Référente
mémoire; Marie-Hélène Chassaing
Mémoire rendu le 13.05.2019
Marie Jutteau
Promotion
2016-2019
|
IFSI des Diaconesses de Reuilly
|
DU PATIENT OBJET AU PATIENT SUJET
UE 5.6 S6 - Mémoire de fin d'études
Analyse de la qualité et traitement des données
scientifiques et professionnelles
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« Il s'agit d'un travail personnel et il ne peut faire
l'objet d'une publication en tout ou partie sans l'accord de son auteur
».
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REMERCIEMENTS
Pour commencer, je veux adresser mes remerciements à ma
référente de mémoire, Madame Marie-Hélène
Chassaing, pour son aide, sa disponibilité, son écoute et ses
judicieux conseils pour la réalisation de mon travail de fin
d'étude.
Je tiens aussi à remercier, Madame Véronique
Serizay, ma formatrice pédagogique qui m'a accompagnée pendant
mes 3 années de formation dans l'élaboration de mon projet
professionnel.
Je souhaite remercier les quatre infirmiers interviewés
pour leur disponibilité, leur patience et leur partage qui ont permis
l'élaboration de mes entretiens de recherche.
Enfin, j'adresse mes plus sincères remerciements
à ma famille : mes parents, mes frères et tous mes proches et
amis qui m'ont soutenu et encouragé tout au long de la
réalisation de ce mémoire.
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TABLE DES MATIERES
Introductionp.4
I. Situations d'appel, analyse et
problématiquep.5
I.1. Première situation d'appelp.5
I.2 Seconde situation d'appelp.6 I.3. Analyse et
questionnementp.7
I.3.1 Intérêt professionnel p.7
I.3.2 Analyse et Questionnement de la situation n°1p.7 I.3.3
Analyse et Questionnement de la situation n°2p.8 I.3. Question de
départp.10
II. Cadre de référencesp.11
II.1. Le corpsp.11 II.1.1. L'Histoire du
corpsp.11
II.1.2. La place du corps dans la médecine
p.13 II.1.3 Du corps objet au corps humainp.15
II.2. L'autonomiep.17 II.2.1.
Définition de l'autonomiep.17 II.2.2. L'autonomie dans le soinp.19
II.2.3. Législation du patient autonomep.21
II.3. Le consentementp.23
II.3.1. L'Histoire du consentement et code de Nuremberg p.23
II.3.2. Consentement du patient et devoir infirmier p.26
II.3.3. Législation du consentement p.28
III. Enquête exploratoirep.31 III.1.
Présentation de l'enquêtep.31 III.1.1 Choix et
formulationp.31 III.1.2 Méthodologiep.32
III.1.3. Modalité de réalisation p.33 III.1.4.
Résultats butsp.34 III.2. Analyse de
l'enquêtep.38 III.2.1. Un patient humanisé par la
considération de son
consentement grâce à la législationp.38
III.2.2. Un patient humanisé par le respect de sa dignité
grâce à la pratique soignantep.41 III.2.3. Un
patient humanisé car considérép.45
Conclusionp.48
Bibliographiep.50 Annexesp.56
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Introduction
Si le corps du patient est le support maître de la
pratique infirmière, il reste étudié et enseigné de
manière très technique et protocolisée. Les connaissances
théoriques du corps humain depuis les expérimentations
d'André Vésale aurait conduit à une objectification du
patient en étudiant un corps morcelé et organique. Ce corps
anatomisé conduit à nier l'affect et le vécu du malade, il
deviendrait donc un objet subissant des traitements et sur lequel
l'étudiant parferait son apprentissage.
Au cours de mes stages, lors de mes soins, cet accès au
corps m'a questionné sur la place du patient dans ma pratique et la
façon dont nous pouvons l'humaniser. C'est la raison pour laquelle j'ai
élargi mon interrogation sur le rôle du consentement, faisant du
patient un sujet capable de décider ce qui est bon pour lui ou non.
Pour ce faire, j'ai étudié deux situations
rencontrées en stage et me suis interrogée sur ma pratique afin
d'élaborer une hypothèse et une problématique de
départ. Par la suite, j'ai complété cette
problématique par un cadre de références dans lequel
j'apporte des savoirs théoriques sur les notions principales introduites
par mon sujet. Ensuite, j'ai réalisé une enquête
exploratoire pour comparer ces savoirs théoriques à la pratique
soignante sur le terrain. Puis, j'ai analysé ces données afin de
vérifier mon hypothèse et donc recueillir des éventuelles
réponses à ma problématique initiale. Enfin, j'ai
synthétisé mon travail afin d'introduire une question de
recherche dans le but d'élargir et approfondir ma réflexion
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I. Situations d'appel, analyse et
problématique
Deux situations d'appel se complètent. La
première s'est déroulée en stage en service psychiatrique
au deuxième semestre de ma formation, et la deuxième au cours
d'un stage en hospitalisation à domicile au quatrième
semestre.
I.1. Première situation d'appel
La situation se déroule le 7 juin 2017 en service de
psychiatrie générale adulte. Je dois effectuer un bilan
biologique à un patient de 45 ans hospitalisé pour un sevrage de
multi-addictions. Le bilan sanguin est un dépistage VIH, Hépatite
B, Hépatite C, Syphilis. L'infirmier me demande si je souhaite
être accompagnée et j'acquiesce car je n'avais jamais
réalisé de bilan dans ces conditions (ceux que j'avais
réalisé précédemment ne suivaient pas le même
protocole puisqu'il s'agissait d'ionogramme).
Après avoir fait l'inventaire du matériel dont
j'ai besoin, l'infirmier m'informe que le recueil du consentement est
primordial avant d'effectuer un dépistage.
Je toque à la porte, j'entre avec l'autorisation du
patient, je le salue et me présente. A ce moment, je suis
focalisée sur la manière dont je vais obtenir son consentement.
En effet, les consentements que je recueillais d'habitude pour les bilans
sanguins consistaient seulement à s'assurer verbalement que le patient
comprenait et acceptait l'acte de soin. Or, ici, le consentement devait
être mis à l'écrit, ce que j'ignorais jusqu'à ce que
l'infirmier me l'apprenne (devant le patient). J'explique alors que, même
s'il a déjà donné son consentement la veille, nous devons
le recueillir de nouveau, car nous sommes les soignants intervenants. Alors,
l'infirmier s'adresse à moi pour m'expliquer, face au patient, que pour
un dépistage, il faut un accord écrit et une signature. Il lui
tend donc la feuille et Monsieur L signe.
Après avoir préparé tout mon
matériel et mon environnement de travail, j'enfile mes gants et je me
tiens prête à ponctionner. A cet instant, l'infirmier m'interrompt
pour me signaler que j'oublie quelque chose de primordial :
l'identitovigilance. En effet, j'étais tellement concentrée sur
le consentement et le soin que j'allais effectuer pour la première fois
que j'en ai oublié la première étape consistant à
demander le nom, le prénom et la date de naissance au patient. Je me
corrige. Après ces quelques erreurs très vite reprises par
l'infirmier, je me lave les mains et j'enfile de nouveaux gants. L'infirmier
commente à nouveau mes gestes, ce qui semble
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inquiéter Monsieur L. Je demande au patient comment il
va et celui-ci me répond qu'il ira mieux une fois l'intervention
finie.
Juste avant de ponctionner, je demande à Monsieur L
s'il veut que je le prévienne quand je pique, ce à quoi
l'infirmier me répond « oui toujours », mais monsieur L
demande à ne pas être prévenu.
Une fois la ponction terminée, je discute avec le
patient, qui me remercie car il n'a pas eu mal. L'infirmier me dit alors dans
la chambre que ma technique est bonne malgré quelques erreurs.
Je remercie Monsieur L de sa patience compte tenu du temps que
nous avons dû prendre pour l'apprentissage de ce soin. Je lui explique
comment se dérouleront l'attente puis la réception des
résultats, puis je lui demande s'il a des questions, ce à quoi il
me répond non. A la fin, l'infirmier me fait un rapide retour sur
l'intervention et souligne l'importance de l'identitovigilance en m'expliquant
les conséquences possibles de mes erreurs.
I.2 La seconde situation d'appel
Nous sommes le 27 mars 2018, je suis en stage en
hospitalisation à domicile, il est 8h40 et mon infirmière tutrice
me fait les transmissions dans la voiture à propos de la prochaine
patiente.
Mme A est une femme de 37 ans qui s'est faite opérer
pour une pose de prothèse de genou suite à un accident sur son
lieu de travail en tant qu'aide-soignante. Elle est en arrêt maladie
depuis 4 ans. Un pansement simple post opératoire est à faire
tous les 2 jours ainsi qu'une injection d'anticoagulant tous les jours. Le
drain a été retiré à l'hôpital.
C'est la première fois que je vais effectuer ce
pansement mais je ne suis pas particulièrement inquiète car j'ai
déjà pu observer ce soin en stage. En arrivant chez la patiente,
nous nous présentons et nous lui expliquons que nous allons nous occuper
de son pansement, des surveillances des constantes et de ses
médicaments.
Je lui demande son accord pour effectuer le soin, sachant que
je suis stagiaire, et je lui explique cette fois ci que c'est la
première fois que je vais faire ce pansement.
Elle me rassure en disant que le pansement n'est pas
compliqué, qu'elle me guidera. Elle ajoute que, selon elle, il est
primordial de faire travailler les étudiants lors de leurs stages, que
c'est la seule façon d'apprendre. Je lui explique que c'est parfois
compliqué avec certains patients car certains soins sont plus complexes,
plus douloureux ou que ces patients ont pu vivre une
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mauvaise expérience lors de ce soin ou avec un
étudiant. Nous sommes d'accord sur le fait que son statut
d'aide-soignante doit sûrement jouer dans cette confiance accordée
à l'étudiant dans les soins.
Cet échange me met en confiance, et j'effectue le
pansement très sereinement. Je fais ensuite l'injection et je prends ses
constantes que je recense sur le dossier.
Une fois mon matériel rangé, la patiente
s'adresse à moi, me disant : « Je suis finalement votre patient
cobaye ». Je ris, la remercie de sa patience et lui souhaite une bonne
journée.
I.3. Analyse et questionnement
I.3.1 Intérêt professionnel
Ces deux situations m'ont permis de m'interroger sur le
rôle qu'occupe le consentement du patient au sein des pratiques des
soignants.
La première m'a permis de m'interroger sur la place du
corps et du patient dans mon apprentissage, et la seconde m'a amenée
à introduire la notion de consentement. Ces questionnements, qui m'ont
interpellée en tant qu'étudiante infirmière, peuvent
s'étendre plus largement aux soignants titulaires : de fait, la question
de la place du consentement et de la considération du corps dans le soin
est primordiale pour la prise en charge globale d'un patient.
I.3.2. Analyse et questionnement de la situation
n°1
Dans la première situation, je prenais en soin le
patient tout en étant moi-même prise en charge par l'infirmier.
L'encadrement de ce dernier était nécessaire étant
donné que je découvrais ce soin. Ainsi, dans cette situation, le
patient est devenu spectateur de mon apprentissage et donc « objet »
de cet apprentissage. En dépit du fait que son consentement ait
été méticuleusement recueilli, Monsieur L montrait des
signes d'inquiétude concernant le soin que j'effectuais car ma technique
était encore en cours d'amélioration.
C'est pourquoi j'ai guidé mon questionnement sur la
place du patient dans l'apprentissage d'un soin infirmier, notamment autour du
concept de « patient objet », et plus précisément ce
qu'on appelle « cobaye humain » ou « patient cobaye ».
Il convient dans un premier temps de distinguer les deux types
de soins pratiqués auprès de ce patient : d'une part les soins
relationnels et d'autre part les soins techniques, chacun devant
nécessairement faire l'objet d'un apprentissage.
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Concernant le relationnel, nous le travaillons tous depuis
l'enfance au sein de notre environnement social, même si nous
l'appréhendons chacun différemment selon nos
personnalités. Cependant, le relationnel dans les hôpitaux ou
autres structures de soins diffère des interactions sociales
habituelles.
Les soins techniques sont, pour ma part, entièrement
nouveaux, et requièrent donc un entraînement. Je suis d'abord
passée par l'observation, puis par la verbalisation avec mon tuteur. Il
m'a ensuite proposé de m'entraîner sur un patient. C'est à
partir de ce moment que l'apprentissage du soin m'a perturbé en raison
du rôle imposé au patient, qui devint « objet d'exercice ou
d'apprentissage ».
On peut également retrouver ce concept (que je
détaillerai par la suite) dans ma seconde situation en stage en
hospitalisation à domicile, décrite ci-dessous.
I.3.3. Analyse et questionnement de la situation
n°2
Dans cette situation, la notion de « patient cobaye
» est explicitement exprimée par la patiente. Cependant, le
consentement ne fut pas recueilli de la même manière que pour la
situation précédente. En effet, dans la première
situation, on peut considérer que le consentement n'a pas
été correctement recueilli car je n'ai pas dit explicitement au
patient que c'était la première fois que j'effectuais le soin. Il
ne disposait donc pas de toutes les informations permettant de donner un
consentement « éclairé »1. En revanche, lors
de mon stage en hospitalisation à domicile, j'ai été
particulièrement vigilante sur la transparence des informations que je
fournissais pour recueillir le consentement. Malgré cela, on a pu
observer que la notion de cobaye était toujours présente.
Selon le Petit Robert2, après la
définition désignant le cobaye comme un mammifère rongeur,
le cobaye est défini tel « un être utilisé comme
un sujet d'expérimentation ». Ce terme est souvent
utilisé dans le jargon médical pour désigner un sujet
(volontaire ou non) d'expérience.
Il s'agira donc de déterminer les causes pouvant faire
d'un patient un sujet d'expérimentation, d'exercice ou
d'apprentissage.
1 Selon le Code de la Santé Publique, le
consentement est éclairé après avoir reçu de la
part d'un soignant une information claire, compréhensible,
adaptée à ses capacités de comprendre la nature des actes
(article R. 412735).
2 Le petit Robert par Paul ROBERT, Dictionnaire de la
langue française, mars 1984.
Tout d'abord, le patient devient cobaye1 lorsque
les effets produits par les traitements ou les soins ne peuvent être
prédis avec la même certitude que ceux habituellement
administrés.
Un patient devient cobaye également lorsqu'il fait
l'objet d'un traitement ou d'un soin inconnu du soignant. Cette situation
implique donc deux rôles : le soignant, une personne se trouvant dans une
situation de découverte d'un soin (que ce soit pour la recherche ou
l'apprentissage), et le patient, qui subit la situation d'objet d'apprentissage
du soin par le soignant.
Ainsi, il est nécessaire de distinguer le soin lambda,
dont les effets sont prévisibles avec une marge d'erreur faible
grâce à l'expérience, du soin effectué sur un
patient cobaye où l'expérience manque et où certains
effets sont inconnus et/ou imprévisibles. La qualité de cobaye
réside donc dans l'exposition à un risque plus
élevé d'incertitude quant aux effets possibles du traitement
réalisé sur la personne.
Pour pallier le défaut d'expérience des
étudiants ou des soignants, il est nécessaire d'en passer par des
patients cobayes, qui sont les seuls supports fiables dans une démarche
scientifique pour expérimenter, adopter puis pratiquer les soins et
traitements sur l'Homme. De fait, cette pratique a pour objectif
d'améliorer les traitements et de réduire la marge d'erreur en
favorisant la prévention des effets secondaires et indésirables.
Les expériences sur les animaux sont utiles, mais insuffisantes pour
transférer un soin ou traitement directement sur l'humain.
Les patients cobayes sont, en temps normal2,
volontaires. Or, nous observons dans la pratique que certains patients sont
« instrumentalisés » contre leur gré, notamment lors de
l'apprentissage d'un soin à un soignant. Cette déviance
s'explique par une faille dans le recueil du consentement ou dans la
transmission d'informations auprès du patient.
Page 9 sur 84
1 CHAMAYOU, G 2014, pp.
287-310. Alinéa 40.
2 CHAMAYOU, G 2014, pp.
287-310. Alinéa 6
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I.3. Question de départ
Mes situations d'appel m'ont permis de m'interroger sur la
place du corps du patient et de son consentement dans l'apprentissage ou
l'exercice de la médecine. J'ai donc émis l'hypothèse
selon laquelle dans le cadre d'un soin, le patient cesse d'être
objectivé dès lors que le consentement recueilli par le soignant
est libre et éclairé.
Ainsi la question que j'étudierai est la suivante : en
quoi le recueil du consentement permet de faire du patient un sujet et non un
objet ?
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II. Cadre de références
II.1. Le corps
Selon le Larousse, le corps se définit par la partie
matérielle d'un être animé considérée en
particulier du point de vue de son anatomie et de son aspect extérieur.
Cette définition reste tout de même discutée à
travers les siècles notamment dans le domaine de la médecine.
II.1.1. L'Histoire du corps
L'Histoire du corps débute dès la
Préhistoire. En effet, que ça soit par les rites
funéraires paléolithiques, les débats de la dissociation
de l'âme et du corps de l'Antiquité ou l'apparition des
différents types de corps au Moyen-Age, l'homme s'est toujours
questionné sur la place physique et spirituelle qu'il a dans son
existence. Plusieurs philosophes appartenant à différents
mouvements ont développé leur questionnement selon leur courant
de pensée. Chez Platon puis chez Aristote, nous retrouvons la
confrontation du corps et de l'âme, ces deux entités qu'ils
dissocient par la matérialité et l'immatérialité.
Dans l'Antiquité, alors que les grecs font du corps beau et sain un
objet de culte pour ressembler aux dieux, les romains, eux, donnent naissance
au concept de « personne » et « individu » grâce
à Marc-Aurèle, philosophe stoïcien.1
Au Moyen-Age puis à la Renaissance, la double vision du
corps permet de faire émerger différents courants de
pensée, dont le cartésianisme, qui remanie l'approche dualiste
antique par René Descartes en 1641 dans ses Méditations
métaphysiques, et plus tard le rationalisme, illustré par
Emmanuel Kant dans la notion de dignité du corps. A la fin du
XVIIème siècle, le cartésianisme se confronte au
jansénisme : pourtant, un point commun persiste, celui du rejet du
corps.2
La réflexion de René Descartes marque une
rupture avec le monde antique car pour la première fois, l'Homme devient
sujet, vérité et certitude contrairement à la nature qui
devient objet. Ainsi, il différencie des statuts du corps : le corps
machine, le corps cadavre, le corps représenté ou encore le corps
objet. Cette méthode provient de ce que Descartes considère comme
la science, c'est-à-dire la médecine associée à la
morale et la mécanique. Son approche marque l'histoire de la
médecine car il introduit l'idée selon laquelle l'âme se
localiserait dans l'épiphyse et donnerait au corps sa cohérence
faisant de lui un individu. Il considère donc que
1 Braunstein, F et Pépin, J. 1999, p.
17-86. Alinéa 8
2 Braunstein F et Pépin J. 1999, p. 87-129.
Alinéa 4.
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même si un corps humain est amputé, l'individu
reste un, car il a une âme. Ce discernement le conduit à se
questionner sur la place du corps en tant qu'état d'âme ou comme
un objet de science et d'étude.
Au XIXème siècle, l'Homme devient sujet
pensant, maître de ses actes, de ses idées, en quête
d'identité1, un individu produit par son histoire.
L'effervescence des découvertes techniques et scientifiques conduisent
à l'apparition des sciences humaines et vont rompre avec les anciennes
philosophies. Ainsi la phénoménologie distinguera le corps objet
étudié par la science, du corps sujet et du corps propre
appelé la chair2.
L'apparition du stéthoscope et des rayons X ont permis
d'associer les sciences humaines aux sciences exactes. En effet, à
partir de ce moment la distinction du corps intérieur et
extérieur se fait sans ouvrir le corps malade3.
En 1865, Claude Bernard, médecin et physiologiste, pose
les premières bases d'une réflexion sur la
propriété du corps humain et pose la question des rapports entre
les sciences politiques et le corps humain. Ainsi, les expérimentations
sur les corps morts vont être légitimées puisqu'elles
poursuivraient un but scientifique.
Avant 1804, le Code Civil ne s'intéressait pas à
l'appartenance du corps pour soi ou autrui et avait une conception
désincarnée de la personne, mais les idées ont
évolué depuis. En effet, depuis la loi du 29 juillet 1994
relative au corps humain, un chapitre relatif au respect du corps a
été intégré dans le Code Civil.
Le questionnement de la place du corps comme objet ou sujet
dans la loi donne la possibilité d'introduire les notions de droit de
propriété ou de droit de personnalité. Le droit de
propriété légitime le droit de disposition de son propre
corps (non-patrimonialité) et permet de distinguer le corps de la chose.
