Claire MARC HANDEAU
Master 2 Professionnel - Didactique du F.L.E. Université
Paris 7 - Denis Diderot
DÉMARCHE ET RÉFÉRENCES
THÉORIQUES
Élaboration d'un projet de formation en F.L.E.
Amélioration du dispositif
pédagogique
d'une école parisienne naissante
SOMMAIRE
I . Historique et démarche du projet p.
4
1. Origine du projet p. 4
2. Diagnostic de la situation et de la demande p.
5
2.1. Analyse de la demande concernant le nouveau dispositif
pédagogique p. 5
2.2. Analyse de la demande concernant la formation au nouveau
dispositif
pédagogique p. 7
2.3. Analyse de la contribution de la formation à la
réussite du projet (système C.M.E.) p. 8
3. La faisabilité du projet et de la formation p.
10
3.1. L'analyse stratégique (selon Crozier) p. 10
3.2. L'étude de la faisabilité (selon Dennery) p.
11
3.3. Grille d'étude de la faisabilité p. 16
4. Création du nouveau dispositif
pédagogique p. 17
4.1. Eléments à prendre en compte p. 17
4.2. Des besoins réels aux objectifs de formation p.
18
5. Tableau récapitulatif des objectifs du projet
p. 20
6. Tableau des objectifs de formation p. 21
7. Scénario pédagogique p. 23
8. Evaluation de la formation p. 25
8.1. Evaluation de satisfaction p. 25
8.2. Evaluation pédagogique p. 26
II . Références théoriques pour la
formation
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p. 27
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1. Choix du manuel
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p. 27
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1.1. Réflexion sur l'utilisation du manuel en classe
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p. 27
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1.2. Grille d'analyse de manuels
|
p. 29
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2. L'évaluation
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p. 34
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2.1. Évaluations : formes, moments et acteurs
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p. 34
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2.2. Fonctions de l'évaluation selon le moment de
l'apprentissage
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p. 38
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3. Choix des documents
complémentaires
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p. 40
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3.1. Un choix pertinent du document déclencheur
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p. 40
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3.2. Exemple de fiche d'exploitation d'un document authentique
|
p. 43
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3.3. Documents authentiques
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p. 46
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III . Concepts et outils d'ingénierie pour le
projet
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p. 48
|
1. L'analyse du projet de formation
|
p. 48
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1.1. Le système C.M.E.
|
p. 48
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1.2. L'analyse stratégique
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p. 49
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1.3. La faisabilité du projet
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p. 50
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2. Le dispositif proposé
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p. 51
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2.1. Le processus d'implication des stagiaires
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p. 51
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2.2. Le processus formatif
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p. 52
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2.3. Le processus d'évaluation de la formation et des
capacités des stagiaires
|
p. 53
|
Conclusion p. 59
Bibliographie p. 62
I . Historique et démarche du projet
1. Origine du projet
Ce projet de formation concerne une école de
français privée située dans le 11ème
arrondissement de Paris, ayant ouvert ses portes en novembre 2008. Cette
école accueille des étudiants étrangers (en
majorité d'origine asiatique) et leur propose des cours de
français général intensifs, à raison de 2 heures
par jour (matin ou après-midi), 5 jours par semaine (du lundi au
vendredi), ce qui représente un volume hebdomadaire de 10 heures.
S'agissant d'une école naissante, l'école
propose 3 cours de 3 niveaux différents dénommés «
débutant », « intermédiaire » et «
avancé » pris en charge par 3 professeurs différents (dont
moi-même) et accueillant chacun un maximum de 16 étudiants.
J'ai moi-même été recrutée dans
cette école afin de prendre en charge le cours de niveau «
intermédiaire » et d'améliorer la structure
pédagogique de l'école. A ce sujet, il convient de
préciser que concernant l'amélioration de la structure
pédagogique, aucune demande spécifique n'avait été
formulée par le directeur et que je serais donc moi-même
l'instigateur de ce projet. Je me devais donc, dans ce cas, de suggérer
aux parties dirigeantes de l'intérêt des actions envisagées
pour leur institution, et d'en devenir le maître d'ouvrage. C'est donc
à travers l'expérience d'enseignement dans cette école et
les différents échanges avec les autres professeurs qu'ont
émergé les besoins de cette école et les propositions
d'amélioration de la structure pédagogique qui en
découlaient.
