UNIVERSITE DE KINSHASA
FACULTE DE DROIT
DEPARTEMENT DE DROIT ECONOMIQUE ET SOCIAL
GESTION ET EXPLOITATION DES TERRES
AGRICOLES DANS LA
VILLE DE KINSHSA : VERS
UNE AGRICULTURE FAVORABLE A LA
SECURITE
ALIMENTAIRE
Par
BAYINA LOYOLA Yannick Gradué en droit
Mémoire présenté et
défendu le 02 juillet 2021, en vue de l'obtention du grade de
licencié en Droit
Option : Droit économique et social
Directeur : Garry SAKATA M. TAWAB
Professeur
Rapporteur : Déborah BAIKALA
Assistante
Année universitaire 2019-2020
[j]
IN MEMORIAM
A nos regrettés KIPEMPE MPAMUKAR Nestor ; BAYINA NGALEY
Nénette qui nous ont quitté, alors qu'on avait encore besoin
d'eux. Que le seigneur garde leurs âmes.
BAYINA LOYOLA Yannick
[ii]
EPIGRAPHE
« Rien n'est meilleur que l'agriculture, rien n'est plus
beau, rien n'est plus digne d'un homme libre. Elle suffit amplement aux besoins
de notre vie »
DAMASE POTVIN.
[iii]
DEDICACE
A mes parents, Léonard TAMPWO BAYINA OSHINDAL et
Scholastique MUNIEMBE, qui se sont sacrifiés pour notre bon devenir
qu'ils trouvent ici un sentiment de joie et d'amour ;
A ma marâtre MBO ENIKA, pour son amour ;
A mon oncle SAKATA SELEBAY Papy-basile, NTOMBE KISANGAL Firme;
A ma future épouse et à ma future
progéniture.
[iv]
REMERCIEMENTS
Tout travail scientifique requiert pour sa réalisation,
le concours de plusieurs personnes. Tel a également été le
cas du présent travail.
Nous remercions ainsi tout le corps académique de
l'Université de Kinshasa, particulièrement les professeurs, chefs
des travaux et assistants de la Faculté de Droit. Nous citons
nommément le Professeur Garry SAKATA M. TAWAB, qui, en dépit de
ses occupations a accepté de diriger ce travail de fin d'étude et
qui n'a cessé de nous encourager et de nous soutenir. Il en est de
même pour Madame l'assistante Deborah BAIKALA, notre encadreuse, à
qui nous disons grand merci pour tous les sacrifices consentis à notre
égard.
Très affectueusement, à mes frères et
soeurs : BAYINA BINETA Rodrigue, BAYINA MITRE Cynthia, BAYINA ENIKA
Adévie, BAYINA LENIR Cherel, pour vos prières et affection
fraternelle dont vous m'avez toujours entouré.
Dans un autre registre, nos remerciements sont
également destinés à monsieur et madame : KAMBALA
TSHIMANGA eleazard, KANYANGA MBONIGABA becky, NABINTU MAGALAMANYI
Céline, DIDIME KAPINGA Grâce, ETSHINDO LONGEMBE Laurent,
DIAMUANGANA KABUYA Dorcas, Nadège MUSONGO, Nadine LOUVET et LUKESA MBETE
Jodelle.
Nous sommes aussi redevables aux services du fonds
perpétuel d'études en sigle PEF, de l'Eglise de
Jésus-Christ des saints des derniers jours pour le soutien consentie en
notre faveur.
A tous ceux qui ne sont pas cités ici nommément,
mais dont l'apport à ce travail a été non
négligeable, qu'ils trouvent en ce travail, l'accomplissement de leurs
voeux en notre personne.
BAYINA LOYOLA Yannick
[v]
LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS
> AL: Alinéa
> ART: Article
> C.S.A.O : Club de sahel et de l'Afrique de l'ouest
> C.P.V.P.K: Comité Provincial de la Stratégie
pour la Réduction de la Pauvreté Ville-
Province de Kinshasa
> D.E.S: Diplôme d'Etudes Supérieures
> Ed.: Edition
> F.M.I: Fonds Monétaire International
> GATT: General Agreement on Tariffs and Trade
> G2: Deuxième Graduat
> Ha: Hectare
> J.O.R.D.C. : Journal Officiel de la République
Démocratique du Congo
> J.O.Z : Journal Officiel du Zaïre
> L.G.D.J: Librairie Générale de Droit et de
Jurisprudence
> N° : Numéro
> O.M.S: Organisation Mondiale de la Santé
> O.N.G: Organisation Non Gouvernementale
> Op. Cit : Opus Citatum
> O.N.U : Organisation des Nations Unies
> P.P : Plusieurs Pages
> P : Page
> P.N.S.A : Programme National de Sécurité
Alimentaire
> R.D.C : République Démocratique Du Congo
> T: Tome
> UNIKIN: Université de Kinshasa
> W.W.W: World Wide Web (toile d'araignée mondiale
[6]
INTRODUCTION
I. Problématique
C'est depuis 1922 que la ville de Kinshasa est successivement
la capitale du Congo-belge et de la République démocratique du
Congo1. Avec plus ou moins 400.000 habitants2 en 1960,
cette ville a vu sa population s'accroitre rapidement jusqu'à atteindre
cinq millions d'habitants en 1968, ce qui explique une croissance exponentielle
si on se réfère aux statistiques de 1973, qui se chiffraient
à 1198720 habitants3, selon les estimations de l'institut
national des statistiques de la RDC; elle comptait 6 062 000 d'habitants en
2000, huit millions en 20094 et en 2010, elle a atteint environ dix
millions repartis sur 600 Km2 d'espace des terres
agglomérées pour une superficie totale d'à peu près
10.000Km2. Les projections indiquent pour l'avenir que la population
pourra atteindre dix-sept millions d'ici 2025 et en 2035 elle sera de vingt
millions d'habitants5.
Depuis l'Indépendance, par manque d'une politique
urbaine de planification, des chefs coutumiers ainsi que différents
types d'autorités administratives sont intervenus pour vendre et
distribuer la terre eux-mêmes, provoquant ce qu'on pourrait appeler un
« urbanisme spontané »6. Comme le dit
Nzuzi7, cela a abouti à une « anarchie foncière
» où des acteurs de tout type vendent et gèrent la terre et
la propriété dans la ville sans réglementation claire et
bien définie. Conformément à la législation, seul
le service des affaires foncières a le droit de distribuer, de louer et
de vendre la terre. Toutefois, en réalité, ce n'est pas
parfaitement le cas. Comme l'espace urbain et semi-rurale devient de plus en
plus rare et disputés, la lutte se fait de plus en plus rude.
1 Il convient de noter que c'est depuis
l'arrêté du 2 juillet 1922 que Kinshasa a été
attachée à Léopoldville. La nécessité de
réunification de Léopoldville et Kinshasa était
commandée par la nécessité politique et administrative
d'en faire la capitale. Kinshasa est devenue effectivement une ville en 1929.
Actuellement, l'article 2 alinéa 3 de la constitution du 18
février 2006 dispose que Kinshasa est la capitale du pays et le
siège des institutions nationale. Elle a le statut de province. La
capitale ne peut être transférée dans un autre lieu du pays
que par voie de référendum.
2 F.LELO NZUZI, Croissance urbaine et recul de
la ceinture verte maraichère à Kinshasa, in Congo-Afrique,
n°438, octobre 2009, p.567.
3(J)., FLOURIOT, `' Croissance de l'habitat»,
in FLOURIOT J., DE MAXIMI. J., PAIN. M., (dir.), Atlas de Kinshasa, Kinshasa,
Institut géographique national, 1975 ; LELO NZUZI, F., Kinshasa, ville
et environnement, Paris, l'Harmattan, 2008
4 F. LELO NZUZI, op. Cit, p.1.
5 Idem
6 M. LUSAMBA, K., Le rôle des chefs
coutumiers dans la production de la ville : le cas de la ville de Kinshasa-Est,
Mémoire du diplôme interuniversitaire d'études approfondies
en Développement, Environnement et Sociétés, FUCaM -
FUSAGx - UCL - ULG, 2005 ; LELO NZUZI, F., op. cit.
7 F. LELO NZUZI, op. cit., p. 55.
[7]
Parce que dans le vieux centre urbain l'espace était
déjà affecté (bien qu'on y trouve aussi des luttes
foncières), c'est maintenant surtout dans les terres semi-urbaines de la
ville que la lutte foncière est intense. L'espace le plus frappé
par l'anarchie foncière reste surtout cette partie que les terres
semi-urbaines dont nous avons vue et remarqué durant ce derniers
années.
En outre, l'augmentation de la population s'est
accompagnée de la précarité de la sécurité
alimentaire8 de la population, l'état de la production locale
n'étant pas à mesure de couvrir les besoins alimentaires à
cause de la forte démographie et suite à la lutte urbaine entre
l'espace résidentiel et l'espace résultant de l'expansion rapide
de la Ville. Si jusqu'à ce jour, les causes profondes de cette situation
semblent être ignorées et que l'évaluation de la
sécurité alimentaire des ménages n'est pas encore un
phénomène courant à Kinshasa9, il est tout de
même admis que le niveau de vie de la population est bas. La situation
alimentaire s'est beaucoup dégradée, et est devenue très
préoccupante à Kinshasa10. Car, la population de de la
Ville de Kinshasa vit dans une insécurité alimentaire
chronique11. L'accès à la nourriture de base est
difficile.
Il s'agit là de la crise alimentaire qui reste un
phénomène structurel et conjoncturel et prend ses racines dans
l'histoire politique et économique de la RDC en générale
et de la Ville de Kinshasa en particulier, qui dispose pourtant des terres
arables et bénéficie des meilleures conditions
agro-écologiques. Malgré l'existence de toutes ces
potentialités, une grande partie de la population Kinoise n'arrive pas
à faire face à ses besoins alimentaires.
Si nous nous référons aux conclusions du sommet
mondial sur l'alimentation de 1992, la sécurité alimentaire
repose sur trois piliers : la disponibilité des aliments,
l'accessibilité de ces aliments et leur utilisation. Ce concept ne
trouve pas en RDC et surtout à Kinshasa un terrain propice pour son
application étant donné qu'une bonne partie de la
8 L. MBUANGI MBUKU , Monographie de la ville de
Kinshasa, comité provincial de la stratégie pour la
réduction de la pauvreté, Ville de Kinshasa(CPVPK), 2005,
p.139.
9 J-P. BANEA MAYUMBU, Consommation alimentaire,
pratique de survie et Sécurité alimentaire des ménages
à Kinshasa, in sécurité alimentaire au
Congo-Kinshasa, Paris, l'Harmattan, 2001, P. 37.
10R. KHONDE MAVUANGI, Transformation,
commercialisation et Consommation du manioc : une stratégie de
sécurité alimentaire à Kinshasa, in sécurité
alimentaire au Congo-Kinshasa, Paris, l'Harmattan, 2001, p.179.
11Il ressort du programme national de
sécurité alimentaire, vision amendée du 16 décembre
2010, p18. Elaboré par le Ministère de l'Agriculture que
l'insécurité alimentaire chronique est celle qui résulte
souvent des périodes prolongées de pauvreté, d'absence des
biens, d'accès inadéquat aux ressources productives ou
financières et concerne donc les personnes ou groupes qui ne sont pas
capable de satisfaire leurs besoins nutritionnels sur une longue période
de temps.
[8]
population kinoise sont frappée par l'insuffisance des
aliments rendant difficile leur accessibilité et leur
utilisation12.
Déjà dans les années 1968, cette
situation avait attiré l'attention des pouvoirs publics et les
tentatives de solutions avaient conduit entre autres, à la
création des Zones maraichères autour de la ville de
Kinshasa13. A ce jour, la situation a changé et est
dépassée à cause de l'accélération de la
croissance démographique et l'occupation coutumière et
légale des terres. Les cultures maraichères à elles
seules, sont insuffisantes pour couvrir les besoins alimentaires en hausse. Il
faut donc une solution.
Il existe dans la ville de Kinshasa des étendues des
terres inexploitées. En effet, 93% des terres de Kinshasa sont
rurales14. Selon l'article 60 al 3 de la loi
foncière15, ces terres ont une vocation agricole de quoi
mettre en valeur rationnellement pour nourrir la population et améliorer
sa sécurité alimentaire. La Constitution de la République
Démocratique Congo du 18 février 2006 énonce en son
article 47 al 1er que le droit à la santé et à
la sécurité alimentaire est garanti16.
En vue de rendre effective cette recommandation
constitutionnelle, la loi portant principes fondamentaux relatif à
l'agriculture en son article 42 dispose : « La sécurité
alimentaire et la production agricole priment sur la culture des biocarburants
»17. La sécurité alimentaire et la production
agricole peuvent être effectives en ce qui concerne la Ville de Kinshasa
que si elles sont le résultat d'une gestion rationnelle des terres
agricoles.
On peut dire que, malgré l'existence des
étendues importantes des terres agricoles dans la ville de Kinshasa, les
autorités de la ville de Kinshasa sont loin non seulement de
12 D-J MUTEBA KALALA et J. NKULU MWINE FYAMA,
Crises alimentaires et mesures d'atténuation en République
Démocratique du Congo, Revue des stratégies et promotion de
bonnes pratiques, KONRAD ADENAUER STIFTUNG, Kinshasa, 2009,p. 5
13 S. KINKELA SUNDA, Op. Cit. p. 2 « il a
été aménagé pour la ville urbaine de Kinshasa 13
centres maraichères sur une superficie estimée à 719 Ha
»
14 G. KALAMBAY LUMPUNGU, Droit agricole et
forestier, cours polycopié, Université de Kinshasa,
Faculté des sciences agronomiques, 2010-2011, p.16
15 La loi n°73-021 du 20 juillet 1973 portant
régime général des biens, régime foncier et
immobilier et régime des sûretés.
16Art 47 de la constitution de la République
Démocratique du Congo du 18 février 2006 modifiée par la
loi n°11/022 du 20 janvier 2011 portant révision de certains
articles de la constitution de la République Démocratique du
Congo du 18 février 2006, in J.O.R.D.C., n° spécial,
52eme année, 5 février 2011.
17 Art 42 de la loi n°11/022 du 24
décembre portant principes fondamentaux relatif à l'agriculture,
in J.O.R.D.C, n° spécial du 27 décembre 2011.
[9]
maitriser la gestion de ces terres, mais aussi de proposer une
réponse au problème de l'insécurité alimentaire qui
se pose avec acuité au sein de sa population18.
Eu égard à ce qui précède, les
questions centrales de cette recherche se résument
à ce sens :
? Est-ce que la Ville de Kinshasa est une ville agricole ?
? Comment sont gérées les terres agricoles de la
Ville de Kinshasa ?
? Que faut-il faire pour que les terres agricoles de la Ville de
Kinshasa puissent contribuer à l'objectif de la sécurité
alimentaire ?
Telles sont les questions principales que soulève cette
étude, il sied de donner l'hypothèse du travail.
II. Hypothèse
L'une des exigences de la recherche scientifique est qu'il
faut non seulement savoir soulever ou souligner le problème en posant
certaines questions, mais aussi savoir leur réserver des réponses
hypothétiques, lesquelles réponses servent véritablement
de fil conducteur de la recherche puisque c'est également elles qui
suggèrent la nature des techniques de recherche à mettre en
oeuvre ultérieurement19.
C'est ainsi que l'on définit l'hypothèse comme
de propositions admises aux données du problème que le chercheur
dépouillera par une dissertation avec des arguments scientifiques et
techniques jusqu'à retenir celles que l'on va appuyer ou renforcer pour
marquer, enseigner ou renseigner et qui sera ainsi le prélude de la
formulation du sujet de l'étude20. Pour REZ SOHAZY, on entend
par hypothèse, une série de réponses qui permettent de
prédire la vérité scientifique, mais vraisemblable au
regard des questions soulevées par la problématiques et dont la
recherche vérifie le bien-fondé ou mal
fondé21.
Au regard de toutes ces définitions, nous allons
émettre quelques élément de réponses à notre
problématique.
18 Y. TSHINGOMBE MULUBA, L'ajustement
structurel de l'économie et la sécurité alimentaire en
RDC, in Sécurité alimentaire au Congo-Kinshasa, Paris,
l'Harmattan, p.418.
19 L. ALBARELLO, Apprendre à chercher,
éd. De BOECH, Bruxelles, 1999, p. 14
20 E. MWANZO, Notes du cours d'Initiation
à la recherche scientifique, deuxième année de
graduat Droit, UNIKIN 2011-2012, p. 36.
21 R. REZ SOHAZY., cité par SHOMBA KINYAMBA
S., Méthode de la recherche scientifique, éd. M.E.S,
Kinshasa, 2006, p.53.
[10]
Primo, la Ville de Kinshasa est une Ville qui a une double
fonction partant de ses différentes communes qui sont totalement
urbaines et d'autres partiellement urbaines, elle est confirmée par
l'arrêté départemental n°00122 du 08 décembre
1975 dans ses articles 1 et 2.
