Projet de fin d'étude Pour obtention d'une licence en
gestion Spécialité : Finance des entreprises
Sous le thème :
De la cohésion sociale
en France et au Maroc
Réalisé par : Sous la direction du professeur :
Othman GAGA Mounir ZOUITEN
DEDICACES
A 5frlr 5frlounir ZOVIgE9,
Pour ses directives, son assistance et son
encadrement.
A mes très chers parents,
Pour votre amour, votre présence, vos sacri"ices et
votre soutien inconditionnels. Vous ave% partagé mes angoisses et mes
peines et vous ave% toujours trouvé le mot juste pour me remonter le
moral et me redonner espoir. Que ce travail récompense vos sacri"ices et
votre dévouement, et qu'il concrétise autant vos rêves que
les miens, je ne vous le dirais jamais asse% : 5frlerci.
Je vous aime.
A tous les membres de ma famille,
Pour m'avoir soutenu et encouragé durant toutes ces
années d'études.
A Jind,
Louée soit la providence qui a permis à mon
chemin de croiser le
tien.
A tous mes ami(e)s,
Pour votre présence et dévouement dans les
moments les plus pénibles.
Je dédie ce travail Othman
La cohésion sociale
en France et au Maroc
SOMMAIRE
INTRODUCTION 6
1. CHAPITRE 1 : GENESE ET DEFINITIONS 9
1.1. Axe social : 9
1.2. Axe économique : 11
1.3. Axe politique : 13
2. CHAPITRE II : LA COHESION SOCIALE EN FRANCE
17
2.1. LE PLAN DE COHESION SOCIALE : 19
2.1.1. L'emploi : 19
2.1.2. Le logement : 23
2.1.3. L'égalité des chances :
24
2.1.4. Que devient le plan de la cohésion sociale
? 26
2.2. GRENELLE DE L'INSERTION : 28
2.2.1. Le Revenu de Solidarité Active (RSA)
30
2.2.2. Paramètres et mécanismes du RSA
32
2.2.3. Champs d'intervention du RSA : 33
2.2.4. Limites : 34
2.3. ESPOIR BANLIEUES, UNE DYNAMIQUE POUR LA FRANCE :
35
2.3.1. Historique des banlieues: 36
2.3.2. Espoir Banlieues : 39
2.3.2.1. Axes : 39
2.3.2.1.1. L'éducation 40
2.3.2.1.2. L'emploi 43
2.3.2.1.3. Le financement des initiatives locales : 44
2.3.2.1.4. La sécurité : 45
2.3.2.1.5. Le transport : 46
2.3.2.2. Limites : 48
3. CHAPITRE III : LA COHESION SOCIALE DANS LE CADRE DE
L'UNION EUROPEENNE 51
3.1. présentation générale :
51
3.2. Mandat général : 52
3.2.1. Objectifs principaux : 52
3.2.2. Les moyens mis en place : 53
4. CHAPITRE IV : LA COHESION SOCIALE AU MAROC
56
4.1. Les inégalités sociales au Maroc
58
4.1.1. Education publique : 60
4.1.2. Santé : 61
4.1.3. Eau potable et électricité : 63
4.2. Lutte contre la pauvreté et la
précarité 64
4.2.1. INDH 64
4.2.2. La caisse de compensation 66
4.3. L'articulation de l'éducation avec la
cohésion sociale 71
4.3.1. Approche didactique de l'éducation : 71
4.3.2. L'éducation à la citoyenneté au
Maroc 76
5. CONCLUSION 82
6. ANNEXES 85
7. BIBLIOGRAPHIE 92
Introduction
L
a cohésion sociale est devenue, depuis quelques
années, un thème récurent sur la scène politique
tant au niveau national qu'international, à tel point qu'on assiste
à un foisonnement de réformes et de plans qui plaident en faveur
du « renforcement » de
ladite cohésion. Ce renforcement se manifeste par la
promotion du bien-être pour tous, en luttant contre la pauvreté et
l'exclusion sociale. En cela, la cohésion sociale se dessine comme un
paradigme qui tente d'analyser les enjeux socio-économiques et
politiques en vue de renforcer les stratégies visant le bon
fonctionnement de la société.
Par ailleurs, L'émergence de ce concept n'a rien
d'anodin. Car la plupart des sociétés actuelles abritent un
fossé énorme entre les classes sociales, qui se traduit par des
inégalités et des injustices à outrance. Ces
dernières sont susceptibles d'engendrer une implosion sociale au sein de
ces sociétés.
Dans un contexte de mondialisation, les échanges,
à la fois culturels et économiques, sont devenus monnaie
courante. Les pays se livrent entre eux une concurrence acharnée, le
spectre du chômage et de l'insécurité est
omniprésent, tandis que les identités nationales des pays sont
mises à mal et on tendance à s'effriter.
À cet égard, le champ de manoeuvre de la
cohésion sociale ne porte pas seulement sur des actions d'ordre
économique ou politique mais aussi, et surtout, d'ordre moral. En effet,
elle inculque aux citoyens l'esprit de solidarité et d'appartenance
à la collectivité. Ainsi la cohésion sociale est
définie comme étant : « l'ensemble des processus sociaux
qui contribuent à inculquer aux gens un sentiment d'appartenance
à une même collectivité et l'impression qu'ils sont
reconnus comme des membres faisant partie de cette collectivité.
»(Le Commissariat général du plan de France, 1977)
Bref, Face à des sociétés qui battent de
l'aile et à des problèmes sociaux qui deviennent de plus en plus
structurels, la cohésion sociale vient à point nommé.
Lutter contre la pauvreté, l'exclusion, le chômage
et l'insécurité, consolider l'esprit de solidarité,
promouvoir le bien-être des populations... Tels sont donc les principaux
objectifs à
atteindre. La cohésion sociale, en tant que perspective
sociale, semble donc se pencher sur plusieurs fronts :
> est-elle capable de relever tous les défis qu'elle se
fixe ?
> Peut-elle concilier le développement
économique avec le développement humain ? > Peut-elle faire
disparaître les inégalités entre les classes sociales ?
Ce sont les principales questions auxquelles nous tenterons
d'y répondre en examinant les expériences françaises et
marocaines. Notre travail n'est pas un travail comparatif, mais plutôt
décrivant et analysant les réformes en matières de
cohésion sociale dans les deux pays.
1. Chapitre 1 : Genèse et définitions
L
e lien social se présente comme étant l'ensemble
des appartenances, des affiliations, des relations qui unissent les individus
et qui les amènent à se sentir membre d'un groupe. Il constitue,
de ce fait, l'ossature de la cohésion sociale.
Le lien social s'articule autours de trois axes : Social.
Economique.
Politique.
1.1. Axe social :
Emile Durkheim est l'un des premiers à s'atteler sur la
cohésion sociale, dans sa thèse de doctorat en 1893
intitulée « de la division du travail social ». Le titre de
cette thèse en dit long sur la relation de la division du travail avec
la mutation des sociétés d'une part, et le degré de
solidarité entre les individus au sein de ces sociétés
d'autre part. En effet, selon lui, à une société
traditionnelle dotée d'une conscience collective forte répond une
société moderne souffrante d'une conscience collective
affaiblie.
Avant, dans les sociétés traditionnelles ou
archaïques, les individus étaient
semblables. Ils partageaient les mêmes valeurs,
croyances, sentiments etc. Quant aux individualités et libertés
individuelles, elles étaient inexistantes. Cette similitude a
créé une solidarité sociale solide qualifiée de
mécanique, la conscience collective était alors forte.
Dans les sociétés modernes, les individus sont
tous différents, ils exercent des fonctions différentes mais
complémentaires, c'est sur la base de cette
complémentarité que la solidarité sociale est
créée, elle est dite organique. Cependant, elle est insuffisante
face à une montée de l'individualisme qui est de plus en plus
ancrée. La conscience collective est dès lors
considérablement altérée, elle devient quasiment
inopérante.
Face à ce problème, Emile Durkheim
préconise le « socialisme »1. Partant du
principe « l'homme est un loup pour l'homme » (Thomas
Hobbes, 1651), il considère l'être humain comme un être
profondément égoïste et insatiable. Le problème,
selon lui, n'est pas économique mais plutôt de socialisation des
individus. Il faut donc apaiser les conflits individuels inévitables,
animés par l'égoïsme, afin de maintenir la cohésion
sociale.
C'est d'ailleurs dans cette optique que Durkheim
définit le droit comme l'« impératif social ».les
désirs infinis des hommes ne peuvent être fixés que par le
droit. De surcroît, ce dernier permet aussi de faire de l'individu un
membre de la collectivité.
En somme, le souci majeur de Durkheim est de rendre les
sociétés modernes plus cohésives. L'organisation et la
moralisation des individus sont indispensables.
Cependant, même si la division du travail, lié
à l'industrialisation, est à l'origine de l'individualisme dont
pâtissent les sociétés modernes, il ne la condamne pas pour
autant. Au contraire, il la considère pourvoyeuse de cohésion
sociale, du fait de l'interdépendance sociale créée par la
répartition des activités productives. La division du travail
est, selon lui, la loi évolutive des sociétés. Ainsi,
écrivait-il, à ce propos : « le progrès social ne
consiste pas en une dissolution continue ; tout au contraire, plus on avance,
plus les sociétés ont un profond sentiment d'elles-mêmes et
de leur unité. Il faut donc bien qu'il ait quelque autre lien social qui
produise ce résultat ; or, il ne peut pas y en avoir d'autre que celui
qui dérive de la division du travail. »2 (E.
Durkheim, 1893)
Toutefois, des dysfonctionnements peuvent exister. En raison
de manque, voire d'absence, d'équité. La division du travail peut
ne pas être acceptée par tous. Tel est le cas pour l'antagonisme
entre le capital et le travail. Dans ce cas, ladite division ainsi que tous les
conflits sociaux engendrés par elle revêtent une forme
pathologique. On parle alors d'anomie, autrement dit, la
désintégration du lien social.
L'analyse de Durkheim fait de la division du travail une forme
prépondérante du renforcement du lien social dans les
sociétés modernes. Il parait donc essentiel d'étudier la
division du travail dans son contexte historique à savoir :
l'industrialisation. Afin de mieux
1 A ne pas confondre avec le socialisme de Marx
apprécier son impact sur les sociétés
actuelles et, par voie de conséquence, sur la cohésion
sociale.
1.2. Axe économique :
Comme on l'a vu précédemment, les individus,
dans les sociétés modernes, ne sont plus semblables. Ils sont
certes tous différents, mais il est possible de les grouper, selon la
convergence de leurs intérêts, dans des classes sociales.
Celles-ci sont conditionnées par la division du travail,
c'est-à-dire, le rapport aux moyens de production.
Si les classes sociales n'existaient autrefois qu'à
l'Etat embryonnaire, ce n'est qu'avec l'avènement de
l'industrialisation, et avec elle le mode de production capitaliste, qu'elles
ont réellement pris corps. Plus précisément, vers la fin
du XVIII siècle, début XIX siècle. On distinguait alors
deux classes fondamentales : la bourgeoisie et le prolétariat. La
première détenait les moyens de production tandis que la
deuxième n'avait que sa force de travail à vendre pour
survivre.
Le mot prolétariat est d'origine latine
désignant à l'époque de l'empire romain : la plus basse
classe, celle qui est dépourvue de tout. Engels le définit comme
étant : « la classe des travailleurs modernes salariés
qui ne possède aucun moyen de production et est réduite à
vendre sa force de travail. » (Marx-Engels, 1848) . La
première classe prolétaire est apparue en Grande-Bretagne, pour
la simple raison qu'elle est le premier pays à avoir pris la voie de
l'industrialisation. En effet, l'évolution technique a permis la
construction de nouvelles machines sophistiquées, à
l'époque, dont le coût était hors de portée pour la
majorité de la population, elles étaient donc un apanage
réservé à une minorité. Les travailleurs furent
obligés de se séparer de leurs anciens instruments de production
devenus vétustes pour travailler pour le compte des propriétaires
des nouvelles machines. De surcroît, la révolution agricole, qui a
nécessité une privatisation des terres communales concomitante
d'une croissance démographique, a eu pour effet une ruée massive
des paysans pauvres vers les villes. Ce qui a représenté une
manne de main d'oeuvre pour l'industrie naissante. Les ouvriers vivaient dans
un marasme profond, les conditions de vie étaient miséreuses. Les
femmes et les enfants étaient obligés à travailler pour
survivre. Peu à peu, en prenant conscience de leur vie de misère.
La masse ouvrière s'est unie en vue d'améliorer leurs
conditions de vie. L'affrontement entre le prolétariat
et le patronat fut âprement réprimé. Mais grâce
à leur nombre important, la bourgeoisie était forcée de
leur céder quelques avantages. D'ailleurs, le XX siècle
n'était que le théâtre de cette lutte acharnée.
La classe bourgeoise, quant à elle, peut être
définie comme l'ensemble des personnes qui détiennent des moyens
de productions, autrement dit, un capital productif. Elle est sans nul doute la
classe qui a su le mieux tirer profit du mode de production capitaliste. En
effet, à l'origine le mot bourgeois désignait un habitant de la
ville. Les bourgeois étaient, pour la plupart, des riches
commerçants qui ont fait fortune avant la « révolution
» industrielle, est qui ont investi après dans l'agriculture,
l'industrie et les banques. Ils ont eu, de ce fait, un rôle important
dans la société. De nos jours, c'est la bourgeoisie
financière qui exerce un rôle hégémonique.
Réunie dans des trusts, holding et autres entreprises multinationales.
Elle a désormais la mainmise sur l'économie mondiale. Pour
résumer, une citation d'Adam Smith s'impose : « Dans une
société de cent mille familles, il y en aura peut-être cent
qui ne travailleront pas et qui, cependant, soit par la violence, soit par
l'usage de l'oppression légale, absorberont une quantité de
travail social supérieure à celle de dix mille familles. Le
partage du revenu du travail lui-même, après un tel
détournement de fonds, ne sera pas effectué réellement en
proportion du travail de chaque individu ; au contraire, ce seront ceux qui
travailleront le plus qui toucheront le moins ».
Par ailleurs, le développement du capitalisme a permis
l'essor du secteur tertiaire. Et avec lui l'émergence d'un très
grand nombre de salariés travaillant dans la gestion ou
l'administration, concernant le secteur public, et qui n'ont aucun lien direct
avec la production. Ce type de salariés ne peut former en aucun cas une
classe sociale proprement dite, car il est de nature « instable ». En
effet, pour la plupart d'entre eux leur condition est proche de celle de la
classe ouvrière tandis que d'autres ont les mêmes
intérêts que la bourgeoisie comme les directeurs d'usine, hauts
fonctionnaires, etc. Ils sont même compris parmi la petite bourgeoisie.
Pour exister, ils doivent s'allier soit avec la bourgeoisie soit avec le
prolétariat.
Ce pendant, depuis le XIX siècle plusieurs facteurs ont
remodelé les sociétés industrielles. En effet,
l'époque des trente glorieuses accoucheuses d'une augmentation du
pouvoir d'achat ouvrier, la démocratisation de l'éducation ainsi
que des produits de consommation, l'évolution technologique qui a
nécessité une main d'oeuvre qualifiée et
relativement bien payée, l'expansion du secteur
tertiaire etc.. Tous ces facteurs, pour un bon nombre de sociologues et
d'économistes tels que Alexis de Tocqueville et Henri Mendras, semblent
avoir dilués la classe laborieuse. Les sociétés tendent
alors vers une « moyennisation », c'est-à-dire,
l'élargissement de la classe moyenne, et donc le rapprochement du niveau
de vie au sein des sociétés. Toutefois, force est de constater
que les inégalités sociales fusent encore tous azimuts. La
cohésion sociale est plus que jamais menacée.
Face à cette réalité, l'Etat est
placé au coeur des débats. Comment entend-il agir pour maintenir
la cohésion sociale ? Est-il neutre ? Ou bien Est-il influencé
par telle ou telle classe sociale ?
1.3. Axe politique :
La société regroupe une nuée
d'intérêts qui peuvent s'avérer antagonistes. Une
société bien organisée et hiérarchisée
paraît alors indispensable pour la sauvegarde du corps social, cependant
cette conception de la société ne peut être
réalisée que si tous les hommes renoncent à une partie de
leurs intérêts. C'est dans ce sens qu'un bon nombre de
philosophes, tels que Thomas HOBBES, John LOCKE et Jean-Jacques ROUSSEAU, se
sont penchés sur un pacte librement établi par l'ensemble de la
communauté, sur lequel repose la légitimité de l'Etat. Ce
pacte est appelé le contrat social.
Contrairement aux autres philosophes, Jean-Jacques ROUSSEAU
est le seul qui assoit son contrat social sur l'égalité et la
liberté de tous les citoyens. En effet, il dénonce vivement la
loi du plus fort et l'esclavagisme. D'ailleurs dans le quatrième
chapitre de son livre « du contrat social » il écrit
: « Puisqu'un homme n 'a aucune autorité sur son semblable, et
puisque la force ne produit aucun droit, restent donc les conventions pour base
de toute autorité légitime parmi les hommes. »
(Jean-Jacques Rousseau, 1761). Le contrat social, tel qu'il le présente,
est une association de tous les citoyens où chacun s'engage à
faire partie de la société et à se plier à la
volonté générale, en contrepartie la société
protège et procure de la liberté à chaque citoyen.
ROUSSEAU a, de ce fait, posé les premiers jalons de la
démocratie.
Toutefois, la majorité des pays et à leur
tête les sociétés industrielles suivent une «
démocratie » libérale. Où l'Etat se cantonne à
des fonctions régaliennes. Quoique lors de certaines périodes
telles que les trente glorieuses, sa marge de manoeuvre fut élargie en
vue de réduire les inégalités sociales par la distribution
des richesses. Quoi qu'il en soit la démocratie libérale promeut
les libertés individuelles, il en découle que certaines
catégories sociales influentes exercent leurs libertés plus que
d'autres, voire au détriment des autres. En Effet : « Si le
plus faible dénonçait quelque énorme
inégalité réelle, le plus fort répondait que
l'égalité serait au contraire satisfaite et parfaite »
(Charles Maurras, 1937) . Preuve en est les inégalités
raciales au Etats-Unis notamment, l'interdiction du droit de vote aux
étrangers en France3...et les exemples sont légion.
La représentativité de l'ensemble des
catégories sociales représente le socle de la démocratie,
or même dans les pays les plus démocratiques cette
représentativité laisse à désirer. A titre
illustratif, une enquête menée par le ministère de
l'intérieur français sur l'origine sociale des maires en 2001 a
donné les résultats suivants :
Catégories sociales des maires comparées à
celles Unité : %
|
de leurs administrés.
Maires en 2001
|
Population de plus de 15 ans
|
Agriculteurs exploitants
|
18,0
|
1,3
|
Artisans, commerçants et chefs d'entreprises
|
6,9
|
3,3
|
Cadres et professions intellectuelles supérieures
|
22,7
|
7,0
|
Professions intermédiaires
|
6,9
|
11,0
|
Employés
|
7,3
|
16,3
|
Ouvriers
|
1,5
|
15,1
|
Retraités
|
29,7
|
22,1
|
Autres sans activité professionnelle
|
7,0
|
23,9
|
TOTAL
|
100
|
100
|
3 À l'exception des ressortissants de l'union
européenne pour les élections européennes et
municipales.
Source : Ministère de l'Intérieur - bureau des
élections et des études politiques. Année des
données : 2001
Ce tableau reflète une représentativité
insatisfaisante, en effet, ceux qui sont bien placés dans la
société sont ceux qui sont les plus représentés, et
ce en dépit de leur proportion réduite au sein de la
population.
Un énorme fossé s'est donc creusé depuis
la fin du XVIII siècle à nos jours, à tel point qu'il nous
paraît aujourd'hui tout à fait naturel. Jusqu'à
présent nous n'avons traité que les sociétés
hautement industrialisées qui ont adopté un mode de production
capitaliste. Seulement, d'autres pays ont pris le chemin du socialisme,
cependant avec la chute du mur de Berlin en 1989 l'importance de ceux-ci dans
l'échiquier mondial s'est considérablement réduite. Le
clivage entre le capitalisme et le socialisme s'est transformé en
clivage entre pays riches et pauvres. La cohésion sociale n'est
manifestement pas la même d'un pays à l'autre, il serait donc vain
d'essayer de la normaliser.
