Paragraphe 3 : Revue de littérature
3.1- Approche traditionnelle :
Selon une définition générale, la
diversification consiste à élargir progressivement la gamme des
produits fabriqués sans modifier nécessairement les niveaux de
productivité.
L'exportation est quant à elle, l'action de diffuser
à l'étranger des idées, une mode ou des marchandises.
Selon H. Gouthon (2004), président du Conseil National
pour l'Exportation, exporter n'est pas le fait d'expédier mais il doit
correspondre pour un pays à la sécurité alimentaire et
doit relever du pouvoir d'achat et de la correction de la balance commerciale
d'une manière concomitante.
Par ailleurs, le commerce international est lié au
désir d'accroître les profits et d'améliorer le niveau de
vie. De temps en temps, des échanges s'effectuent parce qu'un pays est
incapable de produire un bien particulier qui existe, mais, de façon
générale, on fait du commerce parce que cela permet de se
concentrer sur ce qu'on fait de mieux tout en obtenant d'autres biens et
services des autres pays. Ce mélange de la spécialisation et des
échanges permet de produire davantage avec moins de moyens, ce qui
avantage tout le monde au bout du compte (G. Hodgson,
2004).
Des études menées récemment ont fait
recours à un critère. En effet, pour évaluer la
diversification des exportations, on utilise des données chronologiques
pour déterminer et comparer les expériences respectives des
différents produits.
Dans l'analyse de la relation entre la diversification et la
croissance, la plupart des auteurs ont utilisé des modèles
macroéconométriques où ils ont cherché à
tester la corrélation entre le niveau de croissance et différents
indices de diversification. A ce niveau, il faut mentionner les travaux de
Jean-Claude Berthélemy qui a utilisé une méthodologie
particulière. Dans un premier temps, il utilise la méthodologie
traditionnelle de décomposition de la contribution des différents
facteurs à la croissance. Il utilise ensuite une fonction de production
Cobb Douglas qu'il décompose en différentes contributions : le
capital, le travail et la productivité totale des facteurs. Par la
suite, il cherche à travers une régression
économétrique à estimer les
différents facteurs qui expliquent la productivité totale des
facteurs. A ce niveau, il a retenu plusieurs variables explicatives dont
l'indice de diversification, le financement de développement,
l'ouverture de l'économie, le capital humain. Cette méthodologie
est intéressante car elle permet, à travers la
productivité totale des facteurs, de montrer la contribution de la
diversification à la croissance économique.
Selon J-C. Berthélemy (2006), il est
nécessaire de mettre de plus en plus l'accent sur la question de la
diversification dans le débat économique et sur la
nécessité de réorienter les politiques commerciales et
industrielles (Commerce international et diversification économique,
à paraître dans la Revue d'Economie Politique).
3.2- Etudes empiriques :
La question de la diversification n'est pas récente
dans la littérature économique. Elle a été au
centre des premiers travaux sur le développement économique. Les
travaux de B. F. Massel (1970) sur la diversification ont
montré qu'elle joue un rôle essentiel dans la maîtrise des
aléas de la conjoncture et particulièrement des fluctuations des
cours de matières premières pour les pays en développement
(Export instability and economic structure, American Economic Review).
La théorie des avantages comparatifs stipule que
l'allocation optimale des ressources est celle dans laquelle chaque nation se
spécialise sur ce qu'elle sait le mieux faire. Ceci devrait donc en
principe réduire la diversification. On constate néanmoins que
les pays développés, et des pays en développement
très ouverts sont très diversifiés.
Les travaux sur la diversification ont mis l'accent sur une
série d'éléments considérés comme essentiels
dans le renforcement des tissus productifs des pays en développement. Le
premier élément est lié à la capacité
d'investissement ou d'accumulation des pays. La première
génération des travaux sur la diversification a
également été à l'origine d'un
important débat sur les priorités sectorielles. En effet, si
certains défendaient l'idée d'une croissance
équilibrée, d'autres plus nombreux mettaient l'accent sur le
caractère structurant de certains secteurs qui peuvent jouer un
rôle d'entraînement sur le reste de l'économie. C'est cela
qu'a essayé de développer A. O. Hirschman dans
son ouvrage intitulé « The strategy of economic development, Yale
University Press, New Haven » en 1958. Parallèlement à
l'accumulation du capital et aux politiques sectorielles, les premiers travaux
sur la diversification ont également insisté sur le rôle de
l'industrie. En effet, selon A. Gerschenkron (Economic
backwardness in historical perspective, Belknap, Cambridge, 1962.) un consensus
a été établi autour du développement industriel et
de sa place dans la transformation des économies traditionnelles et la
modernisation des structures productives des pays en développement.
Selon Al-Marhubi (2000), la diversification
des exportations se présente comme l'une des variables explicatives dans
l'analyse du recul de la croissance économique et le recours au taux de
concentration comme méthode de diversification s'est avéré
une fois de plus utile pour l'examen de cette relation.
L'impact positif du commerce extérieur sur la
croissance des Pays en Voie de Développement n'est pas
systématique. La réussite du modèle des Nouveaux Pays
Industrialisés d'Asie, où la croissance est tirée par
l'extérieur, masque les problèmes rencontrés par les
autres grandes zones de développement. Les tests révèlent
que l'ouverture et par ricochet le développement des exportations ne
peut palier l'absence des conditions internes favorables à la
croissance. Si ces conditions préalables n'existent pas, l'ouverture
peut figer des situations de sous- développement et se
révéler inefficace voire dans des cas extrêmes. (Centre
d'Etude et de Recherche sur le Développement International
(CERDI) : Ouverture commerciale et croissance des PED- Une
étude sur les données de panel 1980 - 1996).
Le CAPC qui est un projet de la Commission
Economique pour l'Afrique, soutenu financièrement par le Fonds Canadien
pour l'Afrique a, dans sa
36ème publication, définit la
diversification des exportations comme étant « la méthode
qui consiste à modifier la physionomie des Exportations ». Aussi,
l'étude tente de faire une analyse globale de la situation de l'Afrique
quant à la place qu'elle occupe dans le rang de la mondialisation et de
son effort pour la diversification de ses exportations. Sa critique a donc
abouti à la conclusion selon laquelle l'Afrique est très en marge
dans les échanges mondiaux. Il ne peut d'ailleurs en être
autrement car les pays africains ont une croissance économique
très faible et fragile et donc que ces progrès sont insuffisants
pour atteindre les objectifs de développement du Millénaire et
que les exportations en Afrique sont très peu diversifiées.
Plusieurs outils de mesure de la diversification sont proposés dans
cette étude.
>L'indice d'ogive est l'un des indices de diversification
industrielle les plus couramment utilisés. Cet indice mesure la
déviation par rapport à une répartition équitable
de l'emploi dans tous les secteurs, c'est-à-dire la moyenne de la
distribution. Cet indice peut également être utilisé comme
mesure de la diversification des exportations ou de la concentration. La valeur
minimale de l'indice, c'est-à-dire zéro, est atteinte lorsque la
part des exportations est répartie équitablement entre les
différents produits. Lorsque la valeur OGV se rapproche de zéro,
l'économie en question est considérée comme étant
fortement diversifiée. Par contre, une valeur OGV plus importante est le
signe d'une économie relativement moins diversifiée, ce qui
signifie que sa gamme des exportations ne compte que quelques produits.
>Un apport essentiel des travaux de Shannon concerne la
notion d'entropie. L'entropie est une forme de mesure qui a été
appliquée dans de nombreux domaines, comme les sciences, la
théorie de la communication, le commerce et les finances, et
l'économie. A titre d'exemple, dans les sciences biologiques et du
comportement, on a utilisé l'entropie comme mesure de la
désorganisation. Dans un contexte de commercialisation, l'entropie peut
représenter la répartition des préférences des
consommateurs pour différentes marques. Les applications de l'entropie
à la statistique sont apparues à la fin des années 60 et
70. En tant que
mesure de la diversité, l'indice d'entropie reflète
la diversité ou l'étendue de la répartition.
