République du
Sénégal
Un Peuple - un But - une Foi
Université Gaston Berger de
Saint-Louis
U.F.R. des Sciences Juridique et
Politique
Sujet :
Présenté par
:
Moussa TRAORE
Sous la direction de :
Pr. Moussa ZAKI
Promotion 2009
Sommaire
Remerciements.........................................................................................II
Dédicaces................................................................................................III
In
memoriam...........................................................................................IV
Viatique..................................................................................................V
Liste des
abréviations...............................................................................VI
Introduction
générale.................................................................................1
Première partie :
La particularité des CST
Chapitre premier : La particularité des
règles de fonctionnement.............................9
Section première : Les
règles communes aux CST............................................9
Section II : Les règles
spécifiques à chaque
CST...............................................15
Chapitre II : La particularité du mode de
gestion.................................................23
Section première : Une
particularité sous-tendue par une modalité de description
dérogatoire..................................................................23
Section II : Une
particularité
relative............................................................28
Deuxième partie :
Les enjeux de l'institution des CST
Chapitre premier : Les avantages des
CST......................................................34
Section première : Les
avantages des CST dans le
procédé.................................34
Section II : Les avantages des
CST dans leur singularité.....................................39
Chapitre II : Les inconvénients des
CST...........................................................46
Section première : Les
difficultés de la saine gestion des finances publiques en cours
d'exécution..................................................................46
Section II : Les
difficultés du
contrôle.........................................................51
Conclusion.............................................................................................58
Bibliographie..........................................................................................60
Table des
matières...................................................................................64
Remerciements
Un grand Merci au Professeur ZAKI qui par son savoir et sa
disponibilité a su nous procurer un encadrement sans faille ;
A M. Mamadou TRAORE1(*), Directeur du cabinet d'expertise comptable
éponyme avec qui, discuter sur les comptes spéciaux du
Trésor a été plus que fructueux.
A notre oncle Saliou TRAORE qui n'a ménagé aucun
effort pour nous trouver un stage à la Direction Générale
de la Comptabilité Publique et du Trésor. Nous remercions au
passage M. le Ministre d'Etat Abdoulaye DIOP d'avoir bien voulu nous accepter
en stage dans l'une des Directions de son ministère.
A messieurs Amadou SOW et Mamoudou Moussa SOW de la Paierie
Générale du Trésor pour les informations qu'ils ont mises
à notre disposition
Nous témoignons à nouveau toute notre gratitude
à notre ami, frère et encadreur Mamané DJITTE ;
A tous ceux qui ont contribué à notre
formation.
Dédicaces
Par la grâce de Dieu, nous dédions ce travail
:
Ø A notre très chère maman. Merci pour
tout.
In memoriam
Par la grâce d'Allah :
Il est des hommes dont les noms resteront à jamais
inscrits en lettres capitales sur les pages de l'histoire, mais il est
également des hommes dont les noms demeureront pour toujours en
évidence dans les notes infrapaginales. Les premiers ont le
mérite d'avoir servi manifestement l'humanité et les seconds
d'avoir inspiré les premiers et contribué ainsi indirectement
à leur réussite. Parmi ces derniers nous rangeons notre oncle
Alioune MBOUP qui nous a brusquement quittés ce mois de juin 2009 alors
qu'il était à moins de six mois de la soutenance de sa
thèse de doctorat de Philosophie - Anthropologie religieuse
intitulée « Le Ndigël comme dispositif
d'intégration sociale des Mourides du Sénégal et de la
Diaspora »2(*) et
aux premières pages de laquelle on pouvait lire « Les
intellectuels de la nouvelle génération des disciples mourides,
doivent se faire le devoir d'obligation d'élever au sommet des pyramides
intellectuelles, culturelles, scientifiques, socio-économiques, le
Ndigël du vénéré guide spirituel Cheikh Mouhamadou
Bamba MBACKE, lumière intarissable susceptible d'éclairer le
destin de l'Afrique et de l'humanité toute
entière ». Une tâche à laquelle il
s'était attelé comme acteur et incitateur.
Par ces mots, nous lui rendons hommage et prions pour qu'Allah
lui fasse le privilège de l'admettre aux côtés du
prophète Mohammed (PSL) et de son incomparable serviteur Ahmadou Touba
(R.A.).
Viatique
« On peut être connaisseur et éloquent
sans être sage, parce que c'est l'oeuvre qui confirme la dimension de la
grandeur propre à ce don de Dieu »3(*).
Mourchid Souleymane SY
A tous les combattants pour la cause de Ashaboul Yamine
Liste des abréviations
CEPIA Caisse d'encouragement
à la pêche et à ses industries annexes
CST Comptes spéciaux
du Trésor
DMC Direction de la Monnaie et
du Crédit
éd.
édition
FNR Fonds national de
retraite
GDCC Grandes
Décisions du Conseil Constitutionnel
Ibid. Ibidem (au
même endroit = même page par exemple)
JORS Journal Officiel de la
République du Sénégal
LGDJ Librairie
Générale de Droit et de Jurisprudence
Loc. cit. Loco citato :
source (littéralement lieu) citée = utilisé pour les
articles
LOLF Loi Organique Relative
aux lois de Finances
Op. cit. Opere citato = ouvrage
cité
p. Page
RDP Revue du Droit
Public et de la science politique en France et à l'étranger
RFFP Revue française
de finances publiques
s.
suivant(e)(s)
UEMOA Union économique et
monétaire ouest-africaine
Introduction générale
Si l'importance des principes budgétaires
n'est plus à démontrer, il n'en demeure pas moins que leur
applicabilité rencontre des résistances compte tenu des
exceptions qui leur sont apportées. Ces exceptions juridiquement admises
et encadrées - et qui n'ont donc rien à voir avec les pratiques
frauduleuses qui correspondent à des violations pures et simples des
principes - peuvent être conjoncturelles ou structurelles. Dans le
premier cas, elles prennent la forme d'actes juridiques ayant pour objectif de
prendre en compte des opérations qui n'ont pas été
envisagées par les prévisions budgétaires initiales (lois
de finances rectificatives, décrets d'avances), ou encore
d'échelonner une autorisation budgétaire sur plus d'une
année (autorisations de programme). Dans le second cas, elles prennent
la forme de procédés d'individualisation de certaines gestions.
Ces techniques peuvent prendre la forme de services de l'Etat s'érigeant
en producteurs de biens ou prestataires de services en contrepartie du paiement
d'un prix ; ce sont les budgets annexes. Mais elles peuvent aussi
consister à décrire certaines opérations
spécifiques de l'Etat de nature différente de celles du budget
général ou rapprochant des recettes et dépenses d'une
même activité ; on est en présence des comptes
spéciaux du Trésor qui constituent le centre
d'intérêt de ce travail.
Les prémices de ces comptes se situent au
XIXe siècle (vers 1836) où ils constituaient avec les
budgets annexes les services spéciaux du Trésor. Mais à
pareille époque déjà, ces comptes s'étaient
singularisés puisque les services spéciaux du Trésor
opéraient une distinction entre les services rattachés au budget
général - coïncidant avec les budgets annexes - et les
services hors budget qui correspondaient aux CST. Ces derniers ont ensuite
évolué dans le temps en se dissociant des budgets annexes pour
obtenir un régime propre4(*) que le droit va essayer d'encadrer (inefficacement
pour ne pas dire en vain) durant toute la première moitié du
XXe siècle pour n'y parvenir qu'en 1959 avec l'ordonnance du
02 janvier portant loi organique relative aux lois de finances qui a
parachevé un processus entamé depuis 19475(*).
Les CST sont aujourd'hui régis en France par la loi
2001-692 du 1er août 2001 portant LOLF et au
Sénégal par la loi organique 2001-09 du 15 octobre 2001 relative
aux lois de finances en ses articles 24 et suivants. Le
Sénégal6(*) a
pour l'essentiel repris les mêmes dispositions que celles applicables aux
CST en France. Dans une perspective de droit comparé, la seule
différence qu'il faut noter, c'est que le Sénégal n'a pas
encore procédé à la récente réforme
effectuée par l'Hexagone qui a abouti à la
réduction7(*) d'une
catégorie et à la fusion de deux autres.
En dépit de la pléthore de textes intervenus
pour régir ces comptes, le législateur s'est jusqu'ici
contenté de les appréhender par la réalité qu'ils
recouvrent mais n'en donne pas une définition précise. Selon
certains auteurs - M. Raymond MUZELLEC notamment - le juge constitutionnel,
à travers sa décision n° 82-154 DC du 29 décembre
1982 portant examen de la loi de finances pour 1983 en a donné une
définition en ces termes : « établissement
d'une corrélation entre une recette de l'Etat et une dépense
incombant à celui-ci ». Cette tentative est
salutaire pour avoir saisi les CST par une de leurs caractéristiques
fondamentales mais elle ne reflète pas toute la réalité
que couvre cette notion. C'est à la doctrine que revient le
mérite d'avoir systématisé une définition
satisfaisante. Ils sont ainsi « des comptes ouverts dans les
écritures du Trésor pour retracer des opérations de
recettes et de dépenses réalisées en dehors du budget
général, par des services de l'Etat qui ne sont dotés ni
de la personnalité juridique, ni de l'autonomie financière et que
gèrent non des administrations particulières, mais les
ministères intéressés. »8(*).
Tels que présentés, les CST apparaissent comme
ayant pour seule vocation de ne pas se conformer aux principes
budgétaires. Certes leur souplesse de gestion (contrôle
parlementaire assoupli, reports de crédits) les expose à des abus
qui par le passé avaient atteint des proportions qui imposaient une
rationalisation de leur régime juridique qui, très poussée
en France, reste jusqu'à présent inachevée au
Sénégal. Toutefois, la mise sur pied d'un procédé
de spécialisation des comptes du Trésor répond à
quelques préoccupations.
D'une part, de par leur nature, ce sont des opérations
qui se différencient de celles du budget général par leur
caractère temporaire - ce sont souvent des encaissements destinés
à ressortir des caisses de l'Etat ou des décaissements
destinés à y retourner - qui justifie qu'elles soient
retracées en dehors du document budgétaire. Les exemples les plus
patents étant pour ce qui est des encaissements le dépôt de
cautionnement du comptable public qui à la fin de sa carrière lui
sera rétrocédé et concernant les décaissements les
avances que l'Etat accorde aux Collectivités locales et que ces
dernières restituent après être entrées en
possession de leurs revenus provenant des impositions locales. C'est donc une
opération qui avec le temps finit par ne plus laisser de traces et n'a
donc en principe aucune incidence sur le budget général comme le
défendent MM. GAUDEMET et MOLINIER : « l'idée
qui est à la base de la création des CST est que toute
entrée de fonds n'est pas nécessairement une recette, et que
toute sortie n'est pas une dépense. Dès lors, les mouvements de
fonds temporaires paraissent devoir être comptabilisés
séparément afin de donner plus de clarté au document
budgétaire. »9(*). Au-delà de la différence de nature,
l'intérêt d'accorder à ces comptes un régime
spécial réside dans la volonté d'éviter de fausser
les prévisions budgétaires.
D'autre part, les CST sont des comptes qui, en
méconnaissance du principe de l'universalité budgétaire, -
ce qui leur est juridiquement autorisé d'ailleurs - établissent
une corrélation entre certaines recettes et certaines dépenses
parce que dans plusieurs cas, il existe un lien évident entre elles. Il
est ainsi compréhensible que les retombées des activités
de la pêche (taxes sur les licences de pêche, cotisation des
industriels du secteur, amendes etc.) financent au moins pour une partie les
investissements de l'Etat dans le même secteur ou encore que les
cotisations des fonctionnaires en activité servent pour le
règlement des droits de pension des retraités10(*). Ce procédé
présente l'avantage de permettre une évaluation du coût et
du rendement de certains services de l'Etat.
Néanmoins, malgré les avatars qui les ont
caractérisés durant tout le XXe siècle, les CST
posent encore plusieurs problèmes. Si le législateur, pour
atténuer leur dérogation aux principes budgétaires et en
faire de simples aménagements11(*), tente de concilier par la même occasion leur
régime dérogatoire au droit commun aux impératifs du
contrôle parlementaire, il ne faut pas passer sous silence le fait que
sur certains points, la différence entre budget général et
CST n'est pas très tranchée comme le soulève le juge
français des comptes12(*). Un autre constat qui expose ces comptes à la
critique est constitué par leur composition disparate ; comme le
souligne d'ailleurs le professeur ORSONI, « depuis 2006
(coïncidant avec l'entrée en vigueur de la loi organique
2001-692 précitée), les CST posent moins de problèmes
par leur aménagement du principe d'unité que par leur
hétérogénéité »13(*).
Les CST, par l'entremise de deux des catégories qui les
composent à savoir les comptes d'avances et les comptes de prêts,
remettent sur la table la question de l'autonomie financière des
Collectivités locales au Sénégal. Les avances consenties
par l'Etat à ces dernières sont retracées par des comptes
débités automatiquement après l'émission par
l'ordonnateur local des rôles de l'année et qui doivent être
à nouveau crédités une fois le recouvrement
matériel effectué. Autrement dit, les Collectivités
locales, sur la base des revenus de l'année précédente ou
de la dernière gestion connue, empruntent à l'Etat 25% des
produits de la fiscalité directe au début de chacun des deux
trimestres de l'année financière remboursables au fur et à
mesure que les débiteurs se libèrent de leurs obligations envers
elles. En pratique, la quasi-totalité des avances se consolident en
prêts et leur paiement s'effectue sur une durée de trois à
quatre ans du fait des difficultés de recouvrement auxquelles sont
confrontées les autorités locales et ce ajouté à la
modicité des ressources qui leur sont allouées. Il faut
préciser que les Communes et les Départements en France sont
confrontées aux mêmes difficultés relativement au
règlement de ces avances sur impositions locales, mais à un
degré beaucoup moins important étant donné que les sommes
non recouvrées ne correspondent pas toujours à des admissions en
non valeur, mais il peut s'agir de dégrèvements qui sont donc la
volonté des autorités publiques. De surcroît, l'Etat
endosse à chaque fois la différence entre le produit voté
et le produit recouvré14(*).
En résumé, les CST présentent
effectivement une spécificité qui leur permette d'acquérir
un régime juridique propre et différent de celui du budget
général.
Les préoccupations se situeraient dès lors
à un autre niveau. Il s'agit en effet de savoir si cette
spécificité des CST recouvre une importance qui justifie que le
droit les encadre différemment des autres types de comptes ; en
d'autres termes, les CST disposent-ils d'une particularité qui
exige un régime juridique plus adéquat que celui auquel le budget
général est assujetti ?
Formulée de la sorte, la problématique requiert
une réponse qui ne tient qu'à la maîtrise du degré
de spécificité des CST. Autrement dit « jusqu'à
quelles proportions ces comptes sont-ils spéciaux ? ».
Ceci nous permettra de mesurer la particularité des CST et la
différence réelle entre les opérations qui en
dépendent et celles relevant du budget général. Et dans ce
sillage, il nous semble de prime abord que le régime juridique n'a fait
que concrétiser une différence de taille qui existait
déjà et était manifeste à maints égards,
même s'il existe quelques restrictions à une telle assertion.
Par ailleurs, se pose la question des conséquences que
les CST peuvent avoir sur l'exécution de la loi de finances voire sur
les finances publiques en général, du fait de ce régime
juridique spécifique15(*). N'oublions pas que la première étape
de cette étude a pour finalité de savoir si cette
particularité est suffisamment ancrée au point de réclamer
du droit un encadrement différent de celui du budget
général.
Si la réponse est affirmative, dans cette seconde
étape il sera question d'apprécier l'apport de ce régime
dérogatoire pour éventuellement - en comparaison avec le
régime des opérations budgétaires - savoir quel est le
régime le plus bénéfique pour les finances publiques. On
notera ici un apport qui présente des aspects positifs que l'on doit en
réalité à la spécificité du régime
juridique.
D'autre part, il ne faut pas perdre de vue l'effet
négatif de cet apport qui multiplie les critiques adressées aux
CST.
Les CST intègrent cette partie du droit
sénégalais où le mimétisme juridique l'a
emporté sur l'instauration d'un régime original adapté aux
réalités nationales. En toute logique, l'importation du
régime juridique français des CST a par incidence
transposé les mêmes difficultés pour ensuite inciter
à recourir à des solutions semblables16(*). Ce qui oriente
nécessairement notre démarche vers une analyse qui tantôt
fera appel au droit français pour trouver les véritables causes
de ces difficultés, tantôt se focalisera sur le droit
sénégalais pour en mesurer les conséquences. Bien entendu
nous ne manquerons pas de mettre en exergue l'innovation du
Sénégal avec l'institution d'une septième catégorie
de CST constituée par les comptes de garanties et d'avals.
La meilleure manière de jauger l'opportunité
d'une technique ou d'un procédé est de confronter les avantages
et les inconvénients. C'est dans cette perspective que
s'inscrit l'intérêt de la problématique. En effet,
au-delà de leur particularité et de leur impact sur
l'exécution de la loi de finances, c'est la question de l'existence des
CST qui est en jeu. En clair, cette confrontation pencherait-elle en faveur des
inconvénients - auquel cas l'efficacité du procédé
du compte spécial serait remise en cause - ou se solderait-elle par une
prééminence des avantages ; ce qui nous pousserait à
opter pour le maintien de ces comptes, même s'il faut continuer le
processus de rationalisation. La réponse qui émergera au sortir
de notre analyse contribuera à éclairer davantage sur le contenu
de la notion et s'avérera sans doute déterminante pour la
solution à adopter quant à l'avenir des CST.
Dans tous les cas, les CST présentent des
défaillances, et il sera nécessaire de transcender les fondements
théoriques sur lesquels ils reposent pour savoir si cela est imputable
aux textes qui les régissent ou à l'usage qu'en font les
ministères. Le fait est que si, nonobstant toutes les critiques dont ils
font l'objet de part et d'autre, ils subsistent encore, c'est parce que la
question de leur existence n'est pas seulement tributaire du bon vouloir des
autorités publiques. Leur maintien dans la sphère des finances
publiques est surtout sous-tendu par des considérations de
nécessité17(*). L'Etat ne peut pas ne pas tenir ces
opérations temporaires hors budget. Au demeurant, l'écrasante
majorité des critiques des CST admettent leur utilité ; ce
qui signifie que le procédé lui-même ne pose pas
problème18(*), par
conséquent, la liste des causes potentielles de ces
défectuosités se réduit à l'encadrement juridique
et l'aspect pratique. Ce qui signifie donc que même si les CST au
Sénégal et en France sont soumis à un régime
juridique semblable, toujours est-il qu'ils peuvent présenter les
mêmes problèmes avec des causes différentes.
Deux orientations majeures se dessinent au terme de ce
préliminaire. D'abord, nous nous appesantirons sur la
particularité des CST (première partie), avant
d'envisager ensuite leur impact sur les finances publiques à travers les
enjeux que suscite leur institution (deuxième
partie).
Première partie : La particularité
des CST
Pour donner une définition satisfaisante des CST, l'on
a souvent recours à la spécificité des opérations
retracées au regard du budget général.
Mais en quoi ces opérations se distinguent-elles des
autres ? La réponse à cette interrogation renvoie a priori
à leur nature :
- soit elles ne sont pas définitives et ne peuvent donc
être comptabilisées comme de réelles dépenses ou
recettes ;
- soit les recettes et dépenses sont dans une situation
de lien évident qui rend l'affectation des premières aux
dernières inévitable.
Dans tous les cas, cette différenciation d'avec les
opérations du budget général entraîne certaines
conséquences à la fois sur les règles de fonctionnement
(Chapitre Ier) et sur le mode gestion des
CST (Chapitre II).
Chapitre premier : La particularité des
règles de
fonctionnement
Les CST reposent sur un ensemble de règles qui en
constituent à la fois le domaine de définition et le cadre
juridique. Ces règles renseignent sur la particularité de ces
derniers puisqu'elles les déterminent dans leur
généralité et dans leur singularité.
Il y a donc des règles communes à tous les CST
(section première) et qui les distinguent des autres
comptes et des règles spécifiques à chaque
catégorie (section II) prise singulièrement et
qui renforcent la particularité des CST eu égard au budget
général tout en les différenciant les uns des autres.
Section première : Les règles
communes aux CST
Abstraction faite de l'interdiction d'y imputer des
dépenses de personnel, tout compte du Trésor qualifié de
spécial l'est au moins pour deux raisons : d'abord il est censé
retracer des opérations à caractère exceptionnel
(§1) ; ensuite il fonctionne sur la base d'une
corrélation entre recettes et dépenses
(§2).
§ 1. La description d'opérations
à caractère exceptionnel
Le cachet exceptionnel de ces opérations peut
revêtir deux formes : il peut être dû à une
différence de nature qui existe entre ces dernières et les
opérations relevant du budget général et qui est
matérialisée par leur caractère temporaire
(A). Les CST peuvent toutefois retracer des opérations
à caractère définitif (B) et dans ce cas
la particularité est à rechercher dans les moyens de financement
ou leur caractère secondaire compte tenu de la mission principale
assignée au service qui les effectue.
A - Les opérations à caractère
temporaire
La première préoccupation qui a
présidé à la mise en place de CST est la
nécessité pour l'Etat de prendre en compte des opérations
qui, contrairement à celles présentes dans le budget
général, ont cette singularité d'être
décrites « au-dessous de la ligne »19(*), c'est-à-dire
d'être temporaires. La première approche de la notion de CST
proposée par la plupart des auteurs est basée sur cet aspect. Il
en est ainsi du doyen DUVERGER qui atteste : « Certaines
dépenses publiques ont un caractère purement apparent : il
ne s'agit pas de véritables dépenses, mais de sorties provisoires
de fonds destinés à rentrer d'eux-mêmes dans les caisses de
l'Etat. (...). A l'inverse, certaines recettes sont également apparentes
et provisoires »20(*). A quelques exceptions près21(*), tous les CST retracent ce
genre d'opérations. En dehors des avances aux Collectivités
locales22(*), on peut
citer à titre d'illustration les avances sur salaire consenties par
l'Etat aux fonctionnaires à l'occasion des fêtes de Tabaski et
dont le remboursement s'effectue par défalcation mensuelle à la
source sur une durée de dix mois pour suivre encore le même
circuit un mois plus tard. Ce dernier exemple montre que la même somme
débloquée au départ par le Trésor retourne dans ses
caisses ; ce qui signifie que cette opération ne peut être
enregistrée comme une dépense. L'échéance pour le
remboursement total va coïncider avec l'approche du même
événement et ce montant va servir à nouveau
d'avance ; ce qui ne laisse pas à l'Etat la latitude de compter sur
ces fonds pour une autre destination. Ainsi, comme le fait remarquer monsieur
Maurice DUVERGER, « Ces comptes spéciaux sont, par
définition destinés à se clore d'eux-mêmes, lorsque
rentrent les fonds provisoirement sortis ou sortent les fonds provisoirement
rentrés »23(*).
Il faut cependant préciser que le caractère
provisoire n'est pas toujours aussi avéré qu'on le pense. Comme
le défendent les professeurs GAUDEMET et MOLINIER :
« Le caractère temporaire d'une sortie de fonds est
parfois douteux ; on prétend qu'il ne s'agit que d'une avance qui
sera suivie d'un remboursement, mais si le remboursement ne vient pas, l'avance
devient une véritable dépense. »24(*). Dans ce cas de figure, comme
pour les admissions en non valeur, les opérations dans les
prévisions n'étaient pas supposées avoir une incidence sur
le budget. Mais si nous nous intéressons de près au compte
d'émission des monnaies métalliques, l'Etat achète les
pièces fabriquées au coût de production et les revend
à l'institution d'émission au prix de leur valeur nominale. La
différence peut donc créer pour l'Etat des revenus (ce qui est
souvent le cas d'ailleurs) qui sont de véritables recettes et qui en
principe auraient dû figurer dans le budget. La même remarque reste
valable pour les prêts consentis par l'Etat aux particuliers étant
donné qu'ils sont grevés d'intérêts.
En somme, à opérations spéciales,
comptabilisation spéciale, et les opérations des CST le sont pour
le simple fait de ne pas constituer de réelles recettes ou
dépenses à l'image du budget, ce qui constitue une raison
suffisante pour ne pas les fondre dans ce dernier. Toutefois, l'aptitude de ces
comptes à être spéciaux n'est pas réductible
à ce premier caractère ; elle peut aussi se manifester pour
les opérations définitives.
B - Les opérations à caractère
définitif
Les CST n'ont pas pour seule vocation de retracer des
opérations à caractère provisoire. Ils peuvent en effet
décrire des mouvements de fonds de nature identique aux
opérations budgétaires. Dès lors, où se situerait
leur spécificité ? Qu'est-ce qui s'opposerait à leur
soumission à un régime de droit commun ? On peut faire appel
à deux cas de figure pour défendre la particularité de ces
comptes dans pareils cas.
Dans le premier cas, elle trouve son soubassement dans le
financement au moyen de ressources particulières. Il s'agit des comptes
d'affectations spéciales. Cette catégorie de CST se rapproche des
budgets annexes par le procédé mais au moment où les
activités de ces derniers sont financées par l'exploitation
industrielle et commerciale du service, les comptes d'affectations
spéciales disposent comme ressources de diverses contributions, taxes ou
redevances25(*). Pour ne
pas revenir sur les exemples du fonds national de la retraite et de la caisse
d'encouragement à la pêche et à ses industries annexes,
nous allons recourir au droit français. Le compte de gestion des
participations financières de l'Etat - prévu à l'article
21 de la loi 2001-692 portant LOLF - qui décrit les opérations de
nature patrimoniale est alimenté par les produits des cessions de titres
parts et droits de sociétés détenus directement ou
indirectement, des reversements, les produits de réduction de capital ou
de liquidation des remboursements d'avances d'actionnaires et les dotations en
capital26(*).
Dans le second cas de figure, les fondements de cette
particularité sont à rechercher dans la gestion
d'activités industrielles et commerciales tout comme les budgets
annexes, à la seule différence que la gestion est ici accessoire.
C'est ce que rend M. Mamadou DIOP en ces termes : « la
formule du compte spécial a été utilisée pour
déroger aux règles trop strictes de la comptabilité
publique, pour l'enregistrement d'opérations à caractère
industriel et commercial effectuées accessoirement par des services
publics non dotés de la personnalité
morale. »27(*). Ces opérations sont comptabilisées
dans les comptes de commerce. Nous avons en France en guise d'exemple le compte
Régie industrielle des établissements pénitentiaires. La
fonction principale ou première de ces établissements est
d'enfermer ou de priver de liberté les prévenus et
condamnés. Parallèlement à cette vocation, il peut arriver
que les détenus accomplissent des travaux (menuiserie, artisanat etc.)
dans une perspective de commercialisation. Les opérations
afférentes à cette activité seront retracées par ce
compte. Contrairement à ce qui se passe avec le budget, l'Etat ne peut
pas baser ses prévisions sur ces opérations pour la simple et
bonne raison que les services qui tiennent ces comptes ne sont pas
censés générer des recettes ou supporter des charges. On
ne peut pas s'en prendre au responsable d'un pénitencier parce qu'il n'a
pas satisfait à l'obligation de tenir une comptabilité alors que
pour le budget, les comptables publics sont considérés
responsables des sommes à recouvrer puisque sur la base des
prévisions budgétaires, l'Etat les considère comme des
montants disponibles.
A côté des opérations temporaires,
certaines opérations définitives occupent une place de choix dans
les CST. La spécificité de ces derniers y est perceptible non
plus du fait de la nature de ces opérations, mais par la provenance des
ressources, exceptionnelles au regard de la mission principale des services qui
les gèrent ou particulières parce que connues d'avance.
En somme, la différence entre comptes
budgétaires et CST ne passe pas inaperçue en tout cas si l'on
s'en tient aux opérations qu'ils retracent. Et cette différence
peut être inhérente aux opérations elles-mêmes
(nature) ou conforme ou non au principe de la non-affectation qui se traduit
par une corrélation entre recettes et dépenses et qui
mérite qu'on s'y intéresse davantage.
§ 2. La corrélation entre recettes
et dépenses
Une autre spécificité des CST consiste à
établir un lien direct entre recettes et dépenses soit par le
procédé de l'affectation (A), soit par
l'auto-approvisionnement du compte, c'est-à-dire par système
revolving (B).
A - L'affectation de certaines recettes à
certaines dépenses
En méconnaissance du principe de l'universalité
budgétaire qui voudrait que l'ensemble des recettes de l'Etat finance la
totalité de ses dépenses, les CST, pour les dépenses
qu'ils effectuent, ont cette caractéristique de disposer de ressources
dont les origines sont connues et qui leur sont exclusivement
réservées. Comme le soulignent le professeur BOUVIER et alii,
« La procédure des CST est dérogatoire au droit
commun, notamment parce que l'affectation et le report de crédits y sont
la règle. »28(*).
Dans presque tous les textes constitutifs ou d'application
d'un compte dit spécial, il est énuméré la liste
des ressources destinées à servir exclusivement et uniquement au
règlement des dépenses prévues par le même compte.
Ainsi, le décret 79-1151 du 17 décembre 1979 fixant les
règles d'organisation et de fonctionnement du compte d'affectation
spéciale dénommé fonds d'aide au sport et à
l'éducation populaire29(*) énumère en son article 9 l'ensemble des
recettes comptabilisées par le compte et qui sont destinées
à financer uniquement les dépenses prévues à
l'article 14. Ce choix des autorités publiques trouve ses motivations
dans des considérations de nécessité. En effet, la
particularité des CST apparaît en évidence étant
donné que l'Etat ne peut pas inscrire dans le budget - qui est un
document de prévision de l'ensemble des ressources dont l'Etat peut
disposer pour financer n'importe quelle dépense figurant dans la masse
des charges - une recette sur laquelle il ne peut plus compter parce que
déjà imputée. De même tenter de prendre en compte
une dépense dont le règlement est prévu à plus ou
moins brève échéance par une recette
extrabudgétaire aurait à juste titre des apparences frauduleuses
pour le parlementaire examinant la loi de finances. Ce contrôle exige
donc, pour ne pas fausser le document budgétaire, que ces recettes tout
comme les dépenses qu'elles couvrent soient retracées dans des
comptes ad hoc. D'un autre côté, cette affectation présente
l'avantage d'exposer moins que pour le budget, les dépenses des CST
à des problèmes de disponibilité.
En définitive, M. Mamadou DIOP résume bien nos
propos lorsqu'il affirme : « Le procédé du
compte spécial a pu servir à dégager de la masse du budget
les résultats d'une activité publique particulière pour
laquelle l'Etat établit des ressources spéciales ou
affectées à un objet particulier. »30(*).
Donc vu sous l'angle des recettes, cette corrélation
vise à extraire du pouvoir d'affectation discrétionnaire de
l'Etat des ressources utilisées de droit pour les seules dépenses
d'une activité donnée. Il serait cependant intéressant de
l'analyser du point de vue des dépenses.
B - L'approvisionnement des comptes par système
revolving
Le système revolving est un terme emprunté
à la terminologie bancaire où il qualifie un crédit qui se
présente comme une réserve d'argent permanente qui se renouvelle
partiellement au fil des remboursements de son souscripteur. Le montant dont
dispose ce dernier est déterminé en fonction de ses besoins et de
sa capacité de remboursement.
Dans le jargon des agents de la Direction
Générale de la Comptabilité publique et du Trésor,
il recouvre la même réalité, à la seule
différence qu'aux mots prêt et remboursement se substituent
respectivement dépenses et recettes. Ainsi, ce sont les dépenses
qui se chargent de générer les recettes. Les comptes d'avances et
les comptes de prêts fonctionnent dans leur ensemble sur la base de ce
système. En dehors des avances consenties aux Collectivités
locales et aux particuliers, nous avons le compte de prêts DMC auquel les
fonctionnaires ont souvent recours pour concrétiser leur projet de
construction de logement. Le prêt accordé par la DMC est fonction
de la capacité du fonctionnaire à rembourser31(*) et de la hauteur du montant
demandé. Ce sont les remboursements mensuels qui vont venir alimenter
à nouveau le compte et permettre de nouveaux prêts32(*). Le fonds national de retraite
obéit au même principe mais avec une certaine originalité.
Contrairement aux autres comptes où les décaissements
précédent les encaissements, dans le cadre du FNR, les
fonctionnaires actifs cotisent en réalité pour les
retraités. Mais dans le fondement, c'est pour eux-mêmes qu'ils
épargnent puisque cette somme va leur revenir par tranche à la
fin de leur carrière. L'importance de la somme qu'ils vont percevoir
n'est plus fonction des revenus qu'ils sont susceptibles d'avoir, mais de
revenus qu'ils ont déjà. Donc le mot clef qui résume cette
situation est la solvabilité ou la capacité de la dépense
à générer une recette au moins équivalente.
Dans ce second aspect de la corrélation, nous pouvons
affirmer qu'une dépense n'est effectuée qu'à la condition
sine qua non qu'elle retournera sous forme de recette dans les caisses des CST.
Donc autant il est possible d'utiliser des recettes pour effectuer des
dépenses, autant il est possible d'effectuer une dépense pour
générer des ressources.
En résumé, les CST dans leur
généralité manifestent des caractéristiques qui
leur sont propres ; ce qui nous pousse à admettre une dose de
particularité non négligeable aussi bien du point de vue
matériel, (les opérations retracées), que du point vue
formel, (la possibilité de présenter leur contenu sur la base
d'une affectation des recettes aux dépenses).
En marge de cette spécificité du régime
juridique du procédé du CST, il existe des règles qui
permettent de les distinguer les un des autres et qui aboutit à leur
catégorisation.
Section II : Les règles spécifiques
à chaque CST
Chaque type de compte spécial comporte, en sus des
opérations exceptionnelles et de la corrélation entre recettes et
dépenses, des caractéristiques qui contribuent à le
différencier davantage du budget général, qu'il soit
doté de crédits de dépenses (§1) ou
d'autorisation de découvert (§2)33(*).
§ 1. Les CST dotés de
crédits de dépenses
Ils relèvent de quatre catégories : il
s'agit des comptes d'affectation spéciale (A), des
comptes d'avances (B), des comptes de prêts (C)
et des comptes de garanties et d'avals (D).
A - Les comptes d'affection spéciale
Suivant les dispositions de l'article 26 de la loi 2001-09
portant LOLF, « Les comptes d'affectation spéciale
retracent des opérations qui, par suite d'une disposition de loi de
finances prise sur l'initiative du Gouvernement, sont financées au moyen
de ressources particulières ». La nomenclature du budget
sénégalais en répertorie quatre que sont le FNR, la CEPIA,
le fonds de lutte contre l'incendie et le compte dénommé frais de
contrôle des sociétés à participation publique.
C'est une catégorie qui se singularise pour deux
raisons : parce que décrivant d'une part des opérations de
nature identique à celles du budget général,
c'est-à-dire définitives et d'autre part parce que
procédant par affectation entre recettes et dépenses. Cette
affectation doit être sous-tendue par l'existence d'un lien direct comme
le précisent les dispositions de l'article 21 de la loi organique
2001-692. Cette mesure est une innovation de la nouvelle LOLF française.
On a pu remarquer par le passé des rapprochements entre ressources et
charges qui n'avaient rien en commun si ce n'est d'être
enregistrées par le même compte. Nous avons l'exemple du pari
mutuel urbain qui alimentait le fonds national de l'eau.
Si la notion de lien direct est assez précise pour que
ces transferts soient considérés comme illégaux, elle
l'est parfois moins pour des cas qui interpellent le juge
constitutionnel ; ce qui pour des auteurs comme M. MUZELLEC n'en fait pas
moins une consécration pertinente puisque « le
législateur a entendu limiter les possibilités de
dérogation à la règle de non-affectation des recettes au
sein du budget de l'Etat sans pour autant faire obstacle aux exigences de bonne
gestion des ressources. »34(*).
Un autre élément caractéristique des
comptes d'affectation spéciale est qu'ils doivent être
exécutés en équilibre comme le précise le second
alinéa de l'article 26 « Le total des dépenses
engagées ou ordonnancées au titre d'un compte d'affectation
spéciale ne peut excéder le total des recettes du même
compte », exception faite de trois premiers mois suivant sa
création et où le découvert ne peut être
supérieur au quart des dépenses autorisées pour
l'année. Il faut cependant préciser que malgré ces
dispositions, ces comptes sont rarement exécutés en
équilibre. S'il arrive que les recettes d'un compte d'affectation
spéciale soient supérieures à ce qui était
prévu, le ministre chargé des finances peut procéder
à une majoration de crédits dans la limite de ce surplus.
Bref, les comptes d'affectation spéciale bien
qu'étant une exception au principe qui voudrait que les CST
comptabilisent des opérations temporaires35(*) n'en regorgent pas moins une
particularité. Cette singularité ne leur est pas
spécifique, étant donné que même les
catégories de comptes provisoires se distinguent les uns des
autres : c'est dans ces dernières qu'il faut ranger les comptes
d'avances.
B - Les comptes d'avances
Ils décrivent à la lumière de l'article
29 de la loi organique 2001-09 « les avances que le Ministre
chargé des Finances est autorisé à consentir dans la
limite des crédits ouverts à cet effet. ». Peuvent
en bénéficier sur une durée d'un an renouvelable une fois,
les établissements publics, les Collectivités locales, divers
organismes, les particuliers ainsi que les budgets et comptes.
Cette catégorie doit satisfaire à deux
conditions hormis celle de la durée. Il s'agit de :
- L'ouverture d'un compte distinct pour chaque
bénéficiaire ou catégorie de
bénéficiaires ;
- La production d'intérêts dont le taux,
fixé par la décision d'avance, ne peut être
inférieur au taux d'escompte de la Banque centrale (ou aux obligations
et bons du Trésor36(*) dans la législation française).
Les avances doivent faire l'objet d'un remboursement total
avant l'expiration du délai d'un an ou de deux ans en cas de
renouvellement. A défaut, le débiteur, suivant ses
possibilités, peut faire l'objet d'une décision de recouvrement
immédiat ou de poursuites effectives dans un délai de trois mois
(cas ou le non-paiement s'apparente plus à un refus qu'à une
insolvabilité immédiate), s'il semble être de bonne foi, la
somme avancée ou restant à payer fera l'objet d'une constatation
de perte probable imputée aux résultats de l'année. Ce qui
pour autant n'éteint pas la dette, le débiteur aussitôt
qu'il aura le montant dû à sa disposition devra s'en acquitter.
Etant donné que le compte a été clos, cette somme sera
dès lors enregistrée dans les recettes du budget
général.
Le débiteur peut cependant bénéficier
d'une autorisation de consolidation qui transfert son compte dans la
catégorie des prêts.
C - Les comptes de prêts
Ils sont prévus par l'article 30 de la LOLF
sénégalaise qui les appréhende comme retraçant
« les prêts d'une durée supérieure à
deux ans consentis par l'Etat dans la limite des crédits ouverts
à cet effet, soit à titre d'opérations nouvelles, soit
à titre de consolidation ». Le compte de prêt peut
donc être ouvert au profit d'un demandeur après avis favorable
comme il peut résulter de la prorogation de l'échéance de
remboursement d'une avance. C'est une catégorie qui fonctionne dans les
mêmes termes que la précédente - mêmes conditions
d'ouverture d'un compte distinct pour chaque bénéficiaire ou
catégorie de bénéficiaires, de production
d'intérêt supérieur au taux d'escompte de la Banque
centrale37(*) - une seule
différence étant perceptible relativement à leur
durée. Tout comme pour les comptes d'avances, dans chaque compte
particulier, sont enregistrés en recettes le montant annuel des
remboursements (capital + intérêts) et en
dépenses la somme prêtée. L'article 30 précise en
outre que « Le montant de l'amortissement en capital des
prêts de l'Etat est pris en recettes au compte de prêts
intéressés. ». Par le passé, les
intérêts issus de ce compte ont pu servir à créditer
un autre CST dénommé « Caisse autonome
d'amortissement »38(*).
Cette catégorie polarise les prêts et
consolidations des avances en prêts des bénéficiaires
potentiels des comptes d'avances. Ces deux comptes, à eux seuls
résument la fonction de banquier du Trésor. En dehors de leur
durée, il n'existe pratiquement pas de différence entre les
comptes de prêts et les comptes d'avances. C'est pourquoi la France a
procédé en 2001 avec la LOLF à leur fusion sous
l'appellation de comptes de concours financiers et le plus important reste sans
nul doute le compte retraçant les avances consenties par l'Etat aux
Collectivités territoriales.
