L'impact des revenus pétroliers sur l'économie d'un pays exportateur. Le cas du Gabon.( Télécharger le fichier original )par Sylvain ENGOANG Université Pierre Mendès France de Grenoble II - Master 2 à finalité Recherche en Economie internationale et stratégies dà¢â‚¬â„¢acteurs, spécialité Politiques éc 2006 |
Source : BEAC (1991) : « Etudes et Statistiques », n° 187, décembre 1991. Or, la hausse des prix intérieurs implique une surévaluation de la monnaie nationale, il s'ensuit une perte de compétitivité des biens fabriqués localement face aux biens importés devenus de moins en moins chers aux consommateurs gabonais. Un rapport conjoint de la Banque Africaine de Développement (BAfD) et de l'Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) publié en 2006 souligne à cet effet que « le Gabon enregistre une augmentation des importations de produits bas de gamme, et une augmentation d'entrées frauduleuses de produits qui détériorent sa compétitivité »1. Cette perte de compétitivité des biens fabriqués localement va contraindre de nombreuses entreprises déficitaires produisant des biens de substitution aux importations à fermer leurs portes lorsqu'elles ne sont pas suffisamment subventionnées par l'Etat : c'est le cas, par exemple, de la Société de Textile du Gabon (SOTEGA), de la Société Gabonaise d'Elevage (SOGADEL) et de la Société Gabonaise des Piles (SOGAPIL) qui ont toutes disparues. 1 BAfD et OCDE (2006) : « Le Gabon », Perspectives Economiques en Afrique 2005/2006, http://www.oecd.org/dataoecd/20/54/34883788.pdf, p. 270, site consulté le 3 juillet 2006. 22 Paragraphe 2 : L'effet d'accroissement des importationsLa faible diversification de la structure de production de l'économie gabonaise s'explique dans une certaine mesure par l'accroissement des importations qui ruine les efforts de développement des secteurs agricole et industriel. En effet, les exportations de pétrole génèrent au Gabon d'énormes ressources en devises qui, en conséquence, offrent au pays une grande capacité à importer : le Gabon est tributaire des importations pour consommation finale, pour consommation intermédiaire et pour investissement (Cf. supra p. 15). Si les importations pour consommation intermédiaire et pour investissement sont nécessaires en raison de leur caractère productif, les importations pour consommation finale n'ont cependant pas d'effets d'entraînement sur les activités productives. Bien au contraire, les importations pour consommation finale absorbent la plus grande part des revenus d'exportation : le tableau 5 ci-dessous montre que le taux de couverture des importations pour consommation finale par les exportations du pays a atteint des niveaux très élevés après le deuxième choc pétrolier, soit 22 % en 1981 et 17,8 % en 1982. A cet égard, H. A. B. Chambrier (1990) confirme « qu'en raison du niveau encore faible d'industrialisation, les importations absorbent une fraction importante des ressources en devises »1. Ces importations pour consommation finale constituent donc une perte sèche pour le Gabon et affaiblissent le potentiel d'investissement et de développement industriel du pays. Tableau 5 : Taux de couverture des importations pour consommation finale par les exportations totales
Source : BEAC (1991) : « Etudes et Statistiques », n° 187, décembre 1991 ; données des Douanes et de la DGE présentées par H. A. B. Chambrier (1990) : L'économie du Gabon. Analyse, politiques d'ajustement et d'adaptation, Economica, p. 46. 1 H.A.B. Chambrier (1990) : L'économie du Gabon. Analyse, politiques d'ajustement et d'adaptation, Economica, p. 45. 23 Section 2 : Les mécanismes d'allocation de ressourcesContrairement au modèle de syndrome hollandais proposé par W. M. Corden et J. Neary (1982)1 qui explique les changements structurels d'une économie par un mécanisme de ré-allocation de ressources passant par la mobilité des travailleurs d'un secteur à un autre, les distorsions sectorielles de l'économie gabonaise résultent plutôt d'un mécanisme d'allocation des talents disponibles plus favorable à certains secteurs qu'à d'autres. Ce mécanisme d'allocation de ressources dans l'économie gabonaise s'opère de deux manières : par les effets des imperfections du marché du travail, d'une part, et par l'exode rural, d'autre part. Paragraphe 2 : Les effets des imperfections du marché du travailIl est à souligner que la structure de production de l'économie gabonaise a toujours été à l'état embryonnaire. Ce retard de développement de la base productive affectera également le mécanisme d'allocation des ressources sur le marché du travail. En effet, les jeunes diplômés qui arrivent sur le marché du travail ne trouvent pas souvent un grand nombre d'offres d'emploi. D'abord, le secteur pétrolier est très capitalistique et n'embauche qu'un très faible nombre de travailleurs, comparativement à son poids dans l'économie, comme le montre le tableau 6 ci-dessous : en 2001, le nombre de gabonais employés dans le secteur pétrolier se chiffre à 1 424 sur un effectif total de gabonais en activité de 108 405, soit 1,31 %. Ensuite, il y a les entreprises parapubliques qui opèrent dans les secteurs de l'énergie et de l'eau (la Société d'Energie et d'Eau du Gabon), du raffinage (la Société Gabonaise de Raffinage), des transports (Air Gabon) et des télécommunications (Gabon Télécoms). Ces entreprises distribuent des salaires très élevés mais restent d'accès très difficile pour la plupart des jeunes diplômés qui ne bénéficient pas de l'appui d'un parent bien placé dans le Gouvernement. Ainsi, à défaut de s'aventurer dans des petites et moyennes entreprises (PME) qui n'offrent pas de véritables perspectives de carrière, les jeunes diplômés s'orientent finalement vers les concours de la fonction publique où l'effectif en 2001 se chiffre à 39 874 1 Cf. Supra p.10. 