Les différentes concertations avec le personnel
enseignant de l'école nous ont amenées à constater
plusieurs problèmes liés à la structure pédagogique
quasi inexistante dans cette école et le manque de ressources
pédagogiques à disposition des professeurs. Le personnel
enseignant a fait part de ses difficultés de travail et d'organisation
liées à l'absence d'un programme didactique
prédéfini et d'objectifs à atteindre dans le temps, ainsi
que par le manque de cohérence et d'articulation entre les 3 cours
proposés. De plus, l'école ne disposait pas de ressources
pédagogiques variées qui faciliteraient la préparation des
cours pour les professeurs.
Très rapidement, il est donc apparu essentiel de
concentrer le projet sur deux points prioritaires : la mise en place d'un
programme commun articulé entre les trois niveaux
et comportant des objectifs cohérents et limités
dans le temps ainsi que la mise à disposition de ressources
pédagogiques pour les professeurs. Plus précisément, il
s'agissait tout d'abord de choisir un manuel commun aux trois niveaux de
l'école, puis de définir des objectifs précis à
partir du programme du manuel choisi, de limiter ces objectifs dans le temps,
de programmer des évaluations régulières concernant ces
objectifs, et enfin de mettre à disposition des professeurs plusieurs
outils pédagogiques complémentaires.
Nous avons donc suggéré ces améliorations
aux différentes parties enseignantes et dirigeantes de l'école
à travers l'organisation de réunions communes et
décidé de la mise en place de ce projet.
2. Diagnostic de la situation et de la
demande
2.1. Analyse de la demande concernant le nouveau
dispositif pédagogique
Le premier constat concernant l'analyse de la demande est
qu'elle a, dès le début, comporté une dimension de «
conseil », plus que de « commande » de la part du demandeur de
ce projet.
En effet, pour différentes raisons (et notamment le
fait que le demandeur de la formation n'est pas issu d'une formation
enseignante et qu'il a donc en charge la partie « commerciale » de
cette école), le projet de formation proposé ici ne correspond
pas particulièrement à la demande de l'école, mais bien
plus à une proposition faite par les enseignants de cette école
et moi-même. On peut donc dire que le directeur fut « demandeur
» d'une amélioration du système pédagogique de
manière large mais que cette demande n'a jamais fait l'objet de besoins
clairs et précis.
Il s'agissait donc, dans un premier temps, de procéder
à une analyse de terrain précise, afin de prendre en compte le
contexte, les acteurs concernés et leurs besoins, ainsi que les
obstacles ou les freins liés à ce projet.
Cette démarche a donc relevé d'une dimension
coopérative entre les enseignants de cette école et
moi-même car bien que possédant quelques informations sur la
façon dont les cours se déroulaient dans cette école
(j'étais moi-même en charge d'une classe), il était clair
que ces informations et impressions ne seraient pas suffisantes et
nécessiteraient de travailler de façon coopérative avec
les personnes concernées par ce projet.
Or, comme nous l'avons précisé auparavant, il
s'est avéré que les enseignants de cette école
étaient particulièrement demandeurs de l'adoption d'un dispositif
pédagogique commun aux trois niveaux de l'école, souhaitaient
travailler avec un manuel commun, planifier des évaluations communes et
enfin avoir des outils complémentaires à leur disposition. C'est
donc sur ces besoins évoqués par les professeurs que s'est faite
l'analyse de la demande.
Cependant, l'enjeu était aussi de positionner le projet
d'amélioration dans une stratégie de coopération
correspondant également à des choix « managériaux
» en concertation avec les acteurs intéressés (le directeur
principalement). Il était important de considérer que nous (les
enseignants) n'étions pas les seuls décideurs de l'action
à mener, mais de se considérer mutuellement comme une ressource
collaborant avec d'autres ressources.
Il était donc nécessaire de se souvenir que
l'objectif stratégique était la satisfaction des étudiants
et l'augmentation de leur fréquentation dans l'école.
