Dominique SAVRY
MASTER II RECHERCHE DROIT
DE LA SANTE
MEDICAL & MEDICO-SOCIAL
MEMOIRE
LA FRANCE DOIT-ELLE ENCADRER LA
GESTATION POUR AUTRUI
SOUS LA DIRECTION DE MADAME HELENE
GAUMONT-PRAT
2
Année universitaire 2009-2010
REMERCIEMENTS
A ma directrice de mémoire, Madame Hélène
GAUMONT-PRAT qui a accepté de diriger mon mémoire et pour m'avoir
guidé dans mon travail de recherche
A l'ensemble des professeurs
A mes proches pour leur soutien tout à long de
l'année... un très grand merci
A toutes les personnes qui m'ont encouragé
3
SOMMAIRE
INTRODUCTION
|
..4
|
TITRE I : LA GESTATION POUR AUTRUI EN DROIT
EUROPEEN
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CHAPITRE I : SITUATION LEGISLATIVE ET
JURISPRUDENTIELLE
|
7
|
A. DANS QUATRE PAYS EUROPEENS
|
7
|
1. Encadrement juridique
|
7
|
2. Absence de cadre juridique
|
.12
|
|
B. PANORAMA A L'INTERNATIONAL
|
18
|
CHAPITRE II : SITUATION DE LA LEGISLATION ACTUELLE EN
FRANCE...33
A. POINT DE VUE DES ORGANISATIONS NATIONALES ET
INTERNATIONALES
B. OPINIONS DES GRANDES RELIGIONS
|
53
..56
|
TITRE II : LA RESISTANCE DU DROIT FRANÇAIS ENVERS
LA GPA
|
..58
|
CHAPITRE I : ARGUMENTS EN FAVEUR DE LA GPA
|
.58
|
A. D'UN POINT DE VUE JURIDIQUE
|
58
|
B. SUR LE PLAN MEDICAL ET PSYCHOLOGIQUE
|
59
|
CHAPITRE II : ARGUMENTS HOSTILES A LA GPA
|
..63
|
A. L'ARGUMENT JURIDIQUE MAJEUR
|
63
|
B. SUR LE PLAN MEDICAL ET PSYCHOLOGIQUE
|
.63
|
|
CONCLUSION :
|
..68
|
ANNEXE : Propositions des associations MAIA
& CLARA pour l'encadrement de la GPA
|
..70
|
BIBLIOGRAPHIE :
|
72
|
OUVRAGES
|
72
|
ARTICLES
|
73
|
RAPPORTS
|
...75
|
SITOGRAPHIE
|
76
|
4
INTRODUCTION
Les progrès des techniques d'aide médicale
à la procréation (AMP1) peuvent évoluer vers
une ouverture potentielle à la gestation pour autrui (GPA). On distingue
trois hypothèses susceptibles de justifier le recours à l'AMP :
une infertilité pathologique du couple médicalement
diagnostiquée, un risque de transmission à l'enfant d'une maladie
d'une particulière gravité, un risque de transmission à
l'un des membres du couple, lors de la conception de l'enfant, d'une maladie
d'une particulière gravité (nouveauté de la loi de 2004,
introduite pour les maladies virales telles que les infections par le VIH ou
les virus des hépatites B et C).
La GPA ou mère porteuse est une femme qui porte le
bébé à naître d'une autre femme. Elle ne fournit pas
une contribution génétique, c'est-à-dire un ovule, mais
elle met à disposition son utérus. A la naissance elle se
sépare de l'enfant au profit de la mère génétique
(ou sociale en cas de don d'ovules). Cela se pratique en cas
d'infertilité féminine non résolue par les autres moyens
connus.
La confusion concernant la terminologie de «
maternité de substitution ». Elle couvre deux modalités, la
gestation pour autrui et la procréation pour autrui. Dans la gestation
pour autrui, un embryon est conçu avec les gamètes du couple
demandeur (où d'un tiers donneur et transféré dans
l'utérus d'une femme « gestatrice ». dans la
procréation pour autrui, une « mère porteuse » est
inséminée artificiellement avec le sperme de l'homme du couple
demandeur. L'enfant est donc porté mais aussi en partie conçu par
elle. Dans les deux cas, à la naissance, la femme qui a porté
l'enfant le remet au couple demandeur.
Depuis la nuit des temps, l'infertilité féminine
est prise en compte dans la plupart des civilisations : Le Code d'Hammourabi
est l'un des plus anciens recueils de lois écrites trouvé, et de
loin le plus diffusé de son époque. Il fut réalisé
sur l'initiative du roi de Babylone, Hammourabi, en 1750 avant J.-C. Les 282
différents « articles » fixent différentes
règles de la vie courante.
1 Technique médicale destinée à
répondre à la demande parentale d'un couple :
5
Les lois qui y sont rassemblées touchent aux rapports
qui unissent les groupes sociaux, la famille, l'armée, la vie religieuse
et la vie économique. Quatre articles sont consacrés
spécifiquement à l'infertilité féminine et cinq
traitent des conséquences des naissances qui résultent d'un
arrangement reproductif avec une tierce personne.
Au 21ème siècle la gestation pour
autrui (GPA) est au coeur des débats. En France la gestation pour autrui
s'est développée par la pratique dite des « mères
porteuses » dans les années 80, jusqu'à un arrêt du 31
mai 1991 de l'Assemblée plénière de la Cour de
cassation2 interdisant cette pratique. Cette jurisprudence fut
corroborée par la loi de bioéthique de 19943,
confirmée par celle de 20044.
La gestation pour autrui contrevient à une règle
fortement enracinée dans notre droit de la filiation, fondée sur
le vieil adage romain « mater semper certa est », en vertu
de laquelle la mère est celle qui accouche. Aussi fait-elle l'objet de
lourdes sanctions pénales et civiles.
Les femmes qui souhaiteraient avoir recours à la
gestation pour autrui sont stériles, les causes leur infertilité
sont diverses. Il peut s'agir de femmes que le syndrome de
Mayer-Rokitansky-Küster-Hausser prive congénitalement
d'utérus5 ou n'ayant plus d'utérus suite à un
traitement médical (hystérectomie après un cancer ou une
hémorragie de la délivrance, utérus altéré
après un traitement par radiothérapie)6.
Dans la perspective de la révision de la loi relative
à la bioéthique, un certain nombre de rapports
préliminaires ont été rendus. Un seul rapport est
favorable, celui du groupe de travail du Sénat sur la maternité
pour autrui7 (juin 2008).
2 Cass. Ass. Plén., 31 mai 1991, Bull.
n° 4 ; D. 1991, Jur. p. 417, rapp. Y. Chartier et note D. Thouvenin;
J.C.P. 1991, II, n° 21752, communication J. Bernard, concl. Dontenwille
3 Loi n° 94-654 du 29 juillet 1994,
relative au don et à l'utilisation des éléments et
produits du corps humain, à l'assistance médicale à la
procréation et au diagnostic prénatal (J.O., 30
juillet 1994, p. 11060)
4 Loi n° 2004-800 du 6 août 2004,
relative à la bioéthique (J.O., 7 août
2004, p. 14040).
5 Le syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hausser
affecte moins de 100 filles nées par an
6 Hémorragie de la délivrance affecte
moins de 200 femmes par an (rapport de l'agence de la biomédecine 2008
p.42)
7 Contribution à la réflexion sur la
maternité pour autrui n° 421 SÉNAT Michèle
André, Alain Milon et Henri de Richemont
6
Tous les autres se montrent défavorables à la
légalisation de la GPA (rapports de l'Agence de
biomédecine8, de l'OPECST9, du Conseil
d'Etat10, des Etats généraux de la
bioéthique11, de l'Académie de
Médecine12 de même que le rapport d'information de la
Mission d'information sur la révision des lois de bioéthique du
20 janvier 201013.
Le contraste juridique au sein de l'Union Européenne
à ce sujet est stupéfiant. Plusieurs situations sont à
distinguer. Le Royaume-Uni, la Grèce, le Danemark, l'Estonie, la
Géorgie, la Hongrie, la Russie, l'Ukraine reconnaissent et autorisent
dans les textes la GPA. En revanche, beaucoup de pays prohibent
expressément la GPA. Il en est ainsi de l'Allemagne, de l'Espagne, de
l'Italie, du Portugal, de la Norvège, de la Suède et de la Suisse
où des lois en prévoient l'interdiction. D'autres pays ne
disposent pas de tels textes. La GPA est alors pratiquée en dehors de
tout cadre juridique, sans que les conséquences essentielles en
matière de filiation puissent être parfaitement
réglées.
La Belgique, la Finlande sans aucun cadre juridique, les
Pays-Bas où la pratique médicale néerlandaise
reconnaît la GPA, mais pas le droit civil.
Ces antagonismes juridiques se retrouvent à travers de
nombreux pays dans le monde. Les adeptes comme Afrique du Sud, Australie,
Brésil, Equateur, Hong Kong, Israël, Nouvelle Zélande,
Californie, Floride, Canada se trouvent en opposition totale avec l'Arizona, le
Michigan, New York, le Nouveau Mexique, l'Utah, le Japon, les Philippines,
Singapour, le Vietnam.
Ces divergences favorisent le « commerce du ventre
». Le tourisme procréatif se développe entraînant dans
son sillage la réification de la femme, la commercialisation de
l'enfant. Le cadre législatif Français actuel semblerait
prédisposer les couples infertiles à avoir recours à une
mère porteuse hors de l'hexagone. Les problèmes que
soulève la gestation pour autrui sont d'ordre juridique, éthique,
psychologique.
8
www.agence-biomedecine.fr
9 Rapport de l'Office parlementaire des choix
scientifiques et technologiques (OPECST), sur l'évaluation de
l'application de la loi du 6 août 2004 relative à la
bioéthique, 20 novembre 2008
10www.chavrier.fr/IMG/pdf/Etude-bio
C3 A9thique.pdf
11
www.etatsgenerauxdelabioethique.fr
12
www.academie-medecine.fr/UserFiles/File/henrion
rapp 10mars 2009.doc
13Assemblée nationale. Constitution du 4
octobre 1958 enregistré à la présidence de
l'assemblée nationale le 20 janvier 2010.rapport d'information
fait au nom de la mission d'information sur la révision des
lois de bioéthique président Alain Claeys, rapporteur Jean
Leonetti.
7
TITRE I : LA GESTATION POUR AUTRUI EN DROIT EUROPEEN
Nous allons comparer la législation
française avec les différents modèles juridiques de quatre
pays européens, Grande-Bretagne, Grèce, Pays-Bas et
Belgique
CHAPITRE I : SITUATION LEGISLATIVE ET
JURISPRUDENTIELLE A. DANS QUATRE PAYS EUROPEENS
1. Encadrement juridique
La Grande-Bretagne est le premier pays
à avoir légiféré en la matière en autorisant
la gestation pour autrui dès 1985. Le législateur britannique a
été amené à légiférer en
matière de gestation pour autrui après qu'un certain nombre
d'affaires aient secoué son opinion publique14. C'est
toutefois, l'affaire Kim COTTON qui a été déterminante.
Cette jeune femme avait accepté de porter un enfant conçu par
insémination artificielle avec le sperme du père d'intention.
Après la naissance de l'enfant, le père s'adressa au tribunal
pour enfants de Londres qui, constatant que la mère gestatrice (et
également biologique) avait volontairement renoncé à ses
droits parentaux, établit la filiation à l'égard des
parents d'intention. En contrepartie du service rendu, Kim COTTON avait
perçu la somme de 65 000 livres. Cette affaire portée sur la
place publique par les médias fit scandale.
Dès lors, le législateur devait intervenir pour
prévenir le risque de marchandisation du corps humain en matière
de procréation. Plutôt que d'interdire la pratique de la gestation
pour autrui, ce qui aurait été conforme à l'opinion
dominante de l'époque mais également à la position des
pays de l'Union européenne, il prit le parti de l'autoriser mais en y
posant des limites territoriales. En effet, le Surrogacy Arrangements Act
(SAA) de 1985 n'ouvre le recours à cette pratique qu'aux
résidents réguliers sur le territoire britannique.
14 En 1978 l'affaire d'une mère porteuse qui
refusa de remettre l'enfant né aux parents commanditaire. En 1981
où la mère d'intention était un transexuel (Noyes/Turane).
En 1983, des parents d'intention rejettent l'enfant à sa naissance parce
qu'il était atteint de microcéphalie (Stiver/Malaloff).
8
Le principe de la gratuité de la gestation pour autrui
est consacré. Cependant le versement d'une participation
financière en remboursement des frais et autres pertes de revenus subis
par la gestatrice est autorisé. Cette indemnisation se veut «
raisonnable ». Le caractère « raisonnable » du
dédommagement est laissé à l'appréciation des
tribunaux qui prennent en compte le statut social de la gestatrice.
Le contrôle financier entre les couples intentionnels et
les mères porteuses reste néanmoins très difficile. La loi
de 1985 est relative à la maternité de substitution alors que les
lois de 1990 et 2008 sont relatives à la procréation
médicalement assistée.
Le Human Fertilisation and Embryology Act (HFEA) est
adopté en 1990 pour compléter le Surrogacy Act. L'apport
essentiel de ce texte consiste dans la création d'une Autorité de
Fécondation humaine et d'Embryologie, autorité
indépendante dont la mission est de surveiller les services de
traitement et toutes les activités réglementées par le
HFEA.
Le modèle de contrôle des procédures pour
les GPA et l'établissement de la filiation est un modèle
accréditationnel. Seules des cliniques accréditées peuvent
proposer les traitements médicaux nécessaires à la GPA.
Elles soumettent les dossiers présentés par les parents
intentionnels et la gestatrice à un comité d'éthique
indépendant qui statut au cas par cas. Il assure que les deux parties
sont aptes médicalement et psychologiquement à poursuivre le
processus de GPA ; qu'elles ont reçu toutes les informations
nécessaires à l'obtention d'un consentement éclairé
et qu'aucun élément ne risque d'empêcher
l'établissement de la filiation selon le HFEA Act 1990.
Le HFEA est également habilité à donner
des avis sur ces matières au Secrétaire d'état en charge
de ces questions si il en est requis. Cette loi a été
amendée par le nouvel Human Fertilisation and Embryology Act du
13 novembre 2008. Les dispositions de cette nouvelle loi sont entrées en
vigueur en avril 2009. Ses principaux apports consistent dans le fait qu'elle
maintient le caractère non contraignant de contrats de gestation pour
autrui, que les parents d'intention peuvent désormais être
mariés, concubins ou avoir conclu un partenariat civil.
Par ailleurs, cette loi autorise les agences
spécialisées dans l'activité à servir
d'intermédiaire entre les parents d'intention et les gestatrices,
à recourir à la publicité et à
9
se faire rémunérer pour certaines prestations ;
telles que la mise à disposition d'un local afin de permettre aux
intéressés de se rencontrer et la tenue de listes de femmes
porteuses volontaires (article 59 de la loi).
Enfin, elle autorise les couples homosexuels féminins
à recourir à l'assistance médicale à la
procréation (article 42 et suivant) tout en excluant, dans ce cas de
figure, la possibilité d'établir une filiation paternelle
à l'enfant (article 45, alinéa 1er de la loi). La loi
n'a pas prévue de solution dans le cas où les enfants naitraient
avec une maladie ou un handicap.
A la naissance, la mère gestationnelle est
déclarée mère légale de l'enfant. La loi
britannique pose le principe de la filiation maternelle au profit de la
mère porteuse qu'elle soit ou non génétiquement
liée à l'enfant. Dès lors, l'enfant a une filiation
maternelle légalement établie par rapport à la femme qui
l'a mis au monde quelles que soient les circonstances de sa conception et de sa
naissance.
Elle doit déposer avec le père intentionnel une
demande de « Parental Responsability Agreement » qui permet au
père intentionnel d'être reconnu comme père
légal.
Après un délai de six semaines, délai
pendant lequel la loi permet à la mère de substitution de changer
d'avis et de garder l'enfant. Les parents intentionnels déposent une
demande de « Parental Order 15» permettant à la
mère intentionnelle de devenir la mère légale de l'enfant
et annulant les droits parentaux de la gestatrice. Comme le rappelle le
législateur, le « Parental Order » précise que
l'embryon porté par la gestatrice doit être issu des
gamètes d'au moins un des requérants.
Il faut donc un lien génétique entre l'enfant et
au moins l'un des deux parents d'intention. Le couple requérant doit
être soit marié soit lié par un partenariat civil soit
vivant en concubinage stable, être âgé de plus de dix-huit
ans et l'un au moins de ses membres doit être domicilié au
Royaume-Uni. Le domicile de l'enfant doit être celui du couple.
15 Décision judiciaire conférant la
parentalité légale d'un enfant à ses parents d'intention
et établissant sa filiation vis-à-vis d'eux, que ceux qui ont un
lien génétique avec l'enfant.
10
La Grande-Bretagne compte environ une quarantaine de
naissances par GPA chaque année16. A priori la demande ne
serait pas satisfaite car les candidatures pour être mère porteuse
restent insuffisantes. Des couples infertiles se tournent vers d'autres pays
pour trouver une mère porteuse. Les raisons de cet exode sont diverses ;
les couples veulent éviter les procédures, le manque de
mères porteuses, où ne rentrent pas dans les critères
définis par le législateur, délais d'attente trop longs
etc. L'Inde est l'une des destinations où se rendent ces couples en
demande.
La Grèce a une législation qui
diffère quelque peu de la loi britannique. Les actes juridiques
(convention, consentements écrits...) anticipent sur la naissance, et la
décision du juge également. C'est la mère d'intention qui
est réputée comme étant la mère légale.
« Il y a donc ici rupture avec le modèle traditionnel occidental
qui désigne comme mère celle qui accouche de l'enfant.
L'évènement de l'accouchement est ici court-circuité par
une fiction qui en attribue le produit à une autre femme ».
Le contrôle judiciaire intervient avant que l'embryon
puisse être implanté. Le consentement du mari de la gestatrice est
requis. La GPA est réservée aux personnes domiciliées en
Grèce. Cette législation est considérée par
beaucoup comme étant la plus aboutie et la plus satisfaisante.
La distinction entre la législation Britannique et la
législation Grecque est très importante. Dans la première,
c'est la gestatrice qui prend toutes les décisions au cours de la
grossesse et lors de la naissance ; dans la seconde, c'est le couple
d'intention.
Les maternités de substitution ont été
autorisées par la loi n° 3089/2002 du 19
décembre 200217 sur l'assistance médicale à la
procréation, complétée par la loi n° 3305/2005 du 27
janvier 2005. Toute assistance médicale à la procréation
et la maternité de substitution supposent une autorisation
judiciaire. Dans l'article 1458 du code civil, posé en
principe que dans le cas où il est médicalement établi
qu'une femme, mariée ou vivant en concubinage, ne peut assumer la
gestation d'un enfant, elle peut demander à
bénéficier d'une assistance médicale à la
procréation.