Le droit de propriété est complété par la
reconnaissance d'un droit de l'individu et repose sur la liberté qu'un
sujet exerce sur son intégrité. Ce droit permet de se
protéger contre tout acte extérieur menaçant son
intégrité et ne porte pas seulement sur
1 Braunstein F., Pépin J, 1999, p. 131-177.
Alinéa 2.
2 « La chair n'est pas matière, n'est pas esprit,
n'est pas substance. Il faudrait, pour la désigner, le vieux terme
d'«élément» au sens où l'on employait pour
parler de l'eau, de l'air, de la terre et du feu, c'est-à-dire au sens
général... » (M. Merleau-Ponty, Le visible et
l'invisible, op. cit., p. 184).]
3 COURTINE, J. 2015, p.15-26
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« l'enveloppe corporelle » mais sur le respect que
tout tiers doit montrer. Ainsi, le Code Civil introduit non pas un droit sur le
corps mais un droit au respect du corps.
Le Code Civil précise par l'article 16 à
l'alinéa 2 et l'alinéa 3 que le corps est inviolable et ne fait
pas l'objet de patrimonialité. Ainsi comme l'explique Astrid Marais,
1« Le principe d'inviolabilité du corps humain
protège la personne contre les atteintes matérielles
portées à son corps par autrui. Les principes de non
patrimonialité et d'indisponibilité, quant à eux,
encadrent les actes juridiques ayant pour l'objet le corps humain ».
D'un point de vue juridique, pour qu'un tiers puisse valablement porter
atteinte au corps par un acte matériel, il doit alors remplir deux
conditions : une finalité légitime et un recueil du consentement
de la personne.
Ainsi la personne est indissociable du corps humain, le corps
est le substratum2 de la personne ce qui explique la protection
légale du corps. C'est pourquoi il est important pour le soignant
d'identifier le type de corps auquel il est confronté : le corps
souffrant, le corps silencieux, le corps malade ou dénudé.
II.1.2. La place du corps dans la médecine
Même si le corps connaît une place
privilégiée dans la médecine, un tournant s'opère
au cours du XIXème siècle grâce aux avancées
scientifiques, techniques et sociologiques. En effet, les scientifiques
distinguent la santé de la maladie, le corps normal de l'anormal, la vie
et la mort, dans une société qui se médicalise de plus en
plus.
Il reste tout de même important de noter que la
Renaissance marque une époque conséquente dans l'avancée
de la médecine notamment grâce à l'évolution des
études expérimentales sur le corps. L'observation et la
dissection permettent les premiers enseignements de l'anatomie grâce au
célèbre médecin belge André Vésale
(1514-1564). Au XVIIème siècle l'apparition des études
microscopiques permet la découverte des différentes
systèmes (sanguin, lymphatique et pulmonaire).
Ces expérimentations sur le corps humain ont permis ces
avancées : le corps est alors devenu l'objet privilégié
des scientifiques. Ces études ont fait du corps une matière
savante sur laquelle les médecins ne voulaient avoir aucun doute. Le
discours médical dissocie le corps sain du
1 MARAIS, A. 2018. P.163
2 Substratum : le support de la personne.
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corps malade qui fait de la personne une simple structure
modélisable.1 Le XXème siècle tente de trouver
un équilibre entre cette dépossession et réappropriation
du corps. La médecine a réduit le patient à son
corps-objet en oubliant qu'il pouvait être corps-sujet. Elle a alors
limité la maladie à une altération des fonctions
biologiques plutôt que l'expérience émotionnelle et
personnelle du malade. En oubliant le ressenti du malade, la médecine se
centre de plus en plus sur les signes, symptômes et état clinique
du patient afin d'établir un diagnostic sans considérer le
vécu, le retentissement et l'expérience du malade.
Ce processus d'observation des symptômes et des effets
cliniques d'une pathologie se retrouve dans la démarche
expérimentale des médecins SS utilisée dans les camps de
concentration lors de la Seconde Guerre Mondiale sur les populations
déportées. Les nazis avaient pour objectif de soigner le peuple
allemand des races dites métissées considérées
comme des parasites. Les nazis estimaient que le sacrifice des « faibles
et indésirables » permettait la survie de la race allemande. De
cette manière, envieux des avancées médicales et
technologiques de l'Europe à cette époque, les médecins SS
dirigèrent des expérimentations dans des conditions cruelles et
barbares mutilant et tuant des cobayes humains avec des apports
scientifiques discutables. Les différentes expériences
étaient effectuées sur les corps vivants afin de réaliser
des recherches sur la gémellité, sur la stérilisation des
hommes et des femmes, sur les brûlures, sur les maladies parasitaires,
comme la malaria, ou encore sur l'absorption d'eau de mer associée
à l'hypothermie2.
Le 20 novembre 1945 débutera le Procès de
Nuremberg et permettra la mise en place du Procès des médecins
accusant les médecins et fonctionnaires nazis de crime contre
l'humanité et crime de guerre. Ce jugement donnera naissance au Code de
Nuremberg3 : une liste de dix critères indiquant ce qui est
considéré comme « acceptable » dans
l'expérimentation sur le corps humain. Ces dix critères
reprennent des éléments fondamentaux qui étaient
déjà connus au début du XXème siècle mais
ils permettent l'élaboration du premier texte législatif
universel à ce sujet. Le premier article rappelle la
nécessité exclusive du consentement, point de départ du
droit de possession et de respect de son corps.
1 MARZANO, Michela. 2002, pp. 47-81.
2 CYMES, M.2016,p.91-98,p.149-164, p.191-192.
3 Cf Annexes I
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En juillet 1994, la France se dote de nouvelles lois à
propos du droit de disposer de son corps : la loi relative au respect du corps
humain introduisant l'obligation du recueil du consentement de la personne,
préalablement à toute intervention thérapeutique. En 1995
est alors adoptée la charte du patient hospitalisé
précisant que le patient n'est pas seulement un malade mais une personne
avec des droits et des devoirs.
Le 4 mars 2002 est promulguée la loi relative aux
droits des malades et à la qualité du système de
santé aussi appelée loi Kouchner. Cette loi introduit la notion
de démocratie sanitaire qui a pour objectif de donner la parole aux
usagers et de permettre aux citoyens d'être informés sur la
politique de santé et d'exprimer leurs besoins et leurs attentes. Le
patient devient alors acteur et il est donc nécessaire de l'informer, de
recueillir son consentement et considérer sa participation active
à son traitement. Cette loi repose sur une stratégie de soins ou
de prévention en adéquation avec le respect de la personne, le
respect de sa dignité et de son autonomie, fondement de la prise de
décision.
Cette évolution de la considération du corps
dans la société et dans la médecine nous conduit à
nous questionner sur la manière dont il est humanisé dans les
soins et la place qu'il occupe pour les soignants.
II.1.3 Du corps objet au corps humain
Comme vu précédemment, la médecine s'est
fondée sur une perception fragmentée du corps. Cette approche a
été remise en cause par les médecins, les soignants et les
usagers, car ils considéraient qu'elle ne prenait pas suffisamment en
compte le sujet.
A cause de la croissance de la spécialisation en
médecine, les patients sont confiés aux spécialistes selon
leur atteinte organique et une médecine sur la concurrence se
développe. De plus, le patient subit le jargon médical, la
complexité des actes médicaux et le pouvoir de décision du
spécialiste en question. Ce modèle dit « paternaliste »
repose sur l'idée selon laquelle le médecin se voit comme gardien
de l'intérêt du patient en prenant des décisions pour lui
en respectant seulement un principe de bienfaisance. Le malade est alors
réduit au statut d'enfant, il est maintenu dans l'ignorance et s'en
remet à la décision médicale qui agira pour son bien,
ainsi ce qui justifie l'acte n'est pas le consentement mais la finalité
thérapeutique. Lorsque le patient consulte, il subit un interrogatoire
puis des examens en vu d'un diagnostic. En plus de devoir supporter cette
situation, il souffre de l'aspect physiologique et psychologique
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de sa maladie. Il se retrouve dans une situation où
l'appel au soulagement le conduit à accepter les soins
décidés par les soignants en faisant confiance à leurs
compétences.
Le médecin apprend à aborder le sujet par son
corps, ses plaies et ses dysfonctionnements en les observant, les
écoutant ou les palpant. Il n'est pas pour autant familier avec celui-ci
car comme dans la société, le corps reste tabou1,
comme l'aurait énoncé le médecin et écrivain
Norbert Bensaïd « Le corps existe, mais les médecins n'aiment
pas penser qu'il est habité. Sinon ça s'érotise et les
angoisses surgissent. ».
En revanche, depuis quelques années, des mouvements en
faveur de la dignité du patient a permis une prise de conscience
progressive. De plus, l'évolution des techniques et des technologies
associées à une rationalisation économique permet
l'indignation d'un grand nombre de soignants subissant cette
instrumentalisation croissante qui engendre une distanciation avec le
patient.
La considération du patient comme un individu
émerge dans les soins infirmiers notamment grâce à Virginie
Henderson, chercheur, enseignante et infirmière du XXème
siècle grâce à ses célèbres quatorze besoins
fondamentaux2. Elle réalise ce classement avec une approche
à la fois biologique, physiologique, psychologique, sociale et
spirituelle. A propos des quatorze besoins, la moitié se détache
de l'approche corporelle traditionnelle du patient.
Grâce à la théorie Kohlberg puis l'analyse
de Carol Gillian et surtout le psychanalyste et pédopsychiatre Donald
Winnicott, les notions du cure et du care émergent. Le
cure pourrait s'illustrer par les pratiques techniques
réalisées au XVIIème siècle, portées sur la
pathologie et l'organe malade plutôt que la personne. En revanche, le
care sera axé précisément sur le sujet, ce qu'il
éprouve et ce qu'il ressent et renvoie à la notion positive du
soin qui porte sur l'attention et l'accompagnement du patient.
C'est ainsi que la prise en compte de l'ensemble des
affections physiques et psychologiques s'inscrit dans le décret relatif
au études préparatoires et aux épreuves du diplômes
d'état infirmier le 5 septembre 1972 (renouvelé le 11
février 2002).
1 HAMON, H.1994 dans Mon voyage sur la
planète médicale
2 Cf Annexes III
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En 1979, Marge Reddington complète la démarche
de V. Henderson par sa grille des Besoins Humains1 : ses besoins ne
sont pas hiérarchisés contrairement à la
célèbre pyramide de Maslow. Ici, en plus du traditionnel item
qu'est « le niveau physique » nous trouvons « le niveau
psychologique », « le niveau spirituel » et ce qu'elle nomme
« la partie communicante des âmes » qui établirait le
besoin de se relier à soi et aux autres.
Le travail d'une équipe pluridisciplinaire permet
d'aborder différentes approches dans la prise en charge du patient.
L'équipe soignante travaille avec l'entièreté du corps du
patient et ce qu'il représente pour lui. C'est la raison pour laquelle
la place du psychologue et des socio-esthéticiens sont primordiales dans
les établissements de santé tout comme les médecines
parallèles qui s'adaptent à chaque patient selon leur
expérience et leur sensibilité à ces approches.
Nous ne pouvons pas parler du corps sans introduire la notion
d'autonomie qui lui est propre. En effet, chaque sujet serait souverain de
soi-même et donc de son propre corps. Selon Michela Marzano dans
L'éthique appliquée : « le droit de disposer de
son corps et de sa personne, en définitive, devient un véritable
pouvoir : une liberté de disposer, intégrée à
l'autonomie et liée au principe de l'autodétermination de chaque
personne ». C'est la raison pour laquelle il est intéressant
de déterminer ce qu'est l'autonomie dans ce contexte.
II.2. L'autonomie
Selon le Larousse, l'autonomie se définit par la
capacité de quelqu'un à ne pas être dépendant
d'autrui. C'est la faculté de se déterminer par soi-même,
de choisir et d'agir librement. C'est la raison pour laquelle il est
nécessaire de la considérer dans un contexte de soin afin
d'intégrer au mieux le patient à sa prise en charge. Pour cela,
il est important de connaître l'histoire de sa définition afin de
comprendre les changements de considération de l'autonomie du sujet.
II.2.1. Définition de l'autonomie
L'étymologie du mot autonomie vient du grec autos
qui veut dire « soi-même » et nomos qui signifie
« loi, règle ». Ainsi l'autonomie se définit par la
capacité de se donner à soi même sa propre loi ou
règle. Son contexte d'origine se traduit par le système politique
de la Grèce antique
1 Cf Annexes IV
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imposé par les Romains en laissant certaines villes se
gouverner par leurs propres lois. A cette époque, l'autonomie ne se
définissait pas par l'indépendance ou la souveraineté mais
par l'autodétermination, droit des peuples à disposer
d'eux-mêmes.
Pour Héraclite, philosophe du VIème
siècle avant J-C, l'autonomie se définit par l'art
d'acquérir un esprit libre. En ce sens, il lie ce concept à celui
de l'éducation. En effet, selon lui « Il ne faut pas agir et
parler comme nous l'avons appris par l'héritage de
l'obéissance» : c'est-à-dire que l'enfant devient
lui-même lorsqu'il sait interpréter, reconsidérer et
s'émanciper des règles sociales induites depuis la naissance.
C'est ensuite aux siècles des Lumières que le
concept de l'autonomie est particulièrement approfondi notamment
grâce à Emmanuel Kant. L'autonomie est la notion clef de la
philosophie morale de Kant et est le fondement des devoirs éthiques.
Selon lui, l'individu doit être traités comme une fin en soi et
non seulement comme un moyen. En effet, il n'est donc pas légitime
d'objectifier le sujet dit autonome car c'est un être doté d'une
raison, qui fait de lui une personne capable de décider ou penser. Dans
la Critique de la raison pratique, Kant fait de l'autonomie le
principe unique de toutes les lois morales et l'oppose à
l'hétéronomie. L'hétéronomie est le
caractère de la volonté (faculté d'exercer un libre choix
gouverné par la raison) qui se caractérise en fonction
d'éléments extérieurs à lui-même. De cette
façon, il introduit les notions avec lesquelles l'autonomie se
corrèle, soit la dépendance et la liberté.
Adam Smith, célèbre économiste et
philosophe de la même époque, utilise une approche similaire, mais
dans le domaine de l'économie, pour analyser l'individu à part
entière dont l'autonomie et le jugement sont mis en avant sur le
marché.
John Stuart Mill, lui, considère la notion d'autonomie
à travers son principe de non-nuisance. En effet, il définit
l'autonomie par la capacité d'un individu à décider de la
manière dont il veut mener sa vie. Il soutient alors l'antipaternalisme
en condamnant « l'usage d'un pouvoir coercif [qui impose] à
quelqu'un une manière de vivre pour la seule raison qu'elle serait
meilleure pour lui ». Il dénonce, entre autres, dans un
contexte éducatif, les abus d'autorités paternelles qui ont
tendance à imposer un mode de vie plutôt que de faire
accéder l'individu à l'autonomie. Ce paternalisme conduit alors
à une restriction de la liberté individuelle et restreint
l'individu a agir librement selon le mode de vie choisi tout en respectant les
droits d'autrui.
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De nombreux autres penseurs, philosophes ou scientifiques ont
donné leur définition de l'autonomie. Parmi eux nous retrouvons
Auguste Lecomte, père de la sociologie moderne et des sciences sociales.
Il définit l'autonome comme celui atteignant « l'état
positif » celui affranchi de l'influence des religions et de la
métaphysique.
Finalement, le concept d'autonomie interroge les Hommes depuis
l'Antiquité et différentes définitions émergent
dans des domaines variés tel que le droit, la médecine, la
psychologie, la bioéthique ou encore la sociologie. En
résumé, en philosophie, l'autonomie désigne la
capacité d'agir selon ses règles personnelles
indépendamment des influences religieuses et métaphysiques tout
en respectant la liberté d'autrui. En psychologie, elle est
définie comme une affirmation de soi en tant qu'individu de
manière à répondre à ses besoins en fonction de son
expérience personnelle antérieure. En droit, l'autonomie est la
faculté d'agir librement sans entraver les droits d'autrui. Enfin, en
bioéthique, l'autonomie implique le consentement de la personne pour
tout acte réalisé sur sa personne ou son corps. 1
C'est pourquoi il est intéressant de définir ce
qu'est l'autonomie dans le soin des soignants et la manière dont elle
est considérée.
II.2.2. L'autonomie dans le soin
Dans la pratique médicale et paramédicale,
l'enjeu majeur pour les soignants est de faire respecter l'autonomie du sujet
dans un contexte de vulnérabilité lié à la maladie.
Ce respect de l'autonomie repose sur différentes notions : l'information
claire, précise et loyale, la vérification de la
compréhension de la personne, la volonté à décider
ou non de la personne et le consentement éclairée de cette
dernière.
Le respect de l'autonomie du patient implique deux notions :
celle de la capacité de jugement et celle de la liberté de
pouvoir agir. La capacité de jugement rejoint la capacité de
raisonnement, c'est-à-dire la faculté d'identifier et d'analyser
une situation donnée afin de choisir une solution et d'en évaluer
l'impact. La liberté de pouvoir agir est l'aptitude à refuser ou
accepter selon ses choix en fonction du jugement préalablement
établis dans le respect des lois et des usages communs. Lorsque l'une de
ces notions est altérée il y a un risque que
1 REACH,G.2013 - Vol. 7 -
N°4 317-323
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l'autonomie ne soit pas respectée. Pour mieux
comprendre ce phénomène, il faut définir la
dépendance du patient.
Afin de considérer au mieux l'autonomie des patients,
il est nécessaire de déterminer son degré de
dépendance. La dépendance se définit par
l'impossibilité partielle ou totale d'effectuer des tâches de la
vie quotidienne sans aide ou de s'adapter à son
environnement.1 Ces activités peuvent être d'ordre
physique, psychologique ou sociale. Tous types de pathologies peuvent porter
atteinte à l'autonomie du malade et donc augmenter le degré de
dépendance.
La dépendance est un concept qui implique une certaine
forme de solidarité dans la mesure où l'usager a pour objectif
l'ouverture d'une relation avec autrui afin d'obtenir une assistance. Cette
notion se réfère à la définition du care,
précédemment introduite, sous-entendant la sollicitude,
l'attention et le soin réalisés par autrui. Dans un contexte de
soin, cela s'illustre majoritairement à travers la relation
soignant-soigné ayant pour but une restauration de l'autonomie du
patient.
Cette dépendance s'explique par différents
facteurs considérés par le modèle CIF. Nous y retrouvons
dans un premier temps la déficience qui conduit à une
insuffisance physique ou intellectuelle due à une altération
d'une structure ou fonction organique. Dans un deuxième temps,
l'incapacité se traduit par une limitation d'activité liée
à une réduction ou une difficulté d'exécution
d'activité. Enfin, il s'agit du handicap par la restriction de
participation engendrant des conséquences sociales, culturelles,
environnementales et économiques.
De cette manière, plusieurs outils permettent
d'évaluer le degré de dépendance et donc d'autonomie de
l'usager. Pour faciliter la communication entre les professionnels de
santé, il est nécessaire d'utiliser des moyens simples,
vérifiés et universels. Ainsi, nous retrouvons la grille AGGIR ou
les ALD et IALD. Les ADL (activité de la vie quotidienne)
évaluent le degré d'exécution et le besoin d'aide ou non
dans la réalisation de six activités quotidiennes2.
Les IADL (activités instrumentales de la vie quotidienne)
évaluent huit activités impliquant un dispositif extérieur
comme un téléphone, des médicaments, les transports ou
encore l'argent. La grille AGGIR classifie en six groupes de
dépendances, le patient âgé totalement autonome
1 REACH,G.2013.Vol. 7 - N°4 317-323
2 Méga Guide Stages IFSI (c) 2015, pages
577-580.
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à la personne âgée totalement
dépendante, ce qui permettra, ou non, d'organiser une aide à
domicile par exemple.
Ces manières de considérer l'autonomie de
l'individu dans un contexte de soin est particulièrement important pour
évaluer le degré et l'exactitude du pouvoir de décision du
patient. En effet, les facteurs précédemment cités peuvent
altérer le jugement de ce dernier et donc conduire à
reconsidérer l'implication du patient dans la décision
médicale.
II.2.3. Législation du patient autonome
D'un point de vue législatif, l'autonomie de l'individu
trouve son fondement dans le droit des contrats. Le droit des contrats repose
sur la liberté contractuelle qui est la conséquence de
l'autonomie de la volonté. Cette autonomie permet au sujet libre de ne
pas être soumis à des devoirs autres que celui qu'il a
décidé.
En France, aux yeux de la loi, la reconnaissance de
l'autonomie de l'individu se fait entre autres par la majorité civile et
légale c'est-à-dire l'âge auquel l'individu serait
juridiquement capable et responsable, soit l'âge à partir duquel
il est capable de s'engager par les liens d'un contrat ou d'un acte juridique.
