Section1
Entrepreneuriat : champ de recherche à part
entière
Un champ scientifique ou une discipline ne commence à
exister que si une communauté scientifique se constitue et s'organise,
si elle produit des recherches, si elle dispose de revues et si elle organise
des colloques spécifiques permettant aux chercheurs de partager les
résultats de leurs travaux. Comme la plupart des domaines scientifiques,
l'entrepreneurship a dû se détacher de ses racines (l'histoire,
l'économie, la gestion, la PME ...) de façon à parvenir
à l'autonomie. Ceci ne s'est pas fait sans difficultés et n'a pas
manqué de provoquer un certain appauvrissement, étape
nécessaire dans la constitution d'un nouveau champ scientifique 4?
L'entrepreneurship s'est développé d'abord, dans
les années d'après guerre, au sein de l'économie et
surtout de l'histoire (des entreprises). Les historiens d'Harvard, avec le
Research Center in Entrepreneurial History, créé en 1948, qui
connût une activité intense pendant un peu plus d'une dizaine
d'année, furent le véritable moteur de ce mouvement. Cependant,
la recherche historique s'épuisa, peu à peu, faute d'avoir pu
s'accorder sur la définition du concept d'entrepreneur et d'avoir
produit une théorie satisfaisante. L'entrepreneurship n'ayant pas pu
faire sa percée et gagner son autonomie, le mouvement est
retombé.
Au début des années 70 (fin des années
60), il a recommencé à prospérer au sein de la recherche
en gestion (PME) et en psychologie. La crise des années 70, avec la
montée du chômage et la réhabilitation de la PME
créatrice d'emplois et de valeur, l'a considérablement
aidé, ainsi que la perte d'influence des théories marxistes et
structuralistes.
I.1.1. Entrepreneuriat : Définition et
Notions
Définir ce qu'est l'entrepreneuriat n'est pas une chose
aisée, les travaux réalisés dans ce domaine ont
proposé de nombreuses définitions sans qui aucune d'entre elles
ne reçoive un consensus général. Sans vouloir entrer dans
les détails des débats théoriques qui opposent les
auteurs sur le concept d'entrepreneur, il nous parait
néanmoins important de reprendre ici quelques idées pour
rassembler différentes informations nécessaires à la
compréhension globale et systématique de la dynamique
entrepreneuriale.
Selon JULIEN et MARCHESNAY (1996), le concept
d'entrepreneuriat a été consacré pour traduire le terme
Anglo-Saxon « Entrepreneurship », à la place d'autres termes
tels que l'entreprenariat ou l'entreprenoriat.
Quelque soit le terme retenu, le problème regroupe 3
notions essentielles : l'entrepreneur, l'esprit d'entreprise et la
création d'entreprise (JULIEN et MARCHESNAY, 1996)
Les 1ères tentatives de développement
d'une théorie de l'entrepreneuriat ont été fait par SAYEB
(1803) et CANTILLON (1925). Mais la tenue a été
véritablement popularisée par MILL (1848)5. Pour ces
auteurs, l'exercice du rôle de l'entrepreneur s'identifie par sa
détention du capital. L'entrepreneur est donc celui le
propriétaire du capital. C'est à lui que revient le droit de
prendre les décisions essentielles puisqu'il supporte seul les risques.
Ces auteurs considéraient la prise de risque comme l'activité
essentielle de l'entrepreneur.
D'autres auteurs, en particulier, MULLER, FAURE, GERBAUX
(1989), nient cette proposition en ce sens que, pour eux, l'esprit
d'entreprise, le goût du risque n'est pas nécessairement un
attribut des sociétés modernes (RAJEMISON, 1995). En faites, il y
a des nombreux exemples de véritables stratégies
entrepreneuriales conduites depuis longtemps par les habitants des villages
fort peu touchés par la modernité.
Plus tard, d'autres courant d'analyse, reprenant l'une ou
l'autre de ces notions, vont chercher à définir plus
précisément le concept d'entrepreneur. FIGUERREDO en accord avec
PERROURY (1992) avaient arrivée à la conclusion que
l'entrepreneur est le produit de son environnement. Ils affirment que les
actions individuelles se produisent dans un contexte social et
économique et que ce contexte est lui-même, un
élément essentiel pour comprendre les rôles joués
par les individus6. L'évolution économique par
l'exécution de nouvelles
5 Y. GASSE (1983), « l'entrepreneur moderne :
attributs et fonctions », Revue Internationale de Gestion, vol 7,
N° 4, P 4.
6 S. RAJEMISON (1995), « Femmes entrepreneurs et
dynamiques entrepreneuriale : le cas de Madagascar », les facteurs de
performance de l'entreprise. Ed. Aupelf-VREF, pp227-236
combinaisons productives7. Pour lui le défi
de l'entrepreneur, est de trouver et de développer de nouvelles
idées (nouveaux produits, nouvelles méthodes de production,
nouveaux marchés, etc.) Il soutient l'idée que c'est l'innovation
qui distingue l'entrepreneur du manager.
Cependant, MCCLELLAND (1961), quand à lui, il estime
que l'innovation peut être aussi allouée à un gestionnaire
créateur qui prend de bonnes décisions aux bons moments. En
accord avec lui, BROCKHAMS (1980) a montré selon une étude que
beaucoup de gens décident de se lancer dans les affaires sans même
savoir ce qu'ils vont véritablement faire.
MCCLELLAND a défendu l'idée que être
entrepreneur n'est pas forcément un preneur de risque ni un innovateur
mais qu'il faut surtout un fort besoin d'accomplissement. Cependant, de
nombreux chercheurs ont étudié le besoin d'accomplissement, sans
pouvoir établir un lien direct entre ce concept et la réussite de
l'entrepreneur.
Evidemment, le phénomène entrepreneuriale a fait
l'objet de plusieurs recherches et études on peut retenir que l'ensemble
des activités de recherches considère en général
l'entrepreneur comme un leader dans les affaires ayant le rôle de
stimuler la croissance économique et le développement ; cependant
ils sont en désaccord sur l'activité essentielle de
l'entrepreneur : acceptation des risques pour les uns, combinaison des facteurs
de production pour les autres, source de capital pour certains et innovation
pour d'autres8.
Bien que comprenant des éléments parfois
divergentes ces définitions sont comme même
complémentaires. A cet effet, DENIEUIL dans son ouvrage sur les femmes
entrepreneurs en Tunisie a fait rassembler ces éléments au sein
d'une relation socioéconomique globale entretenue par un acteur social
à plusieurs niveaux et simultanément offrit : c'est-à-dire
s'insérer sur un même marché où se régule une
offre et une demande, gérer c'est-à-dire organiser et administrer
des biens ou une unité économique, risquer et mettre en jeu sa
volonté et sa responsabilité personnelle dans une prise
d'initiative. Cette triple exigence semble avoir en commun le concept de la
création d'une nouvelle entreprise.
