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Les ONG et la protection des enfants soldats

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par N'taho Désirée Florine Roxann Victoire ODOUKPE
Université Catholique d'Afrique de l'Ouest - Maitrise en droit, otion relations diplomatiques et consulaires 2006
  

Disponible en mode multipage

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SOMMAIRE

INTRODUCTION................................................................................................................2

PREMIERE PARTIE 

LES DIFFICULTES LIEES A LA PREVENTION DU PHENOMENE DES ENFANTS SOLDATS: Un FONDEMENT DE L'ACTION DES ONG .............15

CHAPITRE I: LES DIFFERENTS TYPES DE PROBLEMES....................17

SECTION I : AU PLAN JURIDIQUE ET POLITIQUE..........................17

SECTION II : AU PLAN IDEOLOGIQUE, SOCIO-ECONOMIQUE ET

TECHNIQUE............................................................21

CHAPITRE II: LA MISE EN OEUVRE DIFFICILE DU DIH ET DU

DDR...................................................................27

SECTION I : TIMIDE APPLICATION DES REGLES DU DIH.................27

SECTION II : MISE EN OEUVRE DEFECTUEUSE DES NORMES

RELATIVES AU DDR...............................................30

DEUXIEME PARTIE

L'INCONTOURNABLE ROLE DES ONG DANS LA PROTECTION

DES ENFANTS SOLDATS...............................................................38

CHAPITRE I: L'APPORT DES ONG DANS LA DETERMINATION

DES NORMES INTERDISANT L'UTILISATION DES

ENFANTS SOLDATS................................................40

SECTION I : LA CONTRIBUTION DES ONG A L'ADOPTION DES

NORMES..................................................................41

SECTION II : L'APPORT DES ONG CONCERNANT L'ENTREE EN

VIGUEUR DES NORMES.............................................51

CHAPITRE II: LE ROLE DES ONG DANS L'APPLICATION DES

NORMES RELATIVES A LA PROTECTION DES

ENFANTS SOLDATS...............................................57

SECTION I : LA DIFFUSION ET LE CONTROLE DES NORMES.............57

SECTION II : LA COOPERATION AVEC LA COUR PENALE

INTERNATIONALE....................................................62

CONCLUSION GENERALE..........................................................71

INTRODUCTION GENERALE

En vue d'assurer la protection des biens, des personnes et des choses, l'Etat s'est muni d'appareils répressifs au nombre desquels l'on compte l'armée. Elle a pour vocation première la défense de l'intégrité territoriale, la protection des populations par le maintien de l'ordre et de la sécurité. Cet important rôle exige de la part des troupes certaines aptitudes physiques, morales et intellectuelles. C'est pourquoi, seuls les adultes, matures et endurants, sont enrôlés dans l'armée.

Cependant, la montée des mouvements nationalistes, les situations de guerres civiles qui résultent de la remise en cause constante de l'autorité et de la légitimité du pouvoir central dans les pays africains depuis la fin de la guerre froide renversent l'état de fait où seuls les adultes participent à la guerre. Ces conflits qui opposent souvent sur le territoire d'un même Etat, des forces armées régulières aux rebelles, entraînent de plus en plus, l'enrôlement de civils parmi lesquels les enfants figurent en bon nombre. Selon le Fonds des Nations Unies de Secours à l'Enfance (UNICEF), «plus de 300 000 enfants, dont certains n'ont pas plus de 8 ans, dans 44 pays de la planète participent directement aux conflits»1(*). Ces enfants, recrutés dans les armées sont privés de  leurs droits fondamentaux notamment le droit à la santé, le droit à l'éducation tout comme le droit à l'unité familiale.2(*)

Pratiquement mis en veilleuse en temps de paix, le phénomène d'enfants participant aux hostilités ou enfants soldats prend des proportions plutôt inquiétantes dans les zones de conflits comme en témoigne une avalanche d'images plus horribles les unes que les autres diffusées par les médias. La violence et les atrocités perpétrées par ces enfants laissent perplexe le commun des mortels: l'idée de la mort est banalisée. L'horreur de la situation décrite plus haut soulève la question des mesures prises par les gouvernements, en vue de respecter les droits des populations civiles en général et des enfants impliqués dans des hostilités en particulier. En général, ces enfants, filles comme garçons, sont enrôlés de force. Ils sont de plus en plus utilisés comme « instruments de guerre » ou comme "armes" à traumatiser les populations civiles parfois sous les regards attentifs de leurs dirigeants.

Mais, en dehors des rebelles et des Forces de Défense et de Sécurité (FDS), il existe aussi un autre type de combattants qui n'appartiennent ni aux FDS ni aux rebelles. On les trouve dans la zone gouvernementale. Ils combattent de leur propre chef pour protéger leurs villages, leurs tribus et leurs biens : ce sont des milices. Ces groupes sont disséminés dans plusieurs villes sous contrôle gouvernemental. On rencontre en leur sein aussi des enfants. C'est cette présence des enfants de part et d'autre des forces irrégulières qui constitue le problème qui nous interpelle et inspire cette étude.

Au demeurant, l'originalité de ce thème se justifie par la tendance à l'extension de la participation des enfants aux conflits armés dans toutes les régions africaines, d'où la nécessité de la protection contre leur implication dans les conflits armés qu'ils soient internationaux ou non. Les guerres les plus récentes en Ouganda, en Angola, au Soudan, au Libéria, en Sierra Léone, au Burundi, en République Démocratique du Congo (RDC) et en République de Côte-d'Ivoire (RCI) où la présence de cette catégorie de combattants est signalée ont remis en évidence la recrudescence de la pratique. Les organisateurs de ces recrutements éprouvent de plus en plus des difficultés à recruter les adultes qui ne sont souvent pas prêts à mourir pour une cause.

L'analyse du contexte actuel de l'ordre international qui est la multiplication des conflits en Afrique, un ordre (pour ne pas dire un "désordre") dans lequel les conflits armés sont devenus monnaie courante et dans lequel la violence s'est en quelque sorte banalisée malgré l'interdiction générale de la menace ou du recours à la force posée par l'acte créateur de l'ONU, constitue aujourd'hui l'un des principaux défis auxquels doit faire face la communauté internationale au premier rang de laquelle se trouve l'ONU.

Son rôle principal est de maintenir la paix et la sécurité internationales. Après l'immobilisme de la période de la guerre froide, l'ONU a sensiblement accru ses activités dans ce domaine.

De nombreuses opérations de maintien de la paix (OMP) ont été projetées dans le monde et surtout en Afrique pour faire face à toutes ces séries de guerres qui y éclatent.

La mise en place de ces opérations a permis d'atténuer, dans bien de cas, les tensions et d'éviter des escalades violentes. A l'inverse, elles ont également révélé leurs limites. Les difficultés et échecs enregistrés dans le maintien et la défense de la paix ont mis en évidence cette vieille leçon de sagesse selon laquelle «il vaut mieux prévenir que guérir». La communauté internationale et les organisations non gouvernementales (ONG), prennent timidement conscience de cette affligeante leçon et de la nécessité d'agir dans ce sens. Aujourd'hui plus que jamais, ces dernières apparaissent en Afrique comme un impératif catégorique au regard des conséquences désastreuses des conflits pour ce continent, conflits que les Etats seuls n'arrivent plus à gérer. Toute cette situation réduit à néant les règles sociales de fonctionnement des sociétés traditionnelles africaines. La nécessité de faire intervenir les ONG s'impose puisqu'elles sont aujourd'hui indéniablement devenues des acteurs incontournables dans la résolution des conflits et de situation de crises. Pour la plupart des ONG, la neutralité de leur intervention, affichée depuis la création de la Croix-Rouge en 1864, leur confère un pouvoir de médiateur unique.

Mais, qui sont-elles? Quelles sont les raisons qui les incitent à intervenir dans les situations de crises pour remédier au phénomène d'enfants soldats? Comment le font-elles ? En d'autres termes, quel a été le leitmotiv de cette attention particulière accordée aux enfants se trouvant dans le cadre d'un conflit armé et sous quelle forme s'est-elle traduite?

Ces interrogations commandent à ce que nous nous arrêtions un instant pour clarifier quelques notions fondamentales sous-jacentes à savoir les notions clés d'enfant, de soldat, d'enfant soldat, d'ONG, de protection et enfin de conflit.

La définition du terme enfant s'analysera au triple niveau dictionnairique, doctrinal et conventionnel.

Etymologiquement, et selon le dictionnaire Larousse, le terme enfant vient du latin «infans», «infantem» de «infantis» formé de in, préfixe négatif et de fan qui signifie parler. Le mot infans veut alors dire ici «qui ne parle pas». Le mot infans désigna d'abord le bébé, le petit enfant qui ne parle pas encore, puis le jeune enfant âgé de moins de 7 ans. C'est donc l'être humain dans la période de l'enfance.

Pour le Dictionnaire Universel, l'enfant est l'être humain dont l'âge est compris entre le moment de la naissance et celui de la puberté3(*). Cet âge de la puberté varie cependant d'une région à une autre et, selon le sexe de l'enfant. Cette définition nous parait insuffisante pour l'objet de notre étude en ce qu'elle ne nous situe pas sur la limite d'âge de l'enfance.

Plus intéressantes alors paraissent les définitions de François Mauriac qui estime qu'«être un enfant c'est donner la main» et de Torelli qui affirme que l'enfant résulte «d'une situation de faiblesse particulière, tant physique qu'intellectuelle ou morale, en raison de son âge, qui le fait bénéficier du droit à une protection spéciale mais qui, en même temps, lui interdit d'accéder à tous les droits de l'homme. L'enfant est d'abord un enfant situé et cette situation fait naître des droits spécifiques4(*) Ces définitions montrent clairement que l'enfant est un être qui n'a pas atteint une maturité intellectuelle, psychologique, morale et donc qui est incapable de faire preuve d'analyse et d'apprécier les choses à leur juste valeur. Dans ces conditions, l'enfant se trouve dans une situation de dépendance vis-à-vis de l'adulte.

En clair, l'enfant se distingue de l'adulte par le fait qu'il lui est nécessaire d'être protégé, d'être canalisé, d'être orienté de part sa situation de vulnérabilité.

Quant aux définitions données par l'arsenal juridique, elles diffèrent quelque peu des deux précédentes. En effet, la Convention relative aux droits de l'enfant (CDE) du 20 Novembre 1989 spécifie en son article premier que l'enfant s'entend comme étant «tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable». La distinction opérée ici réside dans la limite d'âge dont fait référence ladite Convention. L'enfant est un individu âgé de dix-huit ans au moins. Autrement dit, tout être humain dont l'existence est située entre la période allant de la naissance jusqu'à dix-sept ans révolus est juridiquement considéré comme un enfant. La définition que la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant donne à celui-ci en son article 2, s'inscrit dans le même registre.

Cependant, l'article susmentionné de la CDE ajoute une réserve: «...sauf si la majorité est atteinte plutôt en vertu de la législation qui lui est applicable». Cette réserve indique que l'âge de la majorité qui varie selon la législation des Etats parties à ladite Convention, influence la limite d'âge de l'enfance.

En ce qui concerne la Côte d'Ivoire qui est partie à la CDE depuis le 04 février 1991, sa loi n° 70-483 du 03 août 1970 sur la minorité fixe, en son article 1er, l'âge de la majorité à vingt et un ans (21 ans) révolus, et ne fait aucune distinction de sexe. C'est dire que tous ceux qui n'ont pas 21 ans accomplis sont des mineurs. Cette loi nous permet de conclure que la RCI adhère pleinement à la définition conventionnelle de l'enfant en ce qu'elle ne la modifie en rien.

En droit international humanitaire (DIH), la IVème Convention de Genève de 1949 fixe, dans la plupart des dispositions concernant l'enfant, la limite d'âge à «moins de 15 ans».5(*) Cette limite d'âge suppose l'exclusion d'autres enfants âgés de plus de 15 ans car il existe en effet d'autres dispositions visant les enfants sans référence à l'âge6(*), ou qui emploient d'autres désignations telles que « mineurs », « personnes de moins de 18 ans » ou « adolescents ».

En somme, de toute ces définitions, nous pouvons retenir que l'enfant est l'être humain de sa naissance jusqu'à dix sept ans révolus.

La notion de soldat, elle, renferme étymologiquement la réalité d'un homme équipé et instruit pour la défense du pays. Il désigne un homme de troupe de l'armée de terre ou de l'air. C'est donc celui qui sert dans une armée.

La définition de l'enfant soldat est essentiellement conventionnelle. La CDE définit l'enfant soldat comme un individu de moins de 15 ans membre d'une armée. Autrement, le soldat n'est plus considéré comme un enfant à partir de 15 ans en vertu de son article 38, qui prohibe la participation directe aux hostilités et le recrutement dans les forces armées des enfants de moins de 15 ans. Elle exclut les enfants des collèges militaires qui reçoivent une formation académique ponctuée de quelques règles de la discipline militaire7(*). De même, un rapport du Conseil de Sécurité des Nations Unies définit l'enfant soldat comme «toute personne âgé de moins de dix-huit ans qui appartient à une force armée, quelle que soit sa fonction, ainsi que toutes les personnes accompagnant ce groupe, autres que les membres de la famille, comme les filles enrôlées à des fins sexuelles et de mariage forcé8(*)»

Dans le même sens, les Principes et meilleures pratiques de Cape Town9(*), désignent l'enfant soldat comme « Toute personne sous l'âge de dix-huit ans faisant partie d'une force armée, régulière ou irrégulière quelle qu'elle soit et dans n'importe quelle capacité. Ceci inclut, mais ne se limite pas à tout cuisinier, porteur, messager et tous ceux qui accompagnent ces groupes, en tout rôle autre que celui purement de membre de famille. La définition comprend les filles recrutées pour des fins sexuelles et de mariage forcé. Elle ne décrit donc pas simplement un enfant qui porte ou qui a porté des armes10(*) ».

En termes clairs, par enfant soldat on entend toute personne de moins de dix-huit ans qui fait partie d'une force ou d'un groupe armé, régulier ou irrégulier, à n'importe quel titre, y compris, mais pas exclusivement, en tant que cuisinier, porteur, messager ou accompagnateur, à titre autre que purement familial.

Ainsi, dans l'espace géographique ivoirien, l'enfant soldat peut se définir comme tout individu n'ayant pas atteint vingt et un an révolus recruté et ayant participé aux hostilités, peu importe si celui-ci a été recruté par les « Forces Nouvelles » ou par L'Etat de Côte d'Ivoire.

La notion d'ONG quant à elle recouvre différentes réalités. En dehors des organisations internationales, dont la plus célèbre est l'ONU, vont naître d'autres acteurs essentiels issus d'un phénomène associatif spécifique.

Elles sont selon Marcel Merle: «Tout groupement, association ou mouvement constitué de façon durable par des particuliers appartenant à différents pays en vue de la poursuite d'objectif non lucratif »11(*). Cette définition considère le but non lucratif des ONG comme le critère distinctif. En effet, les ONG ne constituent pas, loin s'en faut, des entreprises commerciales en quête de bénéfices. Elles poursuivent des intérêts sociaux tels l'assistance, le secours, le développement sans attendre une contribution financière des bénéficiaires12(*). Un tel point de vue est réitéré par le doyen MELEDJE Djédjro en ces termes: «Ainsi que le présume sa dénomination, l'organisation dite non gouvernementale se définit d'abord par opposition à ce qui a un caractère gouvernemental ou intergouvernemental ; et aussi par la nature non lucrative de l'activité menée, ce qui distingue les ONG des sociétés commerciales et des firmes multinationales13(*)

De ce qui précède, le but non lucratif constitue la raison d'être de l'ONG. Ce but est repris par l'article 1er de la loi ivoirienne n° 60-315 du 21 septembre 1960 relative aux associations, dont la teneur suit : «L'association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun d'une façon permanente leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que lucratif ».

Par ailleurs, il faut souligner qu'il serait maladroit d'aborder la notion d'ONG sans s'appesantir un instant sur les multiples notions voisines qu'elle engendre ou dont elle émane. Surtout celle de la société civile, sève nourricière du mouvement associatif longtemps demeuré comme l'expression de la liberté collective.

En effet, la complexité de la notion de société civile, la nature souvent floue et vague de ses composantes sémantiques la rendent rebelle à toute conceptualisation. Néanmoins elle peut se définir selon Larry DIAMOND comme «le domaine de la vie sociale organisée qui est volontaire, largement autosuffisante, autonome de l'État, et régie par un ordre légal ou un ensemble de règles partagées. Cette vie sociale est distincte de la société en général parce qu'il s'agit de citoyens agissant collectivement dans le secteur public pour exprimer leurs intérêts, passions et idées, pour échanger de l'information, pour atteindre des buts mutuels, pour faire des demandes à l'État et pour exiger des comptes de la part des dirigeants de l'État; elle ne reconnaît pas les efforts politiques pour prendre le contrôle de l'État »14(*).

Dans le schéma hégélien : «La société civile se situe à un niveau supérieur à celui du monde de l'individu et de la famille, mais nettement au-dessous du monde plus achevé et parfait de l'Etat»15(*).

La société civile englobe une panoplie d'acteurs à divers visages dont les plus connus sont les syndicats, les organisations communautaires de base, les mutuelles, les fondations, le tiers secteur et tout récemment les OSI16(*). Dans le cadre juridique ivoirien, toutes les associations sont identiques suite à la persistance de la seule et laconique loi n° 60-315 portant régime des associations citées ci-dessus. Cette confusion inopportune des ONG avec toute sorte d'association est politiquement et juridiquement justifiée par l'inexistence d'un cadre légal spécifique aux ONG qui même si elles sont des associations ne peuvent être assimilées aux autres composantes de la société civile.

