Master II Pratique de l'international:
Droit et Politiques de Développement
L'enjeu du développement durable dans le cadre
de l'Organisation Mondiale du Commerce
L'émergence d'un modèle de diplomatie
écologique et commerciale
Mémoire présenté par
Caleb MOISE
Directeur : Monsieur le Professeur Fereydoun-A.
KHAVAND
Juin 2010
2
REMERCIEMENTS
Mes remerciements s'adressent particulièrement
à Monsieur Khavand, non seulement pour avoir accepté de diriger
ce mémoire et me prodiguer ses précieux conseils mais aussi pour
avoir su me communiquer un très grand intérêt pour le
commerce international.
Je remercie par ailleurs l'ensemble des professeurs du
Master, notamment MM. Nohra et Benchenane qui m'ont partagé avec
beaucoup de passion leurs savoir-faire en méthodologie de la
recherche.
Annexes 96
3
SOMMAIRE
Introduction 4
Chapitre I : Approches conceptuelles et
théoriques du développement
durable et du commerce international 8
Section I : Le développement durable : un concept
composite et controversé 8
Section II : Les fondements théoriques du commerce
international 17
Section III : Les interactions problématiques entre
commerce international et
développement durable : les hypothèses 32
Chapitre II : Libéralisation et régulation
du commerce international et
gestion de l`enjeu du développement durable 47
Section I : Libéralisation et régulation du
commerce international 47
Section II : La gestion de l`enjeu du développement
durable du GATT à l`OMC 57
Section III : L`émergence d`une diplomatie
écologique et commerciale 71
Conclusion 83
4
INTRODUCTION
Je ne mangerai plus de cerises en hiver, tel est le
titre du dernier ouvrage d'Alain Juppé1, où celui-ci
semble vouloir attirer indirectement l'attention sur les enjeux
environnementaux du commerce international. Ce titre suggère en effet
qu'il serait plus judicieux de consommer des fruits et légumes de saison
et de proximité, que d`importer en tous temps et à grands frais
des produits venus de l`autre hémisphère. Ce titre reflète
par ailleurs les nombreuses contestations et manifestations populaires autour
des rencontres des négociations commerciales de l'Organisation mondiale
du commerce (OMC), mais aussi les débats théoriques sur des
supposés contradictions entre, d'un côté, le commerce
international fondé sur le principe du libre-échange et, de
l'autre, le développement durable qui suppose protection de
l'environnement et bien-être social.
Pourtant, on peut constater que, paradoxalement, si le
XXème a été celui de la libéralisation du commerce
et de sa réglementation à travers le GATT (General Agreement on
Tariffs and Trade) en 1947 puis de l'OMC en 1995, il est aussi celui qui a vu
un accroissement de l'intérêt et des préoccupations pour
l'environnement. Le développement simultané et
accéléré de la libéralisation du commerce
international2 et de l'intérêt pour la protection de
l'environnement peut notamment se remarquer
1 Juppé A (2009), Je ne mangerai plus de
cerises en hiver, Paris, Plon.
2 Les 60 dernières années ont
été marquées par une expansion sans
précédent du commerce international. Depuis 1950, le volume du
commerce mondial a été multiplié par 27. Un certain nombre
de facteurs sont à l'origine de cette expansion spectaculaire du
commerce mondial. Il faut citer en premier lieu les changements technologiques,
qui ont considérablement réduit le coût des transports et
des communications. Au cours de la deuxième moitié du
XXème siècle, l'introduction des moteurs à réaction
et de la conteneurisation ont entraîné une baisse notable du
coût des transports aérien et maritime, se traduisant par une
diversification des marchandises faisant l'objet d'échanges et une
augmentation du volume du commerce. Un deuxième facteur a
été l'ouverture des politiques commerciales et d'investissement.
Les pays ont ouvert leurs régimes commerciaux aux plans
unilatéral, bilatéral, régional et multilatéral.
Les mesures qui taxaient, restreignaient ou interdisaient les échanges
ont soit été éliminées, soit sensiblement
réduites.
5
par le fait que la question environnementale a progressivement
gagné l'attention des institutions internationales en charge du commerce
international, en particulier celle de l'OMC.
Nous sommes donc face à un double constat : d'un
côté il y a les contestations visant le libre-échange et
l'OMC sous prétexte que la libéralisation du commerce
international va à l'encontre du principe de développement
durable et, d'un autre côté, il y a l'OMC (et avant elle le GATT)
qui entend intégrer dans ses principes l'idée de
préservation de l'environnement et de bien-être social. La
première question qui s`impose est la suivante : comment comprendre la
relation de simultanéité entre la montée des
préoccupations dans les discussions sur les changements climatiques et
l'expansion du commerce mondial ? Et dans quelle mesure ces
préoccupations sont-elles justifiées? Il s`agira de comprendre
ici les incidences réelles du commerce international sur
l`évolution de l`écosystème.
L`autre phénomène qui semble paradoxal et qui
suscite des interrogations est le fait qu`une organisation comme l`OMC
manifeste un intérêt croissant pour la problématique
environnementale. Si, en effet, le domaine de compétence de l`OMC est
censé se limiter à la règlementation de la
libération du commerce international, en quoi pourrait-elle être
concernée par les enjeux environnementaux? Est-ce vraiment paradoxal que
d`intégrer des considérations environnementales dans les
réglementations commerciales ? Faut-il donc considérer les
intérêts de l`OMC pour le champ environnemental comme une
intrusion illégitime, ou doit-on voir dans les questions
environnementales un réel défi pour l'OMC? Et pourquoi donc l`OMC
devrait-elle prendre en compte dans ses règles les questions touchant
à l`environnement ? Mieux encore, les considérations
environnementales émises par l`OMC sont-elles motivées par de
réelles préoccupations pour l'environnement ou simplement par
l'objectif de lutter contre les formes déguisées de
protectionnisme ("protectionnisme vert")?
De plus, admettre la possibilité que l`OMC puisse
légitimement intégrer des considérations environnementales
dans ses règles, c`est aussi supposer qu`il y a des interactions
nécessaires entre le commerce international et l`environnement.
D`où
6
surgissent les questions suivantes : Quels rapports peut-il
exister entre commerce international et environnement ? Comment les
problématiques du commerce international et de l'environnement
interagissent-elles ? Les relations entre le commerce international et
l'environnement sont-elles nécessairement et uniquement des relations
conflictuelles et antinomiques, ou peuvent-elles aussi se concevoir sous le
mode de la concordance et de la complémentarité ? Et si
complémentarité il y a, comment les mesures environnementales
peuvent-elles avoir des effets sur le commerce international?
Il convient par ailleurs de constater que les
considérations environnementales intégrées dans les
règles de l'OMC font l'objet d'un certain nombre de problèmes
dont les principaux résultent du « principe de la
non-discrimination »: Comment déterminer si des mesures
environnementales ou sanitaires liées au commerce sont compatibles avec
les règles de l'OMC? Quand un Etat considère qu`un produit
étranger ne respecte pas les normes environnementales, comment
déterminer que ce produit non similaire? mérite un traitement
moins favorable que celui accordé au produit national ou à un
autre produit étranger? En outre, quand un État prend une mesure
environnementale en fonction des enjeux nationaux, comment apprécier
l'intérêt commun dans une mesure environnementale? Comment
distinguer les mesures environnementales et les mesures de protectionnisme
déguisées?
D`autre part, les préoccupations écologiques des
pays riches ne vont-elles pas à l'encontre de l'élimination de la
pauvreté dans les pays en développement (PED)? Comment concilier
l`urgence de réduction de la pauvreté dans les PED avec les
mesures environnementales susceptibles d`affecter la production et les
échanges internationaux ? S`agissant des problèmes
écologiques internes dans les PED, sont-ils le résultat ou bien
la cause de la pauvreté? L'OMC devrait-elle exempter les PED des
certaines de ses règles pour favoriser leurs productions et leur
croissance? Ou doit-elle, au contraire, les contraindre à appliquer des
mesures plus strictes dans leurs modes de production pour éviter le
phénomène de « dumping environnemental » ? Enfin, dans
quelle mesure le fait que les PED ne disposent pas de règles
suffisamment contraignante et de moyens de contrôle adaptés
contribue à rendre l'OMC inefficace au regard des objectifs du
développement durable? Les États n'étant plus les seuls
à intervenir dans la dynamique du commerce
7
international, comment l'OMC peut-elle gérer
l'influence des entreprises multinationales et transnationales dans l'enjeu
environnemental? 3
Toutes ces questions nous amènent au constat d'un
réel problème dans les relations entre l'OMC et les exigences du
développement durable: les règles de l'OMC semblent inefficaces,
sinon incompatibles avec le principe de développement durable.
L'enlisement actuel de l'OMC avec les négociations de Doha - où
la problématique du développement durable occupe une place
centrale - montrent justement le risque que constitue l`enjeu du
développement durable pour l`efficacité et la
crédibilité de l'OMC. Se pose donc ainsi la question de la
pertinence des règles de l`OMC dans le cadre des négociations
climatiques : L`OMC dispose t-elle des moyens nécessaires pour lever le
défi de la promotion simultanée du libre-échange et du
développement durable?
3 Les firmes transnationales (FTN) influencent de plus en plus
les échanges et ce, au travers notamment de la division internationale
du processus productif (DIPP) et du commerce intra-firme. D'ailleurs, leur
poids devient tel que les États, voyant leur autonomie s'effriter, se
sentent de plus en plus impuissants face à elles.
8
CHAPITRE I : APPROCHES CONCEPTUELLES ET
THEORIQUES DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
Section I : Le développement durable : un
concept composite et controversé
1. Définition, enjeux et généalogie du
concept de développement durable
Le concept de développement durable apparaît
officiellement pour la première fois dans le Rapport Brundtland qui le
définit comme « un développement qui permet la satisfaction
des besoins présents sans compromettre la capacité des
générations futures à satisfaire les leurs
»4. On peut tout d`abord noter que la notion de besoin occupe
une place centrale dans cette définition du développement
durable. Le terme besoin, tel qu`utilisé ici, réfère
à la situation des plus démunis, mais ne se limite pas aux
besoins physiques et matériels. Certes il s`agit avant tout du
bien-être matériel de l`individu engendré par les
activités économiques, mais il est aussi question de la
santé, de l`éducation, de la culture et de la préservation
de l`environnement5. Le développement durable serait ainsi le
processus qui exigerait l`amélioration globale
4 Gro Harlem Brundtland a été
présidente de la Commission mondiale sur l'environnement et le
développement, mandatée par l'Assemblée
générale des Nations Unies, en 1983. Son rapport, "Our Common
Future" (Notre avenir à tous) publié en 1987 est l'un des
documents fondateurs du développement durable.
5 Notons que le concept de développement
durable apparaît dans un contexte de critique de la croissance, de
surconsommation des ressources naturelles, de montée des
préoccupations environnementales et de risques technologiques et
sanitaires (d'où le « principe de précaution »). Pour
un historique complet du concept de développement durable, voir l'Annexe
I « Généalogie du concept de développement durable
».
9
du bien-être des humains, en conciliant à la fois
les aspects économiques, sociaux et écologiques.
Par ailleurs le concept de développement durable tel
que défini ici suppose la limitation des techniques permettant de
répondre aux besoins et, de ce fait, repose sur deux principes
complémentaires: le principe de la solidarité
intragénérationnelle (dans l'espace), c'est-à-dire la
nécessité de maintenir un objectif de croissance de
manière à permettre à chaque être humain d'avoir le
même droit aux ressources de la Terre ; et le principe de la
solidarité intergénérationnelle (dans le temps),
c'est-à-dire la nécessité de préserver les
ressources pour les générations futures. Le concept de
développement durable est donc aussi fondé sur le principe de
responsabilité et d`équité sociale, car il se veut un mode
de développement qui tient compte à court, moyen et long terme,
et ce, au niveau mondial, des impacts des activités économiques
sur l'environnement, les conditions sociales et l'éthique.
Les enjeux du concept de développement durable
consistent donc non seulement dans la solidarité
intergénérationnelle mais aussi et surtout dans la survie de
toute la planète. Et au-delà de la durabilité
écologique du type et du rythme de développement actuellement en
vigueur dans les pays avancés, se pose également le
problème de l`équilibre social et géopolitique qui
pourrait favoriser une coopération harmonieuse entre les peuples.
10
2. Dimension et indicateurs de
durabilité/soutenabilité (sustanability)
Le développement durable est la traduction de
l`expression anglaise "sustainable development". L'adjectif "sustainable" est
aussi traduit par soutenable, acceptable, raisonné pour prendre en
compte non seulement l'inscription dans le temps mais aussi la dimension
éthique de cette notion. En ce sens, l`adjectif durable/soutenable
associé au développement insiste à la fois sur la
dimension du long terme dans la planification du développement et aussi
sur le respect simultané que l`on doit accorder à
l'efficacité économique, l'équité sociale et la
préservation de l'environnement. Mais pour comprendre le débat
sur la notion de durabilité, il faut se référer au fait
que, du point de vue de l`histoire de la pensée économique, la
nature peut être vue de deux manières : il existe d'une part un
« capital naturel », non-renouvelable à l'échelle
humaine (comme la terre ou la biodiversité), et d'autre part des
ressources renouvelables (comme le bois, l'eau)6. De cette
double vision de la nature découleront les deux principales conceptions
de la durabilité.
Il y a d`un côté la position des
économistes systémiques7 selon laquelle le "capital
naturel" n'est pas substituable. Plutôt que de se concentrer sur l'aspect
purement économique des choses, les économistes
systémiques souhaitent avoir une vision globale qui comprend la
totalité des éléments du système
étudié, ainsi que leurs interactions et leurs
interdépendances. Selon cette approche, « la sphère des
activités économiques est incluse dans la sphère des
activités humaines, elle-même incluse dans la biosphère
»8. Afin d'insister sur les contraintes de la biosphère,
les tenants de cette approche préfèrent utiliser une traduction
littérale de sustainable development qui est « développement
soutenable ».
Il y a par ailleurs la position des économistes
néoclassiques9 qui suppose le caractère substituable
total du capital naturel en capital artificiel : si l'utilisation de
6 Par analogie avec l'économie, on peut donc
voir la nature comme un capital et un ensemble de revenus : lorsque les revenus
sont épuisés (dépassement de la biocapacité), c'est
le capital qui est amputé.
7 On peut citer Rosnay (de) J. (1975), Le
Macroscope : vers une vision globale; Schumacher E.F. (1977), A Guide
for the Perplexed ; ou encore Georgescu-Roegen N. (1971), The Entropy
law and the Economic Process.
8 Marechal J.P (1996), « L'écologie de
marché, un mythe dangereux », Le Monde diplomatique
n°511.
9 On peut citer notamment Solow R.M., «On the
intergenerational allocation of natural resources», Scandinavian
Journal of Economics, 1986; et Hartwick J.M., «Intergenerational
equity and the investing rents from exhaustible resources», The
American Economic Review, 1977.
10 Voir, par exemple, Jacquet P., Mignot G. &
Loup J. (1981), Les pays les plus pauvres: Quelle coopération pour
quel développement ?, Paris, Economica.
11
ressources non-renouvelables conduit à la
création d'un capital artificiel transmissible de
générations en générations, elle peut être
considérée comme légitime. Cette approche du
développement durable est aussi de type technico-économiste :
à chaque problème environnemental correspondrait une solution
technique, solution disponible uniquement dans un monde économiquement
prospère. Dans cette approche, aussi le pilier économique occupe
une place centrale et reste prépondérant, à tel point que
le développement durable est parfois rebaptisé « croissance
durable ». En ce sens, un sentier de croissance ou de développement
est durable si la consommation et l`utilité sont
non-décroissantes au cours du temps. Ainsi, pour ces économistes,
on peut parler de durabilité forte pour un sentier sur lequel le stock
de capital naturel est non-décroissant au cours du temps. Et la
durabilité faible s`appliquerait à un sentier sur lequel le stock
de capital total (capital naturel + capital manufacturé + capital humain
+ capital social) est non-décroissant au cours du temps.
Pour ce qui concerne les indicateurs de la durabilité
du développement, si le produit intérieur brut (PIB) est
très utilisé pour mesurer la croissance économique sur le
long terme, certains auteurs10 critiquent cet usage en raison du
fait que le PIB ne prend pas en compte la variation du stock de ressources
naturelles qui est un effet de long terme. En effet, le PIB considère
comme une production courante la valeur des ressources naturelles mises sur le
marché et n`intègre pas les atteintes à l`environnement
parce qu`aucun agent n`en supporte les coûts (les externalités
négatives). Par ailleurs, le calcul du PIB ne permet pas de comprendre
sa répartition et les différences de niveau de vie. En tant
qu`une moyenne globale de l`ensemble des revenus par habitant, le PIB est peut
aussi masquer des évolutions dans la répartition des revenus :
son augmentation peut ainsi aller de pair avec une amplification des
disparités des niveaux de vie, ce qui peut générer des
coûts sociaux et fragiliser la cohésion sociale. En sus de la
distribution des revenus, le PIB ne tient pas compte des
inégalités dans l`accès aux services publics, à
l`éducation, à la culture, à la santé, qui peuvent
entraver l`obtention d`une croissance forte et régulière sur le
long terme. Enfin, une autre insuffisance du PIB pour refléter la
durabilité du développement se trouve dans le fait qu`il ne
mesure pas la qualité de la vie et ne saurait prétendre à
l`évaluation du bien être. Il ne tient pas compte des
12
activités non rémunérées, des
engagements associatifs ou des loisirs. C`est en raison de toutes ces
insuffisances du PIB que des économistes ont été
amenés à construire des indicateurs agrégés qui
permettent de mieux rendre compte de l'efficacité d'une politique de
développement durable.
C`est ainsi que Nicholas Stern11 parle du «
PIB vert » ou de capital naturel pour donner une valeur monétaire
à la qualité environnementale ou pour exprimer le coût du
changement climatique. Le PIB vert désigne la correction du PIB en
fonction des coûts environnementaux, permettant ainsi de mesurer les
effets de la croissance sur l`environnement12. On parle par ailleurs
d'index de durabilité environnementale (environmental sustainability
index, ESI), de tonnes de CO2 émises (bilan carbone personnel pour
les particuliers) et notamment d'empreinte écologique. L`empreinte
écologique mesure les surfaces biologiquement productives de terre et
d'eau nécessaires pour produire les ressources qu'un individu, une
population ou une activité consomme et pour absorber les déchets
générés, compte tenu des technologies et de la gestion des
ressources en vigueur. Cette « surface » métaphorique est
virtuelle, mais elle traduit une réalité très
concrète. Plus on s`éloigne de l`idéal de
soutenabilité et de durabilité du développement, plus son
empreinte sera profonde et moins réversible sur la planète.
L'empreinte écologique s'efforce ainsi de répondre à une
question scientifique précise, et non à tous les aspects de la
durabilité, ni à toutes les préoccupations
environnementales. Enfin, sur le plan social, on parle d'indice de
développement humain qui mesure à la fois la richesse, le taux
d'alphabétisation et la santé d'une population ; on utilise aussi
le coefficient de Gini qui mesure la répartition des richesses ou les
disparités des niveaux de vie ; on peut surtout noter l`indicateur de
progrès véritable (IPV) qui est un indicateur alternatif au
produit intérieur brut (PIB) ou à l'indice de
développement humain (IDH) pour mesurer l'évolution du
bien-être réel d'un pays. Alors que le PIB ne mesure que
l'activité économique monétaire, l'IPV ajoute au PIB la
valeur estimée des activités économiques non
monétaires et en retranche la valeur estimée des richesses
naturelles.13
11 Nicholas Stern est surtout connu pour le
Rapport Stern sur l'économie du changement climatique
publié le 30 octobre 2006.
12 La Commission Stiglitz s'est
également penchée sur le problème des effets de la mesure
du produit intérieur brut sur l'environnement.
13 On peut aussi se référer aux 11
indicateurs du développement durable selon l'Insee dans l'Annexe II. Il
y a par ailleurs le Global Reporting Initiative qui comporte 79
indicateurs sur les mesures
13
3. Dimension et indicateurs économiques du
développement durable
Sur le plan économique, la durabilité du
développement suppose la possibilité d`un bien-être
économique à la fois dans le présent et dans l'avenir,
tout en préservant le « capital naturel ». La
durabilité économique du développement se traduit
concrètement une augmentation du PIB réel (notamment par
l`expansion du commerce international), par une amélioration de la
croissance potentielle (augmentation du taux d`investissement des entreprises
et du taux d`emploi), par l`investissement dans l`innovation et recherche et
par une bonne qualité de la gestion patrimoniale (augmentation du taux
d`épargne nette ajustée et baisse du taux d`endettement
public)14.
microéconomiques du développement durable pour
les entreprises. Voir aussi la publication de la Banque Mondiale World
Development Indicators en 1999.
14 Voir Georgescu-Roegen N. (1935), «Fixed
Coefficients of Production and the Marginal Productivity Theory»,
Review of Economics and Statistics, vol 3, pp 40-49; (1936), «The
Pure Theory of Consumer's Behavior», Quaterly Journal of
Economics, vol 50, pp 533-539; (1975), "Energy and Economic Myths", in
The Southern Economic Journal, 1975, XLI, 3, p.347-381; (1979),
Demain la décroissance. Entropie, écologie, économie.
Daly, H. E. (1996), Beyond Growth. The Economics of Sustainable
Development. Stiglitz J. (2002), La Grande Désillusion ;
(2003), Quand le capitalisme perd la tête. Beckerman, W. (1992),
«Economic Growth and the Environment: Whose Growth? Whose
Environment?», in World Development, Vol.20, p.481-496. Grossman,
G. M. et Krueger, A. B. (1993), «Environmental Impacts of a North American
Free Trade », in P. M. Garber (éd.), The Mexico-U.S. Free Trade
Agreement, Cambridge, Mass. : The MIT Press, pp. 13-56; (1995),
«Economic Growth and the Environment », The Quarterly Journal of
Economics, vol. 110, pp. 353-378; (1996), «The inverted-U : what does
it mean ? », Environment and Development Economics, vol. 1 (1),
février. De Simone, L. D. et Popoff, F., avec le WBSCD (1997),
Eco-efficiency. The Business Link to Sustainable Development.
14
4. Dimension et indicateurs écologiques du
développement durable
La durabilité écologique du développement
suppose une solide base de ressources naturelles et une volonté de
préserver, améliorer et valoriser l'environnement et les
ressources naturelles sur le long terme15. Conceptuellement, la
durabilité écologique signifie que certaines ressources
naturelles (comme la biodiversité, la terre...) ne sont pas
renouvelables16, que leur exploitation a des limites et qu`une
consommation excessive de ces ressources pourrait conduire à des
détériorations irrévocables17. La
durabilité écologique d`un système de développement
se caractérise notamment par de faibles émissions de gaz à
effet de serre, par la production d`énergie à partir de sources
renouvelables, par l`éco-efficacité des transports et par
l`éco-efficacité du secteur agricole (bilan azoté).
15 Baumol, W. et Oates, W. 1988, The Theory of
Environmental Policy. Daly, H. E. (1977) (1991), «Elements of
Environmental Macroeconomics », in R. Costanza (éd.),
Ecological Economics. The Science and Management of Sustainability, New
York : Cambridge University Press, pp. 32-46.
16 Dubos R. et Ward B. (1972), Nous n'avons
qu'une terre, Rapport non officiel établi à la demande du
Secrétaire Général de la Conférence des Nations
Unies sur l'environnement humain. Le Bras, H. (1994), Les limites de la
planète. Mythes de la nature et de la population. Daly, H. E.
(1977), Steady-State Economics. The Economics of Biophysical Equilibrium
and Moral Growth.
17 Il a été constaté que, sur
les 50 dernières années, les humains ont contribué
à modifier l'écosystème d'une manière à la
fois plus rapide et plus extensive qu'à n'importe quelle période
de l'Histoire. Par exemple, pendant les années 1990, la perte nette de
surface totale en forêt a été estimée à plus
de 94 million d'hectares.
15
5. Dimension et indicateurs socio-sanitaires du
développement durable
« Favoriser un état d`harmonie
entre les êtres humains et entre l`homme et la nature »,
telle est la proposition du Rapport Brundtland pour aller vers le
développement durable. En ce sens, un développement est
socialement durable s`il vise à satisfaire les besoins humains et
à répondre à des objectifs d'équité et de
cohésion sociale. Il englobe notamment les questions de santé, de
logement, de consommation, d'éducation, d'emploi, de culture. La
durabilité socio-sanitaire du développement réside donc
notamment dans la réalisation de la justice sociale via l'allocation
équitable des ressources, dans la lutte contre la pauvreté et
dans la prestation des services sociaux à tous les membres de la
société, surtout les plus pauvres. La dimension socio-sanitaire
du développement durable se fonde sur l`idée selon laquelle
l'homme constitue à la fois les acteurs et la finalité de ce
développement18. Mais n`y a-t-il pas une contradiction entre
le fait de placer simultanément l`homme et la nature au centre du
développement ? La sphère sociale du développement durable
se retrouve alors « prise en tenaille » entre l`approche
écocentrée (se donnant pour objectif la protection de tous
les êtres vivants) et l'approche anthropocentrée (visant
exclusivement le bien-être de l`homme). Les principaux indicateurs pour
mesurer la durabilité sociale du développement sont la dispersion
des revenus19, le taux de pauvreté monétaire, la
dispersion des taux de chômage régionaux, le niveau de vie relatif
des personnes âgées, l`espérance de vie sans
incapacité, le taux de mortalité prématurée
évitable, le principe de précaution20, la valorisation
des ressources humaines (formation professionnelle, l`emploi des femmes,
l`écart relatif entre les taux d`emploi des deux sexes, l`écart
de rémunération entre les sexes, le taux d`emploi des
travailleurs handicapés).
18 Voir: Maslow A. (1971), The Farther Reaches of
Human Nature.
19 Deininger, K. et Squire L. (1997), «
Nouveau regard sur le rapport entre croissance et inégalité des
revenus », Finances & Développement, mars, pp. 36-39.
Georgescu-Roegen N. (1977b), «Inequality, Limits and Growth from a
Bioeconomic Viewpoint », Review of Social Economy, vol. XXXV,
décembre, pp. 361-375. Kuznets, S. (1955), « Economic Growth and
Income Inequality », American Economic Review, vol. 49, pp.