>Mis au point par A. Hirschman en 1945, l'indice de
Hirschman, qui sert à mesurer le degré de diversification, a
été surtout utilisé pour mesurer la concentration des
échanges et des produits. D'après Hirschman, cet indice sert de
mesure lorsque la concentration est fonction à la fois d'une
répartition inégale et du nombre limité de produits.
>On peut également utiliser l'indice de Hirschman
comme mesure relative de la diversification en exprimant sa valeur entre 0 et
1. Il s'agit de l'indice de Hirschman-normalisé.
>L'indice agrégatif de spécialisation qui
sert à mesurer la diversification des exportations, est tiré d'un
indice de la concentration de la répartition des exportations selon les
produits. Comme on l'a vu plus haut, il est très proche de l'indice de
Hirschman de la concentration du commerce. Berthélemy et Sorderling
(2001) ont utilisé un indice de diversification qui est l'inverse de
l'indice agrégatif de spécialisation (SPE).
Le CAPC, dans cette même publication a proposé un
modèle de diversification. En effet, une étude empirique a
été effectuée sur des données de panel pour
plusieurs pays Africains. Cette analyse empirique a permis d'identifier les
déterminants de la diversification de ces pays. Le modèle se
spécifie de la manière suivante :
I1=
[30+[31GCFt+[32GDPcat+[33Indprodt+
[34Tradet+ [35Inflatet+
[36Extratet+ [37Fbalancet+
[38Gouvernt+ [39Conflicç
+ìt.
I1 étant l'indice de diversification; GCF
la formation de capital brut représentant l'investissement ;
GDPca le PIB par habitant; Indprod l'indice de la production
industrielle ; Trade l'ouverture commerciale ; inflate
l'inflation ; Exrate le taux de change; Fbalance
l'équilibre budgétaire ; Govern la gouvernance;
Conflict la variable
fictive indiquant l'existence d'un conflit ;
âi les coefficients à estimer ; et
t l'indice temporelle.
Par ailleurs, dans sa 62ème publication, le
CAPC fait une autre étude sur la diversification des exportations qui
consiste à analyser les effets des politiques
publiques et des chocs exogènes sur la diversification
des économies et la croissance dans la perspective d'atteindre les
Objectifs du Millénaires
pour le Développement. Dans cette perspective, le CAPC
a cherché à introduire, dans les différents secteurs,
l'articulation entre plusieurs formes d'organisation de la production afin de
rendre compte de la multiplicité des structures économiques dans
les pays en développement.
3.3- Différents types de diversification selon le
CAPC
Le premier type de diversification concerne les pays à
faible diversification économique. L'étude a constaté que
de nombreux pays africains appartenaient à cette catégorie. On
peut constater que ces pays affichent une croissance moyenne positive sur la
période 1981-2000. Le Bénin, le Burkina Faso et le Malawi ont des
taux de croissance annuels respectifs de 3,8 %, 3,7 % et 3%. La principale
source de croissance est l'accumulation des facteurs plutôt que la
productivité totale des facteurs. Toutefois, même si la croissance
dans ces pays est positive, sur les vingt dernières années, leurs
taux de croissance ne correspondent pas au niveau nécessaire au
décollage économique, comme c'est le cas dans les
économies à forte croissance des pays d'Asie de l'Est.
Le deuxième type de diversification s'applique aux pays
qui ont entamé le processus de diversification mais sans faire de
progrès notables. Là aussi, la principale source de croissance
est l'accumulation des facteurs plutôt que la productivité totale
des facteurs. A noter cependant que la contribution moyenne de la
productivité totale des facteurs à la croissance au
Sénégal et au Zimbabwe est positive.
Le troisième type de diversification se retrouve dans les
pays dont le processus de diversification est bien avancé.
Les pays qui ont enregistré des gains précoces
en matière de diversification avant de tendre vers la
spécialisation dans un nombre réduit de produits relèvent
du quatrième type de diversification.
Le cinquième type de diversification peut se constater
dans les pays en conflit ou sortant d'un conflit. Les pays de cette
catégorie, à l'exemple du Liberia et de la République
Démocratique du Congo, ne sont ni diversifiés ni fortement
spécialisés.
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