Mémoire de master 2
Par
François Hurstel
Les institutions financières internationales
dans la transition des PECO
2006-2007
Professeur responsable
Eric Bussière
Table des matières
CHAPITRE 1
LES BESOINS IMMEDIATS DES ORPHELINS DU COMMUNISME ET
LES STRATEGIES DE TRANSITION DES IFI
1. LA TRANSITION
ECONOMIQUE.....................................................8
A/ Le concept de transition
B/ La chute du régime soviétique et
ses conséquences économiques
C/ Les défis à relever
2. LES STRATEGIES DE
TRANSITION .............................................19
A/ Le début de l'aide
B/ Quelle approche suivre pour la
transition ?
C/ Etude de la privatisation de l'éducation
en Pologne
CHAPITRE 2
MALGRE LEUR DIVERSITE, LES IFI N'ONT PU REPONDRE A
TOUS LES DEFIS POSES PAR LA TRANSITION
1. DES IFI FORTS DE LEURS CARACTERISTIQUES ET
EXPERIENCES............................................................................................31
A/ L'Union Européenne
B/ La BERD et la Banque Mondiale
C/ Le FMI et l'OCDE
2. DES DEFIS RELEVES MAIS EGALEMENT DES
INSUFFISANCES......41
A/ Des efforts de grande ampleur de tous les
IFI
B/ Efforts qui ont contribué à de nets
progrès
C/ Sans toutefois éviter certains
travers
CHAPITRE 3
DIX-HUIT ANS APRES, QUELLE PART DE RESPONSABILITE
ACCORDER AUX IFI DANS LES DESTINS CONTRASTES DES PECO ?
1. L'ADAPTABILITE DES
IFI........................................................................51
A/ Des actions différentes selon les pays
B/ Les révisions de stratégies
C/ Relations avec les gouvernements
2. QUELLE
RESPONSABILITE.........................................................59
A/ Les autres acteurs de l'aide et leurs champs
d'action : collision avec les IFI ou partenariats ?
B/ Les recommandations pour une meilleure
assistance
C/ Bilan des actions
NB : Nous nous sommes appuyés sur un large
éventail de sources. Internet tout d'abord, avec en particulier les
sites des IFI (FMI, OCDE, BEI surtout) sur lesquels sont
généralement archivés les rapports annuels mais
également des rapports spécifiques qui parfois peuvent traiter de
la transition des PECO. L'avantage de ces rapports est qu'ils traitent notre
sujet sur commande de l'IFI, mais de manière indépendante.
Internet a donc constitué une source précieuse pour obtenir des
documents de première main, mais aussi pour trouver des renseignements
plus factuels sur les IFI (dates de création, entrée des PECO en
tant que membres, montants engagés).
Nous avons également eu accès à
des archives de presse locale en anglais (hongroise, tchèque et
polonaise) et de presse internationale qui nous ont permit de suivre les
évolutions au jour le jour, particulièrement en ce qui concerne
le programme PHARE. Cela a été très utile pour comprendre
la place de l'assistance dans l'opinion, tant à l'Est qu'à
l'Ouest, ainsi que les problèmes quotidiens rencontrés, qui ne
sont pas toujours mentionnés dans les ouvrages plus
généraux ou même dans les articles
spécialisés.
Hormis ces deux types de sources, la majorité
de notre bibliographie se fonde sur des ouvrages écrits dans la
deuxième moitié des années 1990. Il y a davantage
d'ouvrages généraux sur la région qui évoquent
l'aide des IFI que d'ouvrages spécialisés sur cette
dernière, ou encore sur un pays en particulier, lesquels sont finalement
rares. Dans la majorité des cas, ces études ont été
faites par des auteurs d'Europe centrale ou orientale.
Pour la période plus contemporaine,
l'abondance des ouvrages, revues, études et conférences qui
s'explique par les récentes adhésions, nous a obligé
à une sélection, privilégiant par exemple les auteurs
régionaux.
D'un point de vue plus général, nous ne
nous sommes pas heurtés à des problèmes majeurs,
même si certaines informations semblent encore relativement
confidentielles et assez peu discutées, tel que le rôle des
consultants de cabinets privés dépêchés sur place
ayant travaillé avec les IFI. Par ailleurs, il est intéressant de
noter que nous avons trouvé plus d'observateurs critiquant l'action des
IFI que la louant.
INTRODUCTION
En 1991, la chute du bloc soviétique instaure un
nouvel ordre international marqué par la soudaine libération des
pays d'Europe centrale et orientale (PECO). Les PECO se retrouvent
« orphelins », livrés à eux-mêmes
après des dizaines d'années de vie orbitale,
intégrés au géant soviétique. Dans chaque PECO
s'engage alors un processus sans précédent de reconstruction
politique et économique. L'assistance occidental s'impose alors
d'elle-même et résulte d'une double volonté : celle
des nouveaux dirigeants qui prennent conscience des défis
économiques, politiques et sociaux qui les attendent, et celle des
occidentaux désireux d'aider les PECO dans leur transition.
Après avoir vu le rôle important de la coopération entre
PECO et découvert l'ambivalence de ses objectifs (mémoire de
Master 1), nous allons nous intéresser à l'aide apportée
par les IFI dans cette même transition. Répondant aux mêmes
besoins (reconstruction économique et politique) et concernant les
mêmes pays, la coopération avec les IFI a été
cependant différente dans sa nature.
Qu'entend-on par PECO ? La liste des pays peut
varier d'une encyclopédie à l'autre. En effet, l'INSEE par
exemple n'inclut que dix pays sous le terme PECO (Bulgarie, Estonie, Lettonie,
Lituanie, Pologne, Roumanie, Slovénie, Slovaquie, République
Tchèque alors que Wikipedia en dénombre 21 avec les 4 de
Visegrad, les pays nordiques et balkaniques de l'ex-Yougoslavie, les autres
pays balkaniques, les pays baltes et enfin les pays post-soviétiques
occidentaux. Si les 10 PECO ayant intégré l'Union
européenne nous intéresseront, nous nous pencherons plus
particulièrement sur trois exemples significatifs, qui ont le plus
bénéficié de l'aide: la Pologne, la République
Tchèque et la Hongrie.
Le rôle des IFI dans la transition a le plus
souvent été celui de l'aide. Cependant, l'impossibilité
des historiens et spécialistes de s'entendre sur la définition du
terme dans un tel contexte nous a dissuadé de l'employer dans le titre.
L'aide, dans son sens le plus simple, correspond à l'action d'intervenir
en faveur d'une personne ou d'un groupe en joignant ses efforts aux leurs, sur
une base au moins partiellement gratuite. L'apparente clarté de cette
définition contraste avec la complexité des problèmes
d'interprétation qu'elle soulève dans le contexte qui nous
intéresse. S'il est entendu qu'un don correspond bien à de
l'aide, que dire d'un prêt, même à taux
préférentiel, qui procure un intérêt au
donneur ? La littérature économique
spécialisée ne s'est pas étendue sur le sujet. Le contenu
a souvent varié d'une étude à l'autre. Selon Mayhew
(1996), une grande partie de l'aide occidentale « n'a tout simplement
été qu'un abus du mot don »1(*). Ners (1992), lui, insiste sur
le « désordre conceptuel dans la définition de
l'assistance » et estime qu'une « grande masse de
l'assistance occidentale à l'Est » n'est tout simplement pas
de l'aide2(*). Selon la
définition de notion d'aide occidentale à la transition
proposée par le Comité d'aide au Développement (CAD) de
l'OCDE et que nous avons décidé de suivre à peu
près, le concept suppose que l'aide soit (1) officielle,
c'est-à-dire accordée par des gouvernements, des organismes
officiels, des organisations multilatérales, (2) orientée vers le
développement économique du pays bénéficiaire, (3)
assortie d'un « élément de
libéralité » d'au moins égal à 25%. Nous
disons « à peu près » car selon cette
approche, toute action n'ayant pas d'élément de
libéralité, à savoir les prêts et les IDE
(Investissement direct à l'étranger), sont exclus. Moins
restrictive que cette définition, cette étude prendra en compte
dans l'aide l'ensemble des transferts de ressources officielles ou non, avec ou
sans élément de libéralité. En ce sens, l'aide
comprendra ici les dons et les petits (à taux réduits ou non).
Les dons sont donc compris ici au sens large : les réductions et
les rééchelonnements de dettes, par exemple, même s'ils ne
constituent pas des ressources nouvelles, sont interprétés comme
la transformation ex-post en dons de ressources déjà
transférés aux pays bénéficiaires.
Avec cette définition, notre étude va
pouvoir prendre en compte un large panel de types d'aides, largesse
renforcée par les différences inhérentes aux IFI, tant
dans leur manière de travailler, que dans leurs objectifs et
fonctionnements. Ces institutions sont au nombre de cinq : le Fonds
monétaire International (FMI), l'Organisation de Coopération et
de Développement Economiques (OCDE), l'Union Européenne avec la
Banque Européenne d'Investissement (BEI) et le programme PHARE, la
Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement
(BERD) et enfin la Banque Mondiale. Chaque institution possède sa propre
manière de travailler et d'assister les pays en développement ou
émergents, par exemple en se concentrant davantage sur les
problèmes macroéconomiques ou microéconomiques. Si la
définition de l'aide est stricte, les formes d'assistance sont
nombreuses et souples (formation de fonds financiers, crédits à
l'exportation, assistance technique, consultation et conseil, remises de dettes
ou rééchelonnement également considéré comme
aide. Trois grands types d'assistance peuvent être
remarqués :
- assistance génératrice de gains : aide
à la balance des paiements, financement externe direct du type
réduction de dette (FMI, PHARE par exemple);
- assistance à la solution de problèmes
structurels au niveau national, régional, subrégional (BERD par
exemple);
- assistance à la promotion des institutions :
assistance à la construction d'un cadre politique (fonctionnement de
partis, d'institutions étatiques) ; développement
d'institutions et systèmes économiques, incluant le
développement de marchés de capitaux et la promotion de
l'épargne domestique (privatisation est ici la clé) ; l'aide
aux institutions sociales (OCDE par exemple).
La multiplicité des aides n'empêche pas le
même objectif : assister les PECO dans leur transition, les faire
passer d'une économie de type soviétique à une
économie de marché libéral tout en évitant les
dérives pouvant découler d'une transition trop brutale vers le
libéralisme. Au Sommet de l'Arche de juillet 1989, les institutions
internationales et les gouvernements récipiendaires sont parvenus
à un accord politique sur les objectifs économiques de la
transition et ses grandes lignes stratégiques. Ainsi munis d'un socle
commun de références et d'objectifs, les IFI ont pu lancer leurs
aides de manière massive. Cependant, presque vingt ans après, les
IFI sont encore présentes en Europe centrale et orientale et certains
problèmes sont encore d'actualité. Dès lors, quel bilan
tiré de ces aides ; quelle part de responsabilité peut-on
accorder aux IFI dans l'évolution contrastée qu'ont connu les
PECO jusqu'à aujourd'hui ?
L'étude des besoins immédiats propres
à chaque « orphelin du communisme » ainsi que leurs
stratégies de transition ont requis des aides ciblées.
Malgré leur diversité, propre à
s'adapter à la multiplicité des problèmes, les IFI n'ont
pu répondre à tous les défis posés par la
transition.
Alors que certains PECO sont membres de l'UE et d'autres
peinent encore à décoller, quelle part de responsabilité
accorder aux IFI dans les évolutions contrastées des pays
d'Europe centrale et orientale ?
Chap.1
Les besoins immédiats des orphelins du
communisme et les stratégies de transition
1. LA TRANSITION ECONOMIQUE
A/ Le concept de « transition »
politique et économique
Si l'on compare les « transitions »
en Amérique latine, en Europe de l'Est, mais aussi celles d'Europe du
Sud (Grèce, Portugal, Espagne) et ailleurs dans le monde, il existe une
certaine similarité dans leurs conséquences dans le domaine des
systèmes politiques, mais ils recouvrent par contre des transformations
économiques, sociales et politiques de nature souvent très
différentes, voire opposés. Partout, les
« transitions » ont cherché à changer le
système politique, mais les cadres sociaux et économiques
préexistant, en revanche, ont été conservés dans
les dictatures auparavant liées au bloc de l'Ouest, tandis qu'ils ont
été transformés dans le cas des pays de l'ancien bloc de
l'Est. Et même dans ce dernier cas, les bouleversements structurels n'ont
pas modifié de manière fondamentale la composition des
élites dirigeantes ou influentes, en particulier dans les milieux
économiques et médiatiques.
Le terme de « transition » a
été généralisé avec la fin de l'URSS alors
que le monde a connu une vague jusque là inédite de
« démocratisations ». Cependant, l'appellation
même de « transition » mériterait d'être
mieux analysée dans la mesure où, non seulement l'adoption de la
« démocratie de marché » s'est produite aussi
hors des anciens pays du bloc soviétique, mais parce que avant 1989, les
dirigeants des PECO présentaient eux-aussi leurs régimes comme
étant en « transition » vers le communisme.
Si l'idée même de
« transition », celle d'un passage d'un système
socio-politique à une autre est liée aux axiomes de la
modernité, axiomes reconnus en principe tant par les libéraux que
par les marxistes, tout système politique serait destiné à
être supplanté tôt ou tard. En effet, aucun ordre social,
économique, politique, idéologique, humain, voire naturel n'est
immuable et toute situation donnée est par principe
« transitoire » au fur et à mesure de
l'évolution, et des révolutions humaines. Ainsi, depuis le
18ème siècle au moins, les sociétés
occidentales, plus « dynamiques » ont imposé au
reste du monde, l'idée que la seule réalité immuable
était le changement permanent. Dès lors, une question à
laquelle nous essaierons de répondre au fil de notre étude
est : l'action des IFI occidentales dans la transition des PECO
correspond-t-elle à une mise en oeuvre directe de ce principe
théorique ou est-elle davantage une fin en soit à travers les
idéaux qu'elle véhicule ? C'est dans ce contexte que Bruno
Drweski3(*) a
développé sa thèse selon laquelle le capitalisme
post-moderne, dont les principaux soldats à l'Est ont été
les IFI, s'est révélé en définitive à notre
époque plus « révolutionnaire », en tout cas
plus « transformateur », que le « socialisme
réél ». Il faut cependant rappeler que ce dernier a
réalisé la fin de la stabilité
« féodale », rurale, religieuse, traditionnaliste
dans la région. C'est pourquoi afin de mieux comprendre la transition
qui nous intéresse, il convient de revenir d'abord sur le système
établit par la transition du système soviétique, ce que
nous ferons ultérieurement. Par ailleurs, c'est en partant de ces
considérations que nous pouvons commencer à analyser l'action des
IFI dans le contexte particulier de la transition propre aux PECO. Sous
l'influence de ce contexte, les éléments du processus de
transition ont été posés et ont fait l'objet d'un
consensus : la libéralisation (processus à l'issue
duquel la plupart des prix sont déterminés par le libre jeu du
marché, et qui réduit les barrières commerciales tendant
à isoler une économie donnée de la structure des prix en
vigueur dans les économies de marché), stabilisation
macroéconomique (essentiellement, processus en vertu duquel
l'inflation est stabilisée puis réduite, après la
poussée initiale qui suit la libéralisation et l'assouvissement
d'une demande jusque-là refoulée. Ce processus exige des pouvoirs
publics qu'ils appliquent des politiques budgétaires et
monétaires rigoureuses pour contenir la croissance de la monnaie et du
crédit, tout en visant à assurer la viabilité de la
balance des paiements), restructuration et privatisation
(création d'un secteur financier viable et réformes visant
à donner aux entreprises les moyens d'adapter leur production aux
besoins de marchés libres et à en transférer la
propriété au secteur privé), réformes
juridiques et institutionnelles (ces réformes sont
nécessaires pour redéfinir le rôle de l'État dans
ces économies, établir la primauté du droit et mettre en
place des politiques favorables à la libre concurrence). Pour chacun de
ces éléments, nous verrons que les IFI ont eu un rôle
déterminant à jouer.
La transition des PECO qui réside dans le passage du
communisme et de l'économie centralisée, à la
démocratie et à l'économie de marché, est
considéré comme une des transitions les plus difficiles et
douloureuses à la fois. En effet, les responsables de cette transition
n'étaient alors pas en mesure de s'appuyer sur des exemples à
suivre (le seul précédent d'un tel passage du communisme vers
l'économie de marché -sans réforme politique vers la
démocratie néanmoins - était celui de la Chine. Selon la
Banque Mondiale, la PIB chinois, a augmenté de 9% par an, en moyenne,
entre 1978 et 2003. Cette croissance a permis à 300 millions de chinois
de sortir de la pauvreté). Cette absence de précédent a
rendu la tâche des IFI d'autant plus ardue et nécessaire à
la fois.
B/ La chute du régime soviétique et ses
conséquences économiques
Afin de comprendre la situation dans laquelle se sont
trouvés les PECO dans les années qui ont suivi
l'éclatement de l'Union Soviétique, il est donc nécessaire
d'opérer un rapide retour en arrière et de revenir sur leur
relation avec l'URSS. Ce retour apparaît d'autant plus indispensable que
la notion de PECO n'existe, au-delà de l'aspect géographique,
qu'à travers leur expérience commune de la mise sous tutelle
soviétique. Cependant, même si la politique de Moscou a toujours
tendu à l'uniformisation, il y eut des différences notables dans
le traitement de chaque pays. Le totalitarisme soviétique n'a jamais
été à même d'effacer le passé national et les
spécificités propres à chaque
« satellites », mais il a réduit à
néant ce que la transition a tenté de ressusciter :
l'autonomie en matière d'économie et de diplomatie. Dès
lors, la chute de l'empire soviétique a livré à
eux-mêmes des « orphelins du communisme », pour qui
les difficultés et défis à prévoir
s'annonçaient proportionnelles aux joies procurées par la
nouvelle liberté, c'est-à-dire immenses.
Pour Lénine, le socialisme ne pouvait
être envisagé « sans une organisation planifiée
de l'Etat imposant à des dizaines de millions de gens l'obligation de
respecter strictement une règle uniforme dans le domaine de production
et de distribution de biens »4(*). Parmi ces dizaines de millions de gens, les
européens de l'est et du centre ont tenu un rôle
prépondérant. Alors que l'utopie marxiste-léniniste se
révélait incapable de résister à l'épreuve
de la réalité, de répondre au défi de la
modernisation et du développement de technologies de pointe, Moscou a
continué longtemps à imposer ses certitudes aux
démocraties populaires. Les leaders soviétiques n'ont
cessé de proclamer l'avantage décisif de la planification
centrale pour assurer le développement économique et social
à chaque échelle. En effet, la planification s'opérait
tant à l'échelle humaine dans chaque entreprise qu'au niveau
international avec tous les « satellites ». Ces derniers
devaient remplir des objectifs fixés par Moscou et pour Moscou, selon
leurs industries les plus compétitives. Cinquante ans durant, les
démocraties populaires ont mis leur production au service des besoins de
l'URSS. C'est au sein du COMECON ou CAEM (Conseil d'assistance
économique mutuelle), « grand dessein »
institué en 1949, que l'harmonisation des plans nationaux
s'opérait, sous l'égide de Moscou. L'objectif était
double ; une meilleure planification d'abord, une spécialisation
des industries nationales des pays satellites ensuite ; la
conséquence directe étant une dépendance accrue de ces
derniers envers l'URSS. En plus de lancer les satellites sur des projets
industriels souvent en dehors de leur propre intérêt, le CAEM,
avec des prix déconnectés de ceux du marché mondial en se
fermant aux impulsions et critiques extérieures et en renforçant
l'isolement de ses pays membres, n'a fait que conserver et même accentuer
le retard des membres. A titre d'exemples, la Tchécoslovaquie produisait
en priorité des machines industrielles tandis que la Pologne
développait sa production de charbon et la Roumanie de pétrole,
sans qu'aucun de ces pays n'aient de besoins particuliers dans ces domaines. De
nombreux effets pervers et pernicieux vont apparaître au fur et à
mesure pour les PECO qui ont été coupés de
l'économie mondiale pendant quatre décennies. Ces effets ont
été des moteurs pour la coopération régionale des
anciennes démocraties populaires lorsqu'ils ont cherché à
les enrayer, et ont même stimulé le besoin de se tourner vers
l'Ouest et son modèle.
L'évolution des démocraties populaires
dans les dernières années avant l'éclatement de l'empire
soviétique fut diverse mais l'importance du facteur économique
dans ces évolutions fut constante et globale. A partir des années
1950, apparaissent les premières crises et révoltes secouant le
bloc communiste ; en mai 1953 à Pzen les ouvriers se
révoltent contre l'échange de monnaie qui leur faisait perdre 12%
de pouvoir d'achat ; en juin 1956 à Poznan ou encore en octobre
1956 à Varsovie d'autres révoltes dirigées contre Moscou
éclatent. Ces crises ont en commun d'être liées au facteur
économique et d'être des causes directes de la politique de
satellisation, de planification et de croissance extensive imposée par
Moscou. Au cours des années 1960, des stratégies
réformistes ou au contraire accusant Moscou de révisionnisme
voient le jour et les pays se différencient ; Tito et la
Yougoslavie renouent avec l'URSS, l'Albanie rompt ses relations avec Moscou
accusé de révisionnisme pendant que la Roumanie de Ceausescu
affirme son indépendance nationale en 1965. En 1968, c'est la
Tchécoslovaquie qui évolue vers le réformisme avec Dubcek
qui arrive au pouvoir et annonce la libéralisation de l'économie
au printemps. Le 20 août cependant, les troupes du Pacte de Varsovie
interviennent. Malgré cette intervention, quelques années plus
tard, à partir du milieu des années 1970, l'opposition aux
régimes communistes et à Moscou s'accentue, à l'exemple de
la Charte 77 des intellectuels tchèques qui a fait école dans les
autres pays. Le mouvement s'accéléra alors, notamment avec la
création du premier syndicat libre dans une démocratie
populaire : Solidarnosc de Lech Walesa. Enfin, contre toute attente, le
facteur décisif est venu de Moscou avec Gorbatchev qui se
désengagea progressivement de l'Europe centrale et orientale.
Si nous avons rappelé ces
événements ainsi que l'organisation économique des PECO
sous le régime soviétique, c'est parce qu'ils ont
déterminé de manière irréversible la vie de ces
pays. L'économie planifiée les a réduits à produire
en dehors de leur intérêt ; dès lors, après les
révolutions démocratiques et, à fortiori la fin de la
guerre froide, ils se retrouvent avec les mêmes difficultés :
retard économique, absence de marché et d'appartenance à
un grand ensemble susceptible de les tirer vers le haut et de les
protéger. Ces pays qui ont toujours gardé leurs propres
identités peuvent être appelés «les orphelins du
communisme »5(*).
Une même expression
caractéristique, certes, mais des situations particulières qui
n'en restent pas moins diverses. En 1989, lorsque s'effondrent les
régimes communistes d'Europe centrale et orientale et que débute
le processus économique de transformation post-socialiste, une grande
diversité de situations initiales caractérise les pays de la
région. Pour le monde occidental et ses organisations
multilatérales, cette variété de points de départ
est alors occultée : le monde socialiste était le plus
souvent perçu de manière homogène, d'où
l'appellation fréquente d' « économies de type
soviétique ». Assurément, les systèmes
économiques présentaient de fortes ressemblances ; leur
socle institutionnel était formé du régime de parti unique
et de la domination de la propriété d'Etat, l'organisation
hiérarchique prédominait dans l'économie, où les
prix, les salaires, les échanges extérieurs étaient
dépendants des décisions de l'administration économique,
elle-même sous le contrôle formel du parti communiste strictement
centralisé, l'agriculture était collectivisée, le commerce
extérieur sous monopole d'Etat, le secteur privé strictement
confiné. Toutefois, d'importantes différences dans le
fonctionnement des institutions ou même dans leur organisation
distinguaient les différents pays en 1989. Ces différences
étaient le produit de l'histoire dans deux domaines ; les rapports
avec le « grand frère soviétique » et
l'expérience contrastée des « réformes
économiques ». Enfin, la diversité des modalités
de la rupture politique a conditionné les différences
stratégiques de « transition » des premiers
gouvernements post-communistes. Malgré tout, deux
caractéristiques ressortent : l'adoption d'une stratégie
d'inspiration néolibérale de transition vers une économie
de marché, et une dépression économique d'une
sévérité imprévue. Ces deux caractéristiques
vont jouer un rôle important dans la mise en place et
l'élaboration des aides apportées par les IFI.
C/ Les défis à relever
En effet, les gouvernements arrivés au pouvoir en
1989-1990 ont été confrontés au même objectif
économique : celui du passage de l'économie centralement
planifiée à l'économie de marché. Rapidement, il
est apparu que cet objectif n'était pas aussi simple que cela aurait pu
paraître de prime abord. Cette transformation sans
précédent ne pouvait se limiter aux seules privatisations,
pendant longtemps le mot d'ordre principal, pour ne pas dire unique, des
libéraux est-européens. Un travail de fond devait être
mené au préalable. Le libéralisme, avec ses mots d'ordre
antiétatiques, était le courant le plus éloigné du
communisme. Les premières difficultés auxquelles se
heurtèrent les économies en transition de l'Europe
post-communiste sont d'ordre structurel et institutionnel ; gestion rigide
de l'économie planifiée, manque de pragmatisme, lourdeurs
administratives, inefficacité et obsolescence de l'appareil productif,
inadaptation de la structure de production à la demande régionale
et, à fortiori, mondiale. Ce dernier point a très tôt
été discuté multilatéralement par les dirigeants et
fut l'un des objectifs premiers de la formation du Groupe de Visegrad6(*), l'un des tout premier groupe de
coopération régionale. L'adaptation des mentalités et des
comportements aux conditions nouvelles allait être plus complexe et plus
longue encore. La transition du plan au marché exigeait
l'émergence d'une culture économique adéquate ; il
fallait accepter le coût social de la transition avant même la
formation d'un esprit d'entreprise chez les citoyens. Cela nécessitait
donc l'acceptation de l'inflation, de l'accroissement des
inégalités, de la paupérisation de certaines
catégories sociales et du chômage. Toutes ces difficultés
ont amené, dans ces années de transition économique, un
débat régional entre les partisans d'une thérapie de choc
et les tenants de la démarche gradualiste, débat sur lequel nous
reviendrons.
A ces contraintes s'ajoutèrent les
problèmes liés à la création du marché
lui-même. Il convenait d'élaborer non seulement le cadre juridique
et institutionnel approprié mais aussi, et peut-être avant tout,
introduire les mécanismes du marché - la libre concurrence et
l'égalité d'accès au marché des agents
économiques - et recréer le secteur bancaire, garant et support
indispensable de toute économie moderne et efficiente. Le volet le plus
spectaculaire, sinon le plus important, de le réforme économique
entreprise par les Etats d'Europe centrale et orientale, qui devait être
précédé par tout un processus préparatoire fut
celui des privatisations. Il était indispensable, avant de
transférer des mains de l'Etat aux mains du secteur privé, de
redéfinir les régimes de propriété, ce qui
s'inscrivait dans le projet de refonte des structures économiques
existantes. Il y eut donc une transformation du concept même de la
propriété privée. Le débat qui en résulta,
fut, lui encore, intense et fit intervenir tous les PECO. En
réalité, on se trouvait en présence de deux débats.