1-28.
20 Shiva, V. (1995), «Social and environmental
clauses: A political diversion », Third World Resurgence, n°
59, pp. 2-7. Siroën, J.-M. (1999), «Sécurité
alimentaire ou relent mercantiliste ? », Sociétal, n°
26, sept., pp. 15-21.
16
6. Dimension et indicateurs éthico-politiques du
développement durable
La dimension éthico-politique du développement
durable réside notamment dans l`exigence de la participation de tous les
membres de la communauté dans le processus de prise de décision
et l'acquisition de manière précise des informations qui
affectent leur vie. La durabilité éthico-politique du
développement durable suppose en effet une certaine forme de gouvernance
où tous les acteurs de la société civile sont
mobilisés et prennent part aux processus de décision de
manière transparente21. Le développement durable
entend promouvoir la démocratie participative et rénover
l'approche citoyenne. Par ailleurs, la dimension éthico-politique du
développement durable suppose une certaine conscience collective qui
oblige tous les individus, soucieux du respect de l`environnement, à
réfléchir sur leur part de responsabilité à la fois
dans la dégradation et la protection de l`écosystème. Les
individus sont appelés à se fixer des règles de
comportements (trier les déchets, réduire les consommations
énergétiques, etc.) et à agir de manière telle
qu`ils puissent satisfaire leurs besoins sans compromettre la
possibilité que les générations futures puissent
satisfaire les leurs. Les indicateurs de la durabilité
éthico-politique du développement sont notamment l`accès
à l'information, la transparence dans le processus de prise de
décision, le principe de la participation des parties prenantes aux
décisions, l`écocitoyenneté,
l`éco-responsabilité, le principe de
responsabilité22, le principe de précaution, le
principe d`équité et de solidarité.
21 Voir: Hewson, M. et Sinclair, T. (1999),
«The Emergence of Global Governance Theory », in M. Hewson et T.
Sinclair, Approaches to Global Governance Theory, Albany : State
University of New York Press, pp. 3-22. Commission on Global Governance (1995),
Our Global Neighbourhood: The Report of the Commission on Global
Governance, Oxford : Oxford University Press.
22 Voir : Jonas H.(1979), Le principe
responsabilité. Fritz J.-C.(2005), L'ordre public
écologique et Daly, H. E. & Cobb, J. B. (1989), For the
Common Good. Redirecting the Economy toward Community, the Environment, and a
Sustainable Future.
17
Section II : Les fondements théoriques du
commerce international
1. Les approches traditionnelles
1.1 La théorie d`Adam Smith sur les avantages
absolus
S`opposant aux thèses protectionnistes des
mercantilistes qui voyaient dans le commerce international un jeu à
somme nulle, Adam Smith23 élabore la théorie des
avantages absolus. Le principe des avantages absolus suppose la
possibilité pour un pays de produire un bien avec moins de facteur de
production par rapport au reste du monde. L`échange international serait
donc mutuellement avantageux si chaque pays se spécialisait dans la
production où il possède un avantage absolu en matière de
coût. A. Smith raisonne dans le cas de deux pays, produisant chacun deux
biens, avec un unique facteur de production - le travail - mobile sur le plan
national mais immobile internationalement. Les coûts de production
unitaires étant par hypothèse mesurés en heures de
travail, un pays dispose d`un avantage absolu dans la production d`un bien
donné lorsqu`il peut produire une unité du bien
considéré avec moins d`heures de travail que le pays
partenaire.
En vertu de ce principe, les pays doivent se
spécialiser dans les secteurs d'activité où leur
efficacité est la plus grande. En conséquence, chaque pays doit
exporter le surplus de production qui découle de cette
spécialisation et importer les biens dont la production est
laissée aux pays voisins. Pour justifier cette idée, Smith avance
l`argument qui consiste à dire que l'importation est à l'origine
d'un gain à
23 Smith A. (1776), La Richesse des
nations.
18
l'échange et qu`il convient d'acheter à
l'étranger ce qui y est disponible à moindre coût.
Réciproquement, l'économie nationale exportera les biens pour
lesquels elle produit dans des conditions plus avantageuses. C'est
l'importation qui, suscitant un mouvement de spécialisation et mettant
à disposition des producteurs et des consommateurs une plus grande
variété de biens et de services, est à l'origine d'un
gain.
Notons que la théorie des avantages absolus d`Adam
Smith ne permet pas de comprendre pourquoi un pays qui serait plus efficace
dans la production de tous les biens aurait tout de même
intérêt à échanger avec ses voisins.
1.2 La théorie de David Ricardo sur les avantages
comparatifs
Reprenant la théorie des avantages absolus d`Adam
Smith, David Ricardo24 va résoudre la difficulté
interne à cette théorie, qui réside dans le fait qu`un
pays pourrait avoir des avantages absolus dans la production de tous les biens,
ou encore dans le cas où un pays ne disposerait d`avantage absolu dans
la production d`aucun bien. En effet, la théorie des avantages absolus
supposent la nécessité d'un avantage absolu de chaque pays pour
au moins un bien. En élaborant la théorie des avantages
comparatifs, Ricardo va montrer que même un pays avantagé dans
tous les biens ou, à l`inverse, même un pays
désavantagé dans tous les biens peut trouver un gain net dans
l`échange avec ses voisins.
La théorie des avantages comparatifs suppose en effet
que, même en l`absence d`avantage absolu, la spécialisation peut
se révéler avantageuse si les pays se spécialisent dans le
bien pour lequel ils disposent de la productivité relative la plus
forte. Le principe des avantages comparatifs repose sur l'idée du
coût d'opportunité combinée à celle d'un ajustement
des balances de paiements par les variations du taux de change. Le coût
d'opportunité d'une activité consiste à évaluer ce
que le même temps passé à une autre activité
pourrait rapporter. En ce sens, un pays a intérêt à
concentrer ses ressources dans les activités où il est
relativement plus
24 Ricardo D. (1817), Des principes de
l'économie politique et de l'impôt.
19
efficace. Par ailleurs, la variation du taux de change peut
jouer en faveur d`un pays désavantagé dans toutes les
activités, car celui-ci verra son taux de change se
déprécier jusqu'au point où ce désavantage
systématique disparaîtra pour certaines activités, en
monnaie internationale. Après ajustement du taux de change, ce pays
pourra se spécialiser selon les avantages comparatifs que lui auront
procurés les coûts d`opportunité.
Ricardo justifie donc la nécessité d`instaurer
le libre-échange par la comparaison internationale des coûts
d'opportunité. En présence de différences internationales
de coûts d'opportunité, il est avantageux pour tous les pays de se
spécialiser et d'exporter le bien dont la production présente le
plus grand avantage absolu ou le plus faible désavantage absolu. Alors
que les avantages absolus correspondent à une comparaison des
coûts de production, les avantages comparatifs correspondent à une
comparaison des coûts d'opportunité.
1.3 L`approche de John Stuart Mill sur les avantages
comparatifs
Stuart Mill25 prolonge la théorie des
avantages comparatifs de Ricardo en montrant que celui-ci avait omis de
préciser comment le surplus de richesses engendré par le commerce
international sera partagé entre les pays. Sur ce point, Stuart Mill
affirme que ce sont les prix internationaux des produits qui, résultant
du niveau de la demande mondiale, déterminent le gain né de
l`échange pour les différents pays. En effet, si pour Ricardo les
prix internes sont déterminés par les coûts, Stuart Mill
démontre que la détermination du prix international des produits
répond au principe de l`offre et de la demande, et par conséquent
est conditionnée au niveau de la demande mondiale.
Stuart Mill appuie sa thèse sur la démonstration
suivante : pour chaque prix relatif possible, un pays X souhaitera exporter une
certaine quantité du bien A et importer une certaine quantité du
bien B. Un pays Y adoptera une attitude symétrique en exportant le bien
B et en important le bien A. Mais comme il est improbable que les
quantités offertes soient égales aux quantités
demandées, c`est le prix relatif pour
25Stuart Mill J. (1848), Principes
d'économie politique.
20
lequel l`offre et la demande s`égalisent qui va
déterminer les quantités échangées. D`où le
fait que les situations de répartition inégale du gain à
l`échange sont les plus courantes.
Stuart Mill en déduit que les pays qui ont un avantage
comparatif dans les produits fortement demandés au niveau international
ont plus de chance d`acquérir des gains élevés à
l`échange. La spécialisation sur la base des avantages
comparatifs n`est favorable que si la demande étrangère est telle
que le prix international est supérieur au prix en autarcie. De plus,
étant donné que les termes de l`échange sont
définis par le rapport entre l`indice des prix à l`exportation et
l`indice des prix à l`importation, il n`y a jamais de situation stable
car les pays sont confrontés à tout moment à des risques
de détérioration des termes de l`échange.
Par ailleurs, une autre conclusion de Stuart Mill consiste
à dire que l`ouverture commerciale profitera davantage aux pays pauvres
qu`aux pays riches en raison du fait que les premiers peuvent profiter de la
demande plus importante et plus rémunératrice des seconds pour
exporter leurs produits. À l`inverse, les gains que les pays riches
peuvent tirer de l`échange avec les pays pauvres seront limités
par le faible pouvoir d`achat de ces derniers. Il en résulte que, non
seulement les pays pauvres peuvent s`insérer dans le commerce mondial,
mais ils en profitent davantage que les pays riches.
21
2. La théorie marxiste de l`échange
inégal (Arghiri Emmanuel et Samir Amin)
Appliquant la théorie de l'exploitation de Marx aux
échanges internationaux, Arghiri Emmanuel26 et Samir
Amin27 développent la théorie de l`échange
inégal. Selon cette théorie, il y a échange inégal
entre deux pays si, à travers l'échange international, un pays
obtient des marchandises qui incorporent davantage d'heures de travail qu'il
n'en donne à travers ses propres produits. Or, du fait notamment d`une
productivité plus élevé, les pays développés
exportent vers les pays en développement des produits qui
nécessitent moins d'heures de travail que les produits importés
par les pays développés des pays en développement. En
effet, l'exportation de produits manufacturés et l'exportation de
produits primaires ne se font pas à un prix tel que les quantités
de travail incorporées dans les biens échangés soient
égales. Par conséquent, selon ces économistes, le commerce
international serait un processus d'exploitation des pays pauvres par les pays
riches.
Pour comprendre les fondements de la théorie de
l`échange inégal, il est nécessaire de se
référer au concept de « valeur-travail »
élaboré par Karl Marx. Ce concept signifie que toute valeur est
produite par le travail et est exprimée en quantité de travail.
L`unité de mesure pour mesurer la valeur de production est le temps de
travail effectué. Il en résulte que, le travail étant
producteur de richesse, un pays peut s`enrichir ou s`appauvrir selon qu`il vend
sa production en-dessus ou en-dessous de sa valeur-travail. C`est ainsi que
dans la logique de la valeur-travail, sous l`apparence d`un échange
équivalent, un des deux pays s'enrichit alors que l'autre
s'appauvrit28.
Par ailleurs, de cette conception marxiste de la valeur
travail, les théoriciens de l`échange inégal vont
démontrer que ce sont surtout les économies à bas salaires
qui sont les principales victimes du commerce international, lequel se fait
surtout à l`avantage des salariés des pays
développés. Le travail étant internationalement
26 Arghiri Emmanuel (1969), L'Échange
inégal.
27 Samir Amin (1973), L'échange
inégal et la loi de la valeur.
28 Notons que Marx, dans Le Capital
(1867), avait aussi esquissé l'idée que le commerce
extérieur permet la création de plus-value dans les pays
capitalistes, car l'importation maintient la force de travail des pays
capitalistes à un prix inférieur à celui qui existait
avant l'échange.
22
immobile, il n`y a pas de concurrence possible entre les
salariés des pays développés et ceux des pays pauvres. Il
en résulte un transfert de valeur et un surprofit pour les firmes des
pays développés. Et ce surprofit provenant de l`exploitation des
salariés des pays pauvres est en partie versé aux salariés
des pays riches.
23
3. La théorie néoclassique : le modèle
HOS (Hecksher, Ohlin et Samuelson)
Ces trois auteurs ont développé une
théorie selon laquelle ce sont les dotations de facteurs de production
qui sont fondamentales dans l`échange international. C`est l`abondance
ou la rareté relative des divers facteurs de production (terre, capital,
travail) qui va amener un pays à choisir telle spécialisation
plutôt qu`une autre, et à importer des biens et services relevant
des facteurs qui lui manquent. Selon cette théorie, les pays
développés, dotés de capital, de technologies
avancées et d`une main d`oeuvre qualifiée, exporteront des
produits élaborés. A l`inverse, les pays moins
développés exporteront des marchandises incorporant leur facteur
le plus abondant, le travail peu qualifié.
Pour comprendre les fondements de cette théorie, il
faut se rappeler que le modèle HOS postule l`idée selon laquelle
il existe une substitution mutuelle entre le capital et le travail. Mais cette
substitution trouve ses limites dans la fixité ou l`insuffisante
mobilité des facteurs de production. C`est dans cette imperfection que
commerce international trouve son origine.
Notons par ailleurs que l`analyse néoclassique du
commerce international se veut un approfondissement des travaux de Ricardo sur
l`origine des différences de coûts de production entre les pays.
Ricardo affirmait en effet que les différences de coûts
s`expliquent par des différences de productivité.
Heckscher29 explique ces disparités de coûts par des
différences de dotations en facteurs de production entre les pays.
D`où la loi des proportions des facteurs, appelée aussi loi
d`Heckscher-Ohlin30 : un pays a intérêt à
exporter le bien dont la production est intensive dans le facteur relativement
abondant dans ce pays et à importer le bien dont la production est
intensive dans le facteur relativement rare (dans ce pays).
De ces considérations, les théoriciens
néoclassiques déduisent que la spécialisation
internationale contribue à faire augmenter les prix des facteurs de
production. D`où le théorème de
Stolper-Samuelson31 : la hausse du prix d`un produit
29 Eli Heckscher (1919), The effect of foreign
trade on the distribution of income.
30 Bertil Ohlin (1933), Interregional and
International Trade.
31 Paul samuelson (1971, Les fondements de
l'analyse économique.
24
a pour effet d`augmenter la rémunération
réelle du facteur productif dont l`emploi est le plus intensif dans
cette production.
Enfin, selon le modèle HOS, quand la dotation
factorielle d`un pays évolue, sa spécialisation va s`orienter
vers le bien intensif dans le facteur qui augmente. Ce résultat, qui
introduit une dynamique des avantages comparatifs, est connu sous le nom de
théorème de Rybszynski.
25
4. Synthèse des nouvelles théories
4.1 La théorie de l`écart technologique de
Posner
La théorie de l`écart technologique
élaborée par Michael Posner32 désigne la
différence entre les technologies de production disponibles dans deux
économies considérées. Posner remarque que, grâce
à l`innovation, des pays à dotations relatives factorielles
proches commercent néanmoins ensemble et constate que cela apporte un
démenti aux conclusions du modèle HOS.
En effet, contrairement aux théories de Ricardo et
d'HOS, Posner met l`accent sur les firmes et leurs stratégies, plus que
sur les dotations factorielles. Il explique que, si pendant une période
donnée une firme détient le monopole dans la production d`un bien
nouveau consommé à la fois sur le territoire national et à
l`étranger, cela génère des flux d`exportations, tant que
d`autres firmes n`ont pas mis au point un produit concurrent. Un commerce
d`écart technologique naît si les consommateurs des pays
étrangers expriment une demande pour les biens nouveaux. Et l`avance
technologique acquise dans un secteur confère un monopole d`exportation
pour les produits du secteur. Dès que la nouvelle technologie est connue
à l`étranger, une concurrence potentielle existe. Cet avantage
technologique va alors disparaître progressivement lorsque les
producteurs des pays étrangers s`engagent dans la fabrication des
mêmes biens. Néanmoins, le monopole de l`innovateur peut se
maintenir si son avantage de coût est suffisamment net.
32 Michael Posner (1961), "International Trade and
Technological Change", Oxford Economic Papers, New Series, vol. 13,
n°3, octobre 1961, p. 323-341. Il a été repris dans un
rapport de l'OCDE publié en 1969 sur les Ecarts
technologiques.
33 Paul Krugman (1998), L'économie
auto-organisatrice; (2000), La mondialisation n'est pas coupable :
vertus et limites du libre-échange ; (2006), Economie
internationale.
26
4.2 La théorie de la concurrence imparfaite et
politique stratégique de Krugman
Paul Krugman33 souligne les insuffisances de la
théorie de Posner notamment sur le fait qu`elle néglige le fait
que les déterminants des flux commerciaux ne sont pas stables dans le
temps. Krugman complète l`analyse de Posner en montrant que, si les pays
du Nord innovent, ils sont contraints de le faire de façon constante
afin de maintenir leur niveau de revenu. D`autant plus que le monopole
technologique des pays du Nord peut se trouver constamment érodé
par les transferts technologiques à destination des pays du Sud,
compétitifs au niveau international grâce à de bas
salaires.
A partir de ces constatations, Krugman utilise la
théorie de la concurrence imparfaite pour expliquer la politique
stratégique mise en place par les pays du Nord pour conserver leur
avantage technologique. La concurrence imparfaite se caractérise en
effet par l'existence de barrières à l'entrée, des
rendements croissants ou de surprofits liés à des positions de
monopole. Les économies d'échelle donnent un avantage
déterminant aux entreprises qui atteignent les premières la
taille optimale. Cette dernière permet de différencier les gammes
et d'amortir les dépenses de recherche et de développement. De
même, les entreprises peuvent pratiquer des prix bas et laminer les
profits des autres firmes. Dès lors, les pays dont les firmes ne
seraient pas compétitives seront obligés d'importer des biens et
vont prendre un retard technologique. C'est pourquoi les entreprises et les
nations sont incitées à tout faire pour faire perdurer cet
avantage ou à le conquérir. La politique commerciale
stratégique consiste donc à chercher à éliminer son
concurrent afin de récupérer ses débouchés et
renforcer son pouvoir de monopole.
27
4.3 La théorie de la demande représentative
de Linder
S`opposant aux modèles ricardien et HOS qui expliquent
les échanges internationaux par des facteurs d`offre,
Linder34 considère qu`un pays peut s`être
constitué un avantage comparatif grâce à l`existence d`une
demande intérieure importante (principe de la «demande domestique
représentative»). Le marché extérieur n`est qu`un
prolongement du marché national et l`échange international n`est
que l`extension des échanges régionaux.
Selon Linder, l'échange des biens manufacturés
par opposition aux produits primaires ne peut être expliqué par
les seules dotations relatives naturelles. Le volume du commerce entre deux
pays dépend des préférences des consommateurs. Linder
affirme en effet que la proximité des pays en termes de niveau de
développement permet un échange croisé de produits
similaires. Les hypothèses de la théorie de Linder sont les
suivantes : les individus touchant le même revenu possèdent la
même structure de demande quel que soit le pays auquel ils appartiennent
; la répartition des revenus est la même dans les deux pays ; le
pays fabrique un produit manufacturé que parce qu'une demande domestique
préexiste à une demande extérieure.
4.4 La théorie de la demande de différence de
B. Lassudrie-Duchêne
Bernard Lassudrie-Duchêne35 prolongera la
théorie de Linder en introduisant le concept de « demande de
différence » : si les échanges croisés portent sur
des produits semblables, ceux-ci ne sont pas rigoureusement identiques mais
bénéficient d`une « qualité de différence
». La différentiation des biens permet de satisfaire une demande
dite de variété ou de « demande de différence ».
La participation au commerce international permet ainsi d`améliorer la
satisfaction des consommateurs
34 Linder S. B. (1961), An Essay on Trade and
Transformation.
35 Lassudrie-Duchêne B. (1972),
Échange international et croissance.
28
qui peuvent choisir entre de nombreuses variétés
d`un bien et permet également d`élargir le marché
potentiel des entreprises.
4.5 Le paradoxe de Leontief
Partant du fait que les États-Unis étaient en
principe mieux dotés en capital que le reste du monde,
Leontief36 calcule à l'aide de la matrice input-output les
contenus en travail et en capital des exportations et importations
américaines pour l'année 1947. Il constate que, paradoxalement,
les États-Unis exportent des biens qui nécessitent beaucoup de
travail et importent des biens relativement capitalistiques. Les
spécialistes du commerce international ont amplement discuté et
contesté ce paradoxe, les critiques portant sur trois points : la
méthode relative aux fonctions de production, la non prise en compte du
protectionnisme américain, l'absence d'un troisième facteur de
production, à savoir les ressources naturelles qui à
côté du travail et du capital sont susceptible de modifier
considérablement les résultats initiaux en fonction de leur
substituabilité ou de leur complémentarité respectives.
4.6 La théorie de cycle de vie du produit de
Vernon
Prolongeant la théorie de l`écart technologique,
Vernon37 considère que les innovations sont à
l'origine du cycle de vie d'un produit. Il analyse les causes de l`innovation
et les modalités de sa diffusion à l`échelle
internationale. Il affirme qu`au fur et à mesure qu`une innovation est
connue, la concurrence se durcit et le coût des facteurs de production
redevient prédominant. La production est alors transférée
vers des pays à bas salaires.
36 Leontief W. (1953), Domestic Production and
Foreign Trade: The American Capital Position Re-examined.
37 Vernon R. (1966), « International
Investment and International Trade in the Product Cycle », in
Quarterly Journal of Economics, vol. 80, pp. 190-297.
29
Pour Vernon, en effet, la période d`existence d`un
produit peut être découpée en quatre phases et chaque phase
de la vie d`un produit est associée à une phase d`échange
international. Tout d`abord, le produit est intensif en technologie (phase de
la naissance qui n`engendre pas encore de commerce international), puis son
développement et sa production de masse nécessitent une forte
intensité en capital (phase de la croissance qui voit les exportations
du pays innovateur vers ses partenaires développés se
multiplier), enfin le produit banalisé, intensif en main d`oeuvre
qualifiée (phase de la maturité où la balance commerciale
du pays innovateur devient de plus en plus excédentaire) devient peu
à peu obsolète (phase du déclin où les autres pays
commencent à s`approprier l`innovation).
4.7 La théorie de la protection des industries
naissantes (List)
La théorie des industries naissantes préconise
la nécessité pour un Etat de mettre en place des barrières
douanières afin de protéger ses industries qui ne sont pas
capables de faire face à la concurrence étrangère afin de
leur laisser le temps de grandir. En protégeant l'industrie dans le
premier temps de son développement, le pays permet à cette
activité d'engranger des économies d'échelle et de
bénéficier de gains d'apprentissage. Il en résulte une
baisse du coût moyen par rapport à celui des producteurs du reste
du monde. Il s`agit d`un « protectionnisme éducateur » qui a
pour objectif de protéger sur le moyen terme le marché national
afin de permettre sur le long terme un libre-échange qui ne soit pas
à sens unique. Esquissée par John Stuart Mill, cette doctrine a
notamment été élaborée par Friedrich
List38.
L'enjeu de la théorie de List réside dans la
mise en place d'un protectionnisme transitoire pour permettre aux entreprises
nationales dans l'enfance de rattraper un retard en matière
d'économies d'échelle, de productivité, et donc de
compétitivité-prix et hors-prix, par rapport aux entreprises
étrangères. Il s`agit donc de construire une
spécialisation et un avantage comparatif, et aussi d'orienter les choix
des
38 List F. (1841), Système national
d'économie politique.
30
consommateurs vers les entreprises nationales. Cette
théorie a influencé aussi les choix d'industrialisation de
certains pays en développement.
4.8 La théorie de l`intégration
régional de Viner
Jacob Viner39 a élaboré une
théorie de l`intégration régionale selon laquelle une
Union douanière engendre deux effets contradictoires : un effet de
trafic créateur de commerce et un effet de diversion du trafic
destructeur du commerce. Le premier effet - qui correspond au fait que les
consommateurs de chaque Etat membre achètent de plus grandes
quantités aux producteurs des autres Etats membres - améliore la
situation du pays importateur ; le second effet - qui correspond au fait que
les consommateurs achètent aux producteurs des autres Etats membres
uniquement en raison des différences de coûts créés
artificiellement - détériore la situation du même pays
importateur. Et le résultat final est incertain. Viner a montré
par ailleurs que si les accords régionaux crée bien de
l'échange à l'intérieur de la zone, ils en en
détruisent aussi par rapport à l'extérieur, alors
même que la nature du résultat final pour la zone n`est pas
assuré.
Le modèle de Viner repose, en effet, sur la
théorie traditionnelle des avantages comparatifs qui justifie le
libre-échange par le gain qu'il procure aux consommateurs. Les
importations libérées permettent aux économies de se
spécialiser et d'affecter leurs ressources rares dans les secteurs
où ils sont comparativement les plus efficaces. Cette
réorientation de l'activité crée un surplus de production
exportable qui équilibre les importations. La diminution du prix relatif
des biens importés améliore la situation des pays qui s'ouvrent
à l'échange.
Notons que le modèle proposé par Viner
correspond à la situation de l'après-seconde guerre mondiale,
où des pays voulaient conserver des niveaux de protection
élevés, hérités des années 1930, alors
même qu`ils mettaient en place les
39 Viner J. (1950), Studies in the Theory of
International Trade, 1937; The Customs Union Issue; (1923),
Dumping: a problem in international trade; (1943) Trade Relations
Between Free-Market and Controlled Economies; (1950), A Modest
Proposal for Some Stress on Scholarship in Graduate Training; (1951),
International Economics; (1952), International Trade and Economic
Development.
31
accords de Bretton Woods et le GATT qui avaient pour
principale mission d`orienter les économies occidentales vers la
libéralisation des échanges. Si les accords régionaux
permettaient d'abaisser, voire de supprimer les tarifs au profit d'un nombre
limité de pays, les négociations multilatérales
menées au sein du GATT visaient à les abaisser vis-à-vis
de tous.
.
32
Section III : Les interactions problématiques
entre commerce international et développement durable : les
théories
1. Rôle du commerce international dans la
dégradation de l`environnement, et l`hypothèse de la
décroissance et de la limitation du libre-échange
.
Avec l`expansion rapide et massive du commerce international
et la libération croissante des échanges après la Seconde
Guerre mondiale, des scientifiques, des économistes ou encore des
associations et mouvements écologiques ont attiré l`attention sur
les effets éventuels du commerce international sur l`environnement. Ils
soulignent notamment les effets liés à la pollution directe
engendrée par les transports, à l`accroissement des productions
(polluantes et génératrices d'exploitation de la nature), et les
problèmes de régulation internationale des polluants. En outre,
en raison de la division internationale du travail engendré le commerce
international, la spécialisation des pays - induisant des allers-retours
de marchandises d'un pays à l'autre dans le cadre des différentes
étapes du processus productif - provoque encore plus de dommages
à l`environnement. Ainsi l'organisation ATTAC prend l'exemple de la
production de crevettes pour souligner un phénomène de gaspillage
énergétique : « Les crevettes que nous consommons font un
long trajet avant d`arriver dans nos assiettes : pêchées dans la
mer du Nord, elles voyagent du Nord au Sud dans des camions
réfrigérés pour être épluchées par la
main-d`oeuvre féminine bon marché du Maroc, et repartent ensuite,
toujours en camion réfrigéré, pour être vendues sur
les marchés d`Europe...»40.
40 Attac France (12 octobre 2004) « La question
énergétique en débat ».
33
En effet les transports apparaissent comme le principal moyen
par lequel le libre-échange a des conséquences directes sur
l`environnement. Selon la Commission de Coopération Environnementale de
l'Amérique du Nord41, « même si la plupart des
évaluations des effets du commerce sur l`environnement
révèlent un lien indirect et plutôt ténu entre le
commerce et les changements touchant l`environnement, certains
éléments confirment l`existence d`un lien direct et solide entre
l`environnement et le commerce dans le secteur des transports ».
Des études précises ont mesuré l'impact de
l'essor des transports à certains endroits particuliers suite à
la mise en place de l'ALENA en Amérique du Nord. Selon la Commission de
Coopération Environnementale d'Amérique du Nord, la pollution
constatée aux frontières États-Unis/Canada et
États-Unis/Mexique a augmenté, en particulier dans les villes
frontalières à proximité des grands axes de
communications. Notons aussi que le transport en ville des marchandises
contribue à la hausse des nuisances sonores, ce qui nuit à la
qualité de la vie.
A La pollution de l`air s`ajoute celle des mers,
aggravée surtout par le fait que des bateaux de transports pratiquent le
dégazage en mer - ce qui leur permet d'éviter de payer des frais
de nettoyage assez élevés, sans parler des accidents donnant lieu
à des catastrophes (marée noire) très nuisibles à
la nature et provoquant la disparition d`espèces marines. De plus, le
transport des marchandises considéré comme vecteur de
bouleversement de la faune et de la flore constitue une menace pour la
biodiversité. La Commission de Coopération Environnementale
d'Amérique du Nord cite l`US Global Survey42 selon lequel aux
États-Unis vivent durablement plus de 6000 espèces d'animaux, de
plantes et de microbes importées involontairement qui menacent les
espèces locales. Les transports de marchandises pourraient donc
contribuer au déplacement de ces espèces.
Par ailleurs, certains économistes comme Raúl
Prebisch et Hans Singer43 ont émis l`idée selon
laquelle le libre-échange provoquerait des dégradations
considérables de l`environnement dans les pays du Sud, en raison
notamment de la
41Commission de coopération environnementale
de l'Amérique du Nord, 2002, « Libre-échange et
environnement : un tableau plus précis de la situation », p.4.
42US Geological Survey (1998). Status and
Trends of the Nation's Biological Resources, volume one, Washington.
DC.
43Singer H. (1998) "The Terms of Trade Fifty Years
Later - Convergence and Divergence", The South Letter, n.30.
34
dégradation des termes de l`échange. Selon la
thèse de la dégradation des termes de l'échange, durant
les trente dernières années, la valeur des produits qu`exportent
les pays pauvres (traditionnellement des matières premières) est
en baisse comparativement à celle des productions industrielles et
technologiques des pays riches. Cette situation s`expliquerait par le fait que,
d`un côté, les États du Nord fabriquant des produits
manufacturés voient la technicité et les prix de leurs produits
s'accroître, et, de l`autre, les États du Sud fournissent au nord
des matières premières dont les prix baissent progressivement. En
conséquence, pour une même quantité de matière
première produite et vendue aux États du Nord, les pays du Sud ne
peuvent acheter qu'une quantité de plus en plus réduite de
produits manufacturés. Il en résulte une dégradation des
termes de l`échange et une réduction croissante du pouvoir
d`achat des pays du Sud. À long terme, ce phénomène
appauvrit les pays du Sud et les contraint à une surexploitation de
leurs ressources naturelles pour obtenir une quantité égale de
productions des pays riches, au détriment de la protection de
l`environnement et du principe du développement durable.
De ces constatations sur les impacts du commerce international
sur l`environnement a émergé l`hypothèse de la
décroissance et de la nécessaire limitation du
libre-échange. Selon cette hypothèse, les dégradations
environnementales, inhérentes à l`activité humaine,
doivent être minimisées, autant que faire se peut, par la prise de
conscience et l`action volontaire des sociétés humaines. Cette
hypothèse s`appuie notamment sur l`idée que le commerce
international, fondée sur la division internationale du travail et la
spécialisation, favorise une productivité de plus en plus
poussée, ce qui donne lieu à une surexploitation de la nature et
à des dégradations de l`environnement, tel que nous l`avons
exposé précédemment. D`où l`idée de la
nécessité d`une décroissance.
A l`origine, le concept de la décroissance
désigne la remise en cause de la notion de croissance économique
telle qu`elle est mesurée par le PIB. Les promoteurs44 du
concept de décroissance affirment que la croissance ainsi
mesurée
44 Notamment Nicholas Georgescu-Roegen (1971),
The Entropy law and the Economic Process, traduit par Jacques
Grinevald (1979), sous le titre Demain la décroissance. Entropie,
écologie, économie; Günther Anders (1956),
L'Obsolescence de l'homme ; Hannah Arendt (1958), Condition de
l'homme moderne ; Ivan Illich (1973), La Convivialité.
45 Les Rapports Meadows : (1972), Limits to
Growth ? (Halte à la croissance ? dans son édition
française) ; (1974), Sortir de l'ère du gaspillage :
demain.
35
n'est que quantitative, puisqu'elle ne mesure que
l'augmentation de la production et de la vente de biens et services sans tenir
compte du bien-être des populations, de la santé des
écosystèmes et des équilibres climatiques. De plus, elle
ne tient pas compte du fait que la Terre est limitée aussi bien dans ses
ressources naturelles que dans sa capacité à supporter la
destruction de son biotope Ils privilégient des indices de
développement alternatifs tels que l'indice de développement
humain, l'empreinte écologique, l'indice de santé sociale.
Nicholas Georgescu-Roegen, le principal promoteur de cette
thèse, affirme en effet que le modèle économique
néoclassique est fondé sur le paradigme de la mécanique
newtonienne et ne prend pas en compte le principe de la dégradation de
l'énergie et de la matière. Il se fonde quant à lui sur le
paradigme de la thermodynamique et introduit le principe d'entropie dans son
modèle économique. Il associe aux flux économiques de la
matière et de l'énergie qui par le biais des différents
processus de production se dégradent de manière
irréversible. Par exemple les matières premières
utilisées pour la construction des ordinateurs sont fragmentées
et disséminées à travers toute la planète et il
devient pratiquement impossible de reconstituer les minerais d'origine. Quant
à l'énergie utilisée pour leur fabrication, elle est
dissipée à jamais.
Par ailleurs, la thèse de la décroissance a
également été reprise par le Club de Rome dans ses
rapports45 où il souligne notamment les dangers
économiques de la croissance de la consommation des matières
premières et de la croissance démographique que connaît
alors le monde. Depuis, le concept de la décroissance s'oppose au
productivisme économique, lequel est également par la suite remis
en cause par le concept de développement durable. Notons que les
théoriciens de la décroissance voient toutefois dans le concept
de développement durable une contradiction dans les termes. Pour eux, le
développement, la croissance économique comme principal
fondement, crée des déséquilibres tels qu`il ne saurait
être durable. Ils estiment que pour être durable et soutenable sur
une planète finie, le développement humain devra au contraire
pouvoir se passer d'une croissance matérielle perpétuelle, au
profit de réponses justes aux besoins matériels et
socio-psychiques (incluant la santé et la sécurité
affective, individuelle et collective), et au
36
profit d'une croissance partagée de la qualité
et du plaisir de vie, du savoir et des cultures. La décroissance
s`opposerait donc en partie au développement durable lorsque celui-ci
est défini comme nécessitant une croissance durable ou continue
des systèmes de production matérielle et d'échange de
biens et valeurs financières.
Rejetant donc la notion de développement, certains
théoriciens de la décroissance préfèrent parler de
« décroissance soutenable » 46, faisant ainsi
référence au développement durable. Il en reprend
l'objectif, qui est de « répondre aux besoins des
générations actuelles, sans pour autant compromettre la
capacité des générations futures à répondre
à leurs propres besoins ». Les tenants de la «
décroissance soutenable » ajoutent que cet objectif ne peut
correspondre qu'à une diminution de l'empreinte écologique
collective et individuelle dans les situations où le seuil de
durabilité est dépassé. Privilégiant la
relocalisation des économies (priorité à la production et
à la consommation locales et à la réduction des transports
motorisés), ils préconisent la nécessité de faire
profiter les pays du Sud des meilleures techniques et stratégies en
matière d'efficacité énergétique et
écologique. Dans ce cadre, le commerce doit non seulement être
réglementé mais surtout limité. Si les théoriciens
de la décroissance ne rejettent pas complètement les
échanges internationaux, ils soutiennent la nécessité
d`internaliser les coûts environnementaux et sociaux dans les prix
internationaux et de retrouver une certaine autosuffisance des
communautés nationales. Reconnaissant les difficultés qu`il y a
à concilier libre-échange et internalisation des coûts
environnementaux sur une base multilatérale, ils oscillent entre retour
à l`autosuffisance des communautés nationales et projet
émancipateur d`une société civile mondiale en
formation.
46 Latouche S. (2003), Vivre simplement,
Justice sans limites, le défi de l'éthique dans une
économie mondialisée ; (2004), Survivre au
développement ; (2006), Le pari de la décroissance.
Lafargue P. (1880), Le Droit à la paresse. Aubin J. (2006),
Croissance : l'impossible nécessaire.
37
2. Impacts du libre-échange sur les niveaux de vie et
l`environnement, et l`hypothèse de la courbe sociale et environnementale
de Kuznets
En 1993, Gene Grossman et Alan Krueger47 ont
publié une étude sur les conséquences de la
libéralisation des échanges en Amérique du Nord dans le
cadre du futur ALENA créant une zone de libre-échange entre les
États-Unis, le Canada et le Mexique en 1994. Ils ont distingué
dans cette étude des effets contradictoires de la libéralisation
des échanges économique sur l`environnement: il y a tout d`abord
l`effet d`échelle qui veut que, selon la théorie du commerce
international, le libre-échange permet un accroissement absolu de la
production. Cependant, au plan environnemental, la hausse de la production,
induite par la spécialisation de chacun dans la production où il
est le plus performant, se révèle nocif pour
l`écosystème. Nous avons analysé
précédemment cet effet dans l`étude des rôles du
libre-échange dans la dégradation de l`environnement et
l`hypothèse de la décroissance et de la limitation du libre
échange.
Mais à cet effet d`échelle ces auteurs opposent
un effet technique qui comprend deux aspects : il suppose tout d`abord que la
libéralisation commerce permet la généralisation à
l`échelle planétaire des techniques les plus avancées et
généralement les moins polluantes. La technologie se propagerait
ainsi des milieux innovateurs vers le reste du monde à travers le
commerce international. Ce mécanisme suppose un impact direct et positif
du commerce sur l`environnement parce qu`il implique la
généralisation de l`utilisation, grâce au libre
échange, de technologies de plus en plus propres. C`est ainsi que
certains économistes48 ont en effet essayé d`isoler
empiriquement l`effet technique du commerce sur l`environnement et ils
concluent que la diffusion de technologies propres est
47 Grossman, G.M. and Krueger, A.B. (1993), «
Environmental Impacts of a North American Free Trade Agreement ». In
The Mexico-U.S. free trade agreement, P. Garber, ed. Cambridge, Mass.:
MIT Press.
48 Wheeler, D. and Martin, P. (1992): «Prices
policies and the international diffusion of clean technologies the case of
wood-pulp production», in Low, P. (ed): International Trade and the
Environment. World Bank Discussions Papers n°159. Reppellin-Hill, V.
(1999): «Trade and Environment: An Empirical Analysis of the Technology
Effect in the steel industry», Journal of Environmental Economics and
Management, vol. 38. pp. 283-301.
38
influencée positivement par l`ouverture commerciale.
D`autres travaux49 ont montré que, en raison de cet effet
technique, le commerce international peut avoir un impact positif sur la
gestion de la problématique environnementale dans les pays pauvres,
puisque ces derniers bénéficient de la diffusion des technologies
propres.
Le deuxième aspect de l`effet technique concerne les
résultats de la croissance économique. Il suppose la
possibilité d`une augmentation de la demande de qualité
environnementale résultant de l`impact positif que le libre
échange aurait sur la croissance économique et sur les niveaux de
revenu par tête de pays participants. En fait, cette hypothèse
repose sur l`idée que la hausse des revenus induite par la hausse de la
production aurait pour effet de sensibiliser les habitants à
l`environnement. Ce serait donc un revenu per capita plus élevé,
et non pas le commerce directement, qui provoquerait un changement dans les
préférences des consommateurs envers l`environnement. Il est
important de noter ici que l`idée selon laquelle la croissance
économique peut contribuer à améliorer l`ensemble des
niveaux de vie se fonde sur la courbe sociale de Kuznets
représentée ci-dessous en forme d`un graphique en U
inversé :
La courbe de Kuznets représente la relation entre la
croissance économique (mesuré en PIB/hab) en fonction de son
niveau de développement et son niveau d'inégalité. Elle
s'inspire des travaux de Simon Kuznets50 sur le développement
économique dans les années 50. Celui-ci avait fait remarquer que,
dans les premiers
49 Frankel, J.A. and Rose, A. (2005):»Is trade
good or bad for the environment? Sorting out the casuality», The
review of Economics and Statistics, vol. 87. pp. 85-91.
50 Kuznets S. (1971), « Economic Growth and
Income Inequality », in The American Economic Review, vol.
45, no 1, p. 1-28. Economic Growth of Nations: Total Output and
Production Structure, Harvard University Press.
39
stades de développement, lorsque l'investissement dans
le capital infrastructurel et dans le capital naturel est le principal
mécanisme de croissance, les inégalités encouragent la
croissance en partageant les ressources en faveur de ceux qui épargnent
et investissent le plus. A l'inverse, dans les économies plus
avancées, l'accroissement du capital humain prend la place de
l'accroissement du capital physique comme source de la croissance. Ce qui donne
lieu à un ralentissement progressif des inégalités.
En 1995, Grossman et Krueger51 soutiennent que la
courbe de Kuznets peut être observée dans le domaine de
l`environnement. Ces auteurs avancent que la croissance est nuisible à
l`environnement jusqu`à ce que soit atteint un certain niveau de revenu
par habitant, et qu'au-delà les effets favorables à
l`environnement deviennent dominants. Ils démontrent que beaucoup
d`indicateurs de santé comme l`eau ou la pollution de l'air montrent une
courbe en U inversé au début du développement
économique : on se soucie peu de l`environnement et de la hausse de la
pollution qui va de pair avec l`industrialisation. Lorsque les besoins
primaires sont pourvus, on atteint un seuil où le souci pour
l'environnement s'accroît et où la tendance s'inverse. La
société a alors les moyens et la volonté de réduire
le niveau de pollution et l`utilisation de ressources pour créer une
unité de PIB (de richesse) tend à diminuer. Par
conséquent, plus une société est riche, plus elle sera
juste et plus elle sera propre. Cette évolution est
représentée ci-dessous par ce qu`on appelle couramment par la
« courbe environnementale de Kuznets » :
51 Grossman, G.M. and Krueger, A.B. (1994),
"Economic Growth and the Environment", Quarterly Journal of Economics,
Vol. 110 (2).
40
Notons que la thèse de la courbe environnementale de
Kuznets a fait l`objet de nombreux critiques qui montrent notamment qu`un
niveau de revenu plus élevé n`implique pas l`augmentation de la
demande de qualité environnementale. Brenchin & Kempton52
(1994) et Inglehart (1995)53, par exemple, ont soutenu que les
préférences envers une plus haute demande de qualité de
l`environnement sont fonction des différences culturelles et des niveaux
de pollution supportés par une population donnée et, non pas du
niveau de revenu. Par ailleurs une étude empirique de Kevin
Gallagher54 sur le Mexique a également l`hypothèse de
la courbe environnementale : il montre que le revenu-seuil au-delà
duquel la pollution tend à diminuer est estimé à environ 5
000 dollars, et le Mexique avait déjà atteint ce seuil en 1985.
Or, selon l'institut national de statistique mexicain, la libéralisation
du commerce des années 1990 s'est accompagnée d'une faible
augmentation du revenu moyen, tandis que la dégradation de
l'environnement a brusquement augmenté. Ainsi, pour 1999, l'augmentation
du revenu représente 14 milliards de dollars, tandis que la
dégradation est évaluée à 47 milliards. Il
apparaît donc que la seule croissance induite par le libre-échange
ne permet pas de ralentir ou diminuer les effets néfastes sur
l'environnement.
52 Brechin, S. and Kempton, W. (1994): «Global
environmentalism: a challenge to postmaterialism thesis?» Social
Science Quarterly, vol.75, n° 2, pp.245-269.
53 Inglehart, R. (1995): «Public support for
environmental protection: objective problems and subjective values in 43
societies» Political Science and Politics, vol. 28, pp.57-72
54 Kevin P. Gallagher (2004), Free Trade and the
Environment: Mexico, NAFTA, and Beyond.
55 Mabey N. et Mc Nally R. (1999), Foreign
Direct Investment and the Environment: from Pollution Haven to Sustainable
Development.
41
3. Conséquences des mesures environnementales des pays
du Nord sur les pays du Sud, et l`hypothèse de la migration des
industries polluantes
La question ici est de savoir si les entreprises profitent du
libre-échange pour se délocaliser dans des pays où la
réglementation environnementale est moins contraignante, leur permettant
ainsi de polluer davantage que si elles étaient demeurées dans le
pays d'origine où les réglementations obligent à adopter
des méthodes de production moins compétitives mais plus
respectueuses de l'environnement. En effet, depuis une trentaine
d`années, les pays développés ont mis en place des
législations environnementales contraignantes vis à vis des
entreprises. L`efficacité de telles mesures pourrait se trouver
amoindrie par le fait qu`il suffirait à une entreprise de
délocaliser son activité dans les pays ayant des normes
environnementales moins contraignantes. Par exemple, dans le cadre de l`ALENA,
des études empiriques ont pu faire remarquer que la
délocalisation des productions de solvants - production hautement
nuisible à la qualité de l`air - se faisaient dans les
maquiladoras mexicaines (villes à la frontière
américaine), du fait de la souplesse de la réglementation sur la
qualité de l`air au Mexique comparativement aux
États-Unis55.
Ces constatations ont donné lieu à des
débats sur la possibilité de l`existence d`un paradis de
pollution dans les pays du Sud, en raison du dumping environnemental
favorisé à la fois par des grandes firmes transnationales et
aussi les pays du Sud. Selon cette hypothèse, c`est la politique
environnementale de chaque pays qui détermine la localisation spatiale
des activités économiques. C`est ainsi que certains
économistes considèrent que les pays du Sud qui n`ont pas mis en
place une politique environnementale (ou qui en ont une très faible) ont
un avantage
42
comparatif dans des productions polluantes56. Une
situation serait aggravée par le fait que des entreprises en
profiteraient réaliser une migration vers le Sud l`ensemble de leurs
industries polluantes57. Dans le même sens, William Baumol et
Wallace Oates58 ont proposé un modèle
générant un cercle vicieux. Comparant un pays riche appliquant
une réglementation contraignante et un pays pauvre aux normes
environnementales laxistes, ces deux auteurs ont conclu que les industries
polluantes se délocaliseraient dans le pays pauvre et que celui-ci avait
donc intérêt à pratiquer un dumping environnemental. Les
conséquences du libre-échange s`enchaînent alors dans un
cercle vicieux favorisant la pollution. La fabrication polluante du produit
dans le pays sans normes est moins coûteuse, ce qui provoque une baisse
des prix et donc une hausse de la demande de ce produit. La production
polluante augmente alors dans le pays sans normes. Cette hausse de la
production provoque alors une hausse de la pollution et le pays pauvre a
intérêt à conserver des normes laxistes s`il veut continuer
l`expansion de l`industrie concernée.
Par ailleurs, d`autres auteurs59 ont essayé
de montré que les entreprises qui délocalisent dans les pays du
Sud ne cherchent pas nécessairement à profiter du laxisme de les
législations environnementales de ces pays, mais qu`il s`agit tout
simplement des conséquences de l`effet de composition du
libre-échange. Cet effet de composition suppose que la
spécialisation des pays selon leurs avantages comparatifs et selon leur
dotation facteurs de production (capital, travail et aussi ressources
naturelles. En effet, selon le théorème HOS, les entreprises
concentrent leur production nécessitant beaucoup de capital dans les
pays fortement dotés en capital, et leur production très
demandeuse de travail dans les pays fortement dotés en main-d`oeuvre.
D`où il découle un effet inverse à celui prévu par
Baumol et Oates : les industries à forte intensité capitaliste
(la chimie par exemple) fortement polluantes restent dans les pays riches
tandis que les industries de main d`oeuvre peu polluantes (le textile par
exemple) se délocalisent dans les pays pauvres. Selon
56 Birdsall, N. and Wheeler, D. (1992): «Trade
policy and industrial pollution in Latin America: Where are the pollutions
havens?» in Low, P. International Trade and the Environment,
World Bank discussion les paper n°159, pp.159-169.
57 Low, P. and Yeats, A. (1992): «Do dirty
industries migrate?» in Low, P. International Trade and the
Environment, World Bank discussion paper n°159. World Bank,
Washington D.C.
58 Baumol W.J. & W.E. Oates (1975), The Theory
of Environmental Policy, Prentice Hall.
59 Antweiler, W.; Copeland, B. R. and Taylor, M.S.
(2001): «Is free trade good for the environment?», The American
Economic Review, vol. 91, n°4, pp. 877-908.
43
ce modèle, les différences de législation
environnementale entre pays ne jouent qu`un rôle secondaire dans les
décisions d`implantation des entreprises.
D`ailleurs, une étude de la Banque
mondiale60 va dans le sens du modèle HOS et contredit
l`hypothèse de Baumol et Oates. Cette étude établit qu`en
1986 les pays en développement étaient déjà
importateurs nets de biens à la production particulièrement
polluante, et les pays les plus pauvres étaient relativement les plus
faibles exportateurs de produits polluants. En 1995, cette tendance s'est
accentuée : loin d'un dumping environnemental, on constate une
concentration supérieure de productions polluantes destinées
à l'exportation chez les pays les plus riches. Dans le graphique
ci-dessous, l`étude de la Banque montre l`évolution du ratio
exportations/importations de produits à forte intensité de
pollution entre 1986 et 1995. On peut remarquer que si le dumping
environnemental existe de façon ponctuelle, il n'est pas confirmé
à grande échelle.
Source : Banque Mondiale, 1998.
60 Banque mondiale (1998), Indicateurs du
Développement mondial.
44
4. Interactions entre libre-échange et mesures
environnementales : l`hypothèse du renforcement mutuel entre
libre-échange et promotion de l`environnement
La question qui se pose ici consiste à savoir si, dans
les relations difficiles et parfois contradictoires entre le
libre-échange et l`environnement, il ne peut pas y avoir certaines
compatibilités ou même un renforcement mutuel. Il s`agit aussi de
comprendre si le commerce international et l`environnement doivent
nécessairement s`inscrire dans une relation d`opposition ou si, au
contraire, les politiques commerciales et environnementales ont vocation
à cohabiter. L`enjeu de la mise en cohérence des politiques
environnementales et commerciales est double : éviter la montée
d`un protectionnisme déguisé utilisant la protection de
l`environnement comme argument, et assurer la durabilité de la
croissance économique par une meilleure valorisation des ressources
naturelles.
Notons tout d`abord que la question d`une possible
conciliation entre commerce international et mesures environnementales a
commencé à se poser avec l`affaire des tortues marines,
déjà menacées d`extinction, qui se noient dans les filets
des crevettiers. Dans un premier temps, les États-Unis ont réussi
à imposer que tous les chaluts à crevettes opérant dans
les eaux américaines devraient être équipés de cages
(systèmes d`exclusion des tortues) laissant les crevettes
pénétrer dans le filet mais permettant aux tortues de s`enfuir.
Mais les pêcheurs américains estimaient que cette mesure assurait
un avantage indu aux flottes de pêche étrangères, tandis
que les groupes de défense de l`environnement souhaitaient que le
dispositif soit appliqué à l`échelle internationale.
L`ensemble de ces forces ont donc contribué à l`extension de la
mesure, et des interdictions ont été édictées
contre les importations de crevettes en provenance de tout pays qui
n`appliquait pas un mécanisme de protection des tortues analogue
à celui des États-Unis.
45
Ainsi, pour préserver leurs exportations, plusieurs
pays ont imposé à leurs crevettiers d`utiliser les
systèmes d`exclusion des tortues. Le Costa Rica fut l`un d`entre eux.
Toutefois, les engins en question, importés des États-Unis et
conçus en fonction des conditions de pêche américaines, se
sont bientôt révélés inadaptés aux eaux peu
profondes et encombrées de débris dans lesquelles les
pêcheurs costaricains tirent leurs chaluts. Dans les eaux du Costa Rica,
avec un système d`exclusion des tortues conçu pour la pêche
aux États-Unis, les chaluts ramenaient en moyenne 70% de débris
et 30% de crevettes. En conséquence, les autorités costaricaines
ont mis au point un système d`exclusion des tortues mieux adapté
à leurs conditions locales, et elles ont fini par convaincre les
autorités américaines que leur dispositif offrait un degré
de protection des tortues équivalent. On voit ici comment des mesures
environnementales peuvent finalement contribuer à l`innovation,
déboucher sur des technologies plus efficaces, et donc sur des produits
commerciaux plus compétitifs.