Secundo, pour sa gestion, au regard de l'article 54 de la loi
foncier, l'Etat a divisé son domaine foncier en domaine public et
domaine privé . Ainsi, les articles 56 et 60 de la loi foncière
disposent que les terres qui constituent le domaine privé de l'Etat sont
les terres urbaines et les terres rurales. Le premier ne fait pas l'objet de
notre étude; par contre, le second fait l'objet de notre
réflexion dans cette étude. Il sied de signaler que les terres
rurales ne sont concédées qu'après le droit de la
communauté locale ait été payé (le chef coutumier
qui est l'ayant droit coutumière c'est lui qui perçoit l'argent).
Et après l'Etat signera avec le requérant un contrat d'occupation
provisoire. Pour que le requérant signe le contrat d'acquisition des
terres agricoles les articles 191 de la loi foncière et 16 de la loi
n°11/022 du 24 décembre 2011 donne les éléments qui
doivent figurer dans le dossier de la demande des terres rurales d'une personne
physique ou morale.
Tertio, pour que les terres agricoles puissent contribuer
à la sécurité alimentaire nous faisons appel à
l'Etat à travers ses services ainsi que les opérateurs du secteur
concernée au respect de la loi n°73-021 du 20 juillet 1973 portant
régime général des biens, régime foncier et
immobilier et régime des sûretés telle que modifiée
et complétée par la loi n°80-008 du 18 juillet 1980 et de la
loi N°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux
relatifs à l'agriculture. Car ce dernier a été
promulgué pour combler le déficit longtemps observé dans
ce secteur et elles fixe les grandes orientations et prend en compte les
objectifs de la décentralisation et répond au souci de promouvoir
la production agricole, la croissance de ce secteur, la garantie de
l'autosuffisance alimentaire et le développement de la
société en milieu rural.
L'hypothèse étant donc fixé, il sera
question de donner l'intérêt du travail. III.
Intérêt du travail
Tout travail scientifique doit avoir nécessairement un
intérêt quelconque que le chercheur poursuit non pas pour son
propre compte mais plutôt pour la société ou la
communauté. Pas de travail scientifique sans intérêt. Tel
est le principe fondamental de toute
[11]
recherche22. Cet intérêt provient soit
de l'intuition personnelle soit du résultat d'une influence quelconque
sur le chercheur.
Ainsi notre étude présente un intérêt
double : théorique et pratique.
Sur le plan théorique, elle permet de contribuer
à la compréhension et l'applicabilité des lois en
l'occurrence la loi n°73-021 du 20 juillet 1973 portant régime
général des biens, régime foncier et immobilier et
régime des sûretés telle que modifiée et
complétée par la loi n°80-008 du 18 juillet 1980 et la loi
N°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux
relatifs à l'agriculture.
Sur le plan pratique en revanche, cette étude permet
à la population kinoise de résoudre la question de
l'insécurité alimentaire ou mettre fin à
l'insécurité alimentaire ainsi trouver la solution au
problème de la gestion de terres agricole et son exploitation pour qu'en
sorte que l'insécurité alimentaire passe par la production de
base, car ni l'importation, ni l'approvisionnement de la ville par les
provinces encore moins, par les cultures maraichères à eux seuls,
sont actuellement insuffisants pour combattre l'insécurité
alimentaire.
L'intérêt du sujet étant donc fixé,
il sied de définir les méthodes et techniques de
recherche.
III. Méthodes et Techniques de recherche A.
Méthodes
Le professeur MBOKO DJ'ANDIMA définit la méthode
comme étant une démarche rationnelle de l'esprit pour arriver
à la connaissance ou à la démonstration d'une
vérité23. Madeleine GRAWITZ pense quant à elle,
que la méthode est l'ensemble des opérations intellectuelles par
lesquelles une discipline cherche à atteindre la vérité
qu'elle poursuit et qu'elle veut démontrer et
vérifier24. Elle va plus loin dans sa définition
lorsqu'elle soutient que la méthode et la technique est une
réponse à un comment. C'est un moyen d'atteindre un but mais qui
se situe au niveau des faits ou des étapes pratiques. La méthode
est variable selon l'objet de la recherche.
22 B. MUJINYA BAHATI, Leçons à
tirer de la révision constitutionnelle du 15 août 1974 dans le
contexte actuel de la démocratie, Travail de fin de cycle,
Université de Kinshasa, Droit public, 2010, p. 14.
23 MBOKO DJ'ANDIMA, Principes et usages en
matière de la rédaction d'un travail universitaire, CADICE
UNIAPAC, Kinshasa, 2004, p.21.
24 M. GRAWITZ, Les méthodes en sciences
sociales, Paris, Dalloz, 7e éd., 1986, p.360.
[12]
Dans le cadre de notre étude, nous avons fait usage de
la méthode juridique à travers son approche
exégétique, et la méthode sociologique.
La méthode juridique à travers son approche
exégétique est un ensemble des procèdes qui consiste
à interpréter les textes législatifs et
règlementaires pour dépister le véritable esprit du
législateur en vue d'en cerner l'étendue et les limites qu'il
fixe à leur application25. Cette méthode étant
bien fondamentale pour tout juriste, elle nous a permettra ainsi d'analyser les
textes des lois en la matière, en l'occurrence en matière
d'agriculture. Elle nous permettra de se référer aux textes
juridiques, précisément la loi N°11/022 du 24
décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à
l'agriculture, à l'Arrêté départemental 00122 du 8
décembre 1975 érigeant en circonscriptions urbaines certaines
zones ou parties de zone de la ville de Kinshasa, ainsi que la loi
n°73-021 du 20 juillet 1973 portant régime général
des biens, régime foncier et immobilier et régime des
sûretés telle que modifiée et complétée par
la loi n°80-008 du 18 juillet 1980.
Quant à la méthode sociologique, dans la
préface de son ouvrage de l'individualisation de la peine, SALEILLES
allait dans ce sens que le droit est avant tout une science sociale, la science
sociale par excellence ; c'est-à-dire qui doit s'adapter à la vie
de la collectivité pour laquelle est faite, et donner satisfaction
à toutes les exigences des nécessités pratique et à
tous les desiderata qui en ressortent, et qui se traduisent en conception
juridiques26.
La méthode sociologique pour sa part, consiste à
éclairer le texte grâce au contexte sociologique dans lequel il
est né : courants idéologiques, besoins sociaux, état des
moeurs et de cultures, conception des rapports économiques27.
Ce qui nous a servi de faire une juste appréciation de la situation
actuelle qui prévaut sur terrain, ou mieux de confronter les
dispositions légales au vécu quotidien relativement à
l'agriculture.
B. Techniques
La technique est un « procédé qui permet au
chercheur de récolter les données et informations sur son sujet
d'étude ».
25 KIENGE-KIENGE NTUDI, L'initiation à la
recherche scientifique, G2/Droit, UNIKIN, 2010, p.71
26 R. SALEILLES, de l'individualisation de la peine
: étude de la criminalité sociale, 2éme éd.,
Bibliothèque générale des sciences sociale, 1909, Paris,
VI, p. 23 ; Cité par Eddy MWANZO IDIN'AMINYE, cours de
méthodologie juridique, syllabus, faculté de droit, UNIKIN,
2017-2018, p. 74
27 E. MIDAGU BAHATI, Cours de méthode de
sciences sociales, deuxième graduat B, Faculté de Droit, UNIKIN,
2001-2002 p. 37.
[13]
Selon Robert. PINTO et Madeleine. GRAWITZ, les techniques sont
des outils mis à la disposition de la recherche et organisé par
la méthode dans ce but. Elles sont limitées en nombre et sont
communes à la plupart des sciences28.
En réalité, une technique de recherche aide
à asseoir une méthode donnée29.
Sur ce, en tenant compte des objectifs poursuivis, nous avons
retenu la technique documentaire qui nous servira à la consultation de
divers documents écrits, notamment les ouvrages, les notes de cours,
l'internet ainsi que la technique d'interview qui nous a permis d'interroger
les exploitants du secteur agricole sur les réalités
présentes de notre société en rapport avec la gestion et
l'exploitation des terres agricoles de la ville de Kinshasa.
IV. Délimitation du sujet
Restreindre son champ d'investigation ne devrait pas
être interprété comme une attitude de faiblesse ou de fuite
de responsabilité mais bien au contraire comme une contrainte de la
démarche scientifique30. C'est ainsi, l'objet de recherche
doit être délimité dans le temps et dans l'espace, si non
le sujet ne peut être épuisé31. La
conséquence certaine d'une démarche scientifique est d'imposer
à son auteur certaines conditions dont notamment, l'obligation pour lui
de fixer des limites à son action. Il serait irréel, sinon
prétentieux de faire une étude allant aux
extrémités de tous les éléments pris du point de
vue de l'espace géographique.
Sur ce, l'articulation du sujet tel que présenté
constitue en soi sa propre délimitation par rapport à l'espace
géographique, car nous ne circonscrivons notre étude que sur la
Ville de Kinshasa principalement dans les communes semi-urbaines à
savoir la commune de Mont-Ngafula, Kimbanseke, Maluku et N'sele.
Temporellement, notre étude s'inscrit principalement
dans la fourchette des périodes allant du 24 décembre 2011
à ce jour. Le choix de cet intervalle de temps se justifie par le point
de départ de l'application de la loi portant principes fondamentaux
relatifs à l'agriculture.
28 M. GRAWITZ et R. PINTO, Méthodologie de
recherche en sciences sociales, Paris Dalloz, 1972, pp. 80-81.
29 E. MWANZO IDIN`AMINYEE, Cours d'initiation
à la recherche scientifique, Syllabus, Faculté de Droit,
UNIKIN, 2008-2009, p. 63
30 SHOMBA KINYAMA, Op. Cit., p.38
31MBOKO DJ'ANDIMA, Op. Cit, p.4.
[14]
V. Annonce du plan
Ce travail comprend deux chapitres. La première traite
sur l'accès au sol à des fins agricoles et le second analysera
les terres kinoises face à la sécurité alimentaire. Une
conclusion clôturera le présent travail.
[15]
CHAPITRE I. L'ACCES AU SOL A DES FINS
AGRICOLES
Dans ce chapitre portant sur l'accès au sol à
des fins agricoles, nous analyserons d'abord le principe de la
souveraineté de l'Etat sur les ressources naturelles (section I),
l'administration et la gestion des terres agricoles (Section II) et les droits
et obligations du concessionnaire (section III).
SECTION I. LE PRINCIPE DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE
DE L'ETAT SUR LES RESSOURCES NATURELLES
L'article 4 de la loi portant principes fondamentaux relatifs
à l'agriculture dispose : « l'Etat exerce une souveraineté
permanente sur les ressources naturelles et les ressources
phylogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture
»32. En outre, il ressort de l»article 9 de la
Constitution du 18 février 2006 tel que modifiée par la loi
n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles
de la constitution énonce que : « l'Etat exerce une
souveraineté permanente notamment sur le sol, le sous-sol, les eaux et
les forêts, les espaces aérien, fluvial, lacustre et maritime
congolais. Ainsi que sur la mer territoriale congolaise et sur le plateau
continental. Les modalités de gestion et de concession du domaine de
l'Etat visé à l'alinéa précédent sont
déterminées par la loi »33.
Cet article consacre le principe de la souveraineté
permanente de la RDC sur ses richesses et ses ressources naturelles, qui a
été maintes fois proclamé par les résolutions de
l'ONU (1803, 1515, 1304,1314)34. Ce principe est à la fois
une norme impérative qualifiée de jus congens et un
élément fondamental du droit des peuples à disposer
d'eux-mêmes35.
Une précision mérite d'être
apportée ici, c'est celle de distinguer le titulaire de l'exercice du
droit de souveraineté. A l'article sous examen, le constituant parle de
l'Etat, tandis que les résolutions 626 (VII), 1952 et celle 1803, on
rencontre indistinctement les expressions droits des peuples, droits des
nations ou encore droits des Etats d'exercer leur
souveraineté36. L'emploi simultané de ces termes ne
résulte cependant pas d'une simple
32 Art 4 de la loi n°11/022 du 24
décembre 2011 portant principe fondamentaux relatif à
l'agriculture, in J.O.R.D.C., n° Spécial du 27 décembre
2011.
33 Art 9 de la constitution de la République
Démocratique du Congo du 18 février 2006 modifiée par la
loi n°11/022 du 20 janvier 2011 portant révision de certains
articles de la constitution de la République Démocratique du
Congo du 18 février 2006, in J.O.R.D.C., n° spécial, 52eme
année, 5 février 2011.
34 G. FEUER et H. CASSAN, Droit international
du développement, 2eme édition, Dalloz, Paris, 1991,
pp.617-618.
35 Idem.
36 D. ROSENBER, Le principe de la
souveraineté permanente des Etats sur leurs richesses et leurs
ressources naturelles, L.G.D.J., Paris, 1983, p123.
[16]
confusion de langage. Il vient de la conception même que
l'on se fait du droit de la souveraineté, la « summa potestas
».
Nous retenons donc que la souveraineté dont question
ici, appartient au peuple qui en confie l'exercice à l'Etat congolais.
Quant à l'épithète « permanente » collée
au mot souveraineté, ce n'est même ni par un effet du hasard, ni
une invention de la part du constituant congolais, car ce principe a
existé depuis 1952 et c'est seulement à partir de la
résolution 1314 que cette épithète apparait et sera
utilisée.
Il signifie « inaliénable », qu'on ne peut
vendre ou qui ne peut s'interrompre ni en temps de paix ni en temps de guerre.
Ce qualificatif marque à la fois l'essence et la portée du droit
revendiqué. Déclarer cette souveraineté permanente et
inaliénable signifie d'une part, qu'aucune aliénation ou
concession n'est valable sans le consentement de l'Etat congolais qui est ici
l'Etat territorial.
Dans cette perspective, il ne peut y avoir aliénation
qu'à titre précaire. C'est-à-dire toujours
révocable des lors que le gouvernement considère qu'elles ne
répondent plus aux intérêts du pays, intérêts
dont il est à la fois le juge et le gérant37.
§1. Le contenu du principe et son application au
sol
La Constitution de la RDC de 2006 telle que modifiée et
complétée à ce jour ne fait que consacrer le principe de
la souveraineté permanente dans le droit positif (interne) congolais,
à son article 9 alinéa 1er, mais ne définit ni le sens ni
la portée de ce dernier.
Il existe non plus aucune loi ou jurisprudence dans le droit
positif congolais qui définisse ce principe. Face à ce vide, il
nous parait nécessaire d'appliquer le reflexe du juriste. Ainsi, nous
avons recouru à la fois aux travaux préparatoires du parlement
ainsi qu'à la doctrine juridique internationale pour combler cette
lacune en vue de réaliser une analyse minutieuse et en dégager le
sens. Nous analyserons donc tour à tour la notion de la
souveraineté selon les travaux préparatoires et selon la
doctrine.
1. Notion de la souveraineté permanente selon les
travaux préparatoires
D'après la commission38 chargée de
l'examen de l'article 9 de la constitution, le principe repose sur la
sécurisation de la souveraineté de l'Etat, quelles que soient
les
37 B. MBIANGU KAKIESE, Les travaux
préparatoires de la constitution de la 3eme République.
Débats et discussions autour de l'article 9, Kinshasa, inédit,
2005, p.3.
38 Ces travaux ont été
réalisés par le sénat et la discussion eut lieu au sein du
parlement de transition, les deux chambres réunies. Le président
de cette commission fut Bruno MBIANGU KAKESE.
[17]
circonstances, en temps de paix ou de guerre, l'Etat doit
avoir le contrôle politique, économique, financier et social sur
toute l'étendue de son territoire. Cette permanence de sa
souveraineté est à juste titre protégée,
verrouillée par la souveraineté de l'Etat.
2. Notion de la souveraineté permanente selon la
doctrine
Quant à la doctrine, elle se résume en ceci :
tout Etat dont les richesses et ressources naturelles ont été
extorquées ou se trouvent entre des mains étrangères doit
pouvoir recouvrer l'intégralité des droits normalement
attachés à la souveraineté. On ajoute qu'un Etat souverain
ne peut être contraint contre son gré à céder
à des étrangers les droits qu'il détient normalement sur
les richesses situées sur son territoire. C'est là l'une des
applications principales de ce que le langage idéologique en usage au
tiers-monde et aux Nations Unies a pu appeler « la lutte contre
l'impérialisme et le néo-colonialisme». Selon Jean SALMON la
souveraineté permanente est l'initiative des pays en voie de
développement selon lesquels chaque Etat décide du sort de ses
ressources naturelles ainsi que des activités économiques y
relatives39.
§2. Les limites du principe
La souveraineté est la source de tout pouvoir
qu'exercent les organes d'un d'Etat dans le droit positif d'un Etat. Elle a son
siège dans tous les citoyens et dans chacun d'eux. La
souveraineté n'est pas susceptible d'appropriation privative. Aucune
partie du peuple, aucun individu ou organe au sein de l'Etat ne peut s'en
attribuer le monopole. Seul l'Etat en détient
l'exclusivité40.