24 fonctionnaires sur un total de 108 405 gabonais en activité, soit 36,78 % comme le confirme le tableau 6 ci-dessous. Ce mécanisme d'allocation des ressources au détriment du secteur productif entretient donc les distorsions de la structure de production de l'économie et le sous-développement du secteur manufacturier. Tableau 6 : Répartition de l'emploi par secteur d'activité
Source : Direction Générale de la Statistique et des Etudes Economiques : « Données statistiques », http://www.stat-gabon.ga/Donnees/index-data.htm, consulté le 10/07/2006. Paragraphe 2 : L'exode ruralL'exode rural constitue également un facteur de déséquilibre structurel de l'économie gabonaise. Les principales cultures d'exportation sont le café et le cacao. Ces exportations ont connu une chute spectaculaire ces dernières années en raison du vieillissement de la population rurale agricole et de la détérioration des prix d'achat au producteur qui décourage les jeunes actifs ruraux à choisir ce domaine d'activité. En effet, les activités agricoles n'étant 25 plus suffisamment lucratives, comparativement aux activités exercées en milieu urbain où les salaires distribués sont très élevés et payés régulièrement, les jeunes actifs au chômage dans les zones rurales refusent de travailler dans les plantations de cacao ou de café et considèrent que cette activité est l'affaire des « vieux ». Par conséquent, ils désertent les campagnes pour aller chercher un emploi dans les villes où les conditions de vie sont d'ailleurs plus attrayantes en termes de structures sanitaires, d'éclairage public, de routes bitumées, de réseaux de téléphonie mobile... La relève des anciens planteurs n'étant plus assurée, on constate alors un vieillissement des travailleurs agricoles et une chute de la production comme le montre le tableau 7 ci-dessous : la production de cacao est passée de 3 353 tonnes lors de la campagne 1981-1982 à 890 tonnes lors de la campagne 1999-2000, soit une chute de 73,45 % ; de même, la production de café est passée de 1 850 tonnes lors de la campagne 1981-1982 à 276 tonnes lors de la campagne 1999-2000, soit une baisse de 85,1% en moins de deux décennies. Tableau 7 : Production de cacao et de café (en tonnes)
Source : BEAC : « Etudes et Statistiques », n° 157 de janvier 1989 et n° 265 de juillet-septembre 2002. * * * Les revenus pétroliers ont engendré des mouvements de prix et de ressources favorisant le développement des activités tertiaires au détriment du secteur productif qui, au demeurant, entretient de faibles liaisons avec le secteur pétrolier. Or, si les revenus pétroliers importants ne sont pas investis dans le secteur productif, il se développe des comportements rentiers qui vont entretenir les distorsions sectorielles de l'économie. 26 DEUXIEME PARTIELE DEVELOPPEMENT DES COMPORTEMENTS RENTIERS QUE L'ON PEUT INFLECHIRAprès avoir engendré la manifestation du syndrome hollandais qui s'est traduite par de graves déséquilibres structurels dans l'économie gabonaise, l'abondance des revenus pétroliers tend à favoriser le développement des comportements rentiers. Selon J.-P. Koutassila (1998), cette notion « fait référence à l'idée d'une disparition des comportements axés sur la production au profit de comportements d'accès aux revenus liés à l'apparition d'une rente »1. En effet, lorsque le seuil d'absorption du capital est déjà atteint, l'afflux de revenus pétroliers supplémentaires entraîne l'amenuisement de l'effort de rigueur dans la gestion des recettes publiques et favorise le développement d'un laxisme budgétaire et l'établissement d'un système de redistribution de la rente, ce qui creuse encore plus les déséquilibres structurels de l'économie. Ces mécanismes vont ensuite s'entretenir d'eux-mêmes si des mesures profondes ne sont pas prises, avec une volonté politique, pour revenir d'une économie de répartition à une économie de production. En tenant compte des stratégies adoptées par les détenteurs du pouvoir étatique pour pérenniser cette « vie facile », la recherche d'une solution efficace pour infléchir les comportements rentiers et revenir à une économie de production devient très problématique. Le troisième chapitre présentera d'abord certaines caractéristiques qui permettent d'identifier l'économie du Gabon comme une économie de rente ; puis, le quatrième chapitre tentera de proposer des solutions pour améliorer la contribution des revenus pétroliers au développement économique et social du Gabon. 27 1 J.-P. Koutassila (1998), « Le syndrome Hollandais : théorie et vérification empirique au Congo et au Cameroun », Centre d'économie du développement (CED), Document de travail, n° 24, p. 5. 