CHAPITRE DEUXI?ME : LA
SÉCURITÉ DE LA RDC PENDANT LA DEUXIÈME ET LA
TROISIÈME RÉPUBLIQUE
Le présent chapitre sera consacré à
l'étude des fondements de la sécurité en RDC
(section1),à l'étude de la situation sécuritaire dans la
deuxième république (section 2), ensuite dans la troisième
république (section 3). Nous essayerons de comprendre la manière
dont la sécurité est prise en compte dans une situation
supposée stable ou dans une dynamique des guerres.Dans ce chapitre nous
aborderons ou focaliserons donc notre attention sur l'instabilité
politique en RDC afin de bien aborder les stratégies de pacification et
de sécurité après cette instabilité et surtout
quand il s'agira de la troisième république.
SECTION I : LES FONDEMENTS
DE LA SÉCURITÉ EN RDC
Paragraphe 1 :
Rôle de l'Armée
L'armée joue un rôle important de
dissuasion pour chaque État. La dissuasion est un mode de
prévention des conflits dans les rapports entre les États. Elle
consiste pour un État à s'armer amplement pour décourager
tout autre État qui pourrait avoir des intentions expansionnistes sur
l'État armé. L'armement permet aux États d'avoir une
puissance.49(*)
La menace de la sécurité
intérieure apparait comme une raison de l'ingérence
de l'armée dans les affaires civiles. L'armée congolaise
depuis la veille de l'indépendance et dans son évolution a
dû faire face à des mutineries, rebellions ainsi que les
sécessions. Cette situation a continué avec la
rébellion muleliste et celle de l'Est (1964), les mutineries des
ex-gendarmes katangais à Stanleyville (1964) ; la guerre de Bukavu avec
le 10ème bataillon commando de Schramme (en 1967), l'attaque de
Luashi et Kisenge par les mercenaires venusde l'Angola, sous les ordres de Bob
Denard (novembre 1967) ; la guerre de « quatre-vingtjours »(mars 1977
juin 1977) ; la guerre de Kolwezi ( en mai 1978) ; la guerre de Moba 1, de Moba
2 et la guerre de l'AFDL. Pendant toutes ces guerres, l'armée a
joué unrôleimportant à l'intérieur du pays. Cette
mission de l'armée est confuse, entre elle et cellede lapolice.50(*)L'armée congolaise a
changé plusieurs fois des noms, en passant par plusieurs
étapes.Elle a commencé par la force publique depuis 1885 jusqu'en
1960, puis armée nationalecongolaise après l'indépendance
(ANC), jusqu'à devenir forces armées zaïroise (FAZ). Lorsde
l'avènement de Mzee Laurent Désiré Kabila, elle est
passée pour les forces arméescongolaises (FAC) pour finalement
être forces armées de la République Démocratique
duCongo (FARDC).
1.1. LaForce
Publique
Elle fut créée en 1885, lorsque
Léopold II venait de prendre possession de
l'État indépendant du Congo, actuelle République
Démocratique du Congo, il commandait le ministère des affaires
intérieures. C'est ainsi qu'il va créer une force militaire et de
police pour l'État.
En 1886, beaucoup d'officiers belges furent
détachés au Congo pour mettre en place une force militaire.
Cette force publique n'était pas constituée uniquement des
officiers belges, il y avait aussi les suédois, des danois et les
autres européens.
La force publique a mené une campagne militaire
lors de la guerre mondiale 1914- 1918, C'était en Afrique de l'Est,
Cameroun, au Rwanda, au Burundi et surtout dans le territoire de l'actuelle
Tanzanie. Elle remporta divers succès militaires (Tabora, Mahenge)
gagnant ainsi les respects et la confiance de leurs alliés Portugais
et Britanniques.51(*)
Au cours de cette période, la force publique
fut organisée en 21 compagnies, plus lesunités
séparées d'artillerie et de génie, chaque compagnie devait
comprendre quatre officiersblancs et cent cinquante soldats Africains, 80
congolais complétaient l'effectif. L'histoire nous renseigne que les
officiers belges et les congolais prirent automatiquement la place des
européens de différents organes qui constituaient le corps
des officiers sous l'E.I.C.
La troupe déployée au Katanga
était spécialement constituée d'une force autonome de 6
compagnies et une unité cycliste.Dans l'ensemble, la force publique
était constituée d'un organe de douze mille centhommes,
répartis entre les vingt et une compagnies. Au fil du temps, la force
publique vers1914 comptait déjà plus ou moins 17.000 soldats,
recrutés sous le système de quotas dont lesconditions de
recrutement forcé ont continué.