Cette différence d'avec le Sénégal doit
être cependant considérée comme mineure à
côté de l'institution par ce dernier d'une catégorie -
jusqu'ici inconnue de la législation française en matière
de CST - prenant en compte les garanties et avals de l'Etat.
D - Les comptes de garanties et d'avals
C'est une innovation de l'UEMOA, du régime
sénégalais ou même ouest africain des CST. Ils sont
prévus et organisés par l'article 31 qui stipule :
« Les comptes de garanties et d'avals retracent les engagements
de l'Etat résultant des garanties financières accordées
par lui à une personne physique ou morale. ». L'Etat se
porte donc garant pour cautionner des prêts souscrits par une personne
physique ou morale auprès des structures financières. Tout avis
favorable (octroyé par décret après avis du Ministre
chargé des Finances) à une demande de garantie donne droit
à l'ouverture d'un compte particulier pour chaque opération.
Ce compte est alimenté par une dotation
budgétaire correspondant à 10% du total des
échéances annuelles dues aux organismes prêteurs par les
bénéficiaires du compte sous la responsabilité de l'Etat.
Toutefois, comme le souligne le docteur CHANH TAM, « Les
garanties et avals ne constituent pas, à vrai dire, une charge
immédiate pour l'Etat si tout se passe normalement. Cette charge serait
effective si l'emprunteur était défaillant à
l'échéance du prêt. »39(*). Dans ce cas bien
précis, le compte particulier enregistre en débit le montant de
l'échéance. Il revient au bénéficiaire de solder le
compte dans un délai strictement inférieur à deux ans,
sous peine de faire l'objet d'une décision de recouvrement
immédiat avec des poursuites à l'appui. Si le débiteur est
de bonne foi, cela peut aboutir à la constatation d'une perte
imputée aux résultats de l'année.
Dans le procédé, cette catégorie se
rapproche des comptes de prêts précisément en cas de
défaillance du bénéficiaire des garanties. La majeure
partie des praticiens de la comptabilité publique prônent la
suppression des comptes de garanties et d'avals puisque l'Etat lui-même
n'est plus assez crédible pour que les banques et institutions
financières acceptent de prêter sous sa
responsabilité40(*). Le législateur a franchi une étape
dans ce sens puisque la loi de finances pour 2009 a procédé
à la suspension de cette catégorie, reste à savoir si elle
sera restaurée41(*)
ou pas. N'empêche ce compte est très avantageux pour les personnes
désireuses d'investir et ne disposant pas de nantissement pour l'emprunt
des fonds nécessaires.
Pour ce premier lot regroupant les comptes disposant de
crédits votés en loi de finances avec un caractère
limitatif, il faut admettre que même s'il existe des similitudes entre
certains CST, ils ont tous sans exception une spécificité qui les
distingue davantage du budget malgré le fait que ce sont les seuls qui
se conforment à la règle de la présentation en brut. Cette
spécificité est d'autant plus accrue avec les catégories
qui dérogent à ce démembrement du principe
d'universalité.
§ 2. Les CST dotés d'autorisation
de découvert42(*)
Ce sont des comptes dont les prévisions de
dépenses ont un caractère évaluatif. Pour remédier
à cela, il leur est annuellement fixé un découvert
à caractère limitatif. Il s'agit notamment des comptes de
commerce (A), des comptes d'opérations
monétaires (B) et des comptes de règlement avec
les Gouvernements et autres organismes étrangers
(C).
A - Les comptes de commerce
L'article 27 de la LOLF sénégalaise de 2001 les
décrit comme des comptes retraçant « des
opérations à caractère industriel et commercial
effectuées à titre accessoire par des services publics de
l'Etat ». Ces opérations sont donc
réalisées par des services dont ce n'est pas la vocation
première. Il en est ainsi en France du CST « Opérations
commerciales des Domaines » avec les ventes immobilières et
les retombées de la gestion des immeubles domaniaux qui ne constituent
pas sa mission principale mais qui en sont tout de même connexes. Nous
avons au Sénégal le compte « Opérations des
établissements financiers à caractère industriel et
commercial », mais surtout celui intitulé opérations
à caractère industriel et commercial effectuées par
l'armée qui est régi par l'arrêté
interministériel n° 5268 MEF/DGT/TG du 26 mai 198243(*).
Du fait de leur caractère incertain et
imprévisible, leurs prévisions en recettes et en dépenses
sont juste indicatives dans un souci d'assouplir leur gestion. Il existe
cependant quelques restrictions relatives aux opérations
comptabilisées ; celles-ci ne peuvent en effet comporter des
investissements financiers, avances, prêts ou encore emprunts sauf
dérogation expresse d'une loi de finances (article 27). Cette
catégorie se singularise par l'assujettissement des résultats
annuels établis pour chaque compte au Plan comptable
général ; comme le souligne M. PROVENSAL,
« Les comptes de commerce s'écartent par ailleurs, du
principe de la spécialisation des dépenses par
nature. »44(*).
Les opérations des comptes de commerce comportent donc
cette particularité, en plus d'être retracées par un CST,
de reposer sur des aléas, parce que « dépendant
dans une large mesure des circonstances »45(*) et d'occuper une place
accessoire au regard de la mission dévolue au service qui les effectue
(ce qui d'ailleurs les distingue des budgets annexes). Cette catégorie
n'est pas cependant la seule dotée d'autorisation de découvert. A
côté d'elle, il y a les comptes de règlement avec les
Gouvernements et autres organismes étrangers.
B - Les comptes de règlement avec les
Gouvernements et autres organismes étrangers
L'article 28 alinéa 1 de la LOLF
sénégalaise de 2001 dispose : « Les comptes de
règlement avec les Gouvernements et autres organismes étrangers
retracent des opérations faites en application d'accords internationaux
approuvés par la loi ». C'est une catégorie qui
bénéficie de la même souplesse que la
précédente car ne présentant aucune prévision
même évaluative en loi de finances. Le Conseil constitutionnel
français a d'ailleurs tranché en faveur de ce régime avec
sa décision n° 75-60 DC du 30 décembre 1975 en admettant que
les accords dont il était question « ne peuvent être
prévus de manière précise au moment du vote, mais font
l'objet de comptes rendus complets permettant de fixer la demande de
découvert pour l'année suivante, mettant ainsi le Parlement en
mesure d'exercer le contrôle qui lui appartient
(...) »46(*).
Ce compte a pu servir de consolidation des dettes commerciales
de certains pays étrangers vis-à-vis de la France avant de
disparaître avec l'avènement de la loi organique 2001-692. Au
Sénégal, jusqu'en 2007 on a pu répertorier l'accord
sénégalo-mauritanien entre services du Trésor et l'accord
avec le Trésor français, mais il est actuellement en veilleuse et
est destiné à subir le même sort qu'en France47(*).
Les comptes de règlement avec les Gouvernements et
autres organismes étrangers comportent une particularité au sein
des CST en ce qu'ils font prévaloir des considérations de
discrétion sur une bonne gestion comme le rappellent certains auteurs
« Il y a là une zone de pénombre justifiée
en principe par les nécessités de l'action diplomatique ou
militaire, qui rend difficile le contrôle
parlementaire »48(*). Ils se rapprochent cependant du point de vue de leur
régime des comptes d'opérations monétaires.
C - Les comptes d'opérations
monétaires49(*)
Comme leur nom l'indique, ce sont des comptes qui
« enregistrent des recettes et dépenses de
caractère monétaire » (article 29 alinéa 2
de la loi 2001-09). Actuellement, il n'y a que le compte pertes et profits de
change qui est inscrit dans cette catégorie de CST. On le retrouve aussi
en France et il comptabilise essentiellement les recettes et dépenses
issues de la prise en charge par le Trésor des pertes et
bénéfices de change réalisés par le fonds de
stabilisation des changes ou constatés dans les écritures du
Trésor.
A côté, il y a le compte retraçant les
opérations avec le FMI et le compte d'émission de monnaies
métalliques qui procède à l'achat des pièces
fabriquées au coût de leur production pour les revendre à
l'institution d'émission au prix de leur valeur nominale. C'est donc une
opération qui est susceptible de générer des
bénéfices pour l'Etat.
Il faut enfin souligner que les comptes d'opérations
monétaires, dans leur création, laissent à l'Etat une
marge de manoeuvre restreinte50(*) à cause du caractère précis de
leur objet ; ce qui constitue d'ailleurs leur seule
spécificité en dehors de leur statut de compte spécial.
A la différence des comptes dotés de
crédits de dépenses, ces trois catégories de CST doivent
leur singularité plus à leur objet qu'à leur
procédé. Les incidences restent toutefois les mêmes ;
on ne saurait ne pas les différencier du budget général au
risque de se retrouver avec un document aux opérations et règles
hétéroclites. Si on s'en limite donc aux règles de
fonctionnement, les CST regorgent effectivement une particularité
très ancrée aussi bien dans leur globalité que par
catégorie de comptes. Pour une vision panoramique de cette
particularité, nous ne pouvons cependant nous contenter de l'analyse des
ces seules règles, il nous faudra en outre nous intéresser au
mode de gestion des CST.
Chapitre II : La particularité du mode de
gestion
Cette seconde particularité n'est qu'une
conséquence de la première. En effet, étant donné
qu'il existe une différence de taille entre les opérations
retracées par les CST et celles du budget général, il est
tout à fait admissible que les deux types de comptes soient
gérés de manière différente. Cependant, nonobstant
cette différence, il ne faudrait pas perdre de vue que les CST retracent
des deniers publics et qu'à ce titre, en vertu de l'article 1551(*) de la déclaration des
droits de l'Homme et du citoyen, ils sont soumis à un contrôle
à la fois administratif et politique qui les rapproche du budget
général.
C'est donc une particularité que nous qualifierons de
prime abord d'incontestable (section première) ;
épithète qui n'est cependant pas synonyme d'absolu puisque dans
une certaine mesure, cette particularité demeure relative
(section II).
Section première : Une particularité
sous-tendue par une modalité de description dérogatoire
Tout comme pour les règles de fonctionnement, la
particularité du mode de gestion ne peut être
appréciée qu'à la lumière du budget qui constitue
la norme ou le cadre de référence en matière de
prévision des opérations financières de l'Etat. Dans cette
perspective, on peut dire que les CST font l'objet d'une gestion aux antipodes
des règles budgétaires (§1) et en dehors du
document budgétaire (§2).
§ 1. Une gestion en dehors des
règles budgétaires
Les CST ont cette particularité d'être affranchis
de certains principes budgétaires52(*) dont principalement l'universalité et
l'annualité. Respectivement le non-respect de la première se
manifeste par la contraction entre recettes et dépenses
(A) et la méconnaissance de la seconde par les reports
de crédits (B).
A - La contraction entre recettes et
dépenses53(*)
Il faut d'emblée préciser que ce ne sont pas
tous les CST qui dérogent à ce principe classique du droit
budgétaire54(*).
Ainsi, les comptes de commerce, les comptes de règlement avec les
Gouvernements et autres organismes étrangers et les comptes
d'opérations monétaires sont autorisés à
présenter leurs recettes et dépenses en net. Pour ces trois
catégories de comptes, il n'est mentionné qu'une autorisation de
découvert55(*),
correspondant donc au résultat d'une compensation entre les
dépenses et les recettes. Ce qui s'inscrit en faux avec la règle
du produit brut qui est une composante du principe de l'universalité -
l'autre étant la non-affectation - et qui voudrait qu'il ne soit
procédé à aucune contraction entre certaines ressources et
certaines charges. Ces catégories ont ainsi la latitude de contracter
les dépenses et les recettes de telle sorte que celles-ci ne figurent
pas en détail dans la loi de finances. Mieux, l'évaluation des
recettes et dépenses reste facultative. C'est dans ce sens qu'il faut
comprendre les propos du professeur DI MALTA lorsqu'il affirme :
« Pour chacune des trois catégories de comptes, la seule
donnée chiffrée inscrite au tableau d'équilibre
général de la loi de finances est constituée par le solde
net des opérations de l'ensemble des comptes de la catégorie. Ce
solde s'inscrit dans la colonne « Plafond des charges à
caractère temporaire ». Dans l'hypothèse où une
compensation des recettes et des charges aboutit à un excédent
net des recettes, celui-ci figure néanmoins dans ladite colonne, mais
précédé du signe moins ( - ) »56(*).
Derrière la description d'opérations à
caractère exceptionnel, la compensation entre recettes et
dépenses occupe une place de choix dans les raisons qui ont
poussé le législateur à opter pour la présentation
de ces comptes hors budget. C'est ainsi que M. PAYSANT fait
référence à la nécessité d'une tenue
extrabudgétaire de ces opérations étayée par le
non-respect du principe d'universalité57(*).
Si toutefois cet aménagement à la règle
du produit brut ne vaut que pour une partie des CST, il en existe un autre qui
s'érige en principe dans la gestion de tous les comptes dits
spéciaux : il s'agit des reports de crédits.
B - Les reports de crédits
Si en termes de durée, ce qui caractérise le
budget général c'est d'être exécuté sur une
année, les CST dans le principe font l'objet d'une gestion
pluriannuelle. L'alinéa 2 de l'article 25 de la LOLF
sénégalaise de 2001 stipule dans ce sens :
« Sauf dispositions contraires prévues par une loi de
finances, le solde de chaque compte spécial est reporté
d'année en année. ». Cette disposition
déroge à l'alinéa premier du même article qui
précise : « Sous réserve des règles
particulières énoncées aux articles 26 à 31, les
opérations des comptes spéciaux du Trésor sont
prévues, autorisées et exécutées dans les
mêmes conditions que les opérations du budget
général » et sur la base duquel la loi de finances
contient chaque année un tableau de toutes les opérations
imputables à un compte spécial. Il y a donc une
« automaticité des reports » pour reprendre les mots
du professeur ORSONI.
Les reports de crédits constituent un obstacle majeur
à l'exercice du contrôle parlementaire sur les recettes et les
dépenses des CST58(*), a priori l'autorisation annuelle préalable
fait défaut et a posteriori les vérifications sur une gestion
pluriannuelle restent difficiles.
Au-delà des dérogations aux principes du droit
budgétaire admises par le législateur, il faut comprendre une
volonté d'instaurer un régime souple pour les CST vu la
spécificité des opérations qu'ils retracent. Toutefois,
autant ces derniers s'affirment dans leur particularité, autant le
Parlement y est lésé relativement à son pouvoir de
contrôle. Toujours dans le sens de cette spécificité, en
sus d'une autorisation de ne pas se conformer à certaines règles
budgétaires, les CST vont acquérir une autonomie formelle eu
égard au document budgétaire.
§ 2. Une gestion en dehors du document
budgétaire
Tout comme les budgets annexes, les comptes spéciaux,
dans leur gestion sont départis du document du budget
général (A). Cependant, cette autonomie, du fait
des deniers publics qui sont retracés par ces comptes, ne saurait
être aussi poussée que pour les budgets autonomes
(B).
A - Une gestion particulière au regard du budget
général
Le budget général polarise plusieurs comptes
numérotés suivant les règles de la comptabilité
publique auxquels il convient de soustraire la série 96 au
Sénégal et 902 en France à côté des budgets
annexes. On a déjà mentionné le non-respect des principes
budgétaires mais le premier principe auquel les comptes spéciaux
dérogent est le principe d'unité budgétaire. C'est ainsi
qu'on a eu recours à la notion de loi de finances pour annexer ces
comptes au budget général, d'où les propos du professeur
ORSONI : un « procédé particulier de
débudgétisation visant à :
- mieux satisfaire à la recherche de
l'équilibre budgétaire et à l'objectif de maîtrise
de la dépense ;
- soustraire au contrôle parlementaire un certain
nombre d'opérations. »59(*).
La première particularité est donc
afférente au contrôle parlementaire qui même s'il a
été instauré avec l'introduction des CST dans le corpus de
la loi de finances avec l'ordonnance française du 02 janvier 1959, n'en
demeure pas moins assoupli. Et ceci ajouté aux aménagements
prévus pour certaines règles budgétaires (voir supra)
offre aux CST une souplesse de gestion dont le budget général ne
dispose pas.
La gestion des CST, eu égard à celle du budget
général présente quelques particularités
incontestables. La même remarque peut être faite au sortir d'une
comparaison avec les budgets autonomes.
B - Une gestion particulière au regard des
budgets autonomes
Les comptes des organismes dotés de la
personnalité morale et assurant une mission de service public sont
incorporés dans leur propre budget et ne figurent pas dans la loi de
finances. Ces budgets sont qualifiés d'autonomes. En effet auparavant,
tout comme les services spéciaux du Trésor, les CST ne
disposaient pas d'une autonomie, mais d'une indépendance totale
vis-à-vis du document budgétaire à l'instar des budgets
autonomes. Or à la différence des CST, ces derniers
décrivent les opérations des organismes publics (entreprises
publiques y compris) ou privés, dotés de la personnalité
morale et assurant une mission de service public et dont les comptes ne sont
pas intégrés dans la loi de finances car ils disposent de leurs
budgets propres. Donc accorder aux CST une description de leurs
opérations hors loi de finances serait non plus une atténuation
ou un aménagement au principe d'unité mais une dérogation
pure et simple qui n'avantage pas une rationalisation tant recherchée du
régime juridique des CST. En effet, l'intégration de ces derniers
en annexe à la loi de finances les maintient dans le champ de
contrôle des parlementaires ; ce qui contribue à concilier
leur particularité avec les exigences de transparence dans les finances
publiques. Le professeur LALUMIERE écrit dans ce sens en faisant
allusion à la réforme entreprise entre 1948 et 1959 :
« Celle-ci a d'abord consisté dans une
« budgétisation » des comptes spéciaux qui
ont été inclus dans le document budgétaire tout en
conservant leur individualité »60(*).
S'agissant de la gestion proprement dite, si nous prenons
l'exemple des entreprises publiques, elles sont soumises à une gestion
financière conforme aux techniques du droit privé61(*) - bien que leur statut les
assujettisse à certaines règles de droit public - à cause
de l'industrie et du commerce au coeur de leurs activités. Les comptes
de commerce qui sont la catégorie qui se rapproche le plus de ces
entreprises publiques ne bénéficient pas d'une gestion aussi
souple62(*). Même si
les CST disposent d'un régime dérogatoire, cela ne signifie pas
pour autant qu'ils sont exemptés des règles applicables aux
finances publiques.
S'il est donc possible de parler d'indépendance pour
ces budgets, l'autonomie est le concept congru s'agissant des comptes
spéciaux.
En somme, c'est le degré d'autonomie des CST qui est
mis à l'épreuve et nous pouvons de prime abord affirmer que c'est
une autonomie poussée au regard du budget général. Cette
autonomie ne saurait cependant signifier souveraineté par rapport
à la loi de finances à l'image des budgets autonomes qui n'ont
aucun compte à rendre aux parlementaires. Mais dans les deux sens, la
spécificité des CST est manifeste étant donné que
les règles qui les régissent ne sont ni très strictes ni
trop souples.
Cette autonomie se résumant par l'introduction des CST
dans la loi de finances emporte toutefois certaines conséquences qui
relativisent davantage cette particularité des CST.
Section II : Une particularité relative
C'est la LOLF elle-même qui prévoit des
atténuations relativement à la nécessaire
particularité du régime juridique des CST. En effet l'article 25
alinéa premier dispose : « Sous réserve des
règles particulières énoncées aux articles 26
à 31, les opérations des comptes spéciaux du Trésor
sont prévues, autorisées et exécutées dans les
mêmes conditions que les opérations du budget
général ». De cette disposition, nous pouvons
déduire que la gestion des CST est soumise à la procédure
budgétaire (§1) et au contrôle parlementaire
(§2).
§ 1. Une gestion soumise à la
procédure budgétaire
Conformément à l'esprit de l'article 25
précité, l'exécution des CST suit une procédure
identique à celle du budget général (A)
et s'effectue en adéquation avec l'exposé du principe de la
séparation des ordonnateurs et des comptables (B).
