Stéphane HOUISSE
stephane.houisse@gmail.com
Assistant Acheteur - Mai à Octobre
2007
Mémoire de fin d'étude - MS GAI ESSEC -
Année 2006/07
Rôle des achats dans l'offshore
outsourcing : l'exemple de la
Bancassu rance
SOMMAIRE
Executive Summary
Introduction
I. L'offshore outsourcing et le métier de la
Bancassurance
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1. Définition et contexte de l'offshore outsourcing
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Définition de l'offshore outsourcing
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Contexte de l'offshore outsourcing
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2. Enjeux dans le secteur de la Bancassurance
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Tendances et évolutions de la Bancassurance
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Externalisation et délocalisation dans la Bancassurance
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Causes de l'émergence de l'offshore outsourcing et limites
dans la
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Bancassurance
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II. Modèle d'analyse achat d'un projet
d'offshore outsourcing
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Partie 1 - Qualification du besoin
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1. Impacts Internes
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2. Impacts Externes
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3. Matrice de faisabilité
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Partie 2 - Qualification de l'offre
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1. Mode d'offshore outsourcing
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2. Global Sourcing : analyse macro
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3. Sélection du fournisseur : analyse micro
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III. Place des Achats dans l'offshore outsourcing
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1. Offshore outsourcing et maturité Achats
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2. Rôle possible des achats
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3. Approche développement de l'offshore outsourcing
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Conclusion
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Bibliographies
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Executive Summary
L'offshore outsourcing est une tendance de plus en plus
importante en France dans l'achat de prestation de service. Ce
phénomène est particulièrement présent dans la
Bancassurance, ce secteur étant un important consommateur de prestations
de service (notamment informatique). Les directions des achats doivent donc
être capable de mettre en place des outils, des méthodes et
acquérir des compétences spécifiques pour être
impliquées dans ce type d'achat complexe.
Ce Mémoire vise à apporter un éclairage
sur l'offshore outsourcing en général, notamment dans la
Bancassurance, et définir les pré-requis nécessaire
à une direction des achats de prestation pour être crédible
sur ce sujet.
Cette analyse se base à la fois sur mon
expérience dans un grand groupe bancaire français, et les
nombreuses rencontres avec les utilisateurs ou les prestataires, mais aussi sur
un ensemble d'éléments bibliographiques dont vous trouverez une
sélection à la fin de ce document.
Introduction
L'externalisation et la délocalisation des services
pour les organisations a connu une croissance importante ces dernières
années. Ce phénomène est apparu dans les années 90
aux Etats-Unis et tend à se développer aujourd'hui en France. Le
recours accru des organisations à ce type de prestation a des
conséquences en terme de coût, et donc de
compétitivité, mais aussi en terme de risques (social,
qualité de la prestation, propriété intellectuelle et
confidentialité,...). Cette pratique a été notamment
sujette à de vifs débats aux Etats-Unis au cours de
l'élection présidentielle de 2004.
Il s'agit d'un sujet sensible, d'un point de vue
économique et politique. D'un point de vue macro-économique ce
sujet impacte de nombreuses composantes de l'économie des pays
occidentaux : pertes d'emplois et de croissance, divulgation d'informations
sensible dans des secteurs stratégiques,.... D'un point de vue
micro-économique, les organisations peuvent y trouver de nouveaux
viviers de gains tandis que les salariés doivent faire face à une
concurrence supplémentaire.
Ce sujet est particulièrement présent dans le
secteur de la bancassurance. Ainsi, en 2001, moins de 10% des institutions
financières américaines et anglaises ont eu recours à
l'offshore outsourcing, contre 75% en 2006.1
Bien que ce sujet soit de plus en plus présent dans les
organisations, il n'est pas encore maitrisé par la plupart des
Directions Achats. Il me semble intéressant d'en fournir une analyse du
point de vue de la Direction des Achats. Cette analyse visera à
définir ce phénomène, à fournir des
éléments de compréhension aux acheteurs et à
étudier leur rôle potentiel sur ces pratiques. Pour
éclairer cette analyse, je prendrai l'exemple du secteur de la
Bancassurance, secteur fortement impacté par l'offshore outsourcing.
La première partie de ce Mémoire visera à
décrire le contexte de l'offshore outsourcing dans la bancassurance,
et notamment les caractéristiques de l'offshore outsourcing, les
grandes
1 Etude Deloitte Touche
tendances de la bancassurance ainsi que l'émergence de
l'offshore outsourcing dans ce secteur.
La deuxième partie proposera une méthodologie
d'analyse d'un projet de sourcing en offshore outsourcing. Cette
méthodologie sera expliquée étape par étape, et
sera illustrée par des exemples de grille d'analyse.
Enfin la troisième partie a pour objectif de
définir les rôles potentiels de la fonction achats dans l'offshore
outsourcing. Il visera notamment à expliciter les niveaux de
maturité possible de la fonction achats dans ce domaine, ainsi que les
gains que peuvent apporter la Direction des achats dans ce type de projet.
I. L'offshore outsourcing et le métier de la
Bancassurance
1. Définition et contexte de l'offshore
outsourcing
Définition de l'offshore outsourcing
Avant tout, il me semble nécessaire de définir
précisément le terme d'offshore outsourcing.
L'offshore outsourcing, ou externalisation
délocalisée, consiste à confier à une
organisation extérieure, située dans une zone géographique
différente de celle du client, l'exécution d'une
prestation.
EXTERNALISATION
DELOCALISATION
Par organisation extérieure, j'entends toute
organisation ou entité qui n'aurait pas un lien hiérarchique
commun avec l'organisation ou entité demandeuse. Par zone
géographique différente, j'entends toute localisation qui ne
permet pas un contact physique facile avec le personnel de l'organisation
demandeuse. Par prestation, j'entends l'ensemble des activités,
intellectuelles ou physiques, dont peut avoir besoin une organisation ou
une entité.
OFFSHORE O UTSOURCING
Cette définition permet de constater qu'il existe deux
composantes différentes dans l'offshore outsourcing : une composante
externalisation et une composante délocalisation. Le fait de bien
séparer ces deux éléments dans l'analyse permet de bien
comprendre les impacts de chacun.
Quand, par exemple, une prestation est stratégique,
confidentielle ou à l'origine d'un avantage concurrentiel pour
l'organisation, le risque de l'offshore outsourcing ne vient pas du risque de
délocalisation mais d'externalisation. Ainsi, cette prestation doit
être exécutée par l'organisation elle-même, dans la
zone géographique la plus appropriée.
A l'inverse, Renault, par exemple, a rencontré des
problèmes quand il a confié son assistance informatique de
premier niveau à la société HP, en Tunisie. L'échec
vient principalement du retard dans le transfert de connaissance vers le centre
tunisien. Cette période de flottement pendant le démarrage de la
prestation, associée à des problèmes de communication et
de formation des équipes locales, a entraîné de nombreuses
difficultés. Dans ce cas, la délocalisation est à
l'origine du risque et non l'externalisation. Bien que la prestation soit
auparavant confiée sans problème majeur à un prestataire
extérieur, les critiques se sont portées sur
l'externalisation.
Parfois enfin, et il s'agit du cas le plus critique, les deux
phénomènes ont un impact négatif sur la prestation. Pour
des prestations complexes, nécessitant de nombreux échanges, la
communication est rendue difficile à la fois parce que la prestation est
réalisée par une société extérieure qui ne
connaît pas toujours bien le métier et les processus de son client
ainsi que le contexte de l'organisation cliente (problème lié
à l'externalisation), mais aussi parce que les prestataires ne sont pas
sur site et ne peuvent pas toujours communiquer facilement sur des sujets
complexes, parfois dans une langue différente (problème
lié à la délocalisation).
Le deuxième point que soulève cette
définition concerne les termes « organisation extérieure
» et « zone géographique différente ». Ces deux
expressions sont larges. En effet, les choix de délocalisation et
d'externalisation ne sont pas des choix binaires (oui/non). Il existe de
nombreuses alternatives formant un long continuum entre chacun des deux
extrêmes pour chacun de ces éléments. Je
présenterai, plus tard dans ce mémoire, les différentes
configurations possibles pour chacun, car il s'agit d'un levier majeur de ce
type de projet.
Le troisième point enfin que soulève cette
définition est le terme prestation. En effet, il s'agit de toutes les
activités dont peut avoir besoin une organisation. L'activité
peut être une tâche, un processus, un projet ou même un pan
entier d'activité. Ceci est valable pour la production d'un bien ou d'un
service. Historiquement, l'externalisation et la délocalisation se sont
développées des activités les plus simples aux plus
complexes.
Grande Distribution
BIENS SERVICES
Industrie FPO2 BPO2
KPO2
ITO2
< 80's 80's 90's 00's > 00's
La Grande Distribution a été le premier secteur
à externaliser (vendre des produits fabriqués par d'autres
sociétés) puis délocaliser la production (par exemple,
fabriquer ou faire fabriquer des produits textiles dans le sud-est asiatique).
L'Industrie a suivi cette tendance dans les années 80 et 90, pour des
raisons de compétitivité et de recentrage sur le coeur de
métier. La délocalisation de la production a notamment
été favorisée par la levée de nombreuses
barrières tarifaires, suite aux accords du GATT puis de l'OMC, ainsi que
l'ouverture de nouveaux marchés, notamment en Europe de l'Est suite
à la chute de l'URSS.
Les années 90 ont marqué le début de ce
que j'appelle le FPO2 (Functional Process Outsourcing and
Offshoring), c'est à dire l'externalisation et la délocalisation
des processus fonctionnels comme la comptabilité ou les ressources
humaines. Ce sont souvent des processus à faible valeur ajoutée,
ne touchant pas au coeur de métier du client et nécessitant
d'importantes capacités humaines.
Au début des années 2000, émerge le
BPO2 (Business Process Outsourcing and Offshoring) qui consiste
à externaliser et délocaliser certains processus métiers
de l'entreprise, souvent les plus répétitifs, comme la
construction d'un catalogue de vente par exemple. Le BPO2 touche aux
processus liés au coeur du métier de l'organisation, avec donc un
impact direct sur l'activité de l'entreprise. Ainsi, EDF, après
avoir externalisé ses centres d'appel client, a mené une
réflexion sur les possibilités de création de valeur lors
de ce contact privilégié avec le client. Suite aux conclusions de
l'étude, l'opérateur a dû évaluer l'impact de
l'externalisation sur ce processus, qui était considéré
comme pouvant apporter plus de valeur ajoutée.
Enfin, la dernière tendance est le KPO2
(Knowledge Process Outsourcing and Offshoring) consistant à externaliser
et délocaliser les activités liées à la
connaissance (Recherche et Développement, data mining, veille
technologique, analyse industrielle, modélisation financière). Il
s'agit du degré de complexité le plus important d'offshore
outsourcing car il touche à l'origine même de la création
de valeur. Des centres de recherche commencent à s'ouvrir en Inde, comme
celui d'Alcatel pour le développement d'équipement
télécom. Malgré tout, il s'agit des débuts de ce
type de prestation.