Avant cette majorité, le mineur est représenté par
quelqu'un qui a pour rôle de préserver son intérêt,
il s'agit alors d'un ou des deux parents. Sinon, en l'absence de parents, un
tuteur lui sera attribué.
Cette protection par le tuteur se retrouve aussi chez les
adultes, majeurs dont l'autonomie est altérée à cause de
sa santé par exemple. On parle de tutelle lorsqu'il est question de
protection juridique ayant pour objectif de protéger la personne et son
patrimoine selon son intérêt. Tout comme la curatelle. En revanche
la tutelle est plus protectrice car elle concerne les individus qui sont dans
l'incapacité totale d'accomplir les actes de la vie civile alors que la
curatelle s'applique essentiellement aux personnes ayant conservées une
capacité d'autonomie réduite.
Dans le domaine de la médecine, les droits de
l'individu autonome se fonde sur son statut de malade ou de dépendant :
on parle alors de patient autonome ou de patient dépendant. Les droits
des malades évoluent particulièrement grâce à la loi
n°2002-303 du 4 mars 2002 précédemment citée. La
reconnaissance de l'autonomie du patient se fait alors par la
reconsidération de la relation entre l'usager et les soignants. Pour les
partisans de l'autonomie, la solution se trouve dans un rapport
égalitaire entre le médecin et le malade. C'est la raison pour
laquelle sont organisés des états généraux de la
santé en 1998 - 1999 pour intégrer les Français au
débat sur
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la santé et tenir compte de leur principale
préoccupation vis-à-vis du système. Emerge alors une
véritable démocratie sanitaire permettant de faire du patient
l'acteur principal de sa prise en soin.
La manière de transformer le patient en acteur se
réalise par l'information, le consentement et la participation aux
traitements et aux soins. L'information est régie par les articles
L.1111-2 à L.1111-9 du Code de la Santé Publique. Ces articles
à propos de l'information claire, compréhensible, loyale et
appropriée à la singularité du patient permettent
d'introduire la notion de volonté de l'usager. Ce principe ajoute que
« toute personne prend, avec le professionnel de santé et
compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit,
les décisions concernant sa santé » ainsi «
toute personne a le droit de refuser ou de ne pas recevoir un traitement
» et « le médecin a l'obligation de respecter la
volonté de la personne après l'avoir informée des
conséquences de ses choix et de leur gravité ». Par
conséquent, il est important de distinguer la personne en état de
manifester sa volonté et celle hors d'état de manifester sa
volonté.
Lorsque la personne n'est pas en état de manifester sa
volonté, la loi du 4 mars 2002 introduit le dispositif relatif à
la personne de confiance (article L.1111-6 du Code de la santé
publique).
Dans le domaine paramédical, le
référentiel d'activité infirmier, relevant leurs
activités et leurs compétences, met en lumière les
capacités devant être maîtrisées par les
professionnels lors de l'obtention du diplôme d'état. Celles-ci
s'inscrivent dans la réglementation figurant au Code de la Santé
Publique. De ce fait, à l'article R4311-2, l'infirmier se doit
« de protéger, maintenir, restaurer et promouvoir la
santé physique et mentale des personnes ou l'autonomie de leurs
fonctions vitales physiques et psychiques en vue de favoriser leur maintien,
leur insertion ou leur réinsertion dans leur cadre de vie familial ou
social ». Sont rappelés ensuite à l'article R4311-3 les
objectifs du respect de l'autonomie du patient par le rôle propre de
l'infirmier : « relèvent du rôle propre de l'infirmier
les soins liés aux fonctions d'entretien et de continuité de la
vie et visant à compenser partiellement ou totalement un manque ou une
diminution d'autonomie d'une personne ou d'un groupe de personnes
».
Pour Michela Marzano, dans son ouvrage Je consens, donc je
suis... estime que c'est grâce à l'autonomie que l'individu
peut exprimer sa volonté et donc consentir. Le consentement serait alors
« l'expression de l'autonomie individuelle et l'autonomie, elle, le
principe
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justificateur des actions ». Il est donc
pertinent de définir le consentement afin de comprendre la place qu'il
occupe dans le soin lorsqu'on l'associe au principe d'autonomie.
II.3. Le consentement
Selon le Larousse, le consentement se définit par le
fait de donner son accord à une action, à un projet, par une
approbation ou un acquiescement. Il est tout de même intéressant
d'approfondir cette définition de manière à comprendre son
implication dans le soin, car il est important de ne pas confondre «
approuver » et « ne pas empêcher », c'est-à-dire
distinguer « permettre passivement » et « adhérer
activement ».
II.3.1. L'histoire du consentement et le code de
Nuremberg
Le consentement apparaît dans la pensée
stoïcienne et se rapproche de l'idée de résignation. En
effet, il se traduirait par « l'acte d'acceptation dirigé
à l'endroit de quelque chose qui nous dépasse, contre quoi on ne
peut rien, mais que l'on fait paradoxalement sien acquiesçant à
sa présence 1». Epictète définit
alors « ce qui dépend de nous » et « ce qui
ne dépend pas de nous », et conseille de consentir (dans le
sens de nous résoudre) à ce qui ne dépend pas de nous car,
pour les stoïciens, nous devons nous soumettre à ce qui est
extérieur à nous.
Aristote, lui, ne mentionnera pas le consentement comme un
acte de volonté ou un acte d'acceptation mais à travers l'acte
consenti2. Cet acte serait fait de plein gré, guidé
par le désir associé à la raison. Si l'acte était
seulement réalisé selon son désir alors ce serait agir
malgré soit et sous contrainte.
John Locke, philosophe du XVIIème
siècle, définit l'autorité comme un protecteur des lois
naturelles, les hommes doivent respecter les lois pour qu'ils puissent
bénéficier en échange de la protection de leur
liberté.3 Il introduit alors la notion de « trust »
qui signifie que le peuple donne sa confiance et son consentement au
gouvernement afin d'éviter tout pouvoir absolu. Le consentement est au
centre de sa réflexion : pour lui, seul un pouvoir se fondant sur le
consentement de son peuple est légitime.
1 MONTEILS-LANG, L.2008 p 31-43
2 MONTEILS-LANG, L., 2013,tome 76, n°3 pp.
441-457.
3 JAUNAIT,A, 2003,no 11, p. 59-79
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L'importance accordée au corps et à l'autonomie
de l'individu, à la capacité de décision et au respect de
l'intégrité du sujet s'inscrit en grande partie grâce au
code de Nuremberg, au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale. En effet, le
procès de Nuremberg dénonce et punit les expérimentations
effectuées par des médecins nazis sur les prisonniers des camps
de concentration en éditant une liste de dix critères. Ces dix
critères1 énumèrent les conditions que les
expérimentations doivent suivre pour être
considérées comme acceptables et permettent de poser les
premières bases de la bioéthique.
Suite au procès d'Eichmann2, Hannah Arendt,
politologue, philosophe et journaliste du XXème
siècle, dénonce le manque de responsabilité3 et
la négligence du consentement. Dans sa philosophie morale, elle
différencie la notion du consentement à celui de
l'obéissance, elle rappelle que le consentement est propre à
l'adulte par son approbation en connaissance de cause alors que
l'obéissance serait propre à l'enfant par l'acquiescement sous
contrainte.
Dans les années 70, le rejet du modèle
médical paternaliste se fait entendre grâce aux débats
bioéthiques modernes. Gerald Dworkin, célèbre professeur
de philosophie et d'éthique, définit le paternalisme tel
« une intervention sur la liberté d'action d'une personne, se
justifiant par des raisons exclusivement relatives au bien-être, au bien,
au bonheur, aux besoins, aux intérêts ou aux valeurs de cette
personne contrainte ». Autrement dit, le paternalisme médical
est une attitude qui refuse l'autodétermination du patient ainsi que ses
droits et son autonomie décisionnelle. Cette conduite ne donne donc pas
de place au consentement. Cette déviance peut s'expliquer par le statut
du professionnel de santé face à un individu
considéré comme vulnérable en raison de sa maladie : de ce
fait, il interprèterait que le patient soit inapte à prendre une
décision et donnerait alors au soignant le pouvoir de décision.
Cette explication trouve sa source dans le serment d'Hippocrate qui induirait
que le praticien devait préserver l'usager des informations qu'il avait
pour l'intérêt présumé de l'usager. Ce paternalisme
médical est seulement remis en question législativement en France
en 1995 dans le code de déontologie médicale. Il aura fallu
attendre 50 ans pour que le concept paternaliste du diagnostic (article 30 code
1947) laisse place à l'exigence du consentement.
1 Cf. Annexes I
2 Eichmann : Adolf Eichmann, haut fonctionnaire du
Troisième Reich, officier 55 et membre du parti nazi. Le 11 avril 1961,
à Nuremberg, il est déclaré coupable des quinze chefs
d'accusation, dont ceux des crimes contre les juifs et crimes contre
l'humanité. Il est alors condamné à mort.
3 Responsabilité morale : pouvoir personnel de
jugement
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La question du consentement, qu'il soit dans le domaine
médical, juridique ou politique, relève la problématique
de ce qui est jugé acceptable ou non sur le plan normatif1.
Alan Wertheimer, écrivain américain, parle alors de
caractère « moralement transformateur » du
consentement2, c'est-à-dire la capacité que le
consentement a pour modifier la légitimité d'une action en la
rendant acceptable alors qu'elle ne le serait pas autrement. Dans son article
« Consent to sexual relations », A. Wertheimer relie la notion du
consentement à celle de l'autonomie, la non-exploitation et la
non-coercition. Pour lui, la non-validité du consentement conduit
à un manque de respect de l'autonomie de l'individu. De ce fait, pour
être valide, le consentement devrait être libre,
éclairé et fournit par un sujet compétent. Ces trois
critères sont primordiaux et inscrit désormais dans la loi.
Pourtant, malgré l'évolution de la
considération de l'autonomie et le pouvoir de décision de
l'individu, le respect du consentement reste tout de même instable.
L'affaire Weinstein en est une illustration actuelle. En effet, la
révolte historique de nombreuses femmes révèle de
multiples cas d'agressions sexuelles perpétrés par Harvey
Weinstein, célèbre producteur de cinéma américain.
Cette révolte a fait naître les mouvements féministes
« #MeToo » ou « #BalanceTonPorc » en France pour
dénoncer le harcèlement et les agressions sexuelles subies par
les femmes dans leur vie quotidienne. Ces dénonciations ont permis de
relancer le débat de la définition et de la place du consentement
dans la société.
Ce mouvement s'étend dans le milieu médical
notamment dans le domaine gynécologique et obstétrical où
« un sexisme ordinaire » est révélé. Des
documents de l'université de médecine Lyon Sud
révèlent qu'il est attendu par les étudiants de
réaliser des touchers vaginaux sur des patientes endormies (donc
non-consentante) dans le cadre de leurs études. Depuis, sur les
réseaux sociaux, de nombreux témoignages voient le jour avec
l'hashtag « Paye ton gynéco » ou «
BalanceTonHôpital ». Une enquête du Haut Conseil à
l'égalité entre les hommes et les femmes dresse alors un
état des lieux en juin 2018. Parmi les actes dénoncés par
les femmes lors de leur suivi, l'un d'eux concernent l'absence de consentement
éclairé de la patiente : une meilleure formation des
gynécologues et personnels soignants est alors proposée.
Le consentement est donc une question largement
répandue dans différents domaines notamment celui médical
et paramédical. Ainsi, afin de protéger les individus et les
patients, il
1 Plan normatif : qui concerne les règles, les
normes.
2 BARD, G. 2016 dans L'Encyclopédie
philosophique
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est primordial de connaître leurs droits en
matière de consentement pour ne pas entraver leur volonté.
II.3.2. Législation du consentement
Le consentement aux soins du sujet implique le droit au refus
des soins, notion mettant en difficulté les devoirs du personnel
soignant tenu à assurer assistance et soins aux patients
concernés. Il est donc primordial de connaître les droits et
devoirs des soignants et de l'usager pour remplir leur rôle dans la prise
en charge.
Pour ce faire, les droits de l'individu citoyen en France
seront légiférés dans le Code Civil. Les droits du patient
et les devoirs du soignant seront alors établis dans le Code de la
Santé Publique, notamment par la loi du 4 mars 2002 et la Charte de la
personne hospitalisée. Le Code de déontologie des infirmiers
inscrit les devoirs de l'infirmier diplômé d'état et de
l'étudiant en soins infirmiers. Les responsabilités civiles et
pénales sont alors impliquées.
Ainsi, pour ce qui est de l'individu, depuis la
décision du Conseil Constitutionnel le 27 juillet 1994, « la
sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme
d'asservissement et de dégradation » devient un principe
à valeur constitutionnelle grâce à la décision
n° 94-343/344 DC. De cette manière, cette notion devient un
principe de loi fondamentale et prend une place supérieure à la
loi.
Concernant le Code Civil, l'article 16-1 dispose que
« chacun a droit au respect du corps » et « le
corps est inviolable ». Ce principe a pour objectif de
protéger le corps humain des atteintes d'un tier. L'article 16-3 du Code
Civil ajoute qu' « iI ne peut être porté atteinte
à l'intégrité du corps humain qu'en cas de
nécessité thérapeutique pour la personne » :
cette précision permet d'impliquer les professionnels soignants dans
leur démarche de santé. La suite de l'article énonce que
« le consentement de l'intéressé doit être
recueilli préalablement hors le cas où son état rend
nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il
n'est pas à même de consentir. » Ainsi, pour que
l'infirmière soit exonérée de sa responsabilité
pénale, il faut nécessairement que l'atteinte du corps,
après avoir recueilli le consentement, poursuive un objectif
thérapeutique (injonction de la loi à l'article 122-4 du Code
Pénal).
Le consentement est régi par l'article L1111-4 du Code
de la Santé Publique. Il détermine les réglementations que
doivent respecter les professionnels de santé aux regards des usagers.
Pour ce faire, il est exposé dans le livre Ier concernant la protection
des personnes en matière de
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soin qu'« aucun acte médical ni aucun
traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et
éclairé de la personne et ce consentement peut être
retiré à tout moment. ». Il est important de
considérer le consentement comme révocable à tout moment :
cette précision s'ajoute au concept du refus de soin
précisé dans l'article par « toute personne a le droit
de refuser ou de ne pas recevoir un traitement ». Par
conséquent « le médecin a l'obligation de respecter la
volonté de la personne après l'avoir informée des
conséquences de ses choix et de leur gravité. ».
Le consentement doit être « libre »,
c'est-à-dire que la personne ne doit pas avoir donné son
consentement sous la contrainte et qu'il doit être renouvelé
à chaque nouvel acte médical ou paramédical. L'adjectif
« éclairé » signifie que la personne doit avoir
reçu les informations nécessaires sur les actes qu'il va subir,
associés aux risques et aux conséquences possibles. Enfin, la
précision du « sujet compétent », mentionnait par A.
Wertheimer, désigne la personne apte à exprimer sa volonté
liée à son autonomie.
Le consentement diffère parfois selon certaines prises
en charge ou situation, mais des lois spécifiques sont écrites de
façon à protéger l'intérêt de l'ensembles des
usagers, par exemple lorsqu'il s'agit de mineur, de majeur sous tutelle ou dans
une situation d'urgence.
Près de 70 ans après les médecins, les
infirmiers ont finalement droit à leur code déontologique,
publié le 27 novembre 2016. Il comprend l'ensemble des règles
d'exercice professionnel de façon à éclaircir les droits
et les devoirs de chaque IDE. Dans ce code, le consentement du patient est
introduit dès la deuxième section relative aux devoirs envers les
patients par l'article R. 4312-14 : « Le consentement libre et
éclairé de la personne examinée ou soignée est
recherché dans tous les cas. Lorsque le patient, en état
d'exprimer sa volonté, refuse le traitement proposé, l'infirmier
respecte ce refus après l'avoir informé de ses
conséquences et, avec son accord, le médecin prescripteur ».
Tout comme l'IDE, l'étudiant en soins infirmiers, au cours d'un
stage, doit être formé à obtenir le consentement du patient
pour tout type de soin (article R. 4312-48).
La loi du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et
à la qualité du système de santé dite loi «
Kouchner », permet d'appuyer et valoriser les droits du patient
en leur offrant la place d'acteur de soins. Ce principe de démocratie
sanitaire précise le droit à l'information, notion essentielle du
consentement. Pour ce faire, nous parlons « d'information transparente
» soit une information claire, fiable et facilement accessible.
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Enfin, la Charte du Patient Hospitalisé1,
annexée à la circulaire ministérielle n°95-22 du 6
mai 1995, a pour objectif de faire connaître aux personnes malades,
accueillies dans un établissement de santé, leurs droits
affirmés par les lois (4 mars 2002, Code de la Santé Publique,
...) Elle est généralement affichée dans chaque chambre et
accessible à tous. De ce fait, le quatrième et le
cinquième principe rappelle les bases du consentement libre et
éclairé ainsi que le droit au refus de soin.
II.3.3. Consentement du patient et devoir infirmier
L'atteinte du corps humain et la considération de
l'autonomie du patient sont des raisons nécessaires pour justifier la
recherche du consentement. Le Comité Consultatif National d'Ethique
(CCNE) énonce que « la complexité accrue des
propositions thérapeutiques et une plus grande autonomie de
décision reconnue aux personnes malades (loi du 4 mars 2002) dans le
domaine des soins médicaux ont abouti à ce que le consentement du
malade ne soit plus simplement implicite mais doive être explicité
». Dans le cadre de la bioéthique, les différents
principes ont une application propre, ainsi le principe de l'autonomie
s'applique par le biais du consentement.
Dans la pratique soignante, l'infirmier doit se rappeler que
l'acte de soin, même s'il est bienveillant, reste une atteinte à
l'intégrité physique de la personne. L'acte de soin doit donc
répondre à un but thérapeutique et suivre le consentement
de celui-ci.
Il est important de retenir que le consentement donné
aux médecins n'est pas le même que celui donné aux
infirmiers. Même si le consentement du médecin est donné,
l'infirmier n'a pas carte blanche, il doit agir en respect de la volonté
du patient.
La question du consentement dans les soins implique la notion
du refus de soin et donc le libre choix de l'individu de décider ce qui
est bon pour lui. En cas de refus, l'équipe est tenue de lui expliquer
les conséquences de cette décision et mettra tout en oeuvre pour
le persuader en lui apportant à nouveau toutes les précisions
nécessaires. Il faut que la relation soignant-soigné soit
d'égal à égal de manière à ce que les
informations fournies par les infirmiers soient les plus légitimes et
recevables. L'infirmier serait en faute de s'incliner à un refus de soin
dû à une mauvaise information ou une crainte injustifiée
tout comme il serait en faute s'il agissait, sans consentement, dans
l'intérêt présumé du patient. Face à un refus
de soin, l'infirmier doit
1 Elle est réactualisée le 2 mars 2006
par la Charte de la personne hospitalisée. (Cf. Annexe)
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toujours être capable d'analyser la raison de ce refus,
si c'est un refus intuitif par la peur, l'a priori ou la sous-information ou si
c'est un refus réfléchi guidé par la raison. De la
même manière, il est important de discerner le refus du
renoncement afin d'établir la communication la plus adaptée. Une
traçabilité est alors assurée dans le dossier
médical selon la décision prise par le patient.
Le statut de l'infirmier, qui lui offre un rôle
privilégié avec le patient, est bénéfique pour une
relation de confiance fondée sur le consentement de ce dernier. Ce
dialogue, cette compréhension et cette complicité permet, entre
autres, une meilleure implication du soigné dans ces soins.
Pour que le consentement soit valable, il faut que le patient
soit informé par des informations complètes, intelligibles et
loyales ainsi il peut consentir en connaissance de cause.
Parfois, le patient exprime, après coup, avoir consenti
au soin car il n'avait aucune autre possibilité. C'est pourquoi il est
important que le patient bénéficie d'une place égalitaire
à celle du soignant et que le refus de soin ne soit pas
considéré comme une opposition à l'équipe
médicale. Il est donc nécessaire de construire avec ce patient,
un climat dans lequel ces instants de décision soient le plus sains.
Il est tout de même important que le protocole de la
recherche du consentement dans les soins ne se transforme pas en un
prétexte moral pour se décharger de l'atteinte du corps du
patient.. Le consentement écrit en tant que preuve est une
démarche surtout médicale lors d'une hospitalisation ou pour une
intervention lourde comme une chirurgie. En revanche, l'écrit n'est pas
considéré comme un alibi protégeant entièrement le
médecin, il s'agit surtout de prouver que l'information fournie au
patient fût complète, intelligible et loyale. On ne parle pas de
décharge de responsabilité du médecin au patient mais bien
d'une entente et une compréhension loyale et commune des informations
fournies par le médecin à l'usager. Cet écrit ne doit pas
devenir un obstacle et donc une excuse à l'acceptation de l'ensemble des
soins. Une approbation orale en début de soins après une
information claire et précise peut-être réalisée
surtout dans les soins d'hygiène effectués par les
paramédicaux par exemple.
