Perceptions de l'ethnicisation politique au Cameroun: cas dans l'arrondissement de Dschangpar Jonias KAMWA KAMDE Université de Dschang Cameroun - 2019 |
4.1.2 Réalité de la différence entre les sociétés et les HommesMWEIVIORKA14(*), montre que l'expérience de la différence et celle de l'altérité se sont accompagnées, depuis longtemps des tensions et des violences. Les sociétés sont marquées par une différence de culture, de personnalité, de tradition, de pratique ; Ce qui entraîne ou alors peut entraîner ce que SHUNTINGTON appelle « le choc des civilisations »15(*). Chacun de nous venons de quelque part (campagnes, villages...etc.), nous appartenons à une société particulière (occidentale, Africaine...etc.), bref nous avons été forgés d'une certaine façon et une personnalité de base16(*) nous a été donnée. Si la différence culturelle est devenu préoccupante c'est pour la raison qu'elle est fondatrice de tensions, de conflits, de violences et d'antagonismes qui mobilisent toutessortes d'acteurs au coeur de nos sociétés et qui questionnent notre capacité à vivre ensemble17(*). La connaissance que nous propose ce travail nous renseigne sur les différences qui existent dans nos sociétés, chose qui nous sera utile dans l'élaboration de notre mémoire. De plus, à partir de cet ouvrage, nous allons à travers un effort d'appropriation adapter la notion de différence à notre thème. Allant dans le même sens, R GMÜNDER et J-B KENMOGNE18(*), montreront à leur tour que la différence est présente c'est ainsi qu'on pourrait parler de différence tribale, ethnique. Ils traitent de la question du tribalisme et des moyens les plus efficaces pour bannir cette pratique, du moins, pour limiter ses actions néfastes. D'entrée de jeu, les auteurs nous dresse une liste de conflits et d'affrontements d'ordre ethniques et tribales, pour ainsi montrer à quel point ces phénomènes sont présents à tous les niveaux de la vie (politique, religieuse, sociale) et constituent une réelle problématique. Ils montrent aussi que le tribalisme est en nous et se manifeste par les stéréotypes et préjugés, la généralisation, les boucs émissaires, et le sentiment de persécution. En ce qui concerne le contexte environnant, pour comprendre vraiment le tribalisme, il faut aussi se pencher sur les structures sociales. Le tribalisme selon cet ouvrage revêt plusieurs formes concrètes. C'est ainsi que dans la famille, à l'école, dans l'administration, dans la recherche d'un emploi, dans la culture, dans le sport, les migrations et l'accès à la terre, dans la constitution, dans les partis politiques, le tribalisme est présent. À l'épilogue de leur travail, R GMÜNDERetJ-BKENMOGNE proposent des pistes d'action dans l'optique de combattre et de vaincre le tribalisme. Deux principes sont à retenir dans cette lutte : toujours commencer la lutte par soi-même, commencer la lutte par sa propre tribu ; combattre le tribalisme partout et toujours c'est-à-dire non seulement lorsqu'on est perdant et que l'on est victime mais également lorsqu'on est gagnant, lorsqu'on profite d'une injustice. C'est ainsi que le tribalisme doit être combattu à l'école, dans les universités, dans l'administration, dans les médias, dans la loi, dans l'église, dans la société en général. Nous retenons une chose en particulier dans cet article, que les partis politiques sonttribalistes et ethniques en ce sens que certains partis politiques sont calqués sur une tribu, mieux, sur une ethnie particulière. Notons tout de même que ce travail a été fait avec la collaboration d'un pasteur et par conséquent, il émet un jugement de valeur en se positionnant par rapport à la réalité étudiée. Il juge le tribalisme comme mauvais et néfaste pour la société ; leur recherche est à tendance éthique et moralisante. Nous en tant qu'étudiant en sociologie, nous nous donnons comme mission d'observer et de comprendre sans jugement, l'influence du tribalisme, de l'ethnicisation politique sur le comportement politique, sur la cohésion sociale au Cameroun. La prédiction ou encore la prise de position ne relève guère de la sociologie. Le contexte social actuel nous donne d'amples informations sur les questions de tribalisme, d'ethnicité. C'est donc notre projet, de se baser sur le faits actualisés et nouveaux pour comprendre et expliquer ces phénomènes. Dans ce sens, nous nous inscrivons dans une logique de dépassement de ce qui a été dit et fait. J LONSDALE19(*) apporte sa contribution à la compréhension de la différence car les uns et les autres étant différents, il