En prenant en compte cette perspective, nous nous sommes
retrouvés de fait au coeur des problématiques de la structure et
au carrefour de différents domaines présentés ci-dessous
et qui sont en définitive les 7 critères pris en compte dans
l'analyse de la demande :
- la mission de l'école : enseignement du
français aux publics non-francophones
- sa culture : se différencier des
autres écoles par une approche culturelle variée et
pratique
- son histoire : école naissante, ouverte
en novembre 2008
- ses modes de communication : pour l'instant,
principalement le « bouche à oreille »
- les enseignants : de formation F.L.E.,
disposant de peu de temps pour la préparation de leurs cours, favorisant
les pratiques d'enseignement traditionnelles
- les publics : d'origine asiatique à 99%
et effectuant ou projetant d'effectuer des études en France
- les pratiques managériales : investir
pour la satisfaction des étudiants, tendance à considérer
l'étudiant comme un « client »
Après avoir pris en compte ces éléments
dans l'analyse de la demande concernant le nouveau dispositif
pédagogique lors de 3 réunions communes, nous avons pu nous
entendre sur la création du nouveau dispositif et s'intéresser
à la formation que nécessiterait ce nouveau dispositif.
2.2. Analyse de la demande concernant la formation au
nouveau dispositif pédagogique
La question de la formation au nouveau dispositif
pédagogique s'est posée en termes d'enjeux et d'attentes des
bénéficiaires de la formation (les enseignants) vis à vis
de cette formation. En effet, du point de vue du commanditaire (le directeur)
la formation était essentielle mais n'était pas de son ressort,
ou du moins, il considérait cette formation comme une suite logique au
projet d'amélioration, sans imposer aucune exigence à son
déroulement. Nous étions donc entièrement libre, de son
point de vue, concernant sa mise en place et son déroulement. Il
convient cependant de préciser que la formation en elle-même
n'engagerait aucun investissement financier puisque les heures de formation ne
seraient pas rémunérées ni pour les
bénéficiaires, ni pour le formateur et que la réalisation
de la formation en elle-même n'impliquait aucune dépense
spécifique.
On peut en conclure que le directeur visait une forme de
« paix sociale » à travers cette formation et que le nouveau
dispositif en lui-même était l'élément prioritaire
dans la réussite du projet tandis que la formation serait quant à
elle un complément à ce projet, ou du moins « l'affaire
» des enseignants et du formateur.
C'est donc auprès des deux enseignants titulaires dans
cette école que nous avons recueilli les informations nécessaires
à l'analyse de la demande de formation. Cette analyse vise à
identifier les facteurs suivants :
- identifier et caractériser les
activités professionnelles des enseignants et leurs évolutions :
les deux enseignants travaillent dans deux écoles
différentes, ils ont une expérience solide de l'enseignement du
F.L.E. (10 et 3 ans), possèdent au minimum une maîtrise F.L.E.,
souhaitent obtenir un C.D.I. dans l'école où s'effectue le
projet.
- mieux connaître leur situation de travail :
ils enseignent 10 heures par semaine dans cette école et 10
heures dans une autre école, ils sont tous deux en C.D.D. d'un an dans
cette école.
- identifier leurs contraintes et leurs
problèmes : ils disposent de peu de temps pour préparer
leurs cours, rencontrent des problèmes liés à la
progression des cours inexistante, manquent de supports variés,
n'évaluent pas leurs étudiants de manière
régulière et structurée.
- comprendre leurs besoins concernant l'organisation
pédagogique : ils souhaitent travailler avec un manuel commun
aux trois niveaux qui leur apporteraient une
structure et une progression dans leur cours, pouvoir
évaluer leurs étudiants de manière régulière
et structurée, disposer de ressources complémentaires au
manuel.
Pour ce faire, nous avons pu recueillir des informations
à travers les réunions organisées et au cours desquelles
ils nous ont fait part de leurs attentes concernant la formation au nouveau
dispositif ; et nous utiliserons également le « questionnaire de
préparation à la formation » présenté dans le
cahier des charges.
Nous considérons que les éléments
d'analyse présentés ci-dessus sont le reflet de la situation
actuelle des enseignant et nous avons cherché à comprendre les
attentes de ces mêmes enseignants au regard de leur perceptions du
métier et des valeurs qui les sous-tendent afin de proposer un
dispositif que nous espérons adapté aux contraintes et aux
besoins d'évolution professionnelle de chacun.
2.3. Analyse de la contribution de la formation à
la réussite du projet (système C.M.E.)
