un nouvel
dynamisme. Les cadres du ministère qui peuvent traiter cette question
sont mis au garage, ce qui a poussé certains à partir.
(Enq04).
La politisation de l'administration influe les
orientations ou du moins la compréhension des orientations. Qu'un nombre
important de cadres pilote le processus de décentralisation du
système de santé, imprime au processus, différentes
visions dont la gestion ne peut que saborder la mise en oeuvre. Il aurait
été plus salutaire de confier le processus d'implantation
à une équipe inamovible pour une durée bien
déterminée, ce qui à n'en point douter aurait permis
d'avancer convenablement, avec plus de professionnalisme et de
clarté.
La plupart des CoGes se caractérise par un taux
d'analphabétisme très élevé des membres avec
logiquement une méconnaissance des textes ; d'ou un mauvais
fonctionnement qui se traduit par des malversations de toutes sortes. Il est
indéniable que le niveau de scolarisation n'est pas sans
4 Nous parlons de ces cadres qui ont passé
beaucoup de temps dans leurs postes, ce qui leur donne l'avantage d'être
bien informés
37
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
conséquence sur l'efficacité et le bon
fonctionnement des CoGes qui jouent un rôle important voire même
capital dans le dispositif de la décentralisation du système de
santé.
Le taux de scolarisation dans l'ensemble du pays est
très faible. Selon l'INSD (2005) le taux brut de scolarisation au
primaire en 2005 était de 55% soit 107% en milieu urbain contre 48% en
milieu rural. Dans beaucoup de localités notamment en milieu rural, peu
de personnes savaient lire et écrire. Or l'essentiel des CoGes
siègent en zone rurale. La difficulté de trouver des personnes
sachant lire et écrire pour animer ces structures est réelle. Ce
qui dénote leur faible niveau de fonctionnement actuel. Aussi, le
contexte économique se distingue par un taux de chômage
très élevé et des activités économiques qui
se réduisent aux activités agricoles ; 81,9% des ménages
du pays pratique l'agriculture comme principale activité
économique (INSD, 2005). Cette situation dénote une faiblesse des
revenus des ménages ; ce qui n'est pas sans conséquences sur
leurs capacités contributives au financement de la santé. Les
conditions de vie des ménages n'encouragent pas les membres des CoGes
à accepter le bénévolat. C'est sans doute ce qui explique
leur absentéisme fréquent dans l'animation de ces structures
d'appui.
4.2.4 Jeu d'intérêts et logiques
d'intervention des acteurs
« La construction des politiques publiques
n'est pas un processus abstrait. Elle est au contraire indissociable de
l'action des individus ou des groupes concernés, de leur capacité
à produire des discours concurrents, de leurs modes de mobilisation.
Elle dépend aussi de la structure plus ou moins fluctuante de leurs
relations et des stratégies élaborées». (P.
Muller ; Y Surel, 1998, p 79) La mise en oeuvre de la décentralisation
du système de santé mobilise une gamme variée d'acteurs
sociaux : les cadres au niveau central, les DRS, les MCD, les membres des ECD,
les membres des CSD, les membres des CoGes, les communautés, les
fournisseurs, les associations et ONG, les partenaires bilatéraux et
multilatéraux, les partis politiques, les élus locaux, les
confessions religieuses, la chefferie traditionnelle, etc.
Chaque groupe d'acteurs va non seulement se
caractériser par les types et l'importance des ressources qu'il
contrôle (financières, humaines matérielles, symboliques)
et mais aussi par le type de logique qui devrait servir à réguler
et les interactions dans le système (Ibid).
38
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
Muller et Surel discernaient deux types de facteurs
essentiels chez les acteurs, qui à leur sens, pourraient avoir un impact
considérable sur les politiques publiques : il s'agit des ressources et
des répertoires d'action. Prolongeant la liste des
caractéristiques des acteurs à même d'influencer la
production d'une politique publique, Valéry Ridde(2005) a
identifié et documenté dix logiques chez les acteurs
impliqués dans la mise en oeuvre de l'IB, lesquelles logiques ont eu une
influence non négligeable sur cette politique. Nous nous servirons de ce
cadre pour analyser le jeu des acteurs dans la mise en oeuvre de la
décentralisation en cours dans le secteur de la
santé.
4.2.4.1 L'accaparement
L'accaparement est définit comme une
stratégie visant à acquérir certaines ressources pour des
intérêts personnels. La nature des ressources dans un
district sanitaire est diverse : les ressources financières, les
positions de pouvoir qui permettent d'accroître le capital social. Cette
logique est mobilisée pour le positionnement favorable à
l'occupation d'un poste, passage obligé vers les ressources. Le MBDHP
(Mouvement Burkinabé des Droits de l'Homme) et l'UIDH (Union
Interafricaine des Droits de l'Homme) ont à maintes reprises (Rapports
annuels, 2002, 2004), critiqué le prisme de certains chefs traditionnels
et religieux dans la gestion des affaires publiques locales. Dans leur lutte
d'influence certaines sommités s'immiscent sous plusieurs formes dans la
conduite des affaires. Ainsi, ils sont présents par procuration dans
toutes les institutions au niveau locale. Dans le cadre de la
décentralisation sanitaire, ils se sont accaparés du
contrôle des CoGes. Les données empiriques informent que dans la
plupart des localités où il existe un CSPS, il est très
fréquent de constater que les comités de gestion sont
composés par des proches du chef de village ou de certains chefs
religieux. Cette façon de procéder découle d'une logique
d'accaparement de toutes les instances décisionnelles et surtout de
profiter des dividendes qui seront générées ; l'argent
généré par la vente des MEG, le contact avec les
partenaires (ONG, institutions internationales, etc.) constituent les
principaux enjeux. Un interlocuteur, précédemment MCD
témoignait que les détournements sont fréquents dans les
CoGes, sans toutefois que des mesures disciplinaires soient prises car les
personnes incriminées sont dans la majorité des cas des
protégés de certaines autorités locales. Cette logique est
également mobilisée par certains infirmiers qui usent de leurs
relations pour se faire affecter dans un CSPS ou ils ont la chance d'être
ICP. Ce poste est stratégique dans le contrôle des ressources. En
effet, l'ICP est le conseiller des CoGes et mieux, il se trouve être
généralement la personne la plus instruite dans le CoGes, ce qui
n'est pas sans constituer un avantage non négligeable dans
la
39
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
gestion des affaires locales. Selon une étude
(Ministère de la santé, 2002) beaucoup d'ICP s'accaparent de la
gestion des CoGes en se muant en trésorier ou en président,
ordonnateur des dépenses.