7 F. K. HIEN (2002), « L'entreprenariat
féminin au Burkina Faso : une étude exploratoire », sept.
8 Y. GASSE (1983), « L'entrepreneur moderne :
attributs et fonctions », Revue Internationale de Gestion,
Novembre, Vol 7, N°4, p4
Ce rapide survol des différents concepts de
l'entrepreneur permet de retenir que l'entrepreneur est un facteur agissant
mais qu'il peut être des pressions extérieures. En tout
état de cause, l'entrepreneur ne peut être un agent subissant. En
revanche, il peut être un produit social9.une telle
définition pet paraître trop générale, elle a aussi
le désavantage d'être restreinte puisqu'elle confine les
activités de l'entrepreneur au seul domaine économique.
Plusieurs spécialistes dans le domaine de
l'entrepreneuriat préfèrent donner au concept une dimension plus
englobante pouvant rejoindre plusieurs champs d'application.
Dans cette perspective, on peut donc définir l'esprit
entrepreneurial comme une volonté constante de prendre des initiatives
et de s'organiser compte tenu des ressources disponibles pour tenu des
ressources disponibles pour atteindre des résultats
concrets10. Très souvent, les entrepreneurs constituent des
véritables agents de changements économiques, politiques et
sociaux.
Dans le même ordre d'idée, l'entrepreneuriat est
un acte propre à l'entrepreneur et la dynamique entrepreneuriale peut
être définie comme l'ensemble du processus qui tend à
favoriser la création et de développement des entreprises.
L'esprit d'entreprise, quand à lui, peut se
définir comme l'aptitude d'un individu, d'un groupe social, d'une
communauté à : prendre des risques pour engager des capitaux
(pour investir, voir s'investir) dans ne sorte d'aventure (une entreprise),
consistant à apporter quelque chose de neuf (l'innovation), de
créatif, ceci en employant et en combinant de la façon la plus
performante possible des ressources diverses (dans une organisation, autre sens
plus institutionnel du mot « entreprise ») (JULIEN et MARCHESNAY,
1996). C'est cet esprit qui est à la base de la création
d'entreprise.
A cet effet, il est intéressant de mettre l'accent sur
les conclusions de BRUYAT pour qui la création d'entreprise est un
processus stratégique et dynamique de décisions, actions
déclenché sous l'effet d'un changement affectant la configuration
stratégique instantanée perçue (CSIP).
9 S. RAJEMISON (1995), femmes entrepreneurs et
dynamique entrepreneuriale : le cas de Madagascar, les facteurs de performance
de l'entreprise. Ed AUPELF-UREF, John Libbey Eurotext. Paris p 229.
10 Y. GASSE, op. cit.
Cette dernière croise trois ensembles de perceptions.
Le premier a trait aux buts et aux aspirations qui sous tendent l'action des
individus. Le deuxième concerne les ressources et les
compétitions des mêmes individus. Le troisième, enfin,
correspond à des possibilités et/ou des menaces perçus
dans l'environnement.
Par ailleurs, en se rapprochant de la définition de
l'esprit d'entreprise, la dynamique entrepreneuriale se voit comme une «
intention délibérée, une tâche qui doit être
organiser de façon systématique et qui fait partie
intégrante du travail du dirigeant » telle est définit par
DRUKER. C'est-à-dire ainsi que l'esprit d'entreprise ne s'arrête
pas à l'étape de création. Elle intègre
également la pratique, laquelle n'est ni une science ni un art.
Evidemment, et en accord avec beaucoup d'auteurs qui
soutiennent l'idée que la création d'entreprise a une profonde
liaison avec les retournements économiques imprévisibles et les
changements sociaux rapides auxquels nous sommes accoutumés cette
dernière décennie, Drucker retient des facteurs
déterminants de l'efficacité de l'esprit d'entreprise qui ne sont
pas eux même des phénomènes économiques mais qui
relèvent beaucoup plus des changements de valeurs, d'optiques et
d'attitudes démographiques et institutionnelles.
Somme de toute, si la dynamique entrepreneuriale relève
avant tout d'un état d'esprit de la réalisation d'un certain
nombre d'actions, elle est également fonction des conditions
économiques, sociales, culturelles et politiques dans lesquelles
opérant les entrepreneurs.
I.1.2 : La création d'entreprise
L'importance accordée aujourd'hui à la
création d'entreprise n'est pas le fruit d'une génération
spontanée. Elle est en fait le résultat d'un enchaînement
qui remonte au milieu des années 70 ; début d'un
désenchantement progressif vis-à-vis des perspectives de
croissance entrevues jusqu' alors.
Le schéma ci-après résume les grands traits
les temps forts de cet enchaînement.
Regain d'intérêt pour la PME, créatrice
nette d'emploi et
relais
indispensable de la croissance des pays
développés.
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Nécessité d'une attention accrue pour
l'acte fondateur qui réunit les 2 entités
précédentes :
La création d'entreprise.
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Attirance renouvelée pour
la personnage clé
de cette entité,
Son propriétaire.
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Figure I.1 : Les grands traits de la
création d'entreprises
On ne peut pas ignorer que les manifestations
d'intérêt pour la création d'entreprise se sont
situées exactement dans la prolongation chronologique des
développements antérieurs. Il y a eu en effet assez tôt une
prise de conscience du fait que le tissu des PME devrait impérativement
se renouveler, et que la création d'entreprise serait comme
remède à la plaie de chômage. En fait, il y avait en
début des années 80 beaucoup de chemin à parcourir pour
que la prise de conscience devienne un ensemble cohérent et
ordonné de mesures d'incitation.
Le vocable de création d'entreprise recouvre, en
réalité, des objets différents, tant du point de vue de
résultat, les entreprises nouvelles, que du processus.
La création d'entreprise est un phénomène
|
> Hétérogène
> Correspond à des logiques diverses et
évolutives > Aux limites floues
> Ephémère
> Difficilement réparable dans le temps
|
Tableau I.1 : Les caractéristiques de la
création d'entreprise
Un discours général n'a, donc, guère de
sens, ce qui rend probablement illusoire la recherche d'un modèle
explicatif global. A cet égard, la recherche présentée par
ALDRICH et Al., concernant l'influence des réseaux relationnels et de
l'environnement propre à la personne sur la création de la
profitabilité des entreprises nouvelles, montre les dangers de la non
prise en
compte de ces critères (l'environnement proche, les
compétences propres à chaque personne, les ressources
mobilisées sur tous les éléments qui touchent fortement la
création d'entreprise).
Ainsi, il n' y a pas de meilleur définition à la
création d'entreprise (comme l'entrepreneur), mais des
définitions qui répondent à des problématiques
pertinentes avec des projets de recherche et des demandes sociales.
