CHAPITRE 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE
COHESION SOCIO - CULTURELLE ?
L'histoire du Burkina Faso, aussi bien avant, pendant
qu'après la colonisation montre à quel point il est difficile de
définir une législation qui prend en compte les différents
aspects de la corrélation entre la gestion du foncier et la
consolidation de la cohésion et de la paix sociale. La situation
foncière burkinabè est d'une telle complexité que toute
proposition de solution semble relever de la gageure. Avoir donc la
prétention de proposer une solution complète dans le cadre d'une
réflexion individuelle est ainsi quasiment inimaginable. Nous nous
intéresserons pour ce faire à quelques aspects spécifiques
qui nous paraissent déterminants pour la cohésion sociale.
Selon Etienne le Roy, « le rapport foncier est un rapport
social déterminé par l'appropriation de
l'espace»1. Cette assertion résume toute la
complexité de la situation foncière burkinabè. En effet,
et ainsi que nous l'avons expliqué dans la première partie de
cette étude, l'appropriation de la terre revêt au Burkina au moins
deux significations : d'une part, il consiste à rendre propre à
un usage et ne renferme dans ce cas qu'un droit d'usage ; d'autre part et selon
la volonté politique du moment et les exigences économiques, il
concerne l'action de s'attribuer la propriété de quelque chose et
véhicule dans ce cas une conception ressemblant à celle civiliste
de la propriété. Mais qui en diffère en ce sens que le
droit de propriété tel que défini par la
législation burkinabè n'accorde pas indéfiniment l'abusus
au propriétaire. La terre burkinabè étant unique et non
proliférante, l'élément fondamental de la cohésion
socio - culturelle réside dans la définition de son statut, qui
doit obligatoirement prendre en compte ces deux significations de
l'appropriation. Pour y parvenir, il convient de faire l'état des
éléments qui déterminent la cohésion socio -
culturelle (section 1) afin de pouvoir en tenir compte dans la
définition du statut juridique de la terre (section 2).
1 « L'appropriation de la terre en Afrique noire »,
éditions KHARTALA, Paris, 1991, page 11.
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
SECTION 1 : LES ELEMENTS DETERMINANTS DE LA
COHESION SOCIO - CULTURELLE
I - LES REALITES CULTURELLES DU BURKINA
I - 1 LA LOI ET LA COUTUME
La société burkinabè est
caractérisée par la place prépondérante qu'elle
accorde à la tradition dans ses différents aspects. Ainsi, les
burkinabè sont dans leur grande majorité respectueux des
exigences coutumières de leur village, des fois en dépit des
dispositions règlementaires contraires. La loi conçue en ville
définit les rapports de l'homme à la terre mais l'application au
village respecte d'abord les rapports de la société à la
terre avant d'introduire la loi. Le problème qui subsiste ici provient
de l'inadaptation de la loi aux comportements des burkinabè et des
insuffisances des coutumes :
- la loi est inadaptée car elle n'intègre pas les
habitudes culturelles des burkinabè.
- la coutume est insuffisante car elle ne satisfait pas à
toutes les exigences de cohésion socio - culturelle.
I - 2 - LA LEGISLATION FONCIERE UNIFIEE
La législation foncière doit tenir compte des
habitudes culturelles de la société burkinabè. Elle doit
donc reconnaître les compétences des autorités
coutumières en matière foncière et l'existence des droits
fonciers coutumiers. Mais elle doit réguler l'exercice de cette
compétence afin de ne pas reconduire la coutume intégralement car
une telle attitude contribuerait à renforcer la dualité du
régime juridique et éprouverait sérieusement la
cohésion et la paix sociale.