16
http://news.bbc.co.uk/2/hi/health
consulté le 16 juin 2010
17
http://www.ciec1.org/Legislationpdf/Grece-Loi3089-2002-19decembre2002PMA
11
Le transfert dans le corps d'une femme, d'embryons qui lui
sont étrangers puis la gestation par elle peut ainsi être
autorisée en vertu d'une décision judiciaire rendue avant le
transfert sous réserve que les trois conditions suivantes soient
réunies :
? Un accord doit être passé par écrit
entre les personnes qui désirent un enfant et la femme qui lui donnera
naissance, le consentement du mari de celle-ci étant également
requis quand il s'agit d'une femme mariée.
? Toute contrepartie pécuniaire est interdite,
excepté le remboursement des frais de grossesse et
d'accouchement ainsi que, le cas échéant, le versement d'une
indemnité correspondant aux salaires perdus par la mère porteuse
durant la grossesse à concurrence d'un maximum évalué par
une autorité indépendante.
?Le consentement doit avoir été donné de
façon libre et éclairée et une limite d'âge est
fixée à cinquante ans pour la femme commanditaire et la
gestatrice.
Toute infraction à la loi est pénalement
sanctionnée par une peine privative de liberté d'au moins deux
ans et par une amende d'au moins 1 500 euros. Les mêmes peines sont
applicables aux intermédiaires.
L'originalité de la législation grecque tient
aux règles relatives à la filiation de l'enfant conçu et
né dans ces circonstances. Portant exception au principe
général « mater semper certa est », qui
gouverne le droit commun de la filiation, la femme bénéficiaire
de l'autorisation judiciaire est réputée être la
mère légale de l'enfant et doit être inscrite comme telle
dans l'acte de naissance dès l'origine.
Toute action en contestation de ce lien de filiation est
irrecevable, sauf si elle est exercée dans les six mois après la
naissance par la mère présumée ou par la gestatrice, et
s'il est prouvé que l'enfant a été conçu avec un
ovocyte de la mère porteuse en violation de la loi. Dans ce cas, la
filiation est rétroactivement établie envers la gestatrice.
La paternité du mari est présumée en
application du droit commun, dès lors que la naissance a eu lieu durant
le mariage ou dans les trois cents jours suivant sa dissolution ou son
annulation. Dans un couple non marié, le concubin doit exprimer par acte
notarié son consentement à l'assistance médicale à
la procréation réalisée grâce à une
mère porteuse, ce qui vaut reconnaissance volontaire de
paternité. Que le couple bénéficiaire soit marié ou
non, la filiation paternelle est ainsi inscrite dans l'acte de naissance.
12
Enfin, la législation grecque n'est applicable qu'au
profit d'une femme domiciliée en Grèce et à condition que
la gestatrice le soit elle aussi.
2. Absence de cadre juridique
La Belgique n?a aucun cadre juridique en
matière de gestation pour autrui. Elle n'est donc ni interdite ni
subordonnée au respect de certaines conditions. Les cas de gestation
pour autrui restent rares18. Il n'existe toutefois aucune
donnée chiffrée sur les gestations pour autrui sans
fécondation in vitro, qui se pratiquent sur la base de
conventions dépourvues de valeur juridique et qui se concluent parfois
par des accouchements anonymes en France.
Par ailleurs, plusieurs centres de procréation
médicalement assistée réalisent des fécondations
in vitro en liaison avec des gestations pour autrui. Il semble que ces
opérations soient toujours entreprises en réponse à des
problèmes médicaux, qui empêchent certaines femmes de
porter un enfant, mais pas de le concevoir.
Ainsi, à Bruxelles, le centre hospitalo-universitaire
Saint-Pierre a mis en place une équipe pluridisciplinaire rassemblant
des médecins, des conseillers sociaux, des psychologues et des juristes
pour traiter les demandes particulières de procréation
médicalement assistée, parmi lesquelles les demandes de gestation
pour autrui. Les parents commanditaires doivent présenter une
mère porteuse à laquelle ils sont liés par un rapport
affectif (amie du couple, soeur ou belle-soeur de la mère
génétique par exemple). La limite d'âge admise pour la
mère génétique est de 43 ans et pour la mère
porteuse, elle varie entre 40 et 45 ans, selon le bilan de santé de
l'intéressée.
Les demandes de gestation pour autrui auprès de ces
centres sont relativement rares (une cinquantaine de dossiers traités
à l'Hôpital de la Citadelle à Liège depuis 1990 et
une vingtaine de dossiers traités à l'Hôpital Saint-Pierre
à Bruxelles depuis 8 ans), on ne dispose d'aucune donnée
officielle concernant les demandes de gestation pour autrui qui
échappent à la sphère médicale (insémination
naturelle).
18
http://www.senat.fr- Étude de
législation comparée n° 182 - janvier 2008 - La gestation
pour autrui Par Mme Michèle ANDRÉ, MM. Alain MILON et Henri de
RICHEMONT
13
Dans la plupart des cas, les parents demandeurs cherchent
eux-mêmes la mère porteuse, le plus souvent parmi des amies ou la
famille. Différentes procédures « visant à faire
transiter » l'enfant de la mère porteuse vers le couple
commanditaire existent:
la mère porteuse va accoucher « sous X » au
Luxembourg ou en France, le père « commanditaire » inscrit
l'enfant à son nom et la mère commanditaire l'adopte; la
mère porteuse accouche avec la carte d'identité de la mère
commanditaire (c'est un crime au sens du Code pénal passible de la cour
d'assises).
La pratique de la gestation pour autrui se déroule en
Belgique apparemment de manière totalement non commerciale, sur la base
d'une convention qui reste juridiquement sans
valeur. Le Comité Consultatif de Bioéthique
Belge a rendu un avis favorable à la gestation pour
autrui19.
En effet, toute convention portant sur la gestation pour
autrui est nulle en vertu de l'article 6 « On ne peut déroger, par
des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre
public et les bonnes moeurs. » et de l'article 1128 du Code
civil20.
La femme qui accouche, est juridiquement
considérée comme la mère, que l'enfant soit non issu de
ses propres gamètes.
Quant à la filiation paternelle, elle dépend de
l'état civil de la mère porteuse. Si celle-ci n'est pas
mariée, le père commanditaire peut reconnaître l'enfant, le
cas échéant avec l'accord de son épouse. Celle-ci peut
ensuite adopter l'enfant si la mère porteuse y consent.
Il est également possible au couple commanditaire de
demander une adoption conjointe. Dans le cas où la mère porteuse
est mariée, c'est son conjoint qui est considéré comme le
père de l'enfant. Alors le père commanditaire ne peut faire
établir sa paternité que dans une seule hypothèse ; celle
où la naissance résulte d'une assistance médicale à
la procréation à laquelle le mari de la mère porteuse n'a
pas donné son accord. Le code civil Belge prévoit à son
article 348-421 qu'un délai de deux mois doit être
écoulé avant que la mère porteuse ne puisse consentir
à adoption ; concrètement, elle peut donc décider de ne
pas consentir à l'adoption.
19 Avis n°30 du 5 juillet 2004
20 Légifrance/ Article 1128 du code civil Belge
« créé par Loi 1804-02-07 promulguée le 17
février 1804 »
21 http//www.senat de Belgique - document
législatif n° 4-633/1
14
La pratique des « mères porteuses »
soulève bon nombre de questions, qui sont à la fois d'ordre
éthique et juridique et qui restent à ce jour sans réponse
précise, en égard au vide juridique existant en la matière
en Belgique.
On constate que la gestation pour autrui n'est
pratiquée que par un nombre limité de centres et sous indications
médicales strictes. Il s'agit principalement de l'absence
d'utérus (congénitale ou par l'ablation de l'utérus, suite
par exemple à un cancer du col de l'utérus) ou de
l'impossibilité d'implantation d'un embryon (par exemple suite à
des lésions graves de l'utérus).
Ces indications médicales sont élargies dans
certains cas, par exemple aux femmes pour lesquelles une grossesse
présenterait un danger de vie important, ou pour des femmes
présentant pour des raisons inconnues, un nombre inhabituel
d'avortements spontanés.
Plusieurs propositions de lois ont été
déposées au cours des dernières années : les unes
préconisent l'interdiction totale de la maternité pour autrui,
assorties de sanctions pénales, tandis que les autres suggèrent,
d'une part, de limiter cette pratique aux cas où la femme qui souhaite
devenir mère ne peut mener une grossesse à terme, d'autre part,
de l'encadrer très strictement.
De nombreux projets de lois pour combler ce vide juridique ont
été également déposés au cours de ces
dernières années, mais aucun n?a à ce jour abouti. En
2004, le Comité consultatif de bioéthique avait
suggéré l'introduction d'une déclaration de
pré-adoption, permettant à la future mère de substitution
de manifester son accord pour mener une grossesse au profit des parents
intentionnels, l'interdiction de toute commercialisation, l'indemnisation des
mères de substitution et la limitation des possibilités de
maternité pour autrui aux seuls cas médicalement
justifiés.
Les Pays-Bas tolèrent la gestation
pour autrui lorsqu'elle ne donne pas lieu à une contrepartie
financière. Elle est admise par le droit médical dans des
conditions restrictives, mais n'est pas reconnue par le droit civil.
15
Deux voies coexistent :
? une voie très encadrée qui passe par la
fécondation in vitro
? une autre voie plus libérale qui s'appuie sur le
droit reconnu à toute mère de confier son enfant à un
couple tiers22.
Un règlement du 1er avril 1998 relatif aux
établissements qui pratiquent la fécondation in vitro
n'autorise la gestation pour autrui au moyen d'une fécondation
in vitro que si elle constitue la seule possibilité pour sa
bénéficiaire de devenir mère et si la gestatrice a
déjà eu au moins un enfant.
De plus, l'intervention doit être réalisée
dans le respect des conditions médicales et psychologiques
définies par les directives de l'Association néerlandaise
d'obstétrique et de gynécologie. A titre d'exemple, le nombre
d'embryons implantés chez la gestatrice doit être limité
à deux, afin de réduire les risques de grossesse multiples, et
les intéressés doivent bénéficier d'un
accompagnement psychologique pendant et après la procédure.
Lorsque cette procédure est suivie, l'adoption peut être
prononcée assez rapidement, car les parents ne font pas l'objet d'une
enquête approfondie.
Entre le 1er juillet 2004 et le 30 mars 2006, les
établissements ne pratiquaient plus la gestation pour autrui.
Après le 30 mars 2006, un seul établissement à Amsterdam
la pratique à nouveau, mais dans des conditions très strictes
s'ajoutant à celles de l'Association néerlandaise
d'obstétrique et de gynécologie. Ce centre exige en effet que les
intéressés aient la nationalité néerlandaise,
maîtrisent la langue, que le père et la mère d?intention
possèdent un casier judiciaire vierge, résident aux Pays-Bas et
signent une convention écrite, bien que le Code civil dénie
à celle-ci toute valeur juridique, par laquelle les parties doivent
régler à l'avance tous les problèmes susceptibles
d'apparaître pendant la grossesse et se mettre d'accord sur les
responsabilités des uns et des autres après la naissance.
22
http://www.senat.fr/Étude
de législation comparée n° 182 - janvier 2008 - La gestation
pour autrui Par Mme Michèle ANDRÉ, MM. Alain MILON et Henri de
RICHEMONT
16
Pour faire établir la filiation de l'enfant à
leur égard, le couple ayant fait appel à une mère de
substitution sans fécondation in vitro peut utiliser le droit
commun de l'adoption, en vertu duquel une mère peut renoncer à
son autorité sur un enfant au profit d'un couple tiers.
La procédure est cependant assez lourde. Les parents
intentionnels doivent signaler la situation à la municipalité de
leur domicile, qui saisit alors le conseil de protection de l'enfance aux fins
d'enquête sociale. Si celui-ci valide la demande des parents, ceux-ci
peuvent, s'ils ont vécu ensemble pendant trois ans et gardé
l'enfant pendant un an, entamer une procédure d'adoption et solliciter
la déchéance de l'autorité parentale de la mère de
substitution.
Dans un arrêt du 21 août 1998, la Cour d'appel de
La Haye a admis que le souhait clairement exprimé de la mère de
substitution de confier son enfant à un couple tiers puisse constituer
un motif suffisant pour lui retirer l'autorité parentale.
Particulièrement libérale, cette deuxième
possibilité reste très peu utilisée, sans doute parce que
le résultat reste malgré tout, en l'absence de législation
spécifique, suspendu à la décision du juge.
Enfin, si les Pays-Bas acceptent la gestation pour autrui, ils
interdisent strictement et sanctionnent pénalement toute activité
de mise en relation d'un couple avec une mère de substitution, passible
de peines pouvant atteindre un an de réclusion et 16 750 euros
d'amende.
Comme en Belgique et au Danemark, aux Pays-Bas une personne,
qui souhaite devenir parent peut demander à une femme de son entourage
de mener à bien une grossesse pour son compte, car le Code pénal
ne punit que les conventions de gestation pour autrui conclues à titre
onéreux.
Par ailleurs, le droit médical néerlandais
reconnaît la gestation pour autrui. En effet, si celle-ci ne fait l'objet
d'aucun texte spécifique, le règlement de 1998 relatif aux
établissements qui pratiquent la fécondation in vitro
détermine explicitement les conditions dans lesquelles cet acte
médical peut être réalisé en liaison avec une
gestation pour autrui. Il faut en particulier que la gestation pour autrui
constitue la seule possibilité pour une femme de devenir mère.
17
Les critères d'acceptation de la mère
d'intention sont l'absence d'utérus fonctionnel (traitement
anticancéreux, hystérectomie pour raison médicale,
syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster23), la contre-indication de
grossesse avec mis en cause d'un enjeu vital et un âge inférieur
à 41 ans.
La mère porteuse ne doit pas dépasser la limite
de 45 ans, avoir eu des enfants sans complications obstétricales. Ses
motivations pour être mère porteuse doivent être «
idéologiques », il doit donc s'agir d'une soeur, belle soeur ou
amie proche du couple d'intention.
De plus, l'opération doit être
réalisée conformément aux directives, extrêmement
détaillées, de l'Association néerlandaise
d'obstétrique et de gynécologie. Outre ces directives, le seul
établissement qui réalise actuellement de telles
opérations applique son propre protocole, qui prévoit des
conditions supplémentaires. Même si le droit civil ignore la
gestation pour autrui, la procédure d'adoption a été
assouplie pour les enfants ainsi nés, la mère porteuse pouvant
toutefois décider de garder l'enfant qu'elle a mis au monde.
La loi néerlandaise24 prévoit un
délai d'un an au minimum avant que l'adoption soit effective, même
si le couple d'adoption accueille l'enfant dès sa naissance.
En conclusion
Provoquer une naissance par cette technique suscite
obligatoirement en plus du cadre juridique, des interrogations éthiques,
sociales, médicales et psychologiques, précisément parce
que le corps des femmes n'est pas à louer et que l'enfant n'est pas un
produit. Le premier argument avancé au profit des mères porteuses
est celui de la liberté individuelle, « libre d'utiliser son corps
».
Les pays autorisant ou n'interdisant pas la GPA rejettent le
terme « réification » car ils ne considèrent pas les
mères porteuses comme un instrument ou un moyen, mais prétendent
qu'elles gardent leur autonomie au travers du choix qu'il leur est
laissé d'avorter ou de garder l'enfant.
23 Pathologie qui se définit par une absence
congénitale de vagin et d'utérus, mais avec des trompes de
Fallope et des ovaires normaux
24 APM International du 24 octobre 2009
18
Il est pourtant impossible de contester que le fait de
prêter ou louer son utérus pendant neuf mois témoigne d'une
réification et d'une instrumentalisation du corps humain, quelles qu'en
soient les raisons.
Nous constatons que ces quatre pays avec ou sans dispositif
juridique n'ont pas pallié aux intérêts de la gestatrice,
de l'enfant, et des parents intentionnels. De plus, l'aspect « financier
», bien que le terme soit enrobé d'une élégante
dénomination de « dédommagement » est bien réel,
et reste incontrôlable.
B. PANORAMA A L'INTERNATIONAL
Il est nécessaire de connaître les autres
législations prises pour la GPA à l'international. Nous allons
repérer à l'aide d'un tableau récapitulatif ces
dispositions.
PAYS PROHIBANT LA GPA
|
EUROPE
|
Allemagne, Suisse, Italie, Espagne, Norvège, Suède,
Autriche, Bulgarie,
Hongrie, Luxembourg, Portugal, République Tchèque,
Slovénie, France
|
ETATS UNIS
|
Arizona, Michigan, New York, Nouveau Mexique, Utah
|
ASIE
|
Japon, Philippines, Singapour, Vietnam
|
PAYS TOLERANT LA GPA
|
EUROPE
|
Belgique, Finlande, Pays-Bas, Danemark
|
RESTE DU MONDE
|
Nouvelle Zélande, Salvador, Slovaquie, Inde
|
PAYS ENCADRANT LA GPA
|
EUROPE
|
Estonie, Grèce, Hongrie, Grande Bretagne
|
ETATS UNIS
|
Californie, Floride
|
RESTE DU MONDE
|
Canada, Brésil, Géorgie, Afrique du Sud, Australie,
Hong Kong, Israël, Iran Russie, Ukraine, Equateur, Argentine,
Corée
|
L'intérêt se porte sur les pays les plus
médiatisés en matière de GPA.
Le Canada, principe de l'altruisme. Seule la
gestation pour autrui altruiste est reconnue, la procréation
médicalement assistée est ouverte à tous :
célibataires, mariés, couples gays, etc. La loi interdit les
intermédiaires payés. Ainsi, en 2004, les agences ont
été fermées afin d'éviter les dérives
commerciales. Ce qui n'empêche pas la recherche d'une «compensation
raisonnable». La gestatrice a le droit de décider de garder
l'enfant.
19
Le Canada dispose d'un système juridique particulier
puisqu'il existe d'une part des Lois Fédérales destinées
aux treize provinces, et d'autre part, des règles qui varient d'une
province à l'autre.
Dans le Chapitre 2 du droit fédéral, la loi du
29 mars 2004 concernant la procréation assistée et la recherche
connexe, la première mention du terme «mère porteuse»
se trouve dans le paragraphe 3 intitulé «définitions et
application».
Ainsi, la mère porteuse est définit comme
«une personne de sexe féminin qui porte un embryon ou un
foetus issu d'une technique de procréation médicalement
assistée et provenant des gènes d'un ou plusieurs donneurs, avec
l'intention de remettre l'enfant à un donneur ou à une autre
personne à la naissance».
Dans la partie de la loi consacrée aux actes interdits,
l'article 6 traite de la gestation pour autrui. Les trois premiers
alinéas de cet article interdisent la gestation pour autrui à
titre onéreux ainsi que toute activité
d'intermédiaire. D'après le premier
alinéa:
«Il est interdit de rétribuer une
personne de sexe féminin pour qu'elle agisse à titre de
mère porteuse, d'offrir de verser la rétribution ou de faire de
la publicité pour le versement d'une telle
rétribution».
L'alinéa 2 prohibe toute activité
d'intermédiaire. Il est ainsi «interdit d'accepter d'être
rétribué pour obtenir les services d'une mère porteuse,
d'offrir d'obtenir ces services moyennant rétribution ou de faire de la
publicité pour obtenir de tels services»
L'alinéa 3 interdit le fait de rétribuer un
intermédiaire quelle que soit sa prestation: « il est interdit
de rétribuer une personne pour qu'elle obtienne les services d'une
mère porteuse, d'offrir de verser cette contribution ou de faire de la
publicité pour le versement d'une telle contribution.»