1. Des stratégies de recherche différentes
:
Les typologies en matière de stratégies de
recherche sont nombreuses. Toutefois, les recherches expérimentales sont
quasiment inexistantes dans le domaine de création d'entreprise. La plus
grande partie de la recherche est de nature exploratoire ou descriptive. Le but
étant d'apporter de l'information et de décrire le
phénomène.
Des hypothèses et des généralisations
empiriques sont proposées. Les recherches existantes ont exploré
les facettes du phénomène, en décrivant le profil de
différents types d'intervenants (Hommes, femmes, minorités
ethniques, high-Tech...), en proposant des typologies, en détaillant des
environnements particuliers (système éducatif, partenaires
financiers, structures d'appui...), en comparant des populations
d'entrepreneurs différents (appartenant à diverses cultures)...
ces recherches nous ont apporté une meilleure connaissance du divers
aspects de notre phénomène étant la création
d'entreprise par les femmes.
Partant de la théorie, les recherches abstraites, qui ont
pour ambition de proposer des modèles qualitatifs expliquent le
phénomène en question, sont assez rares.
2. Des points de vue de recherche différents
:
La création d'entreprise ex nihilo comprend toujours
quatre notions :
L'individu, la nouvelle entreprise, un ou des environnements
dans lesquels se déroule un processus. HORNADAY et TIEKEN notent que la
chasse à « l'Heffalump » s'est faite à partir de trois
types d'informations : les facteurs liés à la personne, les
facteurs liés à l'entreprise créée et les facteurs
externes (sociologiques, environnementaux et économiques).
RONSTADT propose une typologie équivalente. Gartner
aboutit enfin à un modèle global permettant d'analyser le
phénomène de la création d'entreprise. Il reprend les
points précédents en rajoutant la notion de processus.
Figure I.2 : les 4 facettes de la création
d'entreprise ex nihio
Les problématiques proposées par les chercheurs
à cet effet, sont multiples. L'appartenance à une discipline
conduit a privilégié un point de vue particulier. Les
psychologues donnent la priorité à la dimension individuelle ;
les économistes à l'entreprise et à l'environnement (ils
feront éventuellement référence au processus) ; les
gestionnaires à l'entreprise et au processus ; les sociologues à
la face individu- entreprise- environnement... ainsi, le
phénomène sera examiné sous des perspectives
différentes selon l'origine disciplinaire des chercheurs. Le processus
est aujourd'hui, le plus souvent ignoré. Nous allons examiner ces
différentes possibilités en proposant un rapide survol sur
chacune de ces notions.
> l'entreprise créée est une
dimension toujours présente. Des caractéristiques
particulières de la nouvelle entreprise font souvent l'objet
d'études spécifiques : la taille, la croissance, les
stratégies mis en oeuvre, les problèmes rencontrés lors de
la création et tout au long du processus entrepreneurial. Cette
dimension n'est que rarement pris en compte seule, elle toujours reliée
à la personnalité du créateur/ créatrice
d'entreprise.
> le créateur/ créatrice
d'entreprise ou l'entrepreneur est, lui aussi toujours présent
pour définir l'objet de recherche (la création d'entreprise ex
nihilo). Les chercheurs se sont intéressés des
caractéristiques de l'entrepreneur qui les différencient du reste
de la population. Ils ont pris en compte des variables sociologiques ; l'age,
le sexe, le rang dans la famille, la formation, l'expérience
professionnelle antérieure, l'appartenance à une catégorie
socioprofessionnelle et/ ou des variables psychologiques ; les attitudes
(besoin d'accomplissement, de liberté, d'amélioration de
situation financière...), les motivations, les croyances...
> l'environnement de la création
est une dimension souvent oubliée. Les chercheurs s'intéressant
spécifiquement à cet aspect tentent de mettre en évidence
l'impact qu'a le phénomène sur l'environnement au sens large,
mais surtout en terme d'emplois et de création de richesses. Dans cette
veine, pouvant être classés les nombreux travaux touchant
l'environnement du financement des entreprises, l'éducation, et les
structures d'accompagnement existantes.
> le processus de création
d'entreprise est la dernière dimension pouvant être prise
en compte. Le but étant de trouver des moyens d'améliorer le
système de façon à ce qu'il y ait plus de création
d'entreprise et que les risques d'échec soit minimisé. Les
recherches utilisant cette dimension sont le fait des résultats
tirés de la pratique.
Selon nombreux chercheurs (CUNNIGHAM et LISCHERON, 1991 ;
BRUYAT, 1993 et 2001 ; BRUYAT et JULIEN, 2001 ; FAYOLLE, 2002 ; BERNASCONI,
2003 ; CHELLY, 2003 ; GASSE, 2004 ; SCHMITT et Al, 2004, etc.), la
démarche de création d'entreprise est combinée par deux
catégories composantes, une composante stratégique et une
composante psychologique.
Figure I.3 : les composantes de base du processus
de création
La composante stratégique de la création est un
ensemble formé par le projet, l'environnement et les ressources, alors
que la composante psychologique est un ensemble de comportements, d'aptitudes
et de motivations du porteur de projet. Le processus alors, ne se
déclenche dés que les différents éléments
des deux composantes s'affrontent, se mettent en interaction, voire se combine
afin de prendre des décisions et engager des actions
entrepreneuriales.
En conclusion, le champ de l'entrepreneurship et de
création d'entreprise a fait l'objet de nombreuses recherches dont le
but est d'étudier le profil et l'activité de l'entrepreneur et de
dégager les différentes facettes du phénomène
entrepreneurial.
Le sujet sur l'entrepreneuriat féminin n'est pas neuf
mais « il est jeune », déclare KNIBIEHLER en ouvrant le
colloque international sur les femmes et la révolution, qui se tient
à Toulouse en Avril 1989.
S'agissant d' « entrepreneuses » ou d' «
entrepreneurs », on est appelé à se demander depuis quand
cette dynamique a fait son apparition et à se demander dans quelles
mesures ces facteurs influent positivement on non sur cette dynamique.
Section II : Environnement global de l'entrepreneure
femme
Jamais le statut de la femme dans la société n'a
posé plus de questions à l'échelle mondiale qu'il n'en
pose aujourd'hui. Les bouleversements qui se sont opérés ou qui
s'opèrent dans les pays développés ou en voie de
développement, de la Chine à l'Afrique, de l'URSS à
l'Amérique ne sont pas les seules raisons des secousses qui agissent
l'entrepreneure femme. A l'Est comme l'Ouest, les déclarations de
principes, les discutions passionnées qui ont lieu dans la vie
politique, les mouvements d'opinion, la presse sont autant de preuves de
l'ampleur et de l'importance de la place de la femme dans la vie
économique.
Autant des facteurs et des variables interagissent ensemble pour
jouer un rôle d'incitation et d'attraction à la création
d'entreprises par les femmes.
S'agissant des déterminants de l'efficacité de
l'esprit d'entreprise, en général, plusieurs auteurs (DRUCKER
1977, RAJEMISON 1995...) retiennent des facteurs qui ne sont pas eux même
des phénomènes économiques mais qui relèvent
beaucoup plus des changement de valeurs, d'optique, d'attitudes
démographiques et institutionnelles.