En définitive, les sociétés actuelles,
dans toutes leurs formes, ne sont pas dans une bonne posture. En effet, la
montée de l'individualisme et les inégalités sociales
accrues tant au niveau économique que politique sont le lot de toutes
les sociétés. Sont-elles alors, comme les considérait
Durkheim, des formes pathologiques ? Ou sont-elles, comme les qualifieraient
Marx et Engels, une conséquence résultante du modèle de
production capitaliste ?. En tout cas, la nécessité du maintien
de la cohésion sociale s'impose avec acuité.
C'est dans cette optique que nous allons voir les plans et
stratégies mis en oeuvre en matière de cohésion sociale
dans un pays industrialisé comme la France et l'Union Européenne,
dans une dimension continentale, ainsi que dans un pays en développement
comme le cas du Maroc.
2. Chapitre II : La Cohésion sociale en
France
P
armi les sociétés ayant entrepris la voie de
l'industrialisation, la France fait pâle figure. Ce n'est, en effet, que
soixante-quinze ans après l'Angleterre, qu'elle a connu son
véritable démarrage industriel. Cet état de fait renseigne
sur un retard qui portera
préjudice à l'économie française.
La fin des trente glorieuses, vers la moitié des années
soixante-dix, sonne la fin de la croissance soutenue. Une nouvelle donne
commence alors, l'hégémonie des pays occidentaux commence
à s'effriter tandis que de nouveaux pays commencent à s'imposer
sur la scène économique internationale comme le Japon, La
Corée du Sud et la Chine... Dans cette conjoncture, La France est
touchée de plein fouet, elle perd de sa compétitivité
surtout dans le domaine du textile et de l'électronique.
Cette crise économique est lourde de
conséquences. Son impact sur le niveau social est alarmant. En effet, le
chômage est devenu structurel et de longue durée. La
flambée des prix a eu pour effet la baisse du pouvoir d'achat. La vague
d'immigration, qui a débuté dès les années
soixante, a donné naissance à une nouvelle
génération exclue souffrante d'une crise d'identité et
d'énormes inégalités sociales. L'absence de la croissance
économique a limité l'action de l'Etat en matière d'aides
sociales. On comprend donc mieux pourquoi les français sont peu
optimistes à l'égard de leur futur : 34% des français
seulement sont optimistes sur le sort que connaîtront leurs
enfants4. A l'état actuel, La crise économique a donc
engendré une crise sociale profonde dont les inégalités
sociales, discriminations raciales, logement insalubre et le chômage des
jeunes sont les principaux éléments. L'ascenseur social semble
céder la place au « descendeur » social. Il convient de
signaler que La cohésion sociale en France court un grand danger. Que
fait alors l'Etat pour sortir de cet abîme ?
Curieusement, l'Etat français ne lésine
guère sur les moyens, plus de 30 %5 de sa richesse est
orienté vers la protection sociale. C'est décidemment l'usage de
cette somme considérable qui laisse à désirer. C'est
attribuable essentiellement d'une part à des plans et des
stratégies qui ne s'inscrivent pas dans la continuité, les
politiques sociales changent avec chaque gouvernement, et d'autre part à
un protectionnisme mal placé et à l'atonie de l'Etat en
matière de politique sociale. En effet : « Quatre erreurs
majeures ont été commises :
4 Source : INSEE.
5 Source : Plan de Cohésion Sociale.
· avoir oublié que l'emploi était
le fruit de la rencontre d'une offre et d'une demande et que l'une et l'autre
devaient s'organiser et se prévoir ; la France n'a que très peu
investi dans ce domaine, alors que cet investissement est l'un des plus
rentables de tous ;
· avoir considéré l'emploi comme un stock
donné à partager, plutôt que comme le fruit sans cesse
recomposé de l'activité et de l'inventivité humaines
;
· avoir organisé le contingentement de la
population active et la protection systématique de l'emploi existant
plutôt que son augmentation et sa rotation ;
· avoir fait du traitement social du chômage
la réponse ultime au manque de travail, alors qu'il ne peut s'agir que
d'un moyen de retour progressif vers l'emploi des personnes qui en sont le plus
éloignées. » (Plan de la Cohésion Sociale,
2004)
Depuis 2005, plusieurs plans sont élaborés pour
remédier à ces problèmes : le plan de la cohésion
sociale, espoir banlieues, grenelle de l'insertion. Nous allons voir un
à un le contenu de ces plans.
Il est important de signaler que les inégalités
sociales, en France, sont concentrées dans des régions
spécifiques : les banlieues.
2.1. Le Plan de Cohésion Sociale6 :
L
e PCS est entré en vigueur le 18 janvier 2005 sous
l'égide de Jean-Louis Borloo7, alors ministre de l'Emploi, du
Travail et de la Cohésion sociale. Le mot d'ordre étant de
préparer l'avenir et créer des conditions propices à une
croissance soutenue,
la priorité est donc accordée aux jeunes. D'une
durée quinquennale, le plan se répartit en vingt programmes qui
s'articulent autours de trois axes, à savoir :
o L'emploi
o Le logement
o L'égalité des chances.
2.1.1. L'emploi :
Le marché de l'emploi subit de graves
dysfonctionnements engendrant à la fois un chômage de longue
durée et des secteurs « pénuriques » comme la
restauration, en effet les employeurs de ce secteur faute de ne pas trouver de
main d'oeuvre font appel à celle des immigrés clandestins.
S'inspirant du modèle de la « Flex-sécurité »
danoise, Le PCS veut réconcilier la fluidité du marché du
travail avec la sécurité économique des citoyens. Pour ce
faire, une logique de réinsertion est substituée à celle
de l'assistanat. Onze programmes y sont consacrés, qui se
déclinent comme suit :
+ Afin de lutter contre l'éclatement des dispositifs
français d'intervention en faveur des chômeurs, et d'optimiser le
service rendu au demandeurs d'emplois ainsi qu'aux entreprises. 300 maisons de
l'emploi seront créées, tout au long de cinq ans,
réunissant en son sein les différents agents de la politique de
l'emploi fédérés au sein d'une structure juridique : Le
GIP ( groupement d'intérêt public). Ainsi, un dossier unique du
demandeur d'emploi sera mis en place en vue de faciliter les démarches
et l'accompagnement des demandeurs d'emploi. En contrepartie, ces derniers
devront faire preuve de leur bonne foi en cherchant constamment du travail tout
en participant activement au programme de formation. Si tel n'est pas le cas,
des sanctions « justes et graduées » devront
être prononcées pour crédibiliser le dispositif.
6 Toutes les données présentées
sont relatives à l'année 2004, date de l'élaboration du
PCS.
7 Actuellement ministre de l'Etat, ministre de
l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de
l'aménagement du territoire.
+ S'agissant du taux d'emploi des jeunes, le constat est sans
appel. En effet, il est de 26% en France contre 55% en moyenne en Europe.
L'ANPE recense 430 000 de jeunes demandeurs d'emploi. 150 000 sortent
annuellement du système éducatif sans diplôme dont environ
60 000 sans aucune qualification. Le PCS se propose d'accompagner 800 000
jeunes dans le cadre du « Contrat d'avenir ». Ledit contrat est un
accompagnement personnalisé pour une période d'un an pouvant
être renouvelée jusqu'à l'accès définitif
à l'emploi durable. Chaque jeune a un référent qui l'aide
à définir son projet professionnel et le suit sur tous les plans
: logement, transport et santé. De plus, Les « plates-formes de
vocation » permettent l'orientation des jeunes vers les «
métiers du plein-emploi » en passant des tests par simulation ou
analogie8. Les 800 000 jeunes auront trois voies d'accès
à l'emploi :
La répartition des 800 000 jeunes
100 000
350 000
350 000
"500 000 apprentis, étudiants de métiers"
Emploi marchand
Fonction publique par alternance
+ En France, 1 000 000 d'entrepreneurs ont des PME, des petits
commerces ou travaillent dans l'artisanat. Cependant vue la situation
démographique, leur nombre chutera de moitié au cours de la
décennie qui vient. La question se pose alors sur la transmission de ces
centaines de milliers d'entreprises. « L'alternance sera, dans les
années à venir, la meilleure voie pour devenir patron dans notre
pays [la France] »( Plan de la Cohésion Sociale PCS, 2004). Le
PCS compte, pour combler ce vide, sur la formation en alternance. Le programme
est appelé « 500 000 apprentis, « étudiants des
métiers » ». L'objet est de rendre cette formation pourvoyeuse
d'emploi. Plusieurs
8 Mis au point par l'ANPE
moyens sont mis en place notamment l'aide au logement et la
création des campus des métiers pouvant délivrer aussi
bien des CAP (certificat d'aptitude professionnelle) que des diplômes
d'ingénieur.
+ Pour (r)établir l'égalité des chances
dans la fonction publique, le PCS mise sur la PACTE ( parcours d'accès
à la fonction publique territoriale, hospitalière et d'Etat).
Cette dernière est une formation alternée en service public au
service des jeunes issus des quartiers sensibles. Aucun nouvel emploi ne sera
créé, le PCS usera uniquement des 120 000 fonctions
libérées annuellement par les départs à la
retraite. Il convient aussi de signaler que ces postes ne concernent que les
jeunes sans qualification ni diplômes.
+ A la base le Revenu Minimum d'Insertion (RMI) et
l'Allocation de Solidarité spécifique (AS S) étaient des
allocations ayant pour but la reconduite des chômeurs vers le
marché du travail. Cependant, avec le temps ils semblent
s'éloigner de leur mission. Pour combler ces lacunes, le PCS a mis en
place un nouveau contrat : « le contrat d'activité »
présenté comme étant un accompagnement personnalisé
systématique et sur un contrat de travail aidé. C'est un double
contrat, en effet, le bénéficiaire, qui doit être
allocataire du RMI et de l'ASS, passe un contrat avec le
référant, représentant de la collectivité publique
en charge du dispositif, et un avec l'employeur. La durée du contrat est
de deux ans pouvant être prolongée d'une année. Vers la fin
du contrat le bénéficiaire a droit à une qualification,
à une VAE (validation des acquis de l'expérience) ou bien
à une attestation de compétences.
+ L'économie solidaire lutte contre l'exclusion par
l'insertion via l'activité économique. En effet, 73 % des
bénéficiaires sont en emploi et 3% en formation. Mais elle est
caractérisée par une fragilité financière. Le PCS
s'est assigné la mission d'épauler ce secteur afin de mener
à bien sa mission. Le montant d'aide est révisé à
la hausse de 66 millions d'euros en 2005, et 100 millions d'euros en 2007.
+ Pour les chômeurs de longue durée de plus de
26 ans, le PCS prévoit : la fusion des différents crédit
afférents aux contrats aidés dans une seule enveloppe. Ces
contrats sont accompagnés d'une formation qualifiante.
+ La législation qui a trait au marché du
travail est complexe et rigide pouvant entraver la création d'emploi. Le
PCS prévoit à cet égard une modernisation du dispositif
législatif par le biais d'une négociation interprofessionnelle
dont les thèmes principaux sont :
o La gestion sociale des restructurations
o L'emploi des seniors
o La santé et la sécurité au travail
o La sécurisation des règles régissant les
relations individuelles et collectives de travail.
o L'évolution de la législation sur la
durée du travail
o La modernisation du financement du paritarisme.
+ Dans sa quête de 250 000 emplois, le PCS mise sur les
services aux particuliers, un secteur en plein essor qui a l'avantage
d'être à l'abri de la concurrence internationale. Ainsi, une
réduction des barrières à l'entrée sur le
marché des services aux particuliers est prévue dans le but
d'inciter la création d'emploi.
+ 46% des entreprises sont créées par des
chômeurs (35%), d'allocataires de l'ASS (4%) ou du RMI (7%). Le taux de
survie de ces entreprises est supérieur à la moyenne nationale en
France. Afin d'encourager ces jeunes et inciter d'autres à entreprendre,
le PCS s'est mis comme objectif d'atteindre 100 000 créations d'emplois
par des chômeurs entrepreneurs sur cinq ans par trois séries de
mesures :
o Renforcer l'accompagnement des demandeurs d'emploi
créateurs d'entreprises.
o Faciliter l'accès au crédit.
o Prolonger, dans certaines conditions, le
bénéfice des aides du dispositif ACCRE (aide aux chômeurs
créateurs et repreneurs d'entreprises)
+ « le travail des femmes est une triple
nécessité : pour les femmes, pour l'économie et pour la
société ». cependant il convient de souligner que les
femmes ont plus de difficulté d'accès à l'emploi et sont
souvent victimes de multiples discriminations. Le PCS a l'ambition de porter
à 60 % le taux d'activité des femmes entre 15 et 64 ans,
conformément à l'objectif affiché lors du sommet de
Lisbonne en 2000. cinq mesures sont alors mises en oeuvre :
o Mesures en faveur des PME : créer une aide au
remplacement lors d'un congé maternité, aider les PME à
prendre les dispositions nécessaires à l'égalité
professionnelle.
o Supprimer les incidences de la maternité sur
l'évolution de la carrière des femmes et réduire les
inégalités de rémunération.
o Lever les obstacles à l'accès à la
formation et l'apprentissage.
o Valoriser l'activité des femmes.
o Dynamiser le retour à l'emploi et la création
d'activité par les femmes.
2.1.2. Le logement :
La question du logement cause un grand problème au
niveau politique en France. A titre d'exemple, la construction de logements
locatifs sociaux par an était de 50 000, en moyenne pendant les
années quatre-vingt-dix, tandis que la demande annuelle était de
80 000. Bref, la politique du logement en France est en parfaite
inadéquation avec la situation actuelle. Le plan compte démolir
et reconstruire de nouveaux habitats. Parmi les vingt programmes, le PCS en
consacre trois au logement :
+ Le PCS vise à rattraper les retards en
matière de logement locatif social, et ce en période
limitée. Le but étant de Passer de 80 000 logements sociaux en
2004 à 120 000 en 2009 en mobilisant l'ensemble des acteurs sous une
convention cadre. Cette dernière sera passée entre l'Etat et
l'Union Sociale pour l'Habitat USH et localement avec les collectivités
territoriales et les organismes publics et privé d'Habitation à
Loyer Modéré HLM. Afin de mener à bien cette mission, les
conditions suivantes sont indispensables :
o Maîtriser les coûts du foncier.
o Assurer la stabilité du système dans le temps et
sa facilité de mise en oeuvre. o Garantir un financement
adapté
o Mettre en place une organisation spécifique pour
l'Ile-de-France.
+ Le PCS compte, en s'appuyant sur l'Agence Nationale de
L'Habitat (ANAH), mobiliser aussi le parc privé en matière de
logement social. sur cinq ans l'objectif est
d'arriver à 40 000 logements à loyers
maîtrisés produits avec l'aide de l'ANAH. Afin de
concrétiser l'incitation de l'Etat, des exonérations pendant
trois ans sont prévues ainsi que l'augmentation des primes
versées par l'ANAH.
+ L'hébergement d'urgence connaît une
véritable congestion que l'Etat français met sur le dos des
exilés : « la très forte progression des demandeur
d'asile depuis 1999 a entraîné l'engorgement de l'ensemble de ce
dispositif. En dépit des efforts considérables engagés en
2003, la situation reste très tendue. » (Le Plan de la
Cohésion Sociale, 2004). le PCE prévoit des maisons de relais
pour atteindre 6 000 places dans l'horizon 2007, la création de 7 000
places en Centres d'Aide aux Demandeurs d'Asile (CADA) ainsi que 1 300 places
en centre d'hébergement et de réinsertion sociale.
2.1.3. L'égalité des chances :
L'égalité des chances est une valeur
républicaine. Cependant, le melting-pot français semble
être mal accepté, cet état de fait menace
énormément le lien social. En effet, en quinze ans les actes
racistes enregistrés sont passés de 189 à 817 chaque
année. Six programmes sont prévus par le plan de la
cohésion sociale pour remédier à ce problème :
+ Pour garantir l'égalité des chances, la
prévention précoce est la meilleure des solutions possibles.
Telle est la vision du PCS, en effet ce dernier compte mettre en place des
équipes de réussite éducative, lesquelles regroupent des
spécialistes de la petite enfance : éducateurs,
rééducateurs (kinésithérapeutes, orthophoniste),
travailleurs sociaux, pédopsychiatre ... pour 1 million d'euros, 750
équipes de réussite éducative seront créées
au sein des Zones d'Education Prioritaires (ZEP).
+ Il est important de signaler que les ZEP ne portent pas
bien leur nom, l'échec scolaire y est plus élevé par
rapport aux zones dites normales. Le PCS envisage 150 plates-formes
éducatives, Ainsi que la création d'internat de réussite
éducative. Ces dernières s'orientent vers les collégiens
qui connaissent de grandes difficultés et comporteront un enseignement
général, pré-professionnel et des activités
culturelles.
En parallèle, le PCS, en collaboration avec
l'éducation sociale et les collectivités territoriales, compte
rénover l'éducation prioritaire :
o Etendre et compléter le programme PEP IV (postes
à exigence particulière)
o Favoriser l'adoption d'un moratoire des « mesures de carte
scolaires »
o Aider à la création, dans 150 collèges
situés dans des quartiers difficiles, de
« pôles d'excellence éducative ».
+ S'attaquer aux inégalités entre les
territoires c'est s'attaquer aux inégalités entre les personnes.
Telle est la maxime du PCS. Les communes comportant des Zones Urbaines
Sensibles (ZUS) sont pénalisées au niveau fiscal. Elles se
trouvent ainsi incapables de traiter les charges socio-urbaines. Le PCS se
propose de réformer la dotation de solidarité urbaine DSU,
celle-ci mesure la pauvreté en prenant compte uniquement de la faiblesse
des ressources propres de la commune. Sans tenir compte des charges sociales.
Une réforme de la DSU constitue donc une condition sine qua non pour la
réalisation de la cohésion sociale. de ce fait, en cinq ans le
montant global de la DSU sera augmenter de 600 millions d'euros. De
surcroît, le PCS prévoit une meilleure distribution de la DSU, en
corrigeant les indices de répartition.
+ En dépit des efforts fournis par les
autorités publiques : loi de lutte contre les exclusions, l'insertion
par l'activité économique, le repli de la pauvreté
monétaire, etc. l'exclusion sociale se fait encore ressentir. Le PCS
prévoit à cet égard des chartes territoriales de
cohésion sociale dans le but de mobiliser les acteurs locaux, le
renforcement du rôle de pilotage des services déconcentrés
de l'Etat, l'amélioration de l'accueil et de l'information
inhérente aux droits sociaux en créant des guichets uniques
d'accueil sur les droits sociaux et le développement des points
écoute jeunes. Afin d'optimiser l'accompagnement social, le plan propose
de professionnaliser la médiation en créant de nouvelles
formations diplômantes.
+ « Pour les étrangers résidant en
France comme pour nos compatriotes issus de l'immigration, le défi
consiste à prévenir et sanctionner les discriminations,
particulièrement dans l'accès à l'emploi ou au logement,
et à mieux représenter la diversité des origines des
Français d'aujourd'hui. » (Plan de la Cohésion Sociale)
Tel est donc le mot d'ordre du PCS en matière d'intégration des
populations immigrées. Pour ce faire, ledit plan compte créer
l'Agence nationale de l'accueil et des migrations
ANAM afine de généraliser le contrat d'accueil
et d'intégration, expérimenté depuis juillet 2003.Ainsi,
la carte de résidence de dix ans ne peut être
délivrée qu'aux étrangers ayant signé ledit
contrat. Ce dernier comporte des formations civiques ainsi qu'une
évaluation de la capacité linguistique.
+ La discrimination, selon le PCS, est un facteur de rupture
de la cohésion
sociale. la Haute Autorité de
lutte contre les discriminations et pour l'égalité HALDE est
créée, elle a pour mission le traitement des réclamations
individuelles et la promotion de l'égalité. Une rénovation
des outils juridiques de la lutte contre le racisme est aussi prévue par
le PCS ainsi que la promotion de la diversité dans l'entreprise.
2.1.4. Que devient le plan de la cohésion sociale
?
Trois ans après la promulgation du Plan de la
cohésion sociale, quel constat peut-on dresser à son sujet ?
D'abord, la durée du Plan s'inscrit dans une phase
charnière entre la fin du mandat de Jacques Chirac et le début de
celui de Nicolas Sarkozy. Ce dernier a apporté ses propres
réformes suscitant, par ailleurs, beaucoup de remous. Le PCS s'est donc
estompé au profit de ces dernières. Ensuite, le financement
prévu par le PCS n'a pas suivi en raison d'une situation conjoncturelle
qui a eu pour effet de « vider » les caisses de l'Etat.