En somme, si les ONG sont des associations, toutes les associations ne sont pas des ONG. De surcroît, toutes les ONG soumises au droit ivoirien ne jouissent pas du même régime associatif. Dès lors, le concept d'ONG ivoirienne doit être clarifié selon la définition négative prévue par l'article 28 de la loi n° 60-315 relatives aux associations :

«Sont réputés associations étrangères, quelle que soit la forme sous laquelle ils peuvent éventuellement se dissimuler, les groupements présentant les caractéristiques d'une association, qui ont leur siège à l'étranger ou qui, ayant leur siège en Côte d'Ivoire, sont dirigés en fait par les étrangers ou bien ont, soit des administrateurs étrangers, soit un quart au moins de membres étrangers17(*)

De ce qui précède, nous pouvons soutenir que la notion d'ONG évoque une association de solidarité internationale (ASI)18(*), à but non lucratif, apolitique, pétrie de valeurs humanistes et indépendante des Etats. Cette association est créée par l'initiative privée et regroupe des personnes physiques ou morales en vue d'exercer une activité d'intérêt général, de solidarité ou de coopération bénévole pour le développement économique, social, culturel, environnemental et humanitaire.

La notion de protection provient étymologiquement du latin protegere qui signifie «accorder son soutien, son aide matérielle à quelqu'un 19(*)».

Aujourd'hui, il prend le sens de « action de protéger », « dispositif, institution qui protège »20(*). Dans notre contexte, la protection dont il est question ici concerne l'enfant. En effet, la protection de l'enfant comprend l'ensemble des mesures qui sont destinées à promouvoir le développement optimal des enfants et des adolescents, à protéger ceux-ci contre les dangers et à atténuer et réparer les séquelles d'atteintes à leur sécurité21(*). Font notamment partie de ces instruments les connaissances éducatives et pédagogiques, les mesures officielles relevant du domaine social et de la politique de la famille ainsi qu'un certain nombre de mesures facultatives (service de conseil et services spécialisés), des moyens relevant du droit public (autorité tutélaire) et d'autres qui sont contenus dans le droit international tels que la Convention de la Haye sur la protection des mineurs ; convention concernant la compétence des autorités et la loi applicable en matière de protection des mineurs. Tous ces instruments sont au service du bien-être de l'enfant. La protection de l'enfant comprend la prévention et l'intervention.

Quant à la notion de guerre ou de conflit, il est assurément le phénomène social le plus constant que l'humanité ait connu. Sur près de 3500 ans d'histoire connue, les historiens ont seulement compté 250 ans de paix générale. L'histoire de l'humanité est émaillée en effet de guerres qui ont revêtu diverses formes. La typologie des guerres a certes évolué mais l'atroce réalité de la guerre est restée la même; elle est allée d'ailleurs de cruauté en cruauté: génocides, razzias, pillages, massacres de populations civiles, destruction massive des biens, viols, ruines, désolations, etc.

Ces nombreux abus pourraient faire penser, comme Cicéron, que «dans le fracas des armes, les lois sont muettes22(*)».

Tantôt qualifié de conflit, on assiste de nos jours à l'apparition de nouvelles formes de guerre qui mettent en lice des armées régulières, des mouvements de guérilla avec souvent l'intervention des puissances étrangères.

En somme, la distinction classique opérée par le DIH entre conflits internationaux et conflits non internationaux semble plier l'échine. Elle tombe en obsolescence dans un contexte animé par des nouveaux conflits ou même des conflits déstructurés. De tels conflits se caractérisent par l'absence totale ou partielle de l'Etat. La guerre ne semble plus être «la continuation de la politique par d'autres moyens»23(*). Elle est interne.

Au vu de toutes ces définitions, se pose la question de la protection des enfants en temps de paix ou en temps de guerre. Cette dernière hypothèse qui renvoie au cas des enfants soldats constitue l'objet de la présente étude. L'utilisation d'enfants à des fins militaires est devenue un phénomène préoccupant. Les images d'enfants maniant des armes, semant la désolation, infligeant des atrocités animent constamment, hélas, le théâtre des conflits armés. Entraînés à la culture de la violence, drogués, les enfants sont devenus les plus cruels des combattants, des tueurs sans merci. La notion d'enfant soldat est donc intimement liée à celle de conflit armé.

En principe, la protection de ces enfants relève de l'Etat, c'est ce dernier qui doit assurer les droits de ses ressortissants. Cependant, le phénomène a pris une telle ampleur qu'il a fallu associer à l'Etat, l'aide d'autres partenaires, notamment les ONG.

Dès lors, le présent travail se propose d'apporter une modeste contribution à l'éradication du phénomène d'enfants soldats en mettant un accent particulier sur l'apport des ONG en la matière.

Mais, en quoi consiste la protection des ONG ? Est-elle efficace? Quel est le leitmotiv de cette attention particulière accordée aux enfants se trouvant dans le cadre d'un conflit armé?

Dans le développement qui va suivre, nous tenterons d'apporter des réponses aux différentes interrogations sus-sucitées. Mais auparavant, nous montrerons les fondements de l'action des ONG, notamment les difficultés liées à la prévention du phénomène des enfants soldats (Première partie). L'examen de cette première partie répond au souci de démontrer les problèmes et insuffisances rencontrés par l'Etat dans la mise en oeuvre efficiente des mesures pour éradiquer, du moins réduire le phénomène d'enfants soldats: d'où la nécessité de faire intervenir les ONG. Il sera ensuite question de montrer l'intervention des ONG dans la résolution des crises, intervention qui participe effectivement à la protection tant préventive que curative du phénomène d'enfants soldats (Deuxième partie).

PREMIERE PARTIE

LES DIFFICULTES LIEES A LA PREVENTION

DU PHENOMENE DES ENFANTS SOLDATS :

UN FONDEMENT DE L'ACTION DES ONG

LES FONDEMENTS DE L'ACTION DES ONG :

LES DIFFICULTES LIEES A LA PREVENTION

DU PHENOMENE DES ENFANTS SOLDATS

La guerre a de tout temps été la rupture d'avec les normes sociales préétablies. En temps de guerre, les écoles et les marchés ferment, les familles sont séparées et tiraillées de part et d'autres; les biens de premières nécessités se font rares et les épidémies sévissent. C'est souvent dans ce contexte que l'armée, institution mise à la disposition du gouvernement en vue d'assurer une des missions régaliennes de l'Etat24(*) qui est la défense nationale25(*), se trouve confrontée à de multiples difficultés. Difficultés qui empêchent l'Etat de protéger sa population en général et les enfants en particulier. Mais ces difficultés, loin d'être uniquement militaire, se rencontrent également aux niveaux juridique, politique, idéologique, socio-économique et technique (Chapitre I) et même dans la mise en oeuvre du DIH et du DDR (Chapitre II), d'où l'intervention des ONG.

CHAPITRE I

LES DIFFERENTS TYPES DE PROBLEMES

Le milieu militaire n'est pas un milieu propice pour l'éducation et l'épanouissement de l'enfant. C'est tout simplement un milieu hostile à son évolution sociale.

Pourtant, nous rencontrons des enfants dans tous les conflits d'Afrique et, ils en sont les principaux acteurs. Alors, nous nous demandons: qu'est-ce qui explique cette présence massive des enfants dans les conflits armés? Les raisons sont multiples. Elles se situent à un double niveau : d'une part au plan juridique et politique (Section 1) et d'autre part au plan idéologique, socio-économique et technique (Section 2).

SECTION I: AU PLAN JURIDIQUE ET POLITIQUE

Lorsque les autorités d'un Etat prennent des décisions qui intéressent les enfants et en particulier les enfants soldats, leur intérêt supérieur doit être une considération primordiale. Ce principe devrait s'appliquer aux décisions des tribunaux, des autorités administratives, des organes législatifs et des institutions publiques ou privées de protection sociale. Mais à l'inverse, on assiste à une insuffisance des mécanismes juridiques de protection des enfants soldats (Paragraphe 1) et au manque de volonté des acteurs politiques en faveur desdits enfants (Paragraphe 2).

Paragraphe 1: Les insuffisances des mécanismes juridiques de protection

des enfants victimes des conflits armés

Les efforts déployés par la communauté internationale pour renforcer les normes et règles internationales relatives à la protection des droits des enfants en période de conflit armé ont donné des résultats importants.

Malgré ces progrès, il faut signaler qu'il y a encore des lacunes dans la codification des normes et des règles qui visent à protéger les enfants dans les situations de conflit armé et notamment un manque de cohérence entre ces différents instruments.

En effet, malgré son interdiction par les deux protocoles de 1977 et surtout de l'article 38 de la CDE, l'implication des enfants dans les conflits armés ne cesse d'augmenter, en violation du droit international.

De prime abord, la CDE en son article 38 §2 et 3, interdit formellement toute forme d'incorporation d'enfants de moins de 15 ans dans des troupes armées. Mais, les dispositions de l'article 38 ne sont pas impératives mais incitatives: les Etats sont tenus de prendre toutes les «mesures possibles» pour ne pas enrôler les enfants de moins de 15 ans et garantir à ces derniers la protection que leur accorde le droit humanitaire. Le CICR avait suggéré de remplacer cette expression par celle de « mesures nécessaires »26(*) afin de renforcer la portée de ces obligations mais en vain, les Etats ne voulant pas s'engager davantage à l'égard de la participation spontanée des enfants aux hostilités. Une telle formulation comporte le risque d'affaiblir le DIH dans la mesure où les Etats qui utilisent des enfants soldats pourraient fort bien invoquer les dispositions de la Convention de 1989 afin d'échapper au contenu impératif de l'article 4.3 du Protocole II27(*). On peut donc regretter que les obligations imposées aux Etats ne soient pas véritablement contraignantes. L'article 1er du Protocole facultatif à la CDE concernant l'implication des enfants dans les conflits armés, prévoit dans le même sens que les Etats «prennent toutes les mesures possibles dans la pratique pour veiller à ce que les membres de leurs forces armées qui n'ont pas atteint l'âge de 18ans ne participent pas directement aux hostilités». Cela signifie que les Etats sont liés par une obligation de moyens et non par une obligation de résultat28(*).

Ensuite, l'article 38 comme sus indiqué, affaiblit le DIH en ce qu'il se contente de reprendre le standard de protection minimum énoncé à l'article 77 §1 et 2 du Protocole I29(*), qui ne vise que le recrutement forcé par les forces armées et la participation directe des enfants aux hostilités, sans en faire une interdiction absolue. Les Etats auraient cependant pu opter pour une généralisation de la protection reconnue aux enfants dans le cadre des conflits armés non internationaux. Une telle démarche aurait étendu de manière considérable les obligations des Etats et par voie de conséquence, les droits des enfants, car l'article 4.3c du Protocole II interdit également leur participation indirecte aux hostilités et leur engagement volontaire avant 15 ans. Cette obligation, étant plus stricte et plus large, aurait dû être retenue par les Etats afin de servir au mieux « l'intérêt supérieur » de l'enfant. A défaut, et aux termes même de la Convention de 1989, et plus précisément de son article 4130(*), l'article 38 a vocation à ne jamais s'appliquer totalement puisque le Protocole II est plus favorable. Cet article a donc une portée limitée en certains points puisqu'il est moins ferme et son applicabilité est inopérante pour les troubles intérieurs.

Mais pourquoi les Etats n'ont-ils pas voulu d'obligation plus forte que celles prévues? Tout simplement à cause du manque de volonté des acteurs politiques.

Paragraphe 2: Le manque de volonté des acteurs politiques

La responsabilité de la protection des populations civiles touchées par les conflits armés incombe, en premier, au chef, de l'Etat du pays en guerre. Cependant, on note un décalage criant entre les promesses et l'action, la rhétorique des dirigeants et la réalité. Les dispositifs mis en place pour la protection des enfants affectés par les conflits armés internes en Afrique se heurtent à des difficultés tenant d'une part, à l'absence de volonté politique se traduisant par l'échec des processus de désarmement et d'autre part à l'absence de consensus dans la résolution des conflits.

L'observation de la situation conflictuelle en Afrique et en RCI en particulier, permet de dire qu'on est bien loin des signatures des traités et des accords de paix. C'est plutôt, la remise en cause systématique ou plus concrètement l'inexécution ou la mauvaise exécution des obligations découlant de ces engagements qui est la règle.

En effet, la volonté apparente de parvenir à la paix qui caractérise chaque partie à un conflit tient au fait qu'elle veut échapper aux accusations de la communauté internationale. Et pour cela, elle se presse de signer voir de ratifier les textes sachant pertinemment qu'ils ne seront pas ou seront mal appliqués. Cette situation est caractéristique à l'ensemble des parties aux conflits en Afrique. Ce qui nous a été donné de constater en Côte d'Ivoire est que chacune des parties donne au texte de référence l'interprétation qui l'intéresse sans en mesurer la portée. A titre illustratif, nous pouvons citer les accords de Linas-Marcoussis du 25 janvier 2005. En plus, il a été prévu un comité des droits des enfants qui est chargé du suivi dans chaque pays du respect des obligations conventionnelles en vue d'assurer la sauvegarde des droits des enfants. Mais combien de pays, à l'instar de la RCI, exécutent cette obligation en rendant compte des dispositions prises? Tout comme la Charte africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, la charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant apparaît tout simplement aux yeux des chefs de guerre comme une norme de trop dont il faut balayer les dispositions d'un revers de main.

Dans beaucoup de cas, les parties au conflit le font à la mesure de leur intention malveillante. A cet égard il faut affirmer, en parodiant un responsable de l'UNICEF à Monrovia, que dans le contexte de conflit armé « il y a un prix à payer pour la paix ». Cela signifie, à l'inverse, que si les différents acteurs et surtout les leaders politiques et les factions combattantes ne veulent pas le payer, toute bonne volonté sera vaine. Et ce sont les enfants qui verront leurs droits s'envoler. Cette absence de volonté politique justifie en grande partie les échecs enregistrés dans la conduite des processus de désarmement, démobilisation et réinsertion des enfants soldats.

Par ailleurs, le recrutement d'enfants devient courant lorsque des forces associées au gouvernement prennent elles-mêmes part au recrutement ou quand l'Etat est absent ou incapable de protéger convenablement les enfants. C'est le cas par exemple en Sierra Léone où nombre d'enfants ce sont engagés du fait de la pauvreté, de l'absence d'opportunités en matière de travail ou d'éducation. Il en est de même pour l'exposition prolongée à la violence qui rend les enfants plus susceptibles d'intégrer les forces armées.

SECTION II : AU PLAN IDEOLOGIQUE, SOCIO-ECONOMIQUE ET

TECHNIQUE

L'endoctrinement idéologique clandestin ou public pour glorifier la guerre (paragraphe 1), l'investissement économique insuffisant (paragraphe 2), sans oublier l'influence négative du progrès technique (paragraphe 3) constituent autant de problèmes engendrant le recrutement des enfants au sein des forces armés.

Paragraphe 1 : L'endoctrinement

L'endoctrinement idéologique en soi n'est pas nécessairement nuisible à l'enfance. Ainsi, endoctriner les enfants en vue d'un embrigadement idéologique fondé sur une éthique qui entre dans le cadre des normes de la DUDH peut être une bonne action.

Mais il en va différemment lorsque l'endoctrinement est dominé ou influencé par des considérations de profit ou des propagandes idéologiques incompatibles avec le respect des droits de l'homme.

Une telle forme négative d'endoctrinement ne peut qu'emporter des effets néfastes sur l'éducation et le développement harmonieux des enfants.

En effet, l'enfant est la cible privilégiée de l'endoctrinement à la violence de la guerre. Il est une cible facile à atteindre, étant incapable d'opposer la moindre résistance aux enseignements qu'il reçoit. Les enfants soldats sont donc les victimes de l'endoctrinement idéologique. Très souvent, cet endoctrinement des enfants précède leur participation à la guerre. Il est fondé soit sur le patriotisme, soit sur la religion ou encore l'ethnicisation. Ainsi, au Cambodge par exemple, à la fin des années 60, l'endoctrinement de l'enfant pour en faire un combattant était net. Dans un document des Khmers rouges31(*), il a été mentionné que le but recherché est d'«éduquer, surveiller, nourrir et développer la jeunesse pour en faire la force centrale du mouvement révolutionnaire de chaque région et la force centrale de la future construction nationale»32(*) .

Mais, c'est sans doute en Iran sous Khomeiny33(*) que le phénomène de l'endoctrinement a atteint son apogée. En effet, le régime Khomeiny a inculqué aux enfants la croyance que le sacrifice pour l'islam était l'ultime objectif de leur vie et ce, malgré une présomption d'interdiction, dans l'islam, de toute participation d'enfants à la guerre34(*). Les enfants étaient tenus sous pression constante de l'endoctrinement de la part des autorités gouvernementales et religieuses.

Quant au patriotisme, s'il peut se présenter en sentiment noble, naturel et scientifiquement humain, il ne confère pas à l'Etat le droit d'exploiter des enfants comme des ressources potentielles à des fins politiques. Malheureusement, bien des pays cultivent le patriotisme de leurs enfants en mettant l'accent sur la haine et la vengeance envers l'ennemi.

Ainsi, dans une lettre du ministre syrien de l'Education adressée au Directeur Général de l'UNESCO, on a pu lire que «La haine que nous inculquons à nos enfants dès leur naissance est une haine sacrée» 35(*).