Cette situation semble confirmer l`hypothèse de Michael
Porter61 qui considère que les règlementations en
matière de l'environnement ne vont pas à l'encontre de la
concurrence internationale. Il remarque que les pays soumis aux
règlementations écologiques les plus sévères sont
souvent des leaders de l'exportation de leur produit. Selon lui, cette
situation paradoxale est due au fait que les règlementations obligent
les sociétés à revoir leurs conceptions technologiques,
à innover, à trouver de nouvelles façons d'utiliser les
déchets. A moyen et long terme, on constate que les coûts sont
plus faibles et les produits de meilleure qualité. Grâce à
ces procédés, on utilise moins de ressources rares ou toxiques,
et on utilise utilement les sous-produits auparavant gaspillés.
Cette hypothèse semble par ailleurs se vérifier
dans les relations commerciales entre les pays du Sud et les pays du Nord. Les
pays en développement veulent en effet améliorer leur revenu
grâce aux exportations. Or les pays industrialisés importateurs
exigent que les biens importés répondent à leurs propres
prescriptions internes en matière de santé, de
sécurité et d`environnement. Souvent, les consommateurs de ces
pays souhaitent aussi minimiser l`impact environnemental lié à la
production de ces marchandises. En théorie, l`ensemble de ces
exigences
61 Porter M. (1990), The Competitive Advantage of
Nations.
46
devraient non seulement inciter les pays du Sud à
adopter des méthodes de production plus écologiques62,
mais aussi décourager la pratique de dumping environnemental par des
firmes transnationales qui, d`ailleurs, exportent une bonne part des biens
produits dans le Sud vers le Nord.
Nous venons de voir que les mesures environnementales peuvent,
dans certaines conditions, contribuer à un commerce international plus
harmonieux et plus compétitif. Des économistes ont cherché
à montrer par ailleurs le libre-échange peut en retour contribuer
à protéger l`environnement. Plus précisément, ils
ont montré que l`absence de libre-échange, le protectionnisme et
les entraves au commerce international peuvent se révéler
néfastes pour l`environnement. Robert Feenstra63 utilise
l`exemple des restrictions des exportations des véhicules japonais aux
États-Unis pour parler d`un effet négatif du protectionnisme sur
l`environnement. En effet, afin de compenser la restriction, les japonais ont
modifié la structure de leurs exportations en privilégiant la
qualité : c`est-à-dire en exportant en priorité des
véhicules haut de gamme et gourmands en essence, si bien que le parc
automobile américain est devenu plus nuisible à l`environnement.
Jagdish Bhagwati en conclut pour sa part que « des conséquences
néfastes pour l'environnement peuvent résulter des restrictions
au commerce : les ventes des modèles les moins polluants
déclinent, alors que celle des modèles plus voraces augmentent
»64.
62 Mais il faut noter également que ces
exigences environnementales des pays du Nord peuvent également
constituer une forme déguisé de protectionnisme qui peut avoir
des conséquences néfastes sur le développement des pays du
Sud. C'est ainsi que des recherches effectuées par la Conférence
des Nations unies sur le Commerce et le Développement ont montré
que certains pays en développement avaient subi des pertes à
l'exportation considérables, faute de pouvoir satisfaire aux normes et
réglementations environnementales des pays développés. La
question se pose alors sur les moyens et le délai nécessaires
à accorder aux PED afin qu'ils puissent se conformer aux normes
environnementales internationales.
63 Feenstra, R. C. (1993), "Measuring the Welfare
Effect of Quality Change: Theory and Application of Japanese Autos", NBER
Working Paper No. W4401.
64 Bhagwati J. (2005), Eloge du
libre-échange, p.68.
47
CHAPITRE II : LIBERALISATION ET REGULATION DU
COMMERCE INTERNATIONAL ET GESTION DE L'ENJEU DU DEVELOPPEMENT
DURABLE
Section I : Libéralisation et régulation du
commerce international
1. Le GATT
Le GATT est né dans un contexte de crise
économique et de guerre commerciale. La crise économique des
années de 1929 a favorisé l`exacerbation des nationalismes et la
fermeture des frontières. Les États-Unis et l`Europe deviennent
protectionnistes et se livrent à une guerre de dévaluation
compétitive de leur monnaie respective. Cette pratique du dumping
monétaire va amener les anglo-saxons à se réunir en pleine
guerre, dès 1940 pour préparer le retour au libre-échange.
En 1944 est organisée la conférence de Bretton Woods avec la
participation de 44 États. Cette conférence a été
l`occasion de jeter les bases de l'ordre économique mondiale
d'après-guerre et de créer trois organisations internationales :
le Fonds Monétaire Internationale pour réguler la monnaie, la
Banque Mondiale pour reconstruire l'Europe ruinée par la guerre, et pour
soutenir les pays en développement ex-socialistes.
48
Pour ce qui concerne la gestion du commerce international, une
conférence est organisée à la Havane en 1947 au cours de
laquelle a été mise en place une Charte dont un des objectifs est
la création d`une Organisation Internationale du Commerce (OIC). Mais la
Charte de la Havane n`ayant pas été ratifiée par les
Etats-Unis, en guise de la création de l`OIC, 23 États ont
détaché la partie commerciale de la Charte qui devient l'Accord
général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT).
L'adoption du GATT marque l'adoption du système commercial
multilatéral (SCM) fondé sur trois principes : la non
discrimination, la réciprocité et la négociation.
1.1 Le principe de non-discrimination
Le principe de non-discrimination interdit aux Etats
d`établir des discriminations soit entre partenaires commerciaux, soit
entre ses propres produits ou services et les produits ou services
étrangers. Pour éviter ces discriminations, deux clauses ont
été mises en place :
a. La clause la nation la plus favorisée
La clause de la nation la plus favorisée, pilier du
système commercial mondiale, veut que tout avantage accordé
à un Etat soit également automatiquement étendu à
tous les autres Etats. Dans la cadre du commerce des marchandises65,
l`art I du GATT stipule :
« Tous avantages, faveurs, privilèges ou
immunités accordés par une partie contractante à un
produit originaire ou à destination de tout autre pays seront,
immédiatement et sans condition, étendus à tout produit
similaire originaire ou à destination du territoire de toutes les autres
parties contractantes. Cette disposition concerne les droits de douane et les
impositions de toute nature perçus à l'importation ou à
l'exportation ou à l'occasion de l'importation ou de l'exportation,
ainsi que ceux qui frappent les transferts internationaux de fonds
effectués en règlement des importations ou des exportations, le
mode de perception de ces droits
65 Notons que la clause de la nation la plus
favorisée sera par la suite appliquée également au
commerce des services (Article II § 2 de l'AGCS) et à la
propriété intellectuelle (Article IV de l'Accord sur les
ADPIC).
49
et impositions, l'ensemble de la réglementation et
des formalités afférentes aux importations ou aux exportations
ainsi que toutes les questions qui font l'objet des paragraphes 2 et 4 de
l'article III. »
A cette clause sont ajoutées des dérogations,
telles que la possibilité de créer des zones d'intégration
régionales. Les Etats qui souhaitent entretenir des relations
commerciales privilégiées entre eux sont autorisés
à la faire dans le cadre d`une zone d`intégration
régionale (Article XXIV § 4 du GATT : « les parties
contractantes reconnaissent qu'il est souhaitable d'augmenter la liberté
du commerce en développant, par le moyen d'accords librement conclus,
une intégration plus étroites des économies des pays
participants à de tels accords ». Les zones d`intégration
régionales considérées comme légitimes et licites
sont les zones de libre-échange (Article XXIV § 8 b du GATT) ou les
Unions douanières (Article XXIV § 8 a du GATT). Notons aussi que,
par la suite, les décisions des Parties contractantes du 25 juin 1971 a
autorisé les pays en développement à déroger aux
dispositions de l'article premier du GATT.
Cette dérogation est la base légale du
traitement préférentiel et sans réciprocité que les
pays développés accordent aux pays en développement. Il
s'agit du système généralisé des
préférences qui est un mécanisme permettant aux pays
développés d'accorder des avantages commerciaux aux produits
manufacturés en provenance des pays en développement. La
dérogation de 1971 sera remplacée en 1979 par une clause
d'habilitation incluse dans les accords du GATT permettant aux pays
développés d'accorder des avantages commerciaux aux pays en
développement sans qu`ils soient obligés de les accorder à
des pays développés. Toutefois cette clause d'habilitation est
accompagnée d'une clause de graduation en vertu de laquelle les pays en
développement bénéficiaires des avantages commerciaux
doivent revenir au droit commun du GATT lorsqu'ils atteignent un niveau de
développement jugé suffisamment élevé par les pays
donneurs.
En vertu de la clause du traitement national, tous les
produits sur un territoire doivent être traités de la même
manière et les produits étrangers introduits sur un
b. La clause du traitement national
50
territoire ne doivent pas subir un traitement moins favorable
que les produits nationaux.
Article 3 :1 du GATT : « Les parties contractantes
reconnaissent que les taxes et autres impositions intérieures, ainsi que
les lois, règlements et prescriptions affectant la vente, la mise en
vente, l'achat, le transport, la distribution ou l'utilisation de produits sur
le marché intérieur et les réglementations quantitatives
intérieures prescrivant le mélange, la transformation ou
l'utilisation en quantités ou en proportions déterminées
de certains produits ne devront pas être appliqués aux produits
importés ou nationaux de manière à protéger la
production nationale »
Article 3 :4 du GATT : « Les
produits du territoire de toute partie contractante importés sur le
territoire de toute autre partie contractante ne seront pas soumis à un
traitement moins favorable que le traitement accordé aux 14
produits similaires d'origine nationale en ce qui concerne toutes lois,
tous règlements ou toutes prescriptions affectant la vente, la mise en
vente, l'achat, le transport, la distribution et l'utilisation de ces produits
sur le marché intérieur. Les dispositions du présent
paragraphe n'interdiront pas l'application de tarifs différents pour les
transports intérieurs, fondés exclusivement sur l'utilisation
économique des moyens de transport et non sur l'origine du produit.
»
1.2 Le principe de réciprocité
La GATT formule ce principe de la manière suivante :
« Au cours de ces négociations et dans cet accord, qui pourra
comporter des compensations portant sur d'autres produits, les parties
contractantes intéressées s'efforceront de maintenir un niveau
général de concessions réciproques et mutuellement
avantageuses non moins favorable pour le commerce que celui qui
résultait du présent Accord avant les négociations.»
(Article 28.2 du GATT)
« Les parties contractantes reconnaissent que les
droits de douane constituent souvent de sérieux obstacles au commerce;
c'est pourquoi les négociations visant, sur une base de
réciprocité et d'avantages mutuels, à la réduction
substantielle du
51
niveau général des droits de douane et des
autres impositions perçues à l'importation et à
l'exportation, en particulier à la réduction des droits
élevés qui entravent les importations de marchandises même
en quantités minimes, présentent, lorsqu'elles sont menées
en tenant dûment compte des objectifs du présent Accord et des
besoins différents de chaque partie contractante, une grande importance
pour l'expansion du commerce international. En conséquence, les parties
contractantes peuvent organiser périodiquement de telles
négociations » (Article 28 bis.1 du GATT)
Issu du droit romain, le principe de réciprocité
suppose « la conclusion d=accords sur base de réciprocité et
avantages mutuels ». La réciprocité dans les relations
commerciales internationales exige la libération du commerce et
l`ouverture des frontières soient réciproques. Mais surgit alors
le problème de l`égalité effective des Etats. En effet, si
les Etats sont juridiquement égaux, ils ne sont pas tous face au
libre-échange et à la mondialisation. Le problème se pose
notamment pour les pays en développement qui possèdent des«
industries naissantes »66, qui seraient trop fragiles si on les
exposait au libre-échange.
C`est donc pour cette raison que le GATT à prévu
une dérogation au principe de réciprocité. Il s`agit du
principe de la non-réciprocité dans les relations Nord- Sud, une
non-réciprocité qui doit se faire au profit des pays en
développement : « Les parties contractantes
développées n'attendent pas de réciprocité pour les
engagements pris par elles dans des négociations commerciales de
réduire ou d'éliminer les droits de douane et autres obstacles au
commerce des parties contractantes peu développées. »
(Article XXXVI. 8 du GATT)
Notons que cette dérogation pose le problème qui
consiste à pouvoir définir, avec l`évolution des Etats,
à quel moment ils ne peuvent plus être considérés
comme des pays en développement.
66 Voir la théorie des industries naissantes de
Friedrich List, que nous avons exposée plus haut.
52
1.3 Le principe de négociation
Selon ce principe, également fondateur du
système commercial multilatéral, il est nécessaire de
négocier sans cesse pour ne pas tomber dans le protectionnisme. En
effet, le GATT étant des accords en forme simplifiés et ne
disposant pas d`une structure organisationnelle pour promouvoir la
libération du commerce, le processus de libération et
régulation des échanges s`est fait dans le cadre d`une
série de Négociations Commerciales Multilatérales
appelées aussi Cycles ou Rounds. La libéralisation des
échanges est donc la résultante de multiples Négociations
Commerciales Multilatérales entre Parties contractantes. Toutes les
conclusions des Cycles ou Négociations Commerciales
Multilatérales ont été annexées au GATT.
53
2. Les évolutions du commerce international du GATT
à l`OMC
De 1947 à 1994, le GATT a évolué
concrètement à travers l`organisation de 8 Cycles de
négociation que l'on peut diviser en trois catégories : les 6
premiers, entre 1947 et 1967, étaient presque exclusivement
consacrés à la baisse des droits de douane, lesquels
étaient très élevés après la Seconde Guerre
mondiale en raison de la guerre commerciale de l'entre-deux-guerres. Le
7ème Cycle, le Tokyo Round, de 1973 à 1979, portait
à la fois sur les droits de douane et les obstacles non-tarifaires. Le
8ème Cycle, l`Uruguay Round, de 1986 à 1994, est un
Cycle globale se penchant à la fois sur les droits de douane, sur les
obstacles non-tarifaires mais aussi sur de nouveaux domaines comme le commerce
des services et la propriété intellectuelle. L'Uruguay Round a
également considéré de nouveaux domaines comme
l'agriculture et les textiles qui étaient restés durant une
longue période à l'écart de la libéralisation des
échanges. C`est aussi l`Uruguay Round qui a permis la mise en place
d`une nouvelle organisation économique internationale plus solide par la
création de l`Organisation Mondiale du Commerce.
En effet, si le GATT constituait le principal cadre juridique
pour le système commercial multilatéral pendant près de
50ans, il reste cependant qu`il était affecté de faiblesses et de
limites nécessitant la création de l`OMC. Alors que le GATT
n`était qu'un simple accord commercial, l'OMC est une vraie organisation
internationale qui constitue un cadre général et permanent. En
outre, le GATT n'avait qu'un champ d'intervention très limité, il
surveillait le déplacement d'un produit d'une frontière à
l'autre. En revanche, l'OMC a un champ d'intervention beaucoup plus
étendu, elle concerne les marchandises, les services, la
propriété intellectuelle, le textile et l'agriculture. Par
ailleurs, alors les pays en développement considéraient le
54
GATT comme un Accord créé par les riches pour
les riches, ils sont en revanche très impliqués dans les travaux
de l'OMC. Enfin, comme nous le verrons plus loin plus en détail, le
mécanisme de règlement des différents au sein de l'OMC est
beaucoup plus efficace et crédible que celui qui existait dans le cadre
du GATT.
Notons néanmoins que le texte du GATT reste toujours
valable dans le cadre de l`OMC. Les textes de l`OMC contiennent donc le texte
du GATT actualisé, auquel ont été ajoutés le texte
sur l'Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS), le
texte sur les Aspect des Droits de Propriété Intellectuelle
liés au Commerce (ADPIC), et aussi l'Accord cadre instituant l'OMC, avec
les principes de base, les objectifs, les structures, la manière pour
devenir membre, etc.
Par ailleurs, les Cycles de négociations ou Rounds dans
le cadre du GATT ont été remplacés par des
conférences ministérielles qui, théoriquement, ont lieu
une fois tous les deux ans. C`est ainsi que, depuis la création de l`OMC
en 1994, ont eu lieu les conférences ministérielles de Singapour
(1996), Genève (1998), Seattle (1999), Doha (2001), Cancun
(2003) et Hong Kong (2005). Notons que si presque toutes ces conférences
ministérielles ont relativement été soldées par des
échecs, celle de Doha a réalisé une avancée
décisive notamment en envisageant l`adoption d`un programme de
développement élaboré dans l'intérêt des pays
en développement. En effet, ce programme constitue depuis près de
dix ans un enjeu majeur pour l`OMC. Il porte notamment sur la
libéralisation des produits agricoles, réclamée par les
pays en développement mais refusée par certains pays
développés. Le programme de Doha porte également sur
l`accès au marché pour les produits non-agricoles, domaine qui
constitue un lieu de conflit entre les pays industriels et les pays
émergents. Il porte enfin sur les services, qui occupent une place
très importante dans l'économie mondiale et dans les
échanges internationaux.
55
3. L`organe de règlement des différends du GATT
à l`OMC67
Une procédure de règlement des différends
a été mis en place dans le cadre du GATT de 1947 pour
éviter les Etats à prendre des mesures unilatérales au cas
où ils estimaient que d`autres Etats ne respectaient pas leurs promesses
ou enfreignaient les règles commerciales. Mais comme cette
procédure ne comportait aucun calendrier établi, il était
à certains Etats de bloquer les décisions et beaucoup d`affaires
traînaient en longueur sans arriver à une solution. Le
mécanisme de règlement des différends du GATT de 1947
n`était pas un mécanisme juridictionnel, mais ressemblait
à une forme de règlement diplomatique et était donc
particulièrement fragile. Les parties au règlement des
différends pouvaient même ne pas appliquer les
décisions.
C`est ainsi que, à la création de l`OMC, le
Mémorandum d`accord issu du Cycle d`Uruguay a mis en place un processus
plus structuré, dont les étapes sont plus clairement
définies. Il établit une discipline plus rigoureuse quant au
délai imparti pour le règlement d`une affaire ainsi que des
échéances flexibles pour les différentes étapes de
la procédure. Il souligne qu`un règlement rapide est
indispensable au bon fonctionnement de l`OMC. Il énonce de
manière très détaillée les règles de
procédure à suivre et les calendriers à respecter à
cette fin. La procédure complète, jusqu`à la
décision de la première instance, ne doit pas en principe durer
plus d`un an, ou plus de 15 mois s`il y a appel. Les délais convenus
sont flexibles et, en cas d`urgence, la procédure est
accélérée autant que possible. Le Mémorandum
d`accord issu du Cycle d`Uruguay empêche aussi un pays
désavoué de bloquer l`adoption de la décision.
D`après l`ancienne procédure du GATT, les décisions ne
pouvaient être adoptées que par consensus, de sorte qu`une seule
opposition suffisait pour les bloquer. Mais dans le cadre de l`OMC, les
décisions sont adoptées
67 Voir :
http://www.wto.org/french/thewto_f/whatis_f/tif_f/disp1_f.htm
56
automatiquement sauf s`il y a consensus pour les rejeter.
Ainsi, un pays désireux de bloquer une décision doit amener tous
les autres membres de l`OMC (y compris la partie adverse dans le
différend) à partager ses vues.
Pour ce qui concerne le déroulement de la
procédure, il y a tout d`abord une phase de consultations
(jusqu`à 60 jours) au cours de laquelle les parties au différend
doivent discuter entre elles pour savoir si elles peuvent arriver à
s`entendre. Si les consultations n`aboutissent pas, le pays plaignant peut
demander l`établissement d`un groupe spécial. Le pays
incriminé peut l`empêcher une première fois, mais lors
d`une deuxième réunion de l`Organe de règlement des
différends, il n`est plus possible d`y faire opposition (sauf s`il y a
consensus contre l`établissement du groupe spécial). Un groupe
spécial est constitué pour statuer sur le différend. Le
rapport final du groupe spécial doit en principe être
communiqué aux parties au différend dans un délai de six
mois. En cas d`urgence, notamment lorsqu`il s`agit de produits
périssables, ce délai est ramené à trois mois.
Chaque partie peut faire appel de la décision d`un
groupe spécial. Parfois l`une et l`autre le font. L`appel doit
être fondé sur des points de droit tels que les
interprétations du droit; il ne peut pas viser à obtenir le
réexamen d'éléments de preuve existants ou l`examen de
questions nouvelles. Chaque partie peut faire appel de la décision d`un
groupe spécial. L`appel doit être fondé sur des points de
droit tels que les interprétations du droit; il ne peut pas viser
à obtenir le réexamen d'éléments de preuve
existants ou l`examen de questions nouvelles. Les membres de l`Organe d`appel
sont nommés pour quatre ans. Il doit s`agir de personnes dont
l`autorité est reconnue en matière de droit et de commerce
international et qui n`ont aucune attache avec une administration nationale.
L`appel peut aboutir à la confirmation, à la modification ou
à l`infirmation des constatations et conclusions juridiques du groupe
spécial. La durée de la procédure ne doit pas
dépasser, en principe, 60 jours, et en aucun cas 90 jours. L`Organe de
règlement des différends doit accepter ou rejeter le rapport de
l`Organe d`appel dans un délai de 30 jours, le rejet n`étant
possible que par consensus. L`Organe de règlement des différends,
composé de tous les membres de l'OMC, est responsable de surveiller la
mise en oeuvre des décisions et recommandations, et est habilité
à autoriser l`adoption de mesures de rétorsion si un pays ne se
conforme pas à une décision.
57
Section II : La gestion de l'enjeu du
développement durable du GATT à l'OMC
1. L`approche du Gatt de la problématique
commerce-environnement
Déjà en 1947, le GATT prévoit un certain
nombre de cas dans lesquels les parties contractantes peuvent être
exemptées des règles du commerce international. La
possibilité pour les États de prendre des mesures incompatibles
avec les règles du GATT est en effet formulée dans les
dispositions de l'article XX relatives aux exceptions générales.
Certaines exceptions concernent particulièrement la protection de
l'environnement, de la santé et de la vie humaine, animale ou
végétale. Des exceptions sont également prévues
pour les mesures relatives à la conservation des ressources naturelles
épuisables. Elles sont énoncées de la manière
suivante:
Sous réserve que ces mesures ne soient pas
appliquées de façon à constituer soit un moyen de
discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les
mêmes conditions existent, soit une restriction déguisée au
commerce international, rien dans le présent Accord [le GATT] ne sera
interprété comme empêchant l'adoption ou l'application par
toute partie contractante des mesures:
b) nécessaires à la protection de la
santé et de la vie des personnes et des animaux ou à la
préservation des végétaux;
g) se rapportant à la conservation des ressources
naturelles épuisables, si de telles mesures sont appliquées
conjointement avec des restrictions à la production ou à la
consommation nationales. ...?68
68 Texte de l'article XX du GATT.
58
Si on analyse de près ces exceptions aux règles
du GATT relatives à la protection de l`environnement et de la
santé humaine, on peut observer que le texte introductif de l'article XX
a pour objet de prévenir l'utilisation abusive des mesures liées
au commerce. Aux termes de ce paragraphe, les mesures environnementales ne
peuvent pas être "appliquées de façon à constituer
soit un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays
où les mêmes conditions existent, soit une restriction
déguisée au commerce international". Ces sauvegardes
additionnelles visent principalement à faire en sorte qu'invoquer une
exception pour adopter une mesure incompatible avec les règles du GATT
ne soit pas un moyen détourné de recourir au protectionnisme. Le
texte introductif précise aussi que la mesure ne doit pas constituer un
usage abusif ou impropre de la justification provisoire offerte par l'un des
paragraphes de l'article XX, à savoir qu'elle est appliquée de
bonne foi.
En outre, les paragraphes b) et g) de l'article XX autorisent
les Membres de l'OMC à justifier des mesures incompatibles avec les
règles du GATT si ces mesures sont nécessaires à la
protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou
à la préservation des végétaux, ou si elles se
rapportent à la conservation de ressources naturelles épuisables,
respectivement. Il en résulte que, pour qu'une mesure environnementale
incompatible avec le GATT soit justifiée au regard de l'article XX, un
Membre doit procéder à une double analyse prouvant :
· qu'elle satisfait aux prescriptions du paragraphe
introductif (le texte introductif de l'article XX), à savoir qu'elle
n'est pas appliquée de façon à constituer "un moyen de
discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les
mêmes conditions existent" et qu'elle n'est pas "une restriction
déguisée au commerce international".
· que sa mesure relève au moins de l'une des
exceptions (par exemple, les paragraphes b) ou g), qui représentent deux
des dix exceptions prévues à l'article XX).
59
Ces exceptions sont donc conçues pour assurer
l'équilibre entre le droit des parties de prendre des mesures
réglementaires, y compris des restrictions des échanges, pour
réaliser des objectifs de politique légitimes (par exemple
protéger la vie et la santé des personnes et des animaux,
préserver les végétaux et protéger les ressources
naturelles) et les droits d'autres parties découlant des règles
fondamentales du commerce. Bien qu'il n'existe pas d'accord portant
spécifiquement sur l'environnement, ces exceptions permettent aux
Membres de l'OMC de prendre des mesures liées au commerce visant
à protéger l'environnement sous réserve que plusieurs
conditions soient remplies permettant d'éviter l'utilisation abusive de
ces mesures à des fins protectionnistes.
Par ailleurs, pour comprendre la portée de ces
exceptions et la façon dont elles peuvent intervenir plus
concrètement, il faut se rappeler les principes fondamentaux du GATT. En
effet, en vertu du principe de la non-discrimination, il est interdit à
un Membre d'opérer une discrimination:
? entre des produits "similaires" originaires de
différents partenaires commerciaux (qui bénéficient alors
tous du traitement de la "nation la plus favorisée" ou traitement NPF,
article premier du GATT); et
? entre ses propres produits et les produits étrangers
similaires (qui bénéficient alors tous du "traitement national",
article III du GATT).