4.2.4.2 L'opacité
Une autre logique qui guide les acteurs dans leurs
rapports avec les autres, reste l'opacité définit «
comme la volonté délibérée de certains acteurs de
cacher les informations à d'autres protagonistes ». Cette
attitude est très présente dans la gestion des CoGes. En effet,
ils sont nombreux les membres de certains CoGes qui ne disposent pas
d'information sur leur structure. Une étude révélait que
certains présidents de CoGes gardaient par devers eux tous les outils de
gestion afin de cacher aux autres les malversations dont ils sont l'auteur. La
même étude indiquait que certaines informations (les
bénéfices émanant de la vente des MEG, certains types de
dépenses, le montant des enveloppes financières de certains
partenaires) ne faisaient pas l'objet de large diffusion aussi bien au sein des
CoGes que dans les districts (Catrayé et al , 2001). Cette
manière d'agir est savamment utilisée par certains acteurs (IPC,
MCD, Président de CoGes) dans l'optique de maintenir les autres
collaborateurs dans l'ignorance. C'est ce qui explique que moins qu'une
équipe, c' est plutôt une poignée de complices qui
gère les CoGes, les ECD. Cela affaiblit et dénature la
participation communautaire.
On pourrait être tenté de dire que
l'opacité est institutionnellement admise dans la gestion des
dépôts répartiteurs des districts. En effet, chaque
district dispose d'un dépôt de médicaments qui sont vendus
au sein des CMA et qui servent à ravitailler les dépôts des
CSPS. A ce niveau, aucune structure communautaire n'a été
prévue par les textes pour contrôler le fonctionnement de cette
structure. Les bénéfices engrangés ne sont pas connus des
communautés, ce qui donne toute la latitude aux membres de
l'équipe cadre de se répandre dans toutes sortes de
dépenses, qui sont loin des intérêts des populations. Il
reste que l'opacité favorise la prolifération des rumeurs de
toute sorte qui contribuent à saper le moral des communautés. La
conséquence de l'opacité est la faible fréquentation des
structures de santé, un manque de confiance au système de
santé, etc.
40
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
4.2.4.3 Le clientélisme et la connivence
Le clientélisme et la connivence sont des
logiques que les acteurs mettent en branle dans leurs rapports de tous les
jours avec les autres dans le but d'atteindre les objectifs personnels
escomptés. On pourrait définir le clientélisme comme
« l'usage et l'entretien de relations personnelles avec certains
responsables à des fins diverses ». Cette arme est très
souvent utilisée par les fournisseurs et les entrepreneurs et s'observe
dans les présents et opportunités d'affaires qu'on offre à
certains acteurs importants tels les cadres au niveau central, les DRS, les MCD
contre leur silence devant les manquements , le non respect des termes de
contrat. Pour s'en convaincre, il suffit d'aller voir les conditions dans
lesquelles certaines oeuvres sont exécutées sans que les premiers
responsables n'osent porter des critiques. Beaucoup d'infrastructures sont de
nos jours mal réalisées, des équipements de qualité
approximative livrés au su et au vu de nombre de responsables, qui
préfèrent sacrifier les intérêts collectifs contre
une villa, une voiture. Aussi bien au niveau des CSPS que des CMA, ces logiques
sont mises en contribution par les différents acteurs, chacun dans le
sens de maximiser ses profits. Selon, un informateur, le ministère de la
santé est très souvent victime de la mauvaise construction de
certaines infrastructures, de la faible qualité de certains
équipements, de détournements des derniers publics, des cas de
manquement graves de certains à la discipline, à la
déontologie médicale. Mais dans la plupart des cas, soit les
auteurs ne sont pas dénoncés pour diverses raisons, soit ils ne
sont pas sanctionnés à cause des relations qu'ils entretiennent
avec certains cadres influents. Pour illustrer ces propos, notre informateur a
mentionné que deux blocs opératoires qui viennent à peine
d'être construit connaissent de sérieux problèmes
d'étanchéité sans que des sanctions soient prises à
l'encontre de l'entreprise et de ses complices.
4.2.4. 4 La suspicion
La suspicion se caractérise par le manque de
confiance entre les acteurs. Soit on doute de la compétence des autres,
soit on reste septique quant à leur bonne foi. Cette situation conduit
à la méfiance ou à un contrôle poussé de
l'autre. Cette façon de penser et d'agir caractérise
l'intervention de certains acteurs dans le processus de mise en oeuvre : il
s'agit des agences de coopération bilatérale et
multilatérale, de certaines ONG. Elles n'ont pas confiance à
l'administration publique dans son ensemble et aux agents de l'Etat en
particulier. Une telle façon de concevoir les rapports n'est pas sans
conséquence sur la collaboration et s'illustre par la complexité
et la lourdeur des outils de gestion que ces institutions imposent aux agents
de l'Etat à chaque fois qu'elles interviennent dans le processus. La
rigueur de gestion qui prétend
41
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
caractériser les institutions de
coopération crée sans nul doute des désagréments et
des ratés qui ralentissent la progression du processus. Un directeur de
service regrettait le fait que des districts n'arrivent pas épuiser les
fonds mis à leur disposition par l'UNFPA, tout simplement à cause
des péripéties des procédures administratives. Ce que ces
institutions exigent dépassent dans nombre de situation, les
compétences du personnel disponible dans les districts.
(Enq02).
4.2.4.5 L'évitement
« Nous avons qualifié cette
stratégie d'évitement dans la mesure où elle fait
référence à des comportements humains cherchant à
tout prix à éviter la survenue d'un conflit direct entre les
acteurs sociaux ». (Ridde, 2005) Le but de l'évitement poursuit
l'auteur, est l'instauration et la pérennisation de la paix sociale.
Pour ce faire, il est essentiel d'empêcher l'éclatement des
conflits, des poursuites judiciaires et autres sanctions à même
d'entamer les bonnes relations indispensables à la
collaboration.