28 CHAPITRE IIILES CARACTERISTIQUES D'UNE ECONOMIE DE RENTEEn dépit des programmes d'ajustement structurel (PAS) engagés sous l'égide du Fonds Monétaire International (FMI) et de la Banque Mondiale, le Gabon n'a pas réussi à enrayer le syndrome hollandais. Bien au contraire, l'augmentation des recettes pétrolières a entraîné l'accroissement de la consommation publique et privée, renforçant de plus en plus les déséquilibres structurels de l'économie et la dépendance du pays à l'égard de l'extérieur. Cette situation s'explique par le fait que l'abondance des revenus pétroliers a imprimé sur le fonctionnement de l'économie des comportements rentiers que l'on peut appréhender à travers les caractéristiques suivantes : le laxisme budgétaire et la logique de redistribution. Section 1 : Le laxisme budgétaireLa gestion des ressources de l'Etat au Gabon fait preuve d'un manque de rigueur budgétaire qui entretient le sous-développement économique et social du pays. Ce laxisme budgétaire peut être démontré à travers, d'une part, la multiplication des investissements improductifs qui entraînent le surendettement de l'Etat et, d'autre part, la minimisation de la pression fiscale qui reste étroitement liée à la corruption. Paragraphe 1 : Investissements improductifs et surendettement de l'EtatL'abondance des revenus pétroliers au Gabon a conduit l'Etat à entreprendre d'énormes projets d'investissement, « des éléphants blancs », dont les coûts de réalisation étaient très élevés mais qui se sont avérés improductifs voire inutiles à cause de l'étroitesse du marché intérieur. C'est le cas, par exemple, de « la SOSUHO ; les Ciments du Gabon qui exigent de fortes subventions annuelles ; les hôtels de l'intérieur dont le taux d'occupation est 29 insuffisant »1. Le financement de ces projets a été couvert par la rente pétrolière et par les prêts extérieurs. En effet, grâce à la solvabilité que lui confère les revenus pétroliers, le Gabon a bénéficié de ses créanciers extérieurs des prêts importants qui lui ont permis de soutenir la réalisation de ces grands projets. A terme, le pays est devenu excessivement endetté et le service de la dette freine actuellement toute perspective de diversification de l'économie. Le tableau 8 ci-dessous montre que le ratio d'endettement extérieur du Gabon a atteint 73,22 % du PIB en 1999. Selon la loi des finances rectificative publiée par le Gouvernement gabonais en juillet 2006, le service de la dette afférent à cette année se chiffre à 629,6 milliards de francs CFA2. Ce surendettement du Gabon a conduit son Gouvernement à engager sous l'égide du Fonds Monétaire International (FMI) et de la Banque Mondiale des programmes d'ajustement structurel (PAS) à partir des années 80. Pourtant, une bonne partie des fonds destinés à la réalisation de ces projets a été détournée de son objet par les détenteurs du pouvoir étatique et placée dans des endroits sûrs à l'étranger. Ainsi, réagissant au soutien de la France pour obtenir l'annulation de la dette du Gabon lors du sommet du Groupe des huit pays les plus industrialisés (G8) à Gleneagles, Le Figaro (2005) souligne que « Paris, qui appuie l'effacement de la dette gabonaise, ne semble pas se rendre compte de l'incongruité de la demande »3. Il est à noter que le pays n'est pas éligible à l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE). Tableau 8 : Ratio d'endettement extérieur de l'Etat (en % du PIB)
Source : Estimations de l'auteur sur la base des données de la BEAC (2004) : « Etudes et statistiques », n°287, septembre 2004 ; ainsi que de la DGSEE : « Données statistiques », http://www.stat-gabon.ga/Donnees/index-data.htm, consulté le 10/07/2006. 1 H.A.B. Chambrier (1990) : L'économie du Gabon. Analyse, politiques d'ajustement et d'adaptation, Economica, p. 80. 2 XINHUA (2006) : « Plus de 600 milliards de FCFA pour payer la dette publique en 2006 », http://www.jeuneafrique.com/articleImp.asp?art_cle=XIN60026plusdneeuqi0, consulté le 28/07/2006. 3 P.S.-E (2005) : « La rivalité franco-anglaise en Afrique tourne au détriment de Paris », Le Figaro, 6 juillet 2005, p.3. 30 Paragraphe 2 : Minimisation de la pression fiscale et corruptionA l'instar des autres pays d'Afrique, le taux de pression fiscale est particulièrement faible au Gabon, comparativement à ceux des pays développés, comme le montre le tableau 9 ci-dessous : en 2001, par exemple, le taux de pression fiscale est de 20,1 % au Gabon, alors qu'il se chiffre à 44,7 % en France. Tableau 9 : Evolution des taux de pression fiscale au Gabon et en France (en %)