De plus, Les vingt programmes présentés par le
plan sont loin de faire l'unanimité au sein de la population et surtout
de celles qui sont visées par celui-ci. En effet, en matière
d'emploi le plan stigmatise les chômeurs. Comme on l'a vu, le PCS se
contente d'aider les chômeurs non qualifiés spécialement en
banlieues, il semble omettre les milliers de jeunes issus de ces quartiers qui
possèdent des diplômes et qui peinent à trouver de
l'emploi.
L'éducation n'est pas en reste, les projets portant sur
ce volet sont discrédités par les nouvelles réformes du
président Nicolas Sarkozy visant à supprimer plusieurs postes
d'enseignants.
La création d'un ministère de l'immigration
n'est pas venue pour arranger les choses concernant l'intégration des
populations immigrées, en effet, 26 000 déportations
d'immigrés en situation irrégulière sont prévues
annuellement.
Le logement, quant à lui, peut être
considéré comme étant le talon d'Achille du plan. La
politique de la démolition a apporté plus de mal que de bienfait.
Plusieurs manifestations ont contesté cette politique, comme
l'association Droit au logement DAL : « arrêt des politiques de
"démolition - épuration sociale " des quartiers HLM
populaires.»
En définitive, Le plan de cohésion sociale voulu
comme une vision innovatrice n'est malheureusement rien de plus qu'un
nième plan parmi tant d'autres. De plus, le nouveau président
Nicolas Sarkozy s'est fixé comme but d'atteindre la croissance
économique par n'importe quel moyen, « j'irai chercher la
croissance avec les dents » disait-il. La cohésion sociale
est-elle alors mise au second plan par le nouveau gouvernement ?
2.2. Grenelle de l'insertion :
L
e but du revenu minimum d'insertion [RMI] était, au
départ, d'aider les personnes qui ne possèdent aucune ressource
tout en les incitant à (re)prendre du travail. Vingt ans après,
les résultats escomptés ne sont pas au rendez-vous. On recense
actuellement près de 6 millions de personnes
tributaires financièrement du RMI, dont la majorité vie en
dessous du seuil de la pauvreté9. En effet, la proportion de
la population vivant dans cette situation n'a pas diminué depuis
quelques années, leur nombre est de 7.1 millions. Même certaines
personnes qui ont un travail sont parmi cette catégorie, on les estime
à 1.5 millions. Elles sont qualifiées de « travailleurs
pauvres ».
« Le revenu minimum d'insertion a été
créé en 1988 et près de vingt ans après on
considère toujours que le « i » du RMI a été
trop souvent laissé de côté. » (Grenelle de
l'insertion, 2008) L'insertion est inefficiente car la reprise du travail ne
conduit pas systématiquement à une amélioration
financière du revenu des allocataires des minima, bien au contraire elle
peut même les appauvrir encore plus ; en effet, les minima sociaux ne
sont plus versés dès lors que l'allocataire reprend du travail.
De ce fait, les RMIstes voient leurs revenus baisser, en supportant des charges
supplémentaires comme les frais de transport. Le travail est, dans ce
cas, perçu comme « non rémunérateur ».
Plusieurs réformes ont été
déployées afin de redynamiser le marché du travail et de
promouvoir l'insertion. Toutefois, Elles n'ont eu aucun effet, si ce n'est la
complexité du système des allocations, lequel est devenu, selon
quelques experts, totalement « désincitatif ».
Entre-temps, un écart béant s'est installé entre le revenu
minimum d'insertion et le salaire minimum interprofessionnel de croissance
[SMIC]. La situation est telle que ni l'augmentation du RMI ni celle du SMIC ne
pourront apporter une solution au problème. Car, en cas d'augmentation
du premier, le travail serait alors encore plus « non
rémunérateur ». Et en cas d'augmentation du second, il y
aurait une augmentation des coûts du travail. Les entreprises seraient
plus réticentes s'agissant d'embauche, ce qui pénaliserait
davantage la main d'oeuvre non ou peu qualifiée.
Sous la houlette du président Nicolas Sarkozy. Martin
Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la
pauvreté, a présenté le projet d'une nouvelle
réforme intitulée : le
9 Moins de 817 euros par personne et par mois
« Grenelle de l'insertion ». Ce dernier apportera,
semble-t-il, une solution radicale et efficace dont le fer de lance est le
revenu de solidarité active [RSA].
Lancé à Grenoble les 23 et 24 novembre 2007, Le
grenelle de l'insertion est encore en phase de négociation. Il mobilise
les différents acteurs de l'insertion professionnelle :
o Les bénéficiaires, usagers et salariés en
insertion
o Les collectivités territoriales
o Les représentants des salariés
o Les représentants des employeurs (publics,
privés et spécifiques de l'insertion) o Les travailleurs sociaux,
accompagnants et acteurs locaux
o Les associations et organismes de lutte contre l'exclusion
o L'Etat
o Des personnalités morales associées, les
conseils nationaux et des personnalités qualifiées
Dans le but de refaçonner la politique d'insertion en
France, trois groupes de travail sont mis en place constitués par les
représentants des 8 acteurs « parties prenantes » dont la
présidence est assurée par un binôme de
personnalités qualifiées.
L'objet de ces groupes de travail est de formuler des
propositions concrètes sur les thèmes suivants :
o Groupe A : La redéfinition de la
politique publique d'insertion, de ses objectifs, de ses moyens, de sa
gouvernance.
o Groupe B : La mobilisation des employeurs,
privés, associatifs ou publics, pour favoriser l'emploi de personnes en
difficulté, et les dispositifs et moyens qui permettront de
développer cette mobilisation
o Groupe C : L'évaluation des parcours
d'insertion, de leurs écueils et de leurs conditions de
réussite.
Les propositions doivent être finalisées et rendues
publiques vers la fin de mai 2008.
Le Grenelle de l'insertion est une démarche consensuelle.
Outre le fait qu'il permet à des acteurs, qui sont souvent antagonistes,
à formuler des propositions sur le même pied
d'égalité, le grenelle permet aussi au grand public
d'émettre son avis par le biais des forums de son site10.
2.2.1. Le Revenu de Solidarité Active (RSA) :
Le nouveau gouvernement français s'est lancé le
défit de réduire la pauvreté d'un tiers dans cinq ans.
Pour ce faire, la seule solution est le plein emploi : « la sortie de
la pauvreté passe par le travail »(Martin Hirsh, 2008). Comme
on l'a vu, pour plusieurs allocataires de minima sociaux, travailler
réduit les ressources au lieu de les accroître. Les efforts
à consentir s'orienteront donc vers la réforme du système
des minima sociaux ainsi que des mécanismes d'intéressement et
d'incitation à l'emploi.
C'est pour répondre à cette
nécessité que le RSA est en phase de création. Ce dernier
est destiné à remplacer le revenu minimum d'insertion [RMI],
l'allocation parent isolé [API] et éventuellement d'autres minima
sociaux, le but étant de simplifier au maximum le système de
solidarité. En Outre, le revenu de solidarité active se
décline comme une prestation sociale
10 http://www.grenelle-insertion.fr/
ayant un double objectif. En effet, il vient
complémenter les revenus du travail de ceux ayant un revenu faible tout
en faisant office de revenu minimum pour les ménages qui ne
possèdent aucune ressource.
D'ailleurs, les auteurs de la RSA affichent des ambitions
hardies. Selon leurs estimations, leur projet aurait deux effets sur la
pauvreté : l'un direct et l'autre indirect. Le premier serait
immédiat pour les travailleurs pauvres, plus d'un million de personnes
franchiraient le seuil de la pauvreté. Quant au second, il inciterait
considérablement les allocataires à reprendre du travail par le
biais de la garantie d'un travail « rémunérateur».
Depuis l'été 2007, quarante conseils
généraux se sont portés volontaires pour
expérimenter le RSA. Cette expérimentation est d'une grande
utilité car elle permet de tirer des conclusions pertinentes quant
à l'application effective du RSA. Il convient de noter que cette
expérimentation s'adresse à un public restreint à savoir
les allocataires de l'API et le RMI.
2.2.2. Paramètres et mécanismes du RSA :
Le montant du RSA versé aux allocataires est fonction de
plusieurs paramètres :
A l'instar du RMI, le RSA prend en considération la
situation familiale par le biais d'une échelle d'équivalence
ayant pour finalité la valorisation de l'impact sur les budgets des
ménages.
Le point d'entrée du barème, autrement dit le
niveau du minimum garanti est, lui aussi, similaire à celui des autres
minima sociaux : « le niveau du minimum garanti du RSA correspond au
niveau actuel des minima sociaux pour une configuration familiale
donnée. »(Martin HIRSH, 2008)
Concernant le niveau des revenus d'activité
professionnelle, ils sont pour partie cumulables avec le revenu minimum garanti
après la mise en place d'un taux de cumul garantissant une progression
« régulière » des ressources globales du ménage
en tenant compte des revenus d'activité perçus.
Ainsi, Le taux de cumul du RSA détermine à la
fois le revenu de sortie dudit revenu minimum et le rythme de progression des
revenus globaux chaque fois que les revenus professionnels augmentent ; plus le
taux est élevé, plus les gains à la reprise d'emploi sont
élevés.
Afin de mettre en relief la progression régulière
des ressources globales induite par le RSA, il est nécessaire d'examiner
le graphique ci-dessous :
2.2.3. Champs d'intervention du RSA :
La mission du RSA n'est pas des plus simples. En effet, le
RSA se veut à la fois garant de la sortie de la pauvreté par le
biais du travail et protecteur des gens possédant des bas revenus.
Comment alors prétend-t-il parvenir à ces deux objectifs, sachant
que plusieurs réformes précédentes se sont vite heurter au
mur de l'évidence ?
Abondant dans le même sens du « travailler plus
pour gagner plus », le RSA veut promouvoir l'idée que chaque
nouvelle heure travaillée est synonyme d'amélioration du revenu
final de la famille en supprimant les « effets de seuil ». Il s'agit
donc de rendre le retour à l'emploi ou l'augmentation du temps de
travail financièrement intéressants.
Pour les personnes qui exercent des activités à
temps partiel ou par intérim et qui ne touchent pas la prime pour
l'emploi [PPE], leur soutien financier sera augmenté afin qu'ils
franchissent le seuil de la pauvreté tout en créant les
mécanismes d'accompagnement permettant d'accéder à des
emplois de meilleure qualité.
Le but de la création du RSA est de simplifier le
système des aides et de rendre l'ensemble plus lisible pour les
bénéficiaires, les revenus plus prévisibles pour les
familles, les transferts plus faciles à expliquer et à solliciter
pour les accompagnants sociaux.
En Outre, le RSA n'est qu'une prestation sociale. De ce fait,
il ne peut en aucune façon se substituer au véritable revenu,
c'est-à-dire le revenu d'activité. Cependant, cette
réforme projette de proposer un meilleur accompagnement tant au niveau
social que professionnel et une politique d'amélioration de l'emploi.
2.2.4. Limites :
Le RSA se décline comme un projet innovateur, auquel
incombe la restructuration totale du système des prestations
inhérentes à l'insertion professionnelle dans le but de vaincre
les séquelles de deux décennies de politiques sociales qui ont
« paralysé » l'économie française. Il
est donc clair que cette restructuration a un coût, lequel était
estimé, au départ, par les auteurs du RSA à 3
jusqu'à 4 milliards d'euros.
Toutefois, le président de la république n'a
promis que 1 à 1.5 milliards d'euros pour le RSA. Le reste sera
financé par le redéploiement partiel de la prime pour l'emploi
[PPE] qui ne coûte pas moins de 4.2 milliards d'euros. De surcroît,
les travailleurs bénéficiant du RSA devraient toucher 1.1
à 1.2 fois le SMIC contre 1.4 Fois le SMIC pour les travailleurs
bénéficiant du PPE. Ce plafond du PPE sera révisé
à la baisse afin de pouvoir financer le RSA. Cette réduction
n'est pas sans conséquence quand on sait qu'un foyer sur quatre, soit
8.1 millions de foyers fiscaux, bénéficie de la prime pour
l'emploi. Ainsi, peut-on s'accorder le bénéfice du doute quant
aux bien-fondés du RSA. Serait-il un simple calcul politique dont
l'objet est d'alléger les dépenses budgétaires de l'Etat
français ?
Par ailleurs, la conception de l'insertion professionnelle
française s'appuie sur l'uniformité devant l'emploi, ce qui est
totalement aberrant. En effet, pour certains l'éloignement de la
sphère professionnelle n'est que temporaire en raison des aléas
de la vie. Cependant d'autres y sont exclus d'une manière plus
structurelle pour plusieurs raisons telles que l'handicap, des situations
familiales ou sociales totalement intenables. Il est vrai que la
première catégorie n'a besoin que d'une simple politique active
et ciblée de l'emploi. Seulement, la seconde a besoin de la protection
et de la reconnaissance de la société. Malheureusement, il
paraît que le RSA tourne le dos à la deuxième
catégorie. Cela va sans dire que tout un pan de la cohésion
sociale est bafoué.
2.3. Espoir banlieues, Une dynamique pour la France :
L
es banlieues en France sont la parfaite illustration de la
menace qui guette la cohésion sociale. Elles sont
considérées comme des zones urbaines qui concentrent la
marginalisation et l'exclusion sociales. En effet, la violence, le
chômage, les
difficultés scolaires, l'économie souterraine sont
les traits saillants des banlieues, ces dernières semblent être de
plus en plus détachées du reste de la société
française.
Avant de traiter le projet de réforme « Espoir
Banlieues, une dynamique pour la France ». Il est nécessaire de
retracer l'histoire des banlieues afin de déceler la complexité
économique et sociale de celles-ci.
Étymologiquement, la banlieue désignait le
territoire situé dans un rayon d'une lieue (ancienne mesure de distance
qui correspond environ à 4 Km) autour de la ville et qui était
soumis au « ban », c'est-à-dire à la juridiction de
ladite ville. Le ban peut avoir trait aussi à une condamnation à
l'exil, au bannissement du lieu que sont les centres-villes. A l'état
actuel, la banlieue peut être définie comme étant une zone
périphérique urbanisée entourant une grande ville. En
France, ce terme est apparue pour la première fois à Paris, puis
s'est généralisé à toutes les grandes
agglomérations.
Le terme « banlieusard » désignant un
habitant de la banlieue a aussi une connotation assez péjorative :
« Depuis longtemps, la qualité de banlieusard est plus
attribuée que revendiquée, et elle comporte une connotation de
distance sociale autant que spatiale. Le train de banlieue n'évoque pas
le summum de la vitesse et du confort ; le pavillon de banlieue ne constitue
pas l'archétype d'un habitat de qualité » (Jean-Claude
BOYER, 2000)
Le développement des banlieues est étroitement
lié à celui des centres-villes et aux moyens de communication qui
permettent de les relier. Il donne lieu à des mouvements de va- et-vient
pendulaires quotidiens de populations résidant en
périphérie et venant travailler dans le centre de
l'agglomération. Ces mouvements sont assurés en grande partie par
des trains de banlieue. Les banlieues sont donc cantonnées au rôle
de dortoir.
2.3.1. Historique des banlieues:
Au XIXe siècle, la révolution industrielle a
développé les villes. Les terrains se situant au centre-ville
deviennent de plus en plus chers, les populations les plus démunies ont
été obligées de quitter les villes et de s'installer dans
les périphéries. On parle alors de la ségrégation
des populations pauvres : « L'extension des grandes villes modernes
confère au terrain dans certains quartiers, surtout dans ceux
situés au centre, une valeur artificielle, croissant parfois dans
d'énormes proportions ; les constructions qui y sont
édifiées, au lieu de rehausser cette valeur, l'abaissent
plutôt, parce qu'elles ne répondent pas aux conditions nouvelles ;
on les démolit donc et on les remplace par d'autres. Cela a lieu surtout
pour les logements ouvriers qui sont situés au centre et dont le loyer,
même dans les maisons surpeuplées, ne peut jamais, ou du moins
qu'avec une extrême lenteur, dépasser un certain maximum. On les
démolit et à leur place on construit des boutiques, des grands
magasins, des bâtiments publics... Il en résulte que les
travailleurs sont refoulés du centre des villes vers la
périphérie, que les logements ouvriers, et d'une façon
générale les petits appartements, deviennent rares et chers et
que souvent même ils sont introuvables. Car, dans ces conditions,
l'industrie du bâtiment, pour qui les appartements à loyer
élevé offrent à la spéculation un champ beaucoup
plus vaste, ne construira jamais qu'exceptionnellement des logements ouvriers
»( Frédéric Engels, 1873)
En France, les premières prémices des banlieues
débutent en 1894, date de la loi Siegfried, encourageant la construction
des habitations à bon marché [HBM] assurée par des
sociétés de droit privé. L'intervention directe de l'Etat
en matière d'aménagement urbain est esquissée à
partir de 1928, période de l'entre-deux-guerres, avec d'une part la loi
Sarrault en mars qui lutte contre l'urbanisation anarchique qui
caractérisait à l'époque les banlieues et d'autre part la
loi Loucheur en juillet qui finançait la construction de 200 000 HBM et
de 60 000 logements destinés à la classe moyenne.
Après la seconde guerre mondiale, la France
connaît un énorme chantier de reconstruction. Une demande
pressante se fait sentir dans le secteur du bâtiment.
Bénéficiant d'une large ligne de crédit grâce au
plan Marshall, l'Etat relance le secteur du bâtiment. La loi du 3
septembre 1947, crée les logements à loyers modérés
[HLM] remplaçant ainsi les HBM et élargit le réseau des
sociétés de crédit immobilier [SCI] pour l'accession
à la propriété. Une large série de construction de
« grands ensembles » s'effectue à la hâte sans
accorder
d'importance au long terme. En effet, entre le début
des années cinquante et le milieu des années soixante-dix 7
millions de logement sont édifiés. Les superficies étaient
donc considérables, il fallait tout naturellement trouver des terrains
à bas prix, et par voie de conséquence, les nouvelles
constructions étaient éloignées des centres urbains.
La période de rénovation urbaine coïncide
avec la reprise de l'immigration visant à combler la carence de la main
d'oeuvre. La rénovation urbaine a pour mission de moderniser l'habitat
« populaire », en éradiquant les taudis. Les « grands
ensembles » sont considérés comme une promotion sociale pour
les ménages modestes. A partir de 1961, des programmes sociaux de
relogement [PSR] sont crées, les premières « cités de
transites » sont crées pour accueillir « provisoirement »
les familles les plus vulnérables principalement les familles
maghrébines. Ces familles issues de l'immigration sont victimes de
plusieurs traitements discriminatoires. Car elles représentaient,
semble-t-il, une menace pour les projets de rénovation urbaine. «
La stratégie visant à élever la valeur sociale et
symbolique de la commune, c'est-à-dire à opposer au stigmate de
la banlieue prolétaire une représentation plus digne de la
condition ouvrière, suppose en effet de construire une bonne image du
groupe. (...) Or, massivement embauchés comme OS et manoeuvres, les
immigrés appartiennent aux fractions les plus déqualifiées
et les moins considérées du groupe ouvrier et sont
éloignés du modèle de respectabilité
ouvrière que les élus défendent, en raison de leurs
conditions de travail et d'existence mais aussi de leur statut
d'immigrés et de leur mauvaise réputation héritée
de la colonisation. D'une certaine manière, ils contreviennent au but
poursuivi de promotion collective de la classe ouvrière»(
Olivier Masclet, 1975)
Dans les villes ouvrières comme celle de
Gennevilliers, les offices HLM réservent dans un premier temps en
priorité les logements sociaux aux « Français »
modestes. Dans un contexte où la concurrence est rude pour l'obtention
de ces logements, les immigrés maghrébins, en majorité
algériens, bien qu'étant considérés comme faisant
partie de la classe ouvrière ne sont pas traités sur le
même pied d'égalité que les ouvriers français. Pire
encore, les ouvriers immigrés sont rejetés même par les
élus communistes qui revendiquent pourtant les droits de la classe
ouvrière.