Enfin, l'ITO2 (Information Technology Outsourcing
and Offshoring) est un élément transversal aux
éléments cités plus haut. Il s'agit de l'externalisation
et la délocalisation des
activités informatiques. L'émergence de
l'ITO2 s'est faite dans les années 90 avec les projets de
maintenances liées au passage à l'an 2000, à
l'intégration de solutions ERP (Entreprise Ressource Planning ou
Progiciel de Gestion Intégré) dans les entreprises et au passage
à l'euro en Europe. Les technologies de l'information sont
présentes dans la plupart des activités d'une organisation.
Ainsi, l'externalisation et la délocalisation de activités
liés aux systèmes d'information des entreprises touchent les
trois éléments cités plus haut : le FPO2 (mise
en place d'un outil de e-sourcing par exemple), le BPO2 (maintenance
d'un site internet par exemple) et le KPO2 (développement
d'un progiciel pour un éditeur, par exemple).
Les concepts d'ITO (Information Technology Outsourcing), de
BPO (Business Process Outsourcing) et de KPO (Knowledge Process Outsourcing)
sont couramment utilisés. Malgré tout, ils se limitent à
l'externalisation. Or aujourd'hui, l'offshore outsourcing combine
l'externalisation et la délocalisation. Ainsi, je mets en avant les
concepts d'ITO2, de BPO2 et de KPO2, car ils
recouvrent une problématique plus complexe.
Enfin, le concept de FPO2, que j'ai
développé dans ce mémoire, aide selon moi à
délimiter le périmètre du BPO2. Le
BPO2, comme son nom l'indique, se limite à l'externalisation
et à la délocalisation de processus métier (business). Les
processus fonctionnels ne répondent ni à la même logique ni
aux mêmes contraintes d'Offshore Outsourcing que les processus
métier. Ceci justifie donc cette distinction.
Ce mémoire se limitera à la partie Services du
schéma ci-dessus. Bien que le développement de l'offshore
outsourcing soit important dans les activités liées aux biens ou
aux services, le niveau de maturité ainsi que les logiques
associées sont très différentes. Pour les activités
physiques liées à la production, on parle de sourcing LCC (Low
Cost Countries), ou sourçage en pays à bas coût, cette
démarche étant très développée dans les
organisations industrielles. Ainsi, l'équipementier automobile Valeo
s'est fixé comme objectif de monter sa part d'achat en pays à bas
coût à 70% d'ici à 2010. Les contraintes sont surtout des
contraintes de qualité, de logistiques et de commerce international
(douane, assurance,...).
Les achats de prestations de service externalisées et
délocalisées sont à un niveau de maturité plus
faible, car il s'agit d'une tendance plus récente. De plus, elles
suscitent de nombreuses réticences de la part des populations
touchées dans l'organisation cliente ou chez le prestataire. Ces
populations ont souvent un niveau de formation plus élevé
(ingénieur,
comptable,...) et ont suivi l'impact des
délocalisations et des externalisations sur les métiers de
production (licenciement, baisse des salaires,...). A cela s'ajoute le fait que
les contraintes de l'offshore outsourcing de prestations de service sont
très différentes puisque les activités de service sont
basées sur des prestations intellectuelles, et non physiques. La
production n'est pas transportée physiquement mais de manière
numérique via les réseaux de télécommunication. Or,
avec les avancées technologiques et le déploiement mondial de ces
réseaux de télécommunication, ce transport est rendu plus
facile. L'enjeu est plus lié à la communication, à la
gestion de projet et au management d'équipe.
Enfin, il est important de distinguer l'offshore outsourcing
de projets ou d'activités récurrentes. Cette distinction permet
de bien comprendre les besoins et les enjeux pour chacun des deux cas. Pour un
projet, le risque sur les délais, les coûts et la qualité
sont très importants et ne peuvent pas, le plus souvent, être
rattrapés ensuite. A l'inverse, une activité récurrente
peut être améliorée au cours du temps mais les
investissements au démarrage de la prestation étant plus
importants, il est plus difficile de changer de stratégie ensuite
(changement de fournisseur, de localisation ou ré-internalisation par
exemple).
Le sourcing est différent dans les deux cas puisque
dans un projet, on cherche un savoir-faire déjà existant et
déjà appliqué dans des projets similaires. A l'inverse,
dans des prestations récurrentes, on cherche un partenaire durable dont
les prestations pourront s'améliorer avec le temps.
Contexte de l'offshore outsourcing
L'offshore outsourcing est une pratique en pleine croissance
qui s'appuie sur différents éléments. Sur le plan
macroéconomique, il s'inscrit dans la tendance de fond de la
mondialisation, qui a entrainé deux mouvements dans les économies
occidentales : les délocalisations dans les pays à bas coût
et le recentrage sur le coeur de métier de l'entreprise. Sur le plan
micro économique du marché de l'Offshore Outsourcing, la
pénurie de main d'oeuvre pour certaines prestations dans les pays
occidentaux, la nécessaire diminution des coûts, la
création d'une offre de prestation informatique en Inde (les grandes
sociétés de services informatiques indiennes ont
été crée au début des années 80 : Infosys en
1981, Wipro en 1980) et le développement des Technologies de
l'Information et de la Communication ont favorisé l'émergence de
l'offshore outsourcing.
Le marché de l'offshore outsourcing est en pleine
croissance et nombreuses sont les entreprises souhaitant y recourir dans les
années qui viennent. Ainsi, 50% des grandes entreprises
américaines (supérieur à 5 000 salariés) et 40% des
entreprises en Europe ont l'intention de délocaliser et/ou externaliser
une partie de leurs prestations d'ici 2010.
Que ce soit en terme d'offre ou de demande, il s'agit d'un
marché fortement polarisé. Selon une étude Gartner (Juin
2005), 80% de la demande sur ce marché est représentée par
les Etats- Unis. En Europe, 70% de la demande européenne est
représentée par le Royaume-Uni. A l'inverse, l'Inde
représente 80% des revenus de l'offshore outsourcing de service.
Généraliser les tendances de ce marché
est donc difficile car il est limité à quelques pays, aussi bien
en termes d'offre que de demande. Malgré tout, cette situation semble
évoluer. Ainsi, l'offshore outsourcing ne représente que 2% des
dépenses de prestations informatiques en France mais croit de 20% par
an. De même, le nombre de pays fournisseurs de prestation ne cesse
d'augmenter (Maroc, Ile Maurice, Roumanie).
L'offshore outsourcing est donc une réalité
complexe, qui mérite d'être étudié de manière
structurée.
2. Enjeux dans le secteur de la Bancassurance
Tendances et évolutions de la Bancassurance
Le métier de la Bancassurance doit faire face à
deux tendances fortes : la mondialisation et la concentration sectorielle, ces
deux tendances étant liées. En effet, les marchés
financiers ont été les pionniers de la mondialisation dans les
années 80, qui ont été les premiers marchés
globaux. A l'inverse, la mondialisation entraine une compétition
mondiale et oblige les Bancassurances à devenir des poids lourds
mondiaux, et donc favorise la concentration sectorielle.
Aujourd'hui, les banques doivent absolument atteindre une
taille critique pour pouvoir évoluer sur le marché mondial,
cette mondialisation ne se limitant plus aux marchés financiers
mais s'étendant à l'ensemble des métiers de
la bancassurance (banque de détail ou assurance par exemple).
La banque globale, capable d'avoir une présence
commerciale dans différents pays, est un enjeu supplémentaire
pour les banques françaises car elles évoluent sur un
marché intérieur saturé. La stratégie de banque
universelle, qui consiste à offrir l'ensemble des produits bancaires,
financiers et d'assurance, au sein d'un guichet unique atteint ses limites.
Ainsi, dès les années 80, en plus de proposer les produits
bancaires classiques (moyens de paiements, prêts, placements), les
banques françaises se sont lancés sur le marché lucratif
de l'assurance. Il s'agit du début de la bancassurance, qui consiste
à offrir via un canal de distribution unique, des produits bancaires et
d'assurance. Cette tendance a contraint les acteurs de l'assurance de
développer une offre équivalente en proposant elles aussi des
produits bancaires. Par exemple, Axa lance Axa Banque en 1991. Cette
concurrence s'est encore accrue encore au cours des années 90, avec la
Grande Distribution qui propose elle aussi des services financiers (carte de
paiement, crédit à la consommation,...) et avec le renforcement
du marché des courtiers (en assurance, prêts ou investissement
boursier) grâce à Internet.
Cette concurrence importante sur le marché de la
bancassurance entraine une très forte atomisation de l'offre. Pour
exister, les banques ont été contraintes d'ouvrir un nombre
conséquent d'agences entrainant une saturation du réseau de
distribution. Enfin, les banques ont été contraintes de proposer
une offre commerciale agressive qui a fait que le taux d'équipement des
ménages français en produits de banque et d'assurance est
très élevé. Tout ceci rend très difficile et
très couteux le développement sur le marché
français.
Ainsi, a été lancée l'idée de
chercher des relais de croissance à l'étranger, en capitalisant
sur le savoir-faire acquis sur le marché français pour
équiper la clientèle étrangère. Ce
développement a été d'abord mené en Europe de
l'Ouest, notamment en Italie, où les marges étaient encore
très supérieures à celles de la France au début des
années 2000. Aujourd'hui, la nouvelle concurrence sur cette zone a
considérablement réduit cet écart. Il est
dorénavant nécessaire de se tourner vers les pays
émergents, notamment l'Europe de l'Est, le Bassin
Méditerranéen, et le groupe BRIC (Brésil, Russie, Inde,
Chine).
La Société Générale, comme la
plupart des banques françaises, suit cette tendance et
possède des filiales banque de détail à
l'étranger, notamment en Roumanie (BRD), au Maroc (SGMB)
ou en République Tchèque (KB). L'axe de
développement de la Société Générale se
situe principalement en Europe de l'Est et dans le Bassin
Méditerranéen, et ceci par croissance externe, c'est à
dire en rachetant des banques locales déjà implantées dans
le pays. Ce réseau de distribution est ensuite utilisé pour
proposer l'ensemble des produits du Groupe.
Ces acquisitions en dehors des frontières
françaises ont entrainé l'intégration de nombreux
systèmes d'informations et processus métiers très
différents d'une banque à une autre. De plus, dans certains cas,
le système d'information de ces petites structures était presque
inexistant et les processus étaient souvent mal définis et non
respectés. L'enjeu est de pouvoir équiper ces filiales d'outils
modernes en capitalisant le déploiement sur l'ensemble des filiales. Les
achats ont alors un rôle important sur ce type de projet.
Dans ce contexte, les banques doivent être
particulièrement rentables, d'une part pour permettre l'amortissement de
leurs acquisitions, et d'autre part pour soutenir leur cours de Bourse et
rendre difficile une OPA hostile de la part d'une banque concurrente. Il n'est
donc pas étonnant que de grands plans d'économie soient
lancés. Un des objectifs est bien sûr de rationnaliser les
dépenses, notamment en mutualisant les moyens entre les
différentes filiales. Ceci impacte particulièrement les achats
informatiques, qui ont un poids important dans la banque2.
C'est dans ce cadre (mondialisation, plan d'économie,...)
que la Direction des Achats d'une grande banque française doit
évoluer et que s'inscrit l'émergence de l'offshore outsourcing
Externalisation et délocalisation dans la
Bancassurance
Comme défini au début de ce mémoire,
l'offshore outsourcing est constitué de deux éléments :
l'externalisation et la délocalisation. Chacun de ces deux
éléments connaît un développement important
actuellement, dans tous les secteurs d'activités, et
particulièrement dans celui de la Bancassurance.
