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MASTER ECONOMIE DE LA SANTÉ DANS LES PAYS EN
DEVELOPPEMENT ET EN TRANSITION
Mémoire Thématique
Expériences de Micro-Assurance de Santé
et d'AMO : Qu'en est-il d'une transition vers la Couverture Maladie
Universelle
dans les pays à revenus faible et moyen
? (Propositions pour la Tunisie)
Élaboré par : MAKHLOUFI KHALED
Année Universitaire 2009-2010
A mon père
Mes remerciements les plus sincères à tous
ceux, qui m'ont de près ou de loin aidé à élaborer
ce modeste travail.
Table des Matières
Liste des Acronymes
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05
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I. Introduction :
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06
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II. Etude d'expériences de Micro-assurance de
santé :
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08
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1. De la faisabilité à la conception:
tentative de standardisation :
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08
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a/ Démarche d'identification en MAS:
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09
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b/ Préparation de la faisabilité: outils
à prendre en compte:
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.11
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c/ Choix méthodologiques pour une conception de la
MAS:
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12
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2. Grille de lecture des modèles de
micro-assurance de santé :
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13
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a/ Facteurs favorables à la sensibilisation :
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14
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b/ Mutuelle et micro-assurance de santé :
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.16
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c/ Caractéristiques et originalité de la
MAS :
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19
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c1. Caractéristiques communes aux expériences
de MAS :
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.19
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c2. Typologie des organismes de MAS et grille de
lecture :
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20
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III. Leçons des expériences mûres de
transition d'Assurance Maladie
Obligatoire vers la CMU:
1. Les facteurs accélérant la transition
vers la CMU via l'AMO :
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.26
27
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a/ Les facteurs généraux pour arriver
à une CMU : aperçu général :
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28
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b/ Les facteurs particuliers : leçons de quelques
expériences en matière
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de période de transition :
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30
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c/ Impact du régime d'AMO sur les objectifs finaux
du système de santé :
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2. Caractéristiques d'un régime d'assurance
maladie performant :
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.32
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a/ Le rôle de l'Etat dans la préparation du
développement de l'AMO :
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33
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b/ Indicateurs et aspects de la performance :
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.34
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c/ Analyse des problématiques conceptuelles :
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35
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IV. Couverture maladie universelle : Discussion :
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39
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1. Défis d'une transition vers la CMU par la
micro-assurance de santé et l'AMO :
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.39
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a/ Difficultés de mise en oeuvre d'une CMU dans
les pays à revenus faible et moyen :
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39
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b/ Limites de ce qui peut être assuré :
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40
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c/ Perspectives :
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..42
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2. Perspectives à envisager de point de vue
système d'AMO tunisien :
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43
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a/ Le systme de couverture maladie tunisien : une brve
prsentation : .44
b/ Principaux obstacles la gnralisation de la protection
financire
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travers un systme formel : 45
c/ Projet : propositions pour une transition vers la
couverture universelle en Tunisie : 46
V. Conclusion : 51
VI. Bibliographie : .53
Liste des acronymes :
AMO : Assurance Maladie Obligatoire
CGAP : Consultative Group to Assist the Poor
CHI : Community Health Insurance
CMU : Couverture Maladie Universelle
CNAM : Caisse Nationale d'Assurance Maladie
GRET : Groupe de Recherche et d'Echanges Technologiques
HMI : Health Micro-Insurance
ILO : International Labour Office
IMF : Institution de MicroFinance
MAS : Micro-Assurance de Santé
MIA : Micro Insurance Academy
ONG : Organisation Non Gouvernementale
SEWA : Self Employed Women's Association
(Inde)
SKY : «Sokapheap Krousat Yeugn», Acronyme khmer
: santé pour nos familles. STEP : Strategies and Tools against Social
Exclusion and Poverty UTM : Union Technique de la Mutualité
malienne
I. Introduction :
Apparu en 1999 dans un article ayant pour titre : "
Micro-Insurance : Extending Health Insurance to the excluded" (Dror et al,
1999), le terme micro-assurance à l'instar de microfinance, est
utilisé de manière constante. Les expériences pilotes et
les programmes de développement se focalisant sur l'assurance maladie
communautaire se sont multipliés partout en Afrique de l'ouest
(Sénégal, Mali, Guinée, Burkina Faso, Bénin, Togo,
Cameroun, Niger, Mauritanie, Ghana...), en Afrique de l'est et centrale (Rwanda
et RD Congo), en Afrique du Sud, en Asie (Chine, Inde, Nepal, Bengladesh,
Cambodge, Lao PDR, Philippines, Indonésie) et en Amérique Latine.
Utilisant aussi des techniques de la réassurance (Dror et al, 2003) et
se combinant à d'autres services de microfinance et de distribution de
soins, ces expériences possèdent des points communs malgré
leurs formes très variables. Certains auteurs spécialistes, ont
classé les expériences existantes en modèles et en
classifications selon des critères bien déterminés. Mais
plutôt qu'une nouvelle typologie restrictive, « une grille de
lecture même a été proposée afin de se retrouver
dans le foisonnement des expériences existantes ..., et
d'appréhender au mieux les caractéristiques et
l'originalité des régimes d'assurance pris dans leur contexte.
» (Letourmy et al, 2005). Cette grille comprenait deux volets : un
technique et un autre se focalisant sur les objectifs ayant motivé les
lancements des nombreux projets dans le monde. Pour faire le tour des
appellations proches, «In the anglophone literature, the terms
Community Health Insurance (CHI) and
Community-Based Health Insurance are used most
frequently. Less common is the descriptor Mutual Health
Organisation, although its French equivalent Mutuelle
de Santé is widely employed in francophone Africa, thereby
emphasising an underlying social dynamic. In West Africa especially, scheme
management relies considerably on community participation. In East Africa,
where provider-driven schemes are encountered more frequently, the financial
dimensions of CHI attract more attention.»(Criel et al, 2010).
L'utilisation du terme Health Micro-Insurance (HMI)
par Dror et Jacquier a trait à la dimension financière de la CHI.
Mais pourquoi appuyer et développer la micro-assurance de
santé(MAS), et quels intérêts ou connexions avec d'autres
activités de microfinance ou distributions de soins ? Les
réponses vont être détaillées dans le corps de ce
modeste travail. «The CHI picture today is very patchy, be it in Africa or
Asia. In Latin America, CHI is nowadays hardly relevant and does not deserve
much further discussion. We observe a great heterogeneity in institutional
designs and organisational models for implementing CHI in both the African and
Asian continent. Similarly, we take notice of huge variation in coverage
achieved, in terms of breadth, depth and height.»(Criel et al,
2010)
Se focalisant sur l'objectif primordial de la
Couverture Maladie Universelle - qui est d'ailleurs l'objet de ce travail -
«An influential joint publication on micro-insurance of ILO and the Munich
Re Foundation replaced «those excluded from formal social security»
by «low-income people», and explicitly stated two aims of
micro-insurance: extending social protection to the poor and the creation of a
new market for commercial insurers, including in the field of
HmI.»(Churchil, 2006) L'idée est de discuter sous quelles
conditions et comment intègrer les MAS au sein de la politique nationale
d'un pays pour être sur le chemin vers l'objectif de la couverture
maladie universelle? Surtout si «CHI schemes in Africa are rarely launched
on a programmatic nationwide basis. Most schemes today still are - with the
notable exceptions of Rwanda and Ghana in mind - the result of scattered local
project initiatives heavily dependent on support from external
organisations.» (Criel et al, 2010) Quelle(s) leçon(s) peut fournir
la MAS aux pays ayant des systèmes d'assurances maladie obligatoires
(AMO) - on va discuter surtout l'opportunité pour l'AMO tunisienne - du
moment où plusieurs autres pays ont atteint la CMU au bout de dizaines
d'années et que Le système d'AMO tunisien date juste de 2007.
Atteindre la CMU par l'AMO en Tunisie est notre objectif personnel, un
rêve, un projet pour lequel on va essayer de militer durant les
années de vie qui nous restent. Pourquoi pas, le rêve est le
carburant des miracles, que dire donc d'un objectif déjà
réalisé ailleurs.
Figurant encore parmi le menu des interventions de
«microfinance» pour réduire la pauvreté - la
pauvreté temporaire des périodes immédiatement
postérieures à des situations de crise et la pauvreté
chronique à plus long terme - l'accès à l'assurance ou
plus précisément à la MAS, permet-il de parvenir à
une couverture maladie universelle dans des pays où l'AMO est absente ?
Autrement , dans les pays où un système d'AMO est en place,
est-ce-qu'il est intéressant de monter des programmes de MAS ou bien
juste de se focaliser sur l'AMO - avec d'autres déterminants - pour
atteindre une couverture maladie universelle ( pour toute la population)
?
Donc pour faire le tour de ces points et d'autres , ce
travail a pour ambition d'étudier les expériences de
micro-assurance de santé dans le monde (II), de tirer les leçons
des expériences de transition d'AMO mûres vers la couverture
maladie universelle , qui vont servir aux modèles de MAS (III), puis de
discuter la CMU et les horizons pour la Tunisie (IV).
II. Etude d'expériences de Micro-assurance de
santé :
Par une analyse de la littérature sur les
expériences de MAS dans le monde et d'informations
détaillées sur les projets montés dans plusieurs pays, on
va essayer de rendre compte des caractéristiques communes du concept de
MAS malgré la diversité de ces expériences et des
réalités ayant prévalu pendant leurs études de
faisabilité. Pour en tirer les messages intéressants, sans perdre
de vue surtout la proposition d'une grille de lecture des divers modèles
existants. Mais jusqu'à quand la micro-assurance de santé (MAS)
va-t-elle rester prisonnière du cadre expérimental ? Est-ce de la
nature même du caractère « micro » de ce service ou bien
la faisabilité ou l'identification en MAS pour aborder un nouveau
terrain, qui ne peuvent se surpasser du décryptage du contexte en
question afin de répondre aux questions-clés et des
éléments dans lesquels le programme doit se situer ? Une
standardisation des procédures d'identification, de faisabilité
et de conception n'est donc pas possible ou encore quand elle existe, va
souffrir de plusieurs nuances et insuffisances ?
1. De la faisabilité à la conception:
tentative de standardisation :
On a jugé utile de situer brièvement la
MAS par rapport aux services de la « microfinance» et ce en se
référant au site du CGAP. «Le terme « Microfinance
» désigne l'offre de services financiers aux ménages
à faibles revenus : prêts, épargne, assurance ou services
de transfert...La plupart des bailleurs de fonds ont limité l'essentiel
de leurs interventions à une seule de ces prestations, à savoir
le microcrédit. Bien que le crédit ne crée pas en
lui-même de potentiel économique, il peut le libérer,
permettant ainsi aux pauvres d'utiliser leur capital humain et productif de
façon plus rentable... Au-delà du crédit, les pauvres font
appel aux services d'épargne et d'assurance pour planifier leurs
dépenses futures importantes et pour réduire le risque
découlant des variations de revenus et des besoins soudains...
L'épargne permet aux pauvres de se protéger contre des
événements ou des crises à venir mais la micro-assurance
offre un moyen de gérer des risques spécifiques en
répartissant le coût d'événements
imprévisibles entre un grand nombre de ménages pauvres.... Les
institutions de microfinance commencent à accorder plus d'importance
à la micro-assurance... Tout comme l'épargne, l'offre de
prestations d'assurance directe exige des compétences et des
systèmes importants, ainsi qu'une permanence institutionnelle »
(Pearce et Parker, 2010). Le fait que le microcrédit soit fourni par un
prestataire spécialisé sur une base commerciale, est un service
non financier car tout simplement « L'octroi de crédit sans
discipline
n'est rien de plus que de la charité. La
charité ne suffit pas à vaincre la pauvreté. La
pauvreté est une maladie dont les effets sont paralysants pour l'esprit
et le corps. Un véritable programme de réduction de la
pauvreté aide les gens à se prendre en charge pour tenter de
percer les murs qui les entourent » (Yunus, 1998). La MAS comme service
financier obéit aussi à la nécessité d'un autre
service non financier venant s'ajouter à d'autres garanties de
réussite. Fixer des garanties de réussite veut dire fixer une
sorte de référentiel portant sur les démarches
d'identification, de faisabilité et de conception des projets de
MAS.
a/ Démarche d'identification en MAS :
Comme réponses au fait que la MAS ne peux pas
se surpasser d'un passage par le cadre expérimental et que parfois
même l'expérience mise en place peut échouer. Ceci est du
au fait que: «, in many regions of the world, the principle of
insurance-paying in advance for a potential risk that is pooled-is not
initially obvious to potential subscribers. In addition, due to the lack of
reliable data on illnesses and their prevalence, a truly experimental approach
must be taken to develop this data while experimenting with the insurance
product in order to solve the dilemma of setting the contribution rate neither
too high and thus discouraging households from enrolling, nor too low and thus
preventing the scheme from eventually attaining financial viability»
(Duffau et al, 2008). Ainsi, «le choix des risques couverts peut
privilégier le gros ou le petit risque» (Lepine et Petitpierre,
2006). Cette responsabilité collective dépend de la
capacité à payer et de l'offre de soins disponible, mais à
signaler que cette liberté «relative» distingue la MAS de
l'assurance sociale ou encore l'AMO, et parfois de l'assurance à but
lucratif proposant un panier de prestations standard. Bref, cette
liberté - faisant partie d'une stratégie de communication et
d'une sorte de «marketing social» - est censée attirer les
adhérents potentiels. Donc, c'est la diversité des contextes qui
impose l'expérience et l'identification des éléments pour
répondre à deux questions de base :
«1- What type of health insurance needs to be put in
place?
2- What coverage does one wish to offer, and with which
health care providers?
... The stakes behind identification and feasibility are
to gather the necessary information on health policies and the interest in
micro health insurance, the availability of health care and its quality, and
households' ability to pay and their health-related behaviours» (Duffau et
al, 2008). Généralement les MAS se faisant dans le cadre de
projets de développement ; qui tendent à considérer qu'ils
arrivent en terrain vierge avec leur lecture des réalités locales
en termes
d'absence et de manque. Donc «L'offre nouvelle
apportée par l'intervention ne vient pas combler un vide, elle va
s'insérer dans un ensemble préexistant, élargissant la
gamme des choix» (Lavigne Delville, 2001). Comme en microfinance, et pour
montrer la complémentarité des étapes ou des couches, il
est légitime d'effectuer une mission d'identification pour juger de la
pertinence de la mise en place d'un programme d'assurance avant de
définir comment intervenir : la faisabilité.
La pertinence du projet de micro-assurance a trait
à ses apports supplémentaires par rapport à d'autres
outils financiers de gestion du risque du point de vue du ménage, comme
le crédit et l'épargne dans le cas du Cambodge, ainsi que la
complémentarité entre ces services financiers pour
sécuriser les revenus des ménages contre les coûts
catastrophiques et la décapitalisation(projet d'assurance santé
SKY mené par le GRET au Cambodge, phase d'extension prévue :
2008-2011dans le cadre du programme global STEP du ILO).
L'identification appelée aussi « mission
exploratoire ou étude préalable» (Duffau et al, 2008),
permet par un premier décryptage du contexte afin de définir des
pistes d'actions pertinentes par rapport à ce même contexte,
à la population cible et à l'exigence de technicité sur le
thème concerné. Elle permet de préciser des orientations
stratégiques majeures du futur projet c'est-àdire le champ des
possibles, sa zone d'intervention, ses acteurs, «ses grandes
références techniques et méthodologiques» (Creusot,
2004). Naturellement un accord politique de principe avec un premier noyau
d'acteurs sera recherché - pouvant renseigner sur la volonté
politique - notamment sur les grands objectifs et les orientations de l'action.