1.2. L'Armée Nationale
Congolaise
L'armée nationale congolaise (ANC) fut
créée après l'indépendance qui eut lieu le 30juin
1960. Elle fut obtenue après des nombreuses discussions avec la Belgique
qui tenait à cequ'elle ait lieu après 30 ans. Il s'est
posé un problème très sérieux chez les congolais
depouvoir prendre la relève des officiers blancs pour la maitrise de la
situation sur toute l'étenduedu territoire ou la situation était
devenu ingérable. Les revendications, maintes foisexprimées par
les hommes en uniforme, n'avaient retenu l'attention de personne
:l'africanisation des cadres, réajustement de la
rémunération, amélioration des conditions detravail,
réalisation de promesses faites aux soldats méritants.52(*)La mutinerie avait
été la conséquence logique de la négligence des
revendications deshommes en uniformes. A ce sujet le Général
Janssens s'adressant aux troupes congolaises àqui il voulait demandait
la discipline, il leur dira en ce terme : « Avant l'indépendance
égalaprès l'indépendance ». Cette expression choqua
la conscience congolaise en commença parles hommes destroupes qui ne
comprenaient pas le bienfondé de l'indépendance et dans
lesmilieuxpolitiques ce fut une remise en cause de l'indépendance de la
jeune République.Le discours de Lumumba créa un climat
d'hostilité contre les belges. La situation
seragénéralisée dans tout le pays par manque d'officiers
capable de maitriser les hommes detroupes qui se soulevait dans tout le pays.A
la veille de l'indépendance, la République Démocratique du
Congo fut déchirée pardes guerres de sécession et des
rébellions : la sécession du Katanga conduite par MoiseTshombe et
la sécession du sud-Kassaï (1960-1962) dirigée par Albert
Kalonji Mulopwe ;la rébellion d'Antoine Gizenga dans la Province
orientale (1960-1961) ; la rébellion mulelisteet celles de l'Est (1964)
; ces guerres ont eu une incidence sur la capacité de faire face
à tousces mouvements.53(*)
Pendant cette
période, l'ANC devait faire face à beaucoup de groupes de
résistance, notamment l'armée katangaise, la résistance
d'Albert Kalonji au sud Kasaï, le groupe rebelled'Antoine et les
Mulele-maïainsi que différentes mutineries. Face à cette
réalité l'ANC setrouva dans l'impossibilité de contenir
tous ces mouvements sur terrain. La guerre est un moment propice au Congo
où les gens croient à la magie, à la sorcellerie. On
remarque les chefs militaires courir dans les maisons de devins pour
de procédés de multiplication, d'invulnérabilité
aux balles, de disparation lorsqu' on est dans uneembuscade.Un usage plus
contemporain de la tromperie ancestrale des sorciers fut mis à
jourdurant la récente guerre civile au Congo. La sorcellerie augmente
toujours en temps de guerre,mais cet exemple de tromperie est exceptionnel.Des
jeunes africains furent recrutés pour rejoindre l'armée rebelle
qui déferla vers lesud-ouest du Congo. Ils contrôlèrent
à un certain moment un cinquième du territoire.
Pours'assurer d'une armée vicieuse et sans
peur, les chefs de la rébellion usèrent de la sorcelleriepour
convaincre les guerriers qu'ils étaient invincibles, leur promettant que
si une balleennemie les touchait elle se transforme en goutte d'eau. Le 14
août 1964, après le rite desorcellerie, les soldats se dirigeaient
vers Luluabourg (Kananga aujourd'hui) pleins deconfiance. Le docteur Alexandre
Reid raconte la bataille qui s'ensuivit : Le matin du 14 août, ils
(l'armée de l'ANC) tendirent une embuscade à huit
Camions chargés de soldats rebelles aux deux-tiers de la route vers
Lusambo et les abattirent quasimenttous. Les quelques rescapés
informèrent Lusambo de leurs pertes, ce qui fit que la victoirechangea
des camps dans notre région de Mongo et anéantit la crainte et
les tabous dessorciers.Ce sont les croyances animistes tellement rependues qui
rendent de telles tromperiespossibles. On estime que cette armée, avec
ses forces ancrées dans la sorcellerie, futresponsable de plus de
100.000 morts avant d'être vaincue. Les soldats comme les civilsavaient
perdu leur capacité de raisonner clairement et même de se
défendre, parce qu'ilsavaient mis toute leur confiance dans la
sorcellerie.54(*)
1.3. Forces Armées
Zaïroises
Horold Crouch en faisant
une comparaison de l'Asie du Sud-est constate quedans le pays ou les structures
sociales sont encore relativement instables les gouvernements dominés
par les militaires peuvent apporter une stabilité politique qui favorise
la croissance économique.