De la même façon, l'ethnicisation des groupes armés est un facteur favorable à l'utilisation des enfants soldats. En effet, les conflits internes36(*), à l'image de celui de la RCI posent le problème à la fois de la langue et de la confiance. A défaut d'obliger les adultes, qui eux, ne sont pas prêts à mourir pour une cause, on utilise les enfants de son clan ou de son village à qui on aura inculqué une certaine idéologie teintée de tribalisme. C'est le cas de nombre d'enfants enrôlés dans l'ouest de la Côte d'Ivoire, précisément à Zouan-Hounien et Danané.

Les observateurs civils et militaires ont également signalé la présence de 60 enfants37(*) soldats au côté des Forces Nouvelles à Bouaké et à Man38(*). En juin 2004, les enfants soldats se trouvaient aux postes de contrôle de Ferkessédougou, Sinémantiali, Monoko-Zolu, Gobaza, Niakaramadougou et Bouaké. A côté de l'endoctrinement, l'investissement économique lorsqu'il est insuffisant, peut également être une cause acerbe de recrutement des enfants soldats.

Paragraphe 2: L'investissement économique insuffisant

L'Afrique perd chaque année 2% de sa croissance économique à cause de la guerre. L'Etat se doit en temps de paix, de répondre ou tout au moins de veiller à la sécurité des personnes et des biens, de mettre à la disposition des citoyens des structures et infrastructures nécessaires à leur promotion et bien-être socio-économique, tels le travail rémunéré, les structures sanitaires et scolaires.

Si dans les pays occidentaux le développement a atteint un niveau où l'offre en matière de travail est supérieure à la demande malgré la forte industrialisation et la robotisation39(*), dans les pays du tiers-monde par contre, la faible industrialisation, l'équipement insuffisant, le faible taux de scolarisation, et l'inadéquation formation emploi conduisent inévitablement l'homme au chômage et à la misère.

En effet, l'époque de l'Etat providence est dépassée surtout en ce qui concerne les pays sous-développés, caractérisés par l'insuffisance alimentaire, monétaire, une démographie galopante et où l'on vit en dessous du seuil de pauvreté. Toutes ces tares conduisent inévitablement à l'errance des jeunes et des enfants, et surtout rend critique la cohésion sociale.

Dès lors, pour beaucoup d'enfants, s'enrôler dans les forces armées peut constituer leur seul moyen de survie. Leurs motivations principales sont:

- trouver des moyens de subsistance économique,

- se venger,

- rechercher une sécurité physique personnelle,

- désir de protéger leur famille et leur communauté.

Certains même s'enrôlent par désespoir, situation que les «recruteurs» exploitent fréquemment. Ils sont utilisés dans des zones d'exploitation des ressources et sont rétribués avec une modique somme d'argent mais cela constitue pour eux un revenu. Pour d'autres, l'armée représente le seul refuge, la seule entité devant remplacer la communauté d'origine dans les fonctions élémentaires. Toutefois, à côté de l'investissement économique insuffisant, le progrès technique peut s'avérer négatif pour les enfants.

Paragraphe 3 : L'influence négative du progrès technique.

Au début du XIXème siècle, l'évolution dans les domaines scientifiques mais surtout technique était perçue comme l'aboutissement des moyens permettant l'amélioration des conditions de vie de l'homme et sa libération des contraintes de la nature. Mais ces progrès ont eu pour conséquences néfastes la découverte des moyens facilitant la destruction systématique de l'homme par l'homme. C'est le cas particulier des armes légères. D'après le rapport d'un groupe d'expert de l'ONU rédigé par l'institut américain ACDA (Arms Controls and Disarmement Agency), est définie comme arme légère, «toute arme pouvant être portée par un individu ou un véhicule léger, dont la maintenance exige peu de moyen et dont l'utilisation ne nécessite aucune formation spéciale40(*) ».

A l'origine en effet, l'arme est un instrument de défense ou d'attaque contre le danger, contre l'ennemi. Mais produite à grande échelle, elle peut entraîner des conflits armés aux conséquences incommensurables. Parmi elles, on peut citer: les revolvers, les carabines, les mitraillettes, les lance-grenades portatifs, les mines terrestres, les explosifs et les mortiers de calibre inférieur à 100 mm.

Les armes légères ont fait plus de victimes que les autres armes conventionnelles. Leur disponibilité fait accroître les risques de cristallisation des conflits, mine le cessez-le-feu, les accords de paix et permet également l'enrôlement des enfants comme soldats.

Cette disponibilité des armes légères permet aussi le passage brusque du statut de combattant démobilisé au statut de bandit de grand chemin. S'il y a des armes, c'est parce qu'il y a des clients potentiels; s'il y a des clients, c'est parce qu'il y a des fournisseurs. Tout ceci concourt à la persistance de l'état de guerre qui engendre le recrutement des enfants comme soldats.

Par ailleurs, les insuffisances du droit international en la matière ont permis le développement du trafic illicite par le marché noir, ce qui constitue un facteur de déstabilisation des Etats et une menace à la paix et la sécurité des peuples.

En somme, au vu de toutes ces difficultés sus-mentionnés, et pour une adéquate résolution des conflits, les ONG peuvent inciter les pouvoirs étatiques et juridiques à l'action en faisant du lobbying et en alarmant l'opinion publique.

En outre, les programmes de DDR destinés spécifiquement aux enfants soldats sont mis en place dans de nombreux pays, aussi bien dans des situations de conflit armé qu'après la fin des hostilités. Mais l'absence de volonté politique, justifie en grande partie les échecs enregistrés dans la conduite de ce processus et met en mal la mise en oeuvre même du DIH; choses qui complexifient la question de la protection des enfants soldats.

CHAPITRE II

LA MISE EN OEUVRE DIFFICILE DU DIH ET DU DDR.

Il ne fait aucun doute que dès l'ouverture des hostilités, les règles du DIH sont d'application automatique, ceci dans l'optique de réglementer le conflit et assurer une meilleure protection de la personne humaine contre les passions que déchaîne la guerre. Quant au DDR qui est un programme national, il vient en complément au DIH pour mettre fin aux hostilités. Mais la mise en oeuvre tant du DIH que du DDR n'est pas aisée.

S'agissant du DIH, il ressort de l'analyse des conflits en général que la protection est timidement appliquée, comme on peut le constater, tant au niveau de l'assistance humanitaire qui en résulte que du respect approximatif du principe de traitement humain (Section 1). Quant au DDR, les difficultés rencontrées tiennent à l'absence du dynamisme des structures d'exécution du programme et à l'absence de directives et de méthodologie adaptées et standardisées en la matière. L'insuffisance de moyens financiers par rapport à l'ampleur de la tâche et des besoins des enfants est à mettre à l'actif de ces contraintes (Section 2).

SECTION I: TIMIDE APPLICATION DES REGLES DU DIH.

La particularité des conflits internes est d'être de haute intensité et de s'écouler sur une longue période. Cela pose alors le problème d'application des règles du DIH relatives à la protection des personnes et des enfants en particulier. A l'analyse des conflits, il ressort que cette protection est timidement appliquée comme on peut le constater tant au niveau de l'assistance humanitaire qui en résulte (paragraphe 1) que du respect approximatif du principe de traitement humain pendant les conflits (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Assistance humanitaire limitée

La guerre est un déchaînement sans merci d'atrocité. Pendant longtemps, la personne humaine et en particulier celle de l'enfant a été et continue jusqu'à nos jours d'être affecté de manière croissante par les effets de ces conflits.

Dans son souci de protéger les droits de la personne humaine ainsi que sa dignité contre les atrocités qu'entraînent ces conflits internes, le DIH a, à l'alinéa 2 de l'article 3 commun aux quatre conventions de 1949, institué un principe permettant d'aider et d'assister toutes les personnes humaines, sans discrimination aucune, dans des situations d'urgence.

Ainsi, le conflit ivoirien, déclenché en septembre 2002 a entraîné la mise sur pied d'un mécanisme d'assistance humanitaire accru surtout en faveur des enfants. Plusieurs organismes humanitaires41(*) sont présents sur le terrain et sont en collaboration avec la Croix Rouge de la Côte d'Ivoire et du CICR, coordonnateur des activités. Mais, il est à noter que l'évolution conflictuelle en Côte d'Ivoire ou mieux son intensification a entraîné une incidence sur l'assistance humanitaire. L'assistance se trouve réduite et limitée dans certaines zones, à cause du problème d'insécurité. Le conflit a poussé les organismes humanitaires à offrir leurs services que dans certaines zones, limitant par ce fait même le champ d'application spatiale de l'assistance humanitaire dans ce conflit. Ainsi, il s'est avéré difficile pour certains organismes d'atteindre les zones nord et ouest du pays.

Parfois les obstacles sont posés par les groupes armés à dessein pour éviter que les organismes humanitaires ou de défense des droits de l'homme n'y accèdent. Dans cette confusion beaucoup d'exactions sont permises.

De plus, l'assistance humanitaire apportée par l'Etat s'est vue restreinte à cause de la partition du pays. En effet, depuis le 19 septembre 2002 où la Côte d'Ivoire est divisé en deux42(*), l'Etat n'a pu atteindre les zones sous contrôle non gouvernemental pour y apporter son aide.

Ainsi, et en règle générale, la guerre annule durablement le développement économique et social et, ce faisant, prolonge souvent la pauvreté jusqu'à la génération suivante43(*).

Ainsi face à cette situation, on ne peut que déplorer les conditions de vie des personnes et en particulier des enfants, en situation d'urgence abandonnés à eux-mêmes et donc facilement enrôlables. Il en va de même pour le traitement humain.

Paragraphe 2 : Traitement humain approximatif

Dans l'optique de protéger la personne humaine face aux conséquences des conflits armés, le DIH, impose, non seulement aux parties aux conflits, mais aussi à la population civile une obligation relevant du bon sens: un principe fondamental d'humanité.

En période de conflit armé et plus spécifiquement de conflits internes plus attentatoires aux droits et à la dignité de la personne humaine, l'on doit épargner en toutes circonstances et dans la mesure du possible, l'homme mais par-dessus tout, l'enfant du meurtre et de certains actes et comportements inhumains et dégradants44(*).

Mais dans le cas spécifique des conflits ivoirien et congolais, la réalité est tout autre. Toutes les parties aux conflits déclarent traiter avec humanité les personnes en leur pouvoir ou sous leur contrôle. Ces affirmations bel et bien positives sont-elles crédibles eu égard à cette pléthore d'atrocités que l'on remarque sur le terrain?

Sur le terrain, en effet, les acteurs armés n'ont généralement pas ou du moins suffisamment pas une bonne culture du DIH. Dans la grande majorité des situations, ils remettent en cause le principe de traitement humain ceci en perpétrant des actes effroyables à l'encontre de la personne humaine notamment les massacres ethniques, des violences sexuelles et le recrutement des enfants soldats45(*). En effet, en raison de leur manque d'expérience, de leur imprudence et de l'insuffisance d'entraînement, le taux de mortalité des enfants soldats est très élevé lorsqu'ils sont au front. Ils souffrent d'une manière disproportionnée de la rigueur de la vie militaire et sont particulièrement exposés aux maladies et à la malnutrition. Aussi, ces forces ont-elles procédé au bombardement de certaines villes46(*) orchestrant ainsi de nombreux morts, blessés et déplacés; autant d'actes qui n'ont jamais fait progresser le DIH en matière de protection de la personne humaine.

Les écoles et les hôpitaux n'ont pas été épargnés comme en témoigne la catastrophe humanitaire qui s'est produite en Ituri au Congo en 2003. Le Bureau de coordination des affaires humanitaires signale que 212 dispensaires, sur les 400 que comptait la région, ont été fermés et qu'environ 200 écoles ont été détruites.

En somme, le principe du traitement humain n'a pas été respecté véritablement. On note plutôt une grande disposition des parties au conflit à remettre en cause ce principe; ce qui entraîne inévitablement une défection quant à la mise en oeuvre des normes du DDR.

SECTION II: MISE EN OEUVRE DEFECTUEUSE DES NORMES

RELATIVES AU DDR.

Presque dans tous les conflits, le modèle du DDR a été proposé comme solution standard. La triptyque DDR se décompose en désarmement (paragraphe 1), démobilisation (paragraphe 2) et en réinsertion (paragraphe 3). Le DDR est une étape importante qui succède à un cessez-le-feu et qui précède le retour à la paix. Bien plus, il inaugure le retour à la paix. A l'inverse on assiste à un retour à la case départ s'il est mal conduit, notamment à la recrudescence du phénomène d'enfants soldats.

Paragraphe 1: Les difficultés du désarmement

Le désarmement est un processus qui consiste à débarrasser le soldat (enfant) de toutes ses armes47(*) et à l'aider à redevenir un civil. Il s'agit fréquemment de procéder à la collecte des armes, de rassembler les combattants et d'élaborer des programmes visant à gérer ces armes, notamment en les entreposant de manière sécurisée et en procédant parfois à leur destruction. Cela suppose que les hostilités ont effectivement cessées; car à quoi servirait un désarmement si on se retrouve maintenu dans le feu de l'action?

Dans la mesure où un grand nombre d'enfants soldats ne portent pas d'armes, le désarmement ne devrait pas être une condition préalable pour la démobilisation et la réinsertion des enfants soldats. Malheureusement, ce processus connaît de nombreux blocages.

D'abord, objet de nombreux obstacles d'ordre politique, le désarmement des combattants en général ne semble pas être la priorité de certains groupes politiques. Le nombre de conditions et requêtes formulées par les Forces Nouvelles met en mal un tel processus. Comme un jeu de tennis de table, les conditionnalités et exigences sont renforcées au fur et à mesure que nous avançons dans la crise. Toute situation de nature à rendre difficile le désarmement.

En effet, s'agissant du programme élaboré pour le compte du Libéria, l'échec du processus de désarmement entamé depuis 1994, explique en grande partie la reprise des combats en 1997. L'analyse du tableau des estimations d'enfants soldats fournies par l'ONU, l'UNICEF et un certain nombre d'ONG spécialisées fait apparaître des fluctuations si importantes que les contours du phénomène méritaient d'être définis avec clarté. Pour l'ONU, les enfants soldats étaient en 1997, de l'ordre de 6000 à 10 000 individus48(*) dont 4306 ont été officiellement désarmés et démobilisés. L'UNICEF à la même date avance, pour 15 000 enfants soldats, le chiffre, de 4319 démobilisés dont 78 filles. Il y a là une différence d'appréciation préjudiciable aux enfants.

Quant au cas ivoirien, les accords signés par les différents états major, celui des forces gouvernementales face aux Forces Nouvelles n'a jamais pu respecter le calendrier consensuel établi. Le premier Ministre d'alors faisait état au mois de juillet 2006 du début du pré regroupement et de l'identification. Mais malheureusement, comme un malade à plusieurs maux, d'autres situations constituent de réels blocages notamment les derniers développements de l'actualité basés sur les fameux déchets toxiques « tombés du ciel »49(*).

Ensuite, l'échec du désarmement est dû au fait que certains pays développés font preuve de mauvaise volonté pour mettre en oeuvre les différentes résolutions issues des ateliers, séminaires et conférences. D'aucuns arguent l'argument selon lequel un Etat est libre de mettre en oeuvre toutes les mesures tendant à assurer sa sécurité.

De plus, compte tenu du fait que les programmes nationaux ne visent que les combattants régulièrement identifiés au sein des armées nationales ou des groupes rebelles parties aux accords de paix, les ex-combattants rapatriés des pays limitrophes rencontrent d'énormes difficultés. Ces enfants soldats ne sont pas identifiés soit parce que l'insécurité ne permet pas l'accès à certaines zones soit parce que les belligérants réfutent qu'ils en recrutent. C'est pour cela qu'ils échappent au désarmement, d'où le chancellement de la démobilisation.

Paragraphe 2 : La démobilisation: un processus chancelant

La démobilisation fait référence au processus par lequel les parties au conflit commencent à disperser leurs structures militaires et les combattants commencent à réintégrer la vie civile. Elle suppose généralement d'enregistrer tous les anciens combattants, de leur fournir une assistance pour leur permettre de répondre à leurs besoins fondamentaux immédiats, de les rendre à la vie civile et de les transporter jusqu'à leur communauté d'origine.

Pour l'enfant, la démobilisation permet d'abord d'annoncer son retour dans son contexte social d'origine, de lui donner l'éducation qu'il faut pour qu'il assure la relève de demain.

Mais pendant longtemps la démobilisation des enfants soldats s'est produite de manière désorganisée. En effet, la méconnaissance concrète des situations réelles en brousse, les difficultés à prendre en compte les enfants non combattants (les handicapés et filles en particulier), le nomadisme guerrier ou la guerre à temps partiel, l'exode des réfugiés et des enfants déplacés sont autant de difficultés que les Etats n'arrivent souvent pas à cerner parce que soit ils ne prennent pas le temps de le faire, soit ils ne mettent pas assez de moyens à disposition. Du coup, le retour des enfants à la vie civile s'avère éphémère voire utopique.

Ensuite, d'autres raisons telles que la condamnation publique peuvent empêcher les enfants de quitter les forces armées ou leur faire éviter la démobilisation officielle. Effectivement, la condamnation publique des groupes armés qui utilisent des enfants peut faire qu'il est difficile à ces groupes, sur le plan politique, de reconnaître la présence d'enfants dans leurs rangs ou de les libérer. Au Mozambique, par exemple, l'utilisation et l'exploitation des enfants soldats étaient particulièrement stigmatisées.

En sus, la démobilisation par étape laisse des milliers d'enfants soldats en inactivité pendant un temps relativement long. Cette attente peut paraître insupportable pour un bon nombre d'enfants soldats et être une cause de dérapage. Toutes ces difficultés rencontrées dans l'exécution des programmes DDR constituent des obstacles aux efforts déployés en vue de protéger les droits des enfants touchés directement par les conflits armés.

