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pratiques éducatives familiales, estime de soi et performances scolaires chez des adolescent: cas des adolescents de la commune d'Atakpamé (Togo)

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par Ibn Habib BAWA
Lomé - DEA de Psychologie de l'éducation 2008
  

Disponible en mode multipage

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INTRODUCTION

Dans les sociétés traditionnelles, l'intégration sociale de l'individu par le biais de l'éducation était l'oeuvre exclusive des parents et du clan. Mais aujourd'hui, bien que la famille soit perçue comme première ressource vouée au développement de l'enfant, elle ne semble plus être le seul lieu privilégié de l'éducation car l'évolution du monde actuel et ses exigences font de l'école un point incontournable dans la vie de tout enfant.

Selon Berthelot (1993) dans une société où les diplômes sont sensés être la clé de l'emploi et de réussite, nul n'échappe au piége scolaire. De nos jours, ne pas aller à l'école signifie ne pas acquérir les savoirs de base.

Alors, comment devenir un adulte qui pourra correctement élever ses futurs enfants, comment être un citoyen actif quand on ne sait ni lire, ni écrire, ni compter ? Dès lors, l'on comprend aisément pourquoi le droit à l'éducation est un des droits fondamentaux de l'enfant. Ce droit a été proclamé, il y a un demi-siècle, dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et à nouveau en 1989 dans « la convention relative aux droits de l'enfant », le traité des Droits de l'Homme ratifié par le plus grand nombre de pays.

Malheureusement, malgré les affirmations solennelles qui se sont succédées au cours des 50 dernières années, on estime que 855 millions de personnes, prés du sixième de l'humanité seront fonctionnellement analphabètes au cours du troisième millénaire ; que plus de 130 millions d'enfants en âge de fréquenter l'école dans les pays en développement grandiront en marge de l'éducation de base (UNICEF, 1999).

Cependant, parmi les enfants qui ont la chance d'être scolarisés beaucoup quittent le système sans avoir acquis les compétences de base nécessaires à leur intégration scolaire et sociale (Fauroux & Chacounac, 1996 ; Lobrot, 1992). Donc, l'enfant qui échoue à l'école n'est pas seulement quelqu'un qui n'acquiert pas de compétences mais aussi c'est quelqu'un qui s'expose à une véritable exclusion sociale qui va marquer son destin, affecter son histoire et être handicapé toute sa vie.

Ainsi donc, tout comme l'analphabétisme, l'échec scolaire naguère perçu comme une sorte de fatalité, est devenu un sujet de réflexion politique à part entière. Trop de jeunes quittent le système scolaire mal armés pour trouver leur place dans un monde où la compétitivité requiert des compétences accrues. De ce fait, s'il est urgent de la mener, la lutte contre l'échec scolaire n'en constitue pas moins une affaire délicate à gérer. C'est pourquoi, chercheurs, parents enseignants, responsables politiques, bref tous les acteurs de l'éducation ont besoin de mieux comprendre l'échec scolaire afin d'adapter les stratégies susceptibles de le prévenir ou d'y remédier.

Pour cela, au Togo comme partout ailleurs, le système éducatif est en constante rénovation à l'aide des réformes pédagogiques en vue d'améliorer les conditions d'apprentissage et surtout de réduire le taux d'échec sans cesse croissant. Mais le plus important des problèmes du système éducatif togolais reste toujours celui des échecs scolaires massifs.

Dans le souci de mieux orienter les mesures, les recherches à caractère scientifique ont mis en cause plusieurs facteurs institutionnels, individuels et familiaux.

Dans la présente étude, nous voulons insister sur les facteurs individuels (estime de soi) et familiaux (pratiques éducatives familiales) en essayant d'étudier la relation qui pourrait exister entre les pratiques éducatives familiales, l'estime de soi et les performances scolaires chez les adolescents togolais.

Pour y parvenir, nous articulerons nos propos autour de deux principales parties :

- la problématique et le cadre de référence théorique. Cette partie s'attachera à poser et énoncer le problème de recherche, à définir nos concepts et à identifier les références théoriques pouvant nous permettre d'interpréter les résultats. Dans le but de faire reposer nos hypothèses sur les résultats d'autres recherches, nous nous attacherons à faire une revue des travaux qui portera sur les variables impliquées dans cette étude,

- la méthodologie de la recherche. Ici nous exposerons les différents voies et moyens pour éprouver nos hypothèses.

PREMIERE PARTIE

PROBLEMATIQUE ET CADRE DE REFERENCE THEORIQUE

CHAPITRE PREMIER : PROBLEMATIQUE

I- ANALYSE DE LA SITUATION

Depuis quelques années, la société a tendance à accorder une importance croissante au bien-être psychique et à l'épanouissement personnel. Le développement harmonieux de l'enfant est devenu une préoccupation aussi bien des parents que des professionnels de l'éducation. Quel est le fondement de ce développement ? Ki-zerbo (1978, P.458) répond en ces termes : « l'éducation est la locomotive du développement ».

L'éducation scolaire tient une place de choix dans le processus d'intégration des enfants. L'école offre aux enfants un cadre propice pour l'apprentissage des connaissances, des normes sociales et une formation de qualité. Compte tenu de cette grande utilité, pouvoirs publics et parents ne cessent de mobiliser les ressources nécessaires pour assurer l'éducation des enfants. Les pays européens sont allés jusqu'à instaurer l'école obligatoire et gratuite pour tous jusqu'à l'âge de seize ans. En voulant emboîter le pas aux européens, les pays africains, à la conférence d'Addis Abéba en Ethiopie du 15 au 25 mai 1961, en collaboration avec l'UNESCO et la Commission Economique des Nations Unies, vont s'engager, non seulement à rendre l'enseignement primaire universel, gratuit et obligatoire, mais aussi à dispenser à 30% des enfants un enseignement secondaire et à 20% des enfants un enseignement universitaire de qualité. Toutes ces bonnes intentions sont confrontées à des problèmes financiers. C'est pourquoi, à tous les niveaux de l'éducation scolaire, dans les pays africains et au Togo en particulier, les parents seront fort sollicités à s'investir davantage. Ils sont même sollicités pour créer des EDIL (Ecole D'Initiative Locale) ou CEGIL (Collège d'Enseignement Général d'Initiative Locale). Certains parents vont jusqu'à s'endetter pour assurer la scolarisation de leur progéniture car pour beaucoup de parents, la réussite scolaire et sociale attendue de leurs enfants signe, en fait, leur propre réussite (Bouteyre, 2004). Ce succès les gratifie, les remplit de fierté. Il est l'aboutissement d'un rêve, d'un espoir ou d'un projet établi de longue date ou construit progressivement.

Malheureusement, dans le contexte togolais, l'échec ou mauvaises performances des enfants très fréquentes. A partir de ce moment, le phénomène des échecs scolaires non seulement devient une sorte de gangrène qui ronge des systèmes scolaires (Bawa, 2007) mais aussi entraîne la montée de l'inquiétude des familles à l'égard de la scolarité de leurs enfants.

Une analyse des différents rapports faisant état de la situation de l'échec scolaire au Togo nous permet de l'appréhender.

Figure 1 : Taux d'échecs scolaires aux différents examens en 2005

A travers la Figure 1, on observe un visage triste de l'école togolaise avec des taux d'échecs très élevés. En dehors de l'examen du CEPD où 25,88% des élèves échouent, aux autres examens, plus de 50% des élèves échouent : 51,78% au BEPC, 50,22% au BAC I et 58,48% au BAC II.

Au niveau du 1er cycle du secondaire, qui nous intéresse, les taux d'échecs sont aussi considérables comme le montre la Figure 2

Figure 2 : Taux des échecs intra 1er cycle du secondaire en 2005

On observe sur la figure 2, des taux d'échecs qui vont de 17,43% à 29,07%. Avec 23,30% d'échecs en moyenne, ce cycle d'enseignement ne favorise pas du tout l'intégration et l'épanouissement de tous les élèves.

La situation est très catastrophique lorsque nous analysons la table de cheminement scolaire élaborée par l'Unité de Recherche Démographique en 1992. Elle doit et suscite de inquiétudes. En effet, sur 10000 élèves inscrits au CP1, 1588 arrivent au CM2 en six ans, 19 arrivent en classe de 3ème en treize ans, 7 obtiennent le baccalauréat.

De cette analyse, nous faisons les observations suivantes :

- entre le CP1 et le CM2, 8412 des élèves échouent,

- entre le CM2 et la 3ème, 1379 connaissent d'échecs,

- entre la 3ème et la Terminale, 190 sur 209 connaissent un échec.

En somme, sur 10000 élèves, 9981 soit 99% connaissent un ou plusieurs échecs avant la Terminale et 7 élèves arrivent à terminer leurs études secondaires sans échec. Au 1er cycle du secondaire précisément, 96% des élèves échouent entre la 6ème et la 3ème.

Ces chiffres montrent l'amère situation dans laquelle les élèves togolais accomplissent leur "métier d'écolier". Face à une telle situation, il n'est pas question de se décourager mais plutôt de l'analyser avec le plus d'objectivité possible afin de proposer les remèdes et prendre des mesures capables de la résoudre (Legrand, 1977). C'est pourquoi, il apparaît pertinent de se demander pourquoi dans les mêmes conditions d'études et d'apprentissage, certains élèves réussissent et d'autres échouent.

Plusieurs recherches ont été menées pour comprendre le phénomène de l'échec scolaire au Togo.

Nuakey & al. (1998) ont essentiellement attribué les causes de ces échecs massifs à des facteurs externes aux élèves tels que : la pauvreté économique de l'environnement qui ne permet pas de faire face aux dépenses scolaires de chaque enfant désireux de fréquenter ; le manque de perspectives d'emplois qui décourage les jeunes car ils observent une dégradation des offres d'emplois et éprouvent un sentiment d'impuissance puis adoptent un comportement d'impuissance, comportement négatif face à l'école ; les mariages et grossesses précoces ; la paresse ; un contact prématuré avec les stupéfiants conduisant à la délinquance ; l'absence de dialogue entre les enseignants et la famille de provenance de l'élève qui ne favorise pas l'épanouissement scolaire.

D'autres travaux tels que ceux de Lawson-Body (1993), Kougblenou (1995), Djonna (2007) ont accusé respectivement, comme facteurs déterminants des échecs scolaires, le statut socio-économique, l'inexpérience et la sous qualification professionnelle des enseignants, la cohésion familiale.

C'est Bawa (2007) qui a identifié l'estime de soi comme facteur interne aux élèves dont l'absence, la carence ou l'insuffisance serait à la base de l'échec scolaire des uns et des autres.

Selon Fortin et Strayer (2000), l'adaptation et la réussite scolaire sont le fruit d'un processus interactif entre facteurs personnels ou internes et facteurs environnementaux ou externes.

Parmi les facteurs externes en relation avec la réussite scolaire, ceux liés à la famille sont de la plus haute importance car selon Osterrieth (1970, P 151), le milieu familial « offre l'occasion, des expériences premières. Toutes structurations qui résultent de celles-ci emporteront nécessairement la marque. » Et quel facteur familial prendre en compte ? Bouteyre (2004, P. 53) pense que : « les pratiques éducatives parentales font partie des facteurs familiaux en relation avec le développement cognitif de l'enfant et par voie de conséquence, interviennent sur les possibilités de réussite scolaire. »

Il va sans dire que lorsque les parents participent au suivi scolaire, les enfants et les adolescents ont de meilleurs résultats scolaires, un faible taux d'absence, peu de difficultés comportementales, une perception plus positive de la classe et du climat scolaire, des habiletés autorégulatrices, une meilleure orientation vers le travail et de plus grandes aspirations scolaires (Deslandes & Potvin, 1998 ; Deslandes & al. 1997 ; 2000 ; Grolnick et al. 1997, 2000 ; Jacobs et Eccles, 2000).

En organisant les pratiques éducatives familiales selon les types de structuration de l'environnement familial qui sont au nombre de trois, Lautrey (1984) montre que les enfants élevés dans les milieux souplement structurés ont de meilleures performances intellectuelles que ceux élevés dans des milieux faiblement ou rigidement structurés. .

Steinberg (2001) montre que le style parental démocratique (c'est-à-dire le soutien à l'autonomie, à la sensibilité et à la supervision) est associé à la réussite et au développement de l'autonomie des adolescents (Bouchard, 2001).

Pour Migliore (2006), la réussite scolaire, indépendamment de la provenance socioculturelle, est l'apanage des enfants soutenus par leur famille qui investit sur la réussite scolaire en termes d'attention et d'encouragement même si elle n'a pas les moyens culturel et linguistique de les suivre directement.

Au niveau des facteurs personnels, l'une des caractéristiques psychologiques fondamentales à considérer est l'estime de soi car elle est à la base du développement global de l'enfant et de l'adolescent (Harter, 1990 ; Leonard & Gottsdanker-Willekens, 1987). Pour Martinot (2001, P.497), « la connaissance de soi n'est pas à négliger si l'on désire lutter contre l'échec scolaire. Les conceptions de soi scolaires d'un élève peuvent être en effet déterminantes de sa motivation dans le domaine scolaire. Favoriser le développement de conceptions de soi de réussite peut, par conséquent, se révéler bénéfique pour l'élève. »

Chez les adolescents, sur qui porte la présente étude, elle est plus essentielle car ils sont en quête d'autonomie et de maturité. Claes & Poirier (1998) estiment que  l'affirmation de l'autonomie constitue une des tâches majeures de l'adolescent. Prendre des décisions par lui-même sans se référer à l'autorité des parents, se démarquer de leurs idées et de leurs intérêts, affirmer son individualité et ses particularités, voilà autant de démarches qui garantissent le passage progressif vers la maturité adulte. L'adolescence est ce temps de la vie où les individus doivent se dégager des liens de dépendance envers les parents, pour gagner leur autonomie et affirmer leur identité propre. Mais, ce mouvement d'affirmation de soi s'opère en creusant des distances, car l'autonomie se gagne quotidiennement au prix de discussion, de confrontation et de réajustement. Dès lors, nous comprenons que l'adolescence constitue un moment privilégié pour expérimenter des réalités nouvelles en dehors du contrôle familial.

Selon Jessor, Donovan & Costa (1991), certains adolescents qui négligent le contrôle parental, s'engagent dans une constellation de conduites déviantes et courent des risques de sérieuses difficultés. Et ce sont ces difficultés qui engendrent ultérieurement des échecs ou des mauvaises performances et l'abandon scolaire, les perturbations des conduites délinquantes. Claes (2001) trouve que trois principaux facteurs familiaux contribuent à l'éclosion et au maintien de ces problèmes. Il s'agit de la piètre qualité de l'attachement parental, de la présence de conflits sévères entre adolescents et parents, et de l'exercice inadéquat du contrôle parental. Dans cet ordre d'idées, Grootevant & Cooper (1986) affirment que l'accès à l'autonomie, la construction de l'identité et les bonnes performances scolaires à l'adolescence se réalisent adéquatement dans un cadre de support et d'acceptation parentale.

Sous l'influence parentale donc, les adolescents arrivent à l'école motivés à apprendre ou pas, convaincus d'être capables de réaliser ce qu'on attend d'eux au cours de l'acte pédagogique. A partir de là, ils se livrent à une estime de soi positive ou négative d'eux-mêmes en tant que sujet apprenant. Cette estime de soi a donc une certaine prégnance sur leur engagement et leurs performances scolaires (Bawa, 2007). Dès lors, considérée comme composante essentielle de la construction identitaire, l'estime de soi donne à l'identité personnelle, sa tonalité affective et à ce titre, elle apparaît comme un fondement de la réussite à l'école.

C'est pourquoi Lavoie (1993, P.131) affirme que : « le concept de soi constitue une réalité centrale liée à la réussite académique. »

Chapman (1988) montre que la perception négative de soi déterminerait des attitudes négatives et comportements d'évitement face aux tâches scolaires. Ce qui réduirait la capacité de l'élève à les réaliser (Cooley et Ayres, 1988).

Bariaud & Bourcet (1998) montrent qu'une estime de soi élevée est associée à des comportements plus adaptés et plus positifs tels que la confiance en soi, l'anticipation positive de l'avenir, la recherche du soutien social, la confrontation active à la difficulté, la réussite scolaire ; en revanche, une estime de soi faible induit des attitudes dysfonctionnelles : tristesse, fatalisme, anticipation négative de l'issue de la difficulté, évitement, passivité, déni, échec scolaire.

Lamia (1998), quant à lui, dans son étude montre qu'une bonne estime de soi, résultant d'une auto-évaluation positive, facilite l'adaptation sociale de l'enfant à l'environnement scolaire et lui permet de se retrouver dans une situation de réussite scolaire, telle qu'elle est définie par les enseignants et le système scolaire. A l'opposé, une mauvaise estime de soi rend difficile, voire empêche une bonne adaptation sociale à l'environnement scolaire et amène l'enfant vers une situation de difficulté scolaire qui peut aboutir à des échecs scolaires. Ces résultats corroborent ceux de Bawa (2007) qui a trouvé qu'au Togo, les adolescents qui présentent une estime de soi positive réussissent plus que ceux qui présentent une estime de soi négative.

En somme, ces quelques travaux, qui sont à notre suffrage, relatifs à l'influence respective des pratiques éducatives familiales et l'estime de soi, ont abordé les performances scolaires de façon séparée. Or, on sait bien, avec Koudou (1995,P.275), que « pour l'enfant comme pour l'adolescent, le développement et surtout l'image de soi sont aussi influencées par la qualité des interactions entre le contexte socio-éducatif et les styles éducatifs familiaux ». Plus loin, Koudou (1995, P.277) insiste davantage sur le fait que « la famille, ses pratiques éducatives, la structuration de son environnement paraissent constituer en effet, des sous-systèmes susceptibles de contribuer durablement à l'émergence de l'estime de soi ».

Des chercheurs montrent bien l'influence des pratiques éducatives familiales sur l'image de soi. C'est le cas de Rosenberg (1963) qui met en évidence la relation entre désintérêt des parents pour l'enfant et faible estime de soi de ce dernier. Coopersmith (1967) constate également que certaines attitudes parentales (acceptation de l'enfant, liberté avec limites clairement définie) sont en rapport avec une bonne image de soi. Gecas (1972) a montré le rôle des comportements de soutien et d'encouragement sur le soi de l'adolescent. Tout cela est confirmé par la revue de questions faite par Burns (1979) à ce sujet

Les recherches de Song & Hattie (1984) constatent que les caractéristiques familiales (encouragement, activités pédagogiques dans la famille, intérêts pédagogiques, évaluation parentale des qualités intellectuelles de l'enfant, sanction : récompense et punition) influencent directement l'image de soi et indirectement la performance scolaire.

Les études de Kellerhalls, Montandon, Ritschard & Sardi (1992) ont montré que les styles éducatifs agissent sur l'estime de soi des adolescents. Le style contractualiste caractérisé par l'importance accordée à la créativité de l'enfant à son autorégulation qui fait référence à l'aptitude de l'enfant à se donner des fins, à y adapter les moyens adéquats, l'autorité négociatrice et non coercitive entraîne une estime de soi positive qui influence à son tour la facilité avec laquelle le sujet effectue divers apprentissages, s'adapte aux diverses relations et tisse des relations sociales.

Tout récemment, Bergonnier-Dupuy (2005) a montré que l'éducation familiale basée sur l'autonomisation et l'épanouissement de l'enfant à un effet favorable sur les comportements de l'enfant et sur ses résultats aux évaluations, notamment à l'école.

Ces travaux ont le mérite de mettre en relation les pratiques éducatives et l'estime de soi. Mais, dans le souci de comprendre davantage les processus d'adaptation scolaire des adolescents, nous pensons que la prise en compte simultanée des pratiques éducatives familiales, l'estime de soi est fondamentale pour mieux appréhender le phénomène de l'échec scolaire. A notre connaissance, seules Allès-Jardel, Metral et Scoppellitti (2000) ont impliqué à la fois les pratiques éducatives parentales, l'estime de soi et la réussite scolaire chez les élèves de sixième. Elles ont trouvé une influence significative des pratiques éducatives parentales sur l'estime de soi et influence non significative entre les pratiques éducatives familiales estime de soi et la réussite scolaire. Cette étude a porté sur des enfants en France. .

II- ENONCE DU PROBLEME

Quelle est la situation auprès des adolescents togolais ? Autrement dit, existe-t-il une relation entre pratiques éducatives familiales, l'estime de soi et les performances scolaires des adolescents togolais ? Mieux, les performances scolaires des adolescents togolais sont-elles dues aux effets conjugués des pratiques éducatives familiales et l'estime de soi ?

