IV. DISCUSSION
L'étude que nous avons
menée dans la ZS de Kalamu II, nous a permis de décrire la
volonté et la capacité des chefs de ménage à
financer les soins de santé des PVV.
Au regard de la méthodologie
utilisée, celle-ci présente certainement des faiblesses et des
forces. Etant une étude transversale, il ne sied pas d'établir
une quelconque succession temporelle entre les phénomènes et
variables étudiées. Néanmoins, l'échantillonnage
exhaustif et aléatoire des ménages, associé au traitement
rigoureux et informatisé des données, permettent de prendre en
compte les résultats de cette étude. Leur interprétation
doit être rigoureuse au regard d'autres observations constatées
par d'autres études ailleurs. Une autre faiblesse de l'étude est
liée aux éventuels biais introduits par l'échantillonnage,
la collecte et le traitement des données concernant l'enquête au
sein des ménages. Le biais de non répondants est celui qui
survient lorsque les chefs de ménage éligibles refuseraient de
répondre au questionnaire, ou qu'ils aient été absents
lors du passage des enquêteurs. Un autre biais est celui de mauvaise
classification, qui survient lorsque certains participants à
l'étude sont classés dans des catégories auxquelles ils ne
correspondent pas. Une mauvaise interprétation des items par les
enquêteurs ou par les enquêtés n'est pas non plus à
exclure. La taille de l'échantillon que nous avons étendue
à 420 ménages a permis de réduire l'impact du biais de non
réponses. Par ailleurs, l'enquête se déroulait dans les
après midi à partir de 17 heure, l'heure à laquelle, la
plus part des chefs de ménage étaient déjà de
retour à domicile. Les enquêteurs étaient tenus de repasser
en cas d'absence du chef de ménage jusqu'à le retrouver.
L'amélioration des items des questionnaires après l'étude
pilote, la formation préalable des enquêteurs sur la technique
d'administration des questionnaires, l'utilisation de la langue de choix du
répondant, l'explication au répondant de l'objectif de
l'étude, le libre consentement des répondants de participer
à l'enquête, la garantie assurée de leur
confidentialité, l'utilisation de l'outil informatique pour le
traitement et l'analyse des données, sont autant
d'éléments qui ont contribué à minimiser l'impact
du biais de mauvaise classification.
La force de cette étude est également
liée à sa nature ; étant une étude
descriptive, elle permet d`établir la prévalence et l'ampleur du
phénomène et des variables étudiées. Ces
éléments de prévalence et d'ampleur pourraient servir de
point de départ pour la formulation d'éventuelles
hypothèses à tester avec des études ultérieures
plus approfondies. Une autre force de l'étude réside dans le sens
que les résultats trouvés serviraient aux décideurs
politiques et sanitaires à différents échelons mais aussi
à la communauté, de pouvoir exploiter ces potentialités
cachées.
L'âge moyen du chef de
ménage est d'environ 46 ans. La majorité des ménages est
dirigée par les hommes (56,7%) contre 43,3% des ménages
dirigés par les femmes. Les ménages comptent en moyenne 7
personnes. Les mêmes observations ont été décrites
par une étude «Pauvreté urbaine à
Kinshasa » menée par Francis Lelo Nzuzi et Claudine
Tshimanga Mbuyi dans les communes de Lingwala et Ngaliema où la taille
moyenne des ménages est de 7 personnes tandis que les hommes dirigent
les ménages à 83% contre 17% que dirigent les femmes. Ces deux
études, bien qu'en des proportions différentes, montrent
l'importance des hommes dans la prise des décisions qui engagent tout
le ménage sur la volonté de financer les soins de santé
des PVV.
Dans notre étude, la
proportion des mariés est de 64%. De même lors de l'enquête
nationale sur la situation des enfants et des femmes en RDC (MICS 2), la
proportion des mariés, toutes formes d'unions confondues,
dépassent la moitie des adultes enquêtés. Le mariage
demeure une institution sociale importante dans la vie des hommes et des femmes
de la commune de Kalamu. Ceci justifie même le fait que la proportion
d'unions libres (10%) dépasse celle des célibataires (4,3%).