L'évitement s'exprime dans le refus de
dénoncer les agents qui se répandent dans des comportements peu
orthodoxes, qui inhibent l'utilisation des services de santé et le
fonctionnement des structures d'appui. Afin de sauvegarder la cohésion
sociale, certains membres des CoGes ne s'aventurent pas à s'opposer de
façon affichée et tranchée à certaines
dérives des présidents ou des trésoriers dont la gestion
compromet l'avenir de leur CSPS. Cette logique guide nombre d'acteurs dans
leurs relations avec les autres. Nous pensons que cette façon de se
conduire ouvre la voie à toutes de sortes de dérives dans la
gestion des districts.
4.2.4.6 La substitution
Définie comme « un processus de travail
entrepris par des acteurs pour effectuer certaines tâches en lieu et
place d'autres personnes », la logique de la substitution semble
caractérisée le comportement de certains acteurs dans les
districts sanitaires. Les données disponibles informent de l'existence
de cette stratégie d'acteur(substitution) dans la relation entre les
membres du CoGes, entre le personnel médical et paramédical,
entre les ICP et les membres du CoGes.
En effet, le rapport de l'évaluation de la
gestion des ressources financières des CoGes (Ministère de la
santé, 2002) faisait ressortir des insuffisances profondes au niveau des
rôles et des fonctions des différents membres, pourtant bien
définis dans les statuts. Ainsi, des ICP et des trésoriers se
substituent aux présidents dans l'ordonnancement des dépenses ;
des présidents et des ICP
42
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
tiennent les outils de gestion en lieu et place des
trésoriers. Des aides opérateurs font des interventions
chirurgicales devant l'absence des médecins. La mobilisation de cette
stratégie par les infirmiers, « outre le fait que cela peut leur
permettre, pour les moins honnêtes, d'accaparer quelques ressources, ils
veillent à maintenir leur pouvoir sur les communautés et à
montrer à leur hiérarchie administrative que leur centre de
santé fonctionne bien » (Ridde, 2005). Quant aux membres des CoGes,
cette démarche procède des intentions de malversation dans la
plupart des situations. Pratiquée avec de bonnes intentions, la
substitution favorise un meilleur fonctionnement des districts, elle est dans
ce cas louable.
4.2.4.7 Le mépris du service public
La dernière des logiques d'intervention, qui
pensons-nous s'applique au contexte de la décentralisation du
système de santé est le mépris du service public. Dans
leur course vers l'enrichissement, certains acteurs s'arc boutent sur l'Etat et
partant les biens publics. Que ce soit les entrepreneurs, les fournisseurs, les
cadres au niveau central et périphérique, les communautés,
tous font preuve d'une perception erronée de la chose publique. Il
suffit d'observer les rapports avec les matériels de l'Etat pour
comprendre la profondeur du mépris du service public. Cette situation
conduit à un gaspillage de ressources car le matériel atteint
rarement la longévité escomptée faute d'entretien.
Appliquer au processus de décentralisation, cette réalité
se traduit par les pannes fréquentes des ambulances, l'utilisation
à des fins personnelles du matériel médical, le
détournement du carburant, l'insalubrité de certains locaux, les
surfacturations, les absences injustifiées, les infrastructures
inachevées, les sessions de formation bâclées, etc. La
décentralisation sanitaire s'installe dans un contexte
général empreint de laxisme, de favoritisme, de laisser aller,
bref de corruption. Le sérieux, l'engagement sincère des acteurs,
gage d'un meilleur aboutissement du processus, laissent petit à petit la
place à la maximisation des avantages matériels et personnels.
Que ce soient les passations de marché, les activités de
supervision, de formation, de soins, rien n' est fait avec une application
certaine. La préoccupation première réside dans les prises
en charge et autres avantages matériels. La question fondamentale que
nous posons est la suivante : le personnel médical et paramédical
oeuvre- il dans le sens d'un aboutissement heureux du processus ? La mise en
oeuvre de la décentralisation ne saurait s'affranchir du prisme de la
faiblesse de conscience professionnelle et de l'effondrement progressif et
accéléré du civisme.
43
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
5. DISCUSSION ET RECOMANDATIONS 5.1
Discussion
5.1.1 Le débat, un préalable
nécessaire
Un ancien cadre, alors artisan de la
décentralisation sanitaire nous confiait qu'une des insuffisances de la
politique de décentralisation sanitaire est sans conteste le manque de
débat aussi bien à l'interne qu'à l'externe. La conduite
du processus avait été confiée à un noyau de cadres
convaincus de la nécessité d'une telle réorganisation du
système de santé, qui ne rendaient compte qu'au ministre de la
santé. Il eut peu d'échanges avec les autres acteurs du
ministère. Cette situation s'expliquerait par le fait que la mise en
oeuvre a été engagée sous pression de la Banque mondiale
et qu'il fallait faire les choses selon les exigences des bailleurs de fonds.
Le ministère n'a pas voulu d'un débat car, les
incompréhensions et les tensions qui en résulteraient,
constitueraient sans nul doute de sérieux obstacles.
Il reste que les conséquences de cette
situation pèsent lourdement sur le fonctionnement des districts. En
effet, cette façon de procéder a généré des
mécontents au sein du ministère qui sont, si on peut l'exprimer
ainsi les opposants à cette politique et s'investissent assidument pour
prouver son impertinence. Ce qui fait qu'à chaque changement de
ministre, on note une rupture dans la marche du processus ; des
activités sont supprimées, de nouvelles directives sont mises en
circulation souvent en contradiction avec des textes en vigueur.
Une autre conséquence de l'absence de
débat s'exprime dans la faible participation des populations dans la
gestion des districts sanitaires. Les structures dites communautaires mises en
place à la faveur de la décentralisation sanitaire ne sont la
plupart que l'ombre d'elles sans une emprise réelle sur la gestion des
services de santé qui est resté confinée entre les mains
du personnel médical et paramédical. Des échanges francs
et simples assortis des séances de sensibilisation auraient permis aux
populations de prendre conscience de leurs devoirs et de comprendre qu'elles
peuvent et doivent demander des comptes aux gestionnaires des questions de leur
santé. Comment les populations peuvent-elles jouer pleinement leurs
rôles dans l'ignorance. Il aurait fallu un débat tant avec les
acteurs à l'interne qu'à l'externe pour aplanir
44
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
certaines divergences, lever des équivoques,
toute chose favorable à une participation et une adhésion des
différents acteurs. Un débat aurait permis de prendre compte les
préoccupations de tous les acteurs et d'agir en
conséquence.