Lorsque les choix méthodologiques seront pris, le lancement du projet
expérimental aura lieu et les informations disponibles seront
affinées avec le temps «notamment la prévalence des
pathologies et aussi pour ajuster le modèle mis en place, aboutissant
ainsi à un dispositif d'assurance maladie de qualité»
(Duffau et al, 2008). Reste à préciser les trois aspects de la
démarche de l'identification. Autrement sur quels points, porte
l'analyse du contexte ? Quelles questions-clés de la MAS il faut creuser
? Et enfin quels partenariats ou alliances il faut considérer
?
L'analyse du contexte commence par une revue
d'ensemble portant sur les points suivants : «Compréhension des
données clés du pays...et analyse de la politique de
santé,...analyse du contexte de l'assurance pour savoir à quelles
conditions peut-on être autorisé à mener un projet
expérimental ; quelle est la tutelle gouvernementale de l'assurance
santé c'est-à-dire (quel ministère...l'arsenal des textes
de loi récents régissant (la sécurité sociale,
l'assurance...) et leurs degrés de mise en oeuvre,... existe-t-il des
partenaires techniques possibles parmi les compagnies d'assurance internes ou
externes au pays, quelle population est déjà couverte et comment,
le cas échéant ; y a-t-il eu des expériences
antérieures en micro-assurance santé ou autre mécanisme
de
couverture du risque maladie ? »(Duffau et al,
2008). Nécessité est d'approfondir certaines questions
après cette analyse sommaire de l'environnement qu'on cherche à
accéder. Ces questions ont un caractère déterminant pour
le futur de la MAS s'il elle sera mise en place à savoir : Est-ce qu'il
existe un besoin réel de couverture en santé des ménages
et des familles ? Qu'en est-il de l'existence des conditions minimales
permettant le lancement et le développement ultérieur d'un
programme d'assurance telles que ( les fournisseurs de soins offrant des
services de qualité contrôlable, le cadre légal , le
degré d'alignement avec la politique nationale de santé , les
soutiens des institutions à l'échelle locale et nationale),
Est-ce qu'il y a d'autres intervenants déjà présents sur
les zones envisagées proposant des services similaires ou connexes pour
prévenir une concurrence éventuelle et pourquoi pas profiter de
leur connaissance et de leur expérience dans le milieu ?
« La faisabilité part des conclusions de
l'identification, elle en approfondit les hypothèses afin de
définir les modalités de mise en oeuvre du projet (options
institutionnelles, phasage du projet, choix d'une méthodologie,
dimensionnement humain et financier). Elle doit également veiller
à la cohérence du projet au regard du contexte (cohérence
externe) et de sa logique d'intervention (cohérence interne)»
(Duffau et al, 2008). Ainsi quels outils à prendre en compte pour
achever la phase de la faisabilité et par la suite la conception de la
MAS ?
b/ Préparation de la faisabilité: outils
à prendre en compte:
Comme expliqué plus haut, l'approfondissement
de l'analyse peut commencer en se basant sur le plan de travail
préparé issu de l'identification. Les détails de la
démarche à suivre ou des points à approfondir n'est pas
l'objet de ce travail, d'autant plus qu'on ne va rien ajouter à la
littérature qui s'élargit constamment en essayant de normaliser
ces projets «pilotes» le plus possible. Se référant de
notre côté à une tentative de standardisation (projet SKY),
sans perdre de vue naturellement l'adaptation en fonction de l'état des
lieux et des contextes propres à chaque pays, les lignes qui suivent
vont mettre en lumière les points essentiels à traiter au cours
de la faisabilité. D'une manière relativement
séquentielle, les trois questions clés traitées lors de
l'identification seront approfondies en profitant parfois des occasions pour
traiter plusieurs points se rattachant à plus d'une question
simultanément. Ainsi il convient de traiter minutieusement:
«- L'offre de soins : analyse des structures de
santé et du niveau de qualité des soins [...] analyser le
dispositif sanitaire et l'offre de soins, sa disponibilité et sa
qualité. Autrement enquêter sur la couverture géographique
du dispositif existant, la qualité perçue par les familles,
les
infrastructures de soins, la qualité de
l'accueil, l'évaluation de la qualité réelle et analyse
objective des pratiques de santé, quels types de structures vont
être enquêtées ? Définir un niveau de qualité
minimum de l'offre de soins, analyse de la tarification des services offerts,
évaluer et définir le champ de l'enquête pour planifier les
ressources techniques, humaines et financières à mettre en
oeuvre, comment gérer les difficultés rencontrées surtout
celles ayant trait au manque de fiabilité des chiffres et données
des structures de soins ? Faut-il se fier à l'avis personnel ? Comment
interpréter les données recueillies ?
- Les politiques de santé et
l'intérêt des autorités sanitaires (relevant des
différents ministères- santé, travail, finances...) pour
la micro-assurance de santé. Si des programmes de protection en
santé étaient repérés pendant l'identification, il
faut approfondir leur compréhension (population cible, services
couverts, système de paiement, mode de contractualisation avec les
institutions sanitaires, etc). Dans le cas d'absence de ces programmes de
protection sociale et de méconnaissance du concept d'assurance, il faut
assurer une compréhension minimale des principes d'assurance, une
identification de complémentarité entre les systèmes et
que les autorités nationales et locales en charge de la tutelle du
projet adhérent à la démarche de l'opérateur et lui
apportent soutien dans la durée.
- L'existence d'un besoin et d'une demande :
enquêtes socio-économiques et sur les comportements des familles
face aux soins (recours aux soins, capacité contributive et
«tolérabilité» de la prime c'est-à-dire le
montant que les familles sont effectivement prêtes à payer pour
l'assurance)» (Duffau et al, 2008). Les moyens minimums
nécessaires, la logistique et le coût estimé vont
dépendre majoritairement de la taille de la zone couverte par le projet
de MAS. En fonction des contraintes précisées par les phases
d'identification et de faisabilité, plusieurs choix
méthodologiques sur le futur du projet restent à diagnostiquer.
Ces choix feront l'objet de la transition à la conception.
c/ Choix méthodologiques pour une conception de la
MAS :
Le futur du projet est conditionné par son
environnement présent. Les orientations éventuelles à
analyser sont entre autres guidées par le capital d'expériences
et de savoir-faire de l'opérateur chargé du dispositif du
programme de MAS, ainsi que de son professionnalisme à lire et
récapituler la réalité du contexte. Pour montrer le lien
entre les deux précédentes étapes et les choix
stratégiques à décider et par lesquels la conception du
projet d'assurance va débuter effectivement et vont l'influencer
constamment, deux exemples sont donnés :
- Les choix de la contractualisation avec les
fournisseurs de soins (même si c'est de la médecine
«traditionnelle») ainsi que de la base de tarification des services
offerts seront faits à la lumière des conclusions sur l'offre de
soins.
- La compréhension des habitudes ou
des traditions de santé des ménages vont renseigner sur
l'accessibilité géographique et donc intégrer ou non les
frais de transports par exemple dans les frais couverts par l'assurance pour
attirer la population cible.
Les choix peuvent concerner aussi «le mode de
paiement des primes, le type de gouvernance du dispositif d'assurance
santé, la stratégie de lancement, les actions d'accompagnement,
etc [...] les programmes d'assurance oscillent toujours autour du
délicat équilibre à trouver entre l'étendue et la
qualité des services offerts et le prix de la prime qui doit rester
accessible au plus grand nombre»(Duffau et al, 2008). Ces dispositifs de
MAS souvent montés sous couvert des programmes de développement,
sous forme d'une aide bilatérale ou multilatérale. Mais sont-ils
une mode ou des solutions «prêt-à-porter» tentant
vainement de semer les graines de la participation à la vie sociale et
à faire comprendre les autorités gouvernementales qu'elles ne
peuvent ni décider le sort des citoyens ni prétendre
connaître ce qui est le mieux ou non pour leur vie quotidienne ? Une
lecture des modèles de MAS sera proposée dans la section
suivante.
2. Grille de lecture des modèles de
micro-assurance de santé :
En se basant sur une large littérature des
expériences de MAS dans plusieurs pays surtout : Ghana, Chine, Inde,
Sénégal, Mexique, Philippines, Tanzanie, Chili, République
de Corée, Jordanie, Uganda, Guatemala, Burkina-Faso...Et «sur trois
études de cas concernant : le Mali [l'étude porte sur les
mutuelles de santé, une analyse plus précise de la mutuelle
Kènèya So créée par l'institution de microfinance
Nyéta Musow. L'expérience est positive mais demeure
limitée]. L'Afrique du sud [cette deuxième étude porte sur
la contribution d'entreprises commerciales privées «PROPARCO»
aux objectifs de la micro-assurance de santé. Le contexte sud-africain
se caractérise par un marché de l'assurance maladie saturé
et un système de soins dual, l'un pour les couches favorisées et
l'autre pour les personnes démunies. Les opérateurs privés
d'assurance ont bâti leur activité pour une clientèle
disposant de revenus satisfaisants et ils ont du mal à l'adapter
à une clientèle à plus faible revenu. Une raison est
liée à la tendance du secteur privé de l'assurance
à privilégier la surenchère technologique et les
activités financières, ce qui augmente les coûts de
transaction et interdit la baisse des tarifs des primes]. Et le Bangladesh
[étude de trois organisations non gouvernementales(ONG) : Bangladeshi
Rural Advancement
Committee(BRAC), Grameen Kalyan(GK) et Dushta Shasthya
Kendra(DSK). Elles animent des programmes de développement pour les
populations pauvres, en milieu rural pour BRAC et GK, et en milieu urbain pour
DSK. Ces programmes possèdent un volet santé important
complété par des produits de micro-assurance maladie. Les ONG ont
réussi à créer des relations fortes avec les populations
ciblées. Ensuite, elles réalisent toutes un effort important en
faveur des catégories vulnérables : les femmes et les personnes
très pauvres. Cette étude montre que, même si certaines
grandes organisations travaillent en direction des communautés
démunies, elles possèdent des stratégies entrepreneuriales
précises qui ne s'accordent pas complètement avec une gestion
participative des activités de terrain» (Letourmy et al, 2005). On
va dans ce qui suit analyser les facteurs favorables à la
sensibilisation des populations, puis faire la différence entre une
mutuelle et MAS, et enfin résumer les caractéristiques et
l'originalité des MAS.
a/ Facteurs favorables à la sensibilisation :
On a jugé utile de mettre en lumière la
notion de vulnérabilité. «La vulnérabilité est
définie par le degré de capacité des individus et des
ménages à faire face au risque, elle dépend de
l'exposition aux chocs, de l'ampleur du choc et de la résilience
c'est-à-dire de la capacité à gérer les
chocs»(Lepine et Petitpierre, 2006). L'assurance permet de gérer le
risque, elle ne permet pas de réduire facilement les risques liés
aux évènements cycliques à fort degré de certitude
et faible coût, ni aussi les risques covariants à faible
probabilité mais à coûts très élevés
tels que les catastrophes naturelles. Les coûts des soins, le risque
maladie, la probabilité de ce risque et avec quelle fréquence
sont autant de facteurs qui façonnent le dispositif de MAS. Mais quels
sont les autres facteurs qui favorisent la pénétration de la MAS
c'est-à-dire le fait de convaincre les populations cibles
d'adhérer ? Ces facteurs sont les suivants:
· Les personnes couvertes:
«La MAS cible effectivement les exclus de la
protection sociale, plutôt que les populations pauvres. Dans la plupart
des régimes d'adhésion volontaire, la capacité
financière effective de la population joue un rôle
déterminant : ce sont les plus solvables des exclus qui
adhèrent» (Letourmy et al, 2005). «La micro-assurance de
santé ne s'adresse pas tant aux pauvres qu'aux exclus, qui sont ceux qui
souffrent d'une participation et d'un accès inapproprié à
la vie sociale»(Dror et al, 1999). Certains exemples prouvent ce constat :
les régimes d'assurance UMASIDA en Tanzanie, SEWA (un syndicat
créé en 1972 pour les femmes du secteur informel)
en Inde s'adressent à des travailleurs ou
travailleuses du secteur informel, organisés en coopératives ou
syndicats. L'Association Por Salud de Barillas au Guatemala s'adresse aux
habitants de la commune de Barillas ; une région rurale isolée
constituée principalement de planteurs de café et de travailleurs
du secteur informel. Encore les populations assurées au Zimbabwe par les
régimes d'assurance à faible coût des gestionnaires
d'assurances de santé privées appartiennent à la fois aux
secteurs formel - des salariés ou des fonctionnaires dont les revenus ne
leur permettent pas d'adhérer à un régime d'assurance
classique - et informel de l'économie. On ne va pas s'intéresser
au fait que le secteur informel est le secteur qui échappe à la
légalité, et que ce secteur «informel» n'a rien
d'informel du moment où il influe fortement la sphère
économique. «L'ensemble des populations concernées peuvent
être considérées comme «pauvres», dans la mesure
où elles n'ont pas accès à certains biens et services en
raison de ressources matérielles inégales»(Dror et al,
1999). L'accessibilité financière à des soins de
qualité est entravée au même titre pour le planteur de
café guatémaltèque et l'habitant de la commune de
Barillas. «Si les dispositifs de micro-assurance ne ciblent pas tous les
pauvres, c'est parce que l'assurance suppose une capacité contributive.
Les personnes sans ressources rencontrent a priori des difficultés
à s'acquitter de leurs cotisations [...] Faut-il s'interroger sur la
capacité contributive des exclus «récupérables»
par la MAS ainsi que sur la façon dont la MAS traite les indigents ou
les «ultra-pauvres». Au sein des exclus sociaux, ce sont ceux qui
disposent le plus de ressources qui adhèrent
préférentiellement aux organismes de micro-assurance ou aux
mutuelles...Quant aux vrais indigents, ils ne profitent pas du système,
sauf dans les situations de forte cohésion sociale qui ne s'observent
que sur des territoires circonscrits (mutuelles rurales du Bénin) ou
bien s'il existe une volonté délibérée de leur
donner accès aux soins ou de les associer aux régimes , en payant
pour eux ( au Bangladesh)»(Letourmy et al, 2005). Exclus sociaux ou
«indigence chronique ne posent pas problème du moment où un
surplus de ressources existe et qu'une volonté de partage de ce surplus
pour élargir la sphère d'accessibilité est admise et
acceptée. Ce sont les deux principaux principes de la CMU.
· Le panier de soins offerts :
Si on va se limiter aux seules cotisations, «les
garanties offertes sont généralement modestes, car elles
dépendent des ressources des populations. La couverture des petits
risques occupe ainsi une place privilégiée. Cette tendance
s'expliquerait par divers facteurs : la rareté des hôpitaux, la
difficulté à négocier avec eux, les
préférences des populations elles-mêmes » (Letourmy et
al, 2005). Partant du fait que l'efficience allocative et technique des
fournisseurs de soins, et les
besoins de santé, diffèrent d'une
région à une autre au sein d'un même pays, «plus la
population ciblée est pauvre, plus la couverture du petit risque prend
de l'importance parmi les garanties de la MAS» (Letourmy et al, 2005). Peu
d'exemples de couvertures de soins complètes ou quasicomplètes,
c'est-à-dire que l'assuré bénéficie d'un
accès à une gamme de soins. «Le régime de l'ORT
Community Multipurpose Cooperative de La Union aux Philippines offre par
exemple un panier important comprenant l'ensemble des soins primaires et
secondaires»(Letourmy et al, 2005). Ce n'est pas uniquement la faiblesse
des cotisations, mais aussi le choix des assurés ayant des besoins
«spécifiques» qui fait la prédominance de la couverture
du petit risque, si bien stir ils ont vraiment un mot à dire dans la
définition des prestations. «L'accès à ces services
de base dépasse déjà la capacité contributive
individuelle des ménages et la mutualisation du risque est
intéressante dès le niveau primaire»(Letourmy et al,
2005).
b/ Mutuelle et micro-assurance de santé :
La diversité et le nombre qui ne cesse
d'augmenter des «expériences» de MAS, témoignent d'une
certaine créativité, d'une popularité d'un dispositif
devenu déjà à la mode. Une certaine confusion entre MAS et
mutuelle existe. Y-a-t-il vraiment une différence de fond ou elle
réside juste au niveau de l'appellation ?
