DISCUSSION
Anopheles nili et Anopheles moucheti
étaient présents dans la plupart des rivières et fleuves
prospectés. Ces informations sont conformes à la carte de
distribution de ces espèces au Cameroun et en Afrique (Gillies et De
Meillon, 1968) ; (Antonio-Nkondjio et al., 2006). Toutefois nous avons
relevé une hétérogénéité quant
à la répartition de ces espèces qui pourrait
refléter la variation des propriétés physico-chimique des
cours d'eau de cette région. Pendant cette étude, plusieurs
paramètres ont été mesurés il s'agit de la
température, pH, potentiel d'oxydo-réduction,
conductivité, présence des plantes aquatiques et type de sol.
Pour Anopheles moucheti, exception faite de la conductivité
dont les valeurs moyennes égales à 26,288 uS/cm étaient
associées à sa présence et à son abondance dans un
cours d'eau, les autres paramètres pris isolément n'ont pas
été significatifs pour expliquer la présence ou l'absence
de ce vecteur. Ceci suggère entre autre que la présence ou
l'absence de ce vecteur est liée à une interaction complexe entre
les différents facteurs du milieu. Des observations comparables ont
été rapportées des études effectuées sur les
larves des membres du complexe Anopheles gambiae au
Sénégal et au Mali (Awono-Ambene et al., 1998) ; (Edillo et al.,
2006). Les conditions favorables au développement du vecteur
Anopheles moucheti étaient donc: conductivité moyenne de
26,288 uS/cm, pH moyen de 5,862 et température moyenne de 24,873°C.
Par contre chez Anopheles nili les conditions favorables
étaient : conductivité moyenne de 69,33 uS/cm, pH moyen de
l'ordre de 6,51, température moyenne de 24,999°C et potentiel
d'oxydo réduction moyen de 159,40 mV. Toutefois, remarquons que
Anopheles nili a semblé tolérer de fortes variations des
paramètres physicochimiques du milieu, ce qui justifierai probablement
sa large distribution à travers le continent africain contrairement
à Anopheles moucheti qui est confiné au domaine
forestier et péri-forestier (Gillies et De Meillon, 1968), (Hervy et
al., 1997).
D'autres paramètres du milieu répertoriés
au cours de cette étude ont semblé jouer un rôle
déterminant dans la distribution des larves de ces deux espèces.
C'est le cas des plantes aquatiques du type Pistia ou Paspallum
qui étaient toujours associées à la présence
et à l'abondance des larves de ces 2 espèces. Ces plantes en
abritant les larves régulent la dynamique des populations de ces
espèces et limitent l'action néfaste de la prédation sur
ces populations. Il a été démontré que la
prédation des larves par le biais des poissons larvivores pouvait
influencer significativement la dynamique des populations d'anophèles
(Awono-Ambene et al., 1998). Dans ces cours d'eaux la
Distribution de Anopheles nili et Anopheles moucheti
au sud du Cameroun : influence des facteurs du milieu
présence de prédateurs tels que les poissons
larvivores, les larves d'odonates, les odonates (Exemple : les libellules)
pourraient constituer un frein au développement de ces espèces.
Ceci est du moins corroboré par le fait que les densités
larvaires diminuent considérablement avec la destruction des plantes
aquatiques le long du fleuve ou après élimination naturelle de
ces plantes pendant la saison sèche (Antonio-Nkondjio et al., 2005). Ces
informations pourraient s'avérer utile dans le contrôle de ces
vecteurs dans leur milieu de vie. Certaines espèces de poisson du genre
Gambusia ou Tilapia sont largement utilisées dans la
lutte biologique contre les moustiques.
Il faut toutefois noter que certains facteurs du milieu non
mesurés au courant de cette étude telle que la teneur en ions,
orthophosphate, nitrite ou densité optique pourraient mieux expliquer la
distribution de ces espèces.
Notre étude a porté sur les facteurs du milieu
dont la présence ou l'absence expliquerait le mieux la distribution des
larves d'Anopheles nili et d'Anopheles moucheti. Sur un plan
global il ressort de cette étude que la présence et la
distribution des larves de ces deux espèces répondent à un
complexe système d'interaction entre les facteurs du milieu. Toutefois
des études complémentaires méritent d'être
menées en vue de rechercher comment de telles informations pourraient
être utilisées pour le contrôle des populations de ces
vecteurs qui constituent d'importants vecteurs de paludisme en Afrique
subsaharienne.
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