CHAPITRE DEUXIEME : DEFINITION DES CONCEPTS, CADRE

THEORIQUE, TRAVAUX ANTERIEURS

I- DEFINITION DES CONCEPTS

.

1- LES PRATIQUES EDUCATIVES FAMILALES

Dans la littérature relative à l'éducation familiale, des expressions comme stratégies d'éducation parentale ou familiale, styles parentaux, compétences d'éducation parentale, pratiques éducatives parentales ou familiales voire structuration de l'environnement familial sont utilisées pour désigner un même contenu. Préférentiellement, nous adoptons le terme « pratiques éducatives familiales. »

L'étude des pratiques éducatives familiales est liée à celle des travaux qui ont cherché à mettre en relation les facteurs socio-économiques et le développement cognitif de l'enfant. Au cours de ces travaux, les chercheurs ont découvert que ces facteurs socio-économiques ne sont pas directement liés à l'intelligence. Ils étaient donc obligés d'introduire d'autres variables intermédiaires à la fois liées aux facteurs économiques et au développement cognitif de l'enfant. Et l'une de ces variables intermédiaires est les pratiques éducatives familiales.

Deslandes & Potvin (1998, P.1) pensent que les pratiques éducatives familiales ou styles parentaux « se réfèrent au modèle général d'éducation qui caractérise les comportements des parents à l'égard de leur jeune...en fonction des niveaux d'engagement (chaleur, affection), d'encadrement (supervision) et d'encouragement à l'autonomie (encouragement à l'esprit critique)

Pour notre part, une analyse des différents questionnaires qui évaluent les pratiques éducatives familiales nous amène à proposer la définition suivante : les pratiques éducatives familiales représentent les attitudes et manières dont les parents se comportent à l'égard de leurs enfants. Elles sont essentiellement alimentées par les valeurs, principes, mythes ou rites familiaux.

Nous précisons que dans notre investigation, les pratiques éducatives seront étudiées à partir de la structuration de l'environnement familial car les habitudes, les comportements adoptés par les parents, la représentation qu'ils ont de leurs enfants, ainsi que leurs attentes déterminent un mode de pratiques éducatives (Lautrey, 1980).

2- L'ESTIME DE SOI

Avant de définir le concept d'estime de soi, il est nécessaire que nous le situions par rapport à l'ensemble des terminologies qui lui sont connexes.

2.1- TERMINOLOGIES CONNEXES

Lorsqu'on aborde le sujet de l'estime de soi dans la littérature psychologique, on se trouve face à une multitude de termes utilisés de façon plus ou moins synonymes. Ainsi, on parle de conscience de soi, de perception de soi, de concept de soi, de représentation de soi, d'image de soi, de conception de soi voire d'identité de soi pour n'en citer que les plus courants. A priori, l'ensemble de ces termes a pour intérêt principal de définir le `'soi'' en tant que construction psychique complexe, mettant toutefois différemment en valeur certains mécanismes sous-jacents.

La conscience de soi décrit des processus psychologiques permettant à un ensemble de phénomènes, sensations, désirs, craintes...de s'organiser en un ensemble nommé le Moi.

Le terme perception de soi met l'accent sur les mécanismes en jeu lorsqu'on perçoit un objet : perception visuelle, tactile, kinesthésique.

Le concept de soi, essentiellement utilisé par les auteurs anglophones (self concept) est issu du courant cognitiviste tendant à faire du Moi un objet de connaissance comme d'autres, c'est-à-dire un objet construit, avec le risque de sous-estimer son originalité en tant qu'univers d'affects, de sentiments et d'angoisses animé par toute une dynamique inconsciente. Selon Schutzenberger & al. (1978), par extension, ce terme condense les conceptions que le sujet a de lui-même, la manière dont il se croit perçu par les autres, l'idéal vers lequel il tend et les mécanismes de défense qui maintiennent l'unité de son être, qu'ils soient conscients ou inconscients.

La représentation de soi, terme retenu par Perron (1991) pour son aspect polysémique, appartient au langage courant. La représentation, c'est ce que l'évocation donne à revoir de la perception, dans l'espace psychique interne, en l'absence actuelle de l'objet évoqué. Elle désigne donc à la fois une opération et son résultat. A cela, s'ajoute un deuxième sens en liaison avec le monde du spectacle : donner une représentation, jouer un personnage. Toute représentation de soi peut être la perception de sa propre personne qu'en jouant un ensemble de rôles on donne, souhaite ou croit donner à autrui... et à soi-même. Bref, Perron (1971) use du terme de représentation de soi dans le sens de l'opinion que le sujet a de lui-même, en fonction de son propre système de valeurs.

L'image de soi, selon Meyer (1987, P.953), est « l'ensemble de savoirs sur soi à valence positive ou négative, est le résultat d'une construction psychique et le produit d'une activité cognitive. Ces savoirs sont alimentés par des informations provenant des milieux de vie (familiaux et scolaires) auxquels l'enfant attribue des significations diverses. » Ensuite, pour Argyle (1994), l'image de soi est l'ensemble des idées qu'un individu a sur lui-même, y compris son rôle (métier, classe sociale...), ses traits de caractères et son corps. Ces images propres sont alors composées de caractéristiques que les sujets attribuent de façon plus ou moins conscientes et qu'ils intègrent progressivement comme partie constituante de son Moi. Enfin, Lee-Nowacki (2002) estime que l'image de soi est l'ensemble du savoir à valence positive ou négative, le résultat d'une construction psychique et le produit d'une activité cognitive. Le processus d'évaluation qui s'y rapporte a pour rôle de structurer et de hiérarchiser les représentations relatives à soi, et il concerne des manières d'être et de faire, les caractéristiques et les acquis ainsi que les sentiments et les aspirations de l'enfant, dans les domaines d'activités scolaire et relationnelle.

La conception de soi correspond selon Bernoud & Cartron-Guérin (1976, P.283) à l'idée que l'enfant « acquiert de lui-même, idée qui implique un jugement de valeur par l'enfant de ses relation avec autrui et sur ses expériences personnelles. »

L'identité de soi en tant que phénomène complexe et multidimensionnel est un système de représentations et de sentiments de soi. Elle renvoie au sentiment d'individualité, de singularité du sujet et de continuité de soi. Selon Mounoud et Vinter (1984, P.385), elle correspond au « degré de stabilité et de précision de l'image que les adolescents ont de leur propre visage. » Jendoubie (2002, P.385) estime pour sa part qu' « elle renvoie au sentiment d'individualité, de singularité du sujet et de continuité de soi. Ce système n'est ni donné ni statique car l'identité évolue et se transforme durant toute la vie »

Pour notre part, nous retenons le terme d'«estime de soi ». Nous le faisons parce que d'après L'Ecuyer (1978, P.29), toutes ces notions, en fait, se réfèrent au même contenu, c'est-à-dire: « ensemble de traits, d'images, de sentiments que l'individu reconnaît comme faisant partie de lui-même influencé par l'environnement et organisé de façon plus ou moins consciente ». En adoptant le terme estime de soi, nous pensons accorder simplement un certain intérêt à l'aspect évaluation en tant que jugement de valeur, ce qui est d'autant plus pertinent si l'on considère que l'évaluation et la transmission de certaines valeurs sont des tâches essentielles de l'école. Reste à savoir comment cette dernière entend gérer cet aspect d'évaluation non seulement des compétences scolaires d'un élève, mais aussi de son comportement, de sa personne et donc de l'image qu'il est en train de construire de lui-même.

2.2- ESTIME DE SOI : ESSAI DE DEFINITION

L'estime de soi est une composante psychologique. Elle correspond à la valeur que les individus s'accordent, s'ils s'aiment ou ne s'aiment pas, s'approuvent ou se désapprouvent (Coopersmith, 1967 ; Rosenberg, 1979).

Selon Lawrence (1988), l'estime de soi est l'évaluation personnelle du décalage entre le soi idéal et l'image de soi. Quant à Harter (1990), il s'agit de voir dans quelle mesure chacun s'aime, s'accepte et se respecte en tant que personne.

En ce qui concerne Paradis & Vitaro (1992), l'estime de soi est le regard global sur soi, renvoie à un jugement de valeur personnelle. Ce jugement est possible dès lors que l'individu s'est élaboré une `'image de soi'', c'est-à-dire une connaissance de ses caractéristiques personnelles.

Etant donné que les individus se forgent une image d'eux-mêmes, fondée essentiellement sur la manière dont les traitent les personnes jouant un rôle important dans leur vie : parents, enseignants, camarades, c'est, d'une part, l'appréciation positive ou négative de cette image de soi qui constitue l'estime de soi (CPA, 1984) ; d'autre part, l'estime de soi correspondrait à un ensemble d'attitudes et d'opinions que les individus mettent en jeu dans leurs rapports avec le monde extérieur. Croire en sa réussite personnelle, se mobiliser en fonction d'un but à atteindre, ressentir plus ou moins profondément un échec, améliorer ses performances en mettant à profit les expériences antérieures sont des attitudes directement liées à l'estime de soi. En d'autres termes, l'estime de soi recouvre une disposition mentale qui prépare l'individu à réagir selon ses attentes de succès, son acceptation et sa détermination personnelle (Bawa, 2007).

Plus loin, le CPA (1984, P.6) précise que « l'estime de soi est l'expression d'une approbation ou d'une désapprobation portée sur soi-même. Elle indique dans quelle mesure un individu se croit capable, valable, important. C'est une expérience subjective qui se traduit aussi bien verbalement que par des comportements significatifs. » Cette définition nous fait remarquer que l'estime de soi est axée sur une évaluation relativement durable et non sur des variations ponctuelle et transitoire ; ensuite que l'estime de soi doit prendre en compte les variations dues aux expériences individuelles, au sexe, à l'âge et autres aspects fixant les rôles.

Quant aux Horland & Janis, (1959), l'estime de soi repose sur la notion d' `'auto-évaluation''. Ce terme renvoie à un processus de jugement par lequel l'individu considère ses résultats, ses capacités, ses qualités selon un système de valeurs et de normes personnelles, et porte un jugement sur son mérite personnel. Ces attitudes envers soi-même ne sont pas de nature différente des attitudes envers d'autres objets : il s'agit d'une orientation positive ou négative vers un objet ou un fait, et d'une prédisposition à répondre favorablement ou défavorablement à ceux-ci et à tout ce qui s'y rattache. Ces attitudes peuvent être conscientes ou inconscientes et porteuses de connotations affectives positives ou négatives et étroitement liées à des processus cognitifs et motivationnels. L'estime de soi oriente donc la prise de conscience et la connaissance de soi, par l'appréciation positive ou négative que le sujet porte sur lui-même, en comparaison avec les éléments de son environnement (parents, enseignants). Son influence ne se limite pas seulement aux réactions sur le moment, mais contribue à orienter les décisions et l'investissement pour l'action future en motivant ou en démobilisant la personne (Pierrehumbert, 1992).

Doraï (1988, P56) pense que l'estime de soi « est l'idée que l'enfant se forme de lui-même après intériorisation des jugements issus de l'environnement. »

Enfin, selon Bloch & al. (cités par Anaut, 2003, P.74) l'estime de soi correspond à « la valeur personnelle, la compétence qu'un individu associe à son image de soi. » Alors que Reuchlin (cité par Anaut, op. cit) considère l'estime de soi comme « fondée sur le choix par le sujet de normes extérieures dont il constate qu'il est ou non capable de les atteindre. Elle peut aussi découler de la comparaison entre plusieurs images de soi coexistant chez le même sujet. Le Moi actuel d'une part et le Moi idéal, le Moi-qui-devrait-être, l'image de lui que le sujet suppose chez certaines des personnes qui le connaissent ».

A travers toutes ses définitions, nous observons que l'estime de soi renvoie à une auto-évaluation par un sujet de ses capacités, ses qualités et ses résultats dans les différents domaines où il exerce ses compétences. Cette auto-évaluation qui est un jugement peut être positif ou négatif. Elle est aussi fondée sur la conscience par l'individu de son propre mérite et de sa compétence. Cela suppose une comparaison entre ce que l'individu voudrait être et ce qu'il est actuellement.

Pour notre part, nous entendons par estime de soi le portrait qu'une personne fait de ses capacités qui orientent ses attitudes et ses comportements. Elle peut, bien sûr, être positive ou négative.

2.3- LES SOUS-DIMENSIONS DE L'ESTIME DE SOI

Au fil des recherches, la perspective multidimensionnelle selon laquelle un sujet s'évalue différemment en fonction des différents domaines, s'est avérée être la plus adéquate. Cette distinction de domaines dans lesquels un enfant évalue ses compétences évolue parallèlement au développement cognitif. Une capacité de différenciation croissante permet une augmentation progressive du nombre de domaines qui peuvent être distingués, et cela à partir de la petite enfance jusqu'à l'âge adulte.

Déjà James (1890) distinguait trois sous-dimensions à savoir :

- le soi matériel,

- le soi social,

- le soi spirituel.

Shavelson & al. (1976) distinguent quatre sous-dimensions du soi :

- le concept de soi scolaire,

- le concept de soi social,

- le concept de soi émotionnel,

- le concept de soi physique.

De même, le CPA (1984) trouve quatre sous-dimensions qui sont :

- l'estime de soi générale ou personnelle,

- l'estime de soi scolaire,

- l'estime de soi familiale,

- l'estime de soi sociale.

Pemartin (1986) s'inspirant des travaux de l'Ecuyer identifie, quant à lui, douze sous-dimensions ou catégories de la représentation de soi qui sont :

soi identité familiale ; soi possessif ; soi corporel ; soi scolaire ; soi actif ; structure soi non soi ; soi abstrait ; soi professionnel ; soi adaptatif ; soi par rejet ou opposition ; soi relatif ou multiple et le soi explicite.

Kellerhalls, Montandon, Ritschard & Sardi (1992) dégagent deux sortes d'estime de soi chez les adolescents :

- la `'self-efficacy'' : l'évaluation que le sujet donne de ses aptitudes à réussir certaines actions ( par exemple choisir ses amis, résoudre un problème scolaire...),

- la `'self-worth'' ou le sentiment de valeur personnelle : c'est l'évaluation comparative que le sujet fait de sa personnalité : il se juge bon ou mauvais, fort ou faible, stupide ou vif d'esprit, avare ou généreux... par rapport à son environnement.

Harter (1998), elle, distingue chez les enfants préscolaires et scolaires de quatre à douze ans, six domaines principaux où émerge l'estime de soi : l'école, le social, le `'physique'' (qui se réfère aux compétences sportives), l'apparence physique, la conduite et le sentiment de valeur propre.

Quant aux André & Lelord (1999), cinq domaines spécifiques recouverts par l'estime de soi chez l'adolescent sont : l'apparence physique, la réussite scolaire ou le statut social, les compétences athlétiques, la conformité comportementale et la popularité.

Enfin, L'Ecuyer (2000), quant à lui, trouve dans ses études cinq sous-dimensions à savoir : le soi matériel, le soi personnel, le soi adaptatif, le soi social et le soi non-soi.

Qu'elle soit globale ou spécifique, l'estime de soi présente deux modalités, au regard des définitions susmentionnées : positive ou négative. L'une ou l'autre marquent profondément la vie du sujet. C'est pourquoi, dans le cadre de ce travail, nous n'allons pas catégoriser l'estime de soi. Nous la considérerons dans son aspect global.

2.4- LES TROIS PILIERS DE L'ESTIME DE SOI

2.4.1- L'AMOUR DE SOI

On s'aime malgré ses défauts, ses limites, les échecs rencontrés, car une petite "voix intérieure" nous indique que l'on mérite l'amour et le respect des autres et surtout de nous-même. Selon Malandain (1997), cet amour inconditionnel ne dépend pas des performances. C'est grâce à cette force que l'on se reconstruit après un échec ou face à l'adversité. Il n'empêche ni le doute ni la souffrance en cas de difficultés, mais il protège et donne confiance contre le désespoir.

L'amour de soi est donné en majorité par la famille. En effet, il dépend de l'amour que les parents prodiguent aux enfants. Cet amour permet aux parents de ne jamais douter en leur progéniture et les encourage à éduquer le mieux possible leurs enfants.

Les carences d'estime de soi ayant leur origine à ce niveau sont les plus difficiles à rattraper. Lorsque l'on ne s'aime pas soi-même, il est difficile de croire en l'amour que les autres portent sur soi. L'amour de soi est donc bien l'assise de l'estime de soi le plus caché et le plus intime. Il est donc très difficile de cerner le degré exact d'amour que se porte un enfant.

2.4.2- LA VISION DE SOI

La vision de soi est définie par Malandain (1997) comme le regard que l'on porte sur soi, cette évaluation, fondée ou non, que l'on se fait de ses capacités et de ses défauts.

Dans cette notion, on voit que la subjectivité prend une place importante ; son observation et sa compréhension sont délicates. Ainsi, par exemple, selon André & Lelord (1999), une personne complexée, dont l'estime de soi est souvent basse, laissera souvent perplexe un entourage qui ne perçoit pas les défauts dont elle se croit atteinte. Ce regard que l'on porte sur soi, est en grande partie régit par notre environnement q'il soi familial ou social.

2.4.3- LA CONFIANCE EN SOI

On assimile souvent cette notion avec l'estime de soi. Selon André & Lelord (1999), être confiant, c'est penser que l'on est capable d'agir de manière adéquate dans les situations importantes. Ce concept est facilement identifiable. Il suffit d'étudier les réactions de l'individu face à une situation nouvelle ou devant un enjeu. C'est la conséquence de l'amour de soi et la vision de soi.

En définitive, ces trois piliers de l'estime de soi sont liés. Si l'une d'elle est faible, les autres s'affaibliront de la même façon et par conséquent l'estime de soi serait énormément affectée.

2.5- LE BERCEAU DE L'ESTIME DE SOI

L'histoire de l'estime de soi commence bien avant la naissance d'un enfant. Avant de venir au monde, cet enfant prend corps dans l'imaginaire de ses parents où il est fantasmé, imaginé. On lui attribue un certain nombre de qualités et on lui accorde une place dans les projets familiaux. Les premiers liens tissés avec cet enfant sont déterminés par cette image qui le précède, une image issue du désir parental. Les attentes, ainsi projetées sur le nouveau-né, auxquelles cet enfant devra répondre s'il ne veut pas trop décevoir ses parents, constituent les premiers enjeux interactionnels, intervenant à leur tour dans la constitution de l'estime de soi. On comprendra donc aisément que, pour ce qui est du développement de l'estime de soi, l'enfant dépend pendant les premières années entièrement du jugement des adultes les plus significatifs de son entourage. Toutes les recherches montrent que les premières relations que le bébé, puis le petit enfant entretient avec son entourage influencent cette construction de l'estime de soi. Mais au départ, il faut un acte gratuit, une ration d'estime accordée à l'enfant avant même qu'il ait fait quoi que ce soit pour le mériter (Goumaz, 1991). Cet amour inconditionnel expérimenté par le bébé au début de sa vie pose les bases de sa future estime de soi. A son tour, Winnicott (1969) insiste sur l'impact de la qualité des interactions mère-enfant sur ce développement. C'est une "mère suffisamment bonne" qui répond rapidement et de façon appropriée aux demandes de l'enfant, qui favoriserait un développement sain. De son côté, Harter (1978) souligne l'aspect vital de l'approbation dont l'enfant a besoin, à la fois pour encourager certains comportements et comme source d'informations sur l'adéquation de ses performances. Ces renforcements positifs remplissent donc deux fonctions : ils apportent de la stimulation et de l'affection, de même qu'ils favorisent le processus d'indépendance et de recherche de maîtrise.

La théorie de l'attachement de Bowlby (1982) suppose la construction d'un modèle interne dans le contexte des premiers liens sociaux que le nourrisson établit avec sa mère, son père ou toute personne qui s'occupe régulièrement de lui. Le nourrisson s'imprègne des traits saillants de son milieu et les incorpore. Le début de sa vie psychique est désormais organisé par ce modèle interne qui lui permet de traiter les informations et d'y répondre. La recherche de Cassidy (1988) confirme cette relation étroite entre la qualité de l'attachement précoce à la mère et l'estime de soi à 5-6 ans en montrant que cet attachement continue à influencer pendant longtemps encore l'estime de soi de l'enfant. Pendant les premières années, l'enfant dépend entièrement du jugement de ses parents. Il se sent comme il pense que ses parents le voient. Le regard des parents comme premier miroir dans lequel un enfant se voit, lui reflète une image qu'il va progressivement intérioriser en constituant ainsi une image plus ou moins favorable. Il commence à prendre conscience de sa propre valeur. Un enfant qui a des parents disponibles, aimants et qui encouragent ses efforts, a de fortes chances de construire un modèle interne de soi aimant et compétent. Par contre, un manque de renforcements positifs induirait un besoin croissant d'approbations externes et donc un comportement dépendant.