Ainsi, à l'antagonisme entre la classe ouvrière
et le patronat s'ajoute un antagonisme entre les ouvriers de pur souche «
Français » et les ouvriers issus de le l'immigration. En effet, les
premiers disposent du droit de vote et sont défendus par les syndicats
et les élus communistes. En revanche, les seconds sont exclus de toute
participation citoyenne. Ainsi des
HLM d'une qualité inférieure telles que la
cité d'urgence, cité de transit puis les HLM à normes
réduites ont pris la charge d'accueillir les familles
immigrées.
Au milieu des années soixante-dix, les constructions
HLM commencent à décroître. Les loyers grimpent, la crise
économique structurelle pousse L'Etat à se désengager du
financement des logements sociaux. La loi Barre, promulguée en 1974,
commence alors à encourager les ménages à s'orienter vers
le marché privé de logement. La classe moyenne, les
employés et la classe ouvrière supérieure sont
encouragés à quitter les logements HLM pour devenir
propriétaires de petits pavillons relevant du secteur privé. Ce
qui a provoqué un départ massif des ménages les moins
vulnérables. Les HLM deviennent des ghettos concentrant une population
très appauvrie composée principalement d'immigrés, elle
est qualifiée d' « indésirable » et « à
problème ». Des émeutes urbaines commencent à surgir
dès 1979 dans la banlieue de Lyon, des jeunes affrontent les forces de
l'ordre et incendient des voitures, depuis les émeutes n'ont
cessé de se produire dans diverses banlieues.
A présent, les ghettos couvrent d'opprobre la France.
Les gouvernements qui se succèdent tentent d' « en finir avec les
ghettos » et de renouer avec une cohésion sociale solide par le
biais de la mixité sociale et la promotion de l'égalité
des chances. Cependant les différentes réformes inhérentes
aux banlieues s'attaquaient plus aux conséquences qu'aux causes des
ghettos. La dernière réforme en vue est : « Espoir
Banlieue, une dynamique pour la France » présentée par
le président de la république Nicols Sarkozy le 8 février
2008. Cette réforme est-elle capable d'en finir réellement avec
les ghettos ? Ou bien les banlieues seraient-elles condamnées à
panser leurs plaies en silence à tout jamais ?
2.3.2. Espoir Banlieues :
Depuis 30 ans, la France a été la scène
d'une multitude de « plans banlieues » qui n'ont été
que des séries de mesures éparses, totalement
incohérentes, et surtout sans traitement de fond des conditions qui sont
à l'origine des problèmes des banlieues. Malgré l'ampleur
des financements, la situation est telle que les résultats
escomptés n'ont pas été au rendez-vous. Pis encore, la
situation s'est au contraire aggravée.
Le plan « Espoir banlieues » se fixe deux principaux
objectifs :
o Un contrat « donnant-donnant » qui épaule
uniquement les habitants qui veulent s'en sortir. Les droits doivent aller de
pair avec les devoirs. En cela, rien n'est faisable sans l'impulsion et la
responsabilisation des personnes bénéficiaires des politiques
publiques.
o La Réinsertion de tous les quartiers dans la
République. En effet, la banlieue ne doit plus être un ghetto
urbain, culturel ou mental, mais elle doit, au contraire, devenir comme le
reste du territoire.
En effet, pour atteindre ces objectifs une série de
démarches seront prévues. Le ministère de la ville n'est
plus le seul tenu responsable des problèmes des banlieues.
Désormais tous les ministères sont mobilisés, chacun dans
son domaine aura un objectif à remplir pour réduire
l'écart cumulé des « quartiers sensibles » par rapport
au reste du territoire. En effet, les membres du gouvernement seront
mobilisés jusqu'au 30 juin 2008 en faveur des quartiers sensibles.
Chaque ministre présentera un programme de travail qui porte sur une
durée de trois ans visant à réduire les écarts
structurels entre les quartiers et le reste de la France.
2.3.2.1. Axes :
Le plan « Espoir Banlieues, une dynamique pour la France
» dispose d'une grande mobilisation de la part du gouvernement. Ce qui va
lui permettre de développer une série de mesures qui tente de
satisfaire les différentes attentes des habitants des banlieues.
Lesdites mesures peuvent s'articuler autour de cinq volets :
+ L'éducation
+ L'emploi
+ Le financement des initiatives locales + La
sécurité
+ Le transport
2.3.2.1.1. L'éducation
L'éducation dans les banlieues reflète à
bien des égards la situation lamentable de ces quartiers.
L'éducation prioritaire [ZEP] instaurée dans ces zones n'a eu
guère l'effet souhaité sur celles-ci. En effet, prenons quelques
chiffres qui témoignent de cet échec : les familles qui disposent
des ressources transfèrent leurs enfants vers d'autres
établissements. A la fin, 90% d'élèves sont
défavorisés et 80% d'élèves sont d'origine
étrangère, c'est dire l'image dont pâtie les écoles
faisant partie de l'éducation prioritaire « En France,
après 25 années de politique d'éducation prioritaire,
certains enfants cumulent encore tous les facteurs de réussite, et
d'autres tous les facteurs d'échec. » Que prévoit donc
le plan « Espoirs Banlieues » pour donner à l'éducation
en banlieue ce qu'elle mérite ?
En premier lieu, 30 sites d'excellence seront
créés dans les quartiers prioritaires. L'objet est de faire d'une
pierre deux coups, en effet, d'une part l'amélioration des conditions
d'enseignement et d'apprentissage et d'autre part redorer le blason des
établissements scolaires. Ces établissements seront
jumelés avec des établissements d'enseignement supérieur
de renom ou des entreprises. Parmi les 30 sites figureront au moins six
lycées professionnels qui seront labellisés « lycée
des métiers ». Ces sites regrouperont des classes d'élites
regroupant les élèves les plus brillants de chaque niveau et
bénéficiant d'un enseignement d'excellence similaire à
celui des meilleurs établissements. Ils pourront développer des
filières à options prestigieuses (à titre d'exemple des
filières bilingues et internationales) ou des enseignements à
horaires aménagés favorisant les activités parascolaires
telles que les pratiques sportives ou artistiques.
Afin de favoriser une vie scolaire de qualité, un
renforcement de l'encadrement sera effectué dans ces
établissements par la mise en place d'une équipe de soutien, ses
missions principales seront la définition des démarches
pédagogiques appropriées et assistance des équipes de
direction dans l'élaboration de partenariats. En plus de cela, une
banque de stages
sera mise en place et sera gérée par
l'équipe éducative, en lien avec des entreprises partenaires. Ce
dispositif évitera les discriminations de toute sorte susceptibles
d'évincer les élèves du fait de leur adresse ou de leur
origine.
Cependant, il faut noter que 150 000 élèves
sortent de l'école chaque année. Pour cette catégorie de
jeunes, les sites d'excellence ne lui seront pas d'une grande utilité.
C'est pour cette raison que le nouveau plan tente de généraliser
l'école de la deuxième chance. Cette dernière dispense une
formation de remise à niveau dans les savoirs fondamentaux (s'exprimer
en français, compter, outil informatique...), en alternance avec des
stages en entreprise, sur une durée maximale de 48 mois. Elle propose
à chaque jeune un parcours individualisé, le temps de construire
un projet professionnel et d'acquérir les savoirs et les
compétences nécessaires à sa réalisation.
L'objectif étant de déboucher sur une intégration durable
dans l'emploi, les deux tiers des jeunes qui y passent accèdent au bout
d'un an à un emploi ou une formation.
Le succès des écoles de la deuxième
chance peut donc apporter un appoint solide au plan « Espoir Banlieues
». En effet, le développement des écoles de la
deuxième chance profitera en priorité aux quartiers les plus
difficiles. L'objectif est d'accueillir 15 000 à 20 000 jeunes à
l'horizon 2012, avec une école par région comportant au moins un
site par département, et autant de places que nécessaire
là où les besoins existent. En outre, en mettant en place un
système d'intervention précoce à l'égard des jeunes
en situation d'échec, Les Ecoles de la deuxième chance pourront
accueillir des jeunes dès 16 ans, c'est-à-dire à
l'âge où beaucoup d'entre eux décrochent et quittent le
système scolaire.
Afin de pérenniser ce projet, il est nécessaire
de sécuriser son financement. Pour cette raison, les ressources des
écoles de la deuxième chance seront accrues par une extension de
la possibilité faite aux entreprises de les financer par la taxe
d'apprentissage, au titre de la « catégorie A » du « hors
quota » (soit la part de la taxe d'apprentissage destinée
habituellement à financer les formations correspondant au BEP, CAP et
baccalauréat). Cette ressource consolidera de manière
décisive le financement du dispositif.
Par ailleurs, Certains facteurs nuisent à la
réussite scolaire des jeunes de banlieue, comme les difficultés
dans leur vie familiale ou dans leurs conditions de logement (problèmes
conjugaux des parents, familles monoparentales, appartement exigu...). Dans des
situations
pénibles et invivables, ces enfants ou adolescents
sont livrés à eux-mêmes et quittent, dans la plupart des
cas, l'école. Et si tel n'est pas le cas, ils ne pourront guère
développer leurs capacités pleinement. Le travail éducatif
entrepris dans leur établissement est en grande partie perdu et leur
milieu familial est impuissant à les aider. Pour lutter contre cette
injustice, le plan de la cohésion sociale a crée les internats de
réussite éducative proposant un cadre de vie et de travail
adapté, rassurant et stable avec des conditions d'encadrement et de
soutien optimales. Cependant, leur nombre et leur capacité d'accueil
sont insatisfaisants. De plus, ils ne sont pas bien répartis sur le
territoire français. Afin de rectifier le tir, le plan « Espoir
banlieue » table sur 4 000 places créées au sein des
internats de réussite éducative dans l'espace de trois ans en
s'appuyant sur des établissements aussi bien publics que privés,
en créant de nouvelles places dans des collèges en reconstruction
et en transformant des places existantes au sein d'internats publics et
privés en places d'internat de réussite éducative et en
garantissant une bonne couverture du territoire par le
rééquilibrage de l'offre vers le grandes villes.
L'échec de la politique de sectorisation et de la
politique d'éducation prioritaire a entraîné la
constitution de véritables « ghettos » scolaires, y compris
dans les écoles primaires. L'école en banlieue manque cruellement
de mixité sociale. Ainsi, « pour un trop grand nombre de ces
enfants, l'école primaire représente leur première
expérience de l'échec. » (Présidence de la
république française, 2008) L'échec s'installe d'une
façon précoce et crée un sentiment de «
relégation ». Les chances de rattrapage d'une mauvaise
scolarité au primaire sont très minimes. La moitié des
élèves qui sortent du système éducatif sans
qualification ont redoublé avant leur entrée au collège.
Le haut conseil de l'éducation a d'ailleurs rappelé, dans son
rapport de 2007 sur l'école primaire, que « les chances
d'accomplir une scolarité sans heurt et conduisant à une
qualification sont très fortement liées au niveau initial des
compétences en cours préparatoire. »
L'école primaire constitue donc dans les quartiers
défavorisés le socle qui peut faire perdurer ou non l'ensemble du
système scolaire. La nécessité d'explorer de nouvelles
pistes se manifeste avec acuité pour que les enfants soient mis sur le
chemin de la réussite dès l'école primaire. Tous les
chercheurs et experts se sont convenus à dire qu'une solution innovante
et efficace dans ce domaine serait de disperser les élèves en
difficulté dans
différents établissements, plutôt que de
continuer à les regrouper ensemble comme le fait la politique
d'éducation prioritaire depuis une période de 25 ans.
Dans ce sens, Le « busing
» consiste à déplacer les élèves
scolarisés dans un établissement caractérisé par un
fort échec scolaire dans d'autres écoles de la même ville
afin de leur donner la possibilité de découvrir un autre
environnement social et scolaire. Chaque matin, le transport scolaire («
busing ») amène les enfants dans leur
nouvelle école, et les ramène le soir. Le «
busing » sera expérimenté pendant
trois ans avec des élèves de CM 1 et CM2 provenant
d'écoles primaires des quartiers prioritaires. Les enfants
concernés ne seront plus captifs de leur environnement immédiat
et la mixité sociale à l'école deviendra une
réalité. Cette expérimentation s'inspirera notamment des
regroupements pédagogiques intercommunaux existant dans les zones
rurales, en particulier celle menée à l'école primaire de
la Saulaie à Oullins (Rhône), depuis 2004 celle-ci envoie ses
élèves, une fois leur année de CE1 achevée, vers
d'autres établissements à proximité.
2.3.2.1.2. L'emploi
200 000 jeunes de moins de 26 ans vivant dans les banlieues
sont en situation de chômage dont 80 000 seulement qui suivent les
circuits traditionnels de recrutement (ANPE). Il faut signaler que le boycott
de ces circuits est dû principalement aux discriminations à
l'embauche, le risque de marginalisation et d'éloignement durable du
monde du travail est très élevé. La résolution de
ce problème doit porter au-delà de la confrontation entre l'offre
et la demande ou des mesures d'accompagnement dites « classiques
».
C'est dans cette optique que le plan « Espoir Banlieues
» entend expérimenter un nouveau contrat dénommé
« Contrat d'autonomie ». Il sera proposé à 45 000
jeunes, durant trois ans, dans une soixantaine de départements qui se
caractérisent par des quartiers particulièrement marqués
par le chômage. Le public ciblé sera tous les jeunes ayant moins
de 26 ans sans emploi et domiciliés dans des quartiers difficiles,
qu'ils soient ou non inscrits à l'ANPE ou dans une mission locale, au
moins un tiers des jeunes pris en charge par les opérateurs devront
être sans aucune qualification.
L'Etat sélectionnera par le biais d'un appel d'offre
et selon des critères très rigoureux (rémunération
selon le résultat obtenu, respect du cahier de charge...) les meilleures
entreprises et organismes spécialisés dans le domaine de
l'insertion professionnelle. Avec lesquels les jeunes signeront lesdits
contrats comportant des droits et des devoirs afin de favoriser une insertion
rapide des jeunes, les devoirs consistent à respecter certaines clauses
du contrat comme l'assiduité, recherche active d'un emploi...
Les droits sont à la charge de l'entreprise
d'insertion. En effet, celle-ci doit fournir au jeune un accompagnement
personnalisé ainsi qu'un véritable coaching
durant une période d'un an. Si l'expérience porte
ses fruits, les « contrats d'autonomie » pourront être
généralisée.
2.3.2.1.3. Le financement des initiatives locales :
Le tissu économique des zones urbaines sensibles [ZUS]
(banlieues) est peu dense au regard du reste du territoire français.
Cependant, l'initiative en matière de création d'entreprises y
est très forte, 27% des habitants des ZUS ont l'intention de
créer une entreprise ou de se mettre à leur compte, contre 20%
pour l'ensemble de la population française11. Ce
résultat peut trouver une explication par le biais de deux facteurs :
d'un côté l'initiative est alimentée par la
difficulté à trouver un emploi salarié, et de l'autre par
dynamisme des jeunes habitants de ces quartiers. Malheureusement, cette
initiative est étouffée pour plusieurs raisons, on peut citer
à titre d'exemple le manque d'orientation, le faible accès aux
organismes de crédits...et la liste est longue.
Le plan « Espoir Banlieue » se propose
d'accompagner 20 000 jeunes créateurs d'entreprise issus des quartiers
difficiles pendant une période de quatre ans, et ce avant la
création et pendant les premières années de
développement de leurs entreprises. Les principaux résultats
à atteindre grâce à cet accompagnement sont :
o l'augmentation du taux d'entreprises pérennes trois ans
après leur création, de 50% à 80%.
o l'augmentation du nombre d'emplois créés par
chaque très petite entreprise.
o L'accroissement du niveau de revenu tiré de
l'activité du créateur / repreneur qui est aujourd'hui en moyenne
inférieur ou égal au RMI.
11 Sondage IFOP d'avril 2006.
Afin de mener à bon port ce projet, l'accompagnement
sera confié à un opérateur professionnel (Maison de la
création d'entreprise, CCI, collectivité, réseaux de
l'accompagnement, etc.), qui fera guise de « guichet unique de
l'accompagnement » et garantira un parcours complet d'accompagnement
caractérisé par une lisibilité et une facilité
d'accès. Les meilleurs opérateurs seront
sélectionnés sur la base d'un cahier des charges qui
définira les conditions d'exécution (compétences à
mobiliser, coûts, indicateurs de performance) ainsi que le contenu et
l'intensité (à adapter aux besoins spécifiques des
créateurs) de ses interventions au service des créateurs :
accueil, information, orientation, diagnostic des besoins, définition
d'un plan d'accompagnement, mobilisation et/ou financement des expertises et
actions de professionnalisation nécessaires, médiation bancaire,
suivi individualisé.
2.3.2.1.4. La sécurité :
La sécurité fait partie des aspirations les
plus ressenties au sein des habitants des banlieues. En effet, la
délinquance sévit sous toutes ses formes dans ces quartiers:
vols, violence physiques et trafics de tout genre... pire encore, le gain de
l'argent facile généré par les trafics par exemple bride
la voie de la réussite via l'école. Pour mettre fin à
cette situation, l'effort à consentir s'attellera à faire de la
police un instrument procurant aux habitants de ces quartiers la
sécurité à laquelle ils aspirent.
Ainsi, La création des unités
particulièrement formées à l'activité en milieu
difficile sera prévue. Lesdites unités porteront l'appellation
suivante : « les unités territoriales de quartier ». La
priorité sera attribuée aux quartiers qui ont été
touchées de plein fouet par les violences urbaines, le domaine d'action
desdites unités se restreindra au maintien de l'ordre, elles assureront
une présence visible et dissuasive sur des points fixes. 200
unités territoriales de quartier sont prévues.
Afin de lutter contre la violence urbaine, des compagnies de
sécurisation spécialisées, comptant plus d'une centaine
d'hommes, seront créées, leur mission principale sera d'assurer
un soutien de façon permanente à la police de quartier dans les
secteurs et aux périodes les plus sensibles. La première
compagnie verra le jour au cours du premier semestre 2008 en
Seine-Saint-Denis.
Avec ces deux dispositifs et le renforcement en policiers de
certains départements déficitaires, ce sont, en trois ans, 4 000
policiers qui s'ajouteront à ceux déjà chargés de
la sécurité des banlieues.
La lutte contre l'insécurité
bénéficiera aussi du plan de renforcement de la vidéo
protection (multiplication des caméras sur la voie publique,
généralisation des raccordements aux forces de
sécurité).
En outre, Les groupes d'intervention régionaux [GIR]
renaîtront de leurs cendres en vue de mener une lutte rigoureuse contre
l'économie souterraine et toutes les formes de délinquance qui en
découlent. « Afin de rétablir la loi de la
République dans les quartiers où s'est imposée la loi de
l'argent et de la violence. »
Il est important de signaler que toutes ces mesures ne
pourront avoir lieu que si un lien de confiance s'établit entre la
population et la police. Afin de renforcer ce lien, des réservistes
expérimentés seront recrutés comme
délégués à la « cohésion police -
population », ils s'appuieront sur des « volontaires citoyens de la
police nationale », autrement dit des habitants recrutés pour
impliquer les habitants dans la sécurité de leur propre
quartier.
2.3.2.1.5. Le transport :
Les moyens de locomotion constituent un moyen de
communication avec le reste du territoire. Cependant, les zones urbaines
sensibles sont mal desservies par les transports en commun, sachant qu'un bon
nombre de ses habitants utilisent fréquemment ces derniers, des
statistiques montrent que 34% des habitants des zones urbaines sensibles (ZUS)
utilisent les transports en commun pour se rendre à leur travail ou
à leur lieu d'études, contre 20% pour ceux qui résident
dans les autres quartiers de l'agglomération.
Le manque des moyens de transports constitue ainsi une
entrave pour les habitants des banlieues qui les empêchent
d'accéder facilement aux zones d'activité économique ainsi
que les équipements publics.
A titre d'exemple, le département de la
Seine-Saint-Denis rencontre plusieurs difficultés pour relier certaines
communes aux centres d'activité économique ou de formation, tels
que l'aéroport de Roissy (pôle de 100 000 emplois) ou les grandes
universités (Villetaneuse, Saint-Denis) ce qui aboutit à une
situation paradoxale : certes, les entreprises sont nombreuses dans le
département, toutefois le niveau de chômage demeure
élevé, surtout dans les zones urbaines sensibles.
L'enclavement a donc une large contribution s'agissant du
renforcement de la fracture entre les banlieues et le reste de la ville, et
explique l'aversion des investisseurs pour certains quartiers, car la faiblesse
voire l'absence de moyens de transports collectifs desservant ces quartiers
apparaît comme une contrainte supplémentaire qui aboutit toujours
à éloigner les entreprises et les commerces de ces zones, et ce
de façon structurelle.