A celles-ci viennent s'ajouter les difficultés liées à la multiplication des groupes armés.

En effet, les conflits en Afrique se caractérisent par la multiplicité des groupes armés. L'émergence des milices pro-gouvernementales pose des problèmes singuliers à cet égard. On assiste alors à un affrontement tous azimuts entre une armée gouvernementale soutenue par la ou les milices et diverses factions de groupes rebelles50(*).

La prolifération des factions rebelles a pour conséquence de rendre difficile le contrôle de ces éléments sur le terrain. Dans ce cas les enfants soldats agissent d'une manière plus ou moins autonome et sont libres de leurs actions. Finalement, ces derniers obéissent non pas aux ordres de leurs chefs hiérarchiques mais individuellement, ils exécutent les ordres du chef qui les incarne ou avec qui ils partagent les mêmes convictions ou l'appartenance à une ethnie. Dans beaucoup de cas, ces entités non étatiques ignorent les règles conventionnelles régissant les conflits armés. Mais même si ces acteurs les connaissent, ils dénient ce droit.

Les enfants soldats doivent être reconnus et intégrés aux programmes de démobilisation officiels. Lorsqu'ils sont exclus, le ressentiment et un sentiment d'abandon amènent certains d'entre eux à recourir à la violence comme moyen d'améliorer leur vie. Pour d'autres, la reconnaissance joue un important rôle de protection. En Ouganda par exemple, les assurances de sécurité et les documents qu'ont reçu les enfants, les rassurent de retourner dans leur communauté sans crainte.

En outre, la protection des enfants soldats est rendue difficile par le fait que les zones contrôlées par les rebelles sont difficilement accessibles. Parfois les obstacles sont posés par les groupes armés à dessein pour éviter que les organismes humanitaires ou de défense des droits de l'homme n'y accèdent. Dans cette confusion beaucoup d'exactions sont permises. Les personnels des organismes humanitaires et des missions de maintien de la paix, les journalistes sont plus souvent la cible d'actes de violence organisés. Tout ceci rendant la réinsertion difficile.

Paragraphe 3 : Une difficile réinsertion

Alors que la démobilisation correspond au moment où un enfant quitte la vie militaire, la réinsertion désigne le processus où il rejoint la vie civile.

La réinsertion est un processus à long terme visant à offrir aux enfants des alternatives viables à leur implication dans un conflit armé et les aider à se réintégrer au sein de leur communauté.

Autrement, par réinsertion, on entend le processus selon lequel une aide est fournie aux anciens combattants en vue de faciliter leur réinsertion économique et sociale et celle de leur famille, dans la société civile. Cette aide peut inclure des indemnités en espèces ou en nature ainsi qu'une formation professionnelle et des activités rémunératrices. Les programmes de réinsertion doivent appuyer l'enfant vers une nouvelle voie de développement constructive

La réinsertion des enfants soldats constitue en la matière un défi majeur des sociétés post-conflictuelles. Si dans les programmes de désarmement, démobilisation, réinsertion les deux D semblent être bien menés sans trop de difficulté, le R en reste le point faible. En effet, l'enjeu de la réinsertion, outil fondamental pour sortir les enfants des conflits, est double : prendre en charge les enfants et assurer leur retour à la vie civile. La réinsertion familiale et sociale présente souvent des difficultés liées à la durée de l'éloignement, aux violences commises ou subies et au rejet de l'autorité. Ainsi, en fin 2003, des programmes de réinsertion avaient été mis en place dans une dizaine de pays ; notamment en Colombie, au Congo, au Rwanda, en Sierra Léone, en Somalie, au Soudan, en Ouganda, au Burundi, au Liberia et au Sri Lanka. Mais la question de la responsabilité juridique des enfants ainsi que celle des opportunités économiques qui leur sont offertes après leur retour à la vie civile sont autant de difficultés à résoudre pour favoriser leur réintégration et empêcher leur re-recrutement.

De plus, il s'avère très difficile de traiter leur traumatisme et quasiment impossible, après des épreuves initiatiques violentes et sanglantes, de les faire revenir au rôle d'enfant. De même, faute d'un consensus entre factions, les enfants démobilisés et désarmés devraient être regroupés dans des centres où ils seront pris en charge par un organisme humanitaire, mais la culture de la haine a fait échouer cette opération. A titre illustratif de 1994 à 1996 a eu lieu une «démobilisation spontanée» pendant laquelle un peu plus de 650 enfants soldats ont rendu les armes à l'ECOMOG. Un certain nombre d'entre eux ont été enregistrés et pris en charge. Ceux qui n'ont pas été pris en charge (enregistrement, transport vers le lieu de leur choix) ont rejoint les rues et d'autres sont repartis vers les pays en guerre tels que la Sierra Léone, la Guinée.

Ce processus a par ailleurs mis de côté une catégorie d'enfants soldats. Il s'agit des filles qui sont mal perçues car on continue à croire qu'elles sont uniquement cantonnées aux tâches logistiques et aux mariages forcés ou tout simplement qu'elles servent à «calmer le coeur des garçons». A cet égard il faut préciser que selon le rapport des Nations Unies établi pour 1996 et 1997, sur les 4306 enfants soldats seulement 2% sont des filles alors que d'autres sources en indiquaient plus de 27%. Ces filles ont entre 10 et 15 ans. D'une manière générale, plus de 90% de filles engagées, quelles que soient leurs activités dans la guerre, ont été négligées et n'ont que la prostitution comme dernier rempart, nombreuses sont celles, du fait qu'elles n'avaient pas d'armes n'ont pas été prises en charge. La réintégration des enfants soldats est donc au coeur d'un complexe social, économique et militaire qui, pour réussir, doit s'articuler autour d'une construction de la paix sur le long terme.

Il faut donc retenir que dans le contexte du DDR, les programmes de désarmement et de démobilisation font souvent suite à un conflit armé et interviennent subséquemment dans l'urgence (période postérieure à la signature d'accords de paix, impératif humanitaire...) alors que l'activité de réinsertion est un processus généralement plus long qui requiert bien souvent la contribution de plusieurs acteurs (politiques, humanitaires...) agissant de concert pour une paix et un développement durables. Ils ont aidé d'anciens enfants soldats à acquérir de nouvelles compétences et à retourner dans leurs communautés. Cependant, ces programmes manquent de financements et de ressources suffisants. Pour qu'ils soient efficaces, un investissement soutenu sur le long terme est donc nécessaire.

En définitive, les Etats et leurs diplomaties éprouvent beaucoup de difficultés à mettre fin aux guérillas, tentatives de sécession et autres violences intérieures. Les ONG spécialisées dans la prévention des conflits sont alors mieux placées pour opérer, au plan politique, juridique, institutionnel voire personnel, des changements qui, initialement modestes, permettent parfois de désamorcer un conflit en le ramenant à une série de désaccords négociables. Dans ces conditions, leur rôle s'avère incontournable.

DEUXIEME PARTIE

L'INCONTOURNABLE ROLE DES ONG DANS

LA PROTECTION DES ENFANTS SOLDATS

Face à la violence accrue des conflits internes, conjuguée à leur complexité croissante, les moyens classiques de prévention et de résolution apparaissent-ils dépassés et impuissants. Les ONG se sont vues obligées de statuer pour le redressement et l'éradication du phénomène d'enfants soldats51(*) en Afrique en générale et dans la région des Grands Lacs52(*) en particulier. Ces ONG sont des institutions à but non lucratif créées sur une initiative mixte ou privée et regroupant des personnes privées ou publiques, morales ou physiques de nationalités diverses. Leur connaissance des situations concrètes et leurs contacts étroits avec les mouvements locaux sont d'incontestables atouts dans l'approche de conflits nationaux complexes afin d'agir de manière optimale en vue de la prévention et de la résolution des conflits et surtout du phénomène de recrutement.

Le gros des efforts doit porter sur la nécessité de mise en oeuvre effective des normes juridiques qui sont des outils essentiels pour assurer la protection des civils, au nombre desquels figurent les enfants touchés par des conflits armés.

Pour ce faire, nous verrons l'apport des ONG dans la détermination des normes interdisant l'utilisation des enfants soldats (Chapitre I), avant d'examiner leur contribution dans l'application des normes relatives à la protection desdits enfants (Chapitre II).

CHAPITRE I

L'APPORT DES ONG DANS LA DETERMINATION

DES NORMES INTERDISANT L'UTILISATION

DES ENFANTS SOLDATS.

La quasi inertie des Etat devant les horreurs vécues par les enfants soldats dans le monde a motivé la création d'organisations influentes pour mettre fin à l'utilisation des enfants soldats. Ces organisations internationales et non gouvernementales, participent, soit individuellement soit conjointement, à la protection des enfants soldats.

La plus importante est une coalition d'ONG connue sous le vocable de « La Coalition ». La Coalition a été créée en février 199553(*) et mise en place en mai 1998 par d'importantes ONG internationales de défense des droits humains et humanitaires. Elle dispose de réseaux régionaux et nationaux en Afrique, en Amérique latine, en Asie, en Europe, et au Moyen-Orient. Son siège international est à Londres.

Les organisations membres du Comité directeur international de la Coalition sont les suivantes :

- L'Alliance Internationale Save the Children,

- Amnesty International,

- Défense des Enfants International,

- la Fédération Internationale Terre des Hommes,

- Human Rights Watch,

- Quaker United Nations Office - Genève,

- Le Service Jésuite des Réfugiés.

Leurs contributions se situent aussi bien dans le domaine de l'établissement du droit que dans celui de son application. Elles ont favorablement renforcé le cadre juridique en matière de protection des enfants soldats en contribuant à l'adoption des normes (section 1) ainsi qu'à leur entrée en vigueur (section 2).

SECTION I: LA CONTRIBUTION DES ONG A L'ADOPTION

DES NORMES

Dans un document qu'il avait préparé pour la première session de la Conférence d'experts gouvernementaux sur la réaffirmation et le développement du DIH en 197154(*), le CICR a noté que l'utilisation croissante des enfants dans les conflits armés était le problème le plus important auquel le droit humanitaire devait faire face et que la question n'avait jamais été étudiée auparavant55(*). Fort de ce constat, la contribution des ONG, dans le domaine du droit international relatif à l'interdiction de la participation des enfants dans les conflits armés, va de l'élaboration de « soft law » à la participation directe dans l'élaboration du droit positif.

C'est donc à juste titre qu'elles interviennent lors du processus d'élaboration des normes protectrices de l'enfant (paragraphe 1) et qu'elles promeuvent ces dites normes (paragraphe 2).

Paragraphe I : La participation au processus d'élaboration des normes

protectrices de l'enfant

L'élaboration du principe interdisant la participation des enfants à la guerre est, à l'origine, essentiellement l'oeuvre des ONG56(*). Même les activités des Nations Unies dans ce domaine, en grande partie basées sur l'expérience du CICR, sont également influencées et alimentées par les résultats de l'action d'autres ONG57(*).

La participation des ONG au processus d'élaboration des règles protectrices de l'enfant intervient tant au niveau des travaux préparatoires (A) qu'au niveau des négociations (B).

A - Les travaux préparatoires

Les travaux préparatoires sont un ensemble de documents officiels (rapports des commissions spécialisées, procès-verbaux des débats au sein des Assemblées, etc.) qui précèdent l'établissement d'une règle de droit écrit.

Le CICR a pris une part importante à l'établissement des normes de prévention du phénomène des enfants soldats. En effet, sur la question de la participation des enfants aux hostilités, le CICR est à l'origine directe de la norme. Dans le projet d'articles soumis à la discussion, le CICR a proposé deux articles similaires58(*), l'un pour le conflit international (art 77 §2 du PAI), l'autre pour le conflit non international59(*) (art 4 §3.c du PAII). Ces deux articles ont été développés en termes identiques jusqu'à la session finale de la Conférence en 1977.

Les interdictions prévues par ces articles étaient considérées par le CICR comme absolues. En effet, toutes les formes de participation étaient totalement prohibées pour les enfants de moins de 15 ans. Dans son commentaire, le CICR faisait remarquer que toutes formes de participation des civils, telles que la transmission des informations militaires, les transports d'armes, de munitions et de matériel de guerre, ainsi que les actes de sabotage, étaient interdites.

A l'instar du CICR, d'autres ONG sont intervenues dans le domaine du droit international relatif à l'interdiction de la participation des enfants dans les conflits armés.

Ainsi, dans la résolution de sa réunion triennale en 1979, le Comité Consultatif Mondial de la Société des Amis (Quakers) a déclaré:

«Our friend has brought before us the concern of the Switerzerland Yearly Meeting that Friend should register their abhorrence of the widespread involvement of children in military training and even in active combat. We unite with this concern and ask yearly Meeting to take whatever action may be appropriate or necessary in their own country to eliminate the militarization of children»

Dans la même année, le comité spécial des ONG sur le désarmement a adopté également une résolution sur les enfants dans les activités militaires.

L'activité normative de ces organisations s'effectue sur la base de leur statut consultatif dans les conférences en vue de l'élaboration des instruments conventionnels. Les ONG sont appelées en expertise, dans le processus d'élaboration du droit en raison des compétences et des expériences qui leur sont propres, ainsi que de l'objectivité présumée de leur point de vue.

Ainsi, le CICR, lors de la conférence d'experts gouvernementaux en 197260(*), a demandé aux diverses ONG qui s'occupent de la protection des enfants, de donner leur point de vue sur les dispositions de la IVe Convention de Genève de 1949 relatives à la protection des enfants, afin de renforcer cette protection dans les protocoles additionnels.

De plus, dans le cadre des travaux de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, le rôle des ONG a été considérable61(*). Outre le CICR, le Quakers a participé activement dans le cadre des travaux sur la rédaction des paragraphes 2 et 3 de l'article 38, relatifs à la participation des enfants aux hostilités, en présentant une communication écrite62(*) sur la question de l'entraînement militaire des enfants.

Outre les travaux préparatoires, les négociations apparaissent comme un cadre de participation des ONG à l'élaboration des normes protégeant l'enfant.

B - Les négociations

Les négociations dont il s'agit ici portent essentiellement sur l'âge minimal de participation aux hostilités et sur l'âge minimal d'engagement volontaire énoncé par le Protocole facultatif à la CDE.

Lors de la négociation du Protocole, la question de l'âge minimal de participation aux hostilités a occupé une place très importante. Certaines délégations63(*) (la majorité) étaient favorables à la fixation expresse à 18 ans de l'âge minimal de la participation, d'autres estimaient que l'âge minimum fixé à 18 ans devrait s'appliquer non seulement à la participation aux hostilités mais aussi au recrutement sous toutes ses formes, opinion partagée par le Comité des droits de l'enfant, le Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et la Coalition contre l'utilisation d'enfants soldats, persuadés que la fixation d'un âge minimal de 18 ans dans toutes les dispositions du Protocole facultatif fournirait aux enfants la meilleure protection possible64(*).

De plus, cela serait conforme à l'âge général de la majorité spécifiée dans la Convention relative aux droits de l'enfant ainsi qu'à la plupart des législations nationales. Les différentes délégations se sont finalement accordées sur un texte de compromis qui limite l'application du Protocole facultatif à «la participation directe aux hostilités», un texte de compromis qui reflète la prise en considération des législations nationales interdisant le recrutement des personnes âgées de moins de 18 ans. Mais à aucun moment, le Protocole ne définit ce qu'il faut entendre par «participation directe aux hostilités» ou «participation indirecte»65(*). Toutefois, comme l'a souligné l'UNICEF, «l'essentiel dans tous les cas est de faire en sorte que les enfants bénéficient de la protection la plus large possible prévue par le droit international relatif aux droits de l'homme et le DIH»66(*).

Tout comme la question de l'âge minimal de participation directe aux hostilités, celle relative à l'âge minimal d'engagement volontaire a suscité de vives controverses lors des négociations. De nombreuses délégations étaient favorables à la fixation à 18 ans de l'âge minimal exprimant ainsi leur doute face à la maturité de personnes plus jeunes pour évaluer la portée et les conséquences de leur engagement. Ils s'inquiétaient également du fait que la fixation d'un âge inférieur pourrait nuire à la mise en oeuvre de l'interdiction de la participation directe aux hostilités et d'enrôlement obligatoire des enfants. Un souci qui s'explique par le fait que des enfants sont souvent enrôlés dans les forces armées nationales dans des conditions qui conduisent à s'interroger sur le caractère véritablement volontaire de leur engagement.

En revanche, d'autres délégations ont mis l'accent sur une limite d'âge inférieure arguant qu'il s'agissait là de la seule manière de trouver suffisamment d'aspirants aptes à répondre aux exigences des forces armées nationales. Pour ces délégations, un âge de recrutement inférieur à l'âge minimum de participation aux hostilités était une évidence puisque l'écart entre les deux est consacré à la formation militaire des recrues.

Les Etats se sont finalement mis d'accord en fixant à seize ans l'âge minimal pour l'engagement volontaire, ce qui améliore la protection des enfants.

Il convient toutefois de préciser que chaque Etat reste libre pour fixer un âge minimal d'engagement volontaire supérieur à seize ans.

En définitive, l'on peut retenir que les négociations du Protocole ont malgré tout été très difficiles. Jusqu'en 1998, aucun consensus n'a été trouvé sur la question de l'âge minimal d'enrôlement et de participation aux hostilités.

En relevant à 18 ans l'âge minimum de participation aux opérations de maintien de la paix, le Secrétaire général de l'ONU a donné un exemple de poids, soutenant l'action des pays en faveur d'un Protocole facultatif avec un niveau élevé de protection67(*).