L'externalisation, dans le secteur de la Bancassurance, est une
nécessité. En effet, les banques sont très
concentrées verticalement. Selon une étude de la Deutsche Bank
sur les banques
2 Je traiterai de ce sujet dans la suite de ce
mémoire
allemandes, mais qui s'applique aussi aux banques
françaises, 80% de leur revenu est produit en interne. Elle
maîtrise la construction de leur offre (produits financiers, bancaire ou
d'assurance) ainsi que sa distribution par un réseau d'agence
très important dont ils sont propriétaires. Ce schéma est
particulièrement vrai en France. Ainsi, plus cette intégration
est importante plus les banques sont contraintes d'être centré
uniquement sur leur coeur de métier.
Ainsi, dès la fin des années 70, les
établissements de crédits décident, pour des raisons
économiques, d'externaliser certaines activités administratives,
comme l'imprimerie et le stockage de données. En effet, les banques se
développent en terme de couverture géographique (ouverture
d'agence sur tout le territoire) ainsi qu'en terme de métier
(développement de l'offre financière).
L'outsourcing informatique dans le secteur de la Bancassurance
ne débute que plus tard, dans les années 90. En effet,
l'informatique est un domaine sensible pour les banques que ce soit en terme de
sécurité ou de qualité. De plus, les banques sont des gros
consommateurs de bien et de service informatiques, principalement parce que
l'activité d'une banque consiste à gérer des flux
informationnels et monétaires. Or, l'informatique a été
justement une révolution dans le domaine de la gestion des flux et des
données. Cette révolution a donc permis aux banques de diminuer
leurs coûts de traitement et d'accéder plus rapidement à
des informations à jour. Cette activité étant donc un
facteur clé de succès pour les sociétés de
Bancassurances, ces dernières ont d'abord développé leurs
propres services d'ingénierie informatique.
La volonté de recentrer l'activité des banques
sur leur coeur de métier, la complexification d'une partie de
l'informatique ainsi que la banalisation de certaines tâches ont
entrainé une nouvelle vague d'externalisation dans les banques. Entre
1990 et 2003, les prestations relatives à l'infrastructure informatique
représentaient, en valeur, les deux tiers des contrats
d'externalisation.3 A la Société
Générale, comme dans la plupart des banques, les achats
liés à l'informatique (prestations, progiciels et logiciels,
matériels et consommables) représentent plus de la moitié
du montant total des achats.
Cette externalisation a été effectué
suivant deux axes. D'abord la cession des
entités spécialisées des banques dans le service
informatique. Ainsi, Atos, une des plus grosses SSII
3 Etude Roland Berger (2004)
françaises, est issue de la fusion en 1997 de Axim et
Sligos, fondées respectivement par le Crédit du Nord et le
Crédit Lyonnais, dans les années 70. L'autre axe a
été de confier l'exécution de nombreuses activités
à des prestataires. Ainsi, à la Société
Générale, la moitié du personnel informatique est
composé de personnes appartenant à un prestataire
extérieur. Ce cas n'a d'ailleurs rien d'exceptionnel, et est identique
dans la plupart des banques françaises.
Aux Etats-Unis, le développement de l'externalisation
de l'informatique est encore plus important. Au début des années
2000, des gros contrats ont été signés entre les
sociétés de service et les banques. Ainsi, en 2002, JP Morgan, la
deuxième banque du pays, a signé un contrat d'externalisation de
5 milliards de dollars avec I.B.M. pour 7 ans. Ce contrat est annulé par
la banque, deux ans plus tard, et les 4 000 employés
transférés à Big Blue sont
réintégrés. Cet événement marque les esprits
et signe la fin des gros contrats d'externalisation. Malgré tout, il
convient d'expliquer les causes de ce revirement. Le choix de JP Morgan
n'était pas motivé par les mauvaises performances d'I.B.M. mais
faisait suite à la fusion avec Bank One, reconnu pour son savoir-faire
dans la réduction de ses frais de structure. Ainsi, entre 2000 et 2003,
Bank One a réduit ses frais de structure de 12% quand ses revenues
augmentaient de 17%. Ainsi, JP Morgan a souhaité gérer
l'intégralité de son infrastructure en interne pour pouvoir
intégrer le savoir-faire de Bank One. Il s'agit donc plus d'une mauvaise
publicité faite par les détracteurs de l'externalisation que d'un
réel échec.
Depuis quelques années, le secteur de la Bancassurance
se tourne vers le BPO et le KPO. Mais il s'agit d'une tendance très
récente et en fort développement. En effet, ces externalisations
touchent les processus métiers de l'entreprise. Les Bancassurances
américaines commencent à développer le BPO pour certains
processus métiers, comme pout la gestion des cartes de crédit. En
France, des expériences commencent à se développer dans le
traitement des chèques, avec malgré tout des risques très
forts (respect des délais, confidentialité, protection des
données personnelles).
Voici donc un panorama non exhaustif des différentes
prestations propices à externalisation, mais aussi à la
délocalisation, dans les banques et les assurances.
- traitement des chèques,
- gestion des demandes de crédit, - gestion des
cartes de crédit.
|
F.P.O. B.P.O. K.P.O.
A S S U R
A N
C E
B A N Q U E
- comptabilité,
- gestion des ressources humaines.
- infogérance des postes de travail, -
helpdesk
- maintenance des systèmes de production
bancaire,
- mise en place d'outil CRM (Customer Relationship
Management).
- traitement des indemnisations, - gestion des
remboursements,
- gestion des transferts de dossier.
|
- mise en place d'outil CRM, - maintenance des
systèmes de gestion des contrats d'assurance.
- modélisation financière, - analyse
financière,
- étude de marché.
|
- offre à créer.
- évaluation des risques, - calcul des
primes.
|
- offre à créer.
Prestation non I.T.
Prestation I.T.
Le développement de l'externalisation n'est donc pas un
phénomène nouveau pour les Bancassurances. Par contre la
délocalisation de ces prestations l'est beaucoup plus. Ainsi, BNP
Paribas a ouvert deux filiales à Casashore, la zone franche
située à Casablanca : Mediha Paribas et BDSI. Ces deux centres
assurent le développement et la maintenance d'applications ainsi que
diverses tâches informatiques pour le compte de la banque
française. La Société Générale, quant
à elle, a possède depuis 2000, un centre de développement
à Bangalore, en Inde. Dans le secteur de l'assurance, Axa
développe son centre de Casablanca. Le projet est porté par le
Président du Directoire de l'assureur, Henri De Castries, qui en a fait
une stratégie affichée.
La délocalisation des prestations I.T. ne semble pas
être une possibilité, mais bien une nécessité
à long terme, pour rester compétitif. Ainsi, Deloitte
prévoit que d'ici 2010, 30% des dépenses informatiques mondiales
seront délocalisées (contre 6% aujourd'hui). Pourtant les banques
et les assureurs français sont très en retard par rapport
à leurs homologues anglais et américains.
Aujourd'hui, le niveau d'offshore outsourcing des banques
américaines, mais aussi anglaises, restent très
élevé. Ainsi, HSBC externalise auprès de Cap Gemini en
Inde, plus de 2 000 postes I.T. La délocalisation est aussi directement
gérée par les banques, sur place. Selon une étude de
Deloitte (2003), GE Capital employait 11 000 personnes en Inde, Citigroup 3 000
et HSBC 2 000. La même année, Axa, un des pionniers
français, n'employait que 380 personnes en Inde.
Quant à la délocalisation de processus
métier, il s'agit d'un sujet très sensible. Ainsi, trois grands
assureurs n'ont pas souhaité répondre à l'enquête
des Echos4. D'autres considérant cette pratique comme «
pas stratégique » (Groupama) ou étant « peu
concerné par le sujet » (La Mondiale). Seul Axa France semble
donner des informations sur cette pratique. L'assureur compte ouvrir 1 500
postes de télé commerciaux au Maroc pour le compte de sa filiale
Direct Assurance, pour des tâches de souscription et de gestion des
contrats. Cette activité est donc en plein développement.
Causes de l'émergence de l'offshore outsourcing et
limites dans la Bancassurance
Les raisons du développement de l'offshore outsourcing
sont nombreuses. Pour bien en comprendre les avantages, il convient encore une
fois de séparer l'analyse entre les éléments liés
à l'externalisation et ceux liés à la
délocalisation.
Le principal avantage de l'externalisation est de permettre
à l'entreprise cliente de faire réaliser ses prestations par des
entreprises spécialisées. Cela permet souvent une
amélioration de la qualité, car le prestataire a souvent une
grande expérience dans son domaine. L'informatique d'entreprise devenant
de plus en plus complexe, il est difficile pour les organisations non
spécialisées de suivre toutes les évolutions
technologiques, ce que les spécialistes peuvent faire. De plus, c'est
l'opportunité pour les banques ou les assureurs d'avoir accès
à des technologies qu'elles ne pourraient pas avoir accès en
interne.
Il est important de noter que l'amélioration de la
qualité dans un projet d'offshore outsourcing n'est pas due, comme
souvent avancé à tort, à la délocalisation, mais
à l'externalisation. Le
4 «Les assureurs restent prudents face aux
délocalisations», Les Echos, 17 avril 2007.
fait que la prestation soit réalisée à
l'étranger n'a pas d'impact sur le niveau de qualité. Au
contraire, souvent cette délocalisation entraîne une diminution de
la qualité car l'activité est souvent récente dans ces
pays et nécessite donc un apprentissage. Enfin, le cas de l'Inde est
particulier car le pays possède un savoir-faire et une forte
expérience dans ce domaine. Ils ont su justement crée une offre
spécialisée avec des prestataires de qualité. C'est donc
bien le fait de confier des prestations à des experts du domaine qui
fait la qualité de la prestation en Inde et non le simple fait de la
délocaliser.
Le deuxième avantage qui en découle est que
l'entreprise cliente peut se recentrer sur son coeur de métier,
élément stratégique pour les banques, ces dernières
étant fortement intégrées non seulement verticalement
(création et distribution de produits), mais maintenant aussi
horizontalement (concentration dans le secteur). L'externalisation permet de
variabiliser les charges fixes, comme les salaires du personnel ou
l'investissement en matériel, et donc de dégager des
liquidités, qui peuvent être utilisées pour d'autres
investissements. Cela permet aussi, suivant la même logique, de
libérer des postes, souvent à faible valeur ajoutée
(téléopérateur, développeur,...) et les
réaffecter sur des postes apportant plus de valeur (conseiller
clientèle par exemple).
Enfin, dernier point, comme les prestations sont
effectuées par des spécialistes, le coût est
inférieur, à périmètre identique. En effet, les
entreprises ont un savoir-faire et un plus grand niveau d'expertise qui lui
permettent d'avoir une productivité supérieure. De plus, les
investissements en formation et les coûts de fonctionnement peuvent
être mutualisés entre plusieurs clients.
L'émergence des centres de service s'appuie sur ce
constat. Un centre de service est le rassemblement, dans une seule
entité, physique ou virtuelle, d'activités identiques
antérieurement réparties entre plusieurs sites d'un même
groupe. Les ressources ainsi que les coûts de structure et de formation
sont partagés entre les différents clients du centre. Cela
nécessite une standardisation des processus pour que les tâches
puissent être effectuées par l'ensemble des ressources du centre
de service. Le centre de service est enfin la possibilité de profiter
des meilleures pratiques du marché.