Pendant toute la petite enfance, mais avec une accélération vers 3 ou 4 ans, l'enfant est de plus en plus confronté à un monde social plus élargi (garderie, jardin d'enfants), dans lequel des adultes émergent et prennent le relais des parents, influençant à leur tour le développement de l'estime de soi. C'est à partir de ce moment-là que l'enfant commence à se préoccuper de son acceptation sociale. Certaines recherches montrent que les enfants identifient très rapidement les opinions des personnes à qui ils veulent plaire et qu'ils essayent d'adapter leur comportement en conséquence. En élargissant le champ social dans lequel l'enfant expérimente des interactions nouvelles et variées, on peut s'imaginer que progressivement les pairs influencent à leur tour l'évolution de l'estime de soi.

Toutefois, selon une étude de Harter (1990), chez les jeunes enfants, l'approbation des parents a de plus de poids quant à l'estime de soi que l'approbation des pairs. Cet impact de l'approbation parentale sur l'estime de soi restera très longtemps fondamental et cela plus particulièrement dans les domaines de la conformité comportementale et de la réussite scolaire. L'impact de cette approbation parentale ne diminue vraiment qu'à partir du moment où le jeune quitte le foyer familial. Par contre, en ce qui concerne l'apparence physique, les compétences athlétiques et la popularité, l'avis des pairs devient progressivement primordial. Pour juger de ce qu'il vaut, l'enfant apprendre progressivement à s'appuyer sur les résultats de ses propres actions, qu'ils soient vécus comme des succès ou des échecs. Cela suppose que l'enfant commence à prendre conscience de soi en devenant capable de comprendre le lien entre ses propres actions et les résultats obtenus. Cette capacité de "réfléchir sur", issue de la métacognition, amène l'enfant petit à petit à intérioriser son propre système d'autoévaluation qui lui permet de juger ses réussites et ses échecs. Ce processus d'intériorisation s'accompagne de l'intériorisation d'un système de normes ou de buts à atteindre. Au fur et à mesure que l'enfant s'approprie ces normes, la dépendance d'un système externe va en diminuant, ce qui ne veut pas dire que l'enfant n'a plus besoin de renforcements externes positifs, mais ceux-ci ne jouent plus un rôle développemental.

Donc, à partir de 8 ans, l'enfant devient capable de conceptualiser une représentation de soi au plan cognitif. C'est ainsi qu'il peut accéder à une représentation psychologique globale de lui-même (Harter, 1998) qui puisse être mesurée et évaluée scientifiquement. Dès lors, il arrive à mettre en relation l'importance accordée à certains domaines et l'évaluation de soi. L'estime de soi est dorénavant influencée par la manière dont l'enfant puis l'adolescent perçoit ses compétences dans des domaines où la réussite est considérée comme primordiale.

Ensuite, les enfants peuvent s'évaluer globalement en tant que personne, tout en étant capables d'estimer leurs compétences dans les différents domaines. Toutefois, ces évaluations dépendraient également de l'importance que l'enfant accorde à ces domaines ou qu'il pense être accordée par l'entourage. Différentes observations révèlent que les enfants avec une haute estime de soi se trouvent compétents dans les domaines où ils estiment important de réussir et se contentent de résultats moins bons dans les autres. A ce sujet reprenons l'exemple significatif de deux garçons d'une étude de Harter (citée par André & Lelord, 1999). A profils identiques - enfants très populaires mais très performants à l'école ni en sport, plutôt de leur apparence physique - ils présentent néanmoins des scores d'estime de soi très différents. Jacques, qui considère que les domaines dans lesquels il n'est pas très fort ne sont pas essentiels, a une bien meilleure estime de soi que Jean pour qui la réussite dans le domaine scolaire et athlétique est indispensable à une bonne estime de soi. Pour Jacques, il existe une certaine adéquation entre ces compétences et l'importance accordée au succès. Ainsi, le "Moi perçu" ("Ce que je suis") de cet enfant est assez en accord avec son "Moi idéal" ("Ce que je voudrais être"), alors qu'on remarque une discordance de ces deux types de jugements chez les enfants comme Jean qui ont une estime de soi faible. Plus la discordance entre ces deux représentations est grande, plus l'estime de soi est faible.

3- LES PERFORMANCES SCOLAIRES

D'abord, selon Sillamy (1983, P.506), la performance est la « mise en oeuvre d'une aptitude et le résultat de cette action à partir duquel on peut déduire les possibilités d'un sujet dans un domaine particulier. » Ainsi, il distingue au niveau de l'évaluation, les performances sportives, les performances à un test psychologique des performances scolaires.

En ce qui concerne les performances scolaires, selon Hotyat & Delepine-Messe (1973, P.230), elles correspondent à des « données précises sur le niveau maximal atteint par un apprentissage à un moment donné. Selon la nature de l'activité en cause, elles peuvent être numériques ou descriptives. »

Seme (2002, P. 4) distingue deux sortes de performances scolaires : «la performance globale et la performance partielle. La première concerne l'ensemble des matières en classe et elle est obtenue grâce aux moyennes pondérées des différentes matières de classe. La seconde se réfère à une catégorie de matières ou à une discipline particulière et elle représente la moyenne obtenue dans cette matière. »

En considérant les performances scolaires en terme note obtenue que ce soit dans une matière ou moyenne de notes dans toutes les matières, on se rend compte qu'elle peut être bonne ou mauvaise. C'est pourquoi on parle de bonnes performances et de mauvaises performances.

Les notions de bonnes ou mauvaises performances renvoient aux concepts de réussite ou d'échec scolaire. Toutefois, avec Plaisance (1985) nous savons que réussite et échec scolaire sont des termes ambigus. Ce sont des notions à usage pratique dont les définitions relèvent davantage du point de vue que l'on adopte, à un moment et dans un environnement donnés et non des concepts construits scientifiquement pour expliquer les réalités observées.

Dès lors, pour Villars (1972), l'échec scolaire est une manifestation d'une inadaptation au travail scolaire qui se traduit par un retard scolaire évalué en année scolaire. Ce retard est le résultat d'une comparaison entre le niveau qui devait être celui de l'élève considéré en raison de son âge et celui de son niveau scolaire réel.

Avanzini (1977, P.16), pour sa part, pense que « est en situation d'échec, soit l'élève dont les performances sont inférieures à celles qu'exigent le niveau officiel de sa classe ou de son cours ou les normes de l'examen qu'il prépare, soit celui par voie de conséquence qui est placé dans des classes, sections peu estimées. » Cette notion d'échec scolaire couvre deux dimensions :

- une dimension objective qui se rapporte à tout ce qui est observable. Les critères qui définissent cette dimension sont les mauvaises notes, le redoublement et l'ajournement ;

- une dimension subjective qui fait référence à la manière dont le sujet et son entourage ressentent l'échec objectif. En fonction des ambitions et des aspirations, les sujets ne ressentent pas avec la même acuité une même situation d'insuccès

Pour Jamati (citée par Rousvoal & Zapata, 2001, P.55), « l'élève qui échoue est celui qui n'a pas acquis dans le délai prévu les nouvelles connaissances et les nouveaux savoir-faire que l'institution, conformément aux programmes, prévoit qu'il acquiert. »

Selon Allès-Jardel & al. (2001, P.13),  « l'échec est décrété par rapport à une norme et la réussite scolaire pourrait être mesurée comme l'atteinte d'un objectif scolaire dans un temps considéré comme normal. Tout élève qui obtient une mauvaise note, qui redouble sa classe, qui échoue aux examens ou qui est affecté dans une section autre que celle à laquelle il aspirait, est en échec du point de vue de l'institution scolaire. »

Bouteyre (2004, P.50) estime, pour sa part, que la réussite scolaire évoque avant tout une conformité à une norme. C'est pourquoi, les définitions de la réussite scolaire font référence à ce qui est normalement attendu d'un élève pour pouvoir le déclarer en situation de réussite. Sur ce il distingue de la définition statistique de la définition pédagogique.

En ce qui concerne la définition statistique, on parle d'enfant en réussite à l'école primaire lorsque celui-ci poursuit sa scolarité en passant chaque année en classe supérieure. Cette progression de classe en classe est l'unique élément de comparaison entre tous les enfants scolarisés du même âge. Cette appréciation laisse de côté les inévitables disparités de niveau scolaire. Les taux de passage à l'issue des différentes classes viennent compléter les taux de redoublement, signataires de l'échec. Ces chiffres sont comparés à ceux des années précédentes ou à ceux d'autres écoles. Selon ce critère de passage en classe supérieure, est considéré en situation de réussite tout enfant fréquentant la classe correspondant à sa tranche d'âge, c'est-à-dire tout enfant qui n'a accumulé aucune année de retard dans sa scolarité. A partir du secondaire, le critère de réussite change puisque celui-ci est alors fondé sur l'obtention d'un diplôme marquant la fin de ce cycle. Cette approche statistique de la réussite permet le constat d'une situation envisagée davantage sous l'angle de l'échec que sous celui de la réussite. En effet, la réussite n'est entendue, le plus souvent, que comme un non-échec. Elle est perçue comme une situation banale que doit vivre tout élève, et c'est en cela qu'elle sert de norme.

La définition pédagogique de la réussite suppose d'autres éléments d'appropriation. L'école, par l'éducation qu'elle dispense, est avant tout un outil préparatoire à la société, à l'économie et à vie professionnelle. Pour Jouvenet (1985, P.27), « la réussite scolaire est l'effet d'un processus de formation et de changement de l'élève. Cette réussite scolaire suppose d'intérioriser, de faire siens des signes, des symboles, des savoirs, d'incorporer, de garder en son corps des attitudes, des conduites, des savoirs-faire rationnel ». Selon cet auteur, la réussite concerne le sujet psychologique dans sa totalité, dans son individualité, car, après s'être familiarisé aux savoirs et à ceux qui les dispensent, il doit faire preuve d'appropriation et d'opérationnalisation de ce qui lui a été enseigné. Réussir à l'école est alors possible si chaque élève fait preuve de s'adapter à la tâche scolaire et montre un rapport positif aux savoirs par un désir et un plaisir de connaître. Cette idée rejoint celle de Perrenoud (1984) qui considère qu'à l'école primaire, l'enfant doit faire convenablement son "métier d'élève".

Comme nous pouvons le constater, ces définitions varient d'un auteur à un autre selon les critères de l'échec considérés. Dans le cadre du présent travail, nous n'allons pas privilégier un critère. Nous allons plutôt construire un test de performances et nous fier à la note obtenue par l'élève parce que au secondaire, les notes dans les matières ne reflètent pas souvent les capacités ou l'effort des enfants non seulement on constate une implication de la personnalité de l'enseignant dans l'évaluation mais aussi, par exemple, au premier trimestre, la plupart des élèves ne sont pas assidus au plan travail scolaire. Ils restent encore attachés à leurs objets de distraction des vacances (vidéo, football, sorties nocturnes...), à telle enseigne que les notes qu'ils obtiennent se trouvent affectées par leur manque d'application. Par conséquent, la moyenne du premier trimestre ne reflète pas leurs capacités.

Au troisième trimestre, nous constatons que la plupart des parents viennent solliciter l'aide de certains enseignants pour modifier les notes de leurs enfants contre parfois de l'argent. Dès lors, on voit que la moyenne du troisième trimestre peut ne pas refléter la vraie valeur de l'élève. Des enfants qui devraient échouer, voire être exclus pour insuffisance de travail, se retrouvent avec de fortes moyennes et passent en classe supérieure. C'est aussi au troisième trimestre que le conseil de fin d'année accorde énormément d'indulgence aux élèves : des élèves avec de faibles moyennes peuvent être déclarés admis.

La moyenne du deuxième trimestre nous paraît un peu fiable et crédible, car elle seule semble `'saine''. Toute fois elle est sujette à l'influence de la personnalité des professeurs.

Pour pallier à toutes ces difficultés, nous choisissons de construire un test de performances scolaires.

II- CADRE THEORIQUE

« La psychologie a pour rôle de décrire de comportement et d'en proposer des explications véritables. Ces explications se fondent sur des données théoriques qui constituent des cadre de référence » (Bawa, 2007, P.22).

Sur ce, dans le but de comprendre l'influence des pratiques éducatives familiales et l'estime de soi sur les performances scolaires des adolescents, nous devons trouver des modèles explicatifs ou théoriques de nos concepts. A partir de là, trois axes de modèles théoriques s'imposent à nous :

- modèles explicatifs des pratiques éducatives familiales,

- modèles explicatifs de l'estime de soi,

- modèles explicatifs des performances scolaires.

1- MODELES PARENTAUX DE PRATIQUES EDUCATIVES

Selon Claes (2004, 214), « la littérature psychologique a développé plusieurs façons de concevoir les comportement des parents à l'égard de leurs enfants mais l'approche la plus complète, ayant donnée lieu aux travaux les plus élaborés a été élaboré par Baumrind (1978) ».

En effet, Baumrind (1978) a construit une typologie des styles parentaux autour de deux dimensions : les réponses parentaux (responsiveness) et les demandes parentaux (demandingness). La notion de "responsiveness" fait appel à l'école et à la capacité de capter les besoins de l'enfant mais également à l'aptitude d'y répondre adéquatement ; le concept de "demandingness" recouvre les notions d'attentes et d'aspirations parentales, mais également les consignes et les exigences. Ces deux dimensions sont considérées comme relativement indépendantes l'une de l'autre ; on peut concevoir par exemple qu'une mère soit très exigeante mais peu à l'écoute des besoins de l'enfant ou qu'en revanche, elle soit très affectueuse et chaleureuse mais peu tolérante. A partir de là, Baumrind (1978) trouve quatre modèles généraux parentaux :

- le style "exigeant / chaleureux" définit les parents qui ont les demandes élevées mais qui répondent aux besoins des adolescents ; ils sont chaleureux mais fermes. Ils ont des projets à l'égard des enfants, posent des exigences réalistes, valorisent la responsabilité et la prise en charge, mais assument la responsabilité ultime des décisions. Ces parents font également preuve de proximité affective et s'engagent souvent dans des discussions, afin de faire comprendre à l'enfant ou à l'adolescent la raison de leurs décisions.

- le style "autoritaire" décrit les parents qui préconisent l'obéissance et le respect des règles familiales, mais accordent peu de place aux considérations affectives. Ils considèrent que l'enfant doit se conformer aux exigences parentales sans les discuter.

- le style "permissif ou indulgent" caractérise les parents tolérants qui valorisent les dimensions émotionnelles de proximité et d'accord. La discipline est exercée de façon minimale et ils accordent à leurs enfants une grande liberté pour agir selon leur désir. Ils considèrent que le contrôle limite le développement et perçoivent essentiellement leur rôle en termes de présence affective à laquelle l'enfant peut faire appel selon ses propres demandes.

- le style "indifférent ou négligent" se caractérise par l'absence de chacun des deux dimensions : les demandes et les réponses. Il s'agit de parents qui, pour des raisons diverses, ont abdiqué leurs fonctions parentales ; ils sont peu concernés par ce qui se passe dans la vie de leurs enfants et ne posent guère d'exigence.

On a pu remarquer l'efficacité du style "exigeant / chaleureux". Les adolescents qui vivent dans un tel environnement familial développent des aspirations scolaires et professionnelles plus élevées et une meilleure confiance en leurs capacités personnelles. Les adolescents qui ont grandi dans des milieux familiaux autoritaires sont plus passifs plus dépendants mais affirmés, et moins adaptés socialement. Le groupe des adolescents de parents permissifs se déclarent plus satisfaits des relations qu'ils entretiennent avec leurs parents, ils font preuve da meilleures habiletés sociales avec les paires et les adultes, mais ils sont plus sensibles à l'influence des amis et commettent plus d'actes déviants comme manquer des cours et consommer des drogues douces. Le modèle négligeant se révèle le plus pénalisant pour le développement : la négligence parentale est associée à des problème intériorisés comme la dépression et des idéations suicidaires (Tousignant, Hamel et Bastien, 1988) et à des problèmes extériorisés comme l'engagement dans la délinquance et les conduite antisociales.

Lautrey (1980), lui, a envisagé évaluer la structuration du milieu familial à partir des attitudes et des pratiques éducatives. La structuration de milieu familial est cernée en fonction de valeurs (qualités souhaitées chez l'enfant, et principes d'éducation. Le milieu familial pouvant présenter un degré de structuration plus ou moins élevé, il trouve trois styles éducatifs familiaux en fonction de leur structuration :

- la structuration rigide : elle se caractérise par des régularités importantes qui font que chaque événement est prévisible et se répète, et offre peu d'occasions de perturbation. Des règles immuables fixent ce que l'enfant doit faire quelles que soient les circonstances,

- la structuration faible : elle correspond à un ensemble de pratique que l'on peut qualifier d'aléatoires, imprévisibles. Elle n'offre pas les régulations nécessaires à l'incorporation des perturbations dans les structures cognitives préexistantes, et donc peu d'occasions de rééquilibrations cognitives,

- la structuration souple : elle se caractérise par une combinaison entre les structurations précédentes. Les régularités ne sont pas systématiques. Elle n'offre pas un cadre stable. Des règles organisent les activités de l'enfant avec des conditions souples.

En 1982, Boulangier-Balleyguier distinguait cinq styles éducatifs parentaux à partir d'échelles constituées d'après les réponses des parents à un questionnaire portant sur leurs pratiques. Ces styles sont caractérisés comme suit :

- hyperstimulant : parents à la fois très affectueux mais aussi anxieux, rigides, très éducatifs et sévères ;

- affectueux : parents montrant beaucoup d'affection et d'indulgence, modérément éducatifs ;

- anxieux : parents rigides et contraignants par anxiété ;

- sévères : parents très centrés su l'éducation et sévères, peu affectueux ;

- carentiels : parents qui s'occupent très peu de leur enfant.

Vandenplas-Holper (1987), à partir de deux indicateurs retenus : support et sévérité, il obtient par combinaison quatre catégories de compétences parentales d'éducation savoir :

- la chaleur : support élevé, sévérité faible ;

- le contrôle : support et sévérité élevés ;

- la négligence : support et sévérité faibles ;

- l'hostilité : support faible et sévérité élevée

Un ensemble de recherches menées dans leur centre permettent à Palacio-Quintin & Lacharité (1989) d'identifier les principales pratiques éducatives qui distinguent les mères selon le développement cognitif de leur enfant.

Les mères dont les enfants ont de meilleures performances cognitives :

- aident l'enfant à explorer davantage par lui-même;

- orientent plus soigneusement l'enfant à la tâche;

- encouragent l'enfant à évaluer les conséquences de ses actions futures à vérifier les résultats des actions déjà effectuées;

- donnent plus de feed-back positif;

- donnent plus d'indices et d'informations spécifiques et pertinentes;

- posent plus de questions.

Les mères dont les enfants réussissent moins bien cognitivement ont plutôt de tendance à :

- être plus directives et contrôlantes;

- intervenir à la place de l'enfant;

- s'exprimer sous forme impérative;

- donner des solutions et ne pas offrir le choix entre plusieurs possibilités;

- orienter peu l'enfant à la tâche;

- donner plus de feedback négatif.

Allès-Jardel & Genest (1988) étudie les pratiques parentales d'éducation en définissant différents styles éducatifs à partir d'un questionnaire (inspiré de celui de Lautrey (1980)) adressé aux parents :

- attitude éducative contrôlée : parents hyper-protecteurs, anxieux, ou rigide et sévères, se concrétisent en direction de l'enfant jeune par un contrôle important de ses activités et comportements,

- nuancée ou souple : le parent a une attitude de fermeté bienveillante, de compréhension et d'affection. Il propose même s'il doit parfois imposer. Il essaie d'obtenir la coopération de l'enfant tout en le guidant dans la recherche de son autonomie,

- laisser-faire : on note l'absence de contrainte générale et de règles fixant la vie quotidienne de l'enfant. L'adulte ne s'impose pas et n'a pas d'exigence particulière.