· Qu'est ce qu'on entend par Micro-assurance de
santé ?
Trouver une définition dans la
littérature n'est pas une affaire simple. Les pères du concept ;
appartenant au ILO à l'époque ; dans leur article publié
en 1999, conçoivent «la micro-assurance comme une entreprise
autonome, indépendante des opérateurs extérieurs ou de
lignes de crédit permanentes [...] Le mot micro fait
référence au niveau social de l'interaction. Il s'agit de
régimes plus petits que les régimes nationaux et le mot assurance
fait référence à l'instrument économique»
(Dror et al, 1999). Le nouveau concept «générique ou
basique» concerne «les régimes volontaires de groupes pour
l'auto-assistance en matière d'assurance maladie sociale...la motivation
des assurés est parfois contraste avec les sentiments altruistes des
personnes adhérant à une société amicale»
(Dror et al, 1999). En se référant à plus de
détails du même article et aux conclusions
développées par (Letourmy et al, 2005) pour cerner le concept, la
MAS vient en complément aux stratégies des sociétés
d'assurance, puisque par ce dispositif, les assureurs
auront la possibilité d'offrir un service
adapté à une clientèle qui mène des conditions de
travail et de vie particulières. Encore, il est tout à fait
naturel de faire appel aux techniques de l'assurance pour traiter : la
sélection adverse, le risque moral, l'asymétrie d'information, la
mutualisation des risques, le passager clandestin, l'escalade des coûts
et la sous-assurance. L'adhésion des exclus sociaux n'est pas uniquement
pour un motif économique, mais aussi dans le cadre d'une dynamique
communautaire et une responsabilité collective pour décider
librement et de manière autonome. Ce choix porte principalement sur les
prestations et les risques couverts pour le groupe des assurés. Le choix
des risques couverts gros ou petits, distingue la MAS de l'assurance à
but lucratif (caractérisée par la distribution des dividendes et
la vente des actifs lors de la liquidation), et aussi de l'assurance sociale.
Selon le document de la plate-forme d'Abidjan(1998) auquel Dror et Jacquier ont
fait référence, « la nature démocratique, volontaire,
autonome, participative, communautaire et désintéressée de
la micro-assurance a été reconnue» (Dror et al, 1999). Ce
sont les mêmes principes des mutuelles de santé, où
réside donc la différence ?
· La mutuelle de santé:
«Une mutuelle est un groupe de personnes qui
s'organisent pour faire face, au moyen de leurs seules cotisations, aux
conséquences d'un risque social qui les menace ainsi que leurs familles.
C'est une notion qui ne s'applique pas uniquement à un organisme visant
la protection contre la maladie. Les mutuelles se définissent comme des
sociétés de personnes, par opposition aux sociétés
de capitaux. Elles sont censées tirer leur identité du respect de
cinq grands principes : la non-lucrativité ; la solidarité ; le
volontariat ; la démocratie ; l'indépendance» (Letourmy et
al, 2005). Les mutuelles répandues surtout en Afrique de l'Ouest
francophone, sous l'effet d'opérateurs d'appui français. Elles
«constituent apparemment une forme de micro-assurance [...] En pratique,
trois éléments caractérisent les mutuelles de santé
:
- Les adhérents bénéficient
d'un mode d'accès privilégié aux soins, un régime
d'assurance maladie volontaire. C'est parfois une offre de soins
«maison», exemple d'un centre de soins ;
- La gouvernance des mutuelles est
exercée par les cotisants via un système de représentation
;
- Les mutuelles sont destinées
à constituer des unions et des fédérations. Elles
s'inscrivent donc dans un mouvement social qui représente à la
fois un mode de développement technique et une représentation
politique» (Letourmy et al, 2005). Après avoir
présenté les quelques aspects typiques aux mutuelles et MAS, on
va essayer de dégager la vraie différence. Toujours en se
référant aux travaux de Letourmy père et fille(2005), les
différences ont trait aux points suivants :
Source: Letourmy et al, 2005
![](Experiences-de-Micro-assurance-de-Sante-et-d-AMO-qu-en-est-il-d-une-transition-vers-la-Couverture5.png)
· Pour relier les entités de base, les
mutuelles sont censées constituer des unions ou des
fédérations.
· L'approche mutualiste se veut explicitement
sociale et politique c'est-à-dire atteindre une capacité
d'influence sur la politique nationale de santé ou de protection sociale
dans le pays. Exemple de l'UTM au Mali.
· Les mutuelles ne ciblent pas de
catégories particulières. Certaines mutuelles couvrent des
catégories de population plus aisées et à effectif
important. Naturellement, les garanties qu'elles offrent sont hors de
portée de populations à faible revenu. Certaines mutuelles ne
relèvent pas de la MAS. Exemple des fonctionnaires se regroupant en
mutuelles en Afrique de l'Ouest, en absence de régimes
obligatoires.
Tableau 1 : Comparaison conceptuelle entre mutuelle et
MAS
Mutuelle de santé Organismes de micro-assurance de
santé
· La volonté de départ est de
regrouper des personnes pour faire face aux conséquences d'un risque de
mauvaise santé. D'autant plus que ce n'est pas systématique que
le régime d'assurance d'une mutuelle soit volontaire.
· Une approche globale de la couverture des risques
liés à la santé, à titre d'exemple
et à priori aucune condition à
respecter pour organiser des actions de prévention dès lors que
les adhérents le souhaitent et y mettent les moyens.
· L'objectif prioritaire de monter un dispositif
d'assurance viable financièrement.
· Une approche plus restrictive, faisant
référence aux besoins sociaux des adhérents. Si des
actions de prévention seront programmées, elles doivent passer
par une sélection allant de pair avec l'efficience de l'activité
entière. Ces actions devraient être mises en balance avec une
spécification alternative des garanties : une exclusion de certains
risques de santés liés à des problèmes de
santé particuliers.
· Les organismes de MAS peuvent fonctionner en
réseaux.
· La question d'influence sur la politique
nationale de santé ou de protection sociale n'est pas explicite. Les
fonctions techniques qui ne peuvent être assurées par des
entités de base telles que (la sécurité financière,
la gestion, utilisation d'un médecin conseil) sont assurées par
des formules diverses. Exemple : la mise en place d'une réassurance
selon une formule sans but lucratif dans le cadre du Social Re de l'ILO aux
Philippines.
· La MAS s'adresse aux catégories
«exclues» (Dror et Jacquier), en fait à une population du
monde rural et du secteur informel. Implicitement, les entités de base
ne vont pas regrouper des effectifs importants sauf exception.
A vrai dire, et puisque certains caractérisent
le MAS : «la simplicité, l'accessibilité financière,
la proximité et l'autogestion» (Letourmy et al, 2005). Mais
certaines formes de micro-assurance font exception à ces principes.
Certaines mutuelles relèvent de la MAS. Sur le terrain, certaines
différences disparaissent et parce que sur le plan technique mutuelles
et MAS utilisent exactement les mêmes outils, la seule différence
qui peut surgir est purement idéologique. Les deux notions ne
résument tous les dispositifs à base communautaire. Les lignes
qui suivent vont résumer les points qui caractérisent toutes les
expériences, et les différents modèles existants sur le
terrain.
c/ Caractéristiques et originalité de la MAS
:
Malgré le nombre important des
expériences éparpillées dans le monde, la MAS est à
notre sens une invention économique inspiré de la microfinance et
ces différents dispositifs montés présentent certains
points communs se rattachant aux finalités, aux modes de financement et
aux mécanismes utilisés. Sur quels critères certains
auteurs se sont basés pour classer ses dispositifs et quelle est la
grille de lecture proposée par Letourmy père et fille
?
c1. Caractéristiques communes aux
expériences de MAS :
· Concernant les finalités
recherchées a priori les expériences montées ont pu
:
- Collecter des ressources privées des
ménages destinées à gérer le risque de maladie, et
leur permettre de se prévenir contre les dépenses de soins
imprévues et catastrophiques. Par cette collecte, le dispositif
d'assurance permettra une mutualisation des risques et une meilleure
exploitation des capacités à payer des adhérents
démunies.
- Les individus qui ont contracté une
assurance maladie peuvent avoir accès à une offre de soins dont
la qualité minimale est garantie par des procédures de
contractualisation et implicitement d'accréditation. «L'utilisation
de l'offre de soins augmente en conséquence, comme cela a pu être
constaté à maintes reprises»(Criel et al, 1999).
- La nouveauté du concept d'assurance
pour les populations visées, fait de l'adhésion volontaire un
principe. L'idée de perte des cotisations en cas de non-survenue du
risque n'est pas facilement admise par la population. L'affiliation obligatoire
n'est pas facile à poser. Conséquence, l'affiliation peut
être remise en cause à tout moment et le nombre d'assurés
ne peut pas être aisément important. (Letourmy et al,
2005)
· La mutualisation des risques est un but et
un outil commun à toutes les expériences. «La mutualisation
des risques non liés entre eux permettent la division statistique entre
un grand nombre de cas» (Dror et al, 1999).
· Le financement à base communautaire est
fondé sur le principe du paiement de cotisations en échange de
prestations. Depuis l'institution des politiques de recouvrement des
coûts, la population doit participer aux frais de santé par
l'intermédiaire de l'assurance de santé. (Letourmy et al,
2005)
c2. Typologie des organismes de MAS et grille de
lecture :
Il n'y avait pas un consensus sur les classifications
«restrictives» des expériences décentralisées et
participatives d'assurance maladie, vue l'originalité de certaines
d'entre elles. On y trouve une distinction basée sur une approche
sociale d'Atim(1999), et une autre économique basée sur les
relations entre les différents agents entre eux et sur le mode
d'organisation (McCord, 2000). Les exemples respectifs à chaque
modèle sont fournis par (Letourmy et al, 2005), excepté le
modèle MIA (Massat, 2008).
· Atim(1999) a proposé une typologie des MAS
qu'on distingue en cinq catégories, basée sur les liens entre les
individus. On trouve :
- «Traditional Social
Solidarity Networks» (les assurances basées sur un
réseau traditionnel de solidarité sociale : la population cible
est un clan ou une ethnie. Exemple : la Mutuelle Famille Babouantou de
Yaoundé au Cameroun ;
- «Inclusive Mutual Health
Association or Movement» (les associations d'aide mutuelle ou
mutuelles de santé) : la base du recrutement est plus large, parce
qu'elle est constitué par des communautés rurales ou urbaines
regroupées dans le cadre d'une entreprise, d'un syndicat ou d'une
association professionnelle. Les distinctions de type ethnique, clanique ou
autre ne sont pas prises en compte. Exemple : la mutuelle Umasida en Tanzanie
;
- «Simple or Low
Participation Model of Community Financing» (Assurance
à financement communautaire simple): ce type d'assurance correspond plus
à une initiative issue d'une structure de soins dans le cadre de la
politique de recouvrement des coûts, qu'une initiative communautaire.
Pour cette raison, l'appropriation du régime d'assurance par les
assurés est faible puisque leur participation à ce même
régime l'est aussi ;
- «Complex or High
Participation Community Financing Model» (l'assurance
à financement communautaire avec gestion participative : la
communauté est impliquée dans la gestion active
du régime d'assurance au moins en ce qui
concerne les soins primaires (centres de santé) en collaboration avec
l'offre de soins via des structures participatives. Exemple : l'assurance SEWA
est gérée en partie par ses membres pour le premier niveau de
soins ;
- «Medical Aid
Society» (les sociétés d'aide médicales)
:
Elles représentent la forme la plus
perfectionnée du mouvement social d'aide mutuelle. L'organisation de
tels régimes d'assurance se fait sur une grande échelle, surtout
en termes d'effectifs. La gestion est professionnelle et utilise des techniques
du secteur privé commercial. Exemple : les produits d'assurance maladie
du gestionnaire de Medical Schemes Medscheme en Afrique du Sud.
· Une deuxième typologie a
été proposée par McCord(2000), en distinguant quatre
modèles de MAS :
-
«Partner-Agent-Model»(le modèle
d'assurance basé sur un partenariat entre deux agents financiers) :
à titre d'exemple un partenariat entre un assureur et une institution de
microfinance, ou une ONG proche d'une communauté. Les deux agents
travaillent de façon à obtenir des avantages réciproques.
L'assureur («Partner») utilise le réseau de l'IMF pour
être en contact rapide et facile avec les clients de l'IMF et sur son
terrain. D'un autre côté, l'IMF («Agent») utilise les
services de l'assureur pour permettre un meilleur accès surtout
financier aux soins de santé à ses clients et ainsi les attirer
et réduire encore le risque de non remboursement des crédits
qu'elle a octroyés. Donc en pratique, «le Partner supporte tout le
risque, et par la même décide généralement du panier
de soins couvert et du montant de la prime d'assurance. L'Agent fait le lien
avec les assurés (marketing du produit, collecte de la prime, paiement
et règlement du contentieux). Reste à préciser que le
rôle de médiateur que l'Agent joue, entre l'assureur et la
population assurée peut générer des conflits
d'intérêt qui rendent sa position ambiguë. Car il doit
à la fois défendre les intérêts des assurés
(ses clients), et représenter l'assureur lorsqu'il s'agit de modifier le
panier de soins ou le montant de la prime et éventuellement de
régler des problèmes de fraude» (Massat, 2008). Exemple : en
Ouganda : le partenariat entre «Nsambya Hospital Healthcare Plan»
(NHHP : une entité semi-autonome de l'hôpital de Nsambya, qui
s'occupe de la partie assurance proposée par la structure de soins) et
l'institution de microfinance Finca qui fournit au NHHP son effectif de
clients.
- «Community-Based-Model»(le
modèle d'assurance de santé à base communautaire)
:
Dans ce cas, les assurés sont à la fois
propriétaires et gestionnaires du plan d'assurance santé. On va
encore saisir cette occasion pour présenter, à titre d'exemple
l'originalité d'un modèle développé par la MIA (New
Delhi en Inde), et qui se range dans la catégorie de
l'assurance
communautaire. On a incité encore à
présenter cette expérience vue sa logique qui va de pair avec
notre objet de CMU à développer surtout en Tunisie.
Ainsi, ces modèles sont à but
non-lucratif, volontaires (c'est-à-dire les assurés
élisent parmi eux un groupe de membres volontaires, responsables de
l'ensemble de la gestion du plan d'assurance), et répartissant le risque
selon un principe de solidarité. Ce groupe volontaire conçoit,
développe, met en place et négocie les contrats avec les
prestataires de soins. Il vend et gère les différents produits
d'assurance, d'où la nécessité d'un important
investissement pour la formation de l'équipe des gestionnaires
volontaires.
