CONCLUSION
Le bouleversement du numérique a modifié
l'organisation de l'ensemble des acteurs mais pas leurs missions principales.
Ces mutations ont offert l'opportunité à de nouveaux entrants de
capter une partie de la valeur qui parfois s'externalise en dehors de la
filière. Il semblerait également que le pouvoir sur internet soit
détenu par une poignée de
45 PRODISS, « Rapport d'activité janvier
2013 - 2014 - Activité et enjeux du spectacle musical et de
variété en France », 2014.
46 L'IFCIC est un établissement de
crédit agréé qui a reçu une mission du
Ministère de la Culture et du Ministère de l'Économie et
des Finances de contribuer au développement, en France, des industries
culturelles, en facilitant pour ces entreprises l'accès au financement
bancaire.
47 Interview de Philippe Nicolas, Directeur du CNV,
« Le spectacle vivant est aujourd'hui à un moment charnière
», in IRMA, novembre 2014.
27
multinationales et la législation n'a pas encore su
s'adapter à la demande des professionnels de la musique qui souhaitent
équilibrer la répartition de la valeur. Quelle stratégie
les acteurs de l'industrie de la musique doivent-ils adopter pour
pérenniser leur présence sur le marché, alors que les
mutations du secteur tendent à diversifier leur activité,
à externaliser les revenus en dehors de la filière, et que les
sources de financement sont limitées voire supprimées ? Comment
les acteurs de la filière s'organisent-ils pour trouver un
équilibre alors que les revenus et les manoeuvres du numérique
sont concentrées par les géants d'internet ?
28
II ANALYSE ARGUMENTÉE DE LA
PROBLÉMATIQUE
Afin de justifier la problématique proposée, il
est nécessaire d'étudier des cas d'entreprises et les opinions de
professionnels, dans le but d'en dégager les perspectives et tendances
du marché. Lors de cette analyse, trois phénomènes se
dégagent et impliquent tous les acteurs de l'industrie musicale.
Néanmoins, les objectifs et les pratiques de communication divergent
selon les types d'acteurs concernés.
A) Le live, une activité croissante du secteur 1.
L'organisation de l'activité live
De l'amont à l'aval de la filière musicale, les
interdépendances entre acteurs privés à but lucratif ou
non et les institutions accompagnent l'évolution d'un artiste. Un
artiste qui débute va se produire dans des lieux de petite jauge comme
les cafés, par l'intermédiaire d'une association locale de
programmation. Grâce à ce contact avec un premier public, il peut
être repéré par des acteurs professionnels, le propulsant
ainsi d'un milieu non lucratif à des structures commerciales. Cependant,
durant toutes ses étapes de gain de notoriété, les
institutions au travers des salles labélisées vont contribuer
à son accompagnement.48
Les artistes en développement, ou reconnus, travaillent
avec un producteur phonographique et un producteur de spectacles. Pour
bénéficier de ce dernier, il faut déjà avoir une
discographie établie et d'actualité afin de s'appuyer de la
promotion média existante. Il existe des exceptions comme le groupe The
DØ qui a été révélé par une
publicité qui a utilisé un de leurs titres comme support sonore,
ou encore BlackBerry Smoke qui a joué à l'Alhambra en affichant
complet, peut-être suite à la diffusion d'un titre dans la
série Sons Of Anarchy. En tant que fan de musique et de séries
télévisées, il m'arrive souvent de découvrir des
artistes ainsi.
Pour les artistes en développement et plus
particulièrement à Paris, le circuit reste à toutes les
étapes dans le circuit privé. En effet, les salles de spectacles
sont des sociétés commerciales indépendantes comme le
Nouveau Casino, ou appartiennent à des autres acteurs de la
filière. L'Olympia a été racheté par le groupe
Vivendi qui lui-même détient déjà Universal Music et
la billetterie en ligne Digitick. Cependant pour le reste de la France, le
circuit privé concerne les salles de jauges supérieures à
1.500 personnes comme les Zéniths.
48 GUILBERT et SAGOT-DUVAUROUX, Gérôme et
Dominique, Musiques actuelles : ça part en live - Mutations
économiques d'une filière culturelle, Paris, 2013, Irma
éditions, 140p.
29
Les lieux de diffusion et les festivals associatifs
travaillent avec les producteurs en achetant des dates d'artistes qu'ils ont en
catalogue. Dans ce type de circuit, le bénévolat est très
important car le fonctionnement de ces structures dépend bien souvent
des volontaires, surtout les festivals. En effet, pour la première
édition en 2014 du Fall Of Summer, pour lequel je suis
bénévole, ce sont plus de 250 bénévoles qui ont
été mobilisés pour deux jours de festivals, 2.000
festivaliers et une trentaine de groupes. Une telle organisation se
prépare au moins un an en avance par des responsables eux-mêmes
bénévoles. Quant au Hellfest, il fait vivre douze salariés
avec un chiffre d'affaires de 12 millions d'euros, programme 170 groupes sur
trois jours avec 2.000 bénévoles pour accueillir 47.000 personnes
par jour.49 Ces exemples montrent l'importance des
bénévoles pour les festivals peu importe leur
notoriété.
2. Les liens entre spectacle vivant et musique
enregistrée
En 2013 le marché de la musique enregistrée
représentait 493 millions d'euros50 contre 656 millions
d'euros de recettes de billetterie en 201251, alors qu'en 2007 la
musique enregistrée pesait 713 millions d'euros, et la billetterie
seulement 471 millions d'euros. Depuis 2006 les recettes de billetteries ont
augmentées de 53%, tandis que celles de la musique enregistrée
ont baissé de 31% depuis 2007. Ces chiffres mettent en évidence
la forte hausse des revenus du spectacle vivant et à l'inverse, la forte
baisse des ventes de musique enregistrée.
La tendance montre que la part du spectacle par rapport aux
musiques enregistrées augmente, notamment à partir des
données de la SACEM. En 2010 les perceptions de doits liés aux
spectacles représentaient 18% de plus que celles des droits
phonographiques et de vidéos. La part du spectacle vivant était
de 9,2% des droits globaux de la SACEM en 2010 contre 8,6% en 2006.
52
49 BOUCHET Claude, « Hellfest 2014 : 10 chiffres
pour convaincre », in France 3 Pays de la Loire, 19 juin 2014
50 SNEP, « Economie de la production musicale en
2013 - édition 2014 », édition 2014.
51 PRODISS, « Rapport d'activité
janvier 2013 - 2014 - Activité et enjeux du spectacle musical et de
variété en France », 2014.
52 GUILBERT et SAGOT-DUVAUROUX, Gérôme
et Dominique, Musiques actuelles : ça part en live - Mutations
économiques d'une filière culturelle, Paris, 2013, Irma
éditions, 140p.
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