> Impact de la formation sur le développement
des compétences
La formation proposée ne met pas l'accent sur les
connaissances générales qu'un professeur de F.L.E. doit
posséder pour enseigner. En effet, nous considérons que ces
enseignants possédant au minimum une Maîtrise F.L.E., il serait
inadéquat de leur proposer une formation qui vise à
acquérir des savoirs théoriques. Au contraire, nous proposons
à travers cette formation deux types de développement des
compétences : d'une part des savoirs contextualisés liés
à l'utilisation du manuel en classe, l'évaluation des 4
compétences en F.L.E. ou la variété des supports
utilisés en classe dans le cadre du programme élaboré.
D'autre part, ce sont des compétences liées au
savoir-faire que la formation propose de développer, notamment
connaître le manuel utilisé, apprendre à appliquer le
programme mis en place, savoir évaluer les étudiants sur les
objectifs fixés ou encore savoir utiliser les ressources mises à
disposition.
En résumé, il ne s'agit pas d'apprendre aux
enseignants comment enseigner, mais de leur apprendre à utiliser et
adapter les outils élaborés à travers ce projet
d'amélioration dans le contexte spécifique, afin
d'améliorer et de faciliter leur travail dans cette école.
> Impact de la formation sur le développement
de la motivation
Les enseignants étant très demandeurs de cette
formation, nous considérons qu'elle aura un impact fort sur leur
motivation. En effet, un des enseignants nous a fait part de son sentiment
« d'échec » lié au manque de repères et de
cohérence dans l'organisation pédagogique actuelle et qui, selon
lui, a des répercutions sur le déroulement de ses cours et donc
sur la motivation des étudiants. La formation propose en partie de
remédier à ce problème en établissant un programme
clair et structuré et en apprenant à gérer ce programme,
nous considérons donc qu'elle aura des effets positifs motivant sur le
travail des enseignants et leur donnera une image plus « organisée
» de leur travail.
D'autre part, la formation suggère aux enseignants une
prise en charge de leurs difficultés et donc une valorisation de leur
travail au sein de l'école. Dans cette perspective, nous nous attachons
également à ce que la formation contribue à la
satisfaction des enseignants vis à vis de cette formation et qu'elle
réponde le mieux possible à leurs attentes.
> Impact de la formation sur l'évolution de
l'environnement de travail
Cette formation est dès le départ l'occasion
pour les enseignants de mettre en commun leurs impressions et leurs opinions
sur leurs conditions de travail ; par ce biais, la formation contribue à
renforcer les liens entre les enseignants ainsi que leur sentiment de
cohésion au sein de l'école (à noter que les enseignants
étant peu nombreux, la cohésion est d'autant plus
facilitée).
D'autre part, la création d'outils nouveaux
destinés aux enseignants contribue à améliorer les
conditions de travail dans cette école et contribue à donner les
clés d'une amélioration de leur travail et donc d'une implication
plus forte au sein de l'institution en général.
En définitive, l'impact de la formation sur ces trois
éléments contribue à améliorer le travail des
enseignants et donc à augmenter la satisfaction des étudiants,
voir leur fréquentation dans cette école.
3. La faisabilité du projet et de la
formation
3.1. L'analyse stratégique (selon
Crozier)
Avant de passer à la conception du projet
d'amélioration, nous devons procéder à l'analyse
stratégique du projet et de la formation. Cette analyse s'effectue en
plusieurs étapes et permet de s'assurer d'un certains nombres de choses
comme l'accord mutuel des acteurs du projet, l'adéquation de la
formation avec l'organisation ou encore les moyens à investir pour ce
projet.
Pour cela, nous prendrons en considération trois concepts
primordiaux dans cette analyse : l'acteur, l'organisation et le pouvoir.
Lorsqu'on parle « d'acteur » on doit
considérer qu'il s'agit de l'homme au travail et que cet homme est une
personne autonome, rationnel et stratégique. En prenant en compte des
caractéristiques, nous avons tenté de savoir si le projet
proposé pouvait mettre d'accord tous les acteurs y étant
impliqués.
En ce qui concerne son autonomie, nous considérons que
bien que le travail de l'enseignant sera beaucoup plus guidé et
délimité qu'auparavant, il conservera une grande part d'autonomie
dans son choix des documents ou des thèmes à aborder ; le manuel
ne sera pour lui qu'une trame à suivre autour de laquelle il pourra
adapter sa manière d'enseigner.
La rationalité du projet apparaît évidente
pour tous les acteurs de ce projet puisqu'elle implique une amélioration
des conditions de travail et facilite le travail des enseignants.