Lehalle & Mellier (2005) citent Bukatko & Dachler (1992) qui distinguent quatre grands styles éducatifs tels qu'ils se présentent dans les familles selon les modalités de contrôle et d'attention éducative :

- les parents "autoritaires" valorisent l'obéissance stricte ; ils contrôlent l'activité des enfants par des techniques plutôt coercitives (punitions, menaces), laissant généralement de côté les explications et raisonnement ; ils sont aussi globalement moins attentifs à leurs enfants ;

- les attitudes "démocratiques" privilégient le dialogue et l'explication ; les parents savent indiquer clairement à l'enfant ce qu'ils attendent de lui ; ils utilisent plus volontiers les récompenses que les punitions ou les menaces ; l'enfant se trouve ainsi considéré de façon plus mature, il connaît les attentes parentales et les limites à ne pas dépasser ; les exigences parentales sont donc fortes, mais il y a plus d'attention éducative portée à l'enfant ;

- le style "permissif" est celui des parents qui n'imposent que peu de limites aux enfants et qui n'ont pas d'exigences importantes concernant l'acquisition de comportements "matures" par leurs enfants ; en conséquence,la vie quotidienne se régule sans cadre imposé, et les enfants font ce qu'ils veulent.

- enfin, les parents "désengagés" apparaissent centrés sur leurs propres préoccupations et objectifs avec à la fois peu d'exigence et de contrôle et peu d'attention vis-à-vis des enfants ; en fait, ils ne s'intéressent guère à la vie de leur enfant et ne s'informent pas de ce qui lui arrive quotidiennement.

Le critère de contrôle oppose les styles autoritaires et démocratiques d'une part, et les styles permissifs et désengagés d'autre part. le critère de l'attention éducative oppose les styles démocratiques et permissifs d'une part (attention forte) et les styles autoritaires et désengagés d'autre part (attention faible). Bukatko & Dachler (1992) montrent au même moment que le style autoritaire est associé à un développement moral moins avancé, à des difficultés d'ajustement scolaire, à de plus hauts niveaux d'agressivité et des interactions entre pairs appauvries. Par ailleurs, dans le cas de parents désengagés, on observe une plus faible estime de soi et des difficultés de contrôle personnel (impulsivité). Inversement, le succès du style éducatif démocratique parait lié à trois aspects importants : manifester à l'enfant un cadre de référence (des limites sont effectivement marquées), considérer le point de vue de l'enfant et répondre à ses besoins, présupposer un niveau de responsabilité chez l'enfant et induire des comportements matures.

Les études de Lamborn & al. (1991) et de Steinberg & al. (1994) renforcent la catégorisation précédente. Elles sont menées auprès des adolescents de 14 à 18 ans. On observe que le style éducatif démocratique est associé à plus de compétence sociale et moins de difficultés comportementales ou internalisées. C'est le contraire pour les adolescents ayant évalués les parents comme désengagés. Par ailleurs, lorsque les parents sont jugés autoritaires, les adolescents apparaissent effectivement se conformer aux normes sociales, mais ils ont moins de confiance en eux-mêmes. Enfin, dans le cas du style permissif, les adolescents manifestent une grande confiance en eux-mêmes, mais engagés scolairement.

En somme, la diversité de modèles parentaux d'éducation démontre la complexité et la richesse de la structure et de la dynamique des pratiques éducatives familiales. Les progrès devraient aller dans le sens d'une prise en considération de l'articulation des ces multiples dimensions dans le cadre d'une dynamique stratégique qui s'efforcerait de comprendre comment tout cela fonctionne (Tap, 1995). Pour notre part, nous adoptons le modèle de Lautrey (1980) parce qu'il est le plus élaboré. Mais nous ne pensons pas nous limiter à la catégorisation des conduites mais chercher à savoir aussi la singularité des mêmes conduites, c'est-à-dire le processus par lequel l'adolescent se personnalise, s'adapte, se défend voire se dépasse.

2- MODELES EXPLICATIFS DE L'ESTIME DE SOI

Selon Harter (1998, P. 57) : « la plupart des professionnels définissent l'estime de soi comme l'évaluation globale de la valeur de soi en tant que personne. Il s'agit de l'évaluation qu'un individu fait de sa propre valeur, c'est-à-dire de son degré de satisfaction de lui-même », quant à savoir comment l'individu s'évalue, quels sont les éléments qui sont pris en considération, les avis divergent parfois. C'est pourquoi, nous regroupons ces avis en deux tendances :

- Estime de soi, construction personnelle et unidimensionnelle,

- Estime de soi, construction sociale et multidimensionnelle.

2.1-ESTIME DE SOI, CONSTRUCTION PERSONNELLE ET

UNIDIMENSIONNELLE

Selon Tap (1998, P. 17), James est un des premiers auteurs à avoir considéré l'estime de soi comme résultant d'une construction personnelle depuis 1890. A cet effet, il pense que l'estime de soi est « la conscience de la valeur du Moi, met l'accent sur la dynamique intrapersonnelle et intrapsychique, sur la diversité des Moi (s) sur le rôle éminent des émotions dans la construction de soi et l'émergence de la valeur personnelle, sur l'importance de l'articulation entre le Moi actuel et les aspirations. Il s'intéresse à la personnalité en tant que structure, rigide ou souple, aux frontières précises ou diffuses. » Dans cette optique, l'articulation entre le Moi actuel et les aspirations d'un sujet jouerait un rôle primordial. Ainsi, plus la distance entre le soi réel et le soi idéal est grand, dans le sens que les succès ne correspondent pas aux ambitions, plus un individu aurait tendance à avoir une estime de soi ternie.

De même, Harter (1998, P. 59) estime que le rapport entre les réussites et les échecs déterminent l'évaluation globale défendue par James : « un individu aurait une haute estime de lui-même dans la mesure où ses succès seraient égaux ou même supérieurs à ses aspirations. Si, à l'inverse, les aspirations dépassent les réussites effectives, alors son estime de soi sera faible. » Elle précise qu'il ne s'agit pas d'effectuer un simple calcul mathématique, étant donné que certaines réussites auront davantage d'impact sur l'estime de soi, que d'autres pourront être perçues comme anodines...Cela dépend de l'importance que l'individu accorde au domaine concerné.

2.2- ESTIME DE SOI, CONSTRUCTION SOCIALE ET

MULTIDIMENSIONNELLE

C'est à Cooley (1902) que revient le mérite d'apporter une nouvelle perspective avançant l'hypothèse selon laquelle le sentiment de valeur de soi serait une construction sociale façonnée par les interactions avec l'entourage, et cela dès l'enfance. Cooley parle alors de l'effet de miroir social (looking glass self) : c'est le regard des autres qui renvoie des indications permettant au sujet de connaître l'opinion qu'ils ont de lui. Cette opinion serait par la suite incorporée à la perception de soi, une perception qui dépendrait donc étroitement de la façon dont le sujet est perçu ou pense être perçu pas les autres. Dubar (2000) parle d'identité pour soi et d'identité par autrui.

La plupart des auteurs s'accordent pour reconnaître un caractère multidimensionnel au concept de soi, c'est-à-dire que tout individu possède un concept de soi global constitué de multiples conceptions de soi différentes (Markus et Wurf, 1987 ; Harter, 1982 ; L'Ecuyer, 1981 ; Marsh, 1984 ; Muller, 1979 ; Shavelson & Bolus, 1982). Pierrehumbert (1992, P.184) va jusqu'à déclarer que : « l'idée sous-jacente [...] est que l'image de soi, en particulier l'estime de soi n'est pas une réalité psychologique une et indivisible. Elle correspondrait au contraire à une multiplicité d'impressions, de sentiments relatifs à différents domaines du vécu quotidien, dans lesquels on peut être confronté à ses propres compétences et se trouver plus ou moins satisfait de soi-même. » C'est pourquoi, chaque personne développe un concept de soi global qui représente sa perception générale. Elle tend à organiser ses expériences et ses perceptions afin de leur donner un sens. Cette organisation se fait selon des domaines variés qui reflètent un système de catégories adopté par la personne ou partagé par un groupe.

Shavelson, Hubner & Stanton (1976) indiquent que les enfants et les adolescents regroupent dans un premier temps ces informations en deux : le concept de soi scolaire et le concept de soi non scolaire. Dans un deuxième temps, chacun de ces concepts de soi se subdivise en un certain nombre de concepts spécifiques. Ainsi le concept de soi scolaire inclut un concept de soi spécifique à chacune des matières comme les mathématiques ou le français. Le concept de soi non scolaire inclut des domaines comme les relations avec les autres, les états émotionnels et affectifs, l'apparence et les capacités physiques. Enfin, à la base de la hiérarchie se trouvent la description et l'évaluation du comportement dans des situations spécifiques. Les recherches démontrent que le concept de soi se complexifie avec l'âge, et qu'il tend à devenir moins positif au profit d'un plus grand réalisme. En vieillissant, l'enfant démontre une plus grande capacité à adapter sa perception de soi selon les réactions et les niveaux de performances des autres. Les divers éléments du soi sont pondérés, hiérarchisés et combinés selon des équations extrêmement complexes (L'Ecuyer, 1994) dont l'individu n'a probablement pas conscience (Rosenberg, 1979).

Les résultats des équipes de recherches de Harter (1982), de Marsh (1984) et de Shavelson (1976) indiquent que tous ces concepts de soi seraient relativement indépendants les uns des autres, car la description et l'évaluation que fait l'individu de son comportement peut varier d'un domaine à l'autre. Par conséquent, il semble que la modification d'un domaine du concept de soi (exemple social) n'a que très peu ou même pas d'effet sur d'autres domaines (exemple scolaire) (Muller, Chambliss & Muller, 1983), ni sur le concept de soi global (Sorsdahl & Sanche, 1985).

Selon Bandura (1997), l'estime de soi peut provenir d'auto-évaluations basées sur la compétence personnelle, mais aussi sur la possession de caractéristiques personnelles investies de valeurs positives ou négatives selon la culture (statut social...). C'est dans ce sens que l'estime de soi est multidimensionnelle (travail, vie sociale...). De plus, il précise qu'il n'y a pas de lien systématique entre le sentiment d'efficacité personnelle et l'estime de soi. Il existe des domaines qui favorisent ou défavorisent l'estime de soi. Par exemple, quelqu'un s'évaluant mauvais mathématicien mais qui n'accorde pas d'importance à cette activité n'en tire pas de conclusion négative sur sa valeur personnelle. Inversement, une personne peut s'estimer très compétente professionnellement, et en tirer une valeur négative par la nature de l'activité (huissier, prostitution...)

Rosenberg (1979) trouve que le sentiment de compétence correspond au sentiment qu'à chacun de sa propre valeur, et à l'évaluation qu'il fait de ses compétences sur plusieurs dimensions spécifiques du soi. Celui-ci intervient dans les domaines d'activités dans lesquels s'investit quotidiennement le sujet qui subit alors l'influence de l'altérité. La compétence personnelle est relativisée par rapport à celle des autres. La dimension sociale est donc une composante importante qui influe sur le sentiment de compétence dans chacun des secteurs d'activités. Nous sommes alors plus ou moins satisfaits de nous-mêmes selon les secteurs. C'est au centre de ces domaines de compétences que se situe l'estime de soi.

Harter (1982) a effectué ses travaux en partant des thèses de James (1890) qui considèrent que l'estime de soi se renforce dans les situations de réussite et de Cooley (1902) qui pense que l'estime de soi se construit en fonction des interprétations que l'on fait des réactions de l'entourage à notre égard. Elle a trouvé l'effet du sentiment de compétence dans les différents domaines sur l'estime de soi globale et l'influence du soutien social sur le sentiment de compétence. Elle conclut que l'estime de soi se construit en fait en fonction de l'expérience subjective vécue par l'individu.

Lawrence (1988) et Harter (1982) proposent le modèle théorique du développement de l'estime de soi en classe suivant :

DIVERGENCE

EVALUATION

Compétences académiques : Compétences sociales : Compétences physiques :

Rendement scolaire Relation avec ses pairs Capacités athlétiques

Conduite à l'école Apparence physique

CONCEPT DE SOI

Soi Idéal :

Ce que l'enfant aimerait être

Image de soi :

Ce qu'est l'enfant

ESTIME DE SOI

Modèle théorique du concept de soi

Modèle théorique du concept de soi

selon Harter (1982) et Lawrence (1988)

Pour Lawrence (1988), l'estime de soi se définit par l'évaluation individuelle de la divergence entre image de soi et le soi idéal. Pour lui, l'enfant doit être en mesure de percevoir et d'évaluer ses caractéristiques et son potentiel personnels. A l'aide des travaux de Harter (1982), portant particulièrement sur la perception et l'évaluation des caractéristiques personnelles d'un enfant, il tire une certaine conclusion : l'enfant qui s'évalue de façon négative au niveau de ses compétences dans un domaine particulier, n'affecte pas pour autant le sentiment global de satisfaction qu'il peut ressentir par rapport à sa valeur personnelle.

Duclos, Laporte et Ross (1995) proposent un modèle impliquant l'estime de soi, la motivation, l'engagement et le sentiment d'efficacité dans le processus d'apprentissage. En effet, selon eux, en se concentrant sur le processus d'apprentissage, en corrigeant ses erreurs et en ajustant ses stratégies en cours de route, l'adolescent en vient inévitablement à connaître des succès. Il se sent alors efficace, étant conscient qu'il a adopté les bonnes attitudes et qu'il a choisi les bonnes stratégies. Il éprouve de la fierté qui nourrit l'estime de lui-même. Plus un adolescent réussit ce qu'il entreprend, plus il se sent efficace et fier, et plus il développe graduellement sa compétence. Se sentir compétent, c'est être convaincu que l'on peut relever avec succès n'importe quels défis si l'on adopte les attitudes favorables et les bonnes stratégies. Ce sentiment donne à l'adolescent de l'espoir et lui donne accès à de multiples apprentissages (Duclos, Laporte et Ross, 1995). Toute cette conception est illustrée par le schéma suivant :

Estime de soi

Motivation

Sentiment d'efficacité

et de fierté

Engagement et persévérance dans l'activité

Modèle théorique de l'Estime de soi selon

Duclos, Laporte et Ross (1995)

Concernant les travaux d'Israël (1960) et de Korman (1966), ils traduisent la théorie de la balance de Heider. L'estime de soi y est considérée comme une fonction des sentiments personnels d'adéquation du sujet, ainsi que comme une résultante de la mesure dans laquelle celui-ci fut apte, par le passé à satisfaire des besoins personnels. Dans cette perspective, l'estime de soi peut devenir un prédicateur des performances futures de l'individu. Ainsi, selon Korman (1966), en présence d'une tâche, l'individu sera motivé à réaliser une performance consistante avec son image de soi. Si l'estime de soi est élevée, seule une performance de haut niveau permettra de déboucher sur une cognition consistante, et dès lors, le sujet sera motivé à réussir la tâche. Korman (1966) a ainsi pu montrer que le niveau d'estime de soi est associé au caractère plus ou moins approprié des objectifs choisis, au succès remporté dans la réalisation de ces objectifs, ainsi qu'à l'évaluation de ces objectifs. Il a également montré que les sujets dont l'estime de soi est élevée sont, davantage que les autres, capables de choisir des tâches dans lesquelles leurs chances de succès sont grandes.

En somme, nous constatons que les deux modèles théoriques mettent l'accent sur deux aspects importants qui interviennent dans le développement de l'estime de soi, tout en leur attribuant un statut différent. Si James (1890) valorise les processus internes au sujet, Cooley (1902), pionnier du modèle social s'intéresse davantage aux aspects inter-sujets, aux interactions sociales. Au lieu d'opposer ces différentes approches, il paraît actuellement plus utile d'étudier l'articulation de ces deux dimensions qui déterminent la construction de l'estime de soi, c'est-à-dire le développement d'une personne et de son psychisme en situation et donc en interaction. C'est ainsi qu'on s'accorde aujourd'hui pour dire que l'estime de soi est à la fois le résultat d'une construction cognitive et sociale. Cela signifie que l'estime de soi se construit progressivement et que son développement est un processus dynamique et continu. Si l'estime de soi semble être socialement déterminée, au niveau psychologique, elle s'opère à travers les processus d'identification, d'intériorisation et d'appropriation. Et la famille, l'école et les pairs restent les acteurs importants. Préférentiellement, nous adoptons le modèle multidimensionnel pour interpréter nos résultats quantitatifs car à l'école, l'adolescent est sous l'influence permanente des acteurs susmentionnés.

3- MODELES EXPLICATIFS DES PERFORMANCES SCOLAIRES

Expliquer les performances scolaires, c'est identifier les facteurs en relation avec la réussite ou l'échec scolaire (Bouteyre, 2004). Dès lors, nous regroupons ces facteurs explicatifs en trois catégories :

3.1- FACTEURS FAMILIAUX

Parmi les facteurs en relation avec la réussite scolaire, ceux liés à la famille sont de la plus haute importance.

D'abord, les aspirations parentales entretiennent une dynamique entre parents et enfants. Elles ont pour fonction de préparer les membres de la famille au départ de l'enfant, à sa prise d'autonomie, et en même temps, d'aider l'enfant à devenir adulte. Ce sont ces aspirations parentales qui le projettent dans l'avenir et l'obligent à se positionner en accord ou en désaccord avec elles. Quelle que soit la position adoptée par l'enfant, ses aspirations ont, en général, un impact positif ou négatif sur les performances scolaires (Marini, 1978) et sur les projets scolaires des enfants (Marjoribanks, 1984).

On s'accorde aujourd'hui pour reconnaître que les pratiques éducatives familiales ont une fonction importante dans l'adaptation scolaire des enfants et que l'origine sociale exerce à cet égard un effet différenciateur : plus elle est basse, plus les parents tendent à valoriser l'obéissance ou l'assimilation des normes de conduite (la soumission à l'autorité) et moins ils encouragent leur enfant à cultiver l'exploration autonome. Lorsque le niveau social s'élève, ils ont au contraire tendance à favoriser l'autonomie, la curiosité, l'esprit critique. Les formes de contrôle sont dans ce cas moins immédiates et laissent davantage de place à l'initiative personnelle (Cuisinier, 1996 ; Pourtois & Desmet, 1998). Or, selon Cèbe (2001, P.60), « on a régulièrement établi que les méthodes éducatives les plus favorables au développement intellectuel sont celles qui visent explicitement la construction des compétences qui sous-tendent l'autorégulation (ou l'autocontrôle) du fonctionnement cognitif » : les élèves ayant acquis lesdites compétences s'adaptent toujours mieux aux changements et à l'école que les autres et, partant, y réussissent mieux.

Les pratiques éducatives familiales s'organisent selon des types de structuration de l'environnement familial. Le type de structuration souple est celui qui favorise la réussite scolaire. Lautrey (1984) constate au regard de différents types de structuration familiale, que les enfants élevés dans des milieux souplement structurés ont de meilleures performances intellectuelles que ceux élevés dans des milieux faiblement ou rigidement structurés.

Jimerson, Egeland, Sroufe & Carlson (2000) observent que la qualité de l'environnement familial et la qualité des soins dispensés à l'enfant sont de puissants prédicteurs de la réussite scolaire ou du décrochage scolaire. Le manque de supervision et les pratiques éducatives inadéquates sont aussi rapportées (McNeal, 1999). A cet égard, Potvin, Deslandes, Beaulieu, Marcotte, Fortin, Royer & Leclerc (1999) montrent que les pratiques éducatives des parents telles que le peu de soutien des parents le peu d'engagement dans les activités scolaires et le peu d'encadrement sont fortement associées au risque de décrochage scolaire.

Le climat affectif dans lequel baigne l'enfant intervient, lui aussi, dans la réussite scolaire.

Scheifer & Bayley (1963) établissent qu'une atmosphère chaleureuse centrée sur l'affectivité des parents pour les enfants est plus associée à l'évolution intellectuelle de l'enfant. Motaze (1999) a montré que les élèves qui réussissent sont ceux qui bénéficient d'un climat affectif positif.

Avanzini (1977, P.78), pour sa part, estime que dans un climat affectif familial caractérisé par la mésentente entre les parents, le sentiment de méfiance, d'insécurité, l'élève développe un sentiment de culpabilité, de crainte et de frustration qui le prédispose à l'échec. Il affirme que « une sorte d'indisponibilité d'esprit, un affaiblissement des intérêts scolaires l'affecte puisque tout se passe comme si une telle situation provoquait chez lui une ankylose intellectuelle. »

Dans une étude de Crandall (cité par Tchable, 1999) menée sur 120 garçons et filles d'âge scolaire et leurs parents, les résultats montrent des corrélations significatives entre les attitudes des parents et les performances de leurs enfants. Les parents qui donnent plus d'affection à leurs enfants les voient réussir bien à l'école, alors que pour ceux qui n'en témoignent pas ou pas assez, leurs enfants sont confrontés à l'échec scolaire ou à des résultats médiocres.