Malgré la décentralisation du secteur de
transport, l'Etat s'engagera financièrement dans le
désenclavement des quartiers en difficulté à hauteur de
500 millions d'euros, en leur réservant une partie des financements
prévus par le Grenelle de l'environnement pour des infrastructures de
transports.
La mobilisation du financement s'étalera sur cinq ans
et se fera sur la base d'un appel à projet lancé par le
ministère de l'Ecologie, du développement et de
l'aménagement durables et le ministère de la ville dans le
deuxième trimestre 2008 auprès des autorités
organisatrices de transport (AOT) locales.
Le financement des opérations donnera lieu à des
conventions spécifiques entre l'agence de financement des
infrastructures de transport (AFIT) et les AOT compétentes au cas par
cas. Compte tenu des particularités de l'Ile-de-France (rôle du
Syndicat des transports d'Ile-de-France qui est une AOT régionale), la
gestion sera différente pour cette région.
L'engagement de l'Etat vise à réaliser des projets
structurants et emblématiques de transports en site propre pour les
quartiers (tramway T4 à Clichy et Montfermeil ; réalisation
du barreau de Gonesse raccordant les Réseau Express
Régional (RER) B et D), mais également à financer
rapidement, d'ici la fin de l'année, des projets permettant des
améliorations visibles sur certains sites (sécurisation de gares,
création de voies de bus).
2.3.2.2. Limites :
Le plan « Espoirs Banlieues », apparenté au
plan Marshall par ses auteurs, traite de nouveaux volets tels que la
sécurité et le transport certes, mais est-il vraiment un point de
rupture avec les plans qui l'ont précédés ?
De prime abord, ledit plan s'appuie sur une base fort
déplorable à savoir le contrat « donnant-donnant », qui
n'est là que pour aider les personnes qui veulent s'en sortir. Que
doit-on faire alors pour les personnes qui ne peuvent pas s'en sortir ?
Sont-elles de facto éliminées par le Plan ? Où
sont passées les valeurs républicaines françaises qui
protégent tous les citoyens, y compris ceux qui sont les plus
vulnérables ?
De surcroît, l'évolution de la
dénomination des banlieues renseigne sur la place de celles-ci au sein
du territoire français. En effet, longtemps qualifiées de
quartiers pourris, à problème et parfois indésirables
etc., elles sont désormais qualifiées de « zones urbaines
sensibles ». Toutefois elles sont encore loin d'être
considérées comme des quartiers faisant partie intégrante
du territoire français.
Par ailleurs, Le Plan « Espoir banlieues » a
critiqué lui-même les précédents plans et
réformes en les traitant de catalogues de séries
dispersées et sans traitement de fond. Cependant, force est de constater
que ledit plan ne sort guère du lot et abonde dans le même sens
des plans qui l'ont précédés.
En effet, concernant l'éducation, le Plan ne fait que
recycler quelques anciennes mesures appartenant, pour l'essentiel, au plan de
cohésion sociale. De plus, l'ensemble des mesures,
présentées par le nouveau plan concernant l'éducation est
discutable, à titre d'exemple, l'école de la deuxième
chance n'est peut-être pas la meilleure des solutions pour lutter
efficacement contre l'échec scolaire. Ne serait-il pas plus judicieux de
rénover et de réhabiliter l'école de la «
première chance » avant?
Une fois de plus, tous les volets présentés par
le plan « Espoir Banlieues, une dynamique pour la France » ne
traitent guère le noyau du problème, et se contentent seulement
de lutter contre les conséquences apparentes. Pire encore, il s'appuie
sur une base discriminatoire qui prend en main ceux qui « méritent
» et laissent tomber ceux qui ne « méritent » pas.
La seule singularité qu'on peut accorder au nouveau
plan est la sollicitation massive du secteur privé. Etant donné
que l'Etat a montré ses limites, le secteur privé pourrait
apporter un nouveau souffle. Seulement, il est utile de rappeler que le mot
d'ordre du secteur privé est le profit financier, il est donc fort
probable que les entreprises manifesteront une aversion à l'égard
de cette sollicitation et n'accepteront pas de faire le travail au lieu de
l'Etat, si cette démarche s'avère peu lucrative. Si tel est le
cas, le plan « Espoir Banlieues » restera lettre morte.
En définitive, « Espoir banlieue » est une
vision très subjective sur les banlieues qui scindent ses habitants en
deux catégories : ceux qui méritent et ceux qui ne
méritent pas. En oubliant que les violences, l'échec scolaire, le
chômage des jeunes sont la résultante de l'environnement urbain
dans lequel ces habitants vivent. Ainsi, peut-on avancer que ce plan ne vise
pas à renforcer réellement la cohésion sociale.
3. Chapitre III : La Cohésion sociale dans le
cadre de l'Union Européenne
3.1. présentation générale :
L
'élargissement de l'Union européenne,
regroupant actuellement 27 pays, est un défi majeur Pour son avenir,
pour la sécurité et la paix sur le continent mais aussi pour le
modèle politique et social de l'Union. Le modèle social
européen dans une Europe à
27, ou 30 si l'on compte les trois pays candidats, où
les écarts de développement, de revenus et de salaires n'auront
jamais été aussi grands et où l'absence de règles
sociales et fiscales communes risque d'accroître la dérive vers
une vaste zone de libre-échange soumise aux seules lois de la
concurrence, au dumping salarial et aux délocalisations sauvages.
Une forme de solidarité doit donc s'établir
entre les régions riches et pauvres qui sont une des originalités
de l'Union, faute de financements nouveaux et d'un budget européen
permettant réellement de faire face aux besoins de rattrapage des
régions les plus pauvres des pays candidats comme des pays
déjà membres de l'UE. Tous ces défis ne sont pas
créés en soi par l'élargissement et sont
déjà posés dans l'Union. Mais l'élargissement les
rend plus aigus et urgents à régler, au risque de voir l'Europe
renoncer au projet politique et au modèle social qui sont au coeur de
son identité.
Le territoire de l'Union élargie constitue un tout et
son développement se doit, pour être durable, d'être
équilibré. Il serait néfaste que les régions les
moins prospères des quinze anciens pays membres, qui ont vu leur
situation s'améliorer en termes statistiques, mais qui restent
confrontées à d'importantes difficultés en termes
réels, soient abandonnées à mi- chemin. Toutefois, les
priorités d'intervention pourraient être
différenciées, selon les besoins spécifiques à
chaque pays.
Finalement, pour que la cohésion sociale soit efficace,
il est important d'effectuer une approche à la fois institutionnelle,
sociale et économique. Sans cela, l'harmonisation risque
d'entraîner la "vieille" et la "nouvelle" Europe vers le
bas. C'est pour répondre à cette exigence que la direction
générale de la cohésion sociale (DG III).
En effet, la principale tâche de la Direction
Générale de la Cohésion sociale consiste à
développer la cohésion sociale qui est
définit de la façon suivante : « la cohésion
sociale est la capacité d'une société à assurer le
bien-être de tous ses membres, à minimiser les disparités
et à éviter la polarisation. Une société
cohésive est une communauté solidaire composée d'individus
libres poursuivant des buts communs par des voies démocratiques...
Toutes les sociétés doivent vivre avec les tensions et les
pressions provoquées par des divisions existantes ou potentielles. Par
exemple, il y a dans toute société des disparités de
richesse entre les individus ; lorsque ces disparités sont
excessives ou tendent à augmenter, la
cohésion est menacée. » La direction a pour mandat de
promouvoir les normes européennes du domaine social et de la
santé, de préserver la diversité ethnique et culturelle et
de mettre en oeuvre la coopération en matière de
développement social. Elle cherche également à
élaborer des politiques sociales pluri-disciplinaires et innovatrices
ainsi qu'à apporter son soutien aux décideurs, aux experts et aux
travailleurs sociaux. Ceci peut se faire à travers l'Europe tout
entière notamment grâce aux instruments normatifs dont elle est
dotée, aux conférences ministérielles qu'elle organise et
aux comités européens intergouvernementaux et aux groupes
d'experts qui se réunissent régulièrement.
3.2. Mandat général :
Le mandat général a pour but de favoriser la
cohésion sociale et promouvoir l'amélioration de la
qualité de la vie en Europe pour une véritable jouissance des
droits humains fondamentaux et pour le respect de la dignité humaine.
3.2.1. Objectifs principaux :
Les objectifs de la DG III sont au nombre de trois :
o promouvoir des normes européennes dans les domaines
social, économique et de la santé, défendre la
diversité ethnique et culturelle, promouvoir la mise en oeuvre d'une
coopération pour le développement social dans
l'intérêt des groupes les plus vulnérables en Europe et en
vue de réduire les inégalités ;
o Aider et conseiller le Secrétaire
Général pour ce qui est des questions se rapportant à la
cohésion sociale et aux politiques sociales, de la santé et des
migrations et apporter
appui et conseils au Comité des Ministres ainsi qu'aux
autres organes statutaires de l'Organisation, si besoin est ;
o Aider et superviser la Direction européenne pour la
qualité des médicaments (DEQM), la Direction de l'Accord partiel
sur la Banque de développement du Conseil de l'Europe, l'Accord partiel
dans le domaine social et de la santé publique et le Groupe de
coopération en matière de lutte contre l'abus et le trafic
illicite des stupéfiants (Groupe Pompidou) dans la mise en oeuvre de
leurs programmes conformément au mandat spécifique de ces accords
partiels.
3.2.2. Les moyens mis en place :
Pour atteindre les objectifs cités ci-dessus, la DG III
:
o Conformément aux instructions générales
et aux orientations données par le Secrétaire
Général et en coopération avec la DSP :
· fournit des services de secrétariat pour la
planification, la mise en oeuvre et l'évaluation d'activités de
coopération intergouvernementales dans le domaine de la cohésion
sociale et, dans ce contexte, apporte un soutien logistique aux organes
intergouvernementaux et connexes instaurés dans le cadre du programme
intergouvernemental, ainsi qu'aux conférences de ministres
spécialisés concernées ;
· élabore et met en oeuvre des programmes
ciblés pour aider les Etats membres (et les Etats candidats) à
respecter leurs engagements en matière de cohésion sociale,
notamment en ce qui concerne la compatibilité de leur législation
et leurs pratiques avec les divers accords et conventions de l'Organisation et
en particulier avec : - le Code européen de sécurité
sociale et son Protocole; - la Convention européenne de
sécurité sociale ; - la Convention européenne relative
au statut juridique du travailleur migrant ;
· promeut, par le développement d'orientations
politiques (recommandations), la mise en oeuvre efficace des principes
consacrés dans les instruments de cohésion sociale du Conseil de
l'Europe ;
o conseille et aide le Comité des Ministres et ses
rapporteurs ou groupes de rapporteurs
pertinents ;
o entretient et développe des contacts avec les
commissions compétentes de l'Assemblée parlementaire et avec le
Cabinet du Secrétaire général de l'Assemblée pour
ce qui concerne les questions de politique de cohésion sociale ; en fait
de même de même avec le CPLRE ;
o conseille, si nécessaire, les autres directions
générales et services sur des questions de politiques de
cohésion sociale (dimensions sociale, de la santé et des
migrations), pour parvenir à une complète cohérence dans
ces domaines ;
o v. entretient et développe des contacts avec des
agences spécialisées des autorités nationales et avec des
organisations non gouvernementales dans les Etats membres en matière de
cohésion sociale ; en fait de même pour les Etats candidats et
observateurs ;
o suit étroitement la politique et les
événements dans les Etats membres ou candidats, ainsi que dans
les Etats observateurs, qui peuvent avoir des répercussions sur la
situation de la politique de cohésion sociale et demandent une
réponse de la part de l'Organisation ; diffuse des informations sur les
normes du Conseil de l'Europe, les résultats obtenus et les
activités en matière de cohésion sociale ;
o entreprend des travaux d'analyse, développe des
bases de données, entretient des contacts avec des institutions
universitaires et de recherche et assure la préparation de publications
;
o coopère avec la Banque de développement du
Conseil de l'Europe pour mettre en oeuvre l'accord sur un programme joint de
coopération entre le Conseil de l'Europe et cette banque en
matière de cohésion sociale, en vue du développement de
projets ;
o conçoit et met en oeuvre des activités
d'assistance pour faciliter le respect des engagements souscrits par les Etats
membres et candidats à l'adhésion, y compris dans le cadre
d'initiatives communes avec la Commission européenne et d'autres
partenaires ;
o développe l'interaction et les synergies entre les
travaux du Conseil de l'Europe en matière de cohésion sociale et
ceux d'autres acteurs européens, régionaux et mondiaux dans ce
domaine grâce à des contacts ciblés et aux liens avec les
services et organes compétents des Nations Unies, avec l'OSCE
(Organisation de coopération et de développement
économique, l'OCDE, la Banque mondiale et l'Union européenne, en
tenant compte des compétences propres à la DGAP ; prend en compte
dans toutes ses activités, si cela est opportun et en étroite
coopération avec la DCR, l'importance de la communication interne et
externe.
4. Chapitre IV : La cohésion sociale au
Maroc
J
usque là nous n'avons traité que des exemples
ayant trait à des pays hautement industrialisés, ce qui n'est pas
le cas du Maroc. En effet, la description qu'on a faite des
sociétés de type capitaliste n'est pas systématique. Il
convient de mettre en lumière un
certain nombre de nuances entre les pays
développés et les pays en voie de développement, ces
derniers ont une structure sociale composite, c'est-à-dire qu'en
même temps qu'ils développent des structures modernes, subissent
l'influence des avatars traditionnels de type féodal et tribal.
Il est certain que dans chaque pays, on cherche à
résoudre un problème fondamental, à savoir la justice et
l'égalité sociales. Cependant, les préoccupations ne sont
pas les mêmes. Si les pays développés ont affaire à
une problématique d'abondance, où les questions qui sont
posées sont celles, à titre d'exemple, de la qualité des
aliments ou de la pollution de l'environnement, les pays en voie de
développement, quant à eux, souffrent de problèmes
beaucoup plus élémentaires ayant trait directement à la
subsistance de la population. En toute logique, la cohésion sociale dans
les pays en voie de développement revêt une autre dimension.
Cinquante ans après l'indépendance, le Maroc a
cumulé les faux-pas laissant ainsi s'installer l'un des déficits
sociaux les plus alarmants du Maghreb. La politique marocaine a
été, durant ces années, pour le moins ambivalente,
tantôt prônant un libéralisme et un libre fonctionnement du
marché, tantôt effectuant un protectionnisme étouffant.
Sans oublier, une répression politique qui a sévit depuis les
années soixante jusqu'à la fin des années quatre-
vingt-dix. Dans ce contexte, les entreprises publiques étaient «
gérées » par une bureaucratie étatique
dépourvue de toute compétence, ce qui a eu pour effet une gabegie
des biens publics et des ressources nationales sous toile de fond d'une
corruption sans égale. En effet, Une large série de plan et de
réformes comme le Plan d'Ajustement Structurel (PAS), la marocanisation
ou encore la privatisation se sont soldés par un lourd échec :
« La grande maladie du Maroc, c'est la greffe des modèles et
l'absences de l'innovation » (Paul Pascon cité par Zakya
Daoud, 2007).
Le constat du Maroc est affligeant. Il occupe la 126è
place dans le classement du développement humain ( PNUD, 2007-2008)
très loin derrière l'Algérie 104è place et la
Tunisie 91 è place. Cette situation inquiétante nous pousse
à se demander s 'il existe réellement une promotion de la
cohésion sociale au Maroc ? Quelles sont les interventions de l'Etat
marocain pour réduire la fracture sociale ? Et quel est leur
degré de pertinence ?
4.1. Les inégalités sociales au
Maroc
S
elon la logique gouvernementale, la réduction des
inégalités sociales passe nécessairement par une
croissance économique soutenue. Afin de maximiser celle-ci, le
gouvernement envisage mais ne parvient pas encore à améliorer le
secteur de
l'éducation et de la santé : « Le
Maroc n'arrive pas en termes de développement des ressources humaines
à se hisser au niveau des pays à revenu moyen et à
performance élevée ». (MENA Banque Mondiale, 2005) En
plus de ces deux secteurs fondamentaux, le gouvernement mise sur le secteur
privé, en effet, on a assisté ces dernières années
à une grande série de chantiers ayant pour but
l'amélioration de l'environnement du secteur privé. une grande
part de l'effort consenti par l'Etat va à l'assainissement des finances
publiques par le biais :
+ d'une gestion budgétaire bien maîtrisée
qui devrait ramener le déficit budgétaire à des niveaux
soutenables
+ de l'assouplissement de la fonction publique, en
réduisant la masse salariale.
Concrètement, La situation sociale au Maroc est
façonnée par plusieurs éléments résultant
directement ou tacitement de la volonté politique de l'Etat, on peut
citer quelques uns :
+ la série de privatisation, ayant pour but initial la
soumission des entreprises publiques à des règles de gestion plus
rigoureuses, qui traduit le détachement de l'Etat de plusieurs secteurs
vitaux pour la population comme la santé, l'éducation, l'eau et
l'électricité...
+ la dégradation socio-économique qui touche une
large partie de la population + le gouffre entre la ville et la compagne qui
s'étend de plus en plus...
Il faut se rendre à l'évidence, L'action
sociale de la part de l'Etat est inefficace. Pire encore, elle est souvent mise
au second plan, en s'appuyant sur quelques statistiqueson peut relever les
constats suivants :
·:* Le budget de fonctionnement affecté pour
la défense et les anciens résistants absorbe 36.6% du budget
général contre 29.1% pour l'éducation et 5.4% seulement
pour la santé.
· :* Concernant l'emploi, l'Etat a procédé
à la création de 17000 postes, néanmoins il est
prévu le départ en retraite de plus de 25000 personnes. Ce
désengagement de l'Etat intervient à un moment où tous les
indices sociaux sont au rouge prouvant l'échec des politiques publiques
dictées par les organisations monétaires internationales
· :* le régime de sécurité ne couvre
que la moitié des 2 Millions des salariés, alors que les non
salariés ne bénéficient d `aucune couverture sociale
obligatoire.
· :* l'emploi salarié de la main d'oeuvre infantile
est une pratique courante, alors que 77% des petites filles «
employées à la maison » n'ont jamais été
scolarisées.
· :* le taux de chômage urbain en 2000 selon les
statistiques officielles avoisine les 22%. Ces statistiques sont fortement
contestées puisque, selon les critères retenues, même un
chômeur qui ne travaille qu'un jour par semaine est
considéré comme étant actif.
· :* les inégalités sociales se creusent. Les
10% des marocains les plus riches consomment désormais 14 fois plus que
les 10% les plus pauvres.
Devant l'absence d'une politique sociale concrète,
l'Etat met en avant des raisons conjoncturelles pour justifier ces
résultats comme la sécheresse, le cours du pétrole ou le
cours de devises. Il convient de signaler que les inégalités
sociales étant trop flagrantes menacent la cohésion sociale.
D'ailleurs, le Maroc a connu récemment plusieurs manifestations
dénonçant la vie chère ou le chômage des jeunes
diplômés et qui ont été parfois
sévèrement réprimées. La dernière en date
est celle de SIDI IFNI.
4.1.1. Education publique :
Au Maroc, 42% de la population est illettrée selon les
estimations du HCP pour l'année 2006. Ce taux atteint 58.8 % dans le
milieu rural et plus de 73.4% des femmes rurales sont analphabètes.
Même si le secteur de l'éducation n'est pas touché par la
privatisation, L'Etat promeut en quelque sorte le secteur privé. Parmi
les moyens mis en oeuvre pour stimuler le secteur privé, figurent la
validation par l'Etat de l'enseignement dispensé dans les écoles
privées, des réductions ou exemptions fiscales, des subventions
et la formation de personnel d'encadrement du secteur privé,
payée par l'Etat.
Le dernier rapport de la Banque Mondiale a classé
l'éducation publique marocaine à la 11è place parmi les 14
pays de la région MENA (Moyen orient et Afrique du Nord) la Tunisie et
l'Algérie occupent successivement la 3è et la 8è place
tout en sachant que le budget alloué à l'éducation au
Maroc est 10.5% plus qu'en Algérie et 6.4% plus qu'en Tunisie. L'Etat
débourse plus, encore faut-il bien utiliser cet argent. Car, il est
important de le signaler, la situation de l'éducation est en
piètre condition.