C'est donc au cours de cette phase délicate, qu'est née la «Coalition pour mettre fin à l'utilisation des enfants soldats». Cette Coalition qui vit le jour en 1998, est soutenue par l'UNICEF. Son but, rappelons le, est de faire connaître au public le problème posé par les enfants soldats et de faire pression sur les Etats afin qu'ils signent le Protocole facultatif à la CDE pour une promotion plus efficiente des règles prohibant l'enrôlement des enfants dans l'armée.

Paragraphe 2: La promotion des règles prohibant l'enrôlement des enfants

dans l'armée

Les ONG, par leurs nombreuses interventions, ont démontré leur volonté de lutter contre l'utilisation des enfants comme soldats (A) et de réglementer l'âge de recrutement et de participation de ces enfants aux hostilités (B).

A- La lutte contre l'utilisation des enfants

L'intérêt pour les enfants soldats s'est accru de manière exponentielle durant les années 90. Un arsenal important d'instruments juridiques a été élaboré permettant de protéger l'enfant contre toute forme de recrutement militaire.

D'abord, la Convention internationale des droits de l'enfant, en son article 38, interdit formellement toute forme d'incorporation d'enfants de moins de 15 ans dans des troupes armées. Toutefois, étant donné le solide appui dont bénéficiait la Convention, l'idée est venue d'élaborer un Protocole facultatif à la Convention qui aurait trait spécifiquement à l'implication des enfants dans les conflits armés.

En 1994, la Commission des droits de l'homme de l'ONU a créé un groupe de travail chargé de rédiger le texte du Protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés. Pendant les six années qui ont suivi, le groupe de travail où siégeaient les représentants d'un grand nombre de pays, d'ONG et d'organismes des Nations Unies, ainsi que des experts indépendants, a participé à des échanges de vues et peaufiné le projet de texte.

C'est ainsi que le Protocole facultatif à la Convention relatif à l'implication d'enfants dans les conflits armés, qui est entré en vigueur le 12 février 2002, porte à 18 ans l'âge minimal de participation aux conflits et de recrutement obligatoire dans les forces armées. Ce texte fait interdiction de recrutement d'un enfant de moins de 18 ans dans un groupe armé d'une part, son utilisation dans des conflits armés d'autre part, mais autorise implicitement l'engagement volontaire sous réserves des mesures de protection efficaces.

On a ensuite l'émergence d'autres instruments juridiques importants en la matière.

Le Statut de la CPI (1998) a marqué un tournant historique dans la lutte contre l'utilisation des enfants soldats dans les conflits armés puisqu'il considère comme un crime de guerre « le fait de procéder à la conscription ou à l'enrôlement d'enfants de moins de 15 ans dans les forces armées nationales ou de les faire participer activement à des hostilités » dans un conflit armé international et « le fait de procéder à la conscription ou à l'enrôlement d'enfants de moins de 15 ans dans les forces armées et dans les groupes armés ou de les faire participer activement à des hostilités » en cas de conflit ne présentant pas un caractère international68(*).

La Convention de l'OIT adoptée en juin 1999 et entrée en vigueur en novembre 2000 considère l'utilisation des enfants à des fins militaires comme l'une des «pires formes du travail des enfants» et prévoit l'élaboration de programmes d'action pour éliminer le recours aux enfants soldats et la prise de « toutes les mesures nécessaires pour assurer la mise en oeuvre effective et le respect des dispositions » et ce, « y compris par l'établissement et l'application de sanctions pénales ou, le cas échéant, d'autres sanctions ».

La Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant de 1990, entrée en vigueur en novembre 1999, est le premier traité régional à fixer à 18 ans l'âge minimal de la conscription et de la participation aux hostilités.

Outre ces normes juridiques internationales, il faut également noter l'intérêt croissant des milieux diplomatiques et parfois politiques pour ce phénomène. Plusieurs ONG participent au suivi et à l'établissement de rapports sur les droits des enfants dans les situations de conflit et leurs activités contribuent à inspirer l'action du Conseil de Sécurité.

A cet égard, le Conseil de Sécurité a adopté depuis 1999 et à plusieurs reprises six résolutions exprimant que le recrutement d'enfants comme soldats constitue un danger pour la paix et la sécurité dans le monde:

- La résolution 1261172 (1999)69(*) ;

- La résolution 1314173 (200070(*) ;

- La résolution 1379174 (2001)71(*) ;

- La résolution 1460175 (2003)72(*) ;

- La résolution 1539176 (2004)73(*) ;

- La résolution 1612177 (2005)74(*).

Par ailleurs, il s'avère important de mentionner que la Coalition publie tous les trois ans un rapport mondial sur les enfants soldats. La Watchlist and Armed Conflict est un autre réseau d'ONG qui surveille le droit des enfants et signale les cas de violation de ces droits à certains pays.

Ces résolutions et ces rapports d'ONG représentent un pas important dans la lutte engagée pour mettre fin à l'utilisation d'enfants dans les conflits armés tout comme la réglementation de l'âge de recrutement et de participation des enfants aux hostilités.

B- La réglementation de l'âge de recrutement et de participation des

enfants aux hostilités

Les Conventions de Genève de 1949 relatives à la protection des victimes de la guerre contiennent de nombreuses dispositions portant sur les besoins de protection spécifique des enfants mais ne prévoient aucune disposition en matière d'âge minimum de recrutement ou de participation aux hostilités. Il a fallu attendre le Protocole additionnel du 8 juin 1977 pour que soit adoptée une disposition de ce type, ce qui a constitué à l'époque une étape importante dans l'amélioration de la protection conférée aux enfants par la IVe Convention de Genève.

Ensuite, la pression que certaines ONG ont exercée sur les Etats afin d'élever l'âge minimum de participation aux hostilités et de recrutement à 18 ans a été déterminante. En effet, pendant de nombreuses années, les défenseurs des droits de l'enfant se sont employés à faire porter de 15 à 18 ans cette norme à la faveur d'un nouveau traité international. A cet égard, le CICR a joué un rôle d'autant plus important qu'il jouit d'une grande reconnaissance des Etats qui se répercute sur le poids des opinions qu'il avance tant au niveau de l'élaboration des règles de droit qu'au niveau de leur interprétation.

D'autres ONG, tels que la « Coalition75(*)», se sont également mobilisées dans ce sens. Tout comme le CICR, la Coalition a fermement milité pour l'adoption du Protocole facultatif, notamment en invoquant la propension des législations nationales76(*) et des textes internationaux récents77(*) à fixer à 18 ans la majorité. Son but est de faire connaître au public le problème posé par les enfants soldats et de faire pression sur les Etats afin qu'ils signent le Protocole facultatif à la CDE. Le relèvement en droit international de l'âge minimum de participation aux hostilités améliore très nettement la protection des enfants.

Sur le plan pratique, cette disposition permettra d'empêcher au moins la participation d'enfants de moins de quinze ans aux conflits armés. En effet, les chefs militaires ont dans le passé souvent justifié la présence d'enfants soldats dans leurs troupes par l'argument selon lequel les recrues avaient quinze ans mais paraissaient plus jeunes en raison de la précarité de leurs conditions de vie, argument impossible à réfuter en l'absence de document permettant de prouver l'âge des enfants78(*). L'incorporation abusive d'enfants de moins de quinze ans deviendra impossible avec le relèvement de l'âge minimum à 18 ans, étant donné la différence d'âge désormais très nette.

A l'occasion de la 27e conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge de novembre 1999, les membres ont insisté sur la recommandation de la 26e Conférence qui fait partie du plan d'action 2000-2003 et qui prévoit qu'il convient de s'abstenir de recruter des personnes de moins de 18 ans et d'éviter qu'elles ne prennent part aux hostilités.

Toutefois, l'action des ONG ne se limite pas à l'adoption des normes interdisant l'utilisation des enfants soldats. Celle-là s'étend jusqu'à l'entrée en vigueur de celles-ci.

SECTION II: L'APPORT DES ONG CONCERNANT L'ENTREE EN VIGUEUR DES NORMES

La guerre ne demeure pas la meilleure forme de revendication. Certains acteurs tels que les ONG mènent des campagnes en faisant pression sur les décideurs. Ces campagnes (paragraphe 1), encore appelées lobbying79(*), ont conduit à des développements importants concernant les enfants soldats (paragraphe 2). Cette action des ONG en tant que groupes de pression, est bien résumée par l'internationaliste Pierre de Senarclens: «Les ONG ont une capacité évidente d'infléchir les opinions publiques».

Paragraphe 1: Les campagnes auprès des Etats aux fins de ratification des

textes adoptés

Les grands Etats Occidentaux sont les interlocuteurs privilégiés pour tenter de convaincre les parties aux conflits intra-étatiques de se soumettre aux conventions humanitaires. En effet, ces Etats sont capables d'établir des pressions diplomatique, économique et même militaire susceptibles de faire changer d'avis les belligérants les plus réfractaires.

Cependant, la collaboration des Etats n'est pas toujours possible à obtenir dans la mesure où ils refusent souvent de se mêler de conflits internes dans lesquels ils n'ont pas d'intérêt évident. C'est alors que les organisations internationales en général et les ONG en particulier agissent en faveur de l'adhésion aux droits des enfants.

Leurs actions se résument en des pressions sur le gouvernement pour qu'il ratifie et incorpore dans la législation nationale certains instruments internationaux de protection des enfants soldats tels que le Protocole facultatif à la CDE concernant la participation des enfants aux conflits armés et la Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale (CPI).

Bien sûr, c'est la pratique qui importe puisque les déclarations faites par les Etats ne sont que des promesses vides de sens si les Etats ne veulent pas les mettre en pratique. Les pressions internationales des ONG peuvent cependant influencer les Etats car elles détiennent une force de revendicateur et de contrariété du pouvoir étatique lorsque ce dernier ne semble plus respecter les conventions.

Le lobbying80(*) des ONG pour éradiquer le phénomène des enfants soldats est en vogue. Il consiste à obliger l'Etat ou d'autres structures à inverser les tendances ou encore à renoncer à une décision qui ne semble pas humanitaire. Dans le cadre de notre sujet, il existe une campagne mondiale contre le phénomène des enfants soldats. Cette campagne à l'appui du Protocole facultatif doit son succès à la coopération étroite et efficace de certains acteurs tels que: des gouvernements, des organismes des Nations Unies, des ONG, en particulier la Coalition contre l'utilisation d'enfants soldats, l'UNICEF, le Comité des droits de l'enfant de l'ONU et de bien d'autres entités.

La Coalition contre l'utilisation d'enfants soldats a fait de l'adoption, de la ratification et de l'application du Protocole facultatif l'un des principaux objectifs de la campagne mondiale qu'elle a lancée pour prémunir les enfants contre leur utilisation dans les conflits armés. La Coalition exécute des activités de mobilisation, de recherche, de suivi et de renforcement des capacités en collaborant avec les coordonnateurs régionaux et d'autres ONG dans la région africaine des Grands Lacs, dans la région de l'Asie et du Pacifique, en Europe, en Amérique latine, en Amérique du Nord et au Moyen Orient.

Pour mener à bien ses objectifs, la Coalition collabore avec le Mouvement International de la Croix Rouge et du Croissant Rouge (MICR) et d'autres organisations directement impliquées dans le travail en faveur des enfants.

Ainsi, en 1998, l'Alliance internationale d'aide à l'enfance a intensifié son action en faveur des enfants soldats. Son principal objectif étant d'obtenir l'adoption du Protocole facultatif qui interdirait l'enrôlement d'enfants âgés de moins de 18 ans et leur utilisation dans des conflits armés et faire assurer le respect des dispositions de cet instrument par les Etats.

La particularité de cette organisation réside en son mode d'intervention : dès qu'Amnesty International reçoit des informations concernant des cas d'enfants enrôlés, une équipe de chercheurs vérifie ces allégations. Une heure plus tard, des appels sont envoyés par courrier électronique ou par fax à toutes les sections d'Amnesty dans le monde.

Par ailleurs, comme autre actions entreprises par la Coalition, nous pouvons citer la protestation de Human Right Wacth (HRW) le 11 Août 1998 contre le recrutement par la RDC des enfants de 12 ans dans l'armée nationale81(*).

De même, la Coalition pour le droit de l'enfant au Bangladesh a organisé des rassemblements devant la National Parliament House (Parlement) et le National Press Club le 12 février 2002, pour marquer l'entrée en vigueur du Protocole facultatif.

Un autre moment important de la campagne lancée pour protéger les enfants a été la nomination en 1994 de Graça Machel, ex-Ministre de l'éducation du Mozambique, en qualité d'experte indépendante du Secrétaire général de l'ONU, chargée de réaliser une étude de l'impact des conflits armés sur les enfants. Dans son rapport historique intitulé «l'impact des conflits armés sur les enfants» et publié en 1996, Mme Machel appelle à en finir d'urgence avec l'exploitation cynique des enfants soldats82(*). Ainsi, après avoir reçu les dix ratifications nécessaires pour entrer en vigueur, le Protocole facultatif est devenu juridiquement contraignant le 12 février 2007.

En plus, certaines ONG s'efforcent même d'atteindre des filles associées au conflit armé au moyen, par exemple, de campagnes de sensibilisation, pour les encourager à rejoindre les programmes de libération et de réinsertion.

C'est pourquoi, les ONG sont définies comme "other competent bodies83(*)" et leurs rapports sont vivement souhaités.

Paragraphe 2: La portée de ces campagnes.

Des résultats encourageants ont été obtenus par la Coalition à différents niveaux et sur divers plans84(*). A cet égard, la Coalition belge, où siège entre autres Amnesty International Vlaanderen, s'est occupée d'empêcher des groupes armés de recruter ou d'utiliser des enfants. Elle s'occupe également de mettre en sécurité d'anciens enfants soldats ainsi que de leur réhabilitation et réinsertion dans la société. Pour ce faire, elle loge provisoirement les enfants démobilisés dans des centres pendant qu'on recherche leurs familles. Ce fut le cas en Sierra Léone, en RDC, en Colombie et dans le nord de l'Ouganda, pour ne citer que ceux-là.

Elle s'engage en particulier contre l'exploitation des enfants dans les conflits armés, notamment au travers du programme « Protection de l'enfance » mené en partenariat avec l'UNICEF au Congo, en Guinée-Bissau, au Libéria, en Sierra Léone et en RDC.

De même, au sud Soudan, Rädda Barnen, une organisation membre de la Coalition a réussi à convaincre le SPLA de cesser de recruter les moins de 18 ans.

Ces campagnes aident beaucoup à la réinsertion des enfants et renforcent les réseaux de professionnels et d'organisations locales, notamment les ONG concernées par cette question. Elles éveillent auprès de l'opinion publique internationale une prise de conscience sur le sort des enfants soldats.

Par ailleurs, comme autre portée des campagnes, il y a le fait qu'un nombre croissant de gouvernements modifient leurs lois et leur pratique afin d'interdire l'enrôlement des personnes âgées de moins de 18 ans dans les forces armées. A cet égard, la Constitution de transition de la RDC, en son article 187, interdit le recrutement et la participation dans les hostilités, d'enfants de moins de 18 ans, en ces termes: « Nul ne peut être recruté dans les Forces Armées de la République Démocratique du Congo ni prendre part à des guerres ou à des hostilités s'il n'a atteint l'âge de 18 ans révolus au moment du recrutement ».

Dans son Code du Travail, en harmonie avec la Convention n°182 du BIT, l'article 6 fait interdiction de « toutes les pires formes de travail des enfants ». L'expression « les pires formes de travail des enfants » comprend notamment « le travail forcé ou obligatoire, y compris le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés ».

En outre, les différentes campagnes menées par l'UNICEF, le CICR, et la Conférence de Winnipeg en septembre 2000 sur les enfants touchés par la guerre ont pu aboutir à la proposition des solutions au problème des enfants soldats dont voici quelques unes:

- Information accrue de l'opinion publique et des médias par des campagnes de promotion des normes juridiques nationales et internationales en vue d'entraîner les gouvernements à faire pression sur les pays où l'on trouve des enfants soldats pour faire cesser ce fléau

- Des programmes de réinsertion sociale et de soutien psychologique doivent être mis en place parallèlement aux OMP. Des mesures spéciales doivent être prises pour éviter que les enfants ne s'engagent ou soient enrôlés à nouveau.

- Les enfants soldats doivent être mis à l'abri de la vengeance, de l'exécution sommaire, de la détention arbitraire, de toute autre mesure punitive conformément à la CDE. Toute poursuite en justice impliquant des enfants soldats doit se faire dans un esprit de justice garantissant l'équilibre psychologique ainsi que la réinsertion sociale de l'enfant.

En somme, il n'y a pas de bonne méthode d'application universelle pour réduire l'utilisation du phénomène d'enfants soldats. Il y a plutôt un faisceau de réponses, qui se construisent au fur et à mesure des besoins rencontrés et des demandes émanant des ONG.

Après avoir examiné l'apport des ONG dans la détermination des normes, envisageons à présent leur apport dans l'application des normes relatives à la protection des enfants soldats.

CHAPITRE II

LE ROLE DES ONG DANS L'APPLICATION DES NORMES RELATIVES A LA PROTECTION DES ENFANTS SOLDATS

L'Afrique est le continent qui compte le plus grand nombre de conflits ouverts dans le monde. Il s'agit comme nous l'avons évoqué, de conflits internes ou transfrontaliers aux conséquences tragiques pour les populations civiles et en particulier pour les enfants, qui souffrent déjà de la situation générale sur le continent.