5.1.2 Une vision étriquée de
l'accessibilité
Le discours officiel ne cesse de se
référer au rayon de couverture pour témoigner des efforts
faits pour rapprocher les centres de soins des utilisateurs. Lorsqu'on aborde
la question de l'accessibilité certains cadres avancent que le rayon
d'action des CSPS est passé de 20 km à 8km. Tous les efforts vont
ainsi dans le sens de construction des services de santé afin
d'augmenter la couverture sanitaire qui est d' ailleurs l'objectif 1 du
PNDS.
Nous pensons que cette seule acception qu'on donne
à la notion d'accessibilité est préjudiciable à la
décentralisation du système de santé.
L'accessibilité est une question de disponibilité, une
considération de l'autre, un plaisir à collaborer et à
servir, une possibilité financière. Que prévoit la
décentralisation sanitaire pour éviter aux populations de perdre
du temps dans les formations sanitaires en augmentant le nombre du personnel ?
A-t-on prévue des activités pour permettre aux prestataires des
soins de santé de se comprendre et de se remettre en cause afin
d'aboutir à des comportements favorables à une meilleure
collaboration avec les utilisateurs. Il urge de comprendre que
l'accessibilité des services de santé dans un contexte de
décentralisation passe en plus de la construction des infrastructures,
par l'augmentation du nombre des agents de santé et un impératif
de changement de comportement des prestataires de soins, la prise en compte des
plus démunis.
5.1.3 Décentraliser pour qui ?
« L'imputabilité, c'est ce qui manque le
plus dans la décentralisation sanitaire chez nous » ainsi
s'exprimait un de nos interlocuteurs (Enq04). L'imputabilité est ce
principe selon lequel les administrateurs publics doivent à la fois
reconnaître l'obligation de réaliser les mandats qui leur sont
confiés et rendre compte à la société ou à
ses mandataires de leurs activités et de tout le processus de transfert.
(Turgeon J, Lemieux Vincent, 1999, P 175). L'imputabilité pose à
notre sens, d'une part la question de la conscience que les administrateurs ont
des missions qui leur sont confiées et l'obligation des
bénéficiaires de demander des comptes aux premiers.
45
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
La politique de décentralisation sanitaire,
afin de promouvoir la participation des communautés a prévu la
mise en place d'un certain nombre de structures dites communautaires à
même de constituer un cadre de contrôle, d'expression et de
revendication pour les populations ; ce sont les CoGes. L'existence seule de
ces structures suffit aux autorités sanitaires à justifier de la
participation des populations à la gestion de leurs problèmes de
santé. Ce qui est le plus important, pensons-nous, est d'aller voir dans
les pratiques, les pouvoirs que détiennent ces structures
vis-à-vis des services de santé.
Leurs activités des CoGes se limitent pour
l'instant à la gestion des fonds émanant de la vente des
médicaments. Cette structure représentative des populations
entreprend rarement des actions devant les cas d'absentéisme chronique
et injustifié des agents de santé, au cas de manquement aux
principes élémentaires de la bienséance qui
caractérisent le comportement de certains agents de santé. Le
personnel médical et paramédical utilise dans certains cas cette
structure comme des caisses de résonance ou des alliées pour
spolier les communautés. Autant de lacunes qui témoignent des
énormes insuffisances qui entachent l'existence de cette structure
sensée défendre les intérêts des
populations.
Si les populations sont représentées au
sein des CSPS qui sont les premiers point de contact avec le système de
santé, elles sont quasiment absentes au niveau de la structure de
gestion du district qui est l'équipe cadre. Aucune structure
représentative des utilisateurs des services de santé n'a
été prévue à ce niveau. Comment comprendre cet
état des faits quand on sait que c'est à ce niveau que les
questions importantes concernant la vie du district sont débattues ? On
ne rend pas compte aux utilisateurs des bénéfices
générés par le dépôt répartiteur et la
pharmacie de l'hôpital des districts. Seule l'équipe du district,
composée du personnel médical et paramédical, a un droit
de regard et d'utilisation de ces fonds. Quelle différence avec la forme
de gestion d'avant ? Que fait le MCD et son équipe cadre des plaintes
des utilisateurs du comportement des prestataires, ou des cas de malversions
des agents de santé ?
Ce qui se laisse voir dans la pratique, nous autorise
à affirmer que la décentralisation dans sa forme actuelle
n'accorde aucun pouvoir aux communautés. Ce qui permet à certains
agents de santé d'utiliser des ressources des populations à des
fins personnelles avec l'onction de certains
46
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
cadres au niveau central. Devant les cas de
malversions constatés ça et là dans les districts, la
sanction la plus grave consiste à affecter le coupable dans un autre
district ou il est probable qu'il se répande dans le même type
comportement. L'argumentaire qui fait croire que la décentralisation
permet l'amélioration de la capacité de répondre aux
besoins des citoyens puisque ceux nouvellement chargés de les
écouter seraient plus proches d'eux, est battue en brèche par le
comportement des agents de santé qui sont loin de considérer et
d'accepter les utilisateurs comme des partenaires et pourquoi pas des
employeurs potentiels. Partant de ce constat, on est en droit de se demander
pour qui on décentralise le système de santé ?
5.1.4 Une politique en panne d'évaluation
L'une des tares dans la mise en oeuvre des politiques
publiques dans les pays en développement, facteur d'échec de bon
nombre de programmes, est sans conteste l'absence ou du moins la faiblesse des
évaluations. On consacre plus de temps et de ressources à la
formulation et à l'implantation au détriment de
l'évaluation. Combien sont- ils, les politiques, les programmes et
projets qui ont englouti beaucoup de ressources et qui n'ont jamais fait
l'objet d'évaluation. Qui plus est, certains de ces programmes sont
souvent reconduits avec les mêmes insuffisances. Alors qu'il aurait
suffit d' une évaluation pour tirer des leçons.