De ce fait, un grand nombre d'ouvrages et de recherches se
sont penchés sur la question pour identifier les facteurs sous jacents
et retracer le parcours des entrepreneures femmes. Les recherches ont
montré que la dynamique entrepreneuriale féminine est
expliquée par plusieurs facteurs, tout sur le niveau économique,
social, culturel, psychologique et politique même.
Bien que la plupart des ces facteurs soient parfois communes
et indissociables aux deux sexes, ils ont tendance, dans beaucoup de cas,
à être plus marquées pour les entrepreneures
féminins. Plusieurs interrogations se sont posées : certains
pensent que la création d'entreprise est le fait de motivations
psychologiques et/ou de facteurs de contingence, ce chapitre reposant sur une
approche qualitative basée sur la recherche documentaire, propose
d'identifier les antécédents et les caractéristiques de
l'environnement susceptibles de favoriser l'émergence d'un esprit
d'entreprenariat chez les femmes.
De ce fait, force est de constater la mobilisation «
mondiale » et l'intérêt nouveau des pouvoirs publics sur le
sujet de l'entrepreneuriat féminin dans tous les secteurs, ce qui est
non seulement essentiel pour l'économie, mais également vital
pour la société.
Chaque pays, qu'il soit un pays développé,
émergent ou même sous développé, s'intéresse
à cet accroissement, d'une part du nombre des entreprises
créées par les femmes et d'autre part du nombre d'emplois
généré par ces entreprises.
L'augmentation du taux de création de nouvelles
entreprises par les femmes est indispensable pour stimuler l'innovation et
l'emploi de l'économie. Par conséquent, il était
nécessaire de mettre des mécanismes et des sources d'informations
et de conseil à la disposition des femmes et de leur apporter le soutien
dont elles ont besoin pour créer et gérer leurs propres
entreprises.
De même, les forces psychosociales et le contexte
culturel dans lequel évoluent les femmes ont une importante influence
dans la genèse de comportements innovateurs (RAJEMISON, 1995 ; GASSE,
D'AMOURS ; 1993 ; ZOUITEN, 2005), notamment dans le domaine de la
création d'entreprises.
CARACTÉRISTIQUES ET ANTÉCÉDENTS A
L'ESPRIT D'ENTREPRENEURIAT FEMININ
L'esprit légal et règlementaire
L'expérience professionnelle
Le système de valeurs
La formation scolaire
Le réseau relationnel
L'esprit politique
L'esprit d'entreprenariat féminin
Source : BELAID SAMY, 2004 « Les facteurs externes de
l'entrepreneuriat »11
Figure I.4 : Les caractéristiques à
l'esprit de l'entrepreneuriat féminin
I.2.1. Système de valeurs
Nul ne peut nier que les principales limites de la
participation des femmes à la vie active sont attribuées à
leur environnement socioculturel. S'agissant de l'activité
entrepreunariale, cet environnement n'a favorisé guère son
expansion.
RAJEMISON, 1995 a affirmé à partir de ces
recherches sur les femmes que pour la plupart des pays Africaines, la
ségrégation et l'inégalité subsiste. Cette
inégalité commence dès le plus jeune âge.
Toutefois, cet environnement n'a pas cessé
d'évoluer au cours de ces vingt dernières années, la
mondialisation des marchés et l'explosion des innovations technologiques
ont changé radicalement le monde du travail et les structures
économiques, sociales et culturelles.
Nombreux auteurs ont soulevé au cours de leurs
recherches un système de valeurs qui semblerait caractériser
l'esprit créatif née chez les femmes (GASSE, D'AMOURS 1993,
FAYOLLE, LASSAC-CLERC 2003, BELAID 2004, GERARD 2002). A cet effet, ils
évoquent un système de valeurs culturelles, citoyennes et
parentales, dont la résultante contribuerait au développement
d'un esprit innovateur et créatif chez les femmes pour s'installer dans
le monde des affaires.
Même si les valeurs et attitudes différentes d'un
pays à un autre, d'une région à une autre, nul doute qu'un
cheminement important est indispensable et recommandable.
A partir d'une analyse des cultures différentes, les
chercheurs ont montré primauté de trois valeurs fondamentales et
indissociables :
1. La solidarité familiale ;
2. La confiance ;
3. Et la loyauté.
Ces trois paramètres constituent la pierre angulaire de
tout développement économique et social envisagé par une
société. L'affaiblissement de l'un de ces trois valeurs
entraverait le développement de l'esprit de l'entrepreneuriat.
Ainsi, les femmes auraient maintenant d'avantage confiance en
leurs capacités et elles ne se satisferaient plus des
possibilités réduites de carrière qui leur sont encore
offertes dans les entreprises traditionnelles masculines12.
De plus, pour plusieurs auteurs, les femmes entrepreneures
défendent et respectent l'éthique des affaires plus qu'aux
hommes. Elles sont toujours reconnues par leurs approches différentes
à celles des hommes, en adoptant des traits de caractères «
typiquement féminins ». Leur approche de direction est
différente de la méthode traditionnelle, elles
12 YVON GASSE, ALAIN D'AMOURS (1993) : «
Profession : Entrepreneur », les Editions Transcontinentales, Fondation de
l'Entrepreneurship, p. 88.
pratiquent le type de leadership « interactif » et
font recours à un mode de direction participatif 13. Toutes
ces valeurs citoyennes concourent à la formation d'un espace propice
à la création d'entreprise par les femmes.
Mais même si la plupart de ces valeurs sont plutôt
citoyennes et relatives à la personne ellemême, on ne peut pas
nier l'importance du système des valeurs parental.
Depuis longtemps, un déséquilibre dans
l'accès à l'instruction pour les filles et les garçons
persiste. Le niveau n'est pas le même pour les hommes et les femmes et
c'est surtout dans la population rurale que la différenciation est plus
accentuée. Selon des études faites, RAJEMISON (1995) a
montré que plus de 40% de la population féminine de six ans et
plus est illettré ; alors que pour les hommes elle n'atteint pas 30%
14.
La différenciation demeure aussi aux domaines de
formation. Le recours des femmes dans les filières techniques, de
gestion, de comptabilité est très peu fréquenté.
Toutes ces disparités ont constitué pour
longtemps des handicaps à l'esprit d'entreprise pour les femmes car
elles limitent chez elles les aptitudes et compétences que requiert
l'entrepreneuriat.
D'où apparaît l'effet primordiale de
l'éducation et de type de relation née entre les parents et leurs
enfants dans l'éveil d'un esprit créatif d'entrepreneur tant chez
les hommes que chez les femmes. Les chercheurs ont mis l'accent sur un certain
nombre de valeurs communes, inculquées par les parents au cours de
l'éducation de leurs enfants que se soit fille ou garçon, et qui
semblent stimuler leurs créativités et leurs réussites
sociales.