L'utilisation systématique des enfants dans les combats malgré la pléthore d'instruments relatifs à la protection des enfants heurte la Communauté internationale. Dès lors, les acteurs des relations internationales, notamment les ONG, unissent leurs efforts pour mettre fin ou pour restreindre l'ampleur du phénomène à travers, d'une part la diffusion et le contrôle sur l'application des normes (section I) et d'autre part leur coopération avec la CPI afin de réprimer les exactions collectives voire massives faites aux victimes des conflits armés et en particulier les enfants (section II).

SECTION I : LA DIFFUSION ET LE CONTROLE DES NORMES

Pour avoir des chances d'être appliquée, la règle de l'interdiction de la participation des enfants aux hostilités doit être diffusée auprès des usagers ou des destinataires, c'est-à-dire des civils, des militaires et d'un public plus large85(*). Il est donc nécessaire de développer la diffusion des normes (paragraphe 1) autant que faire se peut avant tout conflit armé. La diffusion étant à long terme, aussi importante que le contrôle du respect du droit (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La diffusion et la clarification des normes.

La diffusion du droit humanitaire, facteur préventif de la protection des victimes de guerre, est une obligation conventionnelle des Etats86(*).

Mais force est de constater que peu de pays liés par les Conventions de 1949 et leurs Protocoles additionnels de 1977 se sont sérieusement efforcés de remplir leur obligation formelle de faire connaître les principes humanitaires. Face à ce manquement, le CICR et certaines ONG se sont engagés dans une entreprise de diffusion et de clarification pour améliorer cette situation.

Effectivement, la protection des enfants en temps de guerre est l'un des sujets de diffusion du CICR. Elle est mentionnée dans plusieurs documents généraux. C'est ainsi que, par exemple, dans un document intitulé «Règles Internationales destinés à tous les combattants-Respectez les civils», les enfants figurent comme membres de la population civile ne participant pas aux combats. On peut encore mentionner «Le CICR et les enfants dans les situations de conflits armés87(*)» et «l'Enfant dans la guerre88(*)», dans lesquels la question de la participation des enfants aux hostilités occupe une place importante.

D'autres organisations internationales, notamment les ONG, sont des sources de renseignements89(*) précieux. Ainsi, outre l'UNICEF et le HCR, Défense des enfants International, Rädda Barnen et Swedish Save the Children fournissent régulièrement des informations sur les enfants soldats dans leurs publications respectives. Citons encore parmi elles, le Comité Consultatif Mondial de la Société des Amis (Quakers), qui est une ONG qui s'occupe particulièrement de la diffusion d'informations de tous ordres relatives à la participation des enfants dans les conflits armés. A cet effet, le Bureau Quaker auprès des Nations Unies à Genève publie et distribue, depuis 1979, un bulletin mensuel intitulé «Children Bearing Military Arms», préparé par Dorothea E. WOODS. Ce bulletin traite aussi bien des aspects historiques que de l'actualité sur la question des enfants soldats. La sortie du Rapport global sur les enfants soldats à l'été 2000 incite également à une sensibilisation auprès d'un grand nombre de personnes au sein des populations.

De même, Save the Children au Sri Lanka soutient depuis un certain temps des structures institutionnelles pour surveiller l'application de la CDE dans quatre districts au moins, y compris Jaffna. En conséquence, Jaffna a établi un comité de district, quinze comités de division et trois cent quinze comités de division de village90(*). Au Rwanda, Save the Children Fund-US et Haguruka (une ONG locale) ont contribué à la diffusion de la CDE en préparant une version officielle en Kinyarawanda91(*). Cette version a été adoptée dans la législation rwandaise et popularisée par le biais de radio, du théâtre et de publication92(*) comme le stipule l'article 128 de la IIIème Convention de Genève.

La diffusion des informations se fait également, surtout depuis ces dernières années, par voie de conférences93(*), où la question des enfants soldats occupe une place importante. Ainsi, par l'organisation de conférences régionales, la Coalition favorise t-elle la prise de position des gouvernements en faveur du Protocole facultatif concernant l'implication des enfants dans les conflits armés.

A cet égard, tenue des conférences d'Accra et de Winnipeg a favorisé une plus grande diffusion de l'information sur la situation des enfants soldats. Tout comme le Sommet des enfants de 2001, reporté en mai 2002 en raison des évènements du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, ces conférences internationales sont utiles pour déterminer les progrès qui ont été faits et les nouvelles priorités à définir.

Comme sus mentionnée, la diffusion et la clarification des connaissances sur la question sont aussi importantes que leur contrôle.

Paragraphe 2 : Le contrôle

Pour être respecté et appliqué, le DIH a besoin de mécanismes de mise en oeuvre. La Commission internationale d'établissement des faits est l'un des mécanismes qu'ont établi les Conventions de 1949 et les deux Protocoles de 1977.

Le contrôle de l'application du droit humanitaire par la Commission peut être inefficace ou impossible du fait de son mécanisme94(*). Le CICR peut pallier cette lacune en jouant, exceptionnellement, un rôle de « dénonciateur ». En effet, le CICR est officiellement chargé de vérifier l'application des Conventions de Genève et de leurs Protocoles, tâche dont il s'acquitte d'une manière discrète et efficace. Ce rôle lui est attribué à la fois par le droit conventionnel95(*) et par les statuts de la Croix-Rouge internationale96(*). Mais l'une des faiblesses du CICR réside dans la rareté, voire l'absence de moyens de pression dont il peut disposer. En conséquence, il se contente d'entreprendre des démarches auprès des Parties en conflit pour faire cesser les violations du DIH, mais ses démarches restent très généralement confidentielles97(*).

Toutefois, il arrive que le CICR, malgré sa réputation de discrétion, sorte de cette confidentialité et prenne publiquement position sur les violations, en recourant à la dénonciation et à la publicité98(*). Il ne recourt à ce moyen que lorsqu'il y va de l'intérêt des victimes, et qu'il n'est plus possible d'agir efficacement par le biais de la persuasion et la discrétion.

La plus notoire des dénonciations publiques de la part du CICR a été, en mai 1983, celle de la violation des règles humanitaires par l'Iran et l'Irak99(*). A cette occasion, la CICR a lancé un appel, appuyé d'un mémorandum, demandant aux Etats Parties aux Conventions de Genève de déployer leurs efforts pour que le droit international humanitaire soit intégralement respecté.

L'année suivante, le CICR a constaté, cette fois, l'ampleur du problème à travers le monde. Dans un bulletin de 1984100(*), il a noté que des enfants âgés de 11 à 12 ans combattaient dans la guerre dans plusieurs parties du monde, y compris dans la guerre du Golfe, en Amérique centrale, en Asie et en Afrique, sans que cette fois le CICR désigne les auteurs de la violation. Quelles qu'aient été les critiques émanant d'une certaine presse101(*), cette attitude adoptée par le CICR était tout à fait conforme à sa politique générale face aux violations des droits et des principes humanitaires.

Au demeurant, et de façon générale, toutes les ONG «sont invitées à fournir des informations et à faire des observations» Dans plus de 20 pays, elles ont publié des contre-rapports qui complètent les rapports présentés par les gouvernements ou en contestent la teneur.

L'objectif principal des ONG étant d'assurer l'application effective du droit et de prévenir sa violation, leurs activités les conduisent forcément à évaluer les mesures prises par les Etats in concreto et à exercer une surveillance quotidienne sur leur mise en oeuvre. Les rapports qu'elles élaborent sont ainsi un moyen de dénoncer sur la scène internationale les violations des droits de l'enfant et d'alerter les responsables politiques sur l'imminence d'un conflit. Ils permettent aussi de donner une orientation pragmatique à l'élaboration des mesures prises en vue de l'application des droits de l'enfant. L'activité des ONG se présente par conséquent comme un facteur de surveillance des agissements des Etats et des groupes armés. Leurs dénonciations ont d'autant plus de poids que les médias permettent de les diffuser à l'échelle internationale.

Toutefois, l'action des différents acteurs de la communauté internationale est souvent remise en cause du fait de l'absence des mesures de répressions effectivement applicables. L'impunité des exactions commises lors des conflits armés peut participer à accroître les risques de conflits dans le monde. L'initiation de la création de la CPI est donc opportune.

SECTION II : LA COOPERATION AVEC LA COUR PENALE

INTERNATIONALE

La création d'une CPI est une nécessité face à l'ampleur et à la cruauté des crimes commis, et dont la répression s'impose tant pour des raisons de justice élémentaire que pour accompagner le retour à la paix et à la sécurité internationale102(*). On sait que le statut de Rome portant création de la CPI a été marqué par l'influence de nombreuses ONG, en particulier la Coalition, qui ont été de véritables partenaires de négociations, soit directement, soit indirectement (en investissant certaines délégations, en définissant leur position et en fournissant leurs arguments). La Coalition pour la CPI est un réseau de plus de 2500 ONG oeuvrant pour une Cour pénale internationale juste, efficace et indépendante. Leur coopération avec la Cour peut se faire en deux temps : d'une part dénoncer les violations constatées (paragraphe 1) et d'autre part, participer aux procédures de la CPI (paragraphe 2).

Paragraphe 1: La dénonciation des violations constatées

La dénonciation, au sens large, s'entend d'«un acte par lequel un citoyen signale aux autorités policières, judiciaires ou administratives une infraction commise par autrui»103(*). Dans le cadre de notre étude, les négociations dont il s'agit ici, sont celles relatives aux violations des droits des enfants utilisés comme soldats dans les conflits armés. Ces dénonciations faites par les ONG peuvent se faire tant devant la CPI (A) que devant le Conseil de Sécurité de l'ONU (B).

A - La dénonciation des violations à la Cour

Les ONG jouent un rôle de collaborateurs de la Cour en présence des délits particuliers, où les victimes104(*) sont les femmes et surtout les enfants. Ces ONG sont tout aussi proches de ces victimes que des témoins. Ainsi, d'après Amnesty International, pour que cette protection des victimes soit effective et pas seulement apparente, la participation conjointe des ONG et des organisations médicales internationales ayant une large expérience dans le domaine est absolument nécessaire. C'est en cela qu'elles publient régulièrement des rapports sur les crimes commis à l'encontre des droits humains qui pourraient tomber sous la compétence de la CPI.

La Coalition internationale est la principale ONG qui surveille l'utilisation d'enfants soldats dans le monde entier. Elle mène des enquêtes sur les enfants soldats qu'elle présente à la Cour, enquêtes qui présentent des informations détaillées pour chaque pays sur le recrutement et l'utilisation d'enfants dans des conflits armés par les forces gouvernementales, des groupes paramilitaires soutenus par le gouvernement et des groupes politiques armés.

Si les ONG pensent que les abus sur lesquels elles ont enquêté sont suffisamment graves pour mériter une enquête de la Cour, elles doivent adresser au Procureur des rapports solidement documentés sur ces crimes. A cet égard, les rapports des ONG ont déjà joué un rôle important en inspirant l'enquête sur la RDC. Le procureur a, en effet, reçu six communications concernant la situation en Ituri, parmi lesquelles «deux rapports détaillés émanant d'organisations non gouvernementales». A l'évidence, ces rapports ont convaincu le Procureur d'évoquer la situation en Ituri comme « d'un caractère d'exceptionnelle gravité». Cependant, les ONG doivent s'abstenir d'adresser au Bureau du Procureur chaque élément d'information dont elles disposent, afin d'éviter de submerger le Procureur et de risquer qu'il accorde moins d'attention aux rapports qu'il recevra.

Grâce à leur présence et les contacts qu'elles ont sur le terrain, les ONG ont un accès privilégié aux informations et témoignages. Elles peuvent donc être une importante source d'informations pour le Procureur de la CPI dans plusieurs cas. Par exemple, lors de l'analyse d'une situation (afin de déterminer si des violations graves se sont produites), lors des enquêtes, et finalement lors des poursuites, que ce soit pour faire directement un témoignage, fournir toute autre forme de preuve ou soumettre des cas amicus curiae105(*).

Mais quel type d'informations les ONG doivent-elles adresser au Procureur? Les ONG adressent des informations sur les crimes qui concernent des cas individuels ou répertoriés, en fournissant le plus de détails possible. Les rapports des  ONG peuvent expliquer le contexte politique et historique des crimes en cours afin de permettre au Procureur une meilleure compréhension de la situation. En établissant un rapport sur la capacité ou la volonté d'un Etat à enquêter ou à poursuivre des crimes, les ONG aident le Procureur à déterminer si l'affaire relève bien de la compétence de la Cour ou si elle doit être laissée aux tribunaux nationaux. Autrement dit, ces informations permettent au Procureur de décider s'il y a lieu ou non d'ouvrir une enquête.

Les ONG informent également le Procureur de la faisabilité, au plan pratique, des investigations. Il n'est pas possible de dresser ici la liste complète de toutes les informations que les rapports des ONG devraient inclure. Mais quand une ONG adresse des informations sur des crimes commis en violation des droits humains, celles-ci doivent absolument comprendre les éléments suivants:

- La situation géographique (en RDC par exemple: la province, le territoire, la collectivité, le groupement; en Ouganda : le district, le comté, le sous-comté ou canton)La date, l'heure et la durée de l'incident

- La chronologie de l'incident

- La nature du crime (torture, viol, homicide, recrutement illégal d'enfants, etc.) et les moyens utilisés

- Les raisons possibles de l'incident

- Identifier les auteurs présumés (l'armée, un groupe armé ou les individus impliqués)

- L'identité des victimes (nom, âge, sexe, profession, adresse, informations pertinentes sur l'ethnie, la religion ou autre appartenance communautaire)

- Une liste des preuves disponibles comme des photos, des preuves écrites. Cependant, il est déconseillé d'envoyer les preuves elles-mêmes, à moins que le Procureur en ait fait la demande, pour ne pas risquer qu'elles se perdent, soient endommagées ou disséminées.

Quand elles envoient des informations à la Cour, les ONG doivent toujours s'assurer de garder en leur possession une copie de la communication. Elles peuvent parfois envoyer directement des informations à d'autres organes de la Cour. En particulier, elles peuvent adresser leurs conclusions à n'importe laquelle des Chambres dans un document légal, en l'occurrence l'amicus curiae106(*). Les ONG peuvent aussi s'adresser directement à la Cour pour représenter des victimes. En effet, les ONG peuvent représenter des victimes qui souhaitent adresser des informations en rapport avec la décision du Procureur de ne pas enquêter sur une affaire. Les ONG peuvent enfin adresser des informations sur une affaire à un gouvernement dont l'Etat est partie au traité de Rome, ou même au Conseil de sécurité de l'ONU et leur demander de soumettre cette affaire à la Cour.

B - La dénonciation des violations au Conseil de Sécurité de l'ONU

Le Conseil de Sécurité des Nations Unies est l'organe exécutif de ONU. Il a « la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationale » selon l'article 24 de la Charte des Nations Unies. A ce titre, il est tenu de mettre en place des mécanismes pour le maintien de cette paix.

Le Conseil de Sécurité a en effet mis en place un mécanisme de surveillance, en ce qui concerne les enfants soldats, mécanisme destiné à lutter contre leur exploitation par les gouvernements et groupes armés dans les zones de conflit. Cela a été rendu possible par l'action de certaines organisations, et en particulier, la Coalition.

Pour ce faire, celle-ci présente régulièrement au Conseil de Sécurité des notes d'information et des données sur des pays qui exploitent les enfants comme soldats. En général, ces notes et données se font en prévision du débat annuel du Conseil sur l'implication d'enfants dans des conflits armés.

Par ailleurs, selon Casey Kelso107(*), depuis 2002, vingt et un groupes armés ont été cités dans trois rapports consécutifs et les preuves contre eux sont accablantes. Il faut maintenant des actions concrètes en réponse aux rapports des Nations unies.

C'est fort de ce constat que la Coalition a demandé au Conseil de Sécurité d'imposer un embargo sur les armes et des sanctions ciblées spécifiquement sur le recrutement et l'utilisation des enfants soldats.

Ainsi, parmi les cinq pays figurant sur l'agenda du Conseil de Sécurité et qui sont cités dans le dernier rapport du Secrétaire Général, quatre (la Côte d'Ivoire, la RDC, la Somalie et le Soudan) sont déjà soumis à des sanctions ; seul le Burundi y échappe.

La Côte d'Ivoire, la Somalie et les parties en guerre dans certaines régions de la RDC et du Soudan, sont soumis à un embargo sur les armes - tous ces pays sont identifiés comme ayant des enfants soldats engagés dans les combats. «Il ne devrait pas être difficile d'ajouter la fin de l'utilisation des enfants soldats comme condition à la levée des sanctions », a conclu Casey Kelso.

La Coalition a aussi demandé au Conseil de Sécurité de veiller à la mise en oeuvre effective d'un dialogue avec les parties citées, afin de développer des plans d'action concrets pour mettre fin à l'emploi des enfants comme soldats. En avril 2004, le Conseil de Sécurité a appelé à un tel dialogue avec les groupes qui utilisent des enfants dans les pays qui figurent sur son agenda. Mais le Secrétaire Général a reconnu qu'il n'y a pas eu beaucoup de dialogue à cause de problèmes de sécurité et du manque de coopération des parties.

La Coalition a alors demandé un élargissement du dialogue pour qu'il puisse inclure les parties dans les conflits cités par le Secrétaire Général mais qui ne figurent pas sur l'agenda du Conseil de Sécurité. Il s'agit de la Colombie, du Myanmar, du Népal, des Philippines, du Sri Lanka et de l'Ouganda.