D'après un rapport de stage effectué par
Massat P. à la MIA en 2005, on a pu résumer les remarques et les
conclusions suivantes :
Dans ce type d'organisation, le manque d'expertise en
matière d'assurance est généralement compensé par
une cohésion très forte fondée sur les liens sociaux
préexistants dans la communauté (c'est souvent un village ou un
groupe de villages voisins qui décident de s'assurer), et par une
implication et une responsabilisation des membres très importante. Toute
la communauté est responsable de chaque étape de la
création et de la gestion de l'assurance, de la définition du
panier de soins couvert, jusqu'au remboursement des assurés.
Conséquences de cette proximité entre
l'assurance et les assurés sont : en premier lieu, la maximisation de
l'intérêt qu'ont les assurés à la bonne marche et
à la pérennité de l'organisation ; puisqu'ils sont
à la fois les seuls gestionnaires et les seuls
bénéficiaires. La communauté a une forte incitation
à faire en sorte que l'assurance se porte bien. La population
assurée partage les pertes comme les profits, ce qui accroit encore son
implication.
Enfin et de par son fonctionnement, les coûts
d'une assurance «mutuelle» ou communautaire sont
généralement plus faibles que dans un autre modèle,
puisqu'une partie de l'information essentielle circule de manière
informelle (tout le monde dans un village sait si une personne est vraiment
malade ou non, ou si quelqu'un n'a pas payé sa cotisation annuelle,
etc.). De plus, moins d'argent est perdu dans des comportements de fraude, de
hasard moral ou de sélection adverse.
En revanche, la taille souvent petite des mutuelles et
assurances communautaires est une limite importante à leur
soutenabilité, puisque les décaissements de l'assurance peuvent
fluctuer grandement d'une période sur l'autre (sur un petit
échantillon, la Loi de grands nombres et le Théorème
Central Limite ne s'appliquent pas, ce qui rend les dépenses largement
imprévisibles). De plus, la communauté assurée
étant généralement relativement pauvre, l'assurance ne
dispose pas de réserves suffisantes pour faire face à des
dépenses anormalement élevées. Le seul recourt
contre ces dépenses catastrophiques est le
partage du risque sur un pool plus large, soit par le pooling avec d'autres
mutuelles, soit, et c'est ce que recommande la MIA, par la réassurance
de la tranche supérieure des coûts.
Ce qui le rend la MIA particulière se
définit sur trois axes : l'Inclusion et le Community Rating,
l'affiliation « en bloc », et la réponse aux Besoins
spécifiques de la population.
Pour commencer, le modèle de la MIA part d'une
logique inclusive plutôt qu'exclusive. Conformément à la
logique première de solidarité, ce modèle vise en premier
lieu une amélioration des conditions de vie de la communauté
toute entière. L'exclusion des plus gros risques (les personnes
âgées et les gens très malades) n'allègerait pas le
poids qui pèse sur l'ensemble de la communauté lorsqu'il s'agit
de payer les soins, puisqu'au final la communauté, ou du moins certains
de ses membres, devront payer de leur propre poche. L'objectif de la MIA est
donc de trouver une solution assurantielle permettant à toute la
communauté de se prémunir contre les dépenses de
santé élevées, voire catastrophiques, ce qui passe
nécessairement par une inclusion de tous ses membres.
En suivant toujours cette logique communautaire, la
MIA privilégie le Community Rating (une prime d'assurance unique pour
l'ensemble de la communauté) à une prime d'assurance basée
sur le risque individuel.
Ensuite, la MIA insiste pour que la décision
d'adhérer, c'est-à-dire de créer l'assurance, soit prise
par l'ensemble de la communauté. Il faut que ce soit une décision
collective, dument réfléchie, et prise de façon (plus ou
moins) démocratique. L'intérêt est double. D'une part, on
ne risque pas de voir certains membres, hostiles au projet, tenter de saborder
l'assurance en fraudant sciemment, par exemple. On ne s'assure que si tout le
monde est d'accord et prêt à faire des efforts pour rendre
l'assurance soutenable. D'autre part, on maximise la taille du pool puisque
100% de la communauté est assurée, ce qui permet une meilleure
répartition du risque. En outre, cela suit la même logique
communautaire dont il était question plus haut.
Enfin, et c'est un des points forts de ce
modèle, on cherche des solutions aux besoins spécifiques de la
population qui veut s'assurer. Au lieu de proposer un panier de soins couverts
standard, le choix est laissé aux futurs assurés de
déterminer ce qu'ils veulent assurer et à quel prix. Pour cela,
un outil a été mis au point qui permet à la
communauté de décider facilement et en connaissance de cause,
même pour les membres analphabètes. Il s'agit du CHAT (Choosing
Health plan All Together). Cet outil permet de trouver une solution à la
fois satisfaisante pour les assurés en termes de couverture,
réaliste du point de vue de l'assurance puisque ce qui a
été choisi l'a été en fonction de l'offre de soins
locale, et viable parce que la communauté ne choisit une
police
d'assurance que si elle peut (a priori...) se l'offrir.
Concernant les principes de base de la MIA on peut voir son site internet (MIA,
2010).
-«Full Service
Model» (le modèle d'assurance) :
Dans ce cas, une entité unique et
indépendante prend en charge l'ensemble des éléments
relatifs à la mise en oeuvre et à la gestion d'un produit
d'assurance maladie, depuis la conception du produit à la gestion de la
garantie en passant par la recherche de clients. L'équipe gestionnaire
est constituée par des professionnels. L'assurance assume seule les
risques du produit, sans qu'elle ne reçoive aucun
bénéfice. C'est ce point qui la distingue des assurances
privées classiques. Des réserves doivent être
constituées pour minimiser naturellement les risques
santé.
- «Provider
Model» (le modèle d'assurance de santé
intégrée à l'offre de soins) :
Le fournisseur de soins propose lui-même un
produit d'assurance à ses patients, collectivement ou de manière
individuelle. Le plan d'assurance propose un panier de prestations
correspondant aux soins disponible dans la structure de soins. Le prestataire
qui est lui-même assureur assume donc les risques du produit, et les
garanties proposées reposent souvent sur un système par
capitation. Exemple : le Nkoranza Community Health Insurance Scheme ; une
assurance maladie lancée par la direction de l'hôpital catholique
de Nkoranza au début des années 1990, couvrant les soins
dispensés dans l'établissement.
Les réalités du terrain, du contexte
local changeant, des caractéristiques techniques assurantielles, du
niveau de professionnalisation des équipes chargées de
gérer les régimes d'assurance, la présence des
caractéristiques d'une assurance privée classique à but
lucratif et enfin le développement parallèle d'activités
de microcrédit pour renforcer la capacité à payer des
cotisations des bénéficiaires, ont rendu les classifications des
expériences de MAS difficiles. Certaines assurances communautaires ne
sont même pas fidèles au mouvement social d'aide mutuelle, vu le
but lucratif recherché. Afin de contourner cette typologie restrictive,
une grille de lecture des expériences a été
proposée par (Letourmy et al, 2005).
· Grille de lecture des dispositifs
montés de MAS :
La grille comprend deux volets. Un volet technique se
basant sur trois dimensions essentielles pour caractériser le
régime d'assurance en question. Un second volet renvoyant aux objectifs
ayant motivé le lancement des expériences.
- Le volet technique
:
Ce volet est constitué par les principales
variables dans les différentes expériences
décentralisées et participatives d'assurance maladie à
savoir : la population visée par le régime d'assurance ;
les garanties proposées ; et les modalités d'organisation de
l'organisme assureur. On va se concentrer
sur la variable mode d'organisation, qui regroupe
à son tour trois éléments : le statut juridique, le mode
de gouvernance et l'association à une autre activité.
En ce qui concerne le statut juridique, les organismes
proposant des services de MAS sont de nature privée et, très
souvent à but non lucratif. Exception pour certains d'entre eux qui ont
pu sous-traiter une partie des opérations liées à leur
activité à des sociétés commerciales
privées. Le modèle de mutuelle ne débouche pas
forcément sur de la micro-assurance, et les Medical Schemes
sud-africains sont un exemple parmi d'autres.
Ensuite et pour le mode de gouvernance, l'association
de représentants des communautés à la gestion et à
la prise de décision constitue une des caractéristiques de la
micro-assurance, compte tenu de la vocation sociale de ces organismes. La
participation des représentants a été codifiée par
les mutuelles. On ne voit pas vraiment une décision appartenant aux
représentants des communautés, si l'activité d'assurance
est greffée sur d'autres activités gérées par une
organisation professionnelle. Si une ONG propose à des villageois de
mettre en place une assurance maladie, c'est cette ONG qui prend les
décisions.
Enfin l'association à une autre
activité, on retiendra globalement deux formes générales
d'association de l'assurance santé à une autre activité :
soit une articulation entre deux activités, proche du concept de
Partner-Agent développé par McCord, soit une intégration
entre deux activités.
- Les objectifs des
projets:
Les objectifs potentiels et leur
hiérarchisation diffèrent selon les partenaires au
développement bailleurs de fonds, les projets montés et
l'institution chargée de gérer l'assurance maladie. Cinq
catégories d'objectifs peuvent être distinguées
:
1- Les plus apportés au fonctionnement du
secteur des soins de santé : L'assurance maladie est censée
améliorer l'accessibilité financière aux soins
coûteux et par la même occasion fournir des ressources stables aux
formations de santé (centres de santé et hôpitaux).
Généralement en rassemblant des effectifs importants, les
régimes obligatoires, les mutuelles ou les réseaux de
micro-assurance peuvent avoir des exigences sur la qualité des
prestations et l'efficience technique ou même allocative, et ils ont les
moyens de les faire valoir.
2- La contribution à étendre la
protection sociale : les MAS étaient une réponse à
l'absence d'assurance maladie ou de régimes de sécurité
sociale en faveur de populations particulières. C'est la population
évoluant dans le secteur de l'économie informelle qui est
visée prioritairement. Les prestations doivent répondre d'abord
aux besoins différenciés des divers groupes sociaux, et donc
s'inscrire dans un système assez décentralisé de
protection sociale.
L'engagement de l'ILO en faveur de la micro-assurance
marque une évolution remarquable en matière d'extension de la
protection sociale. Le programme STEP mis en place à la fin des
années 1990, constitue l'outil pratique d'appui à cette nouvelle
forme d'extension de la protection sociale. La coopération
française a fait un constat analogue et a défendu le concept de
mutuelle pour assurer l'extension de la protection sociale dans le secteur
informel (Foirry et al, 2000).
3- La participation à la lutte contre la
pauvreté : Par le passage d'une démarche de secours a posteriori
aux groupes tombés dans la pauvreté à une approche de
prévention et de gestion du risque des dépenses de santé
en faveur des populations vulnérables. Ces groupes pourront prendre en
charge leurs besoins en soins de santé.
4- La promotion de la démocratie : En termes
politiques, la gestion participative et décentralisée est
considérée comme un élément de promotion de la
démocratie. Les relations entre l'Etat et la société
civile doivent se modifier et les pouvoirs publics doivent exercer un
rôle d'animateur ou de régulateur (stewardship) auquel ils doivent
se préparer.
5- L'extension du marché de l'assurance dans
les pays en développement : Cette attente à l'égard de la
micro-assurance a été exprimée par le CGAP et
mérite l'attention, malgré que la MAS ne fournit pas
généralement de produits d'assurance très rentables, ni de
disponibilités pour l'investissement.
Après avoir présenté et fait le
tour des expériences de MAS dans le mode dans une tentative de tirer
l'essentiel qui pourrait aller de pair avec l'objectif de la CMU, le temps est
venu de tirer les leçons des expériences d'AMO mûres
puisqu'elles ont transité vers ce même objectif. On va voir quels
sont les facteurs qui ont permis la transition dans une optique d'associer
après ce qu'on a jugé nécessaire lors de notre discussion
de la CMU et plus précisément pour le cas de la
Tunisie.
III. Leçons des expériences mûres
de transition d'Assurance Maladie Obligatoire vers la CMU :
On ne va pas apporter un plus en disant que l'AMO est
une des principales méthodes de financement des systèmes de
santé, si ce n'est la plus importante, puisque plusieurs pays ont
établi le principe de la couverture universelle par cette méthode
(Carrin et al, 2004). Plusieurs pays à faible ou moyen revenus sont en
train d'étendre la couverture de leur assurance maladie existante, pour
couvrir éventuellement la totalité de leur population. En 2005
l'OMS par son assemblée mondiale (WHA : World Health Assembly) a
explicitement incité les pays membres à oeuvrer et planifier pour
atteindre la CMU en tenant compte bien sûr des
réalités
macroéconomiques, politiques et
socioculturelles dans chaque pays (WHA, 2005). Le secrétariat de ce
même WHA a adopté la définition suivante de la couverture
universelle : « access to key promotive, preventive, curative and
rehabilitative health interventions for all at an affordable cost » (WHA,
2005). Le rapport sur la santé dans le monde de 2008 a aussi
définit la couverture universelle comme « universal access to the
full range of personal and non-personal health services they need, with social
health protection » (WHO, 2008). De son côté, Nitayarumphong
a avancé la définition suivante : «universal coverage as
«a situation where the whole population of a country has access to good
quality services according to needs and preferences, regardless of income
level, social status, or residency »(Nitayarumphong, 1998). Enfin de son
côté la commission des determinants sociaux de la santé
«added the requirement that people are empowered to use these
services» (Commission on Social Determinants of Health, 2008). Ces
définitions diffèrent sur la portée et l'étendue
des prestations ou services de soins couverts, mais s'accordent sur la
complète population couverte en termes d'effectifs. La différence
a été qualifiée par «the relative concept of
universal coverage with respect to health care services» (Kutzin, 2000).
Ainsi, «In each of these definitions, universal coverage evokes equity in
access, through financial risk protection and implicitly associated with equity
in financing» (Criel et al, 2010). Le concept de couverture maladie
universelle n'est pas à confondre «with more restrictive but
incrementally used terms as universal insurance coverage (and/or `basic
universalism' in Latin America)» (Criel et al, 2010). La CMU reste un
objectif, et donc les manières et les degrés d'atteinte
diffèrent d'un pays à l'autre. Dans ce qui suit, on va
présenter les facteurs permettant d'accélérer la
transition vers cet objectif - en se basant bien stir sur des
expériences - puis les caractéristiques d'un régime de
santé performant.
1. Les facteurs accélérant la transition
vers la CMU via l'AMO :
«La couverture universelle comprend deux volets :
la couverture médicale (soins médicaux
adéquats) et la couverture de la population
(soins médicaux pour tous)»(Carrin et al,
2004). L'importante mise en commun des risques individuels de santé
ayant des probabilités de réalisation différentes, va
permettre à la population assurée de moins supporter les
conséquences financières de son risque et donc favoriser son
accès aux soins de santé nécessaires puisque ses individus
se partagent le financement de ces cotits de soins. Classiquement, il existe
deux options principales de financement du système de santé pour
arriver à la CMU.
1-«Les impôts sont la source principale de
financement des services de santé. Ces services de santé sont
habituellement rendus par un réseau de contractants publics et
privés, souvent nommé Service National de la
Santé.
2- L'AMO, qui en principe, implique une
adhésion obligatoire de toute la population. Salariés,
travailleurs indépendants, entreprises et gouvernement paient une
contribution à une caisse d'assurance maladie obligatoire. Le
gouvernement peut apporter une aide à ceux qui, autrement, ne pourraient
payer, tels que les sans emploi ou les salariés à bas salaires du
secteur informel» (Carrin et al, 2004). Les fonctions d'affiliation, de
recouvrement des cotisations, de contractualisation et de remboursement des
prestataires de soins ...etc, peuvent être exécutées par
des établissements publics ou des institutions non gouvernementales
connues sous le nom de caisse maladie. Les prestataires de soins publics ou
privés sont accrédités et forment le réseau de
l'AMO.