Il est important de signaler ainsi que ces valeurs ont
été essentiellement évoquées par les femmes
entrepreneures Tunisiennes au cours des entretiens que j'ai mené
auprès d'elles. A cet effet, nous notons 15 :
v' L'indépendance ;
v' La responsabilisation ;
13 J. ROSENER (1991), « Les femmes ne dirigent
plus comme les hommes : ce style de management varie-t-il en fonction du sexe
des managers ? » Harvard - Expansion Eté PP 14-25.
14 S. RAJEMISON (1995), « Femmes entrepreneurs et
dynamiques entrepreneuriale : cas de Madagascar »; les facteurs de
performance de l'entreprise, Edition AUPELF- UREF, John Libbey Eurotext, Paris
P230.
15 S. BELAID (2004), « Les facteurs externes de
l'entreprenariat » ; l'entreprise, l'investissement et la
compétitivité. IACE, Tunisie, P 425.
v' La capacité de prendre des décisions, en
assumant les conséquences ;
v' L'aventure vers d'autres cultures, à travers les
langues étrangères
ou suite à des expériences à
l'étranger.
Toutefois cet ensemble des attitudes et valeurs qui se font
naître par l'entourage familial ne constitue pas l'apanage de
l'éducation prodigué par la majorité des parents.
Des analyses sont faites par des psychologues et des
pédopsychiatres dans ce sujet et qui font preuve que ces valeurs
semblent être exceptionnelles. Ils notent que le modèle parental
dominant se base plutôt sur « l'assistance et le suivisme, par
conséquent, il n'est pas capable de favoriser l'autonomie et
l'indépendance »16.
De plus qu'il ne stimule pas la créativité.
Toujours les activités artistiques sont considérées comme
une perte de temps et la vie associative est quasi-absente dans
l'éducation pour les femmes.
En outre, les femmes sont souvent soumises à leurs parents
et plus tard à leur mari, leur notion d'individualité est quasi
inexistante.
Il faut reconnaître que, dans telles conditions, la
dynamique entrepreneuriale féminine a du mal à émerger.
I.2.2. Formation scolaire
La formation initiale est considérée comme un
maillon déterminant dans la formation de l'esprit et des
capacités des individus.
A cet effet, on sera tenté de se poser la question : quand
aux aptitudes du système éducatif dans la formation d'une culture
entrepreneuriale chez les femmes :
Le milieu scolaire foisonne t-il d'initiatives favorables
au développement d'une société entrepreneuriale
?
RAJEMISON (1995) a définit la culture entrepreneuriale
comme étant l'ensemble des connaissances qui doivent permettre à
un individu de passer au stade d'entrepreneur. Par ailleurs, connaissant le
rôle traditionnellement joué par l'école dans le
développement de la
16 S.BELAID (2004), op. cit.
culture d'un milieu. On peut affirmer que la
société a toujours considéré qu'on envoie les
enfants s'instruire pour qu'il puissent devenir plus tard des
salariés.
Dans cette optique, les enfants ne sont pas
éduqués pour créer leur propre entreprise, leur avenir est
tout tracé : obtenir des diplômes pour avoir un poste. La
structure des formations tenait peu compte de la culture entrepreneuriale.
Ce n'est que tout récemment que des situations sur
l'intégration des notions de création d'entreprise et/ou de
gestion de micro-projets dans certains établissements supérieurs
ont commencé à être posées.
A partir des années 80 - 90, des efforts remarquables
ont touché le système scolaire à tous les niveaux. Les
orientations des programmes d'enseignement sont dans le sens de
développement d'un esprit créatif tant chez les hommes que chez
les femmes afin de faire face à la situation du chômage qui est
devenue la préoccupation des autorités tant européennes
que nationale et régionale.
Le chômage constitue un des principaux facteurs
d'exclusion sociale pour les jeunes diplômés et une des causes
majeures de pauvreté du pays. En conséquence, la lutte contre le
sousemploi est devenu une priorité tant européenne que nationale.
A cet effet, l'Union européenne s'est fixée comme objectif
ambitieux un taux d'emploi global de 70% en 2010, et ce en se concentrant sur
les groupes fragilisés notons ainsi la population
féminine17.
Parmi les mesures mises pour l'accomplissement de cet
objectif, on peut mettre en exergue les changements qui ont touché le
système éducatif afin de développer dès le
départ une formation guidée vers la création d'entreprise
au sein des écoles18.
Des liens de proximité se font naître entre les
universités et les entreprises ou plus précisément le
marché du travail. Les universités seront de plus en plus
à l'écoute des entreprises et parviennent à offrir de
nouvelles perspectives de travail aux diplômés, pour qui le
diplôme est un visa pour l'emploi19 (MECHRI, le Manager
1995).
17 V. DE BRIEY, F. JONSON (2005), « Les
structures d'appui à la création d'entreprise par des
allocataires sociaux : cadres théoriques explicatif », Belgique.
18 G. TCHOUASSI (2002), « Eveil entrepreneuriale,
engagement et coaching des femmes en création d'activité
entrepreneuriale au Cameroun », Cameroun.
19 P.N DENIEUIL (1995), « femmes et entreprises
en Tunisie : essai sur les cultures du travail féminin », Ed. L'
Harmattan, Paris.
Ainsi, en faisant appel aux études menées par
Urbaconsult pour le BIT (Bureau International du Travail), l'étude
évoque en ce sens un niveau d'instruction plus élevée pour
les femmes que les hommes. 50% des femmes entrepreneures ont un niveau
d'instruction supérieur ou secondaire contre 40% des
hommes20, cela signifie en faite que l'instruction et/ou le
diplôme sont un véritable outil d'entrée en entreprise pour
les femmes, voire un passage obligé dans certains cas, plus encore que
chez les hommes.
D'après des statistiques prises de l'INS Tunisie en 2005,
on constate qu'un accroissement progressif et intéressant du niveau
d'instruction des femmes Tunisiennes.
Le nombre des femmes ayant un niveau supérieur
d'instruction a presque doublé plus que trois fois entre 1994 et 2004
passant de 83.7 milles en 1994 a 286 milles en 2004. La tendance à la
progression des filles est nette dans tous les secteurs de formation
supérieure ; par ailleurs, on observe un rattrapage régulier et
sensible dans les filières scientifiques, secteurs où la part
relative des filles est encore minoritaire.
Cela met en exergue que les femmes entrepreneures ont
bénéficié, dans une large mesure, de la
démocratisation de la scolarité. Cela a du induire de profondes
mutations par genre et par structure dans le marché du travail. LACHAUD
avait montré en 1991, que les diplômés avaient de plus en
plus tendance à accepter des conditions du secteur informel vue les
difficultés à trouver un emploi dans le secteur formel,
privé ou public.