« Principe des principes du droit public
»41, pivot de l'État autour duquel tournent les
principales notions du droit public moderne, la souveraineté serait un
titre juridique habilitant son détenteur qui ne pourrait être que
l'État à commander, décider, diriger
unilatéralement et arbitrairement («souverainement ») dans les
limites du cadre géographique et humain que son territoire et son peuple
déterminent. À l'instar de toute personne physique ou morale, la
personne étatique jouit de droits fondamentaux ; la souveraineté
ou, du moins, les droits découlant de la souveraineté figurerait
(aient) au nombre de ceux-ci. Et il serait possible de résumer son sens
en empruntant les mots de Georges GURVITCH selon lesquels
39 J. SALMON, La reconnaissance d'Etat. Quatre
cas : Mandchoukouo, Katanga, Biafra, Rhodésie du sud, Paris, Armand
Colin, 1971, p. 1046.
40 R. Carre de Malberg, Contribution à la
théorie générale de l'Etat, tome I, Dalloz, Paris,
1945, p.33.
41 O. BEAUD, La puissance de l'État,
PUF, coll. Léviathan, Paris, 1994, p. 12.
[18]
elle serait un « droit subjectif de commander
»42. Parce qu'il est souverain, l'État serait
juridiquement fondé à prendre toute mesure concernant son peuple,
son territoire ou son gouvernement43.
Les limites de ce principe se situent sur l'étendue du
territoire national, car les richesses et ressources naturelles se situent sur
ces territoires44. C'est pourquoi, la Constitution à son
article 9 alinéa 1er précise qu'il s'agit de tout
territoire, c'est-à-dire le sol, le sous-sol, les eaux et les
forêts, sur les espaces aérien, fluvial, lacustre et maritime. Sur
ce point, il est à affirmer que l'Etat exerce (une souveraineté)
des pouvoirs souverains à l'égard de toutes choses, toutes
situations et de tous les individus se trouvant sur son territoire. C'est ce
qu'expriment les termes latins jus imperium et jus dominium
pour illustrer l'idée de deux aspects de la souveraineté.
Il est à noter que l'article 9 sous examen ne s'oppose
en rien à l'article 53 de la loi n°73-021 du 20 juillet 1973
portant régime général des biens, régime foncier et
immobilier et régime des sûretés qui consacre
l'exclusivité et l'inaliénabilité de la
propriété foncière de l'Etat congolais. Bien au contraire,
il le complète. Le fait pour l'Etat congolais d'exercer sa
souveraineté permanente n'exclut en rien l'exercice, ni la jouissance ou
la détention du droit de propriété privée.
SECTION II. L'ADMINISTRATION ET LA GESTION DES TERRES
AGRICOLES
Il sera question d'analyser les conditions d'accès aux
terres agricoles (§1) ainsi que les types d'exploitation des terres
(§2).
§1. Les conditions d'accès aux terres
agricoles
En République Démocratique du Congo, le sol est
la propriété de l'Etat. Il est soumis au principe de la
domanialité qui constitue le régime juridique applicable aux
biens fonciers de l'Etat45.
Cette attribution provient de l'article 14 de la constitution
de 1967 telle que modifiée par la loi n°71/008 du 31
décembre1971 énonçant que le sol et sous-sol congolais
ainsi que leurs produits naturels appartient à l'Etat. Depuis lors,
cette disposition a été reprise
42 B. BARRAUD, Souveraineté de l'État
et puissance de l'État, Revue de la Recherche Juridique, Droit
Prospectif 2017-1, n° 165, p.17
43 Idem.
44 J. COMBACAUD, Droit international public,
Montchrestien, Paris, 1998, p.567.
45 V. KANGULUMBA MBAMBI, « La gestion des
immeubles du domaine privé de l'Etat ». in Actes du
séminaire organisé par le ministère de l'Urbanisme,
Kinshasa 2012, (inédit.)
[19]
successivement dans différentes constitutions et lois
congolaises46 sauf dans la constitution du 18 février 2006
telle que modifiée à ce jour en son article 9 qui énonce:
« l'Etat exerce une souveraineté permanente notamment sur le sol,
le sous-sol, les eaux et les forêts, sur les espaces aérien,
fluvial, lacustre et maritime congolaise ainsi que sur la mer territoriale
congolaise et sur le plateau continental. Les modalités de gestion et
concession du domaine de l'Etat visé à l'alinéa
précédent sont déterminées par la loi ».
Ce droit de propriété foncière interdit
à son titulaire d'aliéner son fonds. Il porte sur le fonds et
n'autorise aux particuliers de n'avoir que le droit de jouissance.
Pour sa gestion, l'Etat a divisé son domaine foncier en
domaine public et domaine privé47. Le premier ne nous
intéresse pas ; par contre, le second fait l'objet de notre
réflexion dans cette étude. Il découle des articles 56 et
60 de la loi foncière que les terres qui constituent le domaine
privé de l'Etat sont les terres urbaines et les terres rurales.
Sur ces dernières, on rencontre les terres de
communautés locales qui sont régies par leurs usages et coutumes
locaux48. Comme on peut le remarquer, ces différentes terres
sont régies chacune par les dispositions spécifiques et posent
différents problèmes qu'il nous a paru nécessaire
d'examiner dans cette paragraphe.
Pour une bonne gestion, les terres du domaine privé
sont divisées en deux catégories des terres à savoir : les
terres urbaines et les terres rurales49. Dans son article 388, la
loi foncière reconnaît aux communautés locales la
jouissance des terres qu'elles détiennent conformément à
la coutume et à leurs usages locaux.
A propos des terres de communautés locales, l'article
18 de la loi portant principes fondamentaux relatif à l'agriculture
dispose ce qui suit: «Il est reconnu à chaque communauté
locale les droits fonciers coutumiers exercés collectivement ou
individuellement sur ses terres conformément à la loi. L'ensemble
des terres reconnues à chaque communauté locale constitue son
domaine foncier de jouissance et comprend des réserves des terres de
46 Art 53 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime générale des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z,
n°3 du 1er février 1974, p.69
47 Art 54 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n°3 du 1er février 1974, p.69 : « le patrimoine foncier de
l'Etat comprend un domaine public et un domaine privé ».
48 Art 389 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n° 3 du 1er février 1974, p.69.
49 Idem, Art 60.
50Art 60 al 2. de la loi n°73-021 du 20
juillet 1973 portant régime général des biens,
régime foncier et immobilier et régime des sûretés,
J.O.Z., n° 3 du 1er février 1974, p.69.
[20]
cultures, de jachère, de pâturage et de parcours,
et les boisements utilisés régulièrement par la
communauté locale ».
Nous verrons que dans la Ville de Kinshasa du point de vue
foncier, il existe d'une part les communes érigées en
circonscriptions totalement urbaines et d'autre part, les communes qui
possèdent à la fois les terres urbaines et les terres rurales.
Les Terres Urbaines
Elles constituent l'une de deux catégories des terres
du domaine foncier privé de l'Etat. Il est important de préciser
qu'elles ne feront l'objet que d'un bref commentaire.
1. Règles et problèmes relatifs à
leur gestion
Constituent les terres urbaines, celles qui sont comprises
dans les limites des entités administratives déclarées
urbaines par les lois ou les règlements en vigueur50. En
dehors de la loi foncière et ses mesures d'exécution, plusieurs
autres textes juridiques organisent la gestion de ces terres notamment :
? Décret du 20 juin 1957 sur l'urbanisme ;
? L'arrêté départemental n°00122 du 8
décembre 1975 érigeant certaines zones de la ville de Kinshasa en
circonscriptions urbaines et d'autres en circonscriptions partiellement
urbaines ;
? Décret-loi n°031 du 8 octobre 1997 portant
dénomination des entités et autorités administratives ;
? Décret-loi n°081 du 2 juillet 1998 portant
organisation territoriale et administrative ;
? Décret-loi n°082 du 2 juillet 1998 portant
statut des autorités de l'administration des circonscriptions
territoriales.
Sont urbaines les terres comprises dans les villes et
cités qui leur sont assimilées. Selon l'ordonnance n°74-148
du 2 juillet 1974 portant mesures d'exécution de la loi foncière
qui dispose: « constituent des circonscriptions urbaines, les villes et
les localités qui leur sont assimilées en vertu de la
législation sur l'organisation territoriale et administrative de la
république ; les localités déclarées telles pour
l'application de la législation foncière, par une décision
du commissaire d'Etat. Et pour la ville de Kinshasa, seules constituent des
[21]
circonscriptions urbaines, les communes ou parties de communes
déclarées telles par une décision du ministre ».
Administrativement, Kinshasa compte à ce jour
vingt-quatre communes. Pour sa gestion foncière et en exécution
des dispositions précédentes, le ministre des affaires
foncières a, par l'arrêté départemental du 8
décembre 1975, érigé certaines de ces communes en
circonscriptions totalement urbaines et d'autres en circonscriptions
partiellement urbaines.
Sont totalement urbaines aux termes de l'article 1er de
l'arrêté précité les communes de Bandalungwa,
Barumbu, Gombe, Kalamu, Kasa-vubu, Kinshasa, Kisenso, Kintambo, Ngiri-ngiri,
Lingwala, Lemba, Makala, N'djili, Ngaba, Matete, Ngaliema, Masina, Limete,
Selembao.
Il est important de relever que dans
l'énumération des communes, la commune de Bumbu n'est reprise
nulle part. Aucune mention ne justifie cette omission.
Toutes ces communes ne possèdent que les terres
urbaines. Ces terres comprennent les surfaces bâties, la voirie urbaine,
les terrains de récréations et de loisirs accessibles pour le
citadin51. Par contre, sont partiellement urbaines, les communes de
Mont-Ngafula, Kimbaseke, Maluku, N'sele.
Les Terres Rurales
Les terres rurales ne sont pas définies par le
législateur congolais. Il affirme simplement aux termes de l'article 60
alinéa 3 de la loi que les terres rurales sont constituées de
toutes les autres terres, par opposition aux terres urbaines52.
Il sied de signaler que, le législateur ne donne pas
une définition de ce qu'on peut entendre par terres rurales. Il faut
donc comprendre que par terres rurales, toutes les terres qui sont
situées en dehors des circonscriptions déclarées urbaines
par les textes juridiques et les localités qui leur sont
assimilées.
A Kinshasa, ces terres sont situées dans les communes
de Mont-Ngafula, N'sele, Maluku, Kimbaseke.
51 G. KALAMBAY LUMPUNGU, Droits agricole et
forestier, Cours destinés aux étudiants, Université
de Kinshasa, Faculté des sciences agronomiques, 2010-201, p.3. ,
inédit.
52 Art 60 al 3 de la loi n°73-021 du 20
juillet 1973 portant régime général des biens,
régime foncier et immobilier et régime des sûretés,
J.O.Z., n°3 du 1er février 1974, p.69.
[22]
Il s'agit pour la commune de Mont-Ngafula, des terres
situées dans la partie Nord de la rivière Lukaya ;
A Kimbaseke, on les retrouve au Nord d'une ligne reliant le
point de confluence des rivières N'djili et Nshimi au signal 51/30, 491
mètres ;
Pour la commune de la N'sele, c'est sur la partie
septentrionale partagée par une ligne tracée parallèlement
à la route Kinshasa-Kenge, au Sud de celle-ci et distante d'elle de 3
kilomètres que l'on retrouve cette catégorie des terres.
Et dans la commune de Maluku, on les rencontre sur sa partie
septentrionale partagée par une ligne tracée parallèlement
à la route Kinshasa-Kenge jusqu'à la hauteur de la bifurcation de
piste Menkao-Bombo; de cette piste jusqu'à la localité de Guma ;
ensuite, la rivière Mombali jusqu'à son point de confluence avec
le fleuve Congo.
Considérant la carte du découpage administratif
de la Ville de Kinshasa, les terres rurales occupent une superficie plus grande
que celle de terres urbaines. On peut y observer les étendues des terres
non habitées. Par rapport à leur vocation, les terres rurales
peuvent être affectées à plusieurs activités.
En dépit de l'existence de terres rurales, Kinshasa
éprouve des difficultés pour nourrir sa population en
augmentation constante ; la demande en denrées alimentaires a
augmenté, tandis que la production locale ne suit pas le même
rythme. Les causes et les solutions à cette situation ne peuvent
être trouvées que dans la manière dont ces terres sont
gérées par les services de l'Etat.
Selon la loi, l'accès aux terres agricoles en milieu
rural pour tout exploitant, notamment agricole n'est possible qu'après
une enquête préalable.
A. Procédure d'enquête préalable
Toute occupation de terres rurales est soumise à une
enquête préalable. Celle-ci a pour but de constater la nature et
l'étendue des droits que des tiers pourraient avoir sur les terres
demandées en concession.
[23]
Elle ne s'ouvre qu'à la suite d'un avis favorable du
commissaire du district territorialement compétent et elle est
effectuée par l'administrateur du territoire ou par un fonctionnaire ou
un agent à ce commis53.
L'enquête est une formalité d'ordre public qui
comporte les éléments essentiels ci-
après :
? La vérification sur place de la délimitation du
terrain demandé ;
? Le recensement des personnes s'y trouvant ou y exerçant
une quelconque activité ;
? La description des lieux et inventaire de ce qui s'y trouve
en fait de bois, forêts, cours d'eau, voie de circulation, etc... ;
? L'audition des personnes qui formulent verbalement leurs
réclamations ou observations ;
? L'enregistrement et l'étude de toutes les informations
écrites54.
En effet, pour accéder à la concession des
terres rurales, l'initiative provient des particuliers, personnes physiques ou
morales qui déposent une demande pour un terrain
convoité55. Lorsque les terres sont demandées par les
particuliers en concession, il est possible que les droits des tiers soient mis
en jeux. Comme on le sait, la propriété privée est
garantie par la constitution et que, nul ne peut être privé de sa
propriété par l'Etat que pour cause d'utilité publique et
moyennant une indemnité octroyée dans les conditions
fixées par la loi56. Cette formalité présente
un avantage pour l'Etat que pour les particuliers.
Pour l'Etat, la procédure d'enquête
préalable a l'avantage de lui permettre de dégager, sur les
terres rurales, la superficie des terres à concéder mais aussi,
se rassurer de la liberté du fonds et la capacité des
requérants d'assurer la mise en valeur de terrain de manière
efficace, une fois celui-ci est à sa disposition.
53Art 193 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n°3 du 1er février 1974, p.69. Depuis 1997, les
dénominations ont changé. Les textes de la loi foncière et
l'ordonnance portant mesures d'exécution n'ayant pas été
adaptés, il faut entendre par commissaire sous régional, le
commissaire de district et commissaire de zone, administrateur du territoire ou
le bourgmestre en ville.
54 Art 194 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n°3 du 1er février 1974, p.69.
55 Art 192 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n°3 du 1er février 1974, p.69 et l'article 19 de l'ordonnance
n°74/148 portant mesures d'exécution de la loi n°73-021 du 20
juillet 1973 portant régime général des biens,
régime foncier et immobilier et régime des sûretés,
J.O.Z., n°3 du 1er février 1974, p.69.
56 Art 34 de la constitution de la
République Démocratique du Congo du 18 février 2006
modifié par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011 portant
révision de certains articles de la constitution de la République
Démocratique du Congo, J.O.R.D.C., 52ème année, n°
spécial du 5 février 2011.
[24]
En ce qui concerne les particuliers, les droits individuels ou
collectifs acquis en vertu de la coutume par eux, sont protégés
par cette procédure d'enquête. Par conséquent, l'Etat
pourra avoir connaissance de la superficie totale des terres rurales
concédées et éviter ainsi que ces terres
concédées pour un usage agricole ou pastoral, ne soient
inexploités par manque des moyens et de
technicité57.
Depuis la promulgation de la loi portant principes
fondamentaux relatifs à l'agriculture, le cadastre agricole devait aussi
intervenir à la procédure d'enquête lorsqu'il s'agit des
terres agricoles. En effet, la loi sur l'agriculture prévoit un cadastre
et laisse les soins aux gouverneurs des provinces, la charge d'en
déterminer l'organisation et le fonctionnement. C'est dire que le
cadastre agricole n'est que provincial58.
A cet effet, en rapport avec les attributions du cadastre
agricole, l'article 13 de la loi dispose ce qui suit : « Le gouverneur de
province met en place, conformément aux normes nationales, un cadastre
agricole ayant pour mission notamment de :
a) Proposer à l'autorité foncière l'octroi
de concessions d'exploitation agricole ;
b) Assurer la bonne administration des terres destinées
à l'exploitation agricole ;
c) Constater la mise en valeur des terres agricoles ;
d) Conserver les documents cartographiques en rapport avec les
terres destinées à
l'exploitation agricole. Il en détermine l'organisation
et le fonctionnement»59. L'exploitation agricole peut
être familiale, de type familial ou industriel60. Est
familiale, toute exploitation dont le personnel est constitué des
membres de la famille de l'exploitant. Est de type familial, toute exploitation
familiale qui recourt à une main d'oeuvre contractuelle et qui constitue
une unité de production d'une capacité moyenne. Est industrielle,
toute exploitation dont l'étendue, les moyens en hommes et en
matériels donnent un important potentiel de production. Un
arrêté du Gouverneur de province détermine la superficie
maximale de la concession d'exploitation familiale ou de type familial en
tenant compte des particularités de la province.
