Les fusions réalisées entre les cabinets
d'audit au niveau international (le passage des BIG 8 au BIG 4) ont rendu le
marché de l'audit fortement concentré. En France, Broyé
(2007) conclut que la moitié des parts de marché est
détenu par des BIG. Au Royaume-Uni, Beattie et al. (2008) montrent que
la faillite du cabinet Anderson a pour conséquence la redistribution des
parts de marché entre les BIG mais une forte concentration persiste.
Conscients de l'importance de ce problème de
concentration, l'objectif de notre mémoire est d'étudier la
concentration du marché tunisien d'audit légal avant et
après la loi relative au renforcement de la sécurité
financière. Nous avons proposé une analyse descriptive,
basée sur des observations empiriques, de la concentration sur le
marché de l'audit des entreprises tunisiennes faisant appel public
à l'épargne sur la période allant de 2004 à 2006.
La concentration du marché est mesurée par le ratio de
concentration calculé à partir de parts de marché
pondérées par la racine carrée du total de l'actif des
sociétés auditées.
Les résultats révèlent que le
marché de l'audit tunisien, en 2004, est sous la forme d'une structure
intermédiaire entre l'oligopole ouvert et restreint. Après
l'entrée en vigueur de la LSF, la concentration sur le marché
diminue. Il y a une tendance vers un marché concurrentiel. Le ratio de
concentration global d'ordre 4 s'approche de 40% en 2006. L'analyse sectorielle
montre la diminution des ratios de concentration de différents ordres
à l'exception des « Autres Secteurs ». Toutefois, nous
constatons un plafonnement (70-100) des secteurs dés l'ordre 8 à
part le secteur industriel.
A partir des observations intersectorielles, les parts de
marché des BIG connaîssent des fluctuations soit au profit des
autres BIG soit au profit des cabinets nationaux. En effet, aucun réseau
d'audit ne préserve sa dominance sur un secteur donné. Dans
certains secteurs, les cabinets nationaux occupent des positions de leaders.
La LSF commence à avoir ses effets sur la concentration
et la compétitivité sur le marché de l'audit.
L'instauration du double commissariat affaiblit les parts de
marché des leaders au bénéfice des
cabinets nationaux. En outre, l'apparition de nouveaux acteurs reflètent
la structure du marché : l'absence de barrières à
l'entrée est une caractéristique d'un marché
concurrentiel.
Les conclusions tirées de cette étude ne sont
pas affirmatives et acceptent la révision et nécessitent
d'être mises à jour. En effet, l'obligation de rotation des
commissaires aux comptes ne devient effective qu'en 2009.
Nos résultats et conclusions que nous en tirons
doivent cependant être interprétés en prenant en
considération certaines limites.
Tout d'abord, lors de la collecte des informations
nécessaires à la base de donnée, nous avons
rencontré beaucoup de problèmes relatifs à la
disponibilité des états financiers. Le site officiel du CMF
présente quelques insuffisances. Les états financiers des
sociétés faisant appel public à l'épargne ne sont
pas complets et parfois nous constatons des confusions entre les états
financiers publiés des différentes sociétés. Pour
ces raisons, notre échantillon n'est pas exhaustif. Notre étude
serait plus pertinente si les organisations financières prennent en
considération l'importance et la nécessité de la
divulgation à la fois complète, pertinente et à jour des
états financiers pour qu'elles soient à la disposition des
utilisateurs et des centres de recherche.
En outre, notre objectif se limite aux sociétés
faisant appel public à l'épargne. Ces sociétés
représentent un pourcentage faible des sociétés
tunisiennes soumises à l'obligation de désignation d'un
commissaire aux comptes. Seuls les commissaires aux comptes membres de l'ordre
des experts comptables de Tunisie auditent les entreprises de notre
échantillon. En revanche, en Tunisie, nous avons d'autres acteurs
à savoir les comptables membres de la compagnie nationale des
comptables. Donc, les conclusions de notre travail concernent sauf le
marché de l'audit des sociétés faisant appel public
à l'épargne et ne peuvent pas être
généralisées à l'ensemble du marché
tunisien.
Les futures recherches pourraient étudier le
marché de l'audit tunisien dans sa globalité et l'impact de la
concentration sur la qualité de l'information comptable.
Les résultats démontrent que tous les auditeurs
des entreprises faisant appel public à l'épargne font partie de
la région de Tunis à l'exception de deux auditeurs appartenant
à la région de Sfax.