2. Etude des paramètres biologiques
2.1. Etude de la croissance
2.1.1. Croissance pondérale
16
14
12
lot 1 lot 2 lot 3
10
8
6
4
2
0
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120
Age des larves (j)
Figure 20 : Croissance d'Oreochromis
niloticus en fonction du poids moyen
Dans le graphe ci-dessus, on remarque que les alevins sont
passés d'un poids de 0.01g pour les trois lots à la fin avril
à un poids de 9.2 g pour le lot 01, de 13.4 g pour le lot 02 et de 16.4
g pour le lot 03 à la mi-août. On remarque aussi que les trois
courbes de l'évolution pondérale, ont la même allure ; la
différence demeure dans la cinétique de croissance pour chaque
lot. Suite à ça, on peut diviser le graphe en trois parties :
Une croissance plutôt stationnaire
pendant les sept premières semaines (1-55 JAE**) où on
décèle un gain de poids de 0.22 g pour le lot 01, de 0.1 g pour
le lot 02 et de 0.22 g pour le lot 03 ;
Une croissance lente pendant trois semaines
(55-75 JAE), où le gain de poids est de 1.3 g, 1.54 g et 1.46 g
respectivement pour les lots 01, 02 et 03 ;
Une croissance qui s'accélère
nettement pendant les six dernières semaines (75-115 JAE) avec un gain
de poids de 7.7 g pour le lot 01, 11.8 g pour le lot 02 et 14.7 g pour le lot
03.
**JAE : jours après éclosion
2.1.2. Croissance linéaire
10
9
8
7
6
5
4
3
2
1
0
lot 1 lot 2 lot 3
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120
Age des larves (j)
Figure 21 : Croissance d'Oreochromis
niloticus en fonction des tailles moyennes
Pour la croissance linéaire, on remarque le même
schéma d'évolution que pour la croissance pondérale. De la
figure 21, on peut remarquer que les alevins sont passés d'une taille de
0.8 cm (à leur éclosion) à une taille de 8.6 cm pour le
lot 01, de 9.4 cm pour le lot 02 et de 9.9 cm pour le lot 03 à la fin de
l'expérience.
Le graphe nous montre aussi que les trois courbes sont
pratiquement superposées et ce jusqu'au 75ème jour.
Ensuite, l'évolution semble plus rapide pour le lot 03 que pour le lot 2
qui est encore plus rapide que pour le lot 01.
A partir de ces courbes, on peut déduire trois phases
pour les trois lots, qui correspondent à trois vitesses de croissance
:
Une croissance linéaire stationnaire
pendant le premier mois d'élevage (1-30 JAE) qui correspond à la
phase d'alevinage où le gain en taille est de 0.75 cm pour le lot 01,
0.6 cm pour le lot 02 et 0.78 cm pour le lot 03 ;
Une croissance linéaire lente pendant
le deuxième mois (30-65 JAE), avec un gain en taille de 1.95 cm, 2 cm
et 2.29 cm respectivement pour les lots 01, 02 et 03 ;
Une croissance rapide pendant les deux
derniers mois (65-115 JAE), le gain en taille est de 5.86 cm pour le lot 01,
6.6 cm pour le lot 02 et 6.81 cm pour le lot 03 ;
Bien que les conditions physico-chimiques semblent convenir
à l'alevinage et bien que la ration alimentation soit respectée
et présentée sous forme pulvérulente pour faciliter son
ingestion aux larves, la première phase de la croissance
pondérale et linéaire d'aspect stationnaire, pourrait être
due au confinement du milieu (pendant l'alevinage dans les aquariums) ou
à l'inadaptation à l'aliment donné qui peut être
attribuée à son tour à différents facteurs :
formulation inadéquate, médiocre qualité des
matières premières ou taux de protéines en-deça des
valeurs préconisées par Jauncey & Ross (in FAO,
1989) (Tab. III).
Tableau III : Proportions des composés
alimentaires (en % de la matière sèche)
pour différentes catégories de Tilapias (d'après
JAUNCEY & ROSS in FAO, 1989).
Composés (% mat. sèche)
|
<0.5g
|
0.5-10 g
|
10-35 g
|
35g
|
Géniteurs
|
Protéines brutes
|
50
|
35-40
|
30-35
|
25-30
|
30
|
Lipides bruts
|
10
|
10
|
6-10
|
6
|
8
|
Hydrates de C digestibles
|
25
|
25
|
25
|
25
|
25
|
Fibres
|
8
|
8
|
8-10
|
8-10
|
8-10
|
Vitamines
|
2
|
2
|
2
|
2
|
2
|
Minéraux
|
4
|
4
|
4
|
4
|
4
|
La deuxième phase de croissance correspond au
prégrossissement (31-115 JAE) qui se déroule dans les bassins
circulaires où la densité d'empoissonnement varie de 51.33
individus/m3 pour le lot 01, 33.33 individus/m3 pour le
lot 02 et 41.32 individus/m3 pour le lot 03 à 31 JAE
(correspond à la période où la croissance est lente)
à 44 individus/m3 pour le lot 01, 18 individus/m3
pour le lot 02 et 17 individus/m3 pour le lot 03 à 115 JAE
(correspond à la période où la croissance est rapide). Les
poissons sont placés en élevage mixte (lot 01), ou en
élevage monosexe (inversion hormonale : lots 02 et 03).