Des équipes des Nations unies ont donc été désignées pour entamer un dialogue avec ces groupes et mettre en place un plan assorti d'un calendrier. Toutefois, à côté de la dénonciation, les ONG participent aux différentes procédures de la Cour pour une meilleure protection des enfants soldats.

Paragraphe 2: La participation aux procédures de la Cour Pénale

Internationale

Il existe plusieurs moyens par lesquelles les ONG peuvent contribuer au travail de la CPI, et leur contribution peut dépendre des situations sur lesquelles elles travaillent. La participation aux enquêtes (A) et la participation aux procès (B) constituent leurs principaux modes d'action.

A - La participation aux enquêtes

Le rôle des ONG dans les enquêtes de la CPI est extrêmement important. En effet, les ONG, sont souvent les premières à témoigner des violations massives de droits de l'homme et de droit humanitaire. Etant donné qu'elles travaillent directement avec les populations affectées, elles ont des contacts privilégiés avec les victimes et témoins, et peuvent également disposer d'éléments prouvant que ces violations se sont effectivement déroulées. Les ONG ont pour habitude de documenter les événements auxquels elles sont témoins ou que des témoins directs leur ont rapportés.

Mais doivent-elles réellement travailler comme des enquêteurs? La réponse est négative. Les ONG n'ont pas le même mandat que celui de la CPI et fonctionnent donc différemment. Elles ne peuvent que fournir les informations sur les crimes qu'elles ont rassemblées au cours de leur travail habituel. «Elles ne sont pas supposées se conduire comme des mini-procureurs. Il revient au seul Bureau du Procureur de dégager des preuves solides pouvant être présentées à la Cour»108(*).

Par ailleurs, pour mener leur investigation, les ONG doivent-elles n'envoyer que des documents concernant les zones sur lesquelles le Procureur a exprimé un intérêt particulier?

La réponse nous sera donnée en nous appuyant sur les cas d'Ituri en RDC et celui du nord de l'Ouganda.

S'agissant de la RDC, la Cour risque de se concentrer pour un temps sur l'Ituri. Mais ceci ne signifie pas que les ONG doivent limiter leurs contributions à la seule Ituri. Quand le Procureur a annoncé l'ouverture d'une enquête en RDC en juin 2004, il a clairement indiqué que ses investigations couvriraient l'ensemble du territoire de RDC. Si les ONG disposent d'informations pertinentes sur des crimes commis dans d'autres régions de la RDC, elles doivent donc les adresser au Bureau du Procureur.

En Ouganda, le Procureur se concentrera sur le nord du pays à la demande du gouvernement ougandais. Par conséquent, les ONG doivent envoyer des informations concernant les crimes commis par toutes les parties en relation avec le conflit dans le nord de l'Ouganda. Au-delà des enquêtes, les ONG participent parfois aux procès qui ont lieu.

B - La participation au procès

Témoigner devant un tribunal n'est pas une sinécure pour une victime de crimes graves, notamment les enfants associés aux hostilités. Ces dernières années, on a pris conscience du fait qu'une audition peut laisser des séquelles psychiques lorsque la victime est confrontée directement à son agresseur. L'article 42 §9 du Statut de Rome autorise donc les ONG à jouer un rôle de conseillers pour défendre les victimes et les témoins. C'est la raison pour laquelle les ONG apportent assistance à divers nivaux, tant aux victimes qu'aux témoins, lors des procès.

Tout d'abord, les ONG aident les victimes à évaluer les risques pour leur sécurité qui peuvent se présenter du fait de leur participation. Elles peuvent aussi prendre des mesures de protection au plan local. Ensuite, les ONG doivent expliquer aux victimes les différentes étapes de l'examen des faits puis de l'enquête formelle.  Pour cela, elles encouragent les victimes à se faire connaître pour des affaires qui sont liées aux situations faisant l'objet d'une enquête. Enfin, les ONG peuvent aider les victimes à remplir les formulaires qui doivent l'être pour demander à être associé à l'affaire109(*). Les victimes peuvent demander leur participation quand une enquête formelle a été lancée ou même avant, si le Procureur a décidé d'enquêter de sa propre initiative.

S'agissant de l'assistance aux victimes et témoins auprès de la Cour, les ONG servent de lien entre les victimes et les témoins et la Cour; à ce titre:


· Elles envoient à la Cour les informations recueillies auprès des victimes et des témoins,


· Elles informent les victimes et les témoins des différentes possibilités de participer aux travaux de la Cour et les aident à y prendre part,


· Elles aident les victimes et les témoins à obtenir une représentation juridique et peuvent même représenter les victimes à toute étape du procès,


· Elles aident les victimes à obtenir réparation et les informent des risques pour leur sécurité et les aident à prendre des précautions.

En outre, les ONG peuvent demander à participer aux procédures quand elles ont elles-mêmes été victimes des crimes commis. Les statuts de la Cour définissent les victimes comme des « personnes qui ont eu à souffrir de la commission de tout crime entrant dans la juridiction de la Cour ».  De ce fait, les ONG qui ont eu à « souffrir directement » peuvent aussi être des victimes.

Au total, les ONG jouent un rôle très important dans le système légal international quant à la protection des enfants soldats.

CONCLUSION GENERALE

Un nombre impressionnant de normes juridiques a été consacré à la problématique d'enfants soldats.

Malgré cela, les parties aux conflits continuent de saper les droits des enfants qui auraient pu bénéficier d'une protection spéciale. Le recrutement d'enfants de moins de quinze ans et leur utilisation pour les faire participer activement à des hostilités constituent un crime de guerre selon le droit international110(*). Les responsabilités des enfants coupables de crimes, des recruteurs, des Etats et des groupes armés pour violation des règles internationales interdisant le recrutement des enfants et leur participation à des hostilités sont reconnues.

Les droits de l'homme en général ne suffisent plus à assurer la protection des droits de l'enfant. En effet, celui-ci se différencie de l'adulte par une situation de faiblesse particulière, tant physique qu'intellectuelle ou morale liée à son âge. Cette position désavantageuse milite en faveur d'un droit à une protection spéciale mais, en même temps, elle interdit d'accéder à tous les droits de l'homme111(*).

L'enfant est sujet à part entière des droits collectifs attachés à une catégorie particulière parmi les individus. Mais il n'est pas un sujet actif, faute de pouvoir faire valoir personnellement ses droits.

De plus, les efforts des Etats affectés par les conflits armés, et des agences spécialisées, impliqués dans la protection des droits des enfants, sont certes, louables, mais demeurent insuffisants par rapport à l'ampleur du phénomène d'enfants soldats qui atteint des proportions inquiétantes surtout en Afrique. Les processus de désarmement, démobilisation et réinsertion devraient s'inscrire dans un cadre global de retour à la paix et de la reconstruction pour éviter la résurgence du phénomène.

Au demeurant la Communauté internationale est toujours à la recherche de nouvelles normes et en quête de nouveaux progrès afin de remédier au sort des enfants victimes de guerre, voire de résoudre ce problème. En témoigne l'entrée en vigueur récente du protocole facultatif à la CDE, du statut de la CPI et de la Convention C182 de l'OIT.

En depit du sentiment mitigé sur la portée de toutes ces nouvelles règles, nous sommes d'avis qu'elles sont déjà assez satisfaisantes et que la solution ne réside pas dans la création, pour le moment, de nouvelles normes.

Effectivement, l'entrée en vigueur du Protocole facultatif représente un grand progrès pour les enfants, mais elle ne résoud pas le problème des atteintes aux droits humains que subissent quotidiennement des milliers d'enfants soldats. Elle devrait simplement être perçue comme une avancée importante dans un processus qui passe par sa ratification généralisée et son application systématique. L'objectif final : l'arrêt du recrutement et de l'utilisation des enfants soldats. Cet objectif ne sera atteint que si les Etats ont la volonté politique de mettre en oeuvre des instruments juridiques, d'en soumettre le contrôle à la communauté internationale, de rendre des comptes à ce sujet et de se convaincre que les droits de tous les enfants constituent une priorité, non seulement pendant mais aussi après les conflits. En effet, les difficultés liées au Protocole reposent sur l'application du droit plutôt que sur l'interprétation de ses dispositions. Si les enfants ont tant souffert et si les parties aux conflits commettent tant de violations et d'infractions, c'est parce qu'il n'y a pas surtout de volonté politique d'appliquer ce qui existe déjà. Ainsi, l'élaboration de nouvelles règles ne sera souhaitable que si elle vient combler un vide juridique ou lorsqu'elle apportera une solution à la violation des règles existantes.

Toutefois, la problématique des enfants soldats fait appel à la responsabilité des Etats et des communautés dont sont issus ces enfants car, les enfants soldats sont avant tout des enfants privés des droits fondamentaux qui leur sont reconnus dans des instruments spécifiques consacrés à leur protection. L'horreur et les atrocités dont les enfants soldats se sont rendus coupables sur le champ des hostilités doivent interpeller la conscience des adultes face au damne que constitue l'implication d'enfants dans les hostilités. Comme le reconnaît Desmond TUTU, « Nous ne devons pas refuser de voir que les enfants soldats sont à la fois victimes et coupables. Ils commettent quelquefois des violences de la plus grande barbarie. Mais peu importe de quoi l'enfant est capable, c'est nous les adultes, qui portons la principale responsabilité. [...] 112(*)».Il convient donc d'oeuvrer pour que cesse cette forme inhumaine d'exploitation des enfants que constituent leur recrutement et leur utilisation dans les conflits armés. L'urgence est maintenant de renforcer largement les moyens de prévenir les conflits futurs ou de prendre des mesures pour que les enfants ne supportent plus les conséquences de la guerre. A cet égard, il convient, entre autre, de sensibiliser et mobiliser les mécanismes de solidarité et de consensus susceptibles d'agir directement sur la plupart des causes énoncées en première partie.

Ratifier une norme est une chose, la mettre en oeuvre en est une autre. Dans l'esprit des hommes doivent naître le respect des droits fondamentaux de la personne humaine et la culture de la paix.

De plus, les ONG sont aujourd'hui indéniablement devenues des acteurs incontournables dans la résolution de conflits et de situation de crises. Leur neutralité est affichée depuis la création de la Croix rouge en 1864, ce qui leur confère un pouvoir de médiateur unique. Les bons sentiments qui les animent et l'aide apportée sur le terrain en font des institutions respectées le plus souvent par l'ensemble des belligérants dans la résolution des conflits. Initialement dédiées à apporter une aide ponctuelle d'urgence, elles ont déplacé leurs actions vers le développement, la prévention. Cette seconde direction prise par leurs activités en fait à double titre un acteur de paix. Les actions de développement qu'elles coordonnent sont souvent marquées par les valeurs et la culture.

Au demeurant, l'enfance est l'espoir et l'avenir de la nation. Elle représente la génération future qui constituera l'avenir. C'est donc la protection de l'humanité elle-même qui est en cause. L'espoir est donc toujours là. Mais nous nous demandons s'il faut toujours garder espoir même si cet espoir tarde à se concrétiser depuis la confession de la jeune Anne FRANK113(*) qui disait: « je vois comment le monde se transforme lentement en un désert, j'entends plus fort, toujours plus fort, le grondement du tonnerre qui approche et nous tuera, nous aussi, je ressens la souffrance de millions de personnes et pourtant, quand je regarde le ciel, je pense que tout finira par s'arranger, que cette brutalité aura une fin, que le calme et la paix reviendront régner sur le monde ».

Peut-on penser que la lutte contre l'utilisation des enfants comme soldats sera menée à terme un jour pour que personne n'ait à méditer sur le sort de ces enfants en disant, pour parodier AHMADOU Kourouma, « Je pleurais pour leurs mères, je pleurais pour tout ce qu'ils n'ont pas vécu »114(*) ?

 

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· http://www.unicef.org/french/crc/convention.htm, Convention relative aux droits de l'enfant, Protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés.

· http://www.unicef.org.htm, Interdiction de l'enrôlement avant 18 ans, l'UNICEF salue l'accord sur l'interdiction de l'enrôlement avant dix-huit ans.

· http://www.unicef.org.protocolefacultatif.htm, Convention relative aux droits de l'enfant, Protocole facultatif concernant le relèvement de l'âge minimal d'enrôlement dans les forces armées.

VII- SITES INTERNET

· www.child-soldiers.org

· www.droits-de-lenfant.ch

· www.google.fr

· www.hrw.org

· www.icrc.org

· www.rb.se.childwardatabase/efaq

· www.unchr.ch

· www.un.org/children/conflict/french

* 1 Rapport du cinquantième anniversaire consacré aux enfants dans la guerre, « La situation des enfants dans le monde », UNICEF, New York, NY 10017, USA, 1996, p.13.

* 2 Dans un entretien avec le personnel de l'ONU en Cote-d'Ivoire, Hamed, un garçon de 13 ans a admis qu'il savait bien ne pas pouvoir rentré dans sa famille, car son père était furieux qu'il ait amené jusqu'au village les hommes qui ont violé et tué sa mère devant toute la famille. Selon ses dires, s'il conduit ces hommes jusqu'au village, c'est parce que le commandant lui avait dit qu'il serait rendu à sa famille- « après ça, les rebelles sont devenus ma famille et j'ai tout fait pour faire plaisir à mon père [le commandant]».

* 3 Dictionnaire Universel, Paris, Hachette/Edicef, 1995, p.419. En effet, la puberté est un ensemble de modifications physiologiques, morphologiques et psychologiques qui se produisent chez l'être humain au moment de son passage de l'enfance à l'adolescence; elle dépend de l'alimentation, de l'éducation et de la culture.

* 4 Maurice TORELLI, Introduction à la protection internationale des droits de l'enfant, travaux CERDIRI, p.9.

* 5 Les articles 14, 23, 24, 38 §5, 98

* 6 PICHET (J), Commentaire de la IVème Convention de Genève du 12 août 1949, Développement et principes du droit humanitaire, Genève, CICR, 1967, p. 442.

* 7 Voir le collège militaire de TCHITCHAO au Togo, le collège militaire des enfants de troupes au Burkina ou l'école miliaire préparatoire et technique d'Abidjan (EMPT).

* 8 Secrétaire Général des Nations Unies, Rapport au Conseil de sécurité, S/2000/101 du 11 février 2000.

* 9 Adoption des « principes du Cap » par UNICEF et plusieurs ONG à l'issu de la Conférence tenue en Afrique du Sud le 30 Avril 1997.

* 10 Citée par C. CLARK, « La justice pour les enfants soldats: Développements, défis, dilemmes », in www.childsoldiers.org/cs/childsoldiers.nsf/CSCJJpaperFR.pdf. (site visité le samedi 16 juin 2007)

* 11 Marcel Merle cité par Philippe Ryfman, La question humanitaire: histoire, problématique, acteurs et enjeux de l'aide humanitaire internationale, Paris, Ellipses, 1999, p.23.

* 12 A ce sujet il faut noter qu'avec la méthode participative, certains projets exigent une participation financière modeste du bénéficiaire. C'est le cas du projet pilote alphabétisation en Côte d'Ivoire exigeant la participation financière minimum de 500 Frs Cfa en zone urbaine pour les apprenants et 200 Frs Cfa en zone rurale.

* 13 Cf. Meledje Djedjro, la contribution des ONG à la sauvegarde des droits de l'homme, Thèse pour le Doctorat en Droit Public, soutenue le 23 octobre 1987 à l'Université d'Amiens, p.8.

* 14 Larry Diamond, Towards Democratic Consolidation, Journal of Democracy 3 (July 1994), p.5.

* 15 E.J Dionne, La vie associative, ça marche! Renouveau de la société civile aux USA, Paris, Nouveaux Horizons, 1998, p.27.

* 16 Cette notion est employée par Bioforce internationale, une structure française de formation des humanitaires.

* 17 L'analyse de cet article démontre que les critères fondamentaux pour distinguer une ONG ivoirienne d'une ONG étrangère demeurent la localisation du siège, la nationalité des membres dirigeants et le nombre de membres étrangers.

* 18 Synonyme d'organisation de la solidarité internationale, les ASI dénotent la volonté de voir un monde solidaire. Toutes les ONG se doivent d'avoir des attaches au plan international même si elles n'ont pas un champ d'intervention dépassant les limites d'un seul Etat. Cette définition a le mérite d'atténuer la condition du caractère international imposé par l'ONU.

* 19 Dictionnaire encyclopédique, Paris, Hachette, 1980, p. 1038.

* 20 Ibid, p.1037.

* 21 Häfeli C., « Wegleitung für vormundschaftliche Organe », 3e édition, Wädenswil 1998, p.102

* 22 Homme politique et orateur latin, Marcus Tulius Cicero, dit Ciceron (-100 - †-43) considère que la loi, en période de guerre, n'a plus lieu d'être citée. Cf. www.evene.fr

* 23 KARL Clausewitz, cours du professeur Niamkey KOFFI, p.16.

* 24 Encore appelée mission de souveraineté de l'Etat. Il s'agit de la sécurité, la justice, la diplomatie, les finances, la défense

* 25 Loi N° 60 209 du 27 juillet 1960 portant création des forces armées nationales en RCI article 1er : « Il est institué des forces armées nationales (FANCI) pour assurer la défense nationale, le maintien de l'ordre et l'exécution des lois » JOCI du 30juillet 1960.

* 26 Y. Sandoz, C. Swinarski, et B. Zimmermann, Commentaire des Protocoles additionnels du 8 juin 1977 aux Conventions de Genève du 12 août 1949, Genève, CICR, 1986, 3184p.