A - Une procédure d'exécution identique
à celle du budget général
L'exécution du budget comporte quatre étapes
correspondant à deux phases pour ce qui est des dépenses -
l'engagement, la liquidation et l'ordonnancement relevant de l'ordonnateur et
le paiement à la charge du comptable - et trois s'agissant des recettes
(ordonnateur établit les recettes et émet un titre de recettes et
comptable se charge de recouvrer). C'est le même procédé
pour les CST.
Concernant d'abord les dépenses, l'article 14 du
décret n° 79-1151 du 17 décembre 1979 fixant les
règles d'organisation et de fonctionnement du fonds d'aide au sport et
à l'éducation populaire63(*) nous donne une idée de cette proximité
entre les procédures d'exécution des dépenses des CST et
celles du budget général. Il dispose : « Les
titres de dépenses sont établis par les ordres de paiement
établis par le ministre chargé de la Jeunesse et des
Sports ; ils seront accompagnés des pièces justificatives
habituellement exigées en matière de comptabilité publique
et seront ordonnancés par le Directeur de la Monnaie et du crédit
par délégation du ministre chargé des Finances.
L'engagement et la liquidation des dépenses sont effectués par
l'administrateur de crédits nommé par le ministre chargé
de la Jeunesse et des Sports. ». On retrouve donc toutes les
phases de la dépense - en dehors du paiement qu'il n'est pas
nécessaire de préciser puisque corollaire de tout ordre de
paiement régulier64(*).
Pour ce qui est des recettes, si nous reprenons l'exemple du
décret 79-1151, il désigne en son article 13 comme
autorités compétentes pour émettre des ordres de recettes,
le Directeur de la Monnaie et du crédit dans la région du
Cap-Vert et les contrôleurs régionaux des Finances dans les autres
régions.
Relativement à leur exécution, les CST ne
laissent presque pas apparaître de particularité eu égard
au budget général. Si toutefois cette similitude se rapporte
à la procédure, elle est en réalité plus
étendue dans la mesure où pour les CST tout comme pour les
opérations budgétaires, cette exécution est assujettie au
principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables
B - Une exécution conforme à la
séparation des ordonnateurs et des comptables65(*)
Bien que le juge administratif français ait
rejeté l'idée d'ériger ce sacro-saint principe du droit
budgétaire en principe général du droit66(*), son importance n'est pas
remise en cause au point d'en affranchir les opérations retracées
par les CST. M. DI MALTA soutient à ce propos que
« l'exécution s'opère dans le cadre du budget
général, et en particulier, dans le respect de la règle de
la séparation des ordonnateurs et des
comptables. »67(*)
Les fonctions d'ordonnateur reviennent au ministre
chargé des Finances en vertu de l'article 19 du décret 2003-101
qui dispose « Le ministre chargé des Finances est
ordonnateur principal unique des recettes et des dépenses du budget de
l'Etat, des budgets annexes et des comptes spéciaux du
Trésor. ». Le ministre des Finances délègue
ses pouvoirs soit au ministre du budget, soit à un responsable du
service affilié au CST. A titre d'exemple, l'arrêté
interministériel n° 5268 MEF/DGT/TG du 26 mai 1982
définissant la nature des opérations imputables au CST
intitulé « Opérations à caractère
industriel et commercial » effectuées par l'armée et
fixant les modalités de fonctionnement stipule en son article 7 :
« L'intendant militaire, Directeur de l'intendance des Forces
armées est désigné comme administrateur-ordonnateur du
compte spécial par délégation du ministre des
Finances »68(*).
La comptabilité des CST est assurée par des
comptables directs du Trésor69(*). Ainsi, tous les CST sont gérés par le
Payeur général du Trésor à l'exception des comptes
de garanties et d'avals et des comptes de règlement avec les
Gouvernements étrangers qui sont suivis par le Trésorier
général70(*). Ces deux dernières catégories devenues
exsangues, les CST sont actuellement suivis par le Bureau Guichets et Comptes
de dépôt de la Paierie Générale du
Trésor71(*).
En droit français, le procédé est le
même à la seule différence que ce sont les ministres, et
non leur homologue des finances uniquement, qui sont ordonnateurs des CST
qu'ils gèrent tout comme ils disposent de la qualité
d'ordonnateur principal de leur budget.
Avec la séparation des fonctions d'ordonnateur et de
comptable des CST, le législateur sénégalais a
effectué un grand pas dans sa tentative de conciliation de la
particularité de ces comptes avec les impératifs d'une gestion
sécurisée des finances publiques. Cela emporte comme
conséquence de les rapprocher davantage du budget général
en dépit de leur spécificité. Dans la même optique,
le législateur est allé encore plus loin en consacrant un
contrôle parlementaire effectif sur la gestion des CST.
§ 2. Une gestion soumise au
contrôle parlementaire
C'est un contrôle qui s'effectue aussi bien en amont par
la voie de l'autorisation préalable (A) qu'en aval de
l'exécution des CST par l'entremise du contrôle a posteriori
(B).
A - L'autorisation préalable
Pour M. Hervé MESSAGE, « (...), la
réforme des comptes spéciaux et l'application qui en a
été faite ont procuré d'heureux résultats :
(...) ; l'établissement de prévisions de charges permet une
vue plus claire et plus complète des finances
publiques »72(*). Telles furent en 1951 les impressions du
Ministère français des Finances sur la première
étape de la réforme. Les fondements de tels propos ajoutés
à l'article 25 précité légitiment désormais
le droit pour les parlementaires de donner leur opinion sur les
prévisions des CST tout comme pour le budget général. On
serait même tenté de croire que les comptes spéciaux sont
dans ce domaine assujettis à un régime plus strict puisqu'au
moment où le budget général fait l'objet d'une
autorisation globale, ils disposent d'une autorisation par catégorie de
comptes comme le prévoit l'article 32 de la loi organique 2001-09, le
projet des loi de finances « autorise, en distinguant les services
votés des opérations nouvelles, les opérations des budgets
annexes et les opérations des comptes spéciaux du Trésor
par catégorie de comptes spéciaux et éventuellement par
titre ».
Cette autorisation préalable vaut même pour les
réajustements du Gouvernement en cours d'exécution. C'est ce qui
ressort de l'article 21 de la loi organique française 2001-692 :
« Si, en cours d'année, les recettes effectives sont
supérieures aux évaluations des lois de finances, des
crédits supplémentaires peuvent être ouverts, par
arrêté du ministre chargé des finances, dans la limite de
cet excédent. Au préalable, le ministre chargé des
finances informe les commissions de l'Assemblée nationale et du
Sénat chargées des finances des raisons de cet excédent,
de l'emploi prévu pour les crédits ainsi ouverts et des
perspectives d'exécution du compte jusqu'à la fin de
l'année. ».
Mieux, la création des CST échappe au domaine
réglementaire pour devenir l'apanage du législateur comme nous
pouvons le noter à l'article 24 de la LOLF sénégalaise de
2001 : « Les comptes spéciaux du Trésor ne
peuvent être ouverts que par une loi de finances. ». Cette
disposition coupe l'herbe sous les pieds à tout ministre qui aurait eu
pour intention de tenir de manière occulte des deniers publics via un
compte spécial à l'insu du Parlement.
Si aujourd'hui le contrôle des CST est toujours
problématique, l'autorité législative détient de
véritables pouvoirs en matière d'autorisation. Une autorisation
qui bien avant de se rapporter à la gestion concerne l'institution des
comptes spéciaux. Cependant, pour que cette autorisation ait un sens ou
soit effective, il faut que le Parlement puisse être en mesure de
vérifier si les gestionnaires de CST s'y sont conformés, ce qui
explique la dévolution d'uns contrôle a posteriori.
B - Le contrôle a posteriori
C'est une faculté qui conforte le pouvoir des
parlementaires sur les CST mais donne en même temps à
l'autorisation préalable tout son sens. Il est en effet tout à
fait normal qu'à la fin de l'exécution de la loi de finances,
l'autorité législative sache si le Gouvernement s'en est tenu aux
consignes de départ. C'est une vérification et un contrôle
de régularité qui s'effectuent par la voie de la loi de
règlement.
Ainsi, la loi de règlement comportera pour
vérifications les résultats définitifs des CST de
l'année écoulée et les annexes explicatives sur l'origine
des dépassements, des pertes ou des excédents. Il s'agit donc ici
comme le défend M. Mamadou DIOP de vérifier
« l'ajustement des autorisations de dépenses aux
ordonnancements »73(*).
D'un autre côté, les parlementaires ont la
possibilité avec la loi de règlement de vérifier la
régularité de l'exercice clos puisque ce texte est
accompagné « d'un rapport de la Cour des Comptes et de la
déclaration générale de conformité entre les
comptes de gestion des comptables de l'Etat et la comptabilité de
l'ordonnateur ».
Nous pouvons ainsi parvenir aux mêmes conclusions que le
Doyen AMSELEK qui affirmait « les textes de 1956 et 1959 ont
transformé ce qui n'était qu'une pratique douteuse et anarchique,
en un procédé technique contrôlé,
maîtrisé qui permet d'atteindre, dans certaines conditions
définies, certains résultats. »74(*).
En somme, hormis l'exécution des recettes et
dépenses qui les assimile au budget général, les CST
méritent à plus d'un titre leur qualificatif dans leur mode de
gestion, tout comme pour les règles de fonctionnement.
Toutefois, leur étude s'avère plus
intéressante si l'on aborde leur impact sur les finances publiques.
Deuxième partie : Les enjeux de
l'institution des CST
La réponse à la question faut-il maintenir la
pratique des CST demeure toujours critique en raison du dilemme entre
l'utilité qu'ils présentent et les avatars qu'a connu leur
encadrement juridique.
Les trois premières sections de la première
partie consolideraient la nécessité d'un maintien alors que la
dernière représenterait un argument de taille pour les
pourfendeurs de ce genre de compte. Il faudrait cependant transcender ces
considérations théoriques pour voir concrètement
jusqu'à quelle hauteur les CST contribuent à une exécution
efficace des finances publiques. D'un autre côté, cet exercice
nous donnera une vue d'ensemble sur les risques ainsi que les véritables
problèmes qu'ils comportent.
Cette seconde partie de nos développements s'articulera
autour de deux axes : dans un premier temps, nous nous
intéresserons aux avantages des CST (chapitre Ier),
avant d'en arriver ensuite à leurs inconvénients
(chapitre II).
Chapitre premier : Les avantages des CST
Si plus d'un siècle après leur mise sur pied,
les CST continuent d'exister, c'est qu'ils présentent de réels
avantages. A l'heure du renforcement du contrôle financier de
régularité par celui de l'efficacité des services que
propose l'Etat, les CST s'avèrent au moins aussi compétitifs que
n'importe quelle autre formule pour les secteurs relevant de l'une des
catégories. En plus de prendre en charge des opérations
particulières qu'il convient de dissocier du budget, ces comptes sont
bénéfiques aux autres organismes publics et parfois même
aux personnes privées dans leurs relations financières avec
l'Etat.
En substance, ces avantages sont tantôt imputables au
procédé des CST (section
Ière), tantôt à mettre à l'actif
d'une catégorie de comptes (section II).
Section première : Les avantages des CST
dans le procédé
Le choix de classifier un compte spécial n'est pas
fortuit. Les autorités étatiques visent avec cette option
à ne pas se retrouver avec des opérations disparates dans le
budget tout en tenant compte de la spécificité du mode de
financement. Cette première section est donc réductible aux
avantages des CST sur les finances de l'Etat (I), et à
leurs avantages sur les services dont ils décrivent les
opérations (II).
§ 1. Les avantages sur les finances de
l'Etat
Ils sont principalement au nombre de deux :
l'allègement du budget de l'Etat (A) et
l'évaluation de ses services (B).
A - L'allégement du budget de l'Etat
Le premier mérite des CST est d'avoir
dégagé de la masse budgétaire de l'Etat des
opérations différentes de celles qu'elle contient d'habitude.
Comme le précise le professeur Di Malta, « les CST
présentent divers avantages : ils évitent d'inscrire au
budget des opérations temporaires ». Le budget comportant
des mouvements de fonds définitifs ou réels, la présence
de ces opérations pourrait fausser la lisibilité du principal
moyen de contrôle du Parlement sur l'action ou l'activité
financière gouvernementale. Dans l'exposé des motifs de la loi de
finances pour l'année financière 1981-1982, les CST
représentaient plus du quart du budget ; ce qui veut dire que la
présentation classique aurait affiché 70.121.483.000 F CFA
supplémentaires de ressources. Une somme colossale qui aux yeux des
représentants du peuple est synonyme de croissance et peut justifier de
nouveaux investissements ; or en réalité ces ressources sont
déjà affectées et sont par conséquent sans
incidence sur le budget. Bien sûr on peut pour remédier à
cela inscrire dans la section « dépenses » la
destination de ce montant mais la pluriannualité constitue un obstacle
de taille. Si nous prenons en France l'exemple du CST retraçant le
cautionnement des comptables publics, le versement qui créditera le
compte pour une année X (donc enregistrement comme recette) ne sera
restitué au comptable (inscription en dépense) qu'à une
année X+Y (Y coïncidant avec le nombre d'années de service
le séparant de la retraite ou de l'arrêt de quitus). On voit ainsi
nettement que ce type d'opération pourrait encombrer le budget.
Et supposons qu'on réussisse à surmonter cet
écueil en expliquant aux parlementaires la nature des ces
opérations ; le contrôle ne s'en trouvera que plus difficile
parce que de deux choses l'une : ou bien trouver d'autres moyens de
contrôle parce que les principes budgétaires s'avéreront
inutilisables pour l'ensemble des opérations, ou bien
s'intéresser uniquement aux entrées et sorties
définitives. Cette seconde opportunité prend plus de temps et
débouche sur une scission que la pratique des CST peut s'enorgueillir
d'avoir institutionnalisé.
Pour le cas particulier des comptes de commerce, c'est
l'imprévisibilité qui constitue l'obstacle majeur. Il est en
effet tout sauf sûr de vouloir compter sur des ressources incertaines
puisque l'activité industrielle et commerciale ne constitue pas encore
une fois la raison d'être principale du service.
Tout compte fait, nous pouvons admettre avec M. Eric DEVAUX
à propos de la débudgétisation,
qu' « Une première forme s'est
développée entre 1920 et 1950. Elle consistait à
alléger le budget général de l'Etat, en reportant
certaines dépenses qu'il supportait jusque là vers des budgets
annexes et comptes spéciaux du Trésor »75(*). C'est donc là un
apport considérable auquel il convient d'adjoindre l'évaluation
des services pour faire le tour des avantages des CST sur les finances de
l'Etat.
B - L'évaluation des services de
l'Etat
La création des CST répondait à des
préoccupations au nombre desquelles on peut citer l'évaluation
avec précision du coût d'un service public dont les
opérations ont un caractère industriel et commercial76(*). Le coût en question
correspond aux sommes injectées dans le secteur, en d'autres termes aux
dépenses. Ces dernières donnent une idée de ce qu'il
coûte à l'Etat d'entretenir une telle activité.
Parallèlement, nous avons en recettes ce que rapporte ce secteur. Le
rapport entre ces entrées et sorties de fonds renseigne sur le rendement
de ce service ou secteur. L'évaluation des services de l'Etat
s'avère ainsi plus évidente si l'on s'emploie à comparer
les CST avec les Ministères. Ces derniers disposent d'un budget avec une
pléthore de dépenses de différente nature et une multitude
de secteurs contrairement aux CST. A titre d'exemple, en 2008, avec la CEPIA,
les prestations du Gouvernement au secteur de la pêche lui ont
coûté en prévision 900.000.000 F CFA et devaient rapporter
autant. Cette remarque est valable pour la quasi-totalité des CST. Le
professeur ORSONI ne dit pas autre chose lorsqu'il affirme que chaque CST
constituant une mission (crédits étant spécialisés
par programme), il y a un compte rendu de performances intrinsèques aux
programmes77(*).
Cette pratique offre en effet la possibilité de
déterminer avec exactitude le montant de l'entretien d'un secteur par
l'Etat. La rentabilité peut également y être
jaugée78(*).
Cependant, les CST n'ont pas seulement vocation à
présenter des avantages pour l'Etat lui-même ; le secteur
dont ils retracent les opérations y gagne en termes de gestion et de
fonctionnement.
§ 2. Les avantages sur le service
affilié au CST
Affecter une activité donnée à un compte
spécial lui garantit d'un part la souplesse de gestion
(A), et de l'autre une autonomie de fonctionnement
(B).
A - La souplesse de gestion
Pour prendre en compte la particularité des
opérations que décrivent les CST, le législateur a entendu
assouplir leur gestion par rapport aux autres comptes du budget
général. Ces derniers obéissent aux règles d'or que
constituent les principes budgétaires. Parmi ces principes, on
dénombre l'annualité qui exige une gestion circonscrite sur douze
mois ; soit l'intervalle qui sépare les contrôles
effectués par les représentants du peuple. Les CST a contrario ne
font pas toujours l'objet d'une exécution ou d'une gestion annuelle. La
configuration des opérations décrites fait souvent que le compte
n'est en mesure de se solder qu'au-delà d'une année. En
conséquence, les crédits dont le compte est
bénéficiaire sont autorisés à être
dépensés sur plus de douze mois. Cette dispense au profit d'une
gestion pluriannuelle fait dire au Professeur BOUVIER que « La
procédure du compte spécial du Trésor est
dérogatoire au droit commun, notamment parce que l'affectation et le
report de crédit y sont la règle. »79(*).
Il ne faudrait cependant pas considérer ce non-respect
du principe d'annualité comme une violation mais une adaptation. D'abord
toutes les catégories n'en sont pas exemptées. A chaque fois
qu'il est possible de solder le compte sur une durée inférieure
ou égale à un an, le principe est respecté. Notons au
passage que depuis quelques années, seul le report du FNR est
autorisé par la loi de finances au Sénégal.
D'un autre côté, cette souplesse de gestion
s'explique par le fait que certains comptes, en l'occurrence les comptes de
concours financiers, bénéficient d'une autorisation globale de
dépenses, mais que le détail de l'utilisation des crédits
est à la discrétion du service utilisateur80(*). En clair, ces comptes sont
exonérés d'une conformité à la règle de la
spécialité.
De manière succincte, la pratique du CST est à
la mesure de la comptabilisation souple qu'exigent les opérations qu'il
retrace. Ces exigences qui ont pour nom pluriannualité, existence de
lien direct entre une recette et une dépense trouvent dans ce
procédé l'assouplissement des principes budgétaires dont
ils ont besoin.
En marge de cette souplesse, les CST garantissent aux services
auxquels ils sont affiliés une autonomie de fonctionnement.
B - L'autonomie de fonctionnement
Parallèlement à l'autonomie formelle dont ils
disposent et qui se matérialise par une tenue en dehors du budget
général, les CST sont également affranchis de certaines
vicissitudes auxquelles les comptes du budget de l'Etat sont souvent
exposés. Cette seconde autonomie que nous pouvons qualifier de
matérielle, se traduit donc par la propriété des CST
à fonctionner pour la plupart sur la base de l'autofinancement ; ce
qui leur donne une certaine garantie de survie. Il faut cependant distinguer
deux cas de figure.
Pour les catégories de comptes totalement
renfloués par système revolving (comptes de prêts et
avances), le compte fonctionne tout seul en toute indépendance, en tout
cas en termes de disponibilité de fonds. Le recouvrement se fait
principalement par la voie de la perception à la source qui
présente moins de risque voire une probabilité quasiment nulle
d'insolvabilité. Pour ne pas revenir sur l'exemple des avances
accordées aux particuliers à l'occasion de la Tabaski, on peut se
focaliser sur les prêts DMC accordés aux fonctionnaires. Ces
derniers doivent disposer en principe d'un compte courant à la Banque de
l'Habitat du Sénégal via lequel ils perçoivent leur
salaire81(*) qui au moment
du retrait fait l'objet d'une ponction pendant une durée
déterminée82(*). A la fin de la durée de remboursement, le
comptable assignataire des CST est certain de recouvrer
l'intégralité du montant initialement décaissé.
Bref, ce circuit garantit la pérennité du compte qui est
préservé des aléas budgétaires. L'existence de
ressources exclusivement allouées au compte a souvent, eu égard
à l'encadrement juridique, une base décrétale, mais elle
peut aussi être prévue par un arrêté (du Ministre de
l'Economie et des Finances, ou conjointement avec le Ministre de tutelle).