En revanche, une question se pose à propos du type
d'information à fournir au patient. En effet, si l'infirmier agit en
suivant la loi en annonçant le plus sincèrement possible
l'ensemble des risques encourus, les patients n'accepteraient pas, par peur.
Pourtant les tribunaux exigent que
les informations sur tous les risques graves soient
expliquées. La loi du 4 mars 2002 reste tout de même
réaliste en réajustant la notion d'informations pour les
« risques courants ou graves, normalement prévisibles
» qui diffèrent de « tout risque même
exceptionnel » énoncé auparavant.
Pour conclure, l'infirmier doit être capable d'adapter
sa recherche du consentement au type de patient qu'il prend en charge.
Exactement comme pour l'autonomie, il est nécessaire de connaître
les droits du patient (mineur, majeur, sous tutelle ou curatelle), le
degré d'autonomie de celui-ci ainsi que ses volontés de
manière à agir dans son intérêt. Comme l'exprime
Christian Gilioli1 : « L'idée sous-jacente [du
consentement] parfois proposée est plus ambitieuse et consiste, pour la
personne malade, à s'approprier, c'est-à-dire à faire
sien, le projet proposé par un soignant, par exemple. On retiendra
aussi, dans ce souci de maintenir la capacité autonomique, le rôle
central que pourront tenir ceux capables, en quelque sorte, de porter la parole
de la personne malade qui ne serait plus en état de s'exprimer.
»
Ces trois parties sur le corps, l'autonomie et le consentement
m'ont permis de recueillir des apports théoriques que je vais pouvoir
confronter aux pratiques infirmières. En effet, ces précisions
sur les notions du patient objet, du patient sujet, du consentement et de
l'autonomie décisionnelle me permettent d'avoir un cadre
théorique pour vérifier mon hypothèse selon laquelle le
patient serait humanisé dès lors que le consentement soit
recherché.
Page 30 sur 84
1 GILIOLI, C. 2018,
p.64.
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III. Enquête exploratoire
L'enquête exploratoire se fait à partir
d'entretiens. Ces entretiens de recherche sont des outils d'investigation
scientifique ayant pour but de recueillir oralement des informations sur la
thématique questionnée au préalable. Ainsi, ici, ils
auront pour objectif de recueillir les pratiques et les représentations
des infirmiers pour vérifier mon hypothèse selon laquelle dans le
cadre d'un soin, le patient cesserait d'être objectivé dès
lors que le consentement recueilli par le soignant est libre et
éclairé.
III.1. Présentation de l'enquête
III.1.1 Choix et formulation
Cette enquête de recherche me permet de passer d'une
opinion à une réalité professionnelle observée ou
décrite sur le terrain. Autrement dit, les entretiens comparent la
pratique à la théorie. Mon objectif est de connaître les
représentations des soignants sur le corps dans leurs soins. De cette
manière, je souhaite savoir quelles sont les différentes
pratiques des soignants pour humaniser au mieux les patients et s'ils ont
été confronté au « patient objet ». Enfin, j'ai
pour but de savoir si la notion de consentement a une place dans cette
pratique, auquel cas il est intéressant de découvrir les
manières utilisées par les soignants pour l'introduire dans leurs
soins.
Il s'agit d'interviewer des infirmiers diplômés
d'état travaillant auprès de patients adultes car nous cherchons
à connaître la recherche du consentement réalisée
par des infirmiers. Le consentement de l'adulte et de l'enfant n'étant
pas le même, il est nécessaire, au regard de mon cadre conceptuel,
d'interviewer des infirmiers exerçant auprès de patients adultes
pour ne pas fausser les résultats.
C'est ainsi que j'ai choisi l'entretien semi-dirigé
pour questionner les professionnels de santé. En effet, cet entretien
est partiellement structuré et me permet de poser des questions ouvertes
de façon à laisser le professionnel s'exprimer sur ses
représentations. J'ai donc rédigé cinq questions suivant
les thèmes abordés dans mon cadre de référence
notamment sur le corps, l'autonomie et le consentement. La particularité
est que la dernière question s'adapte aux dires de l'interviewé
en fonction des notions qu'il a introduit tout au long de l'entretien
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Pour m'organiser lors de mes entretiens, j'ai
élaboré une grille d'entretien1 validée par ma
référente de mémoire. Cette grille me permet d'avoir un
support afin de garder un fil conducteur lorsque je pose mes questions et prend
des notes. Ma première question porte sur le parcours professionnel de
l'infirmier de façon à connaître ses expériences
avec les adultes. La deuxième question concerne la représentation
du corps. J'ai rédigé trois questions de relance au cas où
elle ne serait pas comprise ou la réponse serait incomplète. Les
trois autres questions suivent la même méthode. A propos de
l'instrumentalisation du corps, mon questionnement a pour objectif de savoir si
l'infirmier est sensible à ce concept et s'il l'a rencontré sur
le terrain. Pour la notion d'autonomie, la question a pour but de
connaître le degré et la manière de prise en compte de
l'autonomie dans les soins du patient. Cette approche me permet de comprendre
la considération du pouvoir de décision du patient par
l'infirmier et la façon dont il l'estime. Enfin, la dernière
question dépend des réponses amenées par
l'interviewé : soit il a parlé du consentement ou en a fait
allusion grâce à différentes expressions comme «
autorisation » ou « permission » soit il ne l'a jamais
introduit. L'objectif est de savoir l'importance ou l'intérêt du
consentement que porte l'infirmier dans ses soins.
III.1.2 Méthodologie
Afin de réaliser mes entretiens, j'ai contacté
un infirmier libéral et une cadre d'un service de néphrologie.
J'ai présenté au téléphone le sujet de mon
mémoire, le temps nécessaire pour chaque entretien qui
était de 30 minutes maximum et les thèmes que je voudrais aborder
avec les professionnels de santé concernés. Pour l'infirmier
libéral, le rendez-vous fût pris pour le lendemain. En revanche
pour le service de néphrologie, je devais envoyer ma grille d'entretien
et mes motivations auprès du directeur des soins de l'hôpital afin
d'avoir une confirmation et donc pouvoir établir des rendez-vous. Cette
démarche a pris trois semaines.
L'entretien avec le libéral s'est déroulé
un matin, 30 minutes avant l'ouverture du cabinet. C'est un cabinet
géré par deux infirmiers libéraux : celui que j'ai eu au
téléphone n'est pas celui rencontré le jour-même.
Nous nous présentons et nous commençons donc l'entretien dans un
environnement particulièrement calme, face à face,
installés dans des fauteuils. Mais, au bout de deux minutes d'entretien,
nous sommes interrompus par une patiente qui avait rendez-vous
1 Cf Annexes V
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sans que l'infirmier n'ait pas été mis au
courant par son collègue. La dame partie, nous reprenons l'entretien
pour vingt minutes
Une fois la confirmation du service de néphrologie
obtenue, j'ai été invité par la cadre du service qui me
présente les trois infirmiers à interroger. Deux entretiens se
sont déroulés le jour même, le dernier s'est
effectué trois jours plus tard. Les deux premiers entretiens ont eu lieu
dans une salle, silencieuse, autour d'une grande table, face à face, et
ont duré treize minutes pour le premier et sept minutes pour le second.
Trois jours après, l'entretien avec la dernière infirmière
s'est déroulé dans une sorte de salle d'attente à l'abri
des regards mais dont le milieu fût plutôt bruyant. Cela a
duré treize minutes : nous étions assises côte à
côte sans table entre nous.
Pour les quatre entretiens, j'ai présenté les
mêmes modalités. Dans un premier temps, j'ai rappelé
l'objectif de mon entretien qui était de connaître leurs
représentations sur différents sujets ainsi que leurs pratiques.
Je leur ai rappelé que leurs opinions et avis m'intéressaient et
qu'aucun jugement ne serait porté sur leurs paroles. Dans un
deuxième temps, je leur ai demandé s'il était possible que
je les enregistre avec mon téléphone pour retranscrire leurs
dires le plus précisément possible tout en gardant leur anonymat
: les quatre infirmiers ont accepté. Enfin, je leur ai rappellé
qu'il n'y a pas de bonnes ou mauvaises réponses à mes questions
et qu'elles sont très ouvertes puis j'ajoute que l'entretien durera
moins de 30 minutes.
III.1.3. Modalité de réalisation
J'ai fait le choix de réaliser quatre entretiens, ce
qui représente un échantillon limité : j'ai donc des
résultats qualitatifs mais non représentatifs de
l'entièreté de la pratique infirmière. De plus, c'est la
première fois que j'effectuais cet exercice : différentes
difficultés se sont alors présentées.
Au préalable, je me suis entraînée avec un
proche pour évaluer ma grille d'entretien : seulement, comme celui-ci me
connaissait, les résultats que j'ai reçu de sa part
étaient ceux que j'attendais car il connaissait mon sujet. Ainsi, le
fait que les questions soient très ouvertes n'ont pas posé de
problème lors de l'exercice avec mon proche alors que les professionnels
ont trouvé ça « trop large », pour la
majorité. En effet, je souhaitais, à travers mes questions
ouvertes, recevoir leurs représentations sans inciter leurs
réponses. Au final, j'ai tout de même reçu des
réponses riches et précises pour les questions posées.
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L'interruption de mon premier entretien ne semble pas avoir
biaisé les résultats recueillis car l'infirmier avait l'air
d'avoir l'habitude de cette organisation de travail et a pu reprendre
exactement où il en était. En revanche, le troisième
entretien s'est déroulé avec un infirmier fraîchement
diplômé et devait avoir un âge proche du mien : il avait
donc du mal à répondre à certaines questions ou à
approfondir certains de ses dires, il semblait ne pas trouver ses mots comme
c'était la première fois qu'il se prêtait à ce genre
d'exercice. Je lui ai donc rappelé que je n'attendais aucune
réponse précise et qu'aucun jugement ne sera apporté.
Enfin, en ce qui concerne le dernier entretien réalisé en service
de néphrologie, j'ai interviewé la dernière
infirmière de l'équipe quelques jours après ses
collègues : je ne sais donc pas si elle a eu des informations au
préalable à propos de mes questions même si elle m'a
précisé le contraire.
Concernant la matière des questions, j'ai
observé quelques écarts avec les réponses recueillies. En
effet, pour la question sur l'autonomie, la plupart des réponses
portaient sur l'autonomie physique et motrice, peut-être aurais-je du
préciser ou ajouter une question de façon à ce qu'ils
puissent me parler de l'autonomie décisionnelle, une précision
primordiale pour confronter mon cadre de référence à la
pratique. Ensuite, pour ce qui est du 2ème entretien
réalisé en service de néphrologie, l'infirmier avait du
mal à répondre aux questions : peut-être aurais-je dû
l'encadrer davantage par mes questions ou lui poser des questions
supplémentaires pour le stimuler à approfondir sa pensée
et donc ses dires.
III.1.4. Résultats buts
Les différents interviewés présentent
divers parcours professionnels. L'IDE11 a toujours travaillé
auprès d'adultes, en psychiatrie pendant trois ans, puis en
libéral depuis quinze ans. L'IDE2 est diplômé depuis huit
ans, il a commencé par de l'intérim dans des services adultes. Il
a désormais l'intention de passer le concours pour être infirmier
en pratique avancée. L'IDE3 est récemment diplômé et
son premier poste fût en néphrologie adulte : il part dans
quelques mois pour faire de l'intérim en service adulte. Enfin, l'IDE4
fût pendant longtemps jeune fille au pair, elle devient auxiliaire
puéricultrice en 2000 puis infirmière en 2017. Une fois
diplômée elle tente la pédiatrie mais elle se rend compte
que la prise en charge des enfants ne lui convient pas et change alors de
service pour être en néphrologie adulte.
1 Pour des raisons de confidentialité, les
prénoms ont été remplacé par IDE1, IDE2, IDE3 et
IDE4.
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Ces quatre entretiens avec les IDE m'ont permis de recueillir
plusieurs points de vue sur les quatre questions à propos du corps, de
l'instrumentalisation du corps, de l'autonomie et du consentement.
Dans un premier temps, en posant la question sur la
représentation du corps du patient que les IDE pouvaient avoir dans leur
soins, trois d'entre eux ont introduit l'importance de l'observation et du
regard lors de la prise en charge. En effet, l'un d'eux énonce «
le regard soignant » pour rentrer en contact avec le patient,
tandis qu'un autre explique qu'il faut « regarder tout le corps [...]
dans sa globalité » afin de détecter un éventuel
problème. Ces deux infirmiers parlent des notions de « pudeur
» et « d'intimité » qu'ils ajoutent
à leur observation qui seraient indispensable dans la
considération du corps. L'IDE1 ajoute l'importance de l'absence de
jugement face au corps dévoilé qu'il soit «
handicapé » ou « abîmé ».
De plus, l'IDE4 et l'IDE3 abordent la notion du patient objet en disant que
« le corps n'est pas un objet » ou qu'il « n'est
pas seulement un objet de soin ». L'IDE4 ajoute que le corps du
patient ne se dissocie pas de « l'être vivant » ou de
« l'être sensible » que peut être le malade : en
effet, elle précise qu'il « ressent des douleurs, des
désagréments » et qu'« il a toujours des
sensations ». De plus, elle évoque le message que peut
transmettre le soignant à travers ses gestes : « la
façon de toucher [...] ça renvoie des messages, par exemple si tu
le touches [le patient] avec violence ça renvoie un message que tu ne
veux pas faire le soin, il pourrait interpréter [...] que tu n'es pas
contente d'être là, que tu n'es pas contente de prendre soin de
lui ».
Dans un deuxième temps, je pose la question sur
l'instrumentalisation du corps dans les soins en faisant
référence au patient objet. Ma question est de savoir si les
infirmiers connaissent cette expression d'instrumentalisation ou
d'objectification du corps et ce qu'elle évoque pour eux. Deux
infirmiers ont partagé que cela leur était déjà
arrivé, pour deux raisons différentes. L'IDE1 pense que ça
lui ait surement arrivé à cause du manque de temps dans le milieu
libéral (« quand t'es dans un jour où t'es pressé
[...] je vais pas te dire que ça m'est jamais arrivé
»). L'IDE3 pense que c'est à cause « des habitudes
» ou « des automatismes » et partage la
manière dont ça s'est déroulé pour lui. L'IDE2
connaît aussi cette expression d'instrumentalisation du corps mais a
beaucoup de mal à le concevoir, il le définit à trois
reprises comme « un terme assez péjoratif » mais
« comprend que [le corps] puisse devenir autre chose quand il arrive
à l'hôpital ». La suite de ma question tend à
connaître les solutions qu'ils mettent en place pour éviter cette
instrumentalisation. La majorité d'entre eux ont évoqué
l'importance de
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l'information fournit aux patients, L'IDE1 explique la
nécessité de « toujours dire ce qu'on va faire,
«ça va faire froid, ça va faire chaud, je vais vous attraper
comme ci, comme ça« » et l'IDE4 rappelle
l'intérêt de s'adapter au patient « tu te
présentes, tu annonces le soin, tu demandes si c'est le bon moment, s'il
veut que tu reviennes dans cinq minutes ou tout de suite, si la personne est
prête [...] on ne force pas mais on essaye toujours d'expliquer ».
L'IDE3, lui, évoque la solution de « l'écoute
active », « c'est le fait de parler avec le patient, tout est dans la
communication ». Enfin, l'IDE4 précise que l'infirmier
« ne vient pas parcequ'[il a] des soins à faire,[...] [il]
vient parce qu'[il] veux prendre soin de la personne » et elle ajoute
que même si c'est sur le corps que les soins sont réalisés
« il y a l'esprit, il a sa façon de penser, sa façon de
voir [...] il faut englober l'ensemble ».
La troisième question a pour objectif de
connaître la manière de considérer l'autonomie par les
soignants. Pour ce faire, différentes réponses ont
été données et toutes ont porté sur l'aspect
physique de l'autonomie, soit le savoir-faire et les capacités du
patient. Ainsi, L'IDE2 cite ses deux outils d'évaluation que sont la
« communication » et « l'observation ».
Il énonce que pour « la communication, on pose la question
à la personne, [...] quand la personne va être alitée ou
quand il va y avoir un manque de communication, on va déjà voir
[...] si elle réussit à se mobiliser avec des gestes simples,
plier les genoux, se mobiliser sur le côté, tenir la
barrière, puis au niveau de la marche ». De plus, il implique
l'équipe pluridisciplinaire dans cette évaluation en citant
notamment le « médecin » et « les
kinés ». L'IDE3 et l'IDE4 rejoignent cette même
idée et soulignent l'importance de la considération de
l'autonomie pour « favoriser au mieux l'autonomie » en
détectant quand les patients « font d'eux-mêmes ».
Ensuite l'IDE4 rappelle que « chacun à ses limites, par
exemple, selon l'âge, la lourdeur de la pathologie, l'envie de la
personne, le moment », il faut donc « s'adapter, [...]
mettre une valeur sur les capacités d'opérer du patient, et
encourager, ça stimule et ça le motive, ça lui donne de
l'importance ». Pour finir, la question de la gestion du temps rentre
en jeu, c'est pourquoi l'IDE1 et l'IDE4 l'évoquent dans leur pratique.
L'IDE1 aborde le sujet du manque du temps en libéral en précisant
que « c'est pas terrible »: « nous déjà en
libéral [...] on a un problème, c'est un problème de temps
[...] on laisse moins de place à l'autonomie [...] je
préfère faire à leur place ». L'IDE4, en service
hospitalier, énonce que l'infirmier « laisse quand même
le temps pour que le patient fasse ce qu'il peut faire, qu'il ne faut pas se
substituer à ses capacités sinon il va régresser ».
Enfin, elle précise qu'« il faut toujours négocier,
demander l'avis, accepter que la personne refuse » .
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Enfin, avec ma dernière question, je voulais
connaître la place et l'importance que le consentement avait dans les
soins des infirmiers. L'IDE1 a apporté une vision intéressante du
consentement dans le milieu libéral. En effet, contrairement à
l'hôpital, « il y a une grande différence c'est que les
patients nous ouvrent la porte [...] donc là ils nous ouvrent la porte
donc ils sont forcément consentants ». Pour l'IDE2, le
consentement est « partie prenante de la démarche de
santé », « ça fait partie intégrante du
soin » : il ajoute que « c'est à partir de ça
qu'on pourra accéder à ce corps et permettre la
réalisation des soins » et « la bonne
continuité des soins ». Il distingue deux types de
consentement : le « consentement claire, libre et
éclairé ou quelqu'un qui ne peut pas consentir de manière
lucide ». Il finit en expliquant qu'en cas de refus de soin ce sera
« un frein à la réalisation de la démarche de
santé ». L'IDE4 rejoint la même idée que l'IDE2
sur le refus de soin et rappelle la loi en disant que « l'accord du
patient fait partie de ses droits, il a le droit de refuser selon la
législation, et il a le droit d'accepter ». Pour elle, il est
important de demander l'accord de son patient car elle ne « veut pas
entraver sa volonté ». L'IDE3 et l'IDE4 procèdent de la
même manière en se positionnant à la place du patient. En
effet l'IDE4 énonce : « on transfère toujours en se
disant «si c'était moi« ou si c'était quelqu'un de ma
famille, est ce que c'est correct. » et l'IDE3 dit que «
personnellement j'aurais pas aimé qu'on me propose pas donc je propose
tout le temps ». Enfin l'IDE4 explique que « ça rend
humain les soins et il faut considérer le patient comme une personne
respectable, [...] tu dois (pas dans le sens obéir) [...] avoir sa
coopération parce qu'un patient qui coopère est un soin qui va
mieux et sa santé qui s'améliore. ». Pour finir, l'IDE3
ajoute que c'est grâce à son éducation qu'il demande au
patient leur consentement, en effet pour lui, il pense que « justement
si on demande pas le consentement du patient, dans un sens, indirectement, on
le considère comme un objet ».
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III.2. Analyse de l'enquête
Ces quatre enquêtes m'ont permis de recueillir
différents points de vue d'infirmiers sur la place que peuvent avoir le
corps, l'autonomie et le consentement dans les soins.
Dans un premier temps il s'agira d'analyser la
considération du consentement par la législation pour humaniser
le patient, puis nous verrons la manière dont le respect de la
dignité du patient par la pratique soignante permet de l'estimer et
enfin, nous étudierons la façon avec laquelle la
considération du patient l'humanise.