Enfin, l'aspect stratégique demeure essentiel dans ce
projet et apparaît dans l'aspect valorisant de ce projet pour
l'école en général, l'amélioration du travail des
enseignants et l'objectif d'augmentation des effectifs dans les classes.
Nous considérons que la notion d'acteur implique
nécessairement la notion d'organisation qui évolue grâce
aux acteurs présents. Le jeu des acteurs et donc le fonctionnement de
l'organisation sont eux liés aux relations de pouvoir instituées
et sont le fondement des rapports de travail.
Concernant cette école, les relations de pouvoir sont
facilement détectables de par la petite taille de l'entreprise et il
apparaît clair que le directeur est le seul à détenir
à la fois le pouvoir financier (il contrôle entièrement les
investissements de l'école) et le pouvoir opérationnel (il est le
seul à décider de la mise en place du dispositif de formation).
Cependant, comme nous
l'avons évoqué précédemment, le
directeur n'exerce qu'un pouvoir décisionnel et laisse le contrôle
de l'élaboration du projet aux acteurs qu'il considère comme plus
compétents dans le domaine pédagogique.
3.2. L'étude de la faisabilité (selon
Dennery)
A partir du modèle d'analyse stratégique
proposé par Crozier, Dennery propose quant à lui un modèle
d'étude de la faisabilité selon 5 étapes distinctes. Nous
nous sommes donc servi de ce modèle en adaptant la démarche
à notre projet étant donnée la taille réduite de
l'organisme.
> Etape 1, 2, 4 et 5 : les acteurs concernés
(relations, risques et opportunités de chacun, stratégies et
coalitions possibles)
Dans ce projet, nous pouvons distinguer plusieurs types d'acteurs
regroupés selon leur statut et leur rôle dans l'école et
dans le projet.
Le commanditaire : il s'agit ici du directeur
de l'école, il est décideur du projet et en a fait la commande.
Il n'intervient pas du tout dans la conception du projet mais y apporte un oeil
expert dans sa dimension « commerciale », décide de son
bien-fondé et en finance les coûts. Le chef de projet :
c'est de moi-même dont il s'agit ici, étant en charge de
la réalisation du projet. A noter que j'exerce également la
fonction d'initiateur (étant à l'origine du projet) et celle de
formateur (réalisant moi-même la formation) pour des raisons
évidentes de moindre taille de l'école. Aux yeux du commanditaire
du projet (le directeur) je suis la personne experte dans le domaine
pédagogique mais n'intervient en aucun cas dans les décisions
financières et commerciales.
Les bénéficiaires : ce sont les
enseignants de cette école et sont les utilisateurs finaux de la
formation. Leur implication dans le projet est grande puisqu'ils sont à
l'initiative de ce projet et ont contribué à lui donner naissance
en explicitant leur attentes.
Les subordonnés : il s'agit ici du
personnel d'accueil et d'orientation des étudiants. Ils sont
également liés à ce projet puisqu'ils seront
chargés, après une formation qui fera l'objet d'un projet
différent, d'informer les étudiants du nouveau dispositif. De
plus, ces personnes s'avèrent être les premiers à entrer en
contact avec les étudiants, constituant ainsi la « vitrine »
de l'école et donc du projet.
S'agissant d'une « petite » école, il a
été facile d'évaluer les risques et les
opportunités que pouvaient représenter ce projet pour chacun des
acteurs.
Pour le commanditaire, ce projet présente
l'opportunité d'améliorer la qualité d'enseignement dans
son école et donc la satisfaction des étudiants. Bien
évidemment, le risque pour le commanditaire est d'investir de l'argent
dans un projet dont il ne connaît pas encore les effets ; cela
nécessite donc de sa part une grande clairvoyance dans le budget
consacré, mais également une confiance entière dans le
responsable de projet, n'étant pas lui-même expert dans le domaine
de la pédagogie, il doit se reposer sur un personnel qu'il juge
compétent dans ce domaine et capable de mener ce projet à
bien.
Pour les enseignants, ce projet constitue de leur avis une
grande opportunité dans l'amélioration de leurs conditions de
travail, ils y sont donc très favorables et contribuent à sa
réussite.