Le premier portait sur le fond ; sur l'étendue et les
méthodes de la privatisation ainsi que sur toutes les mesures
d'accompagnements ; le second sur le choix des voies de transformations.
Le premier débat a fait apparaître les contradictions entre la
volonté politique et la logique économique, l'un exigeant un
redémarrage rapide des économies et l'autre demandant une
préparation, nécessairement longue, de l'économie au
processus de transition. Ces contradictions alimentèrent un second
débat donc, qui, superposé au premier, se déroula entre
les partisans de la thérapie de choc et les tenants de l'approche
gradualiste. Par les échanges que les pays ont eus depuis 1989, il est
possible d'affirmer que les pays ayant choisi la thérapie de choc se
sont trouvés devant des difficultés plus grandes que ceux qui ont
suivi une voie plus progressive.
Un an après l'introduction des premiers
mécanismes du marché et la mise en place de nouvelles politiques
économiques, la situation était très différente
selon les pays. La baisse de l'activité a été
générale, mais son intensité variait d'un pays à
l'autre ; la production industrielle a chuté en moyenne de 18%,
tandis que le chômage a fait une apparition spectaculaire,
particulièrement dans les pays ayant opté pour une transformation
rapide. Trois pays sont cependant parvenus à réaliser des
progrès considérables ; la Pologne, la
Tchécoslovaquie et la Hongrie. Ce n'est donc pas un hasard si l'on
retrouve ces trois pays à l'origine du groupe de Visegrad le 15
février 1991.
Lorsqu'en novembre 1989, la Diète polonaise a
voté le programme de stabilisation et de privatisation, entré en
vigueur le 1er janvier 1990, la situation de l'économie
polonaise était catastrophique. Le programme mis en place par le
ministre des Finances Leszek Balcerowicz représentait une
véritable thérapie de choc à deux volets ; atteindre
une stabilité macro-économique par le biais d'une politique
monétaire et budgétaire rigoureuse et instaurer des
réformes structurelles, nécessaires pour introduire les
mécanismes du marché. Ce programme stipulait une
libéralisation totale des prix et la suppression des subventions aux
entreprises publiques. La politique monétaire prévoyait
l'introduction de la convertibilité interne de la monnaie, laquelle a
été facilitée par l'instauration, fin 1989, par l'OCDE
d'un fonds de stabilisation de zloty d'un montant de 1 milliard de dollars. Par
ailleurs, l'abolition des tarifs douaniers et la libéralisation du
commerce extérieur, décidées collectivement par les PECO
et les organisations internationales compétentes ont
immédiatement porté leur fruits, en permettant un
développement spectaculaire des exportations, dont l'augmentation a
atteint 44% entre janvier et octobre 1990. Par sa politique monétaire,
accompagnée d'un ensemble de mesures visant à instaurer une
véritable économie de marché, avec le développement
du secteur privé, les démonopolisations et les privatisations, le
gouvernement polonais à instaurer une confiance dans la monnaie
nationale. Cependant, des problèmes ont surgit en ce qui concerne les
privatisations et plus particulièrement dans les restructurations du
secteur public, notamment concernant l'évaluation de la valeur des
entreprises mises à la vente. En l'absence de structure de
marché, celle-ci était difficile et les autorités ont donc
opté pour la prudence et la patience. D'autant que l'exemple hongrois en
ce domaine - les premières privatisations
« sauvages » avaient profité surtout à
l'ancienne nomenklatura - ne semblait pas exemplaire. Les
premières vraies privatisations eurent donc lieu en même temps que
l'ouverture de la Bourse de Varsovie, en avril 1991. Les
« privatisations de masse », exemple unique en Europe
centrale et orientale ne commencèrent qu'à la mi-mai 1991. Elles
passaient par la distribution d'actions gratuites (vouchers) à
l'ensemble de la population active, soit 27 millions de personnes. Dans un
premier temps, ces actions furent gérées par un fonds de
placement spécialisé. Quelque 200 à 300 grandes
entreprises devaient être concernées par cette mesure sans
précédent, destinée à créer en Pologne un
actionnariat populaire important. D'autre part, les procédures de vente
aux enchères ou de rachat d'entreprise par les salariés ont
également pris un essor considérable, participant d'une
manière de plus en plus importante à la remise sur les rails de
l'économie polonaise.
L'exemple de la Tchécoslovaquie
diffère d'abord chronologiquement. Elle fut en effet la dernière
à s'engager sur la voie des transformations. Le désavantage de la
Tchécoslovaquie, au moment des bouleversements de 1989, résidait
dans l'absence quasi-totale de secteur privé, alors qu'il existait
à l'état embryonnaire en Pologne ou en Hongrie.
L'expérience de ces deux derniers pays en la matière, aussi
maigre était-elle, fut utile aux dirigeants tchécoslovaques qui
se sont beaucoup renseignés dans les premières années du
Groupe de Visegrad. C'est alors que le ministre des finances, Vaclav Klaus, un
libéral déterminé, a élaboré un programme
qui prévoyait une transition rapide vers l'économie de
marché. Cependant, fort du précédent polonais dont la
thérapie de choc révélait ses limites, ce programme
n'était pas, à proprement parlé, radical. Les
privatisations devaient se diviser en quatre étapes ;
redistribution des biens d'Etat nationalisés à la fin des
années 1950, « petite privatisation », sous forme de
ventes aux enchères publiques de restaurants, magasins et petites
entreprises de services, « grande privatisation »
concernant l'essentiel de l'outil industriel et commercial et enfin
création de joint-ventures. Si la Tchécoslovaquie a
rencontré plus de problèmes que les deux autres pays du Groupe de
Visegrad (lesquels représentent tout de même les PECO
s'étant le mieux sortis de l'après communisme, ce qui relativise
nettement le retard tchécoslovaque), c'est grandement du au
caractère fédéral du pays. La multiplication des centres
de pouvoir rendait fastidieuses les démarches des investisseurs
occidentaux. A cela fallait-il ajouter le manque d'incitations fiscales, une
certaine inertie de la population et la présence encore très
sensible de « noyaux durs » des anciens syndicats
communistes.
Ces deux pays, tout comme la Hongrie, dans lesquels
de nombreux signes encourageants étaient visibles ne reflétaient
cependant pas la situation d'ensemble des PECO. Tant en Bulgarie, qu'en
Albanie, Roumanie ou Yougoslavie, il était difficile de parler de
post-communisme, malgré les transformations de 1989-1990.
2/ LES STRATEGIES DE TRANSITION
A/ Le début de l'aide
L'effondrement du communisme en Europe centrale et
orientale a immédiatement été suivi par de fortes
initiatives internationales soutenant le changement économique (et
politique) dans la région.
Au cours du Sommet de l'Arche les 14, 15 et 16 juillet
1989 à Paris, les institutions internationales et nouveaux gouvernements
de l'Est et du centre de l'Europe sont parvenus à des accords sur les
objectifs économiques et politiques de la transition et sur ses grandes
lignes stratégiques. C'est à l'occasion de ce sommet que fut
décidé l'aide à la Pologne et à la Hongrie,
déjà sur la voie de la réforme en juillet 1989, alors que
l'URSS n'a pas encore été officiellement
démantelée. Selon certains, le caractère novateur du
Sommet de Paris dans les relations Est/Ouest constitue le point de
départ de la chute de l'URSS. Peu de temps avant la fin du Sommet,
Mikhaïl Gorbatchev adressa une lettre à François Mitterrand
au contenu qui surprit tout les observateurs de l'époque. Le Premier
Secrétaire du Parti Communiste en URSS y parlait de
« nouvelle pensée politique »,
« d'harmonisation des processus
économiques »,..., et invitait les participants au Sommet
à le rencontrer. La réaction des 7 à cette lettre fut tout
de même discrète, et personne n'osa se prononcer publiquement.
Toujours est-il que les dirigeants occidentaux décidèrent d'aider
la réforme en Pologne et en Hongrie « de manière
concertée », avec des travaux de préparation
réalisés par la Communauté Economique Européenne
(CEE). La réforme sera précédée d'un soutien
alimentaire pour ces deux pays, toujours sous le patronage de la CEE.
Concernant l'URSS, c'est encore la CEE et son Président de Commission
Jacques Delors qui était la plus adaptée pour rassurer les
américains. Elle servira donc de cadre aux prochaines relations entre
les pays capitalistes et l'URSS. L'initiative de l'aide revenant à la
Communauté européenne, c'est également elle qui est
naturellement choisie pour effectuer la coordination de l'aide sur les
années à venir entre tous les donneurs multilatéraux. Nous
verrons plus tard que ce rôle n'a malheureusement pas toujours pu
être mené à bien. Toujours est-il qu'au lendemain du
Sommet, l'implication de l'Ouest dans le processus de transition qui
s'annonçait était officiellement lancé avec d'un point de
vue générale, la création du Groupe des 24 chargé
de diriger l'assistance du monde occidentale aux PECO et son instrument
strictement européen, le programme PHARE, premier et principal outil de
coopération financier et technique entre la CEE et les PECO (dans un
premier temps seulement destiné à la Hongrie et à la
Pologne). En théorie donc, l'aide aux PECO trouve son origine avec le
Sommet de l'Arche, mais dans la pratique chaque IFI a élaboré son
propre calendrier en traitant directement avec les gouvernements
récipiendaires, sans toujours passer par la case CEE pourtant
censée coordonner l'aide.
Dans la foulée de la mise en oeuvre du programme
PHARE, dont le frère jumeau pour les pays de la CEI est le programme
TACIS, Mitterrand propose de créer en décembre 1989 la
première institution financière internationale post guerre
froide, la BERD (Banque Européenne pour la reconstruction et le
développement), opérationnelle à partir d'avril 1991. Son
objectif premier était directement lié à la transition des
PECO : la promotion des institutions démocratiques et de
l'économie de marché au moyen de prêts et d'investissements
(avec au moins 60% des fonds directement investis dans des entreprises
déjà privatisées ou engagées dans le processus de
privatisation).
En plus de ces deux institutions crées
spécialement à l'attention des PECO, les autres IFI se sont
également impliqués dans la région très rapidement.
Ainsi, le FMI conclu un accord avec la Pologne dès le début du
mois de février 1990, un mois après la libéralisation des
prix. Au début de l'année 1990, les IFI étaient devenus
des acteurs majeurs dans l'assistance à la transition des PECO, au
même titre que les donneurs nationaux les plus actifs tels que
l'Allemagne ou les Etats-Unis. En 1992, tous les PECO étaient devenus
membres du FMI et de la Banque Mondiale et bénéficiaient d'aides
de tous types que nous analyserons plus tard. Au début du processus, et
donc aux prémices de l'aide, les montants engagés par les IFI se
sont élevés à 26 milliards de dollars entre 1990 et
19947(*) (sur une base
annuelle, le montant total a augmenté rapidement d'années en
années). Le FMI et la Commission Européenne ont fourni environ
les trois-quarts de l'ensemble des ressources multilatérales
accordées aux PECO, la Banque Mondiale et la BERD, la
quasi-totalité de ce qui reste. En ce qui concerne les pays
bénéficiaires durant cette première phase de l'aide, la
Pologne (36%), la Hongrie (18%) et la Tchécoslovaquie (12%), puis la
République Tchèque et la Slovaquie, ont
bénéficié de la plus grande partie.
B/ Quelle approche et quelle méthode pour
réussir le volet économique de la transition ?
Dans un premier temps, les IFI, en consultation avec les
gouvernements récipiendaires, n'ont pu éviter le grand
débat sur l'approche à privilégier pour aider à
réformer en profondeur les PECO, tant économiquement que
politiquement. Les IFI qui ont toutes travaillé en proche collaboration
avec les gouvernements ont pris part au débat qui a porté sur la
méthode de transition à choisir. D'un point de vue
générale d'abord, la première question portait sur la
manière : fallait-il réformer rapidement et de
manière brutale les PECO, ou au contraire, fallait-il opérer la
transition en douceur ? Ces deux points de vue opposés avaient
chacun leurs avantages et leurs inconvénients.
La première de ces approches risquait d'engendrer
de nombreux phénomènes négatifs : tensions sociales,
montée en flèche du chômage et de l'inflation,
déclin du niveau de vie et de la production. Rien ne pouvait garantir
que la seconde approche allait entraîner des conséquences moins
néfastes mais cette dernière était plus facile à
accepter pour la population. Ce débat fut à la hauteur des
conséquences qu'il était susceptible d'entraîner ;
intense et global. Il concernait tout le monde et dépassait les simples
frontières de l'Europe centrale et orientale. Finalement, aucun des PECO
n'a mit en place une politique découlant entièrement de l'une ou
l'autre de ces approches. Si celle de la Pologne est traditionnellement
considérée comme radicale, avec une thérapie de choc qui a
été appliquée par Mazowiecki, caractérisée
par une révolution politique intégrale sans
précédent, et celle de la Hongrie plus gradualiste au contraire,
tous les pays ont cherché dans la mesure du possible un juste milieu. En
plus des contraintes intérieures, les PECO ont dû suivre les
consignes strictes du Fonds monétaire internationale et de la Banque
Mondiale afin de bénéficier de leurs aides. Des rencontres
régulières eurent alors lieu entre les dirigeants afin de
déterminer une ligne de conduite unique face aux conditions
fixées par les instances économiques occidentales.
Cependant, ces rencontres, comme ces politiques
générales sur l'approche à privilégier n'ont pas
été les mêmes pour tous les PECO. L'approche
économique prônée par les IFI et choisie par les PECO a
été différente, à la fois selon les pays comme nous
l'avons vu, mais surtout selon les aspects particuliers de la transition
économique. Nombreux pays ayant décidé de faire leur
transition de manière rapide ont privilégié des approches
graduelles et lentes sur certains aspects particuliers de leur transition
(c'est le cas de la Pologne par exemple), et vice-versa. Si nous reprenons les
principaux éléments du processus8(*), à savoir libéralisation, stabilisation
macroéconomique, restructuration et privatisation, réformes
juridiques et institutionnelles, les approches ont souvent varié d'un
aspect à l'autre en fonction des pays et, les conseils, en fonction des
IFI.
Observons donc, parmi ces quatre grands aspects de la
transition des PECO, les trois volets les plus économiques :
libéralisation et stabilisation macroéconomique (à
étudier ensemble), et les restructurations et privatisations. Concernant
la libéralisation et la stabilisation macroéconomique, au
début de la période, la majorité des économistes
issus des IFI s'accordaient pour une approche radicale. Il fallait
procéder rapidement. Ainsi, la transition a commencé par une
libéralisation rapide des prix dans la plupart des économies, ce
qui a entraîné une poussée immédiate de l'inflation
(au départ, le taux d'inflation a atteint en moyenne 450% par
année dans les PECO). En plus de cette poussée inflationniste
soudaine, une autre conséquence de la libéralisation rapide des
prix préconisée par les IFI a été la chute plus
grave que prévu de la production. De nombreux experts envoyés par
les IFI se sont penchés sur les causes de cette soudaine chute. Leurs
études ont dans l'ensemble conclu que la
« désorganisation » liée à des chocs
tels que l'effondrement du CAEM a joué un rôle important.
Concernant la production toujours, il y a eu de fortes disparités entre
PECO et il a été difficile pour les IFI de donner des indications
globales. Généralement, l'existence de « conditions
initiales défavorables » pour expliquer ces différences
ont été invoquées. En effet, au départ, les
économies qui se sont engagées dans la transition
présentaient des caractéristiques différentes,
malgré un socle commun. Par exemple, les pays se distinguaient par leur
aptitude à réorienter leurs échanges vers les
économies de marché avancées, leur degré
d'industrialisation, le rôle économique de leur secteur agricole,
la scolarisation dans l'enseignement secondaire et le nombre d'années
passées sous le régime communiste. Sans grande surprise, les pays
où les conditions initiales étaient les plus défavorables
étaient ceux qui ont connu les chutes de production les plus
importantes. Dans ces constats, les IFI ont eu leur rôle à jouer,
à travers leurs experts dépêchés sur place et leurs
économistes.
Un autre élément primordial de la
transition économique a été la privatisation. Sur cette
aspect-là, les avis des IFI étaient partagés une nouvelle
fois entre les tenants d'un transfert rapide des avoirs de l'Etat au secteur
privé et ceux qui favorisaient une approche plus graduelle. Les avocats
d'une privatisation rapide (République Tchèque par exemple)
préconisaient l'élimination des propriétés de
l'Etat par la redistribution ou restitution9(*). Le FMI a critiqué cette méthode de
restitution, ralentissant inutilement la privatisation par son caractère
compliqué. Les avantages d'une telle approche se situent dans
l'équité. Les partisans de l'autre camp ont soutenu une
réduction plus graduelle du secteur public. Ceux-là ont
privilégié la privatisation des entreprises par la vente de leurs
actifs (la Hongrie a adopté cette approche),
préférablement à des personnes capables d'en
améliorer le rendement, et qui donc avaient une certaine
expérience de l'économie de marché. Selon le FMI, qui a
plutôt soutenu cette méthode, le but initial était de
vendre les actifs de l'Etat à des investisseurs externes, étant
donné le développement insuffisant des marchés
intérieurs des capitaux10(*). Trois types de gains étaient attendus :
des revenus pour l'Etat, l'apport rapide de compétences
extérieures et la probabilité d'une gestion extérieure
plus efficace et expérimentée. Parmi les inconvénients de
la méthode, les experts ont relevé l'inadéquation des
marchés boursiers nationaux et l'absence de capitaux intérieurs.
Par ailleurs, ne pouvant obtenir d'informations fiables sur les entreprises
mises en vente, les investisseurs étrangers ne se sont pas
montrés très intéressés dans un premier temps. En
outre, cette méthode est coûteuse et lente. En conclusion, et
selon le point de vue adopté à la fin de la décennie 1990,
alors que les experts avaient suffisamment de recul, la privatisation rapide
est considérée comme plus dangereuse. Cependant, il se peut
toutefois que pour un historien, la question de la rapidité et de la
méthode choisie ne se pose pas dans ces termes. Au rythme où elle
s'est opérée depuis 1989 et continue de se faire encore
aujourd'hui (la privatisation des grandes entreprises n'est pas encore
terminée partout, contrairement à celle des petites, pratiquement
faite dans tous les PECO), la privatisation sera presque terminé dans
dix ans pour la plupart de ces pays, et un délai de dix ans pour une
tâche aussi énorme sera certainement considéré comme
très court.
Rejoignant cette question du rythme des privatisations,
mais englobant davantage de facteurs, il y avait également la question
de la méthode à suivre, au sens large. Nous avons vu que les
partisans d'une approche lente et ceux d'une approche plus rapide avaient
chacun leur méthode préférée : les premiers
ont généralement mis en oeuvre la vente directe d'actifs et
l'émission d'actions, alors que les seconds ont utilisé
majoritairement la restitution ou redistribution. Cependant, tout comme aucun
pays n'a suivi intégralement un des deux rythmes, aucun gouvernement ni
IFI n'a privilégié systématiquement une méthode. En
outre, la diversité des actifs de l'Etat a le plus souvent obligé
les décideurs politiques et économiques a allié plusieurs
méthodes de privatisations suivant le type de bien public. En plus des
restitutions et des ventes directes, deux autres moyens ont été
utilisés par les gouvernements souvent en accord avec les IFI.
Il y a d'abord le rachat de l'entreprise par ses cadres
ou par ses salariés. Dans cette approche, les actions d'une entreprise
sont vendues ou données à un groupe de ses cadres et autres
employés. En plus d'être politiquement très populaire, elle
est rapide et facile à appliquer. Un rachat bien structuré peut
parfois être efficace, car les motivations des salariés et des
propriétaires sont les mêmes. Néanmoins,
l'expérience montre que ces rachats, souvent critiqués eux-aussi
par les IFI, notamment la Banque Mondiale et ses experts dépêches
en Pologne, présentent de vrais inconvénients. La cession de
l'entreprise à des investisseurs internes entraîne souvent des
coûts élevés sous forme d'inefficacité
d'exploitation et de gestion. Par ailleurs, le processus peut se
révéler inéquitable. Les actions des entreprises
gérées par leur personnel ont montré qu'il leur arrivait
d'accorder des hausses de salaires excessives, de maintenir un niveau d'emploi
trop élevé et de ne pas suffisamment investir. Dans toutes les
économies en transition, au-delà même des PECO, les
investisseurs internes n'ont parfois pas les compétences
nécessaires pour opérer dans un contexte d'économie de
marché dont ils n'ont aucune expérience. En dépit de ces
faiblesses, de nombreux PECO ont popularisé cette méthode dont la
Pologne, la Roumanie ou encore la Slovaquie.
La privatisation en masse est une autre méthode
qui a été utilisée. Dans ce cas, par le biais
d'émissions de coupons, et par égalité d'accès,
l'Etat distribue généralement à titre gratuit, ou contre
versement d'une somme modique, des coupons qui peuvent être
utilisés pour acheter des actions dans des entreprises. Cette
méthode est apparue avec la transition des PECO. Elle a
été peu populaire, hormis en République Tchèque et
dans les petites ex-républiques de la Yougoslavie et de l'URSS.
L'avantage de cette méthode est qu'elle résolvait le
problème de la pénurie de capitaux intérieurs sans
toutefois céder les actifs nationaux à des investisseurs
étrangers, comme c'était le cas avec la simple vente directe.
Comme son nom l'indique, la privatisation en masse est aussi un moyen simple et
rapide d'achever l'application de vastes programmes de privatisation à
l'échelle de l'économie toute entière. Cette
méthode a toutefois des inconvénients. Le principal risque est
que la dispersion du capital s'accompagne d'un manque de focalisation sur
l'efficacité de gestion et du pouvoir nécessaire pour l'assurer.
Cela peut faire fuir les nouveaux investisseurs potentiels. En effet, il
était impossible de contrôler de manière suffisante tous
les nouveaux « petits actionnaires ». Dans la pratique, ces
problèmes ont été en partie résolus par le
regroupement des intérêts dans des sociétés
d'investissement ou des fonds communs de placement. Cependant, ces derniers ne
disposaient pas toujours des pouvoirs nécessaires pour assurer une
gestion, un contrôle et une surveillance adéquats, et la direction
des entreprises pouvait les priver d'informations essentielles.
Maintenant que nous avons vu les différentes
approches et méthodes du volet économique de la transition d'un
point de vue théorique, et les avis des IFI sur ce sujet, penchons-nous
sur une approche particulière de la privatisation dans la transition,
l'éducation.
C/ Approches particulières aux différents
secteurs de l'économie
De quelle manière l'éducation
a-t-elle été privatisée en Pologne ? L'étude
de cet exemple particulier va nous permettre d'avoir une idée plus
concrète de la privatisation et de ses théories.
La privatisation du système éducatif en
Pologne a commencé presque immédiatement après
l'effondrement du socialisme réel. Le 12 septembre 1990 la chambre basse
du parlement (Sejm) a promulgué la loi autorisant la
création d'écoles supérieures non publiques et le 7
septembre 1991 la loi concernant l'enseignement primaire et secondaire a
donné le feu vert au développement du secteur privé dans
cette branche éducative. Depuis, les établissements non publics
sont présents à tous les niveaux. Voyons de plus près de
quelle manière la privatisation du système s'est-elle
opérée dans le primaire/secondaire, le supérieur ainsi que
dans le secteur public, dont certains établissements ont ouvert des
sections privées.
En 1999, dans l'éducation primaire et secondaire,
on comptait 2 000 écoles primaires et secondaires privées
qui rassemblaient environ 200 000 élèves, soit 2,5% de
l'ensemble des élèves polonais. Au début des années
1990, les établissements de ce secteur ne recevaient pas encore de
subventions de l'Etat mais à partir du milieu des années 1990, le
budget a commencé à les financer. La part des subventions
publiques dans les budgets des écoles privées pour l'année
scolaire 2000-2001 a été de 35% pour les écoles primaires,
36,4% pour les collèges et 44,9% pour les lycées. Malgré
cette aide considérable de l'Etat, les frais de scolarité ont
augmenté. Selon un rapport de la NIK (Chambre suprême de
contrôle) portant sur un contrôle réalisé en 2001
dans 11 districts et 320 communes du pays - le montant moyen mensuel des frais
de scolarité était de 400 PLN, soit environ 100 euros dans les
écoles primaires et de 175 PLN, soit 43,75 euros dans les
établissements secondaires. Dans un pays où le niveau de vie
reste bien plus bas que dans les pays d'Europe occidentale, les couches les
moins favorisées, enfants de chômeurs et familles rurales sont
complètement exclues de ce système élitiste.
En 1998, l'Etat a décentralisé l'ensemble
du système éducatif. Depuis, les écoles primaires sont
gérées et financées par les communes (gminy), alors que
l'enseignement secondaire se trouve sous la tutelle des districts (powiaty).
Enfin, en 1999, une nouvelle réforme est entrée en vigueur. D'un
système à deux échelons - un tronc commun de huit ans pour
les enfants de 7 à 15 ans, suivi d'un lycée d'enseignement
général ou d'un enseignement technique ou professionnel - on est
passé à un système à trois échelons, avec un
échelon intermédiaire, le « gymnase »
(collège) pour les 13 - 16 ans. Toutes ces réformes ont
été très contestées aussi bien par les
spécialistes que par les parents. La BERD a participé à la
privatisation de l'éducation mais a aussi critiqué les
dernières réformes. En effet, la décentralisation du
financement porte en germe le développement d'inégalités
régionales et d'un système éducatif à deux
vitesses. Comme la Banque Mondiale en a avertit le gouvernement polonais, le
contribuable de la « riche » Varsovie peut en effet verser
en moyenne plus d'impôts que l'habitant de la campagne ruinée par
la liquidation brutale des fermes d'Etat. La création des gymnases a
aussi entraîné la liquidation des petites écoles de
campagne, ce qui a provoqué les protestations des parents. Ils ont peur
que leurs enfants ne soient rejetés par les collèges des
écoles communales plus riches, ce qui a semblé justifié si
l'on en croit les rapports internationaux.
Du point de vue quantitatif et social, c'est toutefois la
privatisation de l'éducation supérieure qui constitue le
phénomène le plus important. Plus de dix ans après son
introduction, la population estudiantine en Pologne compte 1,8 million
d'étudiants contre environ 390 000 en 1989, ce qui
représente une augmentation de plus de 4 fois. Le taux de scolarisation
brut, c'est-à-dire la relation la relation entre le nombre total de la
population estudiantine et le nombre de la tranche d'âge 19-24 ans de la
société, a atteint en 2003 43,6% contre 12,9% en 1989. En 1998,
7% de la population polonaise possédait un diplôme de formation
supérieure. Cette évolution spectaculaire ne s'explique cependant
pas uniquement par la privatisation, même si cette dernière, en
plus d'avoir crée de la diversité dans les études, a
également stimulé l'éducation supérieure publique.