En effet, un demi-siècle s'est écoulé
depuis l'accession du Burkina à l'indépendance. Au cours de cette
période, les coutumes burkinabè ont connu des mutations à
l'instar de toutes structures sociales humaines. La législation
foncière doit tenir compte de cette évolution. Selon
l'anthropologue ivoirienne Aline AKA1,
1 « Analyse de la nouvelle loi de 1998 au regard de la
réalité foncière et de la crise socio-politique en
Côte d'Ivoire », Aline AKA, bulletin de liaison du l'AJP n° 26,
septembre 2001
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
pour qu'une coutume reproduise fidèlement les effets
qu'on lui a connus à une certaine époque, il faut que la
situation sociale et la logique fondant cette coutume existent toujours au
moment où on la reconduit. C'est dire que reconduire la coutume peut
contribuer à fragiliser la paix et la cohésion sociale car elle
aussi est inadaptée aux réalités sociales actuelles.
Une législation foncière qui ne tient pas non plus
compte de la coutume ne peut résoudre la dualité des
régimes fonciers et se révèlera inefficace à long
terme.
Au Burkina les mutations sociales de la coutume ont aussi
été influencées par les différentes
décisions politiques en matière foncière. Les
autorités coutumières du Burkina ont toutes conscience
aujourd'hui de ne pas disposer d'un droit absolu et au dessus de la loi
nationale. Cette situation constitue de notre point de vue un
élément que la volonté politique peut exploiter pour
exercer aisément un contrôle de l'action coutumière sans
trop de difficultés. Car reconnaître aujourd'hui l'existence de
compétence foncière coutumière, c'est achever de
réintégrer les autorités coutumières dans la vie
communautaire dont ils avaient été quelque peu en marge depuis
l'avènement de la première version de la RAF, en droits mais
aussi en devoirs.
La législation foncière doit donc
reconnaître la compétence des autorités coutumières
en tant qu'acteurs fonciers et les impliquer dans toutes les étapes de
la gestion du foncier. Pour ce faire il convient de:
1)- reconnaître la terre coutumière comme existante
bien que faisant partie des terres du Domaine Foncier National du Burkina.
2) - reconnaître à l'autorité
coutumière la compétence de la gestion de ces terres.
3) -reconnaître l'existence de deux types de droits
fonciers coutumiers :
a- un droit de propriété collectif et non
individuel.
b- des droits d'usage collectif et individuel.
4)- réglementer la transmission des droits fonciers
coutumiers. Pour ce faire :
a - Pour ce qui est du droit de
propriété. Au regard de son caractère collectif
et non individuel, le déclarer non transmissible par des personnes
agissant pour leur propre compte et non transmissible à des personnes
autres que l'Etat. Pour la transmission du droit de propriété
à l'Etat, instituer une cellule à mesure de poser les actes de
transmissions et composée des autorités foncières
coutumières et des représentants des différentes
composantes du village.
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
Exemple de cellule : Les personnes suivantes pourraient
faire partie de la cellule, dans les régions où la configuration
des villages est ainsi : le chef de village, le chef de terre, un
représentant des femmes, un représentant des jeunes, un
représentant des personnes qui exercent les activités
menées dans le village (agriculture, élevage...).
La composition de la cellule pourrait être
arrêtée par région. Confier aux autorités
coutumières l'initiative des actions de transfert du droit de
propriété mais déclarer délictuel et de nul effet
tout transfert non cautionnée par la cellule de transfert.
Pour que la propriété foncière
coutumière profite à l'ensemble de la communauté, et pour
soumettre les actions des autorités coutumières à la
sanction populaire, arrêter une grille de valeurs des terres
coutumières qui fixe, en fonction des pratiques actuelles, la valeur
minimum des terres coutumières par région. Elle aura deux
avantages majeurs :
Pour les transactions du droit de propriété,
elle servira de base au dédommagement de l'Etat. Prévoir qu'une
partie des sommes issues de ces dédommagements soit obligatoirement
reversée dans un compte collectif et serve à financer des
activités de développement du village.
Elle servira aussi de base pour définir la valeur
monétaire de la terre et permettra aux détenteurs de droits
d'usage fonciers coutumiers de les transmettre, les prêter ou même
les donner en garantie par exemple pour obtenir des financements au niveau des
institutions qui accompagnent les activités rurales.
b- Pour ce qui est des droits d'usage
coutumiers. Leur reconnaître des effets similaires mais de
moindre portée que ceux des droits démembrés du droit de
propriété. Pour ce faire circonscrire leurs effets en les
limitant à des activités spécifiques, à un espace
et à des investissements maximaux.
Par exemple le possesseur de droit d'usage coutumier pourrait
se servir du document constatant la possession de ces droits pour les
transmettre, les prêter, les gager... aux conditions cumulatives
suivantes :
- Activités : si la terre objet du droit d'usage
coutumier est destinée uniquement aux activités suivantes:
l'agriculture, l'élevage et la pêche.
- Espace : si l'espace concerné ne dépasse
pas une certaine superficie. -Investissement : si les investissements
réalisés ou requis pour mener l'activité ne
dépassent pas un certain montant. Ce montant pourrait être la
limite
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
maximale du financement dont le document de constatation des
droits d'usages coutumiers peut servir de garantie par exemple.
On pourrait même aller plus loin en désignant les
structures habilitées à octroyer des financements ou à
constater la transmission ou le prêt des droits d'usage coutumiers. Les
structures qui financent habituellement les activités agricoles,
pastorales ou piscicoles pourraient être autorisées à
recevoir ces documents en garantie des financements qu'elles octroient tandis
que les services financiers des communes du lieu de situation de l'espace
concerné pourraient être compétente pour connaître
des actes de transmission ou de prêts des terres sur la base du
document.
Mais dès que l'une des conditions
énumérées n'est plus remplie, le document de constatation
du droit d'usage coutumier devra être insuffisant pour sécuriser
le droit concerné et pour l'utiliser. La gestion de la terre
concernée n'étant plus de la compétence de
l'autorité coutumière, celle réglementaire pourrait alors
prendre la relève.
II - LES REALITES SOCIALES DU BURKINA
II - 1- PRESENTATION DE LA CARTE SOCIALE DU BURKINA
Dans le cadre de notre étude, nous avons choisi de relever
quelques aspects de la société burkinabé qui peuvent avoir
une influence sur la cohésion sociale.
II-1-1 - Présentation de la structure de la
population du Burkina1 COMPOSITION DE LA POPULATION
RESIDENTE
- Population totale résidente (selon le recensement de
2006) = 13.730.258 - Composée de : - Hommes : 6.635.318 soit 48,3% de la
population totale
- Femmes : 7.094.940 soit 51,7% de la population totale
1 Source : Institut National de la Statistique et de
la Démographie du Burkina
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
REPARTITION DE LA POPULATION RESIDENTE PAR SEXE SELON
LE MILIEU
DE RESIDENCE *
MILIEU DE RESIDENCE
|
SEXE
|
MASCULIN
|
FEMININ
|
TOTAL
|
URBAIN
|
1.380.320
|
1.386.063
|
2.766.383
|
RURAL
|
5.254.998
|
5.708.877
|
10.963.875
|
TOTAL
|
6.635.318
|
7.094.940
|
13.730.258
|
*Source : Institut National de la Statistique et de la
Démographie du Burkina
INFORMATIONS COMPLEMENTAIRES
Structure de la population par âge
- Population âgée de 0 à 14 ans : 46,8% de la
population totale.
- Population âgée de plus de 14 ans : 53,2% de la
population totale. Population vivant hors du Burkina : Nous n'avons pas
pu obtenir de statistiques récentes mais en 2000, la population
résidente qui avait séjourné au moins une fois et pendant
plusieurs années hors du Burkina mais était revenue pouvait
être estimée à environ 29% de la population totale ; Quant
à celle qui vit actuellement hors du Burkina, elle avoisinerait 20% de
la population résidente. Ce taux serait plus élevé avant
la crise ivoirienne.
Taux d'alphabétisation : 25,7% de la population
totale en 2005 selon les statistiques INSD.
Langues : Environ 60 groupes ethnolinguistiques.
Activités : -Agriculture, élevage,
pêche : environ 86% de la population active
-Autres activités (commerce, activités
salariées...) environ 14% de la population active.