Source : Investir en zone franc: « Principaux indicateurs économiques et financiers du Gabon », http://www.izf.net/izf/Guide/TableauDeBord/gabon.htm ; données de l'INSEE présentées par X. Badin (2004) : « Pression fiscale : le ratio Insee contestable », Les Monographies de Contribuables Associés, n° 1, 10 septembre 2004, http://www.contribuables.org/custom/fichiers/upload/Monographies_N1200904.pdf. Cette faiblesse du taux de pression fiscale au Gabon s'explique en partie par l'abondance des revenus pétroliers qui n'a encouragé l'Etat ni à diversifier sa base fiscale, ni à alourdir la pression fiscale hors pétrole. Bien au contraire, l'Etat a plutôt accordé de nombreux avantages fiscaux. On note, par exemple, que si le taux normal de la TVA est fixé à 18 %, certains produits sont taxés au taux réduit de 10 % et les biens de première nécessité en sont exonérés ; aussi, alors que le taux de l'impôt sur les sociétés (IS) est de 35 % du résultat fiscal, un impôt minimum forfaitaire (IMF) de 600 000 francs CFA est dû annuellement si le résultat fiscal est déficitaire ; les nouvelles sociétés sont même exonérées de cet impôt minimum forfaitaire (IMF) durant les deux premiers exercices1. S'il est certain que l'Etat a adopté une fiscalité particulièrement attrayante pour attirer les investissements directs étrangers (IDE), il n'en demeure pas moins vrai qu'en baissant la pression fiscale hors pétrole, les détenteurs du pouvoir étatique cherchent à éviter le droit de regard des citoyens sur la gestion peu orthodoxe de la rente pétrolière, comme le souligne M. Mucherie (2005) : « les citoyens sont moins concernés par une mauvaise utilisation de l'argent public s'ils n'ont pas 1 Investir en zone franc : « La fiscalité des entreprises au Gabon », http://www.izf.net/IZF/EE/pro/gabon/6045.asp, consulté le 8/08/2006. 31 été mis à contribution pour le fournir »1. Par ailleurs, il est nécessaire de noter que la plupart des petites et moyennes entreprises (PME) qui bénéficient des avantages fiscaux et des marchés publics, le plus souvent de manière arbitraire, appartiennent à des hommes proches du pouvoir qui en confient la gestion à des prête-noms, de nationalités française ou libanaise. Ainsi, dans le cadre des études comparatives annuelles sur la corruption, le Gabon figure parmi les pays les plus mal classés à l'échelle internationale en 2005, soit au 91ème rang sur 159 pays selon Transparency International2. Section 2 : La logique de redistributionAu Gabon, le pétrole est un facteur de stabilité politique et de paix sociale grâce à la logique de redistribution qui prédomine dans le fonctionnement de l'économie. Cette logique de redistribution de la rente pétrolière se traduit par l'ampleur du clientélisme politique et par le maintien d'une structure artificielle des prix et des salaires. Paragraphe 1 : Politique de redistribution et clientélismeEn abandonnant toute politique sociale minimale, les détenteurs du pouvoir étatique ont mis en place une politique de redistribution de la rente visant à faire bénéficier la manne pétrolière à un grand nombre de citoyens, ce qui permet de préserver la paix sociale et d'assurer la pérennité du régime en place. La rente pétrolière est redistribuée directement à la population par les détenteurs du pouvoir étatique lors des visites officielles des autorités politiques dans les provinces et les villages. Cette redistribution prend surtout de l'ampleur pendant les campagnes électorales, dans le seul but d'acheter les consciences des électeurs. 1 M. Mucherie (2005) : Economie du pétrole (II), Pétrole et développement : une chance ou une malédiction ?, p.4, http://www.melchior.fr/melchior/melchior.nsf/html/, consulté le 11 juillet 2006. 2 Transparency International (2005) : « Corruption Percetions Index 2005 », « http://www.transparency.org/layout/set/print/policy_research/surveys_indices/cpi/2005, consulté le 3 août 2006. 32 De manière indirecte, les détenteurs du pouvoir étatique redistribuent la rente pétrolière à travers les réseaux clientélistes qui sont présents à tous les niveaux de la hiérarchie administrative. C'est ainsi que, si elle ne relève pas de la stratégie de l'équilibre géopolitique, la nomination à tel ou tel poste de directeur d'une entreprise publique ou d'un département ministériel revêt plus le caractère de récompense du militantisme de la personne promue que de la consécration de son mérite, comme l'écrit Z. Limam (2005) : « chaque famille, chaque village, chaque région, chaque ethnie doit être représentée quelque part au sommet. Un tel est directeur général d'une société publique, tel autre est au ministère, tel autre encore dans une ambassade... Chacun d'entre nous, y compris le plus modeste, peut se prévaloir d'un parent qui occupe un poste d'envergure »1. Dès qu'elles sont installées à la tête des entreprises publiques ou parapubliques, les personnes nouvellement promues s'octroient des avantages de salaire et en nature. Pour prévenir des grèves dans l'entreprise, ces hauts responsables augmentent également les salaires des employés, ce qui se traduit à terme par un salaire moyen relativement élevé dans les entreprises publiques et parapubliques au Gabon. En dépit de cette volonté de redistribution, les inégalités entre les différentes couches sociales se creusent de plus en plus. Paragraphe 2 : Maintien d'une structure artificielle des prix et des salairesFace à un taux d'inflation de plus en plus élevé qui tend à amenuiser les avantages de redistribution accordés aux populations les plus défavorisées, l'Etat a mis en place une politique de régulation de la conjoncture qui contribue à maintenir une structure artificielle des prix et des salaires. Le contrôle des prix a d'abord constitué un instrument essentiel en vue d'exercer une influence modératrice sur les pressions à la hausse des niveaux de prix. A cet effet, les blocages des prix ont souvent été utilisés comme mesures d'accompagnement visant à renforcer l'efficacité des décisions prises en faveur des groupes socio-économiques les plus démunis. Par exemple, « le décret du 2 février 1982 instituant le blocage de tous les prix des biens et services au niveau atteint le 18 janvier 1982 avait pour objectif de maintenir le 1 Z. Limam (2005) : Le chef face au changement, p. 1, http://www.lintelligent.com/articleImp.asp?art_cle=LIN201151echetnemeg0, consulté le 25 novembre 2005. 