faut faire un dépassement dans la compréhension des langages de la société en Afrique. Il faut construire une analyse du politique par le bas20(*), c'est-à-dire de décoder les langages de la société civile en Afrique non plus seulement à travers ses expressions religieuses ou institutionnelles, mais aussi et surtout à partir des groupes ethniques ou autres qui en seraientson point faible. L'ethnie fait partir de la structure des sociétés africaines. L'appartenance ethnique est un fait social universel : tout être humain crée sa culture à l'intérieur d'une communauté qui se définit par opposition aux autres. Imaginer une nouvelle « tribu » peut-être le meilleur moyen de s'ouvrir à l'extérieur, d'embrasser le progrès social. Si certains aspects de l'ethnicitéprésententeffectivement un pesant héritage de tradition,sa manifestation est chaque jour réinventée pour satisfaire à de nouveaux besoins. L'identité culturelle est ce que les gens « en font plutôt que le résultat d'une fatalité historique ». L'auteur entend par « ethnicité morale » l'aune controversée de vertu civique à laquelle chacun mesure l'estime qu'il a de lui-même21(*). Elle est bien différente de l'absence de principes qui président au « tribalisme politique » dont les groupes se servent dans la lutte pour les ressources politiques. Il n'existe pas nécessairement de connexion entre l'ethnicité morale et le tribalisme politique. Chaque groupe possède un éventail de traditions renouvelables qui codifient la manière de traiter honorablement avec un étranger. Dans cet article, l'auteur montre le pesant ethnique dans le codage des langages de la société,chose que nous attestons. Dans notre projet de recherche nous allons nous appropriés de ce qu'a dit J LONSDALEpour appréhender le phénomène d'ethnicisation politique. En plus de montrer que l'ethnie est présente dans nos sociétés, nous voulons montrer que le milieu politique est ethnicisé et savoir si une cohésion sociale est possible dans ces conditions. C'est en cela que nous nous démarquons dans ce travail de ce qui a été dit par J LONSDALE au sujet de l'ethnie et de l'ethnicité. C HALPERN et J-C RUANO-BORBALAN22(*) traiteront de la question identitaire humaine et donneront des réponses à un certain nombre de questions ; entre autres, ils tentent de comprendre comment se construit l'identité individuelle ; comment se fait l'intégration des individus au sein d'un groupe, d'une communauté ou d'une société ; comment analyser les conflits ethniques et religieux ; si la mondialisation mène à l'unification des cultures. Dans le cadre de notre sujet, nous allons adapter ces questionnements à la société camerounaise pour mesurer l'ampleur de la question identitaire. D SIMO23(*) quant à luirévèle que l'identité, loin d'être une donnée, est une construction. L'auteur tente, non pas d'inaugurer, mais de soutenir un discours qui a du mal à prendre pied en Afrique. Il essaie de proposer une manière de parler de nos ethnies, une autre manière de les vivre. Il ne s'agit point de nous éloigner de nos cultures ancestrales, mais d'apprendre à mieux les voir, à mieux les étudier, à mieux les admirer, à mieux nous en inspirer. Bref,à nous en approcher non pas avec dévotion, mais avec lucidité, afin qu'elles ne soient pas des prétextes de notre aveuglement et de notre perte mais des éléments de notre salut et de notre survie. Cette démonstration de la construction de l'identité conduit à enrichir cette réflexion, maisne révèle pas l'étendue de la thématique. * 14WEIVIORKA Michel., la différence, France, Balland, 2001, PP.11-20. * 15 HUNTINGTON Samuel., the clash of civilization and the remaking of world order, New York,1996 * 16 RALPH, Linton., l'individu dans la société, Paris, Gallimard, 1969. * 17 TOURAINE, Alain., pourrons-nous vivre ensemble ? France, Fayard, 1997, PP. 197-240 * 18GMÜNDER, Retro & KENMOGNE, Jean-Blaise : « pour vaincre le tribalisme : principes, réflexions et perspectives », CIPRE, 2002, pp.5-90. * 19LONSDALE Jean., ethnicité morale et tribalisme politique, Paris, Karthala, 1996, PP.98-120. * 20 CHABAL Patrick «power in Africa: An Essay», in political interpretation, Londres, 1992 & 1994, PP. 93-94 * 21 LONSDALE Jean., ethnicité morale et tribalisme politique, Paris, Karthala, 1996, PP.99 * 22HALPERN, Cathérine& RUANO-BORBALAN, Jean-Claude : « identité(s) », France, sciences humaines, 2004, PP. 1-9 et 355-359. * 23SIMO David., Constructions identitaires en Afrique, Yaoundé, CLE, 2006, PP.25-42. |
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