Annexe 2
Les petits bonheurs de la vie...
Marcher au bord du Canal du Loing, écouter le chant
des oiseaux, les canards qui se baignent, et croiser des promeneurs,
Entendre le bruit de nos pas qui craquent sur
l'épaisseur des sous-bois, être au calme et découvrir un
tapis de perce-neige, la première fleur de l'hiver,
Être ému par un animal sauvage, un renard,
une hermine, ou des animaux de ferme comme des chèvres, leur parler,
faire des promenades avec des chiens,
Être émerveillé par un renard à
moitié enfoncé dans la neige, son pelage roux avec un peu de gris
et sa queue qui traine dans la neige,
Être touchée par les Aubracs sur la montagne
et leur regard posé sur nous, elles semblent nous reconnaître,
elles soufflent si elles ont peur ou sentent un danger,
Être apaisée par le bruit de la
rivière, la petite cascade qui éclabousse, avec la montagne en
arrière-plan, admirer les couleurs : le jaune des genêts et le
vert des mousses, des herbes, des lichens et des sapins, pêcher des
truites à la main...
38
Texte élaboré à la manière de
Françoise Héritier (Le sel de la vie, Odile Jacob,
2012).
39
Annexe 3
Mardi 9 juin 2020, dans le cadre du Club
Actualité-Débat, à propos de la mort de George Floyd, cet
homme noir tué par un policier américain, nous avons
abordé la question suivante :
Le racisme aux Etats-Unis et en France
La situation aux États-Unis
Le racisme aux Etats-Unis a quasiment été un
racisme d'Etat, au moment de la période de l'esclavage : les USA se sont
construits et ont prospéré grâce à lui. La culture
du coton en particulier était faite par les esclaves, de grandes
filatures aux USA exportaient leurs fils et vêtements de coton (le jean,
entre autres choses).
La guerre de Sécession, au 19 ème
siècle, est une guerre civile entre les états du nord et
les états du sud qui s'opposent sur différents points et
notamment sur la question des esclaves, majoritaires dans les états du
sud qui cultivent le coton exporté vers l'Europe.
Sécession = séparation, entre les
sudistes et les nordistes. Certains états, ceux du sud des
Etats-Unis ont refusé l'abolition de l'esclavage. Ils étaient
fortement racistes car c'est dans ces états que se trouvaient la plupart
des terres agricoles travaillées par les esclaves, alors qu'au nord, les
états étaient plutôt industriels, plus ouvriers.
Dans les états du sud, le racisme, la haine des noirs a
perduré, même après l'abolition de l'esclavage à la
fin de la guerre de sécession. C'est ainsi que, dans les états du
sud, il y a eu des lynchages de noirs, des chasses à l'homme, des
maisons des noirs brûlées par les hommes du Ku Klux Klan
(organisation raciste issue de la guerre de sécession), jusque dans les
années 60.
Les deux photographes mentionnés ci-dessous sont des
artistes mondialement connus qui ont permis au monde entier de découvrir
l'existence de la ségrégation raciale aux Etats-Unis dans les
années 50.
Sur la photo prise par Elliot Erwitt, la
scène se passe dans des lavabos publics. Le lavabo réservé
aux noirs ou « personnes de couleur » (« Colored ») est
plus petit, il semble plus sale. En comparaison, celui réservé
aux blancs (« White » en anglais) est plus haut, plus large, et
comporte un bloc réfrigérant offrant de l'eau fraiche.
La photo prise par Robert Frank montre quant
à elle un bus dans lequel on voit que les personnes noires
étaient tenues de s'asseoir au fond du bus, elles ne pouvaient pas
s'installer n'importe où dans les espaces publics
fréquentés également par des blancs (bus, restaurant,
bancs publics...). Ainsi, dans les bus, les meilleures places, celles de
devant, étaient réservés aux blancs, et en priorité
aux hommes. Dans les restaurants, les noirs n'avaient droit qu'aux tables
installées au fond de la salle, dans des espaces mal
éclairés, mal ventilés, mal entretenus : tout était
fait pour les dissuader de fréquenter les mêmes lieux que les
blancs, et
40
tout était organisé de façon à les
humilier. Les villes étaient très
ségréguées, il y avait des ghettos noirs,
c'est-à-dire des quartiers pauvres et mal entretenus,
éloignés des réseaux de transports en commun. Les petits
boulots mal payés étaient effectués par les noirs,
c'était des emplois au service des familles blanches riches et
puissantes : domestique, jardinier, nourrice, cuisinière, balayeur,
livreur...
En 1955, en Alabama, dans la ville de Montgomery, une femme
noire, Rosa Parks, âgée de 42 ans, monte dans un
bus et s'assoit volontairement à l'avant. Elle est arrêtée
et reçoit une amende, mais son geste de protestation contre la
ségrégation raciale va être le déclencheur d'un
gigantesque mouvement de contestation dans la ville de Montgomery. A la
tête de ce mouvement de contestation qui réclame
l'égalité entre les blancs et les noirs, il y a un jeune pasteur
noir, Martin Luther King.
En 1968, Martin Luther King est assassiné. Il avait
prononcé un grand discours qui a fait date, dans lequel il disait
rêver d'une société plus juste, égalitaire,
où blancs et noirs vivraient enfin en harmonie.
Les villes ont pendant longtemps été très
ségréguées aux Etats-Unis, et elles le sont encore. Par
exemple, dans les années 80 (voir la série « Starsky et
Hutch »), les quartiers du Bronx, de Harlem ou de Brooklyn, à New
York, n'étaient peuplés que de noirs pauvres, sans travail, qui
se droguaient...Et, encore aujourd'hui, c'est dans ces quartiers que vivent des
noirs majoritairement. Ce sont des quartiers éloignés de
Manhattan (quartier riche, d'affaires, touristique).
Aux Etats-Unis, il y a toujours de la
ségrégation et un racisme plus ou moins latent : les emplois
subalternes sont majoritairement occupés par des noirs, ils sont
majoritairement arrêtés, condamnés et envoyés en
prison, alors que leur innocence est parfois prouvée quelques temps
après (de très nombreuses erreurs judiciaires concernent des
noirs). Les noirs se font régulièrement tabassés et
même tués par des policiers blancs (Voir images d'Envoyé
Spécial, l'émission de France 2, le jeudi 11 juin 2020).
George Floyd, lui, a été étranglé
plus de 8 minutes sous le genou d'un policier blanc, sans que personne
n'intervienne, par peur de la police qui est souvent toute puissante dans les
quartiers noirs.