Une évaluation périodique du processus
de mise en oeuvre de la décentralisation du système sanitaire
aurait permis de se rendre vite compte de l'inadéquation de certaines
activités, du coût élevé de certaines
stratégies, des comportements souvent inacceptables de certains
partenaires, de la non application de certains textes et bien d'autres choses
encore. Cela fait plus de dix ans que le processus est en marche, pourtant, il
n' existe aucun rapport d'évaluation globale de l'implantation de cette
politique. D'évaluations, nous avons trouvé deux études
(Catrayé et al, 2000 ; Ministère de la santé, juin 1995 et
mai 2001) qui portent sur certaines composantes de cette politique. Des
études menées par d'autres structures portent des critiques sur
la politique de décentralisation du système de santé
(Bodart et al 2001 ; GTZ, 2000). Un responsable d'une agence participant
à la mise en oeuvre de cette politique justifiait
l'irrégularité des évaluations par un manque de moyens
financiers et surtout de volonté politique pour conclure en ces termes
« c'est vous qui connaissez l'importance de l'évaluation.
Est-ce que dans l'administration publique, cette question intéresse les
gens ; s'ils le font c'est pour justifier des dépenses.
Les
47
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
résultats ne sont pas du tout
utilisés. Ce que je sais, toutes les évaluations de programme qui
ont été faites, l'ont été parce que des bailleurs
l'ont voulu. C'est dommage, on reprend les programmes avec les mêmes
insuffisances. Que voulez vous. (Enq06). Il est urgent à notre sens
de procéder à une évaluation sérieuse de cette
politique afin de lui donner une orientation claire et précise à
même de lui permettre d'atteindre les résultats
escomptés.
5.1.5 La question des ressources humaines reste
posée
La crise du système de santé publique
renvoie en premier lieu au comportement non professionnel du personnel
médical, paramédical et administratif. C'est ce comportement
qu'il s'agit de redresser, en autonomisant les formations sanitaires, en
responsabilisant le personnel et en le motivant (J.F Médard, 2006). Dans
un contexte de décentralisation, il est impératif d'engager une
refonte dans la gestion des ressources humaines pour les rendre
performantes.
Selon l'OMS (Rapport 2006), la performance du
personnel se mesure à travers quatre indicateurs à savoir :
disponibilité, compétence, réactivité et
productivité. Peut- on dire dans l'état actuel de fonctionnement
des districts que le personnel qui sert dans ces structures fait preuve de
performance ? Que prévoit la politique de décentralisation dans
le sens de renforcer la performance du personnel.
En plus de leur insuffisance, le personnel de
santé se caractérise par une mauvaise répartition. Ainsi,
60, 06% des médecins, 62,06% des sages femmes se trouve dans les deux
grands centres urbains du pays (Annuaire des statistiques sanitaires 2005). La
question de la compétence pose fondamentalement la question de la
formation. Les ateliers, séminaires et autres sont-ils des cadres
efficaces de renforcement des capacités du personnel. Aussi, les
formations dispensées aux agents de santé ne répondent pas
à un besoin réel et ne s'adaptent pas aux tâches qu'ils
accomplissent. De même, respecter les patients et tenir compte de leurs
remarques ne semblent pas bien compris des agents de santé. La
décentralisation sanitaire risque de se trouver à la
croisée des chemins si elle ne prend pas en compte la question des
ressources humaines.
48
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
5.1.6 Décentralisation et équité
L'équité selon le petit Larousse
illustré 2006 se définit « vertu de celui qui
possède un sens naturel de la justice ou encore justice naturelle ou
moral considérée indépendamment du droit en vigueur
». Le concept d'équité se définit en termes de
justice mais en référence surtout à la distribution de
biens et de services entre individus et groupes d'individus. La philosophie qui
sous tend l'idée est de donner à chacun selon son besoin. Dit
autrement, l'équité doit amener à une distribution des
biens et des services de telle sorte que ceux qui ont le plus besoin y
accèdent facilement. Appliqué à la santé, le
concept a toujours été rattaché à la
réduction des inégalités. Ainsi, l'une des
définitions les plus souvent citées de l'iniquité en
santé se réfère à de différences de
santé considérées comme évitables et injustes
(Gwatkin, 2000). Parlant d'équité les pauvres sont ceux qui ont
le plus besoin de soins mais dans la pratique ce sont eux qui éprouvent
d'énormes difficultés financières à se faire
soigner.
C'est pourquoi, depuis plus d'une décennie, il
est revendiqué plus d'équité dans le domaine de la
santé. « La santé pour tous » au-delà
d'être un slogan reste de nos jours un principe fondateur de nombre de
politique de santé. L'application de ce principe se traduit par le
développement d'un certain nombre de stratégies : le partage des
couts, le ciblage, la décentralisation. La décentralisation du
système de santé du Burkina a-t-il favorisé
l'équité ? Fautes d'enquête de terrain, nous nous servirons
de données empiriques et la littérature disponible pour essayer
de discuter la question précédente. Notre ambition est moins de
faire une analyse de l'équité dans les politiques publiques de
santé comme on l'a bien fait Valéry Ridde (2005) que de rendre
compte de ce que les études précédentes mentionnent au
sujet de l'équité dans le contexte de décentralisation du
système de santé.
«Eu égard des études disponibles,
nous croyons que ce sont les questions d'administration et de gestion qui ont
pris le pas sur les préoccupations d'accès aux soins. Dit
autrement, l'aspect équitable de l'IB a été
négligé et les préoccupations premières des acteurs
ont été concentrées sur l'efficacité de
l'organisation à mettre en place » (Ridde, 2005) .Nous souscrivons
au constat de l'auteur, ce d'autant plus que la mise en oeuvre de l'IB et
l'implantation de décentralisation sont difficilement séparables.
La décentralisation dans la pratique est focalisée sur ce qu'on
appelle au niveau du ministère de la santé l'
opérationnalisation des districts qui se résume à
la
49
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
construction des infrastructures, l' équipement
des salles de soins, la mise en place des structures, la formation des acteurs.
Peu d'attention est accordée au fonctionnement des districts, comme il
suffit de mettre en place les structures pour que tout fonctionne.