33 pouvoir d'achat des ménages après la hausse du SMIG du 1er janvier »1. Ensuite, l'Etat a mis en place divers mécanismes pour subventionner les prix des produits de base et alléger les charges des ménages les plus défavorisés. C'est ainsi qu'il a été créé une Caisse de soutien destinée à subventionner les prix des produits de première nécessité. L'ensemble de ces mesures de blocage et de subvention des prix a permis de maintenir un rythme d'évolution des prix artificiellement bas, comparativement celui des autres pays de la sous - région : le graphique 1 ci-dessous montre par exemple qu'à partir de 1982, l'évolution de l'indice des prix à la consommation est moins rapide à Libreville qu'à Yaoundé, en comparant les pentes des deux courbes. 250 200 150 100 50 0 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 Graphique 1 : Evolution des indices des prix de détail Années Libreville Yaoundé Source : Graphique établi sur la base des données de la BEAC (1991) : « Etudes et Statistiques », n° 187, décembre 1991. Pour les détenteurs du pouvoir étatique, le salaire minimum interprofessionnel gabonais (SMIG) a également été un instrument important pour améliorer les conditions de vie des couches sociales les plus défavorisées, ce qui devait permettre de garantir la stabilité politique et la paix sociale. Comparativement aux autres pays de la sous-région, on note que le salaire minimum interprofessionnel gabonais (SMIG) a été artificiellement fixé à un niveau 1 H.A.B. Chambrier (1990) : L'économie du Gabon. Analyse, politiques d'ajustement et d'adaptation, Economica, p. 217. 34 très élevé, indépendamment de la productivité des travailleurs. En 2005, par exemple, le salaire minimum interprofessionnel gabonais (SMIG) se chiffre à 44 000 francs CFA, alors que le salaire minimum interprofessionnel garanti est de 40 370 francs CFA au Congo, de 25 479 francs CFA au Tchad et de 23 500 francs CFA au Cameroun1. La fixation du salaire minimum interprofessionnel gabonais (SMIG) à un niveau supérieur à la productivité des travailleurs a contribué à la perte de la compétitivité de l'économie gabonaise. Le niveau attrayant du salaire minimum interprofessionnel gabonais (SMIG) conduit également de nombreux jeunes actifs des zones rurales à aller s'établir massivement dans les villes où ils espèrent trouver un emploi ; en plus du vieillissement de la population agricole rurale, cet exode rural provoque une sur-urbanisation qui exerce une forte pression sur les structures de santé, les écoles et les logements. Par ailleurs, le niveau élevé du pouvoir d'achat au Gabon provoque l'immigration clandestine des travailleurs africains qui n'ont pas pu s'aventurer en Europe ; cette immigration clandestine accentue la criminalité et contribue au développement du secteur informel au Gabon. Il n'existe pas de statistiques officielles, mais les Autorités gabonaises estiment à plus de 400 000 le nombre d'étrangers vivant en situation irrégulière au Gabon et à plus de 500 milliards de francs CFA les économies qu'ils rapatrient dans leurs pays respectifs2. * * * L'abondance des revenus pétroliers au Gabon a provoqué dans un premier temps une déstructuration de l'économie puis, dans un deuxième temps, un développement des comportements rentiers qui entretiennent le sous-développement du pays. Malgré ces résultats, la présence des ressources pétrolières sur un territoire ne devrait pas être considérée comme une « malédiction ». Des solutions existent pour améliorer la contribution du pétrole au développement d'un pays exportateur. 1 Données disponibles sur les sites suivants : Gabonews (2006) : « Gabon : Une dizaine de syndicats menace de déposer un préavis de grève générale », http://fr.allafrica.com/stories/200607280565.html, consulté le 4/08/2006 ; Agence Pour la Création d'Entreprises : « Comment s'implanter au Congo ? », http://www.apce.com/include/imprimer.php?rubrique_id=104000&type_page=I&cont, consulté le 4/08/2006; Droit francophone (1994) : « Tchad : Législation : Décret 273/PR/MFPT/94 du 19 octobre 1994 portant relèvement du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) et du salaire minimum agricole garanti (SMAG), http://droit.francophonie.org/doc/html/td/loi/fr/1994/1994dftdlgfr.19.html, consulté le 4/08/200. 2 Agence France Presse (2006) : « Le Gabon veut lui aussi freiner l'immigration africaine », Jeune Afrique, http://www.jeuneafrique.com/articleImp.asp?art_cle=AFP25256legabeniaci0, mis en ligne le 3 août 2006, consulté le 7/08/2006. 