Par contre, pour les comptes exposés à des
contingences relativement aux entrées de fonds, on peut prendre les
comptes d'affectations spéciales en guise d'exemple : si les sommes
recouvrées sont, au plus, de 20% inférieures aux
prévisions, des dotations de l'Etat se chargent de combler la somme
manquante. A défaut, le compte n'est exécuté que
jusqu'à concurrence du montant disponible (article 26 LOLF
sénégalaise de 2001).
En résumé, l'autonomie de fonctionnement se
réduit d'une part à la capacité des CST à
fonctionner par eux-mêmes et d'autre part à l'assurance de la
disponibilité de ressources nécessaires à leur
fonctionnement. La possible interférence de l'Etat par l'entremise de
versement de subventions en cas d'insuffisance de recouvrement semble remettre
en cause cette autonomie - si l'on calque cette dernière à sa
première composante - mais en réalité elle la conforte et
s'en porte garante parce que permettant toujours la disponibilité de
ressources indispensables à la survie du compte.
Au sortir de ces développements, force est de
reconnaître que les CST satisfont aux exigences de leur secteur
d'affiliation bien mieux que le budget général de l'Etat n'y
parvient. Le régime qui leur est applicable crée les conditions
adéquates pour la réalisation de leur mission.
L'Etat aussi y trouve son compte comme le résume le
professeur ORSONI, avec une meilleure satisfaction de l'objectif de
maîtrise de la dépense83(*).
Au demeurant, au sujet des CST, tous les avantages ne sont pas
au compte du procédé. Chaque compte pris singulièrement,
comporte pour ses bénéficiaires de véritables
intérêts sur lesquels il convient de s'appesantir.
Section II : Les avantages des CST dans leur
singularité
A priori, quand il s'agit des CST, on a à l'esprit la
prise en compte de la spécificité des opérations
retracées ; ce qui semble limiter le champ des avantages à
l'Etat. Mais à y voir de très près, toutes les
activités financières de celui-ci s'entretiennent avec ou au
profit d'autres personnes publiques ou de particuliers. En clair, ces avantages
s'élargissent aussi bien aux autres Collectivités publiques
(I), qu'aux personnes privées (II).
§ 1. Les avantages pour les
Collectivités publiques
Par l'entremise des CST, les Collectivités publiques
avec lesquelles l'Etat entretient des rapports sont de deux ordres : soit
il s'agit de Collectivités locales auxquelles il accorde des avances
(A), soit ce sont d'autres organismes publics qui sont
destinataires de concours financiers analogues (B).
A - Les avances accordées aux
Collectivités locales
Ces avances sont prévues par les articles 250 (pour les
Communes) et 251 (pour les Communautés rurales) de la loi 96-06 qui
stipulent que l'Etat peut consentir aux Collectivités locales :
« au début de chacun des deux premiers trimestres de
l'année financière, une avance égale à 25
% des recouvrements effectués au cours de la dernière gestion
connue au titre des impôts directs (et centimes additionnels pour
les Communautés rurales) »
Cet article s'est matérialisé par la
création d'un compte d'avances84(*). Les autorités locales, n'entrant que
tardivement en possession de leurs moyens financiers, l'Etat met à leur
disposition - pour trois mois - le montant à peu près attendu des
impôts directs sur une durée de trois mois. Les agents de
l'Administration fiscale procéderont au recouvrement pour solder le
compte ouvert au nom de chaque Collectivité locale.
En France, c'est à peu près le même
procédé avec les comptes de concours financiers qui comportent
les avances destinées aux Collectivités territoriales dont un
programme d'avances sur le montant revenant aux Départements. A la
différence du Sénégal, le versement est ici mensuel (donc
assimilable à la pratique des douzièmes provisoires). C'est
suivant l'émission des rôles de l'année en taxe
d'habitation, en taxes foncières et en taxe professionnelle qu'est
fixé le montant de l'avance accordé qui est inscrit en
dépense dans le compte, à côté des recettes que
constituent les impôts indirects recouvrés sur les contribuables
de la localité concernée ainsi que les dégrèvements
et admissions en non valeur.
Dans les deux cas, les intérêts demeurent les
mêmes pour les Collectivités locales : une
indépendance de fonctionnement par rapport aux rentrées de fonds,
surtout pour celles dont les revenus sont essentiellement constitués par
les ressources fiscales sachant qu'en France, plus de la moitié de leur
recouvrement intervient dans le courant du dernier trimestre. D'un autre
côté, elles sont préservées des aléas du
recouvrement puisque c'est l'Etat qui comble le gap créé par le
non-recouvrement issu d'un avantage fiscal accordé à un
contribuable ou du fait d'une impossibilité de recouvrement
(insolvabilité, disparition du contribuable etc.).
Ce compte présente également un
intérêt pour l'Etat puisque en contrepartie, il y a le principe de
l'unité de caisse de la Trésorerie publique. Le
dépôt est donc obligatoire et gratuit - non productif
d'intérêt85(*) - pour l'ensemble des Collectivités locales.
Du côté de ces dernières, cela permet d'éviter la
comptabilité oisive et il est loisible aux autorités
étatiques d'en placer une partie dans le circuit des marchés
financiers.
Toujours suivant les mêmes modalités, les
localités peuvent bénéficier de prêts soit
spontanés, soit sous forme de consolidation d'une avance non
remboursée à temps.
Ces comptes s'avèrent donc très
intéressants pour les Collectivités locales en termes de
disponibilité de fonds et partant de constance dans leur fonctionnement.
L'Etat de sa part n'est point lésé dans cette relation qui
parfois le lie à d'autres organismes publics.
B - Les concours financiers apportés aux autres
organismes publics
Il s'agit d'avances et de prêts accordés à
des organismes dont, les plus importants sont les établissements publics
et les sociétés anonymes à participation publique
majoritaire86(*). Tout
comme les Collectivités locales, ils sont tenus de déposer leurs
fonds au Trésor. En échange, en cas de difficultés
financières, l'Etat s'engage à approvisionner leurs caisses en
attendant que leurs ressources propres soient disponibles. L'article 5 de la
loi 2008-43 portant code de l'urbanisme87(*) dispose dans ce sens « Les organismes
publics, parapublics ou privés compétents peuvent participer
conjointement avec les Collectivités locales et l'Etat à
l'élaboration des documents d'urbanisme et à la
réalisation des opérations d'aménagement. Dans ce cadre,
l'Etat peut consentir des subventions, avances ou dotations à ces
organismes ».
De même s'ils sont confrontés à des
besoins prompts d'emprunter, les autorités étatiques peuvent
leurs accorder des prêts ou s'en porter garantes88(*).
Cette expérience sénégalaise est
similaire à la pratique française qui est un peu plus riche. En
plus des établissements publics, les avances peuvent être
consenties à divers services de l'Etat ou organismes en charge d'une
mission de service public. Ce compte a vu le jour en 1980 avec la loi de
finances d'alors en son article 51. Il est issu de la fusion de quatre
autres : avances aux budgets annexes, aux établissements publics
nationaux et services autonomes de l'État, à des services
concédés ou nationalisés ou à des
sociétés d'économie mixte, à divers organismes de
caractère social. Certains de ces organismes peuvent être
autorisés par l'Etat à percevoir le produit des impositions.
Cette perception passant nécessairement par les caisses de
Trésor, l'Administration fiscale étant toujours exclusivement
composée d'agents de l'Etat, celui-ci peut octroyer, sous forme
d'avance, à ces organismes une partie de la somme correspondante.
Nos remarques sur les avantages des avances et prêts du
Trésor sur les Collectivités locales demeurent valables pour les
autres organismes publics. L'Etat s'organise toujours de manière
à ce que l'indisponibilité immédiate de fonds ne soit pas
la cause de la non-satisfaction d'une activité que les citoyens sont en
droit d'attendre d'une de ces Collectivités publiques
spécialisées.
Les comptes d'avances et de prêts au
Sénégal et de concours financiers en France occupent une place de
choix dans la décentralisation aussi bien territoriale que technique ou
par service. Si l'on invoque souvent l'intérêt des CST sur le
budget général pour justifier leur existence, il ne faut pas
perdre de vue qu'ils sont pour le moment plus efficaces que n'importe quel
autre type de compte pour suivre les rapports financiers qu'entretiennent les
Collectivités publiques décentralisées avec L'Etat.
Néanmoins, lorsque ces rapports s'élargissent aux personnes
privées, les CST demeurent parfois le meilleur procédé de
description des opérations.
§ 2. Les avantages pour les personnes
privées
Les personnes privées peuvent bénéficier
des prestations financières de l'Etat via les CST dans le cadre de leurs
activités professionnelles. Il s'agit pour l'Etat soit d'attacher
certains avantages à certaines fonctions, soit de promouvoir un secteur
économique en particulier. On peut appréhender ces avantages en
nous intéressant aux deux types de compte suivant : les prêts
et avances accordés aux particuliers (A) et la caisse
d'encouragement à la pêche et à ses industries annexes
(B).
A - Les prêts et avances accordés aux
particuliers
C'est certainement le compte le plus avantageux pour les
personnes physiques, qui se révèlent le plus clair du temps
être des fonctionnaires. Pour simple rappel, les avances ont lieu
à l'occasion des fêtes de Tabaski et s'élèvent
à 50.000 F CFA et sont remboursables sur huit mois à raison de
6.250 F CFA par mois. Le montant des prêts au logement est de 5.000.000 F
CFA et doit être épongé en sept ans (voir supra).
Avec ces deux types de comptes, le Trésor offre les
mêmes prestations que les banques avec un coût moindre puisque le
remboursement est affranchi d'intérêt. Cela s'explique par la
gratuité du dépôt des fonds au Trésor à la
différence d'une banque qui, en sus de la somme initialement
déposée par un client, propose un pourcentage de
bénéfices, ce qui lui donne en échange le droit d'user de
ce montant pour un prêt qui à son tour sera grevé
d'intérêt. D'un autre côté, suivant la logique de
fonctionnement de principe du CST, c'est comme si le fonctionnaire dispose
déjà d'une somme au moins aussi importante que le prêt ou
l'avance auprès de l'Etat et le Trésor se contente de le
défalquer au fur et à mesure qu'il perçoit89(*). En d'autres termes, c'est son
propre argent qu'il emprunte en attendant d'en être réel
détenteur ; donc inutile qu'il paie le droit d'usage que
représente l'intérêt.
Le législateur français est allé encore
plus loin90(*). En plus
des avances aux agents de l'Etat pour l'amélioration de l'habitat, on
peut recenser les avances aux fonctionnaires de l'Etat pour l'acquisition de
moyens de transport, les avances aux agents de l'Etat à
l'étranger pour la prise en location d'un logement.
L'autre avantage qu'il faut mettre à l'actif de ces
comptes en dehors de l'accès facile au logement et la prise en charge
des frais occasionnés par une fête religieuse, c'est
l'interventionnisme social auquel les autorités étatiques se
livrent et il faut même entrevoir le développement au bout comme
le défend le professeur DEBENE : « Les missions
nouvelles du Trésor - fonction de banquier (les missions
traditionnelles correspondant à sa fonction de caissier) - sont la
conséquence de l'interventionnisme croissant, appelé par les
exigences du développement au
Sénégal »91(*). En 2009, la loi de finances initiale
prévoyait 12.000.000.000 F CFA de prêts rien que pour les
particuliers au moment où les autorités locales devaient en
percevoir 800.000.000.
En résumé, à travers les avances et
prêts accordés aux particuliers, l'Etat peut directement
intervenir dans le niveau de vie de ses agents. Il faut cependant
reconnaître que les véritables bénéficiaires sont
les fonctionnaires aux revenus mensuels moyens.
Les ambitions de l'Etat peuvent parfois être bien plus
poussées lorsque celui-ci se décide à faire
bénéficier tout un secteur de l'économie de son assistance
via un CST, tel est le cas de la CEPIA.
B - La caisse d'encouragement à la pêche
et à ses industries annexes
C'est l'un des comptes d'affectation spéciale les plus
anciens. La CEPIA a été instaurée par la loi 67-01 du 30
janvier 1967. Sont enregistrées à titre de recettes diverses
cotisations, taxes et amendes92(*). Les dépenses sont réparties entre deux
programmes hormis les frais de fonctionnement, d'encadrement et de
contrôle : un programme de soutien des produits de la pêche et
un programme d'investissement en faveur des structures.
Le programme de soutien s'intéresse principalement
à l'amélioration et à la facilitation de la
commercialisation des produits halieutiques. On peut citer entre autres le
soutien de la vente des conserves fabriquées au Sénégal et
destinées au marché international, le financement des programmes
de recherches et d'aménagement des ressources halieutiques ainsi que des
études de marché, l'action de promotion des produits de la
pêche sur le marché national.
Le programme d'investissement vise à doter le secteur
d'infrastructures telles que « des structures d'accueil des
ouvrages portuaires et ateliers de
réparation » et de moyens logistiques
« installations frigorifiques, équipement en
matériel de pêche » (article 9 décret
80-518).
Sachant que les sources de financement de la CEPIA
génèrent chaque année environ 900.000.000 F CFA qui sont
intégralement réinjectés dans le compte avec plus de
500.000.000 F CFA pour les deux programmes, on peut affirmer que la
volonté de l'Etat est largement au-dessus de ce que laisse entendre la
dénomination du compte. Il y a une réelle prise en charge voire
une promotion du secteur de la pêche.
Les ambitions des autorités étatiques sont
malgré tout bien plus importantes encore ; la demande
d'intégration des 166 agents contractuels du Département des
pêches et de l'aquaculture pris en charge par le compte sur autorisation
de la loi de finances dans la fonction publique pour un allégement du
compte au profit du renforcement de la partie allouée aux programmes en
est une preuve93(*). Au
demeurant, le compte est jugé déficitaire de 300.000.000 F CFA
à cause de la non-reconduction de l'accord de pêche avec la
Communauté européenne et l'arrêt de la cotisation des
professionnels depuis plusieurs années94(*).
La CEPIA est un exemple probant de la possibilité d'une
auto prise en charge de certains secteurs de l'économie qui
s'entretiendraient par les ressources qu'ils génèrent
eux-mêmes. Au-delà, les véritables
bénéficiaires sont ceux qui évoluent dans ce secteur
puisqu'ils sont certains d'exercer dans les meilleures conditions, de surcroit,
les problèmes de commercialisation sont amoindris.
En somme, si toutes les activités de l'Etat ont pour
centre d'intérêt l'épanouissement des citoyens, il faut
avouer qu'avec les CST, il vise des objectifs spécifiques qu'il tente
d'atteindre tantôt en étant directement accessible aux personnes
privées, tantôt via un secteur de l'économie, tantôt
par le biais d'autres organismes publics. Dans tous les cas, les
intérêts de l'institutionnalisation de la distinction entre
opérations « normales » et opérations
exceptionnelles ne sont plus à prouver. L'heure n'est donc pas à
un questionnement sur l'utilité des CST, mais à une confrontation
entre leur apport positif et leurs méfaits pour trancher le
problème de leur maintien ou de leur suppression.
Pour ce faire, il faudra impérativement identifier les
inconvénients qu'une éventuelle réforme devrait surmonter
pour parvenir à une rationalisation du procédé.
Chapitre II : Les inconvénients des CST
S'il est parfois possible de mettre des défaillances
institutionnelles au compte du corpus juridique, il n'en demeure pas moins que
la plupart d'entre elles résultent d'une mise en oeuvre
défectueuse voire malintentionnée. Les CST n'échappent
malheureusement pas à ce constat. La pratique actuelle, malgré
les multiples tentatives de rationalisation, laisse apparaître un
fossé entre les intentions du législateur et leur
concrétisation par les autorités politiques. La surveillance des
activités financières de l'Etat s'en trouve
hypothéquée dans la mesure où en cours d'exécution
le procédé du CST est utilisé pour des raisons autres que
celles qui l'avaient fait naître et en fin d'exécution, les
parlementaires sont impuissants puisque dépossédés de
droit ou de fait d'une bonne partie de leurs moyens de contrôle.
En somme, il s'agira d'analyser les difficultés tant du
point de vue de la saine gestion des finances publiques (section
première) que du point de vue du contrôle
(section II).
Section première : Les difficultés
de la saine gestion des finances
publiques en cours d'exécution
Envisager l'étude des CST à l'écart du
budget de l'Etat et des autres comptes ne donne qu'une vision partielle des
enjeux que comportent ces catégories de comptes. C'est pour cela que
nous nous proposons dans cette section de les appréhender de
manière large dans les finances publiques en général. Et
il ressort de cet exercice deux problèmes majeurs qui ne concourent pas
à une gestion financière saine. L'un est relatif à
l'incapacité de plusieurs comptes à pouvoir fonctionner sans un
apport du budget général et l'autre renvoie à l'usage
abusif qui est fait du procédé.
Respectivement le premier renvoie aux risques de
déficit public (I) et le second au danger que
représente leur expansion (II).
§ 1. Les risques d'accroissement des
déficits publics
Dans le principe de fonctionnement du CST, (exception faite
des comptes d'affectations spéciales) les opérations devraient se
solder d'elles-mêmes ; ce qui signifie un équilibre
inhérent à sa gestion. Mais la pratique montre un tout autre
visage caractérisé par des violations du principe
d'équilibre (A) que l'Etat tente de corriger avec des
dotations budgétaires (B).
A - Les violations du principe
d'équilibre
« Conformément aux dispositions de
l'article 37, alinéa c, de la loi n° 75-64 du 28 juin 1975
portant loi organique relative aux lois de finances, est constatée la
perte d'un montant de cent seize milliards sept cent quatre vingt quinze
millions neuf cent soixante dix sept mille six cent dix neuf (116.795.977.619)
francs CFA dans l'exécution des comptes spéciaux du Trésor
au titre de la gestion 1996, en application des dispositions des articles 22
à 30 de la loi organique, conformément à l'annexe
III ». Cet article 6 - rubrique constatation des pertes - de la
loi n° 2007-12 du 6 février 2007 portant loi de
règlement pour la gestion 1997 résume à lui seul la
difficulté d'associer le procédé du CST à la
règle orthodoxe de l'équilibre censé le régir. En
effet, en théorie, les comptes devraient se solder d'eux-mêmes
avec le temps. Mais la pratique montre une disproportion entre ce qu'il
coûte à l'Etat d'entretenir isolément du budget une
activité, et ce que cette même activité
génère en retour, y compris parfois pour les comptes fonctionnant
sur la base du système revolving (même si les risques sont bien
minimes et que les pertes si elles se produisent sont largement moins
importantes dans ce dernier cas). Dans la loi 2008-70 du 11 décembre
2008 portant loi de finances pour l'année 2009, tous les CST sont
présentés en équilibre. Cependant dans la
réalité, certains comptes connaissent des déficits
considérables. Nous avons à titre d'exemple la CEPIA qui souffre
d'un déficit de 300.000.000 F CFA, soit le tiers des dépenses
prévues (cf. Conseil présidentiel sur la pêche
précité).
Les remarques sont identiques en France où en 1998, la
charge nette des comptes s'est détériorée de 5,1 milliards
de francs pour représenter 3,72% du déficit prévisionnel
du budget de l'Etat95(*).
Encore plus significatif, l'autorisation de découvert
accordée à trois catégories de comptes, en l'occurrence,
les comptes de commerce, les comptes de règlement avec les Gouvernements
étrangers et les comptes d'opérations monétaires, est
synonyme de consentement du législateur à un déficit.
Pour condenser nos propos, nous pouvons invoquer les rapports
de la Commission française des Finances qui y dénonce souvent des
équilibres artificiels. Les déficits créés peuvent
provenir de dispenses, d'imprévus ou de mauvaise gestion. C'est pour
remédier à cela que l'Etat vient en aide à ces comptes
sous forme de dotations budgétaires.