D'une manière générale, s'agissant d'une
école naissante, le projet ne peut que contribuer à
améliorer la structure dans son ensemble et étant donné le
peu de moyens financiers qu'elle engage, elle comporte peu de risques pour le
commanditaire.
Les ressources de pouvoir dans l'école sont peu
nombreuses et reposent entièrement sur une personne : le directeur.
Cependant, comme nous l'avons dit précédemment, le fait que cette
personne ne soit pas experte dans le domaine pédagogique
représente pour nous une grande liberté d'action, à
condition de savoir convaincre du bien-fondé du projet et de sa
rentabilité future. Pour cela, nous avons pu bénéficier de
l'appui des autres enseignants, qui, lors des réunions ont su soutenir
nos propositions et convaincre le directeur de tel ou tel aspect du projet.
Pourtant, cette relation coopérative «
d'égal à égal » entre les enseignants et
moi-même n'a pas toujours été évidente. En effet,
étant moi-même enseignante dans cette école, et de
surcroît plus jeune et donc moins expérimentée que les
autres professeurs, il m'a été difficile, au début de ce
projet d'imposer mes idées et ma responsabilité dans ce projet.
Il a donc fallu progressivement faire admettre aux autres enseignants que je ne
m'opposait pas à leurs idées et que j'avais même grand
besoin de leur contribution, mais que la réalisation du projet et la
formation étaient de ma responsabilité.
En définitive, l'intérêt de l'étude
des relations entretenues par les différents acteurs de ce projet
réside dans le fait de comprendre ce que chacun d'entre eux a à
gagner ou à perdre dans ce projet et de faire en sorte que chacun
soit satisfait du résultat obtenu. Ceci présente
quelques difficultés quant à savoir qui pourra
nous aider dans ce projet sans pour autant empiéter sur notre «
terrain » ou faire barrage à certains aspects du projet ; un
travail qui se révèle hautement diplomatique dans certains
cas...
> Etape 3 : Les zones d'incertitude (personnes et
éléments déterminants)
Dans un projet de formation, les zones d'incertitude peuvent
être liées à différents aspects ; dans ce cas
précis, nous elles ont porté sur les aspects suivants :
- La maîtrise du budget : il est
évident que celui qui détient le budget détient aussi les
moyens de réalisation du projet. Dans notre cas, nous estimons que la
réalisation du projet ne nécessitera pas un budget «
colossal » et que les moyens nécessaires pourront être ms en
oeuvre à condition qu'ils soient justifiés et
cohérents.
- La maîtrise du contenu de la formation
: comme nous l'avons évoqué précédemment,
le contenu de la formation a été un point délicat dans la
réalisation du projet. Nous savons que de la qualité du contenu
dépend en grande partie le résultat de la formation ; cependant,
les bénéficiaires étant plutôt
expérimentés et hautement diplômés, il s'agit de
proposer un contenu de formation adapté à leurs besoins et
suffisamment « léger » théoriquement parlant, afin
qu'ils ne se sentent pas « dévalorisés ».
- La maîtrise de la disponibilité et du
choix des stagiaires : nous l'avons dit, les
bénéficiaires de la formation sont employés dans d'autres
écoles et ont un emploi du temps très « serré »
et n'ont pas une disponibilité physique et mentale très large. La
difficulté réside dans le fait de pouvoir les convaincre de
l'utilité de la formation et de les impliquer au maximum dans le projet
pour qu'ils se sentent concernés. En revanche, concernant le choix des
stagiaires, il y a peu d'incertitude possible étant donnée la
taille réduite de l'école et la demande forte des enseignants
concernant cette formation.
- La maîtrise du transfert pédagogique
: il s'agit ici de prévoir comment le stagiaire pourra
appliquer en classe ce qu'il a appris pendant la formation. Il semble que la
maîtrise de cet aspect dépende de la capacité du formateur
à « convaincre » les stagiaires de l'utilité du projet
et de sa pérennité dans le temps. Le stagiaire lui-même
intervient également dans ce processus à travers sa
capacité à appliquer durablement et efficacement ce transfert,
à condition qu'on lui en donne la possibilité.
- La maîtrise de l'information sur le projet de
formation : il est important que la formation soit en phase avec les
attentes des acteurs du projet et nos devrons pour cela impliquer à la
fois le commanditaire et les bénéficiaires dans le projet afin
qu'ils soient clairement informés du dispositif proposé et qu'il
ait les effets escomptés lors de la formation.