J'insiste sur le fait que les prix ne doivent être
comparés que pour un périmètre identique. En effet,
l'externalisation entraine souvent une redéfinition de la prestation. De
plus, la prestation
est parfois enrichi car le prestataire dispose de
compétences supplémentaires et peut répondre à un
besoin plus large. Ainsi, l'externalisation de la paie peut être enrichie
en fournissant des indicateurs de benchmarks, qui n'était pas
présente dans la prestation auparavant.
La délocalisation, quant à elle, permet en
premier lieu de réduire les coûts, grâce au
différentiel de salaire et de coût de structure entre le pays
d'origine et le pays d'accueil. Le cabinet NeoIT dans son
étude5 avance un différentiel de salaire de 85
à 90% entre les Etats- Unis et l'Inde. De même, les loyers des
locaux professionnels à Casashore (zone franche marocaine
spécialisée dans l'I.T.) sont de 90 dirham/m2 (environ
8€) contre 15 à 20€/m2 à Sophia Antipolis,
dans le sud de la France. Ces gains ont un impact fort sur le coût final
de la prestation mais certains coûts additionnels doivent être pris
en compte comme les coûts de télécommunication, de gestion
de projet, de productivité,... Aujourd'hui il est très difficile
de mesurer les gains en terme de coût complet dans un projet de
délocalisation.
De plus, s'approvisionner à l'étranger permet
d'obtenir des compétences qui sont en pénurie dans le pays
d'origine. En effet, délocaliser l'exécution de la prestation
permet d'avoir accès à un nouveau réservoir de
compétence plus important. Ainsi, les compétences en Java J2E ou
en .Net sont peu nombreuses en France, tandis qu'il existe un pool de
compétence plus important en Inde. Attention, le marché de
l'offshore outsourcing étant en plein boom, certains pays deviennent eux
aussi en pénurie. L'Inde et le Maroc sont aujourd'hui des marchés
qui sont devenus tendus dans ce domaine.
Le dernier avantage est qu'il est possible pour certaines
prestations, d'obtenir une couverture mondiale en continue, en jouant avec les
décalages horaires des différents sites. Par exemple, faire
réaliser le développement d'une application en Inde pendant la
nuit du client, pour que le client situé à New York travaille sur
ses remarques pendant la nuit en Inde. Ainsi, le développement est
assuré 24h/24.
Les avantages sont donc différents pour
l'externalisation et la délocalisation. Même si le
gain financier est un avantage pour chacun des éléments, il
n'a pas la même source. Dans le cas de l'externalisation, il s'agit
d'un savoir-faire qui fait progresser l'organisation sur la courbe
5 Offshore and Nearshore ITO and BPO Salary Report,
NeoIT, Juin 2006
d'apprentissage. Pour la délocalisation, il s'agit d'un
différentiel de coût sur les facteurs de production. L'Inde
combine ces deux éléments, mais ce n'est pas le cas dans tous les
pays.
Malgré ces avantages, de nombreuses limites
ralentissent le développement de l'offshore outsourcing,
particulièrement dans la Bancassurance. Le premier risque vient de
l'image qui est associée à ce type de projet, que ce soit
à l'extérieur ou à l'intérieur de l'entreprise. En
externe, il s'agit d'un risque commercial, les délocalisations
étant souvent mal perçus, en particulier par les consommateurs
français qui sont très sensibles à ce sujet. Aujourd'hui,
bien que la plupart des consommateurs soient informée que les centres
d'appel sont localisés en dehors du territoire français, ceci est
souvent perçu de manière négative. En cas de
problème, l'erreur est mise sur le compte de la situation
géographique du centre et de la supposée non- qualification du
personnel délocalisé. De plus, les clients des banques ne sont
pas forcement prêts à accepter que d'autres activités
soient exécutées hors de France, notamment des prestations
touchant à leurs données financières.
En interne, le risque en termes d'image est aussi fort.
L'externalisation peut entrainer la suppression d'un poste en interne
seulement, souvent transférer au prestataire. La délocalisation
est plus grave car elle supprime complètement des emplois sur le
territoire français. Au delà du problème
macro-économique du positionnement de la France en termes d'emploi sur
le marché mondial, cela diminue le besoin en profil technique
(comptables, développeurs,...), dans l'entreprise. Ainsi, les profils
les plus recherchés actuellement en France sont ceux techniques, avec
des compétences managériales.
Comment trouver à terme ce type de profil en France,
par exemple, s'ils ne peuvent pas auparavant commencer par des projets
exclusivement techniques. Les projets les plus techniques permettent le plus
souvent de former, puis d'acquérir les compétences
managériales. Enfin, sur ce point, il est fortement probable que les
pays comme l'Inde, le Maroc ou la Roumanie ne se limiteront pas à la
fourniture de prestations purement techniques mais proposeront aussi de plus en
plus de prestation de gestion de projet, avec des profils de chef de projet ou
de conduite du changement. La concurrence risque donc de se faire sur tous les
profils.
La deuxième difficulté est de mettre en place et
de gérer ce type de projet. Il est délicat de gérer les
projets en offshore outsourcing et il est nécessaire pour les
entreprises de gagner en
maturité et en expérience. Cela nécessite
des compétences achats, juridique, de management de projet, de conduite
du changement, d'analyse des risques,...De plus, les entreprises ont souvent
une mauvaise vision de leur projet en interne. Ainsi, peu connaissent le
coût en interne de leurs prestations, peu suivent et connaissent le
coût total de ces prestations effectuées ensuite par un
prestataire. Sans ces données, il est très difficile
d'évaluer un projet passé en offshore outsourcing.
Enfin la troisième difficulté concerne la
politique interne de l'entreprise. En effet, les Directions
Générales ont limité le recours à l'Offshore
Outsourcing à cause de la mauvaise image perçue. De plus, les
sociétés françaises, et particulièrement les
banques, ne souhaitent pas que l'on sache qu'ils participaient à ce type
d'opération. Jusqu'à peu de temps, il s'agissait donc
principalement d'actions tests, en province ou dans les pays proches de la
France (Maroc, Espagne,...). Il est à noter que cette situation change,
et que même si peu de communication est faite autour de ces projets, le
recours à l'Offshore Outsourcing est de plus en plus poussé par
les Directions Générales.
II. Modèle d'analyse achat d'un projet d'offshore
outsourcing
Dans cette partie je vais tenter de définir une
méthode d'analyse de la faisabilité d'un projet offshore
outsourcing. L'originalité de la méthodologie proposée est
d'être orientée vers les achats et non vers la gestion de projet.
Cette méthodologie ne vise donc pas à définir les bonnes
pratiques en terme de management de projet. Il vise plutôt à
donner des outils pour les personnes en charge du sourcing en offshore
outsourcing. Cette méthodologie est basée sur mon
expérience dans un grand groupe bancaire français ainsi que
divers témoignages recueillis auprès de personnes ayant une
expérience de ce type de projet (prestataire, acheteur,...).
J'appliquerai, à la fin de ce chapitre, cette méthode à un
projet réellement rencontré dans le cadre de mon stage de fin
d'étude.
Partie 1 - Qualification du besoin
La qualification du besoin est la première phase
d'analyse mais est aussi la phase la plus souvent oubliée dans un projet
d'offshore outsourcing. C'est elle pourtant qui doit être le point de
départ de l'analyse et qui doit permettre d'étudier à la
fois les caractéristiques de l'organisation cliente et de la prestation,
puis de les mettre en phase. La fonction achats a un rôle central
à jouer dans cette étape car, en tant que fonction transversale,
elle est capable de faire la synthèse des éléments et des
échanges avec les autres fonctions de l'organisation.
1. Impacts Internes
PROJET
ORGANISATION CLIENTE
EXTERNALISATION
DELOCALISATION OFFSHORE
OUTSOURCING
Dans un premier temps, l'analyse a pour objectif
d'étudier l'impact que peut avoir l'organisation sur un projet
d'offshore outsourcing. En effet, toutes les organisations ne sont pas
prêtes pour ce type de pratique. L'offshore outsourcing se divise en deux
sous-parties :
l'externalisation et la délocalisation de la prestation.
Il convient donc d'étudier l'adaptabilité de l'organisation pour
chacun de ces deux éléments.
Pour mener cette étude, j'ai développé
une grille d'analyse permettant d'évaluer la capacité d'une
organisation a mené un projet ou effectué une prestation en
offshore outsourcing. Vous trouverez ci-dessous les premiers
éléments de cette grille, pour illustration.
Externalisation
|
Niveau 0
|
Niveau 1
|
Niveau 2
|
Niveau 3
|
Pratique de l'externalisation
|
|
|
|
|
L'organisation a-t-elle l'habitude de travailler avec des
prestataires qui ne
|
Aucune experience
|
Quelques experiences
|
Nombreuses experiences
|
Pratique courante de
|
sont pas présents sur site?
|
récente et équivalente
|
récentes et équivalentes
|
récentes et équivalentes
|
l'externalisation
|
...
Délocalisation
Expérience en management interculturel
L'organisation a-t-elle l'habitude de travailler avec des
partenaires étrangers?
|
Entreprise franco- française (client, fournisseur,
filiale,...)
|
Quelques experiences à l'international
|
Groupe multinational Travail courant avec des
partenaires étrangers dans l'ensemble
de l'organisation
|
...
Cette grille permet de placer la contrainte sur une matrice et de
mesurer la capacité de l'organisation pour mener des prestations en
offshore outsourcing :
0 1 2 3 Délocalisation
Chaque organisation est unique et la réussite d'un
projet, quel qu'il soit, dépend de son niveau de maturité pour ce
type de projet. Il est donc nécessaire d'appliquer une stratégie
cohérente avec la maturité de son organisation en termes
d'externalisation et de délocalisation.
2. Impacts Externes PROJET
EXTERNALISATION
DELOCALISATION OFFSHORE
OUTSOURCING
TYPE DE PRESTATION
Après avoir effectué une analyse de
l'organisation cliente, l'acheteur doit, de la même manière
analyser l'impact de la prestation sur le projet. Ce type d'analyse est assez
courant pour l'externalisation6 mais est plus rare pour les
délocalisations. Il est reconnu que certaines prestations sont
très adaptées à l'offshore comme le développement
ou les télé opérations, et que d'autres le sont beaucoup
moins, comme l'assistance à maîtrise d'ouvrage. Comme pour
l'analyse interne, je vous propose ci-dessous les premiers
éléments de la grille développé à cet
effet.
Externalisation Niveau 0 Niveau 1 Niveau 2 Niveau
3
Environnement instable
L'environnement de la prestation (technique, légal,
sécuritaire) est-il instable?
...
Délocalisation
Standardisation de la demande
Existe-t-il des contraintes locales provenant du pays du
client? (connaissance local, accent, règle ou norme spécifique au
pays, vocabulaire métier dans une langue différente, etc.)
Environnement stable, rendant possible
les investissements internes
Nombreuses contraintes locales
Environnement stable, mais l'organisation n'a pas
les moyens d'investir
Quelques contraintes locales, entrainant des
coûts importants d'adaptation
Environnement en mouvement rendant économiquement
plus avantageux l'externalisation
Quelques contraintes locales, mais adaptation facile
Environnement trop instable pour permettre
des investissements suffisants en interne
Aucune contrainte local, prestation standard
...