35 CHAPITRE IVCOMMENT AMELIORER LA CONTRIBUTION DES REVENUSPETROLIERS AU DEVELOPPEMENT DU GABON ?La production pétrolière du Gabon a commencé à chuter dans la seconde moitié des années 90. Cette production est passée de 18,19 millions de tonnes en 1997 à 16,85 millions de tonnes en 1998 et à 11,74 millions de tonnes en 20001. Cette baisse de la production devrait interpeller les Autorités gabonaises sur le caractère épuisable des réserves pétrolières et la nécessité de mettre en place des mesures visant à améliorer la contribution du pétrolière au développement du pays dans le cadre d'une justice intergénérationnelle. Ces mesures doivent comporter deux volets : le premier volet porte sur l'adoption de politiques volontaristes visant à améliorer la compétitivité de l'économie nationale ; le deuxième volet traite de l'adoption des politiques oeuvrant pour un retour d'une économie de redistribution de la rente à une économie de production compétitive. Section 1 : L'adoption de politiques volontaristes visant à améliorer la compétitivité de l'économie nationaleAfin d'améliorer la compétitivité de l'économie gabonaise qui a été détériorée par l'abondance des revenus pétroliers, les Autorités publiques doivent favoriser le développement des infrastructures économiques et sociales du pays et autoriser la stérilisation des revenus pétroliers à l'étranger. Paragraphe 1 : Le développement des infrastructures économiques et socialesLe développement des infrastructures économiques et sociales constitue un impératif pour favoriser l'expansion des activités de production compétitive au Gabon. A l'heure actuelle, le Gabon ne dispose pas d'un réseau routier très étendu et praticable en toutes 1 Données de la BEAC (2004) : « Etudes et Statistiques », n° 287, septembre 2004. 36 saisons, l'enclavement de certaines localités freine alors les échanges inter-régionaux et entrave le développement des activités productives et commerciales. Le Gabon dispose d'un potentiel hydraulique considérable qui n'est pas encore suffisamment exploité. Le sous-équipement et la répartition inégale des infrastructures de santé sur le territoire national, la dégradation du système éducatif et le manque d'enseignants limitent la formation du capital humain et, par ricochet, le développement du pays dans la mesure où « le développement économique d'un pays dépend de la qualité de sa main-d'oeuvre, mais celle-ci est étroitement reliée au niveau de formation et de santé »1. Or, ces dépenses ne peuvent être réalisées par le secteur privé en raison de leurs coûts extrêmement élevés, du caractère diffus de leurs effets sur l'ensemble de l'économie et des délais de retour sur investissement extrêmement longs, dépassant l'horizon temporel des seuls intérêts privés. Il revient donc à l'Etat gabonais d'engager un ensemble de dépenses génératrices d'effets externes positifs sur l'ensemble de l'économie telles que : le bitumage des routes principales qui ne sont pas praticables en saison des pluies et la création de nouvelles routes en vue de désenclaver certaines localités ; la construction des hôpitaux dotés d'un matériel de fonctionnement conséquent ; la construction de nouvelles écoles, lycées et universités afin d'éviter le surpeuplement des salles de classe ; le recrutement d'un grand nombre d'enseignants du primaire, secondaire et supérieur ; la construction de nouveaux barrages hydroélectriques en vue d'augmenter la production du pays en électricité ; le soutien à la recherche et développement dans le secteur agricole en vue d'adapter les moyens de production aux spécificités du climat du Gabon ; le renforcement des infrastructures de télécommunications (satellites, réseau filaire) et l'extension des réseaux d'adduction d'eau et d'électricité pour atteindre les villages les plus reculés. La réalisation de ces dépenses contribuera à améliorer la compétitivité de l'économie. Paragraphe 2 : La stérilisation des revenus pétroliers à l'étrangerLa capacité d'absorption du capital dépend entre autres des caractéristiques de la demande potentielle du produit et de l'étendue du marché, de la disponibilité de la main-d'oeuvre tant sur le plan quantitatif que qualitatif, du niveau de développement des infrastructures de base et de l'environnement juridique et social. Le niveau de satisfaction de ces exigences détermine le seuil d'absorption du capital au-delà duquel toute augmentation 1 J. Fontanel (2001) : L'action économique de l'Etat, L'Harmattan, 2001, p. 98. 37 des dépenses en capital devient inefficace, voire nuisible à l'économie. En dépit d'une stabilité politique relative dont jouit le pays et d'un régime fiscal particulièrement attrayant, les limites constitutives de la capacité d'absorption du Gabon sont multiples. En premier lieu, il y a l'étroitesse du marché intérieur qui limite la rentabilité du capital investi. La mondialisation de l'économie impose la mise en oeuvre des technologies dont les performances aboutiraient au niveau du Gabon à une sous-utilisation des équipements. En deuxième lieu, il y a une insuffisance de main-d'oeuvre qualifiée. Celle-ci résulte des effets conjugués de la faiblesse de la population estimée à 1,267 million d'habitants en 20021, d'un taux d'échec scolaire élevé et de l'inadéquation des qualifications aux besoins des entreprises2. Enfin, en troisième lieu, l'insuffisance des infrastructures de base constitue un handicap comme cela a été souligné