La différence des proportions,
entre ceux qui ont un niveau d'étude plus ou moins élevé
et ceux qui n'en ont pas, est significative. Elle démontre l'importance
de l'instruction dans la rationalité et la compréhension de
l'intérêt à vouloir financer les PVV.
Le fait de fréquenter une
religion influence significativement la volonté de financer les PVV dans
la mesure où le message véhiculé dans les églises,
est basé sur l'amour du prochain, la charité et le pitié
pour lesquels plus de la moitié des répondants ont
justifié les raisons de la volonté de soutenir les PVV (Tableau
03).
La totalité des
enquêtées ont déjà entendu parler du VIH/Sida dont
nombreux d'entre eux à la TV (89,5%) et à la radio (78,1%). Ceci
montre l'importance des medias audiovisuels dans la sensibilisation de lutte
contre le VIH/Sida. Toute fois cette voie présente aussi des limites qui
justifient les 10% à 22% des enquêtés qui ont entendu
parler du VIH/Sida en dehors de la TV et de la radio pour des raisons tels que
l'absence prolongée du courant électrique, le manque d'une TV ou
d'une radio.
Lorsqu'une relation est bien
établie entre les PVV et la communauté, la proportion de vouloir
financer leurs soins est grande que quand il n'y a aucune relation. Les
ménages ayant une personne souffrant du VIH/Sida ont la volonté
de financer à 100% contre 95,5% de ceux qui n'en ont pas. Mais aussi
plus cette relation est très rapprochée, plus on veut financer
(Tableau 15).
Dans notre étude, les
ménages avec un seul repas représente 48,6%, avec deux repas 49%
et trois repas 2,4%. Nos résultats présentent des
différences avec ceux trouvés par Francis Lelo Nzuzi et Claudine
Tshimanga Mbuyi dans «Pauvreté urbaine à
Kinshasa » où les ménages avec un seul repas
représentent 28,6%, avec deux repas 64,8% et avec trois repas 6,6%.
Cela s'explique par le fait que nos enquêteurs ont eu à poser des
questions sur la nature du repas pour tout le ménage (petit
déjeuner, dîner, souper). Le fait que la totalité des
enquêtés, dans notre étude, accèdent au moins
à un repas pour tout le ménage par jour, ceci indique qu'on a
à faire aux ménages qui ont un niveau de vie modeste ou moyen.
Le salaire constitue la source
principale de revenu auprès d'environ la moitié des
ménages (48,1%).
Les ménages ayant un niveau de
vie élevé acceptent de financer les PVV à 100%, un niveau
de vie moyen à 96,9%, enfin un niveau de vie bas à 94,1%. Ceci
démontre à suffisance que, plus on a un bon niveau de vie, plus
on est disposé à aider les autres, d'où à financer
les PVV.
A l'instar d'autres études,
notre étude montre que seulement une minorité de 4,8% des
ménages sont abonnés à une mutuelle de santé. Cela
se justifie par le fait que pour toute la ville de Kinshasa, on ne trouve qu'un
nombre très limité des mutuelles de santé
organisées, mais aussi les gens ne sont pas assez sensibilisés
sur cette question. Par ailleurs notre étude révèle que
les ménages abonnés à une mutuelle de santé
manifestent tous à 100% la volonté de financer les PVV. Ces
ménages déjà habitués à l'esprit d'entraide,
n'hésitent pas à vouloir financer les PVV.
En moyenne, un ménage
dépense environ 148217,95 FC par mois pour les soins de santé
d'une PVV, ce qui est de loin supérieur aux dépenses moyennes
mensuelles pour l'alimentation, qui s'élèvent à 129960,6
FC. Tandis que la disponibilité de financer mensuellement les PVV par
ménage est moyennement de 2832,75 FC. En divisant la somme des
dépenses moyennes mensuelles des soins de santé des PVV dans les
ménages qui est de 6474800 FC par la somme de montant moyen disponible
à être cotisée dans les ménages mensuellement qui
est de 1141600 FC, cela nous donne un rapport de 5,6. Donc la communauté
est capable de financer les PVV à environ 20% des dépenses des
soins de santé.
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