B - Les dotations budgétaires
Ce sont les versements en provenance de l'Etat. En principe,
les CST devraient fonctionner uniquement sur la base des ressources que
prévoit le texte constitutif. En cas d'insuffisance, ils ne sont
exécutés que jusqu'à concurrence du montant
disponible ; en clair, certaines dépenses devront être
sacrifiées au profit d'autres. Cependant, la loi prévoit deux
exceptions à cette règle :
- D'abord les comptes d'affectation spéciale pour
lesquels le législateur peut prévoir des subventions ; il en
était ainsi du fonds d'aide au sport et à l'éducation
populaire institué par le décret n° 79-1151 du 17
décembre 1979 qui prévoyait en son article 9 pour les ressources
diverses : « le produit des subventions qui pourraient
être consenties par des personnes physiques ou morales ou par des
organismes nationaux ou étrangers » ;
- Ensuite il y a les comptes de garanties et d'avals dont
l'article 31 de loi organique sénégalaise 2001-09 dispose qu' il
sont provisionnés par une dotation budgétaire égale
à 10% des échéances annuelles dues par les
bénéficiaires des garanties de l'Etat (avec la
particularité que le décaissement n'est effectif qu'en cas de
défaillance de ceux-ci).
Les dotations budgétaires violent de façon
flagrante l'esprit du CST. Le budget général supporte les charges
d'un compte qui était censé n'avoir aucune incidence sur
lui96(*). En d'autres
termes, les opérations des comptes, à terme, ne sont pas
« blanches »97(*) ; ce qui n'est pas conforme à
l'idée d'opérations temporaires qu'ils sont supposés
retracer. Monsieur Laurent RABATE rend bien cette situation lorsque
décrivant la couverture de l'insuffisance des recettes du fonds national
pour le développement du sport par le budget du Ministère de la
jeunesse et des sports en 1988, il affirme : « des
ajustements de ce type favorisent des doublons entre chapitres
budgétaires et comptes d'affectation spéciale, qui renforcent le
sentiment d'arbitraire puisqu'une même dépense peut être
imputée sur le budget ou sur le compte
spécial »98(*).
En un mot, les risques de déficit public sont
réels et le demeureront tant que les CST continueront à occuper
une part aussi représentative dans la loi de finances. Et à ce
sujet, il ne faudrait pas perdre de vue que s'il est en majorité admis
depuis les théories de Keynes que le déficit budgétaire
pouvait favoriser une relance économique, le déficit public,
prohibé ou strictement limité, est encore synonyme de mauvaise
gestion. S'il y a toutefois une autre menace adjointe à la pratique du
compte spécial, c'est bien les dangers que pourrait représenter
son développement irrationnel.
§ 2. Les dangers de l'expansion des
CST
Les dangers liés à la multiplication des comptes
spéciaux sont principalement la dénaturation de leur objectif
(A) et l'érection du procédé en principe
(B).
A - La dénaturation de
l'objectif des CST
Pour simple rappel, deux types d'opérations avaient
présidé à l'institution des CST : les
opérations temporaires et les opérations des comptes
bénéficiant d'une affectation d'office en raison de l'existence
d'un lien évident entre les recettes et les dépenses99(*).
Pour les premières, de multiples comptes retracent des
opérations qui n'ont rien de provisoire : il en était ainsi
de la catégorie compte de règlement avec les Gouvernements
étrangers. Pareil pour les comptes d'opérations monétaires
qui ont été supprimés en 2009 au Sénégal.
Pour d'autres comptes, leur non-fonctionnement suffit pour témoigner de
leur inutilité. C'est ce qui a conduit à la suppression - avec la
loi de finances sénégalaise de 2009 - des comptes de commerce de
la DPS et de l'Administration pénitentiaire et la non-reconduction de la
dotations des comptes de garanties et d'avals.
S'agissant des secondes opérations, le lien direct qui
devrait sous-tendre l'affectation n'est pas toujours établi. En effet,
dans la législation française, « si les charges
prévues ne peuvent être intégralement couvertes grâce
à des ressources de nature correspondante, des ressources totalement
étrangères en assurent le financement »100(*). De surcroit, l'usage des
fonds affectés n'est pas toujours déterminé ; c'est
une critique assez récurrente dans les conclusions des Commissions
parlementaires françaises des Finances.
En somme, s'il fallait conserver des comptes dans la
catégorie CST conformément à la législation
stricte, il en resterait certainement moins d'une dizaine. Et selon plusieurs
spécialistes, en l'occurrence le personnel de la DGCPT, en dehors du
FNR, des comptes d'avances et des comptes de prêts, il est plutôt
exceptionnel que des opérations méritent d'être
décrites par un compte dit spécial. Qui dit justement
spécial, fait référence à ce qui déroge au
général et non à ce qui a tendance à
s'ériger en principe comme en témoigne le recours
récurrent à ce procédé.
B - La tendance à l'érection du
procédé en principe
« La procédure du CST est
dérogatoire au droit commun (...). Dérogatoire, cette
procédure doit donc rester exceptionnelle »101(*). Cette assertion du
professeur BOUVIER résume la place que devrait occuper les CST au sein
des comptes budgétaires ou ce qu'est son usage judicieux. Un recours
incessant à ce procédé présente
l'inconvénient de les ériger en une pratique de principe qui
consiste à les créer de la même façon que l'on ouvre
une nouvelle ligne budgétaire, c'est-à-dire en faire un mode
normal - et non plus spécial - de comptabilisation des dépenses
et des recettes. Au finish, les lignes de démarcation entre les
différentes natures des opérations deviennent sensibles à
l'évanescence, et on veut pour preuve le caractère
interchangeable du budget et du CST. En effet, en cas de suppression d'un CST,
dans la plupart des cas, les opérations qui y étaient
retracées se retrouvent dans la masse budgétaire de l'Etat sans
que ce transfert n'entraine une quelconque conséquence sur les
activités affiliées.
On est peut-être encore loin des 400 CST recensés
à l'aide de l'inventaire Schuman102(*) ou encore d'un montant représentant le quart
du budget général, mais toujours est-il qu'il faudrait
rationaliser davantage leur utilisation.
C'est dans cette perspective que nous proposons, à la
place d'une option laissée au bon vouloir des autorités
gouvernementales, un choix strictement guidé par la nature des
opérations décrites. En d'autres termes, il est question de
savoir si la prise en charge d'opérations par le budget
général peut bousculer les règles de présentation.
Et uniquement en cas de réponse positive, le suivi des mouvements de
fonds par un compte spécial s'imposerait. Avec un tel encadrement, le
pari de maintenir les CST dans une situation exceptionnelle serait
gagné.
Décidément, la spécialisation d'un compte
relèverait-elle plus de la volonté des autorités
politiques que de la nature des opérations retracées ?
Malgré les tentatives de rationalisation, l'on est obligé de
pencher pour une réponse affirmative ; c'est justement à
cela que monsieur RABATE faisait allusion quand il s'exprimait en termes
« d'arbitraire ».
Monsieur Christian BIGAUT a pu affirmer
qu' « à l'origine, les comptes spéciaux du
Trésor ont été le moyen d'échapper aux
règles strictes de la comptabilité publique et de dissimuler le
déficit budgétaire »103(*). Si l'heure n'est plus à
l'affranchissement des règles comptables, on peut à juste titre
continuer à s'inquiéter pour la persistance des risques de
déficit public.
Il faut également ajouter à l'utilisation
malicieuse ou l'usage fallacieux des CST, la faculté de rendre difficile
le contrôle.
Section II : Les difficultés du
contrôle
Si la doctrine est partagée sur l'importance des
pouvoirs parlementaires en matière financière, elle est unanime
pour admettre que l'autorité législative dispose d'une panoplie
de moyens de contrôle efficaces allant des questions - écrites ou
orales - aux audits en passant par les Commissions d'enquête. Cette
efficacité peine cependant à trouver ses marques en ce qui
concerne les CST du fait de plusieurs facteurs qui sont soit liés aux
conditions de contrôle (I), soit liés aux moyens
avec lesquels ce contrôle est effectué (II).
§ 1. Les difficultés liées
aux conditions de contrôle
Ce sont les entraves liées à l'objet du
contrôle. Elles se manifestent sous forme de rétention
d'informations de la part de ministres responsables des CST
(A), ou par la prolifération des documents de
contrôle (B).
A - La rétention d'informations des ministres
gestionnaires
Il faut d'abord préciser que tous les CST sont d'une
manière ou d'une autre sous la tutelle d'un Ministère. Cela,
faut-il le répéter, est dû à l'inexistence d'une
personnalité juridique pour les services concernés. Les
Ministres, étant responsables de l'ensemble de leurs services, ce sont
eux qui sont appelés à répondre de leur gestion devant les
parlementaires.
Mais de plus en plus, on se rend compte des difficultés
qui entourent ce contrôle caractérisé selon les rapporteurs
de la Commission française des Finances par des réponses
tardives, incomplètes ou symboliques. Il y a cependant lieu d'identifier
deux situations.
Les obstacles rencontrés dans le contrôle
parlementaire des CST sont souvent imputables à la particularité
d'une catégorie. C'est surtout le cas des comptes de règlement
avec les Gouvernements étrangers. En France, même si le Conseil
constitutionnel avait admis dans la décision n° 75-60 DC du 30
décembre 1975 que les accords dont il était question dans ce
compte « ne peuvent être prévus de manière
précise au moment du vote, mais font l'objet de comptes rendus complets
permettant de fixer la demande de découvert pour l'année
suivante, mettant ainsi le Parlement en mesure d'exercer le contrôle qui
lui appartient », ils étaient caractérisés
par « une zone de pénombre justifiée en principe
par les nécessités de l'action diplomatique ou militaire qui rend
difficile le contrôle parlementaire »104(*). Le Ministre de tutelle
de ces comptes - confiés à l'origine en France au Ministre de
l'Economie, des Finances et de l'Industrie - ne peut donc pas répondre
de manière exhaustive à toutes les interpellations au risque de
dévoiler des secrets d'Etat.
Dans les autres cas, la particularité des
opérations retracées par les CST transcende parfois le
régime juridique ; ce qui les rend favorables à des
entourloupes. Les ministres malveillants peuvent être enclins à
dissimuler une gestion nébuleuse pour ne pas dire frauduleuse qui ne
gagnerait pas à ce que certaines informations parviennent aux
parlementaires.
On pourrait être tenté de justifier une telle
attitude par le fait que les Ministres sont parfois appelés à
rendre compte pour des opérations dont ils ne sont ni les
administrateurs ni ne contrôlent le comptable assignataire. Et qu'il est
donc tout à fait admissible que même avec des documents à
l'appui, ils ne détiennent pas toujours la réponse à une
inquiétude d'un député. Ou encore qu'en cas de cogestion,
il y a toujours des enchevêtrements qui font que chacun des ministres
cogérants ne maitrise pas l'étendue et les limites de sa
responsabilité.
Cependant, dans le premier cas, il ne faut pas oublier que les
ministres disposent d'un minimum d'un mois pour se rapprocher de ceux
chargés de la gestion du compte afin d'obtenir le maximum d'informations
sur la question105(*).
Pour le second cas, on a en France l'exemple du compte
d'affectation spéciale dénommé Fonds national de l'eau qui
comporte un sous-compte pour le développement des adductions d'eau
géré par le Ministère de l'Agriculture, de l'alimentation,
de la pêche et des affaires rurales et un sous-compte de
solidarité pour l'eau sous la tutelle du Ministère de l'Ecologie
et du développement durable. Ces deux sous-comptes sont strictement
séparés pour l'ensemble de leurs opérations106(*), s'il existe donc des
risques d'interférence, ils sont fort bien négligeables.
En marge de ces deux situations, il faut souligner
l'opacité de certains comptes bénéficiant de dotations
budgétaires, ce que tentait de dénoncer le juge des comptes pour
qui : « La nature des dépenses de certains comptes ne
permet pas de constater un partage clair entre les financements pris en charge
par un compte spécial du Trésor et ceux relevant du budget
général. Ces pratiques qui ont déjà
été relevées dans le passé, rendent opaques les
interventions de l'Etat et montrent que la frontière entre le budget
général et comptes spéciaux du Trésor n'est pas
respectée »107(*).
Que ce soit par déficit d'informations ou
prééminence du caractère secret sur la gestion
transparente, c'est le contrôle parlementaire qui y perd sa
crédibilité. Pour contourner cet écueil, les
représentants du peuple peuvent choisir de se référer
directement aux documents fournis, ce qui complexifie leur tâche.
B - La prolifération des documents de
contrôle
L'évolution du contrôle budgétaire au
contrôle de la loi de finances, a élargi les pouvoirs du Parlement
et entrainé par la même occasion une extension des charges des
parlementaires. On ne saurait en dire plus que le professeur PHILIP qui
déclare : « Le document unique qui retrace l'ensemble
des charges et des ressources de l'Etat existe bien, mais pour le comprendre et
l'analyser sérieusement, les parlementaires doivent se
référer à une multitude d'annexes explicatives qui
s'adressent surtout à quelques spécialistes »108(*). Avec 20.000 pages,
trois (3) mètres de hauteur et un poids de cinquante (50) kg (toujours
d'après le doyen Loïc PHILIP), il n'est pas étonnant que les
lois de règlement interviennent avec des années de retard, une
décennie parfois dans le cas du Sénégal (avec les agents
du Trésor qui émettent environ 40.000 mandats par an).
En France, la Mission d'évaluation et de contrôle
se résume à choisir des thèmes et depuis 1998, ce choix
n'a jamais porté sur les CST. Et admettons que cette opportunité
se présente, ce n'est pas un contrôle sur lequel il faut compter
puisque occasionnel et ne pouvant aboutir que sur un rapport qui fait
état de la situation des comptes spéciaux au moment de
l'inspection.
Enfin, et c'est certainement le plus important, la
technicité qui se sent surtout dans les pays où règne une
conception surannée de la politique109(*). Les notions d'opérations temporaires, de
lien direct ne sont pas d'une compréhension automatique. Et faudrait-il
a priori que les opérations normales soient maîtrisées.
Au total, c'est dans des conditions qui défient toute
rigueur que les parlementaires sont appelés à contrôler
tout le contenu de la loi de finances, les CST inclus donc. Les deux
principales sources d'informations que constituent les ministres de tutelle et
les documents retraçant les mouvements de fonds sont en partie
défaillantes. Respectivement la première responsable du compte
n'est pas parfois suffisamment renseignée pour faire part des tenants et
des aboutissants de la gestion ; la seconde, synonyme de preuve, s'identifie
par son importance quantitative doublée d'un
ésotérisme110(*) qui laisse une marge de manoeuvre réduite aux
pensionnaires de l'Assemblée nationale et du Sénat.
A cette situation, s'ajoute une efficacité
limitée des moyens de contrôle qui ont pourtant fait leur preuve
avec les opérations budgétaires normales.
§ 2. Les difficultés liées
aux moyens de contrôle
Il s'agit l'inapplicabilité des principes
budgétaires. Les entorses aux principes classiques dénotent un
contrôle parlementaire résiduel (A), alors que
l'application irrégulière du principe de sincérité
témoigne d'un contrôle constitutionnel occasionnel
(B).
A - Un contrôle parlementaire
résiduel
Ce contrôle est essentiellement basé sur les
principes budgétaires classiques qui représentent jusqu'ici un
moyen efficace pour Parlement d'avoir un oeil sur l'ensemble de
l'activité financière gouvernementale. Ce sont des règles
de présentation - relatives à la durée et à la
forme - qui visent à faciliter et rendre efficient le contrôle
politique. En dehors du principe d'équilibre dont l'utilité est
battue en brèche, il y a le principe d'annualité qui voudrait que
l'exécution soit circonscrite sur douze (12) mois, le principe
d'unité qui exige la présence de toutes les opérations
financières dans un document unique, le principe d'universalité
avec ses deux ramifications à savoir la non-compensation (ou
non-contraction) qui signifie que les dépenses et les recettes doivent
figurer dans le budget pour leur produit brut, et la non-affectation qui
prohibe le financement d'une dépense déterminée par une
recette précise. Enfin nous avons le principe de
spécialité qui impose pour chaque crédit une destination
définie.
Le fondement des CST est bâti sur le non-respect de
certaines de ces règles. Du coup, les parlementaires se retrouvent
démunis de leur principale arme.
Avec le report de crédits, le contrôle n'est plus
régulier ; un compte peut mettre des années avant de
repasser devant le Parlement. Durant tout ce temps, les députés
et sénateurs restent sans la moindre information. Il faudrait
peut-être, pour corriger cela, songer à dresser des situations
annuelles de compte.
De même en vertu de l'antériorité qui est
partie intégrante de l'annualité, une connaissance exacte des
ressources et des dépenses aurait dû précéder
l'autorisation. Ce qui n'est pas le cas pour les comptes dont les deux
composantes ne sont qu'estimatives.
La faculté reconnue aux CST de contracter dissimule
parfois les montants réels aux parlementaires.
Autant d'exceptions qui vident le contrôle politique des
CST de son sens ; ce qu'il ne faut pas comprendre ici par totalement
inefficace, mais inapplicabilité de certains des principes qui servent
de soubassement à cette efficacité face aux opérations du
budget général.
Etant donné qu'il est impensable de ne pas exiger d'une
quelconque activité financière, quelle que soit sa
particularité, un compte rendu de gestion, ne faudrait-il pas recourir
à d'autres principes tels que celui de sincérité sous
l'auspice du juge constitutionnel ?
B - Un contrôle constitutionnel
occasionnel
Parallèlement à leur pouvoir de contrôle,
les parlementaires disposent d'une possibilité de recourir à la
juridiction constitutionnelle qui peut se prononcer sur la
sincérité des opérations y compris celles des CST.
Cette vérification initiée par le Conseil
constitutionnel français avant d'être consacré par
l'article 32111(*) de la
LOLF de 2001 s'intéresse à l'erreur manifeste
d'appréciation qui permet de déceler en plus des erreurs
normales, celles qui relèvent d'une mauvaise foi. Elle ne peut cependant
être effectuée que sur saisine ; ce qui ne garantit pas sa
récurrence. Si en France, on a pu noter une quasi-automaticité de
cette saisine112(*), ce
n'est pas dans les habitudes du parlementaire sénégalais de
saisir le juge constitutionnel pour des questions financières.
Peut-être trouve-t-on l'explication dans le phénomène
majoritaire qui fait souvent primer des considérations politiciennes sur
les nécessités de bonne gestion et qui laisse donc une infime
chance au quorum exigé pour la saisine d'être atteint. L'autre
problème réside dans l'effectivité de la
sincérité en droit sénégalais. Le principe est en
effet consacré par la directive n° 02/2000 portant
adoption du code de transparence mais peine à trouver ses marques en
termes de réception en droit interne et d'application113(*).
Il y a donc peu de chance pour qu'il soit
procédé à un contrôle constitutionnel des CST. Et si
l'occasion se présente, un autre inconvénient est le fait que le
juge dispose de peu de temps pour s'intéresser aux détails face
à des documents caractérisés par leur consistance.
En définitive, ce même si les CST ne sont pas
affranchis de tout contrôle comme c'était initialement les cas, il
est difficile d'attester de leur saine gestion par l'entremise des principes
budgétaires, que ce soit ceux sous l'égide du Parlement ou celui
sous l'autorité du Conseil constitutionnel. Ce n'est pourtant pas
toujours par mauvaise volonté, mais c'est leur principe de
fonctionnement et la souplesse du régime juridique qu'il impose qui ne
permettent pas de les soumettre à ces moyens de contrôle. C'est
pour cette raison que le professeur BOUVIER a pu affirmer pour les comptes
d'affectation spéciale qu'« ils servent à
réaliser ce qui est normalement interdit, à savoir l'affectation
de certaines recettes à certaines
dépenses »114(*).
Plusieurs inconvénients, tantôt du fait de la
législation, tantôt du fait de la pratique, contribuent à
relativiser l'utilité du procédé des CST. Dans une
certaine mesure, ce régime juridique tant loué apparaît
comme un pis-aller. Ces entraves constituent le revers d'une médaille
dont l'avers fait montre d'une réussite de cumul de la
particularité des opérations et de la nécessité de
supervision des deniers publics.
CONCLUSION
Au terme de cette étude, on découvre les
véritables dimensions que recouvre la notion de compte spécial
dont l'étude mérite une place plus importante que celle qu'on lui
accorde dans l'étude des Finances publiques en général,
puisque uniquement envisagée dans le cadre des exceptions aux principes
budgétaires.