Le rapport du conseil supérieur de l'enseignement [CSE]
montre que l'éducation publique se caractérise par une mauvaise
gestion des charges horaires des enseignants, des incohérences
linguistiques, des programmes et manuels dont la plupart sont
désastreux, sans cohérence entre les matières, une
pédagogie dépassée et un enseignement supérieur en
parfaite inadéquation avec le marché de l'emploi.
La gestion des ressources humaines laisse à
désirer. En effet, l'utilisation des effectif est paradoxale 3 340
instituteurs n'ont pas de tableau de service (n'ont pas de classe). En
même temps les écoles souffrent d'un déficit de 1.390
instituteurs. On se trouve dans une situation où dans certaines
régions ou zones, un excédent en enseignants est constaté,
alors que dans d'autres, c'est plutôt le contraire, tout porte à
croire que les affectations se font selon des critères « obscures
».
S'agissant de l'enseignement secondaire collégial, le
problème est tout autre. En effet, le rapport du CSE
révèle que 37,5% seulement des enseignants accomplissent la
charge horaire légale de 24 heures hebdomadaires. Une sous-utilisation
d'effectifs due, selon le
rapport, à la faible taille des collèges ruraux et
à l'inachèvement des structures pédagogiques des
collèges nouvellement construits.
Dans l'enseignement supérieur, l'effectif du corps
professoral n'a guère évolué depuis la rentrée
universitaire 1999-2000 pour s'établir à 9.870 enseignants en
2006-2007. La raison principale est l'opération «départs
volontaires» de 2005. Le rapport souligne d'autres raisons. En effet, le
niveau de recrutement ne suit pas la cadence des nombreux départs
à la retraite qui ne cessent de croître. Cependant, le
déficit est beaucoup plus prononcé dans certaines disciplines que
dans d'autres. Situation qui a poussé le département de tutelle
à procéder au recrutement de quelque 1.140 enseignants entre 2000
et 2007. Mais, malgré cela, le déficit n'a pas été
pour autant comblé. Conséquence, le taux d'encadrement atteint 85
étudiants par enseignant surtout au niveau des facultés de droit
et des lettres. Difficile donc dans cette situation de dispenser un
enseignement de qualité
Les statistiques de l'Unesco en 2005 montrent que seuls 37%
des enfants inscrits en primaire en 1999/2000 arrivent en fin de cycle en 2005,
au lieu des 90% préconisés par la Charte de l'éducation.
Ils seront 19% au lieu des 80% à finir le cycle collège en 2008
et 7% en 2011 au lieu des 60%, en fin d'enseignement secondaire qualifiant. Au
bac, ils ne seront que 3% au lieu des 40% souhaités par la Charte. Force
est de constater que La place occupée par le Maroc est malheureusement
méritée.
4.1.2. Santé :
Le secteur de la santé au Maroc est en
deçà des besoins de la population. Le nombre d'habitants par
médecin est passé de 2749 en 1997 à 1670 en 2006, c'est
dû principalement à l'accroissement de l'effectif des
médecins (secteur public et privé confondus). Cependant quand on
sait que 75% de la population ne peuvent pas s'offrir les soins fournis pars le
secteur privé, le nombre d'habitants par médecin réel doit
être nettement supérieur. Ce qui rend ces statistiques
biaisées.
L'Etat n'investit que 1.2% de son PIB dans la santé,
depuis 10 ans les prémices du détachement de l'Etat se font
sentir, en effet :
Il y a 10 ans les consultations dans les hôpitaux
publics étaient gratuites, désormais elles coûtent 60 Dh.
Les patients doivent payer à l'avance les médicaments et les
fournitures, et ce même en cas d'urgence.
L'accès payant aux soins de santé n'a pas
été accompagné d'un accroissement significatif de
l'investissement de l'Etat en matière d'infrastructures ou de
personnel.
Entre-temps, le secteur privé a connu une grande
expansion. Un large réseau de cliniques et de laboratoires privés
s'est développé, avec différents niveaux
d'équipements, se situant dans des grandes villes et ciblant la
population la plus aisée.
Les soins médicaux, en plus d'être rares, sont
inéquitables. En effet, les patients souffrent d'une mauvaise gestion
des hôpitaux publics principalement au niveau de l'accueil, de la prise
en charge médicale, de l'équipement des services d'urgence et de
la gestion pharmaceutique. La mauvaise gestion des hôpitaux a pour effet
la carence des ressources humaines, l'absentéisme et la corruption en
tout genre. Ajoutons à cela la difficulté des plus démunis
et surtout de la population rurale à accéder aux services de
soins et de la répartition inéquitable de ces services, tant au
niveau territorial que médical
L'évolution du secteur de la santé met en
exergue la situation actuelle au Maroc. En effet, l'essor du secteur
privé ne bénéficie qu'à un cercle de personne
très réduit tandis que le secteur public est enfoncé dans
un marasme profond lésant ainsi la majorité de la population. Des
efforts ont été fournis comme l'adoption d'une stratégie
2008-2012 qui vise à établir l'équité de l'offre
des soins entre les régions et entre les milieux urbain et rural et
à faciliter l'accès aux soins pour les plus démunis,
particulièrement en milieu rural.(Annexe)
En définitive, des régions entière et de
très larges secteurs sociaux sont exclus de l'accès aux services
médicaux qui sont un droit de base. La population la plus démunie
est évincée par l'annulation de la gratuité des soins de
santé publics. Même si, en principe, celle- ci a droit à un
« certificat d'indigence », cependant il n'est délivré
qu'après un processus bureaucratique long et humiliant.
4.1.3. Eau potable et électricité :
Dans les années quatre-vingt, et en concertation avec
la Banque Mondiale le Maroc a lancé l' « opération
branchements sociaux » afin de répondre aux besoins des citoyens eu
égard à une croissance urbaine galopante. L'objectif était
de brancher les quartiers marginalisés mal desservis au réseau
urbain d'alimentation en eau potable à des prix subventionnés.
Toutefois, la Banque mondiale a exigé l'adoption d'une
politique ajustée sur les prix effectifs du marché, sans tenir
compte ni de la structure urbaine propre à ces quartiers, ni de la
solvabilité de leurs résidents. Le manque de connaissance de
certaines données sine qua non, telles que le tissu urbain dans les
quartiers pauvres, le règne de la clandestinité dans ces zones et
les loyers non déclarés etc., a fait en sorte que les
mécanismes adoptés pour aider les plus désavantagés
soient impraticables. Au final, ce sont les utilisateurs qui ont le moins de
revenu qui paient le plus cher pour un mètre cube d'eau.
La série de privatisation, concernant les services
d'eau potables et d'électricité, a aggravé la situation.
La Lyonnaise des Eaux a pris la concession de Casablanca (LYDEC). REDAL,
filiale de l'entreprise Veolia, a obtenu la concession de Rabat... cette large
vague de privatisation s'est accompagnée d'un double mouvement à
savoir : la détérioration des biens publics ainsi qu'une hausse
des tarifs. (Fréquence irrégulière des relevés des
compteurs, manque de clarté des factures, erreurs de facturation graves,
etc.)
Comme on l'a vu, la situation sociale au Maroc ne
présage rien de bon. En effet, même l'accès aux besoins de
base relève du parcours des combattants pour la majorité de la
population. La fracture sociale a atteint un niveau inquiétant, une
croissance économique soutenue, présentée telle une
panacée, apportera peut-être une solution à long terme et
aura sûrement des retombées indirectes sur le tissu social.
Entre-temps, que fait le Maroc pour atténuer cette situation de
façon directe dans le court et moyen terme ? Nous allons survoler
quelques démarches étatiques ayant pour but de réduire
ladite fracture.
4.2. Lutte contre la pauvreté et la
précarité
4.2.1. INDH
E
n matière de lutte contre la pauvreté et la
précarité, l'Initiative nationale du développement humain
(INDH) prend une place majeure. En effet, ce projet est lancé en 2005
par SM le roi Mohamed VI en personne visant à combler le retard
affiché par le Maroc dans la réalisation des Objectifs du
Millénaire.
Ainsi, le domaine d'action de L'INDH s'articule autours de quatre
axes : o le soutien aux activités génératrices de
revenus.
o le développement des capacités.
o l'amélioration des conditions d'accès aux
services et infrastructures de base (éducation, santé, culte,
route, eau et assainissement, protection de l'environnement etc.).
o le soutien aux personnes en grande
vulnérabilité.
D'une durée de quatre ans allant de 2006 à 2010,
l'INDH prévoit un budget de 10 milliards de DH répartis comme
suit :
Programmes concernant l'ensemble des préfectures et
provinces : programme transversal 2 500 millions de Dh
programme de lutte contre la précarité 2 500
millions de Dh
Programmes ciblés territorialement :
programme de lutte contre l'exclusion sociale en milieu urbain
ciblant 250 quartiers urbains : 2 500 millions de Dh
programme de lutte contre la pauvreté en milieu rural
ciblant 360 communes rurales : 2 500 millions de Dh
Cependant, la stratégie de L'INDH est
éparpillée comme le décrit si bien Lahcen HADDAD : «
On sait ce qu'on veut mais on ne sait pas comment y arriver. On trace
des
visions mais il semble qu'on ne dispose pas de bonnes
stratégies pour y arriver. » En effet, ce qui fait
défaut à L'INDH c'est le manque de buts réalisables et
bien précis accompagnés de résultats mesurables.
Signalons aussi que depuis l'instauration de l'INDH aucun
résultat notable n'est constaté, le Maroc a même
régressé dans le classement du développement humain, il
est certain qu'il est encore tôt de dresser un bilan sur l'INDH,
cependant l'Etat doit redoubler d'efforts pour mettre en place une
stratégie visible à même de réaliser les objectifs
escomptés.
4.2.2. La caisse de compensation
L
a caisse de compensation a pour rôle le subventionnement
de certains achats des résidents du royaume. Elle prend partiellement en
charge le prix de vente d'une multitude de produits de large consommation. En
voici quelques exemples :
Produits
|
Prix subventionné
|
Prix réel
|
Kilo de sucre
|
8
|
10
|
Bonbonne de gaz
|
40
|
108
|
Kilo de farine
|
5.5
|
7
|
Le subventionnement de ces produits coûte cher. Le
budget de la caisse de compensation s'élève à 20 milliards
qui a été rallongé du double pour atteindre 40 milliards
de dirhams soit 3 fois plus que le budget quadriennal de l'INDH. Ce sacrifice
de la part de l'Etat est louable quand on sait que le budget alloué
à ladite caisse dépasse 3% du PIB qui représente le niveau
de déficit toléré. En effet, le but est d'assurer à
la population la plus vulnérable un pouvoir d'achat décent en
contournant la loi de l'économie de marché.
évolution du budget de la caisse de compensation en
milliards de dh
45 40 35 30 25 20 15 10 5 0
|
|
|
20032004 2005 2006 2007 2008
|
L'évolution du budget de ladite caisse a
progressé d'une façon vertigineuse, cela est dû à la
dépendance économique du marché international. En effet,
le Maroc importe 96% de ses besoins énergétiques, 62% de son
sucre et 53% du blé tendre en moyenne au cours des dix dernières
années.
Le fonctionnement de la caisse, à terme, devient
intenable. En plus de cela, une étude effectuée par le HCP montre
que 20% de la population la plus aisée monopolisent 40% des subventions
alimentaires :
Produits
|
20% de la population aisée
|
20% de la population pauvre
|
Farine
|
40.2%
|
6.1%
|
Sucre
|
41.2%
|
9.3%
|
Huile de table
|
48%
|
6.3%
|
Produits pétroliers
|
75%
|
1%
|
On constate donc que le ciblage est inapproprié, ce qui
fausse la mission de ladite caisse. En prenant en compte ces deux facteurs :
o la dépendance du marché international qui
connaît une flambée des prix. o un ciblage mal cadré.
La nécessité de réformer la caisse de
compensation s'impose avec acuité.
La Banque mondiale a proposé au Maroc une piste
à suivre, celle des pays latino- américains et asiatiques ayant
une expérience probante dans ce domaine. Afin de mieux apprécier
la performance de ces pays, nous allons voir l'expérience du Mexique.
En 1995, Le Mexique a opéré sa stratégie
de lutte contre la pauvreté dans un contexte de crise économique.
La pauvreté au Mexique se caractérisait par des conditions de vie
insalubres, taux de mortalité infantile élevé et par
l'inégalité entre homme et femme en matière
d'éducation. L'Etat mexicain a lancé le programme «
Progresa » dans un premier temps puis le
programme « Oportunidades » qui est une
continuation du premier. Oportunidades s'articule
autours de trois axes : la santé, l'éducation et l'alimentation.
Dans ce sens, ledit programme en intégrant ces trois
élément assure aux familles un minimum de bien-être. Ainsi,
ses objectifs se déclinent de la façon suivante :
o améliorer la situation de l'éducation, de la
santé et de l'alimentation des familles vivant dans l'extrême
pauvreté,
o intégrer les interventions au niveau de
l'éducation, de la santé et de l'alimentation, o encourager la
responsabilité et la participation active des familles,
o redistribuer les revenus à ceux qui vivent dans des
conditions d'extrême pauvreté.
Pour ce faire, le Mexique a appliqué une
méthodologie ciblée qui implique la coresponsabilité des
bénéficiaires.
L'Alimentation
o Les transferts d'argent
o Les compléments alimentaires pour les enfants de moins
de cinq ans et pour les femmes enceintes et celles qui allaitent leur
bébé.
o (Liés à des visites régulières aux
centres de santé)
La santé
o Des actions préventives
o Un ensemble de mesures répondant aux besoins de
santé élémentaire
o Sensibilisation à l'hygiène et l'alimentation
o Des mesures pour renforcer la qualité des services
L'éducation
o Des bourses d'études
o Des fournitures scolaires (Liées à une
fréquentation scolaire régulière)
Il est important de spécifier comment
l'opération se déroule. Les transferts d'argent vont à la
mère, ils sont fonction du nombre d'enfants inscrits à
l'école, de leur présence et le progrès accompli dans les
différentes classes, et des visites au centre de santé. Les
mères bénéficiant du programme sont informées, par
le biais d'une brochure, que les avantages conférés par
Oportunidades ne sont subordonnés ni à
une participation à des événements politiques, ni à
un vote pour un parti quelconque. Le fonctionnement du programme est
transparent, et le mode d'opération, de même que les conditions,
sont disponibles sur Internet (
www.oportunidades.gob.mx)
et au registre fédéral. Une liste du nombre de familles qui
bénéficient du programme par localité, municipalité
et état est aussi publiée. Toutes les données sur
Oportunidades peuvent être auditées.
Actuellement, cinq millions de familles
bénéficient de ce programme soit 25% de la population. Le
programme Oportunidades a été
couronné de succès, plusieurs évaluations ont
démontré des résultats positifs dans les domaines de
l'alimentation, la santé et l'éducation. Les transferts d'argent
ont permis l'augmentation du revenu de ces familles à hauteur de 25%.
Le Maroc peut tirer quelques leçons du modèle
mexicain :
i. Concevoir un cadre conceptuel pour l'allègement de la
pauvreté:
a. identifier/ donner de la transparence aux subventions et les
transferts d'argent.
b. le rôle des programmes individuels.
c. de la consistance et de la cohérence dans l'effort
global.
ii. Définir les arrangements institutionnels:
a. programmes efficaces
b. identifier le niveau de responsabilité gouvernementale
pour chaque programme.
iii. Renforcer les capacités pour effectuer et maintenir
les changements:
a. la nécessité pour une agence avec des pouvoirs
décisionnaires très forts sur l'allocation du budget et la
conception du programme.
b. promouvoir des appréciations «horizontales»
de ce que font les ministères et les agences.
c. un soutien politique solide.
d. légitimer les propositions en se basant sur des
évidences empiriques.
e. concevoir et suivre de près sa mise en oeuvre
attentivement.
iv. Assurer la durabilité financière:
a. pas de superflu.
b. la cohérence avec la politique économique.
Cependant, cette entreprise doit s'effectuer dans la
transparence la plus totale. Dans le cas du Maroc, la corruption qui est, force
est de constater, enracinée dans les rouages de l'administration
publique et surtout dans le milieu rural faussera toute initiative aussi
ambitieuse soit-elle. Pour remédier à ce problème, il
faudra s'atteler sur d'autres secteurs comme la bonne gouvernance et la
démocratie.
Les énormes inégalités sociales qui
touchent la majorité de la population représentent un réel
danger sur la cohésion sociale de notre pays. En effet, la population
pauvre souffre d'un ostracisme, lequel altère l'adhésion de cette
population à la nation. Preuve en est l'immigration clandestine qui
touche beaucoup de jeunes qui préfèrent aller vers l'autre rive
au péril de leur vie, le taux bas de participation aux élections
législatives de 2007, et de façon plus âpre les attentats
terroristes comme ceux du 16 mai. Rappelons que la cohésion sociale est
avant tout le partage de valeurs communes, lesquelles rendent le tissu social
plus
soudé. En cela, seule l'école peut
répandre ces valeurs. Seulement il ne faut pas se leurrer, l'existence
des valeurs communes est subordonnée à la décence de la
condition de vie de tout un chacun. L'action de l'Etat doit donc s'orienter
vers deux secteurs à savoir :
o l'amélioration des conditions de vie de la
population,
o la promotion de valeurs communes inculquées par
l'école telles que la démocratie, la lutte contre la corruption,
la tolérance, l'égalité entre les deux sexes...
4.3. L'articulation de l'éducation avec la
cohésion sociale
4.3.1. Approche didactique de l'éducation :
L
a cohésion sociale n'est rien d'autre que le partage
d'un certain nombre de valeurs capables de maintenir une société
solide et solidaire. En effet, au-delà de l'aspect économique,
l'absence de ces valeurs peut faire submerger une société, aussi
riche
et développée soit-elle, dans des profondes
dissensions. Le cas de la Belgique en est la parfaite illustration.
Effectivement celle-ci souffre d'un conflit inquiétant entre les
flamands et les wallons (francophones) pouvant mener probablement à une
scission du pays. Il est donc clair que le partage de valeurs communes,
approuvées et non imposées, constitue l'ossature d'une
société cohésive. Ce partage ne peut avoir lieu que par le
biais d'une socialisation des individus. Les principales institutions aptes
à sociabiliser ces derniers, dans le cas du Maroc, sont : la famille,
l'école et la religion. Cette dernière joue un rôle non
négligeable sur le comportement de la population marocaine étant
donné que la société marocaine est fortement religieuse.
Cependant, il faut être prudent à l'égard des idées
véhiculées par des groupements religieux qui n'ont aucune
légitimité. Ceux-ci cachent derrière leurs prêches
des idées intégristes totalement rétrogrades appelant
à la haine et à la violence. Le seul moyen dont dispose l'Etat
pour contrer la montée en puissance d'un islamisme
démesuré est l'école. En effet, tout ce qui est
enseigné à l'école renseigne sur le projet de
socialisation souhaité pour la prochaine génération. Il
convient donc de signaler le rôle de l'école en tant que rempart
agissant en faveur de la société contre les innombrables menaces
qui la guettent.
Seulement, l'école marocaine d'aujourd'hui ne remplit
guère son rôle. C'est à cause de cela qu'on peut expliquer,
en partie, la montée en puissance de l'islamisme qui a trouvé le
champ vide pour endoctriner une large partie de la population et surtout les
couches sociales les plus défavorisées qui ont été
faciles à convaincre en raison de l'exploitation de leurs conditions de
vie. Pis encore, les idées islamistes commencent à
pénétrer l'école par le biais de certains
éducateurs, ce qui n'est pas sans danger sur l'ensemble de la
société. La nécessité de repenser la mission de
l'école s'impose donc avec acuité.