Cette grille permet de placer la contrainte sur une matrice et de
mesurer l'adaptation de la prestation à l'offshore outsourcing :
6 Voir notamment les recherches de J.Barthelemy
0 1 2 3 Délocalisation
Externalisation
3. Matrice de faisabilité
Une fois les impacts interne et externe étudiés,
il convient de les mettre en rapport dans une matrice, que j'appelle «
matrice de faisabilité ». Cette matrice a pour objectif de montrer
en fonction du niveau des deux impacts, l'adaptabilité d'une prestation
à l'offshore outsourcing. Il s'agit d'un outil d'aide à la
décision dont les résultats doivent ensuite analysés.
PROJET
0
1 2 3
Impacts Internes
ORGANISATION CLIENTE
EXTERNALISATION
DELOCALISATION OFFSHORE
OUTSOURCING
TYPE DE PRESTATION
Impacts Externes
3
2
1
RISQUE FORT
RISQUE VS COUT
PEU DE RISQUE
Externalisation Délocalisation
La grille se lit ainsi : plus le cercle est vers le haut
à droite, plus la délocalisation et/ou l'externalisation est un
choix pertinent. La zone rouge correspond à une situation de risque
forte dans laquelle l'offshore outsourcing classique (complètement
externalisé / complètement délocalisé) engendre un
risque important d'échec du projet.
La zone orange correspond à une situation où
l'offshore outsourcing classique conduira à un trade-off entre
coût et risque. En effet, dans cette zone, l'organisation peut choisir
entre payer des coûts supplémentaires pour s'assurer la
réussite du projet ou accepter un risque supplémentaire
d'échec. Les coûts correspondent à des coûts de
formation, de consulting, de
conduite du changement ou de gestion de projet
supplémentaire. Le risque correspond aux coûts de
non-qualité, de retard, juridique, d'image, social, etc. L'entreprise
doit évaluer a priori ces coûts et les intégrer dans
l'analyse.
Enfin, la zone verte correspond à une situation avec
peu de risque, dans laquelle l'organisation a une bonne maitrise de ces
pratiques et où la prestation est bien adaptée à ce type
de projet.
La position des cercles sur la matrice est mobile. Le
rôle des achats est de pouvoir donner les clés pour faire
évoluer cette position. L'organisation doit jouer sur les impacts
internes et externes pour faire glisser les cercles vers la zone verte. Ainsi,
il est possible de découper la prestation pour qu'une partie soit bien
adaptée à l'externalisation et à la délocalisation.
Des formations peuvent être mises en place pour améliorer les
processus. Une bonne communication vers les salariés peut permettre de
diminuer le risque social. Les achats doivent être force de proposition
dans ce domaine.
Une fois cette première analyse effectuée, les
achats doivent se baser sur ces résultats pour proposer la solution et
le type de sourcing le mieux adapté. La suite de l'étude en donne
les clés.
Partie 2 - Qualification de l'offre
Le schéma que je propose se veut pratique. En effet,
l'acheteur a étudié dans la partie précédente, les
contraintes dont son organisation devait faire face dans un projet d'offshore
outsourcing. En étudiant les contraintes internes et externes,
l'acheteur a une vision globale de la situation. L'objectif est alors de
trouver la solution qui sera le plus adapté aux contraintes
exprimées. Ce choix se fera par élimination successive, pour
aboutir à la solution la plus adaptée. Voici ci-dessous un
schéma permettant d'illustrer la marche à suivre.
ENSEMBLE DES POSSIBILITE
Mode d'offshore outsourcing
Global Sourcing
Solution retenue
CRITERES
CRITERES
Sélection du fournisseur
1. Mode d'offshore outsourcing
Ce que j'appelle le « mode d'offshore outsourcing »
correspond au mécanisme d'Offshore Outsourcing choisi. Trois modes
différents pour l'externalisation et pour la délocalisation
cohabitent.
Externalisation :
Sur site (Niveau 1).
Il s'agit du degré le plus faible d'externalisation.
L'équipe est détachée dans les locaux du client. Les gains
associés sont donc réduits à cause des frais de
déplacement, d'hébergement,...
Front / Back Office(Niveau 2).
Une partie de la prestation est effectuée sur le site
du Client et le reste dans les locaux du prestataire. Ce mode d'externalisation
permet d'assurer des gains financiers tout en ayant des contacts directs avec
le client.
Le Centre de service (Niveau 3).
La prestation est effectuée par un prestataire externe,
dans les locaux de ce prestataire. Il s'agit du degré le plus important
d'externalisation puisque le prestataire a la charge complète de la
prestation. Le prestataire peut ainsi mutualiser les compétences entre
différents clients, la prestation n'étant plus facturée
par jour mais en fonction des besoins.
|
Délocalisation :
Les définitions des termes peuvent varier d'un auteur
à l'autre. Les écarts de définitions ont peu d'importance
sur l'analyse, seule la cohérence des éléments est
importante. Malgré tout, comme définit dans la première
partie, une prestation est considérée comme
délocalisée dès qu'elle est effectuée en dehors de
la zone géographique du client.
Near-nearshore (Niveau 1).
Il s'agit d'une délocalisation très proche du
client, le plus souvent les délocalisations en province, dans le
même pays que le client. La langue y est identique, mais le client
profite des salaires et des coûts de structure réduits.
Nearshore (Niveau 2).
Il s'agit d'une délocalisation proche du client. Pour
un client français, cela veut dire en Europe du Sud (Espagne, Portugal),
Afrique du Nord (Maroc) et Europe de l'Est (Roumanie, Bulgarie, Pologne). La
communication est facilitée car la culture est proche, et les distances
sont faibles.
Offshore (Niveau 3).
Il s'agit d'une délocalisation lointaine. Les exemples
sont nombreux et il y a peu de points communs entre ces pays. La langue peut
être identique ou différente de celle du client, comme la culture
ou la distance. Dans ce type de délocalisation, pour un client
français, les pays les plus couramment cités sont l'Inde bien
sûr, l'Ile Maurice, le Vietnam, le Sénégal, le
Brésil ou la Chine.
|
Cette étude est basée sur une vision
centrée sur l'Europe. Ainsi le concept de délocalisation est
relatif au pays du client. Ainsi, le Nearshore pour les Etats-Unis correspond
au Mexique et au Canada. Pour l'Inde, certains prestataires locaux
délocalisent en Nearshore au Vietnam, en Chine ou à Singapour.
Ainsi, l'analyse doit être adaptée en fonction de la situation
géographique de l'organisation, dans le cas contraire.
Le lient entre l'éloignement géographique et la
diminution des coûts ou la disponibilité de ressources
supplémentaires n'est pas automatique. Plus un pays est proche d'une
zone développée et plus les coûts y sont
élevés, car ce pays profite des échanges entre les deux
pays et le jeu de l'offre et de la demande a tendance à égaliser
les prix relatifs entre les pays7.
7 Voir Modèle Heckscher - Ohlin - Samuelson
Ainsi, les pays les plus proches de l'Europe de l'Ouest sont
plus cher que les pays plus éloignés, qui ne profitent pas des
échanges avec l'Europe. La réalité est bien sûr
beaucoup plus complexe et intègre une multitude d'autres facteurs
(niveau d'éducation, instabilité politique, économique et
sociale, lien diplomatique, barrière commerciale,...) qui font que deux
pays, même proche, n'acquière pas forcement le même niveau
de vie.
Le second impact est l'offre et la demande. La distance a un
léger impact sur ce point puisque plus le centre est loin et moins le
nombre d'entreprise capable de gérer ce type de projet est important, et
donc plus la demande est faible. Ainsi, certaines zones encore bon
marché car les sociétés capables de s'y implanter sont
encore peu nombreuses. A l'inverse, d'autres pays, comme le Maroc, font face
à une inflation très importante des coûts de production,
car la demande y est très forte, puisque le pays est facile
d'accès, avec peu de décalage horaire et une population jeune
parlant arabe, français et espagnol. L'Inde est une exception puisque la
demande y est très forte alors que ses clients sont situés loin,
principalement aux Etats-Unis et en Europe de l'Ouest.
Une fois définis les différents modes de
délocalisation et d'externalisation, il convient de l'appliquer à
la matrice de faisabilité. La matrice améliorée
présentée ci-dessous intègre le mode d'externalisation,
dans la partie supérieure de la case et le mode de
délocalisation, dans la partie inférieure de la case. En fonction
de la position du cercle « Délocalisation » et «
Externalisation », la matrice donne la meilleure combinaison concernant le
projet à mettre en place.
|
Délocalisation
|
Externalisation
|
Niveau 1
|
Near-nearshore
|
Front Office
|
Niveau 2
|
Nearshore
|
Front / Back Office
|
Niveau 3
|
Offshore
|
Centre de service
|
2
1
Impacts Externes
3
Front Office
|
Front/Back Office
|
Centre de service
|
Near-nearshore
|
Nearshore
|
Offshore
|
Front Office
|
Front/Back Office
|
Front/Back Office
|
Near-nearshore
|
Nearshore
|
Nearshore
|
Front Office
|
Front Office
|
Front Office
|
Near-nearshore
|
Near-nearshore
|
Near-nearshore
|
1 2 3
Impacts Internes
Externalisation
Délocalisation
Cette phase de l'étude est importante car les
résultats de celle-ci conditionnent le pays de localisation ainsi que
les éléments pour le choix du prestataire. Ce type d'étude
est souvent réalisé par l'équipe en charge du projet de
sourcing mais de façon informelle et non structurée. Par exemple,
l'acheteur imagine facilement qu'une prestation nécessitant beaucoup de
communication (spécification vague,...) sera difficile à mener
dans un centre de service en Inde. Cet outil permet de systématiser
cette analyse et de la baser sur des éléments concrets.
L'ensemble de ces modes d'offshore outsourcing décrit
ci-dessus se combinent. Ainsi, il est possible d'avoir à l'extrême
un centre de service en near-nearshore (un centre de service en province) ou
à l'inverse d'avoir des équipes offshore sur site («
équipe volante »).
2. Global Sourcing : analyse macro
Le Global Sourcing consiste à exploiter l'offre mondiale
des facteurs de production. Cette stratégie peut être
adaptée à la production de service. Concrètement, le
Global Sourcing consiste à faire des arbitrages entre les pays
basés sur un certains nombres de critères
(disponibilité des ressources, coûts et
évolution du marché, stabilité,...). Ces arbitrages
doivent fournir des éléments pour la localisation du sourcing.
Dans la démarche présentée, cette analyse
est conditionnée par les résultats du choix du mode d'offshore
outsourcing, et particulièrement du mode de délocalisation
retenu. En effet, si l'analyse conseille de faire le sourçage de la
prestation en near-nearshore, il est inutile d'étudier les
capacités disponibles en Afrique du Sud.
Je propose une grille d'analyse permettant, quelle que soit la
zone ou le mode de délocalisation, de juger de la bonne localisation de
la prestation. Ainsi, cette analyse est adaptée pour le choix d'une
région, d'un pays ou même d'une ville.
J'ai pu distinguer quatre macro-critères que permettant
d'évaluer une zone géographique : l'impact sur le coût,
l'impact sur la qualité, l'impact sur la pratique du business et la
connaissance de la zone par le client.
