Conclusion
Face à la première crise du septième art,
les règles d'organisation de l'industrie du spectacle, formulées
entre 1935 et 1939 par Jean Zay et son équipe, reflètent
largement la base de la politique cinématographique française
érigée au fil du temps. A travers la mise en place du
« Statut Zay », il s'agit d'instaurer des règles
communes de législations cinématographiques acceptées par
les professionnels et garanties par l'Etat, tout en préservant leur
initiative individuelle et collective.
Pendant cette période, se trament, grâce aux
initiatives du ministre de la rue Grenelle, des choix politiques et un corps de
doctrine qui seront au coeur du modèle français :
- Ne pas se satisfaire de la domination du cinéma
américain et afficher une double ambition industrielle et
culturelle ;
- Faire du cinéma une des grandes causes nationales,
propre à mobiliser - toutes tendances confondues - les hommes
politiques, les intellectuels, les artistes et l'opinion publique et permettre
que cet art touche un public toujours aussi nombreux.
- Enfin, concevoir un système marqué par la
mixité dans lequel l'Etat ne se substitue pas aux initiatives
privées, mais joue essentiellement un rôle de régulation,
faisant du cinéma un secteur pionnier pour penser des formes nouvelles
d'intervention de l'Etat.
Malheureusement, même si le mandat de Jean Zay est riche
de nombreux projets, il n'en résultera pratiquement aucune loi, aucun
statut, ni aucune institution en faveur du secteur
cinématographique : beaucoup de réflexions, de
débats, mais pas de décision ni d'action entreprises. Une
situation assez représentative de l'état de la France dans les
années trente : une conscience partagée des
dysfonctionnements, du marasme de l'imminence du désastre, et une
tragique incapacité à l'empêcher.
Paradoxalement, en ce qui concerne le milieu
cinématographique, bien des textes réglementaires et des
créations institutionnelles, basé sur le travail du sous
secrétariat des Beaux arts du Front populaire, verront le jour sous les
Années Noires de l'Occupation. Le régime autoritaire mis en place
a permis de mettre en application certaines idées de Jean Zay, mais au
service d'une idéologie catégoriquement opposée à
celle des années de belle illusions. Certains éléments de
cette organisation resteront en place, par la suite, après la
Libération, prémices d'un certain Centre National de la
Cinématographie et du droit positif cinématographique
français que l'on connait actuellement.
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