3- Certains pays utilisent une combinaison des deux
principales options, et on trouve des systèmes mixtes de financement de
la santé, puisqu'une partie de la population est couverte par le
financement de l'impôt et une autre partie de cette même population
est couverte par l'assurance maladie obligatoire.
Des services de santé supplémentaires
(non couverts par les forfaits de prestations de base financés par les
trois systèmes décrits), peuvent être offerts par
l'assurance maladie privée jouant un rôle complémentaire
(Sekhri et al, 2003). Ces options de base ou mixtes, sont utiles pour
définir une méthode motivant un système de financement de
santé à s'orienter vers une couverture universelle. (Carrin et,
2004).
a/ Les facteurs généraux pour arriver
à une CMU : aperçu général :
En se référant au papier de Carrin et
James (OMS, 2004) portant sur les expériences de transition dans
certains pays (Allemagne, Autriche, Belgique, Luxembourg, Costa Rica,
Japon, République de Corée) vers la CMU par l'AMO. La
période de transition était définie comme le nombre
d'années écoulées entre le vote de la première loi
sur l'assurance maladie et la dernière loi pour la mise en oeuvre de la
couverture universelle. A titre d'exemples, ces périodes étaient
:
Tableau 2 : Résumé de la période de
transition de quelques régimes nationaux d'AMO
![](Experiences-de-Micro-assurance-de-Sante-et-d-AMO-qu-en-est-il-d-une-transition-vers-la-Couverture6.png)
Pays Allemagne Autriche Belgique Japon1 Costa
Rica1 ROK
Période de transition
1854-1988
(127années)
1888-1967 (79années)
1851-1969 (118années)
1922-1958 (36années)
1941-1961 (20années)
1963-1989 (26années)
1 Il faut noter que dans
le cas du Costa Rica, la couverture universelle n'a pas été
atteinte suite à la loi de 1961. Au Japon, la couverture universelle par
une assurance maladie obligatoire a été atteinte en
1961.
Source : Carrin et James (OMS, 2004).
De manière générale certains
facteurs peuvent accélérer le processus vers une couverture
universelle à travers l'AMO.
1- le niveau de revenu disponible dans le
pays : que se soit du côté des entreprises ou des citoyens
capables de payer les cotisations d'avance au régime AMO, ou bien
l'augmentation des recettes fiscales de l'Etat par l'augmentation des revenus.
La capacité de payer les cotisations en avance sera plus grande dans une
situation de forte croissance économique (Ensor, 1999).
2- la structure de l'économie
c'est-à-dire la taille du secteur formel et celle du
secteur informel. Plusieurs pays en voie de développement ont
d'importants secteurs agricoles, manufacturiers et de service, avec une partie
importante de l'emploi étant informel. Faute de déclaration des
salaires ou revenus, de sérieuses difficultés administratives
empêchent le prélèvement de l'impôt sur le revenu et
la collecte des cotisations. Ce qui mettra en cause l'application de la
protection maladie au secteur informel de la population, surtout lorsque le
système AMO repose de façon significative sur les contributions
des ménages.
3- la répartition de la
population qui va être couverte par l'AMO : les populations
à densité élevée des zones urbaines, dans
lesquelles il est vraisemblable de trouver un minimum d'infrastructures et de
moyens de communication de qualité, a plus de chance d'être servie
par le régime AMO que la population disparate des zones rurales (Ensor,
1999).
4- la capacité de gestion
du pays : La mise en place d'un régime AMO requiert une
maind'oeuvre suffisamment qualifiée ayant des capacités
comptables, bancaires et informatiques. L'éducation secondaire et
tertiaire devrait en principe répondre à cette demande en termes
de formation. Le propre personnel du régime AMO, peut être
appelé à être impliqué dans la formation et le
renforcement des capacités de leurs collègues.
5- le niveau de solidarité
parmi les membres de la société : On
considère ici une société ayant un niveau de
solidarité élevé comme étant une
société dans laquelle les individus ont une propension plus
grande à soutenir les autres individus. Un système de protection
financière totale requiert une quantité significative
d'interfinancement, aussi bien des riches aux pauvres que des personnes
à faibles risques à celles à hauts risques. Les
décideurs politiques peuvent, parfois, imposer la solidarité,
pour parvenir à un niveau nécessaire permettant la mise en oeuvre
durable de l'interfinancement de l'AMO.
Les cinq facteurs peuvent être plus ou moins
présents, mais l'appui du gouvernement pour lancer et orienter le
procédé qui mènera à un système d'assurance
maladie obligatoire pour tous est l'élément fondamental.
L'élément de l'appui du gouvernement sera discuté
ultérieurement.
b/ Les facteurs particuliers : leçons de quelques
expériences en matière de période de transition :
À travers l'analyse des expériences de
quelques pays ayant des régimes AMO développés Carrin et
James (OMS, 2004), on a pu mettre en lumière des facteurs
spécifiques - au pays en question - importants
de facilitation qui peuvent accélérer la période de
transition dans ces pays. Ces facteurs spécifiques proviennent de
l'analyse de ceux qu'on a qualifiés de
généraux.
1- Des facteurs qu'on peut qualifier d'historiques :
en Allemagne, Bismarck a fait le premier pas vers la couverture universelle en
1883, avec la loi sur l'Assurance Maladie, et s'est inspiré de
l'expertise acquise à partir des systèmes volontaires des
décennies précédentes.
2- Des facteurs qu'on peut qualifier
d'idéologiques : en Belgique, le gouvernement a également
stimulé l'objectif de la couverture sociale universelle en reconnaissant
officiellement les mutuelles d'assurance santé en 1851.
3- Des facteurs ayant trait aux objectifs
spécifiques des entités en relation ou en réseau,
chargées de gérer l'AMO, et dont il faut en tenir compte : le
problème suivant s'est posé par exemple en Belgique : la plus
grande caisse d'assurance maladie a dû faire face à d'importants
problèmes financiers à cause de petites caisses engagées
dans des opérations d'écrémage de la clientèle. On
voyait bien que ce n'est pas uniquement les médecins qui peuvent faire
un écrémage du marché des patients !
4- Des facteurs ayant trait à la performance du
régime AMO : en fait cette performance et celle de tout autre
système de financement de la santé, peut être
évaluée en deux étapes. Dans une première
étape, on peut évaluer la performance de l'AMO en termes de
« financement de la santé» pur : recouvrement des ressources
financières, allocations de ces ressources et
garantie d'un forfait de prestations
spécifiques. D'une façon plus large, ces éléments
sont associés à ce que l'on nomme le plus souvent «la
couverture universelle». Par exemple, un régime AMO qui couvre 80%
de la population mais qui a un impact positif limité sur l'état
de santé global de la population ne semble pas être un
régime bien performant.
Dans une deuxième étape, la performance
du régime AMO en terme de financement de la santé est liée
à son impact sur ce qui est appelé les objectifs finaux du
système de santé, c'est-à-dire la « santé
» : égalité en matière de santé,
réactivité, égalité dans la
réactivité, et équité dans le financement. Cette
performance de l'AMO est en relation étroite avec les efficiences
allocative et technique des fournisseurs de soins de santé. Le moment
est venu pour expliquer l'impact de l'AMO sur les objectifs finaux du
système de santé.
c/ Impact du régime d'AMO sur les objectifs finaux
du système de santé :
Au préalable, il n'est pas simple d'identifier
l'impact « net» de l'AMO sur les objectifs finaux du système
de santé. L'identification de cet impact nécessite des
enquêtes et d'autres méthodes complémentaires
effectuées séparément, vue la complexité analytique
d'une telle évaluation et les effets d'autres facteurs
socioéconomiques et épidémiologiques sur le système
de santé. Il ne faut pas perdre de vue que les multiples aspects d'un
système de santé peuvent être classés en quatre
grandes fonctions inter-reliées, à savoir : fourniture des
services de santé, création de ressources (à travers les
investissements et la formation) afin de fournir ces services, financement de
la santé, ainsi que l'administration générale et la
supervision du système de santé (WHR, 2000).Réellement
c'est l'impact des objectifs d'un régime AMO sur les objectifs finaux du
système de santé qui sera présenté
brièvement, puisque la performance d'un régime AMO doit
être évaluée en fonction de l'objectif final d'un
système de santé (Carrin et al, 2004).
L'OMS a récemment défini les objectifs
des régimes de financement de la santé de la façon
suivante : «Le but du financement de la santé est de rendre des
fonds disponibles et établir des incitations financières pour les
prestataires, afin d'assurer que tous les individus ont accès à
un système de santé publique efficace et à des soins de
santé individuels» (WHR, 2000). On peut se poser la question
suivante : pourquoi la définition des objectifs s'est limitée
à l'accès des individus aux soins du système de
santé publique ? Est-ce que cette limitation ne peut pas mener au danger
d'un système à deux vitesses ?
«Un système de financement de la santé
performant, et implicitement un régime d'AMO performant, devrait avoir
les objectifs suivants :
1- Générer des ressources suffisantes et
pérennes pour la santé ;
2- Utiliser ces ressources de façon optimale (en
modifiant les incitatifs et en utilisant de façon appropriée ces
ressources);
3- S'assurer d'une accessibilité
financière pour tous» (Carrin et al, 2004).
Sans oublier que «la santé» est
l'objectif premier ou directeur d'un système de santé et
l'état de santé global de la population ainsi que la distribution
de l'état de santé à travers la population sont
importants. Toutefois, les résultats qui ne sont pas liés
à la santé sont aussi importants. La
réactivité aux attentes (non médicales) de la
population, et l'équité dans les
contributions financières sont aussi reconnues comme
d'importants objectifs finaux du système de santé (WHR,
2000).
Un régime de santé réactif assure
que les individus sont traités avec suffisamment de respect et que le
régime est suffisamment orienté vers le client (WHR, 2000), sans
distinction entre les différentes catégories de la population.
Les contributions financières sont considérées comme
équitables lorsque les dépenses de santé sont
réparties en fonction de la capacité de payer
(équité verticale) plutôt qu'en fonction des risques de
maladie, et devraient assurer que tous sont financièrement
protégés contre ce risque. A cela s'ajoute une
équité horizontale pour les assurés ayant le même
revenu.
Mais l'AMO, comme tout autre régime de
financement de la santé, a un effet sur la distribution et l'état
de santé général de la population, en fournissant des
ressources pour la santé et en décidant de la façon
qu'elles seront utilisées. Finalement, un bon régime AMO peut
avoir un effet positif sur l'objectif de réactivité, en modifiant
les incitatifs des prestataires de santé (Carrin et al, 2004). On a
évoqué à plusieurs reprises la performance du
système de santé et celle de l'AMO, puisqu'elles sont
inter-reliées. Dans les lignes qui suivent les caractéristiques
clés d'un régime AMO seront expliquées, ainsi que les
aspects de cette performance y compris le rôle de gouvernement dans la
préparation du développement de l'AMO.
2. Caractéristiques d'un régime
d'assurance maladie performant :
Après avoir présenté les
objectifs d'un système de financement de la santé performant, et
par le fait même d'un régime AMO performant, ainsi que les
fonctions principales d'un système de santé. Il se dégage
que, la fonction de financement de la santé par l'AMO est le centre
d'intérêt de l'analyse. Cette analyse distingue respectivement
trois sous-fonctions elles-mêmes interreliées à savoir : le
recouvrement des cotisations, la mise en commun des risques et l'achat
des
prestations de soins («passif :
réalisé selon des budgets prédéterminés ou
par le paiement des factures lorsqu'elles se présentent ; ou
stratégique : il implique une recherche continue des meilleurs services
de santé, comment les acheter et de qui.»(WHR, 2000)). Le
détail de ces sousfonctions n'est pas l'objet de ce travail, on va se
limiter à présenter les indicateurs de performance des
problématiques conceptuelles clé, en liaison avec les
sous-fonctions de financement de la santé par l'AMO (Carrin et al,
2004).
a/ Le rôle de l'Etat dans la préparation du
développement de l'AMO :
A l'instar des régimes de MAS, et tel qu'il a
été évoqué parmi les facteurs de catalyse de la
transition vers la couverture universelle via le régime d'AMO pour les
pays analysés par Carrin et James (OMS, 2004), l'administration
générale du régime par ses composantes, a
été identifiée comme un facteur essentiel de
préparation au développement de cette transition. La
première composante de l'administration générale est la
définition d'une stratégie AMO claire et cohérente, visant
les principales caractéristiques de conception du régime. Ces
caractéristiques sont :
1- un calendrier pour la couverture
systématique de la population et/ou de groupes spécifiques de
population ; 2- la définition des cotisants et des
bénéficiaires ; 3- les sources de financement des cotisations
effectuées au régime AMO ; 4- l'attribution des revenus et la
méthode de paiement des fournisseurs de soins de santé et 5- le
cadre organisationnel et administratif.
La stratégie doit ensuite être
accompagnée d'un projet loi sur le régime AMO, contenant les
principes généraux de la couverture universelle par l'AMO - en
Tunisie la loi N° 2004-71 du 2 août 2004, portant institution d'un
régime AMO fondé sur les principes de la solidarité et
l'égalité des droits, mais applicable uniquement aux
assurés sociaux mentionnés dans les différents
régimes légaux de sécurité sociale, et pas à
toute la population - Le calendrier menant à l'établissement du
régime AMO devrait être précisé, spécifiant
quand la loi AMO sera votée et le moment de la mise en oeuvre ( pour
préciser après la durée de la période de transition
).
La mise en oeuvre en tant que telle demandera une
administration générale et une gestion continuelle de la part du
gouvernement. Il y a des tâches concernant le lancement du régime
et il faudra s'assurer, entre autres, que les capacités administratives
soient en place, que les soins de santé inclus dans le forfait soient
fournis et que le développement du régime puisse être
contrôlé et évalué par le biais d'indicateurs de
performance qui seront présentés dans le paragraphe
suivant. Ces indicateurs servent à faciliter le
contrôle et l'évaluation du régime (Carrin et al,
2004).
b/ Indicateurs et aspects de la performance :
Carrin et James (OMS, 2004) ont défini certains
indicateurs de performance qualifiés de «facilement
mesurables» déclinés suivant les trois sous-fonctions de
financement de la santé par l'AMO et les sept problématiques
conceptuelles spécifiques à ces mêmes sous-fonctions. Ils
sont résumés dans le tableau ci-dessous :
Tableau 3 : Résumé de la performance de
sept problématiques conceptuelles-clés
Collecte des revenus
|
1. COUVERTURE DE LA POPULATION
|
- niveau général /
macroéconomique
|
Pourcentage de la population couverte par
l'AMO
|
Quelle portée pour les subventions
gouvernementales directes ?
|
- par groupe spécifique de
population
|
Couverture par groupe socioéconomique
|
2. MÉTHODE DE FINANCEMENT
|
a) Mesures des cotisations payées
d'avance
|
- général
|
Ratio des contributions payées d'avance sur les
coûts totaux des soins de santé
|
Différentes sources de fonds:
- Impôts sur les salaires versus un assortiment de
sources de revenus
Est-ce que les contributions sont nominales ou relatives
?
|
-par groupe
spécifique de
population
|
Ratio des cotisations payées d'avance par groupe
socioéconomique*
|
|
a)
|
- général
|
Pourcentage des ménages ayant des dépenses
d'urgence
|
- par groupe spécifique de
population
|
Dépenses d'urgence par groupe
socioéconomique
|
Mise en commun des risques
|
3. NIVEAU DE FRAGMENTATION
|
Plusieurs risques partagés ? Si oui, y a-t-il des
mesures d'égalisation des risques en place ?
|
Fonds simple versus multiple:
- Fonds simple: niveau de
décentralisation
- Fonds multiple: caractéristiques des membres des
différents fonds, avec des contributions et des bénéfices
variants ? Concurrence entre les fonds ?
|
4.COMPOSITION DES RISQUES PARTAGÉS
|
Est-ce que l'adhésion est obligatoire
?
|
Quelle est l'unité de souscription?
|
Achat
|
5. FORFAIT DE PRESTATIONS DE SOINS DE
SANTÉ
|
Y a-t-il des mécanismes de contrôle -
mécanisme de demande de révision pour les patients, informations
sur les droits des prestataires ?, comité de revue et examen des
revendications- en place ?
|
Nature du contrat entre le fournisseur et le
régime AMO. Comment introduire des critères d'efficacité
et d'équité dans les forfaits de prestations de soins de
santé ?
|
6. MÉCANISMES DE PAIEMENT DES FOURNISSEURS DE
SOINS DE SANTÉ
|
voir les questions de conception
supplémentaires...
|
Est-ce que les incitatifs aux fournisseurs encouragent
la rétention des coûts et la fourniture de soins de santé
de qualité ?
|
7. EFFICACITÉ ADMINISTRATIVE
|
Pourcentage des dépenses en coûts
administratifs
|
Budget plafond; exclusion des interventions peu
coûteuses du forfait des prestations.
|
|
Source : Carrin et James (OMS, 2004).
c/ Analyse des problématiques conceptuelles :
Tel qu'il a été présenté
au paragraphe précédent. On va se référer encore
à l'analyse de Carrin et James (OMS, 2004). Des précisions seront
apportées d'une manière concise, sur les problématiques
conceptuelles ainsi que les indicateurs de performance qui leurs sont relatifs,
dans les pays ayant choisi ou voulant choisir l'AMO comme voie vers la
couverture universelle des soins de santé.