Pour que des mesures environnementales ou sanitaires
liées au commerce soient compatibles avec les règles de l'OMC,
elles ne doivent entraîner aucune discrimination entre des produits
"similaires"69. Le principe de la non-discrimination soulève
donc deux questions fondamentales: les produits considérés
sont-ils des produits "similaires" et, dans l'affirmative, le produit
étranger est-il soumis à un traitement moins favorable que celui
accordé au produit national ou à un autre produit
étranger?
69 Dans la jurisprudence de l'OMC, quatre
critères ont été utilisés pour déterminer si
des produits étaient «similaires»: i) les
propriétés physiques des produits; ii) la mesure dans laquelle
ils peuvent avoir les mêmes utilisations finales ou des utilisations
finales semblables; iii) la mesure dans laquelle les consommateurs les
perçoivent et les considèrent comme d'autres moyens de remplir
des fonctions particulières pour satisfaire à un désir ou
à une demande spécifique; et iv) leur classification
internationale à des fins tarifaires.
60
Une autre question importante liée aux mesures
environnementales est celle de savoir si des produits peuvent être soumis
à un traitement différent en fonction de la manière dont
ils ont été produits, même si la méthode de
production utilisée ne laisse pas de traces dans le produit final,
c'est-à-dire même si les caractéristiques physiques du
produit final demeurent identiques (c'est ce que l'on appelle les
procédés et méthodes de production non liés aux
produits). Aux fins de la comparaison de deux produits, le fait que des
procédés ou méthodes de production (PMP) différents
soient employés pour leur fabrication n'en fait pas en soi des produits
non similaires?.
61
2. Le Groupe sur les mesures relatives à
l'environnement et le commerce international, et règlement de
différends liés aux rapports entre commerce et environnement dans
le cadre du GATT
Dès 1971, le secrétariat du GATT a
réalisé une étude intitulée Lutte contre la
pollution industrielle et commerce international". Cette étude portait
sur les conséquences des mesures de protection de l'environnement sur le
commerce international. Il faut bien noter que, si cette étude visait
à contribuer à la Conférence de Stockholm en 1972, elle
avait également pour but de répondre aux préoccupations
liées au fait que les nouvelles mesures environnementales mises en place
par certains pays pouvaient constituer des obstacles au commerce.
En effet, les années 1970 ont vu naître des
inquiétudes grandissantes quant aux conséquences de la croissance
économique sur le développement social et l'environnement.
Certains Etats, prenant en compte l`émergence des débats dans
l`opinion internationale et les milieux intellectuels et scientifiques sur le
développement durable, adoptaient des mesures visant à
protéger l`environnement. Les dirigeants du GATT craignaient donc que
ces mesures environnementales ne constituent une nouvelle forme de
protectionnisme (protectionnisme vert"), et, par cette étude, invitaient
les parties contractantes à examiner les répercussions
potentielles des politiques environnementales sur le commerce international. Il
a donc ainsi été suggéré qu'un mécanisme
soit créé dans le cadre du GATT pour que les répercussions
des mesures environnementales sur le commerce international soient
examinées de manière plus approfondie.
Le Groupe du GATT sur les mesures relatives à
l'environnement et le commerce international a donc été
créé en novembre 1971. Conformément à son mandat,
en vertu duquel il était chargé d'examiner les effets
éventuels des mesures de protection de l'environnement sur le
fonctionnement du GATT, le Groupe s'est intéressé aux
conséquences des mesures environnementales (tels que les programmes
d'éco-étiquetage) sur le commerce international, aux liens entre
les
62
règles du système commercial
multilatéral et les dispositions commerciales figurant dans les accords
environnementaux multilatéraux (AEM) et à la transparence des
réglementations environnementales nationales ayant des effets sur le
commerce. Par ailleurs, bien quel le Groupe n`ait jamais eu à se
réunir pendant plus de 20 ans70, un certain nombre de
progrès ont été réalisés dans le
débat sur les rapports entre les mesures environnementales et le
commerce international.
Pendant les négociations commerciales du Tokyo Round
(1973-1979), les participants ont examiné jusqu'à quel point les
mesures environnementales (règlements techniques et normes) pouvaient
faire obstacle au commerce. C'est ainsi qu'a été
négocié l'Accord relatif aux obstacles techniques au commerce
(OTC). L`Accord sur les obstacles techniques au commerce vise à faire en
sorte que les règlements, normes et procédures d`essai et
d`homologation puissent être élaborés, adoptés et
appliqués de manière non discriminatoire et transparente, et
qu`ils ne créent pas d`obstacles non nécessaires.
Pouvant varier d`un pas à l`autre, les
règlements techniques et les normes sont nécessaires pour
diverses raisons, depuis la protection de l'environnement jusqu'à
l'information du consommateur en passant par la protection contre les risques
et la sécurité nationale. L`Accord reconnaît ainsi le droit
des pays d'adopter les normes qu'ils jugent appropriées, par exemple
pour protéger la santé et la vie des personnes et des animaux,
préserver les végétaux, protéger l'environnement ou
défendre d'autres intérêts des consommateurs. La question
fondamentale reste : comment faire en sorte que les normes soient d'une
réelle utilité, sans être des mesures arbitraires ou une
excuse pour le protectionnisme ?
Pour statuer sur les règlements techniques
adoptés par les gouvernements pour atténuer les changements
climatiques, un Comité sur les obstacles techniques au commerce
(Comité OTC) a été mis en place. Le Comité des
obstacles techniques au commerce est aussi pour les pas le principal centre
d'échange de renseignements
70 Ouvert à tous les signataires du GATT,
ce Groupe ne peut se réunir qu'à la demande de ces derniers. Mais
il a fallu attendre 1991 pour qu'une telle demande soit faite, en l'occurrence
par les membres de l'Association européenne de libre-échange
(AELE) (à l'époque l'Autriche, la Finlande, l'Islande, le
Liechtenstein, la Norvège, la Suède et la Suisse). Pour justifier
cette demande après 20 ans d'inactivité du Groupe, l'AELE a
invoqué la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le
développement (CNUED) qui allait avoir lieu en 1992, affirmant que le
GATT devrait y contribuer. L'AELE a évoqué par ailleurs le fait
qu'il y ait eu des évolutions importantes dans les domaines du commerce
et de l'environnement de puis la création du Groupe en 1971. Pour ces
évolutions, voir notre annexe I sur « La généalogie
du concept de développement durable ».
63
sur les règlements techniques qui risquent d'avoir une
incidence sur le commerce71. Les règlements techniques en
rapport avec les changements climatiques qui ont été jusqu'ici
examinés au Comité OTC concernent surtout des prescriptions se
rapportant aux produits. Le Comité examine les mesures prises face aux
changements climatiques pour s'assurer qu'elles ne constituent pas des
obstacles non nécessaires au commerce international, tout en atteignant
leur objectif légitime, à savoir protéger l'environnement,
et il encourage l'harmonisation.
Notons qu` en1982, certains pays en développement se
sont dits préoccupés par le fait que des produits interdits dans
les pays développés à cause des risques qu'ils
présentaient pour l'environnement, pour la santé ou pour la
sécurité continuaient d'être exportés vers les pays
en développement, lesquels, faute d'informations suffisantes sur ces
produits, n'étaient pas à même de prendre en connaissance
de cause des décisions concernant leur importation., Ainsi, à la
réunion ministérielle du GATT de 1982, les membres ont
décidé d'examiner quelles mesures étaient
nécessaires pour contrôler l'exportation des produits interdits
sur le marché intérieur (pour cause d'atteinte à la
santé ou à la vie des personnes ou des animaux, à la
préservation des végétaux ou à l'environnement).
Cela a conduit à la création, en 1989, du Groupe de travail de
l'exportation de produits interdits sur le marché intérieur et
d'autres substances dangereuses.
Par ailleurs, le GATT a eu à traiter plusieurs
dossiers sur des différends relatifs aux rapports entre les mesures
environnementales et le commerce international. On peut ainsi noter :
- L'affaire États-Unis -- thon (Canada) en
1982: Une interdiction d'importer avait été
décrétée par les États-Unis après que le
Canada eût saisi 19 bateaux de pêche et arrêté des
pêcheurs américains qui pêchaient le germon, sans
l'autorisation du gouvernement canadien, dans des eaux qui, de l'avis du
Canada, relevait de sa juridiction. Les États-Unis n'ont pas reconnu
cette juridiction et, à titre de rétorsion, ont mis en place une
interdiction d'importer au titre de la Loi sur la conservation et la gestion
des
71 Les fabricants et les exportateurs ont besoin
de savoir quelles sont les normes en vigueur sur les marchés où
ils cherchent à s'implanter. Pour que ces renseignements soient
aisément disponibles, tous les pays sont tenus d'établir des
points d'information nationaux et de se tenir mutuellement informés sur
les nouvelles normes qu'ils adoptent.
- L'affaire États-Unis - Thon (Mexique)
en 1991. L'affaire concernait un embargo imposé par les
États-Unis sur les importations de thons
64
pêches. Le Groupe spécial a constaté que
l'interdiction d'importer était contraire aux dispositions de l'article
XI:1 et qu'elle ne se justifiait ni au regard de l'article XI:2 ni au regard de
l'article XX g) de l'Accord général.
- L`affaire Canada -- harengs et saumons (Etats-Unis) en
1988: En vertu de la Loi canadienne de 1970 sur les pêcheries, le Canada
maintenait des règlements qui interdisaient l'exportation ou la vente
pour l'exportation de certains harengs et saumons non préparés.
Les États-Unis se sont plaints que ces mesures soient incompatibles avec
l'article XI du GATT. Le Canada a fait valoir que ces restrictions à
l'exportation faisaient partie d'un système de gestion des ressources
halieutiques destiné à préserver les stocks de poisson, et
qu'elles étaient par conséquent justifiées au titre de
l'article XX g). Le Groupe spécial a constaté que les mesures
maintenues par le Canada étaient contraires à l'article XI:1 du
GATT et qu'elles n'étaient justifiées ni au regard de l'article
XI:2 b) ni au regard de l'article XX g).
- L'affaire Thaïlande --cigarettes (Etats-Unis)
en 1990: En application de la Loi de 1966 sur les tabacs, la
Thaïlande interdisait l'importation de cigarettes et autres
préparations à base de tabac, mais autorisait la vente de
cigarettes nationales; Les États-Unis se sont plaints que les
restrictions à l'importation soient incompatibles avec l'article XI:1 du
GATT, et estimaient qu'elles n'étaient justifiées ni par
l'article XI:2 c), ni par l'article XX b). Ils alléguaient par ailleurs
que les taxes intérieures étaient incompatibles avec l'article
III:2 du GATT. La Thaïlande a fait valoir, entre autres choses, que les
restrictions à l'importation étaient justifiées au titre
de l'article XX b). Le Groupe spécial a constaté que les
restrictions à l'importation étaient incompatibles avec l'article
XI:1 et qu'elles n'étaient pas justifiées par l'article XI:2 c).
Il a par ailleurs conclu que les restrictions à l'importation
n'étaient pas nécessaires? au sens de l'article XX b). Il a
constaté que les taxes intérieures étaient compatibles
avec l'article III:2.
65
mexicains capturés dans des sennes coulissantes?, qui
provoquaient la mort accidentelle de dauphins. Le Mexique a soumis le
différend au GATT en faisant valoir que l'embargo était
incompatible avec les règles du commerce international. Le Groupe
spécial constitué pour statuer sur l`affaire s`est
prononcé en faveur du Mexique. Son rapport n'a pas été
adopté par les membres du GATT, mais sa décision a
été fortement critiquée par les groupements
écologistes, qui estimaient que les règles commerciales nuisaient
à la protection de l'environnement.
- L'affaire États-Unis -- thon (CEE) en 1994:
La CEE et les Pays-Bas se sont plaints que tant l'embargo de la nation
première que celui de la nation intermédiaire imposés en
vertu de la Loi sur la protection des mammifères marins ne relevaient
pas de l'article III, étaient incompatibles avec l'article XI:1 et
n'étaient visés par aucune des exceptions
énumérées à l'article XX. Les États-Unis
considéraient que l'embargo de la nation intermédiaire
était compatible avec le GATT étant donné qu'il
était visé par l'article XX g), b) et d), et que l'embargo de la
nation première n'annulait ni ne compromettait aucun des avantages
revenant à la CEE ou aux Pays-Bas étant donné qu'il ne
s'appliquait pas à ces pays. Le Groupe spécial a constaté
que ni l'embargo de la nation première ni l'embargo de la nation
intermédiaire n'étaient visés par l'article III, que tous
deux étaient contraires à l'article XI:1 et qu'ils
n'étaient pas visés par les exceptions énoncées
à l'article XX b), g) ou d) du GATT
- L'affaire États-Unis -- automobiles (l'Union
européenne) en 1994: Trois mesures sur les automobiles
appliquées par les États-Unis étaient à l'examen:
la taxe de luxe sur les automobiles ("taxe de luxe"), la taxe sur les
automobiles grosses consommatrices de carburant ("taxe de grosse
consommation"), et la loi sur la consommation moyenne de carburant des
automobiles de chaque fabricant ("CAFE"). La Communauté
européenne s'est plainte que ces mesures soient incompatibles avec
l'article III du GATT et a allégué qu'elles ne pouvaient pas
être justifiées par l'article XX g) ou d). Le Groupe
spécial a constaté que tant la taxe de luxe que la taxe de grosse
consommation appliquées certaines automobiles étaient compatibles
avec l'article III :2 du
66
GATT. Le Groupe spécial a constaté que la
réglementation CAFE était incompatible avec l'article III:4 du
GATT parce que la comptabilisation séparée des flottes
étrangères entraînait une discrimination à
l'égard des voitures étrangères et que le calcul de la
moyenne pour la flotte faisait une différence entre les voitures
importées et les voitures nationales. De la même manière,
il a constaté que la comptabilisation séparée des flottes
étrangères n'était pas justifiée au titre de
l'article XX g); il n'a pas formulé de constatation quant à la
compatibilité du calcul de la moyenne pour la flotte avec l'article XX
g). Il a constaté que la réglementation CAFE ne pouvait pas
être justifiée au titre de l'article XX d).
67
3. La problématique du développement durable
dans les accords instituant l`OMC et la création du Comité du
commerce et de l`Environnement
Vers la fin du Cycle d'Uruguay (1986-1994), avec la
création de l`OMC, les participants se sont interrogés sur la
place des questions environnementales et du développement durable dans
le nouveau système commercial multilatéral. En
conséquence, il a été évoqué dans le
préambule de l'Accord de Marrakech instituant l'Organisation mondiale du
commerce la nécessité de promouvoir le développement
durable. Les objectifs de développement durable et de protection
environnementale ont donc paru suffisamment importants pour être
énoncés au premier paragraphe du préambule de l`Accord
instituant l`OMC. Ce préambule mentionne que les Membres de l'OMC
reconnaissent:
... que leurs rapports dans le domaine commercial et
économique devraient être orientés vers le
relèvement des niveaux de vie, la réalisation du plein emploi et
d'un niveau élevé et toujours croissant du revenu réel et
de la demande effective, et l'accroissement de la production et du commerce de
marchandises et de services, tout en permettant l'utilisation optimale des
ressources mondiales conformément à l'objectif de
développement durable, en vue à la fois de protéger et
préserver l'environnement et de renforcer les moyens d'y parvenir d'une
manière qui soit compatible avec leurs besoins et soucis respectifs
à différents niveaux de développement
économique."
Par ailleurs, les Ministres réunis à l'occasion
de la signature de l'Acte final reprenant les résultats des
Négociations commerciales multilatérales du Cycle d'Uruguay
à Marrakech le 15 avril 1994, rappelant le préambule de l'Accord
instituant l'Organisation mondiale du commerce, ont adopté une
Décision sur le commerce et l'environnement" dans laquelle ils
considéraient:
68
... qu'il ne devrait pas y avoir, et qu'il n'y a pas
nécessairement, de contradiction au plan des politiques entre la
préservation et la sauvegarde d'un système commercial
multilatéral ouvert, non discriminatoire et équitable d'une part
et les actions visant à protéger l'environnement et à
promouvoir le développement durable d'autre part?.
En outre, « désireux de coordonner les
politiques dans le domaine du commerce et de l'environnement », la
Décision ministérielle sur le commerce et l'environnement,
adoptée à Marrakech le15 avril 1994, prévoyait
l'établissement d'un Comité du commerce et de l'environnement
(CCE). Le CCE a pris le relais du Groupe sur les mesures relatives à
l'environnement et le commerce international du GATT. Son mandat est le suivant
:
· identifier les relations entre les mesures
commerciales et les mesures environnementales de manière à
promouvoir le développement durable;
· faire des recommandations appropriées pour
déterminer s'il y a lieu de modifier les dispositions du système
commercial multilatéral, en en respectant le caractère ouvert,
équitable et non discriminatoire.
Le programme de travail du CCE couvre les principales
questions situées à l'intersection du commerce et de
l'environnement. Un certain nombre d'entre elles qui se rapportent
indirectement aux changements climatiques, tels que les avantages
environnementaux de l'élimination des restrictions commerciales dans les
secteurs de l'énergie et des forêts et l'effet de
l'étiquetage du rendement énergétique sur l'accès
aux marchés, ont été discutées au CCE.
De plus, dans le cadre des Accord sur les aspects des droits
de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), le
CEE est chargé d`étudier le droit d`empêcher l`exploitation
commerciale de certaines inventions qui pourraient porter atteinte à la
protection de la santé, de la vie des personnes, des animaux et des
végétaux, ou pour éviter de graves atteintes à
l`environnement. Il analyse aussi les éventuels effets dommageables des
nouvelles technologies sur l`environnement. Le Comité du commerce et de
l`environnement est enfin chargé d`examiner les relations
69
entre le commerce et l`environnement et de faire des
recommandations au sujet des modifications qu`il conviendrait
éventuellement d`apporter aux accords commerciaux. De plus, le
comité examine les rapports existant entre la libéralisation du
commerce (y compris dans le cadre des engagements pris lors du Cycle d`Uruguay)
et la protection de l`environnement. Il analyse l`évolution
nécessaire du système de règlement des différends
nés des rapports entre le commerce international et le
développement durable.
Notons que, par ailleurs, avec les éclairages du CEE,
plusieurs différends relatifs aux rapports entre le commerce
international et le développement durable ont été
traités depuis la création de l`OMC :
- Affaires France - Amiantes (Canada) : Dans cette
affaire, le Groupe spécial et l'Organe d'appel ont rejeté tous
les deux la contestation, par le Canada, de l'interdiction , par la France, des
importations d'amiante et de produits en contenant, confirmant quel les Membres
peuvent assurer, en vertu des Accords de l'OMC, le niveau de protection de la
santé et de la sécurité des personnes qu'ils jugent
approprié.
- Affaire États-Unis - crevettes, (Inde, Malaisie,
Pakistan et Thaïlande) : L'Organe d'appel a reconnu qu'au titre des
règles de l'OMC, les gouvernements ont parfaitement le droit de
protéger la santé et la vie des personnes et des animaux et
d'assurer la préservation des végétaux ainsi que de
prendre des mesures de conservation des ressources épuisables. L'OMC n'a
pas à leur accorder? un tel droit. Initialement, les États-Unis
n'ont pas eu gain de cause dans cette affaire parce qu'ils appliquaient leurs
mesures à l'importation d'une manière discriminatoire; ils ont
par la suite révisé leurs mesures pour introduire des
flexibilités en faveur des pays en développement. L'Organe
d'appel a alors conclu que l'interdiction imposée par les Etats-Unis
était compatible avec les règles de l'OMC.
- Affaire États-Unis - essence (Venezuela et
Brésil) : Cette affaire a confirmé que les États-Unis
avaient parfaitement le droit d'adopter les normes les plus
élevées possibles pour protéger la qualité de l'air
dans leur pays dès lors que cela n'établissait pas de
discrimination à l'encontre des importations étrangères.
Les États-Unis n'ont pas eu gain de cause dans cette affaire parce
qu'ils établissaient
70
une discrimination -- la prescription s'appliquant aux
producteurs nationaux étant moins rigoureuse que celle qui était
imposée à l'essence importée (en l'occurrence, le
Venezuela et le Brésil).
71
Section III : L'émergence d'une
diplomatie
écologique et commerciale
1. Les négociations de DOHA et la problématique
du développement durable72
Si, dès la création de l`OMC, les Membres
avaient établi des liens entre le développement durable et le
commerce international et voulaient faire en sorte que l'ouverture des
marchés soit compatible avec les objectifs environnementaux et sociaux,
dans l'actuel Cycle de Doha, ils sont allés plus loin dans leur
engagement de suivre la voie d'un développement durable en
lançant pour la première fois des négociations
multilatérales sur le commerce et l'environnement. Visant une plus
grande ouverture du commerce, un certain nombre d'aspects du Cycle de Doha ont
une incidence directe sur le développement durable et peuvent donc
contribuer positivement aux efforts consentis pour atténuer les
changements climatiques.
1.1 Négociations sur la libéralisation des
biens
Tout d`abord, dans le cadre des négociations sur le
soutien que peuvent s'apporter mutuellement la libéralisation du
commerce et l'environnement, les Membres de l'OMC s'emploient à
éliminer les obstacles commerciaux dans les secteurs des marchandises
susceptibles de profiter à l'environnement. Le fait de faciliter
l'accès aux produits dans ce domaine peut contribuer à
améliorer l'efficacité
72
http://www.wto.org/french/tratop_f/envir_f/climate_challenge_f.htm
72
énergétique, réduire les
émissions de gaz à effet de serre et avoir une incidence positive
sur la qualité de l'air, l'eau, le sol et la protection des ressources
naturelles. En effet, les biens environnementaux peuvent faire intervenir un
certain nombre de technologies clés susceptibles de contribuer de
manière positive à la lutte contre les changements
climatiques.
Par exemple, certaines technologies d'atténuation et
d'adaptation qui peuvent aider à relever le défi que
représentent les changements climatiques font actuellement l'objet de
négociations dans le cadre du Cycle de Doha. Il s'agit, par exemple, des
turbines éoliennes et hydroélectriques, des chauffe-eau-solaires,
des réservoirs pour la production de biogaz et des décharges
contrôlées pour recueillir le méthane. Le fait de
réduire ou d'éliminer les obstacles tarifaires et non tarifaires
sur les importations de ces types de produits en fera donc baisser le prix et
les rendra plus accessibles. Par conséquent, une concurrence plus vive
encouragera l'innovation technologique dans des domaines liés à
la protection de l'environnement et à la lutte contre les changements
climatiques.
1.2 Négociations sur la libéralisation des
services environnementaux
Déjà pendant le Cycle d'Uruguay, au titre de
l`AGCS, certaines négociations étaient directement en rapport
avec les enjeux du développement durable. Ces négociations ont
été axées sur les services de voirie, les services
d'enlèvement des ordures et les services d'assainissement. Cependant,
certains services environnementaux, généralement
considérés comme relevant de la catégorie "Autres" dans
cette liste, ont attiré peu d'attention à l'époque. Il
s'agit notamment de services comme les "services de purification des gaz
brûlés" et les "services de protection de la nature et des
paysages", qui ont un rapport direct avec les mesures d'atténuation des
changements climatiques.
En effet, les services de purification des gaz
brûlés comprennent les services de surveillance et de lutte contre
l'émission de polluants atmosphériques résultant de la
combustion, par des sources mobiles ou fixes, de combustibles fossiles. Les
services de protection de la nature et des paysages recouvrent divers services
visant
73
à protéger les systèmes
écologiques, ainsi que des services d'étude des interactions
entre l'environnement et le climat.
Mais depuis quelques années, ces autres? services
environnementaux se sont développés sous l'effet de
réglementations environnementales de plus en plus exigeantes et ont
gagné en importance tant du point de vue environnemental que du point de
vue économique. Ces services, essentiellement fournis d'entreprise
à entreprise, offrent des créneaux aux petites et moyennes
entreprises. Ils sont maintenant sur la table de négociations et les
Membres de l'OMC s'efforcent d'obtenir des engagements spécifiques au
titre de l'AGCS concernant les activités qui peuvent avoir un rapport
direct avec les politiques visant à atténuer les changements
climatiques.
1.3 Négociations sur l'agriculture et les produits non
agricoles
Les négociations actuelles sur l'agriculture et sur
l'accès aux marchés pour les produits non agricoles pourraient,
par ricochet, déboucher sur des points positifs pour
l'atténuation des changements climatiques et l'adaptation à ces
changements. Tout d`abord, l'élimination des obstacles tarifaires et
non-tarifaires et la réduction du soutien à l'agriculture dans
les pays développés pourraient conduire à une affectation
plus efficace des ressources et de la production mondiales.
Par ailleurs, le problème du changement climatique a
aussi contribué au développement du secteur des biocombustibles,
que de nombreux pays considèrent comme susceptibles de les aider
à honorer les engagements de réduction des émissions de
gaz à effet de serre qu'ils ont pris au titre du Protocole de Kyoto.
Dans la mesure où la production de biocombustibles se concentre surtout
dans les pays consommateurs, le commerce de ces produits n'est actuellement pas
très important. Les échanges de biogazole ont plutôt lieu
entre pays de l'UE car la production et la consommation sont actuellement
concentrées en Europe.
Par contre, le commerce de bioéthanol est en expansion
depuis quelques années, le Brésil se situant en tête des
exportateurs. Depuis 2000, 37 mesures concernant des biocombustibles ont
été notifiées par 20 Membres de l'OMC dans le
En effet, dans le cadre des négociations de Doha, les
Ministres considèrent que la promotion des échanges et la
protection de l`environnement ne sont
74
contexte de l'Accord sur les obstacles techniques au
commerce. On donc pu constater que tout résultat des négociations
de Doha concernant l'agriculture et l'accès aux marchés pour les
produits non agricoles s'appliquera également au secteur des
biocombustibles.
1.4 Considérations sur les pays en
développement dans le cadre des négociations de Doha en rapport
avec l`environnement
Les Membres de l`OMC ont placé le développement
au centre du des négociations de Doha, et ce, dès son lancement.
Nous visons à mettre [les] besoins et [les] intérêts [des
pays en développement] au centre du Programme de travail adopté
dans la présente déclaration [...] Nous continuerons à
faire des efforts positifs pour que les pays en développement, et en
particulier les moins avancés d'entre eux, s'assurent une part de la
croissance du commerce mondial qui corresponde aux besoins de leur
développement économique. Dans ce contexte, un meilleur
accès aux marchés, des règles équilibrées,
ainsi que des programmes d'assistance technique et de renforcement des
capacités bien ciblés et disposant d'un financement durable
ont des rôles importants à jouer.?