Cette règle n'a pas épargné la RD
Congo qui après des discordes, des conflits politiques, des
sécessions, des rebellions et mutineries après
l'indépendance, ont permis à l'armée de prendre le
pouvoir. Par un communiqué, le commandant en chef de
l'Armée Nationale Congolaise va prononcer ce qui suit : Depuis
plus d'un an, l'Armée Nationale Congolaise a lutté contre la
rébellion qui, à un moment donné, a occupée
près des deux tiersdu territoire de la République. Alors qu'elle
est presque vaincue, le Haut Commandement del'Armée constate avec regret
qu'aucun effort n'a été fait du côté des
autorités politiques pourvenir en aide aux populations
éprouvées qui sortent maintenant en masse de la brousse,
enfaisant confiance à l'Armée Nationale Congolaise. La course au
pouvoir des politiciensrisquant à nouveau de faire couler le sang
congolais, tous les chefs militaires de l'ArméeNationale Congolaise,
réunis ce mercredi 24 novembre 1965 autour de leur commandant enchef,
ont pris, en considération de ce qui précède, des graves
décisions suivantes :55(*)L'armée a assumé et continue a
assumé un très grand rôle politique, mais
économiqueet socioculturel. Il est classique dans les pays en voie de
développement que l'armée prenneen charge la gestion du pays.
Certains avancent l'argumentation que cet engagement est nécessaire au
sein desnations émergentes. L'implication politique militaire vise
à stabiliser la situation politiqueet àcontribuer à la
construction nationale.
Selon Harold,certains facteurs favorisent cette
politisation des forces armées : la perte de la
crédibilité du gouvernement civil due aux incessantes querelles
du pouvoir, la persistance de sérieux problèmes de
sécurité intérieure, l'absence d'une menace
extérieure imminente et la conviction de l'Armée d'être
la gardienne de la nation.
Il y a aussi des circonstances historiques
particulières qui peuvent expliquer l'engagement des militaires, la
lutte pour l'indépendance, l'armée s'appuyant sur la
légitimitérévolutionnaire (l'incapacité de la
classique politique a assuré la gestion du pays). Jean-Jacques
Rousseau écrivait : « le plus fort n'est jamais plus assez fort
pour être toujours le maitre s'il ne transforme sa force en droit et
l'obéissance en devoir ». Le nom de la République
Démocratique du Congo a continué jusqu'en 1971 pour
être remplacé par la dénomination République du
Zaïre, qui d'après les tenants du régime mobutisme
prêtait à confusion qu'il fallait écarter. Par contre, la
prise de pouvoir par Mobutu a plongél'armée dans le tribalisme,
beaucoup d'officiers étaient de l'Equateur, où lui-même
étaitressortissant. Il a fini par faire du lingala une langue
militaire.
1.4. Forces Armées
Congolaises
Depuis 1965, le pays a connu un régime fort qui
l'a plongé dans une crise totale, Laurent Désiré Kabila
à la tête d'un mouvement dénommé Alliance des
Forces Démocratique pour la libération du Congo en sigle AFDL
va combattre le régime de Mobutu pour libérer le pays de la
dictature qui a duré 32 ans. L'armée sera
dénommée les Forces Armées Congolaise pour la
défense de l'intégrité territoriale. Les forces de
Laurent Désiré ont été qualifiées de
libération par le fait d'avoir sorti le pays dans un régime
sans partage qui a ruiné totalement la République
DémocratiqueduCongo.
1.5. Forces Armées
de la République Démocratique Du Congo
Après la mort de Laurent Désiré,
le pays était plongé dans une situation de crise identique
à celle des années qui ont suivi l'indépendance. Les
différents mouvements qui ont combattu avec Laurent Désiré
vont se désolidariser pour commencer leur propre lutte. Après la
mort de Laurent Désiré Kabila, le pouvoir sera pris Joseph Kabila
Kabange, fils du feu Laurent Kabila avec l'accord du gouvernement Kabila
père et l'armée.Au fil de temps les forces armées
congolaise vont devenir les Forces armées de la République
Démocratique du Congo, « FARDC » en sigle.
* 49M.Merle, La vie
internationale, Armand, Paris, S-D, p. 119.
* 50Mukendi Nkashama et
Kabeya Mukamba, Guerres et mutations sociolinguistiques en
République Démocratique du Congo (1960-1999), PUL, Tome II,
Lubumbashi, 2000, p. 133.
* 51Banze Wa Banze,
Etude des comportements des forces armées de la République
Démocratique du Congo, Mémoire de licence en
criminologie, Université de Lubumbashi, Lubumbashi, Février 2010,
p42
* 52Banze Wa Banze, Op
cit., p47.
* 53Mukendi Nkashama at
alii, « Guerres et mutations sociolinguistique en République
Démocratique du Congo (1960-1999) », In 40 ans
d'indépendance, Tome II, PUL, 2004, p. 133
* 54Baudouin Wikha
Tshibinda, Les forces armées de la république
démocratique du Congo. Organisation, structure et base juridique,
Inédit, Lubumbashi, 2010, p32.
* 55 Mukendi Nkashama at
alii, « Extrait de la proclamation du Haut Commandement de
l'Armée Nationale Congolaise du 24 novembre 1965 »,
dans Guerres et mutations sociolinguistique en République
Démocratique du Congo (1960-1999), In 40 ans
d'indépendance, Tome II, PUL, 2004, p.133.
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