III.2.1. Un patient humanisé par la
considération de son consentement grâce à la
législation
Comme l'introduit l'IDE4, « l'accord du patient fait
partie de ses droits ». En effet, chaque individu a des droits et
c'est ce qui le désigne comme sujet aux yeux de la loi. Le sujet ou la
personnalité juridique se définit par l'aptitude à
être titulaire de droits et de devoirs. La reconnaissance du droit de
l'individu permet donc de considérer le sujet comme un être
doté d'une raison. On retrouve finalement l'idée de Descartes
selon laquelle l'homme serait constitué de deux entités : le
corps et l'âme. Le corps correspondant à la matière
vouée à disparaître et l'âme, qui ferait vivre le
corps, capable de penser et de raisonner. La célèbre phrase
« Je pense donc je suis » de Descartes révèle
que selon lui, la pensée permet l'existence du sujet et donc de
l'individu. Cette pensée qui va faire de l'être vivant un
être de raison va donc être soumise à des lois pour jouir de
ses libertés sans entraver celles des autres.
De la même manière que cité dans le cadre
de référence, l'individu a des droits
légiférés par différents textes : le Code Civil qui
régit les rapports entre les personnes et qui s'applique à tous
les citoyens et le Code de la Santé Publique qui détermine
notamment les droits des malades et les devoirs des professionnels et des
établissements de santé. La Constitution, en tant que loi
fondamentale, a pour rôle de protéger les libertés et les
droits des citoyens contre les abus de pouvoirs des gouvernements qui se
succèdent.
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Ainsi, tel que défini dans la Constitution par la loi
de disposition de soi, l'IDE 2 fait référence au non-accès
du corps par autrui1. Il rattache cette notion au consentement en
disant que « le consentement ça fait partie intégrante
du soin [...] c'est à partir de ça qu'on pourra accéder
à ce corps ». Nous retrouvons à l'article 16-3 du Code
Civil, le chapitre relatif au respect du corps humain qu' « il ne peut
être porté atteinte à l'intégrité du corps
humain qu'en cas de nécessité médicale pour la personne ou
à titre exceptionnel dans l'intérêt thérapeutique
d'autrui. Le consentement de l'intéressé doit être
recueilli préalablement hors le cas où son état rend
nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il
n'est pas à même de consentir ».
Cet infirmier rajoute que « si on a pas ce
consentement-là [...] ça va être un frein à la
réalisation de la démarche de santé ». Cette
représentation du consentement suit la loi du 4 mars 2002 relative aux
droits des malades confirmant à l'article L1111-4 qu'« aucun
acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans
le consentement libre et éclairé de la personne et ce
consentement peut être retiré à tout moment.
».
Nous avons donc compris que le consentement fait partie des
droits de l'individu, mais il est important de préciser que ce droit
implique deux choses. En effet, l'IDE 4 évoque que le patient «
a le droit de refuser [...] et il a le droit d'accepter » ce qui
correspond à la notion précédemment expliqué de
l'acceptation et du refus de soin. Ce concept présent dans la loi du 4
mars 2002, reconnaît la capacité du patient à juger ce qui
est bon ou mauvais pour lui. Cette capacité à différencier
le bien du mal est exploitée par Spinoza (philosophe du XVIIème
siècle), qui définit le bien comme ce que l'on juge utile et
bénéfique à nous-même et le mal ce qui nuirait
à la conservation de notre être. C'est ce qu'illustre l'IDE3 par
l'imitation d'un dialogue avec un patient lorsqu'il énonce « si
vous ne voulez pas, je ne vais pas vous forcer ». L'IDE4
considère donc que le patient est capable de juger par lui-même et
ajoute qu'elle ne compte pas « entraver sa volonté »
car ce serait « un manque de respect ». Elle introduit
donc le mot clef essentiel à la compréhension des
différentes lois, celui de « volonté ». Cette
volonté renvoie directement aux capacités du sujet qui, par sa
raison, a la faculté d'exercer un libre choix.
Ensuite, pour avoir un consentement viable et fiable, il faut
prendre en compte différentes choses. Dans un premier temps il faut que
le patient soit capable de consentir et donc qu'il ait la capacité de
juger, décider et s'exprimer. C'est ce problème que l'IDE1
rencontre avec
1 La libre disposition de soi renvoie aux
libertés fondamentales comprenant le droit de dispenser de son corps et
le droit à l'intégrité physique.
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certains de ses patients comme « une petite dame qui
perd la tête » : il considérerait donc que sa
démence entraverait sa capacité de jugement. De la même
manière, en service de psychiatrie, lorsque cet infirmier évoque
la difficulté de recueillir le consentement d'un patient «
psychotique ». L'IDE2 complète en définissant selon lui
deux types de consentement : celui claire, libre et éclairé et
celui de « quelqu'un qui ne peut pas consentir de manière
lucide ». Finalement il aborde les limites du consentement en se
fondant sur la notion de la perte d'autonomie décisionnelle. En effet,
nous avons vu dans le cadre de référence qu'un individu est
doté de différentes autonomies : physique et psychologique. Au
cours de l'enquête, c'est l'autonomie physique qui est majoritairement
abordée, celle qui se définit par la capacité à
agir. Mais l'autonomie décisionnelle ne reste pourtant pas imperceptible
par les infirmiers car ils l'évoquent indirectement en se souciant de
l'état de lucidité de leur patient pour décider.
Les infirmiers mentionnent ensuite l'importance de
l'information fournie aux patients. En effet, nous avions vu la
particularité des renseignements à partager qui permet le
caractère « éclairé » du consentement. Lors des
entretiens, les infirmiers énoncent surtout la nécessité
d'informer face à un refus de soin pouvant entraîner des
conséquences sur l'état de santé du patient. L'IDE4 cite
les différents acteurs pouvant donner les informations aux patients en
passant par l'explication ou l'argumentation : « Nous on essaye en
tant qu'IDE d'expliquer [...] s'il refuse toujours alors on passe par le
médecin et le médecin va expliquer [...] un peu plus le but de ce
soin [...] ils ont d'autre arguments derrière [...] sinon si on arrive
toujours pas à désamorcer la situation on peut en parler à
la psychologue parce qu'elle a des connaissances et des mots qu'elle peut
utiliser auxquelles on ne peut pas forcément penser. ». Enfin,
l'IDE3 explique que « parfois dans les soins si c'est important, je
lui dis les enjeux » : cette approche fait référence
aux devoirs infirmiers face au refus de soins cités dans le Code
Déontologique à l'article R. 4312-14. « Lorsque le
patient, en état d'exprimer sa volonté, refuse le traitement
proposé, l'infirmier respecte ce refus après l'avoir
informé de ses conséquences [...] »
In fine, en continuité de la loi du 4 mars 2002, selon
les IDE, la place du patient en tant qu'acteur de sa santé et de
co-partenaire des soignants lui permet d'être considéré
tout le long de sa prise en charge. Le soignant reconnaît alors le malade
comme un être de raison capable de raisonner, juger et donc choisir en
exprimant sa volonté par le biais du consentement. Pourtant,
d'après les soignants, il semblerait que la considération du
patient ne se fait pas seulement par le biais du consentement.
Page 41 sur 84
III.2.2. Un patient humanisé par le respect de
sa dignité grâce à la pratique soignante
Les enquêtes ont permis de connaître les
représentations du corps et la considération du patient par les
infirmiers dans leurs pratiques. Même si reconnaître la
capacité de raisonner d'un individu et donc la faculté de
consentir pourrait permettre d'humaniser le patient, les quatre infirmiers ont
introduit d'autres concepts qui sembleraient nécessaires à
l'humanisation du malade.
Ainsi l'IDE1 et l'IDE2 introduisent la notion de «
pudeur » et d'« intimité ». En effet,
l'IDE1 dit se représenter le corps du patient dans ses soins avec «
beaucoup de pudeur [...] même si tu regardes un corps
handicapé ou abîmé », il oppose cette
manière de « regarder pudiquement » en
écarquillant les yeux pour mimer un regard insistant. L'IDE2
complète cette notion en disant que face à un corps «
désacralisé » dans le contexte de l'hôpital, il
faut pour « chaque partie du corps faire preuve de pudeur »
et « intimité ». Il est donc intéressant
de définir le concept de pudeur pour comprendre le lien qu'il a avec le
concept de l'intimité. La pudeur serait un trait de personnalité
d'une personne que tout le monde n'aurait pas. Elle serait « une
réaction émotive, assimilée à la
vulnérabilité, timidité, retenue [...] qui tend à
préserver ce que l'on a de plus secret, elle est alors de toute
évidence une «naturelle autoprotection de
l'intime«»1. De cette manière, selon le
Larousse, le mot intimité se définit par «
caractère de ce qui est intime, profond, intérieur ».
Finalement la pudeur serait la manière dont une personne
réagit ou non à un potentiel dévoilement
d'intimité.
Martine Meder-Klein, sociologue, offre alors une
définition plus élargie de l'intimité dite sociale qui
peut s'inscrire dans le contexte hospitalier : « Partager une
intimité sociale, c'est partager un territoire dans des distances et des
espaces définis par les personnes, c'est consentir à l'intrusion
de l'autre et c'est se mouvoir sous la protection du secret professionnel
». Cette approche est particulièrement intéressante car
le professionnel doit, tout le long de sa prise en charge, trouver une juste
distance avec son patient. On parle alors de la proxémie, cette
réflexion sur la façon dont nous occupons l'espace pour ne pas
empiéter la zone dite « intime » d'autrui. Ainsi, dans le
cadre d'un soin, l'infirmier se voit partager l'intimité de son patient
grâce à l'accord de ce dernier. Etant donné que cette
distance spatiale varie notamment selon
1 LE MOAL, S.2007 (vol.30/
n°122), pages 215-221
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les cultures, l'âge et le sexe, il est nécessaire
pour le soignant de l'évaluer pour chaque patient afin de la respecter
et d'adapter sa pratique lors du soin.
L'IDE4 rappelle par la suite que « le corps du
patient [...] est pas juste un objet de soin [...] mais c'est vraiment un
être sensible » qui fait écho à ce qu'elle disait
à propos du soin « tu ne viens pas parce que tu as des soins
à faire, tu viens parce que tu veux prendre soin de la personne
». Cette approche se réfère au fondement du principe de
dignité théorisé par Emmanuel Kant : « Agis de
telle sorte que tu traites l'humanité aussi bien dans ta personne que
dans celle de tout autre toujours en même temps comme une fin et jamais
comme un moyen ». Par ces dires, Kant démontre qu'il s'agit de
respecter la dignité de l'humanité chez chaque personne et non
pas la dignité de chaque personne. Ainsi, le soignant doit respecter le
patient comme une fin en soit, donc sa dignité humaine et jamais comme
un objet de soin.
Le concept de dignité est alors directement lié
à celui de la personne. Il renvoie au respect : le respect de soi et le
respect d'autrui. Cette considération de la personne et donc d'autrui
est aussi analysée par Hegel, philosophe allemand du XIXème
siècle. Selon lui, « Je ne suis pas humain si je ne suis pas
reconnu comme tel par autrui. Le secret de ma dignité se trouve dans le
regard qu'autrui porte sur moi ».. Ce « regard »
introduit par Hegel est particulièrement présent dans la
pratique infirmière et c'est ce que les infirmiers
révèlent dans leurs entretiens. L'IDE1 aborde l'outil de
l'observation dans ses soins en énonçant qu' « il
regarde pudiquement » et que son métier demande de «
regarder tout le corps [...] dans sa globalité » afin de
détecter le moindre problème et de s'assurer que le patient
« est dans un bon environnement ». Il ajoute l'importance
d'adopter un « oeil professionnel », un regard «
sans jugement ». Tout comme l'IDE1, l'IDE3 confie que dans le
cadre d'un soin, il « regarde un peu partout » pour
vérifier que le corps ne soit pas abîmé ou
altéré, cette observation est utilisée comme un outil
préventif dans le soin. L'IDE2 révèle que, selon lui,
« le regard soignant-patient » permet « d'avoir un
contact un peu plus facile » avec ce dernier. Enfin ce «
regard » qu'une personne porte sur autrui selon Hegel est
très illustré par les dires de l'IDE4 lorsqu'elle explique
l'image que renvoie l'infirmier lors d'un soin. En effet, d'après elle,
la manière dont le soignant approche le patient renvoie un message sur
le regard qu'il lui porterait. Elle conclut cette illustration en rappelant que
le patient « est vraiment un être sensible que l'on doit
vraiment prendre soin, en faisant attention, même [à la]
façon de toucher ».
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Enfin, l'IDE2 ajoute à l'observation un nouvel outil
pour considérer les patients, « la communication ».
En effet, d'après lui, la communication complète
l'observation pour connaître le degré d'autonomie de son patient.
Il s'agirait donc de poser directement la question au patient pour
connaître ses capacités. Ensuite l'infirmier ajoute l'importance
de l'évaluation afin de s'assurer que le patient ait bien les
capacités qu'il aurait énoncées, en fonction de cette
évaluation, l'infirmier réajusterait alors sa pratique pour
s'adapter au patient. L'IDE 3 rejoint cette idée selon laquelle
« tout [serait] dans la communication » et ajoute que la
solution contre cette déshumanisation du patient serait «
l'écoute active ». Ce concept est théorisé par
Carl Rogers, psychologue humaniste américain du XXème
siècle, qui n'utilise pas l'expression d'« écoute active
» mais plus celle de « relation d'aide ». Cette
« écoute active » apparaît les années
suivantes chez les auteurs post-rogériens. Ainsi, selon Rogers, «
en relation d'aide de type non-directif [...] les techniques primordiales
de l'aidant consistent à aider le client à reconnaître et
comprendre plus clairement ses sentiments, ses attitudes et ses formes de
réactions, et à l'encourager à en parler ». La
technique de reformulation adoptée par l'aidant dans cette
démarche est primordiale car elle permet au client de trouver «
quelqu'un qui l'écoute et accepte ses sentiments, il devient peu
à peu capable de s'écouter soi-même ». Philippe
Kaeppelin, docteur en philosophie au XXème siècle énonce
dans son ouvrage L'écoute que « l'écoute devient
active avec la parole et la parole en devenant écoutante
(c'est-à-dire questionnante, reformulante, encourageante, facilitante
pour le locuteur) se fait entendre. [...] Ce qu'il est convenu d'appeler
écoute active correspond en fait, à une écoute parlante
».1 De cette manière, nous comprenons mieux la
nécessité de la communication et donc de «
l'écoute parlante » dans le soin afin de savoir ce que pense
et ce que ressent le patient au coeur de la prise en charge.
Pour finir, l'IDE4 a relevé un aspect important dans la
considération du patient, c'est le rôle propre que doit adopter et
pratiquer les infirmiers dans leurs soins. Dans un premier temps, elle souligne
l'importance de « s'adapter » au patient c'est-à-dire
vérifier si « c'est le bon moment » pour
réaliser un soin, « s'il veut que tu reviennes dans 5 minutes
», « si la personne est prête » afin
d'ajuster « les soins au rythme du patient ». En effet,
« il ne faut pas se substituer à ses capacités
» mais il faudrait « toujours donner le temps, qu'il fasse
ce qu'il peut faire » et donc « l'accompagner
».
1 SIMON, E (de), FORMARIER M. (sous la dir.), 2012,
p.310-311.
Page 44 sur 84
Par la suite, l'infirmière évoque le travail de
stimulation et de motivation qu'elle effectue auprès des patients
notamment grâce à la valorisation : « vraiment mettre une
valeur sur les capacités d'opérer du patient et encourager, [...]
faut toujours encourager, ça stimule et ça le motive, ça
lui donne de l'importance, même s'il est malade et qu'il peut faire
très peu de choses, il peut quand même en faire ». De la
même manière, l'IDE2 fait référence à la
considération de la personne par son autonomie en énonçant
l'importance de «la solliciter progressivement ». Cette
façon de travailler est finalement inscrite dans le Code de
Déontologie des infirmiers du 25 novembre 2016. A l'article R. 4312-10,
concernant les devoirs des infirmiers envers les patients, l'infirmier doit
« consacrer le temps nécessaire en s'aidant, dans toute la
mesure du possible, des méthodes scientifiques et professionnelles les
mieux adaptées ». Tout comme dans le Code de la Santé
Publique régissant les activités et les compétences de
l'infirmier, l'article R.4311-2 énonce que l'IDE se doit « de
protéger, maintenir, restaurer et promouvoir la santé physique et
mentale des personnes ou l'autonomie de leurs fonctions vitales physiques et
psychiques en vue de favoriser leur maintien, leur insertion ou leur
réinsertion ». Enfin l'article 4311-3 rappelle que «
relèvent du rôle propre de l'infirmier les soins liés aux
fonctions d'entretien et de continuité de la vie et visant à
compenser partiellement ou totalement un manque ou une diminution d'autonomie
d'une personne ou d'un groupe de personnes. ».
Pour finir, il semble nécessaire de relever les dires
de l'IDE3 lorsqu'il parle des « habitudes » et des
« automatismes » adoptés par les soignants qui
conduiraient à l'instrumentalisation des patients. Selon une
étude de Swanson1, les « automatismes »
dans la pratique infirmière sont la conséquence d'un travail
dans un milieu où l'approche du caring n'est pas
implanté2. Rappelons que, selon la théoricienne Jean
Watson, le caring est l'essence de la pratique infirmière et
vise à promouvoir et préserver la dignité humaine.
Finalement, comme le suggère le devoir
d'humanité de l'IDE envers le patient inscrit à l'article
R-4312-3, le professionnel de santé se doit de respecter la vie humaine
de son patient en respectant sa dignité et son intimité. Ainsi,
ce respect de la pudeur, de l'intimité, de la dignité, de
l'autonomie, notamment grâce à la communication, au regard
soignant et à l'écoute active
1 Kristen Swanson, directeur de American
Association Of Colleges Of Nursing
2 ST GERMAIN, D, BLAIS, R, CARA, C, 2008, p. 57-69.
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conduiraient à humaniser le patient. Cette
démarche estimerait alors le patient comme une fin en soi et non comme
un moyen.
III.2.3. Un patient humanisé car
considéré
Ces deux parties nous auraient donc prouver l'importance du
consentement dans les soins ainsi que le respect de la dignité dans la
pratique soignante. En effet, elles nous ont finalement montrées que ces
deux démarches pouvaient avoir un but commun : celui de rendre le
patient un sujet et non un objet.
Pendant des siècles, les patients ont subi cette
médecine traditionnelle dite paternaliste où le médecin
avait la place de décideur et était gardien de
l'intérêt du patient. Le rapport entre les soignants et le patient
s'est construit de telle sorte que les professionnels de santé
évaluaient les besoins du malade et y répondaient avec leur
savoir-faire en estimant ce qui serait utile pour lui. Cette décision se
fondait donc à partir d'une relation unilatérale car le soignant
projetait ce qui serait bon pour son patient sans lui demander son avis. De ce
fait le patient n'était pas perçu comme un être
raisonnable, son approbation n'était donc pas demandée pour
effectuer un acte sur sa personne.
C'est grâce à la reconnaissance des droits des
patients et des devoirs des soignants que cette relation peut être
bilatérale et que le patient se voit reconnaître son pouvoir
décisionnel. De ce fait, les réformes hospitalières,
déterminant successivement les missions des établissements
publics ou privés, définissent depuis bien longtemps les soins
médicaux en tout genre. En revanche, à partir de la loi dite
« hospitalière » (loi n° 91-748 du 31 juillet
1991) la volonté de prendre en considération les droits des
patients fait partie prenante du processus de prise en charge de l'usager par
l'établissement. Différentes étapes ont permis d'aboutir
à la fameuse loi Kouchner du 4 mars 2002 relative aux droits des malades
et à la qualité du système de santé. Rappelons que
le 30 avril 1980, le Comité Européen de Santé Publique
suggère aux États membres « d'encourager les malades
à participer, de façon active, aux traitements, à la
prévention ainsi qu'au maintien, à la formation et au
rétablissement de leur santé et de celle des autres ».
Puis en juillet 1986, la commission pour la réforme
hospitalière organise la première audition nationale des
associations de patients.
Ainsi, la loi du 31 juillet 1991 (n°91-748) introduit un
premier chapitre à propos des « principes fondamentaux »
qui comprend deux sections, la première sur les « droits
du malade accueilli
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dans un établissement de santé »
et la deuxième concernant « l'évaluation et [...]
l'analyse de l'activité des établissements de santé
». Ce respect des « principes fondamentaux » se
retrouve par la suite dans le Code de Déontologie Infirmier à
l'article R.4312-4 énonçant que « l'infirmier respecte
en toutes circonstances les principes de moralité, de probité, de
loyauté et d'humanité indispensables à l'exercice de la
profession. »
Le décret du 31 décembre 1991 (n° 91-1415)
offre alors une prise de parole aux usagers et à leur famille
grâce à la création de conseils d'établissements
dans chaque structure sociale et médico-sociale. La
représentation des associations des patients est ensuite
autorisée lors de la création du Haut Comité de la
Réforme Hospitalière en 1995.