57 Y. ALONI MUKOKO, Gestion du sol et de ses
ressources pour un développement durable en République
Démocratique du Congo, Mémoire de D.E.S, Université de
Kinshasa, Faculté de Droit, 2004-2005, p.65.
58 G. SAKATA M. TAWAB, Fascicule de droit
forestier et agricole, 3eme graduat , Faculté de droit, UNIKIN,
2017-2018, p.28.
59 Art 13 de la loi portant principe fondamentaux
relatif à l'agriculture, Kinshasa, décembre 2011.
60 P. IBANDA KABAKA, Manuel de droit forestier et
de législation agricole de la R D Congo, Edilivre, Paris, 2019, p. 35
[25]
Avant la loi sur l'agriculture, toutes les missions du
cadastre agricole étaient réalisées par les services des
affaires foncières particulièrement, la division du cadastre.
Jusqu'à ce jour le cadastre agricole n'est ni mis en place ni
organisé à Kinshasa61.
Comme on peut se rendre compte, cette formalité que
l'article 13 de la loi portant principes fondamentaux relatifs à
l'agriculture protège les communautés vivant sur les terres
rurales, elle permet au requérant de se rassurer que le terrain à
occuper est affranchi de tous droits de tiers.
L'un des objectifs assignés à cette loi de 2011
par le législateur, est la promotion et la croissance de la production
agricole en vue de garantir la sécurité alimentaire et le
développement du milieu rural. A travers l'article 12 de la même
loi, le législateur reconnait aux Assemblées Provinciaux la
compétence de dégager par un édit, l'étendue des
terres rurales qu'il faut réserver dans chaque province à
l'activité agricole.
Si la Ville de Kinshasa est soucieuse de capitaliser ses
atouts agricoles, par l'orientation et le contrôle de production agricole
et combattre l'insécurité alimentaire, elle doit connaître
la superficie totale des terres agricoles à exploiter. Dans le
même ordre d'idées, la doctrine a longtemps
considéré que l'absence des conditions ou des critères
d'octroi des concessions foncières agricoles dans la loi est à la
base de la baisse de la production agricole au Congo62.
Ainsi, l'article 16 de la loi portant principes fondamentaux
relatifs à l'agriculture soulève de nombreuses inquiétudes
auprès des certains opérateurs économiques, se
présente dorénavant de la manière suivante : « Les
terres destinées à l'usage agricole sont concédées
aux exploitants, mises en valeur et retirées dans les conditions
définies par la loi. Toutefois, le requérant remplit les
conditions ci-après : a) être une personne physique ou une
personne morale de droit congolais, avoir une résidence, un domicile ou
un siège social en RDC, présenter la preuve de son inscription au
registre de commerce et de crédit mobilier , s'il s'agit d'une personne
exerçant le commerce, d) justifier de la capacité
financière susceptible de supporter la charge ou qui implique la mise en
valeur de la concession »63.
61 Art 13 de loi n° 11/022 du 24 décembre
2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture
62 G. KALAMBAY LUMPUNGU, « Une nouvelle
lecture de la loi foncière pour son efficacité », Revue
de la Faculté de Droit de l'Université Protestante au Congo,
n°017, 2001, pp.9-10.
63 Art 16 de loi n° 11/022 du 24 décembre
2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture
[26]
Donc, l'article 16 de la loi n°11/020 du 24
décembre tel que modifié donne à toute personne morale ou
physique sans distinction la possibilité d'avoir accès aux terres
destinées à l'agriculture alors que dans l'ancienne loi l'article
16 excluait expressément les personnes physiques
étrangères à l'éligibilité aux droits
portant sur les terres agricoles et leur participation au sein des
sociétés.
Il sied de relever qu'il est imposé la signature d'un
contrat agricole qui détermine les types de culture que le
concessionnaire se propose d'exploiter64. Il détermine
également la production minimum que l'exploitant s'engage à
réaliser.
C'est ainsi, dans le souci de permettre l'émergence de
la classe moyenne congolaise dans le secteur clé porteur de croissance,
il est créé un nouvel article 16 bis qui rend impératif la
participation des congolais au capital des sociétés à
constituer par les étrangers dans le secteur agricole. C'est article
dispose : « les terres destinées à l'usage agricole sont
concédées aux exploitants conformément aux dispositions de
la loi N°073-021 du 20 juillet 1973 portant régime
général des biens, régime foncier et immobilier et
régime des suretés, telles que modifiée et
complétée à ce jour.
Toutefois, le requérant rempli en outre les conditions
ci-après :
a) Etre une personne physique de nationalité
congolaise ou une personne morale de droit congolais, constituée
conformément à la loi ;
b) Présenter la preuve de son inscription au registre
de commerce et du crédit mobilier, s'il s'agit d'une personne
exerçant le commerce ;
c) Justifier de capacité financière et
technique susceptible de supporter la charge qu'implique la mise en valeur de
la concession sollicitée ;
d) Produire une étude d'impact environnemental et
social pour toute exploitation industrielle conformément à la loi
n°11/009 du 09 juillet 2011 portant principes fondamentaux relatifs
à la protection de l'environnement65.
Nous pensons que si cela est mis en application, elle
contribuera à l'épanouissement du secteur agricole.
64 P. IBANDA KABAKA, Manuel de droit forestier et
de législation agricole de la R D Congo, Edilivre, Paris, 2019.
65 Art 16 bis de la proposition de la loi modifiant
et complétant la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant
principes fondamentaux relatif à l'agriculture. (Inédit)
[27]
B. Contrat agricole
Sans le définir, la loi sur l'agriculture utilise
l'expression « contrat agricole » deux fois66. Par contre,
en son article 3 point 6, elle définit la concession agricole comme
suit: « contrat ou convention conclu entre l'Etat et un opérateur
agricole, permettant à ce dernier d'exploiter le domaine privé de
l'Etat dans les limites précises, en vue d'assurer la production
agricole ».
L'article 61 de la foncière entend par concession, un
contrat par lequel l'Etat reconnaît à une collectivité,
à une personne physique ou à une personne morale de droit
privé ou public, un droit de jouissance sur un fonds. Dans ce contrat,
l'administration est une partie privilégiée à son
cocontractant67. C'est à elle que revient les soins de
déterminer les conditions de mise en valeur, dans les contrats de
concession agricole selon la nature des cultures visées en
priorité, par le programme agricole dans la région
concernée.
Pour la doctrine, un contrat agricole est celui par lequel
l'Etat fait une obligation au particulier d'exécuter un service qu'est
l'activité agricole. Il est signé entre le ministre de
l'Agriculture et le concessionnaire68.
A noter que, ce contrat connaît deux phases en droit
congolais : la phase d'occupation provisoire et celle de la concession agricole
proprement dite. Selon la loi, le droit d'occupation provisoire est consenti
par le contrat69.
1. Phase d'occupation provisoire
Avant de les concéder, les terres rurales d'une
superficie de plus de dix hectares destinées à un usage agricole
ou d'élevage font l'objet d'un titre d'occupation provisoire pendant un
terme de cinq ans.
A ce propos, l'article 22 du projet de la loi sur
l'agriculture était précis et disposait que : « les terres
agricoles sont concédées aux exploitants moyennant un contrat
d'occupation provisoire qui ne peut excéder cinq ans. Pendant ce temps,
l'occupant a l'obligation de mettre le fonds en valeur, conformément au
contrat conclu entre lui et les services du ministre de l'agriculture...
».
66 Art 17 et 24 de la loi n°11/022 du 24
décembre 2011 portant principe fondamentaux relatifs à
l'agriculture, J.O.R.D.C, n° spécial du 27 décembre 2011.
67 Y. ALONI MUKOKO, Gestion du sol et de ses
ressources pour un développement durable en République
démocratique du Congo, Mémoire de D.E.S., Université de
Kinshasa, Faculté de Droit, 2004-2005, p.97.
68 G. KALAMBAY LUMPUNGU, Op. Cit., p.9.
69 Art 155 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n°3 du 1er février 1974, p.69.
[28]
Dans le même sens, la loi sur l'agriculture en son
article 17 alinéa 1er dispose : « le contrat agricole
détermine les types de cultures que le concessionnaire se propose
d'exploiter ».
Cette étape préparatoire à la concession
se réalise au moyen d'un contrat70 équivalent au
contrat de location préparatoire71 sur les terres urbaines.
Pendant cinq années, l'occupant est tenu d'occuper et mettre en valeur
le terrain mis à sa disposition par l'Etat, conformément aux
prescrits de la loi et à la destination fixée dans le contrat en
rapport avec les cultures qu'il entend exploiter.
Il n'est pas renouvelable mais suivant la nature de
l'activité, ce contrat d'occupation provisoire peut
bénéficier d'une plus longue durée que prévue par
la loi. Malgré la disposition de l'article 11 de la loi sur
l'agriculture, ce sont les services des affaires foncières qui
continuent à déterminer la destination des terres agricoles, car
la demande des terres est adressée à la conservation des titres
immobiliers qui dépend du ministre ayant les affaires foncières
dans ses attributions et c'est elle qui conclut le contrat d'occupation
provisoire.
2. Détermination de la destination et des
conditions de mise en valeur agricole Le mode de gestion des terres
ainsi que le processus d'acquisition des parcelles tant urbaines que rurales
est soumis à la règle de mise en valeur effective du
terrain72. Celle-ci doit respecter la destination du fonds
concédé. L'article 60 alinéa 3 dispose que : « Toutes
les autres terres sont rurales. Selon leur vocation, les terres sont
destinées à un usage résidentiel, commercial, industriel,
agricole ou d'élevage ».
Nous l'avons dit ci-haut, la notion de la destination est
liée à celle de la vocation du sol ; elle renvoie à
l'usage que les pouvoirs publics réservent à chaque partie du
fonds.
C. Concession agricole proprement dite
Définie comme un contrat entre deux parties, l'Etat et
d'exploitant agricole, la concession agricole prévoit les droits et les
obligations de chacun d'entre eux.
70 Art 155 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n°3 du 1er février 1974, p.69.
71 Art 144 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n°3 du 1er février 1974, p.69.
72 Y. ALONI MUKOKO, Aménagement du
territoire, politique foncière et prise en compte des
préoccupations environnementales : perspectives pour une gestion durable
du sol en droit congolais, thèse de doctorat, Université de
Kinshasa, 2013, p 3.
[29]
1. Les parties et leurs obligations dans le
contrat
Les articles 157 de la loi foncière et 17 de la loi sur
l'agriculture, portent à croire que les matières visées
par les contrats agricoles rentrent dans les attributions du ministre de
l'agriculture. Ce dernier a pour mission de promouvoir la production agricole,
l'autosuffisance et la sécurité alimentaire, concevoir la
planification des objectifs nationaux de production dans les domaines de
l'agriculture, l'organisation et l'encadrement de la population rurale pour
l'accroissement de la production agricole, l'aménagement de l'espace
rural73. Et, le point A de l'article 13 de la loi sur l'agriculture
est explicite et reconnaît au cadastre agricole le droit de proposer
à l'autorité foncière l'octroi de la concession
d'exploitation agricole. Il convient de rappeler que la loi sur l'agriculture
reconnait au Ministère de l'agriculture l'orientation de la production
sur chaque fonds concédé en fonction de la demande, en
quantité et en qualité. Il revient par contre, aux services des
affaires foncières d'apprécier l'étendue de la superficie
à réserver à l'activité agricole et les services de
l'agriculture de dire quel type de cultures qu'il faut en fonction des
besoins.
En fait, dans tout contrat de concession foncière,
quelle que soit sa destination, l'Etat est toujours la partie la plus forte. Il
fixe d'autorité certaines conditions.
C'est ainsi que les services du Ministère de
l'agriculture au regard de leurs attributions sont les seuls qui peuvent mieux
apprécier la conformité de la mise en valeur par rapport à
la prévision contractuelle. La loi ne dit rien quant à la nature
et la durée du contrat de concession agricole. Ce silence peut
être interprété comme un renvoi logique à la loi
foncière. Il convient donc de rappeler que la loi foncière
organise deux types de concessions ; la concession
perpétuelle74 et la concession ordinaire75.
Comme le contrat de concession agricole fixe les conditions
spécifiques liées à la nature propre des cultures que le
futur concessionnaire voudrait réaliser dans le respect des conditions
légales, il est important de surveiller le concessionnaire. L'Etat doit
faire respecter
73 Lire l'ordonnance n°12/008 du 11 juin 2012
fixant les attributions des ministères, J.O.R.D.C., n°
spécial, 14 juin 2012, Col. 23.
74 Art 80 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n°3 du 1er février 1974, p.69
75 Art 109 et s. de la loi n°73-021 du 20
juillet 1973 portant régime général des biens,
régime foncier et immobilier et régime des sûretés,
J.O.Z., n°3 du 1er février 1974, p.69.
[30]
la destination pendant toute la durée du droit de
jouissance, car le maintien de cette destination conditionne celui du droit de
jouissance76.
Il sied de noter que les non mise en valeur et le non-respect
de la destination constituent les causes de déchéance du droit de
jouissance qu'on a sur les terres rurales77.
2. Les ayants droit et terres des communautés
locales à Kinshasa
L'absence de la délimitation du domaine foncier et les
modalités d'exercice des droits des communautés locales par la
loi, demeure l'épine dorsale dans la gestion des terres rurales surtout
à Kinshasa. Malgré l'existence de la loi toutes les terres
rurales de la République en générale et celle de la ville
Kinshasa en particulier sont réclamées en propriété
par les populations villageoises celle de Kinshasa par les autochtones
TEKE-UMBU au point de se demander si toutes les terres rurales n'appartient pas
aux communautés locales.
Lors de la réforme foncière de 1973, les terres
rurales des communautés locales n'ont pas été
délimités ni le concept « communautés locales »
n'a été défini78. Cependant, le
législateur congolais a toujours montré son intérêt
à protéger les populations vivant sur les terres rurales. Dans
différents textes il a voulu assurer à ces populations une
protection plus efficace des terres qu'elles occupaient et la sauvegarde du
développement de leur unité.
Les soucis de protéger les droits fonciers des
indigènes ou des communautés locales a toujours figuré
parmi les priorités du législateur congolais depuis l'Etat
Indépendant jusqu'à ce jour ; il se manifeste principalement dans
l'ordonnance du 1er juillet 1885, le décret du 3 juin 1906
relatif à la délimitation officielle des terres des
indigènes, le décret du 31 mai 1934 sur l'enquête et la loi
foncière du 20 juillet 1973.
Sur l'ensemble des terres contenues dans ce territoire, les
membres de la communauté exercent divers droits, fonciers ou
immobiliers. A propos de droit fonciers de communautés locales,
l'article 18 de la loi portant principes fondamentaux relatifs à
l'agriculture dispose : « Il est reconnu à chaque communauté
locale les droits fonciers coutumiers exercés collectivement ou
individuellement sur ses terres conformément à la loi. L'ensemble
des terres reconnues à chaque communauté locale constitue son
domaine foncier
76 Y. ALONI MUKOKO, Aménagement du
territoire politique foncier et prise en compte des préoccupations
environnementales : Perspectives pour une gestion durable du sol en droit
congolais, thèse de doctorat, Université de Kinshasa, 2012-2013,
p.89.
77 Art 167 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n°3 du 1er février 1974, p.69
78 Y. ALONI MUKOKO et C. TSHIZUMBU KAZADI, Des
textes essentiels pour la compréhension du cours de droit civil/Les
biens, UNIKIN, Faculté de droit, G2, Kinshasa, 2017, p.5
(inédit)
[31]
de jouissance et comprend des réserves des terres de
cultures, de jachère, de pâturage et de parcours, et les
boisements utilisés régulièrement par la communauté
locale »79.
A son tour, l'article 19 dispose : « L'exercice collectif
ou individuel de ces droits ne fait pas l'objet d'un certificat
d'enregistrement »80.
La communauté locale correspond donc à la
communauté traditionnelle; une tribu ou un clan qui est titulaire d'un
domaine foncier précis est bien délimité, connu et
respecté par les voisins du domaine fonciers. Ce domaine foncier peut
s'identifier par des signes apparents tels qu'une rivière, une colline,
un grand arbre81 ou tout autre signe, elle a à sa tête
un chef. Ce dernier appelé « chef coutumier » est une
autorité coutumière reconnue conformément à la
coutume locale82. A ce titre, il a un double statut coutumier et
administratif83.
En tant qu'autorité coutumière84, il
a la responsabilité politique de toute la communauté et est
assisté, dans l'accomplissement de ses fonctions, d'un ou plusieurs
notables. Comme chef de la chefferie ou du secteur, il représente
l'Etat. Il est investi par les pouvoirs publics et est placé sous
l'autorité du ministre de l'intérieur.
Il sied de signaler que toute communauté locale ou
communauté traditionnelle est propriétaire d'un domaine foncier
précis85. Elle est organisée et, a à sa
tête un chef.
A Kinshasa la situation est particulière, toutes les
terres de la périphérie sont revendiquées par les
communautés TEKE-HUMBU. Leurs chefs traditionnels, abusant de leur
double autorité coutumière et administrative qu'il
détient, vendent les terrains pour leur propre compte et cela, sans
respect des textes légaux. Cette attitude est à la base de
spéculation foncière constatée dans la ville.