Indépendamment du niveau d'aspiration et des pratiques éducatives parentales, du climat affectif familial, deux autres variables, liées au contexte familial, agissent sur la réussite scolaire. Il s'agit du niveau d'instruction des parents et des conditions matérielle liées au niveau socio-éconimique de la famille (Bouteyre, 2004).

En effet, le niveau d'instruction des parents est habituellement considéré comme un facteur d'une importance considérable dans la réussite des élèves. Les enfants de parents instruits sont avantagés sur plusieurs point par rapport aux autres enfants de parents peu instruits ou illettrés.

Dès la première année, les parents instruits considèrent avec beaucoup d'attention la scolarité de leurs enfants. Ils ont la possibilité de leur apporter un soutient scolaire en dehors des heures de classe. Ils ont une bonne connaissance du système éducatif et interviennent lors des orientations scolaires. Les mères, ayant été longuement scolarisées, consacrent plus de temps à leurs enfants lors des jeux, de lecture, de suivi de devoirs et leçons que les mère ayant été moins scolarisées, bien que ce temps réservé aux enfants s'additionne à celui de leur journée de travail car elles exercent généralement une activité salariée (Jones, Lundsteen & Michael, 1967 ; Hart, 1975). Par ailleurs, un bon niveau d'études paternel assure des rentrées d'argent, ce qui se traduit, pour l'éducation de l'enfant, par la facilité matérielle.

Montmarquette (1989) relie le paramètre de la scolarité des parents à la qualité de l'interaction parents / enfant, au temps consacré aux enfants par les parents et aux ressources financières disponibles, pour en déterminer la portée. La relation positive entre ces différents éléments permet de conclure que le niveau scolaire des parents se répercute sur la réussite scolaire ainsi que sur l'image de soi des élèves.

Le niveau socio-économique des parents et ses effets sur les performances scolaires des enfants ont été, et demeurent encore, un sujet de prédilection pour les chercheurs.

Selon Bouteyre (2004), certains résultats permettent d'affirmer que les enfants des milieux défavorisés ont moins de chance de réussite à l'école que les enfants de milieux favorisés. Les échecs scolaires sont habituellement rares dans les milieux aisés alors qu'ils sont décrits comme fréquents dans les milieux défavorisés. Cette différence de performances est perçue dès l'école maternelle et se poursuit tout au long de la scolarité.

Baudelot & Establet (1971) ont clairement montré que la répartition des élèves dans les différentes filières de l'institution scolaire était fortement corrélée avec leur position socio-économique.

Deschamps, Lorenzi-Cioldi & Meyer (1982) ont présenté une analyse des mécanismes sélectifs de systèmes d'enseignement, et ont constaté que le poids des variables socio-économiques et culturelles est fort et handicape davantage les enfants des milieux sociaux bas.

Enfin, Caglar (1983, P.22) pour sa part, trouve une influence décisive des facteurs sociaux sur la réussite scolaire. A cet effet, il écrit qu' : « à la fin de la première année à l'école primaire, les résultats scolaires de l'élève portent l'empreinte des caractéristiques culturelles et familiales. La durée, la qualité des études de l'enfant vont dépendre en grande partie de son origine sociale. »

3.2- FACTEURS INDIVUDUELS

Nous allons nous intéresser à l'élève lui-même en prenant en compte les facteurs qui lui sont propres et qui favorisent son accession vers la réussite ou l'échec scolaire.

3.2.1- INTELLIGENCE DE L'ELEVE ET REUSSITE SCOLAIRE

L'intelligence a été un des premiers facteurs individuels étudiés pour comprendre les raisons des échecs et des réussites scolaires. Elle est considérée comme un des éléments moteurs de la réussite scolaire des enfants. C'est pourquoi, Deschamps & al. (1981) vont jusqu'à dire que l'échec scolaire est un problème individuel, résultant d'un handicap intellectuel. Ils montrent une corrélation forte entre intelligence et réussite scolaire.

Piéron (1936) souligne l'importance de la "forme verbale de l'intelligence" par exemple dans la réussite scolaire de l'élève. Dix ans plus tard, Zazzo (1946) constate qu'il est impossible à un écolier dont le QI est inférieur à 80 au test de Binet-Simon de suivre un cursus scolaire normal étant donné l'importance accordée par l'école primaire à l'intelligence logico-verbale.

De même Burt, Claparède et Jadouille (cité, par Reuchlin, 1970) trouvent des corrélations allant de .65 à .75, entre les résultats positifs aux tests d'intelligence et la réussite scolaire. Jensen (1969) et Hernstein (1971) non seulement adoptent la même position mais précisent aussi que les insuffisances intellectuelles sont héritées génétiquement.

3.2.2- SATISFACTION A FREQUENTER L'ECOLE

Une des variables qui contribuerait à favoriser la réussite scolaire de l'enfant pourrait être la satisfaction à fréquenter l'école.

En effet, dès leur entrée dans le monde scolaire, les enfants manifestent envers celui-ci un intérêt ou un désintérêt. Certains diront "aimer l'école", alors que d'autres ne s'y rendent que par obligation. Ces attitudes favorables ou défavorables de l'élève envers l'enseignement ont des effets sur les performances scolaires (Bouteyre, 2004).

Brodie (1964) montre que les élèves du groupe "satisfaits" obtiennent des scores plus élevés au test de performance scolaire que les élèves du groupe "insatisfaits". Par la suite, King (1986) trouve une différence significative concernant le niveau de satisfaction par rapport à l'école qui distingue les élèves "peu performants" des élèves "très performants". La satisfaction des sujets "très performants" est plus importante que celle des sujets " peu performants".

3.2.3- MOTIVATION DE L'ELEVE A REUSSIR A L'ECOLE

Une autre variable qui intervient de façon nette dans la réussite scolaire de l'enfant est la motivation pour la réussite. McClelland (1987) considère que la motivation pour la réussite est un désir fondamental plus ou moins inconscient. Atkinson (1983), pour sa part, conçoit essentiellement la motivation du sujet en fonction des intérêts que l'individu peut trouver à agir compte tenu du niveau de difficulté de la tâche. Ces intérêts se traduisent généralement par l'image de la capacité intellectuelle ou du leadership que le sujet reçoit en retour. Crandall et Katkovsky (1962), quant à eux, centrent leur attention sur les indicateurs de motivation que sont la persévérance, l'effort fourni, la sélection d'objectifs réalistes, pour établir un pronostic de réussite.

Il semble, effectivement, que la motivation à réussir relève de l'association de différents facteurs. Boyle & Start (1989) mettent en évidence, chez des enfants âgés de 10 à 12 ans, motivés par les apprentissages scolaires, le fait qu'ils sont consciencieux, qu'ils adhèrent aux idéaux familiaux et qu'ils appartiennent à un milieu socio- culturel favorisé.

Fontaine (1990) mentionne d'autres facteurs. Il s'agit de l'anxiété liée à la réussite, de l'espoir que celle-ci suscite et d'un esprit conformiste. Les sujets les plus motivés pour la réussite manifestent moins d'anxiété inhibitrice, plus d'anxiété à caractère stimulant et sont plus conformistes que les sujets moins motivés. Les pré- adolescents, les plus motivés, évoquent de plus grands désirs de réussite que les pré- adolescents moins motivés lorsque la tâche est de difficulté moyenne.

Mais lorsque celle-ci devient plus complexe, cette tendance ne se manifeste clairement que chez les garçons et les filles vivant en milieu urbain.

L'importance d'une motivation à réussir, lorsqu'elle est propre à l'enfant, est un prédicteur de réussite scolaire, ce qui n'est pas le cas lorsque cette motivation est essentiellement liée aux désirs parentaux. Cependant, cette motivation à réussir propre à l'enfant a parfois besoin d'être soutenue et encouragée par l'adulte, sans quoi celle-ci risque de s'étioler face à des difficultés qui lui paraissent plus importantes que d'autres.

Il semble que la relation entre la motivation pour la réussite et les performances obtenues se construit avec l'âge. Tenue lorsque l'enfant débute sa scolarité, elle s'intensifie progressivement avec la maturité. La motivation pour la réussite est nourrie par la fierté et le plaisir liés à cette réussite, par l'approbation sociale et personnelle que cette réussite confère et par les informations sur les capacités de l'individu qu'elle met en évidence.

3.2.4- IMAGE DE SOI EN TANT QU'ELEVE

La dernière variable dont nous allons parler en relation avec la réussite scolaire est l'image que l'enfant a de lui- même en tant qu'élève. Cette image se construit dès la petite enfance et apparaît comme un facteur influençant la structure de la personnalité et du comportement. Les repères qui permettent à l'enfant de construire son image de soi sont différents selon son sexe. Chez les garçons, l'image de soi scolaire davantage influencée par une auto-évaluation plutôt que par l'appréciation des parents, alors que chez la fille, elle est essentiellement liée à l'évaluation des parents.

Certains chercheurs considèrent qu'une image de soi positive est un facteur de réussite scolaire, alors que d'autres l'envisagent comme une conséquence. Pour Purkey (1970), Schreirer & Krant (1979), Bawa (2007), une bonne image de soi permet à l'enfant de réussir à l'école. Gadzella & Williamson (1984) soulignent le fait qu'une bonne estime de soi n'est pas la cause du succès scolaire, mais une qualité personnelle nécessaire pour y avoir accès. Par ailleurs, il est difficile de modifier une mauvaise image de soi. Une foi formée, celle-ci est relativement stable et une expérience ponctuelle de réussite n'entraîne aucun changement à son égard.

L'autre point de vue est celui de Calsyn & Kenny (1977) qui affirment que le concept de soi est déterminé par la performance scolaire. Prêteur & Vial (1998) rapportent une étude de Zanone, Kauer-Tchicaloff & Plancherel (1988) qui affiche d'autres constats. Zanone & al. (1988) comparent l'estime de soi scolaire de trois groupes d'élèves. Deux de ces groupes (un à l'heure, l'autre en retard) sont en classe banale, tandis que le troisième fréquente une classe spécialisée. Les résultats montrent que les deux groupes d'enfants en difficulté scolaire ne se différencient que faiblement du premier groupe. Les différences vont, toutefois, dans le sens d'une estime de soi plus favorable chez les deux groupes d'enfants en échec scolaire. Zanone & al. (1988) expliquent ces résultats par une tendance des élèves en difficulté à surévaluer leurs capacités. Il ne s'agirait pas, de prime abord, d'un mécanisme de défense contre le sentiment d'échec, mais des conséquences liées à la réduction des contraintes scolaires dans les classes spécialisées. En effet, ce sont les enfants qui fréquentent ces classes qui se valorisent le plus.

En 1972, Gilly, Lacour & Meyer constatent que des élèves, âgés de 10 ans réussissant bien à l'école, ont une personnalité plutôt équilibrée, alors que celle des élèves réussissant plus difficilement ne l'est pas toujours. L'adaptation au milieu de la vie scolaire des « bons » et des « mauvais » élèves témoigne de cet équilibre. Le fait que le « bon » élève se sente bien perçu par l'entourage renforce positivement l'image qu'il se fait de lui-même et s'annonce, selon Gilly et ses collaborateurs (1972), comme un pronostic favorable pour son adaptation ultérieure. A l'inverse, le « mauvais » élève se représente d'une façon moins pondérée, ce qui contribue à entretenir un doute sur sa valeur personnelle, et laisse envisager une adaptation future difficile. Le rôle du maître est majeur dans la mesure où l'adaptation de celui-ci est directement reliée à l'évaluation que l'élève peut faire de lui-même.

3.3- FACTEURS LIES A L'INSTITUTION SCOLAIRE

Plusieurs facteurs sont liés à l'enseignant et à l'organisation même de l'école dans la détermination de la réussite ou l'échec scolaire.

Le premier, qui peut être conçu comme préalable au second, est composé des "a priori" et des attentes de l'enseignant envers l'élève. Le second est constitué des attitudes du maître envers l'élève et de celles de l'enfant envers l'enseignant.

En ce qui concerne les "a priori" du maître envers l'élève, il est classique de rappeler l'impact de l'Effet Pygmalion sur les performances scolaires de l'élève et de dénoncer les conséquences néfastes qu'il peut entraîner dans certains contextes.

Rosenthal & Jacobson (1971) dévoilent ce phénomène dans le milieu scolaire lors d'un travail original effectué sur les conduites du maître envers ses élèves. Il constate qu'avant même qu'un maître ait observé un élève aux prises avec un devoir scolaire, il a déjà un préjugé sur son comportement. Si on lui affecte un groupe d'élèves lents, ou encore dont les mères sont des cas sociaux, il s'attendra à d'autres résultats scolaires que si on lui affecte un groupe d'enfants en avance ou de milieux aisés. Rosenthal & Jacobson (1971) démontrent que la croyance du maître concernant les performances d'un enfant peut conduire à leur réalisation, car l'enfant finit par se conformer à la représentation que le maître a de lui. Roosvoal & Zapata (2001) sont de même avis lorsqu'ils estime que l'enseignant sans l'effet de son statut social et de son histoire, se construit une représentation sociale de l'écolier idéal et / ou de mauvais qui se traduit en attente et que celles-ci vont moduler leurs interactions et agir sur la qualité des performances scolaires.

Quant à Perrenoud (1984 ; 1992), il montre que la situation pédagogique est assujettie à un certain nombre de contraintes liées au moment au cours duquel elle se déroule : lieu, temps de l'activité, le temps imparti pour l'exécution d'une tâche, la gestion et l'organisation pédagogique, et les contraintes du programme. Elles influencent le réseau de communication instauré par l'enseignant et les stratégies d'apprentissage des élèves.

L'inexpérience et la sous-qualification professionnelle des enseignants (Kougblenou, 1995), les effectifs pléthoriques des classes, l'insuffisance d'équipement, de matériels didactiques et manuels scolaires, la faiblesse de l'encadrement des élèves par les maîtres, le manque de motivation des enseignants (Lawson, 1997) sont aussi accusés d'être à l'origine des mauvaises performances. Heynaman (cité par Gokounous, 2000, P.25) conclut en ces termes : « la réussite dépend de la disponibilité des manuels et autres matériels imprimés... On a relevé une relation de cause à effet entre la disponibilité de manuels et de livres et les bons résultats des étudiants. »

Les travaux de Loubat & Maftouh (1989) et Rousvoal (2000) mettent en évidence l'importance de l'emplacement occupé par l'élève dans l'acquisition des savoirs. Au fur et à mesure que celui-ci s'éloigne de l'enseignant, il y a décroissance de la portée de son message et cela se traduit par une baisse notable des performances scolaires entre les élèves du devant et ceux du fond de la classe.

D'avance, nous tenons à préciser que la liste des différents facteurs n'est pas exhaustive. Tout compte fait, c'est aucun des facteurs ne justifie, lui seul, les performances scolaires. Chacun a sa raison d'être selon la situation environnementale dans laquelle se trouve l'élève. Rousvoal & Zapata (2001, P.70) insistent sur le fait que : « la qualité des performances scolaires n'est donc plus simplement liée à des facteurs internes ou externes à l'école ou à l'élève. Elle relève désormais d'un processus interactioniste dont les actions sont co-responsables. » C'est pourquoi, dans le cadre de ce travail, nous allons nous fonder à la fois sur un facteur familial (pratiques éducatives familiales) et un des facteurs individuels (estime de soi) pour expliquer les performances scolaires. En le faisant nous espérons trouver une co-responsabilité des deux sortes de facteurs sur les performances scolaires des adolescents togolais. Dès lors, puisqu'il n'existe pas, nous proposons le modèle impliquant les pratiques éducatives, l'estime de soi et les performances scolaire.

En effet, les parents, en adoptant telle ou telle pratique éducative agissent sur l'adolescent qui voit son estime de soi soit valorisée soit ternie ; cette situation aura une certaine prégnance sur les performances scolaires. Les performances scolaires peuvent aussi avoir des conséquences sur l'estime de soi. Les pratiques éducatives peuvent directement moduler les performances scolaires ; de même que la qualité de ces dernières peut amener les parents à réajuster leurs pratiques éducatives.

Toute cette conception est illustrée par le schéma suivant :

PS

PEF

ES

Modèle interactionniste entre Pratiques Educatives Familiales (PEF), l'Estime de Soi (ES) et Performances Scolaires (PS)

III- LES TRAVAUX ANTERIEURS

La présente étude se propose de mettre en évidence la relation qui pourrait exister entre les pratiques éducatives familiales, l'estime de soi et les performances scolaires chez les adolescents. Pour mieux organiser notre démarche, il parait nécessaire, voire indispensable, de faire l'état de travaux qui ont un rapport plus ou moins étroit avec le présent travail. A cet effet, nous organisons les quelques travaux qui sont à notre suffrage, selon trois axes :

- les pratiques éducatives familiales et les performances scolaires,

- l'estime de soi et les performances scolaires,

- les pratiques éducatives familiales, l'estime de soi et les performances scolaires.

1- TRAVAUX ANTERIEURS SUR LES PRATIQUES EDUCATIVES

FAMILIALES

Les études sur l'environnement familial et le développement ont surtout porté sur les facteurs de cet environnement qui affectent le développement cognitif et social du jeune enfant. Pour certains auteurs, les performances scolaires et sociales font parti du développement cognitif. Ainsi, nous allons présenter quelques une des conclusions issues des travaux portant sur la relation entre les pratiques éducatives familiales et le développement cognitif et les pratiques éducatives familiales et les performances scolaires.

1.1- LES PRATIQUES EDUCATIVES FAMILIALES ET LE

DEVELOPPEMENT COGNITIF

Lautrey (1980) essaie de mettre en relation la structuration de milieu familial et le développement cognitif. Le milieu familial est, dans cette recherche, considérée comme une variable intermédiaire entre la classe sociale et l'intelligence.

La structure du milieu familial est évaluée à partir des attitudes et des pratiques éducatives. Pour cela, il a interrogé 1385 familles de garçons âgés de 10 ans appartenant aux trois milieux socioculturels différents afin de cerner la structuration du milieu familial en fonction de valeurs (qualités souhaitées chez un enfant) et principes d'éducation. Il avait effectué auparavant des entretiens approfondis de type semi-directif portant sur soixante dix comportements éducatifs de la vie quotidienne auprès de 50 familles.

Il élabore un questionnaire de quinze items relatifs aux activités quotidiennes de l'enfant : repas, jeux, qualités souhaitées chez l'enfant, principes et valeurs d'éducation. Le développement cognitif de l'enfant est mesuré à l'aide de quatre tests composites d'intelligence. Le milieu peut présenter un degré de structuration plus ou moins élevé. Cela lui a permis de distinguer trois styles éducatifs familiaux en fonction de leur structuration :

- structuration faible : pas de règles ;

- structuration souple : une règle existe, mais elle peut être modulée selon les circonstances ;

- structuration rigide : une règle existe, mais elle est systématiquement appliquée sans tenir compte des circonstances.

A terme, il constate que :

- plus la profession du père se situe en haut de la hiérarchie sociale, plus le type de structuration de l'environnement familial tend à être souple;

- les familles dont la mère a fait des études supérieures sont structurées d'une façon plus souple que les familles dont le niveau d'études de la mère est bas ;

- les règles des familles nombreuses sont plus rigides que celles des familles

moins nombreuses.

- une structuration souple du milieu familial est associée à une meilleure réussite aux épreuves cognitives et à une avance développementale.

Tape (1987), pour sa part, a voulu comparer les pratiques éducatives des parents en milieu urbain et en milieu rural. Il considère la structure de la famille comme variable intermédiaire entre les différences de milieu socio-culturel (milieu urbain et milieu rural) et les différences développement des opérations formelles.

La structuration de la famille a été définie à partir des réponses d'adolescents ivoiriens de 12 à 16 ans à un questionnaire inspiré de celui de Lautrey (1980), mais adapté aux particularités culturelles de la population ivoirienne. Les épreuve de passation individuelle de Piaget (1972), sur la pensée formelle : permutation, pendule, flexibilité des tiges, ont servi à évaluer les capacité de raisonnement expérimentale des adolescents. Il s'aperçoit que :

- Le type de structuration de l'environnement familial souple se développe plus fréquemment dans les familles du milieu urbain, tandis que le type de structuration de l'environnement familial rigide est fréquent dans les familles du milieu rural. Ce résultat se rapporte de celui de Lautrey (1980) ;

- Par rapport à la réussite aux épreuves, il trouve que les adolescents issus de familles à structuration souple réussissent mieux que ceux des familles à structuration faible et rigide. Cette relation s'observe aussi bien dans le milieu rural que dans le milieu urbain.