Le secteur privé forme 29% de la population
estudiantine, soit 52 000 étudiants. Il compte actuellement 286
établissements, mais seuls 21,1% des étudiants de ce secteur
poursuivent leur enseignement dans le système régulier et
journalier. Les écoles non publiques ont surtout développé
des formations de type économique, telle que la gestion, le marketing,
les finances. Pour ouvrir un établissement privé, il faut obtenir
une autorisation du Ministère de l'Education. Le statut de
l'école doit être accepté par ce ministère. Le
secteur public de son côté compte 120 écoles
supérieures dont 86 dépendent du Ministère de l'Education,
de la Recherche et du Sport (MENiS), 34 dépendant d'autres
ministères.
Dans toutes les écoles supérieures de
Pologne, 80 100 enseignants sont employés, dont 17 700
professeurs, 429 directeurs de recherche avec habilitation, 3 031
maîtres de conférences, 17 500 assistants. Au début
des années 1990, les grandes écoles embauchaient environ
60 000 enseignants. Plus de dix ans après, leur nombre a donc
seulement augmenté de 27%. Ceci constitue une flagrante disproportion
avec le développement rapide du nombre d'établissements scolaires
et des étudiants. En fait, l'Etat s'est montré
particulièrement avare pendant la période de transition. De 1990
à 1999, il a diminué de moitié ses dépenses
budgétaires pour ce secteur, trois fois si l'on compte par
étudiant. Les dépenses annuelles pour les besoins de
l'éducation constituaient en 2002 en Pologne 3% du PNB, dont seulement
0,84% pour l'enseignement supérieur, alors que les pays riches
dépensent en moyenne 5,3% de leur PNB. En conclusion, cette croissance
du secteur de l'éducation supérieure, certes quantitativement
impressionnante, a été obtenue non pas grâce à un
investissement dynamique de la part de l'Etat mais, par son abdication :
il a rejeté les coûts de cette
« réforme » sur la société.
En 1999, la NIK a contrôlé 80
établissements scolaires non publics sur les 180 existants. Elle voulait
savoir comment leur activité était surveillé, car la loi
du 2 septembre 1990 ne donne pas au ministère la possibilité
d'exercer un contrôle direct sur l'activité des écoles
privées. Les enquêteurs ont mis en évidence leur manque
d'enseignants et leur démarche purement commerciale. Ainsi, dans la
très médiatisée et « élitiste »
Ecole privée de journalisme « Melchior Wankowicz »
à Varsovie, on a embauché des personnes n'ayant pas les
qualifications d'enseignant supérieur alors même que dans son
prospectus publicitaire, tous ses enseignants était abusivement
présentés comme des professeurs titulaires. Dans une autre
école privée (l'école de Business de Cracovie), un
étudiant a fait preuve d'incroyables performances intellectuelles en
commençant ses études trois ans avant la création de cette
école ! Toute proportion gardée, ces exemples illustrent les
défaillances qui peuvent découlées d'une privatisation
trop rapide et sans contrôle externe, comme celui des IFI par exemple.
Les établissements publics ont également
développé depuis 1989 tout un système d'éducation
payant. Leur offre « commercial » comprend les
études du soir et d'autres formations alternatives. Pour l'année
académique 2003/2004, il y avait dans les écoles publiques
polonaises 535 000 étudiants payant. Les recettes des frais de
scolarité constituent 30% du budget des établissements publics.
Le nombre d'étudiants des deux secteurs payant est de 1 055
millions, soit 58,6% du total.
A l'instar des établissements privés en
général, la procédure d'entrée dans les
études du soir du secteur public est facile. Les enquêteurs de NIK
ont constaté que la très renommée Alma Mater -
Université de Cracovie - s'est facilement adaptée à la
nouvelle réalité économique du pays et
n'hésite pas à « faire de l'argent ». Pour
l'année universitaire 1999/2000, sa faculté de droit -
malgré un quota de 500 pour les cours du soir - avait accepté
tous les candidats, soit 577. Les frais de scolarité par étudiant
est pour la première année de 5 000 PLN (1 250 euros)
et de 3 000 PLN (750 euros) pour chaque année suivante.
Les contrôles de la NIK ont dévoilé
le caractère « anarchique » du développement
de l'éducation supérieure au cours de la période 1990 -
2001. Ceci a finalement poussé en 2001 le ministère de
l'éducation à préparer une ordonnance définissant
les standards d'éducation. En janvier 2003 on a crée la
Commission Nationale d'Accréditation dont les compétences
consistent à émettre une opinion sur la création d'une
nouvelle école, d'une nouvelle spécialité et à
contrôler la qualité de l'enseignement dans les
établissements déjà existants (privés et publics).
Son président considère que la mise sous contrôle de toutes
les écoles prendra trois à quatre ans.
Cette brève analyse montre bien que
l'éducation en Pologne, depuis sa privatisation, constitue un
marché juteux. Cependant, ses professionnels et ses observateurs sont
inquiets pour l'avenir et les excès se sont déjà
manifestés. Cet exemple concret, nous montre pourquoi le débat
sur les privatisations a été si long et passionné et qu'il
n'a pas trouvé de réponse arrêtée. La privatisation
de l'éducation en Pologne s'est faite très rapidement, sans aucun
contrôle dans un premier temps, et sans participation importante des
organisations internationales. Dans ce contexte, elle n'a pas réussi et
la Pologne est obligée de revenir en arrière aujourd'hui, en
réinstaurant le contrôle des établissements privés
par l'Etat.
Chap. 2
Malgré leur diversité, les IFI n'ont
pu répondre à tous les défis posés par la
transition des PECO
1. DES IFI FORTS DE LEURS CARACTERISTIQUES ET DE LEURS
EXPERIENCES
A/ L'union européenne
Comme nous l'avons souligné, l'Union
Européenne (la CEE au départ en réalité) a
été la première à s'investir dans la transition des
PECO de manière officielle à la suite du Sommet de l'Arche en
juillet 1989 avec notamment la création du programme PHARE. L'autre
entité qui a travaillé pour la transition des PECO dans le cadre
communautaire est la Banque Européenne d'Investissement.
Le programme PHARE est donc né en 198911(*), crée au départ,
comme son nom l'indique - Pologne, Hongrie, Action pour la Restructuration
Economique - uniquement pour ces deux pays, puis étendu en 1990 à
la Bulgarie, la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie et l'Albanie. L'objectif
du programme est d'assister les PECO dans leur transition vers un régime
démocratique et une économie de marché. C'est
principalement par des aides non remboursables plus que par des prêts que
le système de financement de PHARE a fonctionné. Ces aides
étaient accordés de façon autonome par la
Communauté ou en cofinancement avec des Etats membres, avec la Banque
Européenne d'Investissement (BEI), avec des pays tiers ou d'autres IFI.
Le financement de chaque secteur est réalisé dans le cadre de
sous-programmes spécifiques dont les principaux sont :
« Jopp » pour le développement du secteur
privé, « Green, East » pour l'environnement,
« Echo » pour l'aide humanitaire, « Ace,
Tempus » pour l'éducation et la recherche,
« Lien » dans le domaine social,
« Sigma » pour la formation professionnelle des
fonctionnaires, « Démocratie » dans le domaine de
l'organisation parlementaire et la transparence de l'administration publique,
« Consensus » pour la cohésion sociale et la
stabilité politique, « Mctp » pour la politique
régionale de transport, « Praq III » en
matière d'harmonisation des législations est-européennes
avec celles de l'UE, « Taiex » pour l'apprentissage de
l'acquis communautaire... Le programme espérait apporter de la
flexibilité dans les réponses aux besoins. Si les PECO avaient en
commun l'héritage communiste, les points de départ dans la
transition n'en étaient pas pour le moins différents et
inégaux. Ainsi, PHARE est toujours partit de la demande, sachant que les
priorités variaient selon les pays. La réceptivité des
pays dans lesquels PHARE a opéré a été grande
grâce à cette politique d'adaptation. Elle a constitué une
différence importante avec d'autres IFI moins bien vus et
peut-être moins désintéressés. Dans cette optique,
PHARE a même fournit des apports essentiels à la mise en oeuvre de
réformes convenues dans le cadre d'accords contraignants des programmes
du FMI et de la Banque Mondiale. Allant plus loin, PHARE a également
travaillé en étroit lien avec les IFI, dont il devait en
théorie coordonner le travail sur place. Les IFI et PHARE ont souvent
investi ensemble dans des infrastructures, dans le secteur bancaire, la
restructuration des entreprises et avec des lignes de crédit au secteur
privé, ce qui a accru leur efficacité. Par exemple, il existe
depuis 1991 avec la BERD un dispositif formel qui a connu un grand
succès appelé « dispositif de Bangkok ».
PHARE finance la BERD pour soutenir l'assistance technique que
requièrent ses interventions. Jusqu'en 1996, plus de 130
opérations de coopération technique ont été
financés avec ce dispositif.
Le comité de gestion du programme a
été crée auprès de la Commission avec des
représentants des Etats membres, un président représentant
la Commission et un représentant de la BEI.
Dès sa création, les priorités
affichées du programme sont les suivantes : l'abolition des
monopoles d'Etat, les restructurations et privatisations des entreprises
publiques, la modernisation des services financiers, la promotion du secteur
privé (PME-PMI) et la formation professionnelle, le développement
du marché du travail et du secteur social, y compris la réforme
de la sécurité sociale et les politiques de prévoyance
sociale. Aux premières étapes de la transition, l'assistance
était centrée sur l'apport de savoir-faire ou d'assistance
technique et, en cas de nécessité, sur l'aide humanitaire.
L'autre institution crée par la
Communauté Européenne est très différente dans sa
nature. Crée en 1958 avec le Traité de Rome, son siège est
au Luxembourg. La première différence de taille donc est que
cette institution n'a pas été crée pour les PECO. Au
contraire, son objectif premier est d'investir dans des projets de pays
membres. Institution financière de la CEE puis de l'Union
Européenne, la BEI conduit ses activités d'emprunt et de
prêts dans le cadre des politiques économiques de l'Union. Son
rôle est d'emprunter de l'argent sur les marchés de capitaux afin
de l'investir dans des projets européens. Les prêts
accordés ont donc toujours été indépendants de
l'Union, même s'ils suivent les politiques générales. Les
projets soutenus doivent contribuer au bon développement
économique et social des pays visés. Elle peut également
intervenir de son propre chef en dehors de l'Union européenne, mais
l'argent investit est sur ses fonds propres. La Commission européenne
peut aussi lui donner un mandat pour intervenir à l'étranger,
l'argent alors utilisé sera celui de l'Union européenne. C'est
dans ces cadres-là que la BEI a financé de nombreux projets entre
1989 et aujourd'hui dans les PECO, principalement des projets soutenant la
transition économique.
En règle générale (moyenne sur les
quinze dernières années), environ 15% des investissements se font
en dehors de l'Union européenne. En 1989 par exemple, concernant
exclusivement les financements à l'extérieur de la
Communauté, il ya eu 485,9 millions d'ECU de prêts sur ressources
propres et 126 millions d'opérations de capitaux à risques sur
des ressources budgétaires de la Communauté ou des Etats membres,
soit au total 611,9 millions d'ECU. Sur ce total, seulement 58 millions d'ECU
sont allés aux PECO (principalement ex-Yougoslavie). C'est en 1990 que
la BEI s'implique véritablement dans la région à la suite
des événements que l'on connaît. Elle s'engage pour la
transition en augmentant sensiblement ses prêts dans la région.
Les deux premiers pays ayant bénéficié de cette
implication ont été la Hongrie et la Pologne. Ces premiers
concours de la BEI ont porté sur les secteurs de l'énergie, des
télécommunications et des transports. Ils ont également
pris la forme de prêts globaux accordés à deux banques du
pays (Inter-Europa Bank en Hongrie, Export Development Bank en Pologne). En
Hongrie, trois prêts ont été signés en 1990 pour un
montant total de 120 millions d'ECU, concernant d'une part la modernisation des
télécommunications (création d'un réseau
numérique) et d'autre part l'amélioration du réseau
électrique. Le prêt à l'Inter-Europa Bank était lui
destiné à soutenir des petits projets industriels et
énergétiques et faciliter les investissements de promoteurs de la
Communauté. En Pologne, un montant total de 95 millions d'ECU a
été accordé pour le secteur de l'énergie,
axé surtout sur la remise en état des capacités
d'exploitation, de traitement, de transport et de stockage des ressources en
gaz naturel avec une attention particulière portée à la
protection de l'environnement. Le prêt à l'Export Development Bank
contribua lui au renforcement de l'industrie privé, notamment
d'exportation et de services. L'évaluation de ces deux années
montre bien l'implication rapide et la réactivité de la BEI au
début de la transition dans les PECO.
Il est important de noter qu'en tant que
banque
d'investissement, elle ne fait que des prêts et aucun don. Toutes les
sommes investies par la BEI doivent lui être remboursées.
Concernant sa gouvernance, la BEI est composée
d'un Conseil des gouverneurs (représenté par les 27 ministres de
l'économie des pays de l'UE, chargés de fixer la politique
générale), d'un Conseil d'administration (chargé
d'appliquer la politique), d'un Comité de direction (qui assure au jour
le jour le bon fonctionnement de la BEI), d'un Comité de
vérification (chargé d'auditer la BEI pour s'assurer que son
fonctionnement respecte toutes les obligations qu'elle doit remplir) et
d'actionnaires (les 27 pays membres de l'UE, pour lesquels sont fixés
leur participation au capital en fonction de leur PIB au moment de leur
intégration à l'UE). La gouvernance de la BEI lui a toujours
permit, et à fortiori dans un contexte très politique et sensible
comme celui de l'Europe centrale et orientale dans les années 1990, de
prendre des décisions indépendantes de la Communauté, sans
l'empêcher de travailler avec elle, et donc même avec le programme
PHARE, comme nous le verrons lorsque nous étudierons plus en profondeur
les grandes évolutions des institutions au fur et à mesure que
les réformes avançaient.
B/ La BERD et la Banque Mondiale (ou BIRD)
La Banque Européenne pour la Reconstruction et le
Développement et la Banque Mondiale ont en commun d'agir davantage sur
le terrain et par des actions micro-économiques le plus souvent.
Etudions donc maintenant la création, le fonctionnement et les objectifs
de ces deux banques.
La BERD a été crée en mai 1990
à Paris et inaugurée en avril 1991 à Londres, sous
l'impulsion de François Mitterrand qui l'avait proposé dès
1989 au Parlement Européen, dans le but d'aider les PECO à
développer leur secteur privé dans un contexte
démocratique. Selon les règles qu'elle-même s'est
fixée, chaque investissement de la Banque doit « avoir un
impact positif sur la transition, c'est-à-dire contribuer à
promouvoir l'économie de marché dans les pays en
question », « soutenir l'investissement privé et non
pas s'y substituer », « respecter les principes de la saine
gestion bancaire ». Grâce à ces investissements, la
Banque soutient les réformes structurelles et sectorielles, la
concurrence, la privatisation, et l'esprit d'entreprise. Elle se doit
également de renforcer les institutions financières des PECO et
de leurs systèmes juridiques, développer des infrastructures
nécessaires au secteur privé et mettre en oeuvre une bonne
gouvernance d'entreprise.
Hormis le crédit direct qui correspond à la
majorité de sa participation en termes de montants, la BERD a de
nombreuses autres formes de participation. Elle peut prendre des participations
dans des fonds de placement ou des fonds de capital-risque. Ces fonds
décident alors eux-mêmes des projets dans lesquels investir, mais
les critères qu'ils appliquent en matière de placement sont, pour
l'essentiel, conformes à la politique d'investissement de la BERD. Elle
peut également prendre des participations dans des banques d'affaires ou
des banques commerciales qui décident aussi elles-mêmes des
prêts à accorder. Elle peut faire des prêts à des
banques, généralement par des financements à long terme
aux banques locales, lesquelles utilisent ces crédits pour financer des
projets qui s'accordent aux conditions fixées par la BERD. Elle peut
également prêter aux gouvernements et à des banques pour
PME, afin de financer des projets de PME du secteur privé. Il lui arrive
aussi de procéder à des cofinancements de projets avec des
banques d'affaires (la Banque d'affaire française Lazard a par exemple
été très présente dans les PECO avec son service
spécialisé sur les marchés émergents) et des
banques commerciales locales. Ce dernier système sert
généralement à financer des projets moins importants que
ceux qu'elle finance directement. LA BERD peut également attribuer des
facilités de garantie du commerce extérieur, des facilités
de crédit de secours (mises au point pour aider les banques locales
à gérer leurs risques de portefeuille et leurs décalages
d'échéances). Par ailleurs, elle travaille beaucoup en
partenariat avec d'autres IFI telles que la BEI, le FMI ou la Banque Mondiale,
principalement sur des cofinancements. Par ailleurs, la BERD a beaucoup
utilisé les partenariats avec des entités privés ce qui a
souvent encouragé les investisseurs étrangers rassurés de
voir une organisation multilatéral impliquée. Elle a même
été l'une des premières IFI à encourager la
collaboration approfondie entre secteurs public et privé.
Concernant sa structure et sa direction, chaque pays
membre de la BERD nomme un gouverneur - généralement le ministre
des finances du pays en question ou un responsable de niveau équivalent.
Le Conseil des gouverneurs ainsi formé est investit de tous les pouvoirs
dans le cadre de la BERD. Il délègue la majeure partie de ces
pouvoirs au Conseil d'administration qui conduit les opérations
générales et la politique de l'institution. Le Président,
élu par le Conseil des gouverneurs, est le représentant
légal de la Banque. Il dirige l'institution selon les orientations
fournies par le Conseil d'administration. La Banque compte 63 membres (avec la
BEI et l'UE qui ont chacun un représentant), tous membres entre 1990 et
1992, sauf le jeune Monténégro qui a rejoint l'institution
quelques moins après son indépendance en juin 2006. Ces pays
membres sont tous coactionnaires du capital de la Banque et de leur niveau de
participation au capital dépend l'importance de leur voix. Le capital de
base est important avec 20 milliards d'euros. Par ailleurs, pour financer ses
prêts et ses besoins opérationnels, la Banque emprunte des fonds
sur les marchés de capitaux. Elle n'utilise pas directement le capital
des actionnaires pour financer ses projets. Ce système a permit
à la BERD d'engager d'importants montants dans l'aide à la
transition. A titre d'exemple, l'engagement net de la Banque en Hongrie et
Pologne, de 1991 à 2005 d'élève à environ 5
milliards d'euros.
Cet argent a été investit de manière
très diverse. La BERD s'engage dans de nombreux secteurs (agriculture,
énergie, finance, PME-PMI, infrastructures locales et nationales,
ressources naturelles, tourisme et immobilier,
télécommunications, médias ou encore transports).
L'étude des projets financés par la BERD montre qu'elle s'attache
à des réalisations concrètes et qu'elle ne prend pas part
aux politiques macroéconomiques comme le FMI, l'OMC et même
parfois la Banque Mondiale peuvent le faire. Des projets d'hôtels
à Budapest (28 millions d'ECU prêtés pour la
rénovation d'un Hôtel dans le centre-ville en juin 1992), de
transports publics (prêt de 61 millions d'ECU pour la
réhabilitation des transports publics à Budapest en juillet
1993), de télécommunications (prêt de 60 millions de US$
à une compagnie de téléphonie mobile polonaise en novembre
1991) se sont enchaînés très rapidement à partir de
1991. Grâce à cette politique très active et
concrète, avec des résultats visibles à moyen ou court
terme en général, la BERD a été très
populaire (et continue à l'être) dans les PECO en
(re)construction.
L'autre banque parmi les IFI est la Banque Mondiale (avec
ses deux institutions affiliées, la BIRD - Banque Internationale pour la
Reconstruction et le Développement, et l'IDA - Association
Internationale de Développement). Elle est créée en 1944
à la Conférence de Bretton Woods. Initialement, elle était
chargée de soutenir le processus de reconstruction et de
développement de l'après-guerre. Cette phase terminée, la
Banque Mondiale s'est donnée comme objectif de réduire la
pauvreté dans le monde («Notre mission est d'aider les pays en
développement et leurs habitants à atteindre les objectifs en
question, en travaillant pour cela aux côtés de nos partenaires
afin de faire reculer la pauvreté. Dans cette optique, nous nous
attachons, d'une part, à instaurer le climat voulu pour
l'investissement, la création d'emplois et la réalisation d'une
croissance durable, et, de l'autre, à investir dans les pauvres tout en
leur donnant les moyens d'être parties prenantes au processus de
développement », informations tirées du site internet
de la Banque Mondiale). Pour atteindre ces objectifs, la Banque Mondiale
insiste sur différents points qui rentrent dans le domaine des besoins
de pays en transition comme les PECO l'ont été et certains
continuent encore à l'être aujourd'hui. Elle souhaite renforcer
leur capacité en consolidant leurs institutions et en formant sur le
terrain le personnel administratif. Elle dote les pays en question
d'infrastructure nécessaires en mettant en place les cadres juridiques
et judiciaires propres à encourager les affaires dans une
économie de marché saine et transparente, protège les
droits individuels et de propriété et assure le respect des
contrats. Elle développe leurs systèmes financiers en les dotant
de capacités voulues pour pouvoir soutenir des activités allant
du microcrédit au financement de grands projets d'entreprises. Enfin,
elle instaure comme priorité la lutte contre la corruption et la
promotion de la bonne gouvernance.
Le groupe « Banque Mondiale »
opère de manière originale comparée aux autres IFI pour
plusieurs raisons. Premièrement, elle n'est pas à but lucratif.
Ensuite, son organisation est semblable à une coopérative, dans
laquelle ses actionnaires sont ses 185 pays membres. Les actionnaires sont
représentés par un Conseil des Gouverneurs qui est l'organe de
décision suprême de la Banque Mondiale. Les gouverneurs sont en
général les ministres des finances ou du développement des
pays membres. Ils se réunissent une fois par an, à l'occasion des
assemblées annuelles des Conseils des Gouverneurs du Groupe de la
Banque Mondiale et du Fonds Monétaire Internationale12(*). Ne se réunissant
qu'une fois par an, les gouverneurs délèguent certains aspects de
leur mandat à 24 administrateurs qui sont en poste au siège de la
Banque. Les cinq principaux actionnaires de la Banque (Allemagne, Etats-Unis,
France, Japon, Royaume-Uni) nomment chacun un administrateur, et les autres
pays sont représentés dans leur totalité par 19
administrateurs. L'ensemble de ces administrateurs constitue le Conseil des
Administrateurs. Ils se réunissent en temps normal deux fois par semaine
au moins pour superviser les activités de la Banque, et notamment pour
approuver les opérations de prêt ou de garantie, les nouvelles
politiques, le budget administratif, les stratégies d'aide aux pays, et
les décisions touchant aux emprunts et aux finances de l'institution.
Quant au fonctionnement au jour le jour, il est assuré sous l'impulsion
et la conduite du Président, de la Direction et des
Vice-présidents responsables des différents bureaux
régionaux, secteurs, réseaux et fonctions. Enfin, elle accorde
des prêts et crédits à taux d'intérêt faible
ou nul et des dons aux pays qui n'ont pas accès aux marchés
internationaux du crédit (cela a été le cas dans les
premières années de la transition des PECO), ou qui n'y ont
accès qu'à des conditions défavorables. Par ailleurs, la
Banque prend elle-même en charge ses frais de fonctionnement, n'ayant
donc pas à chercher des sources de financement extérieures.
Voyons donc d'où viennent les fonds de la Banque, avant d'étudier
de plus près les modes d'assistance utilisées par la Banque et
ceux dont ont généralement bénéficié les
PECO pour leur transition.
La mobilisation des fonds de la Banque provient en grande
partie des prêts consentis sur le propre capital de la BIRD, bien qu'elle
réalise une légère marge sur les prêts
financés par la vente de ses obligations cotées AAA sur les
marchés internationaux des capitaux13(*). Ce capital de la BIRD comprend les réserves
accumulées au fil des ans et le capital versé à la Banque
par les 184 pays membres qui sont ses actionnaires. Le revenu de la BIRD
couvre également les coûts de fonctionnement de la Banque
mondiale, et a alimenté les contributions à l'IDA et à
l'allégement de la dette. L'IDA, elle, voit ses ressources
reconstituées tous les ans par 40 pays donateurs. Des fonds
supplémentaires sont réunis grâce au remboursement du
principal sur ses crédits ne portant pas intérêt.
En ce qui concerne les prêts accordés par la
Banque par l'entremise de la BIRD et de l'IDA, il y en a deux types
essentiels : les prêts/crédits d'investissement et les
prêts/crédits à l'appui des politiques de
développement. Les PECO ont bénéficié de ces deux
types d'aides selon la nature des emprunteurs. Les premiers prêts et
crédits sont généralement accordés aux pays pour
financer des fournitures, travaux et services à l'appui de projets de
développement économique. Les seconds (qui étaient
auparavant appelés prêts/crédits d'ajustement) fournissent
un financement extérieur pour aider les pays à réorienter
l'action publique et à réaliser des réformes
institutionnelles. Chacun des projets proposés par les emprunteurs est
évalué de manière à en établir la
validité sur le plan économique, financier, social et
environnemental. Lors des négociations pour le prêt, la Banque et
l'emprunteur se mettent d'accord sur les objectifs de développement
visés par le projet, ses résultats escomptés, ses
indicateurs de performance et son plan d'exécution, ainsi que sur le
calendrier de décaissement du prêt. S'il arrive à la Banque
de superviser la mise en oeuvre de chaque prêt et d'en évaluer les
résultats, c'est l'emprunteur qui exécute le projet ou programme
selon les dispositions convenues.
Concernant les dons accordés par la Banque, ils
sont destinés à faciliter la mise en oeuvre de projets de
développement en encourageant l'innovation, la coopération entre
organisations et la participation des entités concernées à
l'échelon local. Ce dernier aspect explique en partie la
proximité entre les experts de la Banque Mondiale et les élus
locaux des pays bénéficiaires de l'aide.