En effet, avec l'extension de la ville, on trouve ces
communautés dans les communes déclaré semi-urbain de
Kinshasa. Les terres qu'elles occupaient, sont de plus en
79 Les articles 18, et 3 point 6 de la loi
n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux
relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C., n° spécial du 27
décembre 2011.
80 Idem, Art 19.
81 G. KALAMBAY LUMPUNGU, les droits fonciers
coutumiers à travers la législation de la République
Démocratique du Congo, in Revue juridique et politique,
indépendance et coopération, LGDJ, p.1177
82 Art 207 de la Constitution de la
République Démocratique du Congo du 18 février 2006
modifiée par la loi n°11/022 du 20 janvier 2011 portant
révision de certains articles de la constitution de la République
Démocratique du Congo du 18 février 2006, in J.O.R.D.C., n°
spécial, 52eme année, 5 février 2011
83 G. CIPARISSE, Op. Cit, p.149.
84 Art 207 de la constitution de la
République Démocratique du Congo du 18 février 2006
modifiée par la loi n°11/022 du 20 janvier 2011 portant
révision de certains articles de la constitution de la République
Démocratique du Congo du 18 février 2006, in J.O.R.D.C., n°
spécial, 52eme année, 5 février 2011
85 Ministère de l'environnement,
Conservation de la nature et tourisme, manuel des droits et obligations des
parties prenantes dans les aires protégées, mars 2011, p.26
[32]
plus urbanisées, d'autres encore sont vendues par les
chefs coutumiers. Lorsqu'on observe de loin les étendues de terres dans
les parties déclarée semi-urbain de la ville, elles sont
apparemment inhabitées, inexploitée mais en
réalité, elles sont déjà distribuées aux
particuliers par les chefs coutumiers TEKE-HUMBU, mettant ainsi les membres des
communautés en déficit des terres et l'exploitation agricole en
danger.
Cette pratique que nous qualifions d'une pratique
parallèle, oblige les services de l'Etat à procéder
à la remise de titres aux personnes qui ont reçus les terrains
des chefs coutumiers.
§2. Les types d'exploitations des terres
Les cultures ne demandent pas toutes les mêmes
étendues des terres ; certaines exigent des grandes étendues et
d'autres des étendues moins vastes.
La loi agricole prévoit en son article 14 trois types
d'exploitations correspondantes chacune à l'importance, au moyen ainsi
qu'à la valeur de la main d'oeuvre à utiliser : l'exploitation
familiale, l'exploitation de type familial et l'exploitation
industrielle86.
1° Exploitation familiale
Est familiale, toute exploitation dont le personnel est
constitué des membres de la famille de l'exploitant.
2° Exploitation de type
familial
Est de type familial, toute exploitation familiale qui recourt
à une main d'oeuvre contractuelle et qui constitue une unité de
production d'une capacité moyenne.
3° Exploitation industrielle
Est industrielle, toute exploitation dont l'étendue,
les moyens en hommes et en matériels donnent un important potentiel de
production.
De par sa dimension, l'exploitation familiale peut avoir
difficile à combattre l'insécurité
alimentaire87.
86 Les articles 12, et 3 point 6 de la loi
n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux
relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C., n° Spécial du 27
décembre 2011.
87 Il était prévu à l'article
31 du projet du code agricole, version finale que l'étendue de
l'exploitation agricole familiale ne peut dépasser un hectare et demi et
celle de type familial ne pouvait dépasser trois hectares (article 30 du
même projet).
88 Lire les article 12 et 3 point 6 de la loi
n°11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux
relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C., n° spécial du 27
décembre 2011.
[33]
L'article 11 de la loi portant principes fondamentaux relatifs
à l'agriculture dispose: « les ministres ayant les affaires
foncières et l'agriculture dans leurs attributions font procéder,
par région naturelle et par nature des cultures ou par types
d'exploitation, aux études nécessaires à
l'appréciation de la superficie à exploiter ».
Dans l'ordonnance n°12/008 du 11 juin 2012 fixant les
attributions des ministères, il est reconnu au Ministère de
l'agriculture et développement rural l'aménagement et
l'équipement de l'espace rural.
Dans le même ordre d'idées, la loi portant
principes fondamentaux relatifs à l'agriculture recommande à
chaque Assemblée provinciale de prendre un édit pour
déterminer les terres rurales ou urbano-rurales destinées
à l'usage agricole88 et donne au gouverneur de province de
déterminer la surface maximale de concession d'exploitation familiale ou
de type familial en tenant compte des particularités de la province.
Dans les mêmes ordres d'idée, Constantin KAKESE
KUNYIMA, pour réussir dans les différents types d'exploitations
agricoles, il faut une bonne planification agricole. Il renchérit en
indique que la direction à laquelle l'agriculture doit se
développer pour être en mesure de remplir son mandant, et aide
à la mise en oeuvre des oeuvres nécessaires. Une planification
agricole est donc indiquée partout où l'on trouve de
l'agriculture. Naturellement on pense principalement aux zones rurales, mais
les intérêts de l'agriculture devraient également
être représentés par une planification agricole dans les
zones d'imbriquées les unes dans les autres, et même en zone
semi-urbaine.
Ainsi, trois types de situations susceptibles de
déclencher une planification
agricole :
1. Type A une amélioration structurelle
d'envergure ; une grande amélioration intégrale ou projet de
développement régional.
2. Type B un grand projet d'infrastructure
ayant des incidences sur le territoire ; transports, constructions hydraulique,
industrie.
3. Type C un projet de planification d'ordre
supérieur ; un plan directeur ou plan d'affectation.
[34]
La planification agricole est conduite parallèlement
aux projets qui l'ont déclenchée et en étroite
coordination avec eux. Cela permet d'échanger
régulièrement les expériences, d'éviter les
doublons et de s'accorder à temps sur les mesures à
prendre89.
Les avantages d'une planification agricole sont évidents
:
1) Elle facilite la réalisation de projets
significatifs, qui vont marquer le territoire, en y impliquant l'un des
partenaires les plus importants et en indiquant comment on peut tenir compte de
ses intérêts ;
2) C'est un moyen d'augmenter les chances d'acceptation des
projets ;
3) Elle permet d'indiquer la meilleure voie vers des
solutions (gagnant-gagnant) durables, élaborées en
partenariat90.
SECTION III. LES DROITS ET OBLIGATIONS DU
CONCESSIONNAIRE
Dans cette section, il est question d'analyser les droits du
concessionnaire (§1) et ensuite les obligations du concessionnaire
(§2).
§1. Les droits
Quant à ses droits, il est logique que les plantations,
les constructions et les récoltes lui reviennent de droit, il a, en
outre, le droit de jouir et d'occuper les terrains nécessaires à
son activité et aux industries qui s'y rattachent, y compris la
construction d'installations industrielles, d'habitations et de loisirs, et
d'utiliser les ressources d'eau et de forêt produits par lui pour les
besoins de l'exploitation, en se conformant aux normes définies dans
l'étude d'impact environnemental et social ainsi que le programme de
gestion de l'environnement du projet préalablement établi par lui
; de creuser des canaux et des canalisations et à l'intérieur
d'établir des moyens de communications et de transport de toute nature
dans le respect de la loi et de l'ordre public91. Le concessionnaire
a le droit de céder et transmettre sa concession aux conditions
prévues par la loi92.
Le concessionnaire agricole a le droit de louer sa concession
à un tiers qui est tenu de respecter la destination de celui-ci. Il en
avise l'administration locale ayant l'agriculture dans ses attributions.
Cependant, il reste tenu solidairement responsable avec le preneur
vis-à-
89 C. KAKESA KUNYIMA, La gestion foncière,
UNIKIN, Faculté des sciences/département de géoscience,
IIème année de licence, 2019-2020, pp. 46-47.
Inédit
90 Idem.
91 Art 32 de la loi n°11/022 du 24
décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à
l'agriculture, J.O.R.D.C., n° Spécial du 27 décembre
2011.
92 Art 38 de la loi n°11/022 du 24
décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à
l'agriculture, J.O.R.D.C., n° Spécial du 27 décembre 2011
.
[35]
vis de l'Etat pour les obligations souscrites dans le contrat
agricole. Dans ce cas, la concession peut faire l'objet soit de bail à
ferme, soit de bail à métayage, et ce, conformément
à la loi et aux règles relatives aux baux ruraux93.
§2. Les obligations
Le concessionnaire agricole a, dans tous le cas, l'obligation
de respecter la destination et maintenir la mise en valeur ; il est tenu de
respecter les obligations particulières souscrites dans le contrat
signé pendant la période provisoire ; il est également
tenu de réaliser la production minimum convenue ; il est tenu aussi
d'entretenir les tronçons reliant sa concession à la voie
publique94; de construire les infrastructures nécessaires
pour le stockage de sa production agricole95. Il sied de signaler
qu'il est difficile aux tiers exploitants de respecter ses engagements en se
basant loi.
En outre, lorsqu'il y a maladies des cultures, tout exploitant
agricole qui constate l'existence des organismes nuisibles dans sa concession
est tenu d'aviser aussitôt l'autorité administrative
compétente la plus proche96. En ce qui concerne les maladies
des cultures l'Etat ne vient pas en aide lorsqu'il y'a une
épidémie
La loi soumet l'exploitant à d'autres obligations
notamment, les règles sur l'environnement. Outre ces obligations et
droits, le concessionnaire agricole doit respecter les minima des conditions de
mise en valeur prévues à l'article 157 de la loi foncière.
En cas d'inexécution ou de négligence grave dans
l'exécution de charge de mettre et entretenir le fonds en valeur telles
que stipulées dans le contrat, l'Etat peut prononcer la
déchéance97.
Le chapitre qui suit tente de faire une analyse sur la notion
de sécurité alimentaire et son implication dans l'exploitation
agricole avant de voir les terres agricoles kinoises et leur contribution
à la sécurité alimentaire afin de donner les perspectives
en matière de gestion des terres agricoles à Kinshasa.
93 Art 24 de la loi n°11/022 du 24
décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à
l'agriculture, J.O.R.D.C., n° Spécial du 27 décembre
2011.
94 Idem, Art 35.
95Ibidem, Art 37 alinéa 1er .
96 Ibidem, Art 44.
97 Article 19 point 2° de la loi n°73-021
du 20 juillet 1973 portant régime général des biens,
régime foncier et immobilier et régime des sûretés,
J.O.Z., n°3 du 1er février 1974, p.69.
[36]
CHAPITRE II. LES TERRES AGRICOLES KINOISES FACE A LA
SECURITE
ALIMENTAIRE
Dans le cadre de ce chapitre, il sera question de voir d'une
part la notion de sécurité alimentaire et ses implications sur
l'exploitation agricole (section I) et d'autre part les terres agricoles
Kinoises et leur contribution à la sécurité alimentaire
(section II).
SECTION I. NOTION DE SECURITE ALIMENTAIRE ET SES
IMPLICATIONS SUR L'EXPLOITATION AGRICOLE
La notion de la sécurité alimentaire n'est pas
unique et universelle. Elle évolue et change de nature selon les
concepts différents et les périodes, conjoncture ou la fonction
qu'elle assure. En effet, avant son apparition en 1970, elle était
considérée comme un simple système d'approvisionnement en
nourriture, par l'individu, ménage et population dans un Etat pour
lutter contre la famine. Ce système a évolué puis
succédé par un autre procédé « aide
alimentaire »98.
Les politiques d'aide alimentaire en vigueur à cette
époque ont été conçues dans le contexte de
l'après seconde guerre mondiale. Pour les Etats Unis, cette politique va
très vite jouer un rôle de régulation des marchés et
de promotion des exportations des produits agricoles américains. C'est
dans ce contexte qu'en 1954, le congrès américain a voté
la loi dénommée « vivres pour la paix ». Outre ses
visées humanitaires, « luttes contre la faim dans le monde »,
cette loi mise à accélérer la consommation des produits
agricoles des Etats Unis. Pour faire face à la concurrence, vers 1964 et
1967 fut signé l'accord de GATT entre l'Europe et les Etats
Unis99, lequel conduiront à inclure une convention
alimentaire comprise dans le plan internationaux sur les céréales
puis sur le manioc100. La raison pour laquelle l'aide alimentaire,
en répondant à beaucoup d'autres objectifs que la gestion de
crises alimentaires d'urgence, a véritablement transféré
des instabilités de marché vers les pays d'approvisionnement ou
de livraison de l'aide au développement. Enfin, la charte d'aide fut
négociée et signée par les Etats africains.
La charte d'aide alimentaire la positionne comme un instrument
de sécurité alimentaire et des politiques de
développement. Elle consacre la nécessité d'adapter, sur
les plans qualitatifs et quantitatifs et dans la mesure du possible, l'aide
alimentaire aux besoins de
98 Le club du Sahel et de l'Afrique de l'ouest (CSAO),
Op. Cit, p.20.
99 Les Etats Unis arrivent à la
négociation en défendant la thèse selon laquelle l'Europe
devrait renoncer à produire des céréales et les
oléagineux et se spécialiser sur la production animale.
100 Du GATT à l'Organisation mondiale du commerce, 15
fiches pour comprendre, anticiper, débattre, Solagral, 1995, p.14
[37]
populations cibles, dans des conditions telles que les
productions locales n'aient à souffrir ni de dépréciation
en valeur ni de difficulté d'écoulement.
Un autre concept est apparu, « droit à
l'alimentation » pour justifier l'évolution de la notion de
sécurité alimentaire. Il désigne le droit à une
nourriture suffisante de chaque homme, chaque femme et chaque enfant seul ou en
communauté avec d'autres, à accéder physiquement et
économiquement accès à tout moment à une nourriture
suffisante et aux moyens de se procurer101. Jean ZIEGLER ajoute que
le droit à l'alimentation est le droit d'avoir accès
régulier, permanent et libre, soit directement au moyen d'achats
monétaires à une nourriture quantitativement et qualitativement
adéquate et suffisante correspondant aux traditions culturelles du
peuple dont est issu le consommateur et qui assure une vie psychique et
physique individuelle et collective, libre d'angoisse, satisfaisante et
digne102.
Ainsi consacré par la Déclaration universelle
des droits de l'homme103, et ensuite précisé dans le
Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et
culturels104, ce droit constitue un droit fondamental qui aspire
à la notion du concept de sécurité alimentaire. Il est
plus coercitif, sévère que politique ou stratégique.
Vers les années 80, 10 ans après la naissance de
la notion de sécurité alimentaire, va sonner le glas des
ambitions « d'autosuffisance alimentaire » déclinées
à l'échelle nationale. C'est la période des ajustements
macro-économiques et financiers qui ne vont pas épargner le
domaine de l'agriculture et de l'alimentation. A nouveau, la question
alimentaire va se traiter dans un cadre plus englobant et n'échappera
pas aux prescriptions des consensus de Washington qui fonde les programmes
d'ajustement structurel en général et des PASA pour le secteur
agricole en particulier. L'autosuffisance alimentaire vise la
disponibilité des vivres, l'accessibilité des ménages et
des individus à l'alimentation, le fonctionnement et la stabilité
des marchés et l'utilisation des aliments (dimension nutritionnelle et
sanitaire). Elle va dès lors laisser la place à la
sécurité alimentaire.
De la politique, le concept devient technique et s'inscrit
dans le contexte de libéralisation externe (démantèlement
des productions aux frontières) et interne (retrait de l'Etat de la
production et de la gestion des marchés) des économies. La
question de savoir qui
101 Comité des droits économiques, sociaux et
culturels, Observations générales n°12.
102 Jean. ZIEGLER, Rapport spécial sur le droit
à l'alimentation de la Commission des droits de l'homme, E/CN.4/2001
103 Art. 25 de la Déclaration universelle des droits de
l'homme de 1948.
104 Art. 11 du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels adoptés en 1966 et entré
en vigueur en1976.
[38]
produit la nourriture nécessaire à
l'alimentation de la population devient secondaire. La sécurité
alimentaire s'appuie sur une définition commune des institutions
internationales notamment le FAO, l'OMS et la Banque mondiale : « c'est
l'accès par tous à tout moment à une alimentation
suffisante pour mener une vie saine et active »105.
Enfin, un autre concept « souveraineté alimentaire
» a été promue dès le sommet mondial de
l'alimentation en 1996 par le mouvement paysan via CAMPESINA et les ONG. Il
exprime « le droit pour les peuples et leurs gouvernements de
définir les politiques agricoles et alimentaires de leur choix
»106. Alors que le débat sur les variantes de
définitions de la sécurité alimentaire n'est pas
épuisé et les enjeux socioculturels, les
préférences alimentaires ne sont pas intégrées.