Cet état de fait toucherait à cet égard
plus particulièrement les femmes 21 dont on verra plus tard
qu'elles pouvaient être plus stigmatisées dans le salariat et
insatisfaite de leur carrières d'une part et d'autre part qu'elles
peuvent appréhender l'entreprenariat comme un moyen de concilier
à la fois leur travail et leur rôle auprès des enfants, par
une plus grande disponibilité dans l'organisation et l'emploi du temps
par exemple.
Même chose pour les femmes ayant un niveau secondaire
passant de 613 milles en 1994 à 1180 milles en 2004. Ce rythme
d'accroissement a touché les femmes plus qu'aux hommes dans tous les
pays.
20 INST. 2005
21 P.N. DENIEUIL (2005), op. cit.
Un rapport de la quatrième conférence mondiale
sur les femmes préparé en 199522 a montré qu'en
1996, la participation des femmes à la vie active va dépendre de
leur niveau scolaire notons une augmentation de 20% pour les femmes
possédant un diplôme d'études secondaire et de 30% pour les
femmes ayant un diplôme universitaire.
I.2.3. Réseau relationnel
Plusieurs recherches récentes en entrepreneuriat ont
mis l'accent sur le réseau relationnel comme un point essentiel dans le
processus d'éveil entrepreneurial au cours duquel la femme est
progressivement sensibilisée, consciemment ou non, à la
création d'entreprise et à l'entrepreneuriat.
Fayolle, 1994, a définit l'éveil
entrepreneuriale comme étant un moment particulier dans la vie des
femmes, où, pour des raisons et motivations diverses, un premier
intérêt se présentant sous la forme d'une sensibilisation
vis-à-vis de l'entrepreneuriat apparaît23.
A cet effet, si le processus d'éveil s'inscrit bien
dans les cultures nationales et dans les encouragements politiques et
institutionnels, ceux- ci n'en sont pas moins relayés par des
comportements d'ordre familiaux et sociaux.
Les auteurs ont provoqué les influences du milieu
social, de la famille, d'origine et proche, de l'environnement familial, des
relations avec les amis au sens où la femme peut être
placée très tôt dans un contexte favorable où, en
particulier, certaines conditions sociales sont réunies, et participent
à son éveil.
Les parents, les frères, le conjoint, l'entourage
familial, les amis et le tissu associatif avec des entrepreneurs d'envergure
locale ou nationale sont tous es acteurs déterminants à la
naissance et le développement de l'esprit créatif chez la
femme24 .
En ce sens, TCHOUASSI a précisé que la femme,
peut être issue ou placée au sein d'une famille d'entrepreneurs
dans laquelle on naît créateur d'activité entrepreneuriale
ou entrepreneur de façon héréditaire, du père en
fils et cela favorise sa place très tôt dans le domaine des
affaires. Pourtant, il peut également être provoqué avec
retard chez d'autres femmes car leur activité principale reste
ménagère.
22 Rapport de la quatrième conférence
mondiale sur les femmes, Nations Unies, 17 octobre 1995, article 46.
23 G. TCHOUASSI (2005), « Eveil entrepreneurial,
engagement et coaching des femmes en création d'activités
entrepreneuriale au Cameroun ».
24 S. BELAID (2004), op.cit.
La stabilité de l'univers familial, basé sur
l'harmonie et les encouragements du père, des frères, ou du mari
est toujours évoquée par les femmes interrogées lors des
entretiens.
Somme toute, et en faisant appel à la notion de la
discrimination toujours évoqué par la littérature, il
apparaît une faible discrimination entre frères et soeurs au sein
de la famille.
Tel est le constat proposé par BARKALLIL25
lors de sa recherche sur l'instruction des filles et la subvention de l'ordre
ancien, il apparaît une faible discrimination entre frères et
soeurs au sein de la famille. Elle précise à cet égard que
« la quasi-totalité des femmes diplômées
étudiées a bénéficié d'une grande confiance
de la part des parents qui ont porté avec elles leurs projets et leur
ont assuré les conditions les plus favorables compte tenu de leurs
moyens pour les réaliser.
En s'intéressant à la création
d'entreprise en tant qu'une affaire de réseaux, AROCENA a montré
dans son rapport avec l'aide de BERNOUX, MINGUET, PAUL CAVALIER que les femmes
entrepreneures ne créent pas « au hasard » et se situent
toujours en terrain connu dans le cadre d'un réseau relationnel et d'un
« milieu support » propre à chacune d'elles. A cet effet, et
aux termes d' AROCENA, il serait abusif et contraire à la
réalité de considérer l'entrepreneuriat féminin
comme un phénomène solitaire et autonome qui réussit
à l'écart des aides et des déterminants familiaux et donc
des hommes.
Les femmes s'appuient souvent, pour débuter, sur les
réseaux du père ou du mari ou parfois des expériences des
entrepreneurs déjà en affaires et qui ont réussi. Il est
en ce sens difficile de nier l'importance des rapports sociaux et familiaux
à l'émergence de l'esprit créatif chez les femmes. Comme
le disait l'une des femmes interviewées dans le rapport effectué
par HISRISH et PETERS sur l'influence des modèles et systèmes de
soutien sur le choix des entrepreneures : « Quand j'ai vu une femme
réussissait, je me suis dit que j'étais plus forte qu'elle et je
pouvais faire mieux. J'ai donc créer mon entreprise ».
Ces modèles comme les appelaient HISRISH et PETERS
peuvent aussi bien jouer le rôle d'un soutien, pendant et après
la période de création. Ils affirment , en sens, l'entreprenance
étant un rôle social indissociable de son contexte social,
l'entrepreneur que ce soit femme ou
25 P.N. DENIEUIL (2005), op. cit.
homme a tout intérêt à tisser très
tôt des liens avec des ces sources de soutien lointaines et
proches26.
Dans cette partie, on se contente plus sur l'importance de
l'environnement proche des entrepreneures femmes propre à chacune d'elle
auprès duquel elles trouveront un soutien moral ; en ce qui concernent
l'autre type de soutien professionnel ça va être traité
dans le second chapitre.
En s'intéressant au concept du réseau, ALDRICH
et ZIMMER montrent dans leur rapport publié en 1986 qu'il est important
pour tout entrepreneur de s'entourer d'une structure de soutien moral
composée de parents, et d'amis - ses proposés aux acclamations.
Cette claque est particulièrement importante pendant les nombreuses
périodes de difficulté et de solitude qui jalonnent le processus
d'entreprenance. La plupart des entrepreneures femmes indiquent que leur
premier supporter est leur conjoint. Elles se sentent ainsi mieux compris
pendant les trop longs moments qu'elles doivent consacrer à leurs
entreprises. Comme la disait une créatrice : « la clé de mon
succès est l'appui que j'ai reçu de ma famille. Avoir des
partisans compréhensifs prêts à m'encourager, cela m'a
permis de tenir bon contre vents et marées. »
I.2.4. Contexte légal et
réglementaire
REUVEN en 1992 a stipulé que l'épanouissement de
l'entreprise privée suppose des conditions minimales concernant le
statut de la propriété privée, la sécurité
des échanges et des individus, une certaine stabilité des
conditions politiques, réglementaires, .... Toutes choses qui sont
acquises, depuis longtemps, dans les pays développés occidentaux,
mais qui posent de réels problèmes pou les pays les moins
industrialisés ou en voie de développement.