Enfin, en plus d'être un service de financement, la
Banque dispense également des analyses, conseils et informations aux
pays membres afin de les aider dans leurs réformes. Ce rôle prend
plusieurs formes, qu'il s'agisse de travaux de recherche économique sur
de grands dossiers (l'environnement, la pauvreté, le commerce, la
mondialisation, etc.) ou d'études économiques et sectorielles
consistant à évaluer les perspectives économiques de pays
donnés à partir d'un examen de leur système bancaire, de
leurs marchés des capitaux et d'autres aspects tels que les
échanges commerciaux, l'infrastructure, la pauvreté et les filets
de protection sociale. Les experts travaillant sur ces dossiers ont sorti de
nombreux rapports sur la situation des PECO durant leur transition, sur
différents sujets très différents. Ce dernier aspect du
travail de la Banque, avec la formation, est sans doute le plus important
dispensé aux PECO en transition, ou du moins c'est celui qui a
été le plus commenté (et parfois critiqué). Car en
effet, avant de voir plus en détails l'action de la Banque auprès
des PECO, il nous faut revenir sur les différentes critiques dont a
été victime la Banque et qui continue aujourd'hui à
l'être, d'autant qu'elles ont aussi déterminées son
opinion, son image, et donc son travail sur place. Une première critique
ancienne et générale est l'influence des Etats-Unis : la
Banque serait sous l'influence politique de quelques pays, en particulier des
Etats-Unis, qui en profiteraient pour faire avancer leurs propres
intérêts. Autre critique courante, la Banque fonctionnerait de
manière trop « néolibérale », principe
selon lequel le marché, à lui seul, apporterait la
prospérité aux nations pratiquant la libre concurrence sans
aucune forme de contrôle par l'Etat. Il est intéressant de noter
que cette critique a souvent été émise par des
observateurs de l'action des IFI dans les PECO. En effet, ces principes, s'ils
peuvent constituer une base, ne conviennent pas toujours, notamment dans les
pays sans assises démocratique et étatique stable. Par ailleurs,
la Banque favoriserait l'installation d'entreprises étrangères au
détriment du développement des économies locales. A
l'opposé de ces critiques, certains détracteurs eux-mêmes
« néolibéraux », critiquent l'existence
même de l'institution qui coûterait cher aux contributeurs sans
résultat certain et qui serait un instrument purement politique. Ils y
voient un outil bureaucratique d'ingérence économique
internationale qui conduirait à masquer les défauts des
politiques pratiquées dans les pays concernés. Ces critiques sont
pour la plupart vieilles et existaient toutes au moment de la transition des
PECO. Dès lors, nous pouvons avancer qu'outre le fait qu'elle a
été la moins présente dans la région (les
régions de prédilection de la Banque sont l'Afrique subsaharienne
et l'Amérique du Sud), elle a également été la
moins apprécié sur le terrain. Cependant, cela ne peut enlever la
réalité de son action et l'utilité de ses nombreux
rapports d'experts.
C/ Le FMI et l'OCDE
Les deux dernières IFI qui ont agi pour la
transition des PECO sont le Fonds Monétaire Internationale et
l'Organisation de Coopération et de Développement Economique.
Le Fonds Monétaire Internationale (FMI) a lui
aussi vu le jour à la conférence de Bretton Woods en juillet
1944. Les 45 gouvernements alors représentés souhaitaient
établir un cadre de coopération économique conçu
pour prévenir le retour aux politiques économiques
désastreuses ayant contribué à la Grande Dépression
des années 1930. Selon l'Article 1 des Statuts du FMI, les
objectifs principaux sont au nombre de six. Le premier but est de promouvoir la
coopération monétaire internationale en fournissant un
mécanisme de consultation et de collaboration. Le deuxième est la
facilitation de l'expansion et de l'accroissement
« harmonieux » du commerce international et contribuer
ainsi à l'instauration et au maintien de niveaux élevés
d'emploi et de revenu réel. Le troisième est la promotion de la
stabilité des changes. Le quatrième, l'établissement d'un
système multilatéral de paiements entre les Etats membres et
éviter les dépressions concurrentielles. Le cinquième
objectif est la mise à disposition des ressources
générales du Fonds (de manière temporaire) moyennant des
garanties adéquates, leur fournissant ainsi la possibilité de
corriger les déséquilibres de leurs balances des paiements sans
recourir à des mesures préjudiciables à la
prospérité nationale et internationale. Enfin, le sixième
objectif est, conformément à ce qui précède,
d'abréger la durée et de réduire l'ampleur des
déséquilibres des balances des paiements des pays membres. A la
lecture des ces objectifs, nous pouvons déjà nous rendre compte
de leur proximité avec les besoins inhérents aux PECO au moment
de leur transition et explique l'implication du FMI.
Ainsi donc, de manière plus
générale, le FMI s'emploie à promouvoir la croissance
mondiale et la stabilité économique en encourageant les pays
à adopter des politiques économiques saines. Cependant, à
la différence de la BERD, de PHARE, de la BEI et de la Banque Mondiale,
les concours du FMI ne financent pas des projets ou des activités
spécifiques. Il n'accorde pas de prêts comme le font les agences
de développement et IFI préalablement citées. La
surveillance14(*) comprend
le dialogue que le FMI entretient régulièrement avec chaque
État membre et les conseils de politique économique qu'il leur
fournit. À intervalles réguliers (habituellement une fois par
an), le FMI évalue en profondeur la situation économique de
chaque pays. Il examine avec les autorités les mesures les plus propices
à la stabilité des taux de change, à la croissance et
à la prospérité de l'économie. La décision
de publier les rapports d'évaluation du FMI appartient à chaque
pays membre concerné. En outre, le FMI apporte lui-aussi une
assistance
technique et une formation -- gratuitement dans la plupart des cas -- pour
les aider à renforcer leur capacité de conception et
d'application de politiques efficaces. L'assistance technique porte notamment
sur la politique de finances publiques, la politique monétaire et de
change, le contrôle et la réglementation du système
bancaire et financier, et les statistiques. Le FMI est également un
fonds auquel les pays membres peuvent avoir recours en cas de difficulté
de balance des paiements. Par ces concours financiers, le FMI donne aux
États membres le répit dont ils ont besoin pour remédier
à leurs problèmes de balance des paiements. Un programme
économique appuyé par le FMI est conçu par les
autorités nationales en coopération étroite avec les
services de l'institution, et les concours financiers restent
subordonnés à la réalisation effective de ce programme.
Cette assistance financière est accordée grâce au
système des prêts concessionnels, la Facilité pour la
réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC), et la
Facilité de protection contre les chocs exogènes
(PCE), ainsi qu'au moyen d'allégements de dettes dans le cadre
de l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés
(PPTE) et l'Initiative d'allégement de la dette
multilatéral (IADM).
Enfin, dernière partie conceptuelle et
générale sur le FMI, son organisation. Le FMI doit rendre des
comptes aux gouvernements de ses pays membres. Au sommet de la pyramide
institutionnelle se trouve une nouvelle fois le Conseil des Gouverneurs qui
comprend un représentant de chacun des pays membres. Vingt-quatre de ces
gouverneurs siègent au Comité Monétaire et Financier
International (CMFI) qui se réunit deux fois par an. La gestion courante
du Fonds est assurée à Washington par un Conseil d'administration
là-encore, composé de 24 membres, dont les activités sont
guidées par le CMFI et appuyées par les services professionnels
du FMI. Le Directeur général dirige les services du FMI et
préside le Conseil d'administration. Il est assisté de trois
Directeurs généraux adjoints.
Concernant l'implication du FMI dans les PECO, elle a
été forte. Sans en faire l'historique qui sera établi plus
tard, il est intéressant de revenir sur quelques points précis et
sur la politique générale afin de mieux comprendre le travail
réel du Fonds. Les défis posés par les PECO en 1989
correspondaient tout à fait aux objectifs fixés par le FMI
à sa création. Selon Yves Gisse, économiste et consultant
en Relations Internationales, le FMI a alors eu à résoudre l'un
de ses plus grands défis depuis sa création. Pour le Fonds, le
problème était en plus différent de ceux auxquels il
s'était habitué dans les pays en voie de développement.
Certes, il fallait instaurer des économies reposant sur le libre jeu du
marché et élaborer de nombreuses transformations, mais le niveau
d'éducation était tout de même élevé, et la
main d'oeuvre plus formée que dans les pays où il avait
l'habitude de travailler. Il n'en restait pas moins que la situation en 1989
était très difficile, avec de profonds
déséquilibres économiques, de la récession, du
chômage, de l'inflation et des dettes. En 1994, le directeur
général du FMI, Michel Camdessus disait à ce
propos : « Jamais, depuis l'effort de reconstruction qui a
suivi la deuxième guerre mondiale, le besoin n'a été aussi
grand de coopérer à une entreprise commune riche de tant de
promesses pour l'avenir de humanité ». Ainsi, face à
cette mobilisation, dès 1989, le Fonds a apporté une aide active
aux PECO qui se sont engagés dans la transition. Il a travaillé
en partenariat avec les autorités de ces pays15(*) pour stabiliser et
restructurer leur économie - particulièrement en les aidants
à se doter du cadre juridique et institutionnel d'une économie de
marché. Pour leur apporter des concours supplémentaires aux
premières étapes de la transition, le FMI a crée en 1993
la Facilité pour la transformation systématique, qui a
existé jusqu'en 1995.
Concrètement, les trois premiers pays à
avoir bénéficié du soutien et de l'aide du FMI sont la
Tchécoslovaquie, la Hongrie et la Pologne.
La dernière IFI à avoir oeuvré pour
les PECO au moment de la transition, même si elle a eu un rôle
moindre, est l'Organisation de Coopération et de Développement
Economique. L'OCDE a succédé à l'Organisation
Européenne de Coopération Economique (OECE) issue du Plan
Marshall et établie en 1948 avec l'appui des Etats-Unis et du Canada,
pour contribuer à la reconstruction des économies
européennes après la Seconde Guerre Mondiale. Créée
pour jouer un rôle équivalent à celui de l'OTAN sur le plan
économique, l'OCDE a remplacé l'OECE en 1961 et, depuis, a pour
mission d'aider les gouvernements à réaliser une croissance
durable de l'économie et de l'emploi, ainsi qu'une progression du niveau
de vie dans les 30 pays membres, tout en maintenant la stabilité
financière, et à favoriser ainsi le développement de
l'économie mondiale. Selon la Convention de l'OCDE, l'Organisation doit
contribuer également à une « saine expansion
économique dans les pays membres, ainsi que dans d'autres pays en voie
de développement économique ».
L'OCDE est un forum unique au sein duquel les
gouvernements de 30 démocraties (parmi lesquelles la Pologne, la
Hongrie, la République Tchèque) de marché oeuvrent de
concert pour relever les défis économiques, sociaux et de
gouvernance liés à la mondialisation, ainsi que pour tirer parti
des possibilités qu'elle offre. Les gouvernements y comparent donc leurs
expériences en matière d'action publique, y cherchent des
réponses à des problèmes communs, identifient les bonnes
pratiques et coordonnent leurs politiques nationales et internationales. Elle
élabore aussi des instruments, des décisions et des
recommandations reconnus au niveau international dans des domaines où
des accords multilatéraux s'imposent pour que les pays puissent
progresser dans une économie mondialisée. Les pays non membres
sont également invités à adhérer à ces
accords et traités. Concernant les PECO, l'OCDE s'est inscrite,
jusqu'aux années 1995/1996, dates auxquelles la République
Tchèque (21 décembre 1995), la Pologne (22 novembre 1996) et la
Hongrie (7 mai 1996) sont devenues membres (la République Slovaque a
attendu le 14 décembre 2000) vis-à-vis de la région comme
une institution de conseil et d'aide extérieure.
Les échanges de vues entre les pays membres de
l'OCDE reposent sur des informations et des analyses fournies par son
secrétariat à Paris. Le secrétariat recueille des
données, suit les tendances, analyse et prévoit les
évolutions économiques. C'est ainsi, qu'avant
l'intégration de certains PECO, le secrétariat a beaucoup
analysé les situations propres à chacun, les besoins et les
perspectives. Il étudie également les changements qui affectent
la société ou l'évolution de la situation concernant les
échanges, l'environnement, l'agriculture, la technologie, la
fiscalité et bien d'autres domaines. Dans son aspect
« Développement », directement en relation avec
l'aide à la transition des PECO, l'OCDE aide les gouvernements à
oeuvrer pour la prospérité et à lutter contre la
pauvreté en favorisant la croissance économique, la
stabilité financière, les échanges et l'investissement.
Elle veille à ce que le développement économique et
social, ainsi que la protection de l'environnement avancent ensemble. Par
ailleurs, et ce fut très utile dans le cas des PECO, l'OCDE est depuis
plus de 40 ans, l'une des sources de données statistiques,
économiques, sociales comparables parmi les plus fiables et les plus
importantes au monde. Ses bases de données couvrent des domaines aussi
divers que les comptes nationaux, les indicateurs économiques, la
population active, les échanges, l'emploi, les migrations,
l'éducation, l'énergie, la santé ou encore
l'environnement.
Le fonctionnement de l'OCDE est relativement traditionnel.
Les agents du secrétariat de l'OCDE, situé à Paris,
réalisent des études et des analyses à la demande des 30
pays membres. Les représentants de ces pays membres se rencontrent et
échangent des informations dans des comités
spécialisés sur des questions clés, le pouvoir de
décision revenant au Conseil de l'OCDE.
Le Conseil de l'OCDE est l'organe décisionnel de
l'Organisation. Il se compose d'un représentant par pays membre, plus un
représentant de la Commission Européenne. Le Conseil se
réunit régulièrement au niveau des représentants
permanents auprès de l'OCDE, et il prend des décisions par
consensus. Une fois par an, le Conseil de l'OCDE se réunit au niveau des
ministres pour discuter des grands problèmes du moment et fixer les
priorités pour les travaux de l'OCDE. Les travaux dont
l'exécution est demandée par le Conseil sont
réalisés par le secrétariat. Ce dernier rassemble quelque
2 000 agents concourant par leur travail aux activités des
comités. Environ 700 économistes, juristes, scientifiques et
autres spécialistes, répartis dans 16 directions de
substance16(*), effectuent
toutes sortes de recherches et d'analyses. Le secrétariat est
dirigé par un Secrétaire général assisté de
quatre Secrétaires généraux adjoints. Le Secrétaire
général préside également le Conseil, assurant un
lien essentiel entre les délégations nationales et le
secrétariat. Enfin, les représentants des 30 pays membres se
réunissent dans les comités spécialisés pour
débattre des idées et examiner les progrès
réalisés dans des domaines précis de l'action des pouvoirs
publics. L'OCDE compte environ 200 comités, groupes de travail et
groupes d'experts. Chaque année, près de 4 000 hauts
fonctionnaires des administrations nationales participent à des
réunions de comités de l'OCDE pour examiner les travaux
effectués par le secrétariat, y contribuer et en suggérer
de nouveaux. Concernant le financement de l'Organisation, les 30 pays membres y
participent. Les contributions nationales au budget annuel sont
calculées à partir d'une formule qui dépend de la taille
de l'économie de chacun des pays membres. Les Etats-Unis, qui financent
environ 25% du budget, sont le contributeur le plus important, suivis par le
Japon. Avec l'approbation du Conseil, les pays peuvent également
apporter leurs contributions de manière distincte à des
programmes ou des résultats particuliers qui ne sont pas financés
partir du budget de base.
L'OCDE fournit donc un cadre de réflexion et de
discussion fondé sur des recherches et des analyses. Ce cadre aide les
gouvernements à déterminer une stratégie qui pourra
déboucher sur un accord formel entre les pays membres, ou être
mise en oeuvre par des institutions nationales ou dans d'autres enceintes
internationales. A la différence des autres IFI ayant oeuvré pour
les PECO, l'OCDE n'accorde pas de financements.
Parmi les structures de travail de l'OCDE, deux organes
méritent que l'on s'arrête plus longuement, même si presque
toutes les directions ont à un moment ou l'autre travaillé pour
les PECO dans leur transition. Le premier organe est celle du
développement, le CAD (Comité d'aide au développement),
celle-là même qui a défini le concept d'aide au
développement. La spécificité de cet organe est qu'il part
du principe que les pays en développement / transition sont
eux-mêmes responsables de leur développement. Le CAD
réfléchit donc à la manière dont la
coopération internationale peut contribuer à renforcer la
capacité de ces pays à participer à l'économie
mondiale, et ainsi relever leurs défis. Le deuxième organe
très général est le département des affaires
économiques qui examine l'évolution économique et
financière des pays de l'OCDE et de certains pays non-membres. Il
fournit un cadre global pour identifier les priorités structurelles qui
requièrent l'attention des gouvernements. Il évalue les
incidences d'un large éventail de questions structurelles (par exemple
les migrations, les politiques du marché du travail, les dépenses
publiques, les systèmes d'enseignement et de santé, l'innovation,
la concurrence sur les marchés de produits et l'évolution des
marchés financiers, les obstacles aux échanges internationaux et
à l'investissement direct étranger, ainsi que les effets de la
mondialisation) du point de vue de l'ensemble de l'économie, en
s'appuyant sur les travaux d'un certain nombre de comités
spécialisés de l'OCDE.
Ainsi, l'OCDE est différente, tant dans ses
objectifs, que dans sa nature, aux autres IFI. Ce n'est ni une Banque, comme la
BEI ou la Banque Mondiale, ni une organisation conseillant les politiques
macro-économiques comme le FMI, ni une institution de crédit ou
de soutien financier à des projets microéconomiques comme le
programme PHARE ou la BERD. Cependant, cette position d'observateur a permit
à l'OCDE d'oeuvrer significativement pour les PECO en examinant leurs
situations de manière neutre.
2/ DES DEFIS RELEVES, MAIS EGALEMENT DES INSUFFISANCES
A/ Des efforts de grande ampleur de tous les IFI
Comme nous l'avons vu, les IFI se
caractérisent par une diversité relativement grande qui a sans
aucun doute constituée une force pour appréhender le défi
de la transition des pays d'Europe centrale et orientale. La complexité
des problèmes posés nécessitait des IFI qu'elles puissent
apporter des réponses variées. Cette variété a
été apporté par les IFI, tant dans la concentration de
leurs travaux que dans les moyens mis en oeuvre et les types de réponses
proposés aux gouvernements des PECO. Ainsi, de réels efforts ont
été relevés par les observateurs, notamment en ce qui
concerne les sommes investies, l'apport technique et les observations et
rapports publiés par les experts des IFI dans l'espoir
d'améliorer certaines situations nationales.
Concernant les sommes investies, données ou
prêtées aux PECO pour les aider à surmonter la transition,
il est très difficile, voire impossible de donner un chiffre
précis qui soit indiscutable. En effet, la définition mouvante de
l'aide, la variété des donateurs, et les formes
hétérogènes de l'aide rendent sa mesure exacte impossible.
Aucune mesure globale officielle n'a été réalisée
pour la totalité de la décennie 1990. Pour la période
1990-1995, une approximation du montant cumulé total de l'appui
occidental aux PECO avoisinerait les 86,4 milliards d'euros selon la Commission
Européenne. 13,3 milliards viendraient de la Communauté
Européenne à travers le programme PHARE principalement, 51,7
milliards d'aides bilatérales et 21,4 milliards provenant des autres
IFI. Selon l'OCDE, l'aide a atteint 107 milliards de dollars entre 1990 et
1994, ce qui ne concorde pas avec la somme précédemment
citée. Ces deux sommes prennent en compte l'ensemble de l'aide venant de
l'Ouest et pas seulement des IFI. Selon l'OCDE, la somme provenant des IFI pour
la même période est de 26 milliards de dollars. Selon les chiffres
du FMI, pour la période 1989-1993, l'Ouest semble s'être
engagée à hauteur de 70,4 milliards de dollars, avec 20 milliards
venant des IFI. Comme nous l'avons précédemment vu, le FMI et la
Commission Européenne semblent avoir fourni environ les trois-quarts de
l'ensemble des ressources multilatérales accordées aux PECO, et
la Banque Mondiale et la BERD, la quasi-totalité de ce qui reste.
Environ 1/3 de l'aide occidentale dans son ensemble (IFI + aide
bilatérale) est composé de dons. De tous les donateurs du G24,
c'est l'UE, à travers le programme PHARE et la BEI, qui a fournit la
plus forte part (près de 60% du total) devant les Etats-Unis. Les autres
composantes de l'aide occidentale (2/3 du total), principalement des
crédits à taux préférentiels, des crédits
liés ainsi que l'assistance technique gratuite ou non, viennent
principalement des IFI.
Concernant l'UE, elle représente sur l'ensemble de
la période, environ la moitié de l'aide (avec la BEI par laquelle
est passée environ 10 milliards d'ECU). Sur dix ans (1990 à
1999), la Commission de Bruxelles a engagé au total 10,89 milliards
d'euros en faveur des PECO dans le cadre du programme PHARE seulement. De son
côté, la BEI a accordé des prêts aux PECO pour un
montant total de 8 milliards de dollars (période 1990-1998).
En dix ans (1991-2000), la BERD a elle engagé
environ 12 milliards d'euros. A titre d'exemple, l'engagement net de la Banque
en Hongrie et Pologne, de 1991 à 2005 d'élève à
environ 5 milliards d'euros. La BERD s'est engagée spécifiquement
au financement microéconomique sur la base de multitudes de projets. En
1992, 54 projets avaient été approuvés pour un montant
total de 1,46 milliards de dollars.
La Banque Mondiale, qui semble s'être engagé
jusqu'en 1992 pour un montant au moins égal à 7,5 milliards de
dollars, et le FMI ont ouvert des financements spécialement importants
pour le support des programmes de stabilisation de la balance des paiements. La
moitié de leur contribution totale représente des crédits
du FMI en soutien à ces programmes de stabilisation
macro-économique.
Concernant l'apport technique, il a été
très actif durant la période de transition. Les IFI ont
envoyé leurs experts dans tous les PECO qui le souhaitaient. L'aide
technique a indéniablement tenu un rôle moteur dans toutes les
étapes de la transition, même si au départ, l'aide à
la balance des paiements et à la stabilisation ont été
plus importantes. Au sein de l'assistance technique, deux domaines ont
été particulièrement importants : le secteur
financier et la privatisation. Le programme PHARE et le FMI ont sans doute
été les plus actifs dans ce domaine. Le FMI offre à ses
pays membres une assistance technique et une formation de vaste portée
dans le domaine de la gestion macroéconomique principalement et les PECO
en ont beaucoup profité tout au long des années 1990 et
continuent d'en profiter aujourd'hui. Cette assistance a prit la forme de
missions effectuées par des membres de divers départements de
l'institution, ainsi que par des consultants et experts externes.
Un autre aspect du travail des IFI au moment de la
transition relève davantage de l'observation. Ce dernier aspect a
été très important et continue de l'être à
travers la multitude de rapports, analyses stratégiques et autres
études menés par les IFI et leurs experts le plus souvent
dépêchés sur place. Nous verrons ultérieurement un
exemple de ce travail à travers une étude de la Banque Mondiale
commandée par le gouvernement polonais sur la corruption dans le
pays.
B/ Les IFI ont contribué à
l'amélioration sensible de certaines situations
Il est indéniable que les IFI ont massivement
contribué à l'amélioration sensible de nombreuses
situations et ont souvent crée les conditions du succès qu'ont pu
connaître les PECO. Cependant, il est difficile de statuer
précisément sur la valeur ajouté apportée par les
IFI. Quelle aurait été la situation si les PECO n'avaient pas
bénéficié de l'aide des IFI ? Pour répondre
à cette question, nous pouvons nous fonder sur l'évolution des
situations propres aux PECO et sur les communications émanant
directement des IFI, et plus particulièrement de la BEI. Les
observateurs, qu'ils soient occidentaux ou originaires de l'Est, se sont
davantage risqués à exposer les travers et insuffisances
plutôt que les succès et apports.
Les bouleversements politiques intervenus fin 1989 ont
amené la communauté internationale, à travers leurs IFI,
à intervenir très vite pour soutenir la volonté des PECO
de mettre en place des institutions démocratiques face à une
situation économique souvent grave, un manque d'infrastructures de base
efficaces, un tissu industriel et des services largement obsolètes et
inefficaces, et un environnement dégradé. Tandis que la
Communauté Européenne mettait en route le programme PHARE, la BEI
rappelle dans son rapport annuel de 1993, que suite aux décisions des
instances communautaires et de son Conseil des Gouverneurs, elle
démarrait en 1990 l'octroi de financement en faveur d'investissements
prioritaires à hauteur d'un milliard d'ECU. Dans les pays de la zone, la
BEI a fortement contribué au renforcement des infrastructures de
communication, et en particulier à celles assurant l'amélioration
des liaisons avec la Communauté, suivant en cela les souhaits du Conseil
Européen visant à soutenir les projets de réseaux
transeuropéens impliquant ces pays (939 millions pour les
télécommunications et les transports). La modernisation, la
remise en état avec l'installation d'équipements antipollution de
centrales électriques, le renforcement et la rationalisation des
réseaux électriques et gaziers sont sans aucun doute de
réelles réussites auxquelles a contribué la BEI. Par
ailleurs, cette dernière a soutenu des projets industriels, agricoles et
des services de tailles diverses, directement ou à travers des
prêts globaux. Afin de favoriser la transition vers l'économie de
marché et l'établissement de partenariat entre firmes de ces pays
et de la Communauté, elle a financé des opérations au
travers de « joint ventures » impliquant des
sociétés de divers pays de la Communauté. Enfin, la BEI a
nettement contribué au développement des marchés
financiers locaux en lançant des emprunts dans des monnaies des PECO.
Cette stratégie a contribué à l'efficacité accrue
des marchés concernés, tout en acheminant l'épargne vers
des produits productifs pour lesquels des financements en monnaie locale des
pays concernés étaient demandés afin de minimiser le
risque de change supporté par les promoteurs. La BEI a lancé des
emprunts en couronnes tchèques et a mis en place en 1997 un
mécanisme de financement sous forme de notes à moyen terme
libellés en forint hongrois. Par ce mécanisme, la Banque a pu
être présente sur le marché domestique de la Hongrie et de
la République Tchèque et d'établir ainsi des valeurs de
référence à long terme pour ce segment du marché
tout en aidant à canaliser une épargne locale vers des projets
productifs. Elle a également emprunté sur l'euromarché des
couronnes estoniennes et slovaques et des zlotys polonais. Ces obligations ont
contribué à orienter de l'épargne occidentale vers la
région. D'une manière générale, la Banque a pu,
lorsque la législation nationale l'autorisait, proposer des
crédits dans les monnaies locales et éliminer les risques de
change pour les emprunteurs. C'est sans doute par ce type de crédits que
la BEI a été la plus utile aux PECO dans leur phase de
transition.
Les autres IFI ont communiqué moins
précisément sur les apports essentiels de leur présence
pendant la transition, et sur les fruits de leur aide. Dans un rapport sur la
transition économique des PECO après dix ans de travail17(*), le FMI se veut très
prudent par exemple. Selon l'expert Stanley Fisher, l'aide occidentale a
indéniablement apporté de l'expérience et des fonds
indispensables pour les réformes de la première heure. Les IFI
auraient aidé les PECO le plus significativement dans les
premières années de la stabilisation macroéconomique. La
question de savoir des aides plus nombreuses auraient davantage apporté
aux PECO ne peut trouver de réponse. Ce constat de Stanley Fisher
illustre la difficulté qu'il y a à évaluer la valeur
ajouté des IFI dans le processus. La croissance a sans doute
été encouragée et facilitée par les
investissements, dons et crédits des IFI mais uniquement dans les pays
qui avaient préalablement réussi leurs réformes de
stabilisation macroéconomique. Ces pays ont dans l'ensemble connu des
cycles économiques vertueux dans les premières années de
la transition, grâce au travail de FMI, et sur la durée des IFI
occidentales.
Les rapports annuels du FMI nous renseignent quelque peu.
Dans le rapport de 1997 par exemple, le rapport insiste, pour la Hongrie, sur
l'amélioration sensible de la situation macroéconomique
grâce au « programme de stabilisation »
appliqué par les autorités et conseillé par le FMI. Le
rapport évoque l'amélioration de l'équilibre de la balance
des paiements, l'austérité budgétaire,
l'accélération des réformes structurelles, autant de
progrès qui représentent exactement les domaines de
compétences du FMI. Les privatisations ont aussi progressé, avec
la vente de quelques grosses entreprises du service public. En ce qui concerne
la Pologne également, le FMI, par l'intermédiaire de ses
administrateurs18(*), se
félicitait, en 1997, des résultats. Là encore, il faut
noter l'importance accordée à la stabilisation
macroéconomique dans les résultats (notamment les hausses de
salaires, du PIB, de la croissance...) polonais. Ainsi, si l'on en croit les
rapports annuels du FMI, qui contrairement à la BEI n'exposent pas
clairement l'impact sur la région, le FMI a surtout réussi
à stabiliser, dans un premier temps, mais avec par la suite des
répercussions sur toute l'économie, la situation
macroéconomique des PECO.
La BERD décrit de manière plus
précise l'impact de ses interventions dans la région. Pour la
Hongrie par exemple, la Banque se félicite de son impact sur la
transition dans trois secteurs différents : le secteur de la
finance, des infrastructures et de l'environnement, de l'entreprise et du
cofinancement, et pour la République Tchèque, elle aurait
également fortement contribué aux réformes menées
dans les trois mêmes secteurs. Si l'on en croit ses communications, la
BERD a supporté la réforme du secteur financier en Hongrie depuis
1994 en supportant la privatisation et l'implication d'investisseurs
étrangers stratégiques. La BERD s'est engagé dans quatre
banques majeures de Hongrie et a pu élaborer de nouveaux instruments de
crédits alors inconnus dans la région. Elle a par ailleurs
contribué à la réforme du droit financier et à
l'établissement d'un système de recensement bancaire
centralisé. En République Tchèque, la Banque a
joué un rôle significatif dans la privatisation des deux plus
importantes banques nationales (Ceska Sporitelna et CSOB).
Dans le secteur structurel et environnemental, la BERD a joué un
rôle clé en Hongrie, d'abord par son implication dans les
infrastructures de transports qu'elle a contribué à
améliorer. Elle a aussi promu la privatisation d'une
société de gestion des eaux usagées et a
amélioré les standards environnementaux du pays. En
République Tchèque, la BERD semble avoir joué un
rôle moindre dans le secteur des transports et de l'environnement. Elle a
participé à titre minoritaire à la construction d'une
autoroute en 1995 et a financé un projet municipal de gestion des eaux.
Dans le secteur de l'entreprise, la BERD a supporté de nombreuses PME et
PMI, a aidé sensiblement aux privatisations en Hongrie et
République Tchèque. En Hongrie, elle a encouragé et
participé à la privatisation de l'opérateur national
(Matav, désormais Magyar Telekom) et à
l'émergence progressive d'un concurrent (Vivendi Telecom
Hungary, désormais Invitel). Ainsi, la BERD se
félicité d'avoir été à l'origine de l'un des
réseaux de télécommunication les plus compétitif et
décentralisés dans la région. En République
Tchèque, la Banque a beaucoup attiré les investissements
étrangers dans l'industrie et l'agriculture (Cokoladovny, Sugar,
Sepap, Barum). Elle s'est également spécialisée dans
l'aide aux entreprises (généralement des PME locales) en
faillite, en finançant elle-même et en encourageant les IDE. La
Banque s'est également investit dans l'immobilier et l'hôtellerie
en République Tchèque où elle a obtenu des
résultats sensibles. En conclusion pour la Hongrie, la BERD
prétend donc avoir bien compris l'environnement économique du
pays et avoir ainsi pu concentrée ses efforts sur des secteurs bien
choisis. Pour la République Tchèque, la BERD a également
connu des réussites notables.
C/ Cependant, certains travers n'ont pu être
évités
Malgré tous les efforts fournis par les IFI, leur
implication et les résultats obtenus, il n'en reste pas moins que de
nombreux travers et défauts ont régulièrement
été relevés par les observateurs, et parfois par les IFI
elles-mêmes. Trois des observateurs les plus avisés du
phénomène de transition des PECO, et particulièrement de
l'influence et du rôle de l'Ouest dans cette dernière ont mis
l'accent sur ces insuffisances.
Parmi eux, Marie Lavigne évoque différents
défauts qu'elle attribue à l'assistance en 1999. Elle en
dénombre trois principaux.
Tout d'abord elle déplore l'ambiguïté
du concept d'assistance. En effet, de nombreuses questions se posent sur le
concept, et cela quelque soit la définition retenue, large ou
étroite. Que retient-on ? Quelles actions d'aide ont
été retenues dans telle ou telle étude ? En plus de
ces questions, en soulevant cette ambiguïté, Marie Lavigne pose la
question du réel bénéficiaire de l'aide. En effet,
même en excluant les IDE, « qui aide qui » ? En
observant de plus près, Marie Lavigne se demande si ce n'est pas l'IFI,
ou l'économie de l'Ouest en général, qui profite le plus
de l'aide. L'assistance technique par exemple, a régulièrement
été considérée inadéquate. Elle aurait
été fournie par des hommes et des institutions qui ne
connaissaient pas le terrain et ses caractéristiques
particulières. Ainsi, certains la voyaient comme un simple moyen
d'obtenir des fonds aux cabinets de conseils occidentaux et aux IFI selon les
cas. Par ailleurs, les investissements des IFI étaient parfois
dirigés vers des projets dans des domaines plus intéressants pour
l'Ouest que pour l'Est (par exemple les projets sur le nucléaire ou la
protection de l'environnement).
Autre critique, Marie Lavigne déplore les
conditionnalités posées par les IFI, et les conséquences
parfois fâcheuses qu'elles peuvent entraîner. La notion de
conditionnalité désigne la soumission d'un financement
extérieur à l'engagement du pays bénéficiaire de
mener une action définie par le pays/IFI donateur. Il existe
différentes conditions pour obtenir les prêts accordés par
les IFI. Le FMI possède une procédure standard en quatre
étapes : tout d'abord, les autorités du pays
récipiendaire doivent établir les mesures qu'elles sont
prêtes à prendre pendant la période de négociation
du prêt ; ensuite, le FMI leur fait parvenir une liste de mesures
économique à prendre avant l'arrangement final ;
après cela, différents objectifs doivent être atteints
durant la période du prêt ; et enfin, il y a des
révisions périodiques du programme financé. La
conditionnalité du FMI est particulièrement importante car son
« sceau d'approbation » a valeur de garantie pour d'autres
IFI et investisseurs privés. Parfois donc, ce
« sceau » peut être plus recherché que le
crédit lui-même. La Hongrie par exemple en 1996 a signé un
accord avec le FMI mais n'a pas profité du prêt et se justifia
officiellement en expliquant son besoin de restaurer l'image du pays sur les
marchés financiers internationaux et qu'elle espérait que le
label FMI l'y aide. La BERD et la banque Mondiale ont leurs propres
critères liés à la viabilité des investissements
faits, ce qui les conduit à pousser à la libéralisation et
à la montée des prix. Ainsi, Marie Lavigne critique le fait que,
malgré leurs bonnes intentions, les IFI ne contrôlent pas toujours
les effets qu'ont leurs prêts et surtout leur politique de
conditionnalité qui est le plus souvent guidée par leur propre
bonne santé financière.
Enfin, Marie Lavigne observe le manque
d'efficacité dans la délivrance et l' «
absorption » des sommes prêtées ou données.
Cette critique vaut surtout pour la première période de la
transition alors que le manque d'infrastructure, de gouvernements stables, de
règles juridiques et économiques empêchaient parfois la
bonne délivrance de l'aide. Les sommes allouées n'ont parfois pas
été utilisées, ou encore ont-elles été
détournées, ce qui a pu faire penser aux occidentaux que les
besoins n'étaient pas si importants.
Au milieu de ce tableau noir, Marie Lavigne relève
tout de même de nombreux motifs de satisfaction dans son ouvrage, ainsi
que certaines recommandations que nous verrons ultérieurement.
Autre observateur de la transition, Jean Pisani-Ferry
relève lui quatre grandes insuffisances ou travers dans un article
daté de 199419(*).
La première question qu'il pose porte sur
l' « excès de radicalisme ». En contraignant
les PECO à une stabilisation brutale ou à une
libéralisation sans précaution, certaines IFI ont souvent
été tenues pour responsables des récessions qu'ont connus
les pays en transition. Cependant, il n'est pas certain que le choix de la
méthode radicale soit dû aux IFI mais plutôt aux
gouvernements eux-mêmes désireux de rompre sans délai avec
les anciens modèles. En effet, les IFI dans leur ensemble n'ont pas
milité pour le gradualisme mais le choix de cette méthode, fait
par certains pays nous l'avons vu, n'a pas empêché les IFI de les
aider, même dans cette démarche. Ainsi, cette première
critique a selon nous une portée limitée.
La deuxième question que pose Jean Pisani-Ferre
porte sur l'excès (ou non) de macroéconomie. Au début de
la transition les questions étaient quasi-exclusivement
macroéconomiques et l'importance accordée aux problèmes
structurels et microéconomiques était bien moindre. Selon
l'auteur de l'article, les IFI ont été bercées par
l'illusion qu'une stabilisation réussie aurait des effets
immédiats. D'après lui, il y a deux explications à cette
illusion. Tout d'abord, face à la complexité du problème,
les experts ont fait appel à des schémas intellectuels
déjà utilisés, par exemple lors des réformes en
Amérique du Sud (nous noterons d'ailleurs à ce propos le grand
nombre de rapports et notes qui mettent en commun ces deux
« transitions »). Le problème de cette
méthode est qu'elle sous-estimait le caractère structurel de la
transition et appliquait donc une politique macroéconomique
« orthodoxe » ou « passe-partout » dans
un contexte microéconomique non-standard, et même
particulièrement spécifique. La deuxième raison qui peut
expliquer cette illusion est d'ordre institutionnel. En effet, les occidentaux
ont décidé que le leadership de l'assistance devait revenir au
FMI et la coordination à la Communauté Européenne. Or, le
FMI est une institution à visée macroéconomique, et les
IFI qui se sont greffées au FMI n'ont pas suffisamment mis en avant les
éléments structurels et l'importance du caractère
microéconomique. Dès lors, la conditionnalité
macroéconomique a tendu à l'hégémonie et a
influencé plus que toute autre les décisions des dirigeants
nationaux. Selon Jean Pisani-Ferry, les institutions davantage tournées
vers la microéconomie devraient avoir plus d'importance et davantage
faire entendre leur voix au sein du leadership de l'assistance.
La troisième critique qu'apporte Jean Pisani-Ferry
est la sous-estimation de la dimension internationale du processus de
transition. Les IFI n'auraient pas assez pris en compte l'effondrement du
marché soviétique et ses conséquences directes sur la
chute de la production dans les PECO. Le choc provoqué par la rupture
des liens commerciaux avec l'URSS enregistré en 1991 représente 7
à 8% du PNB ex-ante en Hongrie et en Tchécoslovaquie. Si les IFI
ne portent pas de responsabilité directe ici, l'approche qu'elles ont
privilégié, pays par pays, n'a pas favorisé la
coopération régionale, et donc la potentielle poursuite des
échanges commerciaux régionaux qui aurait sans doute amoindrit le
choc entraîné par la rupture des liens avec l'URSS. Sans le
vouloir, les IFI ont sans doute favorisé la dissolution des relations
commerciales traditionnelles en laissant espérer à chaque pays
qu'il pourrait compenser à l'Ouest ce qu'il perdrait à l'Est. SI
cette critique nous paraît effectivement valable, nous nous devons de la
pondérer. Notre mémoire de Master 1 (« La
coopération entre PECO dans les années 1990 »),
nous a apprit qu'il y a tout de même eu une prise de conscience de
ce problème dans les PECO, tant d'un point de vue politique (Groupe de
Visegrad) qu'économique avec la création d'un marché
commun à l'Est (CEFTA). Cependant, nous avions déjà
posé la question du rôle des organisations internationales dans
cette coopération régionale, notamment de la Communauté
Européenne qui a négocié bilatéralement les
adhésions, poussant les PECO à une concurrence et non à la
coopération.
Le quatrième problème soulevé par
Jean Pisani-Ferry est le manque de coordination de l'assistance, à la
fois entre donneurs, et entre bénéficiaires. L'assistance est
gérée par au moins six institutions et donc très
différente par exemple du Plan Marshall dont seuls les Etats-Unis
détenaient la gestion. Cette accumulation a entrainé une
multiplication des programmes, agences et fut parfois source de rivalité
entre les IFI, mais aussi de retards et gaspillages. Nous ne pouvons en vouloir
aux IFI qui étaient légitimement guidées par leur culture
et leur logique. Dès lors, si en principe, la Communauté
Européenne devait assurer la coordination politique de l'assistance,
dans les faits, cela a été très difficile. Aucun mandat
sans ambiguïté n'a été donné par la
communauté internationale qui n'a jamais pu s'entendre sur le partage du
« fardeau » financier de l'assistance et sur la
responsabilité de chacun. Ainsi, une nouvelle fois, il paraît
dangereux de condamner trop rapidement les IFI pour ce travers qui semble
davantage imputable à la communauté internationale, et en
particulier aux grands décideurs et pourvoyeurs de fonds
qu'étaient l'Europe, les Etats-Unis et le Japon.
Un autre observateur de la transition des PECO qui a
émit des critiques sur l'assistance des IFI est le polonais Robert
Zuzowski dans un ouvrage de 199820(*). Ce dernier émet une première critique
général qui remonte à l'origine de l'assistance et au
constat fait par les IFI qui a influencé le point de départ de
l'assistance. Selon lui, les hommes politiques de l'Ouest ont pensé
qu'un mélange entre assistance économique et encouragements
verbaux suffiraient à garantir le succès de la transition. En
effet, l'occidentalisation du tiers-monde n'ayant pas fonctionné, il n'y
a pas de raison que celle de l'Est fonctionne mieux. A la
question : « pourquoi tant d'observateurs de l'Ouest sont
optimistes à propos de l'Est ? », Robert Zuzowski
rappelle la réponse du magazine anglais The Economist :
« pendant les années rouges, certains
économistes auraient étudié l'économie de l'Ouest
sous leurs bureaux garantissant le succès de celle-ci à
l'Est ». Or, pour fonctionner de manière saine et correcte,
une économie de marché moderne doit s'appuyer sur des
institutions et des règles (droits de propriétés,
règles économiques, supervision des marchés financiers et
des banques...) ancrées depuis des siècles dans les
mentalités et les habitudes de chacun, de l'ouvrier au patron, en
passant par le politique ; la simple connaissance ne suffit pas. Jusqu'en
1991, aucun des PECO (à l'exception peut-être de la
Tchécoslovaquie) n'avait en sa possession ces structures. En plus, les
règles du jeu du monde économique occidental sont faites et
gérées par des hommes et des institutions de l'Ouest qui ne
s'étaient jamais intéressés aux PECO jusque là.
Robert Zuzowski rappelle que lorsque l'Ouest est graduellement passé
d'un système féodale à un système de
démocratie libéral et d'économie de marché, l'Est
n'a pas suivit ce processus. Ainsi, c'est bien la sous-estimation du facteur
historique et structurel (encore une fois) qui pousse Robert Zuzowski à
émettre une telle critique. L'opinion pensait que l'unique
élément qui manquait à l'Est était le capital. Le
corollaire de cette pensée était l'ouverture des prêts et
des crédits à l'Europe de l'Est. Seulement, en ouvrant ces
possibilités, l'Est s'est dangereusement endetté, tout comme le
tiers-monde. Certes, ce type d'assistance a pu fonctionner dans certains cas,
par exemple l'aide américaine à l'Europe de l'Ouest et au Japon
pour soutenir leur reconstruction. La validité de ces exemples cependant
est détruite par leur principal caractéristique :
« reconstruction ». Nous étions alors dans des
contextes de reconstruction où les pays aidés avaient
l'expérience de l'économie de marché et connaissaient le
fonctionnement des marchés qu'ils avaient parfois même
contribué à instaurer. Tchécoslovaquie à part, la
tâche des IFI à l'Est n'était pas de reconstruire un
capitalisme anéanti mais bien d'en construire les modalités et de
le mettre en place pour la première fois. Ainsi, selon l'auteur
polonais, les IFI ont mal évalué la tâche qui leur
incombait et les conséquences sont graves. En effet, Zuzowski voit dans
les chutes de production, l'hyperinflation qu'ont pu connaître les PECO
durant leur transition des conséquences directes de cette erreur de
jugement de l'Ouest.
Quatrième observateur, et le dernier que nous
citerons, à avoir émit des critiques sur la manière dont
s'est organisé l'assistance est le Français Assen Slim21(*).
Nous passerons rapidement sur les deux premières
limites qu'expose Assen Slim : l'impossible recensement des aides
protéiformes dû à la multiplicité des donneurs et
des aides (assistance humanitaire, prêts, investissements,
crédits, réduction ou rééchelonnement de dettes,
dons, assistance technique, formation...), problème important mais sur
lequel nous nous sommes déjà arrêtés, tout comme la
deuxième critique qui relève des montants impossibles à
chiffrer. En effet, comme nous l'avons évoqué également,
le caractère vague de la définition de l'aide, la
multiplicité des donateurs, et les formes
hétérogènes d'aides rendent la mesure financière
exacte impossible.
Après avoir rappelé lui-aussi les effets
positifs nombreux de l'assistance occidentale, Assen Slim expose deux grandes
familles de limites : les limites inhérentes à l'aide (sans
tenir compte des spécificités des pays aidés) et les
limites liées à son attribution aux PECO. Parmi les limites
inhérentes à l'aide, Assen Slim en distingue deux types.
La première limite inhérente à
l'aide porte sur la lourdeur des conditionnalités liées. Ainsi,
sa critique est d'un ordre différent que celle de Marie Lavigne sur ce
même problème de la conditionnalité. Dans la pratique, la
conditionnalité (surtout celle du FMI), impose aux PECO des mesures
d'austérité et de réduction budgétaire
(réduction des dépenses publiques, freinage de l'absorption par
l'intermédiaire du crédit) ainsi que des mesures d'ajustement
structurel (diminution du rôle de l'Etat, réduction du
déficit du commerce extérieur...). A ces conditions
générales, s'ajoutent celles spécifiques à chaque
donneur. Ainsi l'UE subordonne son action en faveur de la balance des paiements
des PECO à la mise en place d'une discipline financière des plus
strictes. La BERD, quant à elle, établit en plus des conditions
économiques traditionnelles, un lien explicite entre son action et le
respect des droits civiques et politiques. Selon Assen Slim, l'empilement de
conditionnalités pose un problème de coordination. Nous revenons
donc à cette critique émise par Jean Pisani-Ferry. Toujours selon
Assen Slim, ces conditions sont souvent contradictoires et incohérentes
et peuvent donc empêcher les PECO d'identifier clairement la
stratégie à suivre. Seule l'UE semble faire les efforts
nécessaires afin d'accorder ces conditionnalités à celles
des autres IFI. Par ailleurs, au-delà de ce problème de
coordination, la multiplication des conditionnalités entraînerait
une surdétermination des politiques économiques nationales des
pays bénéficiaires. En effet, l'addition de conditions
hétérogène a parfois pu ligoter les décideurs
politiques nationaux, même si cette affirmation semble
légèrement exagérer le trait.
La deuxième grande limite inhérente
à l'aide que pose Assen Slim porte su la centralisation excessive des
procédures d'attribution qui s'explique par la volonté des IFI
d'exercer un contrôle strict sur les capitaux engagés. Le
programme PHARE, par exemple est directement géré par la
Commission à Bruxelles. Cette centralisation semble entraîner,
selon Assen Slim, des délais excessifs entre l'élaboration des
programmes indicatifs et l'attribution des premiers financements. En effet, le
retard moyen de décaissement des fonds engagés est
progressivement passé de 2 ans en 1991 à 3 ans en 1995 pour
atteindre 5 ans en 1999. Dans certaines IFI, certains projets,
l'arriéré d'engagement en cours atteindrait 8,5 années de
paiement. Cependant, afin de nuancer ce propos, nous nous permettons de
rappeler qu'en 1995, la Cour des comptes de l'UE avait reproché à
PHARE son manque de transparence et surtout la perte de contrôle de
certains projets importants.
Assen Slim passe ensuite aux critiques liées aux
attributions des aides aux PECO.
La première critique porte sur la non prise en
compte des écarts de développement au sein des PECO par les IFI.
En effet, les PECO les plus riches ont paradoxalement reçu le plus
d'aide (Hongrie, République Tchèque et Pologne).
En deuxième lieu, les conditions liées
à l'aide occidentale seraient souvent inadaptées à des
pays en transition. La mise en oeuvre de politique de stabilisation par
exemple, comme condition sine qua non pour bénéficier de
l'aide apparaît discutable. En effet, ce type de politique, dans un
contexte comme celui des PECO en transition, affecte notoirement la production,
dans la mesure où les entreprises ont recours au crédit pour
financer leurs activités, à fortiori lorsque les marchés
financiers sont peu ou pas développés comme c'est le cas dans les
PECO. Dès lors la principale critique qu'émet Assen Slim
s'adresse au FMI qui sous-estimerait systématiquement l'impact d'une
variation de crédit sur la production et surestimerait cet impact sur
l'inflation et la balance des paiements.
Enfin, l'aide occidentale, et en particulier celle de
l'UE, serait inadaptée à des pays en voie d'adhésion
à l'UE. La solidarité peut être un élément
fortement intégrateur entre pays mais seulement à condition
qu'elle ait un effet significatif sur la convergence des niveaux de
développement. Si cette convergence n'a pas lieu, l'effet peut
même être opposé. Or, pour qu'un tel rattrapage se produise
dans le milieu des années 1990 entre les PECO et l'UE, il aurait fallu
une aide extérieure sans commune mesure avec celle que les PECO ont
obtenu.
Les critiques, insuffisances et travers que certains
observateurs ont pu relever illustrent avant tout la complexité des
rapports entre IFI et PECO. En effet nombre de ces critiques ne doivent leur
existence qu'à l'implication financière importante des IFI,
d'autres ne leurs sont pas imputables, et d'autres qui relèvent souvent
d'anciennes habitudes sociales et économiques occidentales dont les pays
leaders de la communauté internationale ne se sont pas défaits.
Chap. 3
Dix-huit ans après, quelle part de
responsabilité accorder aux IFI dans les destins contrastés des
PECO ?
1. L'ADAPTABILITE DES IFI
A/ Une adaptabilité aux besoins de chaque pays?
Afin de mieux cerner la part de responsabilité
imputable aux PECO, il est nécessaire d'étudier la manière
dont les IFI ont géré deux facteurs : d'une part les
différences entre PECO ; d'autre part les gouvernements nationaux.
En d'autres termes, les IFI se sont-elles adaptées aux
spécificités propres à chaque pays et à leurs
besoins et dans quelle mesure le facteur politique a-t-il joué et
influencé leur action ?
Nous avons vu que parmi les nombreuses critiques
énoncées, l'une d'elle déplorait l'influence de l'Ouest
dans les positions défendues par les IFI, et en particulier par la
Banque Mondiale. C'est dans cette optique que la question du jeu d'influence se
pose.
La BERD offre des renseignements précis sur
l'affectation de ses fonds pays par pays. L'étude comparée (nous
comparerons ici la République Tchèque et la Hongrie) montre que
l'institution financière européenne s'adapte aux besoins propres
à chacun de ces deux pays. Comme nous l'avons vu au moment d'analyser
l'impact des IFI sur la transition, la BERD par exemple, si elle a ciblé
les mêmes secteurs dans les deux pays, ne l'a pas fait de la même
manière systématiquement. Jusqu'au 30 septembre 2005, la BERD a
financé 56 projets en Hongrie pour un total de 800 millions d'Euros et
en a financé 62 en République tchèque pour un total de 488
millions. A la vue des répartitions, nous apercevons des similitudes qui
sont dues à la proximité des besoins entre les deux pays. Le
secteur ayant reçu le plus de fonds est le même pour les deux
pays : le secteur financier avec respectivement 30% (Hongrie) et 39%
(République Tchèque) du total. Il est aussi intéressant de
noter qu'au sein de ce secteur, ce sont les fonds d'investissements qui ont
reçu le plus d'aide (16% du total pour la Hongrie et 22% pour la
République Tchèque). Les différences de répartition
se font ensuite. Les infrastructures ont reçu le plus de fonds
après le secteur financier en Hongrie (13%, soit 389 millions d'euros)
alors qu'en République Tchèque, c'est le secteur industriel qui
tient cette deuxième place (15%, soit 96,6 millions d'Euros). Quel
constat faire de ces chiffres ? Les aides vont en premier lieu au secteur
bancaire et financier, précisément celui susceptible de
générer le plus d'argent, notamment pour l'Ouest. Pouvons-nous
pour autant avancer que la BERD finance ce secteur sous l'influence de la
communauté internationale avide de gains ? Non, car l'étude
des situations initiales de la Hongrie et de la République
Tchèque montre bien les besoins des deux pays dans ce domaine
précis. Ensuite, il est clair que la Hongrie ne possédait pas le
même niveau d'infrastructures que la République Tchèque et
cela explique la répartition. Ainsi, dans ce cas précis de
l'implication de la BERD dans deux importants PECO, tout porte à croire
que l'IFI s'est parfaitement adaptée aux besoins (notamment structurels)
des pays récipiendaires. Dans son autocritique, la BERD déclare
même que ses apports ont reflété les besoins changeants de
l'économie tchèque et ont su « relativement »
bien y répondre. La question qui se pose maintenant dans un cas comme
celui-ci, où les aides semblent avoir répondu aux besoins, est
l'impact du/des gouvernement(s) en place. En République Tchèque,
la Banque semble avoir traité avec le Ministère des Finances et
celui de la Justice principalement. Les deux ministères semblent avoir
mis des freins à l'instauration de réformes proposées par
la BERD en raison d'un manque de consensus politique. En Hongrie, la BERD ne
semble pas avoir rencontré de problèmes avec les gouvernements
successifs, au contraire, elle insiste sur la bonne coopération
entretenue avec les autorités locales en place.