1- La couverture de la population :
- Pourcentage de la population couverte par l'AMO
: sera plus élevé dès le début dans les
économies disposant de grands secteurs industriels, miniers ou de
services.
- Couverture en fonction des groupes
ciblés : Il convient d'analyser la couverture par groupe de
population : fonctionnaires ( y compris les enseignants, la police et le
personnel militaire), Salariés des entreprises publiques et
privées, travailleurs à l'étranger, indépendants
agricoles et non agricoles, les retraités ou pensionnés, certains
groupes de la population non active (étudiants, handicapés,
chômeurs). Il faut aussi comprendre que la transition vers la CMU peut
prendre un certain temps. Toutefois, le pourcentage couvert peut excéder
le pourcentage de cotisants si le gouvernement
crée des arrangements financiers permettant de payer les cotisations de
certaines catégories de la population, comme les plus pauvres, qui
autrement n'auraient pas pu se permettre une adhésion au régime
d'assurance. L'ampleur des financements croisés dépend du niveau
de solidarité parmi les membres de la société.
2- Les méthodes de financement :
- Ratio des cotisations payées d'avance par
rapport au coût total des prestations AMO : Il existe deux soucis.
Premièrement, le ratio des cotisations payées d'avance peut
être très élevé mais le forfait de prestations
très restreint. Un forfait de prestations de soins de santé
complet est généralement composé de soins externes (soins
de santé primaires, certains services de spécialistes,
médicaments essentiels) et de soins hospitaliers (dont les
médicaments essentiels et les services auxiliaires comme les tests de
laboratoire). (Carrin et al, 2001).
Deuxièmement, le souci du hasard moral - qui
implique que les individus peuvent avoir une demande excédentaire de
soins de santé lorsqu'ils sont confrontés à un prix
subventionné au moment où ils ont besoin de soins de santé
- devrait être pris en compte.
- Ratio des cotisations payées d'avance par
groupes ciblés : Le défi pour les régimes AMO
est de développer un plan par lequel les autres groupes ciblés
adhèrent systématiquement au régime selon des
conditions similaires à celles des affiliés initiaux. Ceci
conduira éventuellement à des
ratios similaires pour tous les groupes, avec une
accessibilité financière comparable aux prestations de
santé.
- Pourcentage de ménages avec des
dépenses d'urgence : la problématique conceptuelle de la
protection contre les dépenses d'urgence est importante. Les
régimes AMO les plus performants minimisant le pourcentage des
ménages ayant à effectuer ce genre de dépenses. Plusieurs
articles et papiers ont défini les dépenses d'urgence ou
catastrophiques, et ont défini des pourcentages différents du
revenu du ménage.
- Dépenses d'urgence par groupe
ciblé : Ce critère montre dans quelle mesure le
régime AMO est équitable. Un régime AMO performant
pourrait limiter les dépenses catastrophiques ou d'urgence même
auprès des groupes vulnérables. Le concept d'équité
est plus large que celui de l'accessibilité financière, puisqu'il
s'intéresse de la manière par laquelle les cotisations au
régime AMO sont distribuées aux ménages à revenus
différents (c'est une «équité verticale»), et au
traitement égal à besoin égal qui est une
«équité horizontale». Qu'elles soient forfaitaires
(pour certains indépendants) ou liées au salaire (favorisent
l'équité), les cotisations sont la source primaire de financement
d'un régime AMO. Les cotisations forfaitaires, surtout dans un pays
où il est très difficile d'évaluer les revenus, peuvent
éviter des pertes de temps et faciliter la gestion. On a une
substitution entre l'équité et l'efficacité. Une solution
intermédiaire est d'avoir une série de tarifs forfaitaires comme
alternative à des modèles basés uniquement sur le revenu
ou sur une contribution forfaitaire. Cette alternative doit tenir en compte la
capacité à payer des individus sans trop augmenter les
coûts administratifs et les pertes de temps. Pour prévenir les
contestations de certaines personnes, une manière de reconnaître
les limites de la solidarité financière dans un régime est
de plafonner le salaire, sur lequel sont basées les cotisations. Si les
décideurs politiques désirent couvrir une plus grande partie de
la population (chômeurs, les retraités, les étudiants et
les pauvres), plutôt qu'uniquement ceux qui ont cotisé par le
prélèvement sur leurs salaires, d'autres sources
complémentaires peuvent être apportées dont la principale
d'entre elles provient des subventions gouvernementales à travers la
taxation générale. D'autres sources telles que les impôts
spéciaux (taxes sur la consommation du tabac et de l'alcool), et les
aides extérieures peuvent être utiles mais pour un financement
temporaire ou isolé de certaines tâches. Les tickets
modérateurs ou « le recouvrement des coûts» ne sont pas
une source directe de financement du régime AMO, mais ont un impact sur
le niveau des dépenses de l'AMO.
3- Le niveau de fragmentation :
La mise en commun complète des risques
dépend en plus de l'étendue des cotisations payées
par les usagers, du niveau de fragmentation de cette mise en commun. La
fragmentation se produit
lorsqu'il y a trop de petits systèmes de mise
en commun du risque (WHO, 2000). Les systèmes de mise en commun auxquels
sont associés des groupes à faible revenu recevront un montant
moins élevé de cotisations, amenant des forfaits de prestations
de santé moins généreux et des restrictions dans
l'accès. Si un mécanisme appelé compensation des risques,
qui permet une rectification des ressources disponibles mises en commun selon
les divers risques des affiliés, est en vigueur, la fragmentation peut
être évitée. La mise en commun des risques peut être
multiple (plusieurs caisses d'AMO) ou unique (caisse d'AMO unique). La caisse
unique comme c'est le cas en Tunisie, demeure la meilleure option pour
maximiser la mise en commun des risques et minimiser la fragmentation.
L'objectif des décideurs politiques est d'offrir un forfait de
prestations de santé identique à tous les affiliés pour
permettre la liaison nécessaire entre les systèmes de mise en
commun. Cette liaison des risques est connue sous le nom de « compensation
des risques», par laquelle des subventions sont données aux
personnes à haut risque, à travers «un fonds de
solidarité». Fournir immédiatement un forfait identique
à toute la population nécessiterait outre les subventions du
gouvernement, d'importants transferts de ressources du secteur formel à
celui informel. Enfin Le régime d'assurance maladie universelle de la
Colombie est un bon exemple de mécanisme de compensation des risques
entre systèmes de mise en commun du risque (Londoño,
2000).
4- Mécanismes de paiement aux fournisseurs
:
Que les fournisseurs des soins de santé soient
individuels ou institutionnels, la manière avec laquelle ils sont
payés peut significativement affecter les coûts et la
qualité des soins prodigués, et peut donc contribuer à
l'atteinte de l'utilisation optimale des ressources. Il n'est pas possible
d'établir catégoriquement quel mécanisme de paiement des
fournisseurs de soins de santé est meilleur ou pire que les autres,
puisque chacun a ses forces et faiblesses et un impact sur la maîtrise
des dépenses et la qualité des soins. (Carrin et Hanvoravongchai,
2003). D'où évidemment la préférence d'un
mélange des méthodes de rémunération. Après
un résumé des principales forces et faiblesses de ces
méthodes, on se propose de discuter les perspectives de la MAS à
parvenir à une couverture universelle, ainsi que le système d'AMO
tunisien à transiter vers une CMU. La discussion de cette transition de
l'AMO en Tunisie vers la couverture universelle va constituer une espèce
de «projet» et un objectif pour lequel on va militer toute notre vie,
espérant qu'il se réalisera un jour pour le peuple tunisien
père de «la révolution pour la liberté». Une
telle transition vers la couverture universelle, est aussi une
révolution dans les idées existantes sur la liaison automatique
entre la qualité d'assuré et l'activité
professionnelle.
Tableau 4 : Principales forces et faiblesses des
méthodes de paiement des fournisseurs de soins
![](Experiences-de-Micro-assurance-de-Sante-et-d-AMO-qu-en-est-il-d-une-transition-vers-la-Couverture7.png)
- Encourager les fournisseurs de soins à offrir
des soins de qualité.
Forces Faiblesses
- Encourager d'un autre côté une
surproduction de soins de santé (demande induite de l'offreur). (Witter
et al, 2000).
- Tendance à réduire le temps
passé par activité et/ou à déléguer à
des personnes moins qualifiées.
- Coûts administratifs élevés :
coûts de facturation, frais de remboursement et de
contrôle.
Méthode de paiement
Rémunération à l'acte (pour
chaque acte fourni à un patient)
Rémunération au cas (DRG : Diagnosis
Related Group) : l'hôpital est payé une somme uniforme pour les
traitements du patient selon le groupe dans lequel il a été
diagnostiqué.
Rémunération à la journée
(per diem)
- Pour des soins ambulatoires ou d'hospitalisation.
Facile à administrer.
- Meilleur contrôle des coûts puisque les
fournisseurs ont intérêt à être plus
efficaces.
- Pour des soins hospitaliers, elle est simple et peu
coûteuse à administrer.
- Existence d'un incitatif à augmenter la
durée du séjour des patients et/ou à accroître le
nombre d'admissions.
- Possibilité d'effet négatif sur la
qualité, car les hôpitaux ont intérêt à
réduire leurs facteurs de production pour diminuer les
coûts.
- Incitatifs à augmenter les
admissions, et à faire des diagnostics plus
graves et donc plus coûteux - et/ou à transférer les cas
complexes à d'autres fournisseurs.
![](Experiences-de-Micro-assurance-de-Sante-et-d-AMO-qu-en-est-il-d-une-transition-vers-la-Couverture8.png)
Rémunération à la capitation : les
fournisseurs reçoivent des paiements selon la
taille de la population desservie.
![](Experiences-de-Micro-assurance-de-Sante-et-d-AMO-qu-en-est-il-d-une-transition-vers-la-Couverture9.png)
- Administration facile - Les paiements sont
ajustés pour
refléter la morbidité espérée
de la population.
- Il n'existe pas d'incitatif à fournir
excessivement des soins de santé, et donc risque de sous-production de
soins de santé.
Budget - Peuvent aider à contrôler les
coûts : il
n'y a pas de lien entre la quantité et la
composition des soins de santé offerts aux patients et les montants
reçus par les fournisseurs.
- En cas où les budgets ne sont pas stricts,
pas d'incitatif à minimiser les coûts pour les
fournisseurs.
- Possibilité de sous-production et des listes
d'attente.
Salaires - Méthode simple administrativement - Ne
peut pas couvrir que les coûts de
personnel et pas ceux des médicaments et de
l'équipement médical.
- Possibilité de sous-production
- Possibilité de fuite vers le secteur
privé.
Source : Carrin et James (OMS, 2004)
IV. Couverture maladie universelle : Discussion :
Les caractéristiques des systèmes d'AMO
performant et de MAS ont été présentées, leurs
impacts sur le financement du système de santé et la
participation à ses objectifs aussi, une grille de lecture des diverses
expériences de MAS montées dans le monde a été
passée en revue, et avant de discuter le point essentiel de l'atteinte
de l'objectif de la couverture universelle par les deux systèmes
d'assurance et plus précisément le cas de l'AMO en Tunisie, les
différentes sousfonctions d'un système de santé d'une
manière générale seront résumées dans ces
quelques lignes. Les sous-fonctions du système de santé sont : le
financement, la production des intrants et la fourniture des services (WHO,
2000). Comme ça était présenté ci-dessus, la
fonction de financement comprend la captation et le pooling des revenus et leur
utilisation sous forme d'allocation des ressources ou d'achat de services aux
prestataires. La fonction de production des intrants comprend la production,
l'importation, l'exportation, la distribution et la vente au détail des
ressources humaines, de la connaissance, des produits pharmaceutiques, de
l'équipement médical et des autres consommables, ainsi que du
capital. La fonction de fourniture des services comprend aussi bien les
services de santé publique d'application globale que les services
cliniques fournis à travers le diagnostic public ou privé, les
transports et l'hospitalisation des individus ou ménages. Les fonctions
du système de santé sont sous l'influence de l'Etat de par sa
fonction d`intendance ainsi que de la population, à travers les
processus politiques, la demande et les marchés (Preker et al, 2003). Le
passage à un système d'assurance sur une base élargie et
de financement à base d'allocations, constitue une des grandes
réussites du financement de la santé au cours du vingtième
siècle (Preker, 1998).
1. Défis d'une transition vers la CMU par la
micro-assurance de santé et l'AMO :
Dans un autre article sur les régimes
d'assurance maladie communautaire, Carrin G. (WHO, 2003), a
évoqué la «protection financière universelle»,
terme qui reflète plus clairement le véritable objectif de la
couverture universelle. Pourquoi de nombreux pays notamment à revenus
faibles et intermédiaires, ont des difficultés à instaurer
cette protection financière universelle ?
a/ Difficultés de mise en oeuvre d'une CMU dans les
pays à revenus faible et moyen :
Vu qu'on s'intéresse précisément
au système d'assurance maladie tunisien, on va présenter les
principaux obstacles à la généralisation de la protection
financière à travers la MAS qui s'adresse principalement au
système informel tel que Langenbrunner, Preker et Jakab (2003) les ont
présentés. Outre le «niveau absolu» faible de
ressources mobilisables dans les pays à revenus faible et moyen, une
grande partie de la population travaille dans le secteur «informel»
(emplois saisonniers et irréguliers, travailleurs non
déclarés, faiblesse du contrôle des services de la
sécurité sociale et corruption, ignorance des textes
législatifs du droit social). Il est difficile voire impossible de
mettre un système de collecte et de recouvrement des cotisations
sociales ou d'assurer la régularité d'un flux de revenu pour les
caisses d'AMO.
- Les fonds collectés dans un contexte de
faibles niveaux de revenu, lorsqu'ils existent, sont généralement
fragmentés selon les niveaux de revenu, ce qui empêche d'assurer
des transferts efficaces entre les classes aisées et celles à
revenu faible (allocations), des bien-portants vers les malades (assurance) et
des périodes actives vers les inactifs (épargne). Autrement,
l'unification des fonds a de fortes chances d'échouer.