II-1-2- Quelques observations sur la carte sociale du
Burkina
Les informations de la carte sociale du Burkina nous
permettent de faire six remarques sur la population burkinabé. Ces six
observations constituent des facteurs qui influent à court et long terme
sur la paix et la cohésion sociale
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
1) - Le Burkina Faso compte une soixantaine de groupes
ethnolinguistiques et donc au moins autant de diversités
coutumières, établies dans plusieurs centaines de villages. Si
l'Etat du Burkina Faso n'était pas constitué, l'espace qui le
compose serait administré par au moins autant de lois foncières
coutumières et chaque burkinabè serait toujours étranger
quelque part dans cet espace.
2) - 46,8% de la population totale, soit environ six millions
quatre cent vingt cinq mille sept cent soixante (6.425.760) personnes ont tout
au plus quatorze (14) ans et n'ont donc pas l'âge minimum requis pour
postuler à la possession d'un terrain. En effet, l'âge minimum
requis par la RAF pour être attributaire d'une parcelle est de quinze
ans1. Cette portion passe à plus de la moitié de la
population totale si l'on considère l'âge de la majorité
juridique c'est-à-dire dix-huit (18) ans.
3) - Sur environ quatorze millions de personnes que compte le
Burkina, près de onze millions vivent en milieu rural. Selon les
informations recueillies à l'INSD, sur cinq (5) burkinabé, quatre
(4) vivent en milieu rural.
4) - L'immense majorité de la population active tire
ses revenus de la terre.
5) - Plus de la moitié de la population est
composée de personnes vulnérables et défavorisées
par la gestion foncière de l'autorité coutumière : il
s'agit des femmes et des enfants.
6)- Une forte portion de la population
burkinabé est immigrante et participe faiblement à la demande en
terre au niveau national. Mais y a néanmoins droit, au même titre
que la population résidente.
II - 2 - ELEMENTS CONCEPTUELS D'UNE LA LEGISLATION FONCIERE,
OUTIL DE COHESION SOCIALE
Ainsi que nous le rappelions dans le premier chapitre de cette
partie, la loi doit être un phénomène social afin que les
populations se l'approprient. C'est la condition sine qua non pour la rendre
légitime. C'est la condition primaire pour rendre la loi vraiment
applicable. C'est enfin de cette condition que découlent la
légitimité et la sécurité des droits des individus.
Nous reviendrons sur ce dernier point dans le troisième chapitre de
cette partie.
1 Décret n° 97-054/PRES/PM/MEF portant
application de la RAF, Article 155.
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
La législation foncière ne peut être
vraiment au service de la cohésion sociale si la population
dépendante de la terre qu'elle régit ne se sent pas
protégée et prise en compte dans ses dispositions. La
législation foncière burkinabè doit donc tenir compte de
la configuration sociale du pays. Elle doit permettre l'égal
accès à la terre, en vertu de l'article 1 de la Constitution du
Burkina qui garantit à tous, l'égalité des droits devant
la loi. Pour ce faire elle doit répondre à huit (8) aspirations
qui nous paraissent essentielles :
1) - Au regard de la diversité de la configuration
ethnolinguistique du Burkina, la législation foncière doit tenir
compte des règles foncières coutumières mais ne doit
jamais leur laisser la prédominance sur la loi nationale. A
défaut, la cohésion sociale serait fracturée. Force doit
donc rester à la loi nationale et à l'Etat qui constitue le
garant de l'unité de la nation. La reconnaissance de la nature
collective et non individuelle du droit de propriété coutumier et
son mode de transmission permettrait de maintenir la cohésion sociale de
la nation dont l'Etat constitue le garant.
2) - La population burkinabè est essentiellement
jeune. La législation foncière doit protéger les droits de
cette frange de la société. Elle doit donc préserver la
terre pour cette population jeune ainsi que pour les générations
futures. La loi et la coutume accordent au Burkina des droits similaires sur la
terre. La législation foncière doit donc être l'expression
de cette réalité. Le caractère absolu du droit de
propriété qui pouvait constituer le point de divergence entre les
deux législations foncières n'en constitue pas puisque la
propriété selon la loi burkinabè ne confère pas
l'abusus indéfiniment. La détention du droit de
propriété par l'Etat constitue la meilleure garantie de la
préservation des droits des générations futures.