Un autre exemple allant dans le sens du
désintérêt de l'aide et de la prise en compte exclusive des
besoins nationaux est la lutte contre la corruption menée
particulièrement activement par la Banque Mondiale. Le gouvernement
polonais a commandé un rapport à la Banque Mondiale en 1999 sur
l'état général de la corruption dans le service public (le
rapport exclut la corruption dans le secteur privé) et sur les moyens de
la combattre. Cet exemple témoigne de la bonne volonté
régnant des deux côtés. Après avoir rappelé
les objectifs de la Banque en matière de corruption (minimiser son
existence et ses effets afin qu'elle devienne une exception et non plus la
règle, et inverser son équilibre : d'une activité
à bas risque et hauts revenus à une activité hautement
risquée et à bas revenus potentiels), évalué ses
effets sur l'économie nationale (macroéconomique,
réduction de la productivité et de la croissance, coûts
pour la population et les pauvres en particulier et perte de confiance dans les
institutions publiques), la Banque Mondiale présente le contexte
polonais. La corruption y est décrit comme un
« phénomène général »22(*), présent partout et en
tout temps. Selon de nombreuses études internationales, la corruption
dans les PECO est plus répandue que dans n'importe quel autre endroit au
monde, et peut-être la pire, car impliquant souvent des violences
physiques en plus des effets économiques23(*). Parmi les domaines publics où la corruption
est la plus forte en Pologne (et sans doute plus importante que dans nombreux
autres PECO), la haute administration semble la plus touchée. Le type de
corruption le plus répandu dans la haute administration polonaise est le
versement d'argent en échange de contrats publics ou de faveurs de
toutes sortes ; défense / promotion / vote ou au contraire blocage
d'une loi ou d'un amendement ; contrats publics accordés contre
versement d'une somme d'argent ; manipulation d'une privatisation ;
intervention dans l'affectation de concessions publiques, licences ou exemption
de taxes ; conflit d'intérêt dans les nominations de
dirigeants d'entreprises publiques ; renforcement illégitimes de
droits de douanes à l'importation. Tous ces instruments de la corruption
vont à l'encontre de la transition promue par les IFI mais en sont aussi
la conséquence directe. En effet, alors que la Pologne était sous
contrôle de l'URSS, la corruption n'existait presque pas. Dès lors
que les soviétiques ont quitté le pouvoir, le pays, comme tous
les autres PECO, s'est retrouvé sans aucune institution suffisamment
solide pour contrôler et éviter de tels agissements. Par ailleurs,
les privatisation en pagaille ont aiguisé les appétits de
nombreux « jeunes loups » dans la région (comme nous
l'avons vu dans le secteur de l'éducation), prêts à tout
pour obtenir des concessions, des contrats ou encore d'anciennes entreprises
publics à bas prix. Le rapport de la Banque Mondiale insiste
également sur la corruption régnant dans le système
judiciaire. Les sentences peuvent être achetées par
l'intermédiaire de professionnels de la justice ou d'avocats.
Après avoir identifié ces problèmes, la Banque Mondiale
propose un programme de lutte contre la corruption. Elle recommande la
création d'un petit groupe de personnalités hors de tout
soupçon et influentes dans différents domaines qui pourraient
ensemble répondre au défi de la corruption. La Banque propose que
l'un de ses membres en fasse partie. Selon elle, certaines sources de la
corruption pourraient être vaincues en améliorant l'aspect
technique de différents mécanismes judiciaires, administratifs et
financiers. Par exemple, la Banque propose une loi sur le financement des
partis politiques et sur l'activité de lobbying. Enfin, la Banque
insiste sur l'engagement de la société civile sans qui rien ne
peut se faire dans la matière. C'est pourquoi elle propose une
conférence publique réunissant différents
représentants de la société civile (représentants
du monde des affaires, des cultes, des ONG, du monde associatif, des
médias et de l'éducation) afin de communiquer sur le
problème, notamment d'informer sur les coûts exacts et les
conséquences de la corruption au niveau national et international. En
conclusion du rapport, la Banque Mondiale propose son aide au gouvernement
polonais. Elle pourrait faire bénéficier le pays de son
expérience dans le domaine, apporter une formation technique utile pour
les réformes nécessaires. Cet exemple, sur lequel il nous a paru
utile de s'attarder, illustre bien un aspect des rapports entre IFI et
gouvernements. Ici, le travail est une nouvelle fois
désintéressé et nul ne peut y voir la défense ou la
promotion des intérêts de l'Ouest. Par ailleurs, la Banque
répond, par définition puisque le rapport provient d'une commande
du gouvernement, à un besoin crucial du pays : la lutte contre la
corruption. Nous pourrions prendre de nombreux autres exemples
témoignant d'un certain dévouement des IFI aux PECO qui en
avaient besoin. Cependant, les nombreuses critiques émises par des
observateurs avisés de la transition et du rôle des IFI nous ont
également montré qu'il a pu exister des dérives et des
insuffisances. Toujours est-il qu'au-delà de ces adaptations
ciblées à des besoins souvent temporelles et structurelles, les
IFI ont également suivi de grandes évolutions sur la durée
qui ont également illustré une certaine adaptabilité.
B/ Les évolutions de stratégie
Ainsi, l'autre aspect de l'adaptabilité des IFI a
été leur évolution dans le temps en fonction du contexte
global de la région. Ces évolutions, contrairement aux
adaptations que nous avons évoqué plus haut, ont davantage prit
en compte les politiques des IFI elles-mêmes. Cependant, en raison de la
diversité des IFI ayant travaillé pour les PECO, il est difficile
d'extraire les mêmes phases pour toutes les IFI. En effet, suivant les
IFI, les grandes phases ont pu sensiblement varié. Ainsi, si l'on peut
observer deux ou trois grandes phases dans l'aide à la transition, la
première d'entre elles diffère selon les IFI : de 1990
à 1993, l'aide à la transition débute, pour le programme
PHARE par exemple, avec de l'assistance et du soutien, notamment humanitaire,
et pour le FMI, avec une priorité accordée à la
stabilisation macroéconomique.
Cette première phase marquée par les
aspects macroéconomiques mérite que l'on s'y arrête. Elle a
commencé avec la Pologne et la Hongrie (avant de continuer tout au long
des années 1990 avec d'autres PECO, et c'est en cela que les
différentes phases ne sont pas tout à fait
délimitées, tant temporellement que géographiquement) avec
deux différentes étapes : la stabilisation à
proprement dite, puis la création de mesures structurelles afin de
créer une économie de marché privée. La
première étape (stabilisation) s'est décomposée
comme suit : libéralisation des prix, rééquilibrage
des comptes nationaux, mise en place d'une politique monétaire
restrictive, politique de revenus visant à stopper la spirale
inflationniste et enfin libéralisation du marché des
exportations. La deuxième étape de cette première phase
(création de mesures structurelles afin de créer une
économie de marché privée) a comporté quatre
différents aspects : le lancement des privatisations et le
démantèlement des anciens monopoles d'Etat, la mise en place d'un
environnement propice à l'économie de marché par des
réformes dans le secteur bancaire et financier, le développement
d'un nouveau système de sécurité sociale et enfin un audit
complet du secteur industriel.
La deuxième phase a généralement
été dévolue au renforcement des infrastructures
législatives et juridiques afin de créer une économie de
marché digne de ce nom.
Enfin, la troisième phase qui ne concerne pas
toutes les IFI, débute en 1996 s'est concentrée sur l'aide
à l'adhésion aux institutions européennes (PHARE, BEI,
BERD).
Dans le cas du programme PHARE, trois phases doivent donc
être distinguées : la première s'est concentrée sur
l'aide et le soutien comme nous l'avons vu, et la seconde, sur les mesures
législatives et réglementaires visant à créer une
économie de marché. Ainsi, entre 1990 et 1993, les principales
allocations sectorielles du programme se subdivisaient de telle
manière : 337,7 millions d'ECU (soit 10,3%) pour l'aide
humanitaire, alimentaire et d'urgence, 876,4 millions d'ECU (soit 26,7%) pour
le secteur privé (restructuration, privatisation, PME, secteur
financier, développement régional), 392,8 millions d'ECU (soit
12%) pour la restructuration agricole et 431 millions d'ECU (soit 13,1%) pour
l'éducation, la formation et la recherche. Durant cette première
phase, PHARE est donc intervenu dans la majorité des aspects de la
transition, ayant un impact dans la vie économique, sociale et
politique, autour de trois thèmes différents : les
problèmes typiques de la transition, les problèmes de
développement et les problèmes sociopolitiques. Les
problèmes typiques regroupaient le soutien à la privatisation des
biens publics, la résolution des problèmes de créances
douteuses et les restructurations des entreprises d'Etat ainsi que le
développement des structures de régulation des marchés et
la réduction des interventions directes du pouvoir public dans les
prises de décision économiques. Les problèmes de
développement rassemblaient eux les investissements dans les entreprises
privés, le développement rural et dans le capital humain et
social (le plus souvent par le biais de la formation et de l'éducation).
Enfin, les problèmes sociopolitiques regroupaient les réformes
politiques et le renforcement du pouvoir des citoyens. Ainsi, jusqu'en 1993
(Conseil de Copenhague), le programme s'est concentré sur le
développement à proprement dit. Durant cette période, les
allocations directes se sont élevées à environ 3,2
milliards d'ECU. En 1993, après le Conseil de Copenhague, le programme
est réorienté vers le « market expansion » et
la phase 2 de l'aide, à savoir l'assistance aux réformes
législatives et réglementaires propres au développement
d'une économie de marché. Durant cette phase qui court jusqu'en
1996 environ, les allocations totales se sont élevées à
3,3 milliards d'ECU. L'aide humanitaire a sensiblement baissé pour
n'atteindre que 180 millions d'ECU (soit 5,3% contre 10,3% entre 1990 et 1993),
la restructuration agricole a subit la plus importante baisse avec 85,5
millions d'ECU (soit 2,6% contre 12% pour la période
précédente). Les secteurs qui ont bénéficié
le plus du changement de politique et de priorités du programme sont les
suivants : infrastructures avec 1,2 milliards d'allocations entre 1993 et
1996 (soit 36,1% contre 8,5 entre 1990 et 1993) et les administrations,
institutions publiques et législation avec 275, 2 millions d'ECU (soit
8,2%) contre 164,5 millions (soit 5%) entre 1990 et 1993. Si dès
décembre 1994 au Conseil Européen d'Essen, PHARE a
été sollicité par la Commission pour préparer
l'aspect financier de la stratégie de pré-adhésion pour
dix PECO, il est resté jusqu'en 1997-1998 un instrument d'aide à
la transition avant tout, qui plus est pour les pays non associés. Au
début de l'année 1998, PHARE change véritablement
d'objectif et devient l'instrument d'aide aux candidats de l'Europe centrale et
orientale souhaitant adhérer à l'UE. Depuis lors, chaque nouvelle
étape du programme a confirmé ce rôle, notamment avec la
mise en place de l'Agenda 2000. Cependant, si la finalité change, le
moyen reste le même et l'objectif de réussir la transition
était indispensable à l'adhésion. Ainsi, les nouvelles
priorités sont restées du même ordre, à savoir la
construction d'institutions solides avec l'adaptation et le renforcement des
institutions démocratiques, de l'administration publique, et la
formation de fonctionnaires et d'acteurs du secteur privé. Par ailleurs,
le nouvel outil de PHARE pour mettre en oeuvre ces objectifs, et poursuivre son
action dans le domaine économique a été le jumelage. Entre
1998 et 2001, plus de 475 projets de jumelages dans des domaines aussi
variés que l'agriculture, l'environnement, les finances publiques, la
justice ont vu le jour.
La BEI aussi sépare trois différentes
étapes dans son aide aux PECO : de 1990 à 1993, de 1993
à 1997 et de 1997 à 2005. La BEI étant une banque de
crédit, il ne peut y avoir de différence sur le fond entre ces
trois étapes. Cependant, à travers les crédits
accordés, la Banque a pu réviser sa stratégie, mais
surtout changer d'échelle en ce qui concerne les sommes investies et
prêtées. Au cours de ces trois grandes étapes de
l'institution, les priorités ont peu évolué, au contraire
des montants qui ont largement augmenté. Ainsi, de 1990 à 1993,
les prêts de la BEI en Europe centrale et orientale ont atteint 1,6
milliards d'ECU et ont majoritairement porté sur les infrastructures de
base dans les secteurs de l'énergie, des communications et surtout les
transports avec 609 millions d'ECU. Durant cette période, sept PECO ont
été concernés : la Pologne, la Hongrie, les
Républiques Slovaque et Tchèque, la Roumanie et la Bulgarie. La
période 1993 - 1997 a été différente d'abord par
les montants engagés. En effet, plus de 5 milliards d'ECU ont
été prêtés à sept PECO et aux trois pays
baltes (Lettonie, Estonie, Lituanie). Les financements ont essentiellement
concernés le domaine des infrastructures de
télécommunications. La concentration dans ce dernier secteur peut
déjà s'expliquer par les perspectives d'adhésion. En
effet, des communications performantes et le prolongement des réseaux
transeuropéens sont des préalables essentiels pour l'essor
économique et l'intégration réussie dans l'Union. La
troisième phase commencée en 1997 s'est directement inscrite dans
la perspective d'adhésion des PECO à l'Union Européenne.
Jusqu'en 2004, la BEI a donc beaucoup aidé les PECO désireux
d'adhérer aux institutions européennes. Ainsi, la BEI a
établit, en accord avec l'UE, une liste d'objectifs auxquels devaient
répondre les pays candidats à travers leurs projets susceptibles
d'être financés : « renforcement de la
cohésion économique et sociale, soutien aux activités
économiques concourant au développement économique des
zones les moins favorisées ; promotion des investissements
concourant au développement d'une société fondée
sur la connaissance et l'innovation ; amélioration des
infrastructures d'intérêt communautaire dans le domaine des
transports, des télécommunications et du transfert
d'énergie ; préservation de l'environnement et
amélioration de la qualité de la vie, y compris par le recours
aux énergies renouvelables ou alternatives ; sécurité
de l'approvisionnement énergétique par l'utilisation rationnelle,
la valorisation des ressources internes ou la diversification des
importations ; amélioration de l'environnement financier des PME
pour concourir à leur développement par le biais de
prêts globaux, d'opérations de capital-risque du FEI24(*) et de garanties du FEI en
faveur des PME »25(*). Ainsi, cette troisième étape de l'aide
de la BEI aux PECO s'inscrit sans aucun doute dans l'optique de
l'adhésion. Tous les objectifs de la Banque sont de financer des projets
directement en lien avec ce processus. L'amélioration de l'environnement
par exemple est l'un d'entre eux. Les candidats ont dû se conformer aux
normes communautaires relatives à cette question cruciale de
l'environnement. Pour les y aider, la Banque a par exemple accordé en
2001 seulement, 484 millions d'ECU de prêts pour le traitement des
déchets municipaux et des eaux usées en Hongrie, des
réseaux de distribution et d'assainissement en Pologne à Szczecin
et à Lodz, en République Tchèque à Prague, et en
Slovénie. Par ailleurs, l'autre thème qui aura finalement
perduré et qui s'est imposé comme le fer de lance de la politique
de soutien de la BEI a concerné les communications. En effet, un
réseau de communication développé et conforme aux normes
communautaires était perçu comme une condition essentielle et la
priorité principale pour l'intégration réussie des pays
candidats. C'est pourquoi tout au long de la période, le financement des
liaisons ferroviaires et routières, des ports, des aéroports et
du contrôle aérien ainsi que des réseaux de
télécommunications ont accaparés les sommes les plus
importantes. En 2000 par exemple, les financements d'infrastructures de
communications ont atteint 1,5 milliards d'ECU.
Cependant, malgré ces efforts
déployés par les IFI pour adapter leur ligne stratégique,
à la fois aux besoins des PECO, mais aussi aux directions occidentales
dont les intérêts peuvent être supérieurs, certains
observateurs ont milité pour de plus importants changements dans la
nature de l'aide en Europe centrale et orientale et ont parfois même
élaboré de nouvelles stratégies complètes.
C/ Certains observateurs ont milité pour des
réorganisations complètes de l'aide
Ce dernier élément peut induire un
élément de doute sur la réelle adaptabilité des IFI
aux PECO. En effet, certains observateurs avisés - parfois d'ailleurs
les mêmes qui ont émis des critiques sur le fonctionnement et
l'organisation de l'aide - ont fortement milité tout au long des
années 1990 pour une réorganisation et une révision de
l'aide des IFI aux PECO dans leur transition économique.
En 1999, Marie Lavigne26(*), à la suite des critiques émises sur
les IFI, a proposé un certain nombre de recommandations pour
accroître l'efficacité de l'assistance. Concernant la coordination
de l'aide tout d'abord, Marie Lavigne insiste sur son impossibilité dans
l'état actuelle des choses, avec l'UE censée la gérer en
partenariat avec le FMI. Selon elle, de trop nombreux conflits
d'intérêts et intérêts contradictoires sont alors
rentrés en jeux, en témoigne une certaine incompatibilité
comme nous l'avons préalablement souligné. Elle déplore la
prise de contrôle implicite du FMI. En conséquence, sans
l'exprimer clairement, Marie Lavigne propose une simple réduction du
nombre d'IFI présents dans la région et aidant à la
transition des PECO. Par ailleurs, Marie Lavigne a milité pour une
baisse des aides directes sous fromes de dons au profit de formes plus
traditionnelles d'investissements. Cependant, cette proposition semble
légèrement en opposition avec le fait qu'elle déplorait
également le manque de répartition des aides entre les PECO les
moins avancés dans la transition et les autres plus dynamiques tels que
la Pologne ou la Hongrie. En effet, selon nous, les investissements classiques
qui s'attendent à des retours financiers et du profit auraient
été nettement plus enclins à investir dans les PECO les
plus riches et les plus développés qui garantissaient davantage
de sécurité et potentiellement plus de revenus. Enfin,
déplorant l'emprise du caractère macroéconomique sur le
microéconomique (élément qu'elle explique par le
leadership exercé par le FMI), elle a aussi milité pour un
rééquilibrage entre ces deux aspects essentiels de la transition.
Pour finir, Marie Lavigne pose même la question de la
nécessité de l'assistance en 1999, alors que les PECO deviennent
petit à petit des économies de marché
« normales », excepté dans certains rares cas. En ce
qui concerne le principal enjeu sur le long-terme, à savoir une
croissance soutenue, les PECO ont besoin d'investissements, surtout dans le
secteur privé. Certes, les IFI peuvent jouer ce rôle par le
financement d'infrastructures (Banque Mondiale, BEI) ou par le cofinancement de
projets privés (BERD), mais Marie Lavigne se demande si des
investisseurs privés ne seraient pas plus aptes à le faire. Le
second enjeu qui se pose selon elle à la fin de la décennie est
l'adhésion aux institutions européennes. Dès lors, le
besoin de soutien financier change de main. Le rôle de la Banque Mondiale
et du FMI évolue. Alors que cette dernière institution a
été la source majeure d'inspiration au début de la
transition, à travers le « consensus de
Washington », à partir de 1997, elle ne tient plus cette place
de leader auprès des PECO. En 1998, il est d'ailleurs intéressant
de noter qu'il n'y avait plus que deux pays d'Europe de l'Est sur la liste du
FMI : la Roumanie et la Bulgarie, et deux pays baltes : l'Estonie et
la Lettonie. Cependant, ne plus être dans cette liste n'a pas
libéré les autres des évaluations du FMI. Ainsi, en 1998,
la Hongrie était rappelée à l'ordre pour son taux
d'inflation trop élevé. Mi-avril 1997, le premier directeur
général adjoint du FMI, Stanley Fisher critiquait dans une lettre
adressée à Vaclav Klaus, alors premier Ministre, l'ensemble des
réformes adoptées et pressait le gouvernement à mettre en
oeuvre des mesures plus radicales. Cependant, si les IFI doivent rester, Marie
Lavigne ne souhaite pas cette réduction du rôle du FMI, au
contraire. En plus de ce rôle de conseil, le FMI devrait selon elle
encore financer certains pays. Lesquels ? Tout d'abord, et c'était
le cas de la Roumanie et de la Bulgarie en 1999, les PECO rencontrant de
sérieuses difficultés macroéconomiques et en même
temps un retard dans leur processus de transition. Par la suite, elle milite
pour un nouveau concept d'assistance davantage tourné vers le
partenariat, déjà officialisé à la
réunion du FMI à Madrid en 1994 et répété en
octobre 1996 à Washington. Ce nouveau concept doit mettre en avant le
dialogue qui doit se substituer à l'assistance directe. La Banque
Mondiale, elle, semblerait selon Marie Lavigne se concentrer sur les enjeux
structurels qui sont de plus en plus importants.
En 1998, Robert Zuzowski27(*) a lui aussi posé la question du maintien de
l'assistance ; « Pourquoi devrions-nous nous soucier de ces
pays ? Pour quelle raison les contribuables occidentaux devraient-ils
supporter les réformes en Europe centrale et orientale ? Est-ce un
devoir moral pour l'Ouest ? Si non, quelle(s) raison(s) donner -
politique, militaire, économique, ou peut-être une combinaison de
toutes ces raisons ? Par ailleurs, l'Ouest a-t-il intérêt
à ce que l'Est se développe ? » Les
défenseurs de l'aide en occident argumentent souvent en expliquant que
le maintien de la démocratie à l'Est est dans
l'intérêt de l'Ouest, en expliquant que l'Ouest doit s'assurer que
les PECO ne redeviendront jamais des possessions de la Russie afin de garantir
un certain équilibre militaire et politico-stratégique. La raison
économique du maintien de l'aide se situe davantage en terme humains. Si
l'Est ne se développe pas, les classes défavorisées
immigreront en masse à l'Ouest, qui plus est après
l'adhésion à l'UE. Or, les pays occidentaux de l'UE font
déjà face à des niveaux de chômage
élevés. Un trop grand flux de « réfugiés
économiques » pourraient avoir de graves conséquences
politiques. L'un d'elles pourraient être une montée du sentiment
nationaliste, déjà très présent dans les PECO. Afin
d'éviter ces problèmes, il semble donc important de continuer
à aider les PECO à se développer eux-mêmes.
Cependant, ce constat présuppose de l'impossibilité des PECO
à se développer par eux-mêmes et qu'ils auraient besoin de
l'aide extérieure.
Est-ce vrai ? Les opinions varient beaucoup sur
cette question, spécialement à l'Ouest. Plusieurs observateurs
occidentaux insistent sur le fait que l'Est doit s'armer, tant au niveau
politique par la démocratie, qu'économiquement avec
l'économie de marché, d'institutions occidentales, et ne peut
donc pas faire l'impasse sur les conseils et l'aide occidentale. Il s'en suit
que l'Ouest, en inspirateur de modèle, ne peut échapper à
sa responsabilité. Dès lors, les mêmes plaident pour la
création d'un libre marché avec l'Est, pas seulement pour les
produits industriels, mais aussi agricoles, et pour que l'Ouest ouvre ses
frontières à tous les habitants de la région afin de
créer un « espace entièrement unit et
intégré ». Ainsi, dans cette vision, le succès
sera effectif pour l'Est lorsque les PECO auront atteint les standards de
l'Ouest. Cependant, selon Robert Zuzowski, le problème de ce point de
vue, dont le principal défenseur était Jeffrey Sachs28(*), est qu'il se fonde sur un
principe explicitement posé mais faux, qui veut que l'Est ait à
un moment donné de son Histoire, fait partie de l'Ouest, ce qui n'a
jamais été le cas. Il ne fait aucun doute qu'il est plus
aisé de retourner à une situation connue plutôt que de
s'adapter à un nouvel ensemble. Et c'est précisément ce
dernier problème qui est le principal défi des PECO selon Robert
Zuzowski. Dès lors, l'enjeu n'est plus seulement économique, mais
également politique et historique. Robert Zuzowski n'apporte pas de
réponse claire à ce problème, expliquant le
caractère nouveau, volatile et imprédictible de la situation en
Europe centrale et orientale. Alors qu'il ne remet pas plus en cause la
nécessité initiale de l'aide qui se concentre sur la
stabilisation macroéconomique et la mise en place d'infrastructures
permettant le développement d'une économie de marché que
le financement à proprement dit et les investissements, il
déplore le manque de clarté et de stratégie sur la suite.
Comment gérer l'aide financière ? Quelle direction lui
donner ? Faut-il accéder aux marchés financiers de l'Ouest
ou créer ses propres marchés indépendants ? Autant de
questions, qui selon Robert Zuzowski n'ont pas été posées
au début de l'aide et il en résulte, en 1998 une situation
confuse.
Dès lors, face à ces interrogations sur
l'aide et son efficacité, entre ses supporters, ses détracteurs,
ses bénéficiaires et les donateurs, il est très difficile
de se risquer à dresser la part de responsabilité de l'aide des
IFI dans les destins contrastés des PECO.
2. QUELLE PART DE RESPONSABILITE POUR LES IFI ?
A/ Les IFI ont-elles travaillé en collaboration? Ou
collision ?
Afin de tenter de déterminer la part de
responsabilité qui incombe aux IFI, il convient d'abord d'étudier
les rapports entre elles. Pouvons-nous parler de collaboration ou faut-il
plutôt évoquer des collisions entre les IFI ? Cette question
qui est encore aujourd'hui sujette à discussions et débats
n'appelle pas de réponse définitive, et nous verrons que les cas
de figure ont pu varier suivant les pays, les périodes, les IFI et
même les projets.
Si l'on s'en tient aux communications des IFI, le
discours est policé et toutes insistent avec plus ou moins de force sur
la bonne collaboration avec d'autres IFI. La BERD par exemple, dans ses
rapports stratégiques29(*), consacre une large part au travail avec les autres
IFI. En Pologne par exemple, la Banque a cofinancé avec la Commission
Européenne plus de 10 projets municipaux. Par ailleurs, elle a
crée et développé avec la Commission et la BEI deux
programmes financiers à l'attention des communes. Avec la BEI, la
BERD a également cofinancé certains projets locaux et mit en
place le programme JASPERS. Toujours en Pologne, la BERD a travaillé
avec le FMI en soutenant financièrement des projets parfois
supervisés par le Fonds. Enfin, la BERD évoque une
stratégie de partenariat avec la Banque Mondiale pour la Pologne, sans
donner davantage de détails. En ce qui concerne la République
Tchèque, la BERD consacre une large part qu'elle appelle cooperation
with other IFI's. Cependant, alors que pour la Pologne, certaines IFI
avaient manifestement travaillé conjointement avec la BERD, notamment au
niveau européen, pour ce qui est de la République Tchèque,
la Banque se contente de relever le travail des IFI dont les domaines de
compétence recoupant les siens. Elle n'évoque pas de
coopération à proprement dite. En Hongrie également, la
BERD relève les actions des autres IFI qui concordent avec sa propre
vision du développement, à savoir le soutien de projets
microéconomiques et microéconomiques.
Dès lors, nous sommes en droit de nous demander si
la coopération entre IFI a été aussi active que ces
dernières le laissent parfois supposer. Bien entendu, il y a eu une
coopération de fait entre les IFI. D'abord entre celles dépendant
de l'Union Européenne, à savoir le programme PHARE, la BEI et,
dans une moindre mesure la BERD. Par ailleurs, sous l'égide du G 24 qui
a accordé la coordination de l'aide à l'UE (même si cette
dernière n'a pas été très effective comme nous
l'avons souligné), les IFI ont dû se concerter un minimum afin de
se répartir les tâches autant que possible. Enfin, les principes
de conditionnalités mis en vigueur, notamment par le FMI, ont
également obligé les IFI à se rencontrer et, si ce n'est
à coopérer à proprement dit, du moins à discuter et
négocier. Dès lors, si ce n'est quelques cadres de
coopération ciblées entre deux IFI, nous ne pouvons pas affirmer
que les institutions présentes en Europe centrale et orientale ont
réellement coopéré entre elles.
B/ Travail avec les autres types d'aide et autres cadres de
coopération
La question se pose donc maintenant de savoir si les IFI
ont travaillé avec les autres types de donateurs et autres cadres de
coopération. Comment les IFI ont-elles travaillé avec les pays
donateurs et les donateurs privés ?