A signaler que la MAS n'est une réponse face
à certains risques de santé. Une discussion de la micro-assurance
doit être accompagnée d'une mise en garde : le produit peut
être le plus utile dans les situations où il est
particulièrement difficile à le mettre en place : régions
à haut risque de catastrophes naturelles ou, plus récemment,
populations où le VIH et le sida sont endémiques.
Malheureusement, l'assurance est un outil bien imparfait pour faire face aux
risques ou aux problèmes prévisibles de toute une population
(Pearce et Parker, 2010).
L'intérêt croissant que connaît le
financement communautaire et plus particulièrement la MAS est du
à ces obstacles et autres plus spécifiques à chaque pays
car on pense qu'il permet plus facilement d'identifier la population de
contribuables et de percevoir les contributions (Preker et al, 2002). Ceci
étant quelles sont les limites de ce qui peut être assuré
?
b/ Limites de ce qui peut être assuré :
Une protection financière universelle ou une
CMU veut dire assurer toute la population contre le risque maladie ou les
coûts dits catastrophiques. Cette couverture suppose une « assurance
appropriée» (Musgrove, 1999). On va se baser sur les conclusions et
les analyses de Dror et Vaté (2003). Les auteurs se sont posé la
question fondamentale : où tracer la limite des risques assurables ? Et
plus précisément du risque de santé défini par
toute situation dans laquelle l'état de santé d'un individu ou
d'un groupe est exposé à une dégradation
possible.
Ils ont donc caractérisé le problème
de ce qui est assurable au moyen de trois limites qui se complètent :
actuarielles, économiques et politiques.
1- Limites actuarielles (caractéristiques du
risque) :
Un risque n'est pas assurable si ses
caractéristiques statistiques ne sont pas en conformité avec les
exigences du calcul actuariel, c'est-à-dire que : les
évènements facteurs du risque doivent être
aléatoires, et les risques en question doivent être à la
fois observables (étendue des garanties et donc leur coût, et la
probabilité des évènements susceptibles d'entraîner
ce coût), et diversifiables (dans le temps entre les périodes et
géographiquement par la réassurance). Ces deux conditions
permettent à l'assureur de déterminer une compensation
statistique ; donc calculer sa prime et juger la viabilité
économique.
D'un côté, les théoriciens et les
professionnels de l'assurance considèrent que la nature aléatoire
des risques de santé tient à six conditions :
- L'évènement est possible : il n'est ni
certain ni impossible.
- Le risque est non spéculatif : une
réalisation de ce risque ne sera pas favorable à l'assuré
(contrairement aux paris ou à la spéculation).
- L'évènement est imaginable : il est
possible d'en imaginer, même de manière imparfaite, les
conséquences en termes de nature comme en termes de
coût.
- Le risque est exogène :
l'évènement n'est pas attendu, et par conséquent on ne
peut déterminer sa réalisation à l'avance. La
réalisation du risque ne peut dépendre de la seule intention de
l'assuré, mais elle peut se produire par suite d'une action
effectuée par l'assuré sans intention ni malice.
- Le risque est futur : l'assurance ne peut couvrir un
risque déjà réalisé.
- Le risque est non présumé : On doit
écarter aussi les risques chroniques ou ceux liés à des
causes qui se sont réalisées.
D'un autre côté, la compensation
statistique des risques comprend deux aspects :
- L'unification et la diversification des risques :
hypothétiquement un certain nombre de gens sont disposés à
payer pour s'assurer contre un risque qui n'affectera que quelques individus.
En unifiant les risques, l'assureur applique la loi des grands nombres pour
calculer une prime actuarielle et déterminer une marge de
sécurité afin de limiter son propre risque de
faillite.
Dans le cas tunisien, on peut discuter le montant
d'une cotisation ou une sorte de participation qu'un citoyen n'exerçant
pas une activité professionnelle pourra payer pour se couvrir contre le
risque maladie. (Dror et Vaté, 2003)
2- Limites économiques (souscription de
l'assuré et engagement de l'assureur) :
Sans entrer dans les détails techniques qui ne
sont pas d'ailleurs l'objet de ce travail et qui demandent encore des
études spéciales et très pointues, l'assuré a
intérêt à ce que la prime soit la moins
élevée possible mais à ce que cette même prime
garantit une viabilité financière. Naturellement, on ne peut pas
parler de couverture universelle sans engagement de la caisse d'assurance
maladie. La couverture de toute la population a un impact sur le calcul
statistique du montant de la contribution. Cette prime ne doit pas être
élevée ou considérée comme excessive aux yeux
d'individus vivant dans des conditions sociales et économiques
difficiles.
- Les conséquences d'une asymétrie
d'information (risque moral, sélection adverse) occupent une place
importante dans la théorie de l'assurance. L'information a un rôle
essentiel dans la détermination de l'assurabilité des risques et
dans le fonctionnement des transactions d'assurance (offre et demande de
soins).
- En théorie, lorsqu'un risque satisfait aux
conditions actuarielles d'acceptation, il n'y a pas d'obstacles
économiques. Dans la réalité, les critères
actuariels et économiques d'acceptation sont rarement binaires. Exemple
: couvrir la population sans exigence d'un examen médical
préalable. (Dror et Vaté, 2003)
3- Limites politiques :
Les limites étant l'expression de choix faits
par les pouvoirs publics, elles peuvent être restrictives - en
interdisant une assurance de certains risques qui serait contraire à
l'intérêt public (une assurance contre les amendes) - ou
expansives (des risques doivent être assurés dans
l'intérêt de la société en général :
exemple de l'assurance santé universelle). Seule une intervention des
pouvoirs publics peut permettre la couverture de risques qui autrement ne
seraient pas assurables, en imposant cette couverture, en versant des
subventions à la caisse d'assurance ou en mettant en place une
réassurance. Parvenir à l'objectif de la CMU par la MAS ou par
l'AMO seule et comme on l'a discuté, présente d'énormes
défis. Quelles sont donc les perspectives ?
c/ Perspectives :
Les relations entre l'Etat et les régimes
d'assurance maladie ne doivent pas être à sens unique
c'est-à-dire que tous les deux ont un rôle à jouer. Ce
«lien» ne sera possible qu'une fois que seront remplies certaines
conditions de départ. D'abord, les régimes d'assurance-maladie
communautaire doivent être considérés comme un instrument
national pour une meilleure protection financière plutôt que comme
des entités isolées. En d'autres termes, il faut créer
un
partenariat en vertu duquel le soutien technique et
financier de l'Etat devient naturel. Deuxièmement, une interconnexion
entre les régimes d'assurance-maladie obligatoire et communautaire et
l'Etat est essentielle. La dynamique de l'assurance sociale est
différente d'un pays à l'autre, et donc la prévision de la
rapidité de l'amélioration de la protection financière au
niveau national est très difficile. Les régimes
d'assurance-maladie communautaire ont généralement donné
jusqu'à présent des résultats modestes, surtout en termes
d'affiliation. Une des principales raisons est que de nombreux régimes
sont apparus il y a relativement peu de temps et ont encore besoin de temps
pour se développer. Il est très probable que les régimes
d'assurance-maladie communautaire auront au mieux un rôle de
complément. L'Etat doit donc, définir leur place dans le cadre
d'une politique nationale de financement de la santé permettant à
ces régimes d'assurance de contribuer à l'objectif de protection
financière universelle. (Carrin, 2003).
Parmi les experiences de MAS considérées
réussies par plusieurs spécialistes: «Ghana and especially
Rwanda are powerful examples in Africa showing that political will, clear
action plans, national scope of implementation beyond pilot project settings,
existence of regulatory frameworks, and - last but not least - the unequivocal
acceptance of the need of subsidies to finance partly or totally the premium
for the poorest in society are a must. Under these conditions, CHI in Ghana, or
the Mutuelle de Santé in Rwanda, today
contributes significantly to progress towards universal coverage.» (Criel
et al, 2010)
Pourquoi on a présenté la MAS comme une
alternative pour atteindre l'objectif de CMU ? Pourquoi on voulait s'inspirer
des régimes communautaires alors que la Tunisie a un système
d'AMO obligatoire depuis 2007 ? L'idée des systèmes de MAS ne
pourrait-elle être une manière de contourner la rigidité du
système tunisien basé sur l'exercice d'une activité
professionnelle (inspirée de la réforme de la
sécurité sociale entreprise par Bismarck en 1883) ?
2. Perspectives à envisager de point de vue
système d'AMO tunisien :
Avant de proposer l'idée d'une CMU en Tunisie,
on va présenter brièvement certains points en concordance avec
l'objectif visé. Ces points concernent d'une manière
générale la couverture de quelques catégories de la
population par les prestations de soins. Ensuite et avant de discuter
l'objectif de la protection financière universelle, les principaux
obstacles à la généralisation de cette CMU à
travers un système formel, seront mis en lumière.
a/ Le système de couverture maladie tunisien : une
brève présentation :
La présente description du système
d'assurance maladie tunisien n'est pas en elle-même l'objectif, mais pour
mettre en lumière certains points qui servent l'objet de la CMU en
Tunisie. Brièvement, et après la loi N° 2004-71 portant
institution d'un régime d'assurance maladie, la réforme de l'AMO
a été déjà partie. En se référant
à un rapport de stage qu'on a effectué à l'OMS -
Genève et ayant pour thème : «L'assurance maladie comme
mécanisme d'incitation à la performance des prestataires de soins
de santé», on va résumer certains aspects techniques du
système tunisien :
- Les dispositions de la loi N° 2004-71
s'appliquent aux assurés sociaux affiliés ou immatriculés
aux divers régimes légaux de sécurité sociale,
autrement les assurés de la Caisse Nationale de Sécurité
Sociale (CNSS) et de la Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance
Sociale (CNRPS). (l'Art 3 de la loi précitée). Seul
l'assuré social et ses ayants droits sous certaines conditions peuvent
bénéficier de la couverture du régime AMO. La
qualité d'assuré social est liée à l'exercice d'une
activité professionnelle justifiée et le paiement d'une
cotisation en pourcentage du salaire ou un montant forfaitaire symbolique (cas
du régime étudiant : 5 DT).
- La réforme tentait d'être une
réponse à plusieurs insuffisances, notamment par la fusion des
branches maladies des divers régimes de sécurité sociale
au sein d'un nouveau régime unique, appliquant un taux de cotisation
unique (6.75% pour les actifs et 4% pour les pensionnés qui ne
cotisaient auparavant pour l'assurance maladie) et géré par une
seule caisse : la CNAM.
- Avec ce nouveau régime, l'accès
à l'offre de soins privée, longtemps ignorée par
l'assurance maladie obligatoire, est désormais possible. L'objectif
annoncé par le gouvernement était que : l'objet de la
présente réforme concerne le volet "amélioration de la
couverture devant le risque maladie".
- L'assuré social peut choisir entre : la
filière «publique», la filière «
privée» et la filière «remboursement ». Le choix
porte sur une seule filière et valable une année, et la
filière «publique» sera attribuée pour défaut de
choix et les assurés qui ont choisi cette filière doivent se
soigner uniquement dans les structures publiques - moyennant le paiement d'un
ticket modérateur -, sauf pour certaines prestations
précisées par la loi et que certains fournisseurs privés
conventionnés délivrent en contrepartie d'une prise en charge par
la CNAM. A noter que la part définitive payée (ticket
modérateur) par l'assuré dépend de la nature des
soins.
La filière « privée » : En
vertu de cette option, l'affilié choisit son médecin traitant qui
doit être conventionné. La filière « remboursement
» : cette dernière filière est très proche du
régime
optionnel qui était en application pour les
affiliés de la CNRPS. En cas d'option pour la filière
«remboursement», l'assuré doit avancer la totalité des
frais de soins, mais, le remboursement ne couvre qu'une partie de ces
frais.
Sans entrer dans le détail concernant, qui peut
opter pour une filière et qui n'a pas ce droit de choix (exemple : les
assurés du régime instauré par la loi 2002-32), et outre
ce régime d'AMO, il y a aussi un régime d'assistance publique
médicale appelée "Assistance Médicale Gratuite" (soins
à tarif réduit : AMG2 et soins gratuits: AMG1). Encore il est
question d'éthique et d'équité, puisque les
bénéficiaires sont obligés de se soigner uniquement dans
les structures publiques et que leur nombre ne cesse d'augmenter. Ce
régime d'assistance médicale est géré par la
direction générale de la promotion sociale (Ministère des
affaires sociales, de la solidarité et des tunisiens à
l'étranger ; l'appellation peut éventuellement
changer).
On peut remarquer que le système de
santé tunisien a mis ses premiers pas sur le chemin de la transition
vers la CMU avant même l'instauration du régime d'AMO en 2007
(exemples : le régime des étudiants, la jeune fille
au foyer, l'assistance médicale gratuite, l'année de couverture
supplémentaire pour les titulaires de diplômes supérieurs
suite à la loi de 2006). La Tunisie figure aussi parmi les
pays qui ont mis en oeuvre une politique de santé visant à
assurer l'accès aux soins à toute la population sans distinction.
En effet, la loi n° 91- 63 du 29 juillet 1991 relative à
l'organisation sanitaire a visé une réduction des
inégalités régionales en termes de distribution
géographique des structures publiques de soins. Cette réforme
d'AMO pourrait renforcer et tracer le chemin vers l'objectif de la couverture
universelle, rien que par l'inspiration de l'idée en elle-même.
Peut-on vraiment parvenir à cet objectif en Tunisie?
b/ Principaux obstacles à la
généralisation de la protection financière à
travers un système formel:
Dans la plupart des pays industrialisés
(à l'exception des Etats-Unis, du Mexique et de la Turquie), la
population bénéficie de l'accès universel à un
ensemble complet de services de santé financés à travers
une combinaison de recettes globales, d'assurance sociale, d'assurance
privée et de cotisations et charges de la part des
usagers.(Langenbrunner et al, 2003).
En se basant toujours sur l'article de (Carrin, 2003)
on va tenter de préciser les causes générales qui
empêchent la création et le développement d'une AMO, ainsi
que la généralisation d'une protection financière
universelle sur toute la population dans les pays à revenus faible et
moyen. Ces difficultés peuvent être :
- L'insuffisance des recettes fiscales (impôts
direct et indirect) de l'Etat limite soit la couverture des individus par les
prestations du système de santé, soit la composition du panier
des soins de santé offerts. Il est difficile d'augmenter de façon
substantielle la capacité contributive de la plupart des pays puisque
l'élargissement de la base d'imposition dépend de la croissance
économique et du degré d'évasion fiscale.
- L'instauration d'un système d'AMO n'est pas
facile, alors que dire dans ces pays à ressources limitées. En se
référant à l'expérience tunisienne, les
négociations entre les différents partenaires sociaux (UGTT,
UTICA, fournisseurs de soins, gouvernement,...) étaient très
longues et difficiles. La garantie des mêmes prestations aux personnes
ayant les mêmes besoins de santé (équité
horizontale), quelle que soit leur contribution est un point accentué
des ces pays où les inégalités de revenus et de richesses
sont grandes et où les personnes percevant un revenu moyen et
élevé sont peu disposées à apporter une
contribution beaucoup plus grande que les pauvres (Carrin, 2003). Cette
question devient plus problématique surtout en absence d'une
cohésion sociale et d'un sentiment de solidarité entre les
individus d'une même population.