Toute personne qui contrevient à ces interdictions
encourt une amende maximale de 500 000 dollars canadiens (soit environ 340 000
euros) et un emprisonnement maximal de dix ans, ou l'une de ces peines. Ainsi,
la loi du 29 mars 2004 sur la procréation assistée autorise
implicitement les contrats de gestation pour autrui à titre gratuit.
20
En effet, l'alinéa 4 de l'article 6 fixe l'âge
minimum de la mère porteuse à 21 ans:
«Nul ne peut induire une personne de sexe féminin
à devenir mère porteuse, ni lui conseiller de le devenir, ni
pratiquer un acte médical pour aider une personne de sexe féminin
à devenir mère porteuse, s'il sait ou s'il a des motifs de croire
qu'elle a moins de vingt et un ans.»
De plus, l'alinéa 5 énonce:
«Le présent article ne porte pas atteinte,
à la validité, en vertu du droit provincial, de toute entente aux
termes de laquelle une personne accepte d'être mère
porteuse.»
Par ailleurs, l'article12 interdit de rembourser les frais
supportés par une mère porteuse, sauf si le remboursement est
autorisé et conforme à un règlement, qui n'a pas
été publié à ce jour. Il y a donc une autorisation
implicite des mères porteuses.
Cependant, la validité d'une convention de gestation
pour autrui à titre gratuit et la filiation d'un enfant né dans
ces circonstances relèvent du droit provincial.
Au Québec, l'article 541 du code civil du
droit provincial déclare: 25
«Toute convention par laquelle une femme s'engage
à procréer ou à porter un enfant pour le compte d'autrui
est nulle de nullité absolue.»
En Alberta, la loi de 2003 relative à
la famille prévoit que les contrats de gestation pour autrui ne sont pas
exécutoires et ne peuvent pas permettre de prouver que la mère
porteuse consent à se séparer de l'enfant qu'elle a mis au monde.
Toutefois, le juge peut, à la demande de la mère
génétique et si la mère porteuse en est d'accord,
déclarer que la mère génétique est la mère
légale de l'enfant. La requête ne peut pas être introduite
moins de quatorze jours après la naissance de l'enfant.
En Nouvelle-Écosse, le
règlement sur l'enregistrement des naissances permet au juge d'attribuer
la filiation juridique aux parents commanditaires lorsque certaines conditions
sont remplies. Il faut en particulier que l'accord entre la mère
porteuse et le couple soit antérieur à la conception et que
l'enfant soit génétiquement celui de l'un au moins des deux
membres du couple.
25 Étude de législation comparée
n°182 - janvier 2008 - La gestation pour autrui
21
Dans la plupart des autres provinces, la situation juridique
est plus incertaine du fait de l'absence de loi visant expressément le
contrat de gestation pour autrui.
S'agissant de l'établissement de la filiation, en
général, les lois provinciales protègent la femme qui
accouche: elle seule a le droit de décider si elle garde ou non
l'enfant. Toutefois, la jurisprudence prend parfois en compte les arguments des
parents commanditaires.
Ainsi, en 2003, en Colombie-Britannique, la
justice, saisie d'une affaire dans laquelle les parents
génétiques demandaient leur inscription en qualité de
parents légaux sur le registre des naissances à la place de la
mère porteuse, a accédé à la demande des parents
génétiques en invoquant l'intérêt supérieur
de l'enfant.
Le débat autour de la gestation pour autrui existe
depuis de nombreuses années au Canada. En 1993
déjà, le rapport de la Commission Royale sur les nouvelles
techniques de reproduction préconisait l'interdiction de la
commercialisation de la maternité de substitution.
Jusqu'à l'adoption de la loi de 2004 sur la
procréation assistée, les établissements appliquaient leur
propre code de conduite et la mère porteuse était le plus souvent
rétribuée par le couple commanditaire, en moyenne entre 12 000 et
20 000 dollars canadiens.
Le nombre exact de gestations pour autrui n'est pas connu,
mais semble peu élevé. À la fin des années 90, IVF
Canada, une des plus importantes cliniques privées de fécondation
in vitro du pays traitait annuellement cinq ou six cas
résultant de contrats de gestation pour autrui.
Les couples rencontrent beaucoup de difficultés pour
trouver une mère porteuse, qu'ils doivent recruter eux-mêmes et
qu'ils ne peuvent pas rémunérer. Ils procèdent par voie
d'annonces, le plus souvent sur Internet, et sont tentés de la
rémunérer en espèces sans établir de contrat ou de
se rendre aux États-Unis, où ils font appel à des agences
commerciales spécialisées.
Malgré le langage sans ambiguïté de
l'article 541 du Code civil du Québec (CCQ), qui stipule que «Toute
convention par laquelle une femme s'engage à procréer ou à
porter un enfant pour une autre personne est nul de nullité
absolue».
Un couple de Québec, a récemment demandé
à la Cour de reconnaître une situation de fait et de donner
à un enfant né d'une mère porteuse, la maternité de
substitution d?une
22
filiation matérielle différente de celle du
biologique26.
Après plusieurs tentatives infructueuses pour
concevoir, le couple en question a décidé d'utiliser une
mère porteuse (avec le sperme du conjoint) afin de satisfaire son
désir d'avoir un enfant et en conséquence, une petite fille est
née dans un hôpital de Québec. Le couple, et la mère
porteuse, ont omis volontairement de remplir la section de l'acte de naissance
sur l'identification de la mère et seulement reconnu la filiation
paternelle.
Ainsi, le jugement relate que «les cases 8 à14 qui
permettent d'identifier la mère biologique du bébé n'ont
pas été complétées (cases vides).
Il ne s'agit manifestement pas d'un oubli. Le père de
l'enfant a rempli les cases 15 à 21 réservées à
l'autre parent et il est le seul à avoir signé le formulaire en
présence d'un témoin signataire ayant le même nom de
famille que le sien » Leur plan était pour le père de
consentir à l'adoption légale de l'enfant par sa conjointe, qui
serait alors devenue juridiquement la mère de l?enfant.
Toutefois, le juge a rejeté la requête du couple
pour l'adoption, laissant le certificat de naissance de l'enfant sans filiation
maternelle. Dans son jugement, le juge a tout d'abord déclaré que
le consentement du père à l'adoption par sa conjointe
était entaché, car elle faisait partie intégrante d'un
processus illégal qui était contraire à l'ordre public.
Et d'autre part, le projet parental du couple était
contraire à la loi puisqu'il consistait à
présenter à la Cour une situation de «fait
accompli», le couple présumant que la Cour serait ému par
leur histoire et mettrait donc l'intérêt de l'enfant au-dessus
d'autres principes existants du droit.
La Cour a également noté que bien que
«l'intérêt de l'enfant" était un principe important,
ce n'était pas le seul facteur décisif, et comme tel, il ne
devrait pas remplacer ou faire nulles et non avenues toutes les
illégalités préalables.
La Cour a en outre élargi que l'enfant n'a pas droit
à une filiation maternelle à tout prix, et en tant que telle, la
fin ne justifie pas les moyens. « L'intérêt de l'enfant, tout
important soit-il, n'est pas un argument fourre-tout permettant tout et son
contraire, comme le
26 2009 CCQ 628 Chambre de la jeunesse 6 janvier 2009
n°450-43-001005-088
23
rappellent les professeurs Deleury et Goubau27 :
« Affirmer le principe de la primauté de l'intérêt de
l'enfant ne signifie donc pas que cette notion permet de faire n'importe quoi,
n'importe comment, chaque fois qu'il s'agit d'un enfant. Encore faut-il que les
décisions respectent les autres règles de droit ». Les
parents n'ont pas fait appel de cette décision.
La Floride, état où les lois
relatives à la gestation pour autrui sont exceptionnellement
progressistes, où la «surrogacy» est
autorisée, mais il n'y a pas de loi fédérale. En revanche
la Floride a une disposition qui doit être soulignée : « le
couple demandeur est d'accord pour accepter la garde et assumer
entièrement les droits parentaux et la responsabilité de l'enfant
immédiatement après sa naissance, sans tenir compte
d'éventuels troubles mentaux ou moteurs de l'enfant ».
Tout passe par l'intermédiaire d'agences
spécialisées, qui mettent en relation les parents intentionnels
et les futures gestatrices. Les agences sont extrêmement
organisées, elles possèdent toutes leur site internet, des
traductions en plusieurs langues y sont assurées.
Tout est cadré, le couple et la gestatrice doivent
« matcher » : c'est un choix mutuel. Les deux parties sont
représentées par un avocat spécialisé. Tout est
prévu et consigné dans un contrat. L'argent est
déposé sur un compte, la somme se situe entre 25.000 et
50.000dollars, l'ensemble de la procédure peut coûter 80 000
à 100 000 dollars28.
Au quatrième mois de grossesse, un jugement en
parenté institue une filiation avec les parents intentionnels. L'avocat
gère également le séjour à la clinique, il s'occupe
du certificat de naissance, de la sécurité sociale et du
passeport. «La moyenne est de dix-huit mois pour repartir avec son
bébé29.» Les enfants sont protégés
des problèmes liés à la filiation.
27 Edith Deleury et Dominique Gourbau- Le droit des
personnes physiques 4è Edition, juillet 2008 Editions Blais Yvon
28Http// :surromomsonline.com
29 Revue de presse de l'Agence de la
biomédecine du 17 novembre 2009 p.6
24
La loi exige que le contrat précise que les parents
commanditaires doivent être âgés de 18 ans et mariés,
que la gestatrice doit également avoir 18 ans. Un médecin
agréé doit confirmer l'infertilité de la mère
d'intention et doit affirmer que la future mère porteuse a une
excellente santé et qu'elle est peut mener une grossesse sans risque.
Elle a l'obligation de se soumettre à des examens médicaux et
psychologiques. Puis à des tests prénataux afin d'assurer un bon
suivi de gestation. La loi autorise les dépenses à des fins
médicales, psychologiques, juridiques et de soins psychiatriques de la
gestatrice, à régler par les parents d'intention.
Bien que ces montants ne soient pas clairement définis,
ils doivent rester dans un cadre raisonnable. La gestatrice doit s'engager
à tenir une bonne conduite de santé ; ne pas boire d'alcool, ne
pas fumer, ne pas consommer de caféine, stupéfiant, drogue etc.
Cet engagement se conclut généralement oralement entre le couple
d'intention et la gestatrice, mais à la demande des parents d'intention
cela peut être mentionné dans le contrat.
La Californie, est seule à disposer
d'une jurisprudence confirmée reconnaissant la gestation pour
autrui30. La pratique est bien établie, un système
d'autorisation tant du couple commanditaire que de la mère porteuse est
fondé sur des critères médicaux et sociaux.
Dans l'affaire Johnson V.CALVERT en 1993, la Cour
suprême de Californie a établi pour la première fois que
les parents légaux d'un enfant étaient ceux qui avaient
l'intention de l'être dès la conception.
Dans cette affaire, où la mère porteuse et la
mère génétique se contestaient mutuellement la filiation
maternelle, la Cour suprême a considéré qu'elles
étaient toutes deux les mères « naturelles » de
l'enfant, puisque, selon la loi californienne, la maternité est
prouvée soit par l'accouchement soit par un test
génétique. Pour établir la filiation juridique, il
fallait, selon la Cour suprême, se placer au moment de la conception.
À cette date, seule la mère biologique avait l'intention
d'être la mère de l'enfant. Par conséquent, c'est elle qui
a été reconnue comme la mère légale de l'enfant.
30 Source
www.senat.fr Étude de
législation comparée n° 182 - janvier 2008 - La gestation
pour autrui
25
Par ailleurs, les tribunaux ont progressivement admis que les
parents commanditaires peuvent, s'ils sont les parents génétiques
de l'enfant à naître, obtenir avant la naissance une
décision judiciaire leur attribuant la filiation.
Ils peuvent en effet, par une procédure à
laquelle la mère porteuse et son éventuel conjoint doivent
consentir, demander au tribunal qu'il rende, avant la naissance, une
décision selon laquelle :
?Ils sont les parents légaux de l'enfant et ont le droit
de lui donner un prénom
?La mère porteuse et son conjoint n'ont pas de droit ni
de responsabilité légale à l'égard de l'enfant
?Le personnel de l'établissement où
l'accouchement a lieu doit porter le nom des parents commanditaires sur la
déclaration de naissance.
«La Californie, Disneyland de la
fertilité31» : l'expression popularisée ces
dernières années s'impose face à l'afflux de
«touristes procréatifs» dans l'Etat américain le plus
libéral et le plus expérimenté en la matière.
Même si beaucoup d'états reconnaissent le recours aux mères
porteuses, la Californie reste, traditionnellement, une grande destination des
couples infertiles du monde entier. Une agence «Center for Surrogate
Parenting » logée dans un gigantesque bâtiment en banlieue de
Los Angeles, organise 75 à 85 naissances par an pour principalement des
couples américains, gay dans 10 % des cas (une catégorie en
hausse) et des couples hétérosexuels étrangers (35 % de la
clientèle, elle aussi en hausse).
Sans forcément refléter l'opinion
américaine sur la question, la Californie a l'avantage d'un cadre
juridique très favorable à la gestation pour autrui. La
création de l'Academy of California Adoption Lawyers, organisation
d'avocats spécialisés dans les contrats de mères
porteuses.
Le couple demandeur s'y sent protégé car la
mère-porteuse est déchue de ses droits parentaux, même
quand le couple n'a pas de liens biologique avec un bébé
conçu grâce à des dons de sperme et d'ovocytes.
31
http://www.liberation.fr 3
novembre 2007
26
La GPA est un véritable business. Les parents
sélectionnent la mère porteuse selon ses traits physiques, son
niveau d'études et sa bonne hygiène de vie. Les agences
s'assurent que les candidates n'ont pas de casier judiciaire ni de dettes.
Si les coûts de procédure sont
élevés (entre 50 000 euros et 100 000 euros selon les cas), la
mère-porteuse reçoit de 2000 à 20 000 euros. Cette somme
serait une compensation pour la douleur, la souffrance, la gêne, la perte
de rémunération, les voyages et autres frais divers liés
à la grossesse. Les candidates choisies ont entre 21 et 42 ans, sont
déjà mères et dotées d'une assurance
médicale.
Pour ces couples infertiles en quête de
bébé, les sommes demandées sont exorbitantes et tous les
couples n'ont pas forcément les fonds. Pour cela les agences proposent
des financements, et dirigent les personnes vers leurs propres bureaux de
prêts.
Une étude ethnographique sur la maternité de
substitution a été menée. Cette étude unique a
été menée par Helena Ragone32 qui a
constaté deux attitudes émanant des couples intentionnels.
? « Egalitariste » qui voulait garder une relation
avec la gestatrice, afin de lui prouver leur reconnaissance et de ne pas la
traiter comme une couveuse.
? « Pragmatique » ont abandonnés toute
relation avec la gestatrice considérant que cette dernière avait
effectuée un travail pour lequel elle avait été
payée, et surtout pour être totalement fusionnels avec
l'enfant.
Les Etats-Unis comptaient 1000 naissances par gestation pour
autrui en 200733, le chiffre en 2009 était de
600034 d'après John WELTMAN, directeur de Circle Surrogacy.
La société Circle Surrogacy est l'une des sociétés
les plus importantes servant d'intermédiaire entre les mères
porteuses et les familles.
Cette organisation de la « naissance » a
réalisé une croissance de 6000% en douze ans et espère
doubler d'ici les trois prochaines années. Ce « bébé
business » génère des procès concernant les
mères porteuses. Une recherche sur le moteur de recherche « medline
» fait état de plusieurs dizaines de procès aux
Etats-Unis.
32 Ragone, Helena. Maternité de
substitution: Conception dans le coeur. Boulder, Colorado: Westview Press,
1994.
33 Bioéthique Propos pour un dialogue ;
Editions Lethielleux 2009 ; Monseigneur Pierre d'Ornellas p.112
34
http://mereporteuse.us suggorate
mother ; center for human reproduction
27
Ces procès intentés relèvent de raisons
multiples, comme par exemple une mère porteuse qui ne voulait pas
arrêter de fumer, ou ne souhaitait pas avorter d'un enfant atteint d'un
handicap35.
Pour mémoire en 2000 c'est l'affaire
Mennesson36 qui éclate, Dominique et Sylvie
Mennesson rentrent des Etats-Unis avec leurs deux filles, Isa et Léa,
nées en Californie d'une mère porteuse. Le couple veut inscrire
les deux enfants sur les listes d'état civil français. Or, en
France, la loi interdit la gestation pour autrui, et la mère
légale est traditionnellement celle qui accouche. S'en suit une longue
bataille judiciaire, au pénal puis au civil. Au nom de
"l'intérêt supérieur de l'enfant", deux premiers jugements,
en 2005 puis en 2007 en appel, donnent d'abord raison au couple. Mais en 2008,
la Cour de cassation renvoie l'affaire en appel. Dans un arrêté du
18 mars 2010, la Cour d'appel de Paris refuse l'inscription à
l'état civil français des deux enfants, sans remettre en cause le
lien avec leurs parents établi par le droit Californien.
En conclusion
Le continent américain est l'une des grandes industries
du ventre, d'ailleurs les Etats-Unis ont trouvé une phrase d'accroche
publicitaire, womb for rent « ventre à louer ». Nous usons
d'euphémismes pour masquer ce qui se passe réellement sur le
marché des bébés. Mais peu importe le terme
employé, encore une fois le triste constat est « l'aspect financier
». L'encadrement juridique est mis en exergue, peut-être pour mieux
traiter les mères porteuses comme des instruments à
procréer, les parents d'intention sont « protéger » de
quoi exactement ! Quant à l'enfant il est réifié, c'est
une commande, d'ailleurs certaines agences parlent de « livraison »
de l'enfant.
35 Spar Debora « the political economy of
commercial surrogary» review of international political economy
p.287-309
36 L'affaire Mennesson », opposait, d'une part
un couple français ayant eu recours en 2000, conformément au
droit de l'état de Californie, aux services d'une gestatrice, et,
d'autre part, le ministère public. La gestatrice avait mis au monde deux
enfants issus d'une FIV réalisée avec l'ovocyte d'une donneuse et
les spermatozoïdes du mari, et la Cour Suprême de Californie avait
conféré aux deux français la qualité de père
et de mère de ces enfants. Le ministère public arguait « de
l'atteinte à l'ordre public » pour demander lannulation
de la transcription, sur les registres français de l'état civil,
des actes de naissances des enfants.
28
L'Inde37, le nouvel eldorado. Plus
de trois mille maternités pratiquent la gestation pour autrui, tout
à commencer à New Delhi puis très vite ce « commerce
juteux » s'est délocalisé sur le territoire indien. La loi
indienne l'autorise depuis 2002, comme dans de nombreux autres pays, mais
l'Inde a réussi à en faire un commerce viable, grâce aux
mêmes atouts que pour les autres domaines de l'externalisation: un vaste
réservoir de main d'oeuvre à bas prix. Ce pays est l'un des rares
à en autoriser la pratique commerciale.