L'organisation du pays en district sanitaire ne semble pas permettre de prendre
en compte les préoccupations des pauvres. Des mécanismes existent
dans les districts pour traiter de la situation des plus démunis ? Nous
affirmons que non car ni les données empiriques, ni les études
antérieures n'ont fait cas de l'existence de « règles
connues, claires et transparentes » dans un quelconque district pour
favoriser l'accès des pauvres aux services de santé. En effet, la
question de l'équité occupe une bonne place parmi les
recommandations de plusieurs études. (Ministère de la
santé juin 1995, 2001, ABSP 2000 ; Nitiéma, Ridde et al, 2003),
toute chose qui indique qu'en dépit des nombreuses réformes
assorties de bonnes intentions en faveur des pauvres, la santé continue
d'être un luxe pour une bonne partie des pauvres. Pour l'instant, la
décentralisation du système de santé comme
stratégie de réduction des iniquités ne semble pas
pertinente ; les efforts des districts et de leurs partenaires convergent plus
vers la réalisation d'infrastructures, l'achat de matériel, que
vers l'instauration d'un débat franc qui aurait permis de
débaucher sur des solutions à cette question. Le taux
d'utilisation des services de santé ne connaîtrait une
amélioration véritable que lorsque cette question aurait
trouvé une réponse satisfaisante. La décentralisation,
comme bien d'autres stratégies adoptées dans le secteur de la
santé ne pourront venir à bout de l'équité car
« il est extrêmement rare que l'on ait défini des objectifs
de santé en termes pertinents du point de vue du renforcement de
l'équité ou du recul de la pauvreté. Les objectifs
sanitaires sont presque toujours exprimés en moyenne pour l'ensemble de
la société (Gwatkin, 2000). Aussi, « les acteurs des
réformes sanitaires en Afrique, comme dans bien d'autres continents,
semblent plus préoccupés par la maximisation de leurs gains et de
la conversation de leurs pouvoirs que par l'amélioration des
systèmes de santé et la prise en charge des exclus permanents
». (Ridde, 2005).
5.1.8 La décentralisation, une question d'approche
au changement
« Le concept de changement est
généralement entendu et défini soit comme un processus,
soit comme un écart dans le contenu de ce qui est observé. Dans
le premier cas, le terme changement est utilisé pour désigner la
progression des évènements, le cheminement entre des
situations
50
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
différentes dans le temps. Dans le second,
il est utilisé afin de décrire le bilan des différences
observables empiriquement dans la forme, la qualité ou l'état des
situations elles-mêmes ». (Dufour Y ; Lamothe L, 1999). Les
politiques de santé conduisent généralement à des
changements dans l'organisation des différentes fonctions du
système de santé que sont l'administration
générale, le fonctionnement, la prestation des services et la
génération des ressources (OMS, 2000). Les résultats
mitigés de la décentralisation du système de santé
nous commandent à nous interroger sur la façon dont les
changements escomptés ont appréhendés et
suscités.
La littérature offre aux perspectives
d'analyses, quatre approches au changement dans les systèmes de
santé (Rouleau et Séguin 1995, cités par Doufour et
Lamothe, 1999). Ce sont l'approche classique, l'approche contingente,
l'approche du comportement organisationnel et l'approche politique. La
différence fondamentale entre ces différentes approches se
focalise sur les places qu'elles accordent aux structures, au processus, aux
mécanismes de gestion, à l'environnement et aux acteurs dans le
processus de changement ; ce qui fait dire à Dufour et Lamothe que
« l'approche classique et celle des contingences considèrent
l'organisation comme un système technique alors que l'approche politique
et celle du comportement la voient plutôt comme un système social
». En effet, les aspects techniques, la qualité du contenu et
la formulation, les démarches de mise en oeuvre du changement, la forme
organisationnelle, l'environnement restent les éléments qui
cristallisent les attentions lorsqu' on adopte l'approche classique et celle
des contingences. Ce sont donc un noyau d'experts qui conçoit le
changement et l'importe dans un milieu donné. Le changement dans cet
ordre n'est pas endogène ; il est exotique. Par contre les approches du
comportement organisationnel et celle politique prônent que les individus
doivent être mis à contribution dans la mise en oeuvre du
changement organisationnel car l'aboutissement d'une réforme passe par
une authentique adhésion des acteurs à l'objectif poursuivi un
engagement soutenu envers l'organisation. En effet, il pas utile de rappeler
qu'une organisation est une somme d'individus qui partagent des traits de
personnalités, des attitudes, des valeurs, des aspirations auxquels ils
sont sérieusement attachés. Or, ces caractéristiques ne
sont pas épargnées par le changement. C'est pourquoi, il est
fortement indispensable de réserver une place de choix aux individus, ce
qui permet sans aucun doute de prendre en compte leurs préoccupations et
d'agir en conséquence. Nous pensons que ces
51
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
caractéristiques ne sont pas sans
conséquence sur la motivation, la mobilisation et la coopération
des individus dans un projet de changement comme celui de la
décentralisation du système de santé.
Nos données empiriques nous laissent affirmer
que les approches de changement promues par la politique de
décentralisation du système de santé au Burkina n'ont pas
fait de places, aux préoccupations de certains acteurs pourtant
essentiels (le personnel médical et paramédical, les
communautés) dans la réussite de cette réforme. C'est une
entorse grave au processus en ce sens que sans une motivation, un engagement
sincère des médecins et des infirmiers, des communautés
à ce processus, on aurait beau mobiliser les ressources
financières que le projet n'atteindrait pas les résultats
escomptés. Il ne faut pas oublier que le changement est porté par
des individus, des acteurs qui ne peuvent être mobilisés que sur
la base de leurs intérêts. L'instabilité des
médecins, cette grosse épine qui entrave le bon fonctionnement
des districts, pourrait être évitée si et seulement si, on
avait mis pris sérieusement en compte les besoins du personnel en lieu
et place de ceux de la structure. « Nous pensons que le rôle des
acteurs est central dans la mise en oeuvre et l'appropriation d'un changement.
Il nous semble que cela soit d'autant plus le cas lorsque nous avons affaire
à une politique publique où des conflits liés aux valeurs
peuvent amener les acteurs à tenter de bloquer ou d'entraver les
réformes sanitaires » (Ridde, 2005). Ce faisant, il est important
de choisir une approche de changement qui accorde une importance aux acteurs
à travers une meilleure prise en compte de leurs préoccupations
et de leurs intérêts. Notre idée est faite que la politique
de décentralisation s'est plus focalisée sur les innovations,
oubliant qu'elles se matérialisent à travers des acteurs.