La Déclaration de Doha prévoit en effet que le
traitement spécial et différencié en faveur des pays en
développement fera partie intégrante de l'ensemble des
négociations et sera incorporé dans les nouveaux engagements
ainsi que dans les règles et disciplines nouvelles ou
révisées pertinentes, de manière à être
effectif dans la pratique, et à permettre aux pays en
développement de répondre à leurs besoins, notamment en
matière de sécurité alimentaire et de développement
rural. Les Ministres ont pris note des considérations autres que d'ordre
commercial (telles que la protection de l'environnement, la
sécurité alimentaire, le développement rural, etc.)
évoquées dans les propositions de négociation
présentées par les Membres.
75
compatibles que sous certaines conditions, liées
notamment à la promotion de l`écodéveloppement dans les
relations internationales, avec garantie d`accès pour les pays du Sud
aux financements et aux transferts de technologies sur base non-commerciale.
Ils considèrent par ailleurs que les négociations commerciales
ouvriront des possibilités commerciales pour les pays en
développement qui pourraient se traduire par des revenus
supplémentaires importants pour ces pays. La hausse des revenus pourrait
permettre aux pays les plus pauvres de réduire leur
vulnérabilité aux effets des changements climatiques en
investissant, par exemple, dans l'irrigation. À plus long terme, la
prévisibilité plus grande découlant des engagements issus
des négociations de Doha et des activités de suivi et de
surveillance connexes pourrait contribuer à compenser les variations
moins prévisibles des conditions météorologiques et de la
productivité. Cela garantira que les pays en développement ne
souffrent pas de manière disproportionnée des effets
négatifs des changements climatiques.
76
2. La pertinence des règles de l`OMC dans les
négociations climatiques
L'OMC est une composante de l'architecture de
coopération multilatérale. Elle offre un cadre de disciplines
visant à faciliter les échanges mondiaux et sert d'instance
où négocier une plus grande ouverture du commerce. Mais la
libéralisation du commerce est aussi liée à des valeurs
humaines et à des objectifs de bien être essentiels. C`est ainsi
que le document fondateur de l'OMC, l'Accord de Marrakech, énonce que
"l'accroissement des échanges n'est pas une fin en soi, mais un
moyen pour parvenir à l'objectif du développement durable".
Ainsi, parmi les objectifs que se donne l`OMC, il convient de citer le
relèvement des niveaux de vie, l'utilisation optimale des ressources
mondiales conformément à l'objectif de développement
durable, et la protection et la préservation de l'environnement. Mais il
est nécessaire de préciser d`emblée que la question du
changement climatique ne fait pas partie en soi du programme de travail de
l`Organisation, laquelle n`est pas non plus un cadre destiné à
favoriser le contrôle des atteintes à l`environnement. Toutefois,
la pertinence de l'OMC tient au fait que les mesures et politiques en
matière de changements climatiques interviennent dans le commerce
international de différentes manières.
Tout d`abord, l'ouverture des marchés peut contribuer
aux efforts d'atténuation et d'adaptation consentis en matière de
changements climatiques, par exemple en favorisant une affectation efficace des
ressources mondiales (y compris les ressources naturelles), un
relèvement des niveaux de vie (encourageant par conséquent la
demande d'une meilleure qualité de l'environnement) et en
améliorant l'accès aux biens et services environnementaux. De
plus, le rôle de l`OMC consiste en ce que, dans le domaine des
changements climatiques, les mesures nationales d'atténuation et
d'adaptation peuvent avoir une incidence sur le commerce international (dans le
sens où elles risquent de modifier les conditions de concurrence) et
être soumises aux règles de l'OMC. La boîte à outils?
que constituent les règles de l'OMC peut donc être pertinente pour
l'examen des mesures
77
concernant les changements climatiques. De plus, les
règles de l'OMC, en tant que tout, offrent un cadre pour assurer la
prévisibilité, la transparence et l'application équitable
de ces mesures.
Outre les mesures réglementaires, des initiatives
nationales, régionales ou multilatérales visant à faire
face aux changements climatiques supposent l'adoption par les gouvernements de
mesures fondées sur les prix telles que taxes et droits de douane,
mécanismes basés sur les marchés et diverses autres
mesures, y compris les subventions. Comme elles ont un caractère
commercial, ces mesures peuvent être assujetties aux règles et
procédures de l'OMC. La conception des programmes relatifs aux
changements climatiques et la poursuite de la coopération internationale
dans ce domaine devront tenir compte des incidences potentielles sur le
commerce de ces mesures et de la pertinence des droits et obligations des
Membres découlant des règles de l'OMC.
Dans l'ensemble, les règles et la jurisprudence de
l'OMC (la boîte à outils? que constituent les règles de
l'OMC) qui concernent de manière générale les questions
environnementales (y compris l'article XX du GATT, la question des PMP
(procédés et méthodes de production) et la
définition d'un produit similaire) sont pertinentes pour l'examen des
mesures relatives aux changements climatiques. L'approche
générale dans le cadre des règles de l'OMC a
été de reconnaître que des restrictions commerciales sont
parfois nécessaires pour atteindre certains objectifs de politique
générale mais qu'il y a alors des conditions soigneusement
définies à respecter. Un certain nombre de règles de l'OMC
peuvent être pertinentes pour les mesures visant à atténuer
les changements climatiques, notamment:
· les disciplines relatives aux droits de douane
(mesures à la frontière), interdisant pour l'essentiel aux
Membres de percevoir des droits à des niveaux supérieurs à
ceux qu'ils ont consolidés dans leurs listes dans le cadre de l'OMC;
· une prohibition générale à
l'encontre des contingents à la frontière;
· un principe général de non
discrimination, qui recouvre le principe de la nation la plus favorisée
et le principe du traitement national;
· des règles sur les subventions;
· des règles sur les normes et règlements
techniques, qui ne doivent pas être plus restrictives que
nécessaire pour atteindre un objectif légitime. Les
règlements techniques et les normes doivent aussi respecter le principe
de la non-discrimination
78
et se fonder sur les normes internationales, lorsqu'il en
existe. Il y a aussi des règles spécifiques concernant les
mesures sanitaires et phytosanitaires qui sont pertinentes pour les produits
agricoles;
· des disciplines intéressant le commerce des
services, qui imposent des obligations générales telles que le
traitement de la nation la plus favorisée, ainsi que d'autres
obligations dans les secteurs où différents Membres ont pris des
engagements spécifiques;
· des règles sur les droits de
propriété intellectuelle qui touchent au commerce. Ces
règles sont pertinentes pour l'élaboration et le transfert de
technologie et de savoir faire sans incidence sur l'environnement.
79
3. Commerce et environnement dans les négociations
multilatérales :
L`OMC et les accords environnementaux multilatéraux
(AEM)
Depuis une quarantaine d`années, plus de deux cent
conventions multilatérales ont été conclues (en dehors du
cadre de l`OMC) traitant de diverses questions environnementales sont
actuellement en vigueur. Ce sont les accords environnementaux
multilatéraux (AEM). Ces accords visent notamment à
préserver les ressources naturelles, les espèces animales et
végétales en voie d`extinction et gérer les déchets
toxiques. Or, Une vingtaine de ces accords comportent des dispositions qui
peuvent affecter les échanges, par exemple en interdisant le commerce de
certains produits ou en autorisant des pays à restreindre les
échanges dans certaines circonstances. Parmi les mesures
préconisées par ces conventions, certaines sont commerciales
parce que les voies commerciales sont plus adaptées pour atteindre les
objectifs environnementaux visés.
Il convient notamment de citer le Protocole de Montréal
relatif à des substances qui appauvrissent la couche d`ozone, la
Convention sur le commerce international des espèces de faune et de
flore sauvages menacées d`extinction soumet l`importation, l`exportation
de certaines espèces à la délivrance de permis ; la
Convention de Bâle qui encadre les échanges de déchets vise
à empêcher d`exporter des déchets dangereux dans des pays
en développement et veille à ce que les déchets dangereux
dont l`exportation est autorisée soient traités de façon
écologiquement rationnelle dans le pays importateur ; la Convention
biodiversité qui vise la conservation de la diversité biologique
contient des dispositions liées à des accords commerciaux
internationaux et impose des mesures qui peuvent avoir des conséquences
sur le commerce ; le Protocole biosécurité ou Protocole de
Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques
règlemente les mouvements transfrontières d`organismes vivants
génétiquement modifiés.
80
On voit donc que ces AEM utilisent des mesures commerciales
pour parvenir à des objectifs environnementaux. Aussi peut-on constater
que, entre ces AEM et l`OMC, il peut exister des points de friction des deux
ordres juridiques. C`est en ce sens que les Membres de l`OMC, dans le cadre des
négociations actuelles de Doha, font de la clarification des relations
entre les accords environnementaux multilatéraux et les règles de
l`OMC un des enjeux majeurs. Il s`agit d`examiner les possibilités de
conciliation entre les deux ordres juridiques et de trouver les moyens
d'assurer une coexistence harmonieuse entre les règles de l'OMC et les
obligations commerciales spécifiques découlant de divers accords
qui ont été négociés au plan multilatéral
pour protéger l'environnement.
Pour comprendre la nature du problème dont il s`agit
ici, il faut se rappeler que, même si tous les problèmes
environnementaux ne comportent pas forcément un enjeu international, les
négociations multilatérales et les actions concertées
restent les meilleures voies à la fois pour lutter contre les
changements climatiques, et pour établir des rapports harmonieux entre
les régimes du commerce et de l'environnement. En effet, le recours
à l`unilatéralisme dans la poursuite des objectifs
environnementaux comporterait un risque de discrimination arbitraire et de
protectionnisme déguisé qui pourrait nuire au système
commercial multilatéral. Les mesures commerciales dans les AEM peuvent
jouer dans certains cas un rôle important dans la poursuite de certains
objectifs environnementaux. Cependant, les restrictions commerciales ne sont
pas le seul moyen d`action, ni nécessairement le plus efficace. Les
règles de l`OMC laissent beaucoup de place à l`application de
mesures commerciales résultant d`un AEM et ce en toute
compatibilité.
Même si, jusqu`à présent, aucune mesure
ayant un effet sur le commerce, prise en application d`un AEM, n`a
été contestée dans le cadre du système du GATT/de
l`OMC73, la complexité des relations entre les règles
environnementales et les règles
73 La question a été posée
d'ailleurs au cas où un différend commercial surgit parce qu'un
pays a pris une mesure affectant le commerce au titre d'un accord
environnemental, en dehors du système de l'OMC, et qu'un autre pays s'y
oppose. Le différend devrait-il être examiné à l'OMC
ou dans le cadre de l'autre accord? Selon le Comité du commerce et de
l'environnement, s'il y a différend au sujet d'une mesure commerciale
prise au titre d'un accord environnemental et si les deux parties au
différend ont signé cet accord, celles-ci devraient recourir aux
dispositions de cet accord pour régler le différend. Par contre,
si l'une d'elles n'a pas signé l'accord environnemental, la seule
instance pouvant connaître du différend est alors l'OMC. Cela ne
signifie pas que les questions environnementales ne seront pas prises en
considération: les Accords de l'OMC autorisent les groupes
spéciaux qui examinent un différend à demander l'avis
d'experts sur des questions environnementales.
81
commerciales a été soulignée dans
l'affaire Chili -- Espadons, et a ainsi montré qu`une issue favorable de
ces négociations renforcerait néanmoins les rapports entre les
deux systèmes juridiques. Les négociateurs ont fait fond sur les
expériences des pays en matière de négociation et de mise
en oeuvre d'accords environnementaux multilatéraux (AEM) à
l'échelle nationale. Ils cherchent des moyens d'améliorer la
coordination et la coopération nationales à cet égard. Ces
mécanismes pourraient jouer un rôle central pour la
réussite des efforts d'atténuation des changements climatiques et
d'adaptation à ces changements entrepris à l'échelle
nationale et internationale.
En outre, il ressort clairement des règles de l'OMC et
de la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques que
les deux régimes ne fonctionnent pas isolément.
Premièrement, l'article 3.5 de la Convention cadre et l'article 2.3 du
Protocole de Kyoto disposent que les mesures prises pour lutter contre les
changements climatiques ne devraient pas constituer un moyen de discrimination
arbitraire ou injustifiable ni une restriction déguisée au
commerce international et devraient être appliquées de
manière à réduire au minimum les effets négatifs, y
compris les répercussions sur le commerce international, et les
conséquences sociales, environnementales et économiques pour les
autres parties. De plus, les règles de l'OMC laissent une marge de
manoeuvre suffisante pour permettre dans certaines conditions l'utilisation de
mesures commerciales pour protéger l'environnement.
Au niveau interinstitutionnel, les Membres explorent aussi les
moyens de renforcer l'échange de renseignements et la coopération
entre les Secrétariats de l'OMC et des AEM. Des éléments
concrets sont étudiés pour améliorer ou compléter
les pratiques et mécanismes de coopération existants. Cet
échange de renseignements comprend la participation à des
réunions des uns ou des autres ainsi que l'organisation de sessions
d'échanges d'informations et des activités conjointes
d'assistance technique et de renforcement des capacités. Des liens de
coopération sont déjà établis entre l'OMC et les
organes chargés des changements climatiques. La Convention cadre des
Nations Unies sur les changements climatiques participe à des
réunions du Comité du commerce et de l'environnement (CCE) de
l'OMC et a le statut d'observateur ad hoc auprès du Comité qui
supervise les négociations concernant spécifiquement le commerce
et l'environnement
82
(Session extraordinaire du CCE). Le Secrétariat de
l'OMC assiste aux réunions de la Conférence des parties à
la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.
Notons qu`au stade actuel de l`examen des rapport entre les
règles de l`OMC et les AME, le comité de l`OMC estime qu`il n`y a
pas de contradiction entre les principes fondamentaux de l`OMC de
non-discrimination et de transparence et les mesures commerciales prises
à des fins de protection de l`environnement, y compris celles qui
relèvent d`accords environnementaux. Il note également que
certaines dispositions des accords portant sur les marchandises, les services
et les droits de propriété intellectuelle permettent aux
gouvernements de donner la priorité aux politiques environnementales
nationales. Selon le comité de l`OMC, les accords environnementaux
constituent le moyen le plus efficace de s`attaquer aux problèmes
environnementaux internationaux. Il note que les mesures qui visent à
protéger l`environnement et qui ont une incidence sur le commerce
peuvent jouer un rôle important dans certains accords environnementaux,
notamment lorsque le commerce est directement à l`origine des
problèmes environnementaux.
83
Conclusion
En définitive, il convient de souligner que les
interactions entre le commerce international et l`environnement sont telles que
toute évolution dans l`un des domaines entrainera nécessairement
des conséquences dans l`autre. Et si, a priori, ces interactions sont
souvent supposées se produire sous un mode antagoniste avec des
conséquences négatives dans l`un ou l`autre domaine, nous avons
vu que, a posteriori, la libération du commerce et la protection de
l`écosystème peuvent se réconcilier et se renforcer
mutuellement. Rappelons qu`il a été établi que les
incidences du libre-échange sur l`environnement se produit sous trois
formes dont l`une négative - l`effet sur «l`échelle«
qui favorise augmentation de la production et donc simultanément une
augmentation des émissions des gaz à effet de serre - et les deux
autres positives - l`effet sur la «technique« qui favorise
l`accès à de nouvelles technologies et des améliorations
de l`efficacité énergétique, et l`effet sur la
«composition« qui suppose que le libre-échange peut faire
baisser les émissions des gaz à effet de serre en raison du
principe des avantages comparatifs. Néanmoins, il faut noter qu`il est
difficile de prévoir le résultat global de ces trois effets
combinés, car tout dépendra de l`intensité relative
à chaque type d`effet. De plus, comme les effets sur la technique et sur
l`échelle ont tendance à se produire de manière
contradictoire (et donc s`annulent), c`est surtout l`effet sur la composition
qui dépend des avantages comparatifs de chaque pays et de l`expansion de
l`un ou l`autre secteur plus ou moins gourmand en énergie qui va
déterminer les incidences globales du libre-échange sur
l`écosystème.
De ces premières remarques conclusives découle
une autre observation : c`est que les considérations environnementales
dans les règles de l`OMC sont parfaitement légitimes. En effet,
comment admettre l`existence nécessaire
84
d`interactions entre le commerce international et
l`environnement sans faire des considérations environnementales dans les
règles sur le commerce international ? Notons que les rapports entre
l`OMC (et aussi le GATT qui l`a précédée) et la
problématique du développement durable ont aussi connu des
évolutions importantes. En effet, à l`origine, la présence
des considérations environnementales dans les règles de l`OMC
semblait viser essentiellement, non pas à mettre en place des mesures
pour protéger l`environnement, mais surtout à lutter contre de
nouvelles formes de protectionnisme déguisé ou «
protectionnisme vert ». Mais progressivement, on a vu la
problématique du développement durable s`imposer comme un
corrélat indispensable au libre-échange. Si bien que les textes
fondateurs de l`OMC font de l`enjeu du développement durable la
finalité de la libération du commerce. Comme le précise
l`Accord de Marrakech, "l'accroissement des échanges n'est pas une
fin en soi, mais un moyen pour parvenir à l'objectif du
développement durable". Se pose donc cependant la question de
l`adaptation ou de la pertinence des règles de l`OMC dans
l`accomplissement de cet objectif de développement durable.
S`interrogeant sur la pertinence des règles de l`OMC
pour la réalisation de l`objectif du développement durable, on
serait aussi en droit de se demander pourquoi recourir à des
règles d`une institution à vocation commerciale pour promouvoir
l`environnement. En effet, même si les règles de l`OMC peuvent,
dans une certaine mesure, s`avérer pertinentes pour renforcer les
mesures environnementales, ne serait-il pas plus judicieux que la question de
l`environnement soit traitée dans un cadre réglementaire
essentiellement dédié à cela ? Tel est le voeu de certains
mouvements écologiques selon lesquels l`environnement est non seulement
une victime du libre-échange mais aussi le seul domaine à
dimension international n`ayant pas un cadre réglementaire qui lui est
aussi dédié à l`échelle internationale. Il
s`agirait donc de créer, à l`instar de l`OMC, une organisation
mondiale de l`environnement. Reste à savoir s`il serait possible
d`isoler le champ environnemental des autres composants du développement
durable, et du composant économique notamment.
D`ailleurs, ne pourrait-on pas penser que les entrecroisements
et les contradictions internes au concept de développement durable
reflètent bien les relations alliances-oppositions qui existent entre le
commerce international et les
85
mesures environnementales ? Et, dans l`optique de la
création d`un cadre réglementaire international essentiellement
dédié à l`environnement, serait-il possible d`envisager
que cette nouvelle institution international prenne des mesures
environnementales sans prendre en compte les incidences de ces mesures sur le
commerce international ? Quelle serait donc la nature des relations entre l`OMC
et une organisation internationale de l`environnement ?
Cette question s`est en effet déjà posée
avec les AEM qui, pour certains d`entre eux, ont des liens très
étroits avec le commerce international mais qui, le plus souvent, vont
à l`encontre du principe du libre-échange. Nous avons ici une
illustration des difficultés que pourraient présenter des
règles environnementales et commerciales énoncées par deux
institutions à visées parfois contradictoires. Mais les relations
établies actuellement entre l`OMC et les AEM pourraient aussi constituer
un modèle ou un précurseur du mode de coopération qui
pourrait exister entre deux institutions internationales où se
négocieraient conjointement les enjeux commerciaux et environnementaux.
C`est là ce que nous appelons l`émergence d`une diplomatie
hybride, à la fois écologique et commerciale.
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94
TABLE DES MATIERES
Introduction 4
Chapitre I : Approches conceptuelles et
théoriques du
développement durable et du commerce international
8 Section I : Le développement durable : un concept
composite et controversé...8
1. Définition, enjeux et généalogie du
concept de développement durable 8
2. La notion de durabilité/soutenabilité
(«sustanability«) 10
3. Dimension et indicateurs écologiques du
développement durable 13
4. Dimension et indicateurs socio-sanitaires du
développement durable 14
5. Dimension et indicateurs économiques du
développement durable 15
6. Dimension et indicateurs éthico-politiques du
développement durable 16
Section II : Les fondements théoriques du commerce
international 17
1. Les approches traditionnelles 17
1.1 La théorie d`Adam Smith sur les avantages absolus
17
1.2 La théorie de David Ricardo sur les avantages
comparatifs 18
1.3 L`approche de John Stuart Mill sur les avantages comparatifs
19
2. La théorie marxiste de l`échange inégal
(K. Marx, A. Emmanuel et S. Amin) 21
3. La théorie néoclassique : le modèle HOS
(Hecksher, Ohlin et Samuelson) 23
4. Synthèse des nouvelles théories 25
4.1 La théorie de l`écart technologique de Posner
25
4.2 La théorie de la concurrence imparfaite et politique
stratégique de Krugman 26
4.3 La théorie de la demande représentative de
Linder 27
4.4 La théorie de la demande de différence de B.
Lassudrie-Duchêne 27
4.5 Le paradoxe de Leontief 28
4.6 La théorie de cycle de vie du produit de Vernon 28
4.7 La théorie de la protection des industries naissantes
(F. List) 29
4.8 La théorie de l`intégration régional de
Viner 30
Section III : Les interactions problématiques
entre commerce international et développement durable : les
hypothèses
1. Rôle du commerce international dans la
dégradation de l`environnement :
l`hypothèse de la décroissance et de la limitation
du libre-échange 32
2. Impacts du commerce international sur les niveaux de vie et
l`environnement :
l`hypothèse de la courbe sociale et environnementale de
Kuznets 37
3. Conséquences des mesures environnementales des pays du
Nord sur les
pays du Sud, et l`hypothèse de la migration des
industries polluantes 41
4. Interactions entre libre-échange et mesures
environnementales : l`hypothèse
du renforcement mutuel entre libre-échange et
environnement 44
95
Chapitre II : Libéralisation et
régulation du commerce international
et gestion de l'enjeu du développement durable
47
Section I : Libéralisation et régulation du
commerce international 47
1. Le GATT 47
1.1 Le principe de non-discrimination 48
1.2 Le principe de réciprocité 50
1.3 Le principe de négociation 51
2. Les évolutions du commerce international du GATT
à l`OMC 53
3. L`organe de règlement des différends du GATT
à l`OMC 55
Section II : La gestion de l'enjeu du
développement durable du GATT à l'OMC
1. L`approche du Gatt de la problématique
commerce-environnement 57
2. Le Groupe du GATT sur les mesures relatives à
l'environnement et le
commerce international et règlement des différends
liés à l`environnement 61
3. La problématique du développement durable dans
les accords instituant l`OMC et la création du Comité du commerce
et de l'environnement (CCE)...67
Section III : L'émergence d'une diplomatie
écologique et commerciale .71
1. Les négociations de DOHA et la problématique du
développement durable.71
1.1 Négociations sur la libération des biens
environnementaux 71
1.2 Négociations sur la libération des services
environnementaux 72
1.3 Négociations sur l`agriculture et les produits
non-agricoles 73
1.4 Considérations sur les pays en développement
dans le cadre des négociations
de Doha en rapport avec l`environnement 74
2. La pertinence des règles de l`OMC dans les
négociations climatiques 76
3. Commerce et environnement dans les négociations
multilatérales : L`OMC et
les accords environnementaux multilatéraux (AEM) 79
Conclusion 83
Bibliographie 86
Annexes 96
96
TABLE DES ANNEXES
Annexe I : Généalogie du développement
durable 97
Annexe II : Les 11 indicateurs du développement durable
selon l`Insee 100
Annexe III : L`article XX du GATT 101
Annexe IV : Acte final reprenant les résultats des
négociations commerciales
multilatérales du Cycle de l`Uruguay 102
Annexe V : Déclaration de Marrakech du 15 avril 1994
103
ANNEXE VI : Protocole de Marrakech annexé au GATT de
1994 (Extrait) 105
ANNEXE VII : Décision sur les effets négatifs
possibles du programme de réforme
sur les PMA et PED importateurs nets de produits alimentaires
(Extrait) 106
ANNEXE VIII: Décision sur le commerce des services et
l`environnement (Extrait)107
ANNEXE IX : Décision sur le Commerce et Environnement
(Extrait) 108
ANNEXE X : La Déclaration Ministérielle de Doha
du 14 novembre 2001(Extrait)..110
97
ANNEXE I
Généalogie du concept de
développement durable
Tout commence véritablement dans les années 1960
avec les premières critiques du mode de croissance productiviste.
· 1968: création du Club de Rome regroupant
quelques personnalités occupant des postes relativement importants dans
leurs pays respectifs et souhaitant que la recherche s'empare du
problème de l'évolution du monde pris dans sa globalité
pour tenter de cerner les limites de la croissance économique. Face
à la surexploitation des ressources naturelles liée à la
croissance économique et démographique, cette association,
prône la croissance zéro : seule croissance capable de concilier
évolution démographique exponentielle et quantité
limitée de ressources naturelles. En clair, le développement
économique est alors présenté comme incompatible avec la
protection de la planète à long terme. En parallèle, face
à la montée des mouvements sociaux qui intègrent largement
les préoccupations environnementales, les premiers ministères de
l'environnement sont créés au sein de différents
gouvernements nationaux (1969 pour les Etats-Unis; 1971, pour la France).
· 1971, les 24 pays membres de l'OCDE (Organisation de
Coopération et de Développement Economique) proclament le
principe de pollueur-payeur. En 1972, ils commandent une étude à
une équipe du Massachusetts Institute of Technologie (M.I.T.)
dirigée par Dennis Meadows.
· 1972: le Club de Rome publie le rapport
rédigé par l'équipe du MIT intitulé The Limits
of Growth (traduit en français par Halte à la
croissance, ou Les limites de la croissance. Ce premier rapport
donne les résultats de simulations informatiques sur l'évolution
de la population humaine en fonction de l'exploitation des ressources
naturelles, avec des projections jusqu'en 2100. Il en ressort que la poursuite
de la croissance économique entraînera au cours du XXIème
siècle une chute brutale des populations à cause de la pollution,
de l'appauvrissement des sols cultivables et de la raréfaction des
énergies fossiles. Selon certain, nombre de ses prévisions se
sont révélées fausses. Au contraire, les auteurs
eux-mêmes, dans leur mise à jour de 2004 intitulé
Limits to Growth. The 30-Year Update démontrent que la
réalité est relativement conforme à leurs
prévisions de 1972. Suite à ce rapport, de nombreux travaux
critiques de certaines limites du système économique de
l'époque sont publiés : citons entre autres Nocholas
Georgescu-Roegen et sa comparaison entre système économique et
thermodynamique, ou encore l'économiste britannique E.F. Schumacher qui
prône des solutions plus locales et moins technologiques et
technocratiques dans son livre Small is beautiful.
· 1972 (5 au 16 juin) : une Conférence des
Nations Unies sur l'Environnement humain (rétrospectivement
qualifié de premier Sommet de la Terre) à Stockholm
expose notamment l'écodéveloppement, les interactions entre
écologie et économie, le développement des pays du Sud et
du Nord. Il sera. Mais cette Conférence des Nations Unies s'est tenue
dans un climat de confrontation et non de conciliation entre l'écologie
et l'économie. Les thèmes centraux de la Conférence
étaient :
? L'interdépendance entre les êtres humains et
l'environnement naturel
98
? Les liens entre le développement économique et
social et la protection de l'environnement ? La nécessité d'une
vision mondiale et de principes communs
Des personnalités comme Maurice Strong, organisateur
de la Conférence, puis le professeur René Dubos, Barbara Ward et
Ignacy Sachs, insistent sur la nécessité d'intégrer
l'équité sociale et la prudence écologique dans les
modèles de développement économique du Nord et du Sud. Il
en découlera la création du Programme des Nations Unies pour
l'Environnement (PNUE) ainsi que le
Programme des Nations Unies pour le Développement
(PNUD). Le concept d'écodéveloppement est alors mis en
avant.
C'est un échec relatif, avec aucun compromis clair,
mais la problématique semble dès lors posée :
l'environnement apparaît comme un patrimoine mondial essentiel à
transmettre aux générations futures.
· 1979: le philosophe Hans Jonas exprime cette
préoccupation dans son livre Le Principe de
responsabilité.
· 1980: L'Union internationale pour la conservation
de la nature publie un rapport intitulé La stratégie
mondiale pour la conservation où apparaît pour la
première fois la notion de « développement durable »,
traduite de l'anglais « sustainable development ». Mais cela
est passé inaperçu.
· 1983, l'ONU demande à Mme Gro Harlem BRUNDTLAND
(ex-chef du gouvernement de Norvège) de présider une commission
indépendante chargée d'enquêter sur la question de
l'environnement global et le développement.
· 1987, une définition du développement
durable est proposée par la Commission mondiale sur l'environnement
et le développement. Cette commission remet le rapport dit «
rapport Brundtland », qui a pour titre « Our common future »
(« Notre avenir à tous »). Ce rapport introduit une rupture
fondatrice dans la conception des gouvernements sur les relations entre
l'environnement et les politiques publiques et prône le concept de «
sustainable development », développement durable ou soutenable.
Reprenant ces thèmes, la Commission mondiale sur l'environnement et le
développement (la Commission Brundtland) a rendu public, en 1987, un
rapport demandant un développement qui permet de : "répondre aux
besoins du présent sans compromettre la possibilité pour les
générations futures de satisfaire les leurs". Le
développement durable n'est pas un état fixe de l'harmonie, mais
plutôt un processus d'évolution durant lequel l'exploitation des
ressources, l'orientation des investissements, l'avancement du
développement technologique et les transformations institutionnelles
sont conformes à nos besoins aussi bien futurs que présents".
· 1987, le protocole de Montréal relatif aux
substances qui appauvrissent la couche d'ozone est signé le 16
septembre, signe qu'un engagement collectif est possible.
· 1992 (3 au 14 juin) : Conférence des Nations
unis sur l'environnement et le développement (CNUED) de Rio de Janeiro
(appelée aussi deuxième Sommet de la Terre). Adoption de la
Convention de Rio et du plan mondial "Action 21". Le concept de
"développement durable" est donc consacré et commence à
être largement médiatisé devant le grand public. La
définition Brundtland, axée prioritairement sur la
préservation de l'environnement et la consommation prudente des
ressources naturelles non
99
renouvelables, sera modifiée par la définition
des « trois piliers » qui doivent être conciliés dans
une perspective de développement durable : le progrès
économique, la justice sociale, et la
préservation de l'environnement.
· 1992 (décembre) : Création de la
Commission mondiale du développement durable (CDD). Elle doit assurer un
suivi efficace de la Conférence de Nations Unies sur l'environnement et
le développement (UNCED), contrôler et faire le suivi de la mise
en oeuvre des accords du Sommet de la Terre tant au niveau local, national,
régional qu'international
· 1994: Publication de la Charte d'Aalborg sur les
villes durables, au niveau européen.
· 1997 (1er au 12 décembre) : troisième
Conférence des Nations unies sur les changements climatiques, à
Kyoto, au cours duquel sera établi le protocole de même nom. Les
pays développés se donnent comme objectif une réduction de
5,2% des émissions de gaz à effet de serre en 2008-2012 (par
rapport au niveau de 1990).
· 1999 : Le Traité d'Amsterdam (mai 99) renforce
l'importance de la politique de l'environnement dans l'Union européenne
par la prise en compte du principe de développement durable
· 2002 (26 août au 4 septembre) : Sommet de
Johannesburg : En septembre, plus de cent chefs d'État, plusieurs
dizaines de milliers de représentants gouvernementaux et d'ONG ratifient
un traité prenant position sur la conservation des ressources naturelles
et de la biodiversité. Quelques grandes entreprises françaises
sont présentes.
· 2005: Entrée en vigueur du Protocole de Kyoto
sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre
dans l'Union européenne. Adoption, en France, d'une Charte de
l'environnement, insistant sur le principe de précaution.
· 2006: Publication du rapport Stern sur
l'économie du changement climatique: premier rapport
financé par un gouvernement sur le réchauffement climatique
mené par un économiste et non par un météorologue.
Selon ce rapport, le changement climatique présente un défi
unique pour l'économie : il constitue l'échec du marché le
plus important et le plus étendu que l'on n'ait jamais connu. En
conséquence, l'analyse économique se doit d'être
mondiale.
· 2007: Publication du rapport final de synthèse
(Fourth Assessment Report ou AR4) du Groupe d'experts
intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC, en anglais
Intergovernmental Panel on Climate Change, IPCC)
établissant notamment des liens entre les activités
économiques et l'évolution du climat.
· 2009 (décembre) : Sommet de l'ONU sur le
changement climatique à Copenhague exigeant notamment des États
des engagements précis sur leurs réductions de gaz à effet
de serre.
100
ANNEXE II
Les 11 indicateurs du développement durable selon
l'Insee
Développement
économique
· Indicateur n° 1 : taux de croissance du PIB par
habitant en volume (prix 1995) Changement climatique et
énergie propre
· Indicateur n° 2 : émissions totales de gaz
à effet de serre
· Indicateur n° 3 : part des énergies
renouvelables dans la consommation totale d'énergie primaire
Transport durable
· Indicateur n° 4 : consommation d'énergie
totale dans les transports Production et consommation
durables
· Indicateur n° 5 : productivité des ressources
Conservation et gestion des ressources naturelles
· Indicateur n° 6 : indice d'abondance des oiseaux
communs
· Indicateur n° 7 : prises de poissons au-dessus des
seuils de précaution (UE25)
Santé publique, prévention et gestion
des risques
· Indicateur n° 8 : espérance de vie en bonne
santé Inclusion sociale, démographie et
immigration
· Indicateur n° 9 : taux de pauvreté
monétaire dans les pays européens
· Indicateur n° 10 : taux d'emploi des travailleurs
âgés de 55 à 64 ans
Pauvreté dans le monde et défis
internationaux Indicateur n° 11 : aide publique au
développement
101
ANNEXE III
Article XX de l'Accord général sur les
tarifs douaniers de 1947 (extrait) Exceptions
générales
"Sous réserve que ces mesures ne soient pas
appliquées de façon à constituer soit un moyen de
discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les
mêmes conditions existent, soit une restriction déguisée au
commerce international, rien dans le présent Accord ne sera
interprété comme empêchant l'adoption ou l'application par
toute partie contractante des mesures
a) nécessaires à la protection de la
moralité publique ;
b) nécessaires à la protection de la
santé et de la vie des personnes et des animaux ou à la
préservation des végétaux ;
c) se rapportant à l'importation ou à
l'exportation de l'or ou de l'argent ;
d) nécessaires pour assurer le respect des lois et
règlements qui ne sont pas incompatibles avec les dispositions du
présent Accord, tels que, par exemple, les lois et règlements qui
ont trait à l'application des mesures douanières, au maintien en
vigueur des monopoles administrés conformément au paragraphe 4 de
l'article II et à l'article XVII, à la protection des brevets,
marques de fabrique et droits d'auteur et de reproduction et aux mesures
propres à empêcher les pratiques de nature à induire en
erreur ;
e) se rapportant aux articles fabriqués dans les
prisons,
f) imposées pour la protection de trésors
nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique,
g) se rapportant à la conservation des ressources
naturelles épuisables, si de telles mesures sont appliquées
conjointement avec des restrictions à la production ou à la
consommation nationales,
h) prises en exécution d'engagements contractés
en vertu d'un accord intergouvernemental sur un produit de base qui est
conforme aux critères soumis aux PARTIES CONTRACTANTES et non
désapprouvés par elles ou qui est lui-même soumis aux
PARTIES CONTRACTANTES et n'est pas désapprouvé par elles,
i) comportant des restrictions à l'exportation de
matières premières produites à l'intérieur du pays
et nécessaires pour assurer à une industrie nationale de
transformation les quantités essentielles desdites matières
premières pendant les périodes où le prix national en est
maintenu au-dessous du prix mondial en exécution d'un plan
gouvernemental de stabilisation...
102
ANNEXE IV
ACTE FINAL REPRENANT LES RESULTATS DES NEGOCIATIONS
COMMERCIALES MULTILATERALES DU CYCLE D'URUGUAY
1. S'étant réunis pour achever les
Négociations commerciales multilatérales du Cycle d'Uruguay, les
représentants des gouvernements et des Communautés
européennes, membres du Comité des négociations
commerciales, conviennent que l'Accord instituant l'Organisation
mondiale du commerce (dénommé dans le présent acte final
l'"Accord sur l'OMC"), les Déclarations et Décisions
ministérielles, ainsi que le Mémorandum d'accord sur les
engagements relatifs aux services financiers, joints en annexe, reprennent les
résultats de leurs négociations et font partie intégrante
du présent acte final.
2. En signant le présent acte final, les
représentants conviennent
a) de soumettre pour examen, selon qu'il sera
approprié, l'Accord sur l'OMC à leurs autorités
compétentes respectives, en vue d'obtenir l'approbation de l'Accord
conformément à leurs procédures; et
b) d'adopter les Déclarations et Décisions
ministérielles.
3. Les représentants conviennent qu'il est
souhaitable que l'Accord sur l'OMC soit accepté par tous les
participants aux Négociations commerciales multilatérales du
Cycle d'Uruguay (dénommés dans le présent acte final les
"participants") afin qu'il entre en vigueur le 1er janvier 1995 ou le plus
tôt possible après cette date. A la fin de 1994 au plus tard, les
Ministres se réuniront, conformément au dernier paragraphe de la
Déclaration ministérielle de Punta del Este, pour décider
de la mise en oeuvre des résultats au plan international, y compris la
date de leur entrée en vigueur.
4. Les représentants conviennent que l'Accord
sur l'OMC sera ouvert à l'acceptation dans son ensemble, par voie de
signature ou autrement, de tous les participants conformément à
l'article XIV dudit accord. L'acceptation et l'entrée en vigueur d'un
Accord commercial plurilatéral repris dans l'Annexe 4 de l'Accord sur
l'OMC seront régies par les dispositions de cet accord commercial
plurilatéral.
5. Avant d'accepter l'Accord sur l'OMC, les participants qui
ne sont pas parties contractantes à l'Accord général sur
les tarifs douaniers et le commerce doivent d'abord avoir achevé les
négociations en vue de leur accession à l'Accord
général et être devenus parties contractantes audit accord.
Pour les participants qui ne sont pas parties contractantes à l'Accord
général à la date de l'Acte final, les Listes ne sont pas
définitives et seront établies par la suite aux fins de leur
accession à l'Accord général et de l'acceptation de
l'Accord sur l'OMC.
6. Le présent acte final et les textes joints en annexe
seront déposés auprès du Directeur général
des PARTIES CONTRACTANTES de l'Accord général sur les tarifs
douaniers et le commerce, qui en remettra dans les moindres délais une
copie certifiée conforme à chaque participant.
103
ANNEXE V
DECLARATION DE MARRAKECH DU 15 AVRIL 1994
Les Ministres,
Représentant les 124 Gouvernements et les
Communautés européennes participant aux Négociations
commerciales multilatérales du Cycle d'Uruguay, à l'occasion de
la réunion finale du Comité des négociations commerciales
à l'échelon ministériel, tenue à Marrakech (Maroc)
du 12 au 15 avril 1994,
Rappelant la Déclaration ministérielle
adoptée à Punta del Este (Uruguay) le 20 septembre 1986 pour
lancer les Négociations commerciales multilatérales du Cycle
d'Uruguay,
Rappelant les progrès réalisés
aux Réunions ministérielles tenues à Montréal
(Canada) et à Bruxelles (Belgique) en décembre 1988 et 1990
respectivement, Notant que les négociations se sont
achevées pour l'essentiel le 15 décembre 1993,
Déterminés à s'appuyer sur le
succès du Cycle d'Uruguay grâce à la participation de leurs
pays au système commercial mondial, sur la base de politiques ouvertes,
orientées vers le marché, et des engagements
énoncés dans les Accords et Décisions du Cycle
d'Uruguay,
Ont adopté ce jour le texte suivant:
DECLARATION
1. Les Ministres saluent l'événement historique
que représente la conclusion du Cycle qui, à leur sens,
renforcera l'économie mondiale et conduira à une plus forte
croissance des échanges, des investissements, de l'emploi et des revenus
dans le monde entier. En particulier, ils se félicitent:
- du cadre juridique plus solide et plus clair qu'ils ont
adopté pour la conduite du commerce international et qui comprend un
mécanisme de règlement des différends plus efficace et
plus sûr,
- de la réduction globale de 40 pour cent des tarifs
douaniers et des accords élargis d'ouverture des marchés pour les
marchandises, ainsi que de la prévisibilité et de la
sécurité accrues que représente une expansion
considérable de la portée des engagements tarifaires, et
- de l'établissement d'un cadre multilatéral de
disciplines pour le commerce des services et pour la protection des droits de
propriété intellectuelle qui touchent au commerce, ainsi que des
dispositions commerciales multilatérales renforcées dans le
domaine de l'agriculture et dans celui des textiles et des vêtements.
2. Les Ministres affirment que l'établissement de
l'Organisation mondiale du commerce (OMC) marque l'avènement d'une
ère nouvelle de coopération économique mondiale,
répondant au désir généralisé
d'opérer dans un système commercial multilatéral plus
juste et plus ouvert au profit et pour la prospérité de la
population de leurs pays. Les Ministres se déclarent
déterminés à résister aux pressions
protectionnistes de toute nature. Ils considèrent que la
libéralisation des échanges et les règles
renforcées mises en place dans le cadre du Cycle d'Uruguay conduiront
à un environnement
104
commercial mondial de plus en plus ouvert. Les Ministres
s'engagent, avec effet immédiat et jusqu'à l'entrée en
vigueur de l'OMC, à ne pas prendre de mesures commerciales qui
amoindriraient les résultats des négociations du Cycle d'Uruguay
ou leur mise en oeuvre, ou qui leur seraient contraires.
3. Les Ministres confirment leur résolution d'oeuvrer
en faveur d'une plus grande cohérence, au niveau mondial, des politiques
menées dans les domaines commercial, monétaire et financier, y
compris par une coopération entre l'OMC, le FMI et la Banque mondiale
à cet effet.
4. Les Ministres se félicitent du fait que la
participation au Cycle d'Uruguay a été beaucoup plus large que
pour toutes les négociations commerciales multilatérales
antérieures et, en particulier, du fait que les pays en
développement y ont joué un rôle remarquablement actif.
C'est là une étape historique sur la voie d'un partenariat
commercial global plus équilibré et intégré. Les
Ministres notent que, pendant la période au cours de laquelle ces
négociations se sont déroulées, d'importantes mesures de
réforme économique et de libéralisation autonome du
commerce ont été mises en oeuvre dans de nombreux pays en
développement et pays ayant eu une économie planifiée.
5. Les Ministres rappellent que les résultats des
négociations comprennent des dispositions accordant un traitement
différencié et plus favorable aux économies en
développement, y compris une attention spéciale à la
situation particulière des pays les moins avancés. Les Ministres
reconnaissent qu'il est important de mettre en oeuvre ces dispositions pour les
pays les moins avancés et affirment leur intention de continuer de
soutenir et de faciliter l'expansion des possibilités offertes à
ces pays en matière de commerce et d'investissement. Ils conviennent que
la Conférence ministérielle et les organes appropriés de
l'OMC examineront périodiquement l'incidence des résultats du
Cycle sur les pays les moins avancés et sur les pays en
développement importateurs nets de produits alimentaires, en vue de
promouvoir des mesures positives qui leur permettent de réaliser leurs
objectifs de développement. Les Ministres reconnaissent la
nécessité de renforcer la capacité du GATT et de l'OMC de
fournir une assistance technique accrue dans leurs domaines de
compétence, et en particulier d'augmenter substantiellement l'aide
apportée aux pays les moins avancés.
6. Les Ministres déclarent qu'en signant l'"Acte final
reprenant les résultats des négociations commerciales
multilatérales du Cycle d'Uruguay" et en adoptant les Décisions
ministérielles qui s'y rapportent, ils amorcent la transition entre le
GATT et l'OMC. Ils ont en particulier établi un Comité
préparatoire pour organiser l'entrée en vigueur de l'Accord sur
l'OMC et s'engagent à s'efforcer d'accomplir toutes les
formalités nécessaires pour ratifier ledit accord afin qu'il
puisse entrer en vigueur le 1er janvier 1995 ou dès que
possible après cette date. Les Ministres ont également
adopté une Décision sur le commerce et l'environnement.
7. Les Ministres expriment leur sincère gratitude
à sa Majesté le Roi Hassan II pour sa contribution personnelle au
succès de cette Réunion ministérielle, ainsi qu'à
son gouvernement et au peuple marocain pour leur chaleureuse hospitalité
et l'excellente organisation qu'ils ont assurée. Le fait que cette
Réunion ministérielle finale du Cycle d'Uruguay se tient à
Marrakech est une manifestation additionnelle de l'adhésion du Maroc
à un système commercial mondial ouvert et de son désir de
s'intégrer complètement à l'économie mondiale.
105
ANNEXE VI
PROTOCOLE DE MARRAKECH ANNEXE A L'ACCORD GENERAL SUR
LES TARIFS DOUANIERS ET LE COMMERCE DE 1994 (EXTRAIT)
Les Membres,
Ayant procédé à des
négociations dans le cadre du GATT de 1947, conformément à
la Déclaration ministérielle sur les Négociations
d'Uruguay,
Conviennent de ce qui suit:
1. La liste d'un Membre annexée au présent
protocole deviendra la Liste de ce Membre annexée au GATT de 1994 le
jour où l'Accord sur l'OMC entrera en vigueur pour ce Membre. Toute
liste présentée conformément à la Décision
ministérielle sur les mesures en faveur des pays les moins
avancés sera réputée être annexée au
présent protocole.
2. Les réductions tarifaires consenties par chaque
Membre seront mises en oeuvre en cinq tranches égales, à moins
que sa Liste n'en dispose autrement. La première réduction sera
effective à la date d'entrée en vigueur de l'Accord sur l'OMC,
chaque réduction successive sera effective le 1er janvier de chacune des
années suivantes, et le taux final sera effectif quatre ans au plus tard
après la date d'entrée en vigueur de l'Accord sur l'OMC, à
moins que la Liste de ce Membre n'en dispose autrement. A moins que sa Liste
n'en dispose autrement, un Membre qui accepte l'Accord sur l'OMC après
son entrée en vigueur opérera, à la date de
l'entrée en vigueur de cet accord pour lui, toutes les réductions
de taux qui auront déjà eu lieu ainsi que les réductions
qu'il aurait été dans l'obligation d'opérer le 1er janvier
de l'année suivante conformément à la phrase
précédente, et opérera toutes les réductions de
taux restantes suivant le calendrier spécifié dans la phrase
précédente. A chaque tranche, le taux réduit sera arrondi
à la première décimale. Pour les produits agricoles, tels
qu'ils sont définis à l'article 2 de l'Accord sur l'agriculture,
les réductions échelonnées seront mises en oeuvre ainsi
qu'il est spécifié dans les parties pertinentes des listes.
3. La mise en oeuvre des concessions et des engagements
repris dans les listes annexées au présent protocole sera
soumise, sur demande, à un examen multilatéral de la part des
Membres. Cela serait sans préjudice des droits et obligations des
Membres résultant des Accords figurant dans l'Annexe 1A de l'Accord sur
l'OMC.
4. Lorsque la liste d'un Membre annexée au
présent protocole sera devenue Liste annexée au GATT de 1994
conformément aux dispositions du paragraphe 1, ce Membre aura à
tout moment la faculté de suspendre ou de retirer, en totalité ou
en partie, la concession reprise dans cette Liste concernant tout produit pour
lequel le principal fournisseur est un autre participant au Cycle d'Uruguay
dont la liste ne serait pas encore devenue Liste annexée au GATT de
1994. Toutefois, une telle mesure ne pourra être prise qu'après
qu'il aura été donné au Conseil du commerce des
marchandises notification écrite de cette suspension ou de ce retrait de
concession et qu'il aura été procédé, si demande en
est faite, à des consultations avec tout Membre dont la liste sera
devenue Liste annexée au GATT de 1994 et qui aurait un
intérêt substantiel dans le produit en cause. Toute suspension ou
tout retrait ainsi effectué cessera d'être appliqué
à compter du jour où la liste du Membre qui a un
intérêt de principal fournisseur deviendra Liste annexée au
GATT de 1994.
106
ANNEXE VII
Décision sur les effets négatifs
possibles du programme de réforme sur les PMA et PED importateurs nets
de produits alimentaires
L...]
2. Les Ministres reconnaissent que, pendant la mise
en oeuvre du programme de réforme conduisant à une
libéralisation accrue du commerce des produits agricoles, les pays les
moins avancés et les pays en développement importateurs nets de
produits alimentaires risquent de subir des effets négatifs pour ce qui
est de disposer d'approvisionnements adéquats en produits alimentaires
de base provenant de sources extérieures suivant des modalités et
à des conditions raisonnables, y compris d'avoir des difficultés
à court terme à financer des niveaux normaux d'importations
commerciales de produits alimentaires de base.
3. Les Ministres conviennent donc d'établir
des mécanismes appropriés pour faire en sorte que la mise en
oeuvre des résultats du Cycle d'Uruguay en matière de commerce
des produits agricoles ne soit pas préjudiciable à la mise
à disposition de l'aide alimentaire à un niveau qui soit
suffisant pour continuer d'aider à répondre aux besoins
alimentaires des pays en développement, en particulier les pays les
moins avancés et les pays en développement importateurs nets de
produits alimentaires. A cette fin, les Ministres conviennent:
i) d'examiner le niveau de l'aide alimentaire établi
périodiquement par le Comité de l'aide alimentaire en vertu de la
Convention de 1986 relative à l'aide alimentaire et d'engager des
négociations dans l'enceinte appropriée pour établir un
niveau d'engagements en matière d'aide alimentaire qui soit suffisant
pour répondre aux besoins légitimes des pays en
développement pendant la mise en oeuvre du programme de
réforme;
ii) d'adopter des lignes directrices pour faire en sorte
qu'une part croissante des produits alimentaires de base soit fournie aux pays
les moins avancés et aux pays en développement importateurs nets
de produits alimentaires, intégralement à titre de don et/ou
à des conditions favorables appropriées, conformément
à l'article IV de la Convention de 1986 relative à l'aide
alimentaire;
iii) de prendre pleinement en considération, dans le
contexte de leurs programmes d'aide, les demandes d'assistance technique et
financière des pays les moins avancés et des pays en
développement importateurs nets de produits alimentaires pour leur
permettre d'améliorer leur productivité et leur infrastructure
agricoles.
4. Les Ministres conviennent en outre de faire en
sorte que tout accord se rapportant à des crédits à
l'exportation de produits agricoles prévoie de manière
appropriée un traitement différencié en faveur des pays
les moins avancés et des pays en développement importateurs nets
de produits alimentaires.
5. Les Ministres reconnaissent que, par suite du
Cycle d'Uruguay, certains pays en développement risquent d'avoir
à court terme des difficultés à financer des niveaux
normaux d'importations commerciales et que ces pays pourraient être admis
à tirer sur les ressources d'institutions financières
internationales, disponibles au titre des facilités existantes ou de
facilités qui pourraient être créées, dans le
contexte de programmes d'ajustement.
107
ANNEXE VIII
DECISION SUR LE COMMERCE DES SERVICES ET L'ENVIRONNEMENT
(Extrait)
Les Ministres décident de recommander que le
Conseil du commerce des services adopte à sa première
réunion la décision ci-après.
Le Conseil du commerce des services,
Reconnaissant que les mesures nécessaires
à la protection de l'environnement peuvent entrer en conflit avec les
dispositions de l'Accord, et
Notant que, puisque les mesures nécessaires
à la protection de l'environnement se caractérisent par le fait
qu'elles ont pour objectif la protection de la santé et de la vie des
personnes et des animaux ou la préservation des végétaux,
il n'est peut-être pas nécessaire de prévoir d'autres
dispositions que celles de l'alinéa b) de l'article XIV,
Décide ce qui suit:
1. Pour déterminer s'il serait nécessaire de
modifier l'article XIV de l'Accord afin de tenir compte de ces mesures, il
invite le Comité du commerce et de l'environnement à examiner les
relations entre le commerce des services et l'environnement, y compris la
question du développement durable, et à présenter à
ce sujet un rapport comportant éventuellement des recommandations. Le
Comité étudiera aussi la pertinence des accords
intergouvernementaux sur l'environnement et leurs rapports avec l'Accord.