1.2- LES PRATIQUES EDUCATIVES FAMILIALES ET

LES PERFORMENCES SCOLAIRES

Pourtois (1979) s'est intéressé au rôle de la mère dans l'éducation du jeune enfant car, selon lui, c'est la mère qui établit la relation éducative la plus intense avec l'enfant. Il n'ignore pas pourtant que c'est la vie du couple qui alimente et organise la vie de l'enfant.

A partir de l'observation des mères dans le foyer, Pourtois (1979) a essayé de cerner les éléments d'épanouissement que les mères offrent à l'enfant et le pouvoir créateur qu'elles peuvent avoir sur lui. L'observation des comportements des mères s'est faite au cours de l'enseignement d'une tâche.

Les conduites et les styles des mères sont mis en relation avec leurs traits de personnalité, leur origine sociale, leur niveau d'études ou niveau de culture d'une part, avec le développement intellectuel de l'enfant et son adaptation scolaire d'autre part. Le développement est mesuré à l'aide de l'échelle de Weschler. Quant à l'adaptation scolaire, elle a été déterminée par le rendement en lecture, en calcul et par le bulletin scolaire de l'enfant.

A terme, il constate que plus le statut social de la famille est élevé, plus on rencontre des enfants réalisant de meilleures performances intellectuelles ou scolaires, et des mères qui permettent à leurs enfants de travailler à un rythme personnel, offrant davantage d'encouragements et des propositions de structuration sur la manière de recherche d'une solution. A l'inverse, plus le statut social de la famille est bas, plus on rencontre des enfants de performances intellectuelles ou scolaires moins bonnes, et des mères interventionnistes qui enlèvent souvent à l'enfant l'occasion de résoudre lui-même les problèmes. Ces mères ont tendance à être plus sévères, plus irritables et plus primitives.

Les mères des milieux favorisés présentent de bonnes qualités intellectuelle et des attitudes éducatives orientées vers l'acceptation, le tolérance et le détachement. Elle tiennent compte des capacités de l'enfant et suscitent chez lui un apprentissage autonome. Tandis que les mères de milieux défavorisés possèdent de faibles potentialités intellectuelles ; ces mères n'ont pas confiance en l'enfant, ce qui fait qu'elles exercent un contrôle exagéré sur lui.

Dans son investigation Aubret (1979) a essayé de mettre en relation le niveau social des parents, leurs pratiques éducatives et les performances scolaires et intellectuelles de l'enfant. Il s'efforce, à l'instar de Lautrey (1980) a montré que les pratiques éducatives peuvent constituer une variable intermédiaire entre le niveau social de la famille et le développement cognitif de l'enfant.

A l'aide d'un questionnaire adressé aux parents, Aubret évalue le niveau social de la famille et les pratiques éducatives. Le développement intellectuel est évalué par le calcul du QI. Quant à l'évaluation du niveau scolaire de cheque enfant, elle est réalisée par l'intermédiaire de l'enseignant.

Après une analyse statistique, Aubret (1979) aboutit aux conclusions suivantes :

- les enfants se classent d'autant mieux au test et à l'école quand leurs parents ont un meilleur niveau professionnel et un meilleur niveau d'études essentiellement, mais aussi lorsqu'ils appartiennent à des familles plus réduites et vivent dans des logements où l'on est plus à l'aise. Ainsi, la qualité des performances intellectuelle et scolaire augment quand le niveau d'apprentissage social s'élève.

- Il existe un lien réel entre les performances scolaire et intellectuelle et les pratiques éducatives.

Une étude camerounaise effectuée par Ntjam (2005) tente de vérifier l'influence du milieu socio-culturel sur l'adaptation scolaire de l'enfant de 6 ans issus de "familles biculturelles" camerounaises.

Ntjam (2005) se dit que les différences culturelles au sein d'une même société ont une influence sur l'adaptation scolaire des enfants. C'est pourquoi, cette étude s'est focalisée sur les relations entre la structuration de la vie familiale, les pratiques parentales et l'adaptation scolaire des enfants de 6 ans observés à l'école maternelle.

Elle définit les différents types de structuration de la vie familiale en prenant en vue le modèle de Piaget (cité par Lautrey, 1980) comme cadre de référence.

Afin de répondre à la question « comment les pratiques éducatives des parents dans les familles "biculturelles" sont associées à l'adaptation scolaire ? », elle approche 20 enfants de 6 ans des deux sexes de la ville de Douala.

- Les pratiques éducatives parentales influencent l'adaptation scolaire des enfants.

- Plus les pratiques éducatives tendent à être souples parce que venant des familles "mono-culturelles", plus l'enfant est communicatif et coopératif.

- Plus les pratiques éducatives tendent à être aléatoires et souples, plus les enfants sont agressifs et s'opposent à tout contact.

Deslandes & Cloutier (2005) se fixent comme but d'identifier les contextes susceptibles de rendre les adolescents plus à risque en terme de réussite scolaire. Parmi les indicateurs de la réussite scolaire examinés, figurent les résultats et aspirations scolaires, le temps consacré aux devoirs et l'autonomie de l'élève. Les pratiques éducatives sont étudiées sous l'angle des pratiques parentales dites de base (style parental) et pratiques reliées au suivi scolaire. Les données ont été recueillies en 2ème secondaire (moyenne d'âge 14,5 ans) puis en 3ème et 4ème secondaire, auprès de 518 adolescents (282 filles, 216 garçons, 24% de familles non traditionnelles).

Les résultats obtenus mettent en évidence la plus grande vulnérabilité des élèves de 2ème secondaire (Moyenne d'âge 14,5) issus de familles non traditionnelles et tout particulièrement es garçons. Pour chacun des niveaux scolaires examinés, les filles conservent leur longueur d'avance sur plusieurs indicateurs de la réussite scolaire. Selon les perceptions des adolescents, les pères de familles non traditionnelles affichent un style parental davantage permissif tandis que les mères manifestent un axe mère-fille à partir de la 3ème année du secondaire (moyenne d'âge 15,5 ans) plus que les pères et les mères de familles traditionnelles.

Bergonnier-Dupuy (2005) a voulu juste présenter les grandes orientations de recherche pouvant apporter des informations à propos de l'influence de l'environnement familial sur la scolarisation de l'enfant et de l'adolescent. Ce sont l'analyse des styles éducatifs familiaux, l'analyse de l'accompagnement parental à la scolarité et, pour les plus jeunes , l'étude des pratique éducatives et des interactions parent-enfant liées à l'apprentissage (résolution de problème, interaction langagières, pratiques de lecturisation). La question posée est la suivante : qu'est-ce qui, en fonction de l'âge de l'enfant, dans la socialisation et l'éducation familiales, de façon directe ou indirecte, favorise la réussite et l'intégration scolaire ou, au contraire, est susceptible d'entraîner des problèmes d'adaptation ?

Les résultats mettent en avant les avantages d'une éducation familiale basée sur l'autonomisation et l'épanouissement de l'enfant. La combinaison de la disponibilité affective et l'encouragement à l'autonomie a toujours un effet favorable sur les comportements de l'enfant et sur ses résultats aux évaluations, notamment à l'école.

En définitive, cette présentation, de ces quelques travaux qui sont à notre suffrage, nous a permis d'apprécier les différentes manières d'aborder l'étude des pratiques éducatives familiales et surtout de découvrir les différents facteurs susceptibles de les influencer. C'est pourquoi, nous allons étudier les pratiques éducatives familiales selon les facteurs tels que la forme ou structure et le taille de la famille, le niveau d'études et la classe sociale des parents, enfin le sexe des adolescents.

Ensuite, nous constatons que ces travaux sont essentiellement effectués en occident. Malheureusement, ils ne ce sont pas intéressés aux adolescents mais plutôt aux enfants. Les adolescents restent nous notre préoccupation. Alors que, certains chercheurs ont utilisé la méthode d'observation directe (Pourtois, 1979), d'autres par contre ont utilisé la méthode d'observation indirecte (Aubret, 1979 ; Tape, 1987 ; Deslendes & Cloutier, 2005 ; Ntjam, 2005). Lautrey (1980), lui, a utilisé les deux méthodes à la fois. Pour notre part, nous allons adopter les deux méthodes à la fois comme Lautrey (1980). Nous exposerons les raisons de ce choix dans la partie : méthodologie de la recherche, chapitre : méthode et techniques de collecte des données.

2- TRAVAUX ANTERIEURS SUR L'ESTIME DE SOI ET LES

PERFORMANCES SCOLAIRES

L'analyse des travaux, mettant en jeu l'estime de soi et les performances scolaires, nous fait distinguer deux axes de recherches.

Le premier estime que « le concept de soi est déterminé par la performance scolaire » (Muller & al, 1988, P. 343). Ces recherches ont abordé le concept de soi comme la conséquence de la qualité des performances scolaires.

Le deuxième axe de recherches, par contre, Le deuxième axe de recherches, par contre, s'est développé autour de l'idée que « le concept de soi est une des bases essentielles à partir desquelles l'enfant réussit à l'école » (Muller & al., 1988, P. 53). Dans ce cas, le concept de soi est la cause de la qualité des performances scolaires.

Au juste, qu'est-ce qui est cause ? Qu'est-ce qui est conséquence ? L'estime de soi ou les performances scolaires ? A ce sujet, Pierrehumbert & al., (1988, P. 343) reconnaissent que « dans l'étude des relations entre échec scolaire et image de soi, il est évidemment difficile de distinguer les causes des conséquences. » Il va sans dire que la relation estime de soi et performances scolaires est double et ambivalente :

(1)

Estime de soi Performances scolaires

(2)

« Si l'échec peut vraisemblablement avoir comme conséquence une dépréciation de soi (axe 2), on peut supposer en retour qu'un enfant au départ ayant peu d'estime de lui-même, se trouve désavantagé dans ses apprentissages scolaires (axe 1) » (Pierrehumbert, 1992, P. 199).

Les travaux, que nous allons présenter par la suite, sont en rapport avec l'axe 1 car, pour nous aussi, l'estime de soi est la cause de la qualité des performances scolaires

Dans le champ des études de l'influence de l'estime de soi sur les performances scolaires, les résultats de bon nombre de recherches ont montré qu'il existe une relation significative entre le concept de soi et le rendement scolaire (Bloom, 1966 ; 1979 ; Crohn, 1983 ; Gerardi, 1990 ; Briffore & Parsons, 1983 ; McGuire, Furjioka & McGuire, 1979 ; Skaalvik, 1983 ; Wiggins, Schatz & West, 1994).

Allès-Jardel, Metral et Scopellitti (2000) se sont centrées sur l'influence que pouvaient avoir les pratiques éducatives parentales et l'estime de soi sur la réussite scolaire en sixième, période propice à l'apparition de problèmes d'adaptation. Cette étude a porté sur une population de 96 enfants composés de deux échantillons de 48 élèves de sixième et de leurs parents. Les pratiques éducatives parentales ont été appréhendées au moyen d'un questionnaire inspiré des travaux de Lautrey (1980) qui a permis de distinguer trois types de structuration familiale (souple, rigide et faible). L'estime de soi a été évaluée grâce à l'Inventaire d'Estime de Soi de Coopersmith (1967). Elles ont mis en relation les pratiques éducatives parentales avec le niveau d'estime de soi et la réussite scolaire. Les résultats ont mis en évidence l'existence d'une influence significative des pratiques éducatives parentales sur l'estime de soi non directement sur la réussite scolaire. D'autre part, il apparaît que la réussite scolaire est influencée par le niveau d'estime de soi scolaire ainsi que par certaines variables différentielles (appartenance socioculturelle, niveau d'études de la mère et taille de la famille).

Caille & O'Prey (2006) étudient l'estime de soi et la réussite scolaire sept ans après l'entrée en sixième. En effet, ils constatent que sept ans après l'entrée en sixième, l'estime de soi des jeunes dans les domaines physique, social et de la confiance en soi apparaît relativement affranchie des différences de réussite scolaire et de milieu social. En revanche, les filles présentent une estime de soi nettement plus faible que celle des garçons. L'image que le jeune a de lui-même est aussi sensible à la qualité relationnelle de son environnement : elle est plus forte quand il communique fréquemment avec ses parents ou juge positivement son lycée, notamment en matière de relations entre élèves. Si l'image de soi du jeune est peu influencée par son passé scolaire, sa réussite ultérieure ne semble en revanche pas indépendante de son degré d'estime de soi. Les candidats au baccalauréat général présentent une réussite et une ambition d'autant plus élevées que leur confiance en eux est forte. Une relation inverse apparaît avec l'image de soi sociale, comme si une estime de soi dans ce domaine se forgeait essentiellement avec les exigences de la scolarité.

Dicko (2006) s'intéresse à l'estime de soi et au support social chez 192 pré-adolescents de CM2 en situation d'échec scolaire. Comme hypothèse, il a cherche à vérifier si la situation d'échec scolaire du pré-adolescents est due en partie à une baisse de l'estime de soi. Il utilise l'Inventaire d'Estime de Soi de Coopersmith (1967) pour évaluer l'estime de soi auprès des pré-adolescents. Comme résultat, il se rend compte que l'estime de soi a un impact sur la probabilité d'échouer si et seulement si elle est associée au support social (par effet d'interaction).

Plus récemment, Bawa (2007) s'appesantit, cette fois-ci sur l'étude de l'influence de l'estime de soi sur les performances scolaires chez des adolescents togolais. Pour ce faire, il appréhende l'estime de soi des adolescents à l'aide de l'Inventaire de l'Estime de Soi de Coopersmith (1967), version scolaire, auprès de 48 élèves adolescents de 14, 15 et 16 ans,de toutes les classes socio-profesionnelles et des deux sexe. Quant aux performances scolaires, elles correspondent à la moyenne pondérée des notes obtenues dans toutes les matières au deuxième trimestre de l'année.

Comme résultats, il observe une relation significative entre l'estime de soi et les performances scolaires. Les adolescents qui ont une estime de soi positive ont un fort taux de réussit plus que les adolescents à estime de soi négative. Les adolescents à estime de soi négative sont plus enclins à l'échec scolaire.

Ces quelques travaux nous font constater que l'Inventaire de l'Estime de soi de Coopersmith (1967) est beaucoup utilisé pour évaluer l'estime de soi des enfants et adolescents. Nous allons l'utiliser, pour le compte de ce travail (les raisons sont à voir dans le chapitre méthode et techniques de collecte des données.

3- TRAVAUX ANTERIEURS SUR LES PRATIQUES EDUCATIVES

FAMILIALES, L'ESTIME DE SOI ET LES PERFORMANCES

SCOLAIRES

La littérature présente une carence très notoire de travaux impliquant les rois variables. Le seul travail que nous avons trouvé est celui de Allès-Jardel, Metral & Scopelletti (2000). En effet, elles se sont centrées sur l'étude de l'influence que pouvaient avoir les pratiques éducatives et l'estime de soi sur la réussite des élèves de la classe de sixième, période propice à l'apparition des problèmes d'adaptation.

Cette étude a porté sur une population de 96 enfants composée de deux échantillons de 48 élèves de 6e de deux collèges différents et de leurs parents. Les pratiques éducations parentales ont été appréhendées au moyen d'un questionnaire inspiré des travaux de Lautrey (1980) qui a permis de distinguer trois types de structuration familiale (souple, rigide, et faible). L'estime de soi a été évaluée grâce à l'Inventaire d'Estime de Soi de Coopersmith (1967). Elles sont mis en relation les pratiques éducatives avec le niveau d'estime de soi et la réussite scolaire et se sont intéressées au lien pouvant exister entre ces deux variables elles-mêmes. Enfin, elles ont pris en compte certaines variables différentielles telles que : appartenance socio-culturelle, niveau d'études de la mère, taille de la famille, rang dans la fratrie. Les résultats obtenus mettent en évidence existence d'une influence signification des pratiques éducatives parentales sur l'estime de soi mais non directement sur la réussite scolaire. D'autre part, il apparaît que la réussite scolaire est influencée par le niveau d'estime de soi scolaire ainsi que par certaines variables différentielles (appartenance socio-culturelle, niveau d'études de la mère et taille de la famille).

Une telle étude effectuée en France, n'existe pas au Togo. Allès-Jardel & al. (2000) se sont intéressés aux enfants. Quelle est la situation au niveau des adolescents ? L'absence de réponse à ces inquiétudes nous conforte dans notre intention d'étudier ces trois variables auprès des adolescents togolais. De là, nous formulons les hypothèses ci-dessous.

TROISIEME CHAPITRE : HYPOTHESES, VARIABLES ET OBJECTIFS

DE LA RECHERCHE

I- LES HYPOTHESES DE LA RECHERCHE

1-HYPOTHESE GENERALE

Il existe une relation entre les pratiques éducatives familiales, l'estime de soi et les performances scolaires des adolescents togolais.

2- HYPOTHESE OPERATIONNELLE (HO)

HO: Les adolescents qui jouissent des pratiques éducatives familiales souples ont une estime de soi positive et un taux de réussite supérieur à celui des adolescents qui ont une estime de soi négative à cause des pratiques éducatives familiales rigides ou laxistes qu'ils rencontrent dans leur famille.

II -LES VARIABLES DE LA RECHERCHE

1- LA VARIABLE INDEPENDANTE

La variable indépendante est la variable qui est isolée afin d'examiner la nature de la relation qui pourrait la lier à la variable mesurée. Etudiant donc la relation entre pratiques éducatives familiales, l'estime de soi et les performances scolaires, la variable indépendante, ici, est précisément les pratiques éducatives familiales.

Ayant adopté le modèle de Lautrey (1980), les pratiques éducatives familiales ici se référent aux différents types de structuration de environnement familial. De ce fait, les modalités et indicateurs des pratiques éducatives se présentent comme suit :

v Pratiques éducatives souples :

- L'adolescent discute avec ses parents sur ses choix,

- L'adolescent peut se servir de lames ou aiguilles mais sous la surveillance d'une personne adulte,

- L'adolescent est reproché calmement lorsqu'il désobéit,

- L'adolescent peut jouer en dehors des endroits choisis pour lui.

v Pratiques éducatives rigides :

- Les parents choisissent tout pour l'adolescent,

- Les parents évitent que l'adolescent utilise les aiguilles ou lames,

- Les parents infligent une punition corporelle en cas de désobéissance,

- L'adolescent joue uniquement dans les endroits choisis pour lui.

v Pratiques éducatives laxistes :

- Les parents laissent l'adolescent choisir ce qu'il veut,

- L'adolescent utilise les lames ou aiguilles comme il veut,

- Les parents ne réagissent pas quant l'adolescent désobéit,

- L'adolescent joue n'importe où dans la maison.

2- LES VARIABLES INTERMEDIAIRES

La principale variable intermédiaire est : l'estime de soi.

Ses modalités sont : l'estime de soi positive et l'estime de soi négative.

Nous associerons à l'estime de soi positive les comportements de l'adolescent suivant :

- l'élève ne se fait pas de soucis,

- l'élève prend facilement la parole en classe,

- l'élève a une bonne opinion de lui-même,

- l'élève se sent bien apprécier par les jeunes de son âge,

- l'élève se sent bien à l'aise en classe comme à la maison,

- l'élève est fier de ses résultats.

Par contre, l'estime de soi négative est caractérisée par les comportements tels que :

- l'élève se fait beaucoup de soucis,

- l'élève déteste prendre la parole en classe,

- l'élève est toujours inquiet,

- l'élève se laisse décourager,

- l'élève a le sentiment que ses parents attendent trop de lui,

- l'élève regrette souvent ce qu'il fait.

3- LES VARIABLES DIFFERENTIELLES

Il s'agit de :

§ la structure de la famille :

- famille traditionnelle (famille biparentale),

- famille non traditionnelle (famille monoparentale, famille adoptive)

§ la taille de la famille :

- famille peu nombreuse : au plus 5 enfants

- famille nombreuse : plus de 5 enfants

§ niveau d'étude des parents :

- pas d'études,

- primaire : CP1 au CM2,

- secondaire : 6e en terminale,

- supérieur : université.

§ Classe sociale et professionnelle des parents :

- la classe socio-professionnelle supérieure : cadres supérieurs du public et du privée, gros commerçants,

- la classe socio-professionnelle moyenne : cadres moyens du publics, du privée, commerçants moyens,

- classe socio-professionnelle inférieure : ouvriers, employés, subalternes, petits revendeurs, cultivateurs.

