SECTION 4 : LES FONDEMENTS THEORIQUES DU FINANCEMENT
DES PME
I : L'apport de l'économie de
l'information
La relation « banque-entreprise » est une relation
complexe basée le plus souvent sur une information imparfaite et
incomplète (Sylvie Cieply et Bernard Parañaque, 1997). Les
banques ne possèdent pas toutes les informations sur les projets
présentés par les entreprises. De même, les entreprises ne
connaissent pas les stratégies suivies par les banques par rapport a la
décision d'accord des crédits, et les méthodes
d'évaluation du risque. Ce phénomène qualifié
« d'asymétrie d'information » a fait l'objet d'études
de plusieurs auteurs à travers différentes théories
permettant de comprendre le comportement des banques dans le processus de
financement. Dans la relation de crédit entre les bailleurs de fonds et
les PME, l'asymétrie d'information est définie comme le fait pour
les emprunteurs de posséder plus d'informations que les bailleurs de
fonds sur leur propre entreprise (Fraser et al, 2001). Il est évident
que les promoteurs d'entreprises connaissent mieux leur situation
financière et les opportunités d'affaires qui s'offrent a eux,
que les prêteurs.
Calomiris et Hubbard, (1990) pensent que les entreprises
disposent d'une information sur le degré de risque de leurs projets. De
plus, elles sont les seules à connaitre l'usage qu'elles font des sommes
empruntées. Ce contexte informationnel accroît le risque moral et
le risque d'anti-sélection pour les banquiers. Il existe donc sur le
marché du crédit une imperfection de l'information qui
génère des phénomènes de sélection adverse,
et d'aléa moral.
De l'avis de H.Varian (1998) la sélection adverse est
dûe au fait qu'un coté du marché ne puisse observer la
qualité du produit que l'autre partie lui propose. En effet, sur le
marché du crédit, les emprunteurs donnent toujours une bonne
image de leurs projets aux prêteurs afin d'obtenir le crédit. Cela
conduit les banques à financer des projets risqués en lieu et
place des projets à faibles niveaux de risque.
Quand a l'aléa moral, c'est une situation dans laquelle
un coté du marché ne peut observer le comportement de l'autre
(comportement cachée). L'emprunteur peut donc affecter le crédit
à d'autres fins.
Bardhan et Udry (1999) pensent pour leur part qu'il est
artificiel de traiter séparément les questions de
sélection adverse et d'aléa moral parce que plusieurs
environnements économiques sont caractérisés par un mixage
des deux problèmes.
Pour Akerlof(1970), Diamand et Dybvig(1975), le
phénomène d'asymétrie d'information conduit à des
comportements opportunistes de la part de l'emprunteur. C'est dans ce contexte
que Jaffée et Russel(1976) distinguent dans leurs modèles les
emprunteurs honnêtes et ceux malhonnêtes. Ils assimilent les
emprunteurs honnêtes aux entreprises qui, estimant les coûts d'une
éventuelle défaillance de leurs projets élevés,
décident de rembourser. Quant aux emprunteurs malhonnêtes, ils
préfèrent faire faillite en proposant des taux
d'intérêts plus élevés.
Le phénomène d'asymétrie d'information
auquel la banque fait face est donc dû au fait qu'il est difficile pour
elle de distinguer les bons et les mauvais emprunteurs.
Pour éviter une telle situation, Stieglitz et
Weiss(1978) proposent aux banques de « rationner )) le crédit en
limitant l'offre destinée aux entreprises. Dès lors, lorsque les
entreprises adoptent des comportements opportunistes pour
bénéficier d'un crédit, la banque peut
préférer limiter son offre de crédit aux emprunteurs. Ce
modèle de rationnement rejoint l'idée de Hodgman(1980) qui,
partant d'une logique Keynésienne (l'offre faisant la demande), pense
qu'il faut ajuster par la quantité (volume) du crédit et non par
le coût comme le préconise Swazi(1978). Dans ces conditions, la
demande excédant la quantité offerte sur le marché du
crédit, il subsistera une demande excédentaire émanant des
entreprises, qui ne sera pas satisfaite.
Toute fois, ce modèle ne nous semble pas applicable
dans le contexte particulier du secteur bancaire burkinabè où 75%
des micros crédits est fait par les structures de micro finances dont
les caisses populaires contre seulement 25% par les banques (Rapport BCEAO,
2008). En effet, La proportion du crédit octroyé par les banques
étant minime, celles-ci ne peuvent jouer significativement sur l'offre
de crédit.
Il est beaucoup plus question d'ajustement par les taux
d'intérêt pour faire face a la sélection adverse et
d'exigence de garantie pour éviter l'aléa moral. C'est pourquoi
la théorie dite de « l'agence » basée essentiellement
sur ces principes se justifie beaucoup plus dans le cadre de notre étude
permettant ainsi d'expliquer le comportement des banques dans le financement
des PME.
II : Approche de la théorie de
l'agence
Les théories générales de la firme
(Théories des contrats, des coûts de transactions entre autres),
qui considèrent l'entreprise comme le lieu où cohabitent des
parties contractantes a intérêts divergents, distinguent deux
grandes fonctions dans l'entreprise: Celle de la gestion confiée au
manager et celle de contrôle dévolue aux associés ou aux
propriétaires.
Etant donné que pour les micros entreprises (notamment
les PME), il existe très peu de cas de séparation entre la
fonction de gestion et celle de contrôle, (puisque dans presque la
totalité des cas, les chefs d'unités de production sont
propriétaires du capital qu'ils utilisent), la théorie des
contrats (agence) se justifie beaucoup plus en ce qui concerne les relations
entre l'entreprise et la banque. La valeur estimée de l'entreprise et au
delà, sa capacité d'endettement sera fonction du degré de
l'asymétrie d'information entre les deux partenaires.
Pour M. Jensen et W. Meckling (1985), la relation d'agence est
« un contrat dans lequel une ou plusieurs personnes ont recours aux
services d'une autre personne pour accomplir en leur nom une tâche
quelconque, ce qui implique une délégation de nature
décisionnelle ». Le principal (la banque) peut limiter les
conséquences négatives des divergences d'intérêts
avec l'agent (entreprise) par des incitations appropriées et des
dispositifs de contrôle.
Ainsi, d'après la théorie de l'agence, le
créancier est confronté a deux types d'incertitudes en
matière de prêt: «l 'aléa moral » dû au
fait que le débiteur peut changer de comportement une fois en possession
du prêt et la « sélection adverse » liée à
l'application par le créancier de conditions de prêts plus
onéreuses( taux d'intérêt et garantie ) obligeant les
emprunteurs a « risque moins élevé ~ a renoncer au
prêt, car les taux de rendement qu'ils anticipent sont relativement
faible.
Par ce procédé, la banque applique donc des
conditions de prêts pour « contrecarrer » le comportement
opportuniste des entreprises ; toute chose qui contraint leurs demandes de
financements.
Les Petites et Moyennes Entreprises de part donc leur
importance, revêtent plusieurs formes en fonction de leurs niveaux
d'investissement, de leurs chiffres d'affaires réalisés et du
nombre d'employés en leur sein. Elles éprouvent toutes au
quotidien des besoins qui font l'objet de demandes de financement auprès
des établissements financiers. Le choix de ces structures est le plus
souvent motivé par un comportement rationnel des entreprises, qui pour
autant doivent remplir certaines conditions pour l'obtention d'un financement.
L'approche théorique a permis essentiellement de se pencher sur les
différents concepts, à travers des réflexions
menées par quelques auteurs sur la relation banqueentreprise. Une
relation qui nécessite aussi le respect des conditions bancaires par les
entreprises. Toute fois, le financement des PME passe avant tout par une
analyse approfondie des dossiers, selon qu'il s'agisse d'un crédit
d'investissement, de fonctionnement ou d'un engagement par signature, et le
suivi d'une procédure établie à cet effet.
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