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Les institutions financières internationales dans la transition des PECO

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par Francois Hurstel
Université Paris IV La Sorbonne - Master 2 - DEA 2007
  

Disponible en mode multipage

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Mémoire de master 2

Par

François Hurstel

Les institutions financières internationales dans la transition des PECO

2006-2007

Professeur responsable

Eric Bussière

Table des matières

CHAPITRE 1

LES BESOINS IMMEDIATS DES ORPHELINS DU COMMUNISME ET LES STRATEGIES DE TRANSITION DES IFI

1. LA TRANSITION ECONOMIQUE.....................................................8

A/ Le concept de transition

B/ La chute du régime soviétique et ses conséquences économiques

C/ Les défis à relever

2. LES STRATEGIES DE TRANSITION .............................................19

A/ Le début de l'aide

B/ Quelle approche suivre pour la transition ?

C/ Etude de la privatisation de l'éducation en Pologne

CHAPITRE 2

MALGRE LEUR DIVERSITE, LES IFI N'ONT PU REPONDRE A TOUS LES DEFIS POSES PAR LA TRANSITION

1. DES IFI FORTS DE LEURS CARACTERISTIQUES ET EXPERIENCES............................................................................................31

A/ L'Union Européenne

B/ La BERD et la Banque Mondiale

C/ Le FMI et l'OCDE

2. DES DEFIS RELEVES MAIS EGALEMENT DES INSUFFISANCES......41

A/ Des efforts de grande ampleur de tous les IFI

B/ Efforts qui ont contribué à de nets progrès

C/ Sans toutefois éviter certains travers

CHAPITRE 3

DIX-HUIT ANS APRES, QUELLE PART DE RESPONSABILITE ACCORDER AUX IFI DANS LES DESTINS CONTRASTES DES PECO ?

1. L'ADAPTABILITE DES IFI........................................................................51

A/ Des actions différentes selon les pays

B/ Les révisions de stratégies

C/ Relations avec les gouvernements

2. QUELLE RESPONSABILITE.........................................................59

A/ Les autres acteurs de l'aide et leurs champs d'action : collision avec les IFI ou partenariats ?

B/ Les recommandations pour une meilleure assistance

C/ Bilan des actions

NB : Nous nous sommes appuyés sur un large éventail de sources. Internet tout d'abord, avec en particulier les sites des IFI (FMI, OCDE, BEI surtout) sur lesquels sont généralement archivés les rapports annuels mais également des rapports spécifiques qui parfois peuvent traiter de la transition des PECO. L'avantage de ces rapports est qu'ils traitent notre sujet sur commande de l'IFI, mais de manière indépendante. Internet a donc constitué une source précieuse pour obtenir des documents de première main, mais aussi pour trouver des renseignements plus factuels sur les IFI (dates de création, entrée des PECO en tant que membres, montants engagés).

Nous avons également eu accès à des archives de presse locale en anglais (hongroise, tchèque et polonaise) et de presse internationale qui nous ont permit de suivre les évolutions au jour le jour, particulièrement en ce qui concerne le programme PHARE. Cela a été très utile pour comprendre la place de l'assistance dans l'opinion, tant à l'Est qu'à l'Ouest, ainsi que les problèmes quotidiens rencontrés, qui ne sont pas toujours mentionnés dans les ouvrages plus généraux ou même dans les articles spécialisés.

Hormis ces deux types de sources, la majorité de notre bibliographie se fonde sur des ouvrages écrits dans la deuxième moitié des années 1990. Il y a davantage d'ouvrages généraux sur la région qui évoquent l'aide des IFI que d'ouvrages spécialisés sur cette dernière, ou encore sur un pays en particulier, lesquels sont finalement rares. Dans la majorité des cas, ces études ont été faites par des auteurs d'Europe centrale ou orientale.

Pour la période plus contemporaine, l'abondance des ouvrages, revues, études et conférences qui s'explique par les récentes adhésions, nous a obligé à une sélection, privilégiant par exemple les auteurs régionaux.

D'un point de vue plus général, nous ne nous sommes pas heurtés à des problèmes majeurs, même si certaines informations semblent encore relativement confidentielles et assez peu discutées, tel que le rôle des consultants de cabinets privés dépêchés sur place ayant travaillé avec les IFI. Par ailleurs, il est intéressant de noter que nous avons trouvé plus d'observateurs critiquant l'action des IFI que la louant.

INTRODUCTION

En 1991, la chute du bloc soviétique instaure un nouvel ordre international marqué par la soudaine libération des pays d'Europe centrale et orientale (PECO). Les PECO se retrouvent « orphelins », livrés à eux-mêmes après des dizaines d'années de vie orbitale, intégrés au géant soviétique. Dans chaque PECO s'engage alors un processus sans précédent de reconstruction politique et économique. L'assistance occidental s'impose alors d'elle-même et résulte d'une double volonté : celle des nouveaux dirigeants qui prennent conscience des défis économiques, politiques et sociaux qui les attendent, et celle des occidentaux désireux d'aider les PECO dans leur transition. Après avoir vu le rôle important de la coopération entre PECO et découvert l'ambivalence de ses objectifs (mémoire de Master 1), nous allons nous intéresser à l'aide apportée par les IFI dans cette même transition. Répondant aux mêmes besoins (reconstruction économique et politique) et concernant les mêmes pays, la coopération avec les IFI a été cependant différente dans sa nature.

Qu'entend-on par PECO ? La liste des pays peut varier d'une encyclopédie à l'autre. En effet, l'INSEE par exemple n'inclut que dix pays sous le terme PECO (Bulgarie, Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Roumanie, Slovénie, Slovaquie, République Tchèque alors que Wikipedia en dénombre 21 avec les 4 de Visegrad, les pays nordiques et balkaniques de l'ex-Yougoslavie, les autres pays balkaniques, les pays baltes et enfin les pays post-soviétiques occidentaux. Si les 10 PECO ayant intégré l'Union européenne nous intéresseront, nous nous pencherons plus particulièrement sur trois exemples significatifs, qui ont le plus bénéficié de l'aide: la Pologne, la République Tchèque et la Hongrie.

Le rôle des IFI dans la transition a le plus souvent été celui de l'aide. Cependant, l'impossibilité des historiens et spécialistes de s'entendre sur la définition du terme dans un tel contexte nous a dissuadé de l'employer dans le titre. L'aide, dans son sens le plus simple, correspond à l'action d'intervenir en faveur d'une personne ou d'un groupe en joignant ses efforts aux leurs, sur une base au moins partiellement gratuite. L'apparente clarté de cette définition contraste avec la complexité des problèmes d'interprétation qu'elle soulève dans le contexte qui nous intéresse. S'il est entendu qu'un don correspond bien à de l'aide, que dire d'un prêt, même à taux préférentiel, qui procure un intérêt au donneur ? La littérature économique spécialisée ne s'est pas étendue sur le sujet. Le contenu a souvent varié d'une étude à l'autre. Selon Mayhew (1996), une grande partie de l'aide occidentale « n'a tout simplement été qu'un abus du mot don »1(*). Ners (1992), lui, insiste sur le « désordre conceptuel dans la définition de l'assistance » et estime qu'une « grande masse de l'assistance occidentale à l'Est » n'est tout simplement pas de l'aide2(*). Selon la définition de notion d'aide occidentale à la transition proposée par le Comité d'aide au Développement (CAD) de l'OCDE et que nous avons décidé de suivre à peu près, le concept suppose que l'aide soit (1) officielle, c'est-à-dire accordée par des gouvernements, des organismes officiels, des organisations multilatérales, (2) orientée vers le développement économique du pays bénéficiaire, (3) assortie d'un « élément de libéralité » d'au moins égal à 25%. Nous disons « à peu près » car selon cette approche, toute action n'ayant pas d'élément de libéralité, à savoir les prêts et les IDE (Investissement direct à l'étranger), sont exclus. Moins restrictive que cette définition, cette étude prendra en compte dans l'aide l'ensemble des transferts de ressources officielles ou non, avec ou sans élément de libéralité. En ce sens, l'aide comprendra ici les dons et les petits (à taux réduits ou non). Les dons sont donc compris ici au sens large : les réductions et les rééchelonnements de dettes, par exemple, même s'ils ne constituent pas des ressources nouvelles, sont interprétés comme la transformation ex-post en dons de ressources déjà transférés aux pays bénéficiaires.

Avec cette définition, notre étude va pouvoir prendre en compte un large panel de types d'aides, largesse renforcée par les différences inhérentes aux IFI, tant dans leur manière de travailler, que dans leurs objectifs et fonctionnements. Ces institutions sont au nombre de cinq : le Fonds monétaire International (FMI), l'Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE), l'Union Européenne avec la Banque Européenne d'Investissement (BEI) et le programme PHARE, la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD) et enfin la Banque Mondiale. Chaque institution possède sa propre manière de travailler et d'assister les pays en développement ou émergents, par exemple en se concentrant davantage sur les problèmes macroéconomiques ou microéconomiques. Si la définition de l'aide est stricte, les formes d'assistance sont nombreuses et souples (formation de fonds financiers, crédits à l'exportation, assistance technique, consultation et conseil, remises de dettes ou rééchelonnement également considéré comme aide. Trois grands types d'assistance peuvent être remarqués :

- assistance génératrice de gains : aide à la balance des paiements, financement externe direct du type réduction de dette (FMI, PHARE par exemple);

- assistance à la solution de problèmes structurels au niveau national, régional, subrégional (BERD par exemple);

- assistance à la promotion des institutions : assistance à la construction d'un cadre politique (fonctionnement de partis, d'institutions étatiques) ; développement d'institutions et systèmes économiques, incluant le développement de marchés de capitaux et la promotion de l'épargne domestique (privatisation est ici la clé) ; l'aide aux institutions sociales (OCDE par exemple).

La multiplicité des aides n'empêche pas le même objectif : assister les PECO dans leur transition, les faire passer d'une économie de type soviétique à une économie de marché libéral tout en évitant les dérives pouvant découler d'une transition trop brutale vers le libéralisme. Au Sommet de l'Arche de juillet 1989, les institutions internationales et les gouvernements récipiendaires sont parvenus à un accord politique sur les objectifs économiques de la transition et ses grandes lignes stratégiques. Ainsi munis d'un socle commun de références et d'objectifs, les IFI ont pu lancer leurs aides de manière massive. Cependant, presque vingt ans après, les IFI sont encore présentes en Europe centrale et orientale et certains problèmes sont encore d'actualité. Dès lors, quel bilan tiré de ces aides ; quelle part de responsabilité peut-on accorder aux IFI dans l'évolution contrastée qu'ont connu les PECO jusqu'à aujourd'hui ?

L'étude des besoins immédiats propres à chaque « orphelin du communisme » ainsi que leurs stratégies de transition ont requis des aides ciblées.

Malgré leur diversité, propre à s'adapter à la multiplicité des problèmes, les IFI n'ont pu répondre à tous les défis posés par la transition.

Alors que certains PECO sont membres de l'UE et d'autres peinent encore à décoller, quelle part de responsabilité accorder aux IFI dans les évolutions contrastées des pays d'Europe centrale et orientale ?

Chap.1

Les besoins immédiats des orphelins du communisme et les stratégies de transition

1. LA TRANSITION ECONOMIQUE

A/ Le concept de « transition » politique et économique

Si l'on compare les « transitions » en Amérique latine, en Europe de l'Est, mais aussi celles d'Europe du Sud (Grèce, Portugal, Espagne) et ailleurs dans le monde, il existe une certaine similarité dans leurs conséquences dans le domaine des systèmes politiques, mais ils recouvrent par contre des transformations économiques, sociales et politiques de nature souvent très différentes, voire opposés. Partout, les « transitions » ont cherché à changer le système politique, mais les cadres sociaux et économiques préexistant, en revanche, ont été conservés dans les dictatures auparavant liées au bloc de l'Ouest, tandis qu'ils ont été transformés dans le cas des pays de l'ancien bloc de l'Est. Et même dans ce dernier cas, les bouleversements structurels n'ont pas modifié de manière fondamentale la composition des élites dirigeantes ou influentes, en particulier dans les milieux économiques et médiatiques.

Le terme de « transition » a été généralisé avec la fin de l'URSS alors que le monde a connu une vague jusque là inédite de « démocratisations ». Cependant, l'appellation même de « transition » mériterait d'être mieux analysée dans la mesure où, non seulement l'adoption de la « démocratie de marché » s'est produite aussi hors des anciens pays du bloc soviétique, mais parce que avant 1989, les dirigeants des PECO présentaient eux-aussi leurs régimes comme étant en « transition » vers le communisme.

Si l'idée même de « transition », celle d'un passage d'un système socio-politique à une autre est liée aux axiomes de la modernité, axiomes reconnus en principe tant par les libéraux que par les marxistes, tout système politique serait destiné à être supplanté tôt ou tard. En effet, aucun ordre social, économique, politique, idéologique, humain, voire naturel n'est immuable et toute situation donnée est par principe « transitoire » au fur et à mesure de l'évolution, et des révolutions humaines. Ainsi, depuis le 18ème siècle au moins, les sociétés occidentales, plus « dynamiques » ont imposé au reste du monde, l'idée que la seule réalité immuable était le changement permanent. Dès lors, une question à laquelle nous essaierons de répondre au fil de notre étude est : l'action des IFI occidentales dans la transition des PECO correspond-t-elle à une mise en oeuvre directe de ce principe théorique ou est-elle davantage une fin en soit à travers les idéaux qu'elle véhicule ? C'est dans ce contexte que Bruno Drweski3(*) a développé sa thèse selon laquelle le capitalisme post-moderne, dont les principaux soldats à l'Est ont été les IFI, s'est révélé en définitive à notre époque plus « révolutionnaire », en tout cas plus « transformateur », que le « socialisme réél ». Il faut cependant rappeler que ce dernier a réalisé la fin de la stabilité « féodale », rurale, religieuse, traditionnaliste dans la région. C'est pourquoi afin de mieux comprendre la transition qui nous intéresse, il convient de revenir d'abord sur le système établit par la transition du système soviétique, ce que nous ferons ultérieurement. Par ailleurs, c'est en partant de ces considérations que nous pouvons commencer à analyser l'action des IFI dans le contexte particulier de la transition propre aux PECO. Sous l'influence de ce contexte, les éléments du processus de transition ont été posés et ont fait l'objet d'un consensus : la libéralisation (processus à l'issue duquel la plupart des prix sont déterminés par le libre jeu du marché, et qui réduit les barrières commerciales tendant à isoler une économie donnée de la structure des prix en vigueur dans les économies de marché), stabilisation macroéconomique (essentiellement, processus en vertu duquel l'inflation est stabilisée puis réduite, après la poussée initiale qui suit la libéralisation et l'assouvissement d'une demande jusque-là refoulée. Ce processus exige des pouvoirs publics qu'ils appliquent des politiques budgétaires et monétaires rigoureuses pour contenir la croissance de la monnaie et du crédit, tout en visant à assurer la viabilité de la balance des paiements), restructuration et privatisation (création d'un secteur financier viable et réformes visant à donner aux entreprises les moyens d'adapter leur production aux besoins de marchés libres et à en transférer la propriété au secteur privé), réformes juridiques et institutionnelles (ces réformes sont nécessaires pour redéfinir le rôle de l'État dans ces économies, établir la primauté du droit et mettre en place des politiques favorables à la libre concurrence). Pour chacun de ces éléments, nous verrons que les IFI ont eu un rôle déterminant à jouer.

La transition des PECO qui réside dans le passage du communisme et de l'économie centralisée, à la démocratie et à l'économie de marché, est considéré comme une des transitions les plus difficiles et douloureuses à la fois. En effet, les responsables de cette transition n'étaient alors pas en mesure de s'appuyer sur des exemples à suivre (le seul précédent d'un tel passage du communisme vers l'économie de marché -sans réforme politique vers la démocratie néanmoins - était celui de la Chine. Selon la Banque Mondiale, la PIB chinois, a augmenté de 9% par an, en moyenne, entre 1978 et 2003. Cette croissance a permis à 300 millions de chinois de sortir de la pauvreté). Cette absence de précédent a rendu la tâche des IFI d'autant plus ardue et nécessaire à la fois.

B/ La chute du régime soviétique et ses conséquences économiques

Afin de comprendre la situation dans laquelle se sont trouvés les PECO dans les années qui ont suivi l'éclatement de l'Union Soviétique, il est donc nécessaire d'opérer un rapide retour en arrière et de revenir sur leur relation avec l'URSS. Ce retour apparaît d'autant plus indispensable que la notion de PECO n'existe, au-delà de l'aspect géographique, qu'à travers leur expérience commune de la mise sous tutelle soviétique. Cependant, même si la politique de Moscou a toujours tendu à l'uniformisation, il y eut des différences notables dans le traitement de chaque pays. Le totalitarisme soviétique n'a jamais été à même d'effacer le passé national et les spécificités propres à chaque « satellites », mais il a réduit à néant ce que la transition a tenté de ressusciter : l'autonomie en matière d'économie et de diplomatie. Dès lors, la chute de l'empire soviétique a livré à eux-mêmes des « orphelins du communisme », pour qui les difficultés et défis à prévoir s'annonçaient proportionnelles aux joies procurées par la nouvelle liberté, c'est-à-dire immenses.

Pour Lénine, le socialisme ne pouvait être envisagé « sans une organisation planifiée de l'Etat imposant à des dizaines de millions de gens l'obligation de respecter strictement une règle uniforme dans le domaine de production et de distribution de biens »4(*). Parmi ces dizaines de millions de gens, les européens de l'est et du centre ont tenu un rôle prépondérant. Alors que l'utopie marxiste-léniniste se révélait incapable de résister à l'épreuve de la réalité, de répondre au défi de la modernisation et du développement de technologies de pointe, Moscou a continué longtemps à imposer ses certitudes aux démocraties populaires. Les leaders soviétiques n'ont cessé de proclamer l'avantage décisif de la planification centrale pour assurer le développement économique et social à chaque échelle. En effet, la planification s'opérait tant à l'échelle humaine dans chaque entreprise qu'au niveau international avec tous les « satellites ». Ces derniers devaient remplir des objectifs fixés par Moscou et pour Moscou, selon leurs industries les plus compétitives. Cinquante ans durant, les démocraties populaires ont mis leur production au service des besoins de l'URSS. C'est au sein du COMECON ou CAEM (Conseil d'assistance économique mutuelle), « grand dessein » institué en 1949, que l'harmonisation des plans nationaux s'opérait, sous l'égide de Moscou. L'objectif était double ; une meilleure planification d'abord, une spécialisation des industries nationales des pays satellites ensuite ; la conséquence directe étant une dépendance accrue de ces derniers envers l'URSS. En plus de lancer les satellites sur des projets industriels souvent en dehors de leur propre intérêt, le CAEM, avec des prix déconnectés de ceux du marché mondial en se fermant aux impulsions et critiques extérieures et en renforçant l'isolement de ses pays membres, n'a fait que conserver et même accentuer le retard des membres. A titre d'exemples, la Tchécoslovaquie produisait en priorité des machines industrielles tandis que la Pologne développait sa production de charbon et la Roumanie de pétrole, sans qu'aucun de ces pays n'aient de besoins particuliers dans ces domaines. De nombreux effets pervers et pernicieux vont apparaître au fur et à mesure pour les PECO qui ont été coupés de l'économie mondiale pendant quatre décennies. Ces effets ont été des moteurs pour la coopération régionale des anciennes démocraties populaires lorsqu'ils ont cherché à les enrayer, et ont même stimulé le besoin de se tourner vers l'Ouest et son modèle.

L'évolution des démocraties populaires dans les dernières années avant l'éclatement de l'empire soviétique fut diverse mais l'importance du facteur économique dans ces évolutions fut constante et globale. A partir des années 1950, apparaissent les premières crises et révoltes secouant le bloc communiste ; en mai 1953 à Pzen les ouvriers se révoltent contre l'échange de monnaie qui leur faisait perdre 12% de pouvoir d'achat ; en juin 1956 à Poznan ou encore en octobre 1956 à Varsovie d'autres révoltes dirigées contre Moscou éclatent. Ces crises ont en commun d'être liées au facteur économique et d'être des causes directes de la politique de satellisation, de planification et de croissance extensive imposée par Moscou. Au cours des années 1960, des stratégies réformistes ou au contraire accusant Moscou de révisionnisme voient le jour et les pays se différencient ; Tito et la Yougoslavie renouent avec l'URSS, l'Albanie rompt ses relations avec Moscou accusé de révisionnisme pendant que la Roumanie de Ceausescu affirme son indépendance nationale en 1965. En 1968, c'est la Tchécoslovaquie qui évolue vers le réformisme avec Dubcek qui arrive au pouvoir et annonce la libéralisation de l'économie au printemps. Le 20 août cependant, les troupes du Pacte de Varsovie interviennent. Malgré cette intervention, quelques années plus tard, à partir du milieu des années 1970, l'opposition aux régimes communistes et à Moscou s'accentue, à l'exemple de la Charte 77 des intellectuels tchèques qui a fait école dans les autres pays. Le mouvement s'accéléra alors, notamment avec la création du premier syndicat libre dans une démocratie populaire : Solidarnosc de Lech Walesa. Enfin, contre toute attente, le facteur décisif est venu de Moscou avec Gorbatchev qui se désengagea progressivement de l'Europe centrale et orientale.

Si nous avons rappelé ces événements ainsi que l'organisation économique des PECO sous le régime soviétique, c'est parce qu'ils ont déterminé de manière irréversible la vie de ces pays. L'économie planifiée les a réduits à produire en dehors de leur intérêt ; dès lors, après les révolutions démocratiques et, à fortiori la fin de la guerre froide, ils se retrouvent avec les mêmes difficultés : retard économique, absence de marché et d'appartenance à un grand ensemble susceptible de les tirer vers le haut et de les protéger. Ces pays qui ont toujours gardé leurs propres identités peuvent être appelés «les orphelins du communisme »5(*).

Une même expression caractéristique, certes, mais des situations particulières qui n'en restent pas moins diverses. En 1989, lorsque s'effondrent les régimes communistes d'Europe centrale et orientale et que débute le processus économique de transformation post-socialiste, une grande diversité de situations initiales caractérise les pays de la région. Pour le monde occidental et ses organisations multilatérales, cette variété de points de départ est alors occultée : le monde socialiste était le plus souvent perçu de manière homogène, d'où l'appellation fréquente d' « économies de type soviétique ». Assurément, les systèmes économiques présentaient de fortes ressemblances ; leur socle institutionnel était formé du régime de parti unique et de la domination de la propriété d'Etat, l'organisation hiérarchique prédominait dans l'économie, où les prix, les salaires, les échanges extérieurs étaient dépendants des décisions de l'administration économique, elle-même sous le contrôle formel du parti communiste strictement centralisé, l'agriculture était collectivisée, le commerce extérieur sous monopole d'Etat, le secteur privé strictement confiné. Toutefois, d'importantes différences dans le fonctionnement des institutions ou même dans leur organisation distinguaient les différents pays en 1989. Ces différences étaient le produit de l'histoire dans deux domaines ; les rapports avec le « grand frère soviétique » et l'expérience contrastée des « réformes économiques ». Enfin, la diversité des modalités de la rupture politique a conditionné les différences stratégiques de « transition » des premiers gouvernements post-communistes. Malgré tout, deux caractéristiques ressortent : l'adoption d'une stratégie d'inspiration néolibérale de transition vers une économie de marché, et une dépression économique d'une sévérité imprévue. Ces deux caractéristiques vont jouer un rôle important dans la mise en place et l'élaboration des aides apportées par les IFI.

C/ Les défis à relever

En effet, les gouvernements arrivés au pouvoir en 1989-1990 ont été confrontés au même objectif économique : celui du passage de l'économie centralement planifiée à l'économie de marché. Rapidement, il est apparu que cet objectif n'était pas aussi simple que cela aurait pu paraître de prime abord. Cette transformation sans précédent ne pouvait se limiter aux seules privatisations, pendant longtemps le mot d'ordre principal, pour ne pas dire unique, des libéraux est-européens. Un travail de fond devait être mené au préalable. Le libéralisme, avec ses mots d'ordre antiétatiques, était le courant le plus éloigné du communisme. Les premières difficultés auxquelles se heurtèrent les économies en transition de l'Europe post-communiste sont d'ordre structurel et institutionnel ; gestion rigide de l'économie planifiée, manque de pragmatisme, lourdeurs administratives, inefficacité et obsolescence de l'appareil productif, inadaptation de la structure de production à la demande régionale et, à fortiori, mondiale. Ce dernier point a très tôt été discuté multilatéralement par les dirigeants et fut l'un des objectifs premiers de la formation du Groupe de Visegrad6(*), l'un des tout premier groupe de coopération régionale. L'adaptation des mentalités et des comportements aux conditions nouvelles allait être plus complexe et plus longue encore. La transition du plan au marché exigeait l'émergence d'une culture économique adéquate ; il fallait accepter le coût social de la transition avant même la formation d'un esprit d'entreprise chez les citoyens. Cela nécessitait donc l'acceptation de l'inflation, de l'accroissement des inégalités, de la paupérisation de certaines catégories sociales et du chômage. Toutes ces difficultés ont amené, dans ces années de transition économique, un débat régional entre les partisans d'une thérapie de choc et les tenants de la démarche gradualiste, débat sur lequel nous reviendrons.