Les cliniques ont leur site sur internet, certaines proposent
des formulaires de candidature pour les gestatrices, la postulante doit avoir
eu au moins un enfant et répondre à une série de
questions. Les couples demandeurs étrangers auraient quadruplés
en un an. Le prix se situe entre 10 000 et 30 000 euros pour une GPA. Ce
marché en pleine croissance était estimé en 2008 à
environ 380 millions d'Euros. Sa montée en puissance est effrayante.
Des cliniques dédiées à la GPA
accueillent les mères porteuses durant toute leur grossesse dans des
résidences spécialement construites à cet effet. Les
femmes peuvent pendant leur gestation apprendre l'anglais, l'informatique.
Elles vivent éloignées de leurs familles, se sont des «
couveuses ». Elles peuvent recevoir de la visite, mais restent sous
surveillance continue pendant tout le temps de la gestation.
Nous citerons en exemple la clinique du Docteur Nayna PATEL
dans l'ouest de l'Inde qui est très organisée, les dossiers sont
traités de A à Z, de la mise en relation des couples
stériles et des futures mères porteuses, au suivi post-natal en
passant par la grossesse et la naissance.
L'Inde, avec ses médecins formés en Angleterre
et aux USA, paraît sécurisante et être une destination de
choix pour les couples en désir d'enfant, pourtant les praticiens sont
peu regardants sur l'éthique et la déontologie du métier.
Des tarifs très concurrentiels comparés à ceux
pratiqués en Europe ou en Amérique sont de plus très
attractifs. Il est convenu que la gestatrice portera l'embryon implanté
dans son utérus et préalablement obtenu par la fécondation
in vitro. Ici, on ne s'embarrasse pas avec l'éthique médicale,
les ovocytes sont achetés dans la même clinique si ceux de la
mère d'intention ne sont pas viables, ou si elle est dans
l'incapacité d'en produire. La clinique fait également office de
« supermarché ».
37 Revue de presse de l'Agence de la
biomédecine du 05/06/2008 p.10
29
La protection juridique des gestatrices tient dans les
quelques lignes d'un contrat passé avec le couple demandeur. Le point
d'orgue du contrat concerne la rémunération. Une clause en cas
d'accident ou de malformation du bébé reste très allusive,
en cas de décès de la mère porteuse, rien n'est
mentionné.
Les directives données par Le Conseil Médical
Indien38 sont jugées insuffisantes par les défenseurs
des droits des femmes. La section 3.10 de cette directive recommande que
l'âge maximum légal de la gestatrice soit fixé à 45
ans, l'âge minimum légal n'est pas indiqué. La protection
de l'enfant et des parents d'intention est inexistante.
La loi indienne ne précise rien quand aux droits de
l'enfant. Deux affaires récentes ont bousculées quelque peu la
Cour Suprême de l'Inde.
? l'affaire Bébé Manji39 » Selon
la loi indienne l'enfant doit être rattaché au passeport de sa
mère pour pouvoir quitter le territoire indien. Dans le cas du
Bébé Manji, sa mère biologique ne voulait plus du
bébé et la mère porteuse ne voulait pas le garder.
? Des jumeaux nés de GPA dont le père est
homosexuel, le problème que rencontre le père est la non
reconnaissance de la France des enfants nés de GPA et que par
conséquent la nationalité française ne peut leur
être donnée.
L'Inde doit légiférer40 pour la
gestation pour autrui, la ministre indienne, Renuka CHOWDHURY prévoit de
légaliser la gestation pour autrui rémunérée car il
n'est pas question d'interdire la pratique commerciale mais de mieux la
réguler, quand à la protection des couples étrangers cela
reste flou.
Le projet de loi Assistance Reproductive Technology (ART) 2010
qui doit prochainement être soumis au Parlement devrait permettre aux
femmes célibataires de devenir mères porteuses pour des couples,
des célibataires et des homosexuels. Alors que l'Inde apparaît
déjà comme un centre mondial des mères porteuses, avec un
business juteux dans le « tourisme de la fertilité », cette
mesure radicale devrait encore augmenter les profits de cette industrie.
38 Organisme public de recherche
39
http://mereporteuse.info/stati/droit_compare.html
40 Hindustan Times du 26 juin 2010 ;
www.Génèthique.org
30
En 2009, un rapport de la Commission des lois décrivait
l'industrie ART comme un « vase d'or », affirmant
qu' « en Inde, les utérus sont à louer, ce qui se traduit
par des bébés pour les étrangers et en dollars pour les
mères porteuses indiennes ».
L'âge légal minimum pour les gestatrices serait
de 22 ans elles auraient un suivi psychologique après l'accouchement. Le
projet de loi indique que chaque femme qui choisira de « louer son
utérus » ne pourra porter que cinq enfants contre
rétribution. Mais vu l'état de prévarication de ce pays,
il se pourrait bien qu'au final ce chiffre ne soit qu'indicatif, d'autant qu'il
sera difficile de le contrôler.
Le couple commanditaire règlera entre 10 000 et 28 000
euros à la clinique, la gestatrice touchera entre 3000 et 5000 euros. Un
autre accord stipule que la mère porteuse s'engage à «
livrer » le nouveau-né au couple, immédiatement après
l'accouchement, renonçant à toute revendication de
maternité sur le bébé. Si la grossesse n'aboutit pas, la
mère porteuse n'aura pas droit à son « salaire ».
L'avocat Rajiv DHAVAN du Public Interest Legal Support and
Research Centre qui a joué un rôle crucial dans
l'élaboration de ce projet de loi. Interrogé sur la
conformité d'une telle loi par rapport aux valeurs indiennes
traditionnelles, Rajiv DHAVAN affirme qu'il n'y a dans ce projet de loi aucune
attaque contre l'institution de la famille en Inde.
A Bombay, une clinique est déjà
spécialisée dans les mères porteuses pour des couples
homosexuels. Son directeur se félicite de ce projet de loi, la location
d'un utérus pourrait devenir bientôt une expérience
totalement légale exempte de tout problème, aussi bien pour les
Indiens que pour les couples étrangers cherchant des mères
porteuses dans le pays.
Un package touristique est prévu, il comprenant le
voyage, l'hébergement dans des hôtels de luxe, des sorties
culturelles, etc. Il est garanti à des prix dérisoires pour un
touriste occidental. Les Américains, bien que pouvant faire appel
à la technique des mères porteuses chez eux,
préfèrent l'Inde. Non seulement ils déboursent moins, mais
ils ont aussi la garantie que les mères porteuses mènent une vie
plus saine et n'abusent ni d'alcool, ni de tabac, ni de drogue41.
L'Ukraine, située aux portes de
l'Union européenne, devient un pays de référence pour
cette pratique, interdite ou strictement limitée dans la majorité
des états européens mais
41
http://www.elwatan.com/Inde-un-bebe-a-tout-prix
31
légalisée depuis 2004 dans cette
ex-république soviétique. « La demande pour la
maternité de substitution en Ukraine a triplé en trois ans
», le tarif est lui aussi dans une courbe de croissance significative pour
la mère porteuse, aujourd'hui il faut compter qu'il sera verser à
la mère porteuse 500 euros par mois pendant toute la grossesse et de
16000 euros à l'accouchement. Ces sommes représentant 10 ans de
salaire. Le salaire moyen est de 170 euros et où 30 % de la population
vivait sous le seuil de pauvreté avant même la crise
économique mondiale.
L'Ukraine est reconnue pour un des pays ayant d'excellents
centres de maternité de substitution au monde. La maternité de
substitution est légale en Ukraine et elle est réglée par
le Code de la famille d'Ukraine en vigueur et par une série d'autres
règlements. On obtient librement les droits à la paternité
et à la maternité. L'article 123-2 du Code de la famille
d'Ukraine établit l'origine de l'enfant en appliquent des
méthodes d'insémination artificielle et déclare le couple
d'époux qui a donné ses gamètes et a profité de
services d'une mère porteuse, parents de l'enfant né par
celle-ci. L'article 123-3 assure la possibilité d'utiliser les ovocytes
de donneuse, l'embryon sera reconnu comme étant
génétiquement celui des deux parents. L'annexe de la Loi
d'Ukraine "Sur la transplantation des organes et d'autres matières
anatomiques humaines" en date du 16 juillet 1999 stipule que les époux
qui ont consenti à l'application de technologies reproductives
auxiliaires possèdent intégralement l'autorité et les
devoirs parentaux par rapport aux enfants nés à la suite de ces
méthodes.
La loi ukrainienne exige seulement que les parents
génétiques soient mariés et ne puissent pas avoir
d'enfant. La mère porteuse doit être majeure et avoir
elle-même au moins un enfant en bonne santé. La législation
ne préconise pas la conclusion d'un contrat même si, en pratique,
les deux parties en signent presque toujours un.
Les contrats garantissent en général une
rémunération en cas de naissance d'un enfant handicapé
pour les parents commanditaires, mais ne prévoient rien en cas de
décès de ces derniers. Rien n'est prévu ni pour la famille
de la mère porteuse ni pour les parents commanditaires en cas de
décès de celle-ci.
Un certificat prouvant les liens biologiques entre le nouveau
né et au moins un de ses parents génétiques n'était
même pas demandé par la loi pour déclarer l'enfant, ce qui
a ouvert la porte à des trafics de bébés. En 2010 un texte
de loi exige ce certificat. En revanche les droits des mères porteuses
ne sont toujours pas protégés et ceux des enfants à
naître non plus.
Il est très facile de trouver une mère porteuse,
il suffit de cliquer sur internet et se déroule des offres de
particulier où de professionnels, comme par exemple la
célèbre clinique de procréation assistée du docteur
Viktor KOZINE, à Isida. Parfois un package est proposé comme par
exemple : « forfait taxi + logement + actes notariés + diverses
interventions médicales + etc. entre 15 000 à 20 000 euros
42». L'exploitation de la misère et la
vulnérabilité des femmes sont encore une fois
constatées.
Que deviennent les droits de l'Homme ? « Nul ne
sera tenu en esclavage ni en servitude; l'esclavage et la traite des esclaves
sont interdits sous toutes leurs formes43 ».
32
42
http://sedifop.com
43 Article 4 de la déclaration des droits de
l'homme
33
CHAPITRE II : SITUATION DE LA LEGISLATION ACTUELLE EN
FRANCE
La loi Française interdit la gestation pour
autrui
A l'occasion de la révision des lois de
bioéthiques en 2010, Le rapport parlementaire propose de maintenir
l'interdiction de la gestation pour autrui car elle va à l'encontre des
grands principes de la loi française dont, en particulier
l'indisponibilité du corps.
Les fondements sont :
V' L'indisponibilité du corps humain et de l'état
des personnes
V' La dignité humaine
V' Non patrimonialité du corps humain
V' La gratuite
V' L'intérêt supérieur de l'enfant
La maternité pour autrui contrevient à une
règle fortement enracinée dans notre droit de la filiation,
fondée sur le vieil adage romain « mater semper certa est
», en vertu de laquelle la mère est celle qui accouche. Aussi
fait-elle l'objet de sanctions pénales et civiles.
Au regard de la loi pénale, la maternité pour
autrui constitue une supposition d'enfant, réprimée en tant
qu'elle constitue une atteinte à la filiation. Des sanctions sont ainsi
prévues à l'égard des auteurs de cette infraction, des
intermédiaires et de leurs complices.
L'article 227-13 du code pénal punit de trois ans
d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende « la substitution
volontaire, la simulation ou dissimulation ayant entraîné une
atteinte à l'état civil d'un enfant », ainsi que
leur tentative.
La chambre criminelle de la Cour de cassation a
également jugé qu'il s'agissait d'infractions clandestines par
nature. Le code pénal prévoit deux modes de complicité :
la complicité par aide ou assistance et la complicité par
provocation.
34
La supposition d'enfant peut s'accompagner d'un faux commis
dans une écriture publique, puni par l'article 441-4 du code
pénal de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende.
L'article 227-12 du code pénal réprime
désormais la provocation à l'abandon, l'entremise en vue
d'adoption et, depuis la loi bioéthique n° 94-653 du 29 juillet
1994 relative au respect du corps humain, « le fait de s'entremettre entre
une personne ou un couple désireux d'accueillir un enfant et une femme
acceptant de porter en elle cet enfant en vue de le leur remettre »
La provocation à l'abandon est punie de six mois
d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. L'entremise en vue de l'adoption,
dans un but lucratif, et l'entremise en vue d'une maternité de
substitution, en l'absence de but lucratif, sont punies d'un an
d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende, tout comme leur
tentative. S'agissant de l'entremise en vue d'une maternité de
substitution, ces peines sont doublées lorsque les faits ont
été commis à titre habituel ou dans un but lucratif.
Sur le plan civil, le droit de se marier et de fonder une
famille, reconnu par l'article 12 de la Convention Européenne
de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4
novembre 1950 et par l'article 23 du pacte international relatif aux droits
civils et politiques du 19 décembre 1966 à l'homme et à la
femme en âge nubile, n'implique pas le droit de conclure avec un tiers
des conventions portant sur le sort d'un enfant à naître.
L'assemblée plénière de la Cour de
cassation condamna catégoriquement cette pratique en 1991,
en jugeant que « la convention par laquelle une femme
s'engage, fût-ce à titre gratuit, à concevoir et à
porter un enfant pour l'abandonner à sa naissance contrevient tant au
principe d'ordre public de l'indisponibilité du corps humain qu'à
celui de l'indisponibilité de l'état des personnes ».
Les conventions de maternité pour autrui ont
été sanctionnées par la Cour de cassation, sur le
fondement des articles 6-311-9 et 1128 du code civil. Enfin cette interdiction
a été confirmée et légalement consacrée par
la loi de bioéthique n° 94-653 du 29 juillet 1994 qui a introduit
l'article 16-7 du code civil lequel dispose « toute convention portant sur
la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui est nulle
».
35
Le législateur est intervenu pour la première
fois dans le domaine de l'assistance médicale à la
procréation par deux lois du 29 juillet 1994, l'une relative au respect
du corps humain, l'autre au don, à l'utilisation des
éléments et produits du corps humain, à l'assistance
médicale à la procréation et au diagnostic
prénatal.
La révision des lois de bioéthiques a
été prévue dans un délai de cinq ans après
leur mise en vigueur afin de tenir compte de l'évolution des techniques
concernées et des enseignements tirés des premières
années d'application. C'est le 6 août 2004 qu'a été
adoptée la loi portant révision des lois du 29 juillet 1994 et
maintenant l'interdiction posée à l'article 16-7 du code
civil.
La première GPA connue fût pratiquée aux
Etats-Unis en 1982 par le couple Guy et Monique LIBAUDIERE44 . Dans
les années 1980, un réseau d'associations aux noms très
parlants fut ainsi créé afin de promouvoir et mettre en oeuvre
l'activité des mères de substitution : l'association «
Sainte Sarah » créée en 1984 se donnait comme but de
regrouper des femmes stériles voulant faire accepter la pratique des
mères de substitution. La création en 1985 de l'association
« les Cigognes » rassemblait des femmes acceptant d'être «
mères porteuses » selon l'expression employée à
l'époque. Le centre d'exploration fonctionnelle et d'étude de la
reproduction (CEFER) dont le président était le docteur GELLER,
fut créé en 1983, il sélectionnait les mères
porteuses et réalisait leur insémination artificielle avec le
sperme de l'homme du couple demandeur. En 1985 se créait à
Marseille Alma Mater, émanation du (CEFER) et était
chargée de gérer les questions pratiques, notamment comptables en
recevant en dépôt la « compensation financière
» à verser à la mère porteuse45,
enfin en 1987 le président du CEFER et de Alma Mater
lançait en une nouvelle association « Euromater46
».
Le docteur GELLER47 avait confessé sa
vénération pour sa mère « pour moi, elle
était aussi mon père et plus que cela», il
décrit la relation foeto-maternelle d'une façon
particulièrement mortifère : « Le foetus est, en fait,
un véritable parasite qui «pompe» littéralement sa
mère, c'est d'elle qu'il tire tous les matériaux
biologiques48. »
44 Un acte d'amour. Nous avons fait porter notre
enfant. Edition la table ronde 1984
45 Sénat : contribution à la
réflexion sur la maternité pour autrui
46 Dictionnaire permanent de
bioéthique, Maternité de substitution, n° 23, Pratiques des
associations illicites, p. 1273
47
http://id.erudit.org/iderudit/057634ar
48 Ces propos sont tirés de Un
enfant pour une autre, oui ou non ? Récit autobiographique
inédit du Docteur Geller.
36
Dans un arrêt du 13 décembre 198949,
la première chambre civile s'est fondée sur l'article 1128 du
Code civil a prononcé la dissolution des l'association au motif que sont
nulles les conventions même verbales qui portent tout à la fois
sur la mise à disposition de parents stériles de fonctions
reproductives d'une mère porteuse et sur l'enfant à naître
parce qu'elles contreviennent au principe d'ordre public, de
l'indisponibilité de l'état des personnes (elles ont pour but de
faire venir au monde un enfant dont l'état ne correspond pas à sa
filiation réelle.
L'Arrêt de l'Assemblée plénière en
date du 31 mai 199150 rendu sous la présidence du Premier
Président Pierre DRAI. Un pourvoi avait été formé
contre un arrêt de la Cour d'appel de Paris qui avait autorisé
l'adoption d'un enfant né en exécution d'un contrat de
mère porteuse. En des termes solennels, la Cour de cassation,
réunie dans sa plus haute formation, a condamné de tels contrats
en ce qu'ils "contreviennent tant au principe de l'indisponibilité du
corps humain qu'à celui de l'état des personnes". La
démarche intellectuelle est tout à fait remarquable. Le pourvoi
dans l'intérêt de la loi permet à la Cour de
résoudre une question non prévue par la loi en se
référant aux principes fondamentaux du droit. Elle a
effectivement ainsi suscité une réforme législative.
L'Assemblée plénière vise ensemble les
articles 6, 1128 et 353 du même code afin de condamner l'adoption
lorsqu'elle est envisagée comme la dernière étape du
processus permettant à une femme de devenir la mère de l'enfant
conçu et porté par une autre en exécution d'un contrat de
maternité pour autrui.
Dans le dispositif de la décision, les juges, afin de
condamner la maternité de substitution, s'en réfèrent au
principe de l'indisponibilité du corps humain.
Cette affaire concernait un couple hétérosexuel.
Dans ce couple, l'épouse était stérile et avait
trouvé une femme qui acceptait de porter un enfant conçu par
insémination artificielle et d'accoucher sous X. La femme volontaire fut
inséminée avec le sperme du mari.
Le père biologique reconnut l'enfant tandis que la
mère biologique accouchait sous X. L'épouse stérile du
mari, père de l'enfant, introduisit alors une requête à fin
d'adoption
49 Cours de Cassation. 1ère Civ., 13 décembre 1989
(Association Alma mater), n° 8815655. Source Bulletin 1989 I n° 387,
p 260, J.C.P. 1990.II.21526, note SERIAUX
50 Cours de Cassation. Assemblée.
Plénière., 31 mai 1991, Bull. n° 4 ; D. 1991, Jur. p. 417,
rapport. Y. Chartier et note D. Thouvenin; J.C.P. 1991, II, n° 21752,
communication J. Bernard, conclusion. Dontenwille
37
plénière de l'enfant. Le Tribunal de Grande
Instance de Paris a d'abord rejeté la demande d'adoption puis la cour
d'appel de Paris a infirmé le jugement et s'est prononcée en
faveur de l'adoption.
