I.2.
Situation dans le monde
Près de la moitié de la population mondiale n'a
pas accès aux soins de santé de base. Cette exclusion touche
principalement les personnes vivant en milieu rural ou travaillant dans le
secteur informel urbain qui sont, pourtant, les plus exposées aux
risques de maladie (10).
Selon la Banque Mondiale, 84% de la population mondiale vit
dans les pays en développement; compte 93% de la charge globale de la
maladie, mais effectue seulement 11% de toutes les dépenses mondiales
allouées à la santé (11, 12).
Les principales causes du manque d'accès aux soins de
santé sont notamment: une qualité médiocre, des
financements insuffisants, une utilisation inefficace des ressources
disponibles, insuffisance de ressources allouées aux services qui sont
d'un bon rapport coût-efficacité, une répartition
inefficace des ressources entre les zones rurales et urbaines ainsi qu'entre
les populations démunies et les populations nanties, et des
dépenses élevées des ménages, même dans le
contexte d'un système de « soins gratuits »
(13, 4).
Dans la conférence tenue à Alma-Ata en 1978, les
organisations internationales dont l'OMS ont affiché les objectifs de
« Santé pour Tous jusqu'à l'An 2000» visant
l'accès universel de la population mondiale aux soins de santé
primaires (14, 15).
La crise financière des années 80, qui a
frappé la plupart des pays africains sans épargner le Rwanda, les
restrictions budgétaires imposées par les instances
financières, notamment le FMI et la Banque Mondiale ont
occasionné la réduction du budget alloué à la
santé, ce qui a contraint à ces pays de mettre fin à la
gratuité aux services de santé, entraînant comme
conséquence la détérioration de l'accès aux soins
de santé primaires (16, 17).
I.3.
Situation au Rwanda
Au Rwanda plus de 60% de la population vit en dessous du seuil
de pauvreté avec PIB par habitant de 250$US, pratique essentiellement
l'agriculture et ne bénéficie d'aucune protection sociale
formelle.
Le gouvernement du Rwanda a adhéré à la
politique de l'Initiative de Bamako par le lancement des initiatives de
financement communautaires des soins de santé pour contribuer à
la résolution du problème d'exclusion aux soins
(4). Ce désengagement du gouvernement rwandais dans le
contexte de recouvrement des coûts a incité les formations
sanitaires à rapporter toute la charge financière sur la
population sans couverture d'assurance maladie (18).
La période après-guerre de juillet 1994 jusqu'en
décembre 1996 a été caractérisée par la
gratuité des soins. Le système de recouvrement des coûts a
été réintroduit à partir de 1997 mais a
rencontré une certaine réticence de la population habituée
à la gratuité des soins, entraînant comme
conséquence, la faible utilisation des soins curatifs
(4).
Figure 1 . Evolution du
taux de consultation CPC au Rwanda pendant les
10 dernières années
(NC/hab./an)
Sources : Minisanté, Rapport SIS 1995, 1996, 1997,
1998, 1999,2000
· Minisanté, rapport annuel 2001, 2002, 2003,
2004,
En ce qui concerne la mutualisation du risque maladie au
Rwanda, les mutuelles de santé sont une option stratégique de
lutte contre la pauvreté, et d'accessibilité aux soins de
santé.
Les mutuelles de santé ont démontré leur
potentiel considérable d'amélioration de l'accessibilité
financière de la population aux soins de santé et de
l'équité dans le système de santé d'une part, et la
nécessité de mobiliser des ressources internes pour
accroître la viabilité financière des services de
santé d'autre part (19, 20, 21).
Le programme de développement des mutuelles de
santé qui est ciblé sur les communautés rurales et du
secteur informel pour leur garantir un accès équitable aux
services de santé de qualité, vient en complément des
systèmes d'assurance sociale, telle que la Rwandaise d'Assurance Maladie
(RAMA) et des systèmes d'assurance privée qui ciblent les
segments des populations du secteur formel de l'économie
(19).
Actuellement, on compte au Rwanda 294 mutuelles de
santé initiées par divers leaders. Elles couvrent 35% de
la population du pays; les institutions publiques et privées d'assurance
maladie couvrent quant à elles 10% ; ainsi, la couverture nationale
en assurance maladie au Rwanda est d'environ 45% (19).
L'accessibilité des services
de santé à travers le système mutualiste rencontre
quelques problèmes, notamment la couverture partielle des services au
niveau des hôpitaux, souvent excluant les gros risques, la
sur-utilisation des services par les adhérents, la qualité des
soins défectueuse dans certaines formations sanitaires, le faible taux
d'adhésion, un faible appui financier aux mutuelles de santé,
nécessaire pour couvrir les gros risques, les faibles capacités
de gestion des comités des mutuelles de santé
(19).
Au Rwanda, le paludisme et le VIH/SIDA qui présentent
une charge importante, risquent de compromettre la viabilité du
système mutualiste à cause du coût élevé de
prise en charge des malades et l'épuisement des ressources
financières des ménages concernés par ces
problèmes.
Table 1. Couverture de la
population par les mutuelles de santé au Rwanda
Provinces
|
Nombre de MS
|
Population recensement 2002
|
Population 2005 accr. Ann. 2,9
|
Membres bénéficiaires
|
Taux d'adhésion
|
MVK
|
18
|
603 049
|
657050
|
234 887
|
36
|
Kigali Ngari
|
22
|
789 330
|
860012
|
307 444
|
36
|
Gitarama
|
36
|
856 488
|
933 184
|
348 437
|
37
|
Butare
|
36
|
725 914
|
790 918
|
310 328
|
39
|
Gikongoro
|
23
|
489 729
|
533 583
|
144 225
|
27
|
Cyangugu
|
7
|
607 495
|
661 895
|
138 516
|
21
|
Kibuye
|
22
|
469 016
|
511 015
|
173 770
|
34
|
Gisenyi
|
33
|
864 377
|
941 780
|
377 732
|
40
|
Ruhengeri
|
11
|
891 498
|
971 329
|
251 330
|
26
|
Byumba
|
31
|
707 786
|
771 166
|
275 682
|
36
|
Kibungo
|
33
|
702 248
|
765 132
|
306 882
|
40
|
Umutara
|
22
|
421 623
|
459 378
|
204 275
|
44
|
Total
|
294
|
8 128 553
|
8 856 444
|
3 073 508
|
35
|
Sources : Rapports Minisanté/DSS, Juillet, 2005
Table 2. Couverture de la
population par le système d'assurance maladie au
Rwanda
Système d'assurance
|
Nom d'institution
|
Nombre de bénéficiaire
|
% couverture au nombre de personnes couvertes par
l'assurance maladie
|
Système institutionnel public
|
CSR
|
148 663
|
5
|
RAMA
|
155 397
|
5
|
FARG
|
283 000
|
9
|
GACACA
|
113 770
|
4
|
Prisonniers
|
107 000
|
4
|
Armée
|
100 000
|
3
|
Système institutionnel privé
|
|
34 900
|
1
|
Système des mutuelles communautaires
|
|
3 073 508
|
69
|
Effectif total des
bénéficiaires
|
|
3 043 764
|
100
|
Population totale (Rec. 2002)
|
|
8128553
|
|
Couverture totale
|
|
|
37
|
Source : Ministère de la
Santé, Kigali, Rwanda : Rapport sur la situation des Mutuelles des
santé au Rwanda : Direction des Soins de Santé, juin, 2004
(22).
Six ans après le démarrage des mutuelles de
santé dans le district de santé de Byumba, le taux
d'adhésion atteint 54%, plus de 60% de la population
est exclue de ce système d'assurance maladie. La situation actuelle
montre que l'utilisation des services curatifs a doublé, passant de 0,21
en 1999 à 0,48 en 2003. (4, 23)
Bien que le taux d'adhésion des membres des SPP ait
augmenté d'une façon considérable au cours des six
premières années, le taux d'utilisation de la consultation
primaire curative quant à lui, a légèrement varié
entre 1,3 et 1,6 consultations par nouveau cas par an.
A la veille de l'introduction d'une couverture universelle en
assurance-maladie sur toute l'étendue du Rwanda, l'on peut se poser les
questions suivantes : quelle est la situation socioéconomique et
géographique de la population exclue des mutuelles de
santé ? Quel est le niveau réel d'adhésion de la
population aux mutuelles de santé ? Quel est le
bénéfice des membres des mutuelles de santé en
matière d'accès aux services de santé ? Quelle est la
participation de la population au financement des services de
santé ?
C'est dans le souci de répondre à ces
préoccupations que nous avons mené cette étude analytique
transversale dans le district sanitaire de Byumba», afin de contribuer
à l'amélioration de l'accessibilité de la population aux
soins de santé.
Notre étude cadre avec certaines recommandations
formulées par les études antérieures qui ont
envisagé notamment d'étudier l'impact des
mutuelles de santé sur le budget des formations sanitaires et le niveau
de recouvrement des coûts par les structures de santé (4,
24).
Figure 2. Evolution du taux d'adhésion de la
population dans les SPP et d'utilisation
des consultations primaires
curatives chez les membres dans le DS de Byumba
Source : Rapports RIC des
mutuelles de santé du district sanitaire de Byumba
|