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Mortalité maternelle: cause et facteurs favorisants déterminés par l'autopsie verbale dans le département de Bakel.

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par Boubacar BARRY
Université cheikh Anta Diop de Daklar - Master de recherche 2008
  

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1-2 POSITION DU PROBLEME

Selon les chiffres les plus récents de l'Organisation Mondiale de la Santé, 529 000 femmes meurent chaque année de causes liées à la maternité et environ 50 millions de femmes sont victimes de complications liées à la grossesse et à l'accouchement [50].

C'est donc des milliers de femmes à travers le monde qui vivent la naissance d'un enfant non pas comme l'évènement heureux qu'il devrait être mais comme une épreuve qui peut même leur coûter la vie. Dans les pays en développement en particulier, la morbidité et la mortalité constituent une immense tragédie qui a été longtemps ignorée par les décideurs. Le continent africain est le plus touché où le risque est parfois 100 fois plus élevé que dans les pays industrialisés. Le taux de mortalité maternelle va de 830 pour 100 000 naissances vivantes dans les pays d'Afrique à 24 pour 100 000 naissances vivantes dans les pays d'Europe [38].

Face à ces chiffres alarmants, plusieurs conférences internationales ont eu lieu dans ces deux dernières décennies pour conjurer ce fléau qui frappe durement nos pays. C'est ainsi que l'Initiative pour la Maternité Sans Risque a été lancée en 1987 à Nairobi, dans le but de réduire la mortalité maternelle et néonatale trop élevées. Elle a attiré l'attention sur les rapports élevés de mortalité maternelle dans les pays en développement par rapport à ceux des pays riches. Cette initiative était renforcée en 1990 au Sommet Mondial pour l'Enfance.

Elle a été également réorientée à la Conférence Internationale pour la Population et le Développement (CIPD) en 1994 au Caire, puis renforcée en 1999 à la CIPD +5 à Beijing.

Lors du Sommet pour le Millénaire tenu en 2000, les Etats Membres des Nations Unies ont renouvelé leur ferme engagement à promouvoir la réduction de la mortalité maternelle. En effet, l'un des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) est la réduction aux 2/3 de la mortalité maternelle d'ici 2015. La maternité à moindre risque a ainsi été érigée au rang de priorité. De plus, la mortalité maternelle est devenue un des principaux indicateurs du programme de réduction de la pauvreté pour la communauté internationale, et les gouvernements du monde entier ont signé des conventions visant à réduire de manière importante les risques de mortalité maternelle. De nombreuses approches ont été développées pour la réduction de l'impact de la mortalité maternelle.

L'approche majoritairement représentée était celle étiologique, qui consiste à identifier les décès liés à la grossesse et à analyser la répartition de ces décès selon leurs causes. C'est ainsi

dans sa thèse « Détermination par l'autopsie verbale des causes de la mortalité maternelle chez les femmes en âge de procréer  à Niakhar », Dr Diallo J.P a souligné l'importance de connaître les taux de mortalité maternelle. Selon lui, pour être efficaces, les programmes doivent s'appuyer sur des données fiables c'est-à-dire une bonne connaissance des niveaux de mortalité maternelle afin de pouvoir mettre en place des programmes pour les réduire [15]. Cette approche appliquée depuis des décennies a fini de montrer ses limites car il ne suffit pas de connaître les niveaux de mortalité maternelle, mais nous avons besoins d'informations sur les causes et les facteurs profonds qui ont conduit à ces décès évitables. C'est la nouvelle approche développée par l'OMS qui estime dans  « Au-delà des nombres » qu'il est plus important de répondre aux questions pourquoi les femmes meurent-elles et que peut -on faire pour les éviter ? Que de connaître le niveau exact de la mortalité maternelle [49].

La mortalité maternelle s'est aussi enrichie d'une dimension sociologique qui considère les grands écarts entre les taux de mortalité maternelle des pays développés et ceux des pays en développement comme un indicateur de la différence et de l'inégalité entre homme et femme et son importance un révélateur de la place des femmes dans la société [9]. Selon les tenants de cette approche, les femmes continueront de mourir tant que la discrimination et le manque de considération dont elles sont victimes ne s'arrêtent pas.

L'UNFPA a opté pour une approche de la mortalité maternelle qui est axée sur les droits de la personne humaine, qu'il s'agisse de la priorité qu'il assigne à cette question ou de la conception et de l'application des politiques et programmes dans ce domaine. Comme pratiquement tous les cas de mortalité maternelle peuvent être évités, on peut invoquer les principes relatifs aux droits de la personne humaine pour dénoncer la persistance

de la mortalité maternelle et préconiser qu'il soit mis fin à cette injustice par le biais de l'accès universel à des soins qualifiés durant la grossesse et l'accouchement...[62].