De ce qui précède, un adage populaire dit «
ventre creux n'a point d'oreilles ». Cela parait logique dans la mesure
où l'homme affamé perd ses forces et par conséquent il ne
saura pas travailler. Comme pour dire, il faut que les ménages soient
bien entretenus pour répondre aux besoins (alimentaires) de l'homme. Car
ce dernier « doit manger suffisamment ni trop peu ni trop, des aliments
d'une qualité organoleptique, sanitaire et nutritionnelle satisfaisante
du point de vue individuel et social »107 . La voie la mieux
indiquée pour cette fin reste valablement l'agriculture. Ainsi, au cours
d'un de ses sommets, la FAO déclare : « si les ménages
manquent des produits alimentaires, mais possèdent des terres, les
efforts visant à accroitre la production, fourniture de facteur de
production et des techniques réduisant l'effort humain, stabilité
de propriété foncières devraient se traduire par un
accroissement de la consommation108. Ainsi, MBOSO N'KODIA PWANGA
parlant du Zaïre dira : « l'agriculture doit devenir le secteur
moteur de développement et de la croissance économique.
Après voir couvert les besoins alimentaires de nos populations, le
secteur agricole doit assurer l'essor de l'agro-industrie locale et ensuite
développer l'exportation des produits transformés et
améliorés »109.
Ainsi, Il sera question dans le cadre de cette section de voir
la définition de la sécurité alimentaire (§1), et
ensuite la réalité de la sécurité alimentaire
à Kinshasa (§2).
105
http://www.peoplesfoodsoverignty.org
, consulté le 05 février 2021, à 15H40.
106 Extrait de la déclaration adoptée lors du
sommet mondial de l'alimentation tenu à Rome du 13 au 17 novembre
1996
107 J-L. RASTOIN, et G.GHESI, Le système alimentaire
mondial, Paris, Quae, 2010, p.407
108 FAO, Intégration de la nourriture dans les projets
de développement agricole et rural, p.5GHESI, Le système
alimentaire mondial, Paris, Quae, 2010, p.407.
109 MBOSO N'KODIA PWANGA, Programme économique du MPR,
dans quelle économie pour le Zaïre, Kinshasa, 1985, p.249
p.5
[39]
§1. Définitions de la
sécurité alimentaire
Le concept de sécurité alimentaire est loin
d'être unique et universel. Depuis son apparition, il a en effet,
évolué à tel point que plus de trente définitions
ont pu être repérées. Ce qui montre la diversité des
approches. Les auteurs l'ont défini, semble-t-il, en se fondant sur des
considérations très économiques ou quantitatives vers des
considérations plus humanistes ou qualitatives. Il est question pour ce
faire de confronter les idées des auteurs afin de nous permettre
à donner la définition qui nous convient.
Dans son observation générale n°0014, le
Comité des droits économiques, sociaux et culturels a
défini la sécurité alimentaire comme étant le droit
pour chaque homme, chaque femme, chaque enfant seul ou en communauté
avec d'autres d'accéder physiquement économiquement à tout
moment, à une nourriture suffisante et aux moyens de se la
procurer110. Ici, la sécurité alimentaire se confond
au droit à l'alimentation. Il insiste en effet, sur la
disponibilité de la nourriture sans tenir compte de la qualité.
Mais, son accès par l'individu et les familles, dépend des moyens
pour l'acquérir. La présence de la nourriture sur le
marché n'est pas une solution.
De là, la sécurité alimentaire est
perçue comme la capacité des pays déficitaires ou des
régions déficitaires à atteindre des niveaux de
consommation111. Cette définition s'appuie sur la
capacité d'accès et les problèmes de production nationale
ou régionale des denrées alimentaires comme cause des
manifestations ou de la faim112. Elle établit à cet
effet un lien univoque entre la production et la satisfaction des besoins en
nourriture.
Dans la même perspective, en 1990, l'USDA a
défini la sécurité alimentaire comme, un accès par
tous les individus à tout moment à une nourriture suffisante pour
mener une vie saine et active113, mais sans tenir comptes des moyens
pour en disposer.
Ainsi, la Définition du sommet mondial de
l'alimentation (FAO 1996), « La sécurité alimentaire, c'est
l'accès pour tous et à tout moment à une alimentation
suffisante pour une vie saine et active, en respectant les habitudes
alimentaires»114.
110 La sécurité alimentaire, un sujet actuel en
RDC,
http://www.caridisdev.cd ,
consulté le 07 Février 2021
111 Algérie, Finlande, Israël, Norvège,
Synthèse de l'obligation alimentaire : étude du droit
comparé, Tome 4, Paris, CNRS, 1988, p.10.
112 N. STAUBLE et B. SOTTAS, Op. cit, p.67.
113 Le Club du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest (CSAO), Op.
Cit, p.13.
114 Agronome et vétérinaire sans Frontières,
Agricultures Paysannes et Souveraineté Alimentaire, AVSF, 2010,
[40]
Lors du sommet mondial sur la sécurité
alimentaire en 1996, les experts réitérèrent sur leur
déclaration que la sécurité alimentaire est un droit
fondamental de chaque être humain d'avoir accès à une
nourriture saine et nutritive, conformément à une nourriture
adéquate et au droit fondamental de chaque être d'être
à l'abri de la faim115. Cela supposerait qu'au plan
qualitatif, la sécurité exige non seulement que les aliments
doivent être sains, c'est-à-dire exempts de toute maladie, sans
risques pour la santé du consommateur, mais également riches en
valeur nutritive ou contenir abondamment des éléments ayant la
propriété de nourrir.
A l'heure actuelle, estime l'OMS, plus de la moitié des
jeunes enfants vivants en Asie du Sud souffrent de la carence en
protéines et en calories. Les estimations pour l'Afrique subsaharienne
ne situent la prévalence qu'environ trente pourcent116. Cette
situation risque de compromettre à la sécurité
alimentaire.
C'est ainsi que le FAO explique que la sécurité
alimentaire au niveau individuel, familial, national, régional et
mondial existe lorsque tous les êtres humains ont à tout moment,
un accès physique et économique à une nourriture
suffisante, saine et nutritive, leur permettant de satisfaire leurs besoins
énergétiques et leurs préférences alimentaires pour
mener une vie saine et active117.
Nous pouvons retenir avec Jean ZIEGLER que la
sécurité alimentaire est la possibilité ou le droit
d'avoir un accès régulier, permanent et libre, soit directement,
soit au moyen d'achats, à une nourriture quantitativement et
qualitativement adéquate et suffisante, correspondant aux traditions
culturelles du peuple dont est issu le consommateur et qui assure une vie
psychique et physique individuelle et collective libre d'angoisse,
satisfaisante et digne118.
En 2001, la RDC a, pour sa part, relevé que la «
sécurité alimentaire est assurée quand toutes les
personnes, en tout temps, ont économiquement accès à une
alimentation
115 Extrait de la déclaration adoptée lors du
sommet mondial de l'alimentation tenu à Rome du 13 au 17 novembre
1996
116 Marchés tropicaux et méditerranés,
n°29966, 13 septembre 2002
117 Consultation d'expert FAO sur la santé des aliments :
science et éthique, FAO, Rome, 2002, p.28
118 J. ZIEGLER, Rapport spécial sur le droit
à l'alimentation de la commission des droits de l'homme, 2001,
p.14.
[41]
suffisante, sûre et nutritive qui satisfait leurs
besoins nutritionnels et leurs préférences alimentaires pour leur
permettre de mener une vie active et saine »119.
Si pour les pays moins avancés de la planète, la
sécurité alimentaire se confond à l'autosuffisance
alimentaire, en revanche dans les pays développés, elle
désigne la sécurité sanitaire des produits destinés
à l'alimentation humaine120. Le législateur congolais
définit la sécurité alimentaire comme la
disponibilité et l'accessibilité permanentes aux
aliments121. Allant dans le même sens, la Banque mondiale a
défini la sécurité alimentaire comme l'accès de
tous les individus à tout moment à suffisamment de la nourriture
pour mener une vie saine et active122.
Il ressort des définitions qui précèdent
que la finalité de la sécurité alimentaire est d'assurer
en tout et à tous les citoyens l'accès matériel et
économique aux aliments de base dont ils ont besoin à tout
moment.
La sécurité alimentaire se résume en deux
éléments ci-après : la disponibilité des biens de
consommation, c'est-à-dire la disponibilité en quantité
suffisante et capacité des citoyens à acquérir ces biens,
donc l'accès facile et permanent par les individus et les familles ou
encore, les ménages à cette nourriture.
Par sa finalité, la sécurité alimentaire
a pour objectif d'améliorer les conditions alimentaires de la
population. Ainsi, il sera mieux de voir les composantes de la
sécurité alimentaire.
L'analyse des différentes définitions telles que
présentées ci-dessus nous convient de ressortir dans le concept
sécurité alimentaire, deux composantes qui divisent les points de
vue. Elles sont à la fois quantitatives et qualitatives.
1. Composante quantitative
La sécurité alimentaire réfère
à la disponibilité des aliments en quantité suffisante et
permanente pour permettre à chacun de manger à sa faim. Mais cela
ne suffit pas, il faut
119 La sécurité alimentaire, un sujet actuel en
RDC,
http://www.caridisdev.cd ,
consulté le 07 février 2021.
120 R. POURTIER, L'Afrique centrale et les régions
transfrontalières. Perspectives de reconstruction et
d'intégration, Paris, OCDE, 2003, p.89.
121 Art 3 point 3, 6 et 22 de la loi n°11/022 du 24
décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à
l'agriculture, J.O.R.D.C., n° spécial du 27
décembre 2011
122Banque mondiale, la pauvreté et la
faim, cité par G. Azoulay et J-C Dillon, p.126.
[42]
ajouter en cette composante, l'idée de
l'accessibilité individuelle objective123. La demande doit
être solvable et acheter/produire des vivres devient un droit.
a. La disponibilité
La première condition pour assurer la
sécurité alimentaire est que les aliments soient disponibles en
quantité et en qualité suffisante et ce, « à
proximité » des consommateurs124. Il faut donc que
l'offre soit suffisante, plus ou moins stable dans le temps et qu'elle soit
bien repartie dans le pays.
Pour y arriver, on peut jouer sur les facteurs de productions
agricoles (superficie et rendement), contrôle des importations et
exportations des denrées alimentaires, la mise en oeuvre des stocks
stratégiques d'aide alimentaire.
b. L'accessibilité
L'accès est la capacité des ménages
à se procurer des vivres disponibles pour une période de
consommation donnée. Ceci à travers leurs propres
réserves, leurs productions domestiques, les transactions de
marché, l'aide alimentaire et d'autres formes de
transfert125. C'est un droit de tous à des ressources
adéquates permettant d'acquérir de nourriture suffisante et
nutritive. C'est-à-dire, l'ensemble des biens auxquels une personne est
susceptible d'accéder en raison du contexte juridique, politique et
social de la communauté dans laquelle elle vit y compris certains droits
traditionnels tels que l'accès aux ressources communes126.
Les types d'accès sont : physiques, social et
économique. En effet, il ne suffit pas seulement de procurer des vivres
disponibles à tous mais la capacité de générer
aussi le revenu suffisant pour se nourrir et réaliser les autres droits
de base tels que la santé, l'éducation127. Bref,
l'accès à la nourriture implique le pouvoir d'achat, le niveau de
prix, la stabilité des marchés et les infrastructures. C'est
l'Etat qui est l'ultime responsable pour assurer que la sécurité
alimentaire soit réalisée et protégée pour ses
citoyens en ce qui concerne la disponibilité et l'accessibilité
des vivres, les politiques et pratiques agricoles et sociales128.
123 G. TSHIONZA MATA et P. VANDERHUSLT, Op. cit,
p.18.
124 Idem.
125 La sécurité alimentaire, un sujet actuel en
RDC,
http://www.caridisdev.cd ,
consulté le 19 mars 2021 à 16h30.
126 GAMBEMBO GAWIYA, Situation des lois coutumières
et des droits des femmes en RDC, Kinshasa, Ministère des affaires
sociales et familles, 1999, p.23.
127 La sécurité alimentaire en RD Congo, Op.
Cit, p.5.
128 La sécurité alimentaire en RD Congo, Op.
Cit, p.5.
[43]
2. Composante qualitative
Au-delà de l'aspect quantitatif qui tient à la
peur très ancienne de manquement de la nourriture du fait de
l'augmentation de la population, la sécurité alimentaire
intègre aujourd'hui l'hygiène et la santé publique par des
conditions de la stabilité et salubrité.
a. La stabilité
La stabilité pour la sécurité
alimentaire veut qu'une population, un ménage ou une personne
accède à la nourriture permanente et adéquate. Cet
accès ne doit être menacé ni par l'émergence des
chocs soudains par exemple une crise économique ou climatique ou par des
évènements cycliques notamment, une insécurité
saisonnière dont la conséquence logique est la carence des
éléments nutritifs dans les aliments.
La salubrité veut aussi bien que les aliments soient
disponibles, permanents en qualité suffisante permettant l'accès
de la nourriture dans le cadre d'une diète adéquate d'eau
potable, d'assainissement et de soins de santé de façon à
obtenir en état de bien être nutritionnel. En effet, l'utilisation
de la nourriture signifie simplement la préparation et la consommation
par un ménage de la nourriture à laquelle il a accès sans
oublier la capacité d'un individu à utiliser la nourriture, de
façon permanente et saine129.
b. La salubrité
La salubrité au plan qualitatif de la
sécurité alimentaire exige la propreté des aliments,
c'est-à-dire, l'accès à une nourriture saine et nutritive
conformément à l'hygiène des produits vivriers
adéquats pour chaque individu d'être à l'abri de la faim
mais exempté de toute maladie, de microbe et sans risque pour la
santé du consommateur. Elle suppose l'abondance des
éléments ayant la propriété nutritive au moment de
la consommation. Car la présence des éléments nutritifs
dans les aliments ne suffit pas. Il y a des produits insalubres à cause
de la durée, ces produits sont périmés et deviennent
insalubres ou impropres à la consommation130.
En RDC, la sécurité sanitaire des aliments n'est
pas bien assurée, et peu développée au niveau de
frontières par l'OCC et la DGDA mais corrompue. A l'intérieur,
c'est le prix qui détermine les produits salubres et insalubres. Dans
les pays développés, c'est la salubrité qui compte. La
sécurité alimentaire désigne pour eux la
sécurité sanitaire qui comprend : la qualité sanitaire et
l'équilibre nutritionnelle.
129 La sécurité alimentaire en RD Congo, Op.
Cit, p.5
130 Idem.
[44]
§2. Réalité de la
sécurité alimentaire à Kinshasa
Le droit à la sécurité alimentaire fait
partie des droits fondamentaux de l'homme et l'une des missions de l'Etat est
d'assurer à sa population la sécurité alimentaire. Il
s'agit d'une finalité dont la mise en oeuvre dépend aussi de la
manière dont les terres agricoles sont gérées.
Les systèmes agricoles sont dans l'ensemble de type
familial et très lacunaire. A Kinshasa, le système agricole est
partagé entre les cultures maraîchères et les cultures
vivrières. Dans ce cas, l'accès au financement et aux intrants
d'excellente qualité est la contrainte majeure, ce qui limite le niveau
des productions131. Ainsi, l'Etat congolais à travers le
ministère de l'agriculture est censé de venir en aide aux
exploitants agricole dans sa politique comme l'indique l'article 6 de la loi
portant principe fondamentaux relatif à l'agriculture qui dispose que :
« le Gouvernement définit et met en oeuvre la politique agricole
nationale en vue de la promotion et de la croissance de la production agricole
ainsi que du développement rural et de la sécurité
alimentaire. Cette politique constitue la base de programme pour les provinces.
Elles comprend les grandes orientations concernant notamment le régime
agraire, l'exploitation, la formation et la recherche agricoles, la promotion,
la production et la commercialisation des intrants et des produits agricoles,
le développement de l'agro-industrie et des infrastructures de base, la
conservation et l'utilisation durable des ressources
phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture ainsi que le
financement de celle-ci »132.
Il sied de signalée que l'Etat à travers le
gouvernement centrale est en difficulté de mettre en oeuvre les
dispositions ci-haut évoquée. L'article 7 al 1er de la
même loi dispose que : « le Gouvernement provincial élabore,
conformément à la politique nationale visée à
l'article 6, le programme agricole de sa province et en fixe les objectifs
quantitatif et qualitatifs »133. Malheureusement, il est
difficile que cela soit respecté car, tout commence par la base
c'est-à-dire les entités territoriale décentralisée
à travers les exploitants agricole et l'inspecteur chef des services qui
sont là pour aider l'Etat à avoir une politique concrète
mais cela ne se fait pas.
131 J. NKULU MWINE FYAMA et Augustin. NGULUNGU NTALABULU,
Sécurité alimentaire et systèmes d'alerte précoce
en RDC, Kinshasa, Konrad Adenauer Stiftung, 2018, p.29.
132 Article 6 de la loi n°11/022 du 24 décembre
2011 portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture,
J.O.R.D.C., n° spécial du 27 décembre 2011
133 Idem, Article 7 al 1er.
[45]
A cet effet, le professeur KALAMBAY LUMPUNGU note que : «
L'exploitation doit produire en fonction de la demande, en quantité et
en qualité. Elle doit produire au moindre coût, d'où, la
nécessité d'une très bonne organisation technique
»134.
La conséquence à tirer de ce propos, est qu'il
existe un lien entre la production agricole et la demande. En effet, la
population produit en priorité ce qu'elle doit consommer. A Kinshasa la
production est insuffisante à la demande de la population qui augmente
chaque jour face à la superficie qui reste statique. L'accès
à la nourriture est difficile et conduit à ce que l'on qualifie
de l'insécurité alimentaire. Cette situation ne peut bien
s'illustrer que dans l'état actuel de la consommation de la population
tel que constaté sur terrain.