Le Procureur général près de la Cour de
Cassation a alors formé un pourvoi dans l'intérêt de la
loi. La Cour de Cassation, dans un arrêt de principe, a jugé que
« la convention par laquelle une femme s'engage, fût-ce à
titre gratuit, à concevoir et porter un enfant pour l'abandonner
à sa naissance, contrevient tant au principe d'ordre public de
l'indisponibilité du corps humain qu'à celui de
l'indisponibilité des personnes ».
Elle condamne l'adoption dans ce cadre, c'est-à-dire en
tant qu'« ultime phase d'un processus d'ensemble destiné à
permettre à un couple l'accueil à son foyer d'un enfant
conçu en exécution d'un contrat tendant à l'abandon
à sa naissance par la mère. Elle conclut en condamnant ce
processus qui constitue « un détournement de l'institution de
l'adoption »
Analysés dans le contexte de ces décisions, les
deux principes de l'illicéité des conventions et de
l'indisponibilité du corps humain expriment une même
idée:
? La condamnation d'une convention qui porte sur le corps
humain, celui de l'enfant à naître et celui de la femme qui l'a
conçu et porté.
? L'illicéité des conventions, telle qu'elle est
comprise dans l'arrêt de 1989, concerne les accords litigieux, qu'ils
soient gratuits ou onéreux.
Sur ce point, la Cour de Cassation, en visant les conventions
qui « portent tout à la fois sur la mise à la disposition
des demandeurs des fonctions reproductrices de la mère et sur l'enfant
à naître » a entériné la position de la Cour
d'Appel de Paris pour laquelle « ni l'altruisme du comportement de la
mère de substitution, ni le caractère
désintéressé des activités de l'association ne sont
propres à faire disparaître l'illicéité qui frappe
l'accord litigieux ». D'après cette jurisprudence, le corps humain
est donc hors commerce, c'est-à-dire hors du marché, mais
également hors de toute transaction.
« Il est donc difficile de dire qu'est légitime en
soi, d'un point de vue biologique, un processus de maternité dans lequel
la femme qui recueille l'enfant, celle qui veut être sa «
mère », n'est pas celle qui lui a donné son sang, celle qui
lui a transmis son patrimoine
38
héréditaire. Il est aussi difficile de dire
qu'il est légitime sur le plan affectif, puisque de deux choses l'une.
Ou bien l'enfant n'a pas été aimé pendant la grossesse, et
cet état d'indifférence pourra avoir des conséquences sur
son développement ultérieur.
Ou bien la femme qui l'aura porté se sera
attachée à lui, et la séparation à la naissance
constituera pour elle une souffrance dont rien ne dit que l'inconscient de
l'enfant ne portera pas les stigmates ». Yves CHARTIER51
Yves CHARTIER souligne que l'argument essentiel qui milite en
faveur de la maternité de substitution est évident : « les
mères donneuses répondent à une attente des couples en mal
d'enfants ». Que cette solution est une « commande », on n'ose
pas écrire fabrication à la demande de
nouveau-nés. Plus choquant encore sont les
termes de « marché du neuf » à côté «
d'un marché d'occasion » que serait celui de l'adoption.
Il précise que sur le terrain de la
légitimité, le point le plus important est sans aucun doute que
cette technique postule, a priori, une séparation entre la mère
et l'enfant, une dissociation de la maternité et de l'éducation,
un éclatement des liens du sang et des liens affectifs. On parle des
droits de l'homme et de la femme à l'enfant. Mais ces « droits
» ne sont-ils pas « qu'une volonté de refus des règles
biologiques communes » La voie vers laquelle veut nous engager la
substitution de mère ne tend elle pas à redéfinir le
concept de la maternité, à opérer une rupture avec ce
qu'elle a été, ce qu'elle est depuis les origines de l'homme ?
La maternité implique que la mère est à
la fois responsable de la vie de l'enfant quand elle l'attend, et de l'enfant
quand il est né. Ici, au contraire, le couple qui « attend »
l'enfant n'en est pas responsable aussi longtemps qu'il n'est pas né (et
pendant sa grossesse, celle qui le porte ne perçoit sans doute pas
totalement elle-même cette responsabilité si vraiment elle est
décidée à s'en séparer).
51 Conseiller à la Cour de cassation À rapport sur
l'illicéité de l'adoption plénière de l'enfant
d'une mère porteuse Àrecueil Dalloz 1991 page 417 . Cass. Ass.
Plén., 31 mai 1991, Bull. n° 4 ; D. 1991, Jur. p.
417, rapp. Y. CHARTIER et note D. THOUVENINJ.C.P. 1991, II, n°
21752, communication J. Bernard, conclusion. Dontenwille
39
Après l'accouchement, à l'inverse, cette
mère voit lui échapper sa formation et son éducation. Il y
a ainsi rupture de ce qui devrait être une continuité.
Et pourrait-on concevoir que ce qui serait mauvais sur le
terrain de la biologie et de l'affection, et qui risquerait par
conséquent de perturber profondément l'enfant pendant tout son
développement serait satisfaisant pour l'éthique ? De ce point de
vue, « la maternité de substitution est choquante car elle repose
sur un contrat qui implique renonciation anticipée de la femme
concernée à sa qualité de mère52 »
« Ce genre de « contrat » « déshonore
l'espèce humaine53 »
Le Code civil reconnaissait le contrat de nourrice, à
laquelle il a même conféré un privilège. On peut
vendre ses cheveux, donner son sang. La pratique connaît au demeurant,
sous des conditions strictement définies, le don du sperme.
La loi du 22 décembre 1976 article. 1er
autorise aussi le prélèvement d'organe sur une personne physique
en vue d'une greffe ayant un but thérapeutique sur un être humain.
Mais ces différentes hypothèses n'autorisent pas, par
elles-mêmes, l'extension considérable qu'impliquerait la
maternité pour autrui. Le contrat de nourrice, qui est heureusement en
voie d'extinction, est lui-même suffisamment critiquable pour qu'on ne le
prenne pas en exemple. Quant aux cheveux, au sang, au sperme, ils se
reconstituent, ils se reproduisent. Le don du sang, comme celui d'organe, ne se
justifient au demeurant que pour des raisons médicales, il s'agit de
sauver des vies. Dans la maternité pour autrui, le don (si « don
» il y a ...) porte sur le corps lui-même, sur sa capacité de
gestation, et il laisse en celle qui le consent d'importantes séquelles,
physiques mais aussi psychiques. L'altération (au sens
étymologique du terme) d'un corps ne peut se justifier que lorsqu'elle
est destinée à préserver une autre vie. Ces exemples
parlent, a contrario, pour une limitation du don à ce qui peut le
justifier. Et que dire, dans cette perspective, du don de l'enfant
lui-même ? A l'évidence, il n'est pas de même nature.
52 J. Hauser et D. Huet-Weiller, op. cit.,
n° 454, p. 218
53 P. Malaurie, Droit civil, La famille,
éd. Cujas, n° 460
40
L'abandon de l'enfant est-il plus libre quand il est gratuit ?
Oui, sans doute. Encore faudrait-il d'abord être sûr qu'il y a
vraiment gratuité : les tribunaux civils ne savent que ce que les
parties veulent bien leur dire, même si le jugement est
précédé d'une enquête du parquet. Et si la
gratuité est le critère du bien-fondé de la demande
d'adoption, il ne faut guère se faire d'illusion : dans l'avenir, toutes
les adoptions seront apparemment gratuites, si d'ailleurs elles ne le sont
déjà.
Quels sont les intérêts en cause ?
Ceux du couple : Ils sont si évidents qu'ils
n'appellent pas de grands développements : la maternité de
substitution, avec son achèvement que représente l'adoption
plénière par l'épouse (ou la concubine) du donneur, leur
permet de réaliser un désir sans doute profond. L'entrée
ainsi réalisée de l'enfant à leur foyer constitue pour eux
un accomplissement.
Ceux de la mère porteuse : Est-il possible de
dire que cette maternité est souhaitable pour elle, qu'il faut
l'encourager ? S'il s'agit d'une maternité à titre
onéreux, peut-on ne pas y voir une résurgence de l'esclavage, une
forme de prostitution ? Une femme, sous quelque forme que ce soit, n'est pas
vénale. Le corps humain, l'utérus, les entrailles, la
faculté de procréation, ne se vendent pas, ne se louent pas. Il y
va de la dignité humaine. Ne faut-il pas protéger contre
elles-mêmes des jeunes filles, des jeunes femmes trop souvent
abusées ? Et si le consentement est gratuit, non mercantile, il faut se
demander qui peut accepter.
Sans doute rencontrera-t-on quelques rares dévouements
suspects d'éléments étrangers à la famille. Et ce
qui ne paraît pas souhaitable pour la mère porteuse,
regardée en tant que femme, l'est-il davantage pour elle
considérée comme une mère ? Il est difficile de poser
comme un postulat qu'une femme qui a porté l'enfant, dont la psychologie
a de ce fait même évolué pendant toute la grossesse, qui,
au moment de l'accouchement est par essence une femme différente de
celle qu'elle était lors de la conception (ou de la réception de
l'embryon), est naturellement prête à se séparer de celui
qu'elle a nourri.
N'y a-t-il pas une certaine cruauté à planifier
par avance la séparation de la mère et de l'enfant, à
décider a priori que la femme qui aura souffert pour enfanter n'aura pas
la récompense de sa souffrance ?
Et l'argument de l'abandon volontaire paraît bien
fragile dans la mesure où, compte tenu des contraintes psychologiques,
morales, voire matérielles et physiques qui pèsent sur elle, la
« mère porteuse » se croit obligée de remettre
l'enfant.
41
Le sort de l'enfant né est, nul ne le
contestera, est digne d'intérêt. Mais s'il ne peut faire l'objet
d'une adoption, les conséquences sont tout de même
limitées. Si, en effet il est vraiment abandonné par sa
mère, recueilli par son père qui l'a reconnu, il peut en tout
état de cause être élevé en commun par celui-ci et
par sa femme : cela ne dépend que de leur volonté commune. Et
l'enfant porte le nom de son père, c'est-à-dire aussi celui de la
femme de son père. Les liens affectifs peuvent se tisser de la
même façon. C'est en cas de décès du père
(pour l'exercice de l'autorité parentale) ou de sa femme (sur un tout
autre plan, qui est
d'ordre patrimonial) qu'apparaissent d'incontestables
difficultés.
Jacqueline RUBELLIN-DEVICHI54 rappelle que le
tribunal de Paris dont les décisions furent infirmées par la cour
d'appel, a connu, à cinq reprises, les 28 juin, 12 juillet, 18 octobre
et 6 décembre 1989 (deux jugements), de demandes d'adoption de l'enfant
du conjoint, qui en réalité dissimulaient, et pour deux d'entre
elles exhibaient plutôt, le recours à une mère porteuse. Le
tribunal a estimé qu'il y avait un détournement de l'adoption,
qui servirait ici à consacrer irrévocablement une pratique
illicite, contraire d'ailleurs à l'intérêt de l'enfant,
privé à tout jamais de sa véritable filiation
maternelle.
Il semblerait selon Jacqueline RUBELLIN-DEVICHI, « qu'il
n'est bon ni pour les justiciables, ni pour les juges, que la Cour de cassation
passe sur le détournement et entérine le recours tranquille aux
règles de droit, sous prétexte qu'il s'agit de
l'intérêt de l'enfant, pour fonder une filiation qui n'est plus
élective, mais mensongère ». Monsieur le premier avocat
général DONTEWILLE55 a souligné la «
tricherie » dont était empreinte l'adoption envisagée,
« véritable pacte sur naissance future » qui ne devait pas
« cautionner par effet rétroactif » une pratique illicite, la
Haute juridiction a estimé que l'adoption « n'était que
l'ultime phase d'un processus d'ensemble et que, portant atteinte aux principes
de l'indisponibilité du corps humain et de l'état des personnes,
ce processus constituait un détournement de l'institution de l'adoption
».
54 Recueil Dalloz 1991 p.209 « réflexions
pour d'indispensables réformes en matière d'adoption
55 Cass. Ass. Plén., 31 mai 1991, Bull.
n° 4 ; D. 1991, Jur. p. 417, rapp. Y. CHARTIER et note D.
THOUVENIN
42
Elle propose l'abrogation de l'article 348-5 du Code civil,
selon lequel « le consentement à l'adoption des enfants de moins de
deux ans n'est valable que si l'enfant a été effectivement remis
au service de l'aide sociale à l'enfance ou à une oeuvre
d'adoption autorisée », une nouveauté introduite par la loi
du 11 juillet 1966, qui a eu pour but « d'éviter tout marché
noir d'enfants, toute pression sur la mère en détresse »,
pour reprendre les termes mêmes du rapporteur de la Commission des lois.
« La situation a changé : aujourd'hui, l'enfant n'est plus
considéré comme la sanction de l'inconduite de la mère,
mais comme un don du ciel, que celle qui n'a que faire d'un pareil cadeau
pourrait confier en adoption à une famille qui saurait assurer son
bonheur. La loi du 3 janvier 1972, en permettant l'établissement de la
filiation de l'enfant a offert un moyen étonnamment sûr de
rattacher un enfant à un homme marié, et subséquemment
à l'épouse de celui-ci, sans que ni l'ASE56 ni la
justice n'aient à intervenir, on conviendra que la tentation est grande
de laisser en fait le libre choix du couple adoptif à celle qui a mis
l'enfant au monde.
Le moyen est connu, et utilisé, plus souvent qu'on ne
l'imagine. Il devient urgent de supprimer l'obstacle et d'abroger l'article.
348-5 du Code civil. La loi ne gagne guère en considération
à être systématiquement et impunément
contournée. Mais la réforme demandée rencontrera, c'est
certain, l'hostilité de l'ASE, des oeuvres d'adoption et des
associations de parents adoptifs, car elle tarirait la source la plus
convoitée des enfants à adopter, puisqu'il s'agit de
bébés à la naissance.
Pour le Professeur Jean BERNARD57, il ne s'agit pas
d'abandon ni de procréation médicalement assistée.
« A l'hôpital Denfert-Rochereau une roue de bois pleine sur
laquelle la mère abandonnait son enfant, déposait le nouveau
né. Un rideau noir la séparait de la religieuse qui faisait
tourner la roue. L'enfant était reçu à l'Hôpital, la
mère restait anonyme ».Voilà un véritable
abandon.
Concernant les mères de substitution, il souligne que
le rôle du médecin est très modeste et pourrait même
être tenu par une personne quelconque. En revanche concernant la
procréation médicalement assistée, le rôle du
médecin est très important, les ovaires et l'utérus de la
vraie mère sont concernés.
56 Aide sociale à l'enfance
57 Semaine juridique, Edition G, n°45
jurisprudence 1991 n°21752 page 377
43
Pour le Professeur Jean BERNARD, il ne s'agit pas non plus
dans cette affaire de « mère porteuse ». Il cite un exemple de
personne atteinte d'une leucémie de la moelle osseuse ayant subit une
irradiation. Après guérison, elle reste stérile. Elle fait
appel à un don d'ovule. L'ovule est fécondé par le sperme
du mari. L'embryon sera placé dans l'utérus de l'ancienne
leucémique. L'enfant aura deux mères, une ovulaire, une
utérine, la vraie mère porteuse.
Il rappelle pourquoi le Comité Consultatif National
d'Ethique n'a pas accepter les mères de substitution. Les arguments sont
de trois ordres : arguments financiers, argument biologique, arguments
affectifs.
Les arguments financiers, le caractère commercial dans
un premier temps n'était pas caché, puis dans un second temps on
affirmait que l'opération était bénévole. Le
commerce clandestin avait alors remplacé le commerce affirmé.
Risque d'intermédiaires mercantiles, risque d'exploitation de la femme.
Il est impossible de contenir ces risques, même si une loi interdit toute
rémunération et toute intervention d'intermédiaire.
L'argument biologique a une place importante dans ce
processus. L'exemple d'un couple de milliardaires américains souffre de
stérilité : stérilité féminine, le couple
conclut un contrat avec une mère de substitution. A la naissance
l'enfant est malformé. Le couple commanditaire ne veut pas de l'enfant.
Des analyses révélèrent que l'enfant n'était pas le
fils du milliardaire mais celui du mari de la mère de substitution. La
mère de substitution avait eu des rapports sexuels avec son époux
peu de temps après l'insémination.
Les arguments affectifs touchent plusieurs personnes, parfois
les enfants de la mère de substitution, ne voulant pas que le
bébé soit enlevé de leur famille, la mère porteuse
qui peut s'attacher à l'enfant et ne plus vouloir le donner.
Le Professeur Jean BERNARD rappelle d'abord les liens que
l'enfant a avec sa génitrice durant neuf mois. Les constantes
informations nerveuses, humorales, endocriniennes passent de la mère
à l'enfant durant toute la gestation. Puis l'enfant après,
à l'adolescence, les questions qu'il pourra se poser sur sa «
mère porteuse » il sera très malheureux.
44
Le Professeur BERNARD souligne que la prévention de la
stérilité féminine est très importante, donner de
bons traitements dans les cas d'infection. Une information auprès des
jeunes filles, des jeunes femmes, il parle d'un véritable effort
pédagogique.
Il invite les grandes institutions internationales, comme
l'OMS, la Croix Rouge internationale à mettre en oeuvre les
filières d'adoption. Des centaines de milliers d'enfants à
travers le monde sont menacés de mort et pourraient être
sauvés par l'adoption.
Selon l'analyse de Dominique THOUVENIN58, des
points importants mais peu explorés comme les faits de la
procédure et le fond du droit. « En liant l'utilisation des
règles de la filiation adoptive au contrat de mère porteuse, la
Cour de cassation a sans doute pu proclamer que l'ensemble de
l'opération constituait une fraude à la loi, mais a
peut-être, de ce fait même, proposé une solution qui risque
d'être limitée dans ses effets. L'arrêt a été
rendu sur un pourvoi dans l'intérêt de la loi, technique peu
courante qui permet à la Cour de cassation de jouer un rôle
disciplinaire, mais qui, enserré dans certaines conditions, a sans doute
imposé à cette dernière le contenu même de sa
décision ».
Il souligne l'importance d'un contrôle des
décisions du fond pour la jurisprudence elle-même, au-delà
de l'application interne d'une sanction visant le juge. Et tel est bien du
reste le sens du pourvoi présenté par le procureur
général près la Cour de cassation qui affirme in fine
« qu'il importe, en cette matière particulièrement sensible,
qui touche à un délicat problème de société,
que soit mis fin à des divergences jurisprudentielles majeures et que la
sécurité juridique soit assurée ». Mais si le pourvoi
dans l'intérêt de la loi est destiné aux juges
eux-mêmes pour les rappeler à l'ordre (ainsi l'arrêt est
transmis à la juridiction d'où émane la décision et
transcrit en marge de la décision attaquée), il n'en demeure pas
moins que la décision rendue a une portée générale
qui vise, au-delà des juges, les citoyens eux-mêmes. Les
destinataires de l'arrêt, sont non seulement les juges, mais tout
individu qui aurait affaire avec les règles posées.