A ces contraintes s'ajoutèrent les problèmes liés à la création du marché lui-même. Il convenait d'élaborer non seulement le cadre juridique et institutionnel approprié mais aussi, et peut-être avant tout, introduire les mécanismes du marché - la libre concurrence et l'égalité d'accès au marché des agents économiques - et recréer le secteur bancaire, garant et support indispensable de toute économie moderne et efficiente. Le volet le plus spectaculaire, sinon le plus important, de le réforme économique entreprise par les Etats d'Europe centrale et orientale, qui devait être précédé par tout un processus préparatoire fut celui des privatisations. Il était indispensable, avant de transférer des mains de l'Etat aux mains du secteur privé, de redéfinir les régimes de propriété, ce qui s'inscrivait dans le projet de refonte des structures économiques existantes. Il y eut donc une transformation du concept même de la propriété privée. Le débat qui en résulta, fut, lui encore, intense et fit intervenir tous les PECO. En réalité, on se trouvait en présence de deux débats. Le premier portait sur le fond ; sur l'étendue et les méthodes de la privatisation ainsi que sur toutes les mesures d'accompagnements ; le second sur le choix des voies de transformations. Le premier débat a fait apparaître les contradictions entre la volonté politique et la logique économique, l'un exigeant un redémarrage rapide des économies et l'autre demandant une préparation, nécessairement longue, de l'économie au processus de transition. Ces contradictions alimentèrent un second débat donc, qui, superposé au premier, se déroula entre les partisans de la thérapie de choc et les tenants de l'approche gradualiste. Par les échanges que les pays ont eus depuis 1989, il est possible d'affirmer que les pays ayant choisi la thérapie de choc se sont trouvés devant des difficultés plus grandes que ceux qui ont suivi une voie plus progressive.

Un an après l'introduction des premiers mécanismes du marché et la mise en place de nouvelles politiques économiques, la situation était très différente selon les pays. La baisse de l'activité a été générale, mais son intensité variait d'un pays à l'autre ; la production industrielle a chuté en moyenne de 18%, tandis que le chômage a fait une apparition spectaculaire, particulièrement dans les pays ayant opté pour une transformation rapide. Trois pays sont cependant parvenus à réaliser des progrès considérables ; la Pologne, la Tchécoslovaquie et la Hongrie. Ce n'est donc pas un hasard si l'on retrouve ces trois pays à l'origine du groupe de Visegrad le 15 février 1991.

Lorsqu'en novembre 1989, la Diète polonaise a voté le programme de stabilisation et de privatisation, entré en vigueur le 1er janvier 1990, la situation de l'économie polonaise était catastrophique. Le programme mis en place par le ministre des Finances Leszek Balcerowicz représentait une véritable thérapie de choc à deux volets ; atteindre une stabilité macro-économique par le biais d'une politique monétaire et budgétaire rigoureuse et instaurer des réformes structurelles, nécessaires pour introduire les mécanismes du marché. Ce programme stipulait une libéralisation totale des prix et la suppression des subventions aux entreprises publiques. La politique monétaire prévoyait l'introduction de la convertibilité interne de la monnaie, laquelle a été facilitée par l'instauration, fin 1989, par l'OCDE d'un fonds de stabilisation de zloty d'un montant de 1 milliard de dollars. Par ailleurs, l'abolition des tarifs douaniers et la libéralisation du commerce extérieur, décidées collectivement par les PECO et les organisations internationales compétentes ont immédiatement porté leur fruits, en permettant un développement spectaculaire des exportations, dont l'augmentation a atteint 44% entre janvier et octobre 1990. Par sa politique monétaire, accompagnée d'un ensemble de mesures visant à instaurer une véritable économie de marché, avec le développement du secteur privé, les démonopolisations et les privatisations, le gouvernement polonais à instaurer une confiance dans la monnaie nationale. Cependant, des problèmes ont surgit en ce qui concerne les privatisations et plus particulièrement dans les restructurations du secteur public, notamment concernant l'évaluation de la valeur des entreprises mises à la vente. En l'absence de structure de marché, celle-ci était difficile et les autorités ont donc opté pour la prudence et la patience. D'autant que l'exemple hongrois en ce domaine - les premières privatisations « sauvages » avaient profité surtout à l'ancienne nomenklatura - ne semblait pas exemplaire. Les premières vraies privatisations eurent donc lieu en même temps que l'ouverture de la Bourse de Varsovie, en avril 1991. Les « privatisations de masse », exemple unique en Europe centrale et orientale ne commencèrent qu'à la mi-mai 1991. Elles passaient par la distribution d'actions gratuites (vouchers) à l'ensemble de la population active, soit 27 millions de personnes. Dans un premier temps, ces actions furent gérées par un fonds de placement spécialisé. Quelque 200 à 300 grandes entreprises devaient être concernées par cette mesure sans précédent, destinée à créer en Pologne un actionnariat populaire important. D'autre part, les procédures de vente aux enchères ou de rachat d'entreprise par les salariés ont également pris un essor considérable, participant d'une manière de plus en plus importante à la remise sur les rails de l'économie polonaise.

L'exemple de la Tchécoslovaquie diffère d'abord chronologiquement. Elle fut en effet la dernière à s'engager sur la voie des transformations. Le désavantage de la Tchécoslovaquie, au moment des bouleversements de 1989, résidait dans l'absence quasi-totale de secteur privé, alors qu'il existait à l'état embryonnaire en Pologne ou en Hongrie. L'expérience de ces deux derniers pays en la matière, aussi maigre était-elle, fut utile aux dirigeants tchécoslovaques qui se sont beaucoup renseignés dans les premières années du Groupe de Visegrad. C'est alors que le ministre des finances, Vaclav Klaus, un libéral déterminé, a élaboré un programme qui prévoyait une transition rapide vers l'économie de marché. Cependant, fort du précédent polonais dont la thérapie de choc révélait ses limites, ce programme n'était pas, à proprement parlé, radical. Les privatisations devaient se diviser en quatre étapes ; redistribution des biens d'Etat nationalisés à la fin des années 1950, « petite privatisation », sous forme de ventes aux enchères publiques de restaurants, magasins et petites entreprises de services, « grande privatisation » concernant l'essentiel de l'outil industriel et commercial et enfin création de joint-ventures. Si la Tchécoslovaquie a rencontré plus de problèmes que les deux autres pays du Groupe de Visegrad (lesquels représentent tout de même les PECO s'étant le mieux sortis de l'après communisme, ce qui relativise nettement le retard tchécoslovaque), c'est grandement du au caractère fédéral du pays. La multiplication des centres de pouvoir rendait fastidieuses les démarches des investisseurs occidentaux. A cela fallait-il ajouter le manque d'incitations fiscales, une certaine inertie de la population et la présence encore très sensible de « noyaux durs » des anciens syndicats communistes.

Ces deux pays, tout comme la Hongrie, dans lesquels de nombreux signes encourageants étaient visibles ne reflétaient cependant pas la situation d'ensemble des PECO. Tant en Bulgarie, qu'en Albanie, Roumanie ou Yougoslavie, il était difficile de parler de post-communisme, malgré les transformations de 1989-1990.

2/ LES STRATEGIES DE TRANSITION

A/ Le début de l'aide

L'effondrement du communisme en Europe centrale et orientale a immédiatement été suivi par de fortes initiatives internationales soutenant le changement économique (et politique) dans la région.

Au cours du Sommet de l'Arche les 14, 15 et 16 juillet 1989 à Paris, les institutions internationales et nouveaux gouvernements de l'Est et du centre de l'Europe sont parvenus à des accords sur les objectifs économiques et politiques de la transition et sur ses grandes lignes stratégiques. C'est à l'occasion de ce sommet que fut décidé l'aide à la Pologne et à la Hongrie, déjà sur la voie de la réforme en juillet 1989, alors que l'URSS n'a pas encore été officiellement démantelée. Selon certains, le caractère novateur du Sommet de Paris dans les relations Est/Ouest constitue le point de départ de la chute de l'URSS. Peu de temps avant la fin du Sommet, Mikhaïl Gorbatchev adressa une lettre à François Mitterrand au contenu qui surprit tout les observateurs de l'époque. Le Premier Secrétaire du Parti Communiste en URSS y parlait de « nouvelle pensée politique », « d'harmonisation des processus économiques »,..., et invitait les participants au Sommet à le rencontrer. La réaction des 7 à cette lettre fut tout de même discrète, et personne n'osa se prononcer publiquement. Toujours est-il que les dirigeants occidentaux décidèrent d'aider la réforme en Pologne et en Hongrie « de manière concertée », avec des travaux de préparation réalisés par la Communauté Economique Européenne (CEE). La réforme sera précédée d'un soutien alimentaire pour ces deux pays, toujours sous le patronage de la CEE. Concernant l'URSS, c'est encore la CEE et son Président de Commission Jacques Delors qui était la plus adaptée pour rassurer les américains. Elle servira donc de cadre aux prochaines relations entre les pays capitalistes et l'URSS. L'initiative de l'aide revenant à la Communauté européenne, c'est également elle qui est naturellement choisie pour effectuer la coordination de l'aide sur les années à venir entre tous les donneurs multilatéraux. Nous verrons plus tard que ce rôle n'a malheureusement pas toujours pu être mené à bien. Toujours est-il qu'au lendemain du Sommet, l'implication de l'Ouest dans le processus de transition qui s'annonçait était officiellement lancé avec d'un point de vue générale, la création du Groupe des 24 chargé de diriger l'assistance du monde occidentale aux PECO et son instrument strictement européen, le programme PHARE, premier et principal outil de coopération financier et technique entre la CEE et les PECO (dans un premier temps seulement destiné à la Hongrie et à la Pologne). En théorie donc, l'aide aux PECO trouve son origine avec le Sommet de l'Arche, mais dans la pratique chaque IFI a élaboré son propre calendrier en traitant directement avec les gouvernements récipiendaires, sans toujours passer par la case CEE pourtant censée coordonner l'aide.

Dans la foulée de la mise en oeuvre du programme PHARE, dont le frère jumeau pour les pays de la CEI est le programme TACIS, Mitterrand propose de créer en décembre 1989 la première institution financière internationale post guerre froide, la BERD (Banque Européenne pour la reconstruction et le développement), opérationnelle à partir d'avril 1991. Son objectif premier était directement lié à la transition des PECO : la promotion des institutions démocratiques et de l'économie de marché au moyen de prêts et d'investissements (avec au moins 60% des fonds directement investis dans des entreprises déjà privatisées ou engagées dans le processus de privatisation).

En plus de ces deux institutions crées spécialement à l'attention des PECO, les autres IFI se sont également impliqués dans la région très rapidement. Ainsi, le FMI conclu un accord avec la Pologne dès le début du mois de février 1990, un mois après la libéralisation des prix. Au début de l'année 1990, les IFI étaient devenus des acteurs majeurs dans l'assistance à la transition des PECO, au même titre que les donneurs nationaux les plus actifs tels que l'Allemagne ou les Etats-Unis. En 1992, tous les PECO étaient devenus membres du FMI et de la Banque Mondiale et bénéficiaient d'aides de tous types que nous analyserons plus tard. Au début du processus, et donc aux prémices de l'aide, les montants engagés par les IFI se sont élevés à 26 milliards de dollars entre 1990 et 19947(*) (sur une base annuelle, le montant total a augmenté rapidement d'années en années). Le FMI et la Commission Européenne ont fourni environ les trois-quarts de l'ensemble des ressources multilatérales accordées aux PECO, la Banque Mondiale et la BERD, la quasi-totalité de ce qui reste. En ce qui concerne les pays bénéficiaires durant cette première phase de l'aide, la Pologne (36%), la Hongrie (18%) et la Tchécoslovaquie (12%), puis la République Tchèque et la Slovaquie, ont bénéficié de la plus grande partie.

B/ Quelle approche et quelle méthode pour réussir le volet économique de la transition ?

Dans un premier temps, les IFI, en consultation avec les gouvernements récipiendaires, n'ont pu éviter le grand débat sur l'approche à privilégier pour aider à réformer en profondeur les PECO, tant économiquement que politiquement. Les IFI qui ont toutes travaillé en proche collaboration avec les gouvernements ont pris part au débat qui a porté sur la méthode de transition à choisir. D'un point de vue générale d'abord, la première question portait sur la manière : fallait-il réformer rapidement et de manière brutale les PECO, ou au contraire, fallait-il opérer la transition en douceur ? Ces deux points de vue opposés avaient chacun leurs avantages et leurs inconvénients.

La première de ces approches risquait d'engendrer de nombreux phénomènes négatifs : tensions sociales, montée en flèche du chômage et de l'inflation, déclin du niveau de vie et de la production. Rien ne pouvait garantir que la seconde approche allait entraîner des conséquences moins néfastes mais cette dernière était plus facile à accepter pour la population. Ce débat fut à la hauteur des conséquences qu'il était susceptible d'entraîner ; intense et global. Il concernait tout le monde et dépassait les simples frontières de l'Europe centrale et orientale. Finalement, aucun des PECO n'a mit en place une politique découlant entièrement de l'une ou l'autre de ces approches. Si celle de la Pologne est traditionnellement considérée comme radicale, avec une thérapie de choc qui a été appliquée par Mazowiecki, caractérisée par une révolution politique intégrale sans précédent, et celle de la Hongrie plus gradualiste au contraire, tous les pays ont cherché dans la mesure du possible un juste milieu. En plus des contraintes intérieures, les PECO ont dû suivre les consignes strictes du Fonds monétaire internationale et de la Banque Mondiale afin de bénéficier de leurs aides. Des rencontres régulières eurent alors lieu entre les dirigeants afin de déterminer une ligne de conduite unique face aux conditions fixées par les instances économiques occidentales.

Cependant, ces rencontres, comme ces politiques générales sur l'approche à privilégier n'ont pas été les mêmes pour tous les PECO. L'approche économique prônée par les IFI et choisie par les PECO a été différente, à la fois selon les pays comme nous l'avons vu, mais surtout selon les aspects particuliers de la transition économique. Nombreux pays ayant décidé de faire leur transition de manière rapide ont privilégié des approches graduelles et lentes sur certains aspects particuliers de leur transition (c'est le cas de la Pologne par exemple), et vice-versa. Si nous reprenons les principaux éléments du processus8(*), à savoir libéralisation, stabilisation macroéconomique, restructuration et privatisation, réformes juridiques et institutionnelles, les approches ont souvent varié d'un aspect à l'autre en fonction des pays et, les conseils, en fonction des IFI.

Observons donc, parmi ces quatre grands aspects de la transition des PECO, les trois volets les plus économiques : libéralisation et stabilisation macroéconomique (à étudier ensemble), et les restructurations et privatisations. Concernant la libéralisation et la stabilisation macroéconomique, au début de la période, la majorité des économistes issus des IFI s'accordaient pour une approche radicale. Il fallait procéder rapidement. Ainsi, la transition a commencé par une libéralisation rapide des prix dans la plupart des économies, ce qui a entraîné une poussée immédiate de l'inflation (au départ, le taux d'inflation a atteint en moyenne 450% par année dans les PECO). En plus de cette poussée inflationniste soudaine, une autre conséquence de la libéralisation rapide des prix préconisée par les IFI a été la chute plus grave que prévu de la production. De nombreux experts envoyés par les IFI se sont penchés sur les causes de cette soudaine chute. Leurs études ont dans l'ensemble conclu que la « désorganisation » liée à des chocs tels que l'effondrement du CAEM a joué un rôle important. Concernant la production toujours, il y a eu de fortes disparités entre PECO et il a été difficile pour les IFI de donner des indications globales. Généralement, l'existence de « conditions initiales défavorables » pour expliquer ces différences ont été invoquées. En effet, au départ, les économies qui se sont engagées dans la transition présentaient des caractéristiques différentes, malgré un socle commun. Par exemple, les pays se distinguaient par leur aptitude à réorienter leurs échanges vers les économies de marché avancées, leur degré d'industrialisation, le rôle économique de leur secteur agricole, la scolarisation dans l'enseignement secondaire et le nombre d'années passées sous le régime communiste. Sans grande surprise, les pays où les conditions initiales étaient les plus défavorables étaient ceux qui ont connu les chutes de production les plus importantes. Dans ces constats, les IFI ont eu leur rôle à jouer, à travers leurs experts dépêchés sur place et leurs économistes.

Un autre élément primordial de la transition économique a été la privatisation. Sur cette aspect-là, les avis des IFI étaient partagés une nouvelle fois entre les tenants d'un transfert rapide des avoirs de l'Etat au secteur privé et ceux qui favorisaient une approche plus graduelle. Les avocats d'une privatisation rapide (République Tchèque par exemple) préconisaient l'élimination des propriétés de l'Etat par la redistribution ou restitution9(*). Le FMI a critiqué cette méthode de restitution, ralentissant inutilement la privatisation par son caractère compliqué. Les avantages d'une telle approche se situent dans l'équité. Les partisans de l'autre camp ont soutenu une réduction plus graduelle du secteur public. Ceux-là ont privilégié la privatisation des entreprises par la vente de leurs actifs (la Hongrie a adopté cette approche), préférablement à des personnes capables d'en améliorer le rendement, et qui donc avaient une certaine expérience de l'économie de marché. Selon le FMI, qui a plutôt soutenu cette méthode, le but initial était de vendre les actifs de l'Etat à des investisseurs externes, étant donné le développement insuffisant des marchés intérieurs des capitaux10(*). Trois types de gains étaient attendus : des revenus pour l'Etat, l'apport rapide de compétences extérieures et la probabilité d'une gestion extérieure plus efficace et expérimentée. Parmi les inconvénients de la méthode, les experts ont relevé l'inadéquation des marchés boursiers nationaux et l'absence de capitaux intérieurs. Par ailleurs, ne pouvant obtenir d'informations fiables sur les entreprises mises en vente, les investisseurs étrangers ne se sont pas montrés très intéressés dans un premier temps. En outre, cette méthode est coûteuse et lente. En conclusion, et selon le point de vue adopté à la fin de la décennie 1990, alors que les experts avaient suffisamment de recul, la privatisation rapide est considérée comme plus dangereuse. Cependant, il se peut toutefois que pour un historien, la question de la rapidité et de la méthode choisie ne se pose pas dans ces termes. Au rythme où elle s'est opérée depuis 1989 et continue de se faire encore aujourd'hui (la privatisation des grandes entreprises n'est pas encore terminée partout, contrairement à celle des petites, pratiquement faite dans tous les PECO), la privatisation sera presque terminé dans dix ans pour la plupart de ces pays, et un délai de dix ans pour une tâche aussi énorme sera certainement considéré comme très court.

Rejoignant cette question du rythme des privatisations, mais englobant davantage de facteurs, il y avait également la question de la méthode à suivre, au sens large. Nous avons vu que les partisans d'une approche lente et ceux d'une approche plus rapide avaient chacun leur méthode préférée : les premiers ont généralement mis en oeuvre la vente directe d'actifs et l'émission d'actions, alors que les seconds ont utilisé majoritairement la restitution ou redistribution. Cependant, tout comme aucun pays n'a suivi intégralement un des deux rythmes, aucun gouvernement ni IFI n'a privilégié systématiquement une méthode. En outre, la diversité des actifs de l'Etat a le plus souvent obligé les décideurs politiques et économiques a allié plusieurs méthodes de privatisations suivant le type de bien public. En plus des restitutions et des ventes directes, deux autres moyens ont été utilisés par les gouvernements souvent en accord avec les IFI.

Il y a d'abord le rachat de l'entreprise par ses cadres ou par ses salariés. Dans cette approche, les actions d'une entreprise sont vendues ou données à un groupe de ses cadres et autres employés. En plus d'être politiquement très populaire, elle est rapide et facile à appliquer. Un rachat bien structuré peut parfois être efficace, car les motivations des salariés et des propriétaires sont les mêmes. Néanmoins, l'expérience montre que ces rachats, souvent critiqués eux-aussi par les IFI, notamment la Banque Mondiale et ses experts dépêches en Pologne, présentent de vrais inconvénients. La cession de l'entreprise à des investisseurs internes entraîne souvent des coûts élevés sous forme d'inefficacité d'exploitation et de gestion. Par ailleurs, le processus peut se révéler inéquitable. Les actions des entreprises gérées par leur personnel ont montré qu'il leur arrivait d'accorder des hausses de salaires excessives, de maintenir un niveau d'emploi trop élevé et de ne pas suffisamment investir. Dans toutes les économies en transition, au-delà même des PECO, les investisseurs internes n'ont parfois pas les compétences nécessaires pour opérer dans un contexte d'économie de marché dont ils n'ont aucune expérience. En dépit de ces faiblesses, de nombreux PECO ont popularisé cette méthode dont la Pologne, la Roumanie ou encore la Slovaquie.

La privatisation en masse est une autre méthode qui a été utilisée. Dans ce cas, par le biais d'émissions de coupons, et par égalité d'accès, l'Etat distribue généralement à titre gratuit, ou contre versement d'une somme modique, des coupons qui peuvent être utilisés pour acheter des actions dans des entreprises. Cette méthode est apparue avec la transition des PECO. Elle a été peu populaire, hormis en République Tchèque et dans les petites ex-républiques de la Yougoslavie et de l'URSS. L'avantage de cette méthode est qu'elle résolvait le problème de la pénurie de capitaux intérieurs sans toutefois céder les actifs nationaux à des investisseurs étrangers, comme c'était le cas avec la simple vente directe. Comme son nom l'indique, la privatisation en masse est aussi un moyen simple et rapide d'achever l'application de vastes programmes de privatisation à l'échelle de l'économie toute entière. Cette méthode a toutefois des inconvénients. Le principal risque est que la dispersion du capital s'accompagne d'un manque de focalisation sur l'efficacité de gestion et du pouvoir nécessaire pour l'assurer. Cela peut faire fuir les nouveaux investisseurs potentiels. En effet, il était impossible de contrôler de manière suffisante tous les nouveaux « petits actionnaires ». Dans la pratique, ces problèmes ont été en partie résolus par le regroupement des intérêts dans des sociétés d'investissement ou des fonds communs de placement. Cependant, ces derniers ne disposaient pas toujours des pouvoirs nécessaires pour assurer une gestion, un contrôle et une surveillance adéquats, et la direction des entreprises pouvait les priver d'informations essentielles.

Maintenant que nous avons vu les différentes approches et méthodes du volet économique de la transition d'un point de vue théorique, et les avis des IFI sur ce sujet, penchons-nous sur une approche particulière de la privatisation dans la transition, l'éducation.

C/ Approches particulières aux différents secteurs de l'économie

De quelle manière l'éducation a-t-elle été privatisée en Pologne ? L'étude de cet exemple particulier va nous permettre d'avoir une idée plus concrète de la privatisation et de ses théories.

La privatisation du système éducatif en Pologne a commencé presque immédiatement après l'effondrement du socialisme réel. Le 12 septembre 1990 la chambre basse du parlement (Sejm) a promulgué la loi autorisant la création d'écoles supérieures non publiques et le 7 septembre 1991 la loi concernant l'enseignement primaire et secondaire a donné le feu vert au développement du secteur privé dans cette branche éducative. Depuis, les établissements non publics sont présents à tous les niveaux. Voyons de plus près de quelle manière la privatisation du système s'est-elle opérée dans le primaire/secondaire, le supérieur ainsi que dans le secteur public, dont certains établissements ont ouvert des sections privées.

En 1999, dans l'éducation primaire et secondaire, on comptait 2 000 écoles primaires et secondaires privées qui rassemblaient environ 200 000 élèves, soit 2,5% de l'ensemble des élèves polonais. Au début des années 1990, les établissements de ce secteur ne recevaient pas encore de subventions de l'Etat mais à partir du milieu des années 1990, le budget a commencé à les financer. La part des subventions publiques dans les budgets des écoles privées pour l'année scolaire 2000-2001 a été de 35% pour les écoles primaires, 36,4% pour les collèges et 44,9% pour les lycées. Malgré cette aide considérable de l'Etat, les frais de scolarité ont augmenté. Selon un rapport de la NIK (Chambre suprême de contrôle) portant sur un contrôle réalisé en 2001 dans 11 districts et 320 communes du pays - le montant moyen mensuel des frais de scolarité était de 400 PLN, soit environ 100 euros dans les écoles primaires et de 175 PLN, soit 43,75 euros dans les établissements secondaires. Dans un pays où le niveau de vie reste bien plus bas que dans les pays d'Europe occidentale, les couches les moins favorisées, enfants de chômeurs et familles rurales sont complètement exclues de ce système élitiste.

En 1998, l'Etat a décentralisé l'ensemble du système éducatif. Depuis, les écoles primaires sont gérées et financées par les communes (gminy), alors que l'enseignement secondaire se trouve sous la tutelle des districts (powiaty). Enfin, en 1999, une nouvelle réforme est entrée en vigueur. D'un système à deux échelons - un tronc commun de huit ans pour les enfants de 7 à 15 ans, suivi d'un lycée d'enseignement général ou d'un enseignement technique ou professionnel - on est passé à un système à trois échelons, avec un échelon intermédiaire, le « gymnase » (collège) pour les 13 - 16 ans. Toutes ces réformes ont été très contestées aussi bien par les spécialistes que par les parents. La BERD a participé à la privatisation de l'éducation mais a aussi critiqué les dernières réformes. En effet, la décentralisation du financement porte en germe le développement d'inégalités régionales et d'un système éducatif à deux vitesses. Comme la Banque Mondiale en a avertit le gouvernement polonais, le contribuable de la « riche » Varsovie peut en effet verser en moyenne plus d'impôts que l'habitant de la campagne ruinée par la liquidation brutale des fermes d'Etat. La création des gymnases a aussi entraîné la liquidation des petites écoles de campagne, ce qui a provoqué les protestations des parents. Ils ont peur que leurs enfants ne soient rejetés par les collèges des écoles communales plus riches, ce qui a semblé justifié si l'on en croit les rapports internationaux.

Du point de vue quantitatif et social, c'est toutefois la privatisation de l'éducation supérieure qui constitue le phénomène le plus important. Plus de dix ans après son introduction, la population estudiantine en Pologne compte 1,8 million d'étudiants contre environ 390 000 en 1989, ce qui représente une augmentation de plus de 4 fois. Le taux de scolarisation brut, c'est-à-dire la relation la relation entre le nombre total de la population estudiantine et le nombre de la tranche d'âge 19-24 ans de la société, a atteint en 2003 43,6% contre 12,9% en 1989. En 1998, 7% de la population polonaise possédait un diplôme de formation supérieure. Cette évolution spectaculaire ne s'explique cependant pas uniquement par la privatisation, même si cette dernière, en plus d'avoir crée de la diversité dans les études, a également stimulé l'éducation supérieure publique.

Le secteur privé forme 29% de la population estudiantine, soit 52 000 étudiants. Il compte actuellement 286 établissements, mais seuls 21,1% des étudiants de ce secteur poursuivent leur enseignement dans le système régulier et journalier. Les écoles non publiques ont surtout développé des formations de type économique, telle que la gestion, le marketing, les finances. Pour ouvrir un établissement privé, il faut obtenir une autorisation du Ministère de l'Education. Le statut de l'école doit être accepté par ce ministère. Le secteur public de son côté compte 120 écoles supérieures dont 86 dépendent du Ministère de l'Education, de la Recherche et du Sport (MENiS), 34 dépendant d'autres ministères.

Dans toutes les écoles supérieures de Pologne, 80 100 enseignants sont employés, dont 17 700 professeurs, 429 directeurs de recherche avec habilitation, 3 031 maîtres de conférences, 17 500 assistants. Au début des années 1990, les grandes écoles embauchaient environ 60 000 enseignants. Plus de dix ans après, leur nombre a donc seulement augmenté de 27%. Ceci constitue une flagrante disproportion avec le développement rapide du nombre d'établissements scolaires et des étudiants. En fait, l'Etat s'est montré particulièrement avare pendant la période de transition. De 1990 à 1999, il a diminué de moitié ses dépenses budgétaires pour ce secteur, trois fois si l'on compte par étudiant. Les dépenses annuelles pour les besoins de l'éducation constituaient en 2002 en Pologne 3% du PNB, dont seulement 0,84% pour l'enseignement supérieur, alors que les pays riches dépensent en moyenne 5,3% de leur PNB. En conclusion, cette croissance du secteur de l'éducation supérieure, certes quantitativement impressionnante, a été obtenue non pas grâce à un investissement dynamique de la part de l'Etat mais, par son abdication : il a rejeté les coûts de cette « réforme » sur la société.

En 1999, la NIK a contrôlé 80 établissements scolaires non publics sur les 180 existants. Elle voulait savoir comment leur activité était surveillé, car la loi du 2 septembre 1990 ne donne pas au ministère la possibilité d'exercer un contrôle direct sur l'activité des écoles privées. Les enquêteurs ont mis en évidence leur manque d'enseignants et leur démarche purement commerciale. Ainsi, dans la très médiatisée et « élitiste » Ecole privée de journalisme « Melchior Wankowicz » à Varsovie, on a embauché des personnes n'ayant pas les qualifications d'enseignant supérieur alors même que dans son prospectus publicitaire, tous ses enseignants était abusivement présentés comme des professeurs titulaires. Dans une autre école privée (l'école de Business de Cracovie), un étudiant a fait preuve d'incroyables performances intellectuelles en commençant ses études trois ans avant la création de cette école ! Toute proportion gardée, ces exemples illustrent les défaillances qui peuvent découlées d'une privatisation trop rapide et sans contrôle externe, comme celui des IFI par exemple.

Les établissements publics ont également développé depuis 1989 tout un système d'éducation payant. Leur offre « commercial » comprend les études du soir et d'autres formations alternatives. Pour l'année académique 2003/2004, il y avait dans les écoles publiques polonaises 535 000 étudiants payant. Les recettes des frais de scolarité constituent 30% du budget des établissements publics. Le nombre d'étudiants des deux secteurs payant est de 1 055 millions, soit 58,6% du total.

A l'instar des établissements privés en général, la procédure d'entrée dans les études du soir du secteur public est facile. Les enquêteurs de NIK ont constaté que la très renommée Alma Mater - Université de Cracovie - s'est facilement adaptée à la nouvelle réalité économique du pays et n'hésite pas à « faire de l'argent ». Pour l'année universitaire 1999/2000, sa faculté de droit - malgré un quota de 500 pour les cours du soir - avait accepté tous les candidats, soit 577. Les frais de scolarité par étudiant est pour la première année de 5 000 PLN (1 250 euros) et de 3 000 PLN (750 euros) pour chaque année suivante.

Les contrôles de la NIK ont dévoilé le caractère « anarchique » du développement de l'éducation supérieure au cours de la période 1990 - 2001. Ceci a finalement poussé en 2001 le ministère de l'éducation à préparer une ordonnance définissant les standards d'éducation. En janvier 2003 on a crée la Commission Nationale d'Accréditation dont les compétences consistent à émettre une opinion sur la création d'une nouvelle école, d'une nouvelle spécialité et à contrôler la qualité de l'enseignement dans les établissements déjà existants (privés et publics). Son président considère que la mise sous contrôle de toutes les écoles prendra trois à quatre ans.

Cette brève analyse montre bien que l'éducation en Pologne, depuis sa privatisation, constitue un marché juteux. Cependant, ses professionnels et ses observateurs sont inquiets pour l'avenir et les excès se sont déjà manifestés. Cet exemple concret, nous montre pourquoi le débat sur les privatisations a été si long et passionné et qu'il n'a pas trouvé de réponse arrêtée. La privatisation de l'éducation en Pologne s'est faite très rapidement, sans aucun contrôle dans un premier temps, et sans participation importante des organisations internationales. Dans ce contexte, elle n'a pas réussi et la Pologne est obligée de revenir en arrière aujourd'hui, en réinstaurant le contrôle des établissements privés par l'Etat.

Chap. 2

Malgré leur diversité, les IFI n'ont pu répondre à tous les défis posés par la transition des PECO

1. DES IFI FORTS DE LEURS CARACTERISTIQUES ET DE LEURS EXPERIENCES

A/ L'union européenne

Comme nous l'avons souligné, l'Union Européenne (la CEE au départ en réalité) a été la première à s'investir dans la transition des PECO de manière officielle à la suite du Sommet de l'Arche en juillet 1989 avec notamment la création du programme PHARE. L'autre entité qui a travaillé pour la transition des PECO dans le cadre communautaire est la Banque Européenne d'Investissement.

Le programme PHARE est donc né en 198911(*), crée au départ, comme son nom l'indique - Pologne, Hongrie, Action pour la Restructuration Economique - uniquement pour ces deux pays, puis étendu en 1990 à la Bulgarie, la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie et l'Albanie. L'objectif du programme est d'assister les PECO dans leur transition vers un régime démocratique et une économie de marché. C'est principalement par des aides non remboursables plus que par des prêts que le système de financement de PHARE a fonctionné. Ces aides étaient accordés de façon autonome par la Communauté ou en cofinancement avec des Etats membres, avec la Banque Européenne d'Investissement (BEI), avec des pays tiers ou d'autres IFI. Le financement de chaque secteur est réalisé dans le cadre de sous-programmes spécifiques dont les principaux sont : « Jopp » pour le développement du secteur privé, « Green, East » pour l'environnement, « Echo » pour l'aide humanitaire, « Ace, Tempus » pour l'éducation et la recherche, « Lien » dans le domaine social, « Sigma » pour la formation professionnelle des fonctionnaires, « Démocratie » dans le domaine de l'organisation parlementaire et la transparence de l'administration publique, « Consensus » pour la cohésion sociale et la stabilité politique, « Mctp » pour la politique régionale de transport, « Praq III » en matière d'harmonisation des législations est-européennes avec celles de l'UE, « Taiex » pour l'apprentissage de l'acquis communautaire... Le programme espérait apporter de la flexibilité dans les réponses aux besoins. Si les PECO avaient en commun l'héritage communiste, les points de départ dans la transition n'en étaient pas pour le moins différents et inégaux. Ainsi, PHARE est toujours partit de la demande, sachant que les priorités variaient selon les pays. La réceptivité des pays dans lesquels PHARE a opéré a été grande grâce à cette politique d'adaptation. Elle a constitué une différence importante avec d'autres IFI moins bien vus et peut-être moins désintéressés. Dans cette optique, PHARE a même fournit des apports essentiels à la mise en oeuvre de réformes convenues dans le cadre d'accords contraignants des programmes du FMI et de la Banque Mondiale. Allant plus loin, PHARE a également travaillé en étroit lien avec les IFI, dont il devait en théorie coordonner le travail sur place. Les IFI et PHARE ont souvent investi ensemble dans des infrastructures, dans le secteur bancaire, la restructuration des entreprises et avec des lignes de crédit au secteur privé, ce qui a accru leur efficacité. Par exemple, il existe depuis 1991 avec la BERD un dispositif formel qui a connu un grand succès appelé « dispositif de Bangkok ». PHARE finance la BERD pour soutenir l'assistance technique que requièrent ses interventions. Jusqu'en 1996, plus de 130 opérations de coopération technique ont été financés avec ce dispositif.

Le comité de gestion du programme a été crée auprès de la Commission avec des représentants des Etats membres, un président représentant la Commission et un représentant de la BEI.

Dès sa création, les priorités affichées du programme sont les suivantes : l'abolition des monopoles d'Etat, les restructurations et privatisations des entreprises publiques, la modernisation des services financiers, la promotion du secteur privé (PME-PMI) et la formation professionnelle, le développement du marché du travail et du secteur social, y compris la réforme de la sécurité sociale et les politiques de prévoyance sociale. Aux premières étapes de la transition, l'assistance était centrée sur l'apport de savoir-faire ou d'assistance technique et, en cas de nécessité, sur l'aide humanitaire.

L'autre institution crée par la Communauté Européenne est très différente dans sa nature. Crée en 1958 avec le Traité de Rome, son siège est au Luxembourg. La première différence de taille donc est que cette institution n'a pas été crée pour les PECO. Au contraire, son objectif premier est d'investir dans des projets de pays membres. Institution financière de la CEE puis de l'Union Européenne, la BEI conduit ses activités d'emprunt et de prêts dans le cadre des politiques économiques de l'Union. Son rôle est d'emprunter de l'argent sur les marchés de capitaux afin de l'investir dans des projets européens. Les prêts accordés ont donc toujours été indépendants de l'Union, même s'ils suivent les politiques générales. Les projets soutenus doivent contribuer au bon développement économique et social des pays visés. Elle peut également intervenir de son propre chef en dehors de l'Union européenne, mais l'argent investit est sur ses fonds propres. La Commission européenne peut aussi lui donner un mandat pour intervenir à l'étranger, l'argent alors utilisé sera celui de l'Union européenne. C'est dans ces cadres-là que la BEI a financé de nombreux projets entre 1989 et aujourd'hui dans les PECO, principalement des projets soutenant la transition économique.

En règle générale (moyenne sur les quinze dernières années), environ 15% des investissements se font en dehors de l'Union européenne. En 1989 par exemple, concernant exclusivement les financements à l'extérieur de la Communauté, il ya eu 485,9 millions d'ECU de prêts sur ressources propres et 126 millions d'opérations de capitaux à risques sur des ressources budgétaires de la Communauté ou des Etats membres, soit au total 611,9 millions d'ECU. Sur ce total, seulement 58 millions d'ECU sont allés aux PECO (principalement ex-Yougoslavie). C'est en 1990 que la BEI s'implique véritablement dans la région à la suite des événements que l'on connaît. Elle s'engage pour la transition en augmentant sensiblement ses prêts dans la région. Les deux premiers pays ayant bénéficié de cette implication ont été la Hongrie et la Pologne. Ces premiers concours de la BEI ont porté sur les secteurs de l'énergie, des télécommunications et des transports. Ils ont également pris la forme de prêts globaux accordés à deux banques du pays (Inter-Europa Bank en Hongrie, Export Development Bank en Pologne). En Hongrie, trois prêts ont été signés en 1990 pour un montant total de 120 millions d'ECU, concernant d'une part la modernisation des télécommunications (création d'un réseau numérique) et d'autre part l'amélioration du réseau électrique. Le prêt à l'Inter-Europa Bank était lui destiné à soutenir des petits projets industriels et énergétiques et faciliter les investissements de promoteurs de la Communauté. En Pologne, un montant total de 95 millions d'ECU a été accordé pour le secteur de l'énergie, axé surtout sur la remise en état des capacités d'exploitation, de traitement, de transport et de stockage des ressources en gaz naturel avec une attention particulière portée à la protection de l'environnement. Le prêt à l'Export Development Bank contribua lui au renforcement de l'industrie privé, notamment d'exportation et de services. L'évaluation de ces deux années montre bien l'implication rapide et la réactivité de la BEI au début de la transition dans les PECO.

Il est important de noter qu'en tant que banque d'investissement, elle ne fait que des prêts et aucun don. Toutes les sommes investies par la BEI doivent lui être remboursées.

Concernant sa gouvernance, la BEI est composée d'un Conseil des gouverneurs (représenté par les 27 ministres de l'économie des pays de l'UE, chargés de fixer la politique générale), d'un Conseil d'administration (chargé d'appliquer la politique), d'un Comité de direction (qui assure au jour le jour le bon fonctionnement de la BEI), d'un Comité de vérification (chargé d'auditer la BEI pour s'assurer que son fonctionnement respecte toutes les obligations qu'elle doit remplir) et d'actionnaires (les 27 pays membres de l'UE, pour lesquels sont fixés leur participation au capital en fonction de leur PIB au moment de leur intégration à l'UE). La gouvernance de la BEI lui a toujours permit, et à fortiori dans un contexte très politique et sensible comme celui de l'Europe centrale et orientale dans les années 1990, de prendre des décisions indépendantes de la Communauté, sans l'empêcher de travailler avec elle, et donc même avec le programme PHARE, comme nous le verrons lorsque nous étudierons plus en profondeur les grandes évolutions des institutions au fur et à mesure que les réformes avançaient.

B/ La BERD et la Banque Mondiale (ou BIRD)

La Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement et la Banque Mondiale ont en commun d'agir davantage sur le terrain et par des actions micro-économiques le plus souvent. Etudions donc maintenant la création, le fonctionnement et les objectifs de ces deux banques.

La BERD a été crée en mai 1990 à Paris et inaugurée en avril 1991 à Londres, sous l'impulsion de François Mitterrand qui l'avait proposé dès 1989 au Parlement Européen, dans le but d'aider les PECO à développer leur secteur privé dans un contexte démocratique. Selon les règles qu'elle-même s'est fixée, chaque investissement de la Banque doit « avoir un impact positif sur la transition, c'est-à-dire contribuer à promouvoir l'économie de marché dans les pays en question », « soutenir l'investissement privé et non pas s'y substituer », « respecter les principes de la saine gestion bancaire ». Grâce à ces investissements, la Banque soutient les réformes structurelles et sectorielles, la concurrence, la privatisation, et l'esprit d'entreprise. Elle se doit également de renforcer les institutions financières des PECO et de leurs systèmes juridiques, développer des infrastructures nécessaires au secteur privé et mettre en oeuvre une bonne gouvernance d'entreprise.

Hormis le crédit direct qui correspond à la majorité de sa participation en termes de montants, la BERD a de nombreuses autres formes de participation. Elle peut prendre des participations dans des fonds de placement ou des fonds de capital-risque. Ces fonds décident alors eux-mêmes des projets dans lesquels investir, mais les critères qu'ils appliquent en matière de placement sont, pour l'essentiel, conformes à la politique d'investissement de la BERD. Elle peut également prendre des participations dans des banques d'affaires ou des banques commerciales qui décident aussi elles-mêmes des prêts à accorder. Elle peut faire des prêts à des banques, généralement par des financements à long terme aux banques locales, lesquelles utilisent ces crédits pour financer des projets qui s'accordent aux conditions fixées par la BERD. Elle peut également prêter aux gouvernements et à des banques pour PME, afin de financer des projets de PME du secteur privé. Il lui arrive aussi de procéder à des cofinancements de projets avec des banques d'affaires (la Banque d'affaire française Lazard a par exemple été très présente dans les PECO avec son service spécialisé sur les marchés émergents) et des banques commerciales locales. Ce dernier système sert généralement à financer des projets moins importants que ceux qu'elle finance directement. LA BERD peut également attribuer des facilités de garantie du commerce extérieur, des facilités de crédit de secours (mises au point pour aider les banques locales à gérer leurs risques de portefeuille et leurs décalages d'échéances). Par ailleurs, elle travaille beaucoup en partenariat avec d'autres IFI telles que la BEI, le FMI ou la Banque Mondiale, principalement sur des cofinancements. Par ailleurs, la BERD a beaucoup utilisé les partenariats avec des entités privés ce qui a souvent encouragé les investisseurs étrangers rassurés de voir une organisation multilatéral impliquée. Elle a même été l'une des premières IFI à encourager la collaboration approfondie entre secteurs public et privé.

Concernant sa structure et sa direction, chaque pays membre de la BERD nomme un gouverneur - généralement le ministre des finances du pays en question ou un responsable de niveau équivalent. Le Conseil des gouverneurs ainsi formé est investit de tous les pouvoirs dans le cadre de la BERD. Il délègue la majeure partie de ces pouvoirs au Conseil d'administration qui conduit les opérations générales et la politique de l'institution. Le Président, élu par le Conseil des gouverneurs, est le représentant légal de la Banque. Il dirige l'institution selon les orientations fournies par le Conseil d'administration. La Banque compte 63 membres (avec la BEI et l'UE qui ont chacun un représentant), tous membres entre 1990 et 1992, sauf le jeune Monténégro qui a rejoint l'institution quelques moins après son indépendance en juin 2006. Ces pays membres sont tous coactionnaires du capital de la Banque et de leur niveau de participation au capital dépend l'importance de leur voix. Le capital de base est important avec 20 milliards d'euros. Par ailleurs, pour financer ses prêts et ses besoins opérationnels, la Banque emprunte des fonds sur les marchés de capitaux. Elle n'utilise pas directement le capital des actionnaires pour financer ses projets. Ce système a permit à la BERD d'engager d'importants montants dans l'aide à la transition. A titre d'exemple, l'engagement net de la Banque en Hongrie et Pologne, de 1991 à 2005 d'élève à environ 5 milliards d'euros.

Cet argent a été investit de manière très diverse. La BERD s'engage dans de nombreux secteurs (agriculture, énergie, finance, PME-PMI, infrastructures locales et nationales, ressources naturelles, tourisme et immobilier, télécommunications, médias ou encore transports). L'étude des projets financés par la BERD montre qu'elle s'attache à des réalisations concrètes et qu'elle ne prend pas part aux politiques macroéconomiques comme le FMI, l'OMC et même parfois la Banque Mondiale peuvent le faire. Des projets d'hôtels à Budapest (28 millions d'ECU prêtés pour la rénovation d'un Hôtel dans le centre-ville en juin 1992), de transports publics (prêt de 61 millions d'ECU pour la réhabilitation des transports publics à Budapest en juillet 1993), de télécommunications (prêt de 60 millions de US$ à une compagnie de téléphonie mobile polonaise en novembre 1991) se sont enchaînés très rapidement à partir de 1991. Grâce à cette politique très active et concrète, avec des résultats visibles à moyen ou court terme en général, la BERD a été très populaire (et continue à l'être) dans les PECO en (re)construction.

L'autre banque parmi les IFI est la Banque Mondiale (avec ses deux institutions affiliées, la BIRD - Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement, et l'IDA - Association Internationale de Développement). Elle est créée en 1944 à la Conférence de Bretton Woods. Initialement, elle était chargée de soutenir le processus de reconstruction et de développement de l'après-guerre. Cette phase terminée, la Banque Mondiale s'est donnée comme objectif de réduire la pauvreté dans le monde («Notre mission est d'aider les pays en développement et leurs habitants à atteindre les objectifs en question, en travaillant pour cela aux côtés de nos partenaires afin de faire reculer la pauvreté. Dans cette optique, nous nous attachons, d'une part, à instaurer le climat voulu pour l'investissement, la création d'emplois et la réalisation d'une croissance durable, et, de l'autre, à investir dans les pauvres tout en leur donnant les moyens d'être parties prenantes au processus de développement », informations tirées du site internet de la Banque Mondiale). Pour atteindre ces objectifs, la Banque Mondiale insiste sur différents points qui rentrent dans le domaine des besoins de pays en transition comme les PECO l'ont été et certains continuent encore à l'être aujourd'hui. Elle souhaite renforcer leur capacité en consolidant leurs institutions et en formant sur le terrain le personnel administratif. Elle dote les pays en question d'infrastructure nécessaires en mettant en place les cadres juridiques et judiciaires propres à encourager les affaires dans une économie de marché saine et transparente, protège les droits individuels et de propriété et assure le respect des contrats. Elle développe leurs systèmes financiers en les dotant de capacités voulues pour pouvoir soutenir des activités allant du microcrédit au financement de grands projets d'entreprises. Enfin, elle instaure comme priorité la lutte contre la corruption et la promotion de la bonne gouvernance.

Le groupe « Banque Mondiale » opère de manière originale comparée aux autres IFI pour plusieurs raisons. Premièrement, elle n'est pas à but lucratif. Ensuite, son organisation est semblable à une coopérative, dans laquelle ses actionnaires sont ses 185 pays membres. Les actionnaires sont représentés par un Conseil des Gouverneurs qui est l'organe de décision suprême de la Banque Mondiale. Les gouverneurs sont en général les ministres des finances ou du développement des pays membres. Ils se réunissent une fois par an, à l'occasion des assemblées annuelles des Conseils des Gouverneurs du Groupe de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire Internationale12(*). Ne se réunissant qu'une fois par an, les gouverneurs délèguent certains aspects de leur mandat à 24 administrateurs qui sont en poste au siège de la Banque. Les cinq principaux actionnaires de la Banque (Allemagne, Etats-Unis, France, Japon, Royaume-Uni) nomment chacun un administrateur, et les autres pays sont représentés dans leur totalité par 19 administrateurs. L'ensemble de ces administrateurs constitue le Conseil des Administrateurs. Ils se réunissent en temps normal deux fois par semaine au moins pour superviser les activités de la Banque, et notamment pour approuver les opérations de prêt ou de garantie, les nouvelles politiques, le budget administratif, les stratégies d'aide aux pays, et les décisions touchant aux emprunts et aux finances de l'institution. Quant au fonctionnement au jour le jour, il est assuré sous l'impulsion et la conduite du Président, de la Direction et des Vice-présidents responsables des différents bureaux régionaux, secteurs, réseaux et fonctions. Enfin, elle accorde des prêts et crédits à taux d'intérêt faible ou nul et des dons aux pays qui n'ont pas accès aux marchés internationaux du crédit (cela a été le cas dans les premières années de la transition des PECO), ou qui n'y ont accès qu'à des conditions défavorables. Par ailleurs, la Banque prend elle-même en charge ses frais de fonctionnement, n'ayant donc pas à chercher des sources de financement extérieures. Voyons donc d'où viennent les fonds de la Banque, avant d'étudier de plus près les modes d'assistance utilisées par la Banque et ceux dont ont généralement bénéficié les PECO pour leur transition.

La mobilisation des fonds de la Banque provient en grande partie des prêts consentis sur le propre capital de la BIRD, bien qu'elle réalise une légère marge sur les prêts financés par la vente de ses obligations cotées AAA sur les marchés internationaux des capitaux13(*). Ce capital de la BIRD comprend les réserves accumulées au fil des ans et le capital versé à la Banque par les 184 pays membres qui sont ses actionnaires. Le revenu de la BIRD couvre également les coûts de fonctionnement de la Banque mondiale, et a alimenté les contributions à l'IDA et à l'allégement de la dette. L'IDA, elle, voit ses ressources reconstituées tous les ans par 40 pays donateurs. Des fonds supplémentaires sont réunis grâce au remboursement du principal sur ses crédits ne portant pas intérêt.

En ce qui concerne les prêts accordés par la Banque par l'entremise de la BIRD et de l'IDA, il y en a deux types essentiels : les prêts/crédits d'investissement et les prêts/crédits à l'appui des politiques de développement. Les PECO ont bénéficié de ces deux types d'aides selon la nature des emprunteurs. Les premiers prêts et crédits sont généralement accordés aux pays pour financer des fournitures, travaux et services à l'appui de projets de développement économique. Les seconds (qui étaient auparavant appelés prêts/crédits d'ajustement) fournissent un financement extérieur pour aider les pays à réorienter l'action publique et à réaliser des réformes institutionnelles. Chacun des projets proposés par les emprunteurs est évalué de manière à en établir la validité sur le plan économique, financier, social et environnemental. Lors des négociations pour le prêt, la Banque et l'emprunteur se mettent d'accord sur les objectifs de développement visés par le projet, ses résultats escomptés, ses indicateurs de performance et son plan d'exécution, ainsi que sur le calendrier de décaissement du prêt. S'il arrive à la Banque de superviser la mise en oeuvre de chaque prêt et d'en évaluer les résultats, c'est l'emprunteur qui exécute le projet ou programme selon les dispositions convenues.

Concernant les dons accordés par la Banque, ils sont destinés à faciliter la mise en oeuvre de projets de développement en encourageant l'innovation, la coopération entre organisations et la participation des entités concernées à l'échelon local. Ce dernier aspect explique en partie la proximité entre les experts de la Banque Mondiale et les élus locaux des pays bénéficiaires de l'aide.

Enfin, en plus d'être un service de financement, la Banque dispense également des analyses, conseils et informations aux pays membres afin de les aider dans leurs réformes. Ce rôle prend plusieurs formes, qu'il s'agisse de travaux de recherche économique sur de grands dossiers (l'environnement, la pauvreté, le commerce, la mondialisation, etc.) ou d'études économiques et sectorielles consistant à évaluer les perspectives économiques de pays donnés à partir d'un examen de leur système bancaire, de leurs marchés des capitaux et d'autres aspects tels que les échanges commerciaux, l'infrastructure, la pauvreté et les filets de protection sociale. Les experts travaillant sur ces dossiers ont sorti de nombreux rapports sur la situation des PECO durant leur transition, sur différents sujets très différents. Ce dernier aspect du travail de la Banque, avec la formation, est sans doute le plus important dispensé aux PECO en transition, ou du moins c'est celui qui a été le plus commenté (et parfois critiqué). Car en effet, avant de voir plus en détails l'action de la Banque auprès des PECO, il nous faut revenir sur les différentes critiques dont a été victime la Banque et qui continue aujourd'hui à l'être, d'autant qu'elles ont aussi déterminées son opinion, son image, et donc son travail sur place. Une première critique ancienne et générale est l'influence des Etats-Unis : la Banque serait sous l'influence politique de quelques pays, en particulier des Etats-Unis, qui en profiteraient pour faire avancer leurs propres intérêts. Autre critique courante, la Banque fonctionnerait de manière trop « néolibérale », principe selon lequel le marché, à lui seul, apporterait la prospérité aux nations pratiquant la libre concurrence sans aucune forme de contrôle par l'Etat. Il est intéressant de noter que cette critique a souvent été émise par des observateurs de l'action des IFI dans les PECO. En effet, ces principes, s'ils peuvent constituer une base, ne conviennent pas toujours, notamment dans les pays sans assises démocratique et étatique stable. Par ailleurs, la Banque favoriserait l'installation d'entreprises étrangères au détriment du développement des économies locales. A l'opposé de ces critiques, certains détracteurs eux-mêmes « néolibéraux », critiquent l'existence même de l'institution qui coûterait cher aux contributeurs sans résultat certain et qui serait un instrument purement politique. Ils y voient un outil bureaucratique d'ingérence économique internationale qui conduirait à masquer les défauts des politiques pratiquées dans les pays concernés. Ces critiques sont pour la plupart vieilles et existaient toutes au moment de la transition des PECO. Dès lors, nous pouvons avancer qu'outre le fait qu'elle a été la moins présente dans la région (les régions de prédilection de la Banque sont l'Afrique subsaharienne et l'Amérique du Sud), elle a également été la moins apprécié sur le terrain. Cependant, cela ne peut enlever la réalité de son action et l'utilité de ses nombreux rapports d'experts.

C/ Le FMI et l'OCDE

Les deux dernières IFI qui ont agi pour la transition des PECO sont le Fonds Monétaire Internationale et l'Organisation de Coopération et de Développement Economique.

Le Fonds Monétaire Internationale (FMI) a lui aussi vu le jour à la conférence de Bretton Woods en juillet 1944. Les 45 gouvernements alors représentés souhaitaient établir un cadre de coopération économique conçu pour prévenir le retour aux politiques économiques désastreuses ayant contribué à la Grande Dépression des années 1930. Selon l'Article 1 des Statuts du FMI, les objectifs principaux sont au nombre de six. Le premier but est de promouvoir la coopération monétaire internationale en fournissant un mécanisme de consultation et de collaboration. Le deuxième est la facilitation de l'expansion et de l'accroissement « harmonieux » du commerce international et contribuer ainsi à l'instauration et au maintien de niveaux élevés d'emploi et de revenu réel. Le troisième est la promotion de la stabilité des changes. Le quatrième, l'établissement d'un système multilatéral de paiements entre les Etats membres et éviter les dépressions concurrentielles. Le cinquième objectif est la mise à disposition des ressources générales du Fonds (de manière temporaire) moyennant des garanties adéquates, leur fournissant ainsi la possibilité de corriger les déséquilibres de leurs balances des paiements sans recourir à des mesures préjudiciables à la prospérité nationale et internationale. Enfin, le sixième objectif est, conformément à ce qui précède, d'abréger la durée et de réduire l'ampleur des déséquilibres des balances des paiements des pays membres. A la lecture des ces objectifs, nous pouvons déjà nous rendre compte de leur proximité avec les besoins inhérents aux PECO au moment de leur transition et explique l'implication du FMI.

Ainsi donc, de manière plus générale, le FMI s'emploie à promouvoir la croissance mondiale et la stabilité économique en encourageant les pays à adopter des politiques économiques saines. Cependant, à la différence de la BERD, de PHARE, de la BEI et de la Banque Mondiale, les concours du FMI ne financent pas des projets ou des activités spécifiques. Il n'accorde pas de prêts comme le font les agences de développement et IFI préalablement citées. La surveillance14(*) comprend le dialogue que le FMI entretient régulièrement avec chaque État membre et les conseils de politique économique qu'il leur fournit. À intervalles réguliers (habituellement une fois par an), le FMI évalue en profondeur la situation économique de chaque pays. Il examine avec les autorités les mesures les plus propices à la stabilité des taux de change, à la croissance et à la prospérité de l'économie. La décision de publier les rapports d'évaluation du FMI appartient à chaque pays membre concerné. En outre, le FMI apporte lui-aussi une assistance technique et une formation -- gratuitement dans la plupart des cas -- pour les aider à renforcer leur capacité de conception et d'application de politiques efficaces. L'assistance technique porte notamment sur la politique de finances publiques, la politique monétaire et de change, le contrôle et la réglementation du système bancaire et financier, et les statistiques. Le FMI est également un fonds auquel les pays membres peuvent avoir recours en cas de difficulté de balance des paiements. Par ces concours financiers, le FMI donne aux États membres le répit dont ils ont besoin pour remédier à leurs problèmes de balance des paiements. Un programme économique appuyé par le FMI est conçu par les autorités nationales en coopération étroite avec les services de l'institution, et les concours financiers restent subordonnés à la réalisation effective de ce programme. Cette assistance financière est accordée grâce au système des prêts concessionnels, la Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC), et la Facilité de protection contre les chocs exogènes (PCE), ainsi qu'au moyen d'allégements de dettes dans le cadre de l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) et l'Initiative d'allégement de la dette multilatéral (IADM).

Enfin, dernière partie conceptuelle et générale sur le FMI, son organisation. Le FMI doit rendre des comptes aux gouvernements de ses pays membres. Au sommet de la pyramide institutionnelle se trouve une nouvelle fois le Conseil des Gouverneurs qui comprend un représentant de chacun des pays membres. Vingt-quatre de ces gouverneurs siègent au Comité Monétaire et Financier International (CMFI) qui se réunit deux fois par an. La gestion courante du Fonds est assurée à Washington par un Conseil d'administration là-encore, composé de 24 membres, dont les activités sont guidées par le CMFI et appuyées par les services professionnels du FMI. Le Directeur général dirige les services du FMI et préside le Conseil d'administration. Il est assisté de trois Directeurs généraux adjoints.

Concernant l'implication du FMI dans les PECO, elle a été forte. Sans en faire l'historique qui sera établi plus tard, il est intéressant de revenir sur quelques points précis et sur la politique générale afin de mieux comprendre le travail réel du Fonds. Les défis posés par les PECO en 1989 correspondaient tout à fait aux objectifs fixés par le FMI à sa création. Selon Yves Gisse, économiste et consultant en Relations Internationales, le FMI a alors eu à résoudre l'un de ses plus grands défis depuis sa création. Pour le Fonds, le problème était en plus différent de ceux auxquels il s'était habitué dans les pays en voie de développement. Certes, il fallait instaurer des économies reposant sur le libre jeu du marché et élaborer de nombreuses transformations, mais le niveau d'éducation était tout de même élevé, et la main d'oeuvre plus formée que dans les pays où il avait l'habitude de travailler. Il n'en restait pas moins que la situation en 1989 était très difficile, avec de profonds déséquilibres économiques, de la récession, du chômage, de l'inflation et des dettes. En 1994, le directeur général du FMI, Michel Camdessus disait à ce propos : « Jamais, depuis l'effort de reconstruction qui a suivi la deuxième guerre mondiale, le besoin n'a été aussi grand de coopérer à une entreprise commune riche de tant de promesses pour l'avenir de humanité ». Ainsi, face à cette mobilisation, dès 1989, le Fonds a apporté une aide active aux PECO qui se sont engagés dans la transition. Il a travaillé en partenariat avec les autorités de ces pays15(*) pour stabiliser et restructurer leur économie - particulièrement en les aidants à se doter du cadre juridique et institutionnel d'une économie de marché. Pour leur apporter des concours supplémentaires aux premières étapes de la transition, le FMI a crée en 1993 la Facilité pour la transformation systématique, qui a existé jusqu'en 1995.

Concrètement, les trois premiers pays à avoir bénéficié du soutien et de l'aide du FMI sont la Tchécoslovaquie, la Hongrie et la Pologne.

La dernière IFI à avoir oeuvré pour les PECO au moment de la transition, même si elle a eu un rôle moindre, est l'Organisation de Coopération et de Développement Economique. L'OCDE a succédé à l'Organisation Européenne de Coopération Economique (OECE) issue du Plan Marshall et établie en 1948 avec l'appui des Etats-Unis et du Canada, pour contribuer à la reconstruction des économies européennes après la Seconde Guerre Mondiale. Créée pour jouer un rôle équivalent à celui de l'OTAN sur le plan économique, l'OCDE a remplacé l'OECE en 1961 et, depuis, a pour mission d'aider les gouvernements à réaliser une croissance durable de l'économie et de l'emploi, ainsi qu'une progression du niveau de vie dans les 30 pays membres, tout en maintenant la stabilité financière, et à favoriser ainsi le développement de l'économie mondiale. Selon la Convention de l'OCDE, l'Organisation doit contribuer également à une « saine expansion économique dans les pays membres, ainsi que dans d'autres pays en voie de développement économique ».

L'OCDE est un forum unique au sein duquel les gouvernements de 30 démocraties (parmi lesquelles la Pologne, la Hongrie, la République Tchèque) de marché oeuvrent de concert pour relever les défis économiques, sociaux et de gouvernance liés à la mondialisation, ainsi que pour tirer parti des possibilités qu'elle offre. Les gouvernements y comparent donc leurs expériences en matière d'action publique, y cherchent des réponses à des problèmes communs, identifient les bonnes pratiques et coordonnent leurs politiques nationales et internationales. Elle élabore aussi des instruments, des décisions et des recommandations reconnus au niveau international dans des domaines où des accords multilatéraux s'imposent pour que les pays puissent progresser dans une économie mondialisée. Les pays non membres sont également invités à adhérer à ces accords et traités. Concernant les PECO, l'OCDE s'est inscrite, jusqu'aux années 1995/1996, dates auxquelles la République Tchèque (21 décembre 1995), la Pologne (22 novembre 1996) et la Hongrie (7 mai 1996) sont devenues membres (la République Slovaque a attendu le 14 décembre 2000) vis-à-vis de la région comme une institution de conseil et d'aide extérieure.

Les échanges de vues entre les pays membres de l'OCDE reposent sur des informations et des analyses fournies par son secrétariat à Paris. Le secrétariat recueille des données, suit les tendances, analyse et prévoit les évolutions économiques. C'est ainsi, qu'avant l'intégration de certains PECO, le secrétariat a beaucoup analysé les situations propres à chacun, les besoins et les perspectives. Il étudie également les changements qui affectent la société ou l'évolution de la situation concernant les échanges, l'environnement, l'agriculture, la technologie, la fiscalité et bien d'autres domaines. Dans son aspect « Développement », directement en relation avec l'aide à la transition des PECO, l'OCDE aide les gouvernements à oeuvrer pour la prospérité et à lutter contre la pauvreté en favorisant la croissance économique, la stabilité financière, les échanges et l'investissement. Elle veille à ce que le développement économique et social, ainsi que la protection de l'environnement avancent ensemble. Par ailleurs, et ce fut très utile dans le cas des PECO, l'OCDE est depuis plus de 40 ans, l'une des sources de données statistiques, économiques, sociales comparables parmi les plus fiables et les plus importantes au monde. Ses bases de données couvrent des domaines aussi divers que les comptes nationaux, les indicateurs économiques, la population active, les échanges, l'emploi, les migrations, l'éducation, l'énergie, la santé ou encore l'environnement.

Le fonctionnement de l'OCDE est relativement traditionnel. Les agents du secrétariat de l'OCDE, situé à Paris, réalisent des études et des analyses à la demande des 30 pays membres. Les représentants de ces pays membres se rencontrent et échangent des informations dans des comités spécialisés sur des questions clés, le pouvoir de décision revenant au Conseil de l'OCDE.

Le Conseil de l'OCDE est l'organe décisionnel de l'Organisation. Il se compose d'un représentant par pays membre, plus un représentant de la Commission Européenne. Le Conseil se réunit régulièrement au niveau des représentants permanents auprès de l'OCDE, et il prend des décisions par consensus. Une fois par an, le Conseil de l'OCDE se réunit au niveau des ministres pour discuter des grands problèmes du moment et fixer les priorités pour les travaux de l'OCDE. Les travaux dont l'exécution est demandée par le Conseil sont réalisés par le secrétariat. Ce dernier rassemble quelque 2 000 agents concourant par leur travail aux activités des comités. Environ 700 économistes, juristes, scientifiques et autres spécialistes, répartis dans 16 directions de substance16(*), effectuent toutes sortes de recherches et d'analyses. Le secrétariat est dirigé par un Secrétaire général assisté de quatre Secrétaires généraux adjoints. Le Secrétaire général préside également le Conseil, assurant un lien essentiel entre les délégations nationales et le secrétariat. Enfin, les représentants des 30 pays membres se réunissent dans les comités spécialisés pour débattre des idées et examiner les progrès réalisés dans des domaines précis de l'action des pouvoirs publics. L'OCDE compte environ 200 comités, groupes de travail et groupes d'experts. Chaque année, près de 4 000 hauts fonctionnaires des administrations nationales participent à des réunions de comités de l'OCDE pour examiner les travaux effectués par le secrétariat, y contribuer et en suggérer de nouveaux. Concernant le financement de l'Organisation, les 30 pays membres y participent. Les contributions nationales au budget annuel sont calculées à partir d'une formule qui dépend de la taille de l'économie de chacun des pays membres. Les Etats-Unis, qui financent environ 25% du budget, sont le contributeur le plus important, suivis par le Japon. Avec l'approbation du Conseil, les pays peuvent également apporter leurs contributions de manière distincte à des programmes ou des résultats particuliers qui ne sont pas financés partir du budget de base.

L'OCDE fournit donc un cadre de réflexion et de discussion fondé sur des recherches et des analyses. Ce cadre aide les gouvernements à déterminer une stratégie qui pourra déboucher sur un accord formel entre les pays membres, ou être mise en oeuvre par des institutions nationales ou dans d'autres enceintes internationales. A la différence des autres IFI ayant oeuvré pour les PECO, l'OCDE n'accorde pas de financements.

Parmi les structures de travail de l'OCDE, deux organes méritent que l'on s'arrête plus longuement, même si presque toutes les directions ont à un moment ou l'autre travaillé pour les PECO dans leur transition. Le premier organe est celle du développement, le CAD (Comité d'aide au développement), celle-là même qui a défini le concept d'aide au développement. La spécificité de cet organe est qu'il part du principe que les pays en développement / transition sont eux-mêmes responsables de leur développement. Le CAD réfléchit donc à la manière dont la coopération internationale peut contribuer à renforcer la capacité de ces pays à participer à l'économie mondiale, et ainsi relever leurs défis. Le deuxième organe très général est le département des affaires économiques qui examine l'évolution économique et financière des pays de l'OCDE et de certains pays non-membres. Il fournit un cadre global pour identifier les priorités structurelles qui requièrent l'attention des gouvernements. Il évalue les incidences d'un large éventail de questions structurelles (par exemple les migrations, les politiques du marché du travail, les dépenses publiques, les systèmes d'enseignement et de santé, l'innovation, la concurrence sur les marchés de produits et l'évolution des marchés financiers, les obstacles aux échanges internationaux et à l'investissement direct étranger, ainsi que les effets de la mondialisation) du point de vue de l'ensemble de l'économie, en s'appuyant sur les travaux d'un certain nombre de comités spécialisés de l'OCDE.

Ainsi, l'OCDE est différente, tant dans ses objectifs, que dans sa nature, aux autres IFI. Ce n'est ni une Banque, comme la BEI ou la Banque Mondiale, ni une organisation conseillant les politiques macro-économiques comme le FMI, ni une institution de crédit ou de soutien financier à des projets microéconomiques comme le programme PHARE ou la BERD. Cependant, cette position d'observateur a permit à l'OCDE d'oeuvrer significativement pour les PECO en examinant leurs situations de manière neutre.

2/ DES DEFIS RELEVES, MAIS EGALEMENT DES INSUFFISANCES

A/ Des efforts de grande ampleur de tous les IFI

Comme nous l'avons vu, les IFI se caractérisent par une diversité relativement grande qui a sans aucun doute constituée une force pour appréhender le défi de la transition des pays d'Europe centrale et orientale. La complexité des problèmes posés nécessitait des IFI qu'elles puissent apporter des réponses variées. Cette variété a été apporté par les IFI, tant dans la concentration de leurs travaux que dans les moyens mis en oeuvre et les types de réponses proposés aux gouvernements des PECO. Ainsi, de réels efforts ont été relevés par les observateurs, notamment en ce qui concerne les sommes investies, l'apport technique et les observations et rapports publiés par les experts des IFI dans l'espoir d'améliorer certaines situations nationales.

Concernant les sommes investies, données ou prêtées aux PECO pour les aider à surmonter la transition, il est très difficile, voire impossible de donner un chiffre précis qui soit indiscutable. En effet, la définition mouvante de l'aide, la variété des donateurs, et les formes hétérogènes de l'aide rendent sa mesure exacte impossible. Aucune mesure globale officielle n'a été réalisée pour la totalité de la décennie 1990. Pour la période 1990-1995, une approximation du montant cumulé total de l'appui occidental aux PECO avoisinerait les 86,4 milliards d'euros selon la Commission Européenne. 13,3 milliards viendraient de la Communauté Européenne à travers le programme PHARE principalement, 51,7 milliards d'aides bilatérales et 21,4 milliards provenant des autres IFI. Selon l'OCDE, l'aide a atteint 107 milliards de dollars entre 1990 et 1994, ce qui ne concorde pas avec la somme précédemment citée. Ces deux sommes prennent en compte l'ensemble de l'aide venant de l'Ouest et pas seulement des IFI. Selon l'OCDE, la somme provenant des IFI pour la même période est de 26 milliards de dollars. Selon les chiffres du FMI, pour la période 1989-1993, l'Ouest semble s'être engagée à hauteur de 70,4 milliards de dollars, avec 20 milliards venant des IFI. Comme nous l'avons précédemment vu, le FMI et la Commission Européenne semblent avoir fourni environ les trois-quarts de l'ensemble des ressources multilatérales accordées aux PECO, et la Banque Mondiale et la BERD, la quasi-totalité de ce qui reste. Environ 1/3 de l'aide occidentale dans son ensemble (IFI + aide bilatérale) est composé de dons. De tous les donateurs du G24, c'est l'UE, à travers le programme PHARE et la BEI, qui a fournit la plus forte part (près de 60% du total) devant les Etats-Unis. Les autres composantes de l'aide occidentale (2/3 du total), principalement des crédits à taux préférentiels, des crédits liés ainsi que l'assistance technique gratuite ou non, viennent principalement des IFI.

Concernant l'UE, elle représente sur l'ensemble de la période, environ la moitié de l'aide (avec la BEI par laquelle est passée environ 10 milliards d'ECU). Sur dix ans (1990 à 1999), la Commission de Bruxelles a engagé au total 10,89 milliards d'euros en faveur des PECO dans le cadre du programme PHARE seulement. De son côté, la BEI a accordé des prêts aux PECO pour un montant total de 8 milliards de dollars (période 1990-1998).

En dix ans (1991-2000), la BERD a elle engagé environ 12 milliards d'euros. A titre d'exemple, l'engagement net de la Banque en Hongrie et Pologne, de 1991 à 2005 d'élève à environ 5 milliards d'euros. La BERD s'est engagée spécifiquement au financement microéconomique sur la base de multitudes de projets. En 1992, 54 projets avaient été approuvés pour un montant total de 1,46 milliards de dollars.

La Banque Mondiale, qui semble s'être engagé jusqu'en 1992 pour un montant au moins égal à 7,5 milliards de dollars, et le FMI ont ouvert des financements spécialement importants pour le support des programmes de stabilisation de la balance des paiements. La moitié de leur contribution totale représente des crédits du FMI en soutien à ces programmes de stabilisation macro-économique.

Concernant l'apport technique, il a été très actif durant la période de transition. Les IFI ont envoyé leurs experts dans tous les PECO qui le souhaitaient. L'aide technique a indéniablement tenu un rôle moteur dans toutes les étapes de la transition, même si au départ, l'aide à la balance des paiements et à la stabilisation ont été plus importantes. Au sein de l'assistance technique, deux domaines ont été particulièrement importants : le secteur financier et la privatisation. Le programme PHARE et le FMI ont sans doute été les plus actifs dans ce domaine. Le FMI offre à ses pays membres une assistance technique et une formation de vaste portée dans le domaine de la gestion macroéconomique principalement et les PECO en ont beaucoup profité tout au long des années 1990 et continuent d'en profiter aujourd'hui. Cette assistance a prit la forme de missions effectuées par des membres de divers départements de l'institution, ainsi que par des consultants et experts externes.

Un autre aspect du travail des IFI au moment de la transition relève davantage de l'observation. Ce dernier aspect a été très important et continue de l'être à travers la multitude de rapports, analyses stratégiques et autres études menés par les IFI et leurs experts le plus souvent dépêchés sur place. Nous verrons ultérieurement un exemple de ce travail à travers une étude de la Banque Mondiale commandée par le gouvernement polonais sur la corruption dans le pays.

B/ Les IFI ont contribué à l'amélioration sensible de certaines situations

Il est indéniable que les IFI ont massivement contribué à l'amélioration sensible de nombreuses situations et ont souvent crée les conditions du succès qu'ont pu connaître les PECO. Cependant, il est difficile de statuer précisément sur la valeur ajouté apportée par les IFI. Quelle aurait été la situation si les PECO n'avaient pas bénéficié de l'aide des IFI ? Pour répondre à cette question, nous pouvons nous fonder sur l'évolution des situations propres aux PECO et sur les communications émanant directement des IFI, et plus particulièrement de la BEI. Les observateurs, qu'ils soient occidentaux ou originaires de l'Est, se sont davantage risqués à exposer les travers et insuffisances plutôt que les succès et apports.

Les bouleversements politiques intervenus fin 1989 ont amené la communauté internationale, à travers leurs IFI, à intervenir très vite pour soutenir la volonté des PECO de mettre en place des institutions démocratiques face à une situation économique souvent grave, un manque d'infrastructures de base efficaces, un tissu industriel et des services largement obsolètes et inefficaces, et un environnement dégradé. Tandis que la Communauté Européenne mettait en route le programme PHARE, la BEI rappelle dans son rapport annuel de 1993, que suite aux décisions des instances communautaires et de son Conseil des Gouverneurs, elle démarrait en 1990 l'octroi de financement en faveur d'investissements prioritaires à hauteur d'un milliard d'ECU. Dans les pays de la zone, la BEI a fortement contribué au renforcement des infrastructures de communication, et en particulier à celles assurant l'amélioration des liaisons avec la Communauté, suivant en cela les souhaits du Conseil Européen visant à soutenir les projets de réseaux transeuropéens impliquant ces pays (939 millions pour les télécommunications et les transports). La modernisation, la remise en état avec l'installation d'équipements antipollution de centrales électriques, le renforcement et la rationalisation des réseaux électriques et gaziers sont sans aucun doute de réelles réussites auxquelles a contribué la BEI. Par ailleurs, cette dernière a soutenu des projets industriels, agricoles et des services de tailles diverses, directement ou à travers des prêts globaux. Afin de favoriser la transition vers l'économie de marché et l'établissement de partenariat entre firmes de ces pays et de la Communauté, elle a financé des opérations au travers de « joint ventures » impliquant des sociétés de divers pays de la Communauté. Enfin, la BEI a nettement contribué au développement des marchés financiers locaux en lançant des emprunts dans des monnaies des PECO. Cette stratégie a contribué à l'efficacité accrue des marchés concernés, tout en acheminant l'épargne vers des produits productifs pour lesquels des financements en monnaie locale des pays concernés étaient demandés afin de minimiser le risque de change supporté par les promoteurs. La BEI a lancé des emprunts en couronnes tchèques et a mis en place en 1997 un mécanisme de financement sous forme de notes à moyen terme libellés en forint hongrois. Par ce mécanisme, la Banque a pu être présente sur le marché domestique de la Hongrie et de la République Tchèque et d'établir ainsi des valeurs de référence à long terme pour ce segment du marché tout en aidant à canaliser une épargne locale vers des projets productifs. Elle a également emprunté sur l'euromarché des couronnes estoniennes et slovaques et des zlotys polonais. Ces obligations ont contribué à orienter de l'épargne occidentale vers la région. D'une manière générale, la Banque a pu, lorsque la législation nationale l'autorisait, proposer des crédits dans les monnaies locales et éliminer les risques de change pour les emprunteurs. C'est sans doute par ce type de crédits que la BEI a été la plus utile aux PECO dans leur phase de transition.

Les autres IFI ont communiqué moins précisément sur les apports essentiels de leur présence pendant la transition, et sur les fruits de leur aide. Dans un rapport sur la transition économique des PECO après dix ans de travail17(*), le FMI se veut très prudent par exemple. Selon l'expert Stanley Fisher, l'aide occidentale a indéniablement apporté de l'expérience et des fonds indispensables pour les réformes de la première heure. Les IFI auraient aidé les PECO le plus significativement dans les premières années de la stabilisation macroéconomique. La question de savoir des aides plus nombreuses auraient davantage apporté aux PECO ne peut trouver de réponse. Ce constat de Stanley Fisher illustre la difficulté qu'il y a à évaluer la valeur ajouté des IFI dans le processus. La croissance a sans doute été encouragée et facilitée par les investissements, dons et crédits des IFI mais uniquement dans les pays qui avaient préalablement réussi leurs réformes de stabilisation macroéconomique. Ces pays ont dans l'ensemble connu des cycles économiques vertueux dans les premières années de la transition, grâce au travail de FMI, et sur la durée des IFI occidentales.

Les rapports annuels du FMI nous renseignent quelque peu. Dans le rapport de 1997 par exemple, le rapport insiste, pour la Hongrie, sur l'amélioration sensible de la situation macroéconomique grâce au « programme de stabilisation » appliqué par les autorités et conseillé par le FMI. Le rapport évoque l'amélioration de l'équilibre de la balance des paiements, l'austérité budgétaire, l'accélération des réformes structurelles, autant de progrès qui représentent exactement les domaines de compétences du FMI. Les privatisations ont aussi progressé, avec la vente de quelques grosses entreprises du service public. En ce qui concerne la Pologne également, le FMI, par l'intermédiaire de ses administrateurs18(*), se félicitait, en 1997, des résultats. Là encore, il faut noter l'importance accordée à la stabilisation macroéconomique dans les résultats (notamment les hausses de salaires, du PIB, de la croissance...) polonais. Ainsi, si l'on en croit les rapports annuels du FMI, qui contrairement à la BEI n'exposent pas clairement l'impact sur la région, le FMI a surtout réussi à stabiliser, dans un premier temps, mais avec par la suite des répercussions sur toute l'économie, la situation macroéconomique des PECO.

La BERD décrit de manière plus précise l'impact de ses interventions dans la région. Pour la Hongrie par exemple, la Banque se félicite de son impact sur la transition dans trois secteurs différents : le secteur de la finance, des infrastructures et de l'environnement, de l'entreprise et du cofinancement, et pour la République Tchèque, elle aurait également fortement contribué aux réformes menées dans les trois mêmes secteurs. Si l'on en croit ses communications, la BERD a supporté la réforme du secteur financier en Hongrie depuis 1994 en supportant la privatisation et l'implication d'investisseurs étrangers stratégiques. La BERD s'est engagé dans quatre banques majeures de Hongrie et a pu élaborer de nouveaux instruments de crédits alors inconnus dans la région. Elle a par ailleurs contribué à la réforme du droit financier et à l'établissement d'un système de recensement bancaire centralisé. En République Tchèque, la Banque a joué un rôle significatif dans la privatisation des deux plus importantes banques nationales (Ceska Sporitelna et CSOB). Dans le secteur structurel et environnemental, la BERD a joué un rôle clé en Hongrie, d'abord par son implication dans les infrastructures de transports qu'elle a contribué à améliorer. Elle a aussi promu la privatisation d'une société de gestion des eaux usagées et a amélioré les standards environnementaux du pays. En République Tchèque, la BERD semble avoir joué un rôle moindre dans le secteur des transports et de l'environnement. Elle a participé à titre minoritaire à la construction d'une autoroute en 1995 et a financé un projet municipal de gestion des eaux. Dans le secteur de l'entreprise, la BERD a supporté de nombreuses PME et PMI, a aidé sensiblement aux privatisations en Hongrie et République Tchèque. En Hongrie, elle a encouragé et participé à la privatisation de l'opérateur national (Matav, désormais Magyar Telekom) et à l'émergence progressive d'un concurrent (Vivendi Telecom Hungary, désormais Invitel). Ainsi, la BERD se félicité d'avoir été à l'origine de l'un des réseaux de télécommunication les plus compétitif et décentralisés dans la région. En République Tchèque, la Banque a beaucoup attiré les investissements étrangers dans l'industrie et l'agriculture (Cokoladovny, Sugar, Sepap, Barum). Elle s'est également spécialisée dans l'aide aux entreprises (généralement des PME locales) en faillite, en finançant elle-même et en encourageant les IDE. La Banque s'est également investit dans l'immobilier et l'hôtellerie en République Tchèque où elle a obtenu des résultats sensibles. En conclusion pour la Hongrie, la BERD prétend donc avoir bien compris l'environnement économique du pays et avoir ainsi pu concentrée ses efforts sur des secteurs bien choisis. Pour la République Tchèque, la BERD a également connu des réussites notables.

C/ Cependant, certains travers n'ont pu être évités

Malgré tous les efforts fournis par les IFI, leur implication et les résultats obtenus, il n'en reste pas moins que de nombreux travers et défauts ont régulièrement été relevés par les observateurs, et parfois par les IFI elles-mêmes. Trois des observateurs les plus avisés du phénomène de transition des PECO, et particulièrement de l'influence et du rôle de l'Ouest dans cette dernière ont mis l'accent sur ces insuffisances.

Parmi eux, Marie Lavigne évoque différents défauts qu'elle attribue à l'assistance en 1999. Elle en dénombre trois principaux.

Tout d'abord elle déplore l'ambiguïté du concept d'assistance. En effet, de nombreuses questions se posent sur le concept, et cela quelque soit la définition retenue, large ou étroite. Que retient-on ? Quelles actions d'aide ont été retenues dans telle ou telle étude ? En plus de ces questions, en soulevant cette ambiguïté, Marie Lavigne pose la question du réel bénéficiaire de l'aide. En effet, même en excluant les IDE, « qui aide qui » ? En observant de plus près, Marie Lavigne se demande si ce n'est pas l'IFI, ou l'économie de l'Ouest en général, qui profite le plus de l'aide. L'assistance technique par exemple, a régulièrement été considérée inadéquate. Elle aurait été fournie par des hommes et des institutions qui ne connaissaient pas le terrain et ses caractéristiques particulières. Ainsi, certains la voyaient comme un simple moyen d'obtenir des fonds aux cabinets de conseils occidentaux et aux IFI selon les cas. Par ailleurs, les investissements des IFI étaient parfois dirigés vers des projets dans des domaines plus intéressants pour l'Ouest que pour l'Est (par exemple les projets sur le nucléaire ou la protection de l'environnement).

Autre critique, Marie Lavigne déplore les conditionnalités posées par les IFI, et les conséquences parfois fâcheuses qu'elles peuvent entraîner. La notion de conditionnalité désigne la soumission d'un financement extérieur à l'engagement du pays bénéficiaire de mener une action définie par le pays/IFI donateur. Il existe différentes conditions pour obtenir les prêts accordés par les IFI. Le FMI possède une procédure standard en quatre étapes : tout d'abord, les autorités du pays récipiendaire doivent établir les mesures qu'elles sont prêtes à prendre pendant la période de négociation du prêt ; ensuite, le FMI leur fait parvenir une liste de mesures économique à prendre avant l'arrangement final ; après cela, différents objectifs doivent être atteints durant la période du prêt ; et enfin, il y a des révisions périodiques du programme financé. La conditionnalité du FMI est particulièrement importante car son « sceau d'approbation » a valeur de garantie pour d'autres IFI et investisseurs privés. Parfois donc, ce « sceau » peut être plus recherché que le crédit lui-même. La Hongrie par exemple en 1996 a signé un accord avec le FMI mais n'a pas profité du prêt et se justifia officiellement en expliquant son besoin de restaurer l'image du pays sur les marchés financiers internationaux et qu'elle espérait que le label FMI l'y aide. La BERD et la banque Mondiale ont leurs propres critères liés à la viabilité des investissements faits, ce qui les conduit à pousser à la libéralisation et à la montée des prix. Ainsi, Marie Lavigne critique le fait que, malgré leurs bonnes intentions, les IFI ne contrôlent pas toujours les effets qu'ont leurs prêts et surtout leur politique de conditionnalité qui est le plus souvent guidée par leur propre bonne santé financière.

Enfin, Marie Lavigne observe le manque d'efficacité dans la délivrance et l' « absorption » des sommes prêtées ou données. Cette critique vaut surtout pour la première période de la transition alors que le manque d'infrastructure, de gouvernements stables, de règles juridiques et économiques empêchaient parfois la bonne délivrance de l'aide. Les sommes allouées n'ont parfois pas été utilisées, ou encore ont-elles été détournées, ce qui a pu faire penser aux occidentaux que les besoins n'étaient pas si importants.

Au milieu de ce tableau noir, Marie Lavigne relève tout de même de nombreux motifs de satisfaction dans son ouvrage, ainsi que certaines recommandations que nous verrons ultérieurement.

Autre observateur de la transition, Jean Pisani-Ferry relève lui quatre grandes insuffisances ou travers dans un article daté de 199419(*).

La première question qu'il pose porte sur l' « excès de radicalisme ». En contraignant les PECO à une stabilisation brutale ou à une libéralisation sans précaution, certaines IFI ont souvent été tenues pour responsables des récessions qu'ont connus les pays en transition. Cependant, il n'est pas certain que le choix de la méthode radicale soit dû aux IFI mais plutôt aux gouvernements eux-mêmes désireux de rompre sans délai avec les anciens modèles. En effet, les IFI dans leur ensemble n'ont pas milité pour le gradualisme mais le choix de cette méthode, fait par certains pays nous l'avons vu, n'a pas empêché les IFI de les aider, même dans cette démarche. Ainsi, cette première critique a selon nous une portée limitée.

La deuxième question que pose Jean Pisani-Ferre porte sur l'excès (ou non) de macroéconomie. Au début de la transition les questions étaient quasi-exclusivement macroéconomiques et l'importance accordée aux problèmes structurels et microéconomiques était bien moindre. Selon l'auteur de l'article, les IFI ont été bercées par l'illusion qu'une stabilisation réussie aurait des effets immédiats. D'après lui, il y a deux explications à cette illusion. Tout d'abord, face à la complexité du problème, les experts ont fait appel à des schémas intellectuels déjà utilisés, par exemple lors des réformes en Amérique du Sud (nous noterons d'ailleurs à ce propos le grand nombre de rapports et notes qui mettent en commun ces deux « transitions »). Le problème de cette méthode est qu'elle sous-estimait le caractère structurel de la transition et appliquait donc une politique macroéconomique « orthodoxe » ou « passe-partout » dans un contexte microéconomique non-standard, et même particulièrement spécifique. La deuxième raison qui peut expliquer cette illusion est d'ordre institutionnel. En effet, les occidentaux ont décidé que le leadership de l'assistance devait revenir au FMI et la coordination à la Communauté Européenne. Or, le FMI est une institution à visée macroéconomique, et les IFI qui se sont greffées au FMI n'ont pas suffisamment mis en avant les éléments structurels et l'importance du caractère microéconomique. Dès lors, la conditionnalité macroéconomique a tendu à l'hégémonie et a influencé plus que toute autre les décisions des dirigeants nationaux. Selon Jean Pisani-Ferry, les institutions davantage tournées vers la microéconomie devraient avoir plus d'importance et davantage faire entendre leur voix au sein du leadership de l'assistance.

La troisième critique qu'apporte Jean Pisani-Ferry est la sous-estimation de la dimension internationale du processus de transition. Les IFI n'auraient pas assez pris en compte l'effondrement du marché soviétique et ses conséquences directes sur la chute de la production dans les PECO. Le choc provoqué par la rupture des liens commerciaux avec l'URSS enregistré en 1991 représente 7 à 8% du PNB ex-ante en Hongrie et en Tchécoslovaquie. Si les IFI ne portent pas de responsabilité directe ici, l'approche qu'elles ont privilégié, pays par pays, n'a pas favorisé la coopération régionale, et donc la potentielle poursuite des échanges commerciaux régionaux qui aurait sans doute amoindrit le choc entraîné par la rupture des liens avec l'URSS. Sans le vouloir, les IFI ont sans doute favorisé la dissolution des relations commerciales traditionnelles en laissant espérer à chaque pays qu'il pourrait compenser à l'Ouest ce qu'il perdrait à l'Est. SI cette critique nous paraît effectivement valable, nous nous devons de la pondérer. Notre mémoire de Master 1 (« La coopération entre PECO dans les années 1990 »), nous a apprit qu'il y a tout de même eu une prise de conscience de ce problème dans les PECO, tant d'un point de vue politique (Groupe de Visegrad) qu'économique avec la création d'un marché commun à l'Est (CEFTA). Cependant, nous avions déjà posé la question du rôle des organisations internationales dans cette coopération régionale, notamment de la Communauté Européenne qui a négocié bilatéralement les adhésions, poussant les PECO à une concurrence et non à la coopération.

Le quatrième problème soulevé par Jean Pisani-Ferry est le manque de coordination de l'assistance, à la fois entre donneurs, et entre bénéficiaires. L'assistance est gérée par au moins six institutions et donc très différente par exemple du Plan Marshall dont seuls les Etats-Unis détenaient la gestion. Cette accumulation a entrainé une multiplication des programmes, agences et fut parfois source de rivalité entre les IFI, mais aussi de retards et gaspillages. Nous ne pouvons en vouloir aux IFI qui étaient légitimement guidées par leur culture et leur logique. Dès lors, si en principe, la Communauté Européenne devait assurer la coordination politique de l'assistance, dans les faits, cela a été très difficile. Aucun mandat sans ambiguïté n'a été donné par la communauté internationale qui n'a jamais pu s'entendre sur le partage du « fardeau » financier de l'assistance et sur la responsabilité de chacun. Ainsi, une nouvelle fois, il paraît dangereux de condamner trop rapidement les IFI pour ce travers qui semble davantage imputable à la communauté internationale, et en particulier aux grands décideurs et pourvoyeurs de fonds qu'étaient l'Europe, les Etats-Unis et le Japon.

Un autre observateur de la transition des PECO qui a émit des critiques sur l'assistance des IFI est le polonais Robert Zuzowski dans un ouvrage de 199820(*). Ce dernier émet une première critique général qui remonte à l'origine de l'assistance et au constat fait par les IFI qui a influencé le point de départ de l'assistance. Selon lui, les hommes politiques de l'Ouest ont pensé qu'un mélange entre assistance économique et encouragements verbaux suffiraient à garantir le succès de la transition. En effet, l'occidentalisation du tiers-monde n'ayant pas fonctionné, il n'y a pas de raison que celle de l'Est fonctionne mieux. A la question : « pourquoi tant d'observateurs de l'Ouest sont optimistes à propos de l'Est ? », Robert Zuzowski rappelle la réponse du magazine anglais The Economist : « pendant les années rouges, certains économistes auraient étudié l'économie de l'Ouest sous leurs bureaux garantissant le succès de celle-ci à l'Est ». Or, pour fonctionner de manière saine et correcte, une économie de marché moderne doit s'appuyer sur des institutions et des règles (droits de propriétés, règles économiques, supervision des marchés financiers et des banques...) ancrées depuis des siècles dans les mentalités et les habitudes de chacun, de l'ouvrier au patron, en passant par le politique ; la simple connaissance ne suffit pas. Jusqu'en 1991, aucun des PECO (à l'exception peut-être de la Tchécoslovaquie) n'avait en sa possession ces structures. En plus, les règles du jeu du monde économique occidental sont faites et gérées par des hommes et des institutions de l'Ouest qui ne s'étaient jamais intéressés aux PECO jusque là. Robert Zuzowski rappelle que lorsque l'Ouest est graduellement passé d'un système féodale à un système de démocratie libéral et d'économie de marché, l'Est n'a pas suivit ce processus. Ainsi, c'est bien la sous-estimation du facteur historique et structurel (encore une fois) qui pousse Robert Zuzowski à émettre une telle critique. L'opinion pensait que l'unique élément qui manquait à l'Est était le capital. Le corollaire de cette pensée était l'ouverture des prêts et des crédits à l'Europe de l'Est. Seulement, en ouvrant ces possibilités, l'Est s'est dangereusement endetté, tout comme le tiers-monde. Certes, ce type d'assistance a pu fonctionner dans certains cas, par exemple l'aide américaine à l'Europe de l'Ouest et au Japon pour soutenir leur reconstruction. La validité de ces exemples cependant est détruite par leur principal caractéristique : « reconstruction ». Nous étions alors dans des contextes de reconstruction où les pays aidés avaient l'expérience de l'économie de marché et connaissaient le fonctionnement des marchés qu'ils avaient parfois même contribué à instaurer. Tchécoslovaquie à part, la tâche des IFI à l'Est n'était pas de reconstruire un capitalisme anéanti mais bien d'en construire les modalités et de le mettre en place pour la première fois. Ainsi, selon l'auteur polonais, les IFI ont mal évalué la tâche qui leur incombait et les conséquences sont graves. En effet, Zuzowski voit dans les chutes de production, l'hyperinflation qu'ont pu connaître les PECO durant leur transition des conséquences directes de cette erreur de jugement de l'Ouest.

Quatrième observateur, et le dernier que nous citerons, à avoir émit des critiques sur la manière dont s'est organisé l'assistance est le Français Assen Slim21(*).

Nous passerons rapidement sur les deux premières limites qu'expose Assen Slim : l'impossible recensement des aides protéiformes dû à la multiplicité des donneurs et des aides (assistance humanitaire, prêts, investissements, crédits, réduction ou rééchelonnement de dettes, dons, assistance technique, formation...), problème important mais sur lequel nous nous sommes déjà arrêtés, tout comme la deuxième critique qui relève des montants impossibles à chiffrer. En effet, comme nous l'avons évoqué également, le caractère vague de la définition de l'aide, la multiplicité des donateurs, et les formes hétérogènes d'aides rendent la mesure financière exacte impossible.

Après avoir rappelé lui-aussi les effets positifs nombreux de l'assistance occidentale, Assen Slim expose deux grandes familles de limites : les limites inhérentes à l'aide (sans tenir compte des spécificités des pays aidés) et les limites liées à son attribution aux PECO. Parmi les limites inhérentes à l'aide, Assen Slim en distingue deux types.

La première limite inhérente à l'aide porte sur la lourdeur des conditionnalités liées. Ainsi, sa critique est d'un ordre différent que celle de Marie Lavigne sur ce même problème de la conditionnalité. Dans la pratique, la conditionnalité (surtout celle du FMI), impose aux PECO des mesures d'austérité et de réduction budgétaire (réduction des dépenses publiques, freinage de l'absorption par l'intermédiaire du crédit) ainsi que des mesures d'ajustement structurel (diminution du rôle de l'Etat, réduction du déficit du commerce extérieur...). A ces conditions générales, s'ajoutent celles spécifiques à chaque donneur. Ainsi l'UE subordonne son action en faveur de la balance des paiements des PECO à la mise en place d'une discipline financière des plus strictes. La BERD, quant à elle, établit en plus des conditions économiques traditionnelles, un lien explicite entre son action et le respect des droits civiques et politiques. Selon Assen Slim, l'empilement de conditionnalités pose un problème de coordination. Nous revenons donc à cette critique émise par Jean Pisani-Ferry. Toujours selon Assen Slim, ces conditions sont souvent contradictoires et incohérentes et peuvent donc empêcher les PECO d'identifier clairement la stratégie à suivre. Seule l'UE semble faire les efforts nécessaires afin d'accorder ces conditionnalités à celles des autres IFI. Par ailleurs, au-delà de ce problème de coordination, la multiplication des conditionnalités entraînerait une surdétermination des politiques économiques nationales des pays bénéficiaires. En effet, l'addition de conditions hétérogène a parfois pu ligoter les décideurs politiques nationaux, même si cette affirmation semble légèrement exagérer le trait.

La deuxième grande limite inhérente à l'aide que pose Assen Slim porte su la centralisation excessive des procédures d'attribution qui s'explique par la volonté des IFI d'exercer un contrôle strict sur les capitaux engagés. Le programme PHARE, par exemple est directement géré par la Commission à Bruxelles. Cette centralisation semble entraîner, selon Assen Slim, des délais excessifs entre l'élaboration des programmes indicatifs et l'attribution des premiers financements. En effet, le retard moyen de décaissement des fonds engagés est progressivement passé de 2 ans en 1991 à 3 ans en 1995 pour atteindre 5 ans en 1999. Dans certaines IFI, certains projets, l'arriéré d'engagement en cours atteindrait 8,5 années de paiement. Cependant, afin de nuancer ce propos, nous nous permettons de rappeler qu'en 1995, la Cour des comptes de l'UE avait reproché à PHARE son manque de transparence et surtout la perte de contrôle de certains projets importants.

Assen Slim passe ensuite aux critiques liées aux attributions des aides aux PECO.

La première critique porte sur la non prise en compte des écarts de développement au sein des PECO par les IFI. En effet, les PECO les plus riches ont paradoxalement reçu le plus d'aide (Hongrie, République Tchèque et Pologne).

En deuxième lieu, les conditions liées à l'aide occidentale seraient souvent inadaptées à des pays en transition. La mise en oeuvre de politique de stabilisation par exemple, comme condition sine qua non pour bénéficier de l'aide apparaît discutable. En effet, ce type de politique, dans un contexte comme celui des PECO en transition, affecte notoirement la production, dans la mesure où les entreprises ont recours au crédit pour financer leurs activités, à fortiori lorsque les marchés financiers sont peu ou pas développés comme c'est le cas dans les PECO. Dès lors la principale critique qu'émet Assen Slim s'adresse au FMI qui sous-estimerait systématiquement l'impact d'une variation de crédit sur la production et surestimerait cet impact sur l'inflation et la balance des paiements.

Enfin, l'aide occidentale, et en particulier celle de l'UE, serait inadaptée à des pays en voie d'adhésion à l'UE. La solidarité peut être un élément fortement intégrateur entre pays mais seulement à condition qu'elle ait un effet significatif sur la convergence des niveaux de développement. Si cette convergence n'a pas lieu, l'effet peut même être opposé. Or, pour qu'un tel rattrapage se produise dans le milieu des années 1990 entre les PECO et l'UE, il aurait fallu une aide extérieure sans commune mesure avec celle que les PECO ont obtenu.

Les critiques, insuffisances et travers que certains observateurs ont pu relever illustrent avant tout la complexité des rapports entre IFI et PECO. En effet nombre de ces critiques ne doivent leur existence qu'à l'implication financière importante des IFI, d'autres ne leurs sont pas imputables, et d'autres qui relèvent souvent d'anciennes habitudes sociales et économiques occidentales dont les pays leaders de la communauté internationale ne se sont pas défaits.

Chap. 3

Dix-huit ans après, quelle part de responsabilité accorder aux IFI dans les destins contrastés des PECO ?

1. L'ADAPTABILITE DES IFI

A/ Une adaptabilité aux besoins de chaque pays?

Afin de mieux cerner la part de responsabilité imputable aux PECO, il est nécessaire d'étudier la manière dont les IFI ont géré deux facteurs : d'une part les différences entre PECO ; d'autre part les gouvernements nationaux. En d'autres termes, les IFI se sont-elles adaptées aux spécificités propres à chaque pays et à leurs besoins et dans quelle mesure le facteur politique a-t-il joué et influencé leur action ?

Nous avons vu que parmi les nombreuses critiques énoncées, l'une d'elle déplorait l'influence de l'Ouest dans les positions défendues par les IFI, et en particulier par la Banque Mondiale. C'est dans cette optique que la question du jeu d'influence se pose.

La BERD offre des renseignements précis sur l'affectation de ses fonds pays par pays. L'étude comparée (nous comparerons ici la République Tchèque et la Hongrie) montre que l'institution financière européenne s'adapte aux besoins propres à chacun de ces deux pays. Comme nous l'avons vu au moment d'analyser l'impact des IFI sur la transition, la BERD par exemple, si elle a ciblé les mêmes secteurs dans les deux pays, ne l'a pas fait de la même manière systématiquement. Jusqu'au 30 septembre 2005, la BERD a financé 56 projets en Hongrie pour un total de 800 millions d'Euros et en a financé 62 en République tchèque pour un total de 488 millions. A la vue des répartitions, nous apercevons des similitudes qui sont dues à la proximité des besoins entre les deux pays. Le secteur ayant reçu le plus de fonds est le même pour les deux pays : le secteur financier avec respectivement 30% (Hongrie) et 39% (République Tchèque) du total. Il est aussi intéressant de noter qu'au sein de ce secteur, ce sont les fonds d'investissements qui ont reçu le plus d'aide (16% du total pour la Hongrie et 22% pour la République Tchèque). Les différences de répartition se font ensuite. Les infrastructures ont reçu le plus de fonds après le secteur financier en Hongrie (13%, soit 389 millions d'euros) alors qu'en République Tchèque, c'est le secteur industriel qui tient cette deuxième place (15%, soit 96,6 millions d'Euros). Quel constat faire de ces chiffres ? Les aides vont en premier lieu au secteur bancaire et financier, précisément celui susceptible de générer le plus d'argent, notamment pour l'Ouest. Pouvons-nous pour autant avancer que la BERD finance ce secteur sous l'influence de la communauté internationale avide de gains ? Non, car l'étude des situations initiales de la Hongrie et de la République Tchèque montre bien les besoins des deux pays dans ce domaine précis. Ensuite, il est clair que la Hongrie ne possédait pas le même niveau d'infrastructures que la République Tchèque et cela explique la répartition. Ainsi, dans ce cas précis de l'implication de la BERD dans deux importants PECO, tout porte à croire que l'IFI s'est parfaitement adaptée aux besoins (notamment structurels) des pays récipiendaires. Dans son autocritique, la BERD déclare même que ses apports ont reflété les besoins changeants de l'économie tchèque et ont su « relativement » bien y répondre. La question qui se pose maintenant dans un cas comme celui-ci, où les aides semblent avoir répondu aux besoins, est l'impact du/des gouvernement(s) en place. En République Tchèque, la Banque semble avoir traité avec le Ministère des Finances et celui de la Justice principalement. Les deux ministères semblent avoir mis des freins à l'instauration de réformes proposées par la BERD en raison d'un manque de consensus politique. En Hongrie, la BERD ne semble pas avoir rencontré de problèmes avec les gouvernements successifs, au contraire, elle insiste sur la bonne coopération entretenue avec les autorités locales en place.

