INTRODUCTION
L'usage de la pierre date d'environ deux millions
d'années. Les Hommes des cavernes s'en servaient comme outils de
défense et de chasse1. Depuis, les techniques et les usages
de ce matériau n'ont cessé d'évoluer. Du matériau
de survie, la pierre devenait des objets témoignant les croyances
ancestrales2. Elle revête de ce fait des caractères
sacrés. Une matière associée aux cultes des
ancêtres, la pierre occupait, comme ailleurs, une place
considérable à Madagascar3, surtout sur les
Hautes-Terres4.La présence des Vatolahy dans
différents endroits en sont les preuves. L'aménagement de
l'habitat y était aussi soumis à des règles strictes au
souci du respect des ancêtres. L'art de bâtir, très
caractéristique et propre, y était en fonction du climat, du
matériau et a été repris de génération en
génération. L'arrivée des Européens dans la grande
île marquait le début d'une nouvelle ère dans divers
domaines.
CHOIX ET INTERETS DU SUJET
L'architecture traditionnelle malagasy se caractérise
par l'emploi intégral de matière végétale
d'où sa qualification de civilisation du
végétal5. Ce style s'imposait du fait du bois,
principal matériau à proximité et abondant. La cité
était également liée à un édit royal
interdisant l'emploi d'autres matériaux que ceux « vivants ».
Une nouvelle ère commençait avec les missionnaires dès
Cameron (J.) en 1826. Des influences architecturales européennes
s'observaient. Les maisons en briques, à vérandas, gagnaient de
la place. L'usage de la pierre faisait son apparition avec la construction
successive des Temples commémoratifs de la Capitale, des bâtiments
à formes et styles importés d'Europe. La levée de
l'interdiction des Sampy par Ranavalona II libérait l'ancienne
cité pour l'usage de la pierre ; ajoutés à cela, la
raréfaction du bois, les incendies fréquents sur la haute ville.
Voulant créer des foyers de cultes durables en mémoire des
martyrs malagasy, les missionnaires-architectes apportaient de nouveaux styles,
de nouvelles techniques étrangères à la population de
l'Imerina. Ceci va influencer le domaine de la construction et l'art
de bâtir malagasy. L'édification des Temples
commémoratifs
1 Période de la pierre taillée- de la pierre polie
: Préhistoire, une période que Madagascar n'a connu,
jusqu'à la découverte de preuve (exemple : restes humains de
10.000 ans ou des pierres travaillées : polies ou taillées).
2 Les grands monuments sont cependant parmi les plus anciens.
Les grands alignements bretons ont été construits entre 4000 et
3000 ans av. J.-C. La construction de Stonehenge en Angleterre a
débuté en 2750 ans av. J.-C. et s'est poursuivi jusqu'en 1500 ans
av. J.-C. Les grands dolmens de Newgrange et de Knowth sont datés de
2000 ans av. J.-C. Les menhirs de Corse quant à eux datent de 1000 ans
av. J.-C. (source : Les mégalithes in Wikipedia)
3 Madagascar est parmi les pays où se localisent les
mégalithes, cités par des archéologues.
4 Une recherche concernant les pierres levées a
été déjà entreprise (Les Vatolahy dans le
Fisakana par RANDRIANANDRASANA, mémoire de maitrise 2005)
5 DOMENICHINI-RAMIARAMANANA (B.) Architecture dans la
tradition des hautes terres centrales in Bulletin de
l'Académie Nationale des Arts, Lettres et Sciences Tome
71/1-2 1993, pp 13-14
montrait également l'adoption du christianisme, devenu
religion de l'Etat, à la place de l'idolâtrie. Toutes ces raisons
que nous avons jugées importantes ont déterminé notre
choix.
PROBLEMATIQUE
Quelles techniques ont été
déployées pour la construction des Temples Commémoratifs
d'Antananarivo ? Les connaissances sur les techniques et méthodes de
construction, les concepteurs de ces travaux, les ouvriers des chantiers
demeurent encore vague voire même inexplorées. Aussi les
connaître nous est-il d'un intérêt important. Mais tout
d'abord il faudrait essayer d'étudier les diverses utilisations de la
pierre en Imerina, ensuite le matériau pierre dans les temples
commémoratifs. Enfin que constituent ces monuments par rapport au temps
et à l'espace ?
Etant donné que toute technique est une production
sociale1, nous posons l'hypothèse que l'adoption des
nouvelles techniques contribue à la création de nouvelles
identités en Imerina.
METHODOLOGIE DE RECHERCHE
Il est important de cadrer l'étude car les
Tranovato témoignent de grandes révolutions dans
l'Histoire et la culture de l'Imerina. De ce fait, le recours à
une démarche historique est nécessaire. Le fait que ces monuments
appartiennent au passé et à l'Histoire, les collectes de
données et d'informations se faisaient par consultation de documents,
d'ouvrages et d'archives... Il faudrait analyser et interpréter toutes
ces informations recueillies d'où l'utilité d'une approche
analytique. On ne peut cependant écarter une démarche descriptive
ni moins une approche déductive. La conjugaison de ces approches nous
permettrait d'étudier au mieux notre sujet.
PLAN DU TRAVAIL
Notre travail se divisera en trois grandes parties. Etant
donné que la pierre jouait un rôle crucial bien avant
l'édification des « Tranovato », il est
nécessaire tout d'abord, dans une première partie de voir les
liens entre les Malagasy de l'Imerina et la pierre. Ensuite, on
traitera dans la deuxième partie l'utilisation du matériau pierre
dans les quatre églises. Enfin, dans la troisième partie, on
parlera de la place qu'occupent ces monuments dans la société
merina. Nous allons donc entamer avec la première partie de notre
travail.
1 Cf. Dictionnaire de l'Ethnologie et de l'Anthropologie
P.U.F, Paris 1992
PREMIERE PARTIE
LA PIERRE ET LES
MALAGASY DE L'IMERINA AVANT LES
TRANOVATO
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