* 27 Article 4 § 3 du PA II : « Les enfants recevront les soins et l'aide dont ils ont besoin et, notamment :

a) ils devront recevoir une éducation, y compris une éducation religieuse et morale, telle que la désirent leurs parents ou, en l'absence de parents, les personnes qui en ont la garde ;

b) toutes les mesures appropriées seront prises pour faciliter le regroupement des familles momentanément séparées ;

c) les enfants de moins de quinze ans ne devront pas être recrutés dans les forces ou groupes armés, ni autorisés à prendre part aux hostilités ;

d) la protection spéciale prévue par le présent article pour les enfants de moins de quinze ans leur restera applicable s'ils prennent directement part aux hostilités en dépit des dispositions de l'alinéa c et sont capturés.

* 28 ARZOUMANIAN (N.), PIZZUTELLI (F.), « Victimes et bourreaux : questions de responsabilité liées à la problématique des enfants soldats en Afrique », RICR, n° 852, décembre 2003, pp. 834-835.

* 29 Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 (Protocole I):

* 30 Art 41 de la cde: Aucune disposition de la présente Convention ne porte atteinte aux dispositions plus propices à la réalisation des droits de l'enfant qui peuvent figurer:

a) Dans la législation d'un Etat partie ;

b) Dans le droit international en vigueur pour cet Etat.

* 31 Nom donné aux guérilleros communistes opposés dans les années 60 au gouvernement pro-américain de Lon Nol.

* 32 LOUYOT (A.), Gosses de guerre, Paris, Robert Lafon, 1989, p 52.

* 33 Khomeiny Ruhollah (1902-1989) est un chef religieux et homme politique iranien. Exilé par le Schah, il inspira le soulèvement populaire qui abouti à la chute du souverain en 1979 et instaura en Iran la République islamique. La constitution a reconnu son autorité spirituelle et politique. Cf. Dictionnaire encyclopédique des noms communs et noms propres, Alpha, 1991, p.708.

* 34 Sur le principe de l'Islam et la guerre, voir SULTAN H, La conception islamique du droit humanitaire dans les conflits armés, Revue égyptienne de droit international, 1978, pp. 1-7. BOISARD (M), «De certaines règles islamiques concernant la conduite des hostilités et la protection des victimes des conflits armés», Annales d'études internationales, 1997, pp 145-152.

* 35 Cette lettre a été publiée le 3 mars 1968 dans l'organe du Parti Baas Al Thania.

* 36 La majorité de ces conflits internes sont inter-ethniques ou claniques.

* 37 Le nombre d'enfants soldats dans les rangs des Forces nouvelles est estimé à 700 ; source : Jeune Afrique L'intelligent, n°2286 du 31 au 6 novembre 2004.

* 38 Les FANCI se refusent à reconnaître l'existence des enfants soldats dans leurs rangs.

* 39 Remplacement de l'homme par la machine.

* 40 Conférence internationale de Bruxelles tenue du 12 au 13 octobre 1998, un désarmement durable pour un développement durable, p 105

* 41 On peut citer entre autre le BICE, Caritas, UNICEF, Aïka (une ONG locale) et Save the Children.

* 42 Le nord et l'ouest sous contrôle des rebelles, le sud sous contrôle gouvernemental.

* 43 UNICEF, La situation des enfants dans le monde 2005, L'enfance en péril, « Enfants pris dans les conflits », Chapitre 3, p. 40.

* 44 Les actes de torture, supplices, les prises d'otage, les pillages, bref autant d'actes qui choquent la conscience.

* 45 Une présence massive des enfants dont nombreux d'entre eux ont neuf (9) ans environ.

* 46 Kalemie au Congo et pour la Côte d'Ivoire, les attaques aériennes lancées sur la concession de la mission catholique de Zouan-Hounien malgré la présence d'un centre médical dans les lieux

* 47 La collecte d'armes légères et de petit calibre et d'armes lourdes dans les zones en conflit.

* 48 Selon une étude réalisée par le GRIP en 2002 ; www. grip.org.

* 49 Chaque autorité administrative décline sa responsabilité. Tout porte à croire que ces déchets sont tombés du ciel.

* 50 Pour le cas de la Côte-d'Ivoire, les factions de groupes rebelles présentes lors du conflit étaient le Mouvement pour la Justice et la Paix (MJP), le Mouvement Populaire Ivoirien pour le Grand Ouest (MPIGO) et le Mouvement Patriotique de Côte-d'Ivoire (MPCI).

* 51 Par sa résolution 55/47 adoptée sans vote le 29 novembre 2000, l'AG de l'ONU déclare la décennie 2001/2010 « Décennie internationale de la promotion d'une culture de non-violence et de paix au profit des enfants du monde ».

* 52 Voir annexe 2

* 53 Voir les documents rédigés par Amnesty International (AI Index: IOR 40/18/00) en date du 10.02.1995.

* 54 « Protection de la population civile contre les dangers des hostilités », Doc CE/III CICR, Genève 1971, p.46.

* 55 Ibid

* 56 BETTATI (M), DUPUY (P-M), Les ONG et le droit international, Paris, Economica, 1986, notamment pp. 16-19, 253-260.

* 57 « As we all know, some of these UN bodies could not function at all without cooperation with the NGOs » (Comme nous le savons tous, certains organes des Nations Unies ne pourraient fonctionner sans la coopération avec les ONG), Associations transnationales n°4, 1982, p.225 cité par BETTATI (M).

* 58 Les deux articles stipulent : «  Les parties au conflit prendront toutes les mesures nécessaires pour que les enfants âgés de moins de quinze ans ne prennent aucune part aux hostilités, notamment en s'abstenant de les recruter dans leurs forces armées ou d'accepter leur enrôlement volontaire ».

* 59 Le projet des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949, Commentaire pp.86 et 163.

* 60 Rapport sur les travaux de la Conférence, vol II, CICR, Genève, juillet 1972, p.93.

* 61 Sur ce sujet, voir Cynthia Price Cohen, «The Convention on the right of the child: Non-Governemental Organisations and implementation », presented at UNICEF conference, UNICEF New-York, November 1985.

* 62 Le comité consultatif est classé dans la catégorie II du statut consultatif du Conseil Economique et Social, laquelle lui donne droit à présenter des communications écrites mais pas la présentation orale. Ibid., pp. 6-7.

* 63 Il s'agit de délégations d'ONG telles que La Coalition, les délégations néerlandaise, suédoise, finlandaise soutenues par la Belgique, le Pérou et le Sénégal.

* 64 UNICEF, « Guide du Protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés », mai

2004. Disponible sur le site de l'UNICEF : www.unicef.org/french.

* 65 Ibid.

* 66 Ibid.

* 67 Communiqué de presse des Nations Unies SG/SM/6777 PKO/79 du 29 octobre 1998.

* 68 L'UNICEF considère cette disposition comme l'événement historique le plus marquant dans la campagne menée pour mettre fin à l'utilisation d'enfants dans les conflits armés.

* 69 UNICEF, Guide du Protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés , mai

2004. Disponible sur le site de l'UNICEF : www.unicef.org/french. (site visitée le 6 octobre 2007)

* 70 Ibid.

* 71 Ibid. En 2002, suite à ladite résolution, la Coalition a établi un rapport «parallèle» sur le recrutement et l'utilisation d'enfants soldats.

* 72 Le Conseil prévoit des «mesures appropriées» en cas d'inaction ou d'insuffisance des progrès accomplis lors de l'examen du rapport ultérieur du Secrétaire général

* 73 Cette résolution met en place un mécanisme de suivi en instaurant un dispositif « gradué ». Les acteurs des Nations Unies au niveau local sont chargés d'évaluer sur le terrain les progrès réalisés par les forces ou groupes armés figurant sur la première partie de la «liste noire» afin que le Conseil puisse prendre des mesures de sanction en cas d'inaction sur la base d'informations viables et précises données très souvent par des ONG.

* 74 Elle met en place un régime de suivi et d'évaluation et prévoit la création d'un groupe de travail du Conseil chargé de la question des enfants dans les conflits armés.

* 75 Elle mène des campagnes contre le recrutement et l'utilisation des enfants soldats dans plus de 20 pays à travers le monde. Elle dispose d'un site Internet : http://www.child-soldiers.org/. ( site visité en octobre 2007)

* 76 Pour une analyse des législations nationales, voir Brett (R) et McCallin (M), Children - The invisible soldiers, Rädda Barnen (Swedish Save the Children), 1996, pp. 53-64.

* 77 Voir la Convention européenne sur l'exercice des droits des enfants (art. 1.1), adoptée par le Conseil de l'Europe, Document Série des traités européens STE/160 et la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant de 1990, adoptée par l'OUA, Document OUA CAB/LEG/153/Rev.2, art. 2.

* 78 UNICEF, « Guide du Protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés », mai

2004. Disponible sur le site de l'UNICEF : www.unicef.org/french. (site visité en octobre 2007)

* 79 Le lobbying est l'ensemble de pressions exercées par des groupes, notamment les ONG, visant à influencer les décisions des pouvoirs étatiques. Ces groupes en raison de leur dimension multinationale et de leurs moyens matériels considérables, sont capables d'exercer une influence dans les Etats et même sur certains Etats pou atteindre leurs objectifs.

* 80 " Toute activité consistant à procéder à des interventions destinées à influencer, directement ou indirectement, les processus d'élaboration, d'application ou d'interprétation de mesures législatives, normes, règlements et, plus généralement, de toute intervention des pouvoirs publics. ", définition du lobbying donnée par le journaliste Zecchini dans Le Monde, 9 juin 1999.

* 81 Rädda Barnen, «children of war protest against child recruitment in Congo», n° 3, septembre 1998, p.2.

* 82 Les étapes de cette campagne consistent à faire pression pour changer la législation concernant l'engagement des enfants dans les conflits et à lancer un débat au Congrès sur la question. Des coalitions locales ont aussi contribué à des recherches sur le recrutement des enfants et ont organisé des ateliers dans les villes pour les enfants et les organisations locales afin de discuter des façons d'empêcher le recrutement. La Coalition tire parti de la vaste expérience de ses membres dans les domaines du travail avec les enfants déplacés et les enfants anciens combattants, la formation en droits de l'homme et l'objection de conscience.

* 83 Les ONG sont des contrepouvoirs car elles constituent de véritables groupes de pression exerçant des lobbying sur le gouvernement. Lire à ce sujet l'article de Bosco Muchukiwa « Les ONG locales : pouvoir et contre pouvoir au Zaïre » sur www.grandslacs.net/doc/2330. (site visité en décembre 2007)

* 84 Mais des difficultés se posent toujours surtout dans le cadre du groupe de travail de l'ONU les Etats n'arrivent toujours pas à trouver un terrain d'entente sur le sort réservé à leurs propres enfants.

* 85 JUNOD (SS), « La diffusion du droit international humanitaire » et SURBECK (J-J), « La diffusion du DIH, condition de son application », in : Etudes et essais sur le DIH et sur les principes de la Croix-Rouge, en l'honneur de PICTET (J), respectivement, pp. 359-368 et pp. 537-549.

* 86 L'art 47 de la Iè Convention, l'art 48 de la IIè Convention, l'art 127 de la IIIè Convention, l'art 144 de la IVè Convention, l'art 83 du Protocole I et l'art 19 du Protocole II.

* 87 Le CICR et les enfants dans les situations de conflits armés, CICR, Genève, 1987.

* 88 L'enfant dans la guerre, Musée Internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, Genève, 1990.

* 89 80% des informations reçues par le Comité des Nations Unies pour les droits de l'homme proviennent des ONG. DERMONT (M) et DUPUY (P-M), Les ONG et le droit international, Paris, Economica, 1986.

* 90 Voir Isobel McCONNAN et Sarah UPPRARD, Des enfants, pas des soldats, Save The Children, 2002, pp. 58-59.

* 91 Une langue locale du Rwanda.

* 92Isobel McCONNAN, Des enfants, pas des soldats, op.cit, p 59.

* 93 -'''' Conférence internationale consacrée aux enfants associés aux groupes et forces armés (Paris, 5-6 février 2007) : Le nombre des enfants recrutés ou utilisés par les groupes et forces armés est estimé à 250 000 en 2007. La conférence avait pour objectif l'adoption par les Etats présents d'un texte appelé les « Engagements de Paris », pour mettre fin à l'utilisation illégale des enfants dans les conflits armés.

-Conférence: Libérons les enfants de la guerre ( Paris,05-06 février 2007).

* 94 On peut relever deux obstacles principaux dans le mécanisme de la Commission :

1) La Commission ne communiquera pas publiquement ses conclusions d'enquêtes, à moins que toutes les parties intéressées ne le lui demandent.

2) Les frais nécessaires au fonctionnement de la chambre d'enquête sont répartis entre les parties qui demandent l'enquête.

* 95 Selon les conventions de Genève, le CICR a les compétences d'exiger d'accomplir certaines prestations en toutes circonstances, à savoir les visites aux personnes privées de liberté : il peut jouer un rôle dans le cadre du système des puissances protectrices, comme substitut ou « quasi-substitut », ou en dehors du système à titre autonome ; il peut, enfin, exercer son droit d'initiative, dans le cadre des actions humanitaires, SANDOZ (Y), « Mise en oeuvre du droit humanitaire » in Les dimensions internationales du droit humanitaire, UNESCO, Paris, Pedone,1986, pp.315-316.

* 96 Selon l'art 4, chiffre 4, le CICR « travaille à l'application fidèle » des Conventions de Genève.

* 97 « Les démarches du CICR en cas de violation du DIH », RICR, n°728, 1981, pp.80-81.

* 98 Quatre conditions doivent être remplies pour que le CICR sorte de sa confidentialité:

1) Il faut que les violations soient importantes,

2) Les violations doivent s'être répétées malgré des démarches confidentielles du CICR,

3) Le CICR ne dénonce que les violations dont ses délégués ont été témoins ou dont il a pu établir

l'existence et l'ampleur de sources sûres et vérifiables,

4) La dénonciation publique est dans l'intérêt de la population menacée.

SANDOZ (Y), op.cit. pp. 165-166.

* 99 L'enrôlement des enfants par l'Irak et l'Iran, en violation de l'article 77 §2 du Protocole I, a été dénoncé par le CICR dans son rapport d'activités où on peut lire: «En 1983, le CICR a constaté, avec consternation, qu'un grand nombre d'enfants iraniens avaient été tués et capturés alors qu'ils participaient aux combats et que cette pratique heurtait une règle morale universelle d'une exceptionnelle importance», CICR, Rapport d'activités, 1983, p.59.

* 100 CICR, bull. n°101, juin 1984, p.2.

* 101 On a critiqué que «The Red Cross is afraid of being accused of partisanship and having its work place in jeopardy», International Herald Tribune du 27 avril 1984, cité in: MANN (H), International Law of the child soldiers, ICLQ, p.52.

* 102 Revue Générale de Droit International Public, sous la direction de Mario BATTATI, JACQUES (JP), ALLAND (D), «La Convention de Rome entre ONG et Conseil de Sécurité». Commenté par Serge SUR, Paris, Tome CIII, Pedone, 1999, p.32-36.

* 103 Lexique des termes juridiques, Dalloz, 12è édition, p.186.

* 104 La Déclaration de l'Assemblée générale de 1985 en ses articles 1 et 2 en fourni une très bonne définition.

* 105 Personnalité faisant autorité dans un domaine d'activité et qu'une juridiction prend l'initiative, (exceptionnelle car non prévu par les textes en vigueur), d'entendre comme « ami de la Cour » (et non comme témoin ou expert), pour connaître son opinion sur le problème débattu devant elle, en vue de garantir, grâce à ses lumières, un procès équitable, au sens européen du terme.

* 106 Outre les informations factuelles que les ONG peuvent adresser à la Cour, elles peuvent aussi lui soumettre des analyses juridiques ou un argumentaire politique par la voie d'un amicus curiae, document judiciaire accepté par l'une des Chambres de la Cour.  Une Chambre peut alors inviter un Etat, une organisation ou un individu à lui adresser une déclaration écrite sur un sujet particulier.  L'amicus curiae peut être préparé par une organisation qui a une connaissance particulière du sujet.  Elle le présente alors de façon concise et émet des suggestions à la Cour sur la manière de régler le cas.  L'amicus curiae donne aux ONG l'occasion d'être entendues sur de nombreuses questions pratiques ou juridiques, telle que la compétence des tribunaux nationaux à poursuivre une affaire.  Les ONG peuvent aussi contacter une Chambre et lui proposer de lui adresser un Amicus Curiae.

* 107 Coordinateur de la Coalition pour mettre fin à l'utilisation d'enfants soldats.

* 108 Réponse donnée par Juliane Kippenberg, responsable de la liaison avec les ONG de la division Afrique de Human Rights Watch et Pascal Kambale, conseiller juridique auprès du Programme Justice Internationale, septembre 2004.

* 109 Ces formulaires ne sont pas encore disponibles mais devraient l'être d'ici la fin de l'année 2007 sur le site internet de la CPI : www.icc-cpi.int.

* 110 L'article 7 du Statut de Rome de la CPI.

* 111 TORRELI (M), La protection internationale des droits de l'enfant, Travaux dirigés du CERDIRI, La Haye, 1979, p.9.

* 112 Propos du Révérend Desmond TUTU, extraits de, M. ARNOUX et I. JAN, La guerre, 1992, cités par G. DHOTEL, p. 55.

* 113 Déclaration aux Pays-Bas de cette jeune fille de 15 ans, morte peu après dans un camp de concentration nazi durant la Seconde Guerre Mondiale in La situation des enfants dans le monde, 50ème anniversaire, UNICEF,

p. 10.

* 114 AHMADOU Kourouma, Allah n'est pas obligé, ed du Seiul, Londers, 2000, p.121.






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