Avant d'aller plus loin, il est nécessaire d'essayer de
donner une interprétation à l'éducation. En faisant cela,
nous pourrons mieux comprendre et définir la mission d'une école
qui défend des valeurs garantes d'une société
cohésive. En effet, selon Philippe MEIRIEU12
l'éducation peut être définie comme : « une
relation dissymétrique, nécessaire et provisoire, visant à
l'émergence d'un sujet. » (Philippe MEIRIEU, 1997)
· L'éducation = Relation
L'éducation est une relation qui lie
l'éducateur et l'éduqué, celle-ci ne se limite pas
seulement à la simple transmission du cours mais englobe l'ensemble des
outils et procédures utilisés à cette fin. En effet, la
sociologie anglo-saxonne met mieux en relief cette relation, selon les
études de Michael YOUNG il existe à côté du
curriculum formel (programmes, instructions pédagogiques) un autre
curriculum tacite où les élèves apprennent comment
intervenir en classe, quelles sont les questions qui sont convenables et celles
qui ne le sont pas. Dans le cas du Maroc, La relation
éducateur/éduqué n'est guère exemplaire, car
caractérisée, spécialement dans le secteur public, par
l'oppression physique et morale. Citons à titre d'exemple le
châtiment corporel qui est monnaie courante dans l'espace éducatif
marocain. Cette situation serait-elle le reflet des rapports de pouvoir dans la
société ?
· L'éducation = relation
dissymétrique
L'éducateur effectue un tri afin de choisir ce qui est
« bon » pour l'éduqué. Les concepteurs des programmes
et les éducateurs choisissent les contenus qui sont jugés
convenable à l'éduqué. La relation éducative,
pouvant être affective ou au contraire autoritaire, est régie par
un référent extérieur à elle. Le
référent (Savoirs, connaissances, cultures) joue donc un
rôle déterminant dans cette relation. Cela va sans dire que le
contenu éducatif doit être confectionné soigneusement. Or
le programme éducatif marocain a acquis sa cohérence au prix de
l'écrasement des langues et cultures régionales et le refoulement
de la diversité culturelle, favorisant ainsi
délibérément le primat d'une logique dominante à
savoir la culture arabe qui n'est pas représentative de l'ensemble de la
société marocaine. Toute une frange de la population (population
berbère qui représente une grande part de la population)
12 Professeur à l'université
Lyon-II.
trouve leur culture exclue de l'école marocaine qui
baigne dans « l'ethnocentricisme ». Effectivement, cela est plus
visible en reprenant les mots de Basil BERNSTEIN : « la manière
dont une société sélectionne, classe, transmet et
évalue les savoirs scolaires est le reflet à la fois de la
distribution du pouvoir et du contrôle social. »
· L'éducation = relation dissymétrique
nécessaire
Il est évident qu'aucun de nous n'a pu parvenir
à être adulte sans une transmission culturelle d'autres personnes
qu'elle soit positive ou négative. La « vie » ne peut
être éducative en raison de son caractère aléatoire.
En cela c'est à l'école qu'incombe la tâche de
l'éducation. En effet, elle doit être un espace qui permet un
apprentissage progressif et exhaustif. Cela implique que l'identification du
contenu à transmettre n'est pas suffisante à elle seule. Elle
doit être accompagnée de l'élaboration des méthodes
permettant une bonne transmission du contenu. C'est justement cet aspect qui
fait défaut au système éducatif marocain, lequel n'incite
guère l'éduqué à apprendre et se cantonne à
l'émission de l'éducateur et à la réception passive
de l'éduqué qui est sommé de recevoir le cours tel qu'il
est sans aucune critique.
· L'éducation = relation dissymétrique
nécessaire et provisoire
L'objet ultime de l'éducation est l'intégration
du contenu éducatif par l'éduqué. Autrement dit, ce
contenu doit être utilisé et réapproprié par ce
dernier dans sa vie quotidienne. Cette intégration constitue le pont qui
lie l'école à la société. Cela étant dit,
l'établissement de ce lien n'est pas une mince affaire, car selon les
penchants et les conditions d'enseignement des matières, certaines
d'elles sont plus prisées que d'autres. A cela vient s'ajouter
l'hégémonie de certaines matières telles que les
mathématiques qui ont une place centrale dans le système
éducatif et qui sont imposées à l'éduqué de
façon systématique sans prendre en considération sa
volonté et ses penchants. Ainsi, peut-on avancer qu'il ne peut y avoir
point d'éducation s'il n'y a pas une appropriation personnelle de ce qui
est transmis à l'éduqué.
· L'éducation = relation
dissymétrique nécessaire et provisoire visant l'émergence
d'un sujet.
L'éducation ne doit pas rimer avec fabrication, en
effet cette approche est à proscrire car il est impossible
d'aliéner les opinions et assigner à l'école la mission de
forger des générations dociles dont les opinions sont identiques
: « L'éducation-fabrication ne conduit qu'à la violence
car, quand les volontés s'opposent, le conflit éclate
inévitablement, avec son cortège d'humiliations ou de
renonciations. » Philippe MEIRIEU La finalité de
l'éducation est de veiller à ce qu'une génération
autonome dotée d'un esprit analytique au niveau intellectuel puisse
émerger. Pour ce faire, le système éducatif doit
être un espace de liberté accordant à
l'éduqué la possibilité de forger sa propre
personnalité en s'appuyant sur un contenu éducatif adéquat
qui anticipe la volonté et la conscience de tout un chacun.
En définitive, Sigmund FREUD n'a pas tout à
fait tort en considérant l'éducation comme étant un «
métier impossible » dans la mesure où il est
impossible d'agir sur la conscience d'autrui. En effet, il faut plutôt se
focaliser sur l'importance de prévaloir un système
éducatif qui accepte les différences et qui encourage
l'éduqué à poursuivre ses volontés et à les
appliquer pour le bien de la société. En résumé, le
processus d'éducation doit prendre en considération trois
exigences indissociables13 :
o Hominisation: rendre l'éduqué
sensible aux questions de l'humanité,
o Socialisation: lui apprendre le « vivre
ensemble » et lui permettre de trouver
une place dans la société à travers
l'insertion professionnelle par exemple, o
Personnalisation: celui-ci doit trouver dans le système
éducatif un outil
efficace pour forger sa propre personnalité.
L'école doit donc permettre à
l'éduqué de s'épanouir quelle que soit son origine
sociale, et non pas être un facteur supplémentaire d'exclusion.
Force est de constater que le système éducatif marocain et loin
de répondre à ces exigences. En effet, on constate une dichotomie
entre le secteur privé et le secteur public. Le premier est
élitiste, réservé à une partie de la population
particulièrement aisée, offrant à ses élèves
un environnement adéquat à l'apprentissage tandis que le second
est empêtré dans ses problèmes ne pouvant même pas
fournir à ses éduqués les rudiments de l'éducation.
Nous pouvons citer la situation dans les
13 Bernard CHARLOT - professeur en sciences de
l'éducation, Université Paris-VIII
établissement ruraux où l'enseignant doit
enseigner trois classes à la fois. Dans ce contexte, l'école, en
tant que promoteur social, devient un espace de concurrence acharnée et
continue, permettant aux plus compétitifs d'accéder à des
établissements prestigieux. Cela dit, cette concurrence, qui n'est ni
pure ni parfaite eu égard à l'inégalité
d'accès au savoir, s'est d'autant plus accrue avec le nombre important
de jeunes diplômés chômeurs, dû principalement
à la déconnexion de l'école avec le marché du
travail. L'entrée dans la vie active décente suppose
impérativement l'obtention de diplômes délivrés par
des établissement prestigieux très sélectifs
nécessitant une durée d'études de plus en plus longue. Les
savoirs et compétences scolaires deviennent des marchandises vendues aux
plus offrants.
Comme on l'avait souligné avant, le système
éducatif marocain doit être en phase avec les besoins actuels de
la société et promouvoir ainsi des valeurs communes pouvant faire
front contre les perversions qui menacent la quiétude de la
société.
Pour ce faire l'école marocaine doit intégrer
l'hominisation, la socialisation et la personnalisation au sein de son
système. Autrement dit, l'éduqué, en sortant de
l'école, doit :
o acquérir des valeurs universelles telles que les Droits
de l'Homme,
o appliquer ses droits et ses obligations en tant que
citoyen,
o se sentir membre de la nation sans pour autant nier les
cultures régionales, o forger une personnalité forte.
Tels sont donc les défis de l'ensemble des
établissements éducatifs marocains. L'enseignement de ces
pratiques ne pourra se faire que dans un cadre qui favorise le
développement en se basant sur l'interactivité, la
diversité des opinions. Sans oublier, la nécessité de
réhabiliter les établissements scolaires publics, qui est une
condition sine qua non, en leur fournissant les ressources financières
et humaines nécessaires à leur développement. Si toutes
ces conditions sont réunies, l'éducation promouvra alors la
citoyenneté et par voie de conséquence la cohésion
sociale.
4.3.2. L'éducation à la citoyenneté
au Maroc
Depuis 2003, le Maroc a amorcé le projet de mettre en
place dans ses établissements l'éducation à la
citoyenneté en la substituant à l'éducation civique.
Celle-ci était longtemps mise de côté et subordonnée
à l'histoire/géographie. Cela dit, on ne peut pas dire qu'il y a
eu une rupture avec l'enseignement assuré par l'éducation
civique. En effet, l'éducation à la citoyenneté s'inscrit
dans la continuité de l'ancienne matière, en lui ajoutant un
nouveau souffle afin de rester en phase avec la situation sociale et mondiale
actuelle.
La mise en place de l'éducation à la
citoyenneté n'est pas fortuite. Effectivement, elle répond
à un certain nombre de volontés affichées par l'Etat qui
peuvent être énumérées comme suit :
o concrétiser la volonté de l'Etat à
renforcer une société marocaine moderne et
démocratique,
o honorer la charte de l'éducation ratifiée par le
Maroc et ce :
· en enseignant des valeurs citoyennes et universelles
· en développant les compétences des
apprenants (développement de la personnalité et des
compétences pouvant faire oeuvre utile à l'ensemble de la
société...)
· en favorisant des programmes qui dépassent
l'approche quantitative et l'adoption d'une approche méthodologique qui
trouve appuie dans la progressivité et la continuité,
o réorganiser le programme de l'éducation
sociale (histoire, géographie, éducation à la
citoyenneté) dans le souci d'appliquer leur contenu dans la vie sociale,
pour qu'elles puissent jouer leur rôle pleinement à savoir :
l'extension des valeurs communes au sein de la société.
Tous ces éléments ont poussé l'Etat
à introduire l'éducation à la citoyenneté à
la place de l'éducation civique. En effet, ce changement suppose une
nouvelle approche au niveau méthodologique et pédagogique ainsi
qu'une nouvelle conception des contenus proposés d'une part, et du champ
d'application de ces derniers, d'autre part.
En effet, l'approche méthodologique vise la liaison
entre les compétences, les programmes, la didactique utilisée
pour le traitement des sujets et l'orientation des activités qui se
focalisent au premier degré sur l'éduqué tout en
respectant la fonction de la matière.
S'agissant de la pédagogie, elle se base sur les
compétences devant être encadrés par les documents,
lesquels constituent le contenu. En effet, ces compétences doivent avoir
trait, d'une façon directe, à la citoyenneté
L'élaboration du contenu assigné à
l'éducation à la citoyenneté passe tout d'abord par le
transfert de certaines leçons de l'éducation civiques
inhérentes à l'histoire ou à la géographie vers les
matières y afférents, et ensuite par l'ajout de nouvelles
leçons qui conviennent davantage à la matière.
Le champ d'application de l'éducation à la
citoyenneté commence dès la quatrième année de
l'enseignement élémentaire en prenant en compte les
capacités des élèves ainsi que les priorités
d'apprentissage exigé par la matière. A cet effet, le contenu
sera continu et progressif et accordant une grande importance à l'aspect
local qui recouvre pas moins de 30% du contenu dédié à la
région et à l'établissement.
L'éducation à la citoyenneté, ainsi
réorganisée, doit répandre certains principes :
o les valeurs citoyennes et de Droits de l'Homme ainsi que leur
rôle à faire émerger l'amour de la nation et la
volonté de la servir chez des apprenants,
o l'éducation à la citoyenneté en tant
qu'outil à la fois de sensibilisation des apprenants envers leurs droits
et leurs obligations et de stimulant à la pratique démocratique
et de développement de la participation positive à la chose
publique et locale,
o l'épanouissement de l'apprenant en réagissant
positivement avec son environnement par le biais d'un esprit tolérant
ouvert aux débats et acceptant les différences.
Cependant, la citoyenneté ne peut avoir lieu que si la
société remplit un certain nombre de critères, à
savoir :
o la pratique des valeurs enseignées dans une
société démocratique,
o la nécessité de la connaissance et de la
reconnaissance des droits et des obligations par tous les citoyens,
o l'égalité entre tous les citoyens.
L'objet de l'éducation à la citoyenneté est
d'inciter les apprenants à appliquer le contenu qu'il leur a
été enseigné. A cet égard, le dispositif
pédagogique doit foisonner d'innovations
afin de transmettre aux apprenants le contenu de la
matière de manière lucide et ludique. Celui-ci adopte une logique
pédagogique triangulaire et progressive :
Initiation Ancrage Appropriation
Afin d'appliquer au mieux cette logique, l'apprenant doit
prendre une place centrale et le considérer en tant que «
partenaire » dans la démarche pédagogique en vue de
l'inciter davantage à pratiquer les valeurs enseignées et de
stimuler en lui les capacités à façonner ses choix et de
les défendre, ce qui suppose une approche participative dans la
construction des enseignements. C'est en prenant en compte ces
considérations que le cycle d'apprentissage a été
élaboré :
La découverte est une phase d'initiation où
l'apprenant commence à connaître certains concepts tels que la
justice, la dignité etc., des faits tels que l'inégalité
entre homme et femme ainsi que l'analyse de certaines données. La phase
de découverte a pour mission de faire naître chez l'apprenant une
sensibilité et une compréhension des valeurs enseignées,
cette phase est un préalable à la réaction de
l'apprenant.
La réaction est une phase intermédiaire
d'apprentissage où l'apprenant est amené à réagir
en construisant des réponses personnelles sur des problématiques
posées sous différents angles. A la fin de cette phase
l'apprenant doit forger un avis propres à lui en prenant en
considérations les dimensions civiles.
L'action est une phase finale qui débouche sur des
voies concrétisant l'action au sein dans la société au
niveau local et national, et qui mène l'apprenant à trouver une
ou des solutions aux problématiques traitées et à essayer
de les appliquer individuellement ou collectivement. La finalité ici est
de faire de l'apprenant un citoyen actif tant au niveau local et national
qu'international.
Pour mener à bien ce cycle, les apprenants ont à
leur disposition des outils tels que les cartes, photographies, données
statistiques etc. qu'ils pourront utiliser en s'appuyant sur des techniques
pédagogiques participatives qui favorisent la dynamique du groupe,
l'autonomie et la capacité à résoudre des
problèmes.
En guise de conclusion, l'initiative prise par le Maroc, en
matière d'éducation à la citoyenneté au sein de ses
établissements, est louable. Il a ouvert une brèche dans le
renforcement des apprentissages des valeurs citoyennes et conséquent au
renforcement de la cohésion sociale.
Cependant entre les principes proposés et l'application
de ceux-ci existe un gouffre béant, lequel efface toute la
crédibilité et les efforts consentis par l'Etat. En effet,
l'enseignement de cette matière rencontre une nuée de
problèmes qui entravent systématiquement la mission de celle-ci,
à commencer par les conditions lamentables des établissements
scolaires publics, ceux-ci ne peuvent pas fournir aux jeunes apprenants les
conditions les plus rudimentaires à l'apprentissage. Comment peut-il y
avoir d'apprentissage participatif dans ce cas ?
A ces conditions lamentables vient s'ajouter l'insouciance
d'un bon nombre d'enseignants, pour qui l'éducation à la
citoyenneté n'est qu'une perte de temps ou bien encore une entreprise
satanique qui tente de répandre des valeurs occidentales antinomiques
avec les valeurs musulmanes. Pour le reste des enseignants qui souhaitent
s'investir dans
l'enseignement de cette matière, ils ne sont
malheureusement pas assez formés pour l'enseigner correctement et
tombent cruellement dans le piège de l'improvisation et de
l'amateurisme.
Par ailleurs, l'application positive des pratiques
enseignées par l'éducation à la citoyenneté dans la
société tant au niveau local que national est la finalité
ultime de cette démarche. Or l'école marocaine, qui vie dans une
situation autarcique, n'a aucun lien avec son environnement
socioéconomique. Cette réalité heurte toutes les
espérances de l'Etat au mur de l'évidence. Car on ne peut
guère imaginer l'enseignement de l'éducation à la
citoyenneté au sein d'un établissement qui est
complètement coupé de son environnement. La pratique n'existerait
qu'à l'état de virtualité.
Même si, comme on l'a vu précédemment, le
ministère de l'éducation nationale affiche la volonté de
rompre avec l'approche quantitative dans le souci de s'aligner avec les autres
pays qui ont ratifié la charte de l'éducation. Toutefois, force
est de constater que cette approche est la forme « pédagogique
» la plus dominante dans le système éducatif marocain, En
effet, la qualité des contenus se mesure encore par leur
épaisseur et la méthode d'apprentissage qui domine est le «
par coeur ». Dur donc de mettre en marche le cycle d'apprentissage
triangulaire.
Avant de traiter l'éducation à la
citoyenneté au Maroc, nous avons souligné l'importance de
réhabiliter les établissements publics. Sans cette condition,
aucune réforme scolaire ne portera ses fruits. Cet état de fait
semble être éludé par le ministère de tutelle, ce
qui minimise les chances de réussite de l'éducation à la
citoyenneté. Pourtant, celle-ci représente une immense
opportunité au Maroc pour renforcer sa cohésion sociale.
Ainsi, la mauvaise adaptation de l'éducation à
la citoyenneté fait perdre au Maroc un atout de renforcement de
cohésion sociale. En effet, l'éducation à la
citoyenneté telle qu'elle est enseignée au Maroc peut
s'apparenter à un château de carte bâti d'une façon
inconsistante. Le moindre souffle de vent peut l'effondrer. Avant d'essayer de
mettre en place une réforme d'une matière nécessitant des
moyens financiers et humains conséquents, il est peut-être
judicieux de réhabiliter les établissements scolaires au niveau
financier, logistique et humain
5. Conclusion
Tout au long de ce travail, nous avons pu apprécier
l'importance du renforcement de la cohésion sociale en France, au Maroc
et, de façon plus générale, au sein de toute
société. En effet, le présent mémoire retrace
quelques plans et réformes qui visent le renforcement de ladite
cohésion. Ces expériences là sont sans doute imparfaites
en raison d'un certain nombre de contraintes telles que le budget alloué
à celles-ci, des raisons conjoncturelles étouffantes etc., mais
leur finalité est louable, car elle vise l'atténuation des
inégalités sociales.
En effet, comme on l'avait précisé
précédemment, les inégalités sociales sont le lot
de toutes les sociétés. Il est donc vain d'essayer de les
éradiquer totalement, quelques expériences socialistes comme
l'ex-URSS ou Cuba peuvent étayer ces propos. La mission donc des Etats,
en tant que garants de cohésion sociale, est de tenter de faire sortir
le maximum de gens de la précarité et de l'exclusion. Pour ce
faire, il faut introduire une logique sociale dans la dimension
économique. La question qui se pose, s'articule donc autour de la
manière et des moyens à mettre en place pour arriver à
cette fin.
Au-delà de l'aspect économique, la
cohésion sociale est un ensemble de valeurs partagées et
approuvées par tous. Nous avons pu observer l'importance que revêt
l'école en matière d'inculcation de ces valeurs. En effet,
l'école est l'institution la plus apte à sociabiliser les
individus et à faire d'eux des citoyens actifs. Cela dit, ce rôle
peut être réduit à sa plus simple expression, si des
conditions nécessaires ne sont pas réunies telles que la bonne
gouvernance, l'équité, la bonne formation des éducateurs
etc.
En résumé, on peut dire que pour renforcer la
cohésion sociale, les Etats doivent à la fois lutter contre la
pauvreté et l'exclusion en vue d'améliorer les conditions de vie
des catégories les plus vulnérables et veiller à ce que
l'école puisse répandre des valeurs citoyennes. La
finalité de cette démarche est la consolidation de l'esprit
d'appartenance au groupe et par voie de conséquence la consolidation de
toute la société.
Telle est donc la finalité des plans et réformes
cités par notre travail. Cela étant dit, lesdits plans et
réformes, malgré l'importance de leurs volumes
budgétaires, n'arrivent pas
souvent à atteindre les résultats
escomptés. Cet état de fait est attribuable à un certain
nombre de limites. En effet, en prenant l'exemple des allocations, pour le cas
de la France, qui jouent le rôle de complément de revenu pour les
personnes ayant un bas salaire, on trouve que celles-ci nécessitent une
part considérable du budget de l'Etat et ne parviennent pas à
faire sortir un grand nombre de gens de la vulnérabilité. En
effet, un bon nombre d'allocataires sont en situation de dépendance
envers ces allocations. Cette situation de dépendance est
remarquée aussi chez les bénéficiaires de la caisse de
compensation au Maroc. Ce qui nous pousse à chercher de nouvelles
approches capables de faire sortir les catégories les plus pauvres de la
vulnérabilité tout en les rendant moins dépendants des
aides fournies par l'Etat.