Voici quelques exemples de critères tirés de la
grille d'analyse développée.
Impact Coût :
Différentiel de salaire et de frais de structure.
Coût des télécommunications.
Fiscalité.
Evolution de l'offre et de la demande.
Impact Qualité :
Spécialisation dans le type de prestation
souhaité.
Qualité de la main d'oeuvre et de la formation.
Certification.
Nombre de ressource qualifiée dans le pays et potentiel
de développement. Qualité des infrastructures (aéroports,
routes, télécommunication).
Impact pratique du business :
Facilité de communication et différences
culturelles. Stabilité politique et économique.
|
Volonté de la zone (rôle moteur du gouvernement
régional, national ou local,...). Législation, bureaucratie et
corruption.
Connaissance du pays :
Présence du client. Expérience du client.
|
3. Sélection du fournisseur : analyse micro
Une fois définit le mode d'offshore outsourcing puis la
zone de localisation, il est nécessaire de choisir le bon
prestataire.
Critères de choix :
Il existe de nombreuses sociétés de service
capables de gérer des projets en Offshore Outsourcing. Il convient de
bien évaluer les sociétés ainsi que leur capacité
à faire. De nombreux éléments sont à prendre en
compte mais voici ceux le plus couramment rencontrés.
D'abord, le prestataire doit bien avoir compris le besoin du
client. Ainsi, la compréhension du besoin client exprimée dans la
réponse au cahier des charges est cruciale dans un projet d'Offshore
Outsourcing, car il sera difficile et couteux de réexpliquer ou
redéfinir le besoin ensuite. Le fait que le prestataire pose des
questions pendant la phase de consultation et identifie les points pouvant
sembler obscure est un élément très positif.
Une fois le besoin compris, le prestataire doit être
capable de s'engager. D'abord en terme de coût, notamment pour les
missions de conseil ou de prestation informatique, l'acheteur doit favoriser au
maximum l'engagement au forfait. Cela permet de cadrer la prestation en terme
de volume et de délai, et cela entraine un engagement de résultat
de la part du prestataire. Même si toute la prestation ne peut pas
être au forfait, l'acheteur doit identifier les parties du projet qui
peuvent l'être.
L'engagement doit aussi se faire sur la qualité, en
mettant en place des indicateurs comme des indicateurs de niveau de service
(ou Service Level Agreement) pour suivre la prestation. Ces indicateurs
doivent être négociés et acceptés par les deux
parties avant le démarrage de la
prestation. Ces indicateurs peuvent être associés
à des pénalités et doivent pouvoir permettre au client de
sortir du contrat.
La phase de réversibilité doit, elle aussi,
être discutée en amont de la prestation et prévoir, au
moins dans les grandes lignes, les actions du prestataire et du client au
moment de la fin du contrat.
L'acheteur doit vérifier la capacité de
production du prestataire. Il convient d'abord de vérifier l'existence
même du prestataire, ainsi que sa présence dans le pays en
question. Cela peut être une visite sur site, la remise de documents
officiels attestant de l'activité de la société, les
états comptables de la société, des renseignements fournis
par des partenaires locaux,... Cette étape est très importante
car l'offshore outsourcing est très à la mode et attire des
sociétés plus ou moins sérieuses.
L'acheteur doit aussi vérifier la capacité de
production des sociétés reconnues. Les sociétés
occidentales commencent à s'internationaliser et ouvrir des centres dans
les pays à bas coût. Certains sites sont pourtant en construction,
et peuvent ne pas être complètement opérationnels. Quant
aux prestataires locaux, ils peuvent ne pas avoir les compétences
pointues requises (compétences techniques, fonctionnelles,
linguistique,...) particulièrement dans les pays avec un turn-over
important.
La vérification de la qualité pressentie de la
prestation peut être validée en demandant des
références sur des projets équivalents, avec des
coordonnées de clients à contacter. Il peut aussi être
opportun d'interviewer des ressources du prestataire pour s'assurer de leurs
compétences et leur savoir-faire, en direct ou en
visioconférence. Les implantations locales du client peuvent aussi
fournir des éléments sur l'existence d'un prestataire. Enfin,
dans le cas de prestations informatiques liées à un progiciel,
l'éditeur de la solution est souvent une bonne source d'information.
La santé financière, l'historique ainsi que la
stratégie de développement de la société doivent
être pris en compte, pour s'assurer que la prestation pourra être
effectuée jusqu'à son terme.
Les certifications sont des éléments souvent mis
en avant par les prestataires. Il s'agit évidemment d'un point
important à prendre en compte mais il s'agit souvent d'un argument
de communication pour les prestataires. L'acheteur doit donc
savoir ce qui se cache derrière ces certifications. Ainsi, la norme ISO
9001-2000 permet de vérifier l'existence de procédure chez le
prestataire ainsi que leur bonne application. Elle ne juge en aucun cas de la
qualité de ces procédures. De même, la norme CMMI
(Capability Maturity Model Integration) ne s'applique qu'au projet de
développement et d'intégration de projet informatique. Inutile
donc pour d'autres types de prestation. Il s'agit encore d'une
vérification des processus. Enfin, ITIL (Information Technology
Infrastructure Library) est un ensemble de recommandations pour la gestion du
système d'information d'une organisation. De plus, la certification ITIL
se fait au niveau de l'individu, et non au niveau d'une organisation, comme
pour l'ISO ou le CMMI.
Points importants à négocier :
De nombreux points sont à négocier avec le
prestataire. En terme de coût, l'effet prix lié au
différentiel de salaire et de frais de structure ne doit pas faire
oublier que le gain se fait sur le coût total de la prestation. Ainsi,
deux fois plus de volume de prestation payés deux fois moins cher n'a
aucun impact sur le coût de la prestation. Une attention
particulière doit donc être donnée sur la
productivité des équipes locales.
Il est important de raisonner en coût complet, pour
assurer une comparaison juste entre différents prestataires
présents dans des zones différentes. De plus, c'est cette base
qui permet de calculer les gains par rapport à l'existant. Ne pas
prendre tous ces éléments en compte risque de
décrédibiliser les gains affichés par les projets en
offshore outsourcing. Voici une liste non-exhaustive des éléments
à prendre en compte pour calculer le coût complet d'une
prestation.
Optimisations possibles
1. Coûts du prestataire
1.1 Frais d'initialisation
Formation des équipes locales Investissement pris en
partie en charge par le prestataire.
Constitution des équipes Négociation sur le
profil de la personne en charge de cette phase.
Inclus une quote-part de frais
généraux.
1.2 Frais en opération
Taux journalier moyen personnes productives
Benchmark des coûts (salaires, structures,...),
négociation du tarif et suivi de la productivité.
Frais d'encadrement
Déplacement / Hébergement Favoriser la
videoconférence, négociation d'une grille plafonnée de
remboursement.
Ecart de productivité Mise en place
d'indicateurs
1.3 Risques
Risques financiers (Frais de change) Facturation en euros
sans clause de réevaluation liée au taux de change
Risques de non-qualité (Bugs,...) Mise en place
d'indicateurs qualité
Risques sur les délais Mise en place d'indicateurs
délai
2. Surcoûts du client
2.1 Coûts de pré projet
Etude d'opportunité Développement d'une base de
connaissance pour ce type de projet.
Processus Achats Amélioration du processus achats,
Professionnalisation des pratiques
Offshore Outsourcing.
Contractualisation Amélioration du processus
contractuelle, Utilisation du droit du client.
2.2 Frais d'initialisation
Formation des équipes clientes Développement
d'une base de connaissance pour ce type de projet.
Frais installation télécom Stratégie
télécom globale.
2.3 Frais récurrent
Frais télécom récurrents
Stratégie télécom globale.
Coordination à distance Utilisation d'outil
(groupware,...).
Frais de déplacement client Favoriser la
videoconf.
2.4 Moyen mis à disposition pour le prestataire
Local Externalisation
Téléphone / Messagerie Externalisation
Le turn-over des équipes locales est un
élément qui doit être discuté au préalable.
Ainsi, le Niveau de Service peut contenir un indicateur du niveau de turn-over.
De plus, en cas de turnover important, un plan d'action doit être
proposé par le prestataire. Un turn-over important est un
élément le plus souvent subi, mais dont le prestataire est
souvent à l'origine. Ainsi, certaines sociétés bien
qu'évoluant dans une zone à fort turn-over (en Inde par
exemple)
parviennent à le limiter grâce à une
politique de ressource humaine active, l'utilisation de la renommée de
la société ou le fait de proposer des avantages
supplémentaires aux salariés.
De plus, certains éléments sont à prendre
en compte au niveau contractuel dans ce type de prestation, notamment la
sécurité des données (clients ou salariés), la
propriété intellectuelle ou la continuité de service
(résilience).
La méthodologie présentée dans ce
mémoire permet de fournir une réponse à un acheteur
confronté à un projet d'achat en offshore outsourcing. Elle doit
être améliorée avec la pratique, et doit être
adaptée et enrichie en fonction du type de prestation concernée.
Malgré tout, elle permet de sensibiliser l'acheteur sur un certains
nombres de points clés, tout au long du projet. Une fois le prestataire
choisi et la prestation démarrée, l'acheteur doit pouvoir suivre
le déroulement de la prestation et ainsi voir les points
d'amélioration pour les projets futurs.
Dans cette partie, j'ai pris comme hypothèse que le
projet d'achat en offshore outsourcing était pris en charge par les
achats. Mais cela est-il naturel ? Quel est la place des achats dans les
projets d'achat en offshore outsourcing ?
III. Place des Achats dans l'offshore outsourcing
1. Offshore outsourcing et maturité Achats
Le niveau de maturité du service achats a un rôle
central dans la réussite d'un projet de sourcing offshore outsourcing.
Elle doit avoir les compétences requises pour ce type de projet. Ces
compétences comprennent, en premier lieu, les bases nécessaires
à l'exécution de tous projets achats (maîtrise du processus
achat, connaissance en droit des contrats, compétence de
négociateur,...) mais aussi la maîtrise de certaines
compétences spécifiques à ce type de projet.
Voici une liste des compétences que la fonction achats
doit acquérir pour pouvoir mener un projet de sourcing en offshore
outsourcing.
Connaissance de l'offshore outsourcing.
La capitalisation des expériences de dossier d'offshore
outsourcing est une première étape dans l'acquisition d'un
savoir-faire dans ce domaine. Les acheteurs ont souvent une expérience
dans l'externalisation. La partie délocalisation est souvent plus
difficile à intégrer et requière des compétences
spécifiques. Cela implique de posséder des outils, comme des
bases de données pour les tarifs, des benchmarks, une cartographie des
prestations,...
Compétences spécifiques - Externalisation :
Connaissance métier :
Le fait de bien connaître la prestation est un
pré-requis quand il s'agit de traiter un dossier d'externalisation, et
donc d'offshore outsourcing. Il ne s'agit pas d'avoir des acheteurs
spécialistes mais ils doivent connaître suffisamment la prestation
pour pouvoir apporter de la valeur lors des rencontres avec les clients
internes et les fournisseurs.
Connaissance du marché :
Il est important que l'acheteur connaisse son marché
fournisseur, l'offre disponible et les spécificités de chaque
prestataire, l'évolution du marché, les impacts
réglementaires,...
Compétences spécifiques - Délocalisation
:
Langue et travail en milieu multi culturel :
|
Le Sourcing mondial est aujourd'hui une réalité.
Les distributeurs et les industriels n'hésitent plus à
s'approvisionner en Chine ou en Turquie. Dans le cas de l'offshore outsourcing,
maitriser plusieurs langues et pouvoir s'adapter aux autres cultures est une
nécessité. Bien que l'anglais soit devenu obligatoire pour
intégrer une société importante, la réalité
est que de nombreuses personnes sont incapables de communiquer en anglais.
De plus, l'acheteur d'offshore outsourcing doit pouvoir
comprendre la culture ainsi que le contexte économique et politique d'un
pays ou d'une région, pour être efficace dans son sourcing et la
négociation.
Connaissance en commerce international :
L'acheteur doit être capable de comprendre les
problématiques liées au commerce international comme les risques
de change, les éléments influençant l'offre et la demande,
le droit international,...
Rôle des achats dans l'organisation :
Il s'agit d'un point dont l'acheteur n'est souvent pas
maître, en tant qu'individu. Mais le rôle des achats, comme la
vision qu'en ont les autres services, sont des éléments
importants. Ce rôle ne s'appuie pas forcement sur les points
précédents, car la fonction achat est prise ici dans son
ensemble. Ainsi, même si la maturité dans l'offshore outsourcing
est moyenne, le reste de l'organisation aura confiance dans une direction des
achats de qualité.
|
Différents modes de Sourcing existent. Le mode de
Sourcing utilisé par l'acheteur responsable d'un projet d'achat en
offshore outsourcing dépend de sa maturité achats pour ce type de
projet. Ces différents modes sont différents niveaux
d'externalisation, non pas de la prestation d'offshore outsourcing, mais du
Sourcing en lui-même.
Prestataire « nationale »
Intermédiaire
(cabinet spécialisé,...)
Prestataire local (SSII indienne,...)
I.P.O. (International Purchasing
Offices)
Complexité du schéma de Sourcing
Prestataire « nationale » : il s'agit du
schéma le plus souvent mis en place aujourd'hui et aussi le plus facile
à gérer. Les prestataires « nationaux » proposent
d'ailleurs souvent dans leur offre d'exécuter une partie de la
prestation en offshore outsourcing. Depuis peu, les clients demandent parfois
qu'une partie ou la totalité de la prestation soit
exécutée en offshore outsourcing, et intègre cette demande
dans le cahier des charges.
L'interlocuteur, que ce soit pendant l'appel d'offre, la phase
de négociation, la phase de contractualisation ou durant la vie du
projet est français. Il n'y a donc pas de risque
d'incompréhension liée à la langue ou la culture. De plus,
la négociation se fait le plus souvent dans la monnaie du client et avec
un contrat basé sur le droit du pays du client. Cela facilite les
transactions, et limite le besoin en compétences supplémentaires
(connaissance en finance ou en droit international). Enfin pendant la vie du
projet, l'interlocuteur est le prestataire basé dans le pays du
client.
Malgré tout, le gain financier associé est assez
limité. D'abord parce que le prestataire supporte la plupart des
risques de l'offshore outsourcing, et que cette prise de risque se monnaye.
Mais aussi, parce que le manque de connaissance du marché de
l'offshore
outsourcing de la part du client, ne permet pas une comparaison
efficace des offres (peu de données disponibles sur les salaires
locaux,...).
Intermédiaire : ce schéma consiste
à utiliser un intermédiaire spécialisé (cabinet de
conseil, freelance,...) qui possède les connaissances du marché
ainsi que les compétences manquantes à la Direction des
Achats.
Ainsi, le client mène ses premiers projets d'offshore
outsourcing avec une société locale, en profitant des
compétences externes pour diminuer le risque. Les intermédiaires
sont souvent neutres et sont payés soit au forfait, soit en fonction des
gains. Ils ont donc intérêt, contrairement à la solution
précédente, à faire diminuer le coût de la
prestation. Le cabinet peut ensuite épauler le client pendant
l'exécution de la prestation.
Cette solution est souvent coûteuse et doit être
considérée comme un investissement de la Direction des Achats
pour acquérir les compétences manquantes.
Prestataire local : Il s'agit de directement
contractualiser avec un prestataire local.
Ce schéma est souvent risqué, le client
supportant tous les risques de l'offshore outsourcing. L'acheteur doit donc
avoir une maitrise parfaite des différentes composantes de l'offshore
outsourcing en terme d'achat car les risques sont de natures diverses :
évaluation de la société, risque de change, risque
juridique,...
Enfin, un investissement des Achats relativement
conséquent est nécessaire pour ce type de projet, que ce soit en
temps mais aussi en moyens (déplacement, communication,...). Cela
s'adresse donc à des projets ayant une taille significative justifiant
ce type d'investissement.
Les gains financiers sont assez importants, puisque ce
schéma limite le nombre d'intermédiaire. De plus, elle permet
d'obtenir des informations stratégiques, comme les niveaux de salaire
sur place réellement appliqué par les prestataires, leur
évolution, etc.
International Purchasing Offices : A l'image de
l'industrie, quand le client possède un volume suffisant de prestations
en offshore outsourcing, il devient intéressant pour lui de disposer
d'une structure spécialisée spécifique à ce type
d'achats.
Les acheteurs de l'I.P.O. doivent avoir un profil très
international (maitrise de plusieurs langues, expérience réussie
à l'international,...), pouvoir suivre les tendances du marché et
les besoins internes, et être très mobile. Enfin, ils doivent
maitriser l'ensemble des problématiques liées à l'offshore
outsourcing.
Les avantages d'un I.P.O. sont nombreux et ce schéma
permet des gains financiers importants puisque le client passe directement par
le prestataire local. De plus, les risques sont limités puisque la
structure maitrise ce type de problématique.
La limite est que compte tenu de l'investissement (nombreux
frais de déplacement, de structure, spécialisation de l'acheteur,
nature des profils, frais de formation,...), il convient à des
entreprises ayant un fort besoin dans ce domaine.
A noter que, les certaines sociétés indiennes
ont un statut particulier. En plus, d'être des SSII implantées en
Inde et donc ayant un réel savoir-faire dans ce pays, certaines
s'implantent de plus en plus dans les pays des clients. Aujourd'hui certains
acteurs indiens rivalisent avec les SSII occidentales. L'exemple de Wipro qui a
récemment acheté la SSII américaine Infocrossing pour
environ 600 millions de dollars montrent bien l'émergence de ces
sociétés. TCS est par exemple présent en Uruguay, au
Brésil, en Chine, au Chili, en Australie, au Royaume Unis, au Japon et
en République Tchèque. Il s'agit d'un double développement
pour à la fois se rapprocher de ses clients mais aussi développer
des centres de service en dehors de leur frontière. Infosys, autre poids
lourd indien, emploie un cinquième de son effectif hors d'Inde.
Ainsi, ces trois sociétés peuvent être
à la fois consultées en tant que prestataires nationaux, compte
tenu de leurs implantations dans les pays du client, mais aussi en tant que
prestataires locaux. L'exemple d'ABN Amro, qui a choisi trois
sociétés indiennes (TKS, Patni et Infosys) pour la gestion de son
informatique, marque d'ailleurs bien l'émergence d'une véritable
offre indienne, en dehors de l'Offshore Outsourcing et deviennent des vrais
concurrents des SSII européennes ou américaines.
2. Rôle possible des achats
Compte tenu des éléments discutés dans ce
mémoire, il semble opportun de définir le rôle de la
Direction des achats dans un projet de Sourcing offshore outsourcing.
Tout d'abord, il convient de rappeler que la Direction des
Achats est une fonction transversale, et une fonction support. Cela a deux
conséquences dans un projet de Sourcing, quel qu'il soit. D'abord, la
Direction des Achats n'agit pas seule, et c'est d'ailleurs une de ses forces
car elle est capable de travailler avec les autres fonctions. De plus, elle
travaille pour un client interne, pour qui elle doit trouver l'offre la plus en
adéquation avec le besoin exprimé, en terme de coût, de
qualité ou de délai.
Ce rôle des achats en général, s'inscrit
dans la tendance de fond des organisations à travailler en groupe de
travail. Dorénavant, les fonctions ne travaillent plus seules, mais de
façon coordonnée au sein de « cross fonctionnal team ».
Ces équipes sont constituées d'individus provenant de
différents domaines et sont rassemblés pour atteindre un objectif
qui ne pourrait être atteint sans cette équipe.
Ainsi, dans un projet d'offshore outsourcing, les achats
possèdent certaines compétences qui peuvent être mise en
avant. Ces compétences concernent surtout la maîtrise du processus
achats (définition du besoin, appel d'offre, négociation,
contractualisation) et la connaissance du marché (tendances du
marché, coût ou expérience sur d'autres projets, notation
de fournisseur...).
La fonction achat doit aussi maîtriser d'autres
compétences spécifiques au projet en offshore outsourcing. Ces
compétences peuvent soit être partagées par l'ensemble des
acheteurs d'une catégorie d'achat (ex : formation de tous les acheteurs
de prestations informatiques à l'achat en offshore outsourcing), soit
par un petit nombre d'expert (ex : identification de plusieurs experts achat
offshore outsourcing, intervenant en support de l'acheteur en charge d'un
projet).
Malgré tout, les acheteurs ont besoin des autres
fonctions, qui apportent leur expertise dans ce type de projet. Ainsi, le
contrôle de gestion peut fournir des éléments de
coûts internes, comme le coût actuel de la prestation ; la
direction financière peut fournir des éléments sur les
risques de change et les couvertures possibles ; la direction
juridique peut fournir des éléments de droit international et
national pour ce type de projet ; les filiales dans les pays peuvent fournir
des informations sur l'état du marché et le droit local ; la
Direction en charge du développement durable pour identifier les impacts
du projet pour l'entreprise dans ce domaine.
De plus, le client interne a un rôle central dans le
projet d'achat, d'abord parce qu'il connait son besoin, mais aussi parce qu'il
peut être une source d'informations concernant le marché. Enfin,
c'est lui qui va vivre la prestation au jour le jour, son jugement est donc
à prendre en compte.
Ainsi, dans un projet d'offshore outsourcing, la Direction des
Achats peut avoir plusieurs rôles, suivant son niveau de maturité,
la taille et l'enjeu du projet ou la volonté de la direction.
Impact des achats sur le projet
F A C I L I T A
T E
U R
SUPPORT / INFORMATION
MANAGER DU PROJET
LEADER DU PROJET
Support / Information : Parfois, il peut simplement
être demandé à la Direction des Achats de fournir des
informations, soit dont elle dispose dans le cadre de projets
équivalents, soit tirées de la connaissance du marché.
Cela peut être des tarifs négociés pour d'autres projets ou
des informations sur des fournisseurs.
Manager du projet : Le rôle des achats est alors
de conduire le projet, en suivant le processus achats. La décision de
pratiquer l'offshore outsourcing sur un projet est décidée par le
client interne, mais l'exécution est assurée par
l'intermédiaire des achats.
Leader du projet : Dans ce cas, la Direction des Achats
a un rôle stratégique dans la conduite du projet. La Direction des
Achats doit alors trouver les moyens pour rendre l'organisation plus
compétitive par l'intermédiaire de l'offshore outsourcing. Les
achats participent au choix du mode d'offshore outsourcing, du pays d'accueil,
ainsi que du mode de Sourcing.