La première question est la part de l'aide
bilatérale, constituée principalement par les dons de pays
(Etats-Unis, Allemagne, France surtout). Environ 1/3 de l'aide de l'aide
occidentale cumulée accordée aux PECO est constituée de
dons. De tous les donateurs, l'UE, à travers le programme PHARE, fournit
la plus large part (60% du total), devant les Etats-Unis (environ 25% du
total). Sur ce point, on ne peut pas parler de rivalité, mais à
la vue de certains chiffres, l'impact financier de certaines IFI par rapport
aux Etats-Unis se réduit. Cette situation peut paraître
étonnante lorsque l'on sait que les Etats-Unis sont déjà
les leaders financiers (étant les contributeurs les plus importants)
d'au moins deux IFI, la Banque Mondiale et le FMI. Cependant, cette
manière de séparer strictement aide au développement
bilatérale, à travers les outils nationaux, et aide
multilatérale, à travers les organisations et institutions
financières est classique et commune à tous les pays participant
à l'aide sur les deux terrains.
Un autre type d'assistance qui mérite que l'on s'y
attarde provient davantage d'investisseurs privés, le plus souvent
occidentaux : les IDE, ou investissements directs étrangers. L'IDE
est un investissement qu'une entité30(*) résidente d'une économie (investisseur
direct) effectue, dans le but d'acquérir un intérêt durable
dans une entreprise résidente d'une autre économie. Un
intérêt durable implique une relation à long terme et
l'exercice d'une influence notable sur la gestion de l'entreprise.
L'investissement direct comprend à la fois l'opération initiale
entre les deux entités et toutes les opérations
ultérieures en capital entre elles et entre les entreprises
affiliées, qu'elles soient constituées ou non en
sociétés. Selon le FMI, une relation d'investissement direct est
établie dès lors qu'un investisseur détient au moins 10%
du capital social de l'entreprise investie. En deçà du seuil de
10%, les opérations sur titres sont classées dans les
investissements de portefeuille. Ces investissements, que certains ne voient
pas comme de l'aide, ont été massivement utilisé durant la
période de transition des PECO. Il convient donc de rappeler la nature,
les objectifs et l'impact des IDE sur la transition des PECO avant de les
comparer aux aides des IFI. Tout d'abord, si l'on veut étudier les
rapports entre assistance des IFI et IDE, il est nécessaire de rappeler
que les IDE n'auraient pas pu exister en Europe centrale et orientale sans les
IFI. En effet, si depuis le début des années 1990, les PECO ont
reçoivent des flux d'IDE31(*) en progression constante, c'est d'abord parce que les
IFI, en coopération avec les gouvernements nationaux, ont
élaboré de cadres réglementaires incitatifs et des
environnements économiques favorables. Dès lors, les
investisseurs privés ont pu investir et ont souvent accompagné le
processus de transition, le plus souvent à travers les privatisations.
En termes de chiffres, les IDE étaient quasi inexistants en 1990 et ont
ensuite fortement progressé, surtout depuis 1995. Entre 1999 et 2000,
ils ont augmenté de 15% pour atteindre le niveau record de 22 milliards
de dollars. L'UE est à l'origine de 71% des flux entrants dans les PECO,
dont les 2/3 sont concentrés sur la Pologne et la République
Tchèque. Selon la CNUCED32(*), le stock total d'IDE33(*) dans les PECO s'établissait à 102
milliards de dollars fin 2000 et trois pays en accueillaient l'essentiel :
la Pologne (36 milliards USD), la République Tchèque (21
milliards USD) et la Hongrie (20 milliards USD). Depuis 1996, la Pologne est la
première destination des flux d'investissement directs étrangers
en Europe centrale et orientale. Parmi les pays d'origine des investisseurs
directs en Pologne, 90% sont membres de l'OCDE et les pays de l'UE en
constituent à eux seuls près de 67%. La France se place au
premier rang des investisseurs avec un stock de 7,9 milliards USD, devant les
Etats-Unis (7,3 milliards USD) et l'Allemagne (5,9 milliards USD). Cette
position s'est nettement renforcée en 2000 avec le rachat de 35% du
capital de l'opérateur national de télécommunications TPSA
par France Télécom (plus grosse opération de privatisation
jamais réalisé dans un PECO). Selon les chiffres de l'Agence
polonaise pour l'investissement étranger (PAIZ), les principaux secteurs
investis sont le secteur manufacturier (38% du stock total), le secteur
financier (21%), le secteur des transports et de la logistique (11%) et celui
de la distribution et du commerce (8%). Il est intéressant de noter que
ces secteurs sont également ceux privilégiés par les IFI,
quelque soit le rôle de ces derniers : conseil, formation ou
financeur. Selon ces différents rôles, les rapports avec les
investisseurs directs changent. Ils peuvent travailler ensemble dans le cas de
conseil ou de formateur. En effet, comme nous l'avons dit, les IDE ont eu
besoin des IFI qui ont formé les cadres juridiques et économiques
préalables à tout investissement. Dans le même registre,
les IDE ont besoin des IFI pour obtenir des garanties sur leurs cibles
d'investissements, demandent parfois des études indépendantes
(notamment du FMI) et peuvent se servir d'autres études et rapports
faits par les IFI. Dans ce contexte, la coopération entre IFI et IDE est
réel, à défaut d'être officielle. Dans le cadre de
formation (PHARE, FMI, OCDE, Banque Mondiale), les IDE ont aussi profité
du travail préalable des IFI qui ont formé des cadres politiques
et économiques aux règles du marché financier
international qui règle et supervise les IDE.
Ainsi, le rôle et l'action omniprésente des
IFI en Europe centrale et orientale ont joué sur l'importance du stock
d'IDE présent dans la région aujourd'hui et sa progression tout
au long de la décennie 1990. Outre ce facteur, d'autres explications
à cette attractivité ont pu jouer. Nous avons relevé cinq
facteurs ayant attiré les IDE dans les PECO. Premièrement, la
taille du marché. Elle apparaît même comme la principale
motivation des investisseurs pour s'implanter dans les PECO. En deuxième
lieu, la proximité géographique avec les pays investisseurs a
beaucoup joué. A la fois la théorie et l'expérience
empirique suggèrent que les investisseurs privilégient les pays
proches géographiquement (la première destination des
investissements des Etats-Unis reste l'Amérique latine par exemple), car
les coûts d'implantation sont croissants avec la distance.
Troisièmement, le facteur des coûts salariaux est difficile
à évaluer de manière sûre. Si les grands PECO,
principales cibles des IDE ont une main d'oeuvre, qualifiée ou non, plus
basse que les pays d'Europe occidentale, il n'en reste pas moins que les pays
où les salaires sont encore plus bas qu'en Hongrie, Pologne ou
République Tchèque (Roumanie, Bulgarie, Slovaquie,
Slovénie) restent relativement délaissés par les
investisseurs étrangers, en dépit des opportunités qu'ils
offrent. Cependant, l'instabilité économique plus forte qui
règne dans ces pays a sans doute dépassé l'attrait
strictement financier lié au coût de la main d'oeuvre, d'autant
plus que les IFI ont été elles-mêmes moins présentes
dans ces pays, offrant moins de garanties en conséquence. Le
quatrième facteur explicatif de la masse d'IDE est l'existence d'une
main d'oeuvre qualifiée importante. Cependant, si elle est couramment
présentée comme un atout, son impact est délicat à
mesurer par des études économétriques. Les indicateurs
existants (taux de scolarisation, nombre d'années d'études
reçues) ne prennent pas en compte la qualité de
l'éducation, l'expérience ou la formation professionnelle. Or,
certaines études suggèrent que malgré un niveau
d'éducation élevé, la main d'oeuvre des PECO serait mal
adaptée aux exigences des firmes multinationales. Enfin le dernier
facteur pouvant entrer en jeu est le degré d'avancement des pays en
transition. La perception qu'en ont les investisseurs étrangers
influence également leurs décisions d'implantation. Dans le cadre
du processus de transition, les PECO ont entrepris des réformes dans
différents domaines : faillite, droit des
sociétés/gestion des entreprises, concessions,
réglementation du marché financier et des
télécommunications...Ils ont aussi renforcé la
solidité et la transparence du cadre juridique et institutionnel,
même si beaucoup reste à faire, (respect des engagements publics
face aux investisseurs étrangers, transparence des règles de
marché public, absence de clause de préférence nationale
ou de traitement différencié, rapidité et
lisibilité du système judiciaire, absence d'interférences
politiques dans la vie économique...). Ces réformes ont
contribué et contribueront à améliorer encore le climat
d'affaires aux yeux des investisseurs étrangers. Dans ce défi,
encore une fois, nous sommes en mesure d'avancer que les IFI ont un rôle
primordial à jouer, en collaboration avec les gouvernements nationaux et
représentants de la société civile.
C/ Bilan des actions par IFI et par pays
Trois différents aspects de la relation entre PECO
et IFI vont nous permettre d'établir un modeste bilan du travail des IFI
dans la région ; tout d'abord une révision rapide des
principaux accomplissements des IFI en Pologne, Hongrie et République
Tchèque.
En 2006, la BERD a établit une rapide
évaluation de l'action des IFI en Pologne, Hongrie et République
Tchèque. C'est donc sur cette étude que nous nous appuierons. Il
est nécessaire de souligner en premier lieu que ces PECO ont
été les plus avancés tout au long de la période de
transition, et qu'ils sont aujourd'hui les plus développés de la
région.
D'un point de vue général concernant la
transition, la Pologne a fait de considérables progrès depuis le
début des années 1990. Les indicateurs de transition indiquent
que dans trois catégories - libéralisation des prix et commerce,
libéralisation des échanges et privatisation des PME - la Pologne
avait atteint, en 2005, les standards d'une économie de marché en
bon fonctionnement. Cependant, certains défis restent en suspens dans de
nombreux secteurs différents. Dans le secteur de l'industrie, il est
important d'accroître l'efficacité et de diversifier
l'activité, notamment vers les services et les nouvelles technologies.
Concernant l'agriculture, la modernisation des fermes et le
développement d'entreprises agricoles sont encore à faire
également. Dans le domaine de l'immobilier aussi, il est
nécessaire de rénover de nombreux centres urbains et de
construire des loyers à bas prix afin de lutter contre le logement
insalubre des couches les plus défavorisées. Dans les
télécommunications, même si beaucoup de progrès ont
été faits et que le secteur est entièrement
privatisé, il reste à développer et encourager la
concurrence dans les services de lignes fixes. D'autres réformes doivent
être menées dans le secteur financier et l'accès au capital
également. Penchons-nous maintenant sur le travail particulier à
chaque IFI en Pologne. La BEI, après 15 ans de présence dans le
pays, a pu couvrir un grand nombre de secteurs économiques, des
infrastructures de base aux services en passant par les institutions
financières. Selon la BERD, plus de 11 milliards d'Euros ont
été engagés par la BEI en Pologne à la fin de
l'année 2005 et elle a tenté de mettre en pratique son principal
objectif théorique ; contribuer à la cohésion sociale
et économique de l'Europe. Le FMI, lui, dont la Pologne est membre
depuis 1986, a principalement apporté à la Pologne une assistance
technique dans de nombreux domaines dont la politique monétaire et
fiscal. Par ailleurs, le Fonds a aussi beaucoup travaillé avec le
gouvernement au début de la décennie afin d'établir de
stabiliser la situation macroéconomique. La Pologne fut l'un des membres
fondateur de la Banque Mondiale avant de la quitter en 1950, pour ne la
rejoindre qu'en juin 1986. Depuis la premier prêt de la Banque au pays en
1990, l'engagement de cette dernière a atteint 6 milliards de dollars
américains pour un total de 40 opérations. La Banque a
sensiblement aidé le pays par son assistance technique auprès des
institutions financières, mais aussi comme nous l'avons vu auprès
du gouvernement afin de combattre la corruption.
Au même titre que la Pologne, la Hongrie fait
partie des PECO les plus en avance économiquement. En ce qui concerne
les réformes structurelles, le pays est à la pointe des
économies en transition. Selon le rapport de transition daté de
2005, la Hongrie est le pays les plus avancé parmi les nouveaux entrants
dans l'UE dans 7 catégories (suivi de près par la
République Tchèque et l'Estonie). Dans trois autres
catégories, libéralisation des prix, libéralisation des
échanges et privatisation, la Hongrie a également atteint un
niveau acceptable parmi les économies de marché. Cependant, comme
pour la Pologne, et c'est parfois les mêmes, un certain nombre de
progrès et réformes restent à faire. Concernant les
entreprises, la réorientation vers les services et les nouvelles
technologies est également à prévoir. Concernant les
marchés de capitaux, l'activité est en plein expansion mai le
nombre d'instruments est encore limité. Comparé aux standards de
l'UE, leur nombre est encore très bas. Par ailleurs, le secteur de
l'énergie doit être davantage libéralisé, en
même temps que la recherche et la production d'énergies
renouvelables doivent être encouragées. Malgré tous les
efforts qui ont été faits, et notamment par la BERD et d'autres
IFI, les facilités de transports ont encore besoin d'être
améliorées, en particulier le transport ferroviaire national. Les
IFI ont été très actives en Hongrie. Depuis 1990, la BEI a
financé différents projets à hauteur de 5,5 milliards
d'euros, parmi lesquels des lignes de métro à Budapest, des
centres de traitement des eaux usagées à Budapest
également, des autoroutes ou encore des prêts à des banques
locales. Le FMI qui compte la Hongrie parmi ses membres depuis 1982 a
peut-être été relativement moins actif en Hongrie qu'il n'a
pu l'être en Pologne et en République tchèque. Cependant,
il a là-aussi envoyé des experts afin de garantir une assistance
technique et publier des rapports d'évaluation. C'est aussi depuis 1982
que la Hongrie est membre de la Banque Mondiale, ce qui lui a valut le
financement d'une quarantaine de projets pour un montant de 4 milliards de
dollars américains.
Concernant la République Tchèque, la
situation change quelque peu puisque l'évaluation ne peut compter
qu'à partir de 1993 et la séparation avec la Slovaquie.
Concernant le secteur de l'industrie, d'importants progrès sont
relevés par la BERD avec différentes vagues de privatisations
notamment (Unipetrol, Cesky Telecom, Vitkovice Steel). Cependant, dans ce
même secteur industriel, des progrès restent à faire dans
le climat avec lequel se traitent les affaires (corruption, protection des
droits de propriété). Le secteur de l'immobilier s'est
développé rapidement avec l'émergence de nouveaux types de
propriétés et d'instruments financiers. Dans le domaine agricole,
des efforts sont à prévoir afin de moderniser les installations
même si la privatisation est quasiment terminée. Dans les
transports et télécommunications enfin, la République
Tchèque a accompli d'immenses progrès. Le réseau de
télécommunication est l'un des plus compétitifs de la
région et le réseau ferroviaire est également très
développé. Comme nous l'avons vu au fil de notre étude,
les IFI se sont fortement impliquées dans le pays. Outre l'Union
Européenne, le FMI qui a accueillit la République Tchèque
dès janvier 1993 a fournit de nombreuses missions d'assistance
technique. Si la Banque Mondiale n'a offert aucun prêt au pays depuis
septembre 1993, elle a compensé par un support technique actif dans
différents domaines (lutte contre le blanchiment d'argent et le
financement du terrorisme, sécurité sociale et système des
retraites). Enfin, la BEI a engagé plus de 5,5 milliards d'Euros depuis
1992, dont 2,9 milliards destinés au secteur public (principalement pour
des projets d'infrastructures).
Ce bilan ne tend pas à l'exhaustivité mais
il présente les principaux domaines d'action des IFI dans les trois pays
qui nous intéressent le plus. Il montre qu'il reste des défis, et
le travail des IFI est encore loin d'être fini dans la région,
mais également que les accomplissements sont réels. Le signe le
plus fort de la réussite des PECO, et donc peut-être des IFI,
reste leur adhésion à l'Union Européenne. Pour finir,
revenons donc rapidement sur les adhésions.
Le 31 mai 1998, les négociations sur
l'adhésion s'ouvraient avec cinq PECO (la Hongrie, la Pologne,
l'Estonie, la République Tchèque, la Slovénie) et Chypre.
Le 13 octobre 1999, la Commission recommandait aux pays membres d'ouvrir les
négociations avec la Roumanie, la Slovaquie, la Lettonie, la Lituanie,
la Bulgarie et Malte, et le 13 décembre 2002, au Sommet de Copenhague,
les chefs d'Etats et de gouvernement des Quinze ont entériné
l'avis de la Commission que dix pays répondaient aux conditions requises
pour leur adhésion à l'Union européenne.
Toujours est-il que l'intégration de l'Est se fit le 1er mai
2004, dans l'indifférence quasi-générale de certains pays
occidentaux qui trancha avec la liesse populaire des pays concernés.
Huit ex-pays de l'Est rejoignaient donc l'Union, avec au total 75 millions
d'habitants. Trois ans plus tard, la Bulgarie et la Roumanie allaient les
rejoindre.
CONCLUSION
L'étude du rôle des institutions
financière internationales auprès des pays d'Europe centrale et
orientale depuis la fin du régime soviétique jusqu'à cet
accomplissement qui paraissait difficilement concevable en 1989 et dont nous
venons de rappeler les dernières étapes, à savoir
l'adhésion à l'Union Européenne, a mit en lumière
différents enseignements sur les PECO, sur la transition et sur le
travail des IFI.
Tout d'abord, la naissance de l'assistance occidentale au
début des années 1990 s'est effectuée à la demande
de l'Est elle-même, paradoxalement à travers la personne de
Gorbatchev (suivi de près par les dirigeants des anciens satellites).
Paradoxalement, parce que l'assistance a d'abord tenté de réparer
les méfaits causés par 40 années de domination
soviétique, avant d'accompagner les PECO dans leur volonté
d'adopter un modèle économique libéral et des institutions
politiques démocratiques. Les deux facteurs les plus importants de cette
accompagnement se sont révélés être deux piliers de
chaque société ; l'économie et la place de l'Etat.
Ces deux piliers, qui ont été au centre des préoccupations
des IFI, étaient également les deux sur lesquels Moscou avait
imposé son autorité pendant plus de quarante ans. La
réactivité de l'Ouest ne s'est pas fait
attendre puisqu'avant même la chute du régime
soviétique, elle s'est employée à fournir des aides
économiques et politiques aux PECO. La correspondance entre le travail
des IFI et les besoins des PECO, qui certes fut parfois questionnée, ne
peut être dénigrée totalement. Derrière ces aides,
l'objectif commun des IFI était de construire une économie de
marché solide et poser les bases de la démocratie. Dans la
majorité des PECO, excepté quelques exemples, cet objectif a
été atteint. Un autre enseignement que nous avons tiré de
notre étude est la difficulté d'établir
précisément la valeur ajouté des IFI dans cette
réussite (néanmoins contrastée) des PECO. Ces derniers
s'en seraient-ils tirés sans l'aide des IFI ? Si notre travail a
tenté d'élucider cette question primordiale, aucune
réponse systématique ne peut être apportée, mais
nous sommes tentés de croire que la diversité des aides venant
des IFI (financement, dons, prêts, expertise et conseil, assistance
technique, sans compter les aides indirects) a fortement contribué aux
progrès des PECO.
Afin de dresser un tableau clair et juste des rôles
qu'ont tenu les IFI dans le processus de transition des pays d'Europe centrale
et orientale, il a fallu revenir longuement sur la transition elle-même,
son point de départ et celui d'arrivée (s'il en existe un, ce qui
signifierait la fin de la transition), mais surtout le mouvement
lui-même.
Dans ce mouvement, les IFI ont eu un rôle
prépondérant à jouer, et si les critiques ont
été nombreuses, c'est peut-être seulement parce que les
observateurs attendaient beaucoup de ces organisations multilatérales
que l'opinion a parfois l'habitude de percevoir comme des entités
toutes-puissantes capables de faire et défaire les situations
économiques des « petits » pays. Or, les IFI ne sont
pas au-dessus du contexte international et ne peuvent lutter contre les
dynamiques d'un marché qu'elles régulent, certes, mais ne
contrôlent pas et se doivent de respecter. Dès lors, à leur
entrée dans l'économie de marché, les PECO ont largement
bénéficié des expertises des IFI, ainsi que de leurs
financements, mais ces dernières n'ont effet pas pu leur garantir la
prospérité immédiate qu'ils espéraient.
ANNEXES
Annexe n°1
Règlement (CEE) N°3906/89 du Conseil du 18
décembre 1989 relatif à l'aide économique en faveur de la
république de Hongrie et de la république populaire de
Pologne
*****
RÈGLEMENT (CEE) No 3906/89 DU CONSEIL
du 18 décembre 1989
relatif à l'aide économique en faveur de la
république de Hongrie et de la république populaire de Pologne
LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté
économique européenne, et notamment son article 235,
vu la proposition de la Commission,
vu l'avis du Parlement européen (1),
considérant que la Communauté et ses États
membres ont décidé un effort concerté avec certains pays
tiers, afin de mener des actions destinées à soutenir le
processus de réforme économique et sociale en cours en Hongrie et
en Pologne;
considérant que la Communauté a conclu des accords
concernant le commerce et la coopération commerciale et
économique avec la république de Hongrie et la république
populaire de Pologne;
considérant qu'il importe que la Communauté dispose
des moyens nécessaires pour pouvoir mener lesdites actions;
considérant qu'il y a lieu de définir les domaines
dans lesquels les actions devront être entreprises;
considérant qu'il est nécessaire de procéder
à une estimation du montant des moyens financiers communautaires
nécessaires à la réalisation de cette action pour
l'année 1990;
considérant que la mise en oeuvre de ces actions est de
nature à contribuer à la réalisation des objectifs de la
Communauté et que le traité ne prévoit pas, pour les
actions en question, d'autres pouvoirs que ceux de l'article 235,
A ARRÊTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:
Article premier
La Communauté met en oeuvre une action d'aide
économique en faveur de la république de Hongrie et de la
république populaire de Pologne, selon les critères prévus
par le présent règlement.
Article 2
Le montant des moyens financiers communautaires estimé
nécessaire pour la réalisation de l'action instaurée par
le présent règlement s'élève à 300 millions
d'écus pour la période expirant le 31 décembre 1990.
Article 3
1. L'aide est utilisée par priorité pour le soutien
au processus de réformes en Pologne et en Hongrie, en particulier par le
financement ou la participation au financement de projets ayant pour objet la
restructuration économique.
Ces projets ou actions de coopération devront être
menés notamment dans les domaines de l'agriculture, de l'industrie, des
investissements, de l'énergie, de la formation, de la protection de
l'environnement, ainsi que du commerce et des services; ils doivent
bénéficier, en particulier, au secteur privé de la Hongrie
et de la Pologne.
2. Le choix des actions à financer, sur la base du
présent règlement, est fait en tenant compte, entre autres, des
préférences et des voeux exprimés par les pays
bénéficiaires concernés.
Article 4
L'aide est accordée par la Communauté, soit de
façon autonome, soit en cofinancement avec des États membres, la
Banque européenne d'investissement, des pays tiers ou des organismes
multilatéraux ou des pays bénéficiaires d'eux-mêmes.
Article 5
L'aide de la Communauté prend, en règle
générale, la forme d'aides non remboursables. Celles-ci peuvent
générer des fonds utilisables pour le financement de projets ou
d'actions de coopération.
Article 6
1. L'aide peut couvrir les dépenses d'importation ainsi
que les dépenses locales nécessaires pour la réalisation
des projets et des programmes.
Les impôts, droits et taxes ainsi que le prix d'achat des
terrains sont exclus du financement communautaire.
2. Les dépenses d'entretien et de fonctionnement peuvent
être prises en charge pour les programmes de formation et de recherche
ainsi que pour les autres projets, étant entendu que, pour ces derniers,
la prise en charge ne peut intervenir que dans la phase de démarrage et
de façon dégressive.
3. Toutefois, en cas de cofinancement, il est tenu compte, dans
chaque cas, des procédures appliquées en la matière par
les autres bailleurs de fonds.
Article 7
1. Pour les interventions supérieures à 50 000
écus, pour lesquelles la Communauté est la seule source d'aide
extérieure, la participation aux appels d'offres, adjudications,
marchés et contrats est ouverte, à égalité de
conditions, à toutes les personnes physiques et morales des États
membres, et de la Pologne et de la Hongrie.
2. Le paragraphe 1 s'applique également aux
cofinancements.
3. Toutefois, en cas de cofinancement, la participation de pays
tiers aux appels d'offres, adjudications, marchés et contrats ne peut
être autorisée par la Commission qu'après examen, cas par
cas.
Article 8
La Commission assure la gestion de l'aide compte tenu de la
procédure définie à l'article 9. Les orientations
générales auxquelles est soumise l'aide et les programmes
sectoriels sont arrêtées selon la même procédure.
Article 9
1. Il est institué auprès de la Commission un
comité de l'aide à la restructuration économique de la
Pologne et de la Hongrie, composé des représentants des
États membres et présidé par le représentant de la
Commission. Un observateur de la Banque européenne d'investissement
participe aux travaux du comité pour les questions qui la concernent.
2. Le représentant de la Commission soumet au
comité un projet des mesures à prendre. Le comité
émet son avis sur ce projet dans un délai que le président
peut fixer en fonction de l'urgence de la question en cause. L'avis est
émis à la majorité prévue à l'article 148
paragraphe 2 du traité pour l'adoption des décisions que le
Conseil est appelé à prendre sur proposition de la Commission.
Lors des votes au sein du comité, les voix des représentants des
États membres sont affectées de la pondération
définie à l'article précité. Le président ne
prend pas part au vote.
3. La Commission arrête des décisions qui sont
immédiatement applicables. Toutefois, si elles ne sont pas conformes
à l'avis émis par le comité, ces mesures sont
aussitôt communiquées par la Commission au Conseil. Dans ce cas,
la Commission diffère l'application des mesures décidées
par elle d'un délai de six semaines.
Le Conseil, statuant à la majorité
qualifiée, peut prendre une décision différente dans le
délai prévu au premier alinéa.
Article 10
À partir de 1990, la Commission établit chaque
année un rapport d'exécution des actions de coopération.
Ce rapport est transmis au Parlement européen, au Conseil et au
Comité économique et social.
Article 11
Le présent règlement entre en vigueur le
troisième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel des
Communautés européennes.
Le présent règlement est obligatoire dans tous ses
éléments et directement applicable dans tout État membre.
Fait à Bruxelles, le 18 décembre 1989.
