III.4.3. Perspectives
La mise en route de ce thème au LAQUE oblige, avant
tout, un certain nombre de travaux préparatoires. D'abord, je pense
à un travail de master portant sur une synthèse de
littérature sur l'évaluation des risques sanitaires liés
à la pollution de l'eau de boisson par des mélanges chimiques. Un
état des connaissances sur les plus polluants fréquemment
rencontrés dans l'eau de boisson, leurs propriétés
physico-chimiques et leur effet sur la santé humaine fera
également objet d'une base de données à mettre en place au
laboratoire.
La recherche de nouveaux partenariats scientifiques est une
autre condition importante au développement de ce thème. En
effet, l'évaluation des risques n'est pas uniquement l'estimation des
effets dus à une ou plusieurs substances, c'est également et
surtout une bonne compréhension des sources d'émission, des voies
de transfert et des réponses de la cible retenue.
Dans le cadre de ce thème, les travaux initiés
en relation avec M. T. Winiarski, en particulier la thèse d'U. Fifi,
vont nous permettre de mieux appréhender les mécanismes de
transferts des polluants métalliques dans les ressources en eau
souterraine de Port-au-Prince, fortement exploitées pour l'AEP de la
population. Ils devront nous permettre d'acquérir des connaissances sur
les différentes sources et voies de transfert.
Au niveau du réseau Santé-Environnement, je vais
essayer, en collaboration avec les autres membres de ce réseau,
d'établir un programme de recherche toxicologique sur les interactions
binaires de polluants retrouvés dans l'eau. Avec le Laboratoire du Dr
Jacques Blaise à la Faculté d'Agronomie et de Médecine
Vétérinaire de l'Université d'Etat d'Haïti, je pense
qu'il serait intéressant d'exposer des animaux de laboratoire à
des mélanges binaires de polluants identifiés dans l'eau de
boisson, particulièrement en Haïti. Les résultats de ce
programme de recherche permettront de mieux ajuster la méthode HI par
des PDE expérimentaux.
Etant donné que la chloration soit le seul
procédé de traitement utilisé, et ne produit pas d'effet
sur les Cryptosporidium sp., je pense qu'il est important maintenant
d'initier un travail sur la caractérisation de l'exposition au
trihalométhane dans l'eau de boisson en Haïti. Dans ce contexte
spécifique, l'identification de Cryptosporidium sp dans les
eaux distribuées en Haïti peut être considérée
comme un indicateur de la pollution aux THMs dans l'eau distribuée.
Les travaux réalisés, dans le domaine de la
qualité physicochimique de l'eau destinée à la
consommation humaine, ont mis en évidence de façon
systématique la présence de substances organiques et
minérales. A Port-au-Prince, des concentrations en plomb, allant
de 40 à 90ug/L, ont été mesurées dans les
eaux souterraines et dans l'eau destinée à la consommation
humaine (Emmanuel, 2004). D'importantes concentrations en chrome (470 ug/L) et
en dichlorométhane (118ug/L) ont été mesurées dans
les eaux souterraines (Emmanuel, 2004).
Etant largement supérieures aux valeurs seuils pour
l'eau potable, ces teneurs mettent en perspective l'existence de risques
sanitaires aigus et chroniques pour les consommateurs. Par ailleurs, les
valeurs obtenues pour le plomb peuvent provoquer un risque d'altération
du développement psychique des enfants exposés, car la
neurotoxicité est, chez le jeune enfant, la conséquence la plus
redoutable de l'exposition au plomb (INSERM, 1999).
L'absence de mécanismes de suivi de la qualité
de l'eau destinée à la consommation humaine, et d'une gestion
efficiente de la pollution urbaine peut largement contribuer à
l'exposition des enfants au plomb et autres substances chimiques nuisibles
à la santé humaine. En effet, une concentration de 250ug/L a
été détectée dans l'eau d'un réservoir de
distribution de la Centrale autonome métropolitaine d'eau potable
(CAMEP). L'estimation des risques de dégradation du quotient
d'intelligence (QI) des enfants consommant cette eau, a donné un
quotient extrêmement élevé allant 331 à 1653
(largement supérieur à 1).
J'ai soumis en janvier 2008, au Ministère de
l'Education Nationale et de la Formation Professionnelle, un programme de
recherche intitulé : « Evaluation des risques
microbiologiques et chimiques liés aux parasites (Cryptosporidium
sp. Helminthes et Giardia) et aux polluants (organiques et
minéraux) contenus dans l'eau de boisson consommée dans les
écoles publiques de la Communauté Urbaine de Port-au-Prince
». Ce programme regroupe le Laboratoire de Parasitologie et Mycologie
Médicales de l'Université de Picardie Jules Verne et le
Laboratoire de Qualité de l'Eau et de l'Environnement de
l'Université Quisqueya.
Le volet évaluation des risques microbiologiques sera
coordonné par l'équipe de recherche de Madame K.
Balthazard-Accou. En ce qui concerne le risque chimique, le plomb, le chrome et
les THMs seront les traceurs chimiques retenus pour cette évaluation des
risques. Dans la perspective d'initier ce thème au LAQUE, je vais
utiliser dans un premier temps l'approche Hazard Index (HI) ou Indice de Danger
(ID).
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