L'heure est aujourd'hui à l'interrogation sur la
nécessité du maintien de cette pratique. Les
spécificités prises en comptes sont un argument de taille pour
les partisans de la conservation. On ne saurait effectivement défendre
l'idée de confondre toutes les opérations dans un document unique
sans se soucier de leur diversité. Evidemment un tel régime
juridique favoriserait davantage les risques ou apparences de malversation dans
la mesure où pour clôturer la gestion annuelle, il faut se
contenter d'une tenue partielle pour certains comptes. Toujours dans le
même sens, il existe des comptes ou catégories de comptes
tellement utiles que les faire disparaître pourrait entrainer un
déséquilibre. Il en est ainsi des avances accordées aux
Collectivités locales. La suppression d'un tel compte peut causer des
désagréments aux autorités locales qui sont
habituées à percevoir leurs recettes avant recouvrement. Pour ce
compte, au même titre que pour le FNR, nous militons pour un fondement
organique qui présente plus de garantie comme c'est le cas en France
pour le compte Gestion des participations financières de l'Etat et
Pension prévu à l'article 21 de la LOLF.
Il faudrait trouver un terrain d'entente qui à notre
avis requiert que l'on repense l'esprit des CST. A une intervention a
posteriori qui se matérialise par des suppressions, il faut substituer
des conditions sélectives et rigoureuses préalables à
l'admission d'un compte dans une des catégories.
Commençons par ces dernières. Elles devraient
être restreintes, et celles restantes, singulièrement
organisées. Les comptes de règlement avec les Gouvernement
étrangers doivent subir le même sort que les comptes
d'opérations monétaires au Sénégal.
S'agissant des comptes d'affectation spéciale, il faut
instituer une procédure incluant la preuve de la nécessité
de ne pas faire supporter par le budget général les
opérations dont il s'agit et une commission composée de
parlementaires et d'agents du Trésor pour statuer en dernier lieu.
L'imprécision des types d'opérations retracés - qui en
fait une proie facile pour tout mouvement de fonds prétendant à
un CST - et la violation de l'égale importance des charges publiques
appellent ainsi un encadrement rigide.
Pour les comptes de prêts et d'avances, étant
donné qu'en dehors de la durée, il n'y a pas de grande
différence, il est préférable de procéder à
l'image de la France à leur fusion dans un compte de concours financiers
qui comprendrait en même temps les garanties et avals comme sous compte.
Si nous avons, dans une certaine mesure trouvé la suspension de ces
derniers salutaire, cela ne veut pas pour autant dire qu'il faille les
supprimer. C'est juste que leur fonctionnement ne doit pas être
structurel, mais tributaire de la situation financière annuelle de
l'Etat, qui à défaut de pouvoir prêter lui-même, se
porte garant auprès des institutions financières.
Pour le cas des comptes de commerce, il est souhaitable que
les opérations soient incorporées dans une rubrique
« ressources extraordinaires » annexée à la
partie du budget allouée au service entretenant l'activité
secondaire retracée. Celui-ci bénéficierait directement
des retombées de ses initiatives subsidiaires115(*) et de l'autre
côté, le caractère imprévisible ne poserait plus
problème.
Le spectre d'un usage malintentionné a quelque part
survécu ; cette réforme pourrait être pour le
Sénégal l'occasion de débarrasser définitivement
les CST d'une telle image. Si nous poussons la réflexion, on se rend
compte que dans certains cas c'est par pure ignorance que les autorités
politiques s'engouffrent dans de telles situations. En vérité,
pour nombre d'entre eux, compte spécial doit décrire
opérations spéciales au sens opposé à celui
d'opérations courantes.
Bibliographie
Textes
Directive n°05-97 CM UEMOA relative aux lois de finances
Directive n° 04-98 portant Nomenclature du budget de l'Etat
dans l'espace UEMOA
Directive 02-2000 portant adoption du code de transparence dans
la gestion des Finances publiques
Ordonnance française du 02 janvier 1959 portant loi
organique relative aux lois de finances
Loi organique n° 99-70 du 17 février 1999 sur la Cour
des comptes116(*)
Loi n° 2001-09 du 15 octobre 2001 portant LOLF
modifiée
Loi française n° 2001-692 du 1er
août 2001 portant LOLF
Loi 2007-12 du 6 février 2007 portant loi de
règlement pour la gestion 1997
Loi 2007-32 du 27 décembre 2007 portant loi de finances
pour l'année 2008
Loi 2008-70 du 11 décembre 2008 portant loi de finances
pour l'année 2009
Loi n° 81-26 du 26 juin 1981 portant loi de finances pour
l'année financière 1981-82117(*)
Loi n° 2002-08 du 22 février 2002 abrogeant
et remplaçant certaines dispositions de la loi n° 81-52 du 10
juillet 1981 portant Code des Pensions civiles et militaires de
Retraite118(*)
Décret 79-1151 du 17 décembre 1979 fixant les
règles d'organisation et de fonctionnement du fonds d'aide au sport et
à l'éducation populaire
Décret 2003-101 du 13 mars 2003 portant règlement
général sur la comptabilité publique
Décret français n° 2006-1727 du 23
décembre 2006 relatif au taux d'intérêt des concours
financiers relevant des comptes intitulés « avances aux
collectivités territoriales » et « accords
monétaires internationaux »119(*)
Arrêté interministériel n° 5268
MEF/DGT/TG du 26 mai 1982 définissant la nature des opérations
imputables au compte spécial du Trésor intitulé
« opérations à caractère industriel et
commercial » effectuées par l'Armée et fixant les
modalités de fonctionnement120(*)
Arrêté n° 00001/MEF/DGCPT du 04 janvier 2001
portant organisation de la Direction générale de la
Comptabilité publique et du Trésor
Arrêté
ministériel n° 6058/MEF/DGCPT du 22 août 2003 portant
établissement de la nomenclature des pièces justificatives des
dépenses de l'Etat
Jurisprudence
Décision n° 75-60 DC du 30 décembre 1975 - Loi
de finances pour 1976, notamment ses articles 41-III et 47
Décision n° 82-154 DC du 29 décembre 1982
Décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001 - LOLF
Décision n° 2003-489 DC du 29 décembre 2003
- Loi de finances pour 2004
Décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005 -
Loi de finances pour 2006
Décision n° 2006-538 DC du 13 juillet 2006 - Loi
portant règlement définitif du budget de 2005
Ouvrages généraux
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1977
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l'Harmattan, 1990
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Charles FOURRIER, Finances publiques du Sénégal,
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Pierre LALUMIERE, Les Finances publiques, Armand Colin, 1970
Maurice DUVERGER, Finances publiques, PUF, 7e
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Gilbert ORSONI, Science et législation financières,
Paris, économica, 2005
Loïc PHILIP, Finances publiques, 5e éd.,
Paris, CUJAS, 1995
Raymond MUZELLEC, Finances publiques, 14e éd.,
Sirey, 2006
André PAYSANT, Finances publiques, 5e
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P.-M. GAUDEMET & J. MOLINIER, Finances publiques (Budget /
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Encyclopédie juridique de l'Afrique, Tome III,
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Revues
Revue française de finances publiques
Revue du Droit Public
Webographie
www.jors.gouv.sn
www.finances.gouv.sn
www.tresor.gouv.sn
www.courdescomptes.sn
www.conseil-constitutionnel.fr
www.legifrance.gouv.fr
www.rffp.gerfip.org
Table des matières
INTRODUCTION............................................................................1
PREMIERE PARTIE : La particularité des
CST...............................8
Chapitre 1 : La particularité des
règles de
fonctionnement....................................9
Section 1 : Les règles communes aux
CST............................................................9
Paragraphe 1 : La description d'opérations
à caractère
exceptionnel............................................9
A - Les opérations à caractère
temporaire..........................................................................9
B - Les opérations à caractère
définitif...........................................................................................11
Paragraphe 2 : La corrélation entre recettes
et
dépenses.....................................................13
A - L'affectation de certaines recettes à certaines
dépenses......................................................................13
B - L'approvisionnement des comptes par système
revolving...................................................................14
Section 2 : Les règles spécifiques
à chaque
CST..........................................................15
Paragraphe 1 : Les CST dotés de
crédits de dépenses...
....................................................15
A - Les comptes d'affectation
spéciale.............................................................................16
B - Les comptes
d'avances....................................................... ..................................17
C - Les comptes de
prêts..............................................................................................18
D - Les comptes de garanties et
d'avals............................................................................18
Paragraphe 2 : Les CST dotés d'autorisation
de
découvert..................................................20
A - Les comptes de
commerce.......................................................................................20
B - Les comptes de règlement avec les Gouvernements et
autres organismes étrangers.....................21
C - Les comptes d'opérations
monétaires...........................................................................22
Chapitre 2 : La particularité du mode de
gestion.................................................23
Section 1 : Une particularité sous-tendue
par une modalité de description dérogatoire.....23
Paragraphe 1 : Une gestion en dehors des
règles
budgétaires...............................................23
A - La contraction entre recettes et
dépenses................................................................................24
B - Les reports de
crédits............................................................................................................................25
Paragraphe 2 : Une gestion en dehors du document
budgétaire.............................................25
A - Une gestion particulière au regard du budget
général........................................................25
B - Une gestion particulière au regard des budgets
annexes.....................................................26
Section 2 : Une particularité
relative.......... ..
............................................................28
Paragraphe 1 : Une gestion soumise à la
procédure
budgétaire............................................28
A - Une procédure d'exécution identique à
celle du budget
général...........................................28
B - Une exécution conforma à la séparation
des ordonnateurs et des comptable.............................29
Paragraphe 2 : Une gestion soumise au contrôle
parlementaire............................................30
A - L'autorisation
préalable...........................................................................................30
B - Le contrôle a
posteriori...........................................................................................32
DEUXIEME PARTIE : Les enjeux de l'institution des
CST............33
Chapitre 1 : Les avantages des
CST.................................................................34
Section 1 : Les avantages des CST dans le
procédé
.....................................................34
Paragraphe 1 : Les avantages sur les finances de
l'Etat......................................................34
A - L'allégement du budget de
l'Etat................................................................................34
B - L'évaluation des services de
l'Etat.............................................................................36
Paragraphe 2 : Les avantages sur le service
affilié au
CST..................................................37
A - La souplesse de gestion
..........................................................................................37
B - L'autonomie de
fonctionnement..............................................................................38
Section 2 : Les avantages des CST dans leur
singularité.............................................39
Paragraphe 1 : Les avantages pour les
Collectivités
publiques.............................................39
A - les avances accordées aux Collectivités
locales................................................................40
B - Les concours financiers apportés aux autres organismes
publics...........................................41
Paragraphe 2 : Les avantages pour les personnes
privées.............. ....................................43
A - Les prêts et avances accordés aux
particuliers...............................................................44
B - La caisse d'encouragement de la pêche et à ses
industries annexes.......................................44
Chapitre 2 : Les inconvénients des
CST........................................................46
Section 1 : Les difficultés de la saine
gestion des finances publiques en cours
d'exécution...............................................................................................46
Paragraphe 1 : Les risques d'accroissement des
déficits publique.........................................46
A - Les violations du principe
d'équilibre..........................................................................47
B - Les dotations
budgétaires.........................................................................................48
Paragraphe 2 : Les dangers de l'expansion des
CST ..........................................................49
A - La dénaturation de l'objectif des
CST...........................................................................49
B - La tendance à l'érection du
procédé en
principe...............................................................50
Section 2 : Les difficultés du
contrôle
..........................................................................51
Paragraphe 1 : Les difficultés liées
aux conditions de
contrôle.............................................51
A - La rétention d'information des ministres
gestionnaires......................................................52
B - La prolifération des documents de
contrôle....................................................................54
Paragraphe 2 : Les difficultés liées
aux moyens de
contrôle..................................................55
A - Un contrôle parlementaire
résiduel...............................................................................55
B - Un contrôle constitutionnel
occasionnel........................................................................56
CONCLUSION...............................................................................................58
Bibliographie....................................................................................60
* 1 Ancien comptable public
* 2 Un travail que nous osons
apprécier pour en avoir saisi une bonne partie ; et il ressort de
cette appréciation, somme toute objective, un esprit
éclairé et au fait du vrai sens de la Mouridiya.
* 3 Mourchid Souleymane SY, De
Médine à Touba, Collection Hadiaratoul Aswad, 2009, p. 31
* 4 Loi du 26 décembre
1890 ouvrant un compte spécial du Ministère de la marine
* 5 Loi n° 47-520 du 31
mars 1947 qui pour la première fois exigea la publication annuelle de la
liste des comptes et du montant de leurs opérations. Interviendront
ensuite les lois des 06 janvier (portant loi de finances de l'année) et
31 décembre 1948 qui ont procédé à une
réduction considérable des CST après un recensement de
plus de 400 unités. L'année suivante, la loi 49-310 du 08 mars
procéda à la catégorisation annoncée par la loi de
1948. C'est enfin avec le décret-loi de 1956 et plus tard avec
l'ordonnance du 02 janvier portant LOLF que le régime juridique actuel
des CST a été achevé.
* 6 L'UEMOA est venue
consacrer le même régime juridique à travers la directive
n° 05-97 CM UEMOA du 16 décembre 1997 relative aux lois de
finances.
* 7 Nous faisons
référence aux comptes de règlement avec les Gouvernements
et autres Organismes étrangers qui n'ont pas été
reconduits par la loi organique 2001-692. Concernant ceux qui défendent
que ces comptes ont été supprimés, il faut relativiser
dans la mesure où M. Jacques LAUZE affirme que cette catégorie a
été intégrée dans les comptes d'opérations
monétaires ; ce qui veut donc dire que cette disparition vaut
uniquement pour leur existence en tant que catégorie à part. Cf.
J. LAUZE, Les grands principes du droit budgétaire d'une loi organique
à l'autre, RDP n° 6-2001, p. 1717
* 8 Pierre Di MALTA, Finances
publiques (1 - Le budget), Paris, PUF, 1999, p. 33. Le seul reproche que l'on
peut objecter à cette définition c'est de ne pas préciser
les raisons qui sous-tendent la tenue de ces opérations hors budget,
à savoir leur caractère temporaire ou la corrélation entre
recettes et dépenses qui ne sont pas conformes aux règles
budgétaires.
* 9 P.-M. GAUDEMET & J.
MOLINIER, Finances publiques (Budget / Trésor), 7e
éd., Paris, Montchrestien, 1996, p. 285
* 10 Ces deux exemples font
respectivement référence à la caisse d'encouragement
à la pêche et à ses industries annexes (CEPIA) régie
par le décret n° 80-518 du 21 mai 1980 modifié par le
décret 82-87 du 24 février 1982 et au Fonds national des
retraités (FNR) organisé par la loi n° 2002-08 du 22
février 2002 abrogeant et remplaçant certaines dispositions de la
loi n° 81-52 du 10 juillet 1981 portant Code des Pensions civiles et
militaires de Retraite (JORS n° 6038 du samedi 23 mars 2002)
* 11 La transition du statut
de dérogation au statut d'aménagement a trouvé
consécration dans l'article 32 de l'ordonnance du 02 janvier 1959
portant LOLF qui intègre désormais les CST en annexe dans la loi
de finances.
* 12 « La
nature des dépenses de certains comptes ne permet pas de constater un
partage clair entre les financements pris en charge par un CST et ceux relevant
du budget général. Ces pratiques, qui ont déjà
été relevées dans le passé rendent opaques les
interventions de l'Etat et montrent que la frontière entre budget
général et CST n'est pas suffisamment
respectée. » in Rapport Cour des comptes sur l'exercice
de la loi de finances pour l'année 1998, juillet 1998, p. 205
* 13 Gilbert ORSONI, Science et
législation financières, Paris, Economica, 2005, p. 251
* 14 Cf. Raymond MUZELLEC,
Finances publiques, 14e éd., Sirey, 2006, p. 296
Jacques LAUZE, Le compte d'avances sur impositions locales,
in RFFP n° 32, Les comptes spéciaux du Trésor, Paris, LGDJ,
1990, p. 111 et s.
* 15 Il faut admettre que
quelle que soit la spécificité de ces opérations, si elles
avaient été assujetties à un régime juridique
identique à celui du budget, l'étude de leur impact ne
présenterait pas un enjeu qui mérite qu'on lui accorde une
importance particulière
* 16 A l'instar de la
France, le Sénégal a procédé à des
suppressions de CST notamment avec la loi n° 81-26 du 26 juin 1981 portant
loi de finances pour l'année financière 1981-1982 (JORS du 11
juillet 1981, p. 681 et s.) qui à l'exposé des motifs
déplore la consistance de comptes équivalent au quart du budget
général en insistant sur la nécessité de stopper
leur prolifération et en procédant à la suppression de la
caisse nationale du marché. En outre, la loi précise que
« cette assainissement se poursuivra au fur et à mesure
pour ne conserver que les plus indispensables de ces
comptes. ».
* 17 « La
technique du compte spécial du Trésor se justifie quant à
elle par la volonté de distinguer certaines opérations
spécifiques de l'Etat (...). A ce titre, elle répond à un
souci de rationalité et d'objectivité. » in
Supplément aux cahiers français n° 225, Mars-avril 1986, la
documentation française, Paris, 1986, p. 3
* 18 Le Professeur Di Malta
ne nous contredit pas lorsqu'il déclare à la page 405 du
dictionnaire encyclopédique des Finances publiques :
« Ces carences ne remettent pas en cause l'utilité du
procédé ».
* 19 Les comptes
budgétaires sont regroupés suivant la nature des
opérations qu'ils retracent. Si elles sont définitives, on parle
d'opérations « au-dessus de la ligne », si par
contre elles sont temporaires, elles sont dites « au-dessous de la
ligne» Cf. Christian BIGAUT, Finances publiques-Droit
budgétaire : Le budget de l'Etat, Paris, Ellipses, 1995, p. 34
* 20 Maurice DUVERGER, Finances
publiques, PUF, 7e éd., 1971, p. 274
* 21 Nous nous voulons
suffisamment circonspect pour ne pas indexer une catégorie
entière. La majeure partie des auteurs citent en exception à
cette règle les comptes d'affectations spéciales or, en France,
deux d'entre elles en l'occurrence le fonds forestier national et le compte de
soutien à l'industrie cinématographique, procèdent
à des prêts qui naturellement sont comptabilisés comme des
opérations temporaires. Le projet de loi de finances pour 2003 en France
dans son exposé des motifs est clair ; il précise que cette
catégorie retrace « des opérations définitives
et, le cas échéant temporaires ».
* 22 Voir introduction, p. 3
* 23 Maurice DUVERGER, ibid.
* 24 P.-M. GAUDEMET & J.
MOLINIER, op. cit. p. 285
* 25 Cf. article 8 du
décret n° 80-518 du 21 mai 1980 fixant les règles
d'organisation et de fonctionnement de la CEPIA. Voir aussi arrêté
n° 4795 du 04-06-2008 du Ministère de l'économie maritime et
des transports maritimes, de la pêche et de la pisciculture portant
compte prévisionnel pour la gestion 2008 de la CEPIA.
* 26 Il faut ajouter qu'en
cas d'insuffisance de ressources, l'Etat se charge de combler ce déficit
par l'entremise de subventions du budget général.
* 27 Mamadou DIOP, Finances
publiques sénégalaises, NEA, 1977, p. 35
* 28 Michel BOUVIER et alii,
Finances publiques, 4e éd., Paris, LGDJ, 1998, p. 213
* 29 JORS n° 4751 du 16
février 1980, p. 63. Ce compte a aujourd'hui disparu du paysage des
CST
* 30 Mamadou DIOP, ibid.
* 31 Il suffit de
connaître le montant du salaire net et de lui faire supporter les
remboursements mensuels perçus à la source tout en tenant compte
des années de service donc de salaire qui restent au demandeur du
prêt. Cette durée doit au moins être égale au temps
prévu pour le règlement définitif du prêt.
* 32 Pour le cas
spécifique du compte DMC, le remboursement peut précéder
de 12 voire 24 mois la disponibilité de la somme pour le demandeur du
prêt.