§ Le sexe de l'adolescent peut être celui d'une fille ou d'un garçon.

4- VARIABLE DEPENDANTE

La variable dépendante est celle qui est mesurée et soumise au traitement statistique pour évaluer son lien avec la ou les variables explicatrices (Bawa, 2007). Sa variation serait en relation avec les variations de la variable indépendante.

Pour le compte de ce travail, la variable dépendante est les performances scolaires.

Eu égard à la définition des performances scolaires que nous avons adoptée plus haut, nous considérons que :

- est considéré être en réussite ou avoir réalisé de bonnes performances scolaires, l'adolescent qui obtient une note supérieure ou égale à dix sur vingt au test de performance,

- est considéré être en échec scolaire ou avoir réalisé de mauvaises performances scolaires, l'adolescent qui obtient une note inférieure à dix sur vingt

III- OBJECTIFS DE LA RECHERCHE

1- OBJECTIFS SCIENTIFIQUES

La présente étude vise à :

- identifier les types de pratiques éducatives dans les familles togolaises.

- Rechercher dans les familles togolaises les liens qui pourraient exister entre leurs pratiques éducatives, l'estime de soi et les performances scolaires de leurs adolescents

- Construire un modèle explicatif des performances scolaires en prenant en compte deux variables, dont l'une externe (pratiques éducatives familiales) et l'autre interne (estime de soi) à adolescent.

2- OBJECTIFS D'APPLICATION

Les résultats de cette étude devraient nous permettre de :

- apporter, à la littérature psychologique, des informations qui peuvent concourir à une compréhension des performances scolaires,

- aider les parents à adopter des attitudes et comportements qui contribuent à l'émergence d'une estime de soi positive de leurs adolescents et par conséquent à réussir à l'école,

- amener les adolescents à connaître leurs forces, habilités, qualités, limites personnelles afin de poser un jugement positif sur cette connaissance,

- faire des propositions utiles aux pouvoirs publics, aux parents, enseignants dont l'application effective pourrait aider les adolescents à réaliser de bonnes performances scolaires. Ainsi nous aurions contribué, tant soit peu, à réduire les taux d'échecs au Togo.

DEUXIEME PARTIE

METHODOLOGIE

DE LA RECHERCHE

QUATRIEME CHAPITRE : POPULATION ET ECHANTILLON

I- CADRE DE RECHERCHE

Les collèges publics et confessionnels de la circonscription pédagogique de l'Ogou (Atakpamé) constituent notre cadre de recherche.

Nous ne prenons pas en compte de collèges privés laïcs parce que nous avons observé des biais ou beaucoup de subjectivité dans les évaluations voire dans les décisions de passage des élèves d'une classe à une autre. Par exemple, les élèves avec une moyenne de six sur vingt sont admis en classe supérieure dans ces collèges.

II- POPULATION ET ECHANTILLON D'ETUDE

1- LE MEILLEUR INFORMATEUR : L'ADOLESCENT OU LE PARENT ?

Claes (2004, P.207) trouve pertinent, avant toute chose, de se « poser une question à caractère méthodologique : quel est le meilleur informateur lorsqu'on veut savoir ce qui se passe dans une famille ? Faut-il interroger l'adolescent ou le parent ? »

La plupart des travaux qui interrogent à la fois les parents et les adolescents observent des écarts relativement importants entre les perceptions des parents et des adolescents (Hartos & Power, 2000). Ces écarts ont, cependant, quelque chose de systématique : les parents ont tendance à valoriser leurs fonctions telles que le soutien d'affection et de communication positivement et prétendent, par exemple : qu'ils parlent à leurs adolescents et se préoccupent de leur bien-être, alors que les adolescents se montrent sensiblement plus critiques sur ces questions (Hartos et Power, 2000, Noller et Callan, 1991). Les adolescents s'attachent aux aspects plus problématiques des relations ; ils identifient plus de conflits que les parents et les amplifient. Chacun est sans doute responsable d'une partie de cette distorsion. Les parents investissent profondément leur rôle et estiment généralement qu'ils offrent suffisamment d'affection, mais tel n'est pas l'avis des jeunes qui revendiquent plus d'attention et de compréhension. Engagés dans une marche de prise d'autonomie, les adolescents ont tendance à dénoncer les obstacles et refus parentaux, alors que les parents déclarent exercer convenablement leur rôle, en fixant des règles et en imposant des limites (Cloutier & Goteau, 1987).

Certains travaux laissent, toutefois, entendre que les adolescents seraient les meilleurs informateurs de la réalité familiale. Pour Kagan (1984), deux raisons sous-tendent l'importance de considérer le point de vue de l'enfant, de l'adolescent. D'une part, cela permet de limiter l'effet de la désirabilité sociale inhérente aux propos des parents, d'autre part, obtenir des informations sur ce que pensent les enfants et adolescents. Ainsi, l'on pourrait saisir non seulement la manière dont ils identifient les pratiques éducatives familiales en place et le projet familial les concernant mais aussi leur appropriation et leur intériorisation du projet de vie envisagé. Car, comme les parents s'impliquent intensément dans leur rôle, ils ont tendance à surévaluer les fonctions positives de leurs actions et à minimiser les problèmes, voire les nier.

Sur ce, nous allons, pour le compte de ce travail, recueillir les avis sur les pratiques éducatives familiales auprès des adolescents car le tableau dressé par les adolescents est plus fidèle à la réalité familiale que celui des parents (Claes, Lacourse, Bouchard, 1998 ; Noller, 1994).

2- POPULATION D'ETUDE : LES ADOLESCENTS

Le terme `'adolescent'' n'est entré dans le langage courant qu'à la fin du 19è siècle, et c'est dans les années quarante qu'il est devenu populaire. Cela dit, l'étymologie du terme remonte à l'Antiquité, puisqu'il est composé de la racine latine `'adolescere'' qui, au participe présent, s'écrit `'adolescens'' et signifie `'en train de grandir'', et au participe passé `'adultus'' ou `'qui a fini de grandir''.

Aujourd'hui, définir l'adolescent, ses critères et ses limites d'âge ne fait pas l'unanimité parmi les chercheurs.

Le premier ouvrage de psychologie scientifique sur l'adolescent a été publié en 1904, aux USA, par Hall. Pour lui, l'adolescence constitue immanquablement une période tumultueuse, proie au stress et au conflit, où dominent l'instabilité, la fougue et la loi des contradictions. Si cette période est dominée par des émotions négatives, elle est également porteuse de promesse pour l'espèce humaine, car l'adolescence constitue le ferment des changements qui vont se transmettre à l'espèce humaine et permettre la naissance de l'homme nouveau (Gaonac'h & Golder, 1995).

Se référant aux transformations physiologiques qui surviennent à cette période, l'adolescence est généralement entendue comme la période de vie qui s'étend de la puberté à l'âge adulte (Audétat & Voirol, 1997). Cette période de la vie est caractérisée par des transformations qui marquent le passage de l'enfance à la maturité du point de vue biologique.

Ces transformations éveillent des intérêts et des émotions. Elles provoquent inquiétudes et une hypersensibilité à l'apparence physique.

Selon Claes (1993), les transformations physiologiques et les remaniements du schéma corporel apparaissent comme le point de départ de la crise pubertaire, et provoquent un sentiment de changement chez l'adolescent. Pour s'affirmer à la fin de sa construction identitaire, l'adolescent choisit de s'opposer aux autres. Les parents sont les premières victimes. La famille, telle que perçue par l'adolescent, se caractérise par des rapports contradictoires de coopération et d'opposition. L'opposition peut s'exprimer sous des formes différentes : opposition ouverte ou agression chez les garçons, résistance plus discrète mais néanmoins résolue chez les filles. Cette opposition se prolonge à l'école vis-à-vis des enseignants.

Sur le plan cognitif, de nouvelles possibilités de pensée prennent la place des `'opérations concrètes'' : la pensée formelle. Celle-ci permet à l'adolescent de réfléchir sur des situations abstraites, détachées des objets concrets. Ceci donne lieu à de nombreuses interrogations du type `'qui suis-je ?'', `'pourquoi suis-je ici ?''. La pensée formelle domine donc à ce stade du développement, et on assiste à une augmentation des périodes de réflexion ou de rêverie (Bazilashe & al., 1995).

Par ailleurs, les études de Simmons & Rosenberg (1968) auprès de 1917 enfants et adolescents américains répartis en trois groupes d'âges (huit - onze ans / douze-quatorze ans / quinze ans et plus) ont montré que l'image positive de soi décline au début de l'adolescence (groupe de douze-quatorze ans) pour se stabiliser, voire s'améliorer par la suite.

Dolto (1988) fait remarquer que l'adolescent se montre vulnérable aux remarques dépréciatives émanant d'autres adultes qui ont pour rôle d'encadrer les jeunes. Au cours de cette mutation, il reproduit une fragilité du bébé qui naît, extrêmement sensible à ce qu'il reçoit comme regard et entend comme propos le concernant. L'auteur affirme que si les adolescents sont blessés affectivement au cours de cette période de vulnérabilité, ils en portent les cicatrices pour toujours. Dolto (1988) souligne le rôle très important que peuvent jouer `'les personnes latérales'' (enseignants, animateurs de groupes de jeunes) pour les fortifier, c'est-à-dire favoriser la confiance en soi, le dépassement du sentiment d'impuissance et de découragement. D'où notre intérêt pour cette période de la vie. Mais en fait, quelles sont les étapes de cette période de vie ?

Selon Débesse (1960), on peut distinguer la prime adolescence de la grande enfance. En d'autres termes l'adolescence pubertaire, de la 12è et à la 16è année, où dominent les transformations organiques, et l'adolescence juvénile de la 16è à la 20è année, où les apprentissages sociaux et culturels passent au premier plan.

Pour Gaonac'h & Golder (1995, P.197), « l'adolescence commence vers 11 ans et se clôture vers 20 ans, lorsque l'individu a réalisé les tâches de l'adolescence et s'engage dans les préoccupations de la vie de jeune adulte. L'adolescence occupe donc un espace de vie important qui recouvre pratiquement toute la seconde décennie de l'existence humaine ». il va jusqu'à proposer des étapes de l'adolescence qui sont :

- 11 à 14 ans : début de l'adolescence dominée par les changements pubertaires, période de transition dans le cours de l'existence,

- 15 à 17 ans : adolescence moyenne caractérisée par les modifications de la vie sociale : se détacher de la zone d'influence familiale pour établir de nouveaux lien avec les pairs

- 18 à 20-21 ans : caractérisée par la consolidation de l'identité et l'engagement dans les perspectives d'avenir.

Audétat et Voirol (1997) admettent que généralement l'adolescence commence aux alentours de 12 ans et se poursuit jusqu'aux environs 18-20 ans, quand les principales transformations biologiques, psychologiques, et sociales sont accomplies.

Quant à Claes (2001), la période de l'adolescence se situe entre 12 et 18 ans.

Quel que soit le découpage, Dolto (1988) pense que c'est entre 14 et 16 ans que l'estime de soi des adolescents est très sensible aux influences, et les difficultés des échanges entre les adolescents et les adultes sont très nettes et plus nombreuses.

Pour cette raison, notre échantillon comprendra les adolescents de 14 à 16 ans fréquentant les collèges privées confessionnels de la commune d'Atakpamé et leurs familles. Les réalités du terrain nous permettront de connaître et son effectif et ses caractéristiques avec précision.

CHAPITRE CINQUIEME : METHODE DE COLLECTE ET D'ANALYSE

DES DONNEES

I- METHODE ET TECHNIQUE DE COLLECTE DES DONNEES

1- METHODES DE MESURE DES PRATIQUES EDUCATIVES

FAMILIALES

Identifier les pratiques éducatives, c'est évaluer la vie quotidienne d'une famille. Cela pose de délicats problèmes. Les parents se sentent profondément mis en cause par des questions relatives à leur vie familiale; spécialement par celles qui touchent à l'éducation de leurs enfants. Ils peuvent ressentir ces questions comme une attente à une vie privée de plus en plus menacée ;  « Dans ce contexte l'observation à visée scientifique est un traitement à bande rouge, à manipuler avec d'infinies précaution » (Lautrey 1980, P 81). Toute une gamme de techniques d'observation ont été mises au point à l'occasion des recherches sur les pratiques éducatives familiales.

1.1-L'OBSERVATION DIRECTE.

Elle peut se faire en milieu naturel ou en laboratoire. En milieu naturel, un ou plusieurs observateurs passent une demi-journée dans chaque famille, et notent les faits dont ils sont témoins. Les parents sont en général priés de faire si l'observateur n'était pas là. Au laboratoire, les enfants et les parents sont placés dans une situation d'interaction, hors du milieu habituel, et l'observateur note leurs comportements.

1.2- L'OBSERVATION INDIRECTE

Cette méthode utilise deux techniques à savoir : l'interview et le questionnaire.

Au cours de l'interview, on peut demander aux parents de décrire eux-mêmes leurs pratiques éducatives. Les questions peuvent porter sur les comportements actuels, ou faire appel au souvenir.

Par questionnaire, on peut demander aux parents d'exprimer leur degré d'accord ou de désaccord avec des affirmations relatives à l'éducation des enfants ou d'estimer eux-mêmes leurs positions sur une échelle de comportement.

En fait, quelle que soit, la méthode considérée, chacune a ses faiblesses. L'observation directe exige énormément de temps, de moyen matériel et les données recueillies sont sujettes de biais à cause de la présence de l'observateur même placé derrière une glace sans tain. L'observation indirecte, quant à elle, souffre de problème de sincérité de celui qui répond (au questionnaire) ou de déformation consciente ou inconsciente de l'interviewé des faits qu'il rapporte (avec interview).

Cependant, laquelle de ces méthodes est plus valable que l'autre ? Autrement dit, l'une d'entre elle reflète-t-elle plus fidèlement que l'autre les caractéristiques réelles du milieu familial ?

Pour Lautrey (1980, P.83), « personne ne sait répondre à cette question ». Car « la faiblesse commune à toutes ces méthodes d'observation est l'impuissance à éliminer les effets parasites de la désirabilité sociale (tendance à adopter devant les autres les comportements supposés conformes à leur attente) ». Cette désirabilité sociale retient les parents de se comporter comme d'habitude en présence d'un observateur. Que faire alors ? La solution serait alors de combiner à la fois l'entretien au questionnaire adressé à la fais aux parents et aux enfants. Mais Lautrey (1980, P.84) pense que, en le faisant, « les recoupements entre les différents approches pourront fournir quelques indications sur la validité des observation, mais ne permettent cependant pas de résoudre le problème au fond ». La solution, c'est que « lorsque les faits observés sont confrontés à ce que la théorie permettait d'atteindre, cela constitue à la fais une validation de la méthode d'observation et du cadre théorique dont sont issues les hypothèses ». A partir de ce moment, nous adoptons, dans le cadre du présent travail, la méthode d'observation indirecte (questionnaire et interview ou entretien) tournée vers les adolescents. Nous allons nous inspirer du questionnaire de Lautrey (1980) pour élaborer un questionnaire adapté aux réalités de notre population d'études.

2- METHODES DE MESURE DE L'ESTIME DE SOI

L'estime de soi est une fonction psychologique. Elle ne peut être évaluée qu'à travers des tests psychologiques. Ces tests sont des tâches dont la réalisation traduit la manifestation de cette fonction. Ceci dit, nous allons donc utiliser une épreuve psychologique pour mesurer l'estime de soi en particulier l'Inventaire d'Estime de Soi de Coopersmith.

3- METHODE DE MESURE DES PERFORMANCES SCOLAIRES

Face à nombreux biais qui interviennent dans le processus d'évaluation que nous avons notés plus haut, nous allons construire un test de performances scolaires adapté à notre population. Nous le ferons en collaboration avec les inspecteurs et les enseignants sur le terrain.

Nous prendrons soins au cours de la pré-enquête à étudier toutes les qualités métrologiques (validité, fidélité, sensibilité) de cet instrument. Pour éviter une interférence de la personnalité des professeurs dans la note, nous prendrons soin de corriger en personnes les réponses des enfants.

II- PRESENTATION DES INSTRUMENTS DE RECHERCHE

1-LES QUESTIONNAIRES

1.1- A PROPOS DES PRATIQUES EDUCATIVES FAMILIALES

En éducation familiale, les difficultés pour appréhender les pratiques éducatives familiales existent. C'est ce qui fait dire qu' « il est certainement utopique d'espérer pouvoir décrire tous les aspects et toutes les variétés des modalités éducatives qui s'exercent au foyer et, sans doute l'infinie richesse des comportements et des interactions éducatives ne se laissera-elle jamais cerne par des mesures simples » (Pourtois, 1979, P.30). Pour cela, De Landsheere (1973, P13) trouve que : « l'ambition de la recherche doit être autre : trouver les signaux, des grands symptômes, des indications permettent de se faire une idée de ce qui se passe réellement ».

Dans la littérature, on trouve deux principales approches méthodologiques ou questionnaires les plus élaborer pour mesurer les pratiques éducatives familiales. Toutefois, elles ne prétendent pas faire le tour de toutes les procédures employées pour l'évaluation de l'environnement familial et des pratiques parentales d'éducation, « cependant, elles représentent les deux outils les plus utilisés actuellement » (Allès-Jardel, 1995, P.45).

Il s'agit des questionnaires de Lautrey (1980) et de Palacio-Quintin & Lavoie (1986).

Le questionnaire de Lautrey (1980) reste une référence dans la plupart des travaux francophones sur la relation entre les pratiques éducatives, le milieu social et l'intelligence (Allès-Jardel, 1995). Il permet de définir différents types de structuration familiale.

Palacio-Quintin & Lavoie (1986) se sont inspirés de Lautrey (1980) pour élaborer le Q.S.E.P : Questionnaire sur la Structuration Educative Parentale, version préscolaire. Par rapport à celui de Lautrey (1980) des questions ont été reformulées d'autres réélaborées afin de pouvoir l'appliquer aux parents d'enfants de quatre ans. Il est composé de dix-neuf items et chaque item présente trois énoncés en ordre aléatoire correspondant aux structurations définies (rigide, souple ou faible). Le père et / ou la mère doivent choisir celui qui correspond le mieux à ses habitudes éducatives.

Le questionnaire de Palacio-Quintin & Lavoie (1986) s'applique aux préscolaires. Donc, c'est celui de Lautrey (1980) qui nous paraît pertinent d'être retenu. Mais nous n'allons pas en faire une utilisation "aveugle" à la lettre. Même Palacio-Quintin & Lavoie (1986) ont tenu compte des caractéristiques culturelles de la population québécoise parce que « les objectifs éducatifs, les altitudes et pratiques éducatives parentales évoluent ou se manifestent différemment en fonction de l'appartenance à un groupe socio-culturel donné, en fonction de la personnalité des parents, de l'âge de l'enfant ou parfois même du sexe de celui-ci ». (Allès-Jardel, 1995, P.38). Dés lors, nous avons essayé d'élaborer un questionnaire à partir de celui de Lautrey (1980) en prenant en compte de la spécificité culturelle de notre population, celle des adolescents togolais et leurs parents de la commune d'Atakpamé. A l'instar de Palacio-Quintin & Lavoie (1986) nous avons reformulé, réélaboré, voire même, supprimé certaines questions de Lautrey (1980). Les questions adressées aux adolescents invitent les adolescents à se prononcent sur les pratiques de leurs parents. Elles sont formulées en terme de perception.

Nous présentons le questionnaire de Lautrey (1980) (Annexe I) et son adaptation aux adolescents (Annexe II).

Le questionnaire adressé aux adolescents comprend deux parties :

- La partie (I) renferme les renseignements généraux relatifs à l'adolescent et aux parents;

- La partie (II) contient les questions sur les pratiques éducatives familiales avec des propositions de réponses. L'adolescent ne fait que choisir parmi les réponses proposées. (Voir Annexes).