Vers 80-85 JAE, la croissance est rapide mais à des
vitesses différentes pour les trois lots. Nous pensons que cette
différence de croissance pourrait correspondre à la
maturité sexuelle du Tilapia qui intervient à cet âge dans
un élevage, sans oublier que les individus mâles présentent
une croissance nettement plus rapide que les femelles et atteignent une taille
nettement supérieure (lot 03).
On remarque que durant cette troisième phase, la
croissance du lot 02 est plus rapide que celle du lot 01 bien qu'ils aient le
même sex-ratio et soient élevés dans les mêmes
conditions. La seule variante réside dans la densité
d'empoissonnement des bassins qui est moins importante pour le lot 02.
On remarque aussi que la croissance du lot 03 est plus rapide
que celle du lot 02 bien que la densité ainsi que les conditions
d'élevage sont les mêmes pour les deux lots. La seule variante
réside dans le pourcentage des mâles et le sex-ratio dans chaque
lot qui tend vers 1/1 (mâle/femelle) dans le lot 02 et vers 1/0 dans le
lot 03.
On peut déduire que deux paramètres ont
influencé la croissance des alevins des trois lots durant toute
l'expérience : 1) la densité d'élevage et 2) le
sex-ratio.
Conclusion :
L'hétérogénéité du poids
des poissons soumis à un même traitement augmente avec la
croissance. Ces différences de croissance dans un groupe (lot) de
poissons ayant le même poids initial et vivant dans les mêmes
conditions peuvent s'expliquer par le ratio sexuel, le comportement face
à l'aliment et/ou la génétique (Gardeur et al.
in Ouledmaamar & Tikerrouchine, 2005). Une densité
élevée serait probablement responsable d'un ralentissement de la
croissance d'individus du même lot, créant ainsi des écarts
relativement importants. De plus, ces différences de croissance ne
résultent pas seulement d'une compétition pour la nourriture mais
également peuvent être dues à une augmentation du stress
résultent de l'accroissement des contacts inter individus.
2.2. Relation taille-poids
Lot 01 (lot témoin) : Lot 02
(lot traité '3 une semaine):
10 15
W = 0,0129L3,0854
W = 0,01 14L3,162
R2 = 0,9893
10 R2 = 0,9842
5
5
0
0 2 4 6 8 10
Taille moyenne (cm) 0
0 2 4 6 8 10
Taille moyenne (cm)
Lot 03 (lot traité '3 un
mois):
15
20
W = 0,0105L3,2004 R2 = 0,9884
10
5
0
0 2 4 6 8 10
Taille moyenne (cm)
Figure 22 : Comparaison des relations
taille-poids entre les lots 01, 02 et 03
La figure 22 représente la relation taille-poids des
individus d 'Oreochromis niloticus étudiés.
L'application du modèle de croissance de Von Bertalanffy (Lazard et
al., 1990) montre qu'il existe une très bonne corrélation
pour les trois lots (R12 = 0.99 ; R22 = 0.98 ;
R32 = 0.99). Néanmoins, l'application d'un modèle peut
s'avérer hasardeuse vu le nombre réduit d'individus ainsi que les
conditions de l'expérience (utilisation d'hormone). Cependant, la valeur
de la pente obtenue pour les trois lots (3.08 ; 3.16 ; 3,2) est voisine de 3,
ceci est en accord avec la bibliographie étudiée (Moreau in
Lazard et al., 1990).
La représentation graphique de la relation taille-poids
du lot 01 montre que l'allométrie est isométrique, le coefficient
de croissance relative entre le poids et la longueur est égal à 3
(b = 3.0854), c'est à dire que le poids croit proportionnellement au
cube de la longueur, on remarque aussi un très bon coefficient de
corrélation (R2= 0,9893) qui met en évidence le
degré de corrélation entre les deux variables.
Concernant le lot 02, on remarque que le coefficient
d'allométrie est supérieur à 3 (b= 3,162), le type de
croissance est dit majorante c'est à dire que le poids croit plus vite
que le cube de la longueur et la corrélation entre les deux variables
est très élevée (R2= 0,9842).
La représentation graphique de la relation taille-poids
du lot 03 présente un coefficient d'allométrie supérieur
à 3 (b= 3,2004), le type de croissance dans ce cas est dit majorante ;
c'est à dire que le poids croit plus vite que le cube de la longueur et
les deux variables sont bien corrélées (R2=
0.9884).
D'après les résultats obtenus, nous pouvons avancer
que les alevins n'évoluent pas de la même manière puisque
nous sommes en présence de deux types de croissance.
Sachant que les trois lots d'alevins sont placés dans
des conditions d'élevage similaires et que la seule variante est
l'incorporation ou pas d'hormones dans l'aliment ainsi que sa durée
d'administration aux alevins, on peut conclure selon les observations
notées pendant l'expérience que les alevins de Tilapia
traités aux androgènes présentent
généralement une croissance plus rapide que les individus non
traités, confirmé par Rothbard et al. (1983).
2.3. Etude du taux de mortalité
cumulée
80
70
60
50
40
30
20
10
0
lot 1 lot 2 lot 3
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120
Age des larves (j)
Figure 23 : Mortalité cumulée
chez Oreochromis niloticus
D'après la figure 23, les taux de mortalité sont de
23 % pour le lot 01, de 52 % pour le lot 02 et de 38 % pour le lot 03 pour le
premier mois d'alevinage.
Nous pensons particulièrement au cannibalisme* et
à l'agressivité reconnue du Tilapia pour expliquer ces
mortalités, car c'est au cours de la période d'alevinage que ce
phénomène est le plus à craindre (Lazard et al.,
1990) et que quelques larves mortes avaient les yeux perforés et le
corps déchiqueté. Nos suppositions semblent être
confirmées par Balarin & Haller (1982); ils ont
démontré qu'il arrive également que le cannibalisme
apparaisse parmi les alevins d'une même ponte. Dans ce cas, la
différence de poids et/ou de taille (rapport 3 à 1) engendre un
comportement agressif allant jusqu'au cannibalisme; ce qui semble se produire
dans notre expérience d'après les résultats de la
pesée du 21 mai 2005 (par exemple, nous avons des individus de 0.123 et
de 0.016 g dans le lot 01 et des individus de 0.052 et 0.0 17 g dans le lot
02). Cette hétérogénéité du poids et de la
taille apparaît, pour les trois lots, durant toute la durée de
l'expérience.
2.4. Etude de l'inversion sexuelle
Tableau IV : Résultats du sexage manuel
et du squash gonadique pratiqués sur les individus
d' Oreochromis niloticus.
|
Effectif
|
Survie
|
Sexage manuel
|
Squash gonadique
|
|
au
|
(%)
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
sexage
|
(Ni=100)
|
6'
|
?
|
Ind.
|
6'?
|
Mâles (%)
|
6'
|
?
|
Ind.
|
6'?
|
Mâles (%)
|
Lot 01
|
66
|
66
|
24
|
36
|
6
|
0
|
36,36
|
31
|
26
|
9
|
0
|
46,96
|
Lot 02
|
27
|
27
|
20
|
3
|
4
|
0
|
74,07
|
13
|
3
|
0
|
11
|
48,14
|
Lot 03
|
25
|
25
|
24
|
1
|
0
|
0
|
96
|
24
|
1
|
0
|
0
|
96
|
Ni : effectif initial
Ind. : indéterminé
?? : Inversion incomplète, organisme avec
gonade mixte (hermaphrodite).
+ La survie des alevins, déterminée au moment du
sexage, diffère d'une manière significative entre le lot
témoin et ceux soumis à l'inversion hormonale.
+ Les sex-ratios des trois lots d'alevins (118 individus) ont
été déterminés par sexage manuel puis
confirmés par squash gonadique (Tab.IV). Aucune différence
significative n'apparaît dans le sex-ratio du lot 02 par rapport au lot
témoin
+ Le premier lot (témoin) présente un sex-ratio
de 1/1 (mâle/femelle), le deuxième lot (traité à
l'hormone pendant une semaine) présente aussi un sex-ratio de 1/1, par
contre, le troisième lot (traité à l'hormone pendant un
mois) a un sex-ratio de 1/0.
+ L'examen microscopique du lot 02 révèle que
40.74 % des individus présentent des caractéristiques
hermaphrodites c'est à dire que la gonade est mixte est présente
les deux tissus mâle et femelle à la fois. Nous pensons que
l'apparition de ce phénomène est liée à la courte
durée du traitement hormonal qu'a subi ce lot (une semaine). Car Chez
O. niloticus, la sensibilité au traitement hormonal
apparaît durant une période critique précise. Le traitement
pour être efficace doit être appliqué durant une
période minimale de 21 jours. Histologiquement, se déroulent
successivement chez les individus femelles, la prolifération ovogoniale
entre 20 et 28 JPF** (Baroiller, 1988). Chez le mâle, durant la
même période, se déroule la phase de multiplication
très progressive des cellules somatiques et spermatogoniales (Baroiller,
1988). Les hormones exogènes sont donc fournies à l'alevin avant
la mise en place de ces processus histologiques.
+ Le traitement du lot 03 à la 17 ct-MT a
déplacé significativement, par rapport au témoin, le
sex-ratio en faveur du sexe mâle.
Conclusion
De nos données, on peut conclure que
l'expérience de l'inversion du sexe par hormone est réussie pour
le lot 03 (traité à l'hormone pendant un mois), on a obtenu un
sex-ratio de 1/0 (mâle/femelle) par rapport au lot témoin qui
présente un sex-ratio de 1/1. Le deuxième lot (traité
à l'hormone pendant une semaine) présente le même sex-ratio
de 1/1, ce qui signifie que l'inversion sexuelle, dans ce lot, ne s'est
produite ou était incomplète.
|