A cet effet, nul ne peut nier le rôle majeur que l'Etat
joue pour créer des conditions favorables ou moins favorables à
l'entrepreneuriat et surtout à l'entrepreneuriat féminin. Le
développement d'une culture entrepreneuriale chez les entrepreneurs tant
femmes qu'hommes relève autant des facteurs reliés aux personnes
c.à.d. les entrepreneurs aux mêmes, à leurs famille,
à leur évolution dans un environnement donné qu'à
l'évolution de leur environnement proprement dit, aux changements
vécus.
Telle la définition de l'entrepreneuriat, certains
auteurs ont insisté sue le fait que l'entrepreneuriat st une affaire de
personnes, qu'il est possible de faire émerger chez elles l'esprit
d'entreprendre, le goût d'entreprendre ainsi que les compétences
nécessaires pour réussir ( GASSE, 2002)27.
Cependant, il y a des conditions à mettre en place dans
l'environnement global et surtout dans le milieu immédiat des
entrepreneures qui joue le rôle de facilitateur au développement
de l'esprit d'entrepreneuriat chez les femmes.
A travers la connaissance des facteurs qui régissent
l'éveil entrepreneurial chez les femmes, les auteurs (AURIFEILLE et
HERNANDEZ, 1991 ; TCHOUASSI, 2005) ont mis en exergue la
nécessité de stimuler très tôt l'esprit
d'entreprendre au sein des communautés des femmes à partir de sa
formation initiale28.
En ce sens, on note l'effort de scolarisation qui a
été consentit par la Tunisie depuis 1958. En juillet, une loi
s'est instaurée, instaurant ainsi une scolarisation obligatoire sous
peine de pénalisation des parents qui retireraient, avant l'age de 16
ans, leurs enfants de l'école.
Cette loi a eu des retombées positives. Les données
statistiques de ces dernières années montrent un accroissement
significatif du taux de scolarisation des filles.
Sexe
Pourcentage
Général de Scolarisation
|
Femmes
|
Hommes
|
1994
|
24.4%
|
28.1%
|
2004
|
31.1%
|
31.4%
|
Variation
|
6.1%
|
3.3%
|
Source : INST, 2005
Tableau I.2 : L'accroissement du taux de
scolarité des filles
27 Y. GASSE (2002), « les créateurs
d'entreprise et les influences de leur environnement », 6 ème
Congrès International Francophone sur la PME, Octobre, HEC,
MONTREAL.
28 G. TCHAOUSSI (2005), « Eveil entrepreneurial,
engagement et coaching des femmes en création d'activités
entrepreneuriale en Cameroun ; 4 ème Congrès de
l'Académie de l' Entrepreneuriat, 24, 25 Novembre.
Citons à titre d'exemple, pour un nombre
d'établissement de l'enseignement supérieur qui
s'élève à 141, dont 7 universités, et un effectif
global d'étudiants de 26250229, le pourcentage de jeunes
filles scolarisées est de 55.1%. C'est un pourcentage très
encourageant et qui reflète une volonté d'accès au savoir,
pour la femme tunisienne, comme moyen de s'imposer et de s'affirmer dans un
environnement social et économique, jusqu'au là
réservé aux hommes.
Parallèlement à cet effort de scolarisation, la
réduction du taux de natalité chez la femme est apparue comme
vital pour assurer leurs activités commerciales hors du domicile.
A cet effet, la Tunisie est le premier pays arabe qui a pu
contrôler le taux de croissance de sa population et assurer un taux
d'emploi féminin équivalent à celui des pays
développés et c'est à partir d'un programme de
planification familiale mis en place par l'Etat partout en Tunisie.
De plus et en terme de reconnaissance des droits de la femme
comme partie intégrante des droits de l'Homme facilitant sa
participation au développement du pays, un ensemble de mesures a
été pris par le gouvernement tunisien dont nos citerons
brièvement la suppression de l'institution du tuteur matrimonial,
l'accès égalitaire à la fonction publique,
l'identité fiscale indépendante de la femme, une plus grande
protection de la mère active, le démantèlement des
barrières juridiques...30
L'outil législatif en tant que stimulateur du
progrès social a été mis à profit dans la promotion
des droits de la femme en consolidant les principes de l'égalité
et de la non discrimination entre les hommes et les femmes.
Parallèlement à cet effort soutenu de
scolarisation, les pouvoirs publics et les acteurs économiques ont
davantage intervenir en faveur de la création d'un esprit créatif
chez les femmes. En plus de vingt ans, l'action publique en matière
d'entrepreneuriat s'est beaucoup transformée. Ainsi, l'appui à la
création d'entreprise s'est développé et s'est
diversifié afin de répondre aux besoins des femmes entrepreneures
potentiels ou existants31. En ce sens, des
29 INST (2005).
30 J. ZOUITEN (2004), « L'Entrepreneuriat
féminin en Tunisie », XVème Colloque International du
CEDIMES, 14,19 Mars, Alexandrie.
31 R. PATUREL, R. MASMOUDI (2005), « Les
structures d'appui à la création d'entreprise : construction en
vue de l'évaluation de leurs performances », 4 ème
Congrès de l'Académie de l'Entrepreneuriat, 24,25
Novembre.
structures de formations professionnelles se sont
constituées afin de répondre aux besoins d'une population
analphabète et non qualifiée.
Nous pouvons citer, à titre d'exemple, la
création, d'une part et dans le cadre du développement
économique de la Tunisie, de 169 centres de formation
gérés par le Ministère du Développement Economique
et qui sont orientés presque totalement vers les femmes. Et d'autre
part, la création par l'Union Nationale des Femmes Tunisienne de 120
centres spécialisés.
Ces efforts d'investissement pourraient permettre à la
femme de contribuer d'une manière plus efficace à l'effort du
développement national et d'une manière plus
général à suivre les mutations mondiales.
Il existe de plus en plus d'organisations gouvernementales ou
non qui proposent de former et d'aider les femmes dans leurs démarches
entrepreneuriales32. L'Organisation Internationale du Travail (OIT),
et l'Organisation de Création et Développement Economique (OCDE),
sont des bureaux qui se consacrent au développement de l'entrepreneuriat
et de la micro entreprise. La Banque Mondiale des Femmes est l'une des agences
internationales les plus dynamiques à proposer des prêts, des
garanties des prêts, de stages de formation et un réseau
d'entraide. Mama Cash d'Amsterdam et Goldraush à Berlin aident les
femmes à trouver des capitaux auprès des sources traditionnelles
: bourses du gouvernement et prêts des banques. L'Administration
Américaine des petites entreprises (PE) garantit 90% des emprunts des
PE.