Dans bon nombre des familles de Kinshasa, le repas
traditionnel préféré devenu onéreux, a
été substitué par une nourriture moins coûteuse,
sans forcément tenir compte de la qualité135. La
même étude renseigne que 65% des ménages kinois vivent de
deux repas par jour. Le repas le plus consistant est pris le
soir136. Faute d'accéder aux principaux produits alimentaires
de base préférés, le matin et le soir, les familles se
contentent d'un repas léger constitué soit du reliquat de la
veille soit du pain et du thé137.
Dans certains quartiers périphériques de
Kinshasa, l'on note que 25% de ménages n'accèdent plus
qu'à un seul repas par jour138. Le régime alimentaire
des Kinois est donc déficitaire tant du point de vue qualitatif que
quantitatif. Face à ce défis, Kinshasa recourt à la
production en provenance de l'intérieur du pays ou de l'importation ; ce
qui est à l'origine de la hausse des prix sur le marché. Parmi
les principaux produits alimentaires importés par la République
Démocratique du Congo on compte le maïs, le riz, les produits
halieutiques salés et fumés, la viande et les abats ainsi que le
blé139.
Certains de ces produits alimentaires d'importation ne sont
pas suffisamment contrôlés, ils sont susceptibles de contenir des
organismes génétiquement modifiés. C'est le cas notamment
du maïs, du riz, de la viande et abats, du blé et de la farine de
blé, de l'huile de table, des fruits etc. Et, ces organismes peuvent
provoquer des maladies.
134 G. KALAMBAY LUMPUNGU, Droit agricole et forestier, cours
polycopié, Université de Kinshasa, Faculté des sciences
agronomiques, 2010-2011, p.16.
135 MBUANGI MBUKU LELO, (Dir)., Monographie de la ville de
Kinshasa, Comité Provincial de la Stratégie pour la
Réduction de la Pauvreté Ville-Province de Kinshasa (CPVPK),
Kinshasa, 2005, p.61.
136 Idem, p.63.
137Ibidem.
138Ibidem.
139 Ministère de l'Agriculture, Programme National de
Sécurité Alimentaire (P.N.S.A), document principal,
version amendée après l'atelier national du 16
Décembre 2010, p.25.
140 Art 42 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011
portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture,
J.O.RDC, n° Spécial du 27 décembre 2011.
[46]
Pour un peuple qui fait face au défi de
l'insécurité alimentaire, il n'y a pas mieux que la production
des denrées alimentaires. La Constitution garantit le droit à la
santé et à la sécurité alimentaire ; dans ce sens,
l'article 42 de la loi sur l'agriculture dispose que la sécurité
alimentaire et la production agricole priment sur l'exploitation des
bioénergies140. Il s'agit là, d'une priorité
que le gouvernement national que local doit se fixer.
A Kinshasa, cette volonté exprimée par
législateur à travers les textes se traduit à ce jour, par
la mise en place du domaine agricole à KINGAKATI, la remise en
activité de la ferme DAIPEN et plus récemment, la relance du
domaine présidentielle de la N'sele sans perdre de vie il y a de cela
cinq ans la remise des tracteurs au gouvernorat de la ville. Il en est de
même du Parc agro-industriel de BUKANGA LONZO qui malheureusement n'a pas
produit comme on s'entendait.
Toutefois, cela ne peut produire un résultat
escompté que dans la mesure où cette activité s'inscrit
dans un programme agricole clairement défini et mise en oeuvre de
façon efficiente.
SECTION II. LES TERRES AGRICOLES KINOISES ET LEUR
CONTRIBUTION A LA SECURITE ALIMENTAIRE
Dans cette étude, il sera question de démontrer
comment les concessions agricoles kinoises n'apportent rien en matière
de sécurité alimentaire.
La gestion des terres et l'ingérence des chefs
coutumiers ne garantissent pas aux exploitants agricoles l'accès facile
et sécurisé aux terres. Les répercussions sont ressenties
dans les ménages. Les ménages vivent dans une situation
d'insécurité alimentaire.
En dehors des étendues des terres qui sont
gelées sans mise en valeur, les terres rurales de Kinshasa sont
utilisées de manière anarchique. Elles sont envahies de plus en
plus par les phénomènes majeurs ci-après : l'extension
urbaine incontrôlée et l'extension des cimetières ; le
changement de destination et l'accumulation des concessions par certains
particuliers sans aucun signe de mise en valeur.
Nous pensons qu'une ville ne peut continuer à
s'étendre jusqu'à l'infini et les cimetières ne peuvent
pas occuper toutes les terres susceptibles d'exploitation agricole. L'Etat,
propriétaire du sol, doit utiliser ses terres à bon escient pour
assurer à sa population le bien-être et la sécurité
alimentaire.
[47]
Il sera question dans le cadre de cette section de faire une
analyse sur l'exploitation des terres agricoles kinoises (§1), et les
défis auxquels les terres agricoles font face (§2).
§1. L'exploitation des terres agricoles
kinoises
L'affectation d'une partie du sol à une activité
quelconque n'a de réussite que lorsqu'elle se réalise dans le
cadre d'une bonne connaissance des capacités et qualités propres
à ce sol. En effet, la connaissance du sol agricole relève du
domaine de l'agrologie, de la pédologie, de la biologie, de l'agronomie,
de la géographie et de la géologie :
? L'agrologie, est une science qui s'intéresse à
la couche cultivable, définit le sol agricole comme la partie de la
couche superficielle de l'écorce terrestre qui, grâce à sa
structure meuble et sa composition physico-chimique, est en mesure d'assurer un
développement normal des végétaux
cultivés141.
? Dans le même ordre d'idées, la pédologie
définit le sol comme la formation naturelle de surface à
structure meuble et d'épaisseur variable, résultant de la
transformation de la roche- mère sous-jacente sans l'influence de divers
processus, physiques, chimiques et biologiques.
Ces différentes définitions permettent de
comprendre la valeur du sol dans l'aspect de ses potentialités
agricoles. La loi foncière par l'article 65 dispose : « Les
terrains sont concédés sous réserve des droits des tiers
et sans garantie quant à leur qualité propre ou leur valeur
industrielle, agricole, commerciale ou résidentielle
»142. Autrement dit, les personnes désireuses de
pratiquer l'activité agricole ne sont pas assurées en avance
quant à la qualité et la capacité de production du terrain
qu'ils reçoivent de l'Etat.
Par ailleurs, la loi portant principes fondamentaux relatifs
à l'agriculture de 2011 dispose : « Les ministres ayant les
affaires foncières et l'agriculture dans leurs attributions font
procéder, par région naturelle et par nature des cultures ou par
type d'exploitation, aux études nécessaires à
l'appréciation de la superficie à exploiter »143.
Cette disposition était devenu lacunaire ou inadéquates c'est
ainsi que la proposition de loi modifiant et complétant
141 G. KALAMBAY LUMPUNGU, Droit civil : Sol et
développement durable, Cours polycopié, 3ième cycle,
Université de Kinshasa, Faculté de Droit, 2011-2012, p.22.
142Art 65 de la loi n°73-021 du 20 juillet
1973 portant régime général des biens, régime
foncier et immobilier et régime des sûretés, J.O.Z.,
n°3 du 1er février 1974, p. 69 dispose : « Les terrains sont
concédés sous réserve des droits des tiers et sans
garantie quant à leur qualité propre ou à leur valeur
industrielle, agricole, commerciale ou résidentielle ».
143 Art 11 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011
portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C,
n° Spécial du 27 décembre 2011.
144 Art 11 de la proposition de la loi modifiant et
complétant la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant
principes fondamentaux relatif à l'agriculture. (Inédit)
[48]
la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant
principes fondamentaux relatifs à l'agriculture dispose ce qui suit :
« Les ministres ayant les affaires foncières et l'agriculture dans
leurs attributions font procéder, par région naturelle et par
nature des cultures ou par type d'exploitation, aux études
nécessaires à l'appréciation de la superficie à
exploiter. Ces études sont menées par une commission
interministérielle d'harmonisation des concessions, composée des
experts des ministères concernés à l'alinéa
précédent ainsi que des délégués
provinciaux. Un décret du premier ministre ,
délibéré en conseil des ministres, sur proposition du
ministre ayant l'agriculture dans ses attributions , détermine les
modalités de fonctionnement de cette commission »144.
Ces dispositions, contrairement à celles de la loi
foncière, nous laissent envisager que les terres agricoles avant
d'être données aux particuliers, devront faire l'objet d'une
étude systématique au sein de la commission
interministérielle ainsi que des délégués
provinciaux pour déterminer leurs capacités de production. Dans
tous les cas, il en va donc de l'intérêt de l'Etat et de celui qui
veut faire l'exploitation agricole de s'assurer de l'état du sol quant
à sa productivité.
La mise en valeur des grandes étendues des terres
agricoles exige un mode approprié d'exploitation. L'exploitation
artisanale telle que pratiquée à ce jour, ne peut pas favoriser
l'augmentation de la production.
Sur le plan agricole, Kinshasa connaît trois types
d'agriculture :
1. L'agriculture traditionnelle qui présente les
mêmes caractéristiques que partout au Congo. Elle est
itinérante et sa production faible.
2. L'agriculture moderne rencontrée chez les grands
fermiers du plateau de Bateke est
caractérisée par :
y' L'exploitation de grandes superficies ;
y' Le recours à la mécanisation ;
y' L'usage de la technologie améliorée.
3. Ce troisième type qui est intermédiaire, est
rencontré chez les paysans qui bénéficient d'un
encadrement de la part de structures spécialisées.
[49]
L'usage des instruments rudimentaires tels que : machette et
houe demande beaucoup de temps et d'efforts physiques pour la
réalisation de la mise en valeur agricole conséquente.
Pour améliorer la production, l'exploitation agricole
doit se faire en fonction des nouvelles techniques culturales à savoir :
l'usage des intrants, des semences améliorées ainsi que la
mécanisation.
En effet, l'usage des intrants et semences peut permettre
à produire en quantité considérable ; l'emploi des
machines pourra permettre de cultiver des grandes étendues,
économiser le temps et améliorer les
récoltes145. Ceci aura l'avantage de permettre à la
population d'avoir accès facile aux produits alimentaires de base et
l'Etat pourra économiser les devises qu'il débourse pour
l'importation des produits alimentaires.
La question de mécanisation agricole est essentielle et
liée au financement des activités agricoles et, à
l'environnement. Elle pose le problème du respect de la
législation en matière de la protection de l'environnement et des
subventions de l'activité agricole.
On doit le savoir, la mécanisation poussée peut
entraîner les conséquences néfastes sur le plan
environnemental suite au labour profond qui peut détruire la structure
du sol et, rendre ainsi le terrain susceptible de déboisement, à
l'érosion et à la pollution.
D'où, l'article 66 de la loi sur l'agriculture soumet
toute activité agricole à une étude d'impact
environnemental et social avant la mise en valeur de la concession. Cette
étude a pour but de permettre à l'Administration de n'autoriser
que l'exploitation agricole présentant le moins possible de risques sur
l'environnement.
Dans le même ordre d'idées, l'agriculture moderne
nécessite des capitaux assez importants tant pour les individus que pour
l'équipement collectif rural146.
La mécanisation suppose l'achat des engins, des
intrants etc. Fort de cette réalité, il est important que
l'activité agricole soit, si pas totalement financée par l'Etat,
elle doit tout au moins être soutenue par ses subventions.
145 MAFWILA MBONA, Les neufs questions d'éthique
agricole, Kinshasa, Editions Academic, Express-Press, 2006, p.10.
146 G. KALAMBAY LUMPUNGU, Op. Cit, p.34.
[50]
Sur ce point précis, l'Etat congolais a
déjà fait une expérience, avant l'indépendance, qui
lui a permis de réaliser les meilleurs rendements dans le domaine
agricole. Pas plus longtemps, la création des banques des crédits
agricoles et la SOFIDE ont été créées à
cette fin. Ces institutions ne parviennent plus à financer
l'agriculture. D'où, le résultat est médiocre.
Cette réalité est prise en compte par la loi du
24 décembre 2011 sur l'agriculture qui a créé un Fonds
national de développement agricole, dénommé : Fonds
destiné à financer l'agriculture147. Ainsi, 10 ans
après la promulgation cette loi, il apparait nécessaire de
compléter l'article 56 pour prévoir des mesures
réglementaires devant déterminer les modalités de gestion
et d'application du fonds national de développement
agricole148.
§2. Les défis auxquels les terres
agricoles font face
Il y'a quelques dizaines d'années encore, la principale
tâche de l'agriculture consistait à produire des denrées
alimentaires de qualité et en quantité suffisantes. Les surfaces
agricoles furent peu convoitées, depuis longtemps, pour d'autres usages.
Avec les rapides transformations de la situation économique et
géopolitique des dernières décennies, la situation a aussi
changé radicalement pour l'agriculture.
Ce secteur d'activité s'est développé
vers une agriculture orientée vers les marchés, qui contribue
grandement au développement de l'espace rural, et qui demande aussi
à être inclue dans les processus de décision.
En effet, dans le cadre de la gestion foncière agricole
Constantin KAKESE KUNYIMA souligne que, les devoirs de l'agriculture
d'aujourd'hui montrent trois missions principales :
? L'approvisionnement en denrées alimentaires de
qualité et le maintien de la capacité de production ;
? La conservation des ressources naturelles (sol, eau, air,
paysage, biodiversité)
et l'entretien du paysage rural ;
147 A56 de la loi n°11/022 du 24 décembre 2011
portant principes fondamentaux relatifs à l'agriculture, J.O.R.D.C,
n° Spécial du 27 décembre 2011.
148 Art 56 de la proposition de la loi modifiant et
complétant la loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant
principes fondamentaux relatif à l'agriculture. (Inédit)
[51]
? L'occupation décentralisée du territoire et le
renforcement de l'espace rural
(par exemple : élargissement de l'offre agritouristique et
des prestations sociales)149. Pour être en mesure d'atteindre
cet objectif afin de réussir face, il faut relever les défis, qui
pourtant restent ignorés par les décideurs politiques et
administratifs. Les défis à relever :
- La spoliation des terres agricoles :
La spoliation à grande échelle des terres
agricoles au profit des lotissements sociaux entraine une disparition
progressive des sites maraîchers dans la ville de Kinshasa. Ces petits
producteurs n'ont pas caché leur indignation lors d'une émission
télévisée, soulignant que depuis quelques années,
la pression démographique urbaine les dépossède de leurs
sites d'exploitation. Par exemple du site N'djili SECOMAF etc...
De ce fait, dans plusieurs communes semi-urbaines de Kinshasa,
les activités agricoles sont actuellement en baisse.
- Manque d'accès aux engrais à des prix bas
Puisque les terres agricoles sont devenues extrêmement
chères en Afrique plus précisément en RDC, la plupart des
agriculteurs étant pauvres n'ont pas d'autre choix que de cultiver la
même terre à plusieurs reprises. Étant abusée, la
terre se dégrade et perd ses composantes nécessaires pour une
bonne production agricole. Pour faire face à cette situation, les
cultivateurs font de l'usage des engrais artificiels leur principale
méthode afin de travailler la même terre autant de fois que
possible. Comme ces engrais (chimiques) coûtent assez chers, ils sont
au-delà de la portée des pauvres paysans ou ne sont pas
disponibles sur les marchés ruraux. Dans des pays où il y a des
subventions d'engrais, une partie de la population rurale est mise à
l'écart de la distribution.
- Manque de bons réseaux routiers et bons
marchés
Après la production agricole, il faut de bonnes routes
pour transporter les produits vers les marchés. Les routes n'existent
pas du tout ou celles qui sont connectée aux grands marchés sont
dans de mauvais états. C'est un enjeu majeur pour l'agriculture en RDC.
Faute de systèmes de stockage efficaces et appropriés, les
produits qui résistent très mal aux conditions climatiques tels
que les tomates, les oignons, les légumes verts, etc. pourrissent.
D'où le gaspillage alimentaire.
149 C. KAKESE KUYIMA, Op.Cit, p.45
[52]
- Manque de soutien financier
Beaucoup de pays africains n'ont pas de systèmes
formels de soutien financier aux cultivateurs comme la RDC, qui leur
permettront de développer et maintenir leur production agricole. Bien
qu'il existe aujourd'hui plusieurs groupes de micro-finance travaillant dans ce
domaine, les cultivateurs sont très peu à avoir accès
à ces groupes ; la majorité d'entre eux ignore les
procédures requises pour pourvoir accéder à un soutien de
financement à long terme ou les conditions mises en place par ces
institutions financières ne peuvent pas être remplies par les
pauvres exploitants.
SECTION III. PERSPECTIVES EN MATIERE DE GESTION DES
TERRES AGRICOLES A KINSHASA
Il sera question d'aborder le rôle de l'Etat (§1) et
ensuite le rôle de l'exploitant
privé (§2).