1.2- A PROPOS DE L'ESTIME DE SOI

L'étude de la littérature, concernant les différents instruments de mesure du concept de soi, laisse apparaître que les questionnaires sont des instruments les plus fréquemment employés. Ces questionnaires déterminent le degré de satisfaction de soi de façon générale (questionnaire de Coopersmith (1967)) ou en fonction des compétences spécifiques (questionnaire de Harter (1998), l'ETES : Echelle Toulousaine d'Estime de Soi). C'est donc dire que mesurer l'estime de soi revient ou à mesurer l'estime de soi globale ou à prendre en compte l'aspect multidimensionnel en découpant en domaines. Selon Tap (1998, P.27), « la personne a des identités multiples, chacune associée à un rôle (de sexe, d'âge, scolaire, familial, professionnel) à des pratiques et des lieux de vie. » Harter (cité par Pierrehumbert, 1992, P.181) adopte à peu près ce point de vue lorsqu'elle déclare que : « l'estime de soi ne constitue pas un objet psychologique unique : ce concept renverrait au contraire à une multiplicité de perceptions, relatives à différents domaines de l'expérience quotidienne, où l'individu est confronté à ses propres capacités, ses propres compétences d'où la notion de SPP : Self Perception Profile. »

Ce qui est mis en question dans la mesure de l'estime de soi, concerne l'honnêteté de l'individu qui s'évalue en fonction du contexte dans lequel intervient cette mesure : qui fait passer ce questionnaire ? Dans quel lieu cela se déroule-t-il ? Peut-on considérer les résultats d'une telle introspection comme fiables ? Il paraît très évident à Pierrehumbert (1992, P.182) de poser ces inquiétudes, car : « il faut reconnaître qu'il est difficile de savoir si l'enfant exprime, au travers de ces questionnaires, ce qu'il ressent vraiment sans qu'un désir d'apparaître favorablement aux autres ne vienne biaiser ses réponses.» Ainsi se pose le problème de désirabilité sociale (tendance à adopter, en présence des autres, les comportements supposés conformes à leur attente). Face à ce problème, Pierrehumbert (1987, P.300) pense que : « l'estime de soi évaluée par un questionnaire consiste avant tout en une image, image que le sujet veut bien présenter aux autres, probablement en compromis avec les sentiments plus intimes, et qui échappent au questionnaire. Mais elle est malgré tout, une image et à ce titre, avec toutes les précautions qui s'imposent, elle mérite un examen critique. »

Toutes ces observations parce que « nous admettons [...] et il est important de le noter avant d'examiner les données, que ce type de questionnaire pose des problèmes de méthodes » (Pierrehumbert, 1992, P.182).

Quant à nous, nous privilégions un instrument anglo-saxon traduit, adapté puis validé par le Centre de Psychologie Appliquée (CPA) en 1984 en France, puisqu'il fait une grande place au domaine scolaire. Il s'agit de l'Inventaire de l'Estime de soi de Coopersmith (SEI). Ce choix est motivé par le fait que le SEI est une mesure directe dont la fidélité et la validité ont été testées sur des enfants et adolescents français de 12 à 24 ans. Elle est, eu égard aux résultats déjà recueillis, particulièrement adapté aux études de l'estime de soi à l'école. En plus, cette échelle a été élaborée pour comparer des individus selon leurs expériences, leur sexe et les aspects fixant les rôles sociaux. A voir les étapes de sa construction et les items qui la composent, elle peut être appliquée à n'importe quelle population scolaire, quitte à en dégager des tendances qui lui sont propres. Enfin, les résultats à cette échelle peuvent être appréciés en termes d'estime de soi valorisée ou dévalorisée, car nous avons des items négatifs et des items positifs.

Toutefois, nous prendrons soin, avant de l'utiliser de vérifier, au cours de la pré-enquête, la consistance interne des items et sa stabilité d'une part, et voir s'il présente une bonne validité de contenu, c'est-à-dire s'il mesure les facteurs reconnus pour l'influence de l'expérience scolaire, d'autre part.

1.2.1- DESCRIPTION DE L'INVENTAIRE D'ESTIME DE SOI

DE COOPERSMITH (LE SEI)

Le SEI s'inscrit dans le souci actuel d'approfondir les recherches concernant la structure et le développement de la personnalité, la crédibilité, le fonctionnement cognitif et les comparaisons entre les groupes sociaux ou spécifiques. Ainsi, on pourrait, par exemple, mieux comprendre les attitudes ou les conduites passagères ou permanentes adoptées par les individus dans diverses situations.

Selon Coopersmith (cité par le CPA, 1984, P.10) « le terme estime de soi renvoie au jugement que les individus portent sur eux-mêmes, quelles que soient les circonstances. C'est, en ce sens, une expression de l'assurance avec laquelle un individu croit en ses capacités de réussite, en sa valeur sociale et personnelle, qui se traduit par les attitudes adoptées face à des situations de la vie courante (vie sociale, familiale et professionnelle). »

Le SEI a donc été élaboré pour fournir une mesure fidèle et valide de l'estime de soi. Il comprend deux formes : la forme adulte et la forme scolaire.

La forme adulte s'applique à des personnes insérées dans la vie professionnelle, sociale et familiale qui est habituellement celle de l'adulte.

La forme scolaire s'applique à des enfants et adolescents scolarisés. C'est elle que nous avons retenue pour le présent travail (Annexe IV).

Elle comprend deux parties :

- la partie (I) : le sujet fournit les informations relatives à son nom, prénoms, âge, sexe, classe, nom, à la profession du père, de la mère ou du tuteur et l'adresse de l'établissement fréquenté puis la date de l'examen.

- la partie (II) comprend les items qui sont au nombre de cinquante huit items, décrivant des sentiments, des opinions ou des réactions d'ordre individuel, auxquels le sujet doit répondre en cochant une case : `'Me ressemble'' ou `'Ne me ressemble pas''.

C'est donc une échelle bipolaire dont la composition est la suivante :

- Echelle générale ou personnelle : 26 items.

(Items n° 1, 3, 4, 7, 10, 12, 13, 15, 18, 19, 24, 25, 27, 30, 31, 34, 35, 38, 39, 43, 47, 48, 51, 55, 56, 57)

- Echelle sociale: 8 items.

(Items n° 5, 8, 14, 21, 28, 40, 49, 52)

- Echelle familiale: 8 items.

(Item n° 6, 9, 11, 16, 20, 22, 29, 44)

- Echelle scolaire : 8 items.

(Items n° 2, 17, 23, 33, 37, 42, 46, 54)

- Echelle de mensonge : 8 items.

(Items n° 26, 32, 36, 41, 45, 50, 53, 58)

Les notes aux différentes sous-échelles, ainsi que la note totale permettent d'apprécier dans quel domaine et dans quelle mesure les sujets ont une image positive d'eux-mêmes.

1.2.2- ADMINISTRATION ET CORRECTION DU SEI

L'administration du SEI peut être individuelle ou collective. En tenant compte du nombre important de sujets, mais surtout du fait que les items font appel à des réponses strictement personnelles qui sont difficilement influençables, nous optons pour l'administration collective pour gagner du temps. La forme scolaire du SEI que nous avons adoptée s'applique aux enfants et adolescents scolarisés de 8 ans et plus. Comme le CPA (1984, P.19) reconnaît que « la grande sensibilité de l'estime de soi aux variations personnelle, environnementale ou sociale conduit à recommander la construction de normes locales et spécifiques adaptées aux diverses populations », nous avons tenu à adapter et valider le SEI avant de l'appliquer à notre population. Au cours de la pré-enquête pouvant nous permettre d'adapter le SEI, nous nous sommes rendu compte que nos sujets mettaient 25-30 minutes pour répondre aux items au lieu de dix minutes comme le prévoit le CPA (1984). En plus, des mots tels que `' contrarié, intimider, harceler, rêvasser'' ont paru difficiles à nos sujets. Pour remédier à ces problèmes, nous avons pris soin d'écrire l'explication de chacun de ces mots au tableau et de prendre une durée de trente minutes pour l'administration, d'autant plus qu'il s'agit de comparer seulement entre eux nos sujets.

Le SEI se corrige rapidement à l'aide d'une grille de correction en comptant un point par croix apparaissant à travers les repères. Les notes ainsi obtenues sont inscrites sur la feuille de réponse. La note totale d'estime de soi s'obtient en sommant les notes aux quatre échelles : Générale, Familial, Social, Scolaire. La note à l'échelle de mensonge n'entre pas dans le total. Une note élevée à cette échelle peut simplement indiquer une attitude défensive vis-à-vis du test, ou un désir manifeste de donner une bonne image de soi. L'interprétation de la note totale d'estime de soi devra donc être modulée selon le résultat obtenu à cette échelle. Notons que la note maximum est de 26 pour l'échelle Générale, de 8 pour les autres échelles. Elle est de 50 pour la note totale d'estime de soi.

Le CPA (1984) recommande qu'une note totale de dix huit au moins pour les scolaires soit considérée comme une estime de soi basse.

2- L'INTERVIEW OU L'ENTRETIEN

Matalon (1998) distingue les entretiens selon le caractère plus ou moins directif, du mode d'intervention du chercheur. Cet auteur met en évidence trois niveaux de directivité que sont l'entretien non directif, l'entretien semi-directif et l'entretien directif.

L'entretien non directif se caractérise par le fait d'être une approche qui accorde une certaine liberté au sujet. L'interviewer ne dirige pas l'entretien. C'est l'interviewé qui, compte tenu de la liberté de ses réponses, `'mène'' le débat. La technique d'entretien non directif va donc consister à relancer la conversation à partir des déclarations faites par l'interviewé, et en évitant d'introduire des éléments extérieurs au débat. L'interviewer évitera de se prononcer sur les dires de l'interviewé. Toutefois, sa réalisation engendre le plus souvent le problème de perception sélective et l'erreur de substitution. Cela voudrait dire que le chercheur a du mal à sélectionner les éléments pertinents pour son étude ; compte tenu de l'importance des informations qui sont débitées par l'enquêté à tel point que des confusions pourraient naître dans son esprit. L'entretien non directif n'est pas standardisé et exige une analyse de contenu qui nécessite une bonne maîtrise de la technique.

En ce qui concerne l'entretien directif, les thèmes à aborder, leur succession et l'énonciation des réponses sont définis par le chercheur. Celui-ci offre l'avantage d'être invariable ou standardisé. Les sujets sont placés dans les mêmes conditions. Mais, plusieurs éléments peuvent entacher la crédibilité de cet entretien : les préjugés du chercheur avant l'interview, l'effet de halo, les erreurs d'estimation et de sous-estimation (pas assez d'importance à un élément), les erreurs de surestimation (trop d'importance à un élément), les erreurs de transposition de l'expérience du chercheur vers celles de l'interviewé.

Enfin, l'entretien semi-directif est une des techniques qui permet de centrer le discours des personnes interrogées autour de différents thèmes définis au préalable par l'interviewer et consignés dans un guide d'entretien. Ce type d'entretien permet de compléter les résultats obtenus par un sondage quantitatif en apportant une richesse et une précision plus grandes dans les informations recueillies, grâce notamment à la puissance évocatrice des citations et aux possibilités de relance et d'interaction dans la communication entre interviewé et interviewer. Sans pouvoir chiffrer précisément dans quelles proportions tel jugement ou telle manière de vivre et de s'approprier un espace se répète, l'entretien semi-directif révèle souvent l'existence de discours et de représentations profondément inscrits dans l'esprit des personnes interrogées et qui ne peuvent que rarement s'exprimer à travers un questionnaire. Les questions restent ouvertes et les réponses libres.

C'est ce dernier type d'entretien que nous retenons à cause de son caractère simple et moins lourd ; en plus parce que, dans toute situation sujette à la désirabilité sociale, Lamia (1998, P.113) souhaite qu'elle soit complétée par des « interviews individuelles de type semi-directif ». Enfin les témoignages par entretien sont la contre partie nécessaire à l'enquête de type qualificatif (questionnaire, données statistiques...) et qu'ils permettent d'illustrer des résultats chiffrés, de les rendre vivants ou de les nuancer (Romuald, 2007). Nous avons donc élaboré un guide d'entretien à l'endroit des parents et des adolescents afin de, non seulement, compléter les données recueillies à l'aide de notre questionnaire sur les pratiques éducatives familiales, mais aussi, de mieux comprendre les réalités qui y sont cachées.

Pour le réaliser, nous allons rencontrer les adolescents de notre échantillon selon leur dispositif un à un. Par l'intermédiaire la direction du collège, nous allons envoyer des demandes de rencontre aux parents pour les interroger personnellement. Les réponses recueillies seront exploitées dans l'analyse et l'interprétation de nos résultats. Nous présentons en Annexe III, le guide d'entretien.

III- DEROULEMENT DE LA COLLECTE DES DONNEES

1- LA PRE-ENQUETE

Cette phrase est très importante pour nous. Elle nous permettra de tester toutes qualités métrologiques de nos différents questionnaires. Ceci, pour s'assure qu'ils mesurent bien ce qu'ils sont censés mesurer en prenant en compte des caractéristiques culturelles de notre population.

2- L'ENQUETE PROPREMENT DITE

Pour la collecte des données, nous avons retenu les adolescents de quatorze, quinze et seize ans. Nous administrerons d'abord le questionnaire aux adolescents sur la perception qu'ils ont des pratiques éducatives de leurs parents. Ensuite, nous allons regrouper les adolescents, selon leur disponibilité dans leurs établissements respectifs pour passer le test de Coopersmith (1967), puis après, le test de performances. Nous passerons les questionnaires sur les pratiques éducatives familiales et l'Inventaire d'Estime de Soi à n'importe quel moment de l'année mais nous prendrons soin de passer le test de performances en fin d'année, histoire d'être sûr que la grande partie du programme a été faite.

IV- METHODES ET ETAPES D'ANALYSE DES DONNEES

1-METHODES D'ANALYSE DES DONNEES

1.1-METHODE QUALITATIVE

C'est un ensemble de procédures qui font recours à des indicateurs non fréquentiels susceptibles d'autoriser des inférences et qui sont plus adaptés à des indices non prévus et à l'évolution des hypothèses.

Selon Mucchielli (1986), une méthode qualitative est une stratégie de recherche utilisant les techniques de recueil et l'analyse qualitative dans le but d'expliciter et de comprendre un fait humain. Dans notre étude, nous avons opté pour l'analyse de contenu.

D'après Mucchielli (1984), l'analyse de contenu (d'un document ou d'une communication), c'est des méthodes sûres, rechercher les informations qui s'y trouvent, dégager le sens de ce qui y est présenté, formuler et classer tout ce que contient ce document ou cette communication.

De Landsheere (1976), définit l'analyse de contenu comme une méthode d'observation objective, systématique qui conduit à une quantification. Il distingue trois types de méthodes d'analyse de contenu :

- les méthodes logico-sémantiques : elles s'en tiennent au contenu manifeste. Elles ne considèrent que le signifié immédiatement accessible et ne concernent donc pas la recherche du sens implicite, du second sens du texte, ni de la structure formelle. Elles procèdent par dénombrement, inventaire, codification, recherche éventuelle de relation et de corrélation entre les mots ou les idées.

- les méthodes logico-esthétiques et formelles : elles ont en commun, le fait de chercher à révéler, par l'analyse de  « textes », « une caractéristique formelle typique et l'auteur ou du genre de texte ». Elles visent particulièrement la forme et l'esthétique de la phrase ; par la forme, elle aboutit au contenu.

- les méthodes d'analyse sémantique et structurale : contrairement aux méthodes logico-sémantiques, elles cherchent à dépasser le contenu manifeste, explicite, et à atteinte par une analyse au second degré, le sens implicite, non immédiatement donné à la lecture, le sens caché de la phrase. La recherche des connotations et la structure de significations sont les deux pistes essentielles qui permettent aux usagers de ces méthodes de rester dans le texte manifeste tout en allant plus loin que le sens immédiatement explicite.

Pour l'analyse des données recueillies, nous allons nous baser sur les méthodes logico-sémantiques. Ce choix se justifie par la catégorisation des données lors du codage et pour la recherche de leur contenu manifeste.

Toutefois, ces méthodes seront complétées par les méthodes quantitatives.

1.2- LES METHODES QUANTITATIVES

C'est l'ensemble des méthodes par lesquelles on exprime les données dans un langage quantitatif ou sous une forme numérique. Ces méthodes utilisent les instruments de mesure, d'analyses physiques qui fournissent des données quantitatives au psychologue. En effet, le processus de traitement et l'analyse des données peuvent nécessiter l'utilisation simultanée des mathématiques et de statistiques ou de l'une d'entre elles.

Ainsi d'après Borel (cité par Reuchlin, 1975), les mathématiques se définissent comme la science qui étudie les relations entre certains êtres abstraits définis d'une manière arbitraire sous la seule condition que ces définitions n'entraînent pas de contradictions.

Selon Cournot (cité par Reuchlin, op., cit.), les statistiques ont pour objet d'étude : « Recueillir et coordonner des faits nombreux dans chaque espèce de mesure, de manière à obtenir des rapports numériques sensiblement indépendants des anomalies du hasard et qui dénotent l'existence de causes fortuites ».

En effet, pour traiter les données recueillies, nous utiliserons les statistiques pour le décompte numérique de l'ensemble de nos données et pour calculer les corrélations diverses (analyse factorielle multivariée par exemple), nous permettant de vérifier objectivement nos hypothèses.

Pour comparer des échantillons indépendants, nous allons aussi appliquer le test statistique X2 (voir annexe pour procédure de calcul) qui nous permettra aussi de voir le degré de signification des relations entre nos variables.

2- ETAPES D'ANALYSE DES DONNEES

2.1- CODAGE DES DONNEES

§ La variable indépendante : les pratiques éducatives familiales :

- PEF faible

- PEF souple

- PEF rigide

§ La variables intermédiaire : l'estime de soi :

- Estime de soi positive : ES+

- Estime de soi négative : ES-

§ La variable dépendante : les performances scolaires

- Réussite scolaire : RS

- Echec scolaire : ES

S'agissant des variables différentielles :

§ Structure de la famille : SF

- Famille traditionnelle : FT

- Famille non traditionnelle : FNT

§ Taille de la famille : TF

- Famille nombreuse : FN

- Famille peu nombreuse : FPN

§ Niveau d'études des parents : NEP

- Pas de niveau : N

- Etudes primaire : N

- Etudes secondaire : N

- Etudes universitaire : N

§ Classe socio- professionnelle des parents : CSP

- Classe socio- professionnelle supérieure : CSP I

- Classe socio- professionnelle moyenne : CSP II

- Classe socio- professionnelle inférieure : CSP III

§ Sexe (S) des adolescents : Féminin : F et Masculin : M

2.2- LE CROISEMENT DES VARIABLES

1ère étape : Elle consiste à vérifier la variation des PEF selon les différentes variables différentielles considérées. Ainsi nous allons croiser :

- PEF avec SF

- PEF avec TF

- PEF avec NEP

- PEF avec CSP

- PEF avec S

2e étape : Nous allons vérifier la relation entre les PEF d'une part, et l'estime de soi, d'autre part, avec les performances scolaires. Pour cela, nous allons croiser :

- PEF avec PS

- ES avec PS

3ème étape : nous pourrions aussi tenter de vérifier la relation qui existerait entre :

- PEF, SF avec PS

- PEF, TF avec PS

- PEF, NEP avec PS

- PEF, CSP avec PS

- PEF, S avec PS

4e étape : nous allons vérifier la variation de l'influence de estime de soi sur les performances selon les variables différentielles. Pour cela, nous allons croiser :

- ES, SF avec PS

- ES, TF avec PS

- ES, NEP avec PS

- ES, CSP avec PS

- ES, S avec PS

5e étape : A ce niveau nous allons vérifier notre hypothèse opérationnelle en croisant : PEF, ES avec PS.

CONLUSION

Les travaux qui ont examiné la relation qui pourrait exister entre les pratiques éducatives familiales, l'estime de soi et les performances scolaires ont trouvé une corrélation entre les pratiques éducatives familiales et l'estime de soi, ensuite, entre les pratiques éducatives familiales et les performances scolaires, et enfin entre l'estime de soi et les performances scolaires. Le seul travail, à notre connaissance, à avoir pris en compte les trois variables à la fois, a trouvé une influence des pratiques éducatives familiales sur l'estime de soi mais pas directement sur la réussite scolaires chez les enfants de sixième en France.

Nous avons jugé nécessaire de nous intéresser à la fois à ces trois variables mais cette fois-ci auprès des adolescents togolais.

Un aperçu théorique, impliquant chacune des variables, a été exposé. A terme, nous nous sommes proposé de construire un modèle explicatif impliquant les trois variables ; cela va nous aider à interpréter nos résultats.

La revue de la littérature nous a permis, non seulement d'identifier les différentes approches méthodologiques de chacune des variables, les variables différentielles prise en compte dans une telle étude, mais aussi d'élaborer des hypothèses.

Enfin, nous avons élaboré une méthodologie qui présente les voies et moyens qui permettront d'éprouver les hypothèses formulées.

Le présent document est un projet de recherche, qui sera finalisé en années de thèse. / .

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ANNEXES






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"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"