plus haut (Cf. supra pp. 30-31) ; certes, un effort a été réalisé dans la mise en place d'un certain nombre d'infrastructures, mais beaucoup reste encore à faire. Pour toutes ces raisons sus-évoquées, la capacité d'absorption du Gabon reste très limitée, d'où un afflux de revenus pétroliers au-delà du seuil d'absorption du pays provoquerait une surévaluation de la monnaie et réduirait la compétitivité de l'économie. Afin d'améliorer cette compétitivité, les Autorités gabonaises peuvent mettre en pratique la stérilisation des revenus pétroliers en plaçant une grande partie de ces fonds dans des actifs financiers à l'étranger. Dans ce cas, chaque génération ne pourra utiliser que les dividendes de ces placements. Cette solution a l'avantage d'avoir déjà été expérimentée en Norvège. Section 2 : L'adoption des politiques oeuvrant pour un retour d'une économie de redistribution à une économie de productionEn vue d'améliorer la contribution des revenus pétroliers au développement du Gabon, les Autorités gabonaises doivent également mettre en place des politiques oeuvrant pour le retour d'une économie de redistribution de la rente à une économie de production de richesses. Ces politiques doivent être axées sur la mise en oeuvre renforcée de la bonne gouvernance et sur la promotion d'un véritable secteur privé industriel. 1 Direction Générale de la Statistique et des Etudes Economiques : « Données statistiques », http://www. stat-gabon.ga/Donnees/index-data.htm, consulté le 10/07/2006. 2 P. Metougue Nang (2001) : « Création d'entreprises et réformes économiques au Gabon. Observations des faits », Laboratoire Redéploiement Industriel et Innovation, Documents de travail, n° 48, décembre 2001, p. 12, http://www-heb.univ-littoral.fr/rii/Docs/doc48.pdf, consulté le 10/08/2006. 38 Paragraphe 1 : La mise en oeuvre renforcée de la bonne gouvernanceParmi les solutions à adopter pour améliorer la contribution de la manne pétrolière au développement du Gabon, la mise en oeuvre renforcée de la bonne gouvernance se présente comme une condition sine qua non dans la mesure où les phénomènes de corruption et de clientélisme, qui perturbent le bon fonctionnement de l'économie, naissent et grandissent du manque de transparence dans la gestion de la chose publique. Pour les élites des milieux politiques et d'affaires, l'absence de transparence permet en effet de préserver les avantages acquis de manière illicite. Dans les pays en développement exportateurs de pétrole, ce manque de transparence naît du déficit de démocratie et de la défaillance des institutions. C'est dans ce sens que M. Mucherie (2005) souligne que « s'agissant de la malédiction pétrolière, il faut préciser qu'elle ne joue pleinement que si et seulement si les «bonnes institutions» (celles qui garantissent un contrôle parlementaire et des contre-pouvoirs, celles qui définissent avec soin et protège les droits de propriété, celles qui organisent la concurrence sur les marchés des biens, du travail et des capitaux) ne sont pas au rendez-vous »1. Au Gabon, par exemple, le manque de transparence résulte de l'absence d'institutions réellement démocratiques et du manque d'un appareil judiciaire véritablement indépendant. Ainsi, en vue de briser les liens de clientélisme qui gangrènent le Gabon et pour reconstruire une économie de production, les détenteurs du pouvoir étatique doivent adopter les principes2 de la bonne gouvernance tels que : - l'obligation de rendre compte : les administrations publiques doivent expliquer aux citoyens la conformité de leur action et des résultats de leurs décisions aux objectifs préalablement fixés dans le cadre du fonctionnement d'une démocratie participative impliquant les institutions et la société civile ; - l'obligation de transparence : le fonctionnement des administrations et entreprises publiques doit être ouvert à l'examen de la Cour des comptes, du Parlement, de la société civile et parfois des institutions extérieurs (Fonds Monétaire International, Banque Mondiale, Transparency International, ...) ; il est à souligner que le Gabon a adhéré en mai 2004 à l'Initiative sur la transparence des industries extractives (EITI), 1 M. Mucherie (2005) : « Economie du pétrole (II), Pétrole et développement : une chance ou une malédiction ? », p. 5, http://www.melchior.fr/melchior/melchior.nsf/html/, consulté le 11/07/2006. 2 OCDE : « Principaux éléments de la bonne gouvernance », http://www.oecd.org/documentprint/0,2744,fr_2649_33735_1814576_1_1_1_1,00.html, consulté le 10/07/2006. 