2. Le Comité fera rapport sur les résultats de
ses travaux à la première réunion biennale que la
Conférence ministérielle tiendra après l'entrée en
vigueur de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce.
108
ANNEXE IX
Décision sur le Commerce et
Environnement
Les Ministres, réunis à l'occasion de
la signature de l'Acte final reprenant les résultats des
Négociations commerciales multilatérales du Cycle d'Uruguay
à Marrakech le 15 avril 1994,
Rappelant le préambule de l'Accord instituant
l'Organisation mondiale du commerce (OMC), qui dispose que les "rapports [des
Membres] dans le domaine commercial et économique devraient être
orientés vers le relèvement des niveaux de vie, la
réalisation du plein emploi et d'un niveau élevé et
toujours croissant du revenu réel et de la demande effective, et
l'accroissement de la production et du commerce de marchandises et de services,
tout en permettant l'utilisation optimale des ressources mondiales
conformément à l'objectif de développement durable, en vue
à la fois de protéger et préserver l'environnement et de
renforcer les moyens d'y parvenir d'une manière qui soit compatible avec
leurs besoins et soucis respectifs à différents niveaux de
développement économique," Prenant note:
- de la Déclaration de Rio sur l'environnement et le
développement, d'Action 21, et de son suivi au GATT, tel qu'il a
été présenté dans la déclaration du
Président du Conseil des Représentants à la 48ème
session des PARTIES CONTRACTANTES en décembre 1992, ainsi que des
travaux du Groupe sur les mesures relatives à l'environnement et le
commerce international, du Comité du commerce et du développement
et du Conseil des Représentants,
Considérant qu'il ne devrait pas y avoir, et
qu'il n'y a pas nécessairement, de contradiction au plan des politiques
entre la préservation et la sauvegarde d'un système commercial
multilatéral ouvert, non-discriminatoire et équitable d'une part
et les actions visant à protéger l'environnement et à
promouvoir le développement durable d'autre part,
Désireux de coordonner les politiques dans le
domaine du commerce et de l'environnement, et cela sans dépasser le
cadre du système commercial multilatéral, qui est limité
aux politiques commerciales et aux aspects des politiques environnementales qui
touchent au commerce et qui peuvent avoir des effets notables sur les
échanges de ses membres, Décident:
- de charger le Conseil général de l'OMC,
à sa première réunion, d'établir un Comité
du commerce et de l'environnement ouvert à tous les Membres de l'OMC qui
présentera un rapport à la première réunion
biennale que la Conférence ministérielle tiendra après
l'entrée en vigueur de l'OMC, au cours de laquelle les travaux et le
mandat du Comité seront examinés, à la lumière des
recommandations du Comité,
- que la Décision du CNC du 15 décembre 1993 dont
une partie est libellée comme suit:
"a) en vue d'identifier les relations entre les mesures
commerciales et les mesures environnementales de manière à
promouvoir le développement durable,
b) en vue de faire des recommandations appropriées pour
déterminer s'il y a lieu de modifier les dispositions du système
commercial multilatéral, en en respectant le caractère ouvert,
équitable et non-discriminatoire, pour ce qui concerne, notamment:
- que le Comité du commerce et de l'environnement
examinera le programme de travail envisagé dans la Décision sur
le commerce des services et l'environnement et les dispositions pertinentes des
ADPIC.
109
- la nécessité d'élaborer des
règles pour accroître les interactions positives des mesures
commerciales et environnementales, afin de promouvoir le développement
durable, en tenant spécialement compte des besoins des pays en
développement, en particulier des moins avancés d'entre eux, et -
la prévention des mesures commerciales protectionnistes, et
l'adhésion à des disciplines multilatérales efficaces pour
garantir la capacité du système commercial multilatéral de
prendre en compte les objectifs environnementaux énoncés dans
Action 21 et dans la Déclaration de Rio, en particulier le Principe 12,
et
- la surveillance des mesures commerciales appliquées
à des fins de protection de l'environnement, des aspects des mesures
environnementales qui touchent au commerce et qui peuvent avoir des effets
notables sur les échanges et de l'application effective des disciplines
multilatérales régissant ces mesures," constitue, avec ce qui est
énoncé dans le préambule ci-dessus, le mandat du
Comité du commerce et de l'environnement,
- que, dans le cadre de ce mandat, et pour faire en sorte que
les politiques en matière de commerce international et les politiques
environnementales se renforcent mutuellement, le Comité traitera au
départ les points ci-après, au sujet desquels toute question
pertinente pourra être soulevée: - rapports entre les dispositions
du système commercial multilatéral et les mesures commerciales
prises à des fins de protection de l'environnement, y compris celles qui
relèvent d'accords environnementaux multilatéraux;
- rapports entre les politiques environnementales qui
intéressent le commerce et les mesures environnementales ayant des
effets notables sur le commerce et les dispositions du système
commercial multilatéral;
- rapports entre les dispositions du système commercial
multilatéral et:
a) les impositions et taxes appliquées à des fins
de protection de l'environnement,
b) les prescriptions, établies à des fins de
protection de l'environnement, relatives aux produits, y compris les normes et
règlements techniques et les prescriptions en matière
d'emballage, d'étiquetage et de recyclage;
- dispositions du système commercial
multilatéral pour ce qui est de la transparence des mesures commerciales
appliquées à des fins de protection de l'environnement et des
mesures et prescriptions environnementales qui ont des effets notables sur le
commerce;
- rapports entre les mécanismes de règlement des
différends du système commercial multilatéral et ceux qui
sont prévus dans les accords environnementaux multilatéraux;
- effet des mesures environnementales sur l'accès aux
marchés, notamment pour les pays en développement et en
particulier les moins avancés d'entre eux, et avantages environnementaux
de l'élimination des restrictions et distorsions des échanges;
110
ANNEXE X
ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE
-WT/MIN(01)/DEC/1
CONFÉRENCE MINISTÉRIELLE - Quatrième
session - Doha, 9 - 14 novembre 2001 (01-5859)
DÉCLARATION MINISTÉRIELLE Adoptée le 14
novembre 2001 (EXTRAIT)
1. Le système commercial multilatéral
qu'incarne l'Organisation mondiale du commerce a largement contribué
à la croissance économique, au développement et à
l'emploi tout au long des 50 dernières années. Nous sommes
résolus, compte tenu en particulier du ralentissement économique
mondial, à poursuivre le processus de réforme et de
libéralisation des politiques commerciales, faisant ainsi en sorte que
le système joue pleinement son rôle pour ce qui est de favoriser
la reprise, la croissance et le développement. Nous réaffirmons
donc avec force les principes et les objectifs énoncés dans
l'Accord de Marrakech instituant l'Organisation mondiale du commerce et nous
engageons à rejeter le recours au protectionnisme.
2. Le commerce international peut jouer un rôle majeur
dans la promotion du développement économique et la
réduction de la pauvreté. Nous reconnaissons la
nécessité pour toutes nos populations de tirer parti des
possibilités accrues et des gains de bien-être que le
système commercial multilatéral génère. La
majorité des Membres de l'OMC sont des pays en développement.
Nous visons à mettre leurs besoins et leurs intérêts au
centre du Programme de travail adopté dans la présente
déclaration. Rappelant le Préambule de l'Accord de Marrakech,
nous continuerons à faire des efforts positifs pour que les pays en
développement, et en particulier les moins avancés d'entre eux,
s'assurent une part de la croissance du commerce mondial qui corresponde aux
besoins de leur développement économique. Dans ce contexte, un
meilleur accès aux marchés, des règles
équilibrées, ainsi que des programmes d'assistance technique et
de renforcement des capacités bien ciblés et disposant d'un
financement durable ont des rôles importants à jouer.
3. Nous reconnaissons la vulnérabilité
particulière des pays les moins avancés et les difficultés
structurelles spéciales qu'ils rencontrent dans l'économie
mondiale. Nous sommes déterminés à remédier
à la marginalisation des pays les moins avancés dans le commerce
international et à améliorer leur participation effective au
système commercial multilatéral. Nous rappelons les engagements
pris par les Ministres à nos réunions de Marrakech, Singapour et
Genève, et par la communauté internationale à la
troisième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins
avancés à Bruxelles, pour aider les pays les moins avancés
à réaliser une intégration véritable et fructueuse
dans le système commercial multilatéral et l'économie
mondiale. Nous sommes résolus à ce que l'OMC joue son rôle
pour ce qui est de faire fond effectivement sur ces engagements dans le cadre
du Programme de travail que nous établissons.
4. Nous soulignons notre attachement à l'OMC en tant
qu'enceinte unique pour l'élaboration de règles commerciales et
la libéralisation des échanges au niveau mondial, tout en
reconnaissant également que
111
les accords commerciaux régionaux peuvent jouer un
rôle important pour ce qui est de promouvoir la libéralisation et
l'expansion des échanges et de favoriser le développement.
[...]
PROGRAMME DE TRAVAIL
QUESTIONS ET PRÉOCCUPATIONS LIÉES À
LA MISE EN OEUVRE
AGRICULTURE
13. Nous reconnaissons les travaux déjà
entrepris dans les négociations engagées au début de 2000
au titre de l'article 20 de l'Accord sur l'agriculture, y compris le grand
nombre de propositions de négociation présentées au nom de
121 Membres au total. Nous rappelons l'objectif à long terme
mentionné dans l'Accord, qui est d'établir un système de
commerce équitable et axé sur le marché au moyen d'un
programme de réforme fondamentale comprenant des règles
renforcées et des engagements spécifiques concernant le soutien
et la protection afin de remédier aux restrictions et distorsions
touchant les marchés agricoles mondiaux et de les prévenir. Nous
reconfirmons notre adhésion à ce programme. Faisant fond sur les
travaux accomplis à ce jour et sans préjuger du résultat
des négociations, nous nous engageons à mener des
négociations globales visant à: des améliorations
substantielles de l'accès aux marchés; des réductions de
toutes les formes de subventions à l'exportation, en vue de leur retrait
progressif; et des réductions substantielles du soutien interne ayant
des effets de distorsion des échanges. Nous convenons que le traitement
spécial et différencié pour les pays en
développement fera partie intégrante de tous les
éléments des négociations et sera incorporé dans
les Listes de concessions et d'engagements et selon qu'il sera approprié
dans les règles et disciplines à négocier, de
manière à être effectif d'un point de vue
opérationnel et à permettre aux pays en développement de
tenir effectivement compte de leurs besoins de développement, y compris
en matière de sécurité alimentaire et de
développement rural. Nous prenons note des considérations autres
que d'ordre commercial reflétées dans les propositions de
négociation présentées par les Membres et confirmons que
les considérations autres que d'ordre commercial seront prises en compte
dans les négociations comme il est prévu dans l'Accord sur
l'agriculture.
[...]
SERVICES
15. Les négociations sur le commerce des services
seront menées en vue de promouvoir la croissance économique de
tous les partenaires commerciaux et le développement des pays en
développement et des pays les moins avancés. Nous reconnaissons
les travaux déjà entrepris dans les négociations,
engagées en janvier 2000 au titre de l'article XIX de l'Accord
général sur le commerce des services, et le grand nombre de
propositions présentées par les Membres sur un large
éventail de secteurs et plusieurs questions horizontales, ainsi que sur
le mouvement des personnes physiques. Nous confirmons les Lignes directrices et
procédures pour les négociations adoptées par le Conseil
du commerce des services le 28 mars 2001 comme étant la base sur
laquelle poursuivre les négociations,
112
en vue d'atteindre les objectifs de l'Accord
général sur le commerce des services, tels qu'ils sont
énoncés dans le Préambule, l'article IV et l'article XIX
de cet accord. Les participants présenteront des demandes initiales
d'engagements spécifiques d'ici au 30 juin 2002 et des offres initiales
d'ici au 31 mars 2003.
ACCÈS AUX MARCHÉS POUR LES PRODUITS NON
AGRICOLES
16. Nous convenons de négociations qui viseront, selon
des modalités à convenir, à réduire ou, selon qu'il
sera approprié, à éliminer les droits de douane, y compris
à réduire ou éliminer les crêtes tarifaires, les
droits élevés et la progressivité des droits, ainsi que
les obstacles non tarifaires, en particulier pour les produits dont
l'exportation présente un intérêt pour les pays en
développement. La gamme de produits visés sera complète et
sans exclusion a priori. Les négociations tiendront pleinement
compte des besoins et intérêts spéciaux des pays en
développement et pays les moins avancés participants, y compris
au moyen d'une réciprocité qui ne soit pas totale pour ce qui est
des engagements de réduction, conformément aux dispositions
pertinentes de l'article XXVIIIbis du GATT de 1994 et aux dispositions
citées au paragraphe 50 ci-dessous. À cette fin, les
modalités à convenir incluront des études et des mesures
de renforcement des capacités appropriées pour aider les pays les
moins avancés à participer effectivement aux
négociations.
ASPECTS DES DROITS DE PROPRIÉTÉ
INTELLECTUELLE QUI TOUCHENT AU COMMERCE
17. Nous soulignons l'importance que nous attachons à
la mise en oeuvre et à l'interprétation de l'Accord sur les
aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au
commerce (Accord sur les ADPIC) d'une manière favorable à la
santé publique, en promouvant à la fois l'accès aux
médicaments existants et la recherche-développement concernant de
nouveaux médicaments et, à cet égard, nous adoptons une
Déclaration distincte.
18. En vue d'achever les travaux entrepris au Conseil des
aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au
commerce (Conseil des ADPIC) sur la mise en oeuvre de l'article 23:4, nous
convenons de négocier l'établissement d'un système
multilatéral de notification et d'enregistrement des indications
géographiques pour les vins et spiritueux d'ici à la
cinquième session de la Conférence ministérielle. Nous
notons que les questions relatives à l'extension de la protection des
indications géographiques prévue à l'article 23 à
des produits autres que les vins et spiritueux seront traitées au
Conseil des ADPIC conformément au paragraphe 12 de la présente
déclaration.
19. Nous donnons pour instruction au Conseil des ADPIC, dans
la poursuite de son programme de travail, y compris au titre du réexamen
de l'article 27:3 b), de l'examen de la mise en oeuvre de l'Accord sur les
ADPIC au titre de l'article 71:1 et des travaux prévus
conformément au paragraphe 12 de la présente déclaration,
d'examiner, entre autres choses, la relation entre l'Accord sur les ADPIC et la
Convention sur la diversité biologique, la protection des savoirs
traditionnels et du folklore et autres faits nouveaux pertinents relevés
par les Membres conformément à l'article 71:1. Dans la
réalisation de ces travaux, le Conseil des ADPIC sera guidé par
les objectifs et principes énoncés aux articles 7 et 8 de
l'Accord sur les ADPIC et tiendra pleinement compte de la dimension
développement.
LIENS ENTRE COMMERCE ET INVESTISSEMENT
113
20. Reconnaissant les arguments en faveur d'un cadre
multilatéral destiné à assurer des conditions
transparentes, stables et prévisibles pour l'investissement
transfrontières à long terme, en particulier l'investissement
étranger direct, qui contribuera à l'expansion du commerce, et la
nécessité d'une assistance technique et d'un renforcement des
capacités accrus dans ce domaine ainsi qu'il est indiqué au
paragraphe 21, nous convenons que des négociations auront lieu
après la cinquième session de la Conférence
ministérielle sur la base d'une décision qui sera prise, par
consensus explicite, à cette session sur les modalités des
négociations.
21. Nous reconnaissons les besoins des pays en
développement et des pays les moins avancés en ce qui concerne un
soutien accru pour une assistance technique et un renforcement des
capacités dans ce domaine, y compris l'analyse et l'élaboration
de politiques de façon qu'ils puissent mieux évaluer les
implications d'une coopération multilatérale plus étroite
pour leurs politiques et objectifs de développement, et le
développement humain et institutionnel. À cette fin, nous
travaillerons en coopération avec les autres organisations
intergouvernementales pertinentes, y compris la CNUCED, et par les voies
régionales et bilatérales appropriées, pour fournir une
assistance renforcée et dotée de ressources adéquates pour
répondre à ces besoins.
22. Jusqu'à la cinquième session, la suite des
travaux du Groupe de travail des liens entre commerce et investissement sera
centrée sur la clarification de ce qui suit: portée et
définition; transparence; nondiscrimination; modalités pour des
engagements avant établissement reposant sur une approche fondée
sur des listes positives de type AGCS; dispositions relatives au
développement; exceptions et sauvegardes concernant la balance des
paiements; consultations et règlement des différends entre les
Membres. Tout cadre devrait refléter de manière
équilibrée les intérêts des pays d'origine et des
pays d'accueil, et tenir dûment compte des politiques et objectifs de
développement des gouvernements d'accueil ainsi que de leur droit de
réglementer dans l'intérêt général. Les
besoins spéciaux des pays en développement et des pays les moins
avancés en matière de développement, de commerce et de
finances devraient être pris en compte en tant que partie
intégrante de tout cadre, qui devrait permettre aux Membres de
contracter des obligations et des engagements qui correspondent à leurs
besoins et circonstances propres. Il faudrait prendre dûment en
considération les autres dispositions pertinentes de l'OMC. Il faudrait
tenir compte, selon qu'il sera approprié, des arrangements
bilatéraux et régionaux sur l'investissement existants.
INTERACTION DU COMMERCE ET DE LA POLITIQUE DE LA
CONCURRENCE
23. Reconnaissant les arguments en faveur d'un cadre
multilatéral destiné à améliorer la contribution de
la politique de la concurrence au commerce international et au
développement, et la nécessité d'une assistance technique
et d'un renforcement des capacités accrus dans ce domaine ainsi qu'il
est indiqué au paragraphe 24, nous convenons que des négociations
auront lieu après la cinquième session de la Conférence
ministérielle sur la base d'une décision qui sera prise, par
consensus explicite, à cette session sur les modalités des
négociations.
24. Nous reconnaissons les besoins des pays en
développement et des pays les moins avancés en ce qui concerne un
soutien accru pour une assistance technique et un renforcement des
capacités dans ce domaine, y compris l'analyse et l'élaboration
de politiques de façon qu'ils puissent mieux évaluer les
implications d'une coopération multilatérale plus étroite
pour leurs politiques et objectifs de développement, et le
développement humain et institutionnel. À cette fin, nous
travaillerons en
28. Au vu de l'expérience et de l'application
croissante de ces instruments par les Membres, nous convenons de
négociations visant à clarifier et à améliorer les
disciplines prévues par les Accords sur la
114
coopération avec les autres organisations
intergouvernementales pertinentes, y compris la CNUCED, et par les voies
régionales et bilatérales appropriées, pour fournir une
assistance renforcée et dotée de ressources adéquates pour
répondre à ces besoins.
25. Jusqu'à la cinquième session, la suite des
travaux du Groupe de travail de l'interaction du commerce et de la politique de
la concurrence sera centrée sur la clarification de ce qui suit:
principes fondamentaux, y compris transparence, non-discrimination et
équité au plan de la procédure, et dispositions relatives
aux ententes injustifiables; modalités d'une coopération
volontaire; et soutien en faveur du renforcement progressif des institutions
chargées de la concurrence dans les pays en développement au
moyen du renforcement des capacités. Il sera pleinement tenu compte des
besoins des pays en développement et pays les moins avancés
participants et une flexibilité appropriée sera prévue
pour y répondre.
TRANSPARENCE DES MARCHÉS PUBLICS
26. Reconnaissant les arguments en faveur d'un accord
multilatéral sur la transparence des marchés publics et la
nécessité d'une assistance technique et d'un renforcement des
capacités accrus dans ce domaine, nous convenons que des
négociations auront lieu après la cinquième session de la
Conférence ministérielle sur la base d'une décision qui
sera prise, par consensus explicite, à cette session sur les
modalités des négociations. Ces négociations feront fond
sur les progrès réalisés jusque-là au Groupe de
travail de la transparence des marchés publics et tiendront compte des
priorités des participants en matière de développement,
spécialement celles des pays les moins avancés participants. Les
négociations seront limitées aux aspects relatifs à la
transparence et ne restreindront donc pas la possibilité pour les pays
d'accorder des préférences aux fournitures et fournisseurs
nationaux. Nous nous engageons à faire en sorte qu'une assistance
technique et un soutien pour le renforcement des capacités
adéquats soient fournis à la fois pendant les négociations
et après leur conclusion.
FACILITATION DES ÉCHANGES
27. Reconnaissant les arguments en faveur de
l'accélération accrue du mouvement, de la mainlevée et du
dédouanement des marchandises, y compris les marchandises en transit, et
la nécessité d'une assistance technique et d'un renforcement des
capacités accrus dans ce domaine, nous convenons que des
négociations auront lieu après la cinquième session de la
Conférence ministérielle sur la base d'une décision qui
sera prise, par consensus explicite, à cette session sur les
modalités des négociations. Jusqu'à la cinquième
session, le Conseil du commerce des marchandises examinera et, selon qu'il sera
approprié, clarifiera et améliorera les aspects pertinents des
articles V, VIII et X du GATT de 1994 et identifiera les besoins et les
priorités des Membres, en particulier des pays en développement
et des pays les moins avancés, en matière de facilitation des
échanges. Nous nous engageons à faire en sorte qu'une assistance
technique et un soutien pour le renforcement des capacités
adéquats soient fournis dans ce domaine.
RÈGLES DE L'OMC
115
mise en oeuvre de l'article VI du GATT de 1994 et sur les
subventions et les mesures compensatoires, tout en préservant les
concepts et principes fondamentaux ainsi que l'efficacité de ces accords
et leurs instruments et objectifs, et en tenant compte des besoins des
participants en développement et les moins avancés. Dans la phase
initiale des négociations, les participants indiqueront les
dispositions, y compris les disciplines concernant les pratiques ayant des
effets de distorsion des échanges, qu'ils cherchent à clarifier
et à améliorer dans la phase ultérieure. Dans le contexte
de ces négociations, les participants viseront aussi à clarifier
et à améliorer les disciplines de l'OMC concernant les
subventions aux pêcheries, en tenant compte de l'importance de ce secteur
pour les pays en développement. Nous notons que les subventions aux
pêcheries sont également mentionnées au paragraphe 31.
29. Nous convenons également de négociations
visant à clarifier et à améliorer les disciplines et
procédures prévues par les dispositions existantes de l'OMC qui
s'appliquent aux accords commerciaux régionaux. Les négociations
tiendront compte des aspects des accords commerciaux régionaux relatifs
au développement.
MÉMORANDUM D'ACCORD SUR LE RÈGLEMENT DES
DIFFÉRENDS
30. Nous convenons de négociations sur les
améliorations et clarifications à apporter au Mémorandum
d'accord sur le règlement des différends. Les négociations
devraient être fondées sur les travaux effectués jusqu'ici
ainsi que sur toutes propositions additionnelles des Membres, et viser à
convenir d'améliorations et
de clarifications au plus tard en mai 2003, date à
laquelle nous prendrons des mesures pour faire en sorte que les
résultats entrent en vigueur ensuite dès que possible.
COMMERCE ET ENVIRONNEMENT
31. Afin de renforcer le soutien mutuel du commerce et de
l'environnement, nous convenons de négociations, sans préjuger de
leur résultat, concernant:
i) la relation entre les règles de l'OMC existantes et
les obligations commerciales spécifiques énoncées dans les
accords environnementaux multilatéraux (AEM). La portée des
négociations sera limitée à l'applicabilité de ces
règles de l'OMC existantes entre les parties à l'AEM en question.
Les négociations seront sans préjudice des droits dans le cadre
de l'OMC de tout Membre qui n'est pas partie à l'AEM en question;
ii) des procédures d'échange de renseignements
régulier entre les Secrétariats des AEM et les Comités de
l'OMC pertinents, ainsi que les critères pour l'octroi du statut
d'observateur;
iii) la réduction ou, selon qu'il sera
approprié, l'élimination des obstacles tarifaires et non
tarifaires visant les biens et services environnementaux. Nous notons que les
subventions aux pêcheries entrent dans le cadre des négociations
prévues au paragraphe 28.
32. Nous donnons pour instruction au Comité du commerce
et de l'environnement, dans la poursuite de ses travaux sur tous les points de
son programme de travail dans le cadre de son mandat actuel, d'accorder une
attention particulière aux éléments suivants:
116
i) effet des mesures environnementales sur l'accès aux
marchés, spécialement en ce qui concerne les pays en
développement, en particulier les moins avancés d'entre eux, et
situations dans lesquelles l'élimination ou la réduction des
restrictions et des distorsions des échanges serait
bénéfique pour le commerce, l'environnement et le
développement;
ii) dispositions pertinentes de l'Accord sur les aspects des
droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce;
et
iii) prescriptions en matière d'étiquetage
à des fins environnementales. Les travaux sur ces questions devraient
entre autres choses consister à identifier la nécessité
éventuelle de clarifier les règles pertinentes de l'OMC. Le
Comité fera rapport à la cinquième session de la
Conférence ministérielle, et fera des recommandations, dans les
cas où cela sera approprié, en ce qui concerne l'action future, y
compris l'opportunité de négociations. Le résultat de ces
travaux ainsi que les négociations menées au titre du paragraphe
31 i) et ii) seront compatibles avec le caractère ouvert et non
discriminatoire du système commercial multilatéral,
n'accroîtront pas ou ne diminueront pas les droits et obligations des
Membres au titre des accords de l'OMC existants, en particulier l'Accord sur
l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires, et ne modifieront pas
non plus l'équilibre entre ces droits et obligations, et tiendront
compte des besoins des pays en développement et des pays les moins
avancés.
33. Nous reconnaissons l'importance de l'assistance technique
et du renforcement des capacités dans le domaine du commerce et de
l'environnement pour les pays en développement, en particulier les moins
avancés d'entre eux. Nous encourageons aussi le partage des
connaissances spécialisées et des expériences avec les
Membres qui souhaitent effectuer des examens environnementaux au niveau
national. Un rapport sera établi sur ces activités pour la
cinquième session.
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