* 33 Cette classification
est implicitement consacrée par la loi 2001-692 portant LOLF et
explicitement entérinée par le ministère français
des finances qui présente souvent les CST sur la base de cette
classification dans les projets de loi de finances. Il en existe cependant
d'autres comme la distinction opérée par MM. Bloch-Lainé
et de Vogué qui identifient les comptes correspondant à des
démembrements du budget, les comptes de relation monétaire et les
comptes de crédit, ou encore celle tripartite aussi proposée par
les rapporteurs de la commission de l'Assemblée nationale
française à savoir les comptes décrivant des
opérations de même nature que celle du budget, les comptes des
activités financièrement autonomes de l'Etat et les comptes des
activités de l'Etat prêteur. Une autre selon le professeur Di
Malta serait fondée sur le régime juridique et séparerait
les comptes présentés en brut de ceux faisant l'objet d'une
présentation en net. Cf. Pierre Di Malta, Le régime juridique des
comptes spéciaux du Trésor, in RFFP n° 32, Les comptes
spéciaux du Trésor, LGDJ, Paris, 1990, p. 23.
* 34 Raymond MUZELLEC, op. cit.
p. 294
* 35 M. Laurent RABATE
soulève d'ailleurs une autre particularité par rapport aux CST
dans le même sens lorsqu'il fait référence à une
« absence de définition des opérations ».
C'est en fait le seul compte qui enregistre des dépenses qui n'ont pas
toutes une destination identique en termes de nature. Voir Laurent RABATE, Du
bon usage des comptes d'affectation spéciale, RFFP n° 32
précitée, p. 35 et s.
* 36 La LOLF
française de 2001 prévoit pour les comptes de concours financiers
qui englobent à la fois les avances et les prêts, qu'un
décret pris en Conseil d'Etat peut déroger à cette
disposition et ramener le taux plus bas.
* 37 Cet
intérêt peut faire l'objet d'une dispense par voie
décrétale
* 38 René CELIMENE,
Droit budgétaire et comptabilité publique au
Sénégal, NEA, 1985, p. 15
* 39 Nguyen CHANH TAM, Finances
publiques sénégalaises, l'Harmattan, 1990, p. 206
* 40 Même s'il est
toujours prévu dans l'exposé des motifs de la loi de finance des
ressources pour ce compte comme pour l'année 2006 où elles
s'élevaient à 3.500.000.000 de francs CFA
* 41 Dans la loi 2008-70
portant loi de finances pour l'année 2009, la suspension de la
catégorie s'explique par une non-reconduction de sa dotation et non par
un défaut de fonctionnement (Comme c'était le cas des comptes de
commerce de la DPS et de l'Administration pénitentiaire). Ce qui ne
renseigne pas clairement sur l'issue de cette mise en veilleuse.
* 42 « Une
autorisation de découvert implique que tout au long de l'année
budgétaire, la différence entre le montant des opérations
portées au débit du compte et celui des opérations
portées à son crédit doit demeurer inférieure au
découvert prévu. », définition
proposée par le Pr. Di Malta à la page 313 du dictionnaire
encyclopédique des Finances publiques.
* 43 JORS de 1982, p. 435 et
s.
* 44 Jacques PROVENSAL, Les
comptes de commerce, RFFP n° 32 précité, p. 57
* 45 Pierre Di Malta, ibid.
* 46 La loi 75-64 portant
LOLF reconnaissait au Gouvernement sénégalais la
prérogative de ne pas présenter de prévision aussi bien
pour les recettes que pour les dépenses (JORS 4432 du 30 juin 1975, p.
902 et s.).
* 47 Il ne peut en principe
être procédé à sa suppression effective que par une
nouvelle LOLF ou une modification de l'ancienne même si la
catégorie ne figure plus dans la rubrique CST des lois de finances.
* 48 Michel BOUVIER et alii,
op. cit. p. 208
* 49 Cette catégorie
a été supprimée de la législation
sénégalaise par la loi 2008-70 du 11décembre 2008 portant
loi de finances pour l'année 2009, voir article 11. Ce qui paraît
contradictoire puisque dans la hiérarchie des normes, la loi organique
est au dessus de la loi ordinaire. Ce qui signifie qu'une loi de finances (loi
ordinaire) a obligation de conformité par rapport à la LOLF. Il
fallait en principe une modification ou une autre loi organique pour
procéder à cette suppression dans la mesure où les
catégories, à la différence des comptes qui les composent
ont un fondement organique (exception faite en France des comptes
expressément prévus par la LOLF en son article 21, notamment la
gestion des participations financières de l'Etat ou les
opérations relatives aux pensions et avantages).
* 50 Les comptes
d'opérations monétaires sont moins exposés que les autres
comptes à certaines pratiques nébuleuses visant souvent à
rendre les dépenses difficiles à contrôler par le
Parlement.
* 51 « La
société a le droit de demander compte à tout agent public
de son administration. »
* 52 Il y a également
le principe d'unité que nous avons choisi de ne pas traiter dans ce
paragraphe parce que ne faisant pas ressortir la particularité du mode
de gestion des CST, même s'il met en évidence une autonomie de
gestion des CST ; raison pour laquelle on l'a implicitement abordé
dans le paragraphe réservé à la gestion en dehors du
document budgétaire.
* 53 Pour éviter de
nous répéter, nous avons réduit dans ce paragraphe la
violation du principe d'universalité à la compensation mais la
règle de la non-affectation est violée au même titre par
les CST.
* 54 Voir sur ce point la
classification opérée par le professeur Di Malta entre les CST se
conformant à la règle de l'universalité et les autres qui
y dérogent dans la RFFP n° 32, p. 23
* 55 Voir supra p. 12
* 56 Pierre DI MALTA, loc. cit.
p. 31
* 57 André PAYSANT,
Finances publiques, 5e éd., Paris, Dalloz, 1999, p. 114
* 58 Même si le
procédé est prévu pour le budget général il
reste exceptionnel or dans le cadre des CST le report est le principe
* 59 Gilbert ORSONI, op. cit.
p. 246
* 60 Pierre LALUMIERE, Les
Finances publiques, Armand Colin, 1970, p. 61
* 61 A l'exception des
établissements publics, elles sont affranchies des règles de la
comptabilité publique, y compris du principe de la séparation des
ordonnateurs et des comptables, ce qui n'est pas le cas des CST comme nous le
verrons un peu plus loin. Voir sur ce point Moustapha SOURANG, « Les
biens et les finances des entreprises publiques »,
Encyclopédie Juridique de l'Afrique, NEA, Tome 7, 1982, p. 281 et s.
* 62 Il faut préciser
que la poursuite d'une activité industrielle et commerciale n'est pas
une condition suffisante pour se voir appliquer les règles de la
comptabilité privée - autrement les comptes de commerce et les
budgets annexes leur auraient été soumises - c'est la
compétitivité des entreprises publiques qui a poussé le
législateur à assouplir les règles de gestion pour donc
les mettre dans les mêmes conditions que les entreprises privées
avec lesquelles elles entrent en concurrence.
* 63 JORS 4751 du 16
février 1980, p. 163 et s.
* 64 Il faut cependant
relever cette particularité des dépenses relatives aux pensions
du fonds national de la retraite à être soumis au même
traitement comptable que pour les dépenses sur salaire alors que les
dépenses des autres CST sont traitées en comptabilité
comme les dépenses de matériel et d'investissement. Cf. Cours sur
la comptabilité de l'Etat, Ecole Nationale d'Administration du
Sénégal / Section Trésor
* 65 Cette soumission des
CST au principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables
n'est pas apparue avec les réformes entreprises au lendemain de la
seconde guerre mondiale. Déjà avec la loi française du
1er décembre 1922, il a été institué un
compte d'apurement des CST avec un chef de service qui par
délégation du ministre chargé des Finances devait se
charger d'émettre des ordres de recettes et d'assurer les fonctions
d'ordonnateur en matière de dépenses et un agent comptable qui
par l'intermédiaire des comptables directs du Trésor (et non
personnellement) réalisera des opérations de recettes et de
dépenses. Cf. Pierre DI MALTA, loc. cit. p. 15
* 66 CE (français) d
u
30 janvier 2008 : « le principe de la séparation
des ordonnateurs et des comptables, s'il est fondamental au sens de
l'article 2 du décret n°62-1587 du 29 décembre 1962, n'est
pas un principe général du droit qui s'appliquerait même en
l'absence de texte et qui aurait une "valeur législative" à
laquelle le pouvoir réglementaire ne saurait déroger
».
* 67 Pierre DI MALTA, op. cit.
p. 37
* 68 JORS de 1982, p. 435
* 69 Contrairement à
ce que pourrait laisser penser leur appellation, les comptes spéciaux du
Trésor ne sont pas confiés à des comptables
spéciaux du Trésor - qui sont à la lumière de
l'article 31 du décret 2003-101 portant règlement
général sur la comptabilité publique du
Sénégal « comprennent les comptables des
administrations financières, les régisseurs d'avances et les
régisseurs de recettes » - mais par des comptables directs du
Trésor qui sont compétents pour exécuter toute
opération de recettes et de dépenses du budget
général et des CST (article 30 décret 2003-101).
* 70 Cours sur la
comptabilité de l'Etat, Ecole Nationale d'Administration du
Sénégal / Section Trésor
* 71 Arrêté
n° 00001/MEF/DGCPT du 04 janvier 2001 portant organisation de la Direction
Générale de la Comptabilité Publique et du Trésor,
voir
www.tresor.gouv.sn
* 72 Hervé MESSAGE,
« Le contrôle parlementaire des CST », RFFP n°
32, p. 153
* 73 Mamadou DIOP, op. cit. p.
144
* 74 Paul AMSELEK, Le budget de
l'Etat sous la Ve République, 1967, p. 86
* 75 Eric DEVAUX, Finances
publiques, Bréal, 2002, p. 104. Précisons que ce qui nous
intéresse dans cette assertion, c'est moins la notion de
débudgétisation que la faculté des CST à
délester le budget de l'Etat.
* 76 Eric DEVAUX, op. cit, p.
60
* 77 Gilbert ORSONI, op. cit.
p. 251
* 78 Il faut au passage
noter que la LOLF française de 2001 a procédé à des
réformes allant dans le sens de rendre plus aisée cette
évaluation des services de l'Etat. Dans le respect du principe de
spécialité on ne parle plus de titre et chapitre mais on raisonne
en termes de mission et programme. La mission comprend un ensemble de
programmes concourant à une politique publique et pouvant
éventuellement relever de plusieurs ministères. Les
crédits seront attribués pour une mission précise et un
contrôle sera exercé pour savoir si ces missions ont bel et bien
été remplies. Au Sénégal où on n'a pas
encore connu pareille refonte, les CST remplissent cette fonction pour les
secteurs dont ils décrivent les opérations.
* 79 Michel BOUVIER et alii,
op. cit. p. 213
* 80 André PAYSANT,
Finances publiques, 5e éd., Paris, Dalloz, 1999, p. 119
* 81 Initialement, le
montant du prêt variait entre 2.000.000 F CFA et 5.000.000 F CFA. Le
fonctionnaire ayant opté pour la première modalité
pouvait bénéficier d'une rallonge de 3.000.000 F CFA de plus.
C'est ultérieurement que le Gouvernement a jugé cette
première modalité nettement insuffisante pour couvrir les frais
de construction d'un logement et que les montants de tous les prêts ont
été harmonisés à hauteur de 5.000.000 F CFA. Il
faut également préciser que le prêt est
exonéré de tout intérêt.
* 82 Les salaires de certains
fonctionnaires sont ponctionnés à hauteur de 59.000 F CFA pour
une durée de sept ans et un mois.
* 83 Gilbert ORSONI, ibid.
* 84 Conformément aux
dispositions de l'article 255, le compte peut également être
sollicité suivant les conjonctures : « L'Etat peut
consentir des avances aux collectivités locales qui justifient :
- que leur situation de caisse compromet le
règlement des dépenses indispensables et urgentes ;
- que cette situation n'est pas due à une
insuffisance des ressources ou à un déséquilibre
budgétaire »
* 85 Conformément
à l'article 24 de la LOLF française de 2001, le décret en
Conseil d'Etat n° 2006-1727 du 23 décembre 2006 relatif au taux
d'intérêt des concours financiers relevant des comptes
intitulés « Avances aux collectivités
territoriales » et « Accords monétaires internationaux
» précise dans son article 1er que « les
concours accordés au titre de la seconde section du compte de concours
financiers intitulé « avances aux collectivités
territoriales » ne sont pas assortis d'un taux
d'intérêt ».
* 86 Ce sont les seuls
organismes publics expressément prévus par la loi de finances
dans la catégorie des comptes d'avances et des prêts. Les autres
se retrouvent dans la rubrique divers organismes.
* 87 JORS n° 6438 du
samedi 15 novembre 2008 à consulter sur
www1.adie.sn/jo/article.php3?id_article=717
* 88 On peut ranger les
garanties et avals de l'Etat dans les concours financiers. La seule
différence étant ici qu'il s'agit d'un engagement passif par
opposition à celui actif qui renvoie au décaissement
matériel. Dans le premier cas, le fait pour l'Etat de supporter les
risques de non remboursement est synonyme d'un décaissement
éventuel.
* 89 C'est la même
démarche pour les Collectivités locales ; lorsque ces
dernières dépensent les sommes qui leur ont été
avancées par l'Etat, on considère qu'elles sont en train de
dépenser leur propre argent dont elles ne disposent pas pour le moment.
Concomitamment au recouvrement le Trésor reprend son dû. La seule
différence qu'on peut noter, c'est que contrairement aux
Collectivités locales, le fonctionnaire, au moment où il
perçoit l'avance, n'est pas encore propriétaire des fonds avec
lesquels il compte rembourser puisque le service n'est pas encore fait.
NB : Salaire = contrepartie d'un
service fait
* 90 Parallèlement
aux particuliers, les associations participant à des tâches
d'intérêt général peuvent avoir accès
à ces avances dans la législation française.
* 91 Marc DEBENE,
Encyclopédie Juridique de l'Afrique, Tome 3e, Systèmes
budgétaires, financiers, fiscaux et douaniers, NEA, 1982, p. 140.
* 92 Cf. article 8 du
décret 80-518 du 21 mai 1980 fixant les règles d'organisation et
de fonctionnement du CST n° 30-18-07 « Caisse d'encouragement
à la pêche et à ses industries annexes ».
* 93 C'est en effet sur les
ressources de la CEPIA que sont prélevés les salaires de ces 166
agents. L'intégration de ces derniers dans la fonction publique aurait
pour conséquence de faire supporter au budget général
cette masse salariale. Ainsi, il sera procédé à la
réaffectation des ressources du compte initialement destinées aux
salaires au profit du renforcement des programmes de soutien et
d'investissement.
* 94 Conseil
présidentiel sur la pêche tenu en mars 2008
* 95 Rapport
général n° 85, tome III, annexe 45, fait au nom de la
Commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la Nation sur le projet de loi de finances pour 1998
adopté par l'Assemblée nationale. A consulter sur
http://www.senat.fr/rap/l97-085-3-a45/l97-085-3-a45.html
* 96 Voir infra - autonomie de
fonctionnement
* 97 Nous empruntons
l'expression à monsieur André PAYSANT qui, dans son manuel de
Finances publiques, parle d'opérations blanches pour rendre
l'idée d'un compte dont les opérations ne devaient pas laisser de
traces parce que devant s'équilibrer d'elles-mêmes. Il affirme
qu' « Il existe des opérations qui présentent
un actif ou un passif qui sera compensé à terme par une
opération inverse équivalente ». Le solde est donc
forcément nul d'où le qualificatif de blanc. Cf.
André PAYSANT, op. cit. p. 114
* 98 Laurent RABATE, Du bon
usage des comptes d'affectation spéciale, in RFFP n° 32, Les
comptes spéciaux sur Trésor, LGDJ, Paris, 1990, p. 37.
* 99 Rappelons qu'en dehors des
comptes d'affectation spéciale, tous les CST sont décrits au
dessous de la ligne ; ce qui renvoie aux opérations temporaires
* 100 Pierre Di MALTA, Le
régime juridique des comptes spéciaux du Trésor, in RFFP
précité, p. 24
* 101 Michel BOUVIER et alii,
op. cit. p. 213
* 102 Inventaire de la
situation financière de la France dirigé en 1947 par le ministre
des Finances de l'époque M. Robert Schuman. Cf. Pierre Di Malta, loc.
cit. p. 16
* 103 Christian BIGAUT,
Finances publiques - de droit budgétaire : Le Budget de l'Etat,
Paris, Ellipses, 1995, p. 35
* 104 Michel BOUVIER et alii,
op. cit. p. 208
* 105 La LOLF 2001-692
dispose en son article 49 : « En vue de l'examen et du vote
du projet de loi de finances de l'année, et sans préjudice de
toute autre disposition relative à l'information et au contrôle du
Parlement sur la gestion des finances publiques, les commissions de
l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances et
les autres commissions concernées adressent des questionnaires au
Gouvernement avant le 10 juillet de chaque année. Celui-ci y
répond par écrit au plus tard le 10 octobre ».
* 106 Cf. projet loi de
finances pour 2003 (France), notamment le compte 902-00. Pour
l'évaluation des recettes, les lignes 01 à 04 sont au compte du
Fonds national de développement des adductions d'eau a lors que les
lignes 05 et 06 approvisionnent le Fonds national de solidarité pour
l'eau. Pareil pour les autorisations de programme et crédits de paiement
qui aussi bien en fonctionnement qu'en investissement sont destinés
à des chapitres ou articles différents. A consulter sur ce
lien :
www4.minefi.gouv.fr/budget/plf2003/bleus/cst/Cst2003v2m-03.htm#P1098_11892
* 107 Rapport Cour des comptes
sur l'exercice des lois de finances pour l'année 1998, juillet 1998, p.
205
* 108 Loïc PHILIP,
Finances publiques, 5e édition, Paris, Cujas, 1995, p. 198
* 109 Nous faisons
référence aux pays où les considérations
politiciennes l'emportent sur les exigences de bonne gouvernance. Ce qui se
traduit, dans le choix des représentants du peuple, par une
primauté de ceux qui se sont le plus illustrés dans les
propagandes (même s'ils sont analphabètes) plutôt que ceux
qui, par leur formation et leur expérience, sont dans les dispositions
pour décider au nom des citoyens.
* 110 C'est justement pour
remédier à cela que la directive n° 02-2000 de l'UEMOA
dispose en son article E-2-5 : « Pour assurer
l'effectivité du contrôle parlementaire des finances publiques,
les Etats membres devront nommer auprès des Assemblées Nationales
des assistants parlementaires possédant une expertise suffisante dans le
domaine des finances et de la comptabilité publique ».
* 111 « Les
lois de finances présentent de façon sincère l'ensemble
des ressources et des charges de l'État. Leur sincérité
s'apprécie compte tenu des informations disponibles et des
prévisions qui peuvent raisonnablement en
découler ».
* 112 A l'exception de ces
trois (3) dernières années (2007, 2008, 2009), depuis 1973, on ne
répertorie que deux années où la saisine du Conseil
constitutionnel français, pour qu'il se prononce sur la loi de finances,
n'est pas intervenue, en l'occurrence 1989 et 1993.
* 113 La Loi organique
n° 99-70 du 17 février 1999 sur la Cour des comptes dispose en son
article 26 : « La Cour des comptes assiste le Parlement et
le Gouvernement dans le contrôle de l'exécution des lois de
finances. Elle contrôle la régularité et la
sincérité des recettes et des dépenses décrites
dans les comptabilités publiques (y compris donc celle des
CST) » cf. JORF n° 5845 du 20/2/1999. Cette
sincérité, à la différence de celle
consacrée par la directive n° 02-2000 n'a pas de contenu
défini, ce qui ne cautionne pas son application.
* 114 Michel BOUVIER et alii,
op. cit. p. 205
* 115 Il est en effet
aberrant de voir un pénitencier entretenir une activité
commerciale et ne pas bénéficier de ces revenus pour une
amélioration des conditions de détention de ses pensionnaires. En
France par exemple, une pareille activité, en plus de prendre en compte
ce souci, prévoit une rémunération pour les détenus
et satisfait aux exigences pour une optimisation de la production.
* 116 JORS n° 5845 du 20
février 1999
* 117 JORS du 11 juillet 1981,
p. 681 et s.
* 118 JORS n° 6038 du
samedi 23 mars 2002
* 119
JORF 302 du 30 décembre
2006
* 120 JORS de 1982, p. 435
* 121 Sous la direction du
professeur Loïc PHILIP
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