- La maîtrise de l'ingénierie de
formation et ingénierie pédagogique : bien sûr, la
maîtrise de cet aspect dépend entièrement du responsable de
projet et il va de soi que mieux cet aspect sera maîtrisé, plus la
réussite du projet sera certaine.
> Influence de la culture de formation :
Plusieurs facteurs vont permettre de comprendre si la culture
va favoriser ou au contraire empêcher une vraie politique de formation.
Dans le cas de notre projet, nous avons tenté de savoir à quels
éléments de la culture formation de cette école
récente et de taille réduite nous devions adapter notre
projet.
- Le niveau d'investissement de la formation :
s'agissant d'une école naissante, aucune formation n'a
déjà été mise en place auparavant. Il s'agit donc
de la première formation proposée dans cette école et il
est difficile de connaître l'intérêt de l'école pour
la formation. Nous espérons donc que ce premier projet suscitera son
intérêt et l'amènera à poursuivre cette
démarche par la suite.
- Les modalités pédagogiques :
ici encore, le projet proposé est le premier de ce type dans cette
école et étant donné le budget dont elle dispose, il est
évident que seules des formations « économiques »
à l'intérieur de l'école sont envisageables. Nous avons
donc cherché à proposer une formation minimisant les coûts
et allant à l'essentiel du point de vue stratégique, en fonction
des besoins prioritaires.
- L'instrumentation pédagogique : il
est clair qu'aux vues des entretiens que nous avons pu avoir avec le directeur,
un de ses objectifs à plus ou moins long terme pour cette école
serait de l'équiper de matériel technologique avancé afin
de favoriser l'apprentissage dit « e-learning » et l'utilisation des
TICE en classe. Cependant, l'achat de ce type de matériel étant
très coûteux, nous devrons attendre un certain avant que
l'école puisse s'équiper de ce matériel. La formation est
donc envisagée au moyen d'outils « traditionnels » pour le
moment.
- Les dispensateurs de formation : il a
été convenu dès le départ, que le responsable de
projet s'occuperait également de dispenser la formation pour des raisons
pratiques
et économiques. La formation ne demandant pas de
compétences spécifiques à un domaine, tout formateur
F.L.E. sensibilisé au contexte de l'école est en mesure de
dispenser cette formation. Dans le cas d'une formation plus spécifique,
nous aurions fait le nécessaire pour faire appel à un formateur
externe, dans la limite du budget qui nous aurait été imparti.
- Les dispositifs d'accompagnement : nous
avons suggéré que pour des raisons pratiques, le responsable de
formation exercerait un rôle de tuteur suite à la formation et
serait chargé d'aider le stagiaire à appliquer ses connaissances
sur le terrain.
- Les dispositifs d'évaluation :
à première vue, il s'est avéré que le commanditaire
du projet n'était pas très favorable à une
évaluation de la formation et n'en voyait pas la
nécessité. Il a donc fallu convaincre de la
nécessité et de l'utilité d'évaluations dites
« à chaud » et « à froid » comme moyens de
mesure de l'efficacité de la formation. Nous avons donc
créé ces outils de manière à ce qu'ils ne soient
pas perçus comme une « sanction » pour les stagiaires mais
comme un outil d'évaluation de leur satisfaction vis à vis de
cette formation.
- Les processus de décision concernant les
choix de formation : dans le cas de ce projet, on peut dire que la
formation est née d'une « négociation » entre le
personnel dirigeant, les enseignants et le responsable de projet. Les besoins
des enseignants mais aussi ceux de l'école en général ont
été pris en compte afin de proposer un projet qui puisse
satisfaire chacune des parties.
En définitive, on peut dire que l'aspect d'adaptation
à la culture formation de l'école n'a pas été une
contrainte majeure dans l'élaboration du projet de formation. S'agissant
d'une école naissante, notre projet est le premier de ce type à
être mis en place et n'a donc pas nécessité une adaptation
particulière. Nous nous sommes donc fiés à ce qui nous
paraissait le plus adapté au contexte économique et
organisationnel de l'école pour créer cette formation, sans
pouvoir se baser sur une expérience précédente. De ce
fait, nous avons pu jouir d'une grande liberté dans la
réalisation du projet concernant cet aspect, tout en mesurant les
risques de ne pas pouvoir s'appuyer sur un modèle empirique.
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