Parmi les pistes à suivre, on peut citer
l'économie solidaire. Cette dernière est un ensemble
d'activités ayant pour but de revaloriser l'être humain au sein du
processus productif. En effet, les valeurs défendues par cette approche
sont : la cohésion, la solidarité et le projet collectif. Elle
permet non seulement de réduire la pauvreté mais aussi de faire
des classes sociales démunies un acteur actif dans la scène
économique. L'économie solidaire repose sur deux piliers
principaux : L'insertion par l'activité économique et le commerce
équitable.
+ L'insertion par l'activité économique consiste
à employer des personnes qui sont en situation de grave
difficulté sociale. Cette pratique essaie de contribuer à la
réinsertion sociale de ces personnes en considérant le travail
comme facteur de réinsertion social.
+ Le commerce équitable est un partenariat commercial
dont l'objectif est de parvenir à une plus grande équité
dans le commerce mondial. Il contribue au développement durable en
garantissant les droits des producteurs et des travailleurs
marginalisés, tout particulièrement au Sud de la planète.
Au-delà de l'aspect financier, Les organisations du commerce
équitable s'engagent activement à sensibiliser l'opinion et
à mener des campagnes en faveur du changement dans les règles et
pratiques du commerce international conventionnel.
L'économie solidaire n'est qu'un exemple parmi tant
d'autre qui tente de donner à l'homme une place centrale dans
l'économie. En effet, au lieu d'utiliser la cohésion sociale
en
tant qu'outil pour soigner les plaies engendrées par le
système économique, il est plus judicieux de consacrer
l'économie à la cohésion sociale.
Le système économique actuel suppose le retrait
des Etats. De ce fait, la marge de manoeuvre des Etats français et
marocain est très réduite. En effet, ils ne sont plus en mesure
de pourvoir des emplois qui pourront résorber le chômage ou bien
de prendre en charge toutes les couches sociales vulnérables en raison
de leur budget réduit. Cela dit, ils peuvent investir dans
l'école afin que celle-ci puisse répandre des valeurs citoyennes
qui pourront créer un lien de solidarité fort entre toutes les
classes sociales. En faisant cela, les membres de la société
participeront massivement à côté de l'Etat pour lutter
contre la pauvreté, en se réunissant dans des ONG ou d'autres
formes d'associations.
En définitive, La France ainsi que le Maroc se sont
penchés sur l'établissement d'une société
cohésive basée sur l'équité et n'ont
lésiné guerre sur les moyens. Cependant, ils doivent encore
redoubler d'efforts pour renforcer davantage la cohésion sociale. Cela
ne peut se faire qu'en donnant à l'économie un aspect social et
en répandant via l'école des valeurs citoyennes et universelles
capables de consolider l'esprit de solidarité chez tous les membres de
la société.
6. ANNEXES
Livre I : Chapitre IV
Puisque aucun homme n'a une autorité naturelle sur son
semblable, et puisque la force ne produit aucun droit, restent donc les
conventions pour base de toute autorité légitime parmi les
hommes.
Si un particulier, dit Grotius, peut aliéner sa
liberté et se rendre esclave d'un maître, pourquoi tout un peuple
ne pourrait-il pas aliéner la sienne et se rendre sujet d'un roi? Il y a
là bien des mots équivoques qui auraient besoin d'explication,
mais tenons-nous-en à celui d'aliéner. Aliéner c'est
donner ou vendre. Or un homme qui se fait esclave d'un autre ne se donne pas,
il se vend, tout au moins pour sa subsistance: mais un peuple pour quoi se
vend-il? Bien loin qu'un roi fournisse à ses sujets leur subsistance il
ne tire la sienne que d'eux, et selon Rabelais un roi ne vit pas de peu. Les
sujets donnent donc leur personne à condition qu'on prendra aussi leur
bien? Je ne vois pas ce qu'il leur reste à conserver.
On dira que le despote assure à ses sujets la
tranquillité civile. Soit; mais qu'y gagnent-ils, si les guerres que son
ambition leur attire, si son insatiable avidité, si les vexations de son
ministère les désolent plus que ne feraient leurs dissensions?
Qu'y gagnent-ils, si cette tranquillité même est une de leurs
misères? On vit tranquille aussi dans les cachots; en est-ce assez pour
s'y trouver bien? Les Grecs enfermés dans l'antre du Cyclope y vivaient
tranquilles, en attendant que leur tour vînt d'être
dévorés.
Dire qu'un homme se donne gratuitement, c'est dire une chose
absurde et inconcevable; un tel acte est illégitime et nul, par cela
seul que celui qui le fait n'est pas dans son bon sens. Dire la même
chose de tout un peuple, c'est supposer un peuple de fous: la folie ne fait pas
droit.
Quand chacun pourrait s'aliéner lui-même, il ne
peut aliéner ses enfants; ils naissent hommes et libres; leur
liberté leur appartient, nul n'a droit d'en disposer qu'eux. Avant
qu'ils soient en âge de raison le père peut en leur nom stipuler
des conditions pour leur conservation, pour leur bien-être; mais non les
donner irrévocablement et sans condition; car un tel don est contraire
aux fins de la nature et passe les droits de la paternité. Il faudrait
donc pour qu'un gouvernement arbitraire fut légitime qu'à chaque
génération le peuple fût le maître de l'admettre ou
de le rejeter: mais alors ce gouvernement ne serait plus arbitraire.
Renoncer à sa liberté c'est renoncer à sa
qualité d'homme, aux droits de l'humanité, même à
ses devoirs. Il n'y a nul dédommagement possible pour quiconque renonce
à tout. Une telle renonciation est incompatible avec la nature de
l'homme, et c'est ôter toute moralité à ses actions que
d'ôter toute liberté à sa volonté. Enfin c'est une
convention vaine et contradictoire de stipuler d'une part une autorité
absolue et de l'autre une obéissance sans bornes. N'est-il pas clair
qu'on n'est engagé à rien envers celui dont on a droit de tout
exiger, et cette seule condition, sans équivalent, sans échange
n'entraîne-t-elle pas la nullité de l'acte? Car quel droit mon
esclave aurait-il contre moi, puisque tout ce qu'il a m'appartient, et que son
droit étant le mien, ce droit de moi contre moi-même est un mot
qui n'a aucun sens?
Grotius et les autres tirent de la guerre une autre origine du
prétendu droit d'esclavage. Le vainqueur ayant, selon eux, le droit de
tuer le vaincu, celui-ci peut racheter sa vie aux dépens de sa
liberté; convention d'autant plus légitime qu'elle tourne au
profit de tous deux.
Mais il est clair que ce prétendu droit de tuer les
vaincus ne résulte en aucune manière de l'état de guerre.
Par cela seul que les hommes vivant dans leur primitive indépendance
n'ont point entre eux de rapport assez constant pour constituer ni
l'état de paix ni l'état de guerre, ils ne sont point
naturellement ennemis. C'est le rapport des choses et non des hommes qui
constitue la guerre, et l'état de guerre ne pouvant naître des
simples relations personnelles, mais seulement des relations réelles,
la
guerre privée ou d'homme à homme ne peut exister,
ni dans l'état de nature où il n'y a point de
propriété constante, ni dans l'état social où tout
est sous l'autorité des lois.
Les combats particuliers, les duels, les rencontres sont des
actes qui ne constituent point un état; et à l'égard des
guerres privées, autorisées par les établissements de
Louis IX roi de France et suspendues par la paix de Dieu, ce sont des abus du
gouvernement féodal, système absurde s'il en fut jamais,
contraire aux principes du droit naturel, et à toute bonne politie.
La guerre n'est donc point une relation d'homme à
homme, mais une relation d'Etat à Etat, dans laquelle les particuliers
ne sont ennemis qu'accidentellement, non point comme hommes ni même comme
citoyens , mais comme soldats; non point comme membres de la patrie, mais comme
ses défenseurs. Enfin chaque Etat ne peut avoir pour ennemis que
d'autres Etats et non pas des hommes, attendu qu'entre choses de diverses
natures on ne peut fixer aucun vrai rapport.
Ce principe est même conforme aux maximes
établies de tous les temps et à la pratique constante de tous les
peuples policés. Les déclarations de guerre sont moins des
avertissements aux puissances qu'à leurs sujets. L'étranger, soit
roi, soit particulier, soit peuple, qui vole, tue ou détient les sujets
sans déclarer la guerre au prince, n'est pas un ennemi, c'est un
brigand. Même en pleine guerre un prince juste s'empare bien en pays
ennemi de tout ce qui appartient au public, mais il respecte la personne et les
biens des particuliers; il respecte des droits sur lesquels sont fondés
les siens. La fin de la guerre étant la destruction de l'Etat ennemi, on
a droit d'en tuer les défenseurs tant qu'ils ont les armes à la
main; mais sitôt qu'ils les posent et se rendent, cessant d'être
ennemis ou instruments de l'ennemi, ils redeviennent simplement hommes et l'on
n'a plus de droit sur leur vie. Quelquefois on peut tuer l'Etat sans tuer un
seul de ses membres: or la guerre ne donne aucun droit qui ne soit
nécessaire à sa fin. Ces principes ne sont pas ceux de Grotius;
ils ne sont pas fondés sur des autorités de poètes, mais
ils dérivent de la nature des choses, et sont fondés sur la
raison.
A l'égard du droit de conquête, il n'a d'autre
fondement que la loi du plus fort. Si la guerre ne donne point au vainqueur le
droit de massacrer les peuples vaincus ce droit qu'il n'a pas ne peut fonder
celui de les asservir. On n'a le droit de tuer l'ennemi que quand on ne peut le
faire esclave; le droit de le faire esclave ne vient donc pas du droit de le
tuer: c'est donc un échange inique de lui faire acheter au prix de sa
liberté sa vie sur laquelle on n'a aucun droit. En établissant le
droit de vie et de mort sur le droit d'esclavage, et le droit d'esclavage sur
le droit de vie et de mort, n'est-il pas clair qu'on tombe dans le cercle
vicieux?
En supposant même ce terrible droit de tout tuer, je dis
qu'un esclave fait à la guerre ou un peuple conquis n'est tenu à
rien du tout envers son maître, qu'à lui obéir autant qu'il
y est forcé. En prenant un équivalent à sa vie le
vainqueur ne lui en a point fait grâce: au lieu de le tuer sans fruit il
l'a tué utilement. Loin donc qu'il ait acquis sur lui nulle
autorité jointe à la force, l'état de guerre subsiste
entre eux comme auparavant, leur relation même en est l'effet, et l'usage
du droit de la guerre ne suppose aucun traité de paix. Ils ont fait une
convention; soit: mais cette convention, loin de détruire l'état
de guerre, en suppose la continuité.
Ainsi, de quelque sens qu'on envisage les choses, le droit
d'esclave est nul, non seulement parce qu'il est illégitime, mais parce
qu'il est absurde et ne signifie rien. Ces mots, esclavage et droit, sont
contradictoires; ils s'excluent mutuellement. Soit d'un homme à un
homme, soit d'un homme à un peuple, ce discours sera toujours
également insensé. Je fais avec toi une convention toute à
ta charge et toute à mon profit, que j'observerai tant qu'il me plaira,
et que tu observeras tant qu'il me plaira.
JEAN-JACQUES ROUSSEAU
DU CONTRAT SOCIAL OU PRINCIPES DU DROIT POLITIQUE
(Edition de 1762, orthographe modernisée)
MEDECINS PAR SPECIALITE ET PAR SECTEUR (EN
%)
Indicateurs
|
Dates et valeurs (en %)
|
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
SECTEUR PUBLIC
|
|
|
|
|
|
Médecine générale
|
57.8
|
47.6
|
47.6
|
48.3
|
53.5
|
Chirurgie
|
5.7
|
7.4
|
0.8
|
7.2
|
5.9
|
Neuropsychiatrie
|
1.8
|
1.9
|
1.8
|
1.8
|
1.7
|
Pédiatrie
|
3.3
|
3.6
|
3.7
|
3.5
|
3.3
|
Ophtalmologie
|
2.1
|
2.5
|
2.5
|
2.3
|
2.1
|
O.R.L
|
1.5
|
1.7
|
1.7
|
1.7
|
1.6
|
Dermato-Vénérologie
|
1.2
|
1.3
|
1.4
|
1.3
|
1.4
|
Cardiologi
|
1 .9
|
2.3
|
2.3
|
2.5
|
2.2
|
Anesthésiologie
|
2.5
|
3.2
|
3.2
|
3.3
|
2.9
|
Electroradiologie
|
1 .9
|
2.5
|
2.5
|
2.6
|
2.2
|
Gynéco-obstétrique
|
4.0
|
4.4
|
4.3
|
4.0
|
4.3
|
Pneumo-phtisiologie
|
2.4
|
2.3
|
2.2
|
2.0
|
2.0
|
Endocrinologie
|
0.7
|
0.7
|
0.8
|
0.8
|
0.9
|
Néphrologie
|
1.0
|
1.1
|
1.2
|
1.2
|
1.2
|
Gastro-entérologie
|
1.5
|
1.7
|
1.8
|
1.7
|
1.8
|
Biologie
|
1.6
|
1.8
|
1.9
|
1.9
|
1.6
|
Autres spécialités
|
9.2
|
13.9
|
14.3
|
14.0
|
11.5
|
Total
|
100
|
100
|
100
|
100
|
100
|
|
|
|
.
|
|
|
SECTEUR PRIVE
|
|
|
|
|
|
Médecine générale
|
50.8
|
49.2
|
48.8
|
47,9
|
50,4
|
Chirurgie
|
6.4
|
6.6
|
6.6
|
6,7
|
6,3
|
Neuropsychiatrie
|
1.1
|
1.2
|
1.1
|
1,3
|
1,2
|
O.R.L
|
2.6
|
2.7
|
2.7
|
2,8
|
2,6
|
Pédiatrie
|
4.6
|
4.5
|
4.5
|
4,6
|
4,4
|
Ophtalmologie
|
3.8
|
3.8
|
3.9
|
4,1
|
3,9
|
Dermatologie
|
2.1
|
2.1
|
2.1
|
2,2
|
2,1
|
Cardiologie
|
3.1
|
3.3
|
3.3
|
3,2
|
3,0
|
Electroradiologie
|
3.0
|
2.9
|
2.9
|
2,8
|
2,6
|
Gynéco-obstétrique
|
6.2
|
6.5
|
6.5
|
6,4
|
6,1
|
Pneumo-phtisiologie
|
1.8
|
1.8
|
1.8
|
2,0
|
1,9
|
Gastro-entérologie
|
2.8
|
2.9
|
2.8
|
2,7
|
2,6
|
Anesthésie
|
1.9
|
2.2
|
2.2
|
2,2
|
2,2
|
Autres spécialités
|
9.8
|
10.4
|
10.7
|
11,7
|
10,8
|
Total
|
100
|
100
|
100
|
100
|
100
|
Source : Ministère de la Santé.
ENSEIGNEMENT PRIMAIRE
Indicateurs
|
Dates et valeurs
|
02-03
|
03-04
|
04-05
|
05-06
|
06-07
|
Effectif scolarisé (en milliers)
|
4.101
|
4.070
|
4.023
|
3.944
|
3.928
|
. % de filles
|
46,4
|
46,5
|
46,4
|
46,3
|
46,5
|
. % du milieu rural
|
48,8
|
48,8
|
48,5
|
48,5
|
48,6
|
. % du secteur privé
|
5,3
|
5,5
|
6,6
|
7,3
|
8,1
|
Effectif des nouveaux inscrits en première année
(en milliers)
|
592
|
573
|
571
|
554
|
606
|
. % de filles
|
48,1
|
48,2
|
48,2
|
48,4
|
48,6
|
. % des inscrits en milieu rural
|
57,2
|
56,6
|
57,6
|
57,9
|
56,6
|
- Taux de redoublement (en %)
|
|
|
|
|
|
. Ensemble
|
14,4
|
13,9
|
13,5
|
13,5
|
12,8
|
. Filles
|
12,1
|
11,6
|
11,1
|
11,0
|
10,5
|
. Garçons
|
16,4
|
16,0
|
15,7
|
15,6
|
14,8
|
Personnel enseignant
|
145.553
|
147.730
|
148.438
|
146.296
|
...
|
. % de femmes
|
43,6
|
45,0
|
46,1
|
47,0
|
...
|
Taux d'encadrement
|
28
|
28
|
27
|
27
|
...
|
Rapport élèves / classe
|
29
|
29
|
28
|
28
|
28
|
Taux de passage au collégial (en %)
|
75,4
|
72,4
|
75,9
|
76,9
|
83,9
|
Source : Ministère de l'Education Nationale.
7. BIBLIOGRAPHIE
+ Thomas Hobbes « Léviathan » 1651
OXFORD UNIVERSITY PRESS
+ Emile Durkheim. « De la division du travail
social » 1893 PRESSES
UNIVERSITAIRES DE FRANCE PUF.
+ Karl MARX et Friedrich ENGELS « Le Manifeste
communiste » 1848
+ Jean-Jacques ROUSSEAU « du contrat social ou
principes du droit politiques » 1762. + « Economie
politique- Le capitalisme » EDITION DU PROGRES- MOUSCOU 1977 + «
Economie politique- Le socialisme » EDITION DU PROGRES- MOUSCOU
1977 + Ahmed TRACHEN « développement et dynamique de
l'inégalité » ECONOMICA
1985
+ Charles MAURRAS « Préface intitulée La
politique naturelle du livre « Mes idées politiques
»1937
+ Jean-Claude BOYER, « les banlieues en France,
Territoires et Sociétés » ARMAND COLIN 2000
+ Friedrich ENGELS « La question du logement »
1873
+ Olivier MASCLET « du « bastion » au «
ghetto », le communisme municipale en butte à l'immigration
» SEUIL 1975.
+ Zakya DAOUD « les années lamalif »
TARIK EDITIONS-SENSO UNICO 2007
+ Marc MONTOUSSE, André LOUAT, Gilles RENOUARD «
analyse économiques et histoire des sociétés
contemporaines » BREAL 1996.
+ « La société actuelle » BENRARD
LAFONT-GRAMMONT 1976
+ Jamil SALMI « Planification sans développement,
Evaluation de l'expérience
marocaine de planification 1960-1979 » LES EDITIONS
MAGHREBINES 1979
+ François COCHET, Gérard HENRY, Michel VOISIN
« Histoire et économie des
sociétés contemporaines. Tome 2 expansions,
ruptures et développement » BREAL
1992.
Rapports
+ Les indicateurs sociaux du Maroc 2006- HAUT
COMISSARIAT AU PLAN
+ ROYAUME DU MAROC Rapport sur la pauvreté :
Comprendre les dimensions géographiques de la pauvreté pour en
améliorer l'appréhension à travers les politiques
publiques- BANQUE MONDIALE 2005
+ UNE NOUVELLE POLITIQUE POUR LES BANLIIEUES- PRESIDENCE
DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE 2008
+ Rapport sur le plan de cohésion sociale-
CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIALE 2005
+ Le descendeur sociale, enquête sur les milieux
populaires- PHILIPPE GUIBERT, ALAIN MERGIER 2007
+ Le livre vert : vers un revenu de solidarité active-
HAUT COMISSARIAT AUX SOLIDARITES ACTIVES. 2008
+ Rapport mondial sur le développement humain 2007/2008 -
PNUD
+ Ministère des Finances, rapport économique et
financier du projet de loi des finances 2001
+ IURS, Bulletin économique et Social. rapport du social
2000.
+ Esp Associatf, situation du développement social au
Maroc 2001.
Revues et périodiques
+ SCIENCES HUMAINES, N°93- AVRIL 1999
+ SCIENCES HUMAINES, N° 76- OCTOBRE 1997 + SCIENCES
HUMAINES, N°121- Novembre 2001 + SCIENCES HUMAINES, N°111-
Décembre 2000
+ PROBLEMES ECONOMIQUES, N° 2844- 18 février 2004 +
LE MONDE DE L'EDUCATION- AVRIL 2008
|