Par le Conseil
Le président
R. DUMAS
(1) Avis rendu le 14 décembre 1989 (non encore paru au
Journal officiel).
|
Annexe 2
Accord portant création de la Banque européenne
pour la reconstruction et le développement (articles 1 et 2)
Les parties contractantes,
Attachées aux principes fondamentaux de la
démocratie pluraliste, de l'état de droit, du respect des droits
de l'homme, et de l'économie de marché ;
Rappelant l'Acte final de la conférence d'Helsinki sur
la sécurité et la coopération en Europe et, en particulier
la Déclaration sur les principes
Se félicitant de l'intention des pays d'Europe centrale
et orientale de promouvoir la mise en pratique de la démocratie
pluraliste, en renforçant leurs institutions démocratiques,
l'état de droit et le respect des droits de l'homme, ainsi que leur
volonté de procéder aux réformes propres à
favoriser la transition vers des économies de marché ;
Considérant l'importance d'une coopération
étroite et coordonnée pour promouvoir l'essor économique
des pays d'Europe centrale et orientale, aider leurs économies à
devenir plus compétitives au plan international, les assister dans leur
reconstruction et leur développement et réduire ainsi, le cas
échéant, les risques associés au financement de leurs
économies ;
Convaincues que l'établissement d'une institution
financière multilatérale européenne dans son essence et
largement internationale par sa composition aiderait à servir ces
objectifs et constituerait en Europe une structure nouvelle et unique de
coopération ;
Sont convenues d'instituer la Banque européenne pour la
reconstruction et le développement (dénommée
ci-après la « Banque ») qui fonctionnera
conformément aux dispositions suivantes:
Chapitre premier : Objet, fonctions, membres
Article 1 : Objet
L'objet de la Banque est, en contribuant au progrès et
à la reconstruction économiques des pays d'Europe centrale et
orientale qui s'engagent à respecter et mettent en pratique les
principes de la démocratie pluraliste, du pluralisme et de
l'économie de marché, de favoriser la transition de leurs
économies vers des économies de marché, et d'y promouvoir
l'initiative privée et l'esprit d'entreprise. L'objet de la Banque peut
également être mis en oeuvre en Mongolie sous les mêmes
conditions. En conséquence, toute référence dans le
présent Accord et dans ses annexes aux « pays d'Europe
centrale et orientale », à un ou plusieurs « pays
bénéficiaires » ou aux « pays membres
bénéficiaires » s'applique également à
la Mongolie.
Article 2 : Fonctions
1. Pour remplir à long terme ses objectifs qui
consistent à favoriser la transition des économies des pays
d'Europe centrale et orientale vers une économie de marché et
à y encourager l'initiative privée et l'esprit d'entreprise, la
Banque aide les pays membres bénéficiaires à mettre en
oeuvre des réformes économiques structurelles et sectorielles, y
compris celles visant au démantèlement des monopoles, à la
décentralisation et à la privatisation, propres à aider
leurs économies à devenir pleinement intégrées
à l'économie internationale ; pour ce faire, la Banque prend des
mesures destinées à :
i) promouvoir, par l'intermédiaire d'investisseurs
privés et d'autres investisseurs intéressés,
l'établissement, l'amélioration et le développement des
activités du secteur productif, concurrentiel et privé, et en
particulier des petites et moyennes entreprises ;
ii) mobiliser, dans le but décrit à
l'alinéa i), des capitaux nationaux et étrangers ainsi que des
équipes de cadres expérimentés ;
iii) favoriser l'investissement productif, y compris dans le
secteur des services et dans le secteur financier ainsi que dans les
infrastructures
|
lorsque cela est nécessaire pour soutenir l'initiative
privée et l'esprit d'entreprise, aidant ainsi à la mise en place
d'un environnement concurrentiel, à l'amélioration de la
productivité, du niveau de vie et des conditions de travail ; iv)
fournir l'assistance technique pour l'élaboration, le financement et
l'exécution des projets relevant des objectifs de la Banque, qu'ils
soient isolés ou qu'ils s'inscrivent dans le cadre de programmes
spécifiques d'investissement ;
v) stimuler et encourager le développement des
marchés de capitaux ;
vi) apporter un soutien aux projets fiables et
économiquement viables intéressant plusieurs pays membres
bénéficiaires ;
vii) promouvoir dans le cadre de l'ensemble de ses
activités un développement sain et durable du point de vue de
l'environnement ; et
viii) entreprendre toutes autres activités et fournir
tous autres services destinés à lui permettre de s'acquitter de
ces fonctions.
2. Dans l'exercice des fonctions mentionnées au paragraphe
1 du présent article, la Banque travaille en étroite
coopération avec tous ses membres et, de la façon qui lui
paraîtra appropriée dans le respect des dispositions du
présent Accord, avec le Fonds monétaire international, la Banque
internationale pour la reconstruction et le développement, la
Société financière internationale, l'Agence
multilatérale de garantie des investissements et l'Organisation de
coopération et de développement économiques ; elle
coopère avec l'Organisation des Nations Unies, ses Institutions
spécialisées et tout autre organisme connexe, ainsi qu'avec toute
entité, publique ou privée, qui serait concernée par le
développement économique et l'investissement dans les pays
d'Europe centrale et orientale.
|
BIBLIOGRAPHIE
1/ ATLAS
[1] FOUCHET, Michel (Dir.), Fragments d'Europe. Atlas de
l'Europe médiane et orientale, Paris, Fayard, 1993
2/SOURCES ET DOCUMENTS DE PREMIERE MAIN
[1] BANQUE MONDIALE, De l'économie planifiée
à l'économie de marché, Rapport sur le
développement dans le monde, 1996
[2] BEI, Rapports d'activité de la Banque
Européenne d'Investissement, Bruxelles, 1989-2004
[3] COMMISSION EUROPEENNE, « PHARE, une
évaluation à mi-parcours » in Rapport de
synthèse, Commission européenne, juillet 1997
[4] COMMISSION EUROPEENNE, Livre blanc sur
l'état de préparation des PECO à
l'élargissement, Bruxelles, mai 1995
[5] COMMISSION OF THE EUROPEAN COMMUNITIES, Communication to
the Commission on the Reform of the Management External Assistance,
2000
[6] COMMUNAUTE EUROPEENNE, Règlement du Conseil du 18
décembre 1989 relatif à l'aide en faveur de la république
de Hongrie et de la république populaire de Pologne (PHARE),
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[8] EBRD, Transition Report, London, 1991-2004
[9] ECOS-ouverture, Les cahiers de la coopération
interrégionale 1991-1996, Conférence finale, Bruxelles,
cahier n°21, 28 juin 1999
[10] FISHER, Stanley, The transition Economies after Ten
Years, IMF Working Paper, Washington, 2000
[11] IMF, Annual Report, Washington, 1989-2005
[12] IMF Staff, « Perspectives et progrès des
économies en transition : le point de vue du FMI »,
Washington, 3 novembre 2000
[13] MEMORANDUM DE VISEGRAD, « Mémorandum des
gouvernements de la République fédérale Tchèque et
Slovaque, de la République de Hongrie et de la République de
Pologne concernant le renforcement de leur intégration aux
Communautés européennes et les perspectives d'adhésion,
septembre »
[14] OCDE, « Pologne, de la transition aux nouveaux
défis de la réglementation », OCDE, Paris, 2002
[15] SLIM, Assen « Une décennie d'aide
occidentale aux PECO : un bilan mitigé », texte
présenté au colloque de Management International « Les
pays en transition ou en intégration », les 29 et 30 novembre
2001 à Angers
[16] TA3 TV, Czech Premier Interview, Bratislava, 2000 GMT, 6
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[17] WORLD BANK, Annual Report, Washington, 1989-2004
[18] WTO, Annual Report, Geneva, 1995-2006
3/ETUDES, OUVRAGES ET REVUES SPECIALISEES
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polices politiques », in Le Monde, 11 avril 1991
[2] BAILES, Alyson, « Les organisations
subrégionales, Cendrillons de la sécurité
européenne », in Revue de l'OTAN, pp. 27-31, mars
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[3] BERTHELOT, Yves, Pour un forum de l'Europe Centrale,
Conférence de Varsovie, 1995
[4] BLOCH, Lainé, L'Europe en quête de
sécurité, Paris, Ecole Polytechnique, Les cahiers du CREST,
1993
[5] COLAS, Dominique (dir.), L'Europe post-communiste,
Paris, PUF, 2002
[6] LHOMEL, Edith, SCHREIBER, Thomas, L'Europe centrale et
orientale, Paris, La documentation française, 1996
[7] WAELE, Jean-Michel, Les clivages politique en Europe
centrale et orientale, Université libre de Bruxelles, 2002
A/ Ouvrages sur la transition économique des
PECO
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Europe? Europe-Asia studies, 1993
[2] BRUNO, M. Stabilization and Reform in Eastern Europe,
IMF Staff Papers, 1992
[3] CROZET, Y., « Les économies
émergentes de l'Est » in Les grandes questions de
l'économie internationale, Paris, Nathan, 2ème
édition, pp. 378-401, 2001
[4] DUCHÊNE, Gérard, TARTARIN, Robert, La Grande
transition : économie de l'après communisme, Paris,
Cujas, 1991
[5] FEJTO, François, KULESZA-MIETKOWSKI, Ewa, La fin
des démocraties populaires-Les chemins du post-communisme, Paris,
Le Seuil, coll. « Points histoire », février 1997
[6] FRYBES, Marcin, Une nouvelle Europe centrale, Paris,
La Découverte, 1998
[7] GREMION, Pierre, HASSNER, Pierre, Vents d'Est : vers
l'Europe des Etats de droit ? Paris, PUF, coll.
« Recherches politiques », 1990
[8] GROZA, Octavian, « La transition
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Paris, n°375, juillet août 2001
[9] HAERPFER, C. W, Democracy and Enlargement in
Post-Communist Europe: The Democratisation of the General Public in 15 Central
and Eastern European Countries, 1991-1998, London, Routledge, 2002
[10] HAVRYLYSHYN, Oleh, MCGETTIGAN, Donald, La privatisation
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décennie, Washington, Fonds Monétaire Internationale, 1999
[11] KERNOOUH, Claude, DRWESKI, Bruno (dir.), La grande
braderie à l'Est, Pantin, Le Temps des cerises, 2005
[12] KOLODKO, Grzegorz, Economic Neoliberalism Became Almost
Irrelevant, Washington, DC, World Bank, Transition, vol.n°3, juin
1998
[13] KOLODKO, Grzegorz, From Shock to therapy, The Political
Economy of post socialist Transformation, Oxford, Oxford University Press,
2000
[14] KORNAI, Janos, « Dix ans après: The
road to a Free Economy: l'autoévaluation de l'auteur » in
La transformation post-socialiste. Dilemmes et décisions,
Paris, ed. de la MSH, pp. 263-278, 2001
[15] LALOY, Jean, Yalta : hier, aujourd'hui,
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[16] LAVIGNE, Marie, Capitalismes à l'Est ; un
accouchement difficile, Paris, Economica, coll. « Grands
Débats », 1994
[17] LAVIGNE, Marie, « L'intégration des pays
d'Europe centrale dans l'économie mondiale : régionalisation
et mondialisation », in Transitions, 1999
[18] LAVIGNE, Marie, The Economics of Transition, from
Socialist Economy to Market Economy, London, Macmillan Press Ltd., 1999
[19] MILANOVIC, Branko, The Transition from Socialism in
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World Bank, 1992
[20] NICOLAIDIS, Kalypso, « East European Trade in the
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Stanley Hoffmann, 1993
[21] ONU-CEE, «Aspects of structural change and adjustment
in transition economies» in Economic Survey of Europe, n° 1,
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[22] PISANI-FERRY J., SAPIR, A., «The Trade and Transition
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Sapir, 1992
[23] RUPNIK, Jacques, L'autre Europe - Crise et fin du
communisme, Paris, Odile Jacob, 1993
[24] SNEJDAREK, Antonin, MAZUROWA-CHATEAU, Casimira, La
nouvelle Europe centrale, Paris, Imprimerie nationale, coll.
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[25] TODD, Emmanuel, La Chute finale, Paris, Laffont,
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[26] WAELE, Jean-Michel, Les clivages politique en Europe
centrale et orientale, Université libre de Bruxelles, 2002
B/ Ouvrages généraux sur l'aide des IFI aux
PECO
[1] AGLIETTA, M., BAILLY, M., DE BOISSIEU, C., CHARPIN, J-M.,
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[4] FISHER, S., The West's challenge: coordinating Soviet
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[7] MOISI, David, RUPNIK, Jacques, Le nouveau continent.
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G, n°44, 1992
[9] PISANI-FERRY, Jean, « L'assistance occidentale et
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Capitalismes à l'Est ; un accouchement difficile, Paris,
Economica, coll. « Grands Débats », 1994
[10] SLIM, Assen « L'aide occidentale à l'Europe
de l'Est : les leçons d'un demi-siècle d'aide au
développement ont-elles été
tirées ? », in Transitions, vol. 39, 1998
[11] SLIM, Assen « Quelle Europe : l'aide
occidentale aux pays d'Europe de l'Est : une conception
étriquée de la solidarité », in Economie et
Humanisme, n°348, 1999
C/ Ouvrages spécialisées par IFI
Sur l'Union Européenne
[1] LAMASSOURE, Alain « L'aide de la
Communauté européenne dans la mutation des pays de
l'Est » in LAVIGNE, Marie, Capitalismes à l'Est ; un
accouchement difficile, Paris, Economica, coll. « Grands
Débats », 1994
[2] MAYHEW, A. « L'assistance financière
à l'Europe Centrale et Orientale : le programme PHARE »
in Revue d'études comparatives Est-Ouest, vol. 27, n°4,
1996
[3] SLIM, Assen, HAPIOT, Aude « Les aides
européennes aux PECO : vers une meilleure affectation des
fonds ? », in Le courrier des pays de l'Est,
n°1034, avril 2003
Sur le FMI
[1] DEMBINSKI, Paul, MORISSET, Jacques, « Les
politiques de stabilisation du FMI : une tentative d'évaluation
pour l'Amérique latine et l'Europe de l'Est », in Revue
d'études comparatives Est-Ouest, n°4, 1990
[2] GISSE, Yves, « Le rôle du FMI dans la
transition économique en Europe de l'Est et Russie », in
LAVIGNE, Marie, Capitalismes à l'Est ; un accouchement
difficile, Paris, Economica, coll. « Grands
Débats », 1994
[3] POLAK, Jacques, « Le modèle
monétaire du FMI : un outil toujours
précieux ? », in Finances et
Développement, Publication trimestrielle du FMI et de la Banque
Mondiale, 1997
Sur la BERD
[1] LEMIERRE, Jean, « Les principaux défis
à relever pour mener la transition à son terme, la
BERD », in Revue d'économie financière,
décembre 2001
Sur la Banque Mondiale
[1] CORBO, Vittorio, CORICELLI Fabrizio, Reforming Central
and Eastern European economies: initial results and challenges,
Washington, World bank, 1992
[2] RUTKOWSKI, Jan, Enhancing job opportunities in Eastern
Europe and the Former Soviet Union, Washington, 2005
D/ Ouvrages spécialisées par pays
Sur la Hongrie
[1] DI CORTONA, Pietro, From Communism to Democracy:
Rethinking Regime Change in Hungary and Czechoslovakia, Rome, Department
of Political Studies of the Rome University, «La Sapienza», 1991
[2] FAYNE, Peter (dir.), Structural Changes in Eastern
European Countries: Case of Hungary, Artha Vijnana, 1991
[3] KORNAI, Janos, The Road to a Free Economy. Shifting
from a Socialist System: The Example of Hungary, New-York, London, Norton,
1990
Sur la Pologne
[1] DRWESKI, Bruno, La transition polonaise - Mythes et
enjeux de la transformation systématique, UQAM, 2005
[2] KOLODKO W. Grzegoz, RUTKOWSKI, Michel, «The Problem
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Social, Political and Economic Studies, 1991
[3] LISSOWSKA, Maria, Interest groups and institutions in
transition countries: the case of Poland, Paper prepared for the
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political democracy?», Université de Paris I Panthéon
Sorbonne, 30-31 may 2005
[4] OCDE, Pologne, de la transition aux nouveaux
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Sur la Roumanie
[1] World Bank, Romania - Country Assistance
Evaluation, Washington, 2004-2005
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www.banquemondiale.org
www.bei.org
www.diplomatie.gouv.fr
www.diploweb.com
(Géopolitique de l'Eurasie)
www.ebrd.com
www.europa.eu.int
http://europa.eu/scadplus/leg/fr/lvb/e50004.htm
www.imf.org
www.insee.fr
www.oecd.org
www.uvi.gov.si/cefta2003/eng/cefta
www.visegradgroup.org
www.wikipedia.com
www.wto.org
* 1 MAYHEW, A. (1996),
L'assistance financière à l'Europe Centrale et
Orientale : le programme PHARE, Revue d'études comparative
Est-Ouest, vol. 27, n°4
* 2 NERS, K. (1992),
L'assistance occidentale à la transition dans les pays
post-communistes, Economies et sociétés, Cahiers de l'ISMEA,
n°44
* 3 DRWESKI, Bruno, La
transition polonaise - Mythes et enjeux de la transformation
systématique, UQAM, 2005
* 4 LENINE, OEuvres
complètes, t. 27
* 5 FEJTO, François,
KULESZA-MIETKOWSKI, Ewa, La fin des démocraties populaires-Les
chemins du post-communisme, p. 62
* 6 Le Groupe de Visegrad est
un groupe informel réunissant quatre PECO : la Pologne, la
République Tchèque, la Slovaquie et la Hongrie.
Historiquement, le groupe trouve son origine en 1335 lorsque
les rois tchèques, polonais et hongrois se rencontrèrent dans la
ville hongroise de Visegrad.
Le V4 moderne a démarré lors d'un sommet de
chefs d'Etat et de gouvernements de Tchécoslovaquie, Hongrie et Pologne
dans cette même ville de Visegrad le 15 février 1991, afin de
mettre en place des coopérations entre ces trois pays en vue
d'accélérer le processus d'intégration européenne
mais aussi de se concerter sur les méthodes de transition. Le Groupe de
Visegrad est le premier cadre de coopération régionale. (Voir
mémoire de Master 1).
* 7 Chiffres
communiqués par la BERD. Selon le rapport de T. Zoehout, Financing
Eastern's Europe Capital Requirements, le chiffre, entre juillet 1989 et
1993 s'élève, pour les IFI, à 20 milliards de dollars
précisément.
* 8 Voir page 8 pour la
définition de chaque élément.
* 9 Selon la
définition du FMI, « il s'agit pour l'Etat de restituer aux
agents du secteur privé qui en étaient les propriétaires,
des actifs qu'il s'est approprié à la suite d'une action
considérée comme injuste. Si pour ses partisans, cette
méthode est essentielle pour des raisons éthiques, ses
adversaires soutiennent que ce processus est nécessairement
sélectif ».
* 10 Le fait que les IFI, et
particulièrement le FMI, aient soutenu cette méthode leur a
coûté de nombreux questionnements sur leur impartialité
politique vis-à-vis de l'Ouest. En effet, privilégiant les
investisseurs étrangers, et donc occidentaux, cette méthode n'a
jamais été très populaire dans certains cercles
conservateurs de l'Est, lesquels voyaient avant tout dans les IFI
présentes sur place des défenseurs des intérêts
financiers occidentaux (voir sur ce sujet l'article de Marie Lavigne,
L'intégration des pays d'Europe centrale dans l'économie
mondiale : régionalisation et mondialisation, 1999).
* 11 Règlement (CEE)
n°3906/89 du Conseil, du 18/12/89, relatif à l'aide
économique en faveur de la République de Hongrie et de la
République populaire de Pologne (voir annexe n°1).
* 12 Ces grands conseils se
tiennent tous les ans à l'automne entre la Banque et le FMI afin de
s'entretenir sur une large gamme de questions concernant la réduction de
la pauvreté, le développement économique et les
financements internationaux. En règle générale, ces
assemblées ont lieu à Washington deux années de suite,
puis, pour marquer le caractère international des deux IFI, dans un
autre pays membre. C'est dans le cadre de ces assemblées que se tiennent
les réunions officielles, non seulement des Conseils des Gouverneurs,
mais aussi du Comité du développement et du Comité
monétaire et financier international.
Environ 10 000 personnes participent aux Assemblées,
à savoir environ 3500 membres des délégations des pays
membres de la Banque et du FMI, un millier de représentants des
médias et plus de 5000 visiteurs et invités spéciaux
représentant essentiellement les milieux d'affaires privés, la
communauté bancaire, et les ONG. Les membres du personnel de la Banque
et du FMI participent en outre aux réunions tenues avec les
représentants officiels des délégations
gouvernementales.
* 13 La côte AAA
indique que le degré de solvabilité de la Banque Mondiale est
sans risque.
* 14 «L'une des
missions essentielles du FMI consiste à encourager le dialogue entre les
États membres sur les conséquences que leurs politiques
économiques et financières peuvent entraîner à
l'échelle nationale et internationale, ceci afin de favoriser la
stabilité extérieure. Ce processus de suivi et de consultation,
qu'il est convenu d'appeler «surveillance», a évolué
rapidement en réponse aux mutations de l'économie
mondiale » (d'après la définition donnée par le
FMI).
* 15 Ce qui faisait dire
à Richard D. Erb, directeur général adjoint du
FMI : « les gouvernements de ces pays ont d'une
manière générale adhéré à une
nouvelle conception du processus de décision
économique ».
* 16 Direction de
l'alimentation de l'agriculture et des pêcheries, Direction des Affaires
économiques, Direction de la coopération pour le
développement, Direction de l'Education, Direction des échanges,
Direction de l'emploi, du travail, et des affaires sociales, Centre pour
l'entreprenariat, les PME et le développement local, Direction des
affaires financières et des entreprises, Centre pour la
coopération avec les non-membres, Direction des statistiques, Direction
de l'Environnement, Centre de politique et d'administration fiscales, Direction
des relations extérieures et de la communication, Direction
exécutive, Direction de la gouvernance et du développement
territorial, Direction de la science, de la technologie et de l'industrie.
En plus de ces directions, six autres organes sont présentes au
secrétariat : le Centre de développement, Centre pour la
recherche et l'innovation dans l'enseignement, l'Agence internationale pour
l'énergie, le Club du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest, l'Agence pour
l'énergie nucléaire et la Conférence européenne des
ministres des Transports.
* 17 FISHER, Stanley,
The transition Economies after Ten Years, IMF Working Paper,
Washington, 2000
* 18 Voir chap. 2 partie 1
sur l'organisation et le fonctionnement du FMI
* 19PISANI-FERRY Jean
« L'assistance occidentale et les problèmes de
transition » in LAVIGNE, Marie, Capitalismes à l'Est,
1999
* 20 ZUZOWSKI, Robert,
« The West's Approach to Postcommunist Eastern Europe », in
Political change in Eastern Europe since 1989, Prospects for Liberal
Democracy and a Market Economy, Praeger, Westport, Connecticut, 1998
* 21 SLIM, Assen, Une
décennie d'aide aux PECO : un bilan mitigé, 2001
* 22 World Bank,
« Corruption in Poland : Review of Priority Areas and Proposals
for Action », Warsaw, 1999
* 23 BRUNETTI, KISUNKO,
WEDER, « World development Report : The State in a Changing
World », chapter 1, p. 35, World Bank, Oxford University Press,
1997
* 24 Le Fonds Européen
d'Investissement a été crée en 1994 afin de devenir la
branche spécialisée dans le capital-risque du groupe BEI. Il
fournit du capital à risque aux PME, en particulier aux jeunes
sociétés et aux entreprises à orientation technologique.
Il sert également de caution pour les institutions financières
(par exemple des banques) pour couvrir leurs prêts aux PME. Le FEI n'est
pas une institution bailleur de fonds: il n'octroie pas de prêts ou des
subventions aux entreprises et n'investit pas directement dans des
sociétés. Il travaille plutôt par le biais d'autres banques
et d'intermédiaires financiers. Il utilise à cet effet soit ses
propres fonds, soit ceux qui lui sont confiés par la Banque
européenne d'investissement ou par l'Union européenne.
* 25 BEI, Rapports
d'activité de la Banque Européenne d'Investissement,
Bruxelles, 2004
* 26 Ibid.
* 27 Ibid.
* 28 SACHS, Jeffrey,
Poland's Jump to the Market Economy, Cambridge, MA : MIT Press,
1993
* 29 EBRD, Document
appoved by the Board of Directors, « Strategy for the Czech
Republic, for Hungary, for Poland », 2005-2006
* 30 Cette entité -
l'investisseur direct - est une personne physique, entreprise publique ou
privée ayant ou non la personnalité morale, gouvernement, groupe
de personnes physiques ou d'entreprises liées entre elles qui
possède une entreprises d'investissement direct - filiale,
société affiliée ou succursale - opérant dans le
pays autre que le pays ou les pays de résidence de l'investisseur ou des
IDE.
* 31 Les flux d'IDE
enregistrent les transactions de capitaux fournis par l'investisseur à
l'entreprise d'investissement ou reçus de cette entreprise par
l'investisseur. Ces transactions se décomposent elles-mêmes en
capital social, bénéfices et autres transactions.
* 32 Conférence des
Nations-Unies sur le commerce et le développement
* 33 Les stocks d'IDE
comprennent le capital-actions et les réserves attribuables à
l'investisseur direct, ainsi que les prêts, crédits commerciaux et
titres de créances dus à l'investisseur direct par les filiales
et sociétés affiliées (et inversement). Dans le cas des
succursales, ils comprennent les immobilisations, les investissements et les
actifs réalisables, diminués des engagements envers les tiers.
Les statistiques existantes sont issues des balances des paiements
publiées par les banques centrales ou les organismes statistiques
mondiaux. La CNUCED, le FMI, l'OCDE et EUROSTAT centralisent ces données
nationales et les publient sous une forme harmonisée, ce qui peut
entraîner des divergences avec les chiffres publiés par les
banques nationales. Tous les pays ne déclarent pas l'ensemble des
sources d'IDE ; ainsi la République Tchèque ne
déclare les bénéfices réinvestis et les autres
transactions que depuis 1998, la Hongrie et la Roumanie ne déclarent pas
les bénéfices réinvestis et ne déclarent les autres
transactions que depuis 1996 pour la Hongrie et 2000 pour la Roumanie.
Même si l'essentiel de l'IDE provient du capital social (en Pologne, la
capital social a représenté en moyenne 71% des flux d'IDE entre
1990 et 1999), des biais qui peuvent être importants interviennent dans
la comptabilisation de l'IDE total.
Il faut opérer une distinction entre fusions et
acquisitions et investissements directs internationaux : les statistiques
d'IDE ne comptabilisent pas les Fusions et Acquisitions
transfrontalières financés par les marchés de capitaux
internationaux ou par les marchés financiers domestiques, ni celles
portant sur une prise de participation inférieure à 10%. Il y a
de plus un décalage temporel entre l'annonce d'une opération de
Fusion et Acquisition et la réalisation des transactions
financières afférentes.
Le besoin de financement externe comprend le déficit
courant, le remboursement du principal de la dette extérieure et les
remboursements effectués auprès du FMI. Ce besoin de financement
externe peut être - partiellement ou totalement - couvert par des dons,
des investissements directs, des crédits à long terme officiels
ou privés, et des crédits du FMI. Si ces différentes
sources de capitaux se révèlent insuffisantes à couvrir le
besoin de financement externe, le pays se trouvent alors dans l'obligation de
se financer à court terme, et deviennent dépendants de
l'obligation de flux de portefeuille, incertains car extrêmement
volatils.
Source : FMI, Manuel de la balance des
paiements, 1993
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