39 initiative qui vise à encourager la publication des transactions entre les Etats et les industries minières et pétrolières ; - la primauté du droit : les autorités publiques doivent veiller à l'égalité des citoyens devant la loi et lutter contre la corruption. La mise en oeuvre effective de ces principes favorisera une allocation efficiente des ressources entre les différents secteurs de l'économie et un développement des activités productives. Paragraphe 2 : La promotion d'un véritable secteur privé industrielLa promotion d'un secteur privé au Gabon repose sur la capacité des Autorités locales à surmonter les pesanteurs administratives et à mettre en oeuvre les réformes structurelles qui s'imposent, eu égard aux difficultés rencontrées par les acteurs privés. Ces réformes sont axées sur le désengagement de l'Etat du secteur productif et sur l'assainissement de l'environnement juridique et administratif des affaires en vue de favoriser l'expansion des petites et moyennes entreprises (PME). L'Etat devrait se désengager des entreprises publiques en raison de leurs déficits chroniques qui pèsent lourdement sur les finances publiques en termes de subventions. Dans certains cas, la privatisation pourrait prendre la forme d'un contrat de gestion à travers lequel l'Etat cède uniquement la gestion de l'exploitation à des opérateurs privés, ce qui éviterait de brader le patrimoine national. En ce qui concerne la Société d'Energie et d'Eau du Gabon (SEEG), cette forme de privatisation a été un succès dans la mesure où l'entreprise réalise des bénéfices depuis sa mise en concession en 1997. Dans d'autres cas, l'Etat pourrait faire appel aux capitaux privés étrangers dont la décision d'investissement est réputée strictement basée sur les critères de rentabilité. C'est le cas, par exemple, de la compagnie Air Gabon dont la privatisation en cours prévoit la vente de 51 % du capital à la compagnie marocaine Royal Air Maroc (RAM), la part de 49 % du capital étant détenue par l'Etat gabonais. S'agissant de la société Gabon Télécoms, la privatisation se fera par la vente de 35 % du capital, couplée à un 40 contrat de gestion. Dans l'optique de la réinsertion des agents licenciés, l'Etat devrait veiller à ce qu'un plan social soit élaboré par le Comité de privatisation de chaque entreprise en partenariat avec les employés. Au Gabon, le dynamisme du secteur privé a beaucoup souffert de « l'environnement des affaires jugé actuellement défavorable »1 à l'expansion des petites et moyennes entreprises (PME). Cette situation résulte en partie du fait que la plupart des petites et moyennes entreprises (PME) présentes sur le territoire national appartiennent à des hommes proches du pouvoir qui en confient la gestion à des prête-noms, de nationalités française ou libanaise. Ainsi, afin d'éviter de soumettre à la concurrence leurs entreprises qu'ils soutiennent avec l'octroi arbitraire des avantages fiscaux et des marchés publics, les détenteurs du pouvoir étatique ont complexifié les procédures juridiques et administratives de création d'entreprises. Par conséquent, « il existe plusieurs interlocuteurs pour l'obtention d'un seul document. Le circuit de légalisation d'une entreprise implique au moins six administrations différentes »2, ce qui contribue à décourager la création d'entreprises. La promotion d'un secteur privé au Gabon exige donc que les pouvoirs publics soient à l'écoute des acteurs privés et que leur volonté de revenir d'une économie de redistribution de la rente à une économie de production compétitive se traduise par des actes concrets sur le terrain. 1 P. Metougue Nang (2001) : « Création d'entreprises et réformes économiques au Gabon. Observations des faits », Laboratoire Redéploiement Industriel et Innovation, Documents de travail, n° 48, décembre 2001, p. 12, http://www-heb.univ-littoral.fr/rii/Docs/doc48.pdf, consulté le 10/08/2006. 2 P. Metougue Nang (2001), Idem, p. 10. 41 CONCLUSIONA la lumière des analyses qui viennent d'être faites, l'abondance des revenus pétroliers au Gabon a provoqué, d'une part, la manifestation du syndrome hollandais qui se traduit par l'expansion du secteur pétrolier et des services au détriment du secteur productif et, d'autre part, le développement des comportements rentiers qui entretiennent les distorsions sectorielles de l'économie et la dépendance du pays vis-à-vis de l'extérieur. Cette situation ne peut être considérée comme une fatalité dans la mesure où il existe des solutions pour améliorer la contribution des revenus pétroliers au développement économique et social du Gabon. Toutefois, il est à noter que ces solutions revêtent un caractère plus politique qu'économique. En effet, le renforcement des infrastructures économiques et sociales et la stérilisation d'une partie des revenus pétroliers à l'étranger relèvent de la compétence du Gouvernement ; de même, l'adoption des principes de la transparence et l'assainissement de l'environnement des affaires sont du domaine des Autorités politiques. Cela implique que si on veut améliorer la compétitivité de l'économie et promouvoir les petites et moyennes entreprises (PME) au Gabon, les détenteurs du pouvoir étatique doivent renoncer aux avantages individuels acquis depuis plusieurs années au profit de l'intérêt général. C'est une chose qui paraît peu certaine dans la mesure où l'habitude devient une seconde nature. 42 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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Source: BEAC : "Etudes et Statistiques", n° 187, décembre 1991 ; n° 220, octobre 1995 ; n° 265, juillet-septembre 20 46 ANNEXE II : Répartition du produit intérieur brut par secteur
Source : BEAC (2004) : "Etudes et Statistiques", n° 279, Janvier 2004. 47 ANNEXE III : Tableau Entrées-Sorties 2001
Source : Direction Générale de la Statistique et des Etudes Economiques.
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