S'appuyer sur les approches politique et celle du comportement nous semble
indiqué et indispensable pour garantir une meilleure réussite au
processus de décentralisation sanitaire en cours depuis plus d'une
décennie.
5.1.9 Ce qui marche
Nonobstant les difficultés qui jalonnent le
processus de décentralisation, il convient de noter que la mise en
oeuvre de cette politique est d'un apport considérable au système
de santé si on s'en tient à la lutte contre la mortalité
maternelle, au renforcement des compétences des acteurs du
système de santé et à l'augmentation de la couverture
sanitaire.
52
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
En effet, la décentralisation a favorisé
la mise en place des hôpitaux, appelé centre médical avec
antenne chirurgicale dans beaucoup de localités du pays, ce qui permet
de prendre en charge le césariennes et bien d'autres pathologie
nécessitant une intervention chirurgicale. De nos jours le pays compte
plus de 40 hôpitaux de district qui sont fonctionnels même si tout
ne semble parfait. Quand on sait qu'avant l'avènement des districts,
bénéficier d'une intervention obligeait à des longs
déplacements, on comprend aisément que la décentralisation
contribue substantiellement à la lutte contre la mortalité
maternelle en disposant des plateaux techniques pour les besoins
obstétricaux dans les zones périphériques.
Sur le plan du renforcement des capacités, on
note avec la formation des médecins exerçant dans les districts
en chirurgie essentielle. Chaque année depuis 1993, au moins une
trentaine de médecin déjà en activité dans les
hôpitaux de district reçoivent pendant 45 jours et sous les
auspices de chirurgiens attitrés des cours théoriques assorties
de stage. Cette formation vient à point nommer considérant les
difficultés que rencontrent les pays en développement de disposer
de chirurgiens en nombre suffisants. Outre la formation en chirurgie la
décentralisation a introduit la formation des médecins en gestion
dans l'optique de leur permettre prendre charge convenablement les districts.
Il faut également relever le renforcement des capacités des
autres acteurs (personnel paramédical, membres des CoGes) disposé
sous forme d'atelier et de séminaire.
5.2 Recommandations
Nous formulons à présent quelques
recommandations, à l'endroit de tous les acteurs du système de
santé, dans l'optique de l'amélioration de la mise en oeuvre de
la politique de décentralisation du système de
santé.
> Instaurer un système d'évaluation
périodique du processus. En effet, l'importance de l'évaluation
pour une politique ou un programme est qu'elle offre la possibilité de
découvrir ce qui marche bien ou non, et ce qu'il faut améliorer.
C'est l'occasion de passer en revue aussi bien les objectifs fixés, les
stratégies définies que les ressources mobilisées afin de
juger de leur pertinence et de leur efficacité. Elle aidera à
tirer des enseignements sur le déroulement du processus. Une
évaluation fournira des
53
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
informations précieuses et capitales aux
décideurs, ce qui permettra d'orienter le
processus dans le sens d'une amélioration
réelle de la santé des populations.
> Prendre en compte les intérêts
matériels et stratégiques des deux acteurs clés du
processus de décentralisation du système de santé à
savoir le personnel de santé et les populations. Des solutions doivent
être trouvées afin de faciliter aux médecins
exerçant dans les districts de se spécialiser. On pourrait par
exemple les exempter des tests pour la spécialisation.
> La décentralisation du système de
santé ne sera efficace que si elle permet au plus grand nombre d'avoir
accès aux soins. Des solutions urgentes et durables doivent être
trouvées pour permettre aux plus démunis de se soigner. L'Etat
doit accompagner les districts dans l'élaboration et la mise en oeuvre
d'un système d'exonération pour les pauvres.
> Accorder aux districts l'exclusivité de
leurs dépenses et mettre en place un système d'audit
régulier. Cela permettra d'éviter de perdre du temps aussi bien
dans les commandes que dans les délais de livraisons. La méthode
de commandes groupées en vigueur actuellement au profit des districts ne
semble pas adéquate ; elle est coûteuse en temps et en
qualité. La preuve, le district de Kombissiri attend toujours des
mobylettes qu'il était sensé recevoir en fin 2005.
> Renforcer la CADSS. En tant que structure conseil
en matière de décentralisation, la CADSS se doit d'avoir les
moyens techniques, financiers et politiques pour fonctionner convenablement. En
lieu et place des fonctionnaires qu'on y affecte, la CADSS sera animée
par un noyau de cadres sélectionnés sur la base de
critères précis. Les compétences extérieures au
ministère de la santé devraient être autorisées
à participer à l'animation de la CADSS. Cette structure ne doit
pas compter seulement sur les subventions de l'Etat pour fonctionner mais elle
doit aller à la recherche de financements extérieurs à
travers des projets de recherche pertinents et d'un intérêt
populationnel et scientifique certains. Cette structure, combien important pour
le
54
Analyse de la politique de décentralisation du
système de santé du Burkina Faso
processus de décentralisation sanitaire cessera
d'être un service anonyme pour se constituer en un centre
d'expertise.
> En lieu et place des CoGes qui siègent au
niveau des CSPS et ne cessent de rencontrer de nombreuses difficultés,
nous proposons de réfléchir à une autre alternative ;
celle d'avoir un seul CoGes pour l'ensemble du réseau des CSPS du
district. Aussi, les maires des différentes communes y seront d'office
membres.
55
6. CONCLUSION
Cet essai d'analyse des politiques publiques
s'était donné pour but de comprendre et d'expliquer d'une part
les facteurs d'influence du processus de mise en oeuvre de la
décentralisation du système de santé du Burkina et de
juger de l'effectivité du fonctionnement des districts sanitaires comme
des entités décentralisées d'autre part. Pour ce faire,
nous sommes allés à la rencontre des acteurs du processus, munis
de deux approches théoriques : le modèle de Walt et Gilson (1994)
qui comprend quatre éléments fondamentaux à savoir le
contenu de la politique, les stratégies de mise en oeuvre, le contexte
et enfin les acteurs, nous a permis d'expliquer les facteurs d'influence de
l'implantation de la décentralisation. ; le cadre de Kochen et Deutsch
(1980) composé de huit variables (pluralité, dispersion,
spécialisation, sensibilité, aplatissement,
délégation, participation courante, participation reconfigurante)
a été utilisé pour estimer le niveau de
décentralisation des districts sanitaires.