Par la suite, la circulaire DGS/DH n°95-22 du 6 mai 1995
instaure la Charte du patient hospitalisé afin de faire connaître
et rappeler les droits de chaque patient ainsi qu'assurer une diffusion plus
large à l'ensemble des professionnels de santé. S'y ajoute
ensuite l'ordonnance n°96-316 du 24 avril 1996 qui donne l'obligation aux
établissements de santé d'informer les patients de leurs droits
en en assurant le respect.
C'est finalement à partir de novembre 1998 que les
premiers états généraux des malades sont
réalisés afin de faire entendre les revendications des patients
sur le système de santé pour en dégager des axes de
priorités à établir. C'est ainsi que « la
démocratie sanitaire » donne la possibilité aux
patients de se transformer en acteur de soin. Le 24 juin 2000, la
recommandation n° R (2000) 5 du Comité des ministres aux
États membres établit alors « le développement de
structures permettant la participation des citoyens et des patients au
processus décisionnel concernant les soins de santé ».
Enfin, les cinq messages clefs recueillis lors des états
généraux conduisent à créer les quatre grands
titres1 de la loi du 4 mars 2002.
Ainsi cette remise en cause du modèle relationnel
unilatéral a permis d'accorder au patient ce pouvoir de
co-décision ainsi que cette place d'acteur principal du soin. Le patient
devient donc valorisé et considéré par la reconnaissance
de ses droits aux yeux de la loi. Cette évolution de reconnaissance des
droits du patient ne repose pas seulement sur la manière de consentir
de
1 Le premier titre concerne la solidarité
envers toutes personnes et en particulier envers les personnes
handicapées, le second est à propos des droits des patients, le
troisième définit l'amélioration du système de
santé et enfin le quatrième titre est relatif à la prise
en charge des risques sanitaires et leur réparation.
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celui-ci, mais aussi sur la qualité de la
considération de sa dignité. C'est ce que prouve la loi du 4 mars
2002 par ces différents thèmes dont l'appel à la
dignité, au respect, à l'accès à l'information et
à la transparence du système de décisions. Comme le
résume Philippe Bataille, directeur d'étude en sociologie :
« la démocratie sanitaire ne revient pas seulement à
faire du malade un acteur autonome qui se libérerait des
dépendances de la maladie, pas plus un consommateur de soins
raisonnable, à peine un usager responsable, mais un citoyen
respecté et reconnu dans son droit à être malade, donc
protégé et garanti. ».
Pour conclure, nous pouvons citer l'IDE4 lorsqu'elle
énonce que « tout est dans la considération de la
personne même si c'est vrai que c'est sur le corps que tu vas faire le
soin mais [ce corps] a l'esprit, il a sa façon de penser, sa
façon de voir, donc [...] il faut englober l'ensemble ». Le
patient sujet est donc humanisé à partir du moment où il
est considéré dans sa globalité.
Page 48 sur 84
Conclusion
Ce travail de fin d'étude m'a permis de
réfléchir sur ma pratique soignante et sur l'importance de la
place du patient dans sa prise en charge. En effet, mon interrogation sur la
manière dont le consentement pouvait humaniser le patient m'a offert une
réflexion plus élargie à ce sujet. Les situations d'appel
ont introduit mon hypothèse selon laquelle le patient cesse d'être
objectivé dès lors que le consentement est recueilli. Elle a
été vérifié et complété grâce
aux enquêtes menées auprès des infirmiers.
L'élaboration du cadre de référence m'a
permis d'approfondir les trois grandes notions que sont le corps, l'autonomie
et le consentement et ainsi de mieux comprendre leur place dans les sciences
infirmières. En retraçant l'histoire du corps, nous comprenons
d'avantage l'image que subit le corps dans la médecine et le peu de
liberté que le patient détient sur ce qui peut lui être
infligé. Ainsi par l'évolution des mentalités, des
connaissances et de l'implication des citoyens en matière de
santé, les droits des patients émergent pour reconnaître
leur pouvoir de décision, leur autonomie et leur capacité
à choisir ce qui est bon pour eux.
L'analyse des quatre entretiens effectués auprès
des infirmiers a affirmé que le consentement permettait, entre autres,
de faire du patient un sujet et non un objet. En effet, considérer que
le patient puisse être capable d'accepter ou de refuser un soin
grâce à des informations claires et précises fait partie de
ses droits et le reconnaît comme un être doté d'une raison.
En revanche, d'après ces infirmiers il ne s'agit pas seulement de la
recherche du consentement pour humaniser le patient mais il conviendrait de
considérer la globalité du patient.
Flora Bastiani, enseignante et chercheuse en philosophie,
énonce que dans les soins « faire la différence entre le
corps observable et plastique, et le corps comme lieu de la personne [..] peut
donc conduire non seulement à oublier l'aspect humain du contact avec
autrui, mais surtout à renoncer à sa responsabilité, son
autonomie et donc son consentement »1. Ainsi, en
permettant au patient d'exprimer sa volonté et d'être pris en
charge selon ses convictions en estimant sa pudeur et son intimité, le
soignant respecte le principe fondamental de sa dignité.
1 BASTIANI,F, 2018,
p.12-15
Page 49 sur 84
Par conséquent, nous avons vu la manière dont le
patient est considéré comme un sujet et non comme un objet. Ce
qui me conduit à m'interroger sur un point : dans le cas
où un patient consent à donner son corps à la recherche
clinique, son corps devient objet de recherche, le soignant fait-il du patient
un sujet seulement par le respect de sa dignité ?
Page 50 sur 84
Bibliographie
Page 51 sur 84
Monographie :
[1] CYMES, Michel. Hippocrate aux enfers - Les
médecins des camps de la mort. Le Livre de Poche. Stock, 2016. ISBN
: 978-2253185741
[2] DEVERS, Gilles. Droit et pratique du soin infirmier.
3ème édition. Lamarre, 2013. ISBN
:9782757307205
[3] GILIOLI, Christian. Droits des patients - comprendre
les textes pour bien les appliquer. Elsevier. Elsevier Masson, 2018. ISBN
: 9782294759123
[4] LAUDE, Anne et TABUTEAU, Didier. Les droits des
malades. Presses Universitaires de France, « Que sais-je ? »,
2016. ISBN : 9782130618881.
[5] MARAIS, Astrid. Droit des
personnes.3ème édition. Cours dalloz. Dalloz,
2018. ISBN : 2247179762.
Ouvrage ayant plusieurs auteurs :
[1] COURTINE, Jean Jacques (sous la dir.), AUDOIN-ROUZEAU, S ; DE
BAECQUE, A. et al. Histoire du corps- 3. Les mutations du regard. Le XXe
siècle. Points, 2015. ISBN : 2757854267
Ouvrage numérisé :
[1] BOULLY.C, PICCOLI, M et al. Gérontologie
Préventive, Eléments de prévention du vieillissement,
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Actes de conférences :
[1] MAMZER-BRUNEEL, M et DE FALLOIS, M. Les principes de
la démocratie sanitaire. Université de Paris Descartes,
Paris, le 21 septembre 2017.
Disponible à l'adresse :
https://mediasd.parisdescartes.fr/#/watch?id=NnrkOb25YV0n
Texte législatif :
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Civil, Chapitre II : Du respect du corps humain [en ligne]. Journal officiel du
30 juillet 1994. [Consulté le 3 octobre 2018].
Disponible à l'adresse :
https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070721
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[2] Décision n°94-343/344 DC du 27 juillet 1994
relative au respect du corps humain et relative au don et à
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prénatal [en ligne]. Journal officiel du 29 juillet 1994, page 11024.
[Consulté le 15 décembre 2018].
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Disponible à l'adresse :
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constitutionnel.fr/decision/1994/94343
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[3] Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des
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contribution de l'approche de caring des infirmières à
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10.3917/rsi.095.0057.
Disponible à l'adresse :
https://www-cairn-info.sirius.parisdescartes.fr/revue-recherche-en-soins-infirmiers-2008-4-page-57.htm
Page 55 sur 84
Documentaire :
[1] Hippocrate aux enfers [documentaire].
Réalisé par Jean Pierre Devillers, écrits par Michel Cymes
et Claire Feinstein. France : Pulsation Productions. Diffusé le 30
janvier 2018 sur France 2. 80 minutes.
Sources graphiques :
[1] EAKINS, Thomas. Portrait of Dr. Samuel D. Gross (The
Gross Clinic). La Clinique du docteur Gross. [Huile sur toile]. 1875.
Philadelphia Museum of Art, Etats-Unis. L'auteur est mort en 1916 ; cette
oeuvre est donc dans le domaine public dans tous les pays pour lesquels le
copyright a une durée de vie de 100 ans ou moins après la mort de
l'auteur. En France il s'agit de 70 ans après la mort.
Disponible à l'adresse :
https://artsandculture.google.com/asset/tQFcdDEg20osqg
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Annexes
Page 57 sur 84
I. Le Code de Nuremberg - 1947
Le Code de Nuremberg identifie le consentement
éclairé comme préalable absolu à la conduite de
recherche mettant en jeu des sujets humains.
1. Le consentement volontaire du sujet humain est absolument
essentiel. Cela veut dire que la personne intéressée doit jouir
de capacité légale totale pour consentir : qu'elle doit
être laissée libre de décider, sans intervention de quelque
élément de force de fraude, de contrainte, de supercherie, de
duperie ou d'autres formes de contraintes ou de coercition. Il faut aussi
qu'elle soit suffisamment renseignée, et connaisse toute la
portée de l'expérience pratiquée sur elle, afin
d'être capable de mesurer l'effet de sa décision. Avant que le
sujet expérimental accepte, il faut donc le renseigner exactement sur la
nature, la durée, et le but de l'expérience, ainsi que sur les
méthodes et moyens employés, les dangers et les risques encourus
; et les conséquences pour sa santé ou sa personne, qui peuvent
résulter de sa participation à cette expérience.
L'obligation et la responsabilité d'apprécier
les conditions dans lesquelles le sujet donne son consentement incombent
à la personne qui prend l'initiative et la direction de ces
expériences ou qui y travaille. Cette obligation et cette
responsabilité s'attachent à cette personne, qui ne peut les
transmettre à nulle autre sans être poursuivie.
2. L'expérience doit avoir des résultats
pratiques pour le bien de la société impossibles à obtenir
par d'autres moyens : elle ne doit pas être pratiquée au hasard et
sans nécessité.
3. Les fondements de l'expérience doivent
résider dans les résultats d'expériences
antérieures faites sur des animaux, et dans la connaissance de la
genèse de la maladie ou des questions de l'étude, de façon
à justifier par les résultats attendus l'exécution de
l'expérience.
4. L'expérience doit être pratiquée de
façon à éviter toute souffrance et out dommage physique et
mental, non nécessaires.
5. L'expérience ne doit pas être tentée
lorsqu'il y a une raison a priori de croire qu'elle entraînera la mort ou
l'invalidité du sujet, à l'exception des cas où les
médecins qui font les recherches servent eux-mêmes de sujets
à l'expérience.
6.
Page 58 sur 84
Les risques encourus ne devront jamais excéder
l'importance humanitaire du problème que doit résoudre
l'expérience envisagée.
7. On doit faire en sorte d'écarter du sujet
expérimental toute éventualité, si mince soit-elle,
susceptible de provoquer des blessures, l'invalidité ou la mort.
8. Les expériences ne doivent être
pratiquées que par des personnes qualifiées. La plus grande
aptitude et une extrême attention sont exigées tout au long de
l'expérience, de tous ceux qui la dirigent ou y participent.
9. Le sujet humain doit être libre, pendant
l'expérience, de faire interrompre l'expérience, s'il estime
avoir atteint le seuil de résistance, mentale ou physique,
au-delà duquel il ne peut aller.
10. Le scientifique chargé de l'expérience doit
être prêt à l'interrompre à tout moment, s'il a une
raison de croire que sa continuation pourrait entraîner des blessures,
l'invalidité ou la mort pour le sujet expérimental.
(Extrait du jugement du TMA, Nuremberg, 1947 (trad.
française in F. Bayle, Croix gammée contre caducée. Les
expériences humaines en Allemagne pendant la Deuxième Guerre
Mondiale, Neustadt, Commission scientifique des crimes de guerre, 1950.)
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II. Charte de la personne hospitalisée
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III. 14 besoins de Virginie Henderson
Besoin
|
Description du besoin
|
Respirer
|
Capacité d'une personne à maintenir un niveau
d'échanges gazeux suffisant et une bonne oxygénation.
|
Boire et manger
|
Capacité d'une personne à pouvoir boire ou manger,
à mâcher et à déglutir. Également à
avoir faim et absorber suffisamment de nutriments pour capitaliser
l'énergie nécessaire à son activité.
|
Éliminer
|
Capacité d'une personne à être autonome pour
éliminer selles et urine et d'assurer son hygiène intime.
Également d'éliminer les déchets du fonctionnement de
l'organisme.
|
Se mouvoir et maintenir une bonne posture
|
Capacité d'une personne de se déplacer seule ou
avec des moyens mécaniques, d'aménager son domicile de
façon adéquate et de ressentir un confort. Également de
connaître les limites de son corps.
|
Dormir, se reposer
|
Capacité d'une personne à dormir et à se
sentir reposée. Également de gérer sa fatigue et son
potentiel d'énergie.
|
Se vêtir et se dévêtir
|
Capacité d'une personne de pouvoir s'habiller et se
déshabiller, à acheter des vêtements. Également de
construire son identité physique et mentale.
|
Maintenir sa température corporelle dans la limite
de la normale (37,2 °C)
|
Capacité d'une personne à s'équiper en
fonction de son environnement et d'en apprécier les limites.
|
Être propre et protéger ses
téguments
|
Capacité d'une personne à se laver, à
maintenir son niveau d'hygiène, à prendre soin d'elle et à
se servir de produits pour entretenir sa peau, à ressentir un
bien-être et de se sentir beau. Également à se percevoir au
travers du regard d'autrui.
|
Page 61 sur 84
Éviter les dangers
|
Capacité d'une personne à maintenir et promouvoir
son intégrité physique et mentale, en connaissance des dangers
potentiels de son environnement.
|
Communiquer avec ses semblables
|
Capacité d'une personne à être comprise et
comprendre grâce à l'attitude, la parole, ou un code.
Également à s'insérer dans un groupe social, à
vivre pleinement ses relations affectives et sa sexualité.
|
Agir selon ses croyances et ses valeurs
|
Capacité d'une personne à connaître et
promouvoir ses propres principes, croyances et valeurs. Également
à les impliquer dans le sens qu'elle souhaite donner à sa vie.
|
S'occuper en vue de se réaliser
|
Capacité d'une personne à avoir des
activités ludiques ou créatrices, des loisirs, à les
impliquer dans son auto-réalisation et conserver son estime de soi.
Également de tenir un rôle dans une organisation sociale.
|
Se récréer
|
Capacité d'une personne à se détendre et
à se cultiver. Également à s'investir dans une
activité qui ne se centre pas sur une problématique personnelle
et d'en éprouver une satisfaction personnelle.
|
Apprendre
|
Capacité d'une personne à apprendre d'autrui ou
d'un événement et d'être en mesure d'évoluer.
Également à s'adapter à un changement, à entrer en
résilience et à pouvoir transmettre un savoir.
|
(Extrait de La nature des soins infirmiers de
Virginie Henderson (traduction de l'édition américaine The
Principles and Practice of Nursing de 1994), InterEditions, Paris, France,
1994 ISBN : 9782729605032)
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IV. Grille des Besoins Humains selon Marge
Reddington
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V. Grille d'entretien des enquêtes (1)
Présentation
Finalement, j'ai choisi l'entretien semi-directif qui permet aux
interviewés de répondre plus librement aux questions ouvertes
posées. Ainsi tous les thèmes exploités dans mon cadre de
référence (corps, autonomie et consentement) seront
abordés.
L'hypothèse à vérifier est la suivante :
dans le cadre d'un soin, le patient cesse d'être objectivé
dès lors que le consentement est recueilli par le soignant. C'est
pourquoi l'ordre des questions est choisi de manière à ne pas
inciter l'infirmier(e) à aborder la notion de consentement.
J'introduis la notion de consentement seulement à la fin
de mon entretien selon les réponses des interviewés de
manière à ne pas inciter leurs réponses.
Population choisis : Infirmiers.ères
travaillant auprès d'adulte conscient, capable de consentir aux soins
sans tutelle ou curatelle.
Présentation à l'infirmier(e) :
- Dans le cadre de mon mémoire j'ai besoin de
connaître les pratiques des infirmiers dans leur soins et les
représentations qu'ils ont sur différentes notions.
- Il est donc intéressant de me partager votre
expérience, vos ressentis, votre opinion et vos pratiques à
propos des différents thèmes que je vais aborder.
- Il n'y a pas de bonnes ou mauvaises réponses.
- La retranscription de nos entretiens sera sous anonymat et
selon votre autorisation je vais enregistrer notre entretien et prendre des
notes pour pouvoir retranscrire nos dires dans mon mémoire.
- Durée d'environ 30 minutes pour 5 questions
Grille d'entretien des enquêtes (2)
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45
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Question primaire
5
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Grille d'entretien des enquêtes (3)
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VI. Retranscription de l'entretien n°1 - IDE
Libéral
J'arrive à 11h comme prévu, je rencontre
l'IDE1, je me présente, nous parlons un peu du métier, de nos
parcours et lui présente mes objectifs. Nous sommes dans le cabinet,
assis face à face, lui sur une chaise, moi dans un fauteuil, le lieu est
calme et clôt.
Moi : « Mon mémoire je le fais sur tout ce qui est
à propos de la représentation du corps dans les soins, la
manière dont on perçoit le corps et la façon dont on
humanise le corps dans nos soins. Du coup j'ai 5 questions à propos de
la prise en charge de l'adulte qui se diffère de celle de l'enfant sur
certains points notamment avec la présence des parents. Pour commencer,
je vais juste te demander ton parcours professionnel, tu as toujours fait du
libéral ? »
IDE1 : « J'ai d'abord fait 3 ans de psychiatrie pour
être tout de suite dans les balles et sinon, oui que libéral
»
Moi : « ok et psychiatrie t'étais toujours
auprès d'adulte ? » IDE1 : « Euh ouai... »
Moi : « Ouai ? ok, du coup je te disais je voulais savoir
un peu tes représentations par rapport au corps, je vais te proposer des
questions très ouvertes, tu peux me dire tout ce que tu penses et te
passe par la tête etc. Comment tu vois le corps dans les soins, la
manière dont tu te le représentes ou tu le prends en
considération dans tes soins, le corps humain... »
IDE1 : « A bah au niveau du corps malade ou si je vois un
corps qu'est-ce que je me dis ? »
Moi :« voilà c'est ça, comment tu te le
représentes, que ce soit le corps de ton patient, ce genre de chose....
»
IDE1 : « Je dirais déjà avec beaucoup de
pudeur, tu vois, même si tu regardes un corps handicapé ou
abîmé. (onomatopée avec geste de la main afin de dire
« tout un tas de chose ») Quand t'es face au patient, tu sais,
comme la dame qui est venue, qui a du mal à montrer, tu sais tu fais pas
comme ça (écarquillement des yeux avec regards insistants)
ou fin tu regardes pudiquement en fait même si tu as une chose
à faire sur une partie du corps ou une toilette, c'est notre
métier de regarder tout le reste du corps, c'est pour ça que des
fois que quand on faisait des toilettes et que .... Maintenant on les fait
presque plus à cause des sociétés qui emploient des dames
pas formées... »
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INTERRUPTION DE L'ENTRETIEN CAR 2eme PATIENT ARRIVE EN
AVANCE. Reprise de l'entretien en lui rappelant qu'il parlait de pudeur
du corps.