En 2002, cependant, l'Assemblée générale des Nations Unies a reconnu que « malgré les progrès de certains pays, les taux de mortalité et de morbidité maternelles demeurent beaucoup trop élevés dans la plupart des pays en développement » [63]. Cette situation est particulièrement tragique en Afrique sub-saharienne, où une femme sur 13 meurt pour des raisons liées à la grossesse, contre une femme sur 4 085 dans les pays industrialisés. Certaines études en avaient donné la preuve patente. Au Sénégal l'utilisation de la méthode des soeurs a donné un taux moyen de 510 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes en 1992. Par la même méthode, le taux dans quatre pays africains a donné : Niger, 652 (1979-1992) ; Soudan, 456(1976-1989) ; Maroc, 348 (1979-1992) ; Namibie, 225 (1983-1992) [19].

Au niveau national, la mortalité liée à la grossesse et à l'accouchement constitue la première cause de décès chez les femmes en âge de procréer. Le ratio de mortalité maternelle qui est passé de 510 en 1992 (EDS II) à 401 en 2005 (EDS IV) pour 100 000 naissances vivantes reste encore préoccupant surtout dans les régions périphériques comme Kolda et Tambacounda très étendues, dont les structures sanitaires sont éloignées et / ou inaccessibles. Pour faire face à cette situation et honorer ses engagements vis-à-vis de la communauté internationale d'atteindre les Objectifs 4 et 5 du Millénaire pour le Développement, le gouvernement du Sénégal a élaboré une feuille de route multisectorielle. Son but est d'accélérer la réduction de la mortalité et de la morbidité maternelles et néonatales. Les objectifs généraux au nombre de deux visent d'ici 2015 à réduire de 510 à 200 pour 100 000 naissances vivantes le ratio de mortalité maternelle et de 34,9 à 16 pour 1000 la mortalité néonatale. Ainsi le ministère de la Santé et de la Prévention médicale a fait des efforts pour améliorer l'accessibilité des soins de qualité par des investissements massifs dans les infrastructures et dans les ressources humaines et des modifications organisationnelles et institutionnelles qui vont dans le sens d'une meilleure accessibilité des soins pour tous. Aujourd'hui, Il a été institué une gratuité des accouchements dans les cinq régions (Kolda, Matam, Ziguinchor, Fatick et Tambacounda) et celle des césariennes dans toutes les régions sauf Dakar. Les évacuations sanitaires du centre de santé vers le niveau de référence sont, par ailleurs, gratuites dans tout le territoire national. Au total, le ministère de la Santé et de la Prévention médicale a élaboré un plan d'accélération de la réduction de la mortalité maternelle et néonatale.

La région de Tambacounda dont appartient notre site d'étude, est après celle de Kolda la partie du Sénégal où le plus grand nombre de femmes meurent des suites de la grossesse et de l'accouchement. Le taux dans cette région est de 740 décès pour 100000 naissances vivantes selon les données hospitalières. Dans le district de Goudiry, le taux de mortalité maternité est de 810 pour 100 000 naissances vivantes [13]. Selon Dr GUEYE Babacar, le département de Bakel avait en 2000 un taux de mortalité maternelle atteignant 1734 pour 100 000 N V au niveau des structures sanitaires [16]. Pourquoi un taux aussi élevé alors que le département de Bakel dispose actuellement d'hôpitaux où l'on effectue des césariennes, des routes bitumées pour le relier soit à Tamba soit à Ourossogui qui disposent de SOUC et que grâce aux immigrés la situation économie s'est améliorée?

Il y a donc un problème qui ne serait pas dû seulement à un manque de services sanitaires mais à une combinaison de facteurs socioculturels et économiques à identifier pour redonner espoir aux femmes en âge de procréer de cette zone.

C'est dans ce sens que nous avons opté pour une étude communautaire par la méthode de l'autopsie verbale qui permet de déterminer les causes et de rechercher les facteurs personnels, familiaux ou dépendant de la communauté qui ont pu contribuer aux décès maternels. Il ne suffit pas de connaître les chiffres accablants de la mortalité maternelle mais nous avons besoin d'études, d'informations pour comprendre les facteurs profonds qui font que malgré les progrès scientifiques, techniques et technologiques, malgré les nombreux programmes de santé de la reproduction, pourquoi les femmes continuent de mourir en donnant la vie. Pour cela, nous avons opté pour le concept basé sur le modèle des trois retards qui tient compte des facteurs socioculturels, environnementaux, économiques et psychologiques influençant la mortalité maternelle dans ce département. Cette approche permet un meilleur ciblage des interventions pour répondre aux trois retards :

1. retard pour décider à recourir aux soins d'urgence.

2. retard pour atteindre un établissement de soins.

3. retard pour recevoir des soins de qualité dans l'établissement.

La réalisation de ce travail soulève un certain nombre de questions.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway