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Effets de débordement des politiques budgétaires en union monétaire hétérogène: cas de l'union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA)


par Ismaila SANGHARE
Université Cheikh Anta Diop Dakar (UCAD) - Doctorat  2021
  

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SECTION II : ANALYSE DES EXTERNALITES BUDGETAIRES DANS LA ZONE

Selon la théorie keynésienne et ses prolongements, les politiques budgétaires produisent bel et bien des externalités positives sur les économies. A contrario, l'approche libérale et ses prolongements soutiennent purement la thèse d'externalités négatives comme l'effet d'éviction ayant tendance à faire baisser l'investissement privé. En premier, nous examinons les théories relatives aux externalités budgétaires dans une union monétaire et en second, nous étudions la nature des effets induits par cette politique économique.II.1- Approche de la Nouvelle Économie Keynésienne (NEK)

La règle de Mundell (1961) prédit qu'en régime de change fixe, la politique budgétaire est efficace. En effet, la hausse des prix va baisser le solde courant à travers une appréciation du taux de change réel ; ce qui va conduire à un effet d'éviction. Si les prix sont rigides et s'il existe des capacités de production excédentaires, la demande globale détermine le revenu global. Pour pallier les déficiences du marché, et favoriser la mise en place d'un cercle vertueux de croissance économique, Keynes décrit et justifie l'intervention de l'Etat dans l'économie.

Levin (1983), inspiré par le modèle Mundell-Fleming (1962) a appliqué au cas d'une petite zone de taux de change fixes entre deux pays en supposant une mobilité imparfaite des capitaux entre cette zone et le reste du monde. Dans ce modèle de Levin, l'hypothèse de mobilité parfaite des capitaux au plan internationale implique qu'une relance budgétaire dans un pays est inévitablement une « politique d'appauvrissement du voisin » parce que le revenu national dans l'autre pays doit diminuer pour maintenir l'équilibre du marché monétaire de la zone (pour un taux d'intérêt donné et une offre de monnaie constante).

Lorsque l'activité économique ralentit, les dépenses publiques ont tendance à s'accélérer tandis que les rentrées de recettes ralentissent mécaniquement. Cela qui entraine une détérioration du solde budgétaire. De ce fait, le montant des recettes fiscales diminue et le volume des dépenses augmente. Aussi, la détérioration de l'activité économique provoque un transfert de revenu des administrations publiques vers les ménages et les entreprises ; ce qui atténue l'effet du ralentissement économique sur les revenus de ces derniers. C'est le rôle de stabilisateur automatique de la politique budgétaire. Cet effet est également relevé par Solow (2002) dans la réhabilitation de la politique budgétaire. Il soutient que l'effet stabilisateur est apparent du simple fait que la variabilité du revenu agrégé sera plus faible en réponse à une variabilité donnée de la dépenseautonome. Dès lors, l'effet stabilisateur est d'autant plus fort que le système d'imposition du revenu est plus progressif. Cette progressivité est mesurée par l'élasticité du taux marginal par rapport au revenu agrégé.

Même si la théorie montre l'efficacité de la politique budgétaire (effets de débordement positifs) sur les économies des pays à travers le multiplicateur Keynésien, elle fait encore l'objet de vives critiques. Lorsque les prix sont rigides, et l'investissement sensible au taux d'intérêt ; le financement des dépenses publiques par l'impôt a un effet nul du fait de l'effet d'éviction : en effet, la hausse des dépenses publiques va augmenter le taux d'intérêt, par la suite il y aura une baisse de l'investissement. Cette baisse peut être négligeable si l'investissement est fortement sensible à la demande.

II.2- Approche de la Nouvelle Économie Classique (NEC)

Friedman (1976) et Schwartz (1963) ont rappelé compte tenu des hypothèses d'anticipations adaptatives et de taux de chômage naturel, qu'une politique budgétaire expansionniste entraîne un effet d'éviction total, et qu'une politique monétaire se traduit inévitablement par une hausse du niveau général des prix (courbe de Phillips verticale à long terme, pas de relation inflation/chômage). De telles théories ont trouvé un écho favorable chez les théoriciens de la nouvelle économie classique ; notamment Lucas (1973) ; Barro, (1974) ; Prescott (1977) qui ont souligné qu'à partir des hypothèses d'ajustements continus des marchés et d'anticipations rationnelles, que les politiques de relance n'avaient aucun effet sur l'activité dans la mesure où les agents anticipent les effets.

Barro (1974), sur le plan théorique, met en évidence le « théorème de l'équivalence ricardienne » selon laquelle les dépenses gouvernementales nettes pouvaient compenser les insuffisances de la demande dans le secteur privé. On considérait désormais que les politiques budgétaires étaient sans effet sur le monde réel, si ce n'est qu'elles pouvaient avoir des conséquences inflationnistes sur le long terme. Les effets de l'augmentation des dépenses publiques sont les mêmes ;qu'elles soient financées par la hausse des impôts ou par l'emprunt. Seule une politique surprenant les agents aura un effet par le biais des mécanismes d'offre. La discipline budgétaire était considérée comme nécessaire pour assurer la stabilité des prix, contrairement aux institutions qui oeuvraient activement à la stabilité macroéconomique. Pour Lucas (1973), seule une politique monétaire non anticipée pourrait avoir des effets sur le niveau de production. Cette théorie milite pour l'abandon des politiques discrétionnaires.

Sur le plan empirique, Alesina et Perotti (1995) montrent qu'il peut exister un biais en faveur du déficit budgétaire. En effet, les agents privés peuvent entre autres ne pas percevoir la contrainte budgétaire de l'Etat stipulant qu'un déficit soit comblé ultérieurement. Les électeurs peuvent délibérément souhaiter transférer le poids de la dette publique sur les futures générations, ou encore percevoir que les gouvernements peuvent se livrer à une utilisation stratégique des dépenses publiques en engageant les futurs dirigeants sur des dépenses correspondant à leurs propres préférences.

Au regard des approches théoriques, on peut déduire une controverse sur la nature des effets de débordements des politiques budgétaires. Certains trouvent les externalités favorables à l'activité économique (soutien à la croissance, situation de plein-emploi, etc.) d'autres par contre y voient un dérapage (effet d'éviction, entrave à la liberté du marché, etc.) et une gabégie dans la gestion des finances publiques (déficit hors norme).

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