IDE1 : « ... et que même quand je fais une toilette
ou quoi et que forcément tu regardes tout le corps parceque comme on
nous le rabâche tout le temps faut prendre les trucs dans sa
globalité donc c'est pas parceque tu viens pour un truc que...si tu
remarques un autre truc qui va pas ben de toute façon tu verras au fur
et à mesure, je sais pas même peut être maintenant au bout
d'un moment même quand tu rentres chez quelqu'un ou dans une chambre d'un
patient tu vas tout regarder pour voir s'il y a pas même une fuite d'eau
ou quoi (j'acquiesce) c'est à nous de vérifier qu'il est
dans un bon environnement donc du coup le corps je le regarde toujours avec de
la pudeur, c'est le premier mot qui me vient à l'esprit, ne pas
.....(mimant un regard appuyé)
parfois les gens atrophiés, je sais pas, qui ont plein
de .... Pas beau ou quoi Ben au bout d'un moment t'en vois tellement des
différents que, c'est pas que tu vois plus c'est que t'as un oeil de
professionnel donc t'as pas de jugements. C'est tout le temps cette phrase
qu'on nous disait pendant les études que j'ai retenue, pas de jugements
de valeurs et enfait c'est ça tu regardes sans juger, peut être
que si t'étais pas infirmière et que t'étais pas au boulot
tu vas juger, tu vois quelqu'un dans la rue, tout ça, ben quand t'es au
boulot, je sais pas moi naturellement je regarde et je juge pas .... »
Moi : « ouai tu rentres dans une sphère vraiment
professionnelle et du coup.... »
IDE1 : « ouai exactement et je suis en mode...
après je décide pas de cliquer sur le bouton mais je sais que
quand j'arrive je juge pas. »
Moi : onomatopée en signe d'acquiescement
IDE1 : « Voilà je dirais pudeur et sans jugement
c'est les 2 mots qui me viendraient comme ça »
Moi : « ok... parceque je sais pas du coup si t'as
déjà entendue parler de ces expressions «
instrumentalisation » ou « objectification » du corps, tu sais
dans nos soins... »
IDE1 : « objectification du corps ? »
Moi : « oui objectification du corps, tu sais c'est un
peu comme, par exemple, faire du patient, le corps un objet, le voir comme un
objet parce qu'on s'entraîne dessus, on fait parfois les soins sans
vraiment prendre en compte la personne etc. »
Page 68 sur 84
IDE1 : « ah ouaaii ! (en signe de compréhension).
Ah nan jamais »
Moi : « et du coup juste pour toi ce que ça
t'évoque, pas forcement personnellement, mais ce que ça
t'évoque cette expression un peu, cette notion sachant que toi tu
expliques très bien que tu es sans jugement, que t'as une pudeur donc
ça contredirait un peu justement cette « instrumentalisation »
mais... »
IDE1 : « Alors je vais...je suis.... Même si
parfois je fais des toilettes chez la même personne
pendant 3 ans, matin et soir, faire les trucs j'oublie jamais
ce que je suis entrain de faire, je suis jamais entrain de faire
....là, droite, gauche, comme ça....(mimant des gestes
brusques pour retourner une personne)... peut être sans faire
exprès quand t'es dans un jour où t'es pressé ou t'es pas
bien ou je sais pas quoi, je vais pas dire que ça m'est jamais
arrivé mais je pense pas même en étant pressé tout
ça, quand t'es chez les gens, pour moi c'est ... Inconcevable quoi. J'ai
toujours de respect pour les gens dont je m'occupe que...je me mets toujours
à leur place, j'inverse les rôles... »
Moi : « Et tu penses que du coup.... Ce respect là
...pour pas instrumentaliser la personne, tu
sais ce que tu fais ou pas ? la manière dont tu leurs
parles ou ce genre de chose Tu sais ce que tu fais justement pour pas
instrumentaliser cette personne ou pour pas qu'elle se sente
instrumentalisée ? »
IDE1 : « Ben ouai, ben y a des trucs qu'on nous apprend
déjà, toujours dire ce qu'on va faire, ça c'est le truc
technique qu'on t'apprend, ça va faire froid, ça va faire chaud,
je vais vous attraper comme ci, comme ça machin, après ça
c'est dans les premiers temps après je prends exemple vraiment d'une
toilette au lit c'est là où tu vois le plus le corps et que tu
dois t'en occuper, après la personne quand elle te connait et que tu la
connais, tu vas pas lui redire, tu sais déjà ce que tu vas lui
faire donc ça va être plus machinal mais je vais jamais... moi
j'aime pas faire mal....tous les gens me disent que je vais pas faire mal.....
et je pense que c'est juste parce que je pense et que j'ai pas envie de leur
faire mal, alors que tu vois, la dame a qui j'ai enlevé les fils elle
m'a dit qu'elle avait pas eu mal (j'acquiesce) et pourtant elle est
arrivée elle était stressée, elle aurait pu avoir mal tu
vois, elle avait oublié, machin, t'as vu elle était un
peu .elle s'est dit oulalal .... Et après t'as vu elle
était plus rassurée parce qu'elle avait pas mal et que ....je
pense toujours à pas faire donc je vais....on m'a toujours dit vous
faites pas mal.....que ça soit une piqûre que je fais tous les
jours à un diabétique, les gens me disent : votre collègue
il me fait mal... mais moi je fais même pas exprès c'est juste que
je me dis que
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voilà je .....soit je suis doux par nature sans m'en
rendre compte soit comme j'ai pas envie de
faire mal il y a une photo qui tournait sur les
réseaux sociaux qui montrait un diabétique je sais pas si
...avec sur un mois toutes les seringues (je lui réponds que oui en
effet je l'ai déjà vu et que c'est impressionnant) parce que
nous on se dit un diabétique trois fois par jour .....franchement c'est
le genre de truc qu'on torche entre guillemets parce que ça va vite,
mais tu sais voilà....mais quand tu vois ça tu te dis : ouai
quand même...Les gens ils en ont marre c'est psychologique donc quand ils
en ont marre ils ont mal donc je pense toujours à .....même
quand je vais vite j'essaye donc j'y pense et je fais pas mal
.enfin j'espère en tout cas. Il rit.
Moi : « Ben du coup là t'en as parlé, dans
les toilettes aux lits ce genre de chose.....donc tu t'adaptes au patient tu
disais mais donc pour toi l'autonomie dans ces soins-là, tu la prends de
quelle manière en compte, tu prends de quelle manière en compte
l'autonomie du patient quand c'est un patient que tu as vu plusieurs fois je
suppose que c'est plus simple parce que tu le connais mais quand c'est un
nouveau patient tu disais que tu observais mais est ce que tu fais autre chose
?
IDE1 : « Pour voir ce qu'il peut faire ou ne peut pas faire
? »
Moi : « ouai, par exemple, déjà en quoi c'est
important l'autonomie du patient dans tes soins »
IDE1 : « Alors nous déjà en libéral,
je vais te dire on a un problème, c'est un problème de temps
déjà, alors c'est vrai que des fois, j'avoue hein, j'avoue, on
laisse moins de place à
l'autonomie ça je sais que des fois je
préfère faire à leur place pour que ça aille vite
plutôt que de laisser faire même je sais pas pour une dame qui
pendant une douche elle sait faire, de se laver la tête elle-même,
ou de se frotter, parfois j'avoue je préfère faire moi-même
c'est plus rapide, tac tac tac, tu vois.... »
Moi : « je comprends, je comprends... »
IDE1 : « donc c'est vrai que la place à
l'autonomie dans le libéral... et même en institution ils sont
pressés aussi mais je pense que, ouai nous on veut que ça aille
vite, c'est pas terrible hein,
mais »
Moi : « enfin, tu t'en rends compte donc c'est que tu le
considères quand même, tu te rends compte que c'est le temps qui
influe aussi la dessus donc bon ..... »
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IDE1 : « après, si je suis là pour la
personne à ce qu'elle retrouve son autonomie, ça dépend je
suis là pour quoi enfait...Ça dépend de pleins de
facteurs...ça dépend de la personne, ça dépend du
soin que j'ai à faire, de l'âge, de pleins de choses enfait...on a
un diabétique il a 20 ans et tout, lui il met un peu de temps et tout,
machin mais je le laisse faire, tu vois je veux pas le faire à sa place,
parfois j'arrive tôt le matin il me dit : vas y pique moi.C'est le week
end, je lui dis : nan nan nan, moi je suis là, tu le fais !
C'était convenu avec ses parents qu'on venait pour le forcer parce qu'il
voulait pas faire sa piqure mais qu'on lui montre pour qu'il soit obligé
et qu'on vérifie ce qu'il fait surtout parce que ça rentre dans
les unités, donc là, lui je le stimule, bon après j'ai un
bon rapport avec lui parce qu'il a 20 ans et tout, du coup par contre je lui
dis, il sait que je suis pressé, donc je lui dis : t'as vu tu te
dépêches quoi. Mais là pour le coup je le laisse faire.
Donc tu vois ça dépend, il faut qu'il le fasse toute sa vie
après donc après si c'est un petit vieux je te dis pas que je
vais le laisser faire, parce que peut être il va jamais comprendre, c'est
pas qu'il veut pas mais c'est peut être un autre problème, quand
on vieillit on a pas toute sa tête etc, donc peut-être je vais
moins le laisser faire c'est vrai.... C'est vrai qu'en libéral, faut
avouer, parfois on est tellement dans le speed on prend pas le temps qui faut
ça c'est sur
après on veut que nos patients aillent bien donc quand
la personne est capable de faire sa douche je vais pas lui faire sa toilette
au lit....en plus c'est moins fatiguant pour nous de faire une douche
même parfois si c'est plus long parce qu'il met un quart d'heure à
aller à la salle de bain avec son déambulateur, là tu le
vois ... mais bon autant faire ce qu'il peut.....on
essaye moi je vais jamais faire un truc en me disant : ah
c'est pas bien ce que tu fais. Ou
alors si je le fais un jour je me dis : nan mais demain tu fais
pas ça et tout- »
Moi : « ouai donc tu te réévalues aussi
tout le temps en soit, tu te remets tout le temps en question .... »
IDE1 : « ça c'est pas que dans notre
métier, ça c'est dans la vie faut tout le temps se
réévaluer, c'est autre chose mais oui je suis en perpétuel
remise en question ça c'est sur »
Moi : « Du coup ma dernière question, c'est pour
toi qu'est-ce.... Je sais pas trop comment ça se passe en libéral
le consentement du patient, genre pour faire les soins, ce genre de choses,
mais qu'est-ce que permet le consentement dans les soins de tes patients
»
IDE1 : « Que le patient consente aux soins ? » Moi :
« oui. »
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IDE1 : « Ben déjà comme t'as dit par
rapport en institution il y a une grande différence c'est que les
patients nous ouvrent la porte. Des fois l'hôpital ils y sont parcequ'ils
ont fait un malaise ou je sais pas, un accident, il y sont et ils ont pas le
choix, tu rentres tu fais toc toc et tu rentres donc là ils nous ouvrent
la porte donc ils sont forcément consentant.
Moi : « d'accord je comprends, c'est drôle de voir
ça de cette manière, c'est intéressant ».
IDE1 : « A 95%, sauf le petit jeune, lui il était
pas très consentent, mais bon ses parents nous ouvraient et tout, c'est
rare, mais là les gens ils sont tous consentant et puis quand nous,
notre patientèle ils sont là, quasiment tous, des patients
chroniques comme on dit, ils sont même contents qu'on vienne.
Après une petite dame qui perd la tête et tout, elle veut pas
prendre ses médicaments je lui donne le midi quand je repasse même
si je suis pas censé retourné chez elle, je vais pas
l'embêter, j'y retourne plus tard. Le rapport est complétement
différent en libéral, surtout quand j'étais en psychiatrie
quand ils voulaient pas prendre leur traitement, la bagarre, une injection, je
suis passé d'un truc où les patients voulaient pas se soigner
à un truc où « oueee super on vous adore », ça
m'a fait un super choc, nan parce que là quand on vient chez eux et
qu'ils nous ouvrent la porte c'est qu'ils sont complètement consentant.
»
Moi : « Tu l'as vécue comment de devoir forcer les
traitements en psychiatrie ? »
IDE1 : « Franchement en psy, attraper les gens, devoir se
mettre à 5 sur lui, même les attacher, tu sors d'une chambre
où t'as attaché une personne à son lit, ouai c'est chaud
franchement...C'était un des pires trucs que je faisais ça,
attacher les gens, après si tu te persuades que c'est pour le bien pour
pas qu'il se fasse du mal. J'ai jamais fait un truc où je me suis dit
c'est abusé ce qu'on fait, parfois on entend des truc : ils droguent des
gens etc. Mais j'ai jamais fait un truc où je me suis dit : qu'est-ce
qu'on est entrain de faire : nan ça m'aies jamais arrivé. C'est
vrai qu'en psychiatrie, le psychotique ne se considère pas comme malade,
là le consentement bah....tu te dis que même si tu le forces c'est
pour son bien, ça dédouane un peu mais c'est vraiment pas
évident. Après parfois lors des soins par exemple un pansement,
les trucs délicats, genre vraiment intime comme des fils d'épisio
ou les trucs de cancer du sein des dames même des jeunes, parfois j'ai
pas besoin de mettre de gants mais j'en mets pour faire la barrière, par
exemple j'utilise un set à pansement j'ai juste à me laver les
mains etc. mais je préfère, si je dois soulever un peu comme
ça (mimant comme si il soulevait un sein avec sa main) je
préfère mettre des gants et faire une barrière pour pas
que ça soit ma peau qui la touche. »
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Moi : « ouai je vois, c'est intéressant »
IDE1 : « Ça se sent la gêne parfois, quand
une dame va montrer sa poitrine ou quoi, tu vois, c'est perceptible, ouai j'ai
des petites techniques comme ça mais je préviens toujours si je
dois soulever la poitrine d'une dame, je vais toujours lui dire «
excusez-moi, voilà... ». T'es plus gêné qu'elle de
toute manière, tu vois ce que je veux dire, on est deux
gênés en général. Après je pense que c'est
une question d'attitude générale, quand t'arrives chez les gens,
t'es pas chez toi. C'est aussi en fonction de la personnalité, en
collaborant avec des collègues parfois ça passait pas avec des
gens, à cause de leur attitude ou autre... Il y a un truc aussi, il y
avait 10% d'hommes dans la profession et en vrai, je sais pas quoi, j'ai
déjà travaillé avec des collègues et c'était
pas comme ça, on dirait tout rejahissé sur elles et du coup elles
étaient pas cools avec les gens, alors que les hommes c'est
différents enfin après c'est une question d'attitude. Enfin bref,
les patients après ils préfèreraient ne pas te voir,
déjà ils sont malades... »
Moi : « c'est vrai, écoute j'ai posé toutes
mes questions, merci beaucoup ».
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Retranscription de l'entretien n°2 - Service
Néphrologie
Nous sommes dans une salle de staff, assis face à
face, chacun dans une chaise avec une table entre nous, le lieu est calme et
clôt.
Après les explications sur les modalités de
l'entretien préalablement établie :
Moi : « Je vais d'abord te demander ton expérience
professionnelle, par quels services tu es passé etc. »
IDE2 : « euh...ça fait, ça va faire 8 ans
que je suis diplômé infirmier, j'ai commencé...sur un
service, de l'intérim sur [nom de l'hôpital], il y avait
différent type de spécialité : médecine interne,
gériatrie et il y avait néphrologie. J'ai
préféré ensuite chercher un post en CDI fixe et la
néphrologie était un service qui me plaisait bien donc j'ai
envoyé plusieurs CV sur Paris et [nom de l'hôpital] était
les premiers à me répondre, donc là ça va faire 7
ans que je travaille ici, sur la néphrologie adulte. »
Moi : « D'accord, et tu veux changer ? tu veux voir autre
chose ? ou tu es bien ici. »
IDE2 : « Après ce serait... j'aimerais bien passer
des concours, tout ce qui est IPA, infirmier en pratique avancée qui est
entrain de se mettre en place progressivement, enfin ça a
déjà commencé mais c'est un peu limité au niveau
des postes et sinon passer les concours de cadre, etc. Essayer d'évoluer
quoi..»
Moi : « D'accord, ok, du coup je vais commencer avec les
questions propres au mémoire, ma première question, comme je te
disais c'était à propos du corps, c'est comment est-ce que tu te
représentes le corps de ton patient, pas forcément
abîmé mais le corps en général, dans tes soins. Les
représentations que tu as et la place qu'il occupe. Le corps humain en
tant que tel. »
IDE2 : « C'est quelque chose d'essentiel, quand on soigne
les gens il y a quoi qu'il en soit un contact physique du coup... quotidien
avec le patient, après c'est un peu dans le milieu, dans le contexte de
l'hôpital c'est vrai qu'on désacralise un peu le corps du patient,
c'est quelque chose que voilà ça peut... On a tous cette pudeur,
cette intimité...dans un contexte, si tu veux, en général
dans la vie quotidienne, c'est vrai que le fait d'être hospitalisé
on a un peu ce détachement là sur le corps qui est quand
même malade, altéré, mais après voilà, c'est
la représentation que j'ai au début, c'est quelque chose qui se
fait au début, je sais pas, que je visualisais un peu comme, pas
forcément tabou, mais quand on est dans les premières
années,
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on est étudiant, on a toujours cette réticence
à être en contact avec le corps et c'est quelque chose avec
laquelle on se familiarise un petit plus au fur des années etc. Ce
regard soignant-patient, ici, à différencier ces deux positions
là et à pouvoir avoir un contact un peu plus facil en tant que
soignant et à avoir moins d'apriori ou ce tabou là avec la notion
du corps quoi... »
Moi : « Oui, je comprends... Du coup quand on rentre dans
ce milieu hospitalier etc, je sais pas si t'as déjà entendu
l'expression d'instrumentalisation ou d'objectification du corps dans le soin,
le fait qu'on fasse du corps un objet, toi ça t'évoque quoi ?
»
IDE2 : « Après c'est un terme assez
péjoratif, je vois la nécessité, du coup je vois pourquoi
on dit ça, après pour moi c'est un terme assez péjoratif,
mais c'est vrai comme une sorte de bulle le corps, je sais pas trop comment le
formuler, mais je comprends qu'il puisse devenir autre chose quand il arrive
à l'hôpital et ouai pour y accéder il faut se
détacher de certain principe tout en gardant après... tout en
gardant à l'esprit qu'il faut respecter la pudeur, l'être en
général, il faut toujours faire attention à ça
même si on peut instrumentaliser et même si je trouve ça un
peu péjoratif.. »
Moi : « oui complétement, complétement, donc
t'en es conscient que ça puisse exister... » IDE2 : « oui oui
je suis conscient que..oui oui »
Moi : « du coup je suppose que c'est une remise en
question perpétuelle pour ne pas instrumentaliser le corps mais t'as des
solutions personnelles pour pallier à ça, peut être que tu
ne t'en rends pas compte parce que c'est dans ta pratique mais ... »
IDE2 : « nan après, faut toujours avoir un
contact, expliquer quoi qu'il en soit les soins que ça soit une
toilette, ou des soins un peu plus technique, un pansement, après il y a
toujours ces parties du corps où faut respecter la pudeur, après
si on montre un pied ou un bras c'est pas la même chose que si on voit
les fesses ou du coup les parties sexuelles du patient, c'est chaque partie du
corps, on doit pour chaque partie du corps faire preuve de pudeur, du coup et
après il y a aussi le fait que ça soit des hommes ou des femmes,
selon après les croyances ou les religions ou juste le sexes de la
personne, si c'est un infirmier qui va faire un soin à une femme ou des
trucs un peu plus basique comme un ECG ou quoi, on essaye de voir si ça
dérange pas la patiente que ça soit un homme qui fasse l'EVG ou
pas, peu importe les religions etc, après généralement
c'est formulé quand il y a une gêne, même si essentiellement
il y a beaucoup de filles dans ce métier là, mais du coup
être un gars, ça m'est déjà arrivé de voir la
personne gênée et je
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proposais éventuellement du coup qu'une autre personne
réalise ce type de soin là parce que ça posait
éventuellement une gêne ou un problème pour la patiente,
pas forcément qu'elle me le formule mais je voyais qu'elle était
gênée, je posais la question et c'est elle qui réalisait ce
soin là »
Moi : « ouai je comprends... là j'ai une autre
notion liée au corps et justement en lien avec l'instrumentalisation et
l'objectification qui comme tu l'as dit est très péjoratif, c'est
par rapport à l'autonomie de ton patient, comment est-ce que, tu parlais
de toilette, de soin, comment tu l'évalues ou comment tu te le
représentes et quelle importance ça a l'autonomie du patient, que
ça soit dans tes soins ou... »
IDE2 : « les moyens d'évaluer déjà,
bah dans un premier temps déjà dans la communication, on pose la
question à la personne, des fois, après c'est, quand la personne
va être alitée ou quand il va y avoir un manque de communication,
on va déjà voir en premier temps lors de l'évaluation
pendant une toilette, on voit si elle réussit à se mobiliser avec
des gestes simples, plier les genoux, se mobiliser sur le côté,
tenir la barrière, et après pour voir au niveau de la marche, on
la met tranquillement sur le bord du lit, et la solliciter progressivement pour
savoir si elle réussit à se mobiliser seule, après si on
voit quand il y a un souci au niveau de la motricité, on se
réfère au médecin et on voit avec les kinés si elle
peut passer pour faire de la kiné motrice pour réévaluer
et réajuster et du coup voilà, optimiser la prise en charge...
après c'est quelque chose au niveau de l'autonomie du patient, c'est
quelque chose qu'on fait automatiquement et machinalement pour ne pas brusquer
le patient, si on connait pas le patient on va lui poser la question
directement et on va l'évaluer une première fois au niveau de son
levée etc. Pour savoir comment il se débrouille et s'autonomise
pour savoir s'il est apte à faire le soin. »
Moi : « quand tu dis : lui poser la question directement,
c'est-à-dire ? »
IDE2 : « ses capacités ouai, voilà s'il est
autonome, après on a un recueille de donnée de façon,
à l'admission, c'est des items du coup qui font partie quasiment des
premières questions et après on a un premier regard,
d'observation et c'est la communication qui fait qu'on sait, mais après
la communication on a l'évaluation, faut pas oublier cette
étape-là, même si le patient est autonome et qu'au premier
regard il semble autonome, faut voir s'il l'est réellement et
réajuster »
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Moi : « ok, et ma dernière question, pour toi dans
tes soins, en prenant en compte l'autonomie et la représentation du
corps etc, le consentement il a quelle place ? »
IDE2 : « Après bah, comment dire ça, le
consentement ça fait partie prenante du coup de la démarche de
santé dans le sens où si on a pas le consentement, après
il y a deux types de consentement, s'il y a un consentement claire, libre et
éclairé ou quelqu'un qui peut pas consentir de manière
lucide, après le consentement ça fait partie intégrante du
soin, on peut pas, c'est à partir de ça qu'on pourra
accéder à ce corps, et permettre la réalisation des soins
quoi, la bonne continuité des soins, si on pas ce
consentement-là, de la personne du coup cet accès là pour
communiquer et justifier ses soins, ça va être un frein à
la réalisation de démarche de santé. Voila. »
Moi : « Ok, merci, parfait, »
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Retranscription de l'entretien n°3- Service
Néphrologie
Nous sommes dans une salle de staff, l'IDE est assis de
biais et n'est pas directement face à moi,, chacun dans une chaise avec
une table entre nous, le lieu est calme et clôt.