Les exemples des organisations tant publiques que
privées sont mise partout dans le monde de l'Est à l'ouest,
notons : Global Woman, un bulletin d'informations et de relations utiles pour
les femmes entrepreneures crée par le forum pour la communication
interculturelle de Washington, le Birmingham Settlement du Royaume Uni qui
conseille les femmes et les aident à acquérir des qualifications
professionnelles, le Centre National d'Education pour les femmes dans les
affaires ,crée en 1993 au collège de Seton Hill de Pennsylvanie
dans le but de conduire des recherches et de proposer des programmes
d'éducation33.
32 D. C. SARCHER (2002), « Femmes entrepreneurs :
catalyseurs de transformation ».
33 D.C.SARCHER (2002), op. cit.
Sans oublier à cet effet l'intérêt
constaté par la Tunisie par la création d'un ministère des
affaires de la femme et de la famille en 1992 qui constate la première
institution officielle à «élaborer des programmes dans le
sens de la promotion de la famille ; la création d'u Centre de
Recherches d'Etudes, de documentation et d'Information sur la femme (CREDIF) en
1990, la structure la plus importante qui a été
créée en Tunisie est la Chambre Nationale des Femmes Chefs
d'Entreprises. Cette structure regroupe en son sein plus de 5000 femmes chefs
d'entreprises, et bénéficie d'une reconnaissance
internationale34.
Dans notre recherche empirique apparaît que plusieurs sont
les femmes qui prononcent l'importance de ce facteur dans leurs
démarches entrepreneuriale.
Au delà de ça, GASSE a confirmé dans sa
recherche sur l'entrepreneuriat35 que les PME et les nouvelles sont
particulièrement sensibles aux actions et aux changements majeurs
venants des gouvernements.
I.2.5. Régime politique
Ces dix dernières années, la
libéralisation des marchés, la conjoncture économique de
l'ère de la mondialisation, la croissance du chômage et le taux
élevé d'échec des grandes entreprises, etc.... ont
poussé les pouvoirs publics et les acteurs économiques à
davantage intervenir en faveur de la création d'entreprise et de
l'accompagnement des différentes catégories de porteurs de
projets de création d'entreprise.
En effet, l'entrepreneur semblait avoir disparu et avoir perdu
complètement son control dans les grandes entreprises ; Une bonne partie
de la population, et plus particulièrement les générations
montantes, doute de plus en plus de l'habilité et de la capacité
des traditionnelles à faire face à ces phénomènes
et aux besoins humains qui sont en constance mutation remettant en cause le
principe longtemps accepté de l'auteur Anglais SCHUMACHER, dans son
livre devenu fameux Small is beautiful (1974)36 « Ce qui est
grand doit nécessairement être bon ».
34 M. BEN SALMA (2006), « Libéralisation
commerciale et dynamique de l'emploi féminin : le cas de la Tunisie
», Gender Impact of Trade Libéralisation in the Mena Région,
pp 39-42.
35 Y.GASSE (1993), « Profession :
Entrepreneur », Ed. Transcontimentales, pp 87-99.
36 Y. GASSE (1983), « L'Entrepreneur moderne :
Attributs et fonctions », Revue Internationales de Gestion, Vol 7
N°4, Novembre, p.3-4.
La reconnaissance et la survivance de l'entrepreneur
indépendant dans des entreprises de petites et moyennes tailles
apparaissent de plus en plus typique à cette époque. Son esprit
créatif et organisateur est au coeur de ce renouvellement dans ce
contexte, les pays développés et même les pays en voie de
développement PVD ont accepté une stratégie pour
l'orientation de leur économie vers la privatisation de leurs
entreprises en incitant ainsi à développer l'initiative
privée. Cette orientation a touché en grande partie notre
population cible qui est les femmes.
De ce point de vue, les auteurs sont mis d'accord que la
dynamique entrepreneuriale féminine est en faite concentrée dans
les PME ou mini projets37. Les femmes peuvent et veulent contribuer
à part entière à la solution de la crise38.
Elles arrivent dans le monde des affaires avec des yeux neufs.
Des lois et des réglementations ont été
mises à l'égard des femmes afin de faciliter leurs accès
au monde des affaires. Les recherches qui ont été
inventées à cet égard montrent que les femmes d'affaires
tirent parti davantage de tous ce qui a été offerts par les Etats
au profit d'elles.
En conclusion, d'après les recherches présentes,
nous pouvons dire que les changements vécus dans l'environnement des
femmes en général ont bien joué un rôle d'appui
à l'entrée des femmes dans le monde des affaires et même
à l'évolution de leur nombre à travers le monde. De cette
manière, les femmes entrepreneures se sentiront davantage soutenues dans
leur quête d'une plus grande autonomie professionnelle et d'une vraie
reconnaissance de leur contribution au développement de leur pays.
37 J. D. MC NEIL (1983), « Le travail
féminin et les nouvelles technologies : défis à relever
», Revue Internationale de Gestion, Vol 8 N°2, Février,
p.42.
38 F. H. GIASSON (1983), « La féminisation
du marché du travail et els défis qu'elle pose aux entreprises
», Revue Internationale de Gestion, Vol 8 N°1,
Février, p.1.
Conclusion
Au termes de ce chapitre, nous pouvons faire un petit survol
sur les constations conclues par les chercheurs. Les sujets sur
l'entrepreneuriat ont certes été amplement étudiés,
mais toujours sans prêter attention au genre. Le monde des affaires,
ainsi que les recherches étaient largement la chasse gardée des
hommes, et l'attention a rarement été portée sur
l'entrepreneuriat féminin.
Cette situation n'a pas trop duré, les récentes
recherches qui ont été menées depuis les années 80
jusqu'à présent dans le domaine de l'entrepreneuriat
féminin ont essayé de lever la voile sur l'environnement global
des femmes. Leur premier intérêt était de déterminer
quels sont les facteurs, au niveau sociétal, économique ou
individuels, qui ont affecté la manière dont les femmes
intègrent l'entrepreneuriat, et comment ce phénomène
est-il lié à la croissance économique.
Les chercheurs aussi bien que les différentes
organisations (OIT, OCDE, diverses entités gouvernementales, etc.)
commencent désormais à reconnaître que le système de
genre joue, comme d'autres domaines, un rôle très important dans
l'entrepreneuriat et la croissance économique.
Nous essayerons dans le chapitre suivant de discuter
de la spécificité de femmes en affaires par rapport à leur
homologue masculin dans un premier lieu (section 1), puis de s'occuper de la
relation porteuse « femmes »- portants dans une perspective
d'accompagnement (section 2) afin de se disposer de meilleures informations
pour lancer des mesures de soutien et d'appui aux femmes dans leurs
démarches entrepreneuriales.
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