58 Cass. Ass. Plén., 31 mai 1991,
Bull. n° 4 ; D. 1991, Jur. p. 417, rapp. Y. CHARTIER et
note D. THOUVENIN
J.C.P. 1991, II, n° 21752, communication J.
Bernard, conclusion. Dontenwille
45
La Cour de cassation leur dit solennellement c'est qu'ils
devront compter avec l'interprétation qu'elle a donnée de ces
règles, c'est-à-dire que s'il apparaît explicitement que
l'adoption est la phase finale d'un processus d'ensemble permettant
d'accueillir un enfant conçu en exécution d'un contrat de
mère porteuse, la requête en adoption devra être
refoulée.
Dans le pourvoi, la formule utilisée « au soutien
de leur décision » ne visait-elle pas la motivation de
l'arrêt d'appel, en l'occurrence la légitimation au recours des
mères porteuses.
Ces par le biais de ces contrats que la Cour de cassation a pu
exercer son contrôle ; en effet, le pourvoi dans l'intérêt
de la loi étant conçu comme un moyen de mettre fin aux
contradictions de jurisprudences, il fallait qu'elle montre en quoi la
décision d'appel ne respectait pas une des solutions qu'elle avait
adoptée. Or, dans son arrêt relatif à l'association
Alma mater elle avait estimé que les conventions de mère
porteuse « contreviennent au principe d'ordre public de
l'indisponibilité de l'état des personnes en ce qu'elles ont pour
but de faire venir au monde un enfant dont l'état ne correspondra pas
à sa filiation réelle au moyen d'une renonciation et d'une
cession, également prohibées, des droits reconnus par la loi
à la future mère.
Dans cette affaire, le couple présentant la demande
d'adoption, a habilement ramené leur démarche dans le champ
médical, présentant la stérilité comme une maladie
et se présentant aux juges comme des êtres en souffrance.
L'argument est sur un plan psychologique très payant puisqu'il a
été repris sans discussion par les juges, lesquels en appel ont
entériné l'idée que la stérilité est une
maladie.
La Cour d'appel a cherché à justifier
l'opération elle-même. Elle l'a fait en se référant
à plusieurs reprises au libre consentement des intéressés,
à la libre expression de volonté, à l'abandon volontaire
de l'enfant, enfin, pour ne pas demeurer en reste au caractère
volontaire de l'organisation des liens de filiation de l'enfant ; autrement
dit, selon cet arrêt, la volonté suffit pour obtenir la
qualification désirée. C'est contre cette conception que la Cour
de cassation s'est élevée en s'appuyant sur la fraude ; c'est une
façon de dire que si la lettre de la loi a été
respectée, l'esprit en a été violé.
46
Car ainsi qu'elle l'avait affirmé dans l'arrêt du
13 décembre 1989, l'adoption permet en principe de donner une famille
à un enfant qui en est dépourvu et non de créer un enfant
pour des parents qui n'en ont pas. C'est donc en se référant
à la fraude à la loi que la Cour de cassation affirme un point
essentiel du droit, à savoir que ce n'est pas tant la volonté
subjective des particuliers qui est la source du droit, que la loi
elle-même.
Il pense qu?il faut s'attendre à ce que, dans des
contentieux futurs, les adoptés plaident le droit d'accès
à la connaissance de leurs origines familiales. Et bien que cette
question ne se soit nullement posée dans l'affaire présente, il
faut être conscient que, dans un avenir plus ou moins proche, les juges
auront à faire face à une situation encore plus difficile.
Il imagine que le jour viendra où un couple se
présentera devant eux en plaidant la filiation légitime de «
leur » enfant produit grâce aux forces génétiques du
couple, mais né d'une mère porteuse, l'épouse, pour des
raisons médicales, ne pouvant assumer une grossesse.
Juridiquement, la situation est exactement la même que celle que
nous venons d'analyser ; cependant, étant donné la confusion
souvent opérée entre la procréation et la filiation, il y
a tout lieu de craindre qu'il se trouvera toujours quelqu'un pour
défendre l'idée que dans ce cas l'enfant est légitime.
Ceci ne devrait pas nous étonner tant sont nombreux
ceux qui estiment que la filiation est fondée sur la
vérité biologique, que s'opèrent des glissements de
vocabulaire tels qu'on oppose la filiation biologique à la filiation
sociale. Mais quelle étrange et surtout quelle fâcheuse confusion
! Certes la naissance d'un enfant passe par la reproduction, mais il n'y a pas
de vraie et de fausse filiation de même qu'il n'y a pas de filiation
biologique, mais des filiations légitimes, naturelles et adoptives qui
constituent autant de fictions. Si la biologie peut éventuellement
servir à contester la filiation, elle ne la crée pas ;
si tel était le cas, tous les enfants qui naissent devraient faire
l'objet d'un contrôle systématique pour être
attribués à leurs géniteurs.
C'est la loi sociale du groupe qui crée la filiation,
mettant ainsi la filiation du côté de la culture. Il ne faut pas
se cacher que le développement des connaissances biologiques
opère une forte attraction sur le droit de la filiation, la biologie
tirant sa supériorité apparente de la vérité.
47
Mais, si l'évolution future devait se faire en ce sens,
ce serait oublier que ce qui fonde le droit ce n'est pas une quelconque
scientificité, mais bien la pertinence sociale de la règle.
Pour Dominique THOUVENIN ce que cette situation
révèle, c'est à la fois la fragilité du
contrôle juridique de la procédure gracieuse et celle liée
à certaines dispositions relatives à l'adoption
plénière.
Henri DONTENWILLE59 pose la question si l'ordre
judiciaire peut trancher l'immense débat de l'explosion des techniques
et l'évolution des moeurs. « Si le problème est juridique,
il est profondément éthique » Il rappelle aux juges que le
rôle de régulateur, pour l'ensemble de la République
où les citoyens doivent être égaux devant la loi,
apparaît dans le cas présent dans toute sa grandeur et sa
force.
Il s'appuie sur trois textes, celui du contrat, celui de
l'ordre public, celui de l'indisponibilité de l'état des
personnes.
y' Article 1128 du Code civil y' Article 353-1 du Code
pénal y' Article 311-9 du Code civil
Il souligne qu'aucune réforme n'est en cours, qu'aucune
abrogation n'est envisagée. Pour Henri DONTENWILLE, l'article 1128 du
Code civil appliqué à la lettre fait barrage à toute
« opération de maternité de substitution » Il rappelle
que les partisans de toutes les formes de « procréation indirectes
» ne manquent pas de souligner que sont aujourd'hui couramment admis les
dons d'organes, de sang, de sperme, d'ovules etc.. Mais il pose la question
« Y-a-t-il une commune mesure entre ces procédés
thérapeutiques et l'option qui nous occupe ? Il met en exergue
l'être humaine car c'est bien de l'être humaine dans toute son
ineffable plénitude qui est en cause.
59 Cass. Ass. Plén., 31 mai 1991, Bull.
n° 4 ; D. 1991, Jur. p. 417, rapp. Y. CHARTIER et note D.
THOUVENIN
J.C.P. 1991, II, n° 21752, communication J.
Bernard, conclusion. Dontenwille
48
L'Article 353-1 du Code pénal touche l'ordre public. Il
rappelle les termes « est proscrit sous peine de sanction grave
puisqu'elle comporte l'emprisonnement tout acte aux termes duquel l'on peut
s'engager (convention bilatérale) à abandonner l'enfant à
naître.
Il évoque la réification de la femme, ses
souffrances. Il dénonce le terme « avancée »
employé dans le cas de la gestation pour autrui et invite ceux qui
estiment qu'il s'agit véritablement d'une « avancée »
à avoir le courage de demander sans détour l'abrogation de ce
texte. Pour Henri DONTENWILLE ce texte est incontournable, il dénonce
une « fraude ».
Concernant la troisième disposition légale
article 311-9 du Code civil, la notion d'ordre public ressurgit, il rappelle
que notre droit autorise la filiation de substitution qu'est « l'adoption
». Il ouvre une réflexion sur l'article 35660 du Code
civil, cette construction juridique a pour seul but l'intérêt de
l'enfant né et abandonné : Mais cette enveloppe juridique
peut-elle servir à un compromis où d'avance, lors de sa
conception, l'enfant à naître sera voué à son
abandon et sans doute à son adoption future ?
Il qualifie de tricherie le pacte sur la naissance future, ce
n'est plus de l'intérêt de l'enfant abandonné par le sort
qu'il s'agit, mais de ceux qui s'accordent pour qu'il le soit à
l'état même d'embryon.
Il cite la Convention des Nations-Unies relative au droit de
l'enfant, du 20 novembre 1989. Convention éclairant à cet
égard : car en effet c'est bien de l'enfant qu'il s'agit et non de ceux
qui, quelles que soient leurs motivations attachantes mettent en place un
mécanisme tendant à produire « l'objet » de leur
désir.
Il y a un droit de l'enfant, il n'y a pas de droit à
l'enfant. Engendre-t-on une famille naturelle par la procréation «
tierce » ?
Il rappelle que la détresse des couples stériles
peut les amener à des manipulations dangereuses. La mère porteuse
également peut être en situation de détresse et l'on
profite
60 Loi du 11 juillet 1966 Article 356 «
L'adoption plénière confère à l'enfant une
filiation qui se substitue à sa filiation d'origine : l'adopté
« cesse d'appartenir à sa famille de sang »
49
de sa vulnérabilité pour utiliser son corps.
Sans écarter les dérives, l'eugénisme ! L'enfant sera
véritable commande et sera refusé s'il ne correspond pas à
l'attente des parents commanditaires !
François TERRE61 souligne que face au
problème des maternités de substitution, entre le pour et le
contre, une réponse nuancée était concevable. Les
approuver dans leur principe, n'est pas en approuver nécessairement
toutes les manifestations. La constatation de certaines expériences
malheureuses révèle, la nécessité d'établir
dans l'intérêt de l'enfant, des interdictions et des
contrôles d'ordre biologique, génétique, psychologique et
social.
Il rappelle que l'Assemblée plénière a
catégoriquement condamné les maternités de substitution en
des termes analogues à ceux que la Première chambre civile avait
utilises en 1989 pour approuver la dissolution d'une association ayant pour
objet de les faciliter. L'Assemblée plénière n'a pas
estimé nécessaire de se prononcer ici au sujet des textes
internationaux utilisés par la Cour d'appel de Paris à l'appui de
sa décision.
Le droit n'ignore plus le poids des faits, et face à
l'évolution de telles pratiques, qui se révèlent
dangereuses, la gestation pour autrui a été mise à l'ordre
du jour de la Mission d'Information Parlementaire du 9 novembre 2005. Claude
SUREAU62 a plaidé pour une réflexion sur la gestation
pour autrui au vue de la grande insécurité juridique qu'entraine
cette pratique, notamment par rapport à la situation de l'enfant
né de celle-ci.
Pour Danièle HUET-WEILLER63, Professeur
à l'université Robert Schuman, l'arrêt sur la
maternité de substitution, est sans surprise. Il était
prévisible que l'Assemblée plénière ne renierait
pas l'analyse que la chambre civile en avait faite le 13 décembre 1989
à l'occasion de l'affaire de l'Association Alma Mater.
On pouvait se demander ce qu'allait devenir l'adoption
prononcée par la Cour de Paris. La décision de l'Assemblée
plénière était attendue même si l'on savait que,
s'agissant d'un pourvoi dans l'intérêt de la loi, elle resterait
sans conséquence pour les intéressés.
61 Cass. Ass. Plén., 31 mai 1991,
Bull. n° 4 ; D. 1991, Jur. p. 417, rapp. Y. CHARTIER et
note D. THOUVENIN
J.C.P. 1991, II, n° 21752, communication J.
Bernard, conclusion. Dontenwille, note de François Terré
62 Professeur Agrégé
d'Obstétrique (membre de l'Académie de Médecine et
Président du Comité Consultatif National d'Ethique pour les
sciences de la vie et de la santé)
63 Revue trimestrielle de droit civil 1991 p.
517Détournement de l'adoption « L'illicéité de la
maternité de substitution et de l'adoption subséquente »
50
La solution était moins évidente car il
n'était pas interdit de penser que « la licéité de
l'engagement de la mère porteuse et le prononcé éventuel
de l'adoption sont deux problèmes différents » et que la
nullité radicale qui frappe « l'accord original »
n'empêche pas forcément les magistrats de prononcer l'adoption
demandée s'ils sont convaincus qu'elle est conforme à
l'intérêt de l'enfant. La plus haute formation de la Cour de
cassation a cependant suivi son avocat général qui lui demandait
de ne pas s'incliner devant le fait accompli et de ne pas donner son label
à l'adoption après en avoir condamné la cause.
Pour Valérie DEPADT-SEBAG64, il est
nécessaire de réformer l'article 16-7 du Code civil. Elle propose
que l'article 16-7 du Code Civil qui dispose que « toute convention
portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui est
nulle » soit maintenu pour éviter toute dérive de la
pratique de «mères porteuses» mais qu'il puisse être
enrichi d'un alinéa supplémentaire ainsi rédigé
« Seul l'acte de gestation pour autrui est possible, en cas
d'incapacité gestationnelle constatée chez la mère
d'intention, et à condition que l'enfant ne soit pas
génétiquement rattaché à la femme qui assure la
gestation».
Dans un article intitulé « de la
nécessité d'une réforme de l'article 16-7 du Code civil
relatif à l'interdiction de la gestation pour autrui » elle
démontre que l'arrêt du 31 mai 1991 de la Cour de cassation, du
fait de l'intérêt que lui porte la doctrine, a influencé
sur la position du Parlement lors du vote des lois du 29 juillet 1994.
Pour elle cette décision ne traite que de la
maternité de substitution, à l'exclusion de la pratique d'une
simple gestation pour autrui.
64 Maître de conférences à la
faculté de droit de l'Université Paris XIII, membre de l'IRDA,
recueil Dalloz 2005 p. 476
« non-lieu dans une affaire de maternité pour autrui
»
51
Elle montre que puisque la loi autorise de don de
gamètes et d'ovocytes, il n'y aurait que la seconde phase,
c'est-à-dire la gestation pour autrui qui serait en fait prohibée
par l'article 16-7 du Code civil. Ainsi, à la différence de la
décision de 1991, qui ne vise que la maternité pour autrui
à l'exclusion du don de gestation, la loi de 1994 n'interdit en
réalité que la gestation pour autrui.
Pour elle, la formulation de l'article 16-7 confond les deux
pratiques, qui au-delà de leurs points communs, présentent une
différence essentielle, puisque leurs effets sur la filiation biologique
de l'enfant sont tout à fait différents.
Elle souligne également que pour motiver ses
arrêts, la Cour de cassation se fonde sur l'illicéité des
conventions qui portent sur le corps humain. Par ailleurs, elle relève
qu'aux termes des articles 16-1 alinéa 3, 16-5 et 16-6 du Code civil,
seuls les conventions qui confèrent une valeur patrimoniale au corps
humain, à ses éléments et ses produits, sont
interdites.
En ce qui concerne les conventions à titre gratuit, la
loi encadre de nombreux actes, don de gamètes, don d'organe entre
personnes vivantes, recherches biomédicales ».
Dans ces hypothèses, le corps reste
protégé de rapports marchands dont il serait l'objet, mais il
n'échappe pas à une certaine patrimonialisation, notamment en
matière de recherches biomédicales où il est difficile de
distinguer l'indemnisation de la rémunération.
En ce qui concerne le principe d'indisponibilité du
corps humain, stipulé à l'article 1128 du Code civil, il ne
convainc pas d'avantage du bien fondé de l'interdiction relative au
« don de gestation ».
Pour Valérie DEPADT-SEBAG, si on prenait en compte
l'article 1128, il faudrait admettre que l'interdiction qui en résulte
doit être étendu à l'ensemble des techniques de
procréation hétérologue65, ces dernières
supposant nécessairement la mise à disposition des fonctions
reproductrices d'un tiers au profit d'un couple infécond.
Ainsi pour elle, le principe de l'indisponibilité du
corps humain, sur lequel les juges suprêmes avaient fondé leur
décision en 1991, a perdu toute valeur depuis que la loi de 1994
reconnaît le don de gamètes.
65 Qui se rapporte à deux individus
appartenant à des espèces différentes
52
Pour répondre à l'argument selon lequel la
gestation pour autrui contreviendrait au principe d'indisponibilité de
l'état des personnes, Madame DEPADT-SEBAG estime que le « don de
gestation » aboutit à ce qu'une femme accouche d'un enfant qu'elle
a dès sa conception reconnu comme celui d'une autre, or l'état
d'une personne consiste en sa situation, son statut, sa condition juridique,
qui peuvent englober l'ensemble des éléments auxquels la loi
attache des effets de droit.
L'Assemblée plénière avait suivie la
première chambre civile selon laquelle la maternité de
substitution contrevient au principe d'indisponibilité de l'état
des personnes en ce qu'elle a « pour but de faire venir au monde un enfant
dont l'état ne correspond pas à la filiation réelle au
moyen d'une revendication et d'une cession des droits reconnus par la loi
à la future mère ».
La filiation réelle étant entendue comme la
filiation naturelle biologique et gestationnelle. Les procréations
médicalement assistées réalisées grâce
à un don d'ovocyte entraînent une dissociation de la
maternité en conséquence de laquelle l'état civil ne
correspond plus à la filiation réelle de l'enfant, tout au moins
pour sa part biologique.
Selon Valérie DEPADT-SEBAG, le maintien d'une
cohérence dans le domaine juridique de l'assistance médicale
à la procréation impose d'admettre la maternité pour
autrui.
Valérie DEPADT-SEBAG souligne le fait que la situation
internationale conforte la nécessité d'une réforme.
53
A. POINT DE VUE DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES ET
NATIONALES
L'Organisation Mondiale de la Santé se dit favorable
à la GPA, considérant que cette pratique fait partie des
techniques d'Aide Médicale à la Procréation.
«Gestational Carrier» est le terme consacré depuis octobre
2009. L'OMS est pour l'indemnisation de la gestatrice, mais réprouve la
commercialisation. L'OMS souligne aussi que ce type de procréation exige
le consentement sur le procédé utilisé ainsi que le
respect des droits des patients et de leur vie privée. Elle rappelle les
règles fondamentales aux praticiens afin qu'ils agissent
conformément à l'éthique.
L'Organisation Mondiale des Gynécologues
Obstétriciens (FIGO) a émis un avis défavorable concernant
la GPA. L'attention est attirée sur les problèmes que peut avoir
la mère porteuse et sa famille, des problèmes d'ordre physiques
et psychologiques après l'accouchement, des besoins de soins à
long terme (quelles ressources)66.
L'Ordre National des Médecins s'est également
prononcé défavorable à la gestation pour autrui lors de la
session du 4 février 2010. Il a été mis en exergue les
différents enjeux : éthique, médical, social et juridique.
Le rappel de la déclaration des droits de l'homme a été
mentionné « tous les hommes naissent égaux en dignité
et en droits » mais ils ne sont pas égaux devant le destin.
Le rôle du médecin est de remédier
à ces différences dans la mesure du possible mais il ne peut le
faire au prix d'une atteinte à la dignité des êtres humains
et au travers de l'espèce toute entière67.
Le Collège National des Sages-femmes met en garde
contre la gestation pour autrui. Pour le CNSF, la GPA est loin de
représenter une avancée en termes de droits des femmes,
privilégie le droit à l'enfant aux dépens du droit de
l'enfant. Le collège soulève des questions sur les liens
affectifs durant la gestation et s'interroge si tous liens possibles ont
été envisagés, et revient sur la question des rapports
materno-foetaux, selon que la gestatrice est complètement
détachée de sa grossesse ou non. Les risques psychiques encourus
par la gestante sont plus importants que pour l'enfant à
naître.
66 Recommendations on ethical
issues in obstetrics and gynecology by the FIGO committee for the ethical
aspects of human reproduction and women's health november 2003
67 La gestation pour autrui, position du conseil de
l'ordre national des médecins 4 février 2010. Dr Piernick
Cressard ; Dr François Stefani.
54
D'autres points sont abordés, notamment en cas
d'anomalies foetales et d'interruption médicale de grossesse,
d'accouchement prématuré, ainsi que la prise en compte
inhérent à toute grossesse. Le Collège pointe du doigt les
inévitables dérapages financiers.
Le CSF rappelle que le dernier plan de
périnatalité a mis l'accent sur la sécurité
émotionnelle et la prise en charge des situations de
vulnérabilités des femmes. Or la GPA est selon le Collège,
« typiquement une grossesse à risque sur le plan
émotionnel68 ».
Toutes les instances consultées, ainsi que les
CECOS69, à l'exception du Sénat, sont favorable au
maintien de l'interdiction de la pratique de la GPA en France. Les citoyens du
forum de Rennes consultés lors des Etats Généraux de la
Bioéthique, affirment la priorité de protéger l'enfant et
la « gestatrice À mère biologique » mais pas «
génétique » de l'enfant.
D'après l'enquête de l'Ipsos en 2008,
réalisée auprès d'un échantillon
représentatif de 1017 Français âgés de 15 ans et
plus. 61% sont favorables à ce que le recours à une mère
porteuse soit autorisé en France. En revanche, la question de la
rémunération des mères porteuses partage les partisans de
la légalisation, et constitue le principal grief des opposants, qui
rejettent « la commercialisation du corps humain ». Quand au fait de
porter un enfant pour quelqu'un d'autre, la réticence est forte, seule
17% des femmes accepteraient.
Les associations
Les associations M.A.I.A et C.LA.R.A. très actives
militent pour la reconnaissance de la gestation pour autrui et pour que le
législateur promulgue une loi l'autorisant. Leurs principales
propositions sont pour la plupart similaires70.
Conditions d'accès pour le couple :
Infertilité médicament avérée :
impossibilité pour la femme de mener une grossesse soit par absence ou
inaptitude de l'utérus, soit en cas de danger pour la mère et/ou
l'enfant.
Conditions d'accès pour la gestatrice : Etre
majeure, mais un âge limite supérieur doit être
prévu.
68 Agence de Presse Médicale du 8 mars 2010
69 Centres d'Etude et de Conservation des OEufs et du
Sperme humains
70 Annexe page 70 Intégralité des
propositions
55
Déroulement de la procédure : Habilitation
du couple et de la gestatrice
Interdiction de la rémunération de la
gestatrice. Toutefois, le législateur peut autoriser le
remboursement des frais liés à la grossesse et pourrait
légitimement envisager une compensation financière (d'un montant
faible et limité) pour les inconvénients liés à la
grossesse, sur la base de la loi Huriet Serusclat.71 Evaluation du
dispositif au bout de 5 ans, et ajustements éventuels.
Des tromperies à l'égard du médecin sont
possibles. La gestatrice et le père intentionnel peuvent se faire passer
pour des concubins menant une vie commune depuis au moins deux ans. Ils
pourront y parvenir au moyen d'un certificat inexact de concubinage obtenu dans
une mairie très facilement (car il n'y a aucun contrôle) sur la
foi de témoins menteurs. La gestatrice se fait suivre sous le nom de la
mère intentionnelle.
Les médias72
Tous les médias se sont emparés du sujet,
l'analyse faite sur une année (de mai 2008 à mai 2009) est que
globalement l'argumentaire des opposants à la légalisation de la
GPA tourne autour des trois grandes idées : Risque de marchandisation,
les conséquences médicales et psychologiques et le bouleversement
de la filiation.
Paradoxalement, si les tenants de la légalisation de la
GPA sont les plus médiatisés dans les médias,
l'argumentation des opposants s'est révélée être
plus systématique et rigoureuse. L'argument médiatique le plus
visible des opposants est celui de l'indisponibilité du corps et
la peur de la marchandisation. Les conséquences
médicales et psychologiques y compris la vie intra-utérine
constituent la deuxième grande sphère. Enfin le
bouleversement de la filiation et la remise en cause de
l'architecture législative qu'entraînerait la GPA constitue la
troisième grande catégorie d'argument.
71
http://www.legifrance.gouv.fr
Loi n°88-1138 du 20 décembre 1988 relative à la
protection des personnes qui se prêtent à des recherches
biomédicales
72 Analyse des retombées presse sur la
gestation pour autrui mai 2008 À mai 2009 ABM
56
A contrario aucun argument phare et facilement identifiable
par les médias n'a été soutenu par les partisans de la
légalisation. Les trois points qui ressortent sont, les
éventuelles dérives, palier à l'injustice
faite aux femmes stériles et l'altruisme du
geste. A noter que la dimension altruiste du geste a été
combattue par les opposants à la GPA, ces derniers y voyant une
hypocrisie émotionnelle.
B. OPINION DES GRANDES RELIGIONS
La religion Catholique73 est
contre la gestation pour autrui. Elle invoque que la procréation ne peut
être dissocié de l'acte sexuel, car celui-ci est lié
directement à la procréation et à l'union des couples. La
procréation humaine demande une collaboration responsable des
époux avec l'amour fécond de Dieu. Le don de la vie humaine doit
se réaliser dans le mariage moyennant les actes spécifiques et
exclusifs des époux, suivant les lois inscrites dans leurs personnes et
dans leur union.
La gestation pour autrui selon l'Eglise Catholique offense la
dignité de l'enfant et son droit à être conçu,
porté, mis au monde et éduqué par ses propres parents.
Elle instaure, au
détriment des familles une division entre les
éléments physiques, psychiques et moraux qui les constituent.
L'origine d'une personne est en réalité le résultat d'une
donation. L'enfant à naître devra être le fruit de l'amour,
de ses parents. Il ne peut - être ni voulu ni conçu comme le
produit d'une intervention de techniques médicales et biologiques, cela
reviendrait à le réduire- à devenir l'objet d'une
technologie scientifique. Nul ne peut soumettre la venue monde d'un enfant
à des conditions d'efficacité technique mesurées selon des
paramètres de contrôle et de domination.
La religion Judaïque74 est
favorable à la gestation pour autrui avec une restriction cependant : le
clonage thérapeutique n'est autorisé que quand il peut aider
à remédier à la stérilité d'une personne, et
si l'enfant est issu génétiquement des parents intentionnels.
73 Congrégation pour la doctrine de la foi 22
février 1987 DONUM VITAE - Le Don de la Vie ; Joseph Cardinal Ratzinger,
préfet Alberto Bovone, archevêque de Césarée de
Numidie
74
http://www.israel7.com/2009/09/meres-porteuses-en-israel
57
La religion Islamique75 est
défavorable à la gestation pour autrui. La Sharia est la base de
la loi islamiste, elle affirme l'importance du mariage de la famille et de la
procréation. Les traitements d'Aide Médicale à la
Procréation intraconjugaux sont d'autant mieux admis que l'adoption qui
n'est pas une solution acceptable aux yeux de cette religion. Cependant l'AMP
avec tierce personne : don de gamètes, d'embryons ou GPA ne sont pas
admis. Selon la réflexion d'éthique Musulmane76, la
gestation pour autrui est contraire au ressenti maternel, car il est
créé le désir de maternité, veille à ce que
la femme surmonte la souffrance et les douleurs (lorsqu'elles sont
présentes) de la grossesse et renforce ainsi le lien et l'attachement
mère-bébé. Il est dit dans le coran « Et
nous avons enjoint à l'homme de la bonté envers
ses père et mère : sa mère l'a malgré tout
porté et l'a malgré tout accouché».Autoriser la
pratique de la gestation pour autrui pourrait altérer cette «
maternité ressentie ».
La gestation pour autrui transgresse une règle
fondamentale du droit de la filiation dans la religion musulmane, selon
laquelle la maternité résulte de l'accouchement et du respect de
l'origine des gamètes (du père et de la mère). Ce principe
n'étant sujet à aucune dérogation et son respect est l'une
des cinq priorités fondamentales de la religion musulmane (le respect de
la vie, la sauvegarde de l'intégrité physique et psychique de
l'Homme et la sauvegarde des biens de soi et d'autrui). Il en résulte la
notion « la vrai mère s'est elle qui accouche l'enfant. Cette
règle est confirmée par le verset coranique : «
car ils n'ont pour mères que celles qui les ont enfantés
»
La religion bouddhique77 la
gestation pour autrui est discutable : tout dépend de la motivation des
deux parties, s'il est question d'altruisme et non d'avidité ou de
souffrance psychique et émotionnelle.
Les différentes religions sont partagées
devant le problème de la gestation pour autrui.
75
http://claradoc.gpa.free.fr
76
http://www.etatsgenerauxdelabioethique.fr/base_documentaire/rel/avicenne_gpa.
77
http://www.le-monde-des-religions.fr/articles/religions-bioethique.html
58
TITRE II : LA RESISTANCE DU DROIT FRANÇAIS ENVERS
LA GPA
La prise en considération de
l'intérêt supérieur de l'enfant et de la mère
porteuse, principes fondamentaux sur lesquels se base l'interdiction actuelle
mènent à ne pas légaliser la gestation pour
autrui.
Le rapport parlementaire sur la révision des lois de
bioéthique rendu le 21 janvier 2010 propose de maintenir l'interdiction
de la gestation pour autrui, car elle va à l'encontre des grands
principes de la loi française dont, en particulier,
l'indisponibilité du corps.
La décision pour levée la prohibition de la
gestation pour autrui appartient totalement au législateur alors que son
application relève du corps médical, où sa
responsabilité est entièrement engagée. Les données
factuelles sur les risques éventuels sont à ce jour,
insuffisantes, ce qui mettrait les praticiens dans une situation inconfortable.
En ce sens que le médecin se doit d'apporter à ces patients les
données les plus complètes possibles et d'assurer à un
haut niveau des complications qui peuvent être graves.
CHAPITRE I ARGUMENTS EN FAVEUR DE LA GPA A. D'UN
POINT DE VUE JURIDIQUE
Le refus de la légalisation de la gestation pour autrui
soulève la question concernant les fondements judiciaires sur lesquels
la Cour de cassation en 1991 s'est appuyée. Serait remis en cause le
principe d'indisponibilité du corps humain sur lequel les juges fondent
leur décision. Les partisans de cette pratique affirment que ce principe
est sans valeur depuis la loi de 1994 qui autorise le don de gamètes. Le
constat est que le corps humain n'est pas resté en dehors du commerce
juridique. (Don de gamètes, don d'organes entre personnes vivantes,
recherches biomédicales). Un autre argument est celui de la
clandestinité et enfin l'exode des couples qui se rendent à
l'étranger où la GPA est autorisée.
59
A cet effet, Madame DEPADT-SEBAG78 pense le
régime envisageable de deux façons, soit sur le modèle du
don de gamètes, soit sur le modèle du don d'organes entre
personnes vivantes. Dans le premier cas, le don de gestation serait anonyme,
à l'instar du don de gamètes, pour lequel les dangers de
dérives sont prévenus par les deux règles de l'anonymat et
de la gratuité. Dans le second cas, le régime du don pourrait
être inspiré des conditions actuelles du don d'organe entre
personnes vivantes, notamment en ce qui concernerait le statut des mères
gestationnelles par rapport aux mères biologiques.
B. SUR LE PLAN MEDICAL ET PSYCHOLOGIQUE
La première indication de la gestation pour autrui
pourrait être l'absence d'utérus, d'origine congénitale ou
accidentelle. L'absence congénitale d'utérus et des deux tiers
supérieurs du vagin appelée syndrome de
Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser atteint environ une femme pour 4 500, soit
environ 200 par an. L'ablation d'utérus liée à une origine
accidentelle comme par exemple une hémorragie très abondante de
la délivrance, ou suite à un cancer du col de l'utérus ou
de l'endomètre. Dans une étude de Peter BRISDEN79 en
2003, est démontré que les antécédents de cancers
sont la cause la plus fréquente de gestation pour autrui. On assiste
depuis quelques années, d'une part au rajeunissement de l'apparition de
certains cancers, d'autre part au retard de plus en plus marqué de
l'âge de la première grossesse ou à une grossesse tardive
à la suite d'un remariage.
D'autres pathologies peuvent être prises en compte pour
justifier la levée de la prohibition de la gestation pour autrui, comme
l'existence d'anomalies fonctionnelles sévères de
l'utérus. Des malformations entraînant une stérilité
ou des avortements à répétition. Il y a aussi le
diéthylstilbestrol (distilbène), ce traitement a
été prescrit pendant la grossesse pour prévenir les
avortements spontanés, à partir de l'année 1948 et
jusqu'à la fin des années 70. Les effets de ce traitement
pouvaient provoquer chez les filles des mères traitées des
modifications importantes de forme et de volume de la cavité
utérine.
78 DEPADT-SEBAG (V.), « De la
nécessité d'une réforme de l'article 16-7 du Code civil
relatif à l'interdiction de la gestation pour autrui » in Revue
générale de droit médical, p. 153.
79 Peter R. BRINSDEN,. « Gestational Surrogacy
», Human. Reproduction Update, 2003, vol. 9, n°5, p. 483484.
60
Par ordre de fréquence décroissante, il s'agit
d'utérus hypoplasique en forme de T, d'utérus hypotrophique,
d'utérus à bords déchiquetés avec des diverticules,
des strictions et des dilatations, des synéchies80. On peut
estimer à 80 000 le nombre de filles qui ont été
concernées en France. Ces anomalies sont à l'origine de
stérilité essentiellement par difficulté de nidation de
l'embryon, de grossesses extra-utérines, d'avortements spontanés
à répétition, d'accouchements prématurés et
autres anomalies.
Il y a également les maladies mettant en jeu la vie de
la mère au cours de la grossesse. La liste des situations susceptibles
de justifier le recours à la gestation pour autrui établie
ci-dessus n'est ni exhaustive, ni limitative. Ces anomalies ou maladies
reconnues pour ne pas avoir d'alternative thérapeutique.
L'absence d'alternative thérapeutique est un argument
supplémentaire pour la levée de la prohibition de la gestation
pour autrui.
En ce qui concerne l'adoption en France, les
difficultés de la procédure découragent les couples, les
démarches sont longues et compliquées. Un argument
supplémentaire pour légiférer en faveur de la gestation
pour autrui.
Des travaux de psychanalystes étrangers
démontreraient que les gestatrices vivent très bien leur
grossesse, que l'analyse de la question primordiale posée par la GPA
était celle du schéma mental d'une mère de substitution
vis-à-vis d'un foetus qu'elle porte mais qu'elle ne désire pas,
mais qu'elle s'apprêtait à remettre à un couple
animé d'un projet parental. Ces gestatrices sensibles aux
problèmes d'infertilité des couples les porteraient à
accomplir un acte qui les valorisent, pouvoir réaliser une chose que la
médecine actuelle ne peut réaliser en faveur de ces couples
infertiles. Elles font part de leur sentiment de valorisation
d'elle-même, d'une forte gratification que procure l'acte de gestation,
sentiment supérieur à la motivation
financière81.
D'après des données de la psychopathologie
périnatale, un enfant porté par une femme qui n'est pas la
mère d'intention sera capable, par déplacement, de faire un
transfert sur d'autres adultes.
80 Adherences intra-utérines
81 The gift of motherhood : egg donation in a
Barcelona Infertility clinic, Ethnos, 2005, n°70-71
61
Les gestatrices seraient soigneusement
sélectionnées suite à des tests médicaux et
psychologiques. Elles devraient avoir un schéma psychologique
particulier. La grossesse et l'enfantement supposent en effet une
corrélation entre le processus biologique, être enceinte, et le
processus mental, dont l'implication est nécessaire pour devenir
réellement mère. Mais la gestatrice n'aura pas le sentiment
d'attendre « son » enfant. Il pourrait être établi un
profil type de la « gestatrice » en prenant en compte trois sortes de
motivation : l'altruisme, le désir d'être enceinte,
l'intérêt financier. Dans le déroulement de la GPA,
l'aspect important serait l'encadrement et le suivi par l'équipe de
professionnels de santé auprès de la gestatrice et des parents
d'intention.
Dans une étude comparative de GOLOMBOK82,
les gestatrices n'ont pas éprouvé de souffrance psychologique
particulière un an après la naissance de l'enfant. Egalement dans
la même étude, le témoignage des associations ne
révèlent l'existence d'aucun trouble particulier chez l'enfant.
Ces études démontrent l'absence de dommages chez la gestatrice et
chez l'enfant.
L'autonomie de la gestatrice dans ses décisions
relatives à son corps et l'autonomie des parents d'intention dans la
réalisation d'un projet parental représente un argument important
pour les partisans de la GPA. L'association MAÏA83
privilégie cette problématique en alléguant le droit des
mères porteuses à faire des choix autonomes et le droit des
parents d'intention à fonder une famille.
Selon certains argumentaires, l'interdiction de la GPA rompt
l'égalité de traitement entre couple infertiles. Cet argument se
réfère à l'article 16 de la Déclaration Universelle
des Droits de l'Homme de 1948 pour qualifier l'incapacité des couples
concernés à exercer leur droit de fonder une famille comme une
inégalité de traitement84.
82 GOLOMBOK S., MURRAY C., JADVA V., MacCALLUM F., LYCETT E. -
Families created through a surrogacy arrangement: parent-child relationships in
the first year of life. Dev. Psych., 2004, 40, 400-411.
83 Contribution de l'Association MAÏA à la
préparation des états généraux, p.14 « Une
interdiction, par définition est une privation de liberté ; en
l'espèce, privation de liberté pour un couple stérile de
fonde une famille et privation de liberté de la gestatrice de faire ses
choix personnels »
84Le droit de se marier et de fonder une famille
reconnu à l'article 12 de la convention (européenne de sauvegarde
des droits de l'homme et des libertés fondamentales) du 4 novembre 1950
et par l'article 23 du pacte international (relatif aux droits civiques et
politiques) du 19 décembre 1966 à l'homme et à la femme en
âge nubile, n'implique pas le droit de conclure avec un tiers des
conventions portant sur le sort d'un enfant à naître ;
Première chambre civile de la Cour de cassation, 13 décembre
1989
Les positions favorables à la gestation pour autrui
font valoir que celle-ci pourrait être mise en oeuvre dans le respect des
principes qui guident l'encadrement de toute démarche d'assistance
médicale à la procréation. Les dispositions existantes
dans le cadre de l'Aide Médicale à la
Procréation85 pourraient être applicables à la
GPA pour favoriser un consentement libre et éclairé. Concernant
les conditions d'accès pour les parents d'intention, la GPA serait
réservée sous certaines indications médicales. La GPA
serait également réservée pour les couples ayant un projet
parental, et sur le modèle d'un couple hétérosexuel. La
gratuité fait également partie des grands fondements pour la
légalisation de la GPA, mais le principe de gratuité ne
s'opposerait pas à l'indemnisation des gestatrices.