Après les explications sur les modalités de
l'entretien préalablement établie :
Moi : « Je vais juste te demander ton expérience
professionnelle, ce que tu as fait déjà... »
IDE3 : « Bah déjà, c'est mon premier poste,
ça fait un an et demie que je suis diplômé, juillet 2017..
»
Moi : « Ok et là, ton devenir ? »
IDE3 : « Ben là je vais partir, je vais faire de
l'intérim, je voulais faire du libéral mais bon après
c'est de l'organisation quoi... »
Moi : « Et toujours avec les adultes ? » IDE3 «
ouai les adultes... »
Moi : « Ok, alors, du coup la première question,
par rapport au corps, c'est la façon dont tu te représentes le
corps dans les soins, la place qu'il occupe, tes représentations,
l'importance que tu lui apportes en fait, le corps humain en tant que tel
»
IDE3 « Ah oui euh, c'est très vaste,
représentations du corps dans le soins, bah euh, déjà moi
je regarde un peu partout, même lorsque l'aide-soignant vient, quand on
fait la toilette, je regarde s'il y a pas des rougeurs, tout ce qui est
début d'escarre, les écorchures parce que parfois il y a des
patients qui ont des ongles, après comment te dire, t'as un but
particulier ou pas ??? »
Moi : « C'est juste pour savoir tes représentations,
est ce que c'est très important pour toi ? »
IDE3 : « Ah si bien sur, c'est très important, on
peut pas, enfin le corps c'est pas un objet quoi...»
Moi : « Ok d'accord je vois, ma deuxième question
c'est un peu par rapport à la première, je sais pas si tu sa
déjà entendue parlé de l'expression «
instrumentalisation » et « objectification » du corps dans les
soins mais... »
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IDE3 : « Ca c'est les habitudes ça, le fait
d'être trop longtemps... Je vais pas te mentir parfois ça
m'arrive, dernièrement il y avait une patiente elle rentrait de
permission sauf que je devais lui faire sa glycémie avant que les
aides-soignants servent le repas et euh, j'étais tellement dans mes
affaires, je me dis qu'il faut absolument que je lui fasse sa glycémie,
sauf que la patiente elle est autonome et elle a son appareil et elle me dit
« mais j'ai déjà fait » sauf que moi j'étais
dans mon truc et elle m'a dit « mais vous m'avez piquer » et je me
suis dit « ah mince » mais c'est des automatismes mais c'est pas bien
franchement.. »
Moi : « Est-ce que depuis cette expérience, t'as
mis en place des solutions personnelles pour éviter ça ?
»
IDE3 : « Ben déjà c'est l'écoute
active, franchement l'écoute active, j'essaye d'écouter les
patients, j'agis pas comme le précédent patient j'ai agis et le
suivant... en gros c'est ça, comment dire .... Comment dire, mmmh, les
automatismes, les habitudes, je ne pourrais pas vraiment te dire,
répète un peu la question »
Moi : « Tout à l'heure tu parlais de patient
objet, quelles sont les solutions que tu utilises pour que justement ne pas
rendre le corps comme un objet ? »
IDE3 : « Moi je le regarde, enfin c'est plus comme je te
dis, je l'écoute, c'est l'écoute, après je t'avoue parfois
avec les patients quand ils sont dans le coma ou ... ça sera un peu plus
compliqué, je pense que c'est le fait de parler avec le patient, tout
est dans la communication... ok...je sais pas si je réponds vraiment
»
Moi : « Du coup c'est lié à la
manière dont tu considères le corps, quand tu l'écoutes,
comment est-ce que tu prends en comptes l'autonomie du patient, comme il y a
différents degrés d'autonomie etc ? »
IDE3 : « Moi déjà j'essaye de favoriser au
mieux l'autonomie, ah ouai ouai, les collègues, il y a une patiente qui
dit que en gros faut écraser ses médicaments, mais moi je lui dis
qu'elle peut bien prendre ses médicaments, qu'elle a pas besoin de les
écraser, même aller au fauteuil... »
Moi : « Oui tu stimules.. et comment tu arrives à
te rendre compte qu'un patient est plus autonome qu'un autre ? »
IDE3 : « Déjà les gestes de la vie
quotidienne, après les patients, ils font d'eux-mêmes, parce que
nous parfois on a tendance on arrive on veut faire, par exemple la
glycémie, il me dit « nan
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je sais faire » du coup je vais lui donner l'appareil,
l'aiguille, l'insuline, ils ont l'habitude de faire chez eux donc pourquoi ils
n'auraient pas l'habitude ici, comme pour les stomies, les autonomiser c'est
mieux. »
Moi : « Et donc ma dernière question : quelle
place a le consentement dans tes soins, est ce que c'est important pour toi ?
»
IDE3 : « Si j'utilise tout le temps, après moi
personnellement je n'aurais pas aimé qu'on ne me propose pas donc je
propose tout le temps. »
Moi : « Quand tu dis que tu proposes c'est de quelle
manière ? »
IDE3 : « Est-ce que vous êtres d'accords pour que
je fasse, si vous voulez pas je vais pas vous forcer, des fois parfois dans les
soins si c'est important, je lui dis les enjeux »
Moi : « Ok, oui tu expliques, du coup pour toi, le
consentement, t'expliques parce que toi t'aimerais pas qu'on t'impose quelque
chose comme tu me disais... »
IDE3 : « je pense aussi que c'est dans mon
éducation, c'est comme ça que j'ai été
éduqué, après, comment te dire, c'est aussi ça la
représentation du corps en fait, je pense que justement si on demande
pas le consentement du patient, dans un sens, indirectement, on le
considère comme un objet quoi... »
Moi : « je vois, ok, parfait, ben merci beaucoup »
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Retranscription de l'entretien n°4- Service
Néphrologie
Nous sommes dans une salle d'attente vide, assises
côte à côte, chacune dans une chaise, il n'y a pas de table
entre nous, le lieu est ouvert et parfois bruyant.
Après les explications sur les modalités de
l'entretien préalablement établie :
Moi : « Alors, je vais d'abord te demander ton parcours
professionnel, par où tu es passé, ce que tu as fait etc...
»
IDE4 : « D'accord, alors, au niveau des
expériences professionnels, j'ai commencé jeunes auprès
des enfants tu vois, du babysitting et après j'ai été
embauché, comment on appelle ça déjà, fille au
pair... »
Moi : « ah oui jeune fille au pair »
IDE4 : « jeune fille au pair voilà, où je
m'occupais des enfants, de la maison de l'entretien de la maison, des repas
etc., ensuite j'ai dû faire ça a peu près 3, 4 ans ensuite
j'ai changé de métier j'ai travaillé comme vendeuse dans
une boutique de la famille de la personne pour qui je me suis occupée
des enfants et je suis restée 3 ans à peu près, ensuite
j'ai changé de métier, j'ai travaillé dans une usine de
confection de t-shirt avec les machines tout pendant 3 ans, ça j'ai fait
ça chez moi aux pays, et ensuite, je suis venue ici, en 1998, j'ai
recommencé un petit peu à garder des enfants à domicile
des parents et après 2000 j'ai décidé de passer les
concours d'auxiliaires de puer' pour faire la formation et ensuite travailler
dans les structures et j'ai travaillé ici en tant qu'auxiliaires de
puériculture, ici, en octobre 2001 à la crèche où
je suis restée pendant 3 ans et demie après j'ai demandé
de changer de service pour être un peu plus dans les services actifs
comme on appelle ça, depuis 2005 jusqu'en 2015 où j'étais
auxiliaire de puer' en pédiatrie générale et en 2015 j'ai
passé mes concours pour devenir infirmière et j'ai
été diplômée au mois de décembre,
l'année dernière, j'ai commencé par l'UH
pédiatrique, c'est très dense, c'est pas fait pour tout le monde,
surtout en début de carrière en général, et du coup
je suis arrivée ici, c'est plus calme, après il y a des choses
à faire, ceci-dit c'est pas les mêmes approches, avec les enfants
tu dois négocier avec les enfants, avec les parents, tu dois attendre
que l'enfant soit d'accord, ça prend beaucoup de temps... »
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Moi : « Eh ben justement, moi je vais te poser des
questions sur l'approche des adultes, donc déjà pour savoir
quelle importance t'apportes au corps du patient dans tes soins. »
IDE4 : « ben déjà le corps du patient je le
considère comme un être vivant hein, qui ressent des douleurs, des
désagréments, enfin tu vois même les patients, disons qu'il
est malvoyant, qu'il entend pas ou ...ben tu touches, il a toujours des
sensations, des réponses, parceque la façon de toucher le corps,
il altère pas, ça renvoie des messages, par exemple si tu le
touches avec violence ça renvoie un message que tu veux pas faire le
soin, il pourrait interpréter en lui que t'es pas contente d'être
là, que t'es pas contente de prendre soin de lui, que voilà, le
corps du patient qui pour moi, est pas juste un objet de soin comme on le dit
souvent, mais c'est vraiment un être sensible que l'on doit vraiment
prendre soin, en faisant attention, même ta façon de toucher,
ça renvoie ... »
Moi : « et justement, t'as parlé de l'objet de
soin, ma deuxième question, on entend parler de l'expression «
instrumentalisation » et « objectification » du corps dans les
soins, t'en as plus ou moins parlé mais est-ce que ça
t'évoque quelque chose en particulier. »
IDE4 : « Par rapport à ça, par exemple dans
mon expérience ou... »
Moi : « oui, tu l'as déjà dit, qu'est-ce
que tu fais pour justement limiter cette objectification et pour humaniser
comme tu disais tout à l'heure le patient, en fait »
IDE4 : « En fait par rapport à ça, il faut
toujours garder à l'esprit que même si la personne est malade tu
ne viens pas parce que tu as des soins à faire donc tu vois, tu viens
parce que tu veux prendre soin de la personne, tu demandes à la
personne, comment tu fais d'habitude, tu te présentes par exemple, tu
annonces le soin, tu demandes si c'est le bon moment, s'il veut que tu
reviennes dans 5 minutes ou tout de suite, si la personne est prête, sans
non plus attendre une heure par exemple, le soin que tu dois faire le matin tu
dois le faire l'après-midi, voilà après on ne force pas
mais on essaye toujours d'expliquer, que peut-être on doit faire le soin
maintenant parce que voilà, les raisons, par exemple si tu dois faire un
bilan, tu lui dis on attend les résultats pour que le médecin
adapte le traitement ou que le médecin commence le traitement,
après c'est pour voir, c'est pas juste t'arrives, j'ai un pansement
à faire à la personne, je commence mon truc, tout est dans la
considération de la personne même si c'est vrai que le corps c'est
ton.... C'est sur le corps que tu vas faire le soin mais le corps il a tout
un...Il a l'esprit, il a sa façon de penser, sa façon de voir,
donc voilà il faut englober l'ensemble, obligé »
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Moi : « Et ben du coup, t'es en néphrologie dont
tu es passé d'enfant à adulte, ma troisième question c'est
sur l'autonomie du patient, quelle importance tu lui apportes et comment tu la
considères dans tes soins ? »
IDE4 : « D'accord, alors au niveau de l'autonomie c'est
vrai, il faut, chacun a ses limites, tu vois, par exemple selon l'âge, la
lourdeur de la pathologie, l'envie de la personne, le moment aussi, c'est comme
nous tous aussi, t'as des moments où t'es pas dans ceux là, c'est
pas le bon moment ou ailleurs, donc voilà, il faut toujours
négocier, demander l'avis, accepter que la personne refuse par exemple
en disant « nan c'est pas le moment, voilà... » et
après faut aussi savoir à l'avance que le patient est capable de
faire parce que bon parfois s'il est capable de faire, c'est vrai que ça
prend du temps, parce que parfois quand tu suis le rythme, chez l'enfant ou les
personnes âgées ou même chez les jeunes hein, quand t'es
malade ... Tu peux pas faire les soins au même rythme que tu as fait
avant donc t'es obligé d'adapter les soins au rythme du patient. On
laisse quand même le temps pour que le patient fasse ce qu'il peut faire,
parce qu'il faut pas se substituer à ses capacités sinon il va
régresser, et il va régresser dans ses soins et parfois il peut
même avoir une réaction négative en disant « nan mais
pourquoi on me laisse pas faire, je suis capable » même s'ils le
disent pas, ils peuvent le penser donc toujours donner le temps, qu'il fasse ce
qu'il peut faire et tu complètes ou l'accompagner tu vois, « vous
voulez faire ça et moi pendant ce temps-là je fais le dos »,
c'est s'adapter, voilà, vraiment mettre une valeur sur les
capacités d'opérer du patient et encourager, vraiment encourager,
faut toujours encourager, ça stimule et ça le motive, ça
lui donne de l'importance même s'il est malade et qu'il peut faire
très peu de chose, il peut quand même en faire. »
Moi : « ouai je vois c'est très intéressant
du coup tout à l'heure tu parlais justement de l'information que tu
donnais au patient lors d'un soin, et c'est pour ça que je voulais te
demander, est-ce ça.., enfin est ce que le fait d'être d'accord,
enfin qu'est-ce que ça évoque pour toi de demander son
acceptation, de savoir s'il est d'accord de faire un soin, quelle importance
pour toi en tant qu'infirmière... »
IDE4 : « euhm, l'importance, enfin déjà
demander l'accord du patient fait partie de ses droits, il a le droit de
refuser selon la législation et il a le droit d'accepter, de refuser
enfin.. enfin voilà après s'il y a vraiment des soins
nécessaires à sa santé, à son état de
santé et qu'il faut le faire alors nous on essaye en tant qu'IDE,
d'expliquer tu vois, après s'il refuse toujours alors on passe par le
médecin et le médecin va expliquer un petit plus car le
médecin connait un peu plus
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le but de ce soin et pourquoi ce soin et les médecins
ils ont aussi d'autres arguments derrière, voilà même si on
sait un petit peu les conséquences du refus de soin, le médecin
peut aussi un petit peu...ou sinon si on arrive toujours pas à
désamorcer la situation on peut en parler à la psychologue parce
qu'elle a des connaissances et des mots qu'elle peut utiliser auxquelles on ne
peut pas forcément penser ... »
Moi : « oui une autre approche... »
IDE4 : « voilà une autre approche et surtout elle,
elle sait s'il y a quelque chose d'autre derrière c'est pas vraiment que
la personne refuse ce soin-là, c'est parce qu'il y a peut-être
quelque chose derrière, donc voilà faut travailler en
équipe. Et pour moi, l'accord du patient sur le soin que je fais bah
ça me rassure parce que je suis pas là... je me dis franchement
si je demande même pas l'avis du patient et je fonce faire mon soin et je
sais même pas si en lui-même il accepterait que je fasse le soin ou
pas donc je veux pas entraver sa volonté et pour moi c'est une marque de
respect. Tu sais des fois, on dit de ne pas faire de transfère mais dans
le soin, mais on transfère toujours en se disant « si
c'était moi » ou si c'était quelqu'un de ma famille, est-ce
que pour moi c'est correct. On est obligé hein, on est des humains, on a
un coeur donc voilà, on est sensible quand même, ça rend
humain les soins et il faut considérer le patient comme une personne
respectable, tu dois respecter quelqu'un que tu dois, pas dans le sens
obéir, mais dans le sens où il faut avoir sa coopération
parce qu'un patient qui coopère c'est un soin qui va mieux et sa
santé qui s'améliore.
Moi : « et bien merci, c'est une très belle
conclusion »
Grille analyse des résultats
INFIRMER 1 INFIRMIER 2
|
INFIRMIER 3 INFIRMIER 4
|
Quels sent les différent sersices clans lesquels
VOUS ripez travaillé ?
|
3 ans en psychiatrie Toujcu rs a u prés
d'adulte
|
Diplômé depuis 8 ans D'abord en
intérim
7 ans néphrologie adulte
Concours IPAa venir
|
Diplômé depuis Jan Service de néph ro
agie est son premier post
|
Jeune fille au pair
Auxiliaire pendant 15 ans IDE depuis 2017
Tente la pédiatrie, ne lui convient
pas_
En intégration en service de
néphrologie
|
Comment voyez-vous le corps dans vos somas ?
|
Pudeur
Sans jugement Observation du corps Regarde
partout
|
Quelque chose d'essentiel 'Désacralise un peu le
corps a 'hôpital Pudeur Intimité Regard soignant pour prendre
contact
|
le regarde un peu partout Le corps C'est pas un
objet
|
Étire vivant
Ressent douleurs et
désagréments
Toucher, sensation
Pas seulement un objet de
soin
Etre sensible
|
Le termes
e instrumentalisaticn . eu a objecti£ication ). du
cons vous évoque-t-il quelque chose'
· Si oui, avec vos moi,
Pourri-vms
u dire ce que cela représente pour vous
'
Entant qu'infirmier (e), co=aent POU' 005-nous
pallier a cette
n tessirZrm6Rlai:în-lion du
oorfAr x. ?
|
J'oublie jamais ce que je saâ entrain de
faire
Je vais pas dire que ça m'arrive
jamais
Respect pour les gens Toujcu rs dire ce qu'on va faire,
ça va faire chaud, ça va faire froid...
|
Péjoratif x.3
Toujours avoir un contact Respecter la pudeur
|
Ça C'est les habitudes Parfois ça m'arrive
Automatismes le le regarde{écoute
Ecoute active
|
Tu ne viens pas pour des soins â faire mais pour
prendre soin rue la personne Annonce le soin, ne force pas
Il n'y a pas que le corps, il y a l'esprit, la
façon de voir/penser
|
Qu'évoque pour vous la paire en compte
de
|
Problème de temps Laisse moins faire
On veut que ça aille vite
|
Communication
Eva uation pendant la toi lette
|
Favoriser au mieux Font d'eux même
|
Chacun a ses limites Négocier, demander
l'avis, accepter le refus
|
l'autonomie du patient dans M é-decin et
Ki né
|
Savoir ce qu'est rsapable le
|
les soirs 7
|
Poser la question directement
|
patient
Pas le soin au même rythme
|
|
S'autonomise pour voir ai apte
Observation
|
Laisse le temps
Pas se substituer â ses
capacrtés
|
|
|
S'adapter, encourager, stimuler, motiver, donner de
l'importance
|
Pour vous. qu'est-ce que permet le
consentement
|
Quand le patient ouvre la porte = consentant
|
Partie prenante de le démarche de
santé
|
l'aurais pas aimé qu'on me propose pas
|
Accord du patient, légis'ation, droit
d'accepter
|
dans les soins'
|
Le consentement en
|
2 types de consentement :
|
Ça vient de mon éducation
|
ou de refuser.
|
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psychiatrie = pas évident
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claire, Tibre et éclairée ou
|
Si on demande pas on le
|
Expliquer
|
|
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non lucide.
C'est à partir de ça qu'on pourra
accéder a ce corps Sinon si pas de consentement i frein â
la réalisation de la démarche de la santé
|
considère comme un patient objet
|
Equipe médecin, psychologue Je peux pas entraver
sa volonté
Marque de respect
Si c'était moi
Coopération du patient mais pas
obéissance_
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