3)- L'article 155 du décret
97-054/PRES/PM portant modalités d'application de la RAF permet aux
autochtones âgés de quinze (15) ans et résidant dans les
villages englobés par les lotissements de postuler à
l'attribution d'une parcelle. Le délai de mise en valeur étant de
cinq (5) ans (article 159 du décret précité),
l'administration est fondée à retirer ces parcelles lorsque les
autochtones ayant bénéficié de cette disposition
dépasseront l'âge de vingt (20) ans. Combien de jeunes
burkinabè sont à mesure de mettre une parcelle en valeur à
cet âge ? Cette disposition, au lieu de préserver le droit de la
jeunesse d'accéder à la terre, la fragilise au contraire et fait
de ces jeunes des instruments de spéculation foncière aux mains
des adultes qui utilisent leurs noms pour les attributions des parcelles
destinées à être revendues
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
plus tard. Pour éviter cela, l'âge requis pour
postuler à une attribution doit être de vingt (20) ans pour
tous.
4)- Quatre burkinabé sur cinq, vit en milieu rural. La
loi doit disposer pour cette frange de la société en l'aidant
à accéder à la terre. La reconnaissance de l'existence des
droits fonciers coutumiers permettrait de sécuriser les droits
déjà existants de cette frange de la population.
5)- L'immense majorité des burkinabé tire ses
revenus de la terre. La loi doit sécuriser les droits de cette frange de
la société. La reconnaissance des droits d'usage coutumiers et le
fait de leur conférer des effets similaires à ceux des droits
démembrés du droit de propriété civiliste
contribueraient à sécuriser les droits des populations
rurales.
6)- Plus de la moitié de la population est
constituée de femmes et de jeunes qui sont considérés
comme vulnérables au regard de la précarité de leurs
conditions de vie. La loi doit protéger cette frange de la
société et résoudre sa vulnérabilité en
l'aidant à accéder à la terre au même titre que les
couches non vulnérables. La législation foncière pourrait
s'appuyer au départ, sur l'existant en milieu rural. Dans ce cas, elle
pourrait commencer par favoriser l'accès des jeunes et des femmes
organisés en association car des milliers d'associations existent en
ville et en campagne et sont pleinement intégrées à la vie
communautaire. Ensuite les attributions individuelles pourraient suivre.
7)- Une importante portion de burkinabé vit hors du
pays. Selon l'article 13 de la déclaration universelle des droits de
l'homme « toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le
sien, et de revenir dans son pays. » La législation foncière
doit donc tenir compte de la frange importante de burkinabè vivant hors
du pays. Elle doit pour ce faire veiller à décourager la
spéculation foncière et accorder des droits ne remettant pas en
cause l'accès à la terre des burkinabé vivant à
l'étranger, en conformité avec les dispositions de l'article
précité.
8)- La majorité de la population burkinabè n'a
pas un niveau d'éducation lui permettant de lire et comprendre les
dispositions législatives. Selon les statistiques de l'INSD, 74,3% de la
population n'est pas alphabétisée. Cette portion passe à
plus de 85% si l'on considère les personnes qui n'ont pas le niveau
3° de l'enseignement scolaire. C'est cette population qui tire le plus sa
subsistance d'activités liées à la terre et qui a besoin
de comprendre ses droits et devoirs tels que définis par la loi. La
législation foncière gagnerait a être
élaborée (ne serait-ce qu'en ses dispositions les
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
plus usuelles) en langues nationales afin que cette population
se l'approprie et soit à mesure de défendre ses droits face
à ceux qui voudraient les spolier. Car si elle n'occupe pas la place qui
peut lui revenir dans les esprits de l'ensemble de la population, la
législation foncière règlementaire laissera à la
coutume cet espace qui est pourtant celui qu'il convient de conquérir en
premier.
Sur la base de la carte sociale du Burkina que nous venons de
dresser et en fonction des facteurs déterminants de la paix et de la
cohésion sociale, nous essayerons de définir le statut juridique
de la terre.
|