En matière d'AMP avec tiers donneur, le
législateur de 1994 a réaffirmé l'impossibilité
pour le couple receveur de désigner nominativement la personne dont il
souhaite recevoir les gamètes. Les objections à l'égard du
don dirigé ou familial seraient identiques pour la GPA. En revanche le
principe d'anonymat ne pourra être conservé.
Quelle déduction peut-on tirer de ces arguments
favorables à la gestation pour autrui ?
Comble de la générosité de la part d'une
femme d'assurer la gestation d'un enfant à la place d'une autre et lui
remettre à la naissance. Que cette générosité qui
convertit l'enfant en bien !
Un terme sera mis au principe de l'indisponibilité du
corps humain, ce qui aura pour conséquence la modification du statut de
l'enfant et par enchaînement celui des êtres humains, à la
chosification du corps de la femme.
62
85 Code de Santé Publique n°2141-10
63
CHAPITRE II : ARGUMENTS HOSTILES A LA GPA
A. L'ARGUMENT JURIDIQUE MAJEUR
Le maintien de la prohibition de la gestation pour autrui est
inscrit à l'article 16 et suivant du Code civil depuis la loi de
bioéthique de 1994, constitue une spécificité du droit
français. L'indisponibilité du corps humain est le fait qu'une
personne n'est pas propriétaire de son corps, et que nul autre ne l'est,
ce principe juridique est lié à la dignité de la personne
humaine.
L'article 16 fait une distinction entre la personne et
l'être humain, puisqu'il garanti la dignité de la personne, et le
respect de l'être humain. Puis, l'article 16-1 du Code Civil semble, au
niveau terminologique, rapprocher l'être humain du corps humain,
puisqu'on leur rattache le terme de « respect ». Par ailleurs,
l'article 16-1 introduit la notion d'inviolabilité du corps,
c'est-à-dire que l'être humain est en principe
protégé contre les atteintes à son corps par le droit
civil et le droit pénal, et la notion d'extra patrimonialité,
c'est-à-dire que le corps humain est en dehors du patrimoine, incessible
et intransmissible.
On ne peut utiliser le corps humain à des fins
purement techniques et un enfant n'est pas un objet qui pourrait faire partie
du commerce juridique. C'est l'argument du Conseil d'Etat qui dénonce
cette marchandisation de l'être humain. L'argument semble assez imparable
car si on accepte la GPA, alors on accepte que l'être humaine entre dans
le commerce juridique et on accepte alors la vente d'êtres
humains. On peut reprendre ainsi les termes de Kant : « les
choses ont un prix, la personne une dignité ».
La route serait ouverte à de nouvelles formes
d'esclavage. La femme entrerait dans une sorte de « cheptellisation
», l'enfant serait considéré comme un « bien
».
B. SUR LE PLAN MEDICAL ET PSYCHOLOGIQUE
On ne peut exclure les risques inhérents à toute
grossesse, fausse couche, grossesse extra-utérine, de césarienne,
de complications liées au risque d'anesthésie à l'issue
d'une césarienne, au diabète, à l'hypertension
artérielle, à l'hystérectomie, voire à une
hémorragie de la délivrance entraînant le
décès. De plus la gestatrice devra subir avant la conception, des
traitements hormonaux pour préparer sa matrice à recevoir
l'embryon. Ces traitements ne sont pas sans incidence sur sa santé.
64
Quant aux risques psychiques, ils sont bien présents
pour la mère porteuse particulièrement au moment de la naissance
de l'enfant lorsque celui-ci lui est enlevé. Il est indéniable
que les liens qui se sont tissées entre la mère et l'enfant, les
fantasmes et les projections de la mère gestatrice qui a porté et
nourri un foetus pendant neuf mois et a eu avec lui des échanges
variés, tant physiologiques que psychologiques ne peuvent
s'évanouir comme par magie. Donc pour amoindrir ces complications, il
faudrait que la mère porteuse se persuade que l'enfant qu'elle porte en
son sein n'est pas le sien. L'un des principaux dangers de cette dissociation
du somatique et du psychique est un avortement provoqué.
Une étude86 permet d'affirmer que les
cellules foetales restent présentes dans le sang maternel au moins vingt
sept ans après la naissance. Chaque grossesse laisse dans le corps de la
mère le patrimoine génétique de l'enfant qu'elle a mis au
monde. Ce qui prouve que la femme n'est pas un « sac ».
Dans l'hypothèse de légalisation le contrat
entre parents commanditaires et gestatrice, seront stipulées des clauses
où la mère porteuse devra s'abstenir de tout comportement de
nature à mettre en danger la vie de l'enfant ou sa santé.
Risquera-t-elle de voir sa responsabilité engagée si elle
contracte une maladie, si elle exerce une activité sportive ou adopte un
comportement potentiellement dangereux pour l'enfant, par exemple boire de
l'alcool, fumer etc. Ce sont des illustrations des nombreux problèmes
que peut faire naître la gestation pour autrui et de l'asservissement
auquel se trouve réduit celle qui porte un enfant pour le compte d'une
autre. Les termes probablement imparfaits en matière d'information sur
le déroulement imprévisible de la grossesse et par la perspective
attractive de rémunération sont des arguments qui renforcent
l'hypothèse que le consentement de la gestatrice serait probablement
feinté.
L'argumentaire se fonde sur l'idée que le consentement
de la gestatrice est affaibli dès lors que la liberté de choisir
la GPA ou d'y renoncer est freinée par un besoin matériel vital.
Le risque d'exploitation des femmes les plus vulnérables, les plus
démunies est évident.
86 Myriam Szejer, pédopsychiatre et
psychanalyste à la maternité Antoine-Béclère.
65
Il faut réfléchir également aux
conséquences de la GPA sur la famille de la mère porteuse.
Comment vont réagir ses propres enfants ? Comment pourront-ils concevoir
que leur mère donne « leur petit frère ou petite soeur
» à une autre famille.
Comment leur expliquer que leur père n'est pas le
père de l'enfant, et que leur mère n'est pas la mère. Mais
cet enfant c'est son enfant ? Et nous, nous sommes aussi ses enfants, va-t-elle
nous donner ? Des tourments apparaîtront dans la tête de la fratrie
et auront obligatoirement des conséquences sur leur développement
mental. Les risques psychologiques se retrouvent à toutes les
étapes de la GPA pour la gestatrice et pour ses proches.
Il est intéressant de se poser la question qui
seront les mères porteuses, des femmes sans emploi à faibles
revenus ou de riches rentières nageant dans le bonheur ?
Souvent les partisans pour la GPA associent cette pratique au
don d'organe entre vivants. Dans le cas des greffes, les risques pris pour le
donneur le sont au nom d'une nécessité impérative pour le
receveur. Dans le cas de la gestation pour autrui, la balance entre les risques
pris par le donneur et les bénéfices escomptés pour le
receveur pose davantage de questions.
On peut constater que les arguments changent en fonction des
besoins. Lors de la mise en place de l'AMP avec le don de gamètes, les
arguments utilisés se fondaient sur le lien affectif et gestationnel,
à valoriser par rapport au lien génétique. On peut donc se
demander comment l'argument inverse peut dès lors être soutenu.
L'argument privilégié étant cette fois le lien
génétique (on utilise les gamètes des futurs parents et on
minimise le lien entre foetus et la mère porteuse), comment ne pas
s'interroger sur ces arguments qui changent au gré des besoins
simplement parce que les gamètes sont devenus accessibles. La
fréquence toujours plus élevée de l'utilisation de
l'ICSI87 dans la pratique de l'AMP va également dans ce sens,
malgré les risques inhérents également à cette
pratique88.
87 injection intra-cytoplasmique de
spermatozoïde
88 René Frydman, la Rehcerche, n°420 p56
juin 2008
66
L'enfant ne doit pas être oublié, d'abord
dès sa vie intra-utérine, on a vu les impacts sur la mère
porteuse, il est important de rappeler les sensations du foetus. Le foetus a
pendant longtemps été considéré comme un être
dénué de capacités perceptives. Les progrès de la
science ont permis d'observer intra-utéro le comportement du
bébé. Il perçoit tous les stimuli sensoriels dans son
environnement. Les sonorités comme, les battements cardiaques et
placentaires, les rythmes respiratoires, la voix maternelle et autres bruits
comme les borborygmes intestinaux.
Il est aussi sensible aux impacts émotionnels de la
mère, le langage, les chants. Ainsi le bébé à la
naissance est attiré par la voix de sa mère. Au-delà des
rythmes langagiers et musicaux, le bébé a mémorisé
in utéro ceux de la marche, de la respiration de sa mère. Toutes
ces sonorités perçues à l'intérieur du corps de sa
mère lui permettront à sa venue au monde une transition plus
aisée. Le descriptif de sa perception intra-utérine est loin
d'être exhaustive.
Les enfants ne sont pas exemptés des dangers de la GPA,
peuvent survenir des problèmes de prématurité, un placenta
prævia89, un faible poids voire même très faible
poids (moins de 1800 g), un cordon mal placé entraînant une
anoxie90, ou d'autres pathologies survenant à la naissance ou
après la naissance (pathologies neurologiques).
Il est incontestable que de sa vie intra-utérine
découlera ses traits de caractères et son comportement, cette
influence se ressentira également dans son développement
psychosocial. Comment pourra-t-il intégrer qu'il a été
conçu pour être abandonné. Le conflit rencontré par
un adolescent conçu par GPA risque d'être d'autant plus violent
que l'enfant ne pourra pas, contrairement aux enfants abandonnés,
considérer que la femme qui l'a porté l'a remis à ses
parents intentionnels par amour91.
Les partisans de la GPA insistent sur le fait que la
gestatrice ne « traite » pas sa grossesse pour autrui comme elle
« traitée » ses propres grossesses. Donc on peut en
déduire qu'elle est dans le déni de grossesse, ce qui aura des
conséquences graves sur le foetus.
89 Le placenta praevia est une localisation
anormale du placenta qui peut être responsable d'hémorragies
sévères
90 souffrance cellulaire induite par le manque
d'oxygène ou l'impossibilité pour les cellules d'utiliser
l'oxygène présent dans le sang
91 Marcel Ruffo, pédopsychiatre, chef de
service de l'unité d'adolescents CHU Ste-Marguerite Marseille
67
Il faut se soucier également des défections, que
devient cet enfant, ce n'est pas un cadre juridique qui empêchera des
« pseudo-parents » à se débarrasser de l'enfant. Des
cas très médiatisés aux Etats-Unis de parents d'intention
qui ne souhaitaient plus accueillir l'enfant pour diverses raisons, soit en cas
de handicap de l'enfant à la naissance, cas de divorces etc.
On invoque souvent l'égalité de traitement, de
quel traitement s'agit-il ? Celui de mettre de corps d'une femme à
disposition d'un couple infertile. L'acte même de changer une femme en un
outil vivant est contraire à sa dignité et à celle de
l'enfant. Même si on la regarde comme une « gestatrice
agréée » sera-t-elle pour autant un remède à
la stérilité ?
Rappelée par les partisans de l'autorisation de la GPA,
l'égalité de traitement fonde également un argument
d'opposition à la GPA. En faisant valoir qu'il y a discrimination
dès lors qu'une caractéristique contingente d'un groupe de
personnes « la capacité reproductive des gestatrices est
transformé en objet pour le bénéfice d'autrui ». Il y
a alors discrimination et rupture d'égalité de traitement dans le
fait d'autoriser la GPA, car cela revient à définir la
fécondité des gestatrices comme un outil au service de
l'accès des couples infertiles à la parentalité, ces
couples devenant à même d'exercer un pouvoir sur le corps des
gestatrices92.
L'égalité de traitement, est mobilisée en
deuxième temps en cas d'autorisation de la GPA, pour la qualification
des personnes susceptibles d'en bénéficier. La restriction de la
GPA aux seuls couples hétérosexuels en âge de
procréer dont la femme souffrirait d'infertilité utérine
serait la même à laquelle est soumis aujourd'hui l'accès
à l'Assistance Médicale à la Procréation. Cette
restriction maintiendrait un certain nombre de candidats à la gestation
pour autrui dans la clandestinité qui seraient confrontés aux
mêmes problèmes qu'aujourd'hui en termes d'établissement de
la filiation et seraient de surcroît vulnérable aux objections de
rupture de l'égalité de traitement.93On sait que des
groupes d'homosexuels et des célibataires réclament
déjà l'accès à la gestation pour autrui.
92 Debra Staz « markets in women's
reproductive «laborphilosophy and public affairs», 1992, 21(2),
107-131 P.124
93 Françoise Héritier « la
filiation, état social » Le Monde du 18 avril 2009
68
CONCLUSION
Nous avons comparé les aspects juridiques et
éthiques de la gestation pour autrui en droit dans quatre pays de
l'Union Européenne et en droit international. Aucun cadre n'existe ni en
droit Européen ni en droit international. Une uniformisation mondiale
aurait été nécessaire au même titre que les
conventions internationales qui protègent par exemple les enfants ou
encore les droits de l'homme.
Le constat qui ressort de cette étude est une question
financière, il n'existe pas de gestation pour autrui sans commerce.
Malgré les dénégations, il est clair que cette pratique
renforce les rapports de domination économique.
Lorsque la gestation pour autrui est autorisée au sein
d'un pays, les candidates pour être mère porteuse sont dans
l'immense majorité des cas des femmes pauvres. L'Inde en est l'exemple
par excellence, son extrême pauvreté en fait un réservoir
inestimable de « ventres ». Le déferlement de la GPA a induit
des traitements inhumains envers les femmes indiennes. En juillet 2010 huit
pays de l'Union Européenne94 ont demandé aux cliniques
indiennes de ne plus accepter les clients européens et de
réorienter leurs citoyens en quête de mère porteuse vers
leur consulat avant d'entamer toute procédure.
Les consulats de Belgique, de France, d'Allemagne, d'Italie,
des Pays-Bas, de Pologne, d'Espagne et de République tchèque sont
à l'origine de cette décision, leur demande a été
adressée auprès de nombreuses cliniques de Bombay.
Face à l'exemple des pays où cette pratique
malheureusement courante moyennant finances est perçue comme presque
« banale ». L'utilitarisme fait que l'on ne se pose pas de question
de nature éthique et médicale, mais seulement des questions de
nature pratique et financière. Ces excès constatés
à l'étranger doivent conforter à légitimer la
prohibition en France.
94
Lemonde.fr 14 juillet 2010
La pauvreté accentue ce « commerce », des
études sur l'accroissement de la précarité dans notre pays
ont démontrées que huit millions de personnes vivaient sous le
seuil de pauvreté95 c'est le constat fait par l'Observatoire
National de la Pauvreté et de l'Exclusion Sociale, il ressort
également que les femmes96 sont en augmentation constante ces
dernières années. Ces études sont des alertes qui doivent
être prises en compte et amener à une réflexion quant
à la levée de la prohibition de la gestation pour autrui.
Par ailleurs, les pays européens qui acceptent et
encadrent la gestation pour autrui se trouvent confrontés au même
titre que la France aux problèmes de clandestinités et de
tourisme procréatif.
L'abrogation de la prohibition remettrait en cause la
protection est due aux êtres les plus vulnérables, les pratiques
condamnées aujourd'hui seraient légitimées avec la
coopération du juge et du médecin.
Nonobstant un encadrement juridique aussi limitatif soit-il,
il n'arrêtera pas le mercantilisme des entremetteurs et les
dérives de tous ordres.
Comme le souligne Sylviane AGACINSKI97, « il
est écoeurant de devoir argumenter pour dire pourquoi il est indigne de
demander à une femme de mettre son ventre à disposition d'autrui.
Chacun devrait le voir lui-même, le comprendre lui-même ».
69
95 (ONPES) rapport du 25 février 2010
96 Rapport du Secours Catholique 5 novembre 2009
97 Corps en miettes ÀSylviane Agacinski Edition
Flammarion 2009 p.8
70
ANNEXE A
PROPOSITON DES ASSOCIATIONS MAIA & CLARA POUR
L'ENCADREMENT DE LA GPA
CONDITIONS D'ACCES POUR LE COUPLE
Cadre législatif de l'Assistance
Médicale à la Procréation : couple marié ou en
union stable, en âge de procréer,
Infertilité médicament avérée
: impossibilité pour la femme de mener une grossesse soit par
absence ou inaptitude de l'utérus, soit en cas de danger pour la
mère et/ou l'enfant,
Utilisation des gamètes (sperme et ovocyte) du
couple : notamment, il s'agit d'éviter que la gestatrice soit
aussi la mère génétique de l'enfant.
Obtention du consentement éclairé
par entretiens psychologique, médical et juridique.
CONDITIONS D'ACCES POUR LA GESTATRICE
Etre majeure, mais un âge limite
supérieur doit être prévu
Avoir un ou des enfants vivants
Vérification de l'aptitude médicale
à la grossesse
Vérification de l'aptitude psychologique
à la GPA
Obtention du consentement éclairé
par entretiens psychologique, médical et juridique.
DEROULEMENT DE LA PROCEDURE
Habilitation de la gestatrice : constitution
d'un dossier médical, psychologique et juridique attestant de son
consentement éclairé à la procédure,
Habilitation du couple : constitution d'un
dossier médical, psychologique et juridique attestant de son
consentement éclairé à la procédure,
Examen du dossier par un juge compétent :
analogie avec le don d'embryons. Décision de principe
du juge : accord, refus ou ajournement.
En cas d'accord : délai de réflexion et de
rétractation de toutes les parties : analogie avec le don de
gamète et d'embryons.
Confirmation de l'accord devant le juge,
établissement de la filiation à l'égard des
71
parents intentionnel : mesure protégeant à la fois
la gestatrice, les parents et l'enfant. Analogie avec le don de gamète
et d'embryons.
Traitement médical : uniquement après
l'accord du juge. Interdiction de la rémunération de la
gestatrice.
Toutefois, le législateur peut autoriser le remboursement
des frais liés à la grossesse et pourrait légitimement
envisager une compensation financière (d'un montant faible et
limité) pour les inconvénients liés à la grossesse,
sur la base de la loi Huriet Serusclat.
Interdiction des intermédiaires commerciaux
à but lucratif (« agences ») qui mettraient en
contact gestatrice et parents ; cette mesure ne ferait pas obstacle au travail
d'association loi 1901 contrôlées par l'Etat comme cela existe
pour l'adoption, et, en Grande-Bretagne pour la GPA (associations COTS et
SurrogacyUK).
Clause de résidence des parties : pour
entrer dans un tel accord, les deux parties : parents et gestatrice doivent
être résidents en France.
Evaluation du dispositif au bout de 5 ans, et
ajustements éventuels. Mesures annexes (voir schéma ci
dessous)
72
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Avocat au barreau de Bruxelles
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