- Si on opte à une transition vers la CMU par
une AMO, l'Etat et les caisses d'assurance maladie doivent disposer des outils
nécessaires de gestion et de surveillance des informations sanitaires et
financières, de communication, de «marketing» et de traitement
informatique des données personnelles et confidentielles des
assurés pour organiser un système de sécurité
sociale d'envergure nationale. Un système bancaire au moins permettant
la collecte des contributions et l'organisation des remboursements, la gestion
des recettes et des actifs.
- Le soutien politique fort et constant est crucial pour
la création d'un régime d'AMO et après la
généralisation de la CMU.
c/ Projet : propositions pour une transition vers la
couverture universelle en Tunisie :
l'article premier de la loi N° 2004-71 dispose
que:" Il est institué un régime d'assurance maladie, au profit
des assurés sociaux et de leurs ayants droit, fondé sur les
principes de solidarité et l'égalité des droits dans le
cadre d'un système sanitaire complémentaire qui englobe les
prestations servies dans les secteurs public et privé de la
santé». La qualité d'assuré social dépend
étroitement de l'immatriculation (pour les salariés dans les
secteurs agricoles ou non agricoles ainsi que leurs ayants droits, et les
étudiants) ou l'affiliation (pour les travailleurs non salariés
dans les secteurs agricole ou non agricole), à un régime
légal de sécurité sociale. Autrement on voyait que la
justification de l'exercice d'une «activité» prévue par
un texte légal est au coeur du
champ de la couverture par l'AMO. Le système de
sécurité sociale tunisien et plus précisément
d'assurance maladie demeure intimement lié au modèle Bismarckien.
Comme on l'a vu plusieurs pays y compris l'Allemagne ont transité vers
la CMU, puisque ça était démontré (Evidence Based),
l'impact de l'état de santé des individus de la population sur la
croissance économique et le développement d'un pays à
court terme et à long terme et vice versa. En Tunisie, la gestion du
régime d'AMO est confiée à la CNAM, mais les cotisations
venant financer l'assurance maladie et naturellement le système de la
santé, transitent par les deux caisses de sécurité sociale
des assurés des secteurs public et privé. Pour pouvoir
bénéficier des services de la CNAM, il faut impérativement
avoir la qualité d'un assuré social à la CNSS ou la CNRPS.
L'affiliation à certains régimes de sécurité
sociale surtout gérés par la CNSS : travailleurs non
salariés du secteur agricole (TNSA) et régime des travailleurs
non salariés prévu par la loi 2002-32, dépend en pratique
du choix de l'individu. Si quelqu'un opte pour l'affiliation au régime
TNS de la loi 2002-32 ( bien stir il doit remplir certaines conditions), il
sera obligé de payer ses cotisations trimestriellement ou mensuellement
ou même annuellement. Dans le cas où il ne répond pas aux
conditions d'affiliation, ou il n'opte pas pour son affiliation à un tel
régime, il ne sera pas un assuré social et donc il ne peut
bénéficier d'aucune couverture sociale (ni retraite ni assurance
maladie). Inutile de dire que pour un citoyen ayant un revenu faible voulant
justifier son exercice d'une activité agricole (petit éleveur,
propriétaire ou locataire d'une petite portion d'une terre agricole),
pourra utiliser la corruption pour obtenir un certificat délivré
par l'Union de l'Agriculture. Pour les travailleurs non salariés du
secteur non agricole (TNSNA), l'affiliation est automatique vue la coordination
entre le bureau des impôts et le bureau de la CNSS. On voyait donc
l'absence de procédures uniformes pour traiter l'affiliation des
assurés à certains régimes, et donc la qualité
d'assuré à la CNAM dépend aussi des
«procédures» au niveau de la CNSS ou de la CNRPS.
La Caisse Nationale de Sécurité Sociale
(CNSS) surtout engage des sommes importantes pour le recouvrement des
cotisations des assurés ayant des retards de paiement, et donc un
assuré social ne pourra pas prétendre au bénéfice
des services de l'AMO que s'il est en règle du point de vue des
cotisations trimestrielles à payer à l'une des caisses de
sécurité sociale qui gère son régime de
sécurité sociale. Puisque le taux de cotisation trimestrielle est
une somme de plusieurs taux correspondant chacun à une assurance
sociale. Le taux total de cotisation comprend un taux pour l'assurance
vieillesse, un taux pour les accidents de travail et les maladies
professionnelles, un taux pour l'assurance maladie, un taux pour
l'indemnité de licenciement économique, un taux pour les
prestations familiales, bref on pourra l'appeler «le taux de la
sécurité sociale» et pas le
taux de cotisation. C'est le taux de «tout ou
rien» ! On peut comprendre que c'est une mesure qui économise des
frais de recouvrement et de gestion pour la CNSS ou la CNRPS, mais pourquoi
laisser les ressources de la CNAM à la merci des services de
recouvrement de deux autres caisses de sécurité sociale
?
La CNAM est une caisse autonome, elle pourra donc se
charger du recouvrement de ses cotisations, mais une distinction du taux de
cotisation affecté pour ouvrir droit à la couverture par le champ
de l'assurance maladie doit être au préalable
opérée. Supposant que les assurés sociaux et les
employeurs auront la possibilité de s'adresser directement à la
CNAM pour payer leurs contributions ou cotisations de l'assurance maladie. Donc
le bénéfice des prestations de l'assurance maladie ne sera plus
lié au paiement des cotisations des prestations familiales, sociales ou
de retraite.
A part les assurés sociaux mentionnés
dans les différents régimes légaux de
sécurité sociale, un nombre important de tunisiens
n'exerçant aucune activité professionnelle que ce soit dans le
secteur formel ou informel, mais ont une capacité à payer une
cotisation afin de bénéficier de la couverture de l'AMO. Le
même problème peut être observé du côté
du secteur informel qui échappe au contrôle administratif des
services de la CNSS surtout car du côté de la CNRPS,
«l'évasion sociale» est quasi absente. Si «le droit
à la santé» est garanti par la constitution tunisienne et
les déclarations universelles des droits de l'homme, pourquoi laisser le
droit au bénéfice d'une couverture par l'AMO sous la
discrétion de l'exercice d'une activité professionnelle ou au
paiement d'un montant élevé ouvrant droit au
bénéfice de plusieurs services d'assurances sociales ? Est-ce que
celui qui n'exerce pas une activité professionnelle, n'a pas le droit de
se soigner quand il tombe malade rien que parce qu'il n'a pas un carnet de
soins ! La maladie ne différencie pas entre le travailleur dans le
secteur formel et le non travailleur. Certains peuvent tout de suite dire que
c'est pour fixer les tranches de revenus et donc mieux calculer les
cotisations. Mais pour les travailleurs non salariés dans le secteur
agricole et non agricole, les tranches de revenus servant de base pour le
calcul des cotisations trimestrielles, sont fixées
forfaitairement.
Partant de l'idée de la MAS ; qui était
une sorte de réponse à la couverture d'une population du secteur
informel et aussi à revenus faibles ; on va essayer de contourner la
rigidité du système de sécurité sociale tunisien.
On ne propose pas de lancer des mutuelles ou des dispositifs de MAS en Tunisie,
mais juste l'idée de base des expériences de MAS lancées
partout dans le monde, qui pourra être appliquée au système
d'AMO tunisien. Pour ces raisons, on propose donc :
- Tout d'abord la CNAM doit gérer tous les
régimes d'assurance maladie y compris l'assistance médicale
gratuite (AMG 1 et 2).
- Pour les individus pouvant payer une cotisation pour
bénéficier des services de l'AMO, ils peuvent s'affilier en tant
qu'assurés sociaux de la CNAM. A l'instar de l'AMG 2 (10 DT
annuellement). Ce montant sera fixé suite à des études
actuarielles, ou même en se référant au montant de la
cotisation correspondant au taux de cotisation de la partie assurance maladie
pour les régimes des TNS dans le secteur agricole et non agricole. La
justification du revenu et du non exercice d'une activité
professionnelle doit être sur la base de documents officiels des services
des impôts, des services de contrôle de la CNSS et aussi d'autres
établissements publics compétents.
- Le paiement trimestriel des cotisations,
inspiré «de la périodicité des salaires, est une
contrainte trop rigide pour ceux qui n'ont pas des revenus réguliers.
Les populations exclues peuvent être réticentes ou incapables
d'assumer l'obligation de payer chaque mois une somme constante en raison de
revenus irréguliers.»(Jakab et al, 2003). Autrement, la
catégorie d'assurés sociaux qui cotisent dans le cadre la
couverture universelle, auront à payer leurs cotisations une seule fois
par an.
- Tout le système d'assurance maladie doit
être géré exclusivement par la CNAM, pour éviter le
risque de la fragmentation et aussi permettre le pooling statistique du risque
maladie et donc agir sur le montant des cotisations.
- Le jeune d'aujourd'hui est le père de demain.
Si certaines maladies sont négligées faute d'une assurance
maladie ouvrant droit au bénéfice des soins de santé
nécessaires, les répercussions de ces maladies seront graves dans
les années à venir. Une étude portant sur la
capacité à payer des tunisiens n'exerçant pas une
activité professionnelle, doit être effectuée. Cette
étude sur la capacité à payer vient compléter les
études actuarielles pour déterminer un montant à cotiser
par les gens qui ne sont pas couverts par un régime légal de
sécurité sociale et prêts à contribuer bien stir
dans le système d'assurance maladie.
- Un tel projet permettant une affiliation «en
bloc» des individus sans emploi et à revenus faibles -
idée de la MIA - de cotiser directement pour
bénéficier de l'assurance maladie gérée par la
CNAM, constitue une révolution dans le système de la
sécurité sociale tunisien. Pour ceux n'ayant pas les moyens de
payer leurs cotisations, ils continuent à être
bénéficiaires de l'assistance médicale gratuite
(AMG1).
- les cotisants dans le nouveau régime qu'on
propose aussi d'appeler «Assurance Maladie Universelle : AMU
», peuvent opter aussi pour les trois filières de soins. Ceci
est d'un point de
vue d'éthique et équité, mais
aussi pour exploiter leur capacité à payer, puisque le seul
obstacle qui les empêche d'être assurés sociaux de la CNAM
est l'exercice d'une activité professionnelle. - On ne propose pas que
les assurés des différents régimes légaux de
sécurité sociale paient leurs cotisations au titre de l'assurance
maladie directement dans les guichets de la CNAM. Les cotisations au titre de
la sécurité sociale continuent à être
recouvrées par les deux autres caisses : la CNSS et la CNRPS, et ce pour
diverses raisons économiques, de gestion et de contentieux. Pour mettre
les choses au clair, on propose que les individus qui ne sont pas
assurés par la CNSS ou la CNRPS, puisqu'ils n'exercent pas une
activité professionnelle, puissent opter pour cotiser uniquement au
titre de l'assurance maladie et ces cotisations seront payées aux
guichets de la CNSS ou de la CNAM directement. Une nouvelle loi
prévoyant ce nouveau régime d'assurance maladie qu'on peut
appeler régime d'assurance maladie universelle ou régime
d'assurance maladie volontaire doit compléter certainement la loi
N° 2004-71.
- Enfin et avant d'entamer n'importe quelle
démarche, la volonté politique, la gestion du gouvernement, et la
capacité de gestion de la CNAM sont les facteurs clés de
succès de l'objectif de la CMU. Comme on l'a vu plus haut, la
volonté politique et la capacité d'administration du
gouvernement, peuvent à elles seules accélérer la
transition vers la protection financière universelle. En Tunisie et
après les évènements des mois de Décembre 2010 et
Janvier 2011, l'environnement politique a changé et de nouveaux droits
sont mis en valeur. Le peuple tunisien s'est révolté et s'est
manifesté pour couper avec un passé de dictature, de corruption
(petite et grande), et de chômage. Le gouvernement de
«coalition» temporaire a levé le slogan des réformes
sociale, politique et économique. Les valeurs de la liberté
d'expression, de la bonne gouvernance avec ses indicateurs (prévus par
la Banque Mondiale) ne font que légitimer l'objectif de la
CMU.
V. Conclusion :
L'objectif essentiel de ce travail n'était pas
de relater les diverses expériences d'assurance maladie communautaire ou
obligatoire partout dans le monde, ni de décrire la transition vers la
couverture maladie universelle via ces systèmes d'assurance dans
plusieurs pays. La finalité primordiale, était de s'inspirer des
leçons tirées de ces expériences pour se permettre de
proposer quelques remaniements ou modifications au système d'AMO
tunisien. On voyait un système tunisien prisonnier d'un modèle
Bismarckien, ne lui permettant peut être pas d'atteindre l'objectif de la
CMU que s'il n'y aura plus de secteur «informel» ou de chômage.
Outre l'objectif de la protection financière universelle qui est un
défi en lui-même, viennent s'ajouter deux autres obstacles
insurmontables : effacer un secteur informel et éliminer totalement le
chômage !
L'assistance médicale gratuite existe avant
même «la réforme» de l'assurance maladie. Donc la
conscience du gouvernement sur la nécessité vitale d'une
couverture maladie existait. L'idée d'une couverture maladie universelle
n'a pas fait encore surface d'une manière claire. On parlait du champ de
la couverture par les régimes légaux de sécurité
sociale. Mais pourquoi ne pas donner la chance aux gens qui n'ont pas une
activité professionnelle, de cotiser au titre de l'assurance maladie
gérée par la CNAM ? Dans une tentative de discuter le fait de se
placer officiellement sur le chemin de la transition vers la CMU, on a
proposé de séparer complètement la cotisation pour
l'assurance maladie de la cotisation pour les autres prestations de la
sécurité sociale. Pour mieux exploiter la capacité
à payer des individus à faibles revenus et chômeurs,
parvenir à un bon état de la santé général
de la population, et protéger les individus contre les risques
financiers des maladies, une loi prévoyant le choix des individus
n'exerçant une activité professionnelle et ayant juste les moyens
pour payer une cotisation de l'AMO, est nécessaire. Pour les
nécessiteux, l'AMG1 (soins gratuits) et l'AMG2 (soins à tarifs
réduits), restent les solutions. On a proposé que la CNAM se
charge de gérer l'assistance médicale, l'AMO et aussi l'assurance
maladie universelle ou volontaire. N'importe qui peut être un
assuré de la CNAM s'il n'est pas un assuré dans un régime
légal de sécurité sociale. Autrement si un individu
n'exerce pas au préalable une activité professionnelle, il pourra
cotiser uniquement pour bénéficier de la couverture par l'AMO.
Naturellement ces assurés volontaires de la CNAM doivent justifier leurs
revenus annuels. Pour contourner l'incitation aux fausses déclarations
de revenus, un montant unique de cotisation pourra être fixé
quelque soit le revenu déclaré, et les cotisations seront
payées de préférence une seule fois par an comme pour
l'AMG2. Le contrôle va porter essentiellement sur l'exercice ou non de
l'activité professionnelle. Plusieurs études
actuarielles,
sur les capacités administratives de la CNAM,
sur le système de santé tunisien, sur la communication et le
marketing, et sur le système d'information de la CNAM et du
ministère de la santé doivent être au préalable
engagées. Des enquêtes et sondages pour collecter des informations
sur l'opinion des gens n'ayant pas une assurance maladie, concernant cette
assurance maladie volontaire ou universelle, doivent être
préparés et faits avant d'étudier techniquement ce nouveau
régime d'assurance maladie. Bref, cette assurance maladie universelle
n'est pas un simple programme à faire, elle nécessite plusieurs
années à l'instar de plusieurs pays, mais tôt ou tard,
cette couverture par une assurance maladie doit être achevée en
Tunisie, puisque elle demeure intégrée dans le droit à la
vie et la dignité humaine.
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