§1. Le rôle de l'Etat
Les lois congolaises ont la particularité de contenir
en elles-mêmes, une politique de gestion et les aspects de planification
des actions dans le secteur agricole. L'Etat doit assurer l'encadrement des
exploitants agricoles par la promotion des coopératives pour
améliorer les récoltes, ses services qui ont en charge la gestion
des secteurs foncier et agricole, sont obligés d'assurer de
manière permanente et effective un contrôle des conditions
prescrites dans les textes de lois ainsi que dans les contrats signés
entre l'Etat et les exploitants.
En vue d'apporter une réponse au problème de
l'insécurité alimentaire, il est question, pour minimiser les
importations et la dépendance de la population de Kinshasa en
matière alimentaire, de favoriser la production agricole locale, pour
cela, nous avons répertorié une gamme des propositions à
savoir :
V' l'aménagement spatial foncier ;
V' l'application stricte de la législation ;
V' la planification de la production agricole ;
V' l'encadrement des exploitants agricoles ;
V' le suivi, le contrôle et les sanctions constituent des
préalables d'une gestion efficace
et rationnelle susceptible de répondre à ce
défi.
150 Article 3 point 10 de la proposition de
la loi modifiant et complétant la loi n°11/022 du 24
décembre 2011 portant principes fondamentaux relatif à
l'agriculture. (Inédit)
[53]
Bien appliquées, ces recommandations permettront
à l'Etat de maîtriser les problèmes d'extension urbaine,
d'économiser les devises pour permettre à la population kinoise
d'avoir au prix convenable, l'accès facile et stable aux denrées
alimentaires de base.
§2. Le rôle de l'exploitant
privé
La loi n°11/022 du 24 décembre 2011 portant
principes fondamentaux relatif à l'agriculture à son article 3
point 8, est considéré comme exploitant agricole toute personne
physique ou morale qui exerce, à titre professionnel, toute
activité agricole. Dans les mêmes ordres d'idées, la loi
modifiant et complétant la loi n°11/022 du 24 décembre 2011
portant principes fondamentaux relatif à l'agriculture dispose à
son article 3 point 10 est exploitant agricole toute personne physique ou
morale qui exerce des activités agricoles150.
L'exploitant agricole assure la surveillance et la direction
de l'exploitation, participe de façon effective aux actes
nécessaires de l'exploitation, bénéficie des
résultats et en supporte les pertes. Son activité correspond
à la maitrise et l'exploitation d'un cycle biologique de
caractère végétal ou animal et constitue une ou plusieurs
étapes nécessaires au déroulement de ce cycle.
Rappelons que les activités de l'exploitant agricole
sont dans le prolongement de l'acte de production où les
activités auxquelles il se livre pour valoriser le cheptel et les
produits de l'exploitation. A côté de celles suscitées,
certaines activités autorisées comme celles de
l'hébergement à usage touristique où de loisir, celle de
la restauration réalisé par un exploitant sur le site de
l'exploitation à conditions qu'elles soient assurées
principalement au moyen des produits de l'exploitation et qu'elles respectent
la règle en matière d'hygiène, de sécurité
et protection de l'environnement.
Les responsabilités de l'exploitant agricole sont entre
autres d'assurer la direction, le contrôle et la surveillance de
l'exploitation, de participer de façon effective aux actes
nécessaires à l'exploitation afin de bénéficier des
résultats et supporter les pertes dans le cas échéant. Il
peut toutefois déléguer la gestion effective de son exploitation
à une tierce personne en qualité de gérant placé
sous son autorité, en accomplissant sa mission sous sa seule
responsabilité. Au regard de la loi, l'exploitant agricole a
l'obligation de respecter le contrat agricole, d'aviser l'autorité
administrative lorsqu'il constate l'existence des organismes nuisibles dans sa
concession...
151 Le projet d'aménagement de 28ha dans la vallée
de N'Djili en 1951, destinée à la production de légumes
frais
[54]
CONCLUSION
Au terme de cette dissertation qui a portée sur :
« la gestion et l'exploitation des terres agricoles : vers une agriculture
favorable à la sécurité alimentaire », il a
été question de réfléchir sur les problèmes
de la gestion et de l'exploitation des terres agricoles dans la ville de
Kinshasa qui grâce à une bonne gestion doit boutée
l'exploitation agricole afin de faire sortir les Kinois et Kinoise aux
problèmes de l'insécurité alimentaire qu'ils font face.
En effet, à partir de textes légaux, nous avons
essayé d'une part, d'évaluer l'état de la gestion des
terres rurales en général et agricoles en particulier, d'autre
part, de relever et d'analyser les causes de la précarité de la
sécurité alimentaire pour y apporter dans la mesure du possible,
les pistes de solution.
Eu égard à ce qui précède, la
gestion rationnelle du patrimoine foncier devrait être la priorité
de la production agricole. Elle devrait également assurer la
sécurité juridique à l'exploitant et permettre une
production agricole conséquente. Elle devrait enfin permettre à
l'Etat de contrôler l'occupation et maitriser l'utilisation de ses
terres. Telle qu'elle se réalise actuellement, elle constitue la cause
fondamentale de l'insécurité alimentaire dans la ville de
Kinshasa. Elle est à la base de l'approvisionnement extravertie de la
ville en denrée alimentaire de base et l'utilisation irrationnelle des
terres par l'extension urbaine non maitrisée.
Si jusqu'à 1960, l'extension de la ville de Kinshasa
était limitée, les mouvements des populations étaient
contrôlés, et l'approvisionnement en denrées alimentaires
était assuré, il n'en est pas question actuellement. Ce
déséquilibre économique entre les provinces et la capitale
ainsi que la suppression des contrôles migratoires ont laissé
libre voie à l'accroissement rapide de la population de la ville de
Kinshasa. En effet, cette Ville s'étend anarchiquement sur les terres
réservées à l'agriculture.
Absence de la production agricole locale ainsi que
l'augmentation du nombre des bouches à nourrir ont rendu difficile
l'accès de la population à la nourriture de base. Toutefois, si
la réponse devrait être trouvée dans la bonne
administration des terres agricoles comme ce fut le cas lorsque les pouvoirs
publics avaient créé, en 1951, les zones maraichères dans
la ville de Kinshasa151.
[55]
Une bonne politique agricole sélective des cultures de
base devrait être mise en place pour encourager la production agricole
locale et décourager l'importation des produits vivriers. Dans tous les
cas, il revient aux pouvoirs publics d'assurer le bien-être social
à sa population. Ce bien-être se cristallise en matière
agricole, par la possibilité qu'ils offrent à la population en
vue de lui faciliter la satisfaction de tous les besoins quotidiens en
général et les besoins alimentaires en particulier.
C'est dans cet ordre qu'on aligne le droit à
l'alimentation parmi ces droits fondamentaux de l'homme et on exige à
chaque Etat au nom de la souveraineté alimentaire de pourvoir à
l'autosuffisance alimentaire d'abord et à la sécurité
alimentaire ensuite. Cette dernière est garantie par les lois nationales
et, beaucoup d'autres textes officiels expriment dans leurs contenus, le souci
de rendre cette garantie effective.
L'administration des terres, notamment les terres agricoles,
est mitigée. Les services de l'Etat en charge de cette tâche sont
défaillants et dépassent par l'anarchie qui caractérise
l'utilisation de terres dans la Ville de Kinshasa. L'intervention de plusieurs
services de l'Etat, le manque de leur coordination dans la gestion des terres
rurales, leurs conflits de compétences et d'intérêts ont
rendu difficile la maitrise de la question du sol par les autorités de
la Ville. Ces dernières sont à ce jour incapable de donner la
situation réelle d'utilisation des terres et de production agricole.
Dans ce même ordre d'idées, certaines
étendues des terres sont accordées par les chefs coutumiers
Teke-humbu aux particuliers dans l'ignorance totales des règles aucune.
Les particuliers qui détiennent des terres sans aucun signe de mise en
valeur ont en leurs noms les certificats d'enregistrement les confirmant
concessionnaire. Il s'agit là, d'une violation d'une obligation
légale essentielle de mise en valeur des terres telle qu'exigée
par le législateur.
Dans le même sens, beaucoup de particuliers ayant
reçu de l'Etat des terres à usage agricole ont dû changer
la destination de leurs terrains avec la complicité de certains agents
de l'Etat. Ils ont procédé à la division de ces terrains
pour les revendre alors que le législateur congolais interdit la
spéculation foncière.
Aucun terrain à usage agricole existant entre les mains
de privés, n'est accompagné d'un contrat agricole qui
déterminerait la nature des cultures et la qualité des produits
à réaliser. La ville de Kinshasa ne maitrise pas son domaine
foncier et n'est pas à
[56]
mesure de planifier la production. Par voie de
conséquence, sa population est loin de faire face à
l'insécurité alimentaire.
C'est donc par une gestion durable des terres
agricoles152et une production agricole locale que doit passer la
solution à la problématique de précarité de la
sécurité alimentaire. En matière de la politique et du
programme de gestion des terres agricoles, l'Etat doit procéder à
l'aménagement spatial foncier, à l'application stricte de la
législation, à la planification de la production agricole,
à l'encadrement des exploitants agricoles, à leur suivi ainsi
qu'aux contrôles et sanction des actes illicites dans l'exploitation
agricole.
Toutes ces recommandations sont basées dans la
législation et doivent être considérées comme
véritable préalable de la gestion durable des terres agricoles
à Kinshasa. Quant aux conflits de compétence entre les services
des affaires foncières et de l'agriculture, il est donc logique de
revisiter l'article 181 de la loi foncière pour reconnaitre l'initiative
d'octroi de concession agricole et d'appréciation des conditions de mise
en valeur des terres agricoles uniquement aux services du Ministère de
l'agriculture, seuls compétents en la matière. D'ailleurs, la loi
sur l'agriculture exige que le contrat agricole soit signé par ces
services et l'exploitant agricole153.
En ce qui concerne l'intervention des chefs coutumiers dans
l'attribution des terres rurales, la loi attribue à l'Etat toutes les
terres y compris celles de la périphérie de la ville de Kinshasa.
Les chefs coutumiers TEKE-HUMBU sont obligés de la comprendre ainsi et
s'engager à respecter la loi. D'où, lors de leur attribution par
les autorités de l'Etat, les chefs coutumiers devraient prêter
serment de respecter scrupuleusement tous les textes des lois et
particulièrement la loi foncière. Outre les dispositions de
l'article 205 de la loi foncière, il est important de renforcer ces
sanctions de leurs actes par des infractions spécifiques. Concernant
ceux qui ont divisé les terrains reçus de l'Etat pour
l'exploitation agricole pour les vendre aux fins d'usage résidentiel, il
est important d'étudier au cas par cas afin de récupérer
celles qui peuvent être réattribuées aux personnes qui
doivent assurer leur mise en valeur.
Tels sont donc les préalables d'une gestion rationnelle
et durable des terres agricoles. Par gestion durable, il faut entendre au sens
de cette étude, celle qui permet aux
'52Art 60 de la loi n°73-021
du 20 juillet 1973 portant régime général des biens,
régime foncier et immobilier et régime des sûretés,
J.O.Z., n°3 du 1er février 1974, p.69.
'53Ministère de l'agriculture,
pêche et élevage, Projet du code agricole, version
finale, article 22, p.28.
[57]
services de la ville de maitriser l'utilisation du sol pour
faciliter et favoriser une production agricole locale susceptible de conduire
la population de la ville de Kinshasa, à l'autosuffisance alimentaire
d'abord et ensuite à la sécurité alimentaire. Cette
gestion durable n'est possible qu'en appliquant la législation en la
matière. En effet, c'est par l'application des dispositions de la loi
foncière et celles de la loi agricole sur l'accès et la
procédure d'obtention des terres agricoles et rurales, en
général et agricoles en particulier, la mise en valeur et son
contrôle, le financement et l'encadrement de l'activité agricole,
ainsi qu'en veillant à l'exécution stricte des clauses du
contrat, qu'il y aura sans doute, une production locale conséquente des
produits vivriers. C'est de cette façon que l'insécurité
alimentaire sera combattue, le taux de mortalité réduit pour
garantir à la population de Kinshasa l'autosuffisance d'abord et la
sécurité alimentaire ensuite.
[58]
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n°438, octobre 2009 ;
[62]
- MBOSO N'KODIA PWANGA, Programme économique du MPR,
dans quelle économie pour le Zaïre, Kinshasa, 1985 ;
- MBUANGI MBUKU L., (Dir)., Monographie de la ville de
Kinshasa, Comité Provincial de la Stratégie pour la
Réduction de la Pauvreté Ville-Province de Kinshasa (CPVPK),
Kinshasa, 2005 ;
- MBUANGI MBUKU L., Monographie de la ville de Kinshasa,
comité provincial de la stratégie pour la réduction de la
pauvreté, Ville de Kinshasa(CPVPK), 2005 ;
- Ministère de l'environnement, Conservation de la
nature et tourisme, manuel des droits et obligations des parties prenantes dans
les aires protégées, mars 2011 ;
- Ministère de l'Agriculture, Programme National de
Sécurité Alimentaire (P.N.S.A), document principal, version
amendée après l'atelier national du 16 Décembre 2010 ;
- MUTEBA KALALA
D-J. et NKULU MWINE FYAMA J., Crises
alimentaires et mesures d'atténuation en République
Démocratique du Congo, Revue des stratégies et promotion de
bonnes pratiques, KONRAD ADENAUER STIFTUNG, Kinshasa, 2009 ;
- NKULU MWINE FYAMA J. et NGULUNGU NTALABULU A.,
Sécurité alimentaire et systèmes d'alerte précoce
en RDC, Kinshasa, Konrad Adenauer Stiftung, 2018.
- TSHINGOMBE MULUBAY, L'ajustement structurel de
l'économie et la sécurité alimentaire en RDC, in
Sécurité alimentaire au Congo-Kinshasa, Paris, l'Harmattan.
- ZIEGLER J., Rapport spécial sur le droit à
l'alimentation de la Commission des droits de l'homme, E/CN.4/2001.
VII. WEBOGRAPHIE
-
http://www.peoplesfoodsoverignty.org
, consulté le 05 février 2021, à 15H40.
- La sécurité alimentaire, un sujet actuel en
RDC,
http://www.caridisdev.cd ,
consulté le 07 février 2021 à 13H25.
[63]
IN MEMORIAM
|
TABLE DES MATIERES
i
|
|
|
|
EPIGRAPHE ii
DEDICACE iii
REMERCIEMENTS iv
LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS v
INTRODUCTION 6
I. Problématique
III. Intérêt du travail
6
10
III. Méthodes et Techniques de recherche 11
A. Méthodes 11
B.
Techniques 12
IV. Délimitation du sujet 13
V. Annonce du plan 14
CHAPITRE I. L'ACCES AU SOL A DES FINS AGRICOLES 15
SECTION I. LE PRINCIPE DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE DE
L'ETAT SUR
LES RESSOURCES NATURELLES 15
§1. Le contenu du principe et son application au
sol 16
§2. Les limites du principe 17
SECTION II. L'ADMINISTRATION ET LA GESTION DES TERRES
AGRICOLES 18
§1. Les conditions d'accès aux terres
agricoles 18
§2. Les types d'exploitations des terres 32
SECTION III. LES DROITS ET OBLIGATIONS DU
CONCESSIONNAIRE 34
§1. Les droits 34
§2. Les obligations 35
[64]
CHAPITRE II. LES TERRES AGRICOLES KINOISES FACE A LA
SECURITE
ALIMENTAIRE 36
SECTION I. NOTION DE SECURITE ALIMENTAIRE ET SES
IMPLICATIONS SUR
L'EXPLOITATION AGRICOLE 36
§1. Définitions de la sécurité
alimentaire 39
§2. Réalité de la
sécurité alimentaire à Kinshasa 44
SECTION II. LES TERRES AGRICOLES KINOISES ET LEUR
CONTRIBUTION A LA
SECURITE ALIMENTAIRE 46
§1. L'exploitation des terres agricoles kinoises
47
§2. Les défis auxquels les terres agricoles
font face 50
SECTION III. PERSPECTIVES EN MATIERE DE GESTION DES
TERRES
AGRICOLES A KINSHASA 52
§1. Le rôle de l'Etat 52
§2. Le rôle de l'exploitant privé
53
CONCLUSION 54
BIBLIOGRAPHIE 58
TABLE DES MATIERES 63
[65]
La sécurité alimentaire et la production
agricole peuvent être effectives en ce qui concerne la Ville de Kinshasa
que si elles sont le résultat d'une gestion rationnelle des terres
agricoles. Mais, les autorités sont loin non seulement de la maitrise
mais aussi de la gestion de ces terres, et de proposer une réponse au
problème de l'insécurité alimentaire qui se pose avec
acuité au sein de sa population. Alors que l'existence des
étendues des terres agricoles dans la Ville de Kinshasa peut servir aux
autorités de la ville de Kinshasa pour nourrir la population. C'est donc
par une gestion durable des terres agricoles et une production agricole locale
que doit passer la solution à la problématique de
précarité de la sécurité alimentaire. En
matière de la politique et du programme de gestion des terres agricoles
l'Etat doit procéder à l'aménagement spatial foncier,
à l'application stricte de sa législation.