Facilitateur du projet : Dans tous les cas, la
Direction des Achats doit jouer le rôle de facilitateur entre les
différents acteurs du projet (prescripteur, utilisateurs, fournisseurs,
directions fonctionnelles,...). Parfois, cela peut être d'ailleurs le
seul rôle de la fonction achats, qui est alors neutre par rapport aux
autres parties prenantes.
La Direction des Achats doit donc bien identifier son
rôle dans le projet. Vouloir avoir un rôle de leader quand il lui
est demandé un rôle de support ne peut que conduire à un
échec dans un projet et discréditer la Direction des Achats.
3. Approche développement de l'offshore
outsourcing
Aujourd'hui, il est demandé à la Directions des
Achats de créer de la valeur et pas simplement réduire les
coûts. Cette tendance, à l'initiative des Directions
Générales, est très délicate pour les fonctions
achats, d'abord parce qu'il s'agit d'une mission supplémentaire qui lui
est confiée, mais surtout car il oblige à repenser
complètement les habitudes et les stratégies achats. Le simple
fait de mettre en concurrence ne permet pas d'apporter de la valeur.
Dans le même temps, l'émergence de l'Offshore
Outsourcing est considérée comme une opportunité pour
réduire les coûts, mais aussi comme une pratique risquée.
Cette image s'appuie sur les grands projets ré-internalisés,
comme celui de JP Morgan, décrit plus haut. Il s'appuie aussi sur les
grandes crises liées aux délocalisations de la production, comme
le cas Nike dans les années 90, qui avait subi une campagne
médiatique très forte sur les conditions de travail dans les
usines de ses sous-traitants en Asie du Sud-Est.
Enfin, troisième tendance, l'innovation est reconnue
comme un élément fondamental dans la création de valeur
d'une organisation. Plus un secteur d'activité est concurrentiel, comme
la Bancassurance en France, plus l'innovation a un rôle central dans la
création de valeur. Ainsi, le développement des cartes de
crédit sans contact, du paiement par téléphones mobiles
sont
parmi les exemples les plus novateurs de l'impact de
l'innovation, et des technologies, sur la création de valeur dans ce
secteur.
Le cas de la WingspanBank.com8 est très
intéressant puisque les dirigeants ont réussi à
créer une banque en ligne de toute pièce en moins de 3 mois. Cela
a été possible grâce à l'utilisation du savoir-faire
des prestataires intégrés au projet. Cet exemple montre bien
l'impact des prestataires dans l'innovation. Ainsi, l'Offshore Outsourcing doit
s'inscrire dans cette tendance et doit pouvoir créer de la valeur pour
la société.
Une première approche est de favoriser le
développement d'acteurs majeurs, spécialisé dans le
domaine bancaire. En Inde, ce type de prestataire existe principalement parce
que les Banques sont les précurseurs ainsi que les plus gros
consommateurs d'Offshore Outsourcing. Ainsi, le rachat de Kanbay,
spécialiste de l'outsourcing bancaire, a permis à Cap Gemini
d'être un acteur majeur dans ce domaine. La création de
spécialiste permet de profiter d'un savoir-faire spécifique pour
un coût parfois inabordable en France.
Le deuxième point est que le faible coût des
prestations en offshore outsourcing doit permettre le lancement de projet ou
l'exécution de processus qui ne serait pas envisageable dans le pays
d'origine du client, compte tenu des coûts associés. Ainsi,
British Airways a délocalisé son centre de réconciliation
de facture. Avant cette délocalisation, le seuil de validation des
transactions s'élevait à 50€ contre 20€ maintenant,
grâce au salaire plus bas des opérateurs. Ainsi, les coûts
de traitement ont diminué tandis que les revenus associés ont pu
être augmentés.
Au-delà de la prestation, l'Offshore Outsourcing peut
permettre de favoriser le business dans les pays d'implantations du client.
Ainsi, cette connaissance par les achats de l'état de certains
marchés peut favoriser l'implantation de nouvelles filiales. Les achats
doivent profiter de ce savoir pour aider l'organisation à se
développer. Attention, ceci ne vise pas les contrats de compensation,
c'est à dire de mêler les obligations en tant que client et
fournisseur (demander que le prestataire soit client de la banque pour obtenir
un marché). Cette pratique est souvent interdite par les Directions des
Achats et ceci quel que soit le pays.
8 Cas Harvard Business School (2002), «
WingspanBank.com »,
Juillet.
Enfin, un domaine où l'Offshore Outsourcing a un impact
très fort et sur lequel les achats peuvent participer est le
développement durable. Le développement durable a un impact fort
dans les Banques. Les risques dont doivent faire face les établissements
financiers sont nombreux : blanchiment d'argent, accès au crédit,
stabilité monétaire...
La Direction des Achats est impliquée dans ce
processus, notamment à la Société Générale
où a été mis en place depuis 2006 un plan Ethical Sourcing
Program (ESP). Ce plan suit trois axes : intégrer les critères
environnementaux et sociaux dans l'exercice des métiers, gérer
dynamiquement et responsablement les collaborateurs, maitriser et optimiser
l'impact direct des activités de la banque sur l'environnement de la
société.
Sur chacun de ces points, l'offshore outsourcing a un impact.
D'abord, sur le premier point, la Direction des Achats Groupe a mis en place
des questionnaires RSE, que les soumissionnaires des appels d'offre doivent
remplir. La note tirée de ce questionnaire doit compter au moins 3% dans
la note globale lors du dépouillement. Des questionnaires
spécifiques ont été crées pour les typologies
d'achat à risque pour la banque, comme la restauration. Un questionnaire
de ce type existe déjà pour les prestations informatiques, mais
elles doivent dorénavant intégrer le risque lié à
une prestation délocalisé.
Mais les organisations doivent aller plus loin et ne pas se
limiter à ce type de questionnaire qui ne fait que contrôler
certains points. Ainsi, l'organisation doit prévoir en amont la
reconversion des personnes, en cas d'offshore outsourcing. En effet, en cas
d'externalisation, le personnel est repris par le prestataire. L'entreprise
cliente doit donc non seulement respecter la réglementation en
matière de droit social, mais aussi prendre en compte la dimension
humaine de ses décisions. L'organisation doit notamment proposer les
formations adéquates aux personnes susceptibles d'être
externaliser, pour ainsi leur permettre de monter en compétence.
Sur le deuxième point, la Direction des Achats doit
assurer une formation adéquate à ses acheteurs pour qu'ils
puissent traiter des dossiers d'Offshore Outsourcing. Comme décrit dans
la partie précédente, ce type de projet nécessite des
compétences spécifiques de la part des acheteurs. L'acheteur qui
traite ce type de projet doit être capable de la faire.
Enfin, sur le troisième point, les acheteurs de
prestation en Offshore Outsourcing doivent pouvoir connaître les impacts
qu'on leur prestation sur l'environnement de la société. Voici
quelques-uns uns des impacts à prendre en compte :
Economie
- Favoriser le développement local (stabilité et
rentabilité des contrats, ...),
- Refuser les pratiques non éthiques (corruption,...).
|
Social
- Assurer des conditions de travail « juste »
(respect des consignes de l'OMT,...),
- Prévoir les conséquences de l'Offshore
Outsourcing dans le pays d'origine (formation, changement de poste,...).
Environnement
- Assurer un développement qui respecte l'environnement
(construction « vert »,...),
- Limiter les déplacements et favoriser les
vidéo/télé conférences.
Le Projet MOOS (Making Offshore Outsourcing Sustainable) a
été lancé en 2004 pour assurer un développement
socialement responsable de l'Offshore Outsourcing. Ce programme est
financé par l'Union Européenne. Bien que ce projet soit
mené par différents syndicats européens et qu'il soit donc
destiné aux salariés, il est fondamental que les organisations
participent, comme le fait Axa, à ce type de démarche, à
la fois pour comprendre l'impact de leurs décisions sur leur
environnement, et pour afficher leur bonne volonté.
Car finalement, les organisations ayant recours à ce
type de prestation ne doivent pas tomber dans les mêmes pièges que
certains industrielles (cas Nike, comme évoqué plus haut). Au
contraire, l'objectif est de s'appuyer sur ce type de projet pour montrer la
prise en compte des éléments de développement durable et
ainsi améliorer l'image de l'organisation dans le pays du client et
celui du prestataire.
Conclusion
Comme discuté tout au long de ce mémoire,
l'Offshore Outsourcing est en pleine explosion, particulièrement dans le
secteur de la bancassurance. Les besoins de compétitivité des
acteurs financiers, ainsi que leur développement à
l'international font augmenter le besoin pour ce type de prestation.
La pratique de l'offshore outsourcing devenant de plus en plus
courante, l'enjeu est de savoir comment la fonction achat peut s'y inscrire. La
méthodologie proposé n'est qu'une approche simple de l'offshore
outsourcing par les achats, et doit être poussée. Malgré
tout, cette analyse permet de se poser la question du rôle de la fonction
achat dans le sourcing de ce type de prestation.
Les gains proposés par la Direction des Achats pour ce
type de prestation ne doivent pas se limiter aux gains financiers liés
à l'arbitrage entre les différents niveaux de salaire. Il est
important de prendre en compte l'ensemble des leviers d'achats possibles, tel
que l'amélioration de la qualité et des délais,
l'accès à des compétences absentes sur le marché du
client,...
Une étude du DTT GFSI (Deloitte Touche Tohmatsu Global
Financial Services Industry) a défini trois phases dans l'offshore
outsourcing : Build (Construire), Optimize (Optimiser) et Release
(Libérer). Une fois les premiers projets de sourcing en offshore
outsourcing effectués, les directions achats devront faire face à
la deuxième étape et devront optimiser, à la fois les
pratiques achats ainsi que les prestations. Cette optimisation ne pourra pas
seulement se limiter aux gains financiers liés au différentiel de
niveau de salaire.
Cette deuxième phase nécessitera une
connaissance complète des projets de sourcing en offshore outsourcing.
Compte tenu de l'augmentation très forte de la demande, des
difficultés dans le sourcing peuvent être anticipées, le
sourcing devenant de plus en plus complexe. Les projets de sourcing
nécessiteront des compétences de plus en plus importantes, pour
tirer le meilleur des pratiques d'offshore outsourcing. C'est à ce prix
que les organisations pourront tirer de l'offshore outsourcing le maximum de sa
valeur.
Bibliographies
Deloitte (2007) : »Global Financial Services Offshoring
Report 2007 : Optimizing offshore operations».
ESSEC-ISIS (2006) : »Délocalisation des services et
innovation : le dessous des cartes», Les Matins de l'Innovation, Mars.
Gartner (2003) : »A Look at India for Offshore Sourcing
Options», Juillet.
Joint Forum (2005) : «Outsourcing in Financial
Services», Basel Committee on Banking Supervision, Février.
Mazzucco F. (2004) : »Progrès des entreprises
offshore», Livre Blanc Compass.
NeoIT (2008) : »Service Globalization Trends 2008»,
Janvier.
Montaigne C. (2007) : «Les assureurs restent prudents face
aux délocalisations», Les Echos, Avril.
OFCE (2005) : «Offshore Outsourcing in the EU Financial
Services Industry», n°2005-09, Juin.
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