L'application du modèle de Walt et Gilson nous
a offert l'occasion de comprendre que certains contenus de cette réforme
ne rencontraient pas l'assentiment des acteurs clés. En effet, les
médecins ne semblent pas satisfaits de ce que la décentralisation
leur réserve. C'est ainsi qu'ils mettent tout en oeuvre en dépit
de la formation complémentaire qu'ils reçoivent pour travailler
hors des districts. Aussi, le paiement direct des actes est de loin ce que les
populations pouvaient attendre de la décentralisation.
Il nous a également été
donné de constater que les stratégies utilisées dans le
cadre de la mise en oeuvre de la décentralisation n'avaient pas fait
l'objet d'expérimentation à travers un projet pilote. Or, il est
indéniable qu'un projet pilote offre une opportunité aux acteurs
d'une intervention de tester de la pertinence, de l'efficacité et de
l'efficience des stratégies d'intervention. C'est aussi le meilleur
moment pour peaufiner et ajuster certains mécanismes, comprendre les
ambitions, les aspirations et les attentes des acteurs afin d'en tenir compte
lors de la phase d'extrapolation du projet. La décentralisation du
système de santé n'a pas obéit à cette logique. Les
conséquences de cette démarche d'intervention restent
l'inadéquation de certaines stratégies, le coût exorbitant
de certains choix, le difficile fonctionnement de certaines structures
d'accompagnement des districts, une faible utilisation des services de
santé par les communautés.
56
Aussi, la décentralisation du système de
santé intervient dans un contexte politique dominé par la
suprématie écrasante du parti du pouvoir qui se traduit par une
monopolisation de la gestion des affaires publiques ; ce qui écarte du
coup les compétences des autres formations politiques qui pouvaient
être mis à contribution dans la mise en oeuvre de ce processus. En
sus, le niveau de pauvreté élevé des ménages
annihile ou amenuise les capacités contributives des populations au
financement de la santé. La faible scolarisation qui caractérise
le pays se répercute au niveau de la gestion des CoGes qui se composent
pour la majorité d'illettrés.
En somme, le modèle de Walt et Gilson s'adapte
à l'analyse de la mise en oeuvre des politiques publiques. Toutefois,
nous estimons qu'il ne prend pas en compte l'ensemble des facteurs qui
caractérisent l'implantation des politiques publiques dans un contexte
africain. En effet, le caractère exogène des politiques
publiques, le poids considérable des opérateurs5
politiques, l'imprécision des objectifs des politiques sont autant de
facteurs qui pourraient enrichir le modèle de Walt et
Gilson.
L'expérimentation du cadre de Kochen et Deutsch
relatif au niveau de décentralisation d'un service nous autorise
à corroborer la pertinence de modèle. L'application de ce
modèle au cas d'un district dans le contexte du Burkina a
révélé que le fonctionnement des districts en tant que
système décentralisé contient de nombreuses insuffisances
qui émoussent l'autonomie de ces structures de soins. En effet, la
décentralisation n'a pas permis de résoudre le problème
des ressources humaines, d'accorder suffisamment de pouvoir aux districts dans
la gestion financière ainsi que l'administration du personnel. Nous
estimons que décentraliser un service, c'est aussi réduire les
longues procédures de dépenses, tout élément qui
permet de gagner aussi bien en tant qu'en qualité. En dépit de la
décentralisation, on constate que les procédures de
dépenses des services de santé décentralisés
continuent à souffrir du poids des mécanismes de
décaissement qui impliquent une longue liste d'acteurs qui ne
relèvent pas de la santé. Aussi, les services de santé
rentent toujours inaccessibles à ceux qui en n'ont le plus besoins,
c'est-à-dire les plus démunis.
5 Ce sont les organisations onusiennes et certaines ONG
internationales que nous désignons sous ce vocable
57
Il est admis que pour qu'un système fonctionne
convenablement, en plus du fait que les rôles et responsabilités
des acteurs doivent être clairement définis, il est indispensable
que des relations de confiance s'installent entre les parties prenantes du
système car « un système de santé fondé sur
les relations de confiance entre les acteurs impliqués est en mesure
d'apporter une contribution importante à la construction des valeurs
sociales » .(Ridde, 2005) Dans le cas de la décentralisation du
système de santé du Burkina, on note un manque de confiance entre
les acteurs tant de l'intérieur que de l'extérieur. On observe un
manque de confiance des populations à l'offre de soins qui se
caractérise par une faible utilisation des services de santé, un
manque de confiance entre le niveau central et la périphérie qui
s'exprime dans la lourdeur des procédures et la pléthore de
commissions, un manque de confiance des partenaires financiers à l'Etat
qui se constate dans les mécanismes de décaissement , de
dépenses et de contrôle qu'imposent ces partenaires, enfin un
manque de confiance de certains ministères (MATD, MFB)à celui de
la santé qui se manifeste par la présence de leurs agents dans
les commissions d'attribution des marchés des districts sanitaires.
Cette confiance pourrait être générée par un
débat sincère, franc et direct avec tous les acteurs.
Tout système, toute organisation tire son
existence et alimente son fonctionnement à partir d'une gamme de valeurs
; et pour que tout se déroule normalement, l'ensemble des acteurs doit
se reconnaître en ces valeurs ; nous pensons que tel ne semble pas le cas
dans le processus de décentralisation du système. La
communalisation intégrale peut être une occasion pour ajuster le
processus et établir la confiance minimum indispensable entre les
acteurs.
L' analyse de la décentralisation
procède de l'analyse des politiques publiques, ce faisant nous aurons pu
l'aborder sous l'angle de l'identification du problème et son
inscription sur l'agenda politique(genèse), à travers le
processus de sa formulation et son adoption ou par les mécanismes du
suivi -évaluation. En choisissant de l'analyser à travers sa mise
en oeuvre, nous pensions que le processus étant en cours depuis plus
d'une dizaine d'année, notre étude viendra en appoint dans
l'identification des obstacles au déroulement du processus et
éventuellement pourrait aboutir à des propositions de solutions
pour une amélioration de la performance du système de
santé. Il est souhaitable que d'autres études abordent la
décentralisation du système de santé du
Burkina
58
Faso sous d'autres angles avec divers cadres
conceptuels; ce qui permettra de disposer à la longue
d'éléments d'appréciation sur cette politique dans sa
globalité.
I
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