41
Photographie prise par Elliott Erwitt, en 1950.

PHOTOGRAPHIE DE ROBERT FRANK, COUVERTURE DE SON LIVRE
« LES AMERICAINS », PUBLIE EN 1958, D'ABORD EN FRANCE PUIS AUX
ETATS-UNIS.
La situation en France
Il existe un phénomène de racisme aussi, qui est
lié à la colonisation et à la décolonisation.
Partout où la France avait des colonies (Dans les pays du Magreb, en
Asie, en Afrique), il y a eu du racisme car ces populations étaient
considérées par les Français comme des populations de
sauvages et non comme des hommes en fait. Ils étaient des «
indigènes ». La France a aussi été
une nation esclavagiste comme les trois quarts de l'Europe au 17 ème et
au 18 ème siècle. Durant cette période, la France a
écrit un Code Noir : un livre qui
considère les esclaves comme des biens meubles et qui fait la liste des
punitions à leur infliger en cas de problèmes avec eux : si un
esclave s'enfuit, on lui coupe la jambe, si il tente de voler de la nourriture,
on lui coupe une main...L'abolition de l'esclavage n'a été
décrétée qu'après la révolution
Française en France...avant que Napoléon ne revienne dessus en
1802. Abolition définitive de l'esclavage en France seulement en
1848.
|
Image du film « La haine » de Mathieu Kassovitz
(1995)
|
42
Le même racisme s'exprime aux Etats Unis et en France
envers les populations immigrées issues de peuples autrefois
colonisés et /ou réduits en esclavage : ce sont ces
populations-là qui ont été logées dans des
bidonvilles dans les années 50-60 en France en périphérie
de Lyon ou de Paris (il y avait 10 000 algériens dans le bidonville de
Nanterre). Ce sont ces gens-là aussi qui étaient employés
dans les usines automobiles de région parisienne et toutes les autres
grandes industries des années 50 à 80.
Aujourd'hui, ce sont ces mêmes populations
immigrées qui habitent dans les banlieues ou quartiers
périphériques des villes où l'emploi n'est pas
présent, où il y a très peu de commerces, où les
transports en commun ne sont pas assez représentés... il faut
1h30 en transport en commun pour parcourir seulement une dizaine de
kilomètres depuis une banlieue comme Chanteloup les Vignes jusqu'au
centre de Paris. Dans ces conditions, difficile de rester motivé pour
aller travailler ou faire des études. D'autant plus qu'il y a de la
discrimination : quand on vient de telle ou telle banlieue, on est souvent
victime de préjugés de la part d'éventuels employeurs
(voyou, délinquant, drogué).
Même dans une ville comme Aurillac, les populations
immigrées se concentrent dans les quartiers populaires
défavorisés où se trouvent des ensembles HLM...La ville,
en France comme aux Etats-Unis manque de mixité sociale. Il manque de la
communication et du mélange entre les différentes populations.
En France, il y a eu des bavures
policières, comme aux Etats-Unis. De jeunes hommes issus de
l'immigration, noirs, ou d'origine arabe, ont été tués par
des policiers (exemple : Malik Oussekine, frappé à mort dans un
hall d'immeuble en 1986, en marge des manifestations étudiantes contre
la loi Devaquet).
Le film « La haine », de Mathieu Kassovitz
en parlait déjà dans les années 90 (bavure
policières, sentiment d'exclusion et désir de revanche chez les
jeunes des quartiers). Trente ans plus tard le film « Les
misérables », porte sur le même sujet...En trente ans,
rien n'a changé.
On sait les difficultés de la police qui est
rejetée quand elle se rend en banlieue mais cela n'a pas toujours
été comme ça. Il y a eu de belles initiatives de
médiation à la fin des années 1990, qui ont hélas
pris fin quand Nicolas Sarkozy est arrivé au Ministère de
l'intérieur : il a sommé les policiers de retrouver le coeur de
leur métier selon lui : la répression, la sanction. Les
initiatives de terrain qui consistaient à faire de la prévention
et de la médiation ont donc pris fin (plus de matchs de foot
jeunes/policiers, mais, à la place, des contrôles renforcés
et des amendes, avec, pour les policiers, des primes en fonction du nombre
d'arrestations = politique du chiffre). Dans le même temps, hélas,
les commissariats de quartiers fermaient dans de nombreuses banlieues et des
postes d'éducateurs disparaissaient.

43
Affiche du film « Les Misérables » , de Ladj
Ly
44
|