Un autre exemple allant dans le sens du désintérêt de l'aide et de la prise en compte exclusive des besoins nationaux est la lutte contre la corruption menée particulièrement activement par la Banque Mondiale. Le gouvernement polonais a commandé un rapport à la Banque Mondiale en 1999 sur l'état général de la corruption dans le service public (le rapport exclut la corruption dans le secteur privé) et sur les moyens de la combattre. Cet exemple témoigne de la bonne volonté régnant des deux côtés. Après avoir rappelé les objectifs de la Banque en matière de corruption (minimiser son existence et ses effets afin qu'elle devienne une exception et non plus la règle, et inverser son équilibre : d'une activité à bas risque et hauts revenus à une activité hautement risquée et à bas revenus potentiels), évalué ses effets sur l'économie nationale (macroéconomique, réduction de la productivité et de la croissance, coûts pour la population et les pauvres en particulier et perte de confiance dans les institutions publiques), la Banque Mondiale présente le contexte polonais. La corruption y est décrit comme un « phénomène général »22(*), présent partout et en tout temps. Selon de nombreuses études internationales, la corruption dans les PECO est plus répandue que dans n'importe quel autre endroit au monde, et peut-être la pire, car impliquant souvent des violences physiques en plus des effets économiques23(*). Parmi les domaines publics où la corruption est la plus forte en Pologne (et sans doute plus importante que dans nombreux autres PECO), la haute administration semble la plus touchée. Le type de corruption le plus répandu dans la haute administration polonaise est le versement d'argent en échange de contrats publics ou de faveurs de toutes sortes ; défense / promotion / vote ou au contraire blocage d'une loi ou d'un amendement ; contrats publics accordés contre versement d'une somme d'argent ; manipulation d'une privatisation ; intervention dans l'affectation de concessions publiques, licences ou exemption de taxes ; conflit d'intérêt dans les nominations de dirigeants d'entreprises publiques ; renforcement illégitimes de droits de douanes à l'importation. Tous ces instruments de la corruption vont à l'encontre de la transition promue par les IFI mais en sont aussi la conséquence directe. En effet, alors que la Pologne était sous contrôle de l'URSS, la corruption n'existait presque pas. Dès lors que les soviétiques ont quitté le pouvoir, le pays, comme tous les autres PECO, s'est retrouvé sans aucune institution suffisamment solide pour contrôler et éviter de tels agissements. Par ailleurs, les privatisation en pagaille ont aiguisé les appétits de nombreux « jeunes loups » dans la région (comme nous l'avons vu dans le secteur de l'éducation), prêts à tout pour obtenir des concessions, des contrats ou encore d'anciennes entreprises publics à bas prix. Le rapport de la Banque Mondiale insiste également sur la corruption régnant dans le système judiciaire. Les sentences peuvent être achetées par l'intermédiaire de professionnels de la justice ou d'avocats. Après avoir identifié ces problèmes, la Banque Mondiale propose un programme de lutte contre la corruption. Elle recommande la création d'un petit groupe de personnalités hors de tout soupçon et influentes dans différents domaines qui pourraient ensemble répondre au défi de la corruption. La Banque propose que l'un de ses membres en fasse partie. Selon elle, certaines sources de la corruption pourraient être vaincues en améliorant l'aspect technique de différents mécanismes judiciaires, administratifs et financiers. Par exemple, la Banque propose une loi sur le financement des partis politiques et sur l'activité de lobbying. Enfin, la Banque insiste sur l'engagement de la société civile sans qui rien ne peut se faire dans la matière. C'est pourquoi elle propose une conférence publique réunissant différents représentants de la société civile (représentants du monde des affaires, des cultes, des ONG, du monde associatif, des médias et de l'éducation) afin de communiquer sur le problème, notamment d'informer sur les coûts exacts et les conséquences de la corruption au niveau national et international. En conclusion du rapport, la Banque Mondiale propose son aide au gouvernement polonais. Elle pourrait faire bénéficier le pays de son expérience dans le domaine, apporter une formation technique utile pour les réformes nécessaires. Cet exemple, sur lequel il nous a paru utile de s'attarder, illustre bien un aspect des rapports entre IFI et gouvernements. Ici, le travail est une nouvelle fois désintéressé et nul ne peut y voir la défense ou la promotion des intérêts de l'Ouest. Par ailleurs, la Banque répond, par définition puisque le rapport provient d'une commande du gouvernement, à un besoin crucial du pays : la lutte contre la corruption. Nous pourrions prendre de nombreux autres exemples témoignant d'un certain dévouement des IFI aux PECO qui en avaient besoin. Cependant, les nombreuses critiques émises par des observateurs avisés de la transition et du rôle des IFI nous ont également montré qu'il a pu exister des dérives et des insuffisances. Toujours est-il qu'au-delà de ces adaptations ciblées à des besoins souvent temporelles et structurelles, les IFI ont également suivi de grandes évolutions sur la durée qui ont également illustré une certaine adaptabilité.

B/ Les évolutions de stratégie

Ainsi, l'autre aspect de l'adaptabilité des IFI a été leur évolution dans le temps en fonction du contexte global de la région. Ces évolutions, contrairement aux adaptations que nous avons évoqué plus haut, ont davantage prit en compte les politiques des IFI elles-mêmes. Cependant, en raison de la diversité des IFI ayant travaillé pour les PECO, il est difficile d'extraire les mêmes phases pour toutes les IFI. En effet, suivant les IFI, les grandes phases ont pu sensiblement varié. Ainsi, si l'on peut observer deux ou trois grandes phases dans l'aide à la transition, la première d'entre elles diffère selon les IFI : de 1990 à 1993, l'aide à la transition débute, pour le programme PHARE par exemple, avec de l'assistance et du soutien, notamment humanitaire, et pour le FMI, avec une priorité accordée à la stabilisation macroéconomique.

Cette première phase marquée par les aspects macroéconomiques mérite que l'on s'y arrête. Elle a commencé avec la Pologne et la Hongrie (avant de continuer tout au long des années 1990 avec d'autres PECO, et c'est en cela que les différentes phases ne sont pas tout à fait délimitées, tant temporellement que géographiquement) avec deux différentes étapes : la stabilisation à proprement dite, puis la création de mesures structurelles afin de créer une économie de marché privée. La première étape (stabilisation) s'est décomposée comme suit : libéralisation des prix, rééquilibrage des comptes nationaux, mise en place d'une politique monétaire restrictive, politique de revenus visant à stopper la spirale inflationniste et enfin libéralisation du marché des exportations. La deuxième étape de cette première phase (création de mesures structurelles afin de créer une économie de marché privée) a comporté quatre différents aspects : le lancement des privatisations et le démantèlement des anciens monopoles d'Etat, la mise en place d'un environnement propice à l'économie de marché par des réformes dans le secteur bancaire et financier, le développement d'un nouveau système de sécurité sociale et enfin un audit complet du secteur industriel.

La deuxième phase a généralement été dévolue au renforcement des infrastructures législatives et juridiques afin de créer une économie de marché digne de ce nom.

Enfin, la troisième phase qui ne concerne pas toutes les IFI, débute en 1996 s'est concentrée sur l'aide à l'adhésion aux institutions européennes (PHARE, BEI, BERD).

Dans le cas du programme PHARE, trois phases doivent donc être distinguées : la première s'est concentrée sur l'aide et le soutien comme nous l'avons vu, et la seconde, sur les mesures législatives et réglementaires visant à créer une économie de marché. Ainsi, entre 1990 et 1993, les principales allocations sectorielles du programme se subdivisaient de telle manière : 337,7 millions d'ECU (soit 10,3%) pour l'aide humanitaire, alimentaire et d'urgence, 876,4 millions d'ECU (soit 26,7%) pour le secteur privé (restructuration, privatisation, PME, secteur financier, développement régional), 392,8 millions d'ECU (soit 12%) pour la restructuration agricole et 431 millions d'ECU (soit 13,1%) pour l'éducation, la formation et la recherche. Durant cette première phase, PHARE est donc intervenu dans la majorité des aspects de la transition, ayant un impact dans la vie économique, sociale et politique, autour de trois thèmes différents : les problèmes typiques de la transition, les problèmes de développement et les problèmes sociopolitiques. Les problèmes typiques regroupaient le soutien à la privatisation des biens publics, la résolution des problèmes de créances douteuses et les restructurations des entreprises d'Etat ainsi que le développement des structures de régulation des marchés et la réduction des interventions directes du pouvoir public dans les prises de décision économiques. Les problèmes de développement rassemblaient eux les investissements dans les entreprises privés, le développement rural et dans le capital humain et social (le plus souvent par le biais de la formation et de l'éducation). Enfin, les problèmes sociopolitiques regroupaient les réformes politiques et le renforcement du pouvoir des citoyens. Ainsi, jusqu'en 1993 (Conseil de Copenhague), le programme s'est concentré sur le développement à proprement dit. Durant cette période, les allocations directes se sont élevées à environ 3,2 milliards d'ECU. En 1993, après le Conseil de Copenhague, le programme est réorienté vers le « market expansion » et la phase 2 de l'aide, à savoir l'assistance aux réformes législatives et réglementaires propres au développement d'une économie de marché. Durant cette phase qui court jusqu'en 1996 environ, les allocations totales se sont élevées à 3,3 milliards d'ECU. L'aide humanitaire a sensiblement baissé pour n'atteindre que 180 millions d'ECU (soit 5,3% contre 10,3% entre 1990 et 1993), la restructuration agricole a subit la plus importante baisse avec 85,5 millions d'ECU (soit 2,6% contre 12% pour la période précédente). Les secteurs qui ont bénéficié le plus du changement de politique et de priorités du programme sont les suivants : infrastructures avec 1,2 milliards d'allocations entre 1993 et 1996 (soit 36,1% contre 8,5 entre 1990 et 1993) et les administrations, institutions publiques et législation avec 275, 2 millions d'ECU (soit 8,2%) contre 164,5 millions (soit 5%) entre 1990 et 1993. Si dès décembre 1994 au Conseil Européen d'Essen, PHARE a été sollicité par la Commission pour préparer l'aspect financier de la stratégie de pré-adhésion pour dix PECO, il est resté jusqu'en 1997-1998 un instrument d'aide à la transition avant tout, qui plus est pour les pays non associés. Au début de l'année 1998, PHARE change véritablement d'objectif et devient l'instrument d'aide aux candidats de l'Europe centrale et orientale souhaitant adhérer à l'UE. Depuis lors, chaque nouvelle étape du programme a confirmé ce rôle, notamment avec la mise en place de l'Agenda 2000. Cependant, si la finalité change, le moyen reste le même et l'objectif de réussir la transition était indispensable à l'adhésion. Ainsi, les nouvelles priorités sont restées du même ordre, à savoir la construction d'institutions solides avec l'adaptation et le renforcement des institutions démocratiques, de l'administration publique, et la formation de fonctionnaires et d'acteurs du secteur privé. Par ailleurs, le nouvel outil de PHARE pour mettre en oeuvre ces objectifs, et poursuivre son action dans le domaine économique a été le jumelage. Entre 1998 et 2001, plus de 475 projets de jumelages dans des domaines aussi variés que l'agriculture, l'environnement, les finances publiques, la justice ont vu le jour.

La BEI aussi sépare trois différentes étapes dans son aide aux PECO : de 1990 à 1993, de 1993 à 1997 et de 1997 à 2005. La BEI étant une banque de crédit, il ne peut y avoir de différence sur le fond entre ces trois étapes. Cependant, à travers les crédits accordés, la Banque a pu réviser sa stratégie, mais surtout changer d'échelle en ce qui concerne les sommes investies et prêtées. Au cours de ces trois grandes étapes de l'institution, les priorités ont peu évolué, au contraire des montants qui ont largement augmenté. Ainsi, de 1990 à 1993, les prêts de la BEI en Europe centrale et orientale ont atteint 1,6 milliards d'ECU et ont majoritairement porté sur les infrastructures de base dans les secteurs de l'énergie, des communications et surtout les transports avec 609 millions d'ECU. Durant cette période, sept PECO ont été concernés : la Pologne, la Hongrie, les Républiques Slovaque et Tchèque, la Roumanie et la Bulgarie. La période 1993 - 1997 a été différente d'abord par les montants engagés. En effet, plus de 5 milliards d'ECU ont été prêtés à sept PECO et aux trois pays baltes (Lettonie, Estonie, Lituanie). Les financements ont essentiellement concernés le domaine des infrastructures de télécommunications. La concentration dans ce dernier secteur peut déjà s'expliquer par les perspectives d'adhésion. En effet, des communications performantes et le prolongement des réseaux transeuropéens sont des préalables essentiels pour l'essor économique et l'intégration réussie dans l'Union. La troisième phase commencée en 1997 s'est directement inscrite dans la perspective d'adhésion des PECO à l'Union Européenne. Jusqu'en 2004, la BEI a donc beaucoup aidé les PECO désireux d'adhérer aux institutions européennes. Ainsi, la BEI a établit, en accord avec l'UE, une liste d'objectifs auxquels devaient répondre les pays candidats à travers leurs projets susceptibles d'être financés : « renforcement de la cohésion économique et sociale, soutien aux activités économiques concourant au développement économique des zones les moins favorisées ; promotion des investissements concourant au développement d'une société fondée sur la connaissance et l'innovation ; amélioration des infrastructures d'intérêt communautaire dans le domaine des transports, des télécommunications et du transfert d'énergie ; préservation de l'environnement et amélioration de la qualité de la vie, y compris par le recours aux énergies renouvelables ou alternatives ; sécurité de l'approvisionnement énergétique par l'utilisation rationnelle, la valorisation des ressources internes ou la diversification des importations ; amélioration de l'environnement financier des PME pour concourir à leur développement par le biais de prêts globaux, d'opérations de capital-risque du FEI24(*) et de garanties du FEI en faveur des PME »25(*). Ainsi, cette troisième étape de l'aide de la BEI aux PECO s'inscrit sans aucun doute dans l'optique de l'adhésion. Tous les objectifs de la Banque sont de financer des projets directement en lien avec ce processus. L'amélioration de l'environnement par exemple est l'un d'entre eux. Les candidats ont dû se conformer aux normes communautaires relatives à cette question cruciale de l'environnement. Pour les y aider, la Banque a par exemple accordé en 2001 seulement, 484 millions d'ECU de prêts pour le traitement des déchets municipaux et des eaux usées en Hongrie, des réseaux de distribution et d'assainissement en Pologne à Szczecin et à Lodz, en République Tchèque à Prague, et en Slovénie. Par ailleurs, l'autre thème qui aura finalement perduré et qui s'est imposé comme le fer de lance de la politique de soutien de la BEI a concerné les communications. En effet, un réseau de communication développé et conforme aux normes communautaires était perçu comme une condition essentielle et la priorité principale pour l'intégration réussie des pays candidats. C'est pourquoi tout au long de la période, le financement des liaisons ferroviaires et routières, des ports, des aéroports et du contrôle aérien ainsi que des réseaux de télécommunications ont accaparés les sommes les plus importantes. En 2000 par exemple, les financements d'infrastructures de communications ont atteint 1,5 milliards d'ECU.

Cependant, malgré ces efforts déployés par les IFI pour adapter leur ligne stratégique, à la fois aux besoins des PECO, mais aussi aux directions occidentales dont les intérêts peuvent être supérieurs, certains observateurs ont milité pour de plus importants changements dans la nature de l'aide en Europe centrale et orientale et ont parfois même élaboré de nouvelles stratégies complètes.

C/ Certains observateurs ont milité pour des réorganisations complètes de l'aide

Ce dernier élément peut induire un élément de doute sur la réelle adaptabilité des IFI aux PECO. En effet, certains observateurs avisés - parfois d'ailleurs les mêmes qui ont émis des critiques sur le fonctionnement et l'organisation de l'aide - ont fortement milité tout au long des années 1990 pour une réorganisation et une révision de l'aide des IFI aux PECO dans leur transition économique.

En 1999, Marie Lavigne26(*), à la suite des critiques émises sur les IFI, a proposé un certain nombre de recommandations pour accroître l'efficacité de l'assistance. Concernant la coordination de l'aide tout d'abord, Marie Lavigne insiste sur son impossibilité dans l'état actuelle des choses, avec l'UE censée la gérer en partenariat avec le FMI. Selon elle, de trop nombreux conflits d'intérêts et intérêts contradictoires sont alors rentrés en jeux, en témoigne une certaine incompatibilité comme nous l'avons préalablement souligné. Elle déplore la prise de contrôle implicite du FMI. En conséquence, sans l'exprimer clairement, Marie Lavigne propose une simple réduction du nombre d'IFI présents dans la région et aidant à la transition des PECO. Par ailleurs, Marie Lavigne a milité pour une baisse des aides directes sous fromes de dons au profit de formes plus traditionnelles d'investissements. Cependant, cette proposition semble légèrement en opposition avec le fait qu'elle déplorait également le manque de répartition des aides entre les PECO les moins avancés dans la transition et les autres plus dynamiques tels que la Pologne ou la Hongrie. En effet, selon nous, les investissements classiques qui s'attendent à des retours financiers et du profit auraient été nettement plus enclins à investir dans les PECO les plus riches et les plus développés qui garantissaient davantage de sécurité et potentiellement plus de revenus. Enfin, déplorant l'emprise du caractère macroéconomique sur le microéconomique (élément qu'elle explique par le leadership exercé par le FMI), elle a aussi milité pour un rééquilibrage entre ces deux aspects essentiels de la transition. Pour finir, Marie Lavigne pose même la question de la nécessité de l'assistance en 1999, alors que les PECO deviennent petit à petit des économies de marché « normales », excepté dans certains rares cas. En ce qui concerne le principal enjeu sur le long-terme, à savoir une croissance soutenue, les PECO ont besoin d'investissements, surtout dans le secteur privé. Certes, les IFI peuvent jouer ce rôle par le financement d'infrastructures (Banque Mondiale, BEI) ou par le cofinancement de projets privés (BERD), mais Marie Lavigne se demande si des investisseurs privés ne seraient pas plus aptes à le faire. Le second enjeu qui se pose selon elle à la fin de la décennie est l'adhésion aux institutions européennes. Dès lors, le besoin de soutien financier change de main. Le rôle de la Banque Mondiale et du FMI évolue. Alors que cette dernière institution a été la source majeure d'inspiration au début de la transition, à travers le « consensus de Washington », à partir de 1997, elle ne tient plus cette place de leader auprès des PECO. En 1998, il est d'ailleurs intéressant de noter qu'il n'y avait plus que deux pays d'Europe de l'Est sur la liste du FMI : la Roumanie et la Bulgarie, et deux pays baltes : l'Estonie et la Lettonie. Cependant, ne plus être dans cette liste n'a pas libéré les autres des évaluations du FMI. Ainsi, en 1998, la Hongrie était rappelée à l'ordre pour son taux d'inflation trop élevé. Mi-avril 1997, le premier directeur général adjoint du FMI, Stanley Fisher critiquait dans une lettre adressée à Vaclav Klaus, alors premier Ministre, l'ensemble des réformes adoptées et pressait le gouvernement à mettre en oeuvre des mesures plus radicales. Cependant, si les IFI doivent rester, Marie Lavigne ne souhaite pas cette réduction du rôle du FMI, au contraire. En plus de ce rôle de conseil, le FMI devrait selon elle encore financer certains pays. Lesquels ? Tout d'abord, et c'était le cas de la Roumanie et de la Bulgarie en 1999, les PECO rencontrant de sérieuses difficultés macroéconomiques et en même temps un retard dans leur processus de transition. Par la suite, elle milite pour un nouveau concept d'assistance davantage tourné vers le partenariat, déjà officialisé à la réunion du FMI à Madrid en 1994 et répété en octobre 1996 à Washington. Ce nouveau concept doit mettre en avant le dialogue qui doit se substituer à l'assistance directe. La Banque Mondiale, elle, semblerait selon Marie Lavigne se concentrer sur les enjeux structurels qui sont de plus en plus importants.

En 1998, Robert Zuzowski27(*) a lui aussi posé la question du maintien de l'assistance ; « Pourquoi devrions-nous nous soucier de ces pays ? Pour quelle raison les contribuables occidentaux devraient-ils supporter les réformes en Europe centrale et orientale ? Est-ce un devoir moral pour l'Ouest ? Si non, quelle(s) raison(s) donner - politique, militaire, économique, ou peut-être une combinaison de toutes ces raisons ? Par ailleurs, l'Ouest a-t-il intérêt à ce que l'Est se développe ? » Les défenseurs de l'aide en occident argumentent souvent en expliquant que le maintien de la démocratie à l'Est est dans l'intérêt de l'Ouest, en expliquant que l'Ouest doit s'assurer que les PECO ne redeviendront jamais des possessions de la Russie afin de garantir un certain équilibre militaire et politico-stratégique. La raison économique du maintien de l'aide se situe davantage en terme humains. Si l'Est ne se développe pas, les classes défavorisées immigreront en masse à l'Ouest, qui plus est après l'adhésion à l'UE. Or, les pays occidentaux de l'UE font déjà face à des niveaux de chômage élevés. Un trop grand flux de « réfugiés économiques » pourraient avoir de graves conséquences politiques. L'un d'elles pourraient être une montée du sentiment nationaliste, déjà très présent dans les PECO. Afin d'éviter ces problèmes, il semble donc important de continuer à aider les PECO à se développer eux-mêmes. Cependant, ce constat présuppose de l'impossibilité des PECO à se développer par eux-mêmes et qu'ils auraient besoin de l'aide extérieure.

Est-ce vrai ? Les opinions varient beaucoup sur cette question, spécialement à l'Ouest. Plusieurs observateurs occidentaux insistent sur le fait que l'Est doit s'armer, tant au niveau politique par la démocratie, qu'économiquement avec l'économie de marché, d'institutions occidentales, et ne peut donc pas faire l'impasse sur les conseils et l'aide occidentale. Il s'en suit que l'Ouest, en inspirateur de modèle, ne peut échapper à sa responsabilité. Dès lors, les mêmes plaident pour la création d'un libre marché avec l'Est, pas seulement pour les produits industriels, mais aussi agricoles, et pour que l'Ouest ouvre ses frontières à tous les habitants de la région afin de créer un « espace entièrement unit et intégré ». Ainsi, dans cette vision, le succès sera effectif pour l'Est lorsque les PECO auront atteint les standards de l'Ouest. Cependant, selon Robert Zuzowski, le problème de ce point de vue, dont le principal défenseur était Jeffrey Sachs28(*), est qu'il se fonde sur un principe explicitement posé mais faux, qui veut que l'Est ait à un moment donné de son Histoire, fait partie de l'Ouest, ce qui n'a jamais été le cas. Il ne fait aucun doute qu'il est plus aisé de retourner à une situation connue plutôt que de s'adapter à un nouvel ensemble. Et c'est précisément ce dernier problème qui est le principal défi des PECO selon Robert Zuzowski. Dès lors, l'enjeu n'est plus seulement économique, mais également politique et historique. Robert Zuzowski n'apporte pas de réponse claire à ce problème, expliquant le caractère nouveau, volatile et imprédictible de la situation en Europe centrale et orientale. Alors qu'il ne remet pas plus en cause la nécessité initiale de l'aide qui se concentre sur la stabilisation macroéconomique et la mise en place d'infrastructures permettant le développement d'une économie de marché que le financement à proprement dit et les investissements, il déplore le manque de clarté et de stratégie sur la suite. Comment gérer l'aide financière ? Quelle direction lui donner ? Faut-il accéder aux marchés financiers de l'Ouest ou créer ses propres marchés indépendants ? Autant de questions, qui selon Robert Zuzowski n'ont pas été posées au début de l'aide et il en résulte, en 1998 une situation confuse.

Dès lors, face à ces interrogations sur l'aide et son efficacité, entre ses supporters, ses détracteurs, ses bénéficiaires et les donateurs, il est très difficile de se risquer à dresser la part de responsabilité de l'aide des IFI dans les destins contrastés des PECO.

2. QUELLE PART DE RESPONSABILITE POUR LES IFI ?

A/ Les IFI ont-elles travaillé en collaboration? Ou collision ?

Afin de tenter de déterminer la part de responsabilité qui incombe aux IFI, il convient d'abord d'étudier les rapports entre elles. Pouvons-nous parler de collaboration ou faut-il plutôt évoquer des collisions entre les IFI ? Cette question qui est encore aujourd'hui sujette à discussions et débats n'appelle pas de réponse définitive, et nous verrons que les cas de figure ont pu varier suivant les pays, les périodes, les IFI et même les projets.

Si l'on s'en tient aux communications des IFI, le discours est policé et toutes insistent avec plus ou moins de force sur la bonne collaboration avec d'autres IFI. La BERD par exemple, dans ses rapports stratégiques29(*), consacre une large part au travail avec les autres IFI. En Pologne par exemple, la Banque a cofinancé avec la Commission Européenne plus de 10 projets municipaux. Par ailleurs, elle a crée et développé avec la Commission et la BEI deux programmes financiers à l'attention des communes. Avec la BEI, la BERD a également cofinancé certains projets locaux et mit en place le programme JASPERS. Toujours en Pologne, la BERD a travaillé avec le FMI en soutenant financièrement des projets parfois supervisés par le Fonds. Enfin, la BERD évoque une stratégie de partenariat avec la Banque Mondiale pour la Pologne, sans donner davantage de détails. En ce qui concerne la République Tchèque, la BERD consacre une large part qu'elle appelle cooperation with other IFI's. Cependant, alors que pour la Pologne, certaines IFI avaient manifestement travaillé conjointement avec la BERD, notamment au niveau européen, pour ce qui est de la République Tchèque, la Banque se contente de relever le travail des IFI dont les domaines de compétence recoupant les siens. Elle n'évoque pas de coopération à proprement dite. En Hongrie également, la BERD relève les actions des autres IFI qui concordent avec sa propre vision du développement, à savoir le soutien de projets microéconomiques et microéconomiques.

Dès lors, nous sommes en droit de nous demander si la coopération entre IFI a été aussi active que ces dernières le laissent parfois supposer. Bien entendu, il y a eu une coopération de fait entre les IFI. D'abord entre celles dépendant de l'Union Européenne, à savoir le programme PHARE, la BEI et, dans une moindre mesure la BERD. Par ailleurs, sous l'égide du G 24 qui a accordé la coordination de l'aide à l'UE (même si cette dernière n'a pas été très effective comme nous l'avons souligné), les IFI ont dû se concerter un minimum afin de se répartir les tâches autant que possible. Enfin, les principes de conditionnalités mis en vigueur, notamment par le FMI, ont également obligé les IFI à se rencontrer et, si ce n'est à coopérer à proprement dit, du moins à discuter et négocier. Dès lors, si ce n'est quelques cadres de coopération ciblées entre deux IFI, nous ne pouvons pas affirmer que les institutions présentes en Europe centrale et orientale ont réellement coopéré entre elles.

B/ Travail avec les autres types d'aide et autres cadres de coopération

La question se pose donc maintenant de savoir si les IFI ont travaillé avec les autres types de donateurs et autres cadres de coopération. Comment les IFI ont-elles travaillé avec les pays donateurs et les donateurs privés ?

La première question est la part de l'aide bilatérale, constituée principalement par les dons de pays (Etats-Unis, Allemagne, France surtout). Environ 1/3 de l'aide de l'aide occidentale cumulée accordée aux PECO est constituée de dons. De tous les donateurs, l'UE, à travers le programme PHARE, fournit la plus large part (60% du total), devant les Etats-Unis (environ 25% du total). Sur ce point, on ne peut pas parler de rivalité, mais à la vue de certains chiffres, l'impact financier de certaines IFI par rapport aux Etats-Unis se réduit. Cette situation peut paraître étonnante lorsque l'on sait que les Etats-Unis sont déjà les leaders financiers (étant les contributeurs les plus importants) d'au moins deux IFI, la Banque Mondiale et le FMI. Cependant, cette manière de séparer strictement aide au développement bilatérale, à travers les outils nationaux, et aide multilatérale, à travers les organisations et institutions financières est classique et commune à tous les pays participant à l'aide sur les deux terrains.

Un autre type d'assistance qui mérite que l'on s'y attarde provient davantage d'investisseurs privés, le plus souvent occidentaux : les IDE, ou investissements directs étrangers. L'IDE est un investissement qu'une entité30(*) résidente d'une économie (investisseur direct) effectue, dans le but d'acquérir un intérêt durable dans une entreprise résidente d'une autre économie. Un intérêt durable implique une relation à long terme et l'exercice d'une influence notable sur la gestion de l'entreprise. L'investissement direct comprend à la fois l'opération initiale entre les deux entités et toutes les opérations ultérieures en capital entre elles et entre les entreprises affiliées, qu'elles soient constituées ou non en sociétés. Selon le FMI, une relation d'investissement direct est établie dès lors qu'un investisseur détient au moins 10% du capital social de l'entreprise investie. En deçà du seuil de 10%, les opérations sur titres sont classées dans les investissements de portefeuille. Ces investissements, que certains ne voient pas comme de l'aide, ont été massivement utilisé durant la période de transition des PECO. Il convient donc de rappeler la nature, les objectifs et l'impact des IDE sur la transition des PECO avant de les comparer aux aides des IFI. Tout d'abord, si l'on veut étudier les rapports entre assistance des IFI et IDE, il est nécessaire de rappeler que les IDE n'auraient pas pu exister en Europe centrale et orientale sans les IFI. En effet, si depuis le début des années 1990, les PECO ont reçoivent des flux d'IDE31(*) en progression constante, c'est d'abord parce que les IFI, en coopération avec les gouvernements nationaux, ont élaboré de cadres réglementaires incitatifs et des environnements économiques favorables. Dès lors, les investisseurs privés ont pu investir et ont souvent accompagné le processus de transition, le plus souvent à travers les privatisations. En termes de chiffres, les IDE étaient quasi inexistants en 1990 et ont ensuite fortement progressé, surtout depuis 1995. Entre 1999 et 2000, ils ont augmenté de 15% pour atteindre le niveau record de 22 milliards de dollars. L'UE est à l'origine de 71% des flux entrants dans les PECO, dont les 2/3 sont concentrés sur la Pologne et la République Tchèque. Selon la CNUCED32(*), le stock total d'IDE33(*) dans les PECO s'établissait à 102 milliards de dollars fin 2000 et trois pays en accueillaient l'essentiel : la Pologne (36 milliards USD), la République Tchèque (21 milliards USD) et la Hongrie (20 milliards USD). Depuis 1996, la Pologne est la première destination des flux d'investissement directs étrangers en Europe centrale et orientale. Parmi les pays d'origine des investisseurs directs en Pologne, 90% sont membres de l'OCDE et les pays de l'UE en constituent à eux seuls près de 67%. La France se place au premier rang des investisseurs avec un stock de 7,9 milliards USD, devant les Etats-Unis (7,3 milliards USD) et l'Allemagne (5,9 milliards USD). Cette position s'est nettement renforcée en 2000 avec le rachat de 35% du capital de l'opérateur national de télécommunications TPSA par France Télécom (plus grosse opération de privatisation jamais réalisé dans un PECO). Selon les chiffres de l'Agence polonaise pour l'investissement étranger (PAIZ), les principaux secteurs investis sont le secteur manufacturier (38% du stock total), le secteur financier (21%), le secteur des transports et de la logistique (11%) et celui de la distribution et du commerce (8%). Il est intéressant de noter que ces secteurs sont également ceux privilégiés par les IFI, quelque soit le rôle de ces derniers : conseil, formation ou financeur. Selon ces différents rôles, les rapports avec les investisseurs directs changent. Ils peuvent travailler ensemble dans le cas de conseil ou de formateur. En effet, comme nous l'avons dit, les IDE ont eu besoin des IFI qui ont formé les cadres juridiques et économiques préalables à tout investissement. Dans le même registre, les IDE ont besoin des IFI pour obtenir des garanties sur leurs cibles d'investissements, demandent parfois des études indépendantes (notamment du FMI) et peuvent se servir d'autres études et rapports faits par les IFI. Dans ce contexte, la coopération entre IFI et IDE est réel, à défaut d'être officielle. Dans le cadre de formation (PHARE, FMI, OCDE, Banque Mondiale), les IDE ont aussi profité du travail préalable des IFI qui ont formé des cadres politiques et économiques aux règles du marché financier international qui règle et supervise les IDE.

Ainsi, le rôle et l'action omniprésente des IFI en Europe centrale et orientale ont joué sur l'importance du stock d'IDE présent dans la région aujourd'hui et sa progression tout au long de la décennie 1990. Outre ce facteur, d'autres explications à cette attractivité ont pu jouer. Nous avons relevé cinq facteurs ayant attiré les IDE dans les PECO. Premièrement, la taille du marché. Elle apparaît même comme la principale motivation des investisseurs pour s'implanter dans les PECO. En deuxième lieu, la proximité géographique avec les pays investisseurs a beaucoup joué. A la fois la théorie et l'expérience empirique suggèrent que les investisseurs privilégient les pays proches géographiquement (la première destination des investissements des Etats-Unis reste l'Amérique latine par exemple), car les coûts d'implantation sont croissants avec la distance. Troisièmement, le facteur des coûts salariaux est difficile à évaluer de manière sûre. Si les grands PECO, principales cibles des IDE ont une main d'oeuvre, qualifiée ou non, plus basse que les pays d'Europe occidentale, il n'en reste pas moins que les pays où les salaires sont encore plus bas qu'en Hongrie, Pologne ou République Tchèque (Roumanie, Bulgarie, Slovaquie, Slovénie) restent relativement délaissés par les investisseurs étrangers, en dépit des opportunités qu'ils offrent. Cependant, l'instabilité économique plus forte qui règne dans ces pays a sans doute dépassé l'attrait strictement financier lié au coût de la main d'oeuvre, d'autant plus que les IFI ont été elles-mêmes moins présentes dans ces pays, offrant moins de garanties en conséquence. Le quatrième facteur explicatif de la masse d'IDE est l'existence d'une main d'oeuvre qualifiée importante. Cependant, si elle est couramment présentée comme un atout, son impact est délicat à mesurer par des études économétriques. Les indicateurs existants (taux de scolarisation, nombre d'années d'études reçues) ne prennent pas en compte la qualité de l'éducation, l'expérience ou la formation professionnelle. Or, certaines études suggèrent que malgré un niveau d'éducation élevé, la main d'oeuvre des PECO serait mal adaptée aux exigences des firmes multinationales. Enfin le dernier facteur pouvant entrer en jeu est le degré d'avancement des pays en transition. La perception qu'en ont les investisseurs étrangers influence également leurs décisions d'implantation. Dans le cadre du processus de transition, les PECO ont entrepris des réformes dans différents domaines : faillite, droit des sociétés/gestion des entreprises, concessions, réglementation du marché financier et des télécommunications...Ils ont aussi renforcé la solidité et la transparence du cadre juridique et institutionnel, même si beaucoup reste à faire, (respect des engagements publics face aux investisseurs étrangers, transparence des règles de marché public, absence de clause de préférence nationale ou de traitement différencié, rapidité et lisibilité du système judiciaire, absence d'interférences politiques dans la vie économique...). Ces réformes ont contribué et contribueront à améliorer encore le climat d'affaires aux yeux des investisseurs étrangers. Dans ce défi, encore une fois, nous sommes en mesure d'avancer que les IFI ont un rôle primordial à jouer, en collaboration avec les gouvernements nationaux et représentants de la société civile.

C/ Bilan des actions par IFI et par pays

Trois différents aspects de la relation entre PECO et IFI vont nous permettre d'établir un modeste bilan du travail des IFI dans la région ; tout d'abord une révision rapide des principaux accomplissements des IFI en Pologne, Hongrie et République Tchèque.

En 2006, la BERD a établit une rapide évaluation de l'action des IFI en Pologne, Hongrie et République Tchèque. C'est donc sur cette étude que nous nous appuierons. Il est nécessaire de souligner en premier lieu que ces PECO ont été les plus avancés tout au long de la période de transition, et qu'ils sont aujourd'hui les plus développés de la région.

D'un point de vue général concernant la transition, la Pologne a fait de considérables progrès depuis le début des années 1990. Les indicateurs de transition indiquent que dans trois catégories - libéralisation des prix et commerce, libéralisation des échanges et privatisation des PME - la Pologne avait atteint, en 2005, les standards d'une économie de marché en bon fonctionnement. Cependant, certains défis restent en suspens dans de nombreux secteurs différents. Dans le secteur de l'industrie, il est important d'accroître l'efficacité et de diversifier l'activité, notamment vers les services et les nouvelles technologies. Concernant l'agriculture, la modernisation des fermes et le développement d'entreprises agricoles sont encore à faire également. Dans le domaine de l'immobilier aussi, il est nécessaire de rénover de nombreux centres urbains et de construire des loyers à bas prix afin de lutter contre le logement insalubre des couches les plus défavorisées. Dans les télécommunications, même si beaucoup de progrès ont été faits et que le secteur est entièrement privatisé, il reste à développer et encourager la concurrence dans les services de lignes fixes. D'autres réformes doivent être menées dans le secteur financier et l'accès au capital également. Penchons-nous maintenant sur le travail particulier à chaque IFI en Pologne. La BEI, après 15 ans de présence dans le pays, a pu couvrir un grand nombre de secteurs économiques, des infrastructures de base aux services en passant par les institutions financières. Selon la BERD, plus de 11 milliards d'Euros ont été engagés par la BEI en Pologne à la fin de l'année 2005 et elle a tenté de mettre en pratique son principal objectif théorique ; contribuer à la cohésion sociale et économique de l'Europe. Le FMI, lui, dont la Pologne est membre depuis 1986, a principalement apporté à la Pologne une assistance technique dans de nombreux domaines dont la politique monétaire et fiscal. Par ailleurs, le Fonds a aussi beaucoup travaillé avec le gouvernement au début de la décennie afin d'établir de stabiliser la situation macroéconomique. La Pologne fut l'un des membres fondateur de la Banque Mondiale avant de la quitter en 1950, pour ne la rejoindre qu'en juin 1986. Depuis la premier prêt de la Banque au pays en 1990, l'engagement de cette dernière a atteint 6 milliards de dollars américains pour un total de 40 opérations. La Banque a sensiblement aidé le pays par son assistance technique auprès des institutions financières, mais aussi comme nous l'avons vu auprès du gouvernement afin de combattre la corruption.

Au même titre que la Pologne, la Hongrie fait partie des PECO les plus en avance économiquement. En ce qui concerne les réformes structurelles, le pays est à la pointe des économies en transition. Selon le rapport de transition daté de 2005, la Hongrie est le pays les plus avancé parmi les nouveaux entrants dans l'UE dans 7 catégories (suivi de près par la République Tchèque et l'Estonie). Dans trois autres catégories, libéralisation des prix, libéralisation des échanges et privatisation, la Hongrie a également atteint un niveau acceptable parmi les économies de marché. Cependant, comme pour la Pologne, et c'est parfois les mêmes, un certain nombre de progrès et réformes restent à faire. Concernant les entreprises, la réorientation vers les services et les nouvelles technologies est également à prévoir. Concernant les marchés de capitaux, l'activité est en plein expansion mai le nombre d'instruments est encore limité. Comparé aux standards de l'UE, leur nombre est encore très bas. Par ailleurs, le secteur de l'énergie doit être davantage libéralisé, en même temps que la recherche et la production d'énergies renouvelables doivent être encouragées. Malgré tous les efforts qui ont été faits, et notamment par la BERD et d'autres IFI, les facilités de transports ont encore besoin d'être améliorées, en particulier le transport ferroviaire national. Les IFI ont été très actives en Hongrie. Depuis 1990, la BEI a financé différents projets à hauteur de 5,5 milliards d'euros, parmi lesquels des lignes de métro à Budapest, des centres de traitement des eaux usagées à Budapest également, des autoroutes ou encore des prêts à des banques locales. Le FMI qui compte la Hongrie parmi ses membres depuis 1982 a peut-être été relativement moins actif en Hongrie qu'il n'a pu l'être en Pologne et en République tchèque. Cependant, il a là-aussi envoyé des experts afin de garantir une assistance technique et publier des rapports d'évaluation. C'est aussi depuis 1982 que la Hongrie est membre de la Banque Mondiale, ce qui lui a valut le financement d'une quarantaine de projets pour un montant de 4 milliards de dollars américains.

Concernant la République Tchèque, la situation change quelque peu puisque l'évaluation ne peut compter qu'à partir de 1993 et la séparation avec la Slovaquie. Concernant le secteur de l'industrie, d'importants progrès sont relevés par la BERD avec différentes vagues de privatisations notamment (Unipetrol, Cesky Telecom, Vitkovice Steel). Cependant, dans ce même secteur industriel, des progrès restent à faire dans le climat avec lequel se traitent les affaires (corruption, protection des droits de propriété). Le secteur de l'immobilier s'est développé rapidement avec l'émergence de nouveaux types de propriétés et d'instruments financiers. Dans le domaine agricole, des efforts sont à prévoir afin de moderniser les installations même si la privatisation est quasiment terminée. Dans les transports et télécommunications enfin, la République Tchèque a accompli d'immenses progrès. Le réseau de télécommunication est l'un des plus compétitifs de la région et le réseau ferroviaire est également très développé. Comme nous l'avons vu au fil de notre étude, les IFI se sont fortement impliquées dans le pays. Outre l'Union Européenne, le FMI qui a accueillit la République Tchèque dès janvier 1993 a fournit de nombreuses missions d'assistance technique. Si la Banque Mondiale n'a offert aucun prêt au pays depuis septembre 1993, elle a compensé par un support technique actif dans différents domaines (lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, sécurité sociale et système des retraites). Enfin, la BEI a engagé plus de 5,5 milliards d'Euros depuis 1992, dont 2,9 milliards destinés au secteur public (principalement pour des projets d'infrastructures).

Ce bilan ne tend pas à l'exhaustivité mais il présente les principaux domaines d'action des IFI dans les trois pays qui nous intéressent le plus. Il montre qu'il reste des défis, et le travail des IFI est encore loin d'être fini dans la région, mais également que les accomplissements sont réels. Le signe le plus fort de la réussite des PECO, et donc peut-être des IFI, reste leur adhésion à l'Union Européenne. Pour finir, revenons donc rapidement sur les adhésions.

Le 31 mai 1998, les négociations sur l'adhésion s'ouvraient avec cinq PECO (la Hongrie, la Pologne, l'Estonie, la République Tchèque, la Slovénie) et Chypre. Le 13 octobre 1999, la Commission recommandait aux pays membres d'ouvrir les négociations avec la Roumanie, la Slovaquie, la Lettonie, la Lituanie, la Bulgarie et Malte, et le 13 décembre 2002, au Sommet de Copenhague, les chefs d'Etats et de gouvernement des Quinze ont entériné l'avis de la Commission que dix pays répondaient aux conditions requises pour leur adhésion à l'Union européenne.
Toujours est-il que l'intégration de l'Est se fit le 1er mai 2004, dans l'indifférence quasi-générale de certains pays occidentaux qui trancha avec la liesse populaire des pays concernés. Huit ex-pays de l'Est rejoignaient donc l'Union, avec au total 75 millions d'habitants. Trois ans plus tard, la Bulgarie et la Roumanie allaient les rejoindre.

CONCLUSION

L'étude du rôle des institutions financière internationales auprès des pays d'Europe centrale et orientale depuis la fin du régime soviétique jusqu'à cet accomplissement qui paraissait difficilement concevable en 1989 et dont nous venons de rappeler les dernières étapes, à savoir l'adhésion à l'Union Européenne, a mit en lumière différents enseignements sur les PECO, sur la transition et sur le travail des IFI.

Tout d'abord, la naissance de l'assistance occidentale au début des années 1990 s'est effectuée à la demande de l'Est elle-même, paradoxalement à travers la personne de Gorbatchev (suivi de près par les dirigeants des anciens satellites). Paradoxalement, parce que l'assistance a d'abord tenté de réparer les méfaits causés par 40 années de domination soviétique, avant d'accompagner les PECO dans leur volonté d'adopter un modèle économique libéral et des institutions politiques démocratiques. Les deux facteurs les plus importants de cette accompagnement se sont révélés être deux piliers de chaque société ; l'économie et la place de l'Etat. Ces deux piliers, qui ont été au centre des préoccupations des IFI, étaient également les deux sur lesquels Moscou avait imposé son autorité pendant plus de quarante ans. La réactivité de l'Ouest ne s'est pas fait attendre puisqu'avant même la chute du régime soviétique, elle s'est employée à fournir des aides économiques et politiques aux PECO. La correspondance entre le travail des IFI et les besoins des PECO, qui certes fut parfois questionnée, ne peut être dénigrée totalement. Derrière ces aides, l'objectif commun des IFI était de construire une économie de marché solide et poser les bases de la démocratie. Dans la majorité des PECO, excepté quelques exemples, cet objectif a été atteint. Un autre enseignement que nous avons tiré de notre étude est la difficulté d'établir précisément la valeur ajouté des IFI dans cette réussite (néanmoins contrastée) des PECO. Ces derniers s'en seraient-ils tirés sans l'aide des IFI ? Si notre travail a tenté d'élucider cette question primordiale, aucune réponse systématique ne peut être apportée, mais nous sommes tentés de croire que la diversité des aides venant des IFI (financement, dons, prêts, expertise et conseil, assistance technique, sans compter les aides indirects) a fortement contribué aux progrès des PECO.

Afin de dresser un tableau clair et juste des rôles qu'ont tenu les IFI dans le processus de transition des pays d'Europe centrale et orientale, il a fallu revenir longuement sur la transition elle-même, son point de départ et celui d'arrivée (s'il en existe un, ce qui signifierait la fin de la transition), mais surtout le mouvement lui-même.

Dans ce mouvement, les IFI ont eu un rôle prépondérant à jouer, et si les critiques ont été nombreuses, c'est peut-être seulement parce que les observateurs attendaient beaucoup de ces organisations multilatérales que l'opinion a parfois l'habitude de percevoir comme des entités toutes-puissantes capables de faire et défaire les situations économiques des « petits » pays. Or, les IFI ne sont pas au-dessus du contexte international et ne peuvent lutter contre les dynamiques d'un marché qu'elles régulent, certes, mais ne contrôlent pas et se doivent de respecter. Dès lors, à leur entrée dans l'économie de marché, les PECO ont largement bénéficié des expertises des IFI, ainsi que de leurs financements, mais ces dernières n'ont effet pas pu leur garantir la prospérité immédiate qu'ils espéraient.

ANNEXES

Annexe n°1

Règlement (CEE) N°3906/89 du Conseil du 18 décembre 1989 relatif à l'aide économique en faveur de la république de Hongrie et de la république populaire de Pologne

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RÈGLEMENT (CEE) No 3906/89 DU CONSEIL

du 18 décembre 1989

relatif à l'aide économique en faveur de la république de Hongrie et de la république populaire de Pologne

LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 235,

vu la proposition de la Commission,

vu l'avis du Parlement européen (1),

considérant que la Communauté et ses États membres ont décidé un effort concerté avec certains pays tiers, afin de mener des actions destinées à soutenir le processus de réforme économique et sociale en cours en Hongrie et en Pologne;

considérant que la Communauté a conclu des accords concernant le commerce et la coopération commerciale et économique avec la république de Hongrie et la république populaire de Pologne;

considérant qu'il importe que la Communauté dispose des moyens nécessaires pour pouvoir mener lesdites actions;

considérant qu'il y a lieu de définir les domaines dans lesquels les actions devront être entreprises;

considérant qu'il est nécessaire de procéder à une estimation du montant des moyens financiers communautaires nécessaires à la réalisation de cette action pour l'année 1990;

considérant que la mise en oeuvre de ces actions est de nature à contribuer à la réalisation des objectifs de la Communauté et que le traité ne prévoit pas, pour les actions en question, d'autres pouvoirs que ceux de l'article 235,

A ARRÊTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:

Article premier

La Communauté met en oeuvre une action d'aide économique en faveur de la république de Hongrie et de la république populaire de Pologne, selon les critères prévus par le présent règlement.

Article 2

Le montant des moyens financiers communautaires estimé nécessaire pour la réalisation de l'action instaurée par le présent règlement s'élève à 300 millions d'écus pour la période expirant le 31 décembre 1990.

Article 3

1. L'aide est utilisée par priorité pour le soutien au processus de réformes en Pologne et en Hongrie, en particulier par le financement ou la participation au financement de projets ayant pour objet la restructuration économique.

Ces projets ou actions de coopération devront être menés notamment dans les domaines de l'agriculture, de l'industrie, des investissements, de l'énergie, de la formation, de la protection de l'environnement, ainsi que du commerce et des services; ils doivent bénéficier, en particulier, au secteur privé de la Hongrie et de la Pologne.

2. Le choix des actions à financer, sur la base du présent règlement, est fait en tenant compte, entre autres, des préférences et des voeux exprimés par les pays bénéficiaires concernés.

Article 4

L'aide est accordée par la Communauté, soit de façon autonome, soit en cofinancement avec des États membres, la Banque européenne d'investissement, des pays tiers ou des organismes multilatéraux ou des pays bénéficiaires d'eux-mêmes.

Article 5

L'aide de la Communauté prend, en règle générale, la forme d'aides non remboursables. Celles-ci peuvent générer des fonds utilisables pour le financement de projets ou d'actions de coopération.

Article 6

1. L'aide peut couvrir les dépenses d'importation ainsi que les dépenses locales nécessaires pour la réalisation des projets et des programmes.

Les impôts, droits et taxes ainsi que le prix d'achat des terrains sont exclus du financement communautaire.

2. Les dépenses d'entretien et de fonctionnement peuvent être prises en charge pour les programmes de formation et de recherche ainsi que pour les autres projets, étant entendu que, pour ces derniers, la prise en charge ne peut intervenir que dans la phase de démarrage et de façon dégressive.

3. Toutefois, en cas de cofinancement, il est tenu compte, dans chaque cas, des procédures appliquées en la matière par les autres bailleurs de fonds.

Article 7

1. Pour les interventions supérieures à 50 000 écus, pour lesquelles la Communauté est la seule source d'aide extérieure, la participation aux appels d'offres, adjudications, marchés et contrats est ouverte, à égalité de conditions, à toutes les personnes physiques et morales des États membres, et de la Pologne et de la Hongrie.

2. Le paragraphe 1 s'applique également aux cofinancements.

3. Toutefois, en cas de cofinancement, la participation de pays tiers aux appels d'offres, adjudications, marchés et contrats ne peut être autorisée par la Commission qu'après examen, cas par cas.

Article 8

La Commission assure la gestion de l'aide compte tenu de la procédure définie à l'article 9. Les orientations générales auxquelles est soumise l'aide et les programmes sectoriels sont arrêtées selon la même procédure.

Article 9

1. Il est institué auprès de la Commission un comité de l'aide à la restructuration économique de la Pologne et de la Hongrie, composé des représentants des États membres et présidé par le représentant de la Commission. Un observateur de la Banque européenne d'investissement participe aux travaux du comité pour les questions qui la concernent.

2. Le représentant de la Commission soumet au comité un projet des mesures à prendre. Le comité émet son avis sur ce projet dans un délai que le président peut fixer en fonction de l'urgence de la question en cause. L'avis est émis à la majorité prévue à l'article 148 paragraphe 2 du traité pour l'adoption des décisions que le Conseil est appelé à prendre sur proposition de la Commission. Lors des votes au sein du comité, les voix des représentants des États membres sont affectées de la pondération définie à l'article précité. Le président ne prend pas part au vote.

3. La Commission arrête des décisions qui sont immédiatement applicables. Toutefois, si elles ne sont pas conformes à l'avis émis par le comité, ces mesures sont aussitôt communiquées par la Commission au Conseil. Dans ce cas, la Commission diffère l'application des mesures décidées par elle d'un délai de six semaines.

Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut prendre une décision différente dans le délai prévu au premier alinéa.

Article 10

À partir de 1990, la Commission établit chaque année un rapport d'exécution des actions de coopération. Ce rapport est transmis au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social.

Article 11

Le présent règlement entre en vigueur le troisième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Fait à Bruxelles, le 18 décembre 1989.

Par le Conseil

Le président

R. DUMAS

(1) Avis rendu le 14 décembre 1989 (non encore paru au Journal officiel).

Annexe 2

Accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (articles 1 et 2)

Les parties contractantes,

Attachées aux principes fondamentaux de la démocratie pluraliste, de l'état de droit, du respect des droits de l'homme, et de l'économie de marché ;

Rappelant l'Acte final de la conférence d'Helsinki sur la sécurité et la coopération en Europe et, en particulier la Déclaration sur les principes

Se félicitant de l'intention des pays d'Europe centrale et orientale de promouvoir la mise en pratique de la démocratie pluraliste, en renforçant leurs institutions démocratiques, l'état de droit et le respect des droits de l'homme, ainsi que leur volonté de procéder aux réformes propres à favoriser la transition vers des économies de marché ;

Considérant l'importance d'une coopération étroite et coordonnée pour promouvoir l'essor économique des pays d'Europe centrale et orientale, aider leurs économies à devenir plus compétitives au plan international, les assister dans leur reconstruction et leur développement et réduire ainsi, le cas échéant, les risques associés au financement de leurs économies ;

Convaincues que l'établissement d'une institution financière multilatérale européenne dans son essence et largement internationale par sa composition aiderait à servir ces objectifs et constituerait en Europe une structure nouvelle et unique de coopération ;

Sont convenues d'instituer la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (dénommée ci-après la « Banque ») qui fonctionnera conformément aux dispositions suivantes:

Chapitre premier : Objet, fonctions, membres

Article 1 : Objet

L'objet de la Banque est, en contribuant au progrès et à la reconstruction économiques des pays d'Europe centrale et orientale qui s'engagent à respecter et mettent en pratique les principes de la démocratie pluraliste, du pluralisme et de l'économie de marché, de favoriser la transition de leurs économies vers des économies de marché, et d'y promouvoir l'initiative privée et l'esprit d'entreprise. L'objet de la Banque peut également être mis en oeuvre en Mongolie sous les mêmes conditions. En conséquence, toute référence dans le présent Accord et dans ses annexes aux «   pays d'Europe centrale et orientale  », à un ou plusieurs «   pays bénéficiaires  » ou aux «   pays membres bénéficiaires  » s'applique également à la Mongolie.

Article 2 : Fonctions

1. Pour remplir à long terme ses objectifs qui consistent à favoriser la transition des économies des pays d'Europe centrale et orientale vers une économie de marché et à y encourager l'initiative privée et l'esprit d'entreprise, la Banque aide les pays membres bénéficiaires à mettre en oeuvre des réformes économiques structurelles et sectorielles, y compris celles visant au démantèlement des monopoles, à la décentralisation et à la privatisation, propres à aider leurs économies à devenir pleinement intégrées à l'économie internationale ; pour ce faire, la Banque prend des mesures destinées à :

i) promouvoir, par l'intermédiaire d'investisseurs privés et d'autres investisseurs intéressés, l'établissement, l'amélioration et le développement des activités du secteur productif, concurrentiel et privé, et en particulier des petites et moyennes entreprises ;

ii) mobiliser, dans le but décrit à l'alinéa i), des capitaux nationaux et étrangers ainsi que des équipes de cadres expérimentés ;

iii) favoriser l'investissement productif, y compris dans le secteur des services et dans le secteur financier ainsi que dans les infrastructures

lorsque cela est nécessaire pour soutenir l'initiative privée et l'esprit d'entreprise, aidant ainsi à la mise en place d'un environnement concurrentiel, à l'amélioration de la productivité, du niveau de vie et des conditions de travail ; iv) fournir l'assistance technique pour l'élaboration, le financement et l'exécution des projets relevant des objectifs de la Banque, qu'ils soient isolés ou qu'ils s'inscrivent dans le cadre de programmes spécifiques d'investissement ;

v) stimuler et encourager le développement des marchés de capitaux ;

vi) apporter un soutien aux projets fiables et économiquement viables intéressant plusieurs pays membres bénéficiaires ;

vii) promouvoir dans le cadre de l'ensemble de ses activités un développement sain et durable du point de vue de l'environnement ; et

viii) entreprendre toutes autres activités et fournir tous autres services destinés à lui permettre de s'acquitter de ces fonctions.

2. Dans l'exercice des fonctions mentionnées au paragraphe 1 du présent article, la Banque travaille en étroite coopération avec tous ses membres et, de la façon qui lui paraîtra appropriée dans le respect des dispositions du présent Accord, avec le Fonds monétaire international, la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, la Société financière internationale, l'Agence multilatérale de garantie des investissements et l'Organisation de coopération et de développement économiques ; elle coopère avec l'Organisation des Nations Unies, ses Institutions spécialisées et tout autre organisme connexe, ainsi qu'avec toute entité, publique ou privée, qui serait concernée par le développement économique et l'investissement dans les pays d'Europe centrale et orientale.

BIBLIOGRAPHIE

1/ ATLAS

[1] FOUCHET, Michel (Dir.), Fragments d'Europe. Atlas de l'Europe médiane et orientale, Paris, Fayard, 1993

2/SOURCES ET DOCUMENTS DE PREMIERE MAIN

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[4] COMMISSION EUROPEENNE, Livre blanc sur l'état de préparation des PECO à l'élargissement, Bruxelles, mai 1995

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[13] MEMORANDUM DE VISEGRAD, «  Mémorandum des gouvernements de la République fédérale Tchèque et Slovaque, de la République de Hongrie et de la République de Pologne concernant le renforcement de leur intégration aux Communautés européennes et les perspectives d'adhésion, septembre »

[14] OCDE, « Pologne, de la transition aux nouveaux défis de la réglementation », OCDE, Paris, 2002

[15] SLIM, Assen « Une décennie d'aide occidentale aux PECO : un bilan mitigé », texte présenté au colloque de Management International « Les pays en transition ou en intégration », les 29 et 30 novembre 2001 à Angers

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[17] WORLD BANK, Annual Report, Washington, 1989-2004

[18] WTO, Annual Report, Geneva, 1995-2006

3/ETUDES, OUVRAGES ET REVUES SPECIALISEES

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[5] COLAS, Dominique (dir.), L'Europe post-communiste, Paris, PUF, 2002

[6] LHOMEL, Edith, SCHREIBER, Thomas, L'Europe centrale et orientale, Paris, La documentation française, 1996

[7] WAELE, Jean-Michel, Les clivages politique en Europe centrale et orientale, Université libre de Bruxelles, 2002

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[6] FRYBES, Marcin, Une nouvelle Europe centrale, Paris, La Découverte, 1998

[7] GREMION, Pierre, HASSNER, Pierre, Vents d'Est : vers l'Europe des Etats de droit ? Paris, PUF, coll. « Recherches politiques », 1990

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[10] HAVRYLYSHYN, Oleh, MCGETTIGAN, Donald, La privatisation dans les pays en transition - Leçons de la première décennie, Washington, Fonds Monétaire Internationale, 1999

[11] KERNOOUH, Claude, DRWESKI, Bruno (dir.), La grande braderie à l'Est, Pantin, Le Temps des cerises, 2005

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[13] KOLODKO, Grzegorz, From Shock to therapy, The Political Economy of post socialist Transformation, Oxford, Oxford University Press, 2000

[14] KORNAI, Janos, « Dix ans après: The road to a Free Economy: l'autoévaluation de l'auteur » in La transformation post-socialiste. Dilemmes et décisions, Paris, ed. de la MSH, pp. 263-278, 2001

[15] LALOY, Jean, Yalta : hier, aujourd'hui, demain, Paris, Laffont, 1988

[16] LAVIGNE, Marie, Capitalismes à l'Est ; un accouchement difficile, Paris, Economica, coll. « Grands Débats », 1994

[17] LAVIGNE, Marie, « L'intégration des pays d'Europe centrale dans l'économie mondiale : régionalisation et mondialisation », in Transitions, 1999

[18] LAVIGNE, Marie, The Economics of Transition, from Socialist Economy to Market Economy, London, Macmillan Press Ltd., 1999

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[23] RUPNIK, Jacques, L'autre Europe - Crise et fin du communisme, Paris, Odile Jacob, 1993

[24] SNEJDAREK, Antonin, MAZUROWA-CHATEAU, Casimira, La nouvelle Europe centrale, Paris, Imprimerie nationale, coll. « Notre siècle », 1986

[25] TODD, Emmanuel, La Chute finale, Paris, Laffont, 1990

[26] WAELE, Jean-Michel, Les clivages politique en Europe centrale et orientale, Université libre de Bruxelles, 2002

B/ Ouvrages généraux sur l'aide des IFI aux PECO

[1] AGLIETTA, M., BAILLY, M., DE BOISSIEU, C., CHARPIN, J-M., DESERTINE, J-P., LAKITS, E., MINK, G., PAGE, J-P., SAPIR, J., PISANI-FERRY, J., « Repenser le soutien de la communauté internationale à l'Europe de l'Est » in Observations et diagnostics économiques, Revue de l'OFCE, n° 42, octobre 1992

[2] BARRE, Raymond, LVERS W., NERS, K., SOLOMON, A., «Moving beyond Assistance», Final Report of the IEWS Task Force on Western Assistance to transition in the CSFR, Hungary and Poland, New-York, Institute foe East-West Studies, European Studies Center, 1992

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[4] FISHER, S., The West's challenge: coordinating Soviet Aid, International Economic Insight, 1991

[5] MICHEL, Patrick, L'Europe médiane, Au seuil de l'Europe, Paris, L'Harmattan, coll. « Aujourd'hui l'Europe », 1997

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[7] MOISI, David, RUPNIK, Jacques, Le nouveau continent. Plaidoyer pour une Europe renaissante, Paris, Calmann-Lévy, 1991

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[9] PISANI-FERRY, Jean, « L'assistance occidentale et les problèmes de transition » in LAVIGNE, Marie, Capitalismes à l'Est ; un accouchement difficile, Paris, Economica, coll. « Grands Débats », 1994

[10] SLIM, Assen « L'aide occidentale à l'Europe de l'Est : les leçons d'un demi-siècle d'aide au développement ont-elles été tirées ? », in Transitions, vol. 39, 1998

[11] SLIM, Assen « Quelle Europe : l'aide occidentale aux pays d'Europe de l'Est : une conception étriquée de la solidarité », in Economie et Humanisme, n°348, 1999

C/ Ouvrages spécialisées par IFI

Sur l'Union Européenne

[1] LAMASSOURE, Alain « L'aide de la Communauté européenne dans la mutation des pays de l'Est » in LAVIGNE, Marie, Capitalismes à l'Est ; un accouchement difficile, Paris, Economica, coll. « Grands Débats », 1994

[2] MAYHEW, A. « L'assistance financière à l'Europe Centrale et Orientale : le programme PHARE » in Revue d'études comparatives Est-Ouest, vol. 27, n°4, 1996

[3] SLIM, Assen, HAPIOT, Aude « Les aides européennes aux PECO : vers une meilleure affectation des fonds ? », in Le courrier des pays de l'Est, n°1034, avril 2003

Sur le FMI

[1] DEMBINSKI, Paul, MORISSET, Jacques, « Les politiques de stabilisation du FMI : une tentative d'évaluation pour l'Amérique latine et l'Europe de l'Est », in Revue d'études comparatives Est-Ouest, n°4, 1990

[2] GISSE, Yves, « Le rôle du FMI dans la transition économique en Europe de l'Est et Russie », in LAVIGNE, Marie, Capitalismes à l'Est ; un accouchement difficile, Paris, Economica, coll. « Grands Débats », 1994

[3] POLAK, Jacques, « Le modèle monétaire du FMI : un outil toujours précieux ? », in Finances et Développement, Publication trimestrielle du FMI et de la Banque Mondiale, 1997

Sur la BERD

[1] LEMIERRE, Jean, « Les principaux défis à relever pour mener la transition à son terme, la BERD », in Revue d'économie financière, décembre 2001

Sur la Banque Mondiale

[1] CORBO, Vittorio, CORICELLI Fabrizio, Reforming Central and Eastern European economies: initial results and challenges, Washington, World bank, 1992

[2] RUTKOWSKI, Jan, Enhancing job opportunities in Eastern Europe and the Former Soviet Union, Washington, 2005

D/ Ouvrages spécialisées par pays

Sur la Hongrie

[1] DI CORTONA, Pietro, From Communism to Democracy: Rethinking Regime Change in Hungary and Czechoslovakia, Rome, Department of Political Studies of the Rome University, «La Sapienza», 1991

[2] FAYNE, Peter (dir.), Structural Changes in Eastern European Countries: Case of Hungary, Artha Vijnana, 1991

[3] KORNAI, Janos, The Road to a Free Economy. Shifting from a Socialist System: The Example of Hungary, New-York, London, Norton, 1990

Sur la Pologne

[1] DRWESKI, Bruno, La transition polonaise - Mythes et enjeux de la transformation systématique, UQAM, 2005

[2] KOLODKO W. Grzegoz, RUTKOWSKI, Michel, «The Problem of Transition from a Socialist to a Free Market Economy» in Journal of Social, Political and Economic Studies, 1991

[3] LISSOWSKA, Maria, Interest groups and institutions in transition countries: the case of Poland, Paper prepared for the conference «Transition: Which relationship between market economy and political democracy?», Université de Paris I Panthéon Sorbonne, 30-31 may 2005

[4] OCDE, Pologne, de la transition aux nouveaux défis de la réglementation, Paris, 2002

Sur la Roumanie

[1] World Bank, Romania - Country Assistance Evaluation, Washington, 2004-2005

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www.banquemondiale.org

www.bei.org

www.diplomatie.gouv.fr

www.diploweb.com (Géopolitique de l'Eurasie)

www.ebrd.com

www.europa.eu.int

http://europa.eu/scadplus/leg/fr/lvb/e50004.htm

www.imf.org

www.insee.fr

www.oecd.org

www.uvi.gov.si/cefta2003/eng/cefta

www.visegradgroup.org

www.wikipedia.com

www.wto.org

* 1 MAYHEW, A. (1996), L'assistance financière à l'Europe Centrale et Orientale : le programme PHARE, Revue d'études comparative Est-Ouest, vol. 27, n°4

* 2 NERS, K. (1992), L'assistance occidentale à la transition dans les pays post-communistes, Economies et sociétés, Cahiers de l'ISMEA, n°44

* 3 DRWESKI, Bruno, La transition polonaise - Mythes et enjeux de la transformation systématique, UQAM, 2005

* 4 LENINE, OEuvres complètes, t. 27

* 5 FEJTO, François, KULESZA-MIETKOWSKI, Ewa, La fin des démocraties populaires-Les chemins du post-communisme, p. 62

* 6 Le Groupe de Visegrad est un groupe informel réunissant quatre PECO : la Pologne, la République Tchèque, la Slovaquie et la Hongrie.

Historiquement, le groupe trouve son origine en 1335 lorsque les rois tchèques, polonais et hongrois se rencontrèrent dans la ville hongroise de Visegrad.

Le V4 moderne a démarré lors d'un sommet de chefs d'Etat et de gouvernements de Tchécoslovaquie, Hongrie et Pologne dans cette même ville de Visegrad le 15 février 1991, afin de mettre en place des coopérations entre ces trois pays en vue d'accélérer le processus d'intégration européenne mais aussi de se concerter sur les méthodes de transition. Le Groupe de Visegrad est le premier cadre de coopération régionale. (Voir mémoire de Master 1).

* 7 Chiffres communiqués par la BERD. Selon le rapport de T. Zoehout, Financing Eastern's Europe Capital Requirements, le chiffre, entre juillet 1989 et 1993 s'élève, pour les IFI, à 20 milliards de dollars précisément.

* 8 Voir page 8 pour la définition de chaque élément.

* 9 Selon la définition du FMI, « il s'agit pour l'Etat de restituer aux agents du secteur privé qui en étaient les propriétaires, des actifs qu'il s'est approprié à la suite d'une action considérée comme injuste. Si pour ses partisans, cette méthode est essentielle pour des raisons éthiques, ses adversaires soutiennent que ce processus est nécessairement sélectif ».

* 10 Le fait que les IFI, et particulièrement le FMI, aient soutenu cette méthode leur a coûté de nombreux questionnements sur leur impartialité politique vis-à-vis de l'Ouest. En effet, privilégiant les investisseurs étrangers, et donc occidentaux, cette méthode n'a jamais été très populaire dans certains cercles conservateurs de l'Est, lesquels voyaient avant tout dans les IFI présentes sur place des défenseurs des intérêts financiers occidentaux (voir sur ce sujet l'article de Marie Lavigne, L'intégration des pays d'Europe centrale dans l'économie mondiale : régionalisation et mondialisation, 1999).

* 11 Règlement (CEE) n°3906/89 du Conseil, du 18/12/89, relatif à l'aide économique en faveur de la République de Hongrie et de la République populaire de Pologne (voir annexe n°1).

* 12 Ces grands conseils se tiennent tous les ans à l'automne entre la Banque et le FMI afin de s'entretenir sur une large gamme de questions concernant la réduction de la pauvreté, le développement économique et les financements internationaux. En règle générale, ces assemblées ont lieu à Washington deux années de suite, puis, pour marquer le caractère international des deux IFI, dans un autre pays membre. C'est dans le cadre de ces assemblées que se tiennent les réunions officielles, non seulement des Conseils des Gouverneurs, mais aussi du Comité du développement et du Comité monétaire et financier international.

Environ 10 000 personnes participent aux Assemblées, à savoir environ 3500 membres des délégations des pays membres de la Banque et du FMI, un millier de représentants des médias et plus de 5000 visiteurs et invités spéciaux représentant essentiellement les milieux d'affaires privés, la communauté bancaire, et les ONG. Les membres du personnel de la Banque et du FMI participent en outre aux réunions tenues avec les représentants officiels des délégations gouvernementales.

* 13 La côte AAA indique que le degré de solvabilité de la Banque Mondiale est sans risque.

* 14 «L'une des missions essentielles du FMI consiste à encourager le dialogue entre les États membres sur les conséquences que leurs politiques économiques et financières peuvent entraîner à l'échelle nationale et internationale, ceci afin de favoriser la stabilité extérieure. Ce processus de suivi et de consultation, qu'il est convenu d'appeler «surveillance», a évolué rapidement en réponse aux mutations de l'économie mondiale » (d'après la définition donnée par le FMI). 

* 15 Ce qui faisait dire à Richard D. Erb, directeur général adjoint du FMI : « les gouvernements de ces pays ont d'une manière générale adhéré à une nouvelle conception du processus de décision économique ».

* 16 Direction de l'alimentation de l'agriculture et des pêcheries, Direction des Affaires économiques, Direction de la coopération pour le développement, Direction de l'Education, Direction des échanges, Direction de l'emploi, du travail, et des affaires sociales, Centre pour l'entreprenariat, les PME et le développement local, Direction des affaires financières et des entreprises, Centre pour la coopération avec les non-membres, Direction des statistiques, Direction de l'Environnement, Centre de politique et d'administration fiscales, Direction des relations extérieures et de la communication, Direction exécutive, Direction de la gouvernance et du développement territorial, Direction de la science, de la technologie et de l'industrie. En plus de ces directions, six autres organes sont présentes au secrétariat : le Centre de développement, Centre pour la recherche et l'innovation dans l'enseignement, l'Agence internationale pour l'énergie, le Club du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest, l'Agence pour l'énergie nucléaire et la Conférence européenne des ministres des Transports.

* 17 FISHER, Stanley, The transition Economies after Ten Years, IMF Working Paper, Washington, 2000

* 18 Voir chap. 2 partie 1 sur l'organisation et le fonctionnement du FMI

* 19PISANI-FERRY Jean « L'assistance occidentale et les problèmes de transition » in LAVIGNE, Marie, Capitalismes à l'Est, 1999

* 20 ZUZOWSKI, Robert, « The West's Approach to Postcommunist Eastern Europe », in Political change in Eastern Europe since 1989, Prospects for Liberal Democracy and a Market Economy, Praeger, Westport, Connecticut, 1998

* 21 SLIM, Assen, Une décennie d'aide aux PECO : un bilan mitigé, 2001

* 22 World Bank, « Corruption in Poland : Review of Priority Areas and Proposals for Action », Warsaw, 1999

* 23 BRUNETTI, KISUNKO, WEDER, « World development Report : The State in a Changing World », chapter 1, p. 35, World Bank, Oxford University Press, 1997

* 24 Le Fonds Européen d'Investissement a été crée en 1994 afin de devenir la branche spécialisée dans le capital-risque du groupe BEI. Il fournit du capital à risque aux PME, en particulier aux jeunes sociétés et aux entreprises à orientation technologique. Il sert également de caution pour les institutions financières (par exemple des banques) pour couvrir leurs prêts aux PME. Le FEI n'est pas une institution bailleur de fonds: il n'octroie pas de prêts ou des subventions aux entreprises et n'investit pas directement dans des sociétés. Il travaille plutôt par le biais d'autres banques et d'intermédiaires financiers. Il utilise à cet effet soit ses propres fonds, soit ceux qui lui sont confiés par la Banque européenne d'investissement ou par l'Union européenne.

* 25 BEI, Rapports d'activité de la Banque Européenne d'Investissement, Bruxelles, 2004

* 26 Ibid.

* 27 Ibid.

* 28 SACHS, Jeffrey, Poland's Jump to the Market Economy, Cambridge, MA : MIT Press, 1993

* 29 EBRD, Document appoved by the Board of Directors, « Strategy for the Czech Republic, for Hungary, for Poland », 2005-2006

* 30 Cette entité - l'investisseur direct - est une personne physique, entreprise publique ou privée ayant ou non la personnalité morale, gouvernement, groupe de personnes physiques ou d'entreprises liées entre elles qui possède une entreprises d'investissement direct - filiale, société affiliée ou succursale - opérant dans le pays autre que le pays ou les pays de résidence de l'investisseur ou des IDE.

* 31 Les flux d'IDE enregistrent les transactions de capitaux fournis par l'investisseur à l'entreprise d'investissement ou reçus de cette entreprise par l'investisseur. Ces transactions se décomposent elles-mêmes en capital social, bénéfices et autres transactions.

* 32 Conférence des Nations-Unies sur le commerce et le développement

* 33 Les stocks d'IDE comprennent le capital-actions et les réserves attribuables à l'investisseur direct, ainsi que les prêts, crédits commerciaux et titres de créances dus à l'investisseur direct par les filiales et sociétés affiliées (et inversement). Dans le cas des succursales, ils comprennent les immobilisations, les investissements et les actifs réalisables, diminués des engagements envers les tiers. Les statistiques existantes sont issues des balances des paiements publiées par les banques centrales ou les organismes statistiques mondiaux. La CNUCED, le FMI, l'OCDE et EUROSTAT centralisent ces données nationales et les publient sous une forme harmonisée, ce qui peut entraîner des divergences avec les chiffres publiés par les banques nationales. Tous les pays ne déclarent pas l'ensemble des sources d'IDE ; ainsi la République Tchèque ne déclare les bénéfices réinvestis et les autres transactions que depuis 1998, la Hongrie et la Roumanie ne déclarent pas les bénéfices réinvestis et ne déclarent les autres transactions que depuis 1996 pour la Hongrie et 2000 pour la Roumanie. Même si l'essentiel de l'IDE provient du capital social (en Pologne, la capital social a représenté en moyenne 71% des flux d'IDE entre 1990 et 1999), des biais qui peuvent être importants interviennent dans la comptabilisation de l'IDE total.

Il faut opérer une distinction entre fusions et acquisitions et investissements directs internationaux : les statistiques d'IDE ne comptabilisent pas les Fusions et Acquisitions transfrontalières financés par les marchés de capitaux internationaux ou par les marchés financiers domestiques, ni celles portant sur une prise de participation inférieure à 10%. Il y a de plus un décalage temporel entre l'annonce d'une opération de Fusion et Acquisition et la réalisation des transactions financières afférentes.

Le besoin de financement externe comprend le déficit courant, le remboursement du principal de la dette extérieure et les remboursements effectués auprès du FMI. Ce besoin de financement externe peut être - partiellement ou totalement - couvert par des dons, des investissements directs, des crédits à long terme officiels ou privés, et des crédits du FMI. Si ces différentes sources de capitaux se révèlent insuffisantes à couvrir le besoin de financement externe, le pays se trouvent alors dans l'obligation de se financer à court terme, et deviennent dépendants de l'obligation de flux de portefeuille, incertains car extrêmement